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Rough Draft N Regulation No Figures
- 1. 2
1. MĂ©tabolisme de lâazote
Le cycle biogĂ©ochimique de lâazote est alimentĂ© par un rĂ©servoir dâazote
atmosphérique (N2) de plus de 3.8 X 1015 tonnes métriques. Six processus, tous mis
en marche par des microorganismes, permettent aux différentes formes réduites ou
oxydĂ©es de lâazote de circuler dans lâenvironnement: la fixation, lâassimilation,
lâammonification, la nitrification, la dĂ©nitrification et lâoxydation anaĂ©robique de
lâammonium (NH4+) (anammox) (voir figure 1) (Atlas et Bartha, 1998).
Figure 1. Cycle de lâazote. (Figure tirĂ©e de http://www.mpi-
bremen.de/en/Nitrogen_Cycling_in_the_Black_Sea.html).
En résumé, la fixation consiste en la réduction du N2 en ammoniac (NH3). Le NH3 est
ensuite assimilé par les plantes et incorporé dans des molécules organiques comme
les acides aminĂ©s, les nuclĂ©otides, etc. Les acides aminĂ©s et dâautres petites
molĂ©cules contenant de lâazote peuvent ĂȘtre assimilĂ©s directement par les animaux,
les champignons et divers hĂ©tĂ©rotrophes. Lâazote organique des plantes et des
animaux morts est reconverti en NH3 par ammonification. La nitrification, effectuée
par des bactĂ©ries du sol, consiste en lâoxydation du NH3 jusquâau nitrate (NO3-) en
passant par le nitrite (NO2-). Les plantes assimilent aussi le NO3- et le réduisent en
NH3. Pour compléter le cycle, le NO3- est réduit en N2 en passant par les
intermĂ©diaires suivants: le NO2-, le monoxyde dâazote (NO) et le protoxyde dâazote
(N2O). Dans lâocĂ©an, le NH3 et le NO2- peuvent ĂȘtre convertis directement en N2 par
un processus appelé anammox. Dans ce cas, le NH4+, la forme cationique du couple
NH3/NH4+ majoritaire en solution à un pH physiologique, réagit avec le NO2- pour
donner du N2 et deux molĂ©cules dâeau. La premiĂšre partie de cette revue de littĂ©rature
se consacrera Ă lâassimilation et la fixation de lâazote.
1.1 Lâassimilation de lâazote
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Une variĂ©tĂ© de composĂ©s organiques azotĂ©s peut ĂȘtre assimilĂ©e par les
microorganismes. Le NH3 est souvent la source dâazote prĂ©fĂ©rĂ©e. Câest le cas pour
Escherichia coli puisque le NH3 supporte le taux de croissance le plus rapide. E. coli
a servi dâorganisme modĂšle pour lâĂ©tude de lâassimilation du NH3. Deux voies
métaboliques entrent en jeux pour la génération de glutamate et de glutamine à partir
du NH3. Lorsque le milieu est limité en NH3, la glutamine synthétase (GS) (GlnA) et
la glutamate synthase (GOGAT) (GltBD) catalysent les réactions suivantes:
A) glutamate + ATP + NH3 => glutamine + ADP + PO4-2 (GS)
B) glutamine + α-cétoglurate + NADPH => 2 glutamates + NADP+ (GOGAT)
Lorsque le NH3 est abondant dans le milieu, la glutamate déhydrogénase (GDH)
(GdhA) catalyse la réaction suivante :
C) α-cétoglutarate + NH3 + NADPH => glutamate + NADP+ (GDH)
Chez certaines bactéries pourpres non-sulfureuses telles que Rhodobacter capsulatus
et Rhodoblastus acidophilus, la L-alanine déhydrogénase (AldA) est responsable de
lâassimilation de lâazote dans un milieu riche en NH3 en catalysant la rĂ©action
suivante (Caballero et al., 1989; Herbert et al., 1978) :
D) pyruvate + NADH + NH3 => L-alanine + NAD + H2O
La voie dâassimilation GS-GOGAT est plus appropriĂ©e dans un environnement
pauvre en NH3 parce que lâaffinitĂ© de la glutamine synthĂ©tase pour le NH3 est plus
haute que celle de la glutamate déhydrogénase. En effet, la constante de Michaelis
(Km) de la glutamine synthétase pour le NH3 est de <0,2 mM alors que celle de la
glutamate déhydrogénase est de >1 mM (Miller et Stadtman, 1972). Par contre, la
voie GS-GOGAT nĂ©cessite prĂšs de 15 % des molĂ©cules dâATP disponibles dans la
cellule (Lengeler et al., 1999). Une fois la glutamine et le glutamate synthétisés, et
- 3. 4
donc le NH3 assimilé, diverses voies métaboliques sont alimentées pour la synthÚse
des composantes azotées de la cellule (Revue par Reitzer, 2003). Le glutamate
fournit ~88 % de lâazote cellulaire et la glutamine fournit le reste (Wohlheuter et al.,
1973). Outre son rĂŽle dans la biosynthĂšse, chez Escherichia coli, le glutamate
participe Ă la rĂ©ponse de la cellule au stress osmotique. Quand lâosmolaritĂ© externe
sâaccentue, la concentration intracellulaire en glutamate et en K+ augmente (Revue
par Csonka et Hanson, 1991). Le glutamate forme le plus important groupe dâanions
contrebalançant la présence de K+. La concentration en glutamate demeure constante
en dĂ©pit de lâajout dâazote externe (Revue par Csonka et Hanson, 1991). En
permanence inférieure à la concentration en glutamate, la concentration en glutamine
intracellulaire varie selon la disponibilité en azote externe et est un indicateur de
celle-ci (Ikeda et al., 1996). Le rÎle détaillé de la glutamine dans la régulation du
mĂ©tabolisme de lâazote sera abordĂ© ultĂ©rieurement.
1.1.1 La glutamate déhydrogénase et la L-alanine déhydrogénase
La glutamate déhydrogénase est un hexamÚre composé de sous-unités
identiques avec un poids moléculaire total de 300 kDa. Cette enzyme est encodée par
le gĂšne monocistronique gdhA Ă partir dâun promoteur unique Ï70-dĂ©pendant (voir
figure 2). Chez Escherichia coli, la prĂ©sence de glutamate ou dâaspartate externe
rĂ©prime lâexpression de la glutamate dĂ©hydrogĂ©nase par un mĂ©canisme inconnu
(Revue par Reitzer, 1996). Chez une autre entérobactérie, Klebsiella aerogenes,
lâajout de lysine dans le milieu rĂ©duit par deux la formation de glutamate
déhydrogénase in vivo (Janes et al., 2001). La pauvreté du milieu en NH3 entraßne
aussi une réduction de la transcription de gdhA. La protéine NAC (Nitrogen
Assimilation Control) cause cette répression chez Escherichia coli, chez Klebsiella
aerogenes et chez Klebsiella pneumoniae (Camarena et al., 1998; Macaluso et al.,
1990; Rosario et Bender, 2005). NAC est composée de deux sous-unités identiques
de 32 kDa et appartient à la famille des régulateurs de la transcription LysR. En effet,
NAC possĂšde en N-terminal un motif dâattachement Ă lâADN HTH (Helix-Turn-
Helix) typique de la famille LysR. Contrairement aux régulateurs de cette famille, la
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protĂ©ine NAC nâa pas besoin de lâattachement dâune petite molĂ©cule effectrice en C-
terminal pour ĂȘtre active (Schwacha et Bender, 1993). En plus de la glutamate
déhydrogénase, NAC réprime sa propre expression et celle de la glutamate synthase.
NAC active la transcription des opérons hut (histidine utilization), ure (urea
utilization), dad (d-amino acid dehydrogenase) et cod (cytosine deaminase). Ă
remarquer, tous ces opérons sont transcrits avec une ARN polymérase associée au
facteur Ï70. Quant au gĂšne nac, il est transcrit par une ARN polymĂ©rase associĂ©e au
facteur Ï54 et nĂ©cessite la prĂ©sence de lâactivateur NtrC~P. Cette protĂ©ine est
phosphorylée lorsque la concentration en NH3 dans le milieu est faible. Ainsi, NAC
permet le couplage du systÚme de régulation à deux composantes NtrB (NRII) / NtrC
(NRI) avec des opĂ©rons transcrits Ă lâaide du facteur Ï70 (Bender, 1991). Les sections
1.1.3.2 et 1.1.3.3 apporteront plus de dĂ©tails quant aux facteurs Ï et au systĂšme de
régulation à deux composantes Ntr. Chez Klebsiella aerogenes, la transcription de
gdhA est rĂ©duite par trois lorsque NAC sâattache Ă une sĂ©quence ATC-N9-TAT aux
alentours de la position -89 par rapport au site dâinitiation de la transcription. Dans
cette conformation, Nac concurrence probablement un activateur inhibé par la
présence de lysine. La répression est plus forte (10 fois moins de transcription de
gdhA) lorsque NAC, sous une forme tĂ©tramĂ©rique, sâattache aux alentours des
positions -89 et +57 et induit la formation dâune boucle dâADN bloquant la
transcription (Goss et al., 2002; Rosario et Bender, 2005).
Figure 2. OpĂ©ron gdhA dâEscherichia coli. LĂ©gende: rose = rĂ©presseur. (Figure
tirée de http://biocyc.org/ECOLI/NEW-IMAGE?
type=OPERON&object=TU0-1201; Keseler et al., 2004).
Chez Escherichia coli, un site dâattachement pour la protĂ©ine rĂ©gulatrice CRP
(ou CAP) couvrant la région -35 du promoteur de gdhA a été identifié (Riba et al.,
1988). Cet homodimĂšre de 44 kDa possĂšde deux motifs dâattachement Ă lâADN HTH
et est impliqué dans la répression catabolique; c'est-à -dire dans la gestion de
- 5. 6
lâexpression des enzymes nĂ©cessaires au mĂ©tabolisme de sources de carbone (lactose,
maltose, glycérol, etc.) moins favorables à la croissance bactérienne aprÚs
lâĂ©puisement du glucose, un sucre permettant une croissance plus rapide. CRP active
la transcription Ă partir de plus dâune centaine de promoteurs et rĂ©prime lâexpression
de certains gĂšnes tel que ompA (outer membrane complex A protein), crp et lâopĂ©ron
gal (galactose). En prĂ©sence de lâeffecteur allostĂ©rique cAMP (AMP cyclique), la
protĂ©ine CRP sâattache Ă une sĂ©quence de 22 pb et amĂ©liore ou rend difficile lâaccĂšs
au promoteur de lâARN polymĂ©rase (Revue par Lawson et al., 2004). La
concentration en cAMP est inversement proportionnelle au taux de croissance.
Lâenzyme responsable de la synthĂšse du cAMP, lâadĂ©nylate cyclase (Cya), est
probablement activée par la forme phosphorylée de IIAGlc, une protéine jouant un rÎle
dans le systÚme phosphoénolpyruvate:sucre phosphotransférase de transport des
sucres (PTS) (Park et al., 2006). Dans le cas de gdhA, la protéine CRP est un
rĂ©presseur puisque la quantitĂ© dâARNm et lâactivitĂ© de GdhA sont plus importante en
prĂ©sence de glucose quâen prĂ©sence de glycĂ©rol (Riba et al., 1988).
La L-alanine déhydrogénase de Rhodobacter capsulatus est composée de six
sous-unités identiques et possÚde un poids moléculaire total de 240 kDa. Le Km de
cette enzyme pour le NH3 se situe entre 8.3 mM et 28 mM dépendant de la souche de
Rhodobacter capsulatus étudiée (Caballero et al., 1989). La régulation de
lâexpression ou de lâactivitĂ© de la L-alanine dĂ©hydrogĂ©nase est un sujet peu Ă©tudiĂ©.
Chez Rhizobium leguminosarum, une bactĂ©rie symbiotique fixatrice dâazote, un
rĂ©gulateur de la famille AsnC-Lrp, AldR, est nĂ©cessaire pour lâexpression dâAldA
(Lodwig et al., 2004). Le régulateur AldR est une protéine de 17 kDa possédant un
motif dâattachement Ă lâADN HTH en N-terminal typique de la famille AsnC.
1.1.2 La glutamate synthase
La glutamate synthase de la bactérie pourpre non-sulfureuse Azospirillum
brasilense est composĂ©e de quatre hĂ©tĂ©rodimĂšres formĂ©s dâune sous-unitĂ© de 160 kDa
et dâune autre de 52 kDa. gltB encode la grosse sous-unitĂ© alors que gltD encode la
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petite sous-unité. GltB contient un cofacteur FMN (Flavine Mononucléotide) et un
centre [3Fe-4S]0, +1. GltD contient un cofacteur FAD (Flavine Adénine Dinucléotide)
et probablement deux centres [4Fe-4S]+1. +2 (Agnelli et al., 2005). GltB catalyse la
synthĂšse rĂ©ductive du glutamate Ă partir de la glutamine et de lâα-cĂ©toglutarate
(αCG). La petite sous-unité GltD est une NADPH oxydoréductase FAD-dépendante
qui transfert des équivalents réducteurs du NADPH en passant par le cofacteur FAD,
le centre [3Fe-4S]0, +1
et au moins lâun des deux centres [4Fe-4S]+1. +2
jusquâau
cofacteur FMN de la grosse sous-unité GltB (Revue par Van den Heuvel et al., 2004).
Les gĂšnes gltB et gltD sont situĂ©s sur lâopĂ©ron gltBDF transcrit Ă partir dâun
promoteur possĂ©dant un motif reconnu par le facteur Ï70 (voir figure 3). Aucun rĂŽle
spĂ©cifique nâa Ă©tĂ© identifiĂ© pour GltF jusquâĂ maintenant (Goss et al., 2001). Quatre
rĂ©presseurs et trois activateurs sont impliquĂ©s dans la rĂ©gulation de lâopĂ©ron gltBDF
dâEscherichia coli. Tout comme pour gdhA, CRP-cAMP sâattache en amont de
lâopĂ©ron gltBDF aux alentours de la position -65 et fait office de rĂ©presseur (Paul et
al., 2007). La protéine NAC est aussi impliquée dans la régulation négative de
gltBDF (Zimmer et al., 2000).
