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Faut-il avoir peur de
    l’évaluation?
         Charles Hadji
Professeur émérite de l’Université
           Grenoble 2
4 idées principales
1  L’évaluation est une nécessité
 2 Mais elle ne doit pas devenir
  obsessionnelle
 3 Et encore moins servile
 4 C’est pourquoi elle a besoin d’une
  double légitimité, méthodologique et
  éthique.
Point 1: L’évaluation est une
               nécessité

1.   L’évaluation est une nécessité pour la
     conduite de l’action éducative, dans une
     optique de régulation
2.   Mais elle est tiraillée entre constat (de
     fait), et jugement (de valeur)
3.   Et il est possible d’en faire de
     « mauvais » usages.
1.1 Une nécessité pour la
  conduite de l’action, dans une
      optique de régulation
 Ilnous faut répondre à deux questions
  préalables:

 Question   1: qu’est-ce qu’évaluer?
 Question 2: dans quel mécanisme général
  l’évaluation s’insère-t-elle?
Un mécanisme de conduite
   éclairée de l’action
                         Feedback
                          = prise
Champ
                      d’informations
   de
                         en retour
l’évalu
  ation
           Un sujet       Tend vers    Un but
            actif

Champ                  Ajustement =
 de la                  adaptation
régulati                éclairée de
  on                      l’action
Ce mécanisme comporte deux
         « volets »
 Un   volet « surveillance » (ou: monitoring)
       • -contrôle de la situation par prise d’informations en
         retour (feedback d’ordre rétroactif)  processus
         de comparaison (si possible continue) entre un
         « état-but à atteindre » et un « état donné » (Allal,
         1993).
 Un   volet « ajustement »
       • -adaptation de l’action visant à réduire l’écart au
         but (objectif, standard ou critère), par reprise ou
         modification éventuelle de l’action en cours, ou
         déjà accomplie.
Ce qui entraîne 2
             conséquences
 La  surveillance est nécessaire pour une
  conduite éclairée de l’action: c’est dans ce
  cadre que prend sens l’évaluation
 Mais elle n’est pas une fin en soi: elle est
  là pour fournir les bases à un ajustement
  éclairé de l’action
      l’oubli de cette fonction « naturelle » ouvre
      la porte à toutes les dérives.
Question 1: L’évaluation
 (appréciative) comme production
  d’un jugement d’acceptabilité…



 Evaluer, c’est dire dans quelle mesure une
 réalité donnée peut être jugée acceptable
 par référence à des attentes.
L’évaluation dans le champ
                éducatif:
     une appréciation du « SFR »
 Evaluer,c’est apprécier la qualité d’une
 action « éducative », dans l’axe d’une
 question générale:
    quel est le « service (éducatif,
    formatif, développemental) rendu »?
L’acceptabilité de l’action
 est alors appréciée par
 référence au « SFA »,
            i.e.
   au « service formatif
        attendu »
Ainsi, par exemple:
 Evaluerun élève, c’est donc dire si son
 CSM (comportement scolaire manifeste)
 est « acceptable » par référence au CSA
 (comportement scolaire attendu).

  la question à traiter est: le CSM est-il à
 la hauteur du CSA?
1.2 une première ambiguïté
                fondamentale
   Projet 1: estimer l’importance (l’ampleur)
    d’un phénomène
        évaluation estimative, « par défaut de mesure
        »: centrée sur l’appréciation de la grandeur d’un
        phénomène, et n’ayant pas pour fin la production d’un
        jugement de valeur


   Projet 2: débattre de la valeur d’une réalité
        évaluation appréciative: centrée sur
        l’appréciation de la qualité d’une réalité, et ayant pour
        fin la production d’un jugement de valeur.
Exemples
   1: évaluation estimative:

   -évaluer les dégâts occasionnés par le tremblement de terre
   -évaluer la menace de paludisme
   -évaluer la dette du pays
   -évaluer le prix d’un appartement
   -évaluer les inégalités socio-économiques
   -évaluer le chômage, la pauvreté, la fraude fiscale….

