1. Guillaume Pegoraro - août 2011
Quelle est l’influence de la musique dans la communication audiovisuelle des marques et sur leur public cible ?
La musique
Découvrez son enjeu
et son rôle dans la
communication.
Fonctions
musicales
Les fondements théoriques
sur l’utilisaton de la musique.
Orange
Zoom sur une stratégie
musicale audacieuse
4. Préambule
La musique
donne une
âme à nos
coeurs [Platon]
Les publicitaires ont bien compris le musical est un axe idéal pour apprivoiser Il y a quelques années, la réalité était
pouvoir émotionnel de la musique et, par un public jeune et fugace. Cette derniè- toute autre, la musique était, de manière
conséquent, la communication audiovi- re variable étant due à l’évolution de générale, trop souvent le dernier maillon
suelle n’échappe pas à cette emprise. En la consommation des médias. Ce fait de la chaine créative, pour le domaine
effet, déjà au temps des Grecs, l’arrivée résulte, en majeure partie, de l’arrivée audiovisuel. Depuis peu, le rôle de la mu-
des bateaux de pêche était annoncée abondante des nouveaux médias. sique à évoluer, tant par sa place que par
par des crieurs accompagnés de musi- son importance dans les stratégies de
ciens, qui marquaient le rythme. On pourrait donc s’attendre à ce que la communication.
musique dispose d’une attention tou-
De nos jours, le marketing musical prend te particulière dans le processus de Il est important de noter que l’utilisation
de plus en plus d’importance dans les création publicitaire. Jacques Séguéla, de la musique est soumise à certaines
stratégies de communication des mar- grand publicitaire français et co-fondateur règles et conditions d’utilisation, afin
ques. La musique offre aux annonceurs de l’agence Euro RSCG, a indiqué, lors d’atteindre les objectifs escomptés par
de nouveaux territoires d’expression et d’une interview sur France Culture (radio celle-ci et non l’inverse.
leur procure un souffle de modernité. française) "la musique est plus de 50%
Par ailleurs, l’utilisation du marketing d’un spot".
6. Sommaire
L’usage de la Les fonctions de la
musique dans la musique dans la
publicité publicité
10 Les processus de communication 00 Préambule
12 La musique et la communication 00 La fonction cognitive
14 D’une musique à une marque 00 La fonction affective
17 La perception auditive de la musique 00 La fonction symbolique
18 Synthèse de la première partie 00 Synthèse de la deuxième partie
10. Première partie
Chapitre
numéro un.
Les processus de
communication
1. Le modèle de Shannon et Weaver : 2. Le schéma de Jakobson :
À la fin des années 1940 aux États-Unis, un modèle sur le Un autre fondement théorique a vu le jour quelques années
processus de communication voit le jour. Le modèle de com- plus tard. Vers 1960, c’est à l’université d’Harvard que Roman
munication de Shannon et Weaver, qui porte le nom de ses Jakobson élabora le "schéma de Jakobson". Ce travail était si
créateurs, est l’un des fondements théoriques de la commu- percutant dans son domaine, qu’il est devenu l’un des linguistes
nication. les plus connus et influents du XX siècles.
La représentation simplifiée de la communication selon Shannon Ce modèle décrit les différentes fonctions du langage. Selon
et Weaver se compose de quatre éléments majeurs : d’un Roman Jakobson, tout acte de communication est associé à
émetteur (une marque, une personnalité, une entreprise, etc.), trois éléments de base qui sont : le message en lui-même, un
d’un message qui doit être transmis à un ou plusieurs récepteurs locuteur (destinateur, celui qui envoie le message), un interlocu-
(cible) par le biais d’un ou plusieurs canaux de communication teur (destinataire, celui qui est censé recevoir le message).
(presse, télévision, radio, etc.).
Ensuite, pour être actif, le message doit être inscrit dans un
contexte (appelé aussi référent). Autrement dit, le contexte est
une référence commune et sous-entendue entre les deux locu-
teurs. Le message nécessite, également, un code, qui doit être
Shannon et Weaver vont introduire la notion de bruit dans leur commun (dans sa globalité) au destinateur et au destinataire.
schéma. Ce nouveau facteur parasite peut influer sur la percep- Pour finir, un dernier élément est indispensable au message,
tion et la réception d’un message publicitaire. il s’agit du contact. Celui-ci permet de créer et d’entretenir la
communication.
Toujours selon le linguiste Jakobson, tous ces éléments réfè-
rent à une fonction précise (voir schéma ci-après). La fonction
expressive (première des six fonctions) provient de l’émetteur,
elle a comme objectif d’informer le récepteur sur l’état d’esprit
de celui-ci. Ensuite vient la fonction conative (une des fonctions
le plus utilisées en publicité), son but est d’agir, d’influencer le
destinataire du message.
Les fonctions suivantes sont fondées sur les trois éléments
périphériques du message, c’est-à-dire le contexte, le contact
et le code.
10 music & ads.
11. L’amour de la musique mène
toujours à la musique de
l’amour... [Jacques Prévert]
La fonction référentielle (contexte) permet d’indiquer le monde et l’environnement
qui entoure les interlocuteurs, que ce soit des informations culturelles ou géographi-
ques. La fonction phatique (contact) permet, elle, d’établir, de maintenir ou encore de
stopper le contact avec le destinataire du message.
Un exemple typique permet d’illustrer cette fonction : lors d’une communication té-
léphonique, au moment où la personne décroche le combiné, elle dit "allo" ; ce terme
permet de tester et de vérifier le passage physique du message, mais également
d’établir le contact avec l’interlocuteur.
La fonction métalinguistique (code) appelée également "fonction de traduction" est
relative au code linguistique en lui-même.
Pour terminer l’explication de ce schéma, la fonction poétique (message) se rapporte
à la forme du message en lui-même. Le ton, la hauteur de la voix sont autant de procé-
dés qui permettent la construction de cette fonction.
L’ensemble de ces processus de communication démontre la complexité et le nombre
important de facteurs pouvant intervenir dans un tel procédé. Ainsi, il est capital de
les prendre en considération, car chacun de ces éléments peut influencer de manière
positive ou négative la transmission d’un message.
Ces théories ne sont pas exclusivement réservées à la communication, au sens large
du terme, mais peuvent, selon moi, être également un outil stratégique précieux, pour
le choix d’une intégration musicale. Comme énoncé auparavant (introduction), la musi-
que est soumise à certaines règles et conditions d’utilisation, qui doivent prendre en
compte les divers éléments ou fonctions des ces théories.