Figure 3. OpĂ©ron gltBDF dâEscherichia coli. LĂ©gende: rose = rĂ©presseur; vert =
activateur. (Figure tirée de http://biocyc.org/ECOLI/NEW-IMAGE?
type=GENE&object=EG10403; Keseler et al., 2004).
Le rĂ©gulateur ArgR peut sâattacher aux alentours des sites -352 et -331 en
amont de gltBDF et rĂ©duit lâexpression de cet opĂ©ron. ArgR est un hexamĂšre de 98
kDa composé de deux trimÚres liés par six arginine (Van Duyne et al., 1996). La
partie N-terminale de la protĂ©ine contient un site dâattachement Ă lâADN HTH alors
que la partie C-terminale contient un site dâattachement pour lâarginine. ArgR
reconnaĂźt un opĂ©rateur constituĂ© de deux sĂ©quences dâADN plus ou moins
- 7. 8
palindromiques de 18 pb séparées par 2 ou 3 pb appelées boßtes ARG (Berg, 1988).
En plus de rĂ©primer la transcription dâune trentaine de gĂšnes donc ceux responsables
de la biosynthĂšse de lâarginine (argE, argI, argCBH, argD, argR, argG, carAB, etc.),
ArgR est impliqué dans la recombinaison site-spécifique permettant la résolution en
monomÚre de multimÚres de plasmides possédant un origine de réplication ColE1
(Stirling et al., 1988). Sachant que le glutamate est un prĂ©curseur de lâornithine qui Ă
son tour est convertit en arginine, le produit final de cette voie de synthĂšse exerce
donc une inhibition «feedback» par lâentremise dâArgR sur la glutamate synthase.
FNR (Fumarate and Nitrate Reduction) est le dernier facteur de transcription
rĂ©primant lĂ©gĂšrement lâexpression de la glutamate synthase (Constantinidou et al.,
2006). De la mĂȘme famille que le rĂ©gulateur CRP, FNR est un homodimĂšre de 56
kDa possĂ©dant un motif dâattachement Ă lâADN HTH en C-terminal et un centre Fe-S
en N-terminal (Revue par Körner et al., 2003). FNR contrĂŽle lâexpression de plus de
100 gĂšnes impliquĂ©s dans le passage de la bactĂ©rie dâun environnement aĂ©robie Ă un
environnement anaĂ©robie. En particulier, FNR rĂ©prime lâexpression des gĂšnes
responsables de la respiration aérobie et active ceux qui permettent la réduction
dâaccepteurs dâĂ©lectrons alternatifs comme le nitrate et le fumarate. Le centre Fe-S
permet Ă FNR de sentir le niveau dâO2 dans la cellule. En effet, lâO2 convertit les
deux centres [4Fe-4S]2+ du dimĂšre en centres [2Fe-2S]2+. Dans cette conformation,
FNR devient incapable de se lier Ă lâADN Ă cause dâune diminution de son taux de
dimérisation (Revue par Kiley et Beinert, 2003).
En absence des activateurs Lrp (Leucine-responsive Regulatory Protein) et
IHF (Integration Host Factor), lâexpression de lâopĂ©ron gltBDF est rĂ©duit 30 fois
(Paul et al., 2001). Ces deux protĂ©ines sâattachent simultanĂ©ment en amont de
gltBDF; aux alentours des positions -246, -215 et -152 pour Lrp et des positions -89
et -85 pour IHF. Lrp dâEscherichia coli est un homodimĂšre de ~40 kDa possĂ©dant un
motif dâattachement Ă lâADN HTH en N-terminal, un domaine central responsable de
la régulation de la transcription et un domaine C-terminal sensible à la leucine. Lrp
affecte la transcription dâau moins 10% de tous les gĂšnes dâEscherichia coli; entre
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autre, ceux impliqués dans le métabolisme des acides aminés ou dans la synthÚse des
pili (Revue par Brinkman et al., 2003). La leucine indique au régulateur Lrp la
quantité disponible de protéines et de peptides dans le milieu. Dépendant de
lâabondance en nutriments, Lrp inhibe habituellement lâexpression des gĂšnes associĂ©s
au catabolisme et active lâexpression de ceux associĂ©s Ă lâanabolisme. La leucine peut
attĂ©nuer ou accentuer lâactivitĂ© de rĂ©gulation de Lrp ou encore nâavoir aucun effet.
Une cellule dâE. coli contient 3000 dimĂšres de Lrp. Ă une concentration comparable
in vitro, les dimÚres Lrp forment un complexe hexadécamÚrique réduit en octamÚre
en présence de leucine (Chen et al., 2001; Chen et Calvo, 2002). Selon le modÚle
proposé par Chen et al. (2001), les deux formes oligomériques de Lrp interagissent
avec différents promoteurs ce qui explique la variabilité des effets de la leucine.
Compte tenu de la grande quantité de Lrp dans la cellule, ce régulateur pourrait agir
aussi en tant quâorganisateur de la structure du chromosome (DâAri et al., 1993).
Dans le cas de lâopĂ©ron gltBDF, la rĂ©gulation Lrp est peu sensible Ă la leucine. Par
contre, lâexpression de Lrp est stimulĂ©e par le ppGpp (3â, 5â-bipyrophosphate
guanosine), un indicateur dâune limitation en acides aminĂ©s ou en sources dâĂ©nergie
(Landgraf et al., 1996). La combinaison dâIHF et de Lrp stabilise le complexe formĂ©
entre lâARN polymĂ©rase et le promoteur. IHF pourrait plier lâADN de maniĂšre Ă
permettre un contact entre les complexes ARN-polymérase-gltBp et Lrp-ADN (Paul
et al., 2007). IHF est un hétérodimÚre composé de deux sous-unités de 10 kDa
chacune encodées par himA et himD. Contrairement aux autres membres de la famille
«DNA-binding Proteins» de type II (HU, TF1, etc.), IHF reconnaßt la séquence
consensus T/AATCAANNNNTTA/G et sâattache spĂ©cifiquement Ă ce site (Revue
par Travers, 1997). IHF plie lâADN de 160° et participe, entre autre, Ă la
condensation du chromosome (Revue par Swinger et Rice, 2004).
Le troisiĂšme et dernier facteur activant la transcription de gltBDF est GadE,
une protĂ©ine impliquĂ©e dans lâadaptation dâEscherichia coli Ă un environnement
acide (Hommais et al., 2004). GadE a un poids moléculaire de ~20 kDa et contient un
motif dâattachement Ă lâADN en C-terminal typique de la famille LuxR. Lâeffet
positif de GadE sur la transcription de gltBDF a été démontré par micropuce ADN et
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lâattachement de GadE au promoteur de gltBDF a Ă©tĂ© observĂ© par retard sur gel.
GadE est exprimée préférentiellement à un pH acide de 4.5 ou 5.5 par rapport à un
pH de 7.4 (Tucker et al., 2002). E. coli possĂšde quatre systĂšmes pour survivre dans
un milieu acide: un systÚme réprimé par le glucose peu caractérisé et trois systÚmes
basĂ©s respectivement sur la dĂ©carboxylation du glutamate, de lâarginine et de la
lysine (Castanie-Cornet et al., 2001; Iyer et al., 2003). De ces quatre mécanismes, la
décarboxylation du glutamate est celui qui consomme le plus de protons. Puisque le
transport du glutamate Ă lâintĂ©rieur de la cellule entraĂźne lâentrĂ©e simultanĂ©e dâun
proton, la production intracellulaire de glutamate par GltBD est essentielle pour que
ce systÚme de survie soit efficace. En plus de cet opéron, GadE active, entre autre,
lâexpression des gĂšnes gadA, gadB et gadC responsables de la dĂ©carboxylation du
glutamate (Ma et al., 2003).
1.1.3 La glutamine synthétase
La glutamine synthétase bactérienne est un dodécamÚre de ~620 kDa formé
de deux anneaux hexamĂ©riques se faisant face (voir figure 4i). Lâenzyme possĂšde 12
sites actifs localisĂ©s Ă lâinterface entre le domaine C-terminal dâune sous-unitĂ© et le
domaine N-terminal de la sous-unité adjacente. La grande majorité des résidus
composant le site actif provient du domaine C-terminal. Le glutamate et lâATP
sâattache aux extrĂ©mitĂ©s opposĂ©es du site actif en forme de sablier (voir figures 4i et
4ii). Au centre du site actif, 2 Mg2+ et/ou 2 Mn2+ se lient aux sites n1 et n2. Le cation
n1 stabilise la forme active de la glutamine synthétase et joue un rÎle dans
lâattachement du glutamate. Le cation n2 est impliquĂ© dans le transfert du groupe
phosphoryl-. La synthĂšse de la glutamine se fait en deux Ă©tapes: la formation de
lâintermĂ©diaire Îł-glutamyl phosphate et la production de glutamine. En premier lieu,
le cation n2 coordonne le Îł-phosphate de lâATP pour permettre la phosphorylation du
groupe Îł-carboxylate du glutamate et la synthĂšse de lâintermĂ©diaire. Finalement, le
NH3 attaque le Îł-glutamyl phosphate et entraĂźne la libĂ©ration dâune molĂ©cule de
phosphate et dâune molĂ©cule de glutamine (Revue par Eisenberg et al., 2000). Dâun
point de vue structural, lâarrivĂ©e de lâATP Ă proximitĂ© du cation n2 provoque la
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migration de la boucle Asp-50â, la portion N-terminale du site actif, vers le futur site
dâattachement du NH4+ (voir figure 4ii). SimultanĂ©ment, lâarginine 339 se dĂ©place
vers le site dâattachement du groupe Îł-carboxylate du glutamate. Ces deux
changements de conformation augmentent lâaffinitĂ© de GlnA pour le NH4+ et le
glutamate. Le glutamate pénÚtre ensuite dans le site actif et se lie au-dessus de la
boucle Glu-327 (résidus 323-330) de façon à ce que le groupe γ-carboxylate soit dans
lâentourage du cation n1. La fonction principale de la boucle Glu-327 est dâempĂȘcher
lâhydrolyse aberrante de lâintermĂ©diaire Îł-glutamyl phosphate en bloquant lâentrĂ©e du
site actif. Le groupe amine du glutamate modifie lâorientation de la boucle Asn-264
(rĂ©sidus 255-266) et permet Ă celle-ci de coopĂ©rer avec la sĂ©rine 53â de la boucle
Asp-50â pour stabiliser la boucle Glu-327 dans une conformation favorisant la
protection du site actif. La polarisation par les deux cations et lâarginine 339 du
groupe Îł-phosphate entraĂźne la synthĂšse du Îł-glutamyl phosphate. Une fois cette
Ă©tape franchit, le NH4+ entre dans le site actif et sâancre dans le vestibule chargĂ©
nĂ©gativement formĂ© par les rĂ©sidus Glu-327, Asp-50â, Tyr-179, Glu-212 et Ser-53â.
Le NH4+ perd un proton au dĂ©pend de la chaĂźne latĂ©rale de lâasparagine 50â. Lâattaque
par le NH3+ du Îł-glutamyl phosphate rĂ©sulte en la formation dâun adduit tĂ©traĂ©drique
lié à la glutamine 327 par un pont salin. Finalement, la glutamine est relùchée aprÚs le
transfert dâun proton de lâadduit vers la glutamine 327 et lâouverture du site actif par
la boucle Glu-327 (Revue par Eisenberg et al., 2000).
- 11. 12
i
ii
Figure 4. i. Site actif et anneau hexamérique de la glutamine synthétase. ii. Cycle
de la biosynthÚse de la glutamine effectué par la glutamine synthétase.
(Figure tirée de Eisenberg et al., 2000).
1.1.3.1 La régulation transcriptionnelle de la glutamine synthétase
La glutamine synthĂ©tase est encodĂ©e par le gĂšne glnA situĂ© sur lâopĂ©ron
glnALG (voir figure 5). GlnL (NtrB) et GlnG (NtrC) sont les membres dâun systĂšme
de régulation à deux composantes sur lequel nous reviendrons dans la section 1.1.3.3.
Chez Escherichia coli, GlnA est transcrit Ă partir de deux promoteurs: glnAp1 et
glnAp2. Puisque la glutamine synthétase est la seule enzyme capable de fabriquer de
la glutamine, la bactérie doit exprimer un niveau basal de GlnA indépendamment de
la concentration en NH3 dans le milieu. glnAp1 est donc un promoteur plus faible que
glnAp2 permettant une transcription minimale de glnALG lorsquâil y a abondance de
- 12. 13
NH3 (Revue par Reitzer, 2003). Le promoteur Ï70-dĂ©pendant glnAp1 est situĂ© 116 pb
en amont de glnAp2, un promoteur Ï54-dĂ©pendant. glnAp2 est responsable de
lâaugmentation draconienne de la transcription de glnA en conditions de croissance
déficientes en azote fixé. glnAp1 et glnAp2 peuvent assurer la transcription de glnA
seul ou de lâopĂ©ron glnALG en entier. En effet, la transcription Ă partir de ces
promoteurs peut prendre fin ou non au terminateur Rho-indépendant situé dans la
partie 5â de glnL (Rocha et al., 1985). En aval de glnA, le promoteur glnLp Ï70-
dĂ©pendant permet lâexpression exclusive de glnLG (Pahel et al., 1982).