   2: évaluation appréciative:

   -évaluer la « performance » des dirigeants d’entreprise
   -évaluer la « performance » d’un service
   -évaluer la politique de lutte contre la pauvreté
   -évaluer la qualité de l’enseignement universitaire
   -évaluer un ministre
Les 2 pôles de l’activité évaluative
                   Évaluation          Évaluation
                   estimative          appréciative
caractéristiques   Constat (de fait)   Jugement (de
                                       valeur)
                   Quantitatif         Qualitatif
                   Continuité des      Discontinuité des
                   chiffres            seuils
Exigences          Précision           Pertinence
spécifiques        Fiabilité
                   Justesse            Justice
Risques            Valorisation        Insuffisante prise
                   subreptice          en compte du réel
2 projets dont aucun ne peut ignorer
          totalement l’autre

    Estimation de                Appréciation
       l’ampleur                 de la valeur
   d’un phénomène                d’une réalité




                    EVALUATION
SI BIEN QUE:
1.   Il y a toujours une part d’estimation, voire de
     mesure, dans l’évaluation appréciative: le
     jugement se fonde sur un constat qu’il intègre
2.   L’estimation court toujours le risque de la
     valorisation subreptice et indue : présence de
     valeurs sous-jacentes à la mise en place d’un
     indicateur (ex: nombre d’actes, taux de
     mortalité pour un hôpital); choix orienté des
     seuils et des limites de catégories (ex: le seuil
     de pauvreté).
3.   De par son étymologie, le terme d’évaluation
     devrait être réservé à l’évaluation appréciative
1.3 Evaluer, c’est tenter de se
            rendre utile

 Utile à quoi?
 Cela soulève la question des fonctions de
  l’évaluation

 Utile
      à qui?
 Cela soulève la question des publics ou
 des destinataires prioritaires
 La   question des usages de l’évaluation



                                                                 A certaines fins
                 Des attentes


   Évaluer     par confrontation       Un jugement
   c’est             entre            D’acceptabilité
   produire
                                                                 Pour remplir
                  Une réalité                                    certaines
                                                                 fonctions

              Espace méthodologique de la               Espace des usages
              construction du jugement                  sociaux de l’évaluation
Il faudra donc s’interroger:
Sur les finalités de l’évaluation (en vue de quoi évalue-t-
    on?). Ex: mieux connaître une réalité? Agir sur un
    public? Modeler des individus (normalisation)? Servir
    une autorité?

Sur ses fonctions (pour faire quoi de concret évalue-t-
    on?). Ex: classer? Contrôler (des compétences)?
    Attester ou valider? Faire un diagnostic?

Sur le public qui en sera bénéficiaire (pour le bénéfice
    de qui évalue-t-on?). Ex: le public des commanditaires
    de l’évaluation? Le public directement concerné par le
    processus évaluatif? Le public constitué par un groupe
    privilégié d’acteurs sociaux?
Les 6 fonctions de l’évaluation
                scolaire
1.   Faciliter les apprentissages = évaluation formative
2.   Etayer les décisions éducatives à l’intérieur d’une école
     = évaluation diagnostique d’étape
3.   Préparer des décisions d’orientation = évaluation
     diagnostique de synthèse
4.   Éclairer/informer les acteurs du jeu social sur les acquis
     et compétences = évaluation sommative/certificative
5.   Donner des repères collectifs de niveau = évaluation
     normative de groupe
6.   Informer les citoyens sur l’état du système scolaire =
     évaluation externe
Les 2 grands usages sociaux de
 l’évaluation (selon Michel Vial,
              2001).
                  A quoi ça sert? Au service de
                                  qui?

 Fonction bilan
             Voir pour           D’un
             rendre des          responsable,
             comptes             qui va juger
 Fonction    Etre à l’écoute     Du public
 accompagnem pour                concerné, qui
 ent         promouvoir          sera éclairé
Du mauvais usage de l’évaluation
     On fait un « mauvais » usage de l’évaluation quand:
1.    On ne respecte pas les règles d’une « saine »
      méthodologie » (ex: non explicitation des attentes
      prioritaires)
2.    On ne respecte pas les exigences éthiques minimales
      (ex: quand on évalue pour humilier)
3.    On fait de l’évaluation un moyen au service de fins
      contestables (ex: éliminer; opérer un conditionnement
      idéologique, en faveur par ex. de l’idée de la positivité
      naturelle de la concurrence)
Point 2: Mais l’évaluation ne doit
  pas devenir obsessionnelle
1.   Or elle est trop souvent aujourd’hui
     devenue obsessionnelle
2.   Cette obsession ayant des effets
     dévastateurs (un climat de stress, qui
     peut rendre fou)
3.   … et se déployant dans un climat
     idéologique préoccupant
2.1 L’ère de l’évaluation
             obsessionnelle?
     une « fièvre de l’évaluation » qui
 2.1.1
 gagne l’Ecole:
     •   -omniprésence des interrogations et des contrôles
     •   -évaluation des élèves de maternelle
     •   -débauche de classements
     •   -folie des notes


