2. Edi.pro
Introduction
« Mais pourquoi j’ai pas plus d’amis ? »
«L’ignorance du juge, c’est le malheur de l’innocent »
Juan Luis Vivès
La majorité des associations éprouvent encore aujourd’hui des
difficultés avec le WEB : Que mettre en ligne ? Comment ne pas être
copiés ou récupérés ? Comment se servir de la toile pour être vu ? Doit-
on adopter Facebook ? Ou l’Ipad ?
Tout cela paraît tellement mercantile, tellement superficiel… tellement
rapide. Tout va trop vite : les outils, les langages, les codes et les
machines, tout évolue constamment et de plus en plus rapidement.
Au cœur de ces révolutions, les réseaux sociaux. Facebook, mais
également Google+, Viadeo et Linkedin. Tout semble passer par eux :
information, sensibilisation, vente et même, pour les associations,
recherche de fonds et recrutement de bénévoles.
Ils semblent donc incontournables. Ils sont incontournables. Ils le sont
même pour le secteur non-marchand.
Impossible de vivre en dehors du WEB : tout le monde y est présent même
ceux qui ne se connectent pas. On les voit en photo, on les retrouve dans
des documents ou des liens, on les critique via des commentaires…
Un doute ? Tapez votre nom ou celui de votre organisation dans Google.
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3. Introduction
A. Enfin du simple ?
Ceux qui ont plus de 40 ans ont connu l’écran noir et ses lettres vertes
qui clignotaient. On ne parlait pas encore de surf, ni de tag. Pour utiliser
son PC, il fallait alors apprendre des langages, maîtriser des OS et
bénéficier de bonnes bases techniques en Hardware. Les ordinateurs
étaient des jouets d’ingénieurs. Rapidement ils sont devenus les outils
des secrétaires et des étudiants… A présent ils se redessinent dans les
mains des enfants. Là exactement se joue l’avenir des communications,
du commerce et peut-être celui de la planète.
Les ados d’aujourd’hui sont les citoyens et les bénévoles de demain.
On ne peut donc échapper ni à leur logique ni à leur mode de
communication. Si tout va vite, il faut pour nous aussi faire l’effort de
cette vitesse. Si tout paraît difficile, il faut pour nous aussi faire l’effort
de cette difficulté.
Les enjeux sont en effet importants pour les institutions non-marchandes.
L’objectif est de les mettre en ligne, en phase avec leur public, leurs
collaborateurs et leurs bénéficiaires.
Il faut que les associations soient à la hauteur… à la hauteur de leurs
engagements, de leurs causes et des personnes qu’elles soutiennent.
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4. Edi.pro
important
L’informatique, de la console à la tablette, est trop souvent associée à
l’enfance. Beaucoup de responsables croient donc à tort que tout y est
simple et abordable.
Faux : l’informatique professionnelle est complexe et chère. Elle nécessite
des investissements professionnels humains et financiers.
B. La communication
ininterrompue
Qu’il est bon d’être dans sa bulle : les écolos parlent aux écolos, les
assistants sociaux aux bénéficiaires, les responsables à leurs équipes…
Et quid du reste ? Pourquoi ignorer les autres ?
Trop longtemps, cette logique a prévalu dans les secteurs sociaux : peu
de communication qui soit efficace, conçue et orientée destinataires,
encore moins sur le WEB, et que dire de leur absence sur les réseaux
sociaux ?
Le « Vivons heureux, vivons cachés » est un archaïsme, un reliquat d’une
époque révolue. Notre temps est celui de la communication. Ce siècle
est celui de l’exposition : pour exister, il faut être vu.
La présence en ligne est donc indispensable : quelque soit son
engagement, l’association doit s’afficher sur les PC, les tablettes et les
téléphones. Non seulement s’afficher, mais vivre, s’exprimer, expliquer
et demander.
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5. Introduction
tips : tout change et de plus en plus vite
Que ce soit pour se justifier auprès des donateurs, pour expliquer ses
engagements ou pour défendre une cause, il faut être là. Et pour être
là, il faut être en ligne.
La communication 2.0 n’est plus statique :
• elle est permanente : un site ou un blog et, à plus forte raison, un
réseau social doit être mis à jour quasi quotidiennement;
• elle est interactive : vous devez pouvoir répondre aux questions, réagir
aux commentaires ou apporter des réponses aux interrogations voire
même rassurer les bénéficiaires ou les donateurs qui vous interpellent
sur votre mur;
• elle est collaborative : votre contenu ne vous appartient plus. Depuis
5 ans, les internautes ont pris le droit de co-construire le WEB. A
vous donc d’innover aussi, d’inventer une e-collaboration différente.