Figure 5. OpĂ©ron glnALG dâEscherichia coli. LĂ©gende: rose = rĂ©presseur; vert =
activateur; brun = activateur et répresseur. (Figure tirée de
http://biocyc.org/ECOLI/NEW-IMAGE?type=GENE&object=EG10383;
Keseler et al., 2004).
Chez les bactéries pourpres non-sulfureuses tel que Rhodobacter capsulatus,
Rhodspirillum rubrum et Azospirillum brasilense, glnA fait partie de lâopĂ©ron glnBA.
glnB code pour un régulateur PII; famille de protéines occupant une place central
dans le mĂ©tabolisme de lâazote. Chez Rhodospirillum rubrum, le promoteur faible
Ï70-dĂ©pendant glnBp1 et le promoteur fort Ï54-dĂ©pendant glnBp2 ont des fonctions
similaires au couple glnAp1 et glnAp2 dâEscherichia coli (Cheng et al., 1999). Par
contre, la transcription à partir de glnBp2 en présence de NH4+ demeure plus forte que
celle Ă partir de glnBp1. En plus des promoteurs glnBp1 et glnBp2, lâopĂ©ron glnBA
dâAzospirillum brasilense contient un troisiĂšme promoteur glnAp peu caractĂ©risĂ© et
situé entre les régions codantes de glnB et de glnA (de Zamaroczy et al., 1993). Chez
Rhodobacter capsulatus, malgré la présence de transcrits glnBA et de transcrits glnA,
seulement un couple de promoteurs glnBp1-2 bĂąti sur le mĂȘme modĂšle que celui
retrouvé chez Rhodospirillum rubrum a été détecté en amont de glnBA (Foster-
Hartnett et Kranz, 1994). à la différence de glnBp2 de Rhodospirillum rubrum, le
promoteur fort glnBp2 de Rhodobacter capsulatus est indĂ©pendant du facteur Ï54.
- 13. 14
Pour expliquer lâexistence de transcrits glnA, Borghese et Wall (1995) ont recherchĂ©
la prĂ©sence de structures tige-boucle dans lâARNm. Une structure tige-boucle
potentielle situĂ©e dans la partie 3â de glnB pourrait ĂȘtre la cible de la RnaseIII et
entraĂźner une dĂ©gradation rapide de lâARNm en amont. Une seconde structure tige-
boucle comprenant le codon de départ de glnB pourrait compliquer la traduction de
ce gĂšne.
1.1.3.2 Les facteur Ï 70 et Ï 54
La transcription des rĂ©gions codantes dâADN en ARNm nĂ©cessite une
structure en cis, le promoteur, et un complexe enzymatique composé de cinq sous-
unitĂ©s (ÎČÎČâα2Ï), lâARN polymĂ©rase. Pour sâattacher Ă une sĂ©quence promoteur
spĂ©cifique et pour initier la transcription, lâARN polymĂ©rase dâEscherichia coli doit
sâadjoindre une autre sous-unitĂ© sĂ©lectionnĂ©e parmi lâun des sept facteurs Ï. Deux
facteurs Ï sont impliquĂ©s dans lâexpression de la glutamine synthĂ©tase: Ï70 (rpoD) et
Ï54 (rpoN). La famille Ï70 est responsable de lâinitiation de la transcription des gĂšnes
mĂ©nage et des gĂšnes facultatifs dans un environnement donnĂ©. Câest la famille de
facteurs Ï prĂ©dominante durant la phase exponentielle de croissance. Ï70 reconnaĂźt
deux éléments du promoteur de 5-6 pb de long centrés autour des positions -10 et
-35. SubsĂ©quemment Ă la reconnaissance et Ă lâancrage sur le promoteur de lâARN
polymĂ©rase ÎČÎČâα2ÏÏ, les brins dâADNdb sont sĂ©parĂ©s pour former le complexe
ouvert. Le brin gabarit sâapproche du site actif de lâARN polymĂ©rase et lâautre brin
est sĂ©questrĂ© par des acides aminĂ©s aromatiques du facteur Ï. AprĂšs la synthĂšse dâun
brin dâARN de 8 Ă 10 nuclĂ©otides de long, le relĂąchement du facteur Ï permet Ă
lâARN polymĂ©rase dâĂ©chapper au promoteur et de progresser le long de la sĂ©quence
codante dâADN jusquâĂ la terminaison de la transcription. Ï70 est une protĂ©ine de ~36
kDa constituĂ©e de quatre domaines (Ï1, Ï2, Ï3, Ï4) ayant des fonctions distinctes: Ï1
rĂ©gule la cinĂ©tique de la transcription, Ï2 sâattache Ă la rĂ©gion -10 du promoteur, Ï3
stabilise le complexe ouvert et Ï4 sâattache Ă la rĂ©gion -35. Lâexpression et lâactivitĂ©
de Ï70 sont contrĂŽlĂ©es par la rĂ©gulation transcriptionnelle, la maturation, la
- 14. 15
dĂ©gradation protĂ©olytique et lâinhibition post-traductionnelle (revue par Paget et
Helmann, 2003). Le facteur Ï54 est nĂ©cessaire pour lâexpression de gĂšnes impliquĂ©s
dans lâassimilation de lâazote, lâutilisation de sources de carbone, certaines voies de
fermentation, la synthÚse des flagelles et la virulence bactérienne. De tous les
facteurs Ï, Ï54 est le seul qui ne soit pas un homologue de Ï70. Ï54 est une protĂ©ine
de ~54 kDa composée de trois régions. La région N-terminale interagit avec les
protĂ©ines activatrices en amont (ex :NtrC-P) pour contrĂŽler la formation dâun
complexe ouvert au niveau du promoteur. La région centrale contient le domaine
dâattachement minimal Ă lâARN polymĂ©rase et un autre domaine qui augmente
lâaffinitĂ© de Ï54 pour lâADN. La rĂ©gion C-terminale reconnaĂźt et sâattache Ă la
séquence consensus du promoteur située autour des positions -24 et -12. La
principale diffĂ©rence entre Ï54 et Ï70 rĂ©side au niveau de la rĂ©gulation de lâinitiation
de la transcription. Une fois lâARN polymĂ©rase-Ï70 attachĂ©e au promoteur et lâADN
ouverte, la transcription dĂ©bute spontanĂ©ment. Au contraire, lâARN polymĂ©rase-Ï54
doit interagir avec une protéine activatrice située 150 pb en amont du promoteur pour
dĂ©buter sa progression. AprĂšs sa phosphorylation ou lâattachement dâun ligand,
lâactivateur hydrolyse lâATP et utilise lâĂ©nergie pour changer la conformation fermĂ©e
du complexe promoteur-ARN polymĂ©rase-Ï54 en conformation ouverte ( Revue par
Buck et al., 2000).
1.1.3.3 Le systÚme de régulation à deux composantes NtrB/NtrC
NtrC (Nitrogen Regulatory Protein C) contrĂŽle directement ou par lâentremise
de Nac, la transcription de 2% du gĂ©nome dâEscherichia coli. Principalement, NtrC
active lâexpression de gĂšnes minimisant le ralentissement de la croissance observĂ© en
conditions limitantes pour lâazote (Zimmer et al., 2000). NtrC est une protĂ©ine de ~52
kDa constituée de trois domaines: le domaine récepteur N-terminal de 124 résidus
qui contient un site de phosphorylation sur lâaspartate 54, le domaine central de 240
rĂ©sidus responsables de lâhydrolyse de lâATP et par consĂ©quent de lâactivation de la
transcription par lâARN-polymĂ©rase-Ï54 et le domaine C-terminal de 90 rĂ©sidus qui
- 15. 16
permet la dimĂ©risation et lâattachement Ă lâADN grĂące Ă un motif HTH. Sous sa
forme inactive, NtrC est un dimĂšre incapable dâutiliser lâĂ©nergie de lâATP. Lorsque
lâaspartate 54 est phosphorylĂ©e, NtrC forme un anneau de six sous-unitĂ©s possĂ©dant
une activitĂ© ATPase (Revue par Rombel et al., 1998). Cet activateur est membre dâun
systÚme de régulation à deux composantes, type de voie de transduction du signal le
plus rĂ©pandu chez les bactĂ©ries. Câest NtrB (Nitrogen Regulatory Protein B), une
histidine kinase, qui fournit un groupement phosphoryl Ă NtrC. Ă souligner, NtrC
catalyse sa propre phosphorylation et peut aussi recevoir le groupement phosphoryl
dâune molĂ©cule centrale dans le mĂ©tabolisme du carbone, lâacĂ©tyl phosphate (Feng et
al., 1992; Keener et Kustu, 1988). Protéine cytoplasmique de 39 kDa sous forme
dâhomodimĂšre in vivo, NtrB possĂšde trois domaines: le domaine N-terminal
contenant un motif PAS impliquĂ© chez dâautres protĂ©ines dans lâattachement dâun
ligand ou dans des interactions intra- et intermoléculaires, le domaine central siÚge de
la dimérisation et possédant une légÚre activité phosphatase et le domaine C-terminal
regroupant les sites dâattachement pour lâATP et la protĂ©ine PII (GlnB). Avant de
donner un groupement phosphoryl Ă NtrC, NtrB doit sâautophosphorylĂ© sur le rĂ©sidu
histidine 139 situé dans le domaine central. Pour ce faire, chaque sous-unité du
dimĂšre hydrolyse une molĂ©cule dâATP et phosphoryle lâautre sous-unitĂ© (Ninfa et al.,
1993). Deux mĂ©canismes se combinent lorsquâil sâagit dâenlever le groupement
phosphoryl attachĂ© Ă lâaspartate 54 de NtrC : une activitĂ© lente autophosphatase de
NtrC et une augmentation de la déphosphorylation induite par le complexe NtrB-PII
(Keener et Kustu, 1988). La nature exacte du second phénomÚne reste à élucider.
Sâagit-il dâune activitĂ© phosphatase du complexe NtrB-PII ou encore dâun effet
amplificateur sur lâactivitĂ© phosphatase de NtrC?
Lâexpression de lâopĂ©ron glnALG dâEscherichia coli Ă partir du promoteur
Ï70-dĂ©pendant glnAp1 est inhibĂ©e par NtrC-P (Reitzer et Magasanik, 1985). Au
contraire, NtrC-P active la transcription Ă partir du promoteur fort Ï54-dĂ©pendant
glnAp2. Par rapport Ă la premiĂšre base de la sĂ©quence codante, NtrC-P sâattache Ă
cinq endroits dans la région promoteur: -140, -108, -90, -68 et -45 (voir figure 5). Les
éléments amplificateurs en cis situés aux positions -140 et -108 ont une affinité
- 16. 17
Ă©levĂ©e pour NtrC-P et sont responsables de lâeffet bĂ©nĂ©fique de lâactivateur sur
lâexpression de glnALG. Par contre, ils ne sont pas essentiels pour que NtrC-P
entraĂźne lâouverture du complexe fermĂ© promoteur-ARN polymĂ©rase-Ï54. Lorsque
prĂ©sent en grande concentration in vitro, un mutant NtrC-P incapable de sâattacher Ă
lâADN peut quand mĂȘme interagir avec lâARN polymĂ©rase-Ï54 et initier la
transcription (Porter et al., 1993). Les trois éléments -90, -68 et -45 ont une affinité
faible pour NtrC-P. Deux de ces trois éléments (-90 et -68) sont responsables de
lâinhibition de la transcription de glnALG lorsque la concentration en NtrC-P est
Ă©levĂ©e (Atkinson et al., 2002). -90 et -68 fixent le seuil supĂ©rieur de lâexpression de
la glutamine synthĂ©tase en conditions limitantes pour lâazote. La prĂ©sence de copies
de NtrC-P attachĂ©es aux positions -90, -68 et peut-ĂȘtre -45 rĂ©duirait la flexibilitĂ© de
lâADN et empĂȘcherait la formation dâune boucle permettant un contact entre les
dimĂšres NtrC-P situĂ©s aux positions -140 et -108 et le facteur Ï54. La transcription Ă
partir du promoteur Ï70-dĂ©pendant glnLp est rĂ©primĂ©e par NtrC-P (Ueno-Nishio et al.,
1984). Lorsque le milieu contient du NH4+, glnLp et glnAp1 permettent juste assez de
transcription de NtrBC pour assurer lâactivation rapide de glnALG aprĂšs lâĂ©puisement
de la source dâazote.
NtrC-P rĂ©gule aussi lâexpression des opĂ©rons glnBA des bactĂ©ries pourpres
non-sulfureuses. NtrC-P active la transcription de glnBA dâAzospirillum brasilense Ă
partir du promoteur Ï54-dĂ©pendant glnBp2 et inhibe la transcription Ă partir du
promoteur Ï70-dĂ©pendant glnBp1. Lâexpression de glnA seul Ă partir de glnAp est
indépendante de NtrC-P (Huergo et al., 2003). Chez Rhodobacter capsulatus, un
phĂ©nomĂšne peu frĂ©quent survient: lâactivation dâun promoteur fort indĂ©pendant de
Ï54 par NtrC-P (glnBp2). Le promoteur faible glnBp1 de cette bactĂ©rie est rĂ©primĂ© par
NtrC-P. Le systĂšme NtrBC de ces deux espĂšces est encodĂ© sur lâopĂ©ron nifR3ntrBC.
