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PROPOSITION DE RÉSOLUTION
visant à améliorer le bien-être et la santé mentale des détenus en prison
déposée par
Mmes Salvi, Kapompole, Leal Lopez et M. Onkelinx
822 (2016-2017) — N° 1	 822 (2016-2017) — N° 1
PARLEMENT WALLON
SESSION 2016-2017
31 MAI 2017
4e
session de la 10e
législature	 site internet : www.parlement-wallonie.be
	 courriel : courriel@parlement-wallonie.be
2
RÉSUMÉ
En suite du rapport parlementaire relatif à l’accompagnement des personnes détenues
dans le milieu carcéral de Wallonie, en matière de santé et de promotion de la santé, la
présente proposition de résolution formule des recommandations pragmatiques au Gou-
vernement wallon, et au Gouvernement fédéral, en vue d’améliorer la Santé et la Promo-
tion de la santé des détenus en prison, dans la limite des disponibilités budgétaires. En
effet, le premier constat posé par le rapport est que les secteurs de la Santé et de la Pro-
motion de la Santé sont en proie à de grandes carences dans notre système carcéral. Tant
le personnel médical que les ASBL qui y travaillent tirent la sonnette d’alarme : manque
de moyens, manque de coordination, manque de temps. Manque aussi d’intérêts des pou-
voirs publics pour le détenu et sa santé.
3
Ala demande du Gouvernement wallon et du Ministre
des Travaux publics, de la Santé, de l’Action sociale et
du patrimoine, Maxime Prévot, la députée Véronique
Salvi a été chargée de rédiger un rapport parlementaire
relatif à l’accompagnement des personnes détenues
dans le milieu carcéral de Wallonie, en matière de santé
et de promotion de la santé.
La méthode de travail appliquée s’est articulée en
trois phases : la rencontre des acteurs de terrain, la visite
des établissements pénitentiaires francophones, et enfin
la rédaction du rapport.
La rédaction de ce rapport n’aurait pas pu se faire
sans vivre la situation de l’intérieur, sans rencontrer les
directions, les services médicaux, les infirmiers(ères),
les médecins, mais aussi les personnes détenues et les
assistant(e)s de surveillance pénitentiaire, et quand cela
était possible les commissions de surveillance des éta-
blissements pénitentiaires.
Les prisons suivantes ont été visitées par l’auteure
dans le courant de l’année 2016 : Andenne, Jamioulx,
Lantin, Leuze-en-Hainaut, Marche-en-Famenne, Namur
et Tournai. Une visite à la prison de Champ-Dollon, à
Genève en Suisse, a également permis à l’auteure d’ou-
vrir les yeux sur un système carcéral et médical bien
différent du nôtre.
Le rapport parlementaire, remis officiellement au
Ministre compétent le 9 novembre 2016, et présenté
par son auteure en Commission des travaux publics, de
l’action sociale et de la santé du Parlement wallon le 21
mars 2017, met en évidence les réalités du monde carcé-
ral dans sa globalité (questions de surpopulation, d’hy-
giène, de formation, d’alimentation, d’effectifs, etc.),
pour ensuite formuler des recommandations en matière
de santé et de promotion de la santé en milieu carcéral.
Cette plongée au cœur de notre système carcéral a
d’abord mis en évidence une question fondamentale :
Que souhaite la société comme système carcéral? Un
système d’enfermement qui se veut une parenthèse dans
la vie d’un homme, ou un système qui travaille tout
au long de l’enfermement à une réinsertion possible, à
une prise de conscience, à un accompagnement vers la
sortie, où l’aspect de l’éducation d’une population pré-
carisée pourrait faire partie du quotidien ?
Pour rappel, en son article 23, 2°, la Constitution
belge dispose que « chacun a le droit à la santé sociale,
à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale
et juridique ». La Constitution ne fait donc pas de diffé-
rence entre un détenu et un homme libre.
Dans ce contexte, la loi relative aux droits du patient
du 22 août 2002 détermine les droits dont le patient jouit
face aux praticiens. Parmi ceux-ci, on retrouve le droit
d’être informé sur son état de santé ; le droit de choisir
librement le praticien professionnel ; le droit de consen-
tir librement et de manière éclairée à la prestation de
soins proposée ; le droit de disposer d’un dossier patient
tenu à jour, de le consulter et d’en obtenir une copie ;
le droit à la protection de la vie privée et au respect de
l’intimité ; le droit d’introduire une plainte auprès du
service de médiation « Droits du patient ».
Les prestataires de soins rencontrés en prison sont
évidemment conscients de ces droits, et ils s’efforcent
de les faire appliquer. Les détenus ont en effet tout à fait
le droit de refuser un traitement, une intervention ou un
examen proposé par le médecin.