C. La victoire de la base et
la perte des repères
Le WEB Social arbore le visage de l’ange : il a toutes les qualités. Il
semble indispensable à tous et pour tout. Il se drape d’éthique et de
morale. On le dit donc Social.
Comme dans les dessins animés Pixar, cet ange-là peut cependant
rapidement prendre les traits d’un diable cruel : ces ailes deviennent
pourpres, des dents lui poussent et ses yeux si angéliques sont à présent
implacables.
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6. Edi.pro
Le Social baisse son masque. Le profit, la compétition, le voyeurisme et
la rumeur apparaissent « tout sourire » : ils savent que souvent ce sont
eux qui mènent la danse Sociale.
Les associations doivent donc marcher avec prudence : leur présence
en ligne ne doit pas se faire au détriment ni de leurs valeurs, ni de leurs
engagements sociaux. Les dérives sont nombreuses et tentantes : il ne
faut jamais oublier que le WEB est une toile. Les araignées sont donc
nombreuses.
Deux de celles-ci sont particulièrement vénéneuses: l’expertise
horizontale et la perte des repères.
1. L’expertise horizontale
Moins vous en savez, plus le WEB vous accorde sa confiance. Ce drôle
d’axiome a perturbé durablement la logique d’information en ligne.
L’internaute semble se méfier de ceux qui maîtrisent leur sujet : experts,
professeurs, universitaires, références bibliographiques, tout est sujet à
caution. On y voit de la manipulation, on croit y déceler du mensonge
voire de la désinformation.
Cela paraît aberrant, mais l’internaute préfère s’informer auprès de
pairs que d’experts : il va sur des forums, des blogs. Il interroge sur
son réseau Social.
Se méfier donc :
• des rumeurs ou de la désinformation qui circulent sur les
réseaux : l’association a un devoir moral d’information juste.
Trop d’associations relayent encore des informations fausses et
entretiennent ainsi la rumeur1;
• certaines associations attirent, par leurs engagements et leurs
combats, le courroux d’organisations ou d’états parfois très
puissants. Ceux-ci n’hésitent pas à utiliser les réseaux pour contre-
informer, déstabiliser ou décrédibiliser l’association.
1 Les associations d’enfants atteints de maladies graves ou incurables sont un bon
exemple : rares sont celles qui vérifient les données médicales qu’elles publient.
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7. Introduction
Une remarque à fluoter
Les associations et ONG s’imposent souvent une éthique très conservatrice.
On y préfère le verbe, la discussion et la réflexion. Il faut adapter ces
contraintes à la nouvelle donne de la communication : l’image.
Il ne faut rien perdre, juste traduire ces arguments graphiquement.
2. La perte des repères
Le virtuel n’est pas l’irréel. Chaque commentaire et chaque image sont
des messages. Loin de se cantonner dans un monde parallèle, ceux-ci
ont des effets bien réels. Ils sont interprétés, appliqués ou rejetés. Ils
induisent des comportements et peuvent directement ou indirectement
influencer les personnes et même les états.
Certains se voient protéger sous les traits d’avatars ou sous le sceau de
l’anonymat. A ceux-là, il convient de dire et de répéter que sur Internet
rien n’est caché, tout est vu. Il est donc impératif de leur expliquer que
tout ce qui est visible a des effets… bien réels.
Se méfier donc :
• pour être responsable, une communication doit être gérée : ce
qui est posté sur Facebook doit donc être validé. Chaque phrase
et chaque photo sont importantes : elles engagent l’association.
Le nom et la renommée de celle-ci valident en effet tout contenu
auprès des internautes;
• la gestion de contenu implique une surveillance non seulement des
pages dites officielles mais également des forums, des blogs des
collaborateurs ou des partenaires et de leur réseau Social.
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8. Edi.pro
Synthèse
Comme tout progrès, le Web Social draine ses avatars. Il faut donc le
considérer tel qu’il est : un outil avec ses limites et ses risques.
Il est impératif pour l’association de conserver la main sur sa communication
WEB : trop externaliser (sociétés sous-traitantes ou bénévoles) peut s’avérer
dangereux.
D. « S’écrire » et se vendre
au quotidien
« Comme ils sont glorieux les philosophes de notre temps… »
Leonardo Bruni
L’écriture est-elle l’oubliée des réseaux sociaux ? Tout est une question
de point de vue…
Il y a dix ans, on fit la même critique aux textos. A d’autres époques,
on critiqua la machine à écrire, l’ordinateur et ses traitements de texte,
le FAX et même le stylo à bille. Le progrès draine le changement : à
chaque nouveau mode de communication, il a fallu un nouveau mode
de rédaction. Le progrès draine également les réticences, la peur du
changement et parfois même le retour de certains fantasmes.