NifR3 est une protéine de fonction inconnue présentant une grande similarité avec le
cadre de lecture ouvert YhdG dâEscherichia coli co-transcrit avec le rĂ©gulateur Fis
(Foster-Hartnett et al., 1993). Lâexpression de nifR3ntrBC dâAzospirillum brasilense
est inhibée par NtrC-P (Machado et al., 1995). Au contraire, chez Rhodobacter
capsulatus, la transcription de nifR3ntrBC est constitutive malgré la présence de deux
- 17. 18
sites dâattachement de NtrC-P aux positions +1 et -81. En y regardant de plus prĂȘt,
Cullen et al. (1998) se sont aperçus que la synthÚse de la protéine NifR3 est réduite
40 fois par lâinactivation de ntrC et augmentĂ©e 5 fois en absence de NH4+ dans le
milieu. Ces deux situations nâont pas dâimpact sur la concentration de NtrC. Puisque
la stabilitĂ© et la quantitĂ© dâARNm NifR3 sont similaires chez la souche sauvage et
chez le mutant ntrC, Cullen et al. estiment que NtrC-P sâattacherait aux Ă©lĂ©ments
amplificateurs +1 et -81 et stimulerait la traduction de NifR3. Ă la fois chez
Azospirillum brasilense et Rhodobacter capsulatus, un autre systĂšme de rĂ©gulation Ă
deux composantes impliquĂ© dans le mĂ©tabolisme de lâazote est encodĂ© par lâopĂ©ron
ntrYX situé en aval de nifR3ntrBC. NtrY serait une histidine kinase qui au contraire
de NtrB, possĂšderait une extension N-terminale sâinsĂ©rant dans la membrane. NtrX
dâAzospirillum brasilense ressemble Ă NtrC et dĂ©veloppe une activitĂ© ATPase aprĂšs
une phosphorylation in vitro par le carbamyl phosphate (Assumpçao et al., 2007).
Chez Rhodobacter capsulatus, NtrC est absolument essentielle pour la croissance
dans un milieu déficient en azote fixé (Kutsche et al., 1996). La comparaison des
phĂ©notypes de mutants ntrB, ntrY et dâun double-mutant ntrBntrY en absence de
NH4+ Ă rĂ©vĂ©ler que NtrY peut se substituer Ă NtrB en tant que donneur dâun
groupement phosphoryl à NtrC (Drepper et al., 2006). Le modÚle proposé pour
expliquer la transmission dâun signal connexe par ces deux kinases Ă NtrC est que
NtrB sent le niveau intracellulaire dâazote par lâintermĂ©diaire des protĂ©ines PII et que
NtrY, protĂ©ine transmembranaire, sent le niveau extracellulaire dâazote.
1.1.3.4 RĂ©gulation de lâactivitĂ© de NtrB par GlnB et GlnK (PII)
Chez Escherichia coli, les activités kinase et phosphatase de NtrB sont
régulées principalement par GlnB (voir figure 6). Lorsque le ratio glutamine/α-
cĂ©toglutarate (Gln/αCG) intracellulaire est Ă©levĂ©, GlnB sâattache au domaine C-
terminal de NtrB, inhibe lâactivitĂ© kinase et stimule lâactivitĂ© phosphatase (Revue par
Leigh et Dodsworth, 2007). Le ratio Gln/αCG est un indicateur de la qualité et de la
quantitĂ© des sources de carbone et dâazote disponibles. GlnB est une protĂ©ine de ~12
kDa organisĂ©e en homotrimĂšre contenant deux hĂ©lices α et six feuillets ÎČ (voir figure
- 18. 19
7). Les boucles T, B et C se dégagent de la structure de la protéine (Carr et al., 1996).
Un ratio Gln/αCG faible favorise lâuridylylation de la tyrosine 51 situĂ©e dans lâapex
de la boucle T par GlnD. Cette enzyme, sur laquelle nous reviendrons dans la section
1.1.3.8, sent directement le niveau intracellulaire de glutamine. Lorsque celui-ci
augmente, GlnD enlĂšve par hydrolyse lâUMP liĂ© Ă GlnB (Jiang et al., 1998A).
Puisquâil sâagit dâun trimĂšre, GlnB peut adopter quatre degrĂ©s dâuridylylation
GlnB-0UMP, GlnB-1UMP, GlnB-2UMP et GlnB-3UMP. Plus le niveau
dâuridylylation est Ă©levĂ©, moins GlnB a la capacitĂ© dâinhiber la phosporylation de
NtrC par NtrB (Atkinson et al., 1994). Deux effecteurs, lâATP et lâαCG se lient
directement Ă GlnB. Avant que lâαCG puisse sâattacher Ă GlnB, lâATP doit dĂ©jĂ ĂȘtre
présent à la surface de la protéine (Kamberov et al., 1995). à des concentrations
physiologiques dâATP, il y a une molĂ©cule dâαCG par trimĂšre de GlnB. La prĂ©sence
de cette molĂ©cule inhibe lâoccupation des deux autres sites dâattachement par lâαCG.
En effet, lâaffinitĂ© du trimĂšre GlnB pour la deuxiĂšme et la troisiĂšme molĂ©cule dâαCG
est 30 à 40 fois moins élevée que pour la premiÚre (Jiang et al., 1998A). La
cristallisation de GlnK dâEscherichia coli, un homologue identique Ă GlnB Ă 67 %, a
montrĂ© que lâATP sâinsĂšre dans un vestibule formĂ© par la boucle B et la base de la
boucle T dâune sous-unitĂ© et la boucle C de la sous-unitĂ© adjacente (Xu et al., 1998).
Lâanalyse mutationnelle de ce vestibule chez GlnB laisse croire quâil est aussi
impliquĂ© dans lâattachement de lâαCG (Jiang et al., 1997). Sous sa forme uridylylĂ©e,
GlnB est incapable de former un complexe avec NtrB (Atkinson et al., 1994).
Lâintroduction de mutations dans la boucle T confirme son importance dans
lâinteraction de GlnB avec NtrB et GlnD (Jiang et al., 1997). La somme de ces
observations suggÚre que les résidus UMP bloquent le contact de la boucle T de
GlnB avec NtrB. La prĂ©sence dâune seule molĂ©cule dâαCG Ă la surface de GlnB
favorise la rĂ©gulation de NtrB. Lâattachement de deux αCG supplĂ©mentaires
empĂȘche GlnB de se lier Ă NtrB, et ce mĂȘme si la protĂ©ine PII est exempte de
groupement uridylyl (Revue par Ninfa et Atkinson, 2000). La structure cristal de
GlnK de lâarchaea Methanocaldococcus jannaschii en prĂ©sence dâATP et dâαCG
donne des indices quant au rĂŽle de ces effecteurs dans lâinteraction des protĂ©ines PII
- 19. 20
avec leurs partenaires. En effet, lâattachement de Mg-ATP dans le vestibule cause la
compaction de la boucle T. Ce changement de conformation génÚre un site
dâattachement pour lâαCG dans lâapex de la boucle T (Yildiz et al., 2007). La
prĂ©sence dâαCG, une molĂ©cule chargĂ©e nĂ©gativement Ă cette position, changerait les
propriĂ©tĂ©s de lâinterface GlnK-protĂ©ine partenaire et provoquerait une rĂ©pulsion
Ă©lectrostatique. GlnK de Methanocaldococcus jannaschii ne subit pas de
modification covalente lorsque le ratio Gln/αCG diminue. Dans ce cas, lâαCG fait le
mĂȘme travail que le groupement uridylyl chargĂ© nĂ©gativement de GlnB
dâEscherichia coli. Il est donc possible que lâattachement dâATP et dâαCG Ă GlnB ou
Ă dâautres protĂ©ines PII bactĂ©riennes altĂšre lâarrangement de la boucle T et prĂ©vienne
lâinteraction avec des partenaires protĂ©iques dans la rĂ©gulation du mĂ©tabolisme de
lâazote.
Figure 6. RĂŽle de GlnB dâEscherichia coli dans lâexpression et lâactivitĂ© de la
glutamine synthétase. Légende: bleu = environnement riche en azote fixé;
rouge = environnement pauvre en azote fixé; ligne pleine = modifications
posttraductionnelles des protéines; ligne pointillée = rÎles des effecteurs et de
GlnB; flÚche = effets positifs des effecteurs et de GlnB; trait = effets négatifs
des effecteurs et de GlnB. (Figure tirée de Leigh et Dodsworth, 2007).
- 20. 21
Figure 7. Structure du trimÚre PII de Synechococcus elongatus représentative de
la famille GlnB-K. LĂ©gende: vert = hĂ©lice α; jaune = feuillet ÎČ; Bx = boucle
B; Cx = boucle C; Tx = boucle T; rouge = ions nickel et sulfate présents dans
le tampon de cristallisation mais absents de la structure de la protéine native.
(Figure tirée de Leigh et Dodsworth, 2007).
Un systĂšme levure Ă deux hybrides a permis dâĂ©tablir que GlnK, la deuxiĂšme
protĂ©ine PII dâEscherichia coli, interagit aussi avec NtrB (Salinas et Contreras,
2003). Le mutant âglnK continue Ă exprimer les gĂšnes Ntr 16H aprĂšs le transfert
dans un milieu pauvre en azote au lieu de 4H pour la souche sauvage. Lorsquâune
source dâazote devient disponible aprĂšs plus de 10H de croissance dans le milieu
pauvre, les cellules âglnK sont incapables de rĂ©primer la transcription Ă partir des
promoteurs NtrC-dépendants (Blauwkamp et Ninfa, 2002). Deux raisons expliquent
ce phĂ©notype. Tout comme GlnB, la protĂ©ine GlnK purifiĂ©e stimule lâactivitĂ©
phosphatase de NtrB in vitro (Atkinson et Ninfa, 1999). De plus, les deux protéines
PII peuvent ĂȘtre sĂ©questrĂ©es Ă la membrane cytoplasmique par AmtB suite Ă un choc
NH4+. Dans la souche sauvage en absence dâazote, il y a une stoechiomĂ©trie de 1:1
entre GlnK et AmtB et de 500:1 entre GlnK et GlnB (Javelle et al., 2004). La
séquestration de GlnB par AmtB est détectable par Western Blot seulement dans une
souche âglnK. Ce faisant, il est probable que dans la souche sauvage, GlnB
interagisse trĂšs peu ou pas du tout avec AmtB. En absence de GlnK, GlnB se retrouve
accrochĂ©e en trop grande quantitĂ© Ă AmtB et ne peut stimuler efficacement lâactivitĂ©
phosphatase de NtrB située dans le cytoplasme (Blauwkamp et Ninfa et al., 2003).
- 21. 22
glnB dâEscherichia coli est un gĂšne monocistronique transcrit Ă partir de trois
promoteurs Ï70-dĂ©pendants situĂ©s aux positions -33 (glnBp1), -95 (glnBp2) et -118
(glnBp3). ConsidĂ©rĂ©e gĂ©nĂ©ralement comme constitutive, lâexpression de glnB est
rĂ©duite deux fois par un rĂ©gulateur sâattachant autour de la position -44, PurR (He et
al., 1993). Ce répresseur homodimérique de la famille LacI contient un motif HTH
dâancrage Ă lâADN dans sa partie N-terminale et un site dâattachement pour un co-
rĂ©presseur, la guanine ou lâhypoxanthine, dans sa partie C-terminale. Par contre,
PurR nâa aucun effet sur la synthĂšse de la glutamine par GlnA en conditions
limitantes ou non pour lâazote. Lâhomologue de GlnB, GlnK est encodĂ©e par lâopĂ©ron
glnKamtB. AmtB est un transporteur de NH4+ homotrimérique de ~45 kDa qui sera
lâobjet de la deuxiĂšme partie de cette revue de littĂ©rature. glnKamtB est transcrit Ă
partir dâun promoteur Ï54-dĂ©pendant activĂ© par NtrC et GadX. Comparativement Ă
glnAp2, glnKp nécessite une concentration de NtrC-P beaucoup plus élevée pour son
activation. Ă cause de cela et de lâexpression constitutive de GlnB, GlnK a un rĂŽle
dans la rĂ©gulation de lâexpression des gĂšnes Ntr plus loin dans le temps par rapport
au début de la carence en azote que GlnB (Revue par Ninfa et Atkinson, 2000). Tout
comme GadE, GadX rĂ©gule lâexpression de gĂšnes impliquĂ©s dans un systĂšme de
rĂ©sistance Ă lâacide basĂ© sur la dĂ©carboxylation du glutamate (Tramonti et al., 2002).
GadX est une protéine de la famille AraC/XylS de ~31 kDa ayant la capacité de se
dimĂ©riser in vivo avec un motif HTH dâattachement Ă lâADN situĂ© dans sa partie C-
terminale.
1.1.3.5 Autres régulateurs de la transcription de glnALG
Le promoteur fort Ï54-dĂ©pendant glnAp2 est activĂ© 1.4 fois par Fis (Factor for
Inversion Stimulation), un régulateur global du métabolisme bactérien. Fis, la
protéine la plus abondante dans la chromatine durant la phase exponentielle, joue un
rĂŽle dans lâadaptation de la cellule Ă des conditions permettant une croissance rapide.
Fis est un homodimĂšre de ~22 kDa possĂ©dant un motif dâattachement Ă lâADN HTH
en C-terminal. Cet activateur se fixe autour de la position -55 en amont du promoteur
glnAp2 (Huo et al., 2006). Lâintroduction dâune courbure dans lâADN par Fis entre
- 22. 23
les éléments amplificateurs ayant une affinité élevée pour NtrC-P et le promoteur est
responsable de cette lĂ©gĂšre augmentation de lâexpression. Lorsque des bactĂ©ries en
phase stationnaire sont inoculĂ©es Ă nouveau dans un milieu riche, Fis passe de 100 Ă
50000 copies par cellules avant la premiĂšre division (Ball et al., 1992). Ceci semble
indiquĂ© que la transcription de glnA est positivement rĂ©gulĂ©e par lâentrĂ©e de la culture
bactérienne dans la phase exponentielle.