 2.1.2… comme elle gagne toute la
 société
     • -un univers où tout est classé, donc classant (Max
       Dorra).
2.2 Une obsession aux effets
        dévastateurs
 2.2.1: un climat de stress: l’enjeu de la
  compétition scolaire devient écrasant pour
  les élèves
     • -une école devenant anxiogène
               contre la notation facteur d’angoisse, et la souffrance
               à l’Ecole
     • -des devoirs scolaires devenant un châtiment
       familial
               contre la sous-traitance pédagogique et
               l’externalisation du traitement de la difficulté scolaire

 2.2.2   … qui peut rendre fou
2.3 Une obsession exprimant une
  vision réductrice de la valeur
 2.3.1 réduction de la réalité humaine à sa
  dimension quantitative (je possède, donc
  je suis); substitution du désir de posséder
  au désir de comprendre.
 2.3.2 Réduction de la régulation au
  contrôle social
 2.3.3 Réduction du travail scolaire à la
  compétition concurrentielle, et de la
  réussite à la performance.
3. Le risque pour l’évaluation
   est alors de devenir servile
 3.1 En se soumettant à l’idéologie néo-
 libérale

 3.2 En se soumettant à la dictature de
 l’immédiat et du superficiel

 3.3 En se soumettant aux pouvoirs, et à
 l’argent
3.1 En se soumettant à
        l’idéologie dominante
 Car:
 1. L’extension du domaine de l’évaluation
  s’est effectuée dans un contexte
  idéologique marqué, celui de l’idéologie
  néo-libérale actuellement dominante, où
  est méconnue, voire bafouée, l’exigence
  du respect de la dignité de la personne
  humaine, volontiers réduite à sa
  dimension de marchandise.
Les promesses de          L’envers du tableau
l’idéologie               (une réalité
(un modèle idyllique)     calamiteuse)
Efficacité et résultats   Politique du chiffre
Saine concurrence         Élimination des faibles
Compétitivité             Enrichissement des plus
                          cupides
Performances              Excès et dérives
Rentabilité               Inégalités et
                          précarisations
Mérite                    Bénédiction du fait
Excellence                Dévalorisation
Marché autorégulateur     Crises et krachs
…Car: 2. dans ce contexte,
     l’évaluation a tendance à devenir
                   servile
1.    Asservissement à des croyances: une évaluation soumise aux
      dogmes néo-libéraux, et aux prétendues lois de l’économie
      (sacralisation des notions d’excellence et de concurrence)

2.    Asservissement au court terme: une évaluation soumise à la
      dictature de l’immédiat (tournée vers ce qui est le plus facile à
      estimer, et/car le plus visible à court terme)

3.    Asservissement au pouvoir: une évaluation soumise aux
      politiques (tentation de la bienveillance à l’égard des puissants)

4.    Asservissement à l’argent : une évaluation soumise à la finance
      (prégnance des logiques comptables).
L’exemple de l’évaluation des
            écoles

 Une  première expérience positive: le «
  dispositif d’évaluation pédagogique »
  (1979  1986)
 Une deuxième expérience positive: les «
  évaluations diagnostiques de masse »
  CE2/6ième (1989  2003)
 Une expérience
  controversée: l’évaluation CM2 2009
Une première expérience positive: le
      « dispositif d’évaluation
          pédagogique »
     Ce dispositif, mis en place par la DEP de 1979
      (CP) à 1986 (lycée) présente 3 grandes
      caractéristiques:
 1.   Des intentions clairement affichées (mesurer
      les connaissances des élèves)
 2.   Un public de destination clairement désigné (le
      constat macroscopique est destiné à
      l’ensemble des citoyens)
 3.   Un refus d’individualisation des données.
      Celle-ci « n’a aucun sens et est même
      contraire à la rigueur et à l’objectivité » (Les
      dossiers Education et Formation, 1, avril 89)
Une deuxième expérience positive: les
 « évaluations diagnostiques de masse
      » CE2/6ième (1989 2003)
    5 grandes caractéristiques:
1.   Touchent tous les élèves en début d’année
2.   2 finalités, mais claires: faire le point sur l’état des savoirs et
     savoir-faire sur certaines compétences; éclairer l’action des
     enseignants (choix des stratégies, remédiations)
3.   2 publics de destination clairement désignés (le grand public;
     les enseignants)
4.   Des épreuves construites en respectant 3 principes:
     démarche participative; expérimentation; évolution et
     adaptation
5.   Un triple refus:
    refus d’en faire un bilan d’un niveau de scolarisation
    refus des comparaisons dans le temps
     refus d’une fonction normative, et de tout classement
Une expérience
    controversée: l’évaluation CM2
                2009
   Un objectif officiel recevable: donner une image objective et fiable des
    connaissances et compétences des élèves de CM2

   Mais 4 sujets de préoccupation:

         Pourquoi en milieu d’année?

