1. Pourquoi s’intéresser à la notion d’événement ?
Parce que l’événement est le moyen privilégié par lequel nous percevons une situation.
Un événement est un paradoxe, c’est une focalisation de l’attention sur un fait, cette focalisation de
l’attention érigeant ce fait au statut d’événement.
Parmi la multitude de faits qui se présentent à nous en continu, certains attirent notre attention et
nous les appelons événements.
Une définition de l’événement selon le sens commun serait :
« Ce sur quoi se focalise l’attention d’un groupe significatif de personnes »
En fait cette façon de définir un événement n’est pas vraiment satisfaisante car elle ne définit pas
l’essence de l’événement, il ne s’agit pas en fait d’une définition de la notion d’événement mais du
constat d’une pratique sociale répandue dans l’ensemble de la société et au sein des organisations,
on peut l’appeler également « événement » mais il y a clairement 2 notions distinctes derrière ce
même substantif.
Une définition systémique de l’événement serait :
Ce qui amène un système à changer d’état.
De ce point de vue, ce qu’on appelle communément « événement » est en fait le constat d’un
changement d’état d’un système et donc réellement la conséquence d’un événement.
Par exemple, si votre voiture tombe en panne à la suite de la défaillance mécanique d’une pièce du
moteur, c’est la situation de panne qui attire votre attention, c’est la situation de panne qui constitue
l’événement pour vous. Alors que du point de vue du système, l’événement est le bris de la pièce qui
fait passer le système voiture de « en marche » à « en panne ».
La situation « événementielle » est un signe qui dit qu’il y a des faits (les vrais événements) qu’on ne
perçoit pas nécessairement à ce moment et qui ont fait passer le système dans l’état qui a attiré
notre attention.
En d’autres termes, cet événement nous dit : « attention, le système vient de changer d’état, il était
dans un autre état auparavant, et nous avons l’opportunité de découvrir certains faits ou
enchainement de faits (événements au vrai sens du terme) qui sont capable de provoquer ce
changement d’état.
C’est la que se situe l’enseignement potentiel de l’événement.
Par exemple, dans le schéma ci-dessous :
E1 E2
Système ev1 Système
en à
marche (Rupture l’arrêt
pièce)
2. Ce qui sera perçu comme « événement » au sens vulgaire, sera la panne, l’état de panne plus
précisément.
Cet état de panne devrait attirer notre attention sur l’événement qui a provoqué le changement
d’état : la rupture d’une pièce dans notre exemple, qui attirera notre attention sur la pièce
défaillante, qui nous permettra in fine de remettre le système dans l’état « en marche ».
Il peut également attirer notre attention sur l’état antérieur : un système en marche, et sur les
événements qui contribuent à maintenir cet état.
On peut alors découvrir que l’état « en marche » était en fait alimenté, supporté, par un flot continu
d’événements, la plupart non perçus !
E1 (Rupture E2
pièce)
Evi Système ev1 Système
en à
marche l’arrêt
Evj
Parmi ces événements non perçus, il y aurait par exemple, l’envoi d’huile vers les pièces en
mouvements, événement dont l’absence ou l’insuffisance pourrait expliquer la rupture de la pièce.
On voit donc comment, en déplaçant notre attention de l’état du système vers l’événement qui est à
l’origine de ce changement d’état, on se déplace des conséquences vers les causes, on effectue une
inférence qui nous donnera à la fois de moyens d’investigation et de prévention.
En effet, nous percevons facilement un changement d’état, un peu comme nous prenons conscience
d’un élément dans notre champ visuel seulement à partir du moment où il se met en mouvement.
Lorsqu’un système reste dans un état donné, nous avons tendance à ne pas le considérer, à ne pas
réaliser que nous sommes devant un système distinct de nous même et qui est maintenu dans son
état actif par un flot d’événements particuliers.
Souvent, une fois le changement d’état perçu, notre attention se focalise sur la nouvelle situation et
a du mal à se libérer de cette focalisation. Particulièrement lorsque le nouvel état nous est
désagréable, nous avons tendance à développer des attitudes de victimes, des plaintes, de la
souffrance, des accusations … bref toutes choses qui ne font que fixer encore plus notre attention sur
l’état et non sur ce qui nous permettrait de le modifier.
Revisiter la notion vulgaire d’événement et l’appréhender dans la dimension systémique, la
distinguer de la notion d’état et de changement d’état, offre un angle d’approche nouveau, plus
solide plus à même de faire face aux situations en redirigeant l’attention vers ce qui peut nous
redonner le contrôle d’une situation.
En résumé
1- On appelle le plus souvent évènement ce qui est au vrai la perception d'un changement d'état, et
un état a bien un sens, l'état "en marche" et furieusement différent de l'état "en panne", si on le
perçoit c'est qu'il est bien visible et typiquement nous affecte d'une façon où d'une autre.
2- En déplaçant le focus de notre attention en amont de ce changement d'état, on pourrait
s'apercevoir qu'en fait, l'état précédent était supporté par une succession continue de micro-
évènements qu’on ne remarquait pas.
3. 3- Tout est en constant mouvement, mais le changement nous apparaît de façon discontinu, sous la
forme de paliers dont on a du mal à comprendre la dynamique sous jacente.
5- Mon message est : derrière le soi-disant "évènement", voir le changement continu et comment
notre action présente créé le futur.
En conclusion
Le changement est continu, à chaque instant, des milliards de milliards de milliards de milliards ...
d'évènements se produisent de par le monde. Certain de ces évènements sont la conséquence
mécanique d'autres évènements et nous n'avons pas de moyen d'agir sur eux. Par contre, certains
évènements impliquent une possibilité d'option, de choix de notre part. C'est à ce moment que nous
pouvons exercer notre responsabilité vis-à-vis de l'avenir à condition de :
1- prendre conscience de la possibilité de l'option
2- savoir où on veut aller
3- agir pour aligner l'option avec notre but
Nous n'avons pas besoin de voir tout le changement du monde en continu, si nous voulons améliorer
le monde, nous devons prendre conscience des options qui se présentent à nous pour les aligner
dans la bonne direction.
Je pense que cette attitude est peu répandue car nous n'avons pas une conscience élevée de ce
mode de fonctionnement.
Pascal RODMACQ
Nancy le 16 Novembre 2012