12. Première partie
Chapitre
numéro trois.
D’une musique à » Le slogan musical : il est différencié du logo sonore par sa
durée un peu plus longue, principalement, mais, surtout, par le
une marque
fait de l’intégration de la voix (slogan chanté). Créé spécifique-
ment pour la marque, le slogan musical offre une association
optimale entre le nom de la marque et la musique. L’exemple
type, Babybel, utilise, depuis des années, une adaptation de
la célèbre chanson Barbarane des Beach Boys comme slogan
musical.
1. Les divers types de musiques publicitaires :
Nous savons maintenant de quoi est faite (en partie) la musique
et quel est son rôle sommaire dans la communication audio-
visuelle. Nous allons, ici, développer les différentes musiques
publicitaires et découvrir les atouts et les failles de chacune.
» Le logo sonore : c’est une mélodie sonore, qui a pour but la
reconnaissance immédiate et automatique de la marque.
Le logo sonore joue un rôle identique à celui du logo visuel. Attention, tout de même, aux répétitions d’une musique ou
Dans les spots télévisuels, les deux sont souvent présentés d’un slogan musical, elles doivent être savamment dosées, car,
en symbiose. Ainsi, cette cohésion visuelle et sonore permet à la longue, elles peuvent devenir lassantes, voire même
d’asseoir la notoriété de la marque et d’éradiquer le risque que irritantes pour le téléspectateur.
le logo sonore asservisse une autre marque.
Apprécié pour son pouvoir à de démarquer de la concurrence, le
Son aspect atemporel et international fait du logo sonore un slogan musical est, également, utilisé pour sa capacité de mé-
élément attractif pour les annonceurs. Par sa durée réduite, morisation. Ainsi, Rodolphe Muller, directeur de création chez
son coût est moins onéreux en opposition avec une musique TVLowCost, indique sur son blog, que cette méthode "reste
de fond. Ainsi, les annonceurs peuvent devenir plus aisément une mécanique ultra efficace pour travailler le Top of mind,
propriétaires de leur logo musical, ayant, de ce fait, une certaine l’attribution et la proximité avec les consommateurs".
indépendance envers les droits d’auteur et interprète.
» La musique identitaire : caractérisée par sa récurrence dans
La règle de Miller stipule que le nombre maximal d’éléments les spots télévisuels, cette musique apporte à la marque une
sonores pouvant être mémorisé simultanément est restreint image forte, durable et constante ; permettant l’identification
aux nombres de sept au maximum. et la mémorisation de celle-ci, de manière plus raide qu’une
musique de fond.
L’une des plus grandes et belles histoires d’amour pour une
musique identitaire est sûrement celle de DIM. En 1970, Boris
Claudio Schifrin, dit Lalo Schifrin compose les six notes qui
incarneront DIM au fil des années.
12 music & ads.
13. En 1974, le spot nommé Le Gros Léon, est utilisé pour la première Dernièrement, la marque de voiture Citroën, a réussi un grand
fois à la télévision, où, bien évidemment, nous retrouvons cette coup dans le domaine publicitaire et musical, en faisant de sa
mélodie. Elle a été remixée durant toutes ces années, dans des synchro un tube radio.
styles musicaux divers et variés. Leur dernière campagne publi-
citaire pour DIM Body Touch (2010), n’échappe pas à cette règle,
en réinterprétant cette mélodie de façon rythmique.
Ou encore, la marque de pâtes Panzani qui lance en mars 2009,
avec sa nouvelle agence Asap, une campagne, qui a pour but Avec son spot aux allures de clip vidéo, la campagne "Face"
"de redonner sa fibre populaire et méridionale à la marque". pour la Citroën C3, est accompagnée par la bande-son "Hit The
Une nouvelle page de l’histoire de Panzani est donc entrain de road Jack", reprise de Ray Charles, concoctée par les agences H
s’écrire ! et The Hours.
Avec comme budget bruts, en 2009, douze millions d’euros Titre : Hit The Road Jack
(sources strategie.fr), la marque de pâtes va utiliser ce principe Album : Hit The Road Jack
de musique identitaire, en adaptant la célèbre chanson inter- Artiste : Dan Black alias Donuts
prétée par Fernandel, Félicie aussi.
Agence : H
Réalisateur : Peter Sluszka
Annonceur : Citroën
La compagnie aérienne Air France a, elle aussi, su de manière
optimale, intégrer la musique dans sa communication audiovisue-
lle. La campagne "faire du ciel le plus bel endroit de la terre"
commence en 1999, avec le premier spot nommé Le Passage.
Il existe bien évidemment d’autres marques qui on su exploiter
la musique identitaire, comme Nescafé avec la chanson tradi- Selon le site corporate.airfrance.com, cette campagne c’est "tou-
tionnelle d’Amérique latine, La Colegiala, interprété par Roolfo te une atmosphère traduite avec subtilité – le téléspectateur
y su tipica en 1982. plonge dans un univers intime et paisible porté par la musique
des Chemicals Brothers qui, comme la vitesse, déclenche une
sensation de liberté, d’évasion et d’apesanteur".
En 2002, le nouveau spot "Nuages" fait son apparition et re-
prend le même esprit et les mêmes codes, que le précédent.
Cette campagne a connu un succès planétaire.
Air France va encore plus loin et en mars 2010, la compagnie
» La musique en premier plan : De plus en plus présente sur explique que, "fidèle à sa démarche d’innovation, elle crée Air
nos écrans de télévision, ce style musical occupe le premier France Music et donne, désormais, accès à ses contenus mu-
plan dans l’annonce publicitaire. La musique devient le seul sicaux rares, voire exclusifs, sur le net et, notamment, sur les
élément auditif du spot ; ainsi, l’exploitation de ses effets est à réseaux sociaux Facebook, MySpace, Twitter et Netvibes".
son maximum, donnant une atmosphère, un ton et des valeurs
auxquels les téléspectateurs assimileront à ceux de la marque.
music & ads. 13
14. Première partie
» Les publicités mythiques : cette catégorie pourrait être as-
similée à un film d’action hollywoodien, assurance d’un grand
spectacle ! La musique joue un rôle très important dans ce type
de spot, car elle dispose souvent de la fonction de premier plan
(expliqué dans le chapitre précédent) et doit, ainsi, transmettre
à elle seule, l’ambiance, des émotions, du rêve.