         Pourquoi un dispositif construit en milieu fermé (ministère)?

         Suspicion d’existence d’un but caché: mise en concurrence des
         écoles

         Un triple défaut de légitimité (Nathalie Mons):
              Défaut de légitimité scientifique (car absence de distance critique)
     •        Défaut de légitimité professionnelle (car pas de démarche participative)
     •        Défaut de légitimité politique (car pas de consensus sur les fins)
Faut-il donc avoir peur de
         l’évaluation des écoles?
    OUI, SI:
1.   Elle s’opère sur des bases aussi sauvages
     (résultats bruts à des tests ou examens) que
     réductrices (seulement des résultats scolaires)
2.   Elle ne se donne pas les moyens d’une
     évaluation intelligente (mise en perspective
     des résultats d’élèves)
3.   La volonté de classer est prépondérante (fin
     discutable)
4.   Elle détourne du problème d’action prioritaire:
     aider les élèves de l’école à progresser.
Faut-il donc avoir peur de
        l’évaluation des écoles?
    NON, SI:
1.   Il n’y a pas d’ambiguïté sur ses fins
2.   Elle ne se contente pas d’un seul
     indicateur (résultats bruts)
3.   Elle rapporte les résultats à leurs
     conditions de production (environnement
     socio-économique de l’établissement;
     structuration du public d’élèves)
Finalement, les résultats des élèves
peuvent-ils servir à l’évaluation des
         établissements?
    OUI? SI:

1.   On s’intéresse à toutes les dimensions de l’activité des
     établissements (dont la seule mission n’est pas de
     faire réussir à des examens)  ne pas se contenter de
     résultas d’examen ou de tests
2.   On prend en compte la particularité des conditions de
     production des résultats pour les mettre en perspective
      sinon la volonté de classement, contre laquelle on
     aura du mal à résister,débouchera, non sur un
     palmarès, mais sur un simple tableau des inégalités
     d’éducation!
Opération     Réalité        Indicateur              Ce qui est
effectuée     considérée                             « mesuré »
Constat de    Résultat brut I.1Taux de              Le succès par
                                                    candidatures
type 1        ponctuel      Réussite au             =succès à l’examen
                                                    Des élèves de
                            bac                     terminale présentés

Constat de    Parcours       I.2 Taux d’accès au     Effort
                                 bac
type 2        effectués      a)depuis la seconde     d’accompagn
                             b)depuis la première    ement
              (par de
              individus ou                           Persévéranc
                             I.3 proportion des
              des            bacheliers parmi les    e
              cohortes)      sortants du lycée       pédagogique
Mise en       Résultats      I.4 Valeur              Différence
perspective   dans leurs     ajoutée                 Entre réalisé
              contextes                              et attendu
…Mais (3): si l’évaluation:
 Est devenue quasiment obsessionnelle
 En étant marquée par une obsession de la
  compétition
 Ce qui en fait un outil de normalisation
 Etant ainsi touchée par la maladie de la «
  valeur vénale » (Max Dorra), dans un
  monde d’ « humains-marchandises » où
  tout s’achète et se vend…
   …elle n’est pas par nature idéologique, et peut
    même participer à la résistance contre:

       La réduction de l’homme à sa valeur d’échange (à un
        statut de marchandise)
       La réduction de la Valeur à la valeur argent

       Les évaluateurs ne sont pas condamnés à n’être que
        les chronométreurs officiels des grands jeux
        olympiques de la finance mondiale.

               C’est l’oubli du questionnement sur la Valeur qui est
                ravageur.
4. Comment redonner alors à
     l’évaluation sa légitimité
  (méthodologique et éthique)?
 4.1En lui faisant retrouver le sens du
  questionnement pertinent
  ex: non pas : « qui est le meilleur? »;
  mais: « chacun a-t-il bien appris ce qu’il
  devait apprendre? »

 4.2
    en la mettant au service du plus grand
 nombre
4.1 La démarche d’évaluation en
           condensé: 3 temps forts,
            autour de 3 questions

   Question 1: qu’est-on essentiellement en droit d’attendre de l’
    « objet » évalué? Quel est le service attendu (SA)?
           assigner des attentes prioritaires

   Question 2: que faudra-t-il alors aller voir (observer)?
          identifier des espaces d’observations, i.e. des «
    lignes de lecture » de l’objet