Cependant l’application de ces droits interpelle aussi
certains médecins, tant il est parfois long et difficile
d’obtenir un rendez-vous dans les Centres Médico-
Chirurgicaux (CMC) par exemple. Le droit du détenu
à avoir recours au service de médiation fédéral du SPF
Santé publique est également une obligation, mais ce
n’est objectivement pas le cas dans la pratique…
Par ailleurs, la loi de principes du 12 janvier 2005,
concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le
statut juridique des détenus – ou « Loi Dupont » – défi-
nit le cadre dans lequel doit se dérouler la privation de
liberté. De manière substantielle, les principes relatifs
aux soins de santé s’inscrivent dans la droite ligne des
principes édictés ci-dessus :
– droits à des soins de santé équivalents à ceux prodigués
dans la société libre;
– droits à des soins équivalents à ceux prodigués avant
l’incarcération, ce qui met en évidence la continuité des
soins (ex.: le cas de prise de méthadone);
– droits à des prestataires de soins, des médecins qui dis-
posent évidemment des qualités requises, indépendants
et qui agissent en fonction de critères médicaux et non
de sécurité;
– droits à l’application de la loi relative aux droits du
patient, à l’exception du libre choix limité du médecin
traitant, du choix limité concernant l’assistance par une
personne de confiance, du droit de consulter son dossier
mais pas d’en recevoir une copie en mains propres.
A la lumière de ce qui précède, le premier constat
posé par le rapport est que les secteurs de la Santé et
de la Promotion de la Santé sont en proie à de grandes
carences dans notre système carcéral. Tant le personnel
médical que les ASBL qui y travaillent tirent la sonnette
d’alarme : manque de moyens, manque de coordination,
manque de temps. Manque aussi d’intérêts des pouvoirs
publics pour le détenu et sa santé…
Il est évident que les prisons wallonnes ne vont pas
bien. Et les grèves des agents de surveillance vécues
tout au long des mois d’avril et de mai 2016 font écho à
ces observations.
Il est difficile d’isoler l’aspect de la santé du système
carcéral global. Le monde carcéral est un monde unique
avec ses codes, ses rythmes et ses règles propres. Tous
les aspects sont constamment en interdépendance.
La population des détenus présents dans les prisons
belges augmente chaque année. En 2015, on comptait
une population moyenne de 11 040,7 détenus pour une
3
DÉVELOPPEMENT
capacité moyenne de 10 028 places disponibles. On y
trouvait 10 557 hommes et 483 femmes. Les détenus
étaient répartis comme suit: 3 499 prévenus, 6 455
condamnés en exécution de peine et 903 internés (sur
base d’une juridiction pénale ou condamné interné sur
base d’une décision ministérielle en raison de leur état
mental). Le public détenu est masculin à 96%. En 2015,
en moyenne, 55% des détenus étaient de nationalité
belge. 81,3% des personnes incarcérées sont âgées entre
18 et 39 ans 13.
Par ailleurs, les détenus appartiennent souvent aux
franges les plus paupérisées de la population. Au sein
des prisons, la population est profondément infrascolari-
sée (30% sans aucun diplôme, 45% ont au maximum le
certificat d’études de base et 20% le certificat d’études
secondaires inférieures). Il y aurait aussi un taux d’anal-
phabétisme proche des 11%.
Autre chiffre important à rappeler, le nombre de
décès : En 2015, en Wallonie, 14 détenus sont décédés
en détention, en établissement pénitentiaire ou dans un
hôpital dans lequel ils avaient été transférés. Sur ces
décès, on dénombre sept suicides ; le secret médical
empêche d’identifier les autres cas. En Belgique, le taux
de suicide serait ainsi six fois supérieur au taux à l’exté-
rieur de la prison.
Face à ces divers chiffres, les travailleurs sociaux ren-
contrés en prison estiment qu’une instruction limitée de
cette population surreprésentée en prison, associée à la
pauvreté du réseau social, au stress prolongé, au recours
fréquent aux substances psychotropes comme l’alcool,
le tabac ou la drogue, au tabagisme et à une alimenta-
tion de piètre qualité, génèrent des inégalités de santé
significatives.
En 2015, les frais de soins de santé de ces personnes
détenues, en ce compris les personnes internées (soins,
expertises médicales et psychologiques) s’élevaient à
35 423 826,90 euros soit seulement 6,16 % du budget
global des prisons. En sachant qu’un détenu coûte
aujourd’hui en moyenne 49 048 euros/an, les coûts rela-
tifs à ses soins de santé s’élèvent à 3 023,20 euros/an.
Un élément important à retenir aussi est celui du
budget minimaliste de 3,58 euros/jour/détenu en matière
d’alimentation, qu’il faut mettre en perspective avec le
manque évident de professionnels en relation avec la
santé (diététicien, nutritionniste, …) attachés à la prison,
et avec le choix de menus peu adapté à la vie sédentaire
des détenus…
On le voit, à l’heure actuelle, les orientations poli-
tiques portent sur une rationalisation budgétaire impor-
tante, alors que les constats sont pourtant accablants
(surpopulation, manque de personnel, formation non
adaptée des agents, manque d’hygiène, carence du per-
sonnel médical) et les difficultés nombreuses (difficulté
de recruter de nouveaux médecins, les anciens qui vont
d’une prison à l’autre, le manque de psychologue pour
les détenus, la surmédicalisation des détenus, etc.).
Et le monde associatif présent en prison, principal vec-
teur de l’aspect préventif, souffre lui aussi d’un manque
de moyens, alors qu’il réalise beaucoup avec parfois peu
d’argent et peu de reconnaissance du monde extérieur.
Et pourtant, là aussi, les projets pilotes sont probants et
porteurs de résultats.
