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LA PRESSE NOUVELLE

Magazine
Progressiste
Juif

PNM aborde de manière critique les problèmes politiques et culturels, nationaux et internationaux. Elle se refuse à toute diabolisation et combat résolument toutes les manifestations d'antisémitisme et de
racisme, ouvertes ou sournoises. PNM se prononce pour une paix juste au Moyen-Orient, sur la base du droit de l'Etat d'Israël à la sécurité, et sur la reconnaissance du droit à un Etat du peuple palestinien.

N° 252 - JANVIER 2008 - 26e A N NÉE

L e N° 5 , 5 0 €

MENSUEL EDITE PAR L’U.J.R.E.
Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide

Mémoire

-

27

janvier

-

Auschwitz

libéré

JOURNÉE INTERNATIONALE POUR LA MÉMOIRE DE LA SHOAH ET
POUR LA PRÉVENTION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ
Ce la e st arriv é , c e la pe ut arrive r e nc o r e ! Primo L E V I

AUSCHWITZ

VON JUDEN BLUT
© M. KRAKOWSKI - USA

63 ANS DÉJÀ !
Le 27 janvier 1945, l’Armée
Rouge libérait le camp
d’Auschwitz, faisant découvrir
au monde l’horreur des camps
d’extermination nazis.

Chaque traverse est une page
Chaque page est un monument
J’entens encore les hurlements
Des plus faibles de ces otages
Les cris et les coups se succèdent
Puis les cris ne s’entendent plus,
Vient un moment où le corps cède
Ne subsiste qu’un mort tout nu.
Ils ont eu l’horreur en partage,
Bien rares sont les survivants,
Aucun enfant ne fait son âge,
Nul ne reverra ses parents.
Chaque année revient une date
Souvenir des crimes passés
Que n’effacent pas les années.
Les bourreaux ont volé nos âmes.

SOUVENONS-NOUS !

Roland Wlos

A

D. Krakowski

LE MOT DU PRÉSIDENT
PROCHE-ORIENT
Les négociations, otages du blocus de Gaza
L’Etat juif et le conflit israélo-palestinien

L. Steinberg

p. 2

J. Dimet
J. Fath

p. 3
p. 3

L. Steinberg

p. 2

M. Muller
H. Levart

p. 4
p. 4

R. Joseph

p. 5

HISTOIRE
John Rabe - Un nazi atypique

SOCIÉTÉ
L’Arche de Zoë - Une imposture exemplaire
Sus aux Infidèles !

EUROPE
Le brûlot des Balkans

CULTURE (p.7)
Aventures et mésaventures du judéo-espagnol H-V. Sephiha p. 6

ITINÉRAIRE
Willy Ronis - La vie en courant ! Entretien avec H. Amblard

p. 8

Politique de civilisation ?

plusieurs reprises, N. SARKOZY vient de
proclamer qu’il entend conduire “une
politique de civilisation”. Au regard de
celle qu’il met en oeuvre depuis qu’il est Président
de la République, et du programme qu’il affiche,
on ne peut qu’être sceptique, car l’affirmation de
cette ambition, relève, quant au fond, d’une véritable duperie.
Pour Edgar MORIN*, ce concept signifie “remettre
l’humain au centre de la politique, donner la priorité à la qualité de vie et retrouver solidarité et
responsabilité (...) la réduction des inégalités...”
On est aux antipodes de cette finalité ; ainsi, par
l’instauration d’une “franchise” sur les soins, à la
manière de l’assurance automobile, (encore heureux que ne soit pas ajouté un coefficient de vétusté), ces critères bafouent la dignité humaine. La
valeur d’une personne ne s’apprécie pas comme
celle d’un véhicule endommagé.
Un malade n’a pas à être sanctionné pour son état
de santé. Alors que la solidarité constitue l’un des
fondements de la civilisation, est-ce être solidaire
que faire payer un malade pour d’autres malades,

en faisant peser injustement des charges souvent
insurmontables pour les plus démunis? Après les
cadeaux fiscaux faramineux qui n’ont concerné
qu’une infime minorité de privilégiés...
Politique de civilisation, dites-vous ?
Mais peut-on parler de civilisation quand on évalue le
travail d’un ministre au nombre d’expulsions, causant
la traque des individus, la séparation brutale des
enfants d’avec leurs parents, et des peurs qui conduisent au pire ?
Mais de quelle civilisation parle-t-on quand, à côté
d’un chômage massif, des salariés vivent au-dessous
du seuil de pauvreté, contraints pour certains à être
sans domicile... ? Quand l’urgence de réformer le système solidaire de retraite se traduit par un allongement
de la durée de cotisation ? Et qu’au lieu de faire profiter les salariés des progrès techniques et de la productivité, on allonge la durée du travail, en envisageant
même d’en finir avec sa durée légale et d’autoriser le
travail du dimanche... ?
Est-ce encore de la civilisation lorsqu’en matière de
politique internationale, le Président confirme son

ralliement au modèle américain, sans se donner les
moyens d’éteindre, notamment, la poudrière du
Proche-Orient ?
Est-ce toujours de la civilisation, quand son ambition est de donner au capital financier national les
moyens de participer à la guerre économique, dans
le cadre de la mondialisation libérale, en accentuant
le système d’exploitation et de domination qui se
traduit par la mise en concurrence des individus et
des peuples ?
Comme l’a dit clairement la Présidente du MEDEF :
“Le Président de la République pose les actes et
énonce des principes qui, à terme, structureront différemment la société française comme nous, les
entrepreneurs, le souhaitons”.
Ainsi la voie empruntée jusque là n’augure pas,
pour le plus grand nombre, d’un “avenir de civilisation au service d’une nouvelle renaissance”.
* Edgar Morin, sociologue, auteur en 1997, avec
le politoloque Sami Naïr, de l’ouvrage réimprimé
le 14/01/2008 “Pour une politique de civilisation”
Ed. Arlea, Paris, 2002, 80 p., 5€
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P.N.M. JANVIER 2008