Pour chacun de ces changements, pourtant, l’histoire fut identique :
rien n’avait été oublié, mais tout avait dû évoluer.
1. L’eau du bain est peut-être froide
Le monde se cherche constamment de nouveaux théâtres pour se
mettre en scène. Chaque génération a besoin d’y laisser une trace,
de changer la donne, de bousculer ses aînés… Cette génération-ci a
plongé dans le WEB. Elle y a recréé un monde plus ouvert, plus direct
et plus humain.
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9. Introduction
Pour tout cela, il a fallu réinventer l’écriture. Elle a dû se plier à ce
nouveau mode de communication : le support est différent, il est
mobile; le ton est différent, plus rapide et moins convenu ; le style
est aussi différent… Que l’on aime ou que l’on déteste, il va falloir
s’adapter.
Quand le téléphone fit son apparition, il y eut au sénat français un élu
pour déposer un texte visant à son interdiction : il allait être un outil
de « tentation » pour la femme au foyer. Quand le téléphone portable
débarqua sur le marché, il fut stigmatisé : plus de vie privée, signe
ostentatoire de réussite et d’addiction. Quand le WEB apparut et plus
encore quand Facebook s’imposa à notre quotidien, les arguments
furent identiques et les craintes furent pareilles : intrusion dans la vie
privée, détournement ou utilisation des données, risque d’addiction
et dérives diverses (harcèlements, trafics divers, prosélytismes, …) et,
comme à chaque fois, l’angoisse de « on va toucher à nos enfants ».
La vie privée, un problème de vieux cons2 ? Pas si sûr, mais, dans tous
les cas, Facebook a fait bouger les frontières. Pour ceux qui y trempent
le pied pour la première fois, les réseaux sociaux font cette impression
de bord de mer : l’eau paraît plus froide qu’elle n’est.
2 La vie privée, un problème de vieux cons ?, Jean-Marc Manach, FYP éditions, coll.
Présence/Essai.
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10. Edi.pro
Deux phrases simples pour un concept qui ne l'est pas
Certains scindent à présent la vie privée en deux. Ils distinguent l’espace
intime, qui doit rester clos et donc réellement privé, de l’espace public qui
lui dévoile (ou met en scène) une part de notre vie privée, qu’elle soit
professionnelle ou familiale.
Ceux qui résistent aux réseaux finiront comme pour le téléphone, le
mobile et le WEB par y adhérer non par conviction, mais simplement
par nécessité.
Il va falloir se mettre en scène, imaginer des décors, des scènes, des
évènements et surtout bien régler la lumière, choisir ses spots… Tout
est affaire d’éclairage.
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11. Introduction
2. La Méthode des Mondes : vos murs ont
des oreilles
Ce livre applique les principes de la Méthode des Mondes à l’écriture
Sociale. Cette Méthode s’applique à toutes les facettes de l’écriture
WEB3 : la conception de la page d’accueil, l’écriture des pages d’un
site ou des articles d’un blog, la rédaction d’une newsletter, d’un
courriel, la composition d’un lien ou d’une bannière, la rédaction d’une
description d’un objet pour un site de partage et donc également à la
gestion d’un réseau Social.
Nous nous limiterons dans cet ouvrage à la facette suivante : comment
écrire, commenter et taguer sur le réseau de votre association.
Cet ouvrage n’est pas conçu comme un apport théorique à l’art narratif.
Tout au contraire, loin des dogmes méthodologiques, il se veut un
recueil de « trucs et astuces » pour les community managers. L’objectif
est de former le lecteur au juste maniement de ses projecteurs. La mise
en lumière est en effet un art qui nécessite un apprentissage.
Pour que le livre atteigne cet objectif, il a été construit comme un cahier
d’écolier : tout y est clair, compréhensible et pratique.
3 A. Adam, M. Aubert, A. Coussement, F. Meuleman & T. Pay, Ecrire et manager sa
communication WEB, EDIPRO, 2008.
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12. Edi.pro
Le lecteur saura, dès la première page lue, comment adapter son style,
comment faire de son mur un agréable lieu d’expression.
Le directeur de l’asso, le responsable com., le community manager et
l’éducateur trouveront ici les méthodes qui font défaut ailleurs.
3. Quant à la structure du livre
Le premier chapitre dresse un tableau général de l’écriture Sociale
et des apports de la Méthode des Mondes. Le second, consacré à la
Rhétorique des murs, se concentre sur les fondements de l’écriture : le
choix des mots, des expressions et des figures de syntaxe. Le troisième
reprend dans le détail les techniques de copywriting propres à la
Méthode des Mondes. La quatrième partie applique les formules de la
presse et de la télévision à l’écriture en ligne.
repère : c'est quoi le Co-branding ?