Le monde carcéral mérite par conséquent une plus
grande valorisation, car si les problèmes sont nombreux
dans le milieu carcéral, il n’en demeure pas moins que
le personnel médical y exerce un travail remarquable !
S’inspirant d’un modèle découvert en Suisse, au
Champ-Dollon, où l’équipe médicale est totalement
indépendante de la direction pénitentiaire, le rapport
plaide pour une dissociation entre les aspects sécuri-
taires et sanitaires. Si les aspects sécuritaires ne peuvent
être négligés, les détenus sont des êtres humains, ils ont
dès lors droit à un suivi médical adéquat. Cela augmen-
tera sans aucun doute la qualité de vie des détenus et
du personnel des prisons, mais cela favorisera aussi leur
future réinsertion dans la société, à leur sortie de prison.
La santé et sa promotion ne peuvent plus demeurer le
parent pauvre du milieu carcéral !
Ce rapport parlementaire ne doit dès lors pas rester
en l’état. Il doit susciter la réflexion et amorcer des
changements, tant au niveau de la Commission intermi-
nistérielle qu’au niveau des visions politiques actuelles
des Ministres fédéral de la Justice et wallon de l’Action
sociale et de la Santé.
Pour rappel, légalement, le SPF Justice est compétent
pour la prise en charge de la santé des détenus. Cette
prise en charge est financée via une enveloppe forfaitaire
de l’INAMI. Le SPF Justice complète cette enveloppe.
Pour améliorer la prise en charge, il est prévu depuis
des années de transférer cette compétence au SPF Santé
publique. Une étude du KCE est en cours pour examiner
les possibilités de financement en cas de transfert.
En pratique, dans le cadre d’un futur projet pilote
Drogues et prison, le cabinet de la Ministre fédérale de
la Santé considère comme évidente la compétence du
Fédéral en matière de prise en charge médicale (impli-
quant médecins et infirmiers).
La Fédération Wallonie-Bruxelles est compétente
pour l’aide psychosociale aux détenus. Cette aide ne
comprend cependant pas la prise en charge des per-
sonnes avec un problème d’assuétudes.
Quant à la Région wallonne, elle est compétente pour
assurer le suivi des soins psychosociaux lors de la sortie
de prison du détenu. Elle n’a pas de compétence expli-
cite en matière de prise en charge de la santé des détenus
dans la prison, mais elle a néanmoins des compétences
générales en promotion de la santé, prévention, réduc-
tion des risques, ainsi qu’en matière de prise en charge
des problèmes de santé mentale et assuétudes via des
institutions de soins non hospitalières.
Nonobstant le transfert de compétences dans le cadre
de la 6ème réforme de l’État, il s’avère qu’une meilleure
coordination entre le niveau fédéral et les entités fédé-
rées doit être réalisée, notamment afin de mieux tenir
compte des contraintes actuelles et des spécificités wal-
lonnes.
4
En conséquence de quoi, 27 recommandations prag-
matiques au Gouvernement wallon, et au Gouvernement
fédéral, ont été formulées en vue d’améliorer la Santé et
la Promotion de la santé des détenus en prison, dans la
limite des disponibilités budgétaires.
Pour l’auteure du rapport, il est en effet primordial
d’enfin changer les cadres de références et la vision de la
prison, afin d’évoluer vers des perspectives plus justes.
La Belgique est un pays démocratique, où l’humanisme
doit rester au centre de nos valeurs. Tant les détenus
que le personnel qui les accompagne ont des droits. Le
premier de ceux-ci est de vivre et de travailler dans la
dignité…
5
66
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
visant à améliorer le bien-être et la santé mentale des détenus en prison
Le Parlement de Wallonie,
A.	 Vu l’article 23 de la Constitution belge;
B.	Vu la loi de principes du 12 janvier 2005 concernant
l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juri-
dique des détenus;
C.	Vu la loi du 22 août 2002 relative aux droits du
patient;
D.	Vu l’accord de coopération du 23 janvier 2009 entre
la Communauté française, la Région wallonne et
la Commission communautaire française visant la
coordination des politiques d’intervention en lien
avec le milieu carcéral;
E.	Vu l’accord de coopération du 23 mai 2014 entre
l’État fédéral, la Communauté française et la Région
wallonne en vue de créer une politique carcérale
cohérente dans le respect des compétences des enti-
tés fédérées et de l’autorité fédérale;
F.	Vu le Code wallon de l’Action sociale et de la Santé;
G.	Considérant le rapport parlementaire relatif à la pro-
motion de la santé des personnes détenues en milieu
carcéral, déposé par Mme Salvi et publié en octobre
2016;
H.	Considérant que, statistiquement, l’état de santé des
détenus est méconnu faute de données épidémiolo-
giques quantitatives et qualitatives en Belgique;
I.	Considérant que les personnes détenues sont fra-
giles, mentalement et physiquement, et que leurs
besoins en matière de soins de santé sont impor-
tants;
J.	Considérant la gravité actuelle de la situation sani-
taire des détenus;
K.	Considérant qu’en prison, les troubles en santé men-
tale sont importants suite à la déresponsabilisation,
la perte d’autonomie, l’éloignement familial, la pro-
miscuité des lieux et les conditions de détention dif-
ficiles;
L.	Considérant qu’il ne faut pas nier la présence de dro-
gues en prison, ni nier les problèmes d’assuétudes
liées à certaines substances fréquemment consom-
mées telles que l’alcool, le cannabis, l’héroïne, la
cocaïne, le LSD et des médicaments non prescrits,
dont la méthadone prise sans surveillance médicale;
M.	Considérant que les soins de santé en prison sont