2

Courrier des lecteurs
Elie Korenfeld, Champigny Chers
amis, j’ai pris connaissance de l’article
paru dans la PNM d’octobre concernant
la mémoire des Résistants de la MOI.
Evidemment, je me joins à votre appel,
d’autant plus quej’ai connu personnellement Fingersweig, un des fusillés de
“l’affiche rouge”, pendant la période
noire de l’Occupation. Nous habitions le
même quartier, celui de la Bastille.
Résistants tous les deux, mais pas dans le
même Réseau. Merci pour ce que vous
entreprenez.Très amicales salutations à
vous tous.
Jacques Céliset, Paris Chers amis, en
tant qu’abonné depuis des décennies à la
PNH, je veux me joindre à l’appel pour
le parrainage d’un Espace de mémoire
dédié à la Résistance des immigrés juifs
de la M.O.I. Je le fais en tant que juif
arrêté le 16 juillet 1942 et ayant échappé
au sort réservé à mes parents et à mon
frère assassinés à Auschwitz moins de 10
semaines après leur déportation.
Egalement en tant que Secrétaire général
de l’Association Fonds Mémoire
CARNET
Décès

Léa LESCOU et
Sophie SPECULANTE
ont la grande tristesse de vous
faire part de la disparition dans
sa 81ème année de leur soeur aînée

Fanny SERMAIZE
née ZYLBERSPON

d’Auschwitz (AFMA), tel qu’approuvé
par la direction nationale de
l’Association. En vous souhaitant tout le
succès pour la mise en oeuvre du projet,
je vous prie de croire, chers amis, à l’assurance de mes meilleurs sentiments
ainsi qu’à tous mes voeux pour l’année
2008.
Annette Azenac, Paris Chers amis, je
vous présente mes meilleurs voeux pour
cette nouvelle année en souhaitant que
notre journal “La Presse Nouvelle”
continue à évoluer comme elle le fait ces
deux dernières années. J’apprécie pour
l’essentiel la teneur du journal, il est
agréable à lire, et surtout à le lire dans sa
totalité. (...) Avec mes sentiments les plus
cordiaux.
Andrée Daspre, Toulon Chers amis, j’ai
lu avec grand plaisir le dernier numéro,
249, de la Presse Nouvelle, que mon
amie Marlène Steinberg a eu la bonne
idée de me faire parvenir. L’orientation

Rédaction - Administration :
14, rue de Paradis
75010 PARIS
Tel. : 01 47 70 62 16
Fax: 01 45 23 00 96
Mèl : ujre@wanadoo.fr
Site : http://ujre.monsite.wanadoo.fr
(bulletin d’abonnement téléchargeable)
Tarif d’abonnement :
France et Union européenne:
6 mois 28 euros
1 an
55 euros
Etranger, hors U.E : 70 euros
IMPRIMERIE DE CHABROL
PARIS

Lorsque nous fatiguons ou doutons ...
voila de petits mots qui nous vont droit
au coeur, merci de vos encouragements !
L’équipe de la PNM

S

uite à la publication par “Le Monde des Religions” (n° 27 de janvier-février 2008)
du dossier “Etre juif en France en 2008”, nous avons reçu deux copies de lettres de lecteurs adressées à cette publication, s’étonnant de l’omission, voire de
l’ostracisme, de cette enquête à l’égard de “deux organisations juives laïques et
progressistes et de leurs publications”, à savoir l’UJRE (la Presse Nouvelle
Magazine) et les Amis de la CCE - COMMISSION CENTRALE DE L’ENFANCE (“La lettre des Amis de la CCE”). En voici quelques extraits : “La liste des organisations
juives pp. 40 et 41 me paraît incomplète (...) je ne crois pas l’omission innocente
(...) “éviter que se renouvellent des pratiques d’exclusion” J-F. Marx - “Deux
associations issues de la Résistance pendant la guerre 1939-1945 (...) Omission
volontaire ou involotaire de votre part ? Permettez-moi de vous inviter à compléter
votre dossier en prenant contact avc ces organisations qui ont joué un très grand
rôle pendant et après la guerre” (...) (S.Boski) .
Nous aurons l’occasion d’y revenir dans le prochain numéro.
L’équipe de la PNM

LA PRESSE NOUVELLE
Magazine Progressiste Juif
édité par l’U.J.R.E.
Comité de rédaction :
Jacques Dimet, Bernard Frédérick,
Nicole Mokobodzki,T.R. Staroswiecki,
Lucien Steinberg, Nathan Zederman,
Roland Wlos, Solange Zoldan
N° paritaire 64825
(en cours de renouvellement)
C.C.P. Paris 5 701 33 R
Directeur de la Publication :
Lucien STEINBERG

générale de votre mensuel est combative,
courageuse et me convient tout à fait !
Permettez-moi de vous féliciter et de
marquer ma sympathie par ce versement
à votre souscription. Bien cordialement.
Adolphe Ekman Avec mes meilleurs
voeux de SANTÉ pour l’année nouvelle
2008 à tous mes AMIS PROGRESSISTES de
l’UJRE
Patrick Le Mignan, Erdeven Au seuil
de cette nouvelle année, ma famille et
moi-même voous adressons nos voeux
les meilleurs. Nous vous souhaiton une
très bonne santé, bonheur et joie partagés
au sein de vos foyers, paix et amour entre
les peuples. Amitiés.
Jacques Smusman, Montreuil
Longue vie à PNM et à UJRE !