De plus, cette bande sonore doit également apporter son sou-
tien au message, afin qu’il exprime, de manière claire et simple,
le bénéfice produit. Remarque importante sur ce type de pu-
blicité : elles sont souvent les plus "attractives" que toutes les
autres catégories ! (Coca-cola - Chanel)
» Les publicités persuasives : elles peuvent être, également,
Cette année, c’est la chanteuse Keren Ann, qui a été sélection- qualifiées d’informatives ; souvent dépourvues de musique,
née pour être l’égérie de la marque et transmettre, ainsi, la leurs objectifs sont de convaincre sur la base d’arguments. Ce
"féminisation" de la communication de la compagnie aérienne. style publicitaire ne laisse aucune place à l’émotionnel ; le tout
est basé sur le rationnel, l’apport de preuve, pour augmenter la
» La musique de fond : Ce type d’intégration est destiné à com- crédibilité du produit.
bler le vide. La musique joue un rôle simpliste, ne contribuant que
très peu au message. Encore un nombre important d’annonceur Dans la deuxième partie, nous expliquerons que la musique
utilisent ce procédé dans leur publicité. peut avoir un effet dispersif et donc néfaste, pour un type de
publicité. C’est très souvent le cas pour les spots informatifs,
car la musique détourne et/ou perturbe l’attention du télés-
Titre : All of a Sudden pectateur. (Aspirine - Skip)
Album : Telekinesis !
Artiste : Telekinesis » Les publicités obliques : ce type de publicité donne une
touche d’étonnement, de surprise, voire même d’humour à la
marque. La musique tient un rôle, que l’on pourrait qualifier
d’amplificateur. Ainsi, elle renforce l’univers et le contexte dans
Le style rock de la bande son ne correspond pas vraiment à lequel évolue le spot, pour asseoir la réalité de cette situation
l’univers du spot, qui nous plonge dans un univers estival, où incongrue ! (Evian - Roller Babies)
mer et soleil sont réunis pour le plus grand bonheur de tous.
Une musique plus légère et enjouée aurait sûrement renforcé Voici, donc, les trois grandes familles de publicité, que nous re-
ce côté vacances et détente. trouvons le plus sur nos écrans de télévision. Notons que le
type de spot télévisuel, que l’annonceur souhaite réaliser, est
Pour conclure ces lignes, notons que la musique publicitaire bel et bien facteur primaire de sélection pour la musique.
peut venir d’une reprise (musique classique ou chansons à lar-
ge diffusion), soit être une composition originale.
2. Du style publicitaire à la musique :
Comme vous avez pu le remarquer, la musique n’est pas pré-
sente de la même manière dans toutes les publicités que nous
voyons. Le style d’une publicité influe sur la musique et vice et
versa.
14 music & ads.
15. Chapitre
numéro quatre. Ainsi, l’œil voit des images tristes et
La perception auditive
désolantes, mais l’oreille, elle, entend
une musique qui renvoie à des souvenirs
joyeux et plaisants.
de la musique Par cette distorsion musicale, le télés-
pectateur est placé dans une situation
indélicate et déplaisante et son attention
est donc attirée. Comme le démontre cet
exemple, la musique a, effectivement, un
Il existe deux types d’écoute : consciente ou La signature du spot "drinking et driving impact sur notre état physiologique et/
inconsciente (ambiance musicale neutre, is one christmas tradition we can all do ou psychologique (énoncé également au
bruit de rue, etc.), qui peuvent influencer without", que l’on pourrait traduire par début de cette partie).
le téléspectateur dans la compréhension "boire et conduire sont une tradition de
d’un spot télévisuel. Noël mais nous pourrions faire sans" Les travaux de Jost et Lecourt attestent
renvoie bien aux traditions et aux sym- que l’écoute d’une musique peut accroitre
On parle d’écoute consciente, quand la boles de Noël énoncés plus haut. un changement de l’état affectif déjà
musique, les paroles ou les bruitages présent ou, même, en être la cause princi-
captent l’attention du spectateur. La dis- pale. Il démontre, également, que cette
torsion musicale est un principe combi- réponse affective, qui résulte de l’écoute
nant des éléments visuels complètement d’une musique découle de plusieurs
différents des éléments auditifs. Ainsi, un facteurs (tempérament de l’individu, ni-
crash de voiture, sans le son de l’impact veau d’éducation, contexte socioculturel
ou le bruit de crissements de pneu, peut et, bien entendu, l’œuvre en elle-même,
devenir très choquant. ainsi que son interprétation).
L’agence anglaise AMV BBDO, dans un
spot pour la sécurité routière, nous fait
l’exemple brillant d’une utilisation de la
distorsion musicale. La bande-son, qui
est utilisée dans ce spot est Silent Night
La relation entre la vie et la
(douce nuit), l’un des plus grands symbo-
les musicaux pour représenter la fête de
Noël.
mort est la même que celle
Cet événement hivernal symbolise, aux
yeux des occidentaux, un moment magi-
qui existe entre le silence et la
que, de partage et de communion avec musique - le silence précède
la musique et lui succède.
les siens. Les éléments visuels sont tout
autres, ils montrent un grave accident de
la route, impliquant un automobiliste, qui
a dû abuser de l’alcool, avec pour consé- [Daniel Barenboïm]
quence de blesser un tiers.
music & ads. 15
19. Les fonctions
de la musique
dans la publicité
Deuxième partie
music & ads. 19
20. Deuxième partie
Chapitre
numéro un.
Préambule sur les
fonctions de la musique
Cette deuxième partie va donc aborder les différentes fonctions, La seconde est une approche fondamentalement cognitive ;
que la musique peut remplir dans la communication musicale autrement dit, elle agit de manière plus rationnelle et son
des marques. Ces fonctions ont été énumérées dans un ou- objectif initial pourrait être la mémorisation ou encore d’attirer
vrage paru en 1989, écrit par Jean-Rémy Julien, entièrement l’attention (fonction cognitive).
consacré au thème de la musique et de la publicité.
La dernière de ces approches est résolument basée sur
L’ensemble des chercheurs s’accorde à dire, que la musique l’aspect symbolique de la musique ; ainsi cette fonction peut,
affecte les attitudes des consommateurs, que ce soit de façon par exemple, aider au positionnement d’une marque ou d’un
positive ou négative. La musique peut être classifiée de trois produit. Nous pourrions, ainsi, résumer, comme suit, les
manières. La première traite de l’émotionnel affectif ; ainsi son fonctions de la musique au sein d’une annonce publicitaire :
but premier est de faire aimer la marque ou le produit (fonc-
tion affective).