nettement insuffisants et que les détenus ne sont
pas suffisamment pris en charge en matière de santé
mentale (hors cas psychiatrique) et pour les pro-
blèmes liés à la consommation de substances psy-
choactives;
N.	Considérant que la promotion de la santé, la préven-
tion et la réduction des risques sont tout à fait insuf-
fisants en prison;
O.	Considérant le rôle fondamental des Communau-
tés et maintenant de la Région wallonne en matière
de sensibilisation, de soutien et de formation tant
au niveau des prestataires de soins que des inter-
médiaires, et donc du monde associatif présent en
prison;
1. Demande au Gouvernement wallon,
	 – de légitimer l’expertise et de soutenir la présence
des associations de promotion de la santé ainsi
que la collaboration d’associations spécialisées
en santé mentale et assuétudes qui développent
des projets dans les prisons;
	 – de contribuer à ce que chaque détenu en Wallonie
ait la possibilité d’optimaliser ses connaissances
afin de prendre soin de sa propre santé en ayant
une information claire sur les risques encourus en
matière de transmission de maladies et IST ainsi
que les gestes de base en matière d’hygiène et
de soin primaire que ce soit pour lui ou pour son
environnement (communication par différents
supports, passage en cellule…);
	 – sous l’angle de la prévention, d’encourager les
détenus à accepter les dépistages proposés par les
services médicaux via les associations de préven-
tion et de promotion de la santé qui développent
des projets avec les détenus;
	 – de soutenir et développer l’accès des associations
proposant un accompagnement en santé mentale
dans toutes les prisons;
	 – de favoriser l’accès et de renforcer les actions de
prévention (au sens large) des associations spé-
cialisées en assuétudes (information aux détenus,
diversité des supports d’information, projets par-
ticipatifs en matière d’information, renforcement
de la sensibilisation des professionnels) dans une
démarche de santé publique et de réduction des
risques;
	 – dans le cadre de la promotion de la santé, de per-
mettre des contacts avec des professionnels de la
santé spécialisés en nutrition et avec les profes-
sionnels qui en sont responsables au sein des pri-
sons;
	 – de porter les demandes de cette résolution au sein
de la prochaine Conférence interministérielle
consacrée à la santé en milieu carcéral;
2. Demande par ailleurs au Gouvernement wallon de
sensibiliser le Gouvernement fédéral à la nécessité :
	 – de faire appliquer la loi de principes du 12 janvier
2005 concernant l’administration pénitentiaire
ainsi que le statut juridique des détenus en prenant
un arrêté d’exécution en la matière;
	 –d’établir un état des lieux de la santé des personnes
détenues au départ du SPF Justice en faisant en
sorte que les chiffres se retrouvent dans les rap-
ports officiels;
	 – d’utiliser les moyens budgétaires dédiés aux
extractions soit à l’engagement de personnel
médical de garde sur place, soit à du personnel
rappelable, comme par le passé;
	 – de créer un questionnaire d’anamnèse homogène
à toutes les prisons et le rendre plus complet sur
base du bilan infirmier d’entrée en détention de la
prison de Champ-Dollon;
	 – de renforcer le dépistage systématique des mala-
dies transmissibles et dès l’entrée en prison, de
proposer le dépistage du VIH et des IST;
	 – de doter chaque prison d’une unité de radiologie
afin d’effectuer un dépistage de qualité de la tuber-
culose;
	 – de permettre une présence de plus longue durée
d’un médecin dans chaque établissement;
	 – de faire respecter la loi en matière de distributions
des médicaments ; celles-ci doivent être effectuées
par le seul personnel habilité (infirmier ou médi-
cal);
	 – de permettre aux agents pénitentiaires travaillant
en annexes psychiatriques ou dans les établisse-
ments de défense sociale de bénéficier d’une for-
mation adéquate et spécialisée;
	 – de faire respecter et d’informer les détenus et pra-
ticiens sur la loi relative aux droits du patient dans
le milieu carcéral et notamment de rendre effec-
tive la possibilité de déposer plainte au niveau du
service de médiation « Droits du patient »;
	 –de créer, à côté du personnel médical, un poste
de référent « promotion santé » (distribution de
préservatifs, aides ou conseils pour développer
l’exercice physique et une alimentation équili-
brée, conseils, informations, le tout en collabora-
tion étroite avec la direction et le personnel de la
prison) et « santé mentale - assuétudes » (stratégie
pour augmenter le bien-être, écoute bienveillante
quel que soit l’individu, renvoi vers le médecin ou
les autres services) dans chaque établissement;
	 – de permettre à chaque équipe médicale de colla-
borer activement avec les associations de santé
afin d’assurer un meilleur suivi des dossiers, en y
associant les associations de promotion de la santé
ou le référent « en Promotion Santé et en Santé
mentale - assuétudes »;
	 – de donner une légitimité au référent « promotion
santé et santé mentale - assuétudes » ou à des
experts thématiques qu’il recommanderait pour
former, informer et conseiller personnel et direc-
tion afin d’améliorer globalement la santé des
détenus;
	 – de soutenir au moyen de subsides plus important
des collaborations entre le personnel médical des
prisons et les associations extérieures, afin qu’ils
puissent travailler de façon plus proactive aux pro-
blématiques de promotion de la santé pour facili-
ter le travail du personnel médical dans son aspect
prévention.