John RABE - Un nazi atypique

L

a mémoire de John Rabe, nazi
atypique, est vive en Chine, pour
une bonne raison. Cet allemand
vivant hors du Reich avait adhéré au
parti nazi. Il vivait en Chine, représentant du KonZern Siemens, jusqu’en 1937.
Bon nazi, bon européen, il n’avait
guère d’estime pour ses ouvriers chinois ; jusqu’en 1937, quand l’armée
japonaise prit d’assaut Nankin, capitale provisoire de la Chine nationaliste.
L’armée nippopne s’est livrée à des
massacres à Nankin. Rabe en fut
révolté - et il a agi. Le Japon étant
l’allié du Reich, Rabe a mis en place

d’immenses drapeaux à croix gammée autour de son usine. Drapeaux
qui ont permis de sauver des dizaines de milliers de chinoix. Son
exemple a été suivi par d’autres
industriels étrangers, mais à moindre
échelle.
Aujourd’huu, Rabe est un héros
national en Chine. Il n’en fut pas de
même dans le Reich : rentré en
Allemagne il voulait dénoncer les
crimes de Nankin - mais le Japon
étant son allié, la Gestapo a su
décourager Rabe.
Aujourd’hui, un film est en préparation - une coproduction sino-allemande.
LS

SOUSCRIPTION* n°43
(du 16 décembre 2007 au 15 janvier 2008)

En ce début de l’an 2008, je tiens
tout d’abord à vous présenter à
toutes et à tous, chers lecteurs et
amis de la PNM et de l’UJRE, mes
meilleurs voeux pour vous et
ceux qui vous sont chers, de
santé, de joie et beaucoup d’instants de bonheur.
Après une année de grisaille et
de remise en cause de ce qui a
toujours été au coeur du combat
de l’UJRE, la SOLIDARITÉ, je
forme aussi le voeu que l’action
unie de tous les démocrates et
des gens de coeur crée les conditions pour voir se lever un nouvel
espoir pour la Paix, et pour le
mieux-être.
Je forme enfin le voeu, à bientôt
82 ans, de voir des amis et camarades “plus jeunes” nous rejoindre nombreux ...
En effet, mon état de santé m’a cloué
loin de l’UJRE et de la PNM pendant
les derniers douze mois, mais la PNM
et l’UJRE ont continué !
L’équipe qui a pris en main
l’existence du journal et de notre
Union a fait ses preuves, et je les
en félicite :
Ainsi, le projet de MRJ-MOI a pris
corps, s’est affermi, a reçu de larges soutiens, assurant prochainement pérennité, au “14”, de la
mémoire de ces “étrangers”, résistants juifs de la MOI...
Ainsi, le projet de DVD pour le
film “Nous continuons”, tourné par
l’UJRE en 1946 “à la mémoire de
ceux qui sont tombés pour que les
enfants puissent vivre et rire librement”, portera-t-il témoignage aux
jeunes générations des actions de
sauvetage entreprises par ces
“immigrés”, fondateurs de la
Commission Centrale de l’Enfance
auprès de l’UJRE, qui voulurent
redonner toute leur dignité aux
orphelins de fusillés, de déportés ...
Mon action, avec cette équipe, et
parmi vous, m’a rempli de joie
et d’espoir.

BULLETIN D'ABONNEMENT
Je souhaite m'abonner à votre journal
"pas comme les autres",
magazine progressiste juif.
Je vous adresse ci-joint mes nom, adresse
postale, date de naissance, mèl et téléphone

D’ores et déjà, je vous confie un
article sur un personnage hors du
commun, John Rabe, le nazi qui
a sauvé la vie de dizaines de
milliers de Chinois lors de la
guerre sino-japonaise.

PA R R A I N AG E
(10 € pour 3 mois)

J’ O F F R E U N A B O N N E M E N T À :
Nom et prénom ..............
Adresse .......................
Téléphone .....................
Courriel ......................

Le mot
du
Président

Bon courage, allons de l’avant !
* Sauf mention explicite d’un don ou d’une adhésion UJRE, tout règlement reçu par le journal renouvelle, à échéance, l’abonnement à la PNM - NB: 66% des dons (Adhésions, Dons) sont déductibles des revenus déclarables.

Lucien Steinberg
Président de l’UJRE
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P.N.M. JANVIER 2008

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L’Etat juif et le conflit
israélo-palestinien

par Jacques FATH

Après la Conférence de Paix tenue à Annapolis le 27 novembre 2007, la PNM entame une consultation des responsables politiques français, en commençant par M.
Jacques FATH, responsable des relations internationales du Parti Communiste Français.

PNM: Ehud OLMERT a exigé des
Palestiniens qu’ils reconnaissent Israël
comme un Etat juif. Qu’en pensez-vous ?