20 music & ads.
21. Chapitre Prenons, par exemple, l’utilisation d’un
roulement de tambour au commen-
cent d’un spot ; cela peut évoquer, chez
numéro deux.
l’auditeur, qu’il s’agit d’un événement ou
d’un lancement de produit à ne manquer
sous aucun prétexte. Si cette technique
fonctionne et que l’auditeur devient té-
La fonction cognitive
léspectateur, l’objectif aura, alors, été
pleinement rempli.
de la musique
» Ensuite, Jean-Rémy Julien évoque la
notion de timbre de marque, appelé éga-
lement musique identitaire (exposé dans
le chapitre : Les divers types de musiques
publicitaires), il le définit comme étant "une
adaptation d’un texte publicitaire à une
Cette fonction est dite cognitive, car elle 1. L’impact de la musique sur l’attention œuvre lyrique ou musicale antérieure au
se réfère au traitement de l’information du public cible envers le message publi- produit pour lequel le texte a été écrit.
(voir schéma ci-dessous). Dans les lignes citaire
suivantes, nous tenterons de savoir quel Ce fragment musical est associé, sys-
est l’impact de la musique sur l’attention De nos jours, attirer l’attention sur une tématiquement et pendant une pério-
du public cible, vis-à-vis du message publicité n’est pas une mince affaire. de déterminée, à une marque ou aux
publicitaire, mais, également, si elle est Même si très peu d’études ou de recher- produits d’une marque (le temps d’une
capable d’augmenter, de manière signi- ches ont été menées sur le thème de campagne, quelques jours, quelques se-
ficative, la mémorisation d’une marque. l’exposition publicitaire, nous sommes maines, plusieurs années, voir plusieurs
toutes et tous exposés à des centaines dizaines d’années)". Ainsi, cette musique
de messages commerciaux, que ce soit identitaire permet au consommateur de
dans la rue, sur internet ou encore sur savoir, d’entrée de jeu, de quelle mar-
nos postes de télévision. que il s’agit. Le logo sonore, également
abordé dans le chapitre (les divers types
Aujourd’hui, l’enjeu pour les publicitaires de musiques publicitaires), peut, égale-
est de trouver toujours de nouveaux mo- ment, servir de stimulus auditif aux con-
yens pour se distinguer de la concurrence. sommateurs.
Pour ce faire, la musique peut être un L’impact d’une musique de fond, selon une
moyen efficace d’attirer l’attention du étude réalisée par Brooker et Wheatley
téléspectateur, pour autant qu’elle soit (1994), serait nuisible, car une version
suffisamment pertinente et originale, non musicale d’un spot télévisuel serait
sans pour autant dénoter de l’univers de plus impactant et, de ce fait, aurait la ca-
marque. pacité d’attirer l’attention de l’auditeur.
Ainsi Jean-Rémy Julien évoque deux La conclusion émise par Brooker et
Ainsi, on pourrait donc classifier la fonc- styles musicaux pouvant répondre à Wheatley est, néanmoins, à modérer,
tion cognitive en deux sous catégories. ce type d’objectif qu’est la démarcation selon l’utilisation de la musique de fond.
La première étant une fonction démar- concurrentielle.
cative, qui a pour but d’attirer l’attention En effet, l’utilisation de la distorsion
du consommateur sur la publicité, et » En premier lieu, il nous évoque musicale (énoncée dans le chapitre : La
la deuxième étant une fonction, dite l’indicatif musical qui, selon lui, est la for- perception musicale auditive) peut être
mnémonique, qui a comme objectif me idéale pour "mettre l’auditeur dans un extrêmement puissant, comme le démon-
l’augmentation de la mémorisation du état de réceptivité maximale". En effet, tre l’exemple du spot anglais pour la
spot, puis, à posteriori, celle de la marque. l’utilisation de certains instruments sécurité routièreou encore la campagne
ou rythmes se prête à cet exercice. d’Action Internationale Contre la Faim.
music & ads. 21
22. Deuxième partie
Ce spot avait pour signature "Qu’est-ce Le slogan musical (jingle) ou le logo sonore 3. Synthèse de la fonction démarcative
qui vous a le plus choqué : ce que vous sont, également, des types de musiques et mnémonique de la musique, dans la
avez vu ou ce que vous avez entendu ? " Il publicitaires ayant une influence positi- publicité
était composé d’une bande sonore joyeu- ve sur la mémorisation d’une marque ou
se sur des images d’une enfant africain d’un produit, selon les études réalisées La fonction démarcative et mnémoni-
victime de la malnutrition. Ce procédé de par Yalch, en 1991. que peut être remplie par la musique au
distorsion musicale peut, également, sein d’une publicité, mais sous certaines
être un facteur impliquant et impactant Toutefois, il met en lumière un facteur conditions.
sur l’attention du téléspectateur. important, pouvant influer sur les per-
formances mémorielles d’un tel type de Une musique de fond doit être placée en
2. L’impact de la musique sur la mémori- musique. début de spot, puis, être stoppée, pour
sation du message verbal de la publicité laisser place aux informations essentie-
En effet, au fur et à mesure des ex- lles. La musique doit être en décalage
L’annonceur a comme objectif de ven- positions, l’effet mémoriel du jingle avec le visuel (distorsion musicale) alors,
dre. Avant d’influencer le comportement s’amoindrit. Cependant, le fait de réa- il doit s’agir d’une musique de type jingle.
d’achat d’un consommateur, il est pri- liser des réorchestrations (rock, jazzy,
mordial que celui-ci connaisse la marque rythmique, etc.) permet de ne pas lais- Relevons qu’une musique de fond om-
mais, surtout, qu’elle soit dans son esprit ser place à l’effet de lassitude, qui peut niprésente ne semble pas améliorer la
lors de l’acte d’achat. survenir avec le temps. mémorisation ou démarcation et peut
même influer de manière négative sur le
On le sait, une marque qui ne communi- téléspectateur.
que pas et qui, par conséquent, est "ab-
sente", est très vite remplacée. Ainsi, le
graal recherché par chaque marque est
le Top Of Mind (marque immédiatement
présente à l’esprit du consommateur).
Etape 1
Alors, la musique est-elle capable de
développer, de manière éloquente, la
Crédibilité
mémorisation d’un nom, d’une marque
ou d’un produit ?