V. Salvi
J. Kapompole
C. Leal Lopez
A. Onkelinx
7

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Pw - Santé mentale des détenus en prison - juin 2017

  • 1. PROPOSITION DE RÉSOLUTION visant à améliorer le bien-être et la santé mentale des détenus en prison déposée par Mmes Salvi, Kapompole, Leal Lopez et M. Onkelinx 822 (2016-2017) — N° 1 822 (2016-2017) — N° 1 PARLEMENT WALLON SESSION 2016-2017 31 MAI 2017 4e session de la 10e législature site internet : www.parlement-wallonie.be courriel : courriel@parlement-wallonie.be
  • 2. 2 RÉSUMÉ En suite du rapport parlementaire relatif à l’accompagnement des personnes détenues dans le milieu carcéral de Wallonie, en matière de santé et de promotion de la santé, la présente proposition de résolution formule des recommandations pragmatiques au Gou- vernement wallon, et au Gouvernement fédéral, en vue d’améliorer la Santé et la Promo- tion de la santé des détenus en prison, dans la limite des disponibilités budgétaires. En effet, le premier constat posé par le rapport est que les secteurs de la Santé et de la Pro- motion de la Santé sont en proie à de grandes carences dans notre système carcéral. Tant le personnel médical que les ASBL qui y travaillent tirent la sonnette d’alarme : manque de moyens, manque de coordination, manque de temps. Manque aussi d’intérêts des pou- voirs publics pour le détenu et sa santé.
  • 3. 3 Ala demande du Gouvernement wallon et du Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l’Action sociale et du patrimoine, Maxime Prévot, la députée Véronique Salvi a été chargée de rédiger un rapport parlementaire relatif à l’accompagnement des personnes détenues dans le milieu carcéral de Wallonie, en matière de santé et de promotion de la santé. La méthode de travail appliquée s’est articulée en trois phases : la rencontre des acteurs de terrain, la visite des établissements pénitentiaires francophones, et enfin la rédaction du rapport. La rédaction de ce rapport n’aurait pas pu se faire sans vivre la situation de l’intérieur, sans rencontrer les directions, les services médicaux, les infirmiers(ères), les médecins, mais aussi les personnes détenues et les assistant(e)s de surveillance pénitentiaire, et quand cela était possible les commissions de surveillance des éta- blissements pénitentiaires. Les prisons suivantes ont été visitées par l’auteure dans le courant de l’année 2016 : Andenne, Jamioulx, Lantin, Leuze-en-Hainaut, Marche-en-Famenne, Namur et Tournai. Une visite à la prison de Champ-Dollon, à Genève en Suisse, a également permis à l’auteure d’ou- vrir les yeux sur un système carcéral et médical bien différent du nôtre. Le rapport parlementaire, remis officiellement au Ministre compétent le 9 novembre 2016, et présenté par son auteure en Commission des travaux publics, de l’action sociale et de la santé du Parlement wallon le 21 mars 2017, met en évidence les réalités du monde carcé- ral dans sa globalité (questions de surpopulation, d’hy- giène, de formation, d’alimentation, d’effectifs, etc.), pour ensuite formuler des recommandations en matière de santé et de promotion de la santé en milieu carcéral. Cette plongée au cœur de notre système carcéral a d’abord mis en évidence une question fondamentale : Que souhaite la société comme système carcéral? Un système d’enfermement qui se veut une parenthèse dans la vie d’un homme, ou un système qui travaille tout au long de l’enfermement à une réinsertion possible, à une prise de conscience, à un accompagnement vers la sortie, où l’aspect de l’éducation d’une population pré- carisée pourrait faire partie du quotidien ? Pour rappel, en son article 23, 2°, la Constitution belge dispose que « chacun a le droit à la santé sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale et juridique ». La Constitution ne fait donc pas de diffé- rence entre un détenu et un homme libre. Dans ce contexte, la loi relative aux droits du patient du 22 août 2002 détermine les droits dont le patient jouit face aux praticiens. Parmi ceux-ci, on retrouve le droit d’être informé sur son état de santé ; le droit de choisir librement le praticien professionnel ; le droit de consen- tir librement et de manière éclairée à la prestation de soins proposée ; le droit de disposer d’un dossier patient tenu à jour, de le consulter et d’en obtenir une copie ; le droit à la protection de la vie privée et au respect de l’intimité ; le droit d’introduire une plainte auprès du service de médiation « Droits du patient ». Les prestataires de soins rencontrés en prison sont évidemment conscients de ces droits, et ils s’efforcent de les faire appliquer. Les détenus ont en effet tout à fait le droit de refuser un traitement, une intervention ou un examen proposé par le médecin. Cependant l’application de ces droits interpelle aussi certains médecins, tant il est parfois long et difficile d’obtenir un rendez-vous dans les Centres Médico- Chirurgicaux (CMC) par exemple. Le droit du détenu à avoir recours au service de médiation fédéral du SPF Santé publique est également une obligation, mais ce n’est objectivement pas le cas dans la pratique… Par ailleurs, la loi de principes du 12 janvier 2005, concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus – ou « Loi Dupont » – défi- nit le cadre dans lequel doit se dérouler la privation de liberté. De manière