   Question 3: et à quoi verra-t-on que l’attente est satisfaite ou
    non?
         définir des indicateurs de réussite, i.e. des signes
    d’appréciation du service rendu (SR) par la réalité évaluée
4.2 Se mettre au service du plus
        grand nombre
 En   se délivrant d’une triple obsession:

-  l’obsession de la sélection  contre la
  « constante macabre »
 - l’obsession de la compétition  contre la
  débauche de classements
 - l’obsession de la notation  contre la
  « folie » des notes
En conclusion: retrouver le sens
 de l’accompagnement, et de la
          promotion…
 La première façon d’être utile (en
  évaluation, comme ailleurs) est de ne pas
  nuire!
  les 2 règles d’une éthique « minimale »:
     - 1 Neminem laede = ne fais de mal à
      personne
     -2 Imo omnes, quantum potes, juva = mais
      bien plutôt vient en aide à tous, autant que tu
      peux…

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Faut il avoir peur de l’évaluation

  • 1. Faut-il avoir peur de l’évaluation? Charles Hadji Professeur émérite de l’Université Grenoble 2
  • 2. 4 idées principales 1 L’évaluation est une nécessité  2 Mais elle ne doit pas devenir obsessionnelle  3 Et encore moins servile  4 C’est pourquoi elle a besoin d’une double légitimité, méthodologique et éthique.
  • 3. Point 1: L’évaluation est une nécessité 1. L’évaluation est une nécessité pour la conduite de l’action éducative, dans une optique de régulation 2. Mais elle est tiraillée entre constat (de fait), et jugement (de valeur) 3. Et il est possible d’en faire de « mauvais » usages.
  • 4. 1.1 Une nécessité pour la conduite de l’action, dans une optique de régulation  Ilnous faut répondre à deux questions préalables:  Question 1: qu’est-ce qu’évaluer?  Question 2: dans quel mécanisme général l’évaluation s’insère-t-elle?
  • 5. Un mécanisme de conduite éclairée de l’action Feedback = prise Champ d’informations de en retour l’évalu ation Un sujet Tend vers Un but actif Champ Ajustement = de la adaptation régulati éclairée de on l’action
  • 6. Ce mécanisme comporte deux « volets »  Un volet « surveillance » (ou: monitoring) • -contrôle de la situation par prise d’informations en retour (feedback d’ordre rétroactif)  processus de comparaison (si possible continue) entre un « état-but à atteindre » et un « état donné » (Allal, 1993).  Un volet « ajustement » • -adaptation de l’action visant à réduire l’écart au but (objectif, standard ou critère), par reprise ou modification éventuelle de l’action en cours, ou déjà accomplie.
  • 7. Ce qui entraîne 2 conséquences  La surveillance est nécessaire pour une conduite éclairée de l’action: c’est dans ce cadre que prend sens l’évaluation  Mais elle n’est pas une fin en soi: elle est là pour fournir les bases à un ajustement éclairé de l’action   l’oubli de cette fonction « naturelle » ouvre la porte à toutes les dérives.
  • 8. Question 1: L’évaluation (appréciative) comme production d’un jugement d’acceptabilité…  Evaluer, c’est dire dans quelle mesure une réalité donnée peut être jugée acceptable par référence à des attentes.
  • 9. L’évaluation dans le champ éducatif: une appréciation du « SFR »  Evaluer,c’est apprécier la qualité d’une action « éducative », dans l’axe d’une question générale: quel est le « service (éducatif, formatif, développemental) rendu »?
  • 10. L’acceptabilité de l’action est alors appréciée par référence au « SFA », i.e. au « service formatif attendu »
  • 11. Ainsi, par exemple:  Evaluerun élève, c’est donc dire si son CSM (comportement scolaire manifeste) est « acceptable » par référence au CSA (comportement scolaire attendu).  la question à traiter est: le CSM est-il à la hauteur du CSA?
  • 12. 1.2 une première ambiguïté fondamentale  Projet 1: estimer l’importance (l’ampleur) d’un phénomène   évaluation estimative, « par défaut de mesure »: centrée sur l’appréciation de la grandeur d’un phénomène, et n’ayant pas pour fin la production d’un jugement de valeur  Projet 2: débattre de la valeur d’une réalité   évaluation appréciative: centrée sur l’appréciation de la qualité d’une réalité, et ayant pour fin la production d’un jugement de valeur.