Des chercheurs ont étudiés cette ques-
tion. Leurs résultats divergent, mais nous
pouvons tout de même dégager trois
Etape 2
grandes tendances. S’il s’agit d’une mu-
Réputation
sique de fond, l’effet de mémorisation
ne semble pas être amélioré ou, pire, elle
disperse l’attention du sujet sur le trai-
tement de l’information. Notons que la
musique influe, également, de manière
négative sur une cible sénior.
Les travaux d’Oslen, entre 1994 et 1997,
Etape 3
ont démontré que si la musique est Communauté
diffusée en introduction d’un spot et
que celle-ci est ensuite stoppée, pour
laisser place à la diffusion des informa-
tions verbales essentielles, elle produit,
alors, un effet bénéfique sur la mémo-
risation.
22 music & ads.
23. Chapitre "La formation de l’attitude et des inten-
tions d’achat à l’égard d’une marque dé-
coulent des évaluations des informations
numéro trois.
présentées dans le message ; ces der-
nières étant mieux perçues, lorsqu’elles
sont accompagnées d’un stimulus musi-
cal, qui génère un plaisir musical ou une
La fonction affective
humeur agréable." Schumann, Cacioppo
et Petty
de la musique
1. L’effet du plaisir musical sur le public
cible
1.1 Action directe du plaisir musical sur
les consommateurs
Cette fonction a comme objectif primai- Tels sont les résultats des travaux de D’un point de vue théorique, cette action
re de créer un contexte agréable, afin Schumann, Cacioppo et Petty, en 1983, directe est basée sur le procédé du con-
que le téléspectateur puisse réception- qui ont, ainsi, pu mettre en lumière la ditionnement classique. Nous pourrions
ner le message publicitaire de manière théorie de la persuasion périphérique définir le conditionnement comme étant
optimale. Les chercheurs ont établi deux (autre terme pour l’action directe). un type "d’apprentissage", qui s’appuie
facteurs sur lesquels influe la fonction sur une association entre une stimu-
affective. Dans le cas contraire, on parle d’action lation et une réponse. Ce principe de
indirecte ou de persuasion centrale (Schu- conditionnement nous vient de Pavlov
Le premier, est le plaisir auditif (aimer mann, Cacioppo et Petty). (1849-1936), un psychologue et médecin
ou ne pas aimer la musique) ; ainsi russe.
l’hypothèse émise par les chercheurs Les effets ressentis à l’écoute du stimu-
serait que ce plaisir auditif se répercute lus musical, altéreraient, dans un premier Ainsi, l’utilisation de la musique dans sa
sur les réactions des consommateurs. temps, le traitement de l’information fonction affective est basée sur ce principe
puis, modifieraient les attributs et in- du conditionnement classique.
La deuxième probabilité est le style tentions d’achat du consommateur.
d’humeur déclenchée par le stimulus Après des expositions répétées au mes-
musical et l’état affectif (joyeux, triste sage publicitaire, dans le but de créer
etc.) dans lequel le consommateur est un stimulus conditionné, le plaisir mu-
plongé et qui se répercute directement sical devrait être transmis de manière
sur son intention d’achat. directe sur les intentions d’achats ou
voire même sur le comportement du
Qu’il s’agisse du plaisir auditif ou de consommateur. Les recherches de Gorn,
l’humeur, le processus de réception musi- en 1982, sont les premières à traiter de
cale peut être considéré comme direct ce sujet. Il va tenter de démontrer que
ou indirect. Si l’effet influe directement la musique peut, bel et bien, influencer
sur le comportement du consommateur le comportement du consommateur et,
(attitudes et intentions d’achat), alors le donc, faire naître une préférence pour
stimulus musical reçu par celui-ci, n’a pas un produit plutôt qu’un autre.
modifié le traitement de l’information
du message publicitaire (attribut et pro-
messe produit) et, donc, ce sont les élé-
ments périphériques, qui ont orienté le
consommateur et non la promesse ou
les attributs du produit.
music & ads. 23
24. Deuxième partie
Pour ce faire, il va utiliser des stylos bleu En résumé, nous ne sommes sûrement 2. L’impact provoqué par la musique sur
et beige (à priori des couleurs neutres pas aussi facile à conditionner que le l’humeur du public cible
pour des stylos) dans un message publi- chien du docteur Pavlov. Une chose est
citaire qui comporte soit une bande-son sûre, le choix de la musique ne peut être Outre l’effet du plaisir musical, nous
dite "appréciée" (musique du film Grease), fait uniquement sur l’appréciation ou trouvons également le facteur de
soit une musique d’origine indienne dite non qu’elle entraine envers le public ci- l’humeur dans la fonction affective. Ain-
"non appréciée". ble. si, la musique d’un spot télévisuel pou-
rrait adoucir l’humeur du téléspectateur
Environ deux-cents sujets seront utilisés 1.2 Action indirecte du plaisir musical et, par extension, rendre la produit ou la
pour cette étude. Ils seront exposés une sur les consommateurs marque plus attrayants ou efficaces.
seule fois à l’un des quatre messages
publicitaires. (voir ci dessous) Comme indiqué ci-dessus, l’action indi- Le chercheur Garner, en 1985, définit
recte du plaisir musical pourrait modi- l’humeur comme étant "la propriété d’un
Les résultats de cette recherche sont fier, de manière favorable, la perception état affectif qui caractérise un individu.
éloquents ! Dans une grande majorité, et le traitement des informations (preu- Elle est éphémère, instable, fugitive,
les sujets choisissaient le stylo bleu, ve, bénéfice, promesse) du produit ou de temporaire ; la plupart du temps non
quand la musique du message était la marque. Le cas échéant, les attitudes intense et liée à un moment précis. Elle
agréable ; à contrario le stylo beige, as- et le comportement du consommateur peut être négative, positiveou neutre.
socié à la bande sonore dite désirable et seraient également modifiés. Elle se distingue des émotions, car ces
vice et versa. dernières sont intenses et consciem-
Des conclusions mitigées sont apparues ment ressenties par l’individu."