Il est passé le temps où les marques géraient seules leur image. Leur
branding est à présent partagé. La part de leur influence a été rognée
par celle du WEB : ce que disent d’elles les communautés, les sites et
les réseaux occasionnent à présent autant d’impacts que leur propre
communication.
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13. Introduction
Il en est de même pour les associations : la construction de leur marque
se fait à deux avec les internautes. C’est ce que les livres de marketing
surnomment le Co-branding. Dans la construction de ce Co-branding, la
place du réseau social et des UGC4 est cruciale : on fait davantage confiance
à son voisin, son ami ou son cousin qu’au discours de la marque.
Les marques ont dû l’accepter. Les associations devront aussi s’y plier :
un commentaire sur Viadeo a tout autant de puissance qu’un message
publicitaire. L’affiche n’est plus seulement au bord de route, elle est à
présent sur nos murs…
E. La fiche 2.0 : savoir dire merci
et e-valoriser
C’est rien que pour les assos ;o)
Rien n’est dû à ceux qui font ou prônent le bien.
Tout au contraire : un donateur a besoin d’être remercié, un bénévole a
besoin d’être soutenu et, comme chaque collaborateur, d’être valorisé
dans son travail.
4 Les UGC, « User generated content », sont des sites de partage. Ils offrent aux
internautes des plateformes libres sur lesquelles ils peuvent poster leurs photos, tel
Flickr, leurs clips, tel Youtube, ou leurs documents, tel Slideshare.
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14. Edi.pro
C’est humain, nous aimons être « rétribués » pour ce que nous
faisons. Dans le monde marchand, cela se traduit par de l’argent,
des promotions ou des reconnaissances matérielles, la voiture de
société ou les chèques repas. Dans le non-marchand, les bénévoles,
les collaborateurs et les partenaires attendent autre chose : être
reconnus.
Les murs et les commentaires sont des lieux privilégiés pour mettre
en avant le travail des bénévoles, pour remercier les partenaires et
informer les donateurs.
C’est aussi l’occasion de diffuser des résultats et des réussites. Non
seulement pour informer, mais également pour concrétiser des chiffres
et mettre des visages sur des projets, les efforts et les investissements
de chacun.
L’association a tout à gagner à soutenir ceux qui la soutiennent. C’est
humainement moral et socialement éthique. Cela motive les équipes,
dynamise les projets et pérennise les dons et les soutiens extérieurs.
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15. Introduction
Les réseaux offrent un relais parfait pour ces feedbacks :
• les messages du mur ou un tweet : ils peuvent exprimer un
remerciement ou une réussite;
• les commentaires : l’association peut répondre à un bénévole ou un
donateur. Elle peut aussi réagir aux messages postés sur leur profil;
• les « J’aime » : et oui, c’est parfois aussi simple que cela. Un
« J’aime » peut se traduire ici par un « merci ! », un « super job »
ou « tout cela on te le doit »;
• les liens partagés : l’institution peut ainsi mettre en avant une autre
association, un partenaire, une urgence ou remercier un bénévole
ou un donateur;
• la photo du profil : elle peut afficher la fin d’un projet ou exprimer une
réussite. Elle peut représenter une personne, ou remercier une équipe;
• les photos des albums : l’association peut publier des albums de
photos (en taguant les bénévoles et ses collaborateurs);
• la création de pages spécifiques à certains projets ou pour des
recherches de fonds spécifiques;
• le renvoi aux UGC pour des documents, des photos ou des vidéo;
• elle peut aussi partager ou référencer les blogs de ses collaborateurs
ou bénévoles.
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16. Edi.pro
Tips : agir ou réfléchir ?
La communication non marchande a deux écoles : l’une prône la réflexion
et l’éthique, l’autre l’action et le résultat.
a. l’école américaine : l’objectif prime. Il faut agir, trouver une solution
ou apporter une aide. Dans cet esprit, la défense de la cause ou
l’aide du bénéficiaire justifie les démarches. On agit plus qu’on
réfléchit;
b. l’école française, elle, repose sur une vieille utopie toute hexagonale :
toute approche sociale ou révolutionnaire nécessite une réflexion. La
part est donc ici plus à l’analyse, la prise de distance, la méthode
et le discours. On peut faire des choses, mais nous nous devons de
procéder dans un cadre éthique.
Une bonne communication se situe à l’intersection des deux.
Les profils et les comptes sociaux doivent intégrer ces deux facettes :
être dans le résultat et simultanément se placer dans une autre manière
de parler, d’agir et donc de commenter en ligne, moins marketing, plus
réfléchie.
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