En plus de GdhA, CRP rĂ©duit aussi quatre fois lâexpression de la glutamine
synthĂ©tase en combinant deux effets contraires. CRP est requise pour lâactivation du
promoteur faible Ï70-dĂ©pendant glnAp1 et rĂ©prime 21 fois la transcription Ă partir de
glnAp2 (Tian et al., 2001). Pour établir ce taux de répression, des mutants cya
cultivés dans un milieu déficient en azote avec du glycérol comme source de carbone
ont Ă©tĂ© exposĂ©s ou non Ă du cAMP. CRP sâattache autour de la position -70 en amont
de glnAp1 (Reitzer et Magasanik, 1985). Deux mécanismes sont impliqués dans
lâinhibition de glnAp2 par CRP. In vitro, CRP sâattache autour de la position -51 en
amont de glnAp2 et rĂ©duit 2 fois lâexpression de GlnA en introduisant dans lâADN
une courbure empĂȘchant NtrC dâapprocher efficacement les sites amplificateurs de la
rĂ©gion promoteur (Mao et al., 2007). Lâajout de cAMP exogĂšne augmente trois fois
lâexpression de lâopĂ©ron glnHPQ. Ces trois gĂšnes codent pour un systĂšme ABC (Atp-
Binding Cassette) haute-affinité de transport de la glutamine. GlnH est une protéine
périplasmique responsable de la capture de la glutamine et de sa livraison aux autres
sous-unitĂ©s du systĂšme ABC. Lâhydrolyse de lâATP qui fournit lâĂ©nergie nĂ©cessaire
au transport unidirectionnel de la glutamine est effectuée par GlnQ. GlnP est la
protĂ©ine transmembranaire permettant le passage de la glutamine. Lâaugmentation de
lâexpression de GlnHPQ accentue lâimportation de la glutamine et par consĂ©quent, la
déuridylylation des protéines PII par GlnD. Les interactions entre CRP et le systÚme
PII-Ntr assurent lâintĂ©gration de signaux provenant du mĂ©tabolisme du carbone dans
la rĂ©gulation de lâassimilation de lâazote (Maheswaran et Forchhammer, 2003; Mao
et al., 2007).
1.1.3.6 La régulation posttraductionnelle de la glutamine synthétase
- 23. 24
LâactivitĂ© de la glutamine synthĂ©tase purifiĂ©e est inhibĂ©e partiellement par
neuf mĂ©tabolites: la sĂ©rine, lâalanine, la glycine, lâAMP, le CTP, le tryptophane,
lâhistidine, le carbamyl phosphate et la glucosamine-6-phosphate. Lorsquâelles sont
combinĂ©es, ces molĂ©cules rĂ©duisent presque Ă nĂ©ant lâactivitĂ© de la glutamine
synthĂ©tase. Câest ce que Woolfolk et Stadtman (1967) appelle lâinhibition rĂ©troactive
cumulative. La glycine, la serine et lâalanine occupent le site dâattachement du
glutamate de la glutamine synthétase de Salmonella typhimurium (Liaw et al., 1993).
Ces quatre acides aminĂ©s sâattachent Ă GlnA par lâentremise de la chaĂźne principale,
+
NH3-CH-COO-, quâils ont en commun. CTP et AMP sâinstallent dans le site
dâattachement de lâATP (Liaw et al., 1994). Lâinhibition rĂ©troactive cumulative
rĂ©gule la fonction anabolique de GlnA. Câest-Ă -dire que ce mode de rĂ©pression agit
dans des conditions oĂč GdhA est responsable de lâassimilation du NH3 et oĂč GlnA
produit la glutamine essentielle Ă la synthĂšse des composantes cellulaires (Revue par
Reitzer, 2003).
LâAMP participe principalement Ă un systĂšme de rĂ©gulation de lâactivitĂ©
assimilatoire du NH3 de GlnA par adénylylation réversible covalente. Chacune des 12
sous-unitĂ©s de GlnA peut ĂȘtre adĂ©nylylĂ©e sur la tyrosine 397 lorsque le ratio Gln/
αCG est Ă©levĂ©. Lâaddition dâun rĂ©sidu AMP Ă une sous-unitĂ© rĂ©sulte en son
inactivation et augmente la susceptibilitĂ© des autres sous-unitĂ©s Ă lâinhibition
rĂ©troactive cumulative (Revue par Stadtman, 1990). LâintĂ©gration des signaux
carbone et azote dans la régulation de GlnA par la combinaison des deux modes
rĂ©gulateurs principaux, lâadĂ©nylylation et lâactivation de la transcription par NtrC-P,
engendre une variété de situations possibles. Lorsque la source de carbone est de
qualité (Ex.: glucose) et que le milieu est pauvre en azote, la concentration de
glutamine synthĂ©tase dĂ©adĂ©nylylĂ©e dans la cellule est Ă©levĂ©e. Lâajout dâazote entraĂźne
une rĂ©duction du nombre de copies intracellulaires de GlnA et lâadĂ©nylylation en
masse des sous-unités. Quand la source de carbone est de moins bonne qualité (Ex.:
glycĂ©rol), la dĂ©adĂ©nylylation et lâactivation de la transcription de GlnA surviennent
seulement lorsque le manque dâazote est assez sĂ©vĂšre pour limiter la croissance.
- 24. 25
Lâactivation transcriptionnelle et post-traductionnelle de GlnA est aussi induite par le
remplacement dâune source de carbone de mauvaise qualitĂ© par une source de
carbone de bonne qualitĂ© indĂ©pendamment dâune altĂ©ration dans la disponibilitĂ© de
lâazote (Maheswaran et Forchhammer, 2003).
1.1.3.7 LâadĂ©nylyltransfĂ©rase (GlnE)
LâadĂ©nylylation et la dĂ©adĂ©nylylation de GlnA sont catalysĂ©es par la mĂȘme
adĂ©nylyltransfĂ©rase (GlnE). Cette enzyme est encodĂ©e par lâopĂ©ron ygiFglnE. Le
gÚne ygiF code pour une adénylate cyclase potentielle. Quoique la région promoteur
de cet opéron soit peu caractérisée, ygiFglnE est exprimé de façon constitutive
indĂ©pendamment du niveau dâazote fixĂ© (Van Heeswijk et al., 1993). ProtĂ©ine
cytoplasmique de ~108 kDa, GlnE serait composée de trois domaines et de deux
séquences de liaison: le domaine de déadénylylation N-terminal (AT-N) (acides
aminées 1-440), le domaine central de régulation (R) (463-606), le domaine
dâadĂ©nylylation C-terminal (AT-C) (628-946) et les deux sĂ©quences de liaison Q1 et
Q2 (respectivement les résidus 441 à 462 et 607 à 627) (Clancy et al., 2007). AT-N et
AT-C contiennent chacun un motif ÎČ-polymĂ©rase distinctif des
nucléotidyltransférases. Ce site comprend une boucle riche en glycine suivie par une
paire dâaspartates participant Ă la chĂ©lation de deux Mg2+. Ces cations positionnent le
substrat et stabilisent les Ă©tats transitionnels du phosphate pentavalent. AT-N catalyse
la phosphorolyse de GlnA-AMP et produit une molĂ©cule dâADP en consommant un
phosphate (Anderson et Stadtman, 1970). AT-C utilise un ATP et libĂšre un
pyrophosphate pour adénylyler GlnA (Shapiro et Stadtman, 1968).
GlnB, GlnB-UMP et la glutamine rĂ©gule lâactivitĂ© de GlnE en sây attachant
(voir figure 6). GlnK peut aussi jouer ce rĂŽle mais avec beaucoup moins dâefficacitĂ©
que GlnB (Revue par Ninfa et Atkinson, 2000). GlnB et la glutamine stimulent
lâadĂ©nylylation de GlnA et inhibent la dĂ©adĂ©nylylation. Ces effecteurs agissent en
synergie. Lâattachement de trois molĂ©cules dâATP et dâune molĂ©cule dâαCG Ă GlnB
accentue sa capacitĂ© Ă activer lâadĂ©nylylation. La saturation de lâhomotrimĂšre par
- 25. 26
trois αCG empĂȘche la stimulation de lâadĂ©nylylation par GlnB. GlnB-UMP activent
la dĂ©adĂ©nylylation et inhibent lâadĂ©nylylation. Ces deux actions de GlnB-UMP
requiÚrent une concentration élevée de αCG (Jiang et al., 1998B). La glutamine se lie
à un site inconnu localisé dans le domaine AT-C (Jiang et al., 2007). Selon Clancy et
al. (2007), la région de GlnE interagissant avec GlnB et GlnB-UMP serait comprise
entre les acides aminés 466 et 507 dans le domaine R. Ce résultat a été obtenu en
ajoutant des anticorps monoclonaux de souris bloquant lâaccĂšs Ă diffĂ©rentes rĂ©gions
de GlnE Ă des rĂ©actions in vitro dâadĂ©nylylation/dĂ©adĂ©nylyation en prĂ©sence de
glutamine, de GlnB et de GlnB-UMP. Il reste Ă dĂ©terminer lâidentitĂ© du site exact
dâattachement et si câest le mĂȘme ou non pour GlnB et GlnB-UMP. Chez la bactĂ©rie
pourpre non-sulfureuse fixatrice dâazote Rhodospirillum rubrum, la rĂ©gulation de
lâactivitĂ© de GlnE exhibe des caractĂ©ristiques diffĂ©rentes par rapport Ă ce qui est
observĂ© chez Escherichia coli. La glutamine nâa aucun effet sur lâadĂ©nylylation et la
déadénylylation de GlnA par GlnE in vitro. Les trois protéines PII (GlnB, GlnK,
GlnJ) de R. rubrum stimulent lâadĂ©nylylation mais nâinhibent pas la dĂ©adĂ©nylylation.
Dans ce cas, il semblerait que lâαCG joue un rĂŽle plus important dans la rĂ©gulation
de GlnE et par consĂ©quent dans lâactivitĂ© de la glutamine synthĂ©tase (Jonsson et al.,
2007).
La capacitĂ© de GlnK et de GlnB dâEscherichia coli de former des
hĂ©tĂ©rotrimĂšres in vivo est un autre phĂ©nomĂšne dont il faut tenir compte lorsque lâon
Ă©tudie le rĂŽle de ces protĂ©ines dans lâassimilation de lâazote (Forchhammer et al.,
1999; Van Heeswijk et al., 2000). Cette interaction entre GlnB et GlnK augmente
considĂ©rablement le nombre dâespĂšces possibles de protĂ©ines PII dans la bactĂ©rie:
GlnB3, GlnB2GlnK, GlnBGlnK2, GlnK3, GlnB-UMP3, GlnB-UMP2GlnK-UMP,
GlnB-UMPGlnK-UMP2, GlnK-UMP3 et toutes les espÚces partiellement urydylylées.
JusquâĂ maintenant, il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© quâun hĂ©tĂ©rotrimĂšre GlnB-GlnK uridylylĂ© est
capable de stimuler la déadénylylation de la glutamine synthétase in vitro mais avec
moins dâefficacitĂ© que lâhomotrimĂšre GlnB uridylylĂ©. Ce niveau diffĂ©rent dâactivitĂ© Ă
mener Ă lâhypothĂšse que la formation de complexes GlnB-GlnK raffine davantage la
- 26. 27
transduction du signal dans le cadre, entre autre, de la rĂ©gulation de lâactivitĂ© de
GlnA (Forchhammer et al., 1999; Van Heeswijk et al., 2000).
1.1.3.8 LâuridylyltransfĂ©rase (GlnD)
Tel que mentionné furtivement dans la section 1.1.3.4, GlnD fixe et enlÚve un
résidu uridylyl à la tyrosine 51 des protéines PII. Lorsque la cellule contient peu de
glutamine, GlnD catalyse la formation de PII-UMP et de pyrophosphate Ă partir de
PII et dâUTP. La protĂ©ine PII sâattache en premier Ă GlnD suivie de lâUTP. AprĂšs la
rĂ©action, le pyrophosphate est relĂąchĂ© avant PII-UMP. Lâaugmentation du niveau
intracellulaire de glutamine entraĂźne lâhydrolyse de PII-UMP (voir figure 8). Dans ce
cas, UMP et PII ne sont pas libérés dans un ordre précis par GlnD. Dans des
conditions physiologiques, le cation Mg2+ est essentiel pour les deux activités de
GlnD. Les molĂ©cules dâαCG et dâATP liĂ©es aux protĂ©ines PII activent les deux types
de rĂ©action in vitro. La glutamine rĂ©prime lâuridylylation et stimule la dĂ©uridylylation
simultanĂ©ment (Jiang et al., 1998A). Chez Escherichia coli, lâuridylylation de GlnK
est aussi efficace que celle de GlnB. Par contre, la déuridylylation de GlnK est 10
fois plus lente (Atkinson et Ninfa, 1999).
Figure 8. Uridylylation/déuridylylation des protéines PII. Légende: UR/Utase =
GlnD; GLN = glutamine; 2KG = α-cétoglutarate; Encadré = Effet répresseur.
(Figure tirée de Jiang et al., 1998C).