Les conclusions de cette recherche lais- lors des différentes études menées par
sent penser qu’une simple association des chercheurs. Ainsi, les recherches Cet état émotionnel particulier, qui a
entre une marque et une bande-son de Smith et Simpkins, en 1974, ont dé- pour cause de nombreux facteurs, a été
appréciée par le public cible et intégrée montré que la musique pouvait avoir étudié par des chercheurs en marketing
dans un message publicitaire, aurait un un effet négatif sur le traitement de et des psychologues, afin de savoir si cet
impact positif et significatif sur le choix l’information, si elle n’était pas appré- état pouvait influencer le traitement de
et, donc, la préférence d’un produit. ciée par le public cible. l’information, les attitudes ou même la
mémorisation. En 1984, Srull démontre
De multiples réactions et débats sont A contrario, les recherches entreprises qu’un individu de bonne humeur perçoit
apparus parmi les chercheurs en mar- par Sullivan, en 1990, mettent en lumière mieux son environnement.
keting, pour faire suite aux résultats que la crédibilité de la marque, face au
énoncés par Gorn ; les résultats obtenus consommateur, ne se trouve pas visible- De ce fait, il est prédisposé à mieux mé-
semblaient trop simples ! Ainsi, d’autres ment améliorée s’il s’agit d’une musique moriser des informations plaisantes.
études ont été menées sur ce sujet, afin de fond. Dans de telles conditions, il est Yuseph, en 1979, constate qu’une an-
de savoir si les résultats émis par Gorn très difficile de dégager une règle théori- nonce publicitaire est mieux mémorisée
étaient plausibles. De nombreux résul- que sur le principe de l’action directe du si elle est placée entre un programme
tats d’études et de recherche divergent. plaisir musical sur les consommateurs. joyeux, mettant ainsi le téléspectateur
dans une humeur joviale et gaie. Le pro-
cessus est également subdivisé en ac-
association Couleur choisie par les tion directe ou indirecte (voir schéma
musique / couleur du stylo répondants à l’issue de la dans l’introduction de la fonction affec-
projection de la publicitié tive).
Musique appréciée - stylo bleu Bleu 2.1 Action directe de la musique sur
l’humeur des consommateurs
Musique appréciée - stylo beige Beige
L’étude la plus connue, traitant de ce
Musique non appréciée - stylo bleu Beige sujet, a été réalisée par Alpert et Alpert,
dans les années 1990. Leur recherche
Musique non appréciée - stylo beige Bleu est basée sur la théorie suivante : "la
musique génère une humeur, qui se ré-
24 music & ads.
27. Il y a de la musique dans le soupir du roseau ;
Il y a de la musique dans le bouillonnement du
ruisseau ; Il y a de la musique en toutes choses,
si les hommes pouvaient l’entendre.
[George Gordon]
1.2 La fonction dite "poïétique " Pour le domaine publicitaire, un doctorat Cohen, en 1997, met en évidence, que
(Gallopel, 1998-2000) a tenté de dé- lorsqu’une musique est jugée compa-
Cette fonction est intégrée dans une montrer que la musique était capable tible avec la marque ou le produit du
stratégie commerciale définie au préala- d’influencer la perception du consom- spot publicitaire et que celle-ci corres-
ble. De la sorte, la musique apporte au mateur sur le positionnement d’une pond au style musical de la cible, alors
message publicitaire des informations marque. le transfert des valeurs de la musique
complémentaires, que les images ou les sur l’image ou le produit se fait de ma-
mots ne peuvent que difficilement ex- La première étape de ce doctorat cons- nière beaucoup plus aisée. (Dans l’étude
ploiter. tituait à réaliser des études qualitatives, effectuée, la première musique était la
qui avaient pour but de mettre à jour plus adaptée au produit et aux images,
"Dans la fonction poïétique, on assis- les ressentis véhiculés par trois extraits mais également la plus appréciée des
te à la composition des thèmes musi- musicaux choisis pour l’occasion. sujets, contrairement aux deux autres.)
caux non seulement pertinents, mais
symbolisant, qui ne se contentent pas La deuxième partie de cette recherche Cette étude nous apprend que, si la bande
d’intégrer, de documenter ou de renfor- devait faire coexister une publicité an- sonore d’un spot télévisuel est sélec-
cer la proposition commerciale, mais glaise pour de la bière (inconnu pour les tionnée en fonction d’un public cible, elle
génèrent une totale adhésion de la per- sujets) avec les extraits musicaux, afin devient, alors, un outil de positionne-
ception auditive. L’information musicale de tester et de prouver, que la musique ment pour l’annonceur conséquent.
n’est pas ici décorative, elle apporte véri- avait bien un effet sur le positionnement
tablement un plus à la communication." d’une marque. 3. Interview de Christophe Caurret ,
Jean-Rémy Julien Music Superviasor Euro RSCG
En effet, si les adjectifs récoltés lors des
2) Résultats de recherche scientifique études qualitatives étaient transférés à 01. Quel est votre rôle au sein de cette
la marque de bière par le biais du spot, grande agence qu’est BETC Euro RSCG ?
Plusieurs recherches ont été menées cette hypothèse pourrait être confirmée.
dans le domaine du marketing, afin » Je travaille chez BETC Euro RSCG en
de savoir si la musique était capable Les résultats de cette étude sont miti- tant que Music Supervisor, terme an-
d’installer un positionnement de marque. gés. Sur le premier spot, l’hypothèse est glophone, emprunté au cinéma long
Mais l’ensemble des ces recherches totalement vérifiée ; cependant, sur le métrage, pour nommer la personne
portent essentiellement sur les lieux de deuxième et troisième spot, les résultats en charge de trouver, proposer et fai-
ventes et non sur la publicité. Notons sont décroissants. re composer les musiques pour les
tout de même qu’en 1993, Yalch et Span- films, mais également de négocier les
genberg ont mis en lumière, que la musi- Les différences constatées dans les ré- droits d’utilisation. Je travaille, depuis 8
que sur un point de vente influençait la sultats sont expliquées comme suit. ans, pour des marques comme Evian, Air
perception des clients sur le positionne- France ou encore Peugeot.
ment de celui-ci.
music & ads. 27
28. Deuxième partie
A partir d’un poste de Music Supervisor, je suis, aujourd’hui, la » En effet, plutôt que de proposer uniquement une bon-
personne qui réfléchit à toutes les actions que l’on peut propo- ne musique pour un bon film publicitaire ou voire même une
ser, pour le compte des annonceurs de l’agence et qui associe identité sonore (logo sonore ou jingle), aujourd’hui on essa-
musique et communication. ye de proposer une espèce de panorama d’action, sur lequel
la marque peut communiquer dans le cas d’une association
Cela va même au-delà d’opérations dites média, comme des musique et marque. C’est, finalement, utiliser les nouveaux
compilations thématiques, pour le compte d’annonceurs, que ce médias pour le compte d’associations entre musique, marque
soit sous format physique ou digital, d’événementiel ou autres et client. source : cataliseur-numérique.com
opérations.