  • 13. Exemples  1: évaluation estimative:  -évaluer les dégâts occasionnés par le tremblement de terre  -évaluer la menace de paludisme  -évaluer la dette du pays  -évaluer le prix d’un appartement  -évaluer les inégalités socio-économiques  -évaluer le chômage, la pauvreté, la fraude fiscale….  2: évaluation appréciative:  -évaluer la « performance » des dirigeants d’entreprise  -évaluer la « performance » d’un service  -évaluer la politique de lutte contre la pauvreté  -évaluer la qualité de l’enseignement universitaire  -évaluer un ministre
  • 14. Les 2 pôles de l’activité évaluative Évaluation Évaluation estimative appréciative caractéristiques Constat (de fait) Jugement (de valeur) Quantitatif Qualitatif Continuité des Discontinuité des chiffres seuils Exigences Précision Pertinence spécifiques Fiabilité Justesse Justice Risques Valorisation Insuffisante prise subreptice en compte du réel
  • 15. 2 projets dont aucun ne peut ignorer totalement l’autre Estimation de Appréciation l’ampleur de la valeur d’un phénomène d’une réalité EVALUATION
  • 16. SI BIEN QUE: 1. Il y a toujours une part d’estimation, voire de mesure, dans l’évaluation appréciative: le jugement se fonde sur un constat qu’il intègre 2. L’estimation court toujours le risque de la valorisation subreptice et indue : présence de valeurs sous-jacentes à la mise en place d’un indicateur (ex: nombre d’actes, taux de mortalité pour un hôpital); choix orienté des seuils et des limites de catégories (ex: le seuil de pauvreté). 3. De par son étymologie, le terme d’évaluation devrait être réservé à l’évaluation appréciative
  • 17. 1.3 Evaluer, c’est tenter de se rendre utile  Utile à quoi?  Cela soulève la question des fonctions de l’évaluation  Utile à qui?  Cela soulève la question des publics ou des destinataires prioritaires
  • 18.  La question des usages de l’évaluation A certaines fins Des attentes Évaluer par confrontation Un jugement c’est entre D’acceptabilité produire Pour remplir Une réalité certaines fonctions Espace méthodologique de la Espace des usages construction du jugement sociaux de l’évaluation
  • 19. Il faudra donc s’interroger: Sur les finalités de l’évaluation (en vue de quoi évalue-t- on?). Ex: mieux connaître une réalité? Agir sur un public? Modeler des individus (normalisation)? Servir une autorité? Sur ses fonctions (pour faire quoi de concret évalue-t- on?). Ex: classer? Contrôler (des compétences)? Attester ou valider? Faire un diagnostic? Sur le public qui en sera bénéficiaire (pour le bénéfice de qui évalue-t-on?). Ex: le public des commanditaires de l’évaluation? Le public directement concerné par le processus évaluatif? Le public constitué par un groupe privilégié d’acteurs sociaux?
  • 20. Les 6 fonctions de l’évaluation scolaire 1. Faciliter les apprentissages = évaluation formative 2. Etayer les décisions éducatives à l’intérieur d’une école = évaluation diagnostique d’étape 3. Préparer des décisions d’orientation = évaluation diagnostique de synthèse 4. Éclairer/informer les acteurs du jeu social sur les acquis et compétences = évaluation sommative/certificative 5. Donner des repères collectifs de niveau = évaluation normative de groupe 6. Informer les citoyens sur l’état du système scolaire = évaluation externe
  • 21. Les 2 grands usages sociaux de l’évaluation (selon Michel Vial, 2001). A quoi ça sert? Au service de qui? Fonction bilan Voir pour D’un rendre des responsable, comptes qui va juger Fonction Etre à l’écoute Du public accompagnem pour concerné, qui ent promouvoir sera éclairé
  • 22. Du mauvais usage de l’évaluation  On fait un « mauvais » usage de l’évaluation quand: 1. On ne respecte pas les règles d’une « saine » méthodologie » (ex: non explicitation des attentes prioritaires) 2. On ne respecte pas les exigences éthiques minimales (ex: quand on évalue pour humilier) 3. On fait de l’évaluation un moyen au service de fins contestables (ex: éliminer; opérer un conditionnement idéologique, en faveur par ex. de l’idée de la positivité naturelle de la concurrence)
  • 23. Point 2: Mais l’évaluation ne doit pas devenir obsessionnelle 1. Or elle est trop souvent aujourd’hui devenue obsessionnelle 2. Cette obsession ayant des effets dévastateurs (un climat de stress, qui peut rendre fou) 3. … et se déployant dans un climat idéologique préoccupant
  • 24. 2.1 L’ère de l’évaluation obsessionnelle? une « fièvre de l’évaluation » qui  2.1.1 gagne l’Ecole: • -omniprésence des interrogations et des contrôles • -évaluation des élèves de maternelle • -débauche de classements • -folie des notes  2.1.2… comme elle gagne toute la société • -un univers où tout est classé, donc classant (Max Dorra).