E

hud Olmert, Premier ministre,
en a effectivement fait une
condition d’un accord, lors du
Sommet d’Annapolis censé rouvrir un
processus de règlement politique.
Cette exigence n’est évidemment pas
nouvelle. Mais le fait qu’elle soit ainsi
posée est nouveau. Ajoutée à la multiplication d’annonces provocatrices
d’extension de la colonisation à
Jérusalem, elle apparaît comme la
volonté manifeste de faire échec à toute
négociation. La situation est des plus
préoccupantes pour l’avenir immédiat.
Cependant, cette question de l’Etat juif
est d’une autre portée. C’est aussi un
problème fondamental. D’une façon
générale, il n’est jamais rassurant de
voir des dirigeants politiques définir
une souveraineté étatique sur une base
ethnique ou religieuse. Cela rapproche
trop de l’intégrisme. Les divisions et
les dominations identitaires sont productrices de répressions et de violences, et on ne connaît pas d’exemple
d’Etat fondé sur une religion, d’Etat
théocratique qui soit aujourd’hui
démocratique. Ni l’Iran, ni l’Arabie
saoudite ne brillent par le pluralisme, le
respect des libertés et de l’Etat de droit.
Le cas d’Israël est bien sûr spécifique,
du fait de l’histoire et d’un conflit
israélo-palestinien et israélo-arabe loin
d’être résolu. Première question : si
Israël est un Etat juif, alors quel est le
statut et quels sont les droits réels des
20% de sa population palestinienne,
musulmane et chrétienne ?
Poser cette question c’est y répondre.
Comme le dit Monseigneur Sabbah,
Patriarche latin de Jérusalem, c’est la
porte ouverte à la discrimination. Et
cette discrimination est déjà une réalité. Tous les citoyens d’Israël ne vivent
pas de la même manière car ils n’ont
pas les mêmes droits, ils ne bénéficient
pas des mêmes services de l’Etat, certains ont des privilèges, leur citoyenneté est loin d’être égale, ils ne sont pas
considérés de la même manière, l’histoire et le passé des uns sont étouffés
pour que le quotidien et l’avenir des
autres soit mieux assuré…Beaucoup
ont le sentiment d’être étrangers dans
leur propre pays.
Israël n’est pas un Etat juif démocratique, comme le dit Uri Avnery du
mouvement Gush Shalom. C’est un
“Etat juif démographique”. On y distri-

bue de la terre aux juifs, pas aux arabes,
souligne encore Avnery.
Exiger d’être reconnu en tant qu’Etat
juif comme condition d’une négociation israélo-palestinienne soulève une
deuxième question, celle du droit au
retour des réfugiés palestiniens. Voici
des années que l’Autorité palestinienne
et les dirigeants de l’OLP ont admis que
l’application concrète de ce droit fera
l’objet de négociations pourvu que le
principe soit reconnu comme légitime,
ce qui correspond au droit international. Affirmer en préalable au règlement
de cette question qu’Israël est un Etat
juif, c’est refuser par avance la reconnaissance de ce droit et toute application possible. Un tel positionnement
est inacceptable sur le fond et choquant
dans la forme. C’est un mépris ouvert
et profond pour les droits nationaux du
peuple palestinien et pour les droits des
citoyens arabes palestiniens d’Israël.
L’exigence de justice et de démocratie
conduit à rappeler le droit légitime des
Palestiniens à édifier leur propre Etat
indépendant à côté d’Israël, avec
Jérusalem-Est pour capitale. Elle
conduit aussi à rappeler qu’un Etat
démocratique doit être un Etat de tous
ses citoyens et enfin que tout réfugié
dispose de la reconnaissance de son
droit inaliénable au retour. Ces positionnements sont décisifs car si l’on ne
fonde pas un règlement politique négocié sur des valeurs et des principes, sur
des droits rigoureusement définis et
interprétés - conformément à la Charte
et aux résolutions des Nations Unies en
particulier - c’est la crédibilité et la
durée même d’une solution négociée
qui est en cause et qui peut être fragilisée en toutes sortes de circonstances.
Cela est d’autant plus important que ce
débat est marqué par certaines dérives,
souvent graves, qui se nourrissent de
l’impasse politique actuelle. Pour certains - notamment parce que l’emprise
de la colonisation rendrait problématique la création d’un Etat palestinien
viable - il faudrait en finir avec l’Etat
d’Israël et créer un seul Etat multinational et multiconfessionnel. D’autres ne
précisent même pas ce que deviendrait
la population juive dans le cadre d’une
telle “solution”… dont la nature - au
delà de la simple crédibilité - n’a pour
seule vertu que d’exacerber des polémiques et des confrontations, voire d’alimenter le racisme et l’antisémitisme.
Ces dérives sont très minoritaires même
si elles s’appuient sur la réalité d’une
colonisation qui n’a jamais cessé de progresser et qui rend, il est vrai, par l’accu.../...

Suite en page 5

Les négociations otages Moyen-orient
du blocus de Gaza
par Jacques Dimet

Le blocus s’accentue sur Gaza. La situation devient dramatique pour des centaines de
milliers de civils. Les négociations risquent d’en pâtir.

Q

uelles perspectives immédiates et à moyen terme - se dessinent
aujourd’hui pour le ProcheOrient et, plus spécifiquement pour l’avenir d’Israël et de la Palestine ?

Les derniers événements à Gaza n’incitent pas à l’optimisme. Le blocus de ce
qu’Israël appelle désormais une “entité
ennemie” (la bande de Gaza contrôlée
depuis juin dernier par le Hamas) a des
répercussions sur la population civile du
territoire. Ce blocus, qui a conduit à la
réduction de la production électrique à
Gaza, rend encore plus difficile les
conditions de vie et ne peut que renforcer
le sentiment d’hostilité à une politique de
compromis. Ce sont évidemment les éléments les plus extrémistes qui tireront
bénéfice de ce type de situation. D’autant
plus que par delà les déclarations d’intention, rien de concret ne bouge, qui puisse
permettre une amélioration des conditions de vie.
La visite du Président américain George
W. Bush (sa première au Proche Orient en
tant que tel) en Israël et à Jérusalem n’a
pas apporté de modification substantielle
à la politique de Washington, même si
pour la première fois, le locataire de la
Maison Blanche a parlé d’occupation et
s’est prononcé contre l’installation de
nouvelles colonies dans les territoires
palestiniens. D’un autre côté, George
Bush n’a pas hésité à dire qu’Israël était
la patrie des juifs, ce qui n’est pas tout à
fait la même chose que de dire qu’Israël
est un Etat juif.
Toujours est-il que le “deux poids, deux
mesures” continue dans la politique
internationale.
La politique de Nicolas Sarkozy s’apparente de plus en plus, malgré parfois des
propos de circonstance, à un alignement
sur les positions américaines. Le couplet
du Président français dans ses vœux au
corps diplomatique sur les valeurs de
l’Occident (après ses propos répétés sur
les fondements chrétiens de la France) le
prouve désormais.
L’arrimage de la France à une politique
américaine (celle de Bush et des néoconservateurs) est maintenant affirmé, ce
qui ne manquera pas, d’ailleurs, de poser
quelques problèmes en cas de victoire
(probable) des démocrates aux élections
présidentielle et parlementaires américaines, et particulièrement si c’est Barack
Obama qui emporte la partie.
Non seulement l’alignement de la France
au plan diplomatique et politique n’est
pas juste, mais en plus, il hypothèque l’avenir de la politique internationale de la
France, et sa place dans le monde.
Alors que les négociations de paix entre
l’Autorité palestinienne du Président
Abbas et le gouvernement israélien ont
commencé, des affrontements armés ont
repris entre l’armée israélienne et le