4. Synthèse de la fonction symbolique de la musique, dans la
02. Quelles sont les synergies que tu essayes de créer entre la publicité
musique et la marque ?
Pour qu’une musique remplisse des objectifs symboliques dans une
» Cela part d’un constat simple : une marque, par nature, a annonce publicitaire, il est primordial de s’assurer que celle-ci trans-
besoin de se créer une histoire, une identité et la musique, elle, met des valeurs et des images en cohérence avec ceux de la marque.
peut participer à cette histoire. Donc, l’association musique - Ainsi, l’annonceur peut s’appuyer sur cette musique aux effets symbo-
image ou musique – marque, elle, me semble naturelle. Il y a lique, tout au long d’une campagne et même d’avantage.
quelques années, ce n’était pas aussi simple, toutes ces asso-
ciations-là. Maintenant, c’est vrai que, d’un côté, il y a un mon- La fonction symbolique d’une musique peut donc servir à la construction
de de la musique, qui vit actuellement une mutation et puis, à d’une identité de marque. Notons que ce processus s’effectue d’une
côté de ça, il y a aussi des gens comme nous, qui essayons de manière plus aisée lorsque la composition musicale est compatible
nous inscrire en temps qu’acteur de la musique. avec la marque et le produit, mais, également, si celle-ci correspond
aux goûts musicaux de la cible de l’annonceur.
03. En tant que Music Supervisor d’une grande agence de pu-
blicité, est-ce que vous cherchez à créer des nouvelles relations
entre les marques et la musique ?
28 music & ads.
32. troisième partie
Chapitre
numéro un.
Introduction sur
l’optimisation des effets
Comme nous avons pu le constater dans les pages précéden- Le sexe, l’âge, le niveau socioprofessionnel et l’implication
tes, de nombreuses variables interviennent et peuvent, donc, envers le produit sont des facteurs pouvant influencer la com-
modérer, de manière positive ou négative, l’effet et l’impact de préhension du message et ainsi fausser son idée première.
la musique dans une communication audiovisuelle.
Le facteur de cohérence (ou non) entre la bande-son et le
Nous allons, dans les lignes suivantes, énoncer un ensemble contexte publicitaire, autrement dit la promesse du produit,
de fondements théoriques qu’il semble essentiel d’intégrer les arguments et les images, sont, également, des facteurs
et de contrôler, lors du processus de sélection d’une musique importants. Notons, aussi, que la familiarité de la musique, sur
dans le milieu publicitaire. Les caractéristiques individuelles et le public cible, peut, également, influer sur les performances
sociodémographiques sont les premiers fondements à pren- de la bande-son.
dre en compte, lors d’une synchronisation.
32 music & ads.
33. Chapitre
numéro deux.
Caractéristiques individuelles
et sociodémographiques
1. Les caractéristiques individuelles et ans (selon une étude réalisée, en 1986, Le concept de l’implication a été introduit,
sociodémographiques et la musique par Holbrook et Schindler) ou, encore, en 1983, par des chercheurs en marketing
publicitaire la personnalité des téléspectateurs. Les (Cacioppo et Schumann), qui essayaient
résultats de l’étude menée par Cattel et de comprendre et d’expliquer la manière
Afin que la musique remplisse son Saunders, en 1984, révèlent que des in- dont une publicité fonctionnait sur les
objectif sur la cible de l’annonceur, il dividus au tempérament enthousiaste prospects.
est nécessaire de comprendre, mais sur- ont une préférence pour la musique po-
tout de savoir, quelles sont les carac- pulaire, à tempo rapide ; à contrario, les À la suite de cette étude, ils ont énoncé
téristiques de celle-ci. Par exemple, les personnes sensibles ont une préférence qu’un consommateur, qui emprunte la
femmes perçoivent plus aisément les et un attrait pour la musique classique. voix de la persuasion centrale (expliqué
émotions que les hommes ; elles sont, dans le chapitre 3 : la fonction affective),
également, plus sensibles à un volume Quand le temps est venu d’effectuer une a un niveau d’implication très élevé
sonore élevé (recherche effectuée par sélection pour une musique basée sur (fortement intéressé par l’achat du produit).
Lacher en 1994). la fonction affective, il est primordial de
connaître les caractéristiques individue- Celui-ci va analyser les arguments du
Ainsi, une marque de vêtement pour lles et sociodémographiques de la cible, produit et, donc, prendre en compte des
femme peut s’appuyer fortement sur pour éviter toute erreur lors de cette éléments rationnels. En revanche, si son
l’aspect symbolique et émotionnel d’une sélection. action est dite directe, il va prendre en
musique, mais doit prendre en compte compte les éléments périphériques du
que celle-ci ne doit jamais être intégrée Le pré-test est, dans ce cas, un outil utile spot. Autrement dit, les composants
dans le spot de manière élevée. et bénéfique, car il permet de s’assurer annexes à la promesse du produit seront
de la cohérence et de la pertinence de la analysés, tels que les couleurs, la musique
Cependant, une étude, commandée par musique sélectionnée, pour la cible de ou, encore, le traitement des images.
le CSA et réalisée à partir de juin 2003 l’annonceur.
par l’École Nationale Supérieure des
Télécommunications de Paris, a fait 2. L’influence de l’impaction des ca-
apparaître que, dans plus de 50 % des ractéristiques individuelles et sociodé-
cas, le volume sonore des écrans publi- mographiques sur le traitement de
citaires, sur TF1, France 2, France 3 et l’information musical et publicitaire
M6, dépasse le volume sonore moyen du
programme les précédant. – source csa.fr L’âge et le niveau d’implication sont
des facteurs, qui peuvent modifier, de
D’autres facteurs que le sexe rentrent en manière conséquente, le traitement de
ligne de compte pour la sélection d’une l’information publicitaire.
musique, comme les goûts musicaux,
qui se figent vers l’âge de vingt-trois
music & ads. 33
34. troisième partie
À la suite de cette étude, ils ont énoncé qu’un consommateur, Si la voix off est présente dans le spot, il s’agira d’une publi-
qui emprunte la voix de la persuasion centrale (expliqué dans le cité rationnelle et la musique choisie sera, alors, destinée à
chapitre 3 : la fonction affective), a un niveau d’implication très l’arrière-plan. Son pouvoir émotionnel sera réduit au maxi-
élevé (fortement intéressé par l’achat du produit). mum, sans pour autant inhiber les attributs de la marque.