substantielle, les principes relatifs aux soins de santé s’inscrivent dans la droite ligne des principes édictés ci-dessus : – droits à des soins de santé équivalents à ceux prodigués dans la société libre; – droits à des soins équivalents à ceux prodigués avant l’incarcération, ce qui met en évidence la continuité des soins (ex.: le cas de prise de méthadone); – droits à des prestataires de soins, des médecins qui dis- posent évidemment des qualités requises, indépendants et qui agissent en fonction de critères médicaux et non de sécurité; – droits à l’application de la loi relative aux droits du patient, à l’exception du libre choix limité du médecin traitant, du choix limité concernant l’assistance par une personne de confiance, du droit de consulter son dossier mais pas d’en recevoir une copie en mains propres. A la lumière de ce qui précède, le premier constat posé par le rapport est que les secteurs de la Santé et de la Promotion de la Santé sont en proie à de grandes carences dans notre système carcéral. Tant le personnel médical que les ASBL qui y travaillent tirent la sonnette d’alarme : manque de moyens, manque de coordination, manque de temps. Manque aussi d’intérêts des pouvoirs publics pour le détenu et sa santé… Il est évident que les prisons wallonnes ne vont pas bien. Et les grèves des agents de surveillance vécues tout au long des mois d’avril et de mai 2016 font écho à ces observations. Il est difficile d’isoler l’aspect de la santé du système carcéral global. Le monde carcéral est un monde unique avec ses codes, ses rythmes et ses règles propres. Tous les aspects sont constamment en interdépendance. La population des détenus présents dans les prisons belges augmente chaque année. En 2015, on comptait une population moyenne de 11 040,7 détenus pour une 3 DÉVELOPPEMENT
  • 4. capacité moyenne de 10 028 places disponibles. On y trouvait 10 557 hommes et 483 femmes. Les détenus étaient répartis comme suit: 3 499 prévenus, 6 455 condamnés en exécution de peine et 903 internés (sur base d’une juridiction pénale ou condamné interné sur base d’une décision ministérielle en raison de leur état mental). Le public détenu est masculin à 96%. En 2015, en moyenne, 55% des détenus étaient de nationalité belge. 81,3% des personnes incarcérées sont âgées entre 18 et 39 ans 13. Par ailleurs, les détenus appartiennent souvent aux franges les plus paupérisées de la population. Au sein des prisons, la population est profondément infrascolari- sée (30% sans aucun diplôme, 45% ont au maximum le certificat d’études de base et 20% le certificat d’études secondaires inférieures). Il y aurait aussi un taux d’anal- phabétisme proche des 11%. Autre chiffre important à rappeler, le nombre de décès : En 2015, en Wallonie, 14 détenus sont décédés en détention, en établissement pénitentiaire ou dans un hôpital dans lequel ils avaient été transférés. Sur ces décès, on dénombre sept suicides ; le secret médical empêche d’identifier les autres cas. En Belgique, le taux de suicide serait ainsi six fois supérieur au taux à l’exté- rieur de la prison. Face à ces divers chiffres, les travailleurs sociaux ren- contrés en prison estiment qu’une instruction limitée de cette population surreprésentée en prison, associée à la pauvreté du réseau social, au stress prolongé, au recours fréquent aux substances psychotropes comme l’alcool, le tabac ou la drogue, au tabagisme et à une alimenta- tion de piètre qualité, génèrent des inégalités de santé significatives. En 2015, les frais de soins de santé de ces personnes détenues, en ce compris les personnes internées (soins, expertises médicales et psychologiques) s’élevaient à 35 423 826,90 euros soit seulement 6,16 % du budget global des prisons. En sachant qu’un détenu coûte aujourd’hui en moyenne 49 048 euros/an, les coûts rela- tifs à ses soins de santé s’élèvent à 3 023,20 euros/an. Un élément important à retenir aussi est celui du budget minimaliste de 3,58 euros/jour/détenu en matière d’alimentation, qu’il faut mettre en perspective avec le manque évident de professionnels en relation avec la santé (diététicien, nutritionniste, …) attachés à la prison, et avec le choix de menus peu adapté à la vie sédentaire des détenus… On le voit, à l’heure actuelle, les orientations poli- tiques portent sur une rationalisation budgétaire impor- tante, alors que les constats sont pourtant accablants (surpopulation, manque de personnel, formation non adaptée des agents, manque d’hygiène, carence du per- sonnel médical) et les difficultés nombreuses (difficulté de recruter de nouveaux médecins, les anciens qui vont d’une prison à l’autre, le manque de psychologue pour les détenus, la surmédicalisation des détenus, etc.). Et le monde associatif présent en prison, principal vec- teur de l’aspect préventif, souffre lui aussi d’un manque de moyens, alors qu’il réalise beaucoup avec parfois peu d’argent et peu de reconnaissance du monde extérieur. Et pourtant, là aussi, les projets pilotes sont probants et porteurs de résultats. Le monde carcéral mérite par conséquent une plus grande valorisation, car si les problèmes sont nombreux dans le milieu carcéral, il n’en demeure pas moins que le personnel médical y exerce un travail remarquable ! S’inspirant d’un modèle découvert en Suisse, au Champ-Dollon, où l’équipe médicale est totalement