  • 25. 2.2 Une obsession aux effets dévastateurs  2.2.1: un climat de stress: l’enjeu de la compétition scolaire devient écrasant pour les élèves • -une école devenant anxiogène   contre la notation facteur d’angoisse, et la souffrance à l’Ecole • -des devoirs scolaires devenant un châtiment familial   contre la sous-traitance pédagogique et l’externalisation du traitement de la difficulté scolaire  2.2.2 … qui peut rendre fou
  • 26. 2.3 Une obsession exprimant une vision réductrice de la valeur  2.3.1 réduction de la réalité humaine à sa dimension quantitative (je possède, donc je suis); substitution du désir de posséder au désir de comprendre.  2.3.2 Réduction de la régulation au contrôle social  2.3.3 Réduction du travail scolaire à la compétition concurrentielle, et de la réussite à la performance.
  • 27. 3. Le risque pour l’évaluation est alors de devenir servile  3.1 En se soumettant à l’idéologie néo- libérale  3.2 En se soumettant à la dictature de l’immédiat et du superficiel  3.3 En se soumettant aux pouvoirs, et à l’argent
  • 28. 3.1 En se soumettant à l’idéologie dominante  Car:  1. L’extension du domaine de l’évaluation s’est effectuée dans un contexte idéologique marqué, celui de l’idéologie néo-libérale actuellement dominante, où est méconnue, voire bafouée, l’exigence du respect de la dignité de la personne humaine, volontiers réduite à sa dimension de marchandise.
  • 29. Les promesses de L’envers du tableau l’idéologie (une réalité (un modèle idyllique) calamiteuse) Efficacité et résultats Politique du chiffre Saine concurrence Élimination des faibles Compétitivité Enrichissement des plus cupides Performances Excès et dérives Rentabilité Inégalités et précarisations Mérite Bénédiction du fait Excellence Dévalorisation Marché autorégulateur Crises et krachs
  • 30. …Car: 2. dans ce contexte, l’évaluation a tendance à devenir servile 1. Asservissement à des croyances: une évaluation soumise aux dogmes néo-libéraux, et aux prétendues lois de l’économie (sacralisation des notions d’excellence et de concurrence) 2. Asservissement au court terme: une évaluation soumise à la dictature de l’immédiat (tournée vers ce qui est le plus facile à estimer, et/car le plus visible à court terme) 3. Asservissement au pouvoir: une évaluation soumise aux politiques (tentation de la bienveillance à l’égard des puissants) 4. Asservissement à l’argent : une évaluation soumise à la finance (prégnance des logiques comptables).
  • 31. L’exemple de l’évaluation des écoles  Une première expérience positive: le « dispositif d’évaluation pédagogique » (1979  1986)  Une deuxième expérience positive: les « évaluations diagnostiques de masse » CE2/6ième (1989  2003)  Une expérience controversée: l’évaluation CM2 2009
  • 32. Une première expérience positive: le « dispositif d’évaluation pédagogique »  Ce dispositif, mis en place par la DEP de 1979 (CP) à 1986 (lycée) présente 3 grandes caractéristiques: 1. Des intentions clairement affichées (mesurer les connaissances des élèves) 2. Un public de destination clairement désigné (le constat macroscopique est destiné à l’ensemble des citoyens) 3. Un refus d’individualisation des données. Celle-ci « n’a aucun sens et est même contraire à la rigueur et à l’objectivité » (Les dossiers Education et Formation, 1, avril 89)
  • 33. Une deuxième expérience positive: les « évaluations diagnostiques de masse » CE2/6ième (1989 2003)  5 grandes caractéristiques: 1. Touchent tous les élèves en début d’année 2. 2 finalités, mais claires: faire le point sur l’état des savoirs et savoir-faire sur certaines compétences; éclairer l’action des enseignants (choix des stratégies, remédiations) 3. 2 publics de destination clairement désignés (le grand public; les enseignants) 4. Des épreuves construites en respectant 3 principes: démarche participative; expérimentation; évolution et adaptation 5. Un triple refus:  refus d’en faire un bilan d’un niveau de scolarisation  refus des comparaisons dans le temps  refus d’une fonction normative, et de tout classement
  • 34. Une expérience controversée: l’évaluation CM2 2009  Un objectif officiel recevable: donner une image objective et fiable des connaissances et compétences des élèves de CM2  Mais 4 sujets de préoccupation: Pourquoi en milieu d’année? Pourquoi un dispositif construit en milieu fermé (ministère)? Suspicion d’existence d’un but caché: mise en concurrence des écoles Un triple défaut de légitimité (Nathalie Mons): Défaut de légitimité scientifique (car absence de distance critique) • Défaut de légitimité professionnelle (car pas de démarche participative) • Défaut de légitimité politique (car pas de consensus sur les fins)