GlnD est encodĂ©e sur lâopĂ©ron mapglnDdapD et transcrit Ă partir dâun
promoteur peu caractĂ©risĂ© indĂ©pendant du facteur Ï54 et du niveau dâazote fixĂ© (Van
Heeswijk et al., 1993). Map est une méthionine aminopeptidase qui enlÚve la
mĂ©thionine prĂ©sente Ă lâextrĂ©mitĂ© N-terminal de toutes les chaĂźnes peptidiques
- 27. 28
synthétisées chez Escherichia coli. Une paire de sous-unités DapD constitue la
tetrahydrodipicolinate succinylase. Impliquée dans la voie métabolique de synthÚse
de la lysine, DapD catalyse la formation de N-succinyl-2-amino-6-ketopimelate Ă
partir du tetrahydrodipicolinate et de succinyl-CoA. GlnD est une enzyme
monomĂšrique de ~102 kDa avec un motif ÎČ-polymĂ©rase en N-terminal entre les
résidus 70 à 169 (domaine NT). Tondervik et al. (2006) ont conduit une recherche
dans des banques de donnĂ©es permettant dâidentifier dâautres domaines potentiels
dans GlnD: un domaine signature présent dans toutes les uridylyltransférase de la
famille GlnD (résidus 191 à 400), un domaine His-Asp (résidus 468 à 602), un
domaine IMP déhydrogénase (résidus 332 à 686) et deux domaines aspartokinase-
chorismate mutase TyrA (ACT). LâidentitĂ© des domaines de GlnD impliquĂ©s dans
lâuridylylation, la dĂ©uridylylation, lâattachement de la glutamine et lâinteraction avec
les protĂ©ines PII nâa pas encore Ă©tĂ© Ă©tablie avec certitude. Les Ă©tudes cinĂ©tiques
menĂ©es par Jiang et al. (1998A) laissait croire Ă un seul site actif pour lâuridylylation
et la dĂ©uridylylation dans le domaine NT et Ă un seul site dâattachement pour la
glutamine. Lâintroduction de mutations ponctuelles dans le domaine NT va dans le
sens de lâanalyse cinĂ©tique quant Ă une rĂ©gion exclusive responsable des deux
rĂ©actions catalysĂ©es par GlnD (Ninfa et al., 2000). RĂ©cemment, lâobservation quâun
mutant GlnD tronquĂ© (acides aminĂ©s 1 Ă 358) catalyse lâuridylylation des protĂ©ines
PII mais pas la dĂ©urydylylation contredit lâhypothĂšse du site unique. Selon Tondervik
et al. (2006), le site actif pour la dĂ©urydylylation pourrait ĂȘtre contenu dans le
domaine His-Asp que lâon retrouve aussi chez plusieurs enzymes possĂ©dant une
activitĂ© phosphohydrolase. Quant au site dâattachement de la glutamine, il serait situĂ©
dans la région des deux séquences ACT en C-terminal. Présent chez plusieurs
enzymes impliquées dans la régulation du métabolisme des acides aminés, le
domaine ACT est une structure Ă laquelle sâattache une variĂ©tĂ© de ligands.
GlnD de Rhodospirillum rubrum est requise pour lâuridylylation et la
déuridylylation des trois protéines PII: GlnB, GlnJ et GlnK. Cette protéine GlnD
prĂ©sente deux diffĂ©rences majeures par rapport Ă celle que lâon retrouve chez
Escherichia coli. Tout dâabord, la glutamine stimule la dĂ©uridylylation mais nâinhibe
- 28. 29
pas lâuridylylation in vitro. Ensuite, lâαCG rĂ©gule positivement lâuridylylation mais
nâa pas dâeffet sur la dĂ©uridylylation par GlnD (Jonsson et Nordlund, 2007). GlnD
dâAzospirillum brasilense catalyse lâuridylylation de GlnB et de GlnZ. Quoique GlnD
dâA. brasilense soit exprimĂ©e en absence ou en prĂ©sence dâazote fixĂ©, le nombre de
copies de cette enzyme augmente 4 fois lorsque la cellule croĂźt dans des conditions
propices Ă la rĂ©duction du N2. Cette rĂ©gulation positive nâest que partiellement
dépendante du systÚme NtrB/NtrC (Van Dommelen et al., 2002).
1.2 La fixation de lâazote
LâatmosphĂšre terrestre est composĂ©e Ă 78% de N2. La rĂ©duction de lâazote
atmosphérique en NH3 est une réaction essentielle pour la vie sur terre puisque la
majoritĂ© des organismes vivants sont incapables dâutiliser le N2 sous cette forme. Le
triple lien unissant les deux molĂ©cules dâazote, rend le N 2 extrĂȘmement stable et
coĂ»teux Ă©nergĂ©tiquement Ă rĂ©duire. Le N2 peut ĂȘtre modifiĂ© par trois processus: la
foudre, la réduction industrielle et la réduction biologique. La foudre participe à la
fixation de 10 millions de tonnes métriques de N2 par an, la réduction industrielle est
responsable de la fixation de 80 millions de tonnes métriques par an et la réduction
biologique fixe entre 100 et 175 millions de tonnes métriques par an (Burns et Hardy,
1975; Hardy, 1993). LâĂ©nergie libĂ©rĂ©e par la foudre brise le triple lien du N2 et
entraĂźne la formation de nitrate qui plus tard est assimilĂ© par les plantes. Lâindustrie
utilise le procédé de Haber-Bosch pour produire du NH3 à partir du N2 et du H2. Cette
rĂ©action se fait Ă lâaide dâun catalyseur de Fe3+ Ă une pression situĂ©e entre 200 et 400
atm et à une température de 450 à 500 °C. Le procédé Haber-Bosch nécessite
annuellement 1% de toutes les sources dâĂ©nergie mondiales (Smith, 2002). Les
engrais azotĂ©s dĂ©coulant de ce procĂ©dĂ© permettent dâalimenter 40% de la population
totale et coûtent annuellement 20 milliards de dollars US. En contraste, la réduction
biologique du N2 se fait dans des conditions de température et de pression courante
sur terre. JusquâĂ maintenant, la capacitĂ© de fixer lâazote a Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©e seulement
chez des procaryotes.
- 29. 30
1.2.1 La nitrogénase
Lâenzyme responsable de la rĂ©duction de lâazote diatomique en NH3 est la
nitrogénase. La réaction catalysée par la nitrogénase est la suivante : N2 + 8 é- + 8 H+
=> 2 NH3 + H2. Cette rĂ©action est extrĂȘmement coĂ»teuse dâun point de vue
Ă©nergĂ©tique puisquâil faut hydrolyser 2 molĂ©cules dâATP par Ă©lectrons transfĂ©rĂ©s.
Possiblement Ă cause dâun lĂ©ger dĂ©couplage entre le transfert dâĂ©lectrons et
lâhydrolyse dâATP, la consommation finale dâATP nĂ©cessaire pour rĂ©duire une
molécule de N2 se situe entre 20 et 30 ATP (Pelmont, 1993). La nitrogénase étant
inactivĂ©e irrĂ©versiblement par la prĂ©sence dâO2, la production dâune molĂ©cule dâH2
permet lâĂ©limination de lâoxygĂšne de lâenvironnement immĂ©diat de lâenzyme par
oxydation de lâhydrogĂšne diatomique (Revue par Robson et Postgate, 1980). Trois
autres stratĂ©gies on Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©es pour prĂ©venir lâinactivation de lâenzyme par
lâO2 : une activitĂ© respiratoire Ă©levĂ©e pour les microorganismes qui rĂ©duisent le N2 en
aérobie comme Azotobacter, un métabolisme anaérobie ou encore, chez certaines
cyanobactĂ©ries, le dĂ©veloppement de cellules relativement Ă©tanches Ă lâO2, les
hétérocystes. La nitrogénase est un enzyme peu spécifique qui réduit de nombreux
substrats en plus du NH3. LâacĂ©tylĂšne, le cyanure, lâacĂ©tonitrile et lâazoture sont des
exemples parmi dâautres (Revue par Burgess et Lowe, 1996). PrĂ©sente chez certaines
protéobactéries, cyanobactéries, firmicutes, bactéries vertes sulfureuses, spirochÚtes
et archaea, la nitrogénase est construite sur un modÚle présentant relativement peu de
variations. Deux composantes forment la métalloenzyme: la dinitrogénase réductase
(protĂ©ine Fe) et la dinitrogĂ©nase (protĂ©ine FeMo). LâĂ©tude structurale de lâenzyme, en
particulier les diverses techniques de spectroscopie et la cristallographie Ă rayon X, a
Ă©tĂ© effectuĂ©e Ă partir de la nitrogĂ©nase molybdĂšne dâAzotobacter vinelandii.
1.2.1.1 La dinitrogénase réductase
Protéine de 30 à 32 kDa, la dinitrogénase réductase (NifH) est organisée en
homodimÚre contenant un centre [4Fe-4S]-Cys4 à cheval entre les deux sous-unités
(Georgiadis et al., 1992; Hausinger et Howard, 1983) (voir figure 9i et 9ii). Une
- 30. 31
molécule de Mg-ATP peut se lier à chacune des sous-unités de la dinitrogénase
réductase (Revue par Burgess et Lowe, 1996). La principale fonction de cette
protéine est de transférer à la dinitrogénase les électrons nécessaires à la réduction du
N2. De plus, la protĂ©ine Fe est essentielle pour lâinsertion du cofacteur FeMo dans la
dinitrogénase et pour la maturation de cette enzyme (Revue par Burgess et Lowe,
1996; Revue par Peters et al., 1995). La premiĂšre Ă©tape du cycle de transfert des
électrons de la dinitrogénase réductase à la dinitrogénase consiste en la réduction de
la forme oxydée du centre [4Fe-4S]-Cys4 de la protéine Fe (voir figure 9iii). Deux
Mg-ADP sont ensuite relùchés et remplacés par deux Mg-ATP (Thorneley, 1992). La
dinitrogĂ©nase rĂ©ductase forme un complexe avec la dinitrogĂ©nase, lâĂ©lectron est
transféré et les deux Mg-ATP sont hydrolysés. Subséquemment, la forme oxydée de
la protéine Fe se dissocie trÚs lentement de la protéine FeMo. Cette étape limite le
taux dâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase lorsque toutes les composantes de la rĂ©action de
fixation du N2 sont en excÚs (Thorneley et Lowe, 1985). Le cycle est répété huit fois
jusquâĂ la complĂ©tion de la rĂ©action (Revue par Burgess et Lowe, 1996).
1.2.1.2 La dinitrogénase
La dinitrogĂ©nase est un hĂ©tĂ©rotĂ©tramĂšre α2ÎČ2 (voir figure 9i et 9ii).
Respectivement, les protĂ©ine α (NifD) et ÎČ (NifK) ont un poids molĂ©culaire
dâapproximativement 59 et 54 kDa. Le contact entre les paires de protĂ©ines αÎČ se fait
presque exclusivement par lâentremise des protĂ©ines ÎČ. Deux centres P font la
jonction entre les protĂ©ines α et ÎČ (Kim et Rees, 1992). ConstituĂ© de 8 molĂ©cules de
fer et de 6 molĂ©cules de soufre, le centre P reçoit lâĂ©lectron transfĂ©rĂ© Ă partir de la
dinitrogénase réductase (Peters et al., 1997; Revue par Dance, 2007). Site
dâattachement et de rĂ©duction du N2, le cofacteur FeMo est situĂ© dans la sous-unitĂ© α.
Ce cofacteur est constituĂ© dâune molĂ©cule de molybdĂšne, de 7 molĂ©cules de fer, de 9
molĂ©cules de soufre et dâun acide essentiel pour lâactivitĂ© de lâenzyme, lâhomocitrate
(Revue par Burgess et Lowe, 1996; Revue par Dance, 2007; Imperial et al., 1989).
Au centre du cofacteur, lâon retrouve une molĂ©cule dont lâidentitĂ© reste Ă confirmer
(Einsle et al., 2002). La densitĂ© dâĂ©lectrons de cet inconnu laisse prĂ©sumer quâil sâagit
- 31. 32
dâune molĂ©cule de carbone ou dâazote ou encore dâoxygĂšne. En ce qui concerne les
Ă©tapes de la rĂ©duction du substrat au niveau du cofacteur, beaucoup de travail reste Ă
faire. Toutefois, deux intermĂ©diaires, lâhydrazine et le diazĂšne ont Ă©tĂ© identifiĂ©s par
15
spectroscopie N-ENDOR permettant dâesquisser un cycle hypothĂ©tique de la
rĂ©duction du N2 (voir figure 10) (Barney et al., 2005). Le site initial dâattachement du
N2, lâacheminement des Ă©lectrons du centre P au cofacteur FeMo et le mode
dâĂ©vacuation du NH3 sont autant de phĂ©nomĂšnes mĂ©connus qui font actuellement
lâobjet dâinvestigations.
ii
iii
Figure 9. i. Structure de la dinitrogénase (MoFe-protein) et de la dinitrogénase
réductase (Fe-protein). ii. Cofacteur FeMo et centre P de la
dinitrogénase. Légende: noir = Fe et Mo; gris foncé = S; gris pùle = atome
inconnu (X). iii. Circulation des électrons entre la dinitrogénase réductase
et la dinitrogénase. (Figure tirée de Rees et al., 2005).
Figure 10. Intermédiaires dans la réduction du N2 au niveau du cofacteur FeMo.
(Figure tirée de Barney et al., 2007).
- 32. 33
1.2.1.3 Les nitrogénases alternatives
En plus de la nitrogénase molybdÚne décrite dans les deux sections
précédentes, il existe trois nitrogénases alternatives moins communes à travers les
diazothrophes; ces microorganismes capables de réduire le N2. Dans la nitrogénase
vanadium (VnfHDGK), la molĂ©cule de molybdĂšne prĂ©sente au cĆur du cofacteur
FeMo est remplacée par une molécule de vanadium. Cette enzyme est retrouvée,
entre autre, chez le genre Azotobacter et chez les cyanobactéries du genre Anabeana
(Boison et al., 2006; Revue par Rehder, 2000). Au point de vue structurale, la seule
différence majeure entre la protéine MoFe et la protéine VFe est que celle-ci possÚde
deux sous-unitĂ©s ÎŽ (VnfG) supplĂ©mentaires de 13 kDa (Robson et al., 1989). Quant Ă
la nitrogénase fer, son cofacteur FeFe ne contient aucune molécule de molybdÚne ou
de vanadium(Chisnell et al., 1988). Tout comme la dinitrogénase vanadium, la
dinitrogénase Fer possÚde aussi deux sous-unités Ύ (AnfG) de 15 kDa (Pau et al.,
1993). Une combinaison de deux ou de trois de ces nitrogĂ©nases peut ĂȘtre synthĂ©tisĂ©e
par la mĂȘme espĂšce bactĂ©rienne. Par exemple, Azotobacter vinelandii possĂšde ces
trois types de nitrogénases alors que les bactéries pourpres non-sulfureuses
Rhodobacter capsulatus et Rhodospirillum rubrum possÚdent la Mo-nitrogénase et la
Fe-nitrogĂ©nase (Loveless et Bishop, 1999). Dans tous les cas de figure, lâexpression
des nitrogénases Fe et V est inhibée par la présence de molybdÚne dans le milieu de
culture (Revue par Masepohl et al., 2002; Revue par Rehder, 2000). Les
microorganismes pourvus dâune ou de deux nitrogĂ©nases alternatives auraient un
avantage sélectif sur les autres diazotrophes puisqu'ils seraient capables de réduire le
N2 dans un milieu pauvre en molybdĂšne comme un sol acide ou riche en fer
(Pelmont, 1993).