indépendante de la direction pénitentiaire, le rapport plaide pour une dissociation entre les aspects sécuri- taires et sanitaires. Si les aspects sécuritaires ne peuvent être négligés, les détenus sont des êtres humains, ils ont dès lors droit à un suivi médical adéquat. Cela augmen- tera sans aucun doute la qualité de vie des détenus et du personnel des prisons, mais cela favorisera aussi leur future réinsertion dans la société, à leur sortie de prison. La santé et sa promotion ne peuvent plus demeurer le parent pauvre du milieu carcéral ! Ce rapport parlementaire ne doit dès lors pas rester en l’état. Il doit susciter la réflexion et amorcer des changements, tant au niveau de la Commission intermi- nistérielle qu’au niveau des visions politiques actuelles des Ministres fédéral de la Justice et wallon de l’Action sociale et de la Santé. Pour rappel, légalement, le SPF Justice est compétent pour la prise en charge de la santé des détenus. Cette prise en charge est financée via une enveloppe forfaitaire de l’INAMI. Le SPF Justice complète cette enveloppe. Pour améliorer la prise en charge, il est prévu depuis des années de transférer cette compétence au SPF Santé publique. Une étude du KCE est en cours pour examiner les possibilités de financement en cas de transfert. En pratique, dans le cadre d’un futur projet pilote Drogues et prison, le cabinet de la Ministre fédérale de la Santé considère comme évidente la compétence du Fédéral en matière de prise en charge médicale (impli- quant médecins et infirmiers). La Fédération Wallonie-Bruxelles est compétente pour l’aide psychosociale aux détenus. Cette aide ne comprend cependant pas la prise en charge des per- sonnes avec un problème d’assuétudes. Quant à la Région wallonne, elle est compétente pour assurer le suivi des soins psychosociaux lors de la sortie de prison du détenu. Elle n’a pas de compétence expli- cite en matière de prise en charge de la santé des détenus dans la prison, mais elle a néanmoins des compétences générales en promotion de la santé, prévention, réduc- tion des risques, ainsi qu’en matière de prise en charge des problèmes de santé mentale et assuétudes via des institutions de soins non hospitalières. Nonobstant le transfert de compétences dans le cadre de la 6ème réforme de l’État, il s’avère qu’une meilleure coordination entre le niveau fédéral et les entités fédé- rées doit être réalisée, notamment afin de mieux tenir compte des contraintes actuelles et des spécificités wal- lonnes. 4
  • 5. En conséquence de quoi, 27 recommandations prag- matiques au Gouvernement wallon, et au Gouvernement fédéral, ont été formulées en vue d’améliorer la Santé et la Promotion de la santé des détenus en prison, dans la limite des disponibilités budgétaires. Pour l’auteure du rapport, il est en effet primordial d’enfin changer les cadres de références et la vision de la prison, afin d’évoluer vers des perspectives plus justes. La Belgique est un pays démocratique, où l’humanisme doit rester au centre de nos valeurs. Tant les détenus que le personnel qui les accompagne ont des droits. Le premier de ceux-ci est de vivre et de travailler dans la dignité… 5
  • 6. 66 PROPOSITION DE RÉSOLUTION visant à améliorer le bien-être et la santé mentale des détenus en prison Le Parlement de Wallonie, A. Vu l’article 23 de la Constitution belge; B. Vu la loi de principes du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juri- dique des détenus; C. Vu la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient; D. Vu l’accord de coopération du 23 janvier 2009 entre la Communauté française, la Région wallonne et la Commission communautaire française visant la coordination des politiques d’intervention en lien avec le milieu carcéral; E. Vu l’accord de coopération du 23 mai 2014 entre l’État fédéral, la Communauté française et la Région wallonne en vue de créer une politique carcérale cohérente dans le respect des compétences des enti- tés fédérées et de l’autorité fédérale; F. Vu le Code wallon de l’Action sociale et de la Santé; G. Considérant le rapport parlementaire relatif à la pro- motion de la santé des personnes détenues en milieu carcéral, déposé par Mme Salvi et publié en octobre 2016; H. Considérant que, statistiquement, l’état de santé des détenus est méconnu faute de données épidémiolo- giques quantitatives et qualitatives en Belgique; I. Considérant que les personnes détenues sont fra- giles, mentalement et physiquement, et que leurs besoins en matière de soins de santé sont impor- tants; J. Considérant la gravité actuelle de la situation sani- taire des détenus; K. Considérant qu’en prison, les troubles en santé men- tale sont importants suite à la déresponsabilisation, la perte d’autonomie, l’éloignement familial, la pro- miscuité des lieux et les conditions de détention dif- ficiles; L. Considérant qu’il ne faut pas nier la présence de dro- gues en prison, ni nier les problèmes d’assuétudes liées à certaines substances fréquemment consom- mées telles que l’alcool, le cannabis, l’héroïne, la cocaïne, le LSD et des médicaments non prescrits, dont la méthadone prise sans surveillance médicale; M. Considérant que les soins de santé en prison sont nettement insuffisants et que les détenus ne sont pas suffisamment pris en charge en matière de santé mentale (hors cas psychiatrique) et