  • 35. Faut-il donc avoir peur de l’évaluation des écoles?  OUI, SI: 1. Elle s’opère sur des bases aussi sauvages (résultats bruts à des tests ou examens) que réductrices (seulement des résultats scolaires) 2. Elle ne se donne pas les moyens d’une évaluation intelligente (mise en perspective des résultats d’élèves) 3. La volonté de classer est prépondérante (fin discutable) 4. Elle détourne du problème d’action prioritaire: aider les élèves de l’école à progresser.
  • 36. Faut-il donc avoir peur de l’évaluation des écoles?  NON, SI: 1. Il n’y a pas d’ambiguïté sur ses fins 2. Elle ne se contente pas d’un seul indicateur (résultats bruts) 3. Elle rapporte les résultats à leurs conditions de production (environnement socio-économique de l’établissement; structuration du public d’élèves)
  • 37. Finalement, les résultats des élèves peuvent-ils servir à l’évaluation des établissements?  OUI? SI: 1. On s’intéresse à toutes les dimensions de l’activité des établissements (dont la seule mission n’est pas de faire réussir à des examens)  ne pas se contenter de résultas d’examen ou de tests 2. On prend en compte la particularité des conditions de production des résultats pour les mettre en perspective  sinon la volonté de classement, contre laquelle on aura du mal à résister,débouchera, non sur un palmarès, mais sur un simple tableau des inégalités d’éducation!
  • 38. Opération Réalité Indicateur Ce qui est effectuée considérée « mesuré » Constat de Résultat brut I.1Taux de Le succès par candidatures type 1 ponctuel Réussite au =succès à l’examen Des élèves de bac terminale présentés Constat de Parcours I.2 Taux d’accès au Effort bac type 2 effectués a)depuis la seconde d’accompagn b)depuis la première ement (par de individus ou Persévéranc I.3 proportion des des bacheliers parmi les e cohortes) sortants du lycée pédagogique Mise en Résultats I.4 Valeur Différence perspective dans leurs ajoutée Entre réalisé contextes et attendu
  • 39. …Mais (3): si l’évaluation:  Est devenue quasiment obsessionnelle  En étant marquée par une obsession de la compétition  Ce qui en fait un outil de normalisation  Etant ainsi touchée par la maladie de la « valeur vénale » (Max Dorra), dans un monde d’ « humains-marchandises » où tout s’achète et se vend…
  • 40. …elle n’est pas par nature idéologique, et peut même participer à la résistance contre:  La réduction de l’homme à sa valeur d’échange (à un statut de marchandise)  La réduction de la Valeur à la valeur argent  Les évaluateurs ne sont pas condamnés à n’être que les chronométreurs officiels des grands jeux olympiques de la finance mondiale.  C’est l’oubli du questionnement sur la Valeur qui est ravageur.
  • 41. 4. Comment redonner alors à l’évaluation sa légitimité (méthodologique et éthique)?  4.1En lui faisant retrouver le sens du questionnement pertinent   ex: non pas : « qui est le meilleur? »; mais: « chacun a-t-il bien appris ce qu’il devait apprendre? »  4.2 en la mettant au service du plus grand nombre
  • 42. 4.1 La démarche d’évaluation en condensé: 3 temps forts, autour de 3 questions  Question 1: qu’est-on essentiellement en droit d’attendre de l’ « objet » évalué? Quel est le service attendu (SA)?  assigner des attentes prioritaires  Question 2: que faudra-t-il alors aller voir (observer)?  identifier des espaces d’observations, i.e. des « lignes de lecture » de l’objet  Question 3: et à quoi verra-t-on que l’attente est satisfaite ou non?  définir des indicateurs de réussite, i.e. des signes d’appréciation du service rendu (SR) par la réalité évaluée
  • 43. 4.2 Se mettre au service du plus grand nombre  En se délivrant d’une triple obsession: - l’obsession de la sélection  contre la « constante macabre »  - l’obsession de la compétition  contre la débauche de classements  - l’obsession de la notation  contre la « folie » des notes
  • 44. En conclusion: retrouver le sens de l’accompagnement, et de la promotion…  La première façon d’être utile (en évaluation, comme ailleurs) est de ne pas nuire!   les 2 règles d’une éthique « minimale »:  - 1 Neminem laede = ne fais de mal à personne  -2 Imo omnes, quantum potes, juva = mais bien plutôt vient en aide à tous, autant que tu peux…