Le systÚme nitrogénase de Streptomyces thermoautotrophicus diffÚre des trois
autres nitrogénases sur plusieurs points. Trois enzymes sont impliquées dans la
réduction du N2 chez cette bactérie : la CO déhydrogénase, la superoxyde
- 33. 34
oxydoréductase et la dinitrogénase FeMo. La CO déhydrogénase oxyde le CO et
gĂ©nĂšre un anion superoxyde Ă partir de lâO2. Ce superoxyde est oxydĂ© Ă son tour par
la superoxyde oxydoréductase qui, ce faisant, libÚre des électrons. Ce dimÚre
composé de sous-unités de 48 kDa agit ensuite comme une dinitrogénase réductase
standard puisquâil fournit des Ă©lectrons Ă la dinitrogĂ©nase FeMo. La dinitrogĂ©nase de
Streptomyces thermoautotrophicus est un hétérotrimÚre constitué de sous-unités de,
respectivement, 18 kDa, 33 kDa et 93 kDa (Ribbe et al., 1997). Pour fonctionner ce
systÚme nitrogénase à besoin de seulement 4 ATP par molécule de N 2 réduite. Autre
caractĂ©ristique surprenante, câest lâoxygĂšne, toxique pour les autres nitrogĂ©nases, qui
sert de transporteur dâĂ©lectrons.
1.2.1.4 Transport des Ă©lectrons jusquâĂ la dinitrogĂ©nase rĂ©ductase
Deux familles de protéines sont impliquées dans le transport des électrons
jusquâĂ la dinitrogĂ©nase rĂ©ductase de la nitrogĂ©nase molybdĂšne: les flavodoxines et
les ferrĂ©doxines. Les flavodoxines sont des protĂ©ines acides dâune longueur variant
entre 140 et 180 acides aminés et contenant un seul groupement prosthétique FMN.
Les ferrĂ©doxines sont des protĂ©ines acides dâune longueur variant entre 50 et 120
acides aminés et contenant 1 ou 2 centres Fe-S. Le cheminement des électrons
jusquâĂ la dinitrogĂ©nase rĂ©ductase varie dâun microorganisme Ă lâautre. Trois
exemples seront donnés dans cette section. Chez Klebsiella pneumoniae, la
flavodoxine NifF est le seul transporteur dâĂ©lectron associĂ© Ă la nitrogĂ©nase. Cette
protéine est réduite par les électrons libérés par la pyruvate-Fd oxydoréductase (NifJ)
lors de la gĂ©nĂ©ration dâacĂ©tyl-coA Ă partir du pyruvate et de la coenzymeA (Nieva-
Gomez et al., 1980; Shah et al., 1983). NifJ est constituée de deux sous-unités de 120
kDa contenant chacune trois groupes Fe-S et un groupement prosthétique thiamine
pyrophosphate. Chez Azotobacter vinelandii, la flavodoxine NifF est le transporteur
dâĂ©lectrons principal (Bennett et al., 1988). Les ferrĂ©doxines FdxA, FdxN, FixFd,
VnfFd et trois autres flavodoxines sont des candidates potentiellement impliquées
dans lâapprovisionnement en Ă©lectrons de la dinitrogĂ©nase rĂ©ductase (Revue par
Saeki, 2004). Lorsque la ferrĂ©doxine FdxN est inactivĂ©e, lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase
- 34. 35
molybdĂšne est rĂ©duite de 60 Ă 65%. Par contre, ce phĂ©notype pourrait ĂȘtre dĂ» Ă un
rĂŽle possible de FdxN dans lâassemblage du cofacteur FeMo (Rodriguez-Quinones et
al., 1993). Dans des conditions ou seulement la nitrogénase vanadium est
fonctionnelle, la ferrĂ©doxine VnfFd est essentielle pour la croissance dâAzotobacter
vinelandii (Raina et al, 1993). Tout comme chez Klebsiella pneumoniae, NifJ fournit
les électrons à la flavodoxine NifF ou aux autres flavodoxines/ferrédoxines.
La bactérie pourpre non-sulfureuse Rhodobacter capsulatus possÚde six
ferrédoxines et une flavodoxine (FdxN, FdxA, FdxB, FdxC, FdxD, FdxE, NifF). De
ce groupe, lâimportance de la ferrĂ©doxine FdxN et de la flavodoxine NifF dans le
transport dâĂ©lectrons jusquâĂ la dinitrogĂ©nase rĂ©ductase a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©e par des
analyses mutationnelles. Lorsque fdxN est muté, la nitrogénase molybdÚne est 20 fois
moins active que dans la souche sauvage. De plus, ce mutant contient 4 fois moins de
nitrogénase molybdÚne. Cette ferrédoxine aurait un rÎle à la fois dans la stabilisation
de la nitrogénase Mo et dans le transport des électrons (Jouanneau et al., 1995). Dans
un milieu limité en fer (formation de ferrédoxine problématique) et sans source
dâazote rĂ©duit, la mutation de nifF empĂȘche Rhodobacter capsulatus de croĂźtre. Dans
un milieu abondant en fer, lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase molybdĂšne dans la souche nifF
est réduite à 55% (Gennaro et al., 1996). FdxN est aussi impliqué dans
lâapprovisionnement en Ă©lectrons de la nitrogĂ©nase fer de Rhodobacter capsulatus
puisque dans un milieu dépourvu de molybdÚne, la souche fdxN croßt trÚs mal
(SchĂŒddekopf et al., 1993).
La pyruvate-Fd oxydoréductase, quoique capable de supporter la réduction du
N2 in vitro par la nitrogĂ©nase molybdĂšne, nâest pas la source dâĂ©lectrons principale de
FdxN ou de NifF chez Rhodobacter capsulatus (Yakunin et Hallenbeck, 1998A). Un
groupe de dix protéines Rnf (RnfA, RnfB, RnfC, RnfD, RnfE, RnfF, RnfG, RnfH,
RnfX, RnfY) pourrait accomplir ce travail. Lâinactivation par mutation de chacun des
gĂšnes rnf, Ă lâexception de rnfH pour lequel la construction dâun mutant reste Ă faire,
empĂȘche la croissance de Rhodobacter capsulatus dans des conditions oĂč la
réduction du N2 est obligatoire (Saeki et al., 1993; Schmehl et al., 1993). Autre
- 35. 36
Ă©vidence de lâimplication de ces protĂ©ines dans le transport dâĂ©lectrons, lorsque
lâopĂ©ron rnfABCDGEH est surexprimĂ©, lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase molybdĂšne in
vivo augmente de 50% Ă 100% mais lâactivitĂ© in vitro et la quantitĂ© de nitrogĂ©nases
molybdÚne dans la cellule demeurent inchangées (Jouanneau et al., 1998). Les
protĂ©ines Rnf dâAzotobacter vinelandii, au contraire, seraient plutĂŽt associĂ©es Ă
lâexpression des protĂ©ines NifHDK de la nitrogĂ©nase molybdĂšne et Ă lâassemblage du
centre [4Fe-4S]-Cys4 de la dinitrogénase réductase (Curatti et al., 2005). Les
protĂ©ines Rnf jouent aussi un rĂŽle dans lâalimentation en Ă©lectrons de la nitrogĂ©nase
fer de Rhodobacter capsulatus puisque dans une souche nifHDK, tous les gĂšnes rnf, Ă
lâexception de rnfB, sont essentiels pour la croissance diazotrophique (Masepohl et
Klipp, 1996; SchĂŒddekopf et al., 1993).
LâhypothĂšse selon laquelle les protĂ©ines Rnf rĂ©duisent FdxN et/ou NifF a pris
naissance suite Ă trois observations. PremiĂšrement, RnfABCDGE forment un
complexe protéique associé à la membrane (Jouanneau et al., 1998). DeuxiÚmement,
la comparaison des séquences en acides aminés a révélé que RnfC possÚde des
rĂ©gions similaires Ă ce que lâon retrouve chez les H+-NADH-quinone oxydorĂ©ductase
(H+-NQR); entre autre des sites dâattachement pour le NADH et le FMN.
TroisiÚmement, les protéines RnfA, RnfD et RnfE ont entre 25% et 40%
dâhomologie avec NqrA, NqrC et NqrF, trois membres du complexe protĂ©ique
membranaire formant la Na+-NADH-quinone oxydoréductase (NqrA, NqrB, NqrC,
NqrD, NqrE, NqrF) (Na+-NQR) de Vibrio alginolyticus (Nakayama et al., 1998). Les
enzymes H+-NQR et Na+-NQR sont respectivement impliquées dans la translocation
à travers la membrane de H+ et de Na+. Donc, il a été proposé que le complexe
protĂ©ique membranaire Rnf pourrait ĂȘtre organisĂ© en deux sous-complexes: lâun
comprenant RnfB et RnfC, ressemblant Ă la H+-NQR et couplant lâoxydation du
NADH Ă la rĂ©duction de FdxN/NifF et lâautre, comprenant RnfADGE, ressemblant Ă
la Na+-NQR et fournissant lâĂ©nergie nĂ©cessaire, par lâentremise dâune force proton
motrice, à la réduction de FdxN/NifF par le NADH (Kumagai et al., 1997).
1.2.1.5 Maturation de la nitrogénase
- 36. 37
La grande majorité des expériences visant à bien comprendre les étapes de la
maturation de la nitrogénase molybdÚne a été effectuée chez Azotobacter vinelandii
et chez Klebsiella pneumoniae. Trois protéines sont essentielles pour la maturation de
la dinitrogénase réductase: NifM, NifS et NifU. NifM est une peptidyl-prolyl
cis/trans isomĂšrase (PPI). Cette enzyme convertit en trans le lien peptidyl-prolyl du
résidu Pro258 et permet le repliement adéquat de la dinitrogénase réductase (Gavini
et al., 2006). NifS est une cystéine désulfurase qui fournit le soufre nécessaire pour
lâassemblage du centre [4Fe-4S]-Cys4 alors que NifU est la chaperone oĂč se fait cette
assemblage (Yuvaniyama et al., 2000; Zheng et al., 1994). La maturation de la
dinitrogĂ©nase FeMo se fait en plusieurs Ă©tapes (voir figure 11). Dâabord, deux paires
de groupes [4Fe-4S] sont insĂ©rĂ©es dans le tĂ©tramĂšre α2ÎČ2 probablement par
lâentremise du couple de protĂ©ines NifS et NifU. La dinitrogĂ©nase rĂ©ductase en
prĂ©sence de Mg-ATP, amorce, par un mĂ©canisme inconnu nâimpliquant pas sa
fonction transport dâĂ©lectrons, la transformation des deux paires de groupes [4Fe-4S]
en deux groupes P et rend accessible le site dâinsertion du cofacteur FeMo (Revue
par Rubio et Ludden, 2005). Ensuite, la protĂ©ine NafY sâattache Ă la dinitrogĂ©nase
immature et participe Ă lâinsertion du cofacteur FeMo. Le rĂŽle exact de NafY dans ce
processus est soit de stabiliser le site dâinsertion labile du cofacteur FeMo ou dâĂȘtre
elle-mĂȘme Ă lâorigine de lâinsertion. SubsĂ©quemment, NafY se dissocie du tĂ©tramĂšre
mature α2ÎČ2. Les chaperones GroEL sont requises pour lâexpression dâune
nitrogĂ©nase FeMo fonctionnelle. Ces protĂ©ines sâassocient Ă NifHDK et serait
nĂ©cessaires pour le repliement correct de lâactivateur NifA. Le rĂŽle dĂ©taillĂ© de NifA
sera décrit dans la section 1.2.2.3. Les chaperones GroEL sont aussi impliquées, soit
directement ou via la maturation de dâautres protĂ©ines de maturation, dans
lâactivation du cofacteur FeMo (Ribbe et Burgess, 2001).
- 37. 38
Figure 11. Maturation de la dinitrogénase. Légende: ovale = α (NifD); rectangle
= ÎČ (NifK); octogone = NafY. Ătape 1: chargement initial du tĂ©tramĂšre α2ÎČ2
avec 2 paires de centres [4Fe-4S]. Ătape 2: formation des centres P et
prĂ©paration du site dâinsertion du cofacteur FeMo. Ătape 3. Attachement de
NafY et stabilisation du site dâinsertion du cofacteur FeMo. Ătape 4. Insertion
du cofacteur FeMo, dissociation de NafY et génération de la dinitrogénase
mature. (Figure modifiée à partir de Rubio et Ludden, 2005).
Lâassemblage du cofacteur FeMo se fait avant lâinsertion dans la dinitrogĂ©nase. La
protĂ©ine NifB chaperonne lâassemblage du cofacteur NifB, un groupe Fe-S
précurseur du cofacteur FeMo (Shah et al., 1994). Le cofacteur NifB est ensuite pris
en charge et transformé par le couple de protéines NifEN (Revue par Rubio et
Ludden, 2005). NifX sâattache au cofacteur NifB et contrĂŽlerait le flux de cofacteurs
NifB dans la voie de synthĂšse du cofacteur FeMo (Hernandez et al., 2007).