Hamas à Gaza. Tsahal a intensifié ses
frappes aériennes et incursions terrestres.
L’ancien chef du département de planification de l’armée, Shlomo Brom
explique “qu’Israël poursuit un double
objectif : limiter au maximum les tirs de
roquettes et affaiblir le Hamas (...) C’est
réalisable, poursuit-il, à condition d’éviter une escalade de la violence incontrôlée en frappant trop fort, ce qui aurait
pour effet de torpiller toute relance du
processus de paix.”
Pour Shlomo Brom, la seule issue possible serait un cessez-le-feu avec le
Hamas. Pour le moment, ce dernier lance
des roquettes sur le Sud d’Israël, en
revendiquant, et ce pour la première fois,
ces actes. L’invasion de Gaza a été envisagée mais, selon les analystes militaires
israéliens, une telle opération d’envergure, causerait de lourdes pertes à l’armée
israélienne et immobiliserait des effectifs
importants.
Pour les dirigeants israéliens, Ehud
Olmert l’a encore récemment rappelé, il
s’agit d’une guerre. “Il y a une guerre en
cours, a ainsi déclaré le premier ministre
israélien, et nous ferons tout notre possible pour mettre fin à ces tirs inacceptables (…) Nous allons continuer de lutter
sans merci contre le Hamas, le Jihad et
tous nos ennemis.”
Pour les responsables palestiniens, “les
raids et l’escalade militaire d’Israël
visent à infliger un camouflet aux négociations de paix israélo-palestiniennes” *.
Cette situation survient, comme nous l’avons indiqué, alors que des négociations
directes ont été engagées entre Israéliens
et Palestiniens. Ces négociations portent
sur un règlement permanent du conflit
et englobent les frontières du futur Etat
palestinien, le démantèlement des colonies, le statut de Jérusalem et le sort des
réfugiés palestiniens de 1948. Questions
déjà posées lors des rencontres de Camp
David et qui n’avaient pu être réglées à
l’époque.
Les négociations se poursuivent donc
cahin-caha, marquées à la fois par la
poursuite de la colonisation, et par les
avertissements du président palestinien
qui déclare ne pouvoir continuer à négocier dans ces conditions.
Le Président américain doit en tout cas
faire avancer le processus, car à la fin
de l’année il devra céder la place.
George Bush a affirmé qu’un accord
serait trouvé d’ici là.
Notons également qu’Ehud Olmert, dans
un entretien donné le 1er janvier au
Washington Post, a évoqué le partage de
Jérusalem et le retour aux frontières de
1967. Il faudra, a-t-il dit, notamment
“procéder à un compromis sur des parties d’Eretz Israël”.
22/01/2008
* Déclaration à l’AFP de Nabil Abou
Roudeina, porte parole de la Présidence, le
17 janvier 2008
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P.N.M. JANVIER 2008

4

Société

L’ a f f a i r e
Arche de Zoë
Une imposture exemplaire
par Michel Muller

L

a tentative d’acheminement
dans notre pays de
cent trois enfants
africains par une petite ONG
prétendant secourir des
enfants du Darfour, révèle
dans un raccourci historique
caricatural, dérisoire et tragique, la terrible et délétère
logique coloniale.
On sait aujourd’hui que les enfants
que l’on voulait transférer en France
ne sont ni des orphelins en danger de
mort, ni des Darfouri. Ils sont tchadiens.
Comment a-t-on pu faire fi de la
marque indélébile et de l’incommensurable charge émotionnelle laissée
dans la mémoire collective africaine
par la tragédie multiséculaire qu’a été
la traite négrière ? Le projet de
l’Arche de Zoé en reprenait la trame,
même si, bien sûr, il ne s’agissait pas
d’aboutir à l’esclavage, mais au “sauvetage”. On se fait livrer des enfants
par des intermédiaires locaux - des
chefs de villages ou des marabouts
sans doute aussi trompés - qui font
miroiter aux parents la possibilité
inespérée d’accès à l’école, à la santé
et au bien-être de leurs petits.
La colère des Tchadiens est à la mesure de cette mémoire. Une colère que,
tout naturellement, le patron contesté
du Tchad, Idriss Déby, a exploité
pour, tout à la fois, faire monter les
enchères parisiennes dans l’intervention militaire française pour son maintien au pouvoir et pour redorer son
blason nationaliste. Pour grotesque
que nous paraisse l’accusation de “trafic d’organes” qu’il a cru pouvoir porter, ce mensonge n’est pas sans écho
dans une population frappée par la
misère et l’horreur d’une guerre civile
endémique.
De l’autre côté, on a offert ces êtres
humains à des gens en mal d’enfants,
qui pour certains en sont à un point
d’aveuglement tel que toute capacité
de réflexion, d’humanité et tout simplement de respect de l’autre est
oubliée, si ce n’est l’obtention de ce
qui peut bien ressembler à un “enfant
de compagnie”.
Les membres de l’Arche ont été jugés,
collectivement condamnés à une
même peine et rapidement rapatriés
en France. On ne peut que s’étonner
de l’arrogance affichée aujourd’hui
par les avocats dénonçant une “justice
expéditive” alors que l’on sait que tout
avait été arrangé entre le despote tchadien et son ami français.