pour les pro- blèmes liés à la consommation de substances psy- choactives; N. Considérant que la promotion de la santé, la préven- tion et la réduction des risques sont tout à fait insuf- fisants en prison; O. Considérant le rôle fondamental des Communau- tés et maintenant de la Région wallonne en matière de sensibilisation, de soutien et de formation tant au niveau des prestataires de soins que des inter- médiaires, et donc du monde associatif présent en prison; 1. Demande au Gouvernement wallon, – de légitimer l’expertise et de soutenir la présence des associations de promotion de la santé ainsi que la collaboration d’associations spécialisées en santé mentale et assuétudes qui développent des projets dans les prisons; – de contribuer à ce que chaque détenu en Wallonie ait la possibilité d’optimaliser ses connaissances afin de prendre soin de sa propre santé en ayant une information claire sur les risques encourus en matière de transmission de maladies et IST ainsi que les gestes de base en matière d’hygiène et de soin primaire que ce soit pour lui ou pour son environnement (communication par différents supports, passage en cellule…); – sous l’angle de la prévention, d’encourager les détenus à accepter les dépistages proposés par les services médicaux via les associations de préven- tion et de promotion de la santé qui développent des projets avec les détenus; – de soutenir et développer l’accès des associations proposant un accompagnement en santé mentale dans toutes les prisons; – de favoriser l’accès et de renforcer les actions de prévention (au sens large) des associations spé- cialisées en assuétudes (information aux détenus, diversité des supports d’information, projets par- ticipatifs en matière d’information, renforcement de la sensibilisation des professionnels) dans une démarche de santé publique et de réduction des risques; – dans le cadre de la promotion de la santé, de per- mettre des contacts avec des professionnels de la santé spécialisés en nutrition et avec les profes- sionnels qui en sont responsables au sein des pri- sons; – de porter les demandes de cette résolution au sein de la prochaine Conférence interministérielle consacrée à la santé en milieu carcéral;
  • 7. 2. Demande par ailleurs au Gouvernement wallon de sensibiliser le Gouvernement fédéral à la nécessité : – de faire appliquer la loi de principes du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus en prenant un arrêté d’exécution en la matière; –d’établir un état des lieux de la santé des personnes détenues au départ du SPF Justice en faisant en sorte que les chiffres se retrouvent dans les rap- ports officiels; – d’utiliser les moyens budgétaires dédiés aux extractions soit à l’engagement de personnel médical de garde sur place, soit à du personnel rappelable, comme par le passé; – de créer un questionnaire d’anamnèse homogène à toutes les prisons et le rendre plus complet sur base du bilan infirmier d’entrée en détention de la prison de Champ-Dollon; – de renforcer le dépistage systématique des mala- dies transmissibles et dès l’entrée en prison, de proposer le dépistage du VIH et des IST; – de doter chaque prison d’une unité de radiologie afin d’effectuer un dépistage de qualité de la tuber- culose; – de permettre une présence de plus longue durée d’un médecin dans chaque établissement; – de faire respecter la loi en matière de distributions des médicaments ; celles-ci doivent être effectuées par le seul personnel habilité (infirmier ou médi- cal); – de permettre aux agents pénitentiaires travaillant en annexes psychiatriques ou dans les établisse- ments de défense sociale de bénéficier d’une for- mation adéquate et spécialisée; – de faire respecter et d’informer les détenus et pra- ticiens sur la loi relative aux droits du patient dans le milieu carcéral et notamment de rendre effec- tive la possibilité de déposer plainte au niveau du service de médiation « Droits du patient »; –de créer, à côté du personnel médical, un poste de référent « promotion santé » (distribution de préservatifs, aides ou conseils pour développer l’exercice physique et une alimentation équili- brée, conseils, informations, le tout en collabora- tion étroite avec la direction et le personnel de la prison) et « santé mentale - assuétudes » (stratégie pour augmenter le bien-être, écoute bienveillante quel que soit l’individu, renvoi vers le médecin ou les autres services) dans chaque établissement; – de permettre à chaque équipe médicale de colla- borer activement avec les associations de santé afin d’assurer un meilleur suivi des dossiers, en y associant les associations de promotion de la santé ou le référent « en Promotion Santé et en Santé mentale - assuétudes »; – de donner une légitimité au référent « promotion santé et santé mentale - assuétudes » ou à des experts thématiques qu’il recommanderait pour former, informer et conseiller personnel et direc- tion afin d’améliorer globalement la santé des détenus; – de soutenir au moyen de subsides plus important des collaborations entre le personnel médical des prisons et les associations extérieures, afin qu’ils puissent travailler de façon plus proactive aux pro- blématiques de promotion de la santé pour facili- ter le travail du personnel médical dans son aspect prévention. V. Salvi J. Kapompole C. Leal Lopez A. Onkelinx 7