SubsĂ©quemment, la nitrogĂ©nase rĂ©ductase catalyse lâinsertion Mg-ATP-dĂ©pendante
du molybdĂšne et de lâhomocitrate (synthĂ©tisĂ© par NifV) dans le cofacteur FeMo (Hu
et al., 2006). Le cofacteur FeMo mature sâattache ensuite Ă la protĂ©ine NafY.
1.2.1.6 Diversité des organismes réducteurs de N2
Le groupe des diazotrophes est restreint en nombre mais étalé à travers
plusieurs familles de bactĂ©ries et dâarchaea (voir tableau I). Lâidentification de ces
microorganismes dans lâenvironnement rĂ©sulte de la dĂ©tection du gĂšne nifH ou
quelquefois du gĂšne nifD (Zehr et McReynolds, 1989; Ueda et al., 1995). Pour ce
faire, une sĂ©rie de techniques de biologie molĂ©culaire est utilisĂ©e: lâextraction de
lâADN ou des ARNm provenant dâĂ©chantillons environnementaux, la PCR, la RT-
PCR, le clonage, le séquençage, les micropuces ADN, etc. Une similarité élevée entre
les gÚnes nifH des différentes espÚces réductrices laisse croire que la nitrogénase
molybdĂšne aurait atteint sa forme actuelle tĂŽt dans lâĂ©volution et se serait propagĂ©e
chez les diazotrophes Ă partir dâun ancĂȘtre commun (Postgate et Eady, 1988). Voici
un bref survol des principaux groupes de diazotrophes.
- 38. 39
Dans la nature, les diazotrophes entretiennent souvent des relations
symbiotiques avec des organismes incapables de rĂ©duire le N2. LâĂ©ventail des
associations bénéfiques pour les deux membres du couple diazotrophes-eucaryotes
est assez large. Par exemple, certaines cyanobactéries fournissent les éponges
marines et les coraux en molĂ©cules dâazote fixĂ© (Revue par Kneip et al., 2007). Dans
lâintestin du termite, lâon retrouve des protozoaires flagellĂ©s contenant Ă leur tour des
espÚces de bactéries réductrices du N2 constituant un phylum distinct nommé
Endomicrobia (Stingl et al., 2005). Les champignons aussi se servent des
cyanobactĂ©ries pour avoir accĂšs Ă de lâazote fixĂ©. Câest le cas du cyanolichen oĂč il y a
symbiose tripartite entre un champignon, une algue et une cyanobactérie. Dans ce
mĂ©nage Ă trois, la cyanobactĂ©rie rĂ©duit lâazote et fournit aussi des molĂ©cules de
carbone organique, lâalgue se spĂ©cialise dans la photosynthĂšse et le champignon
protĂšge les cyanobactĂ©ries dâune concentration en O2 inhibitrice pour lâactivitĂ© de la
nitrogĂ©nase (Honegger, 2001). Autre forme dâinteraction trĂšs commune dans la
nature, une structure appelée mycorhize à arbuscules résulte de la symbiose entre les
racines dâun arbre et un champignon. Dans ce cas, le champignon contient des ÎČ-
protĂ©obactĂ©ries fixatrices dâazote intracellulaires du genre Burkholderia (Revue par
Kneip et al., 2007). La symbiose bipartite entre un protozoaire et un diazotrophe est
plus rare et dans un seul cas, lâinteraction entre le diatomĂ© Rhopalia gibba et des
cyanobactéries du genre Cyanothece, la fixation du N2 par le partenaire procaryotique
a été démontrée (Floener et Bothe, 1985).
La symbiose la plus commune dans la nature ayant pour but lâassimilation de
lâazote est lâassociation entre une plante et un diazotrophes. Les α-protĂ©obactĂ©ries
des genres Rhizobium, Azorhizobium et Bradyrhizobium sont contenues Ă lâintĂ©rieur
de nodules attachés au systÚme racinaire de diverses plantes légumineuses. Ces
diazotrophes fournissent de lâazote rĂ©duit et reçoivent en retour de la plante des
composés organiques de carbone. à remarquer, les bactéries des genres Rhizobium et
Bradyrhizobium sont incapables de rĂ©duire le N2 lorsquâelles sont libres dans
lâenvironnement (Atlas et Bartha, 1998). La formation des nodules fait lâobjet dâun
processus complexe et dâune rĂ©gulation extrĂȘmement serrĂ©e. Les Rhizobia sont attirĂ©s
- 39. 40
par les flavonoides ou isoflavonoides secrĂ©tĂ©s par la plante. Lâexpression des gĂšnes
nod impliqués dans la synthÚse des lipochitines oligosaccharides est alors induite.
Ces molĂ©cules permettent aux Rhizobia de reconnaĂźtre la bonne espĂšce de plante Ă
coloniser, provoquent le repliement des racines et la division des cellules
méristématiques (Atlas et Bartha, 1998). Les racines excrÚtent aussi du tryptophane
récupéré par les Rhizobia et transformé en acide indolacétique, une autre molécule
participant au repliement des racines. Les diazotrophes pénÚtrent ensuite dans les
racines, sâinstallent dans des vĂ©sicules membranaires situĂ©es Ă lâintĂ©rieur des cellules
du parenchyme et prennent une forme bactéroïde. La nitrogénase des Rhizobia est
protĂ©gĂ©e de lâoxygĂšne par une compartimentation dans les nodules et par la
leghĂ©moglobine qui capture lâO2 (de Billy et al., 1991). Les Rhizobia ne sont pas les
seuls diazothropes à pratiquer la symbiose avec les plantes. Les actinobactéries du
genre Frankia forment des nodules attachĂ©s aux racines de plantes de lâordre des
angiospermes (Torrey et Tjepkema, 1979). Les cyanobactéries sont aussi des
symbiontes des plantes mais cette interaction ne rĂ©sulte pas en la gĂ©nĂ©ration dâune
structure spéciale comme les nodules. En effet, les cyanobactéries résident dans des
cavités symbiotiques, structure qui existe chez les plantes indépendamment de la
symbiose. Tel que mentionné dans la section 1.2.1, une fraction des cyanobactéries
produisent des hétérocystes pour prémunir leurs nitrogénases contre les effets
nĂ©fastes de lâO2 et câest probablement pour cette raison quâun nodule est inutile.
Dâailleurs les cyanobactĂ©ries symbiotiques ont une proportion dâhĂ©tĂ©rocystes plus
Ă©levĂ©e que les cyanobactĂ©ries libres. Autre caractĂ©ristique, le spectre dâhĂŽte vĂ©gĂ©tal
pouvant accueillir les cyanobactéries est plus large que pour les Rhizobia ou Frankia.
Les cyanobactéries symbiotiques ont un taux de fixation du N2 plus élevé que les
cyanobactéries libres et elles sont incapables de faire la photosynthÚse pour prévenir
une compétition pour le CO2 entre la plante et le diazotrophe (Meeks, 1998; Revue
par Kneip, 2007).
Deux groupes de bactĂ©ries libres rĂ©ductrices dâazote et phototrophes sont
présents à travers la majorité des écosystÚmes: les cyanobactéries et les bactéries
pourpres non-sulfureuses (Revue par Zehr et al., 2003). En effet, les cyanobactéries
- 40. 41
nâont pas besoin dâĂȘtre en symbiose avec des Ă©ponges, coraux, champignons ou
plantes pour réduire le N2. Retrouvées dans la nature sous forme unicellulaire ou sous
forme de filament pluricellulaire (trichome), les cyanobactéries pratiquent une
photosynthĂšse oxygĂ©nique. C'est-Ă -dire que lâeau est utilisĂ©e comme donneur final
dâĂ©lectrons et que la photolyse de lâeau produit de lâO2. Les cyanobactĂ©ries peuvent
ĂȘtre divisĂ©es en deux groupes : les formatrices dâhĂ©tĂ©rocystes et les non-formatrices
dâhĂ©tĂ©rocystes. Anabeana et Nostoc sont les deux genres de cyanobactĂ©ries
formatrices dâhĂ©tĂ©rocystes les plus Ă©tudiĂ©s. Dans le trichome de ce type de
microorganisme, les hĂ©tĂ©rocystes sont retrouvĂ©s Ă travers les cellules vĂ©gĂ©tatives Ă
intervalle plus ou moins rĂ©gulier. Donc, la fixation de lâazote se fait dans les
hétérocystes et est séparée spatialement de la photosynthÚse oxygénique effectuée
dans les cellules végétatives (Revue par Thiel, 2004). La majorité des espÚces de
cyanobactĂ©ries non-formatrices dâhĂ©tĂ©rocystes sont incapables de rĂ©duire le N2 ou
encore elles le font seulement en anaérobie ou en présence de faibles concentrations
dâO2. Par contre, selon Gallon (2004), les quelques cyanobactĂ©ries non-formatrices
dâhĂ©tĂ©rocystes fixatrices de N2 en aĂ©robie, tel que Trichodesmium et Gleothece, sont
probablement responsables de 50% du total annuel de N2 réduit sur terre. La stratégie
adoptĂ©e par certains de ces microorganismes pour rĂ©duire au minimum lâimpact de
lâO2 sur lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase est de faire la photosynthĂšse oxygĂ©nique le jour et
la fixation du N2 la nuit (Revue par Gallon, 2004).
Les bactéries pourpres non-sulfureuses (Rhodospirillaceae et
Rhodobacteriaceae) sont des α-protéobactéries possédant un métabolisme trÚs
polyvalent. Par exemple, Rhodobacter capsulatus est capable dâadopter 5 modes de
croissances différents : photoautotrophe, photohétérotrophe, chimioorganotrophe par
respiration aĂ©robie, chimioorganotrophe par fermentation et chimiolithotrophe. Ă
cause de lâĂ©nergie nĂ©cessaire pour la fixation de lâazote, lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase
est optimale dans les modes de croissance impliquant la photosynthĂšse. Les
Rhodospirillaceae et les Rhodobacteriaceae pratiquent une photosynthĂšse
anoxygĂ©nique qui nâutilise pas lâeau comme donneur dâĂ©lectrons final et donc, qui ne
produit pas dâO2. Des petites molĂ©cules organiques, du H2S, du S ou du H2 peuvent
- 41. 42
remplacer lâeau (Imhoff, 1995). Azospirillum, Rhodospirillum et Rhodobacter sont
les principaux genres étudiés de cette famille. Du lot, Azospirillum est le seul genre
de Rhodospirillaceae actuellement reconnu pour ĂȘtre Ă©troitement associĂ© Ă une
plante, Oryza sativa (Revue par Bashan et al., 2004). Le reste des Rhodospirillaceae
et Rhodobacteriaceae évolue sous forme de bactéries libres présentes, entre autre,
dans le sol et les marais (Revue par Masepohl et al., 2004).
Cluster Group Subcluster Genera
I Alpha 1J Azospirillum
Gluconacetobacte
r
Mesorhizobium
Rhodobacter
Rhodospirillum
Rhizobium
Sinorhizobium
1K Beijerinckia
Methylocella
Methylosinus
Methylocystis
Rhizobium
Xanthobacter
Beta 1J Burkholderia
1K Burkholderia
Herbaspirillum
1P Azoarcus
1U Alcaligenes
Epsilon 1F Arcobacter
Gamma 1H Vibrio
1K Acidothiobacillus
1I Klebsiella
Vibrio
1M Marichromatium
Methylomonas
1N Azotobacter
(vnfH)
Klebsiella
- 42. 43
1P Methylobacter
1T Azomonas
Azotobacter
1U Pseudomonas
Cyanobacteri 1B Anabaena
a
Chiorogioeopsis
Calothrix
Cyanothece
Dermacarpa
Fischerella
Gloeothece
Lyngbya
Myxosarcina
Nostoc
Oscillatoria
Phormidium
Plectonema
Pseudanabaena
Scytonema
Sympioca
Synechococcus
Cluster Group Subcluster Genera
I Synechocystis
Tolypothrix
Trichodesmium
Xenococcus
Firmicutes 1D Frankia
1E Paenibacillus
II Alpha 2C Rhodobacter
Delta 2E Desulfobacter
Gamma 2C Azotobacter
Firmicutes 2D Paenibacillus
2E Clostridium
Spirochaete 2C Spirochaeta
s
Treponema
Archaea 2B Methanobrevibacter
Methanococcus
Methanothermobacte
r
2F Methanosarcina
III Delta 3B Desulfobacter
3E Desulfomicrobium
Desulfovibrio
3J Desulfotomaculum
- 43. 44
3L Desulfonema
3P Desulfovibrio
3T Desulfovibrio
Firmicutes 3A Clostridium
3C Clostridium
3D Acetobacterium
Clostridium
3J Desulfosporosinus
Spirochaete 3C Spirochaeta
s
Treponema
3K Spirochaeta
3L Spirochaeta
Treponema
3S Spirochaeta
Archaea 3C Methanosarcina
Green 3L Chlorobium
sulphur
Pelodictyon
IV Spirochaete 4A Treponema
s
4C Treponema
Archaea 4 Methanobrevibacter
Methanocaldococcus
Cluster Group Subcluster Genera
IV Methanococcus
Methanopyrus
Methanosarcina
Methanothermobacte
r
4A Methanosarcina
4D Methanosarcina
Tableau I. Distribution phylogénétique des gÚnes nifH à travers les espÚces
cultivables. Les groupes phylogénétiques (group) majeurs sont basés sur
lâARNr et les sous-clusters (subcluster) sur nifH, (Tableau tirĂ© de Zehr et al.,
2003).
1.2.2 La rĂ©gulation de lâexpression et de lâactivitĂ© de la nitrogĂ©nase
Puisque la nitrogénase catalyse une réaction coûteuse en énergie, les
diazotrophes ont développé une série de mécanismes pour réguler de maniÚre trÚs