En revanche, si aucune voix off n’est présente lors du spot, il
Celui-ci va analyser les arguments du produit et, donc, prendre s’agira d’une publicité émotionnelle et la musique choisie aura,
en compte des éléments rationnels. En revanche, si son action alors, la première place dans celui-ci, pour transmettre toute
est dite directe, il va prendre en compte les éléments périphé- l’émotion et les promesses du produit.
riques du spot. Autrement dit, les composants annexes à la
promesse du produit seront analysés, tels que les couleurs, la Ainsi, l’intégration de la musique pour Apple est un élément, à
musique ou, encore, le traitement des images. part entière, dans leur stratégie de création publicitaire.
Ils ont réussi à instaurer un conditionnement sur leur cible,
grâce à un style bien différent, lorsqu’il s’agit de comprendre
ou juste de découvrir et d’aimer. Effectivement, la charge émo-
tionnelle de la musique doit être prise en compte, afin de ne
pas perturber le traitement de l’information.
Outre le niveau d’impaction du consommateur, l’âge est, éga-
lement, un élément, qui a été étudié par des chercheurs, afin
de comprendre quelle était l’influence de ce facteur dans la
transmission d’une communication audiovisuelle et comment
la musique influait sur celle-ci.
Une première recherche a été menée (Gorn, Goldberg et
Litvack) sur ce sujet, en 1991. Leur expérience s’est basée sur
des individus âgés de 60 à 84 ans. Leurs conclusions ont
démontré que, si l’annonceur souhaitait développer sa noto-
riété, l’utilisation de musique de fond n’est pas recommandée
sur un public sénior. En effet, la musique va perturber la
mémorisation et la reconnaissance de la marque. Par contre,
dans le cas où l’objectif de l’annonceur est de travailler sur les
attitudes et les croyances du consommateur, aucun aspect
négatif n’apparaît sur les résultats, lorsque la publicité est cou-
La musique est, donc, considérée comme un stimulus faisant plée avec une musique de fond et des arguments verbeux, en
partie des éléments périphériques et peut, donc, être très comparaison avec un spot uniquement verbal.
efficace si la cible a un niveau d’implication faible vis-à-vis du
produit. À l’inverse, elle peut être néfaste, si celle-ci dispose Cependant, cette conclusion n’a pas été confirmée par une autre
d’un niveau d’implication élevé. Notons, tout de même, qu’il recherche entreprise en 1995 (Cole, Castellan et Schum). Leur
s’agit d’une règle générale et que dans toutes règles, il y a des expérience n’a pas démontré d’effet positif ou négatif au sti-
exceptions. mulus musical intégré dans une publicité sur un public sénior,
que ce soit pour améliorer la notoriété ou modifier les attitudes
Prenons l’exemple d’Apple ; dans leur communication audio- ou croyances de cette cible.
visuelle, deux grands types de spots se partagent nos écrans.
Nous pourrions les classifier de la sorte : publicité émotionne- Ainsi, les recherches menées n’ont pas pu démontrer, de maniè-
lle et publicité rationnelle. Il est intéressant de remarquer que re explicite, que la musique pouvait avoir un impact négatif ou
dans chacune des catégories énoncées la musique est présen- positif sur une cible sénior. Néanmoins, notons que l’utilisation
te. Cependant, une grande différence subsiste dans le choix de la musique, pour une cible sénior ou d’enfant en bas âge,
musical. L’élément décisif qui intervient, est l’intégration d’une peut compliquer, de manière significative, le traitement de
voix off (ou non). l’information, car ces cibles disposent d’une capacité cognitive
réduite.
34 music & ads.
36. troisième partie
Chapitre
numéro trois.
L’utilisation de musique
familière en publicité
Il serait logique de se dire, que l’utilisation Ainsi, si la musique, qui fait remontrer Publicité pour Coco Mademoiselle Chanel
de musique familière dans une publi- des pensées négatives chez le téléspec-
cité est le gage d’une réussite ou, tout tateur, se trouve dans le spot, celui-ci va
du moins, un filet de sécurité. Malheu- traduire, de manière négative, ce stimu-
reusement, ce n’est pas le cas. Dans le lus musical et transférer ce sentiment
domaine publicitaire, l’utilisation d’un sur le produit ou la marque.
même morceau pour deux marques
n’est pas si rare. Ce phénomène est nommé, par les pro-
fessionnels du marketing, comme étant
Dans ce cas précis, si l’utilisation du le phénomène de l’indexicalité (traduit
morceau n’est pas suffisamment diffé- de l’anglais indexicability)
rente entre les deux marques et les deux
spots, un risque majeur de cannibalisa- Étonnamment, on pourrait penser que,
tion intervient, pour la deuxième mar- si la musique évoque chez la cible des
que. Autrement dit, le risque est que le émotions personnelles positives, celle-ci
consommateur mémorise la deuxième va, comme dans l’étude précédente, être
publicité comme étant celle du premier assimilée au produit ou à la marque.
annonceur, surtout si la diffusion des Pourtant, une étude démontre, que ce
Publicité pour Airness Success
deux spots est simultanée ou proche n’est pas forcément le cas.
dans le temps ou, encore, si les domaines
d’activités des marques sont proches Car, si, dans un premier temps, la musi-
l’un de l’autre. que attire l’attention du téléspectateur,
dans un second temps, des interféren-
En 1990, un chercheur du nom de Tom, a ces se produisent entre ses émotions
également émis un bémol sur l’utilisation personnelles et les éléments verbaux du
de musique familière. Ainsi, les résul- message publicitaire, entraînant, ainsi,
tats de cette expérience ont démontré, un effet négatif sur la marque, car celui-
que l’utilisation de ce type de musique ci ne parviendra pas à se focaliser sur les
fait resurgir des souvenirs et des émo- éléments centraux du message (dans le
tions personnels, dans l’esprit du télés- cas où le niveau d’impaction est élevé).
pectateur, qui interfèrent et troublent, Même si l’impaction du téléspectateur
de manière éloquente, le traitement est faible envers le produit ou la marque,
de l’information publicitaire et peuvent ses émotions personnelles prendront le
même se traduire sur la marque ou le dessus, l’éloignant, ainsi, de la publicité.
produit.
36 music & ads.