Que n’aurait-on entendu si les choses
avaient traîné !
On va jusqu’à insulter les
juges tchadiens qui n’en
pouvaient mais face aux
diktats des puissants.
Comme l’un des magistrats
l’a rappelé à ses détracteurs,
“nous avons été formés à
l’école française…”. On en est arrivé
dans les médias dominants - à l’exception courageuse de France 3 qui a
diffusé une remarquable enquête - à
considérer les voleurs d’enfants
comme des victimes.
Gageons que tout était prêt pour un
formidable show médiatique dégoulinant de bons sentiments et d’émotion
frelatée au cas où l’opération aurait
réussi. Gageons que le premier à se
trouver, avec son service de propagande audio-visuel, sur les lieux de l’atterrissage en France de l’avion de
l’Arche, aurait été Nicolas Sarkozy,
comme d’ailleurs on l’avait laissé
entendre lors d’une assemblée des
“futurs parents”. Quelle plus belle
démonstration de son discours de
Dakar où il exhortait l’Afrique à sortir
de “cet imaginaire où tout recommence toujours” où “il n’y a de place ni
pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès” pour rejoindre la
mondialisation capitaliste où “le libre
échange est bénéfique” et où “la
concurrence est un moyen” ?
L’argumentaire n’est pas nouveau. Il
est vieux de plusieurs siècles. Les
croisades ont été perpétrées contre les
peuples du Proche-Orient au nom de
la primauté - et donc de la supériorité
- de la croyance chrétienne.
C’est avec cette même imposture que
furent perpétrées les conquêtes des
Amériques et la destruction des peuples indiens. A l’esclavage - dont la
victime était ravalée au rang de marchandise - les puissances du Nord ont
ensuite substitué la colonisation, au
nom de la supériorité de la “civilisation” occidentale, cette autre imposture qui a été parée des habits neufs des
Lumières.
Aujourd’hui, on dévoie la volonté de
solidarité envers les plus défavorisés
et les victimes, au moyen de la doctrine de l’ “ingérence humanitaire”, ce
terrible artifice idéologique inventé en
son temps par Bernard Kouchner et
ses adeptes, destiné à légitimer les
interventions militaires pour assurer
l’hégémonie sur les peuples du Sud.
Comme le fait Nicolas Sarkozy lorsqu’il agite pêle-mêle les spectres du

Sus aux Infidèles

U

ne protestation générale, un
tollé, une levée de boucliers :
Les propos de Sarkozy, précédés de son livre sur la vocation attribuée aux religions, ont suscité inquiétude et réprobation, sentiments partagés par de nombreux croyants. Est
ainsi poursuivie une œuvre de destruction dont le sombre dessein est de
transformer notre République en un
régime obscurantiste. De Gaulle, qui
était d’une grande piété, n’a jamais
dérogé au devoir de sa charge, respectant les normes éthiques de notre vie
collective. L’hôte de l’Elysée, par son
extravagance prosélytique, s’inspire
de son homologue états-unien.
Souvenons-nous de Bush, une main
sur le cœur, l’autre sur la Bible,
déclenchant la guerre en Irak. Il ne
s’agissait pas d’une manifestation de
la colère divine, mais bel et bien d’une
opération géopolitique, hégémonique,
à forte odeur de pétrole. Litanie d’un
autre âge, notre Président, invoquant
treize fois Dieu dans ses harangues,
prétend restituer aux religions dont il
exalte le rôle civilisateur, un magistère moral sur notre société ; apostolat réitéré lors de ses vœux aux autorités ecclésiastiques.
C’est une profanation des fondements de notre laïcité, une concep-

terrorisme, de la surpopulation, des
inondations, d’ “une confrontation
entre l’Islam et l’Occident”, de la
misère du monde à l’assaut des pays
de la “civilisation”.
Et, dans un même souffle, on voudrait
imposer aux pays du Sud, au nom de
l’ “immigration choisie”, une nouvelle forme d’apartheid, en en faisant des
bantoustans où l’on pourrait puiser
une main d’œuvre “utile”. Un processus de néo-colonisation déjà pratiqué
en Palestine occupée par les autorités
israéliennes, sans que les capitales
occidentales n’y trouvent à redire.
Dernière imposture en date, et non des
moindres, celle de la prétendue égalité que l’Europe prétend mettre en pratique avec les pays du Sud, et tout
particulièrement l’Afrique. Cette
“nouvelle” relation d’ “égal à égal”
que l’Union européenne a voulu
imposer aux pays africains le 9
décembre dernier à Lisbonne, est une
vaste tromperie fondée sur une prétendue égalité entre le fort et le faible,
auquel on ordonne de supprimer toute
protection contre les importations des
produits du Nord.
Une restauration du pacte colonial.

tion négative, révisionniste de la
séparation de l’Etat et des Eglises
qui, elles-mêmes, en reconnaissent
le bien-fondé. Oser dire que seuls les
croyants sont en mesure d’espérer
est un outrage à la liberté de conscience, une injure aux croyants animés du désir de vivre ensemble.
Déduire que la crise des banlieues
s’avère être un manque de lieux de
culte, proférer des incantations charismatiques, en menant simultanément une offensive de régression
sociale, est révélateur d’un retour en
arrière afin d’obscurcir la réalité des
antagonismes sociaux, aboutir à
l’acceptation, à la pérennisation de
l’ordre des choses : il y a toujours
eu, il y aura toujours des riches et
des pauvres. Modernisme, où vas-tu
te nicher ?
Appréciant la fascination de Sarkozy
pour le veau d’or, la Providence sait
effectuer les bons choix. Les mannes
financières tombent drues du firmament en faveur des nantis. La rhétorique sarkozienne est d’autant plus
condamnable qu’elle s’est déclamée
au Vatican et à Ryad. Or, chacun
connaît la démarche dogmatique du
Pape, ses penchants à rétablir les
rites anciens ainsi que la sauvagerie
avec laquelle les femmes peuvent
être traitées en Arabie Saoudite.
Quant aux valeurs chrétiennes dont
serait imprégné le passé de notre
pays, il s’agit là d’une vision manichéenne, d’un postulat évangélique
frauduleux. Nul ne saurait nier l’apport civilisationnel des religions
monothéistes, ni faire abstraction de
leur emprise sur les esprits. Combien
d’Abélard mis à l’Index, de persécutés par l’Inquisition, de massacres de
la Saint-Barthélemy, de Jacquou le
Croquant humiliés par chapelains et
châtelains, de génuflexions épiscopales devant Pétain et la Collaboration,
de prêtres ouvriers sommés de choisir entre leurs compagnons de travail
et leur Eglise, qu’ils voulaient servir
d’un cœur généreux ? Le journal La
Croix note que : “Rome se réjouit du
nouveau visage de la laïcité française. Les responsables du Saint-Siège
ayant été agréablement surpris par
le discours de Sarkozy à propos du
catholicisme”.
La remise en cause des orientations
de Vatican II est affligeante. Bâtir un
monde meilleur ici-bas, avec ceux
qui l’espèrent au ciel, est notre
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P.N.M. JANVIER 2008
P.N.M. NOVEMBRE 2007

es !

Europe

5

Le brûlot des Balkans

par Henri Levart
inébranlable volonté. Le Siècle des
Lumières, le combat pour la laïcité,
les luttes du mouvement ouvrier,
l’essor des sciences et des techniques, la montée du rationalisme,
l’accueil des immigrés, l’accès aux
soins, à la culture, aux loisirs, sont
des limons qui ont matricé notre
patrie. Toutes les familles spirituelles, athée comprise, y ont contribué
depuis les temps les plus reculés.
Les moines transcrivaient sur leurs
parchemins les textes des philosophes grecs et romains. Rabelais dans
son imaginaire Abbaye de Thélème
rêvait de bâtiments sans murailles,
où religieux et religieuses auraient la
possibilité de se marier, de vivre en
liberté. Les curés de campagne
aidaient les paysans à rédiger les
cahiers de doléances, la Révolution
de 1848 était d’inspiration chrétienne.
L’emblématique
poème
d’Aragon “La rose et le réséda”
glorifie le sang mêlé des martyrs de
la Résistance à laquelle nombre de
juifs ont participé. Ces derniers, par
leur labeur et la part prise à la vie
intellectuelle, à la création artistique
sont d’authentiques artisans de notre
unité nationale. C’est pourquoi les
actions contre les manifestations
d’antisémitisme n’ont pas de connotation religieuse. L’affaire Dreyfus
en est témoin.
N’en déplaise au chanoine d’honneur de Saint-Jean de Latran, nous
nous référons aux vraies valeurs
léguées au cours des siècles. Nous
poursuivons nos rêves. Jacques
Chambaz a pu décrire dans son livre
“La patience de l’Utopie / La civilisation en question” (prémonitoire)
“L’utopie peut désigner l’idéal,
l’aspiration, l’imagination enracinée dans l’investigation du monde
(...) Faudrait-il l’interdire, comme
certains y invitent, dans le domaine
social et politique (...) L’utopie positive ne rejette pas le passé (...) Elle
ne détourne pas davantage les questions les plus immédiates et les plus
urgentes au nom d’une Terre promise. Elle tend au contraire à s’inscrire dans le mouvement même qui
modifie l’état présent (...) Elle suppose donc d’éclairer l’expérience et
de faire reculer les barrières qui
empêchent des millions d’hommes et
de femmes de s’approprier le mouvement des savoirs et des pouvoirs”.
Nous nous y employons, foi de char23 janvier 2008
bonnier.

par Robert Joseph

L

es dirigeants occidentaux
s’enlisent dans les Balkans.
Ils n’ont pu comme ils le souhaitaient concrétiser l’indépendance
du Kosovo. Les accords de stabilisation et d’association de l’Union
européenne (A.S.A.) avec la Serbie
et la Bosnie-Herzégovine marquent le pas. Le général Mladic et
Radovan Karadzic, les anciens chefs
des Serbes de Bosnie recherchés
comme criminels de guerre, courent
toujours. La Bosnie-Herzégovine
connaît une nouvelle crise et la
Macédoine reste fragilisée. Dans
cette région d’Europe, fertile en
divergences entre Washington et
Moscou, le climat politique suscite
pas mal d’inquiétude.
L’indépendance du Kosovo, décidée
pour fin 2006, reste jusque-là en
suspens. L’ancien chef terroriste de

L’ E t a t j u i f
et le conflit
israélo-palestinien
(Suite de la page 3)

mulation des faits accomplis, la perspective concrète d’un Etat palestinien plus
compliquée aujourd’hui. L’édification de
cet Etat palestinien - revendication légitime de l’ensemble d’un peuple - reste
cependant la condition décisive d’une
paix durable.
Notons au passage que le choix israélien
d’un Etat juif interdit, pour une raison
démographique évidente, la colonisation
jusqu’au bout et l’annexion des territoires
occupés à laquelle certains extrémistes et
ultranationalistes israéliens rêvent encore. Cela ne fait que ressortir la légitimité
d’un Etat palestinien et l’importance de
l’action des progressistes et anticolonialistes d’Israël.
Quant à l’Etat d’Israël, justement, ce
n’est pas le fait d’être un Etat juif qui lui
permettra de vivre durablement en sécurité. C’est le fait de devenir réellement
démocratique ; c’est le fait d’être définitivement reconnu et accepté comme
partenaire de paix au Proche-Orient,
qui pourront lui apporter une telle
garantie. Et pour en arriver là, il faut
qu’une solution politique au conflit israélo-palestinien, dans le droit et la justice,
puisse s’imposer.
Cette simple vérité est aussi un rappel
pour la France, pour ses partenaires européens, pour les Etats-Unis, pour l’ensemble des membres permanents du Conseil
de Sécurité de l’ONU… Moins on agit
dans cette voie, plus on laisse faire la
colonisation, plus on encourage la politique actuelle des dirigeants israéliens et
plus les choses seront difficiles et dangereuses. Cela sonne comme un avertissement.
Jacques FATH
25 décembre 2007

l’U.C.K., Hasim Thaçi, nouveau
premier ministre, dit vouloir la proclamer unilatéralement. L’Union
européenne lui recommande patience et prudence. Elle craint l’épreuve
de force pour les seize mille militaires de l’O.T.A.N, et dit attendre les
élections présidentielles du 20 janvier en Serbie. Avec beaucoup de
crainte, les sondages donnent bien
des points d’avance aux ultranationalistes de Vojislav Seselj, malgré
l’emprisonnement de leur leader à
La Haye.
La Russie s’oppose à toute solution
qui n’aurait pas l’approbation des
deux parties. La Serbie ouverte à
une large autonomie, rejette toute
idée d’indépendance pour une parcelle de son territoire. Au sein des
vingt-sept de l’UE, il y a des désaccords. Un schéma prévoyait la proclamation de l’indépendance, puis
début 2008 la transmission à l’UE
des pouvoirs de l’ONU, qui gère le
Kosovo depuis 1999. Seulement une
vingtaine de pays de l’UE se contenterait d’une proclamation unilatérale. Madrid, Athènes et d’autres ne
suivraient que s’il y avait une résolution du Conseil de sécurité.
Washington qui a encouragé la proclamation unilatérale, semble plus
réservée. D’autant que Belgrade ne
paraît plus tellement pressée de se
rapprocher de l’UE malgré les efforts
de la Slovénie, et de l’OTAN, dans les
conditions actuelles.
Les dirigeants occidentaux voudraient bien en finir, mais ils se brûlent les doigts sans trouver d’issue
rassurante, avec le “cadeau” de leurs
prédécesseurs qui, en 1999, bombardaient la Serbie pour “protéger” les
Albanais du Kosovo, tout en affirmant l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Serbie.
La Bosnie - Herzégovine voisine,
qui traverse une nouvelle crise politique suit l’évolution. Si malgré les
résolutions de l’ONU, le Kosovo peut
être séparé de la Serbie, pourquoi la
Republika Srpska ne pourrait-elle
l’être de la Bosnie-Herzégovine ? La
question est posée. Comme bien
d’autres encore relatives à la
Macédoine, au Caucase, voire … à
l’Espagne.
Dans cette Bosnie où la haine domine toujours, les plus importantes forces politiques en sont toujours à
leurs objectifs de 1992. En
Republika Srpska, il faut défendre
l’Etat créé en 1992 et défini par les
accords de Dayton de 1995. Or la
disparition de cet Etat est revendiquée, comme au temps de la guerre
civile, par Haris Silajdzic, l’ex-bras

droit de feu le Président Izetbegovic,
devenu à son tour membre de la présidence bosniaque. L’instauration
d’un pouvoir centralisé est aussi
une exigence de l’Ouest.
La haine “des Serbes” et de leur Etat
bosniaque, “fruit de l’agression et
du génocide” dit-on à Sarajevo,
imprègne nombre d’hommes politiques de la Fédération musulmanocroate. Elle n’est pas le moindre des
obstacles à une normalisation de la
situation. Surtout quand elle déborde
largement ses frontières. Comme on
parle des Juifs “peuple déicide”, des
moralistes chez nous parlent sans
aucune gêne des Serbes, “nation criminelle non repentie” (J. Julliard,
Le Nouvel Observateur, 13-19 septembre 2007). Le même sentiment
inspire bien du monde politique
occidental... Ces Serbes osent faire
face dans l’adversité à ceux qui les
ont sans cesse depuis 1991, sanctionnés, bombardés et soumis à un
permanent chantage.
Les échecs subis en BosnieHerzégovine par l’UE et son “gouverneur”, actuellement le Slovaque
Milorad Lajcak, ont conduit, en
contribuant à attiser les haines, à
prolonger le protectorat occidental
sur un peuple jugé incapable de se
gérer lui-même. Actuellement, une
nouvelle organisation, de la police
notamment, est en cause. La partie
serbe rejette le découpage des circonscriptions prévues parce qu’il
modifie les “frontières” des entités.
Il amorcerait ainsi la liquidation de
sa République. Cette opposition, diton, entrave le “processus de modernisation”. Cependant, dans la
Fédération, chacun des dix cantons
dispose de sa police, croate ou
musulmane, et dans les cantons
croates, on ne prise guère une police
dirigée par des Musulmans.
Maintenant, Vojislav Kostunica, le
premier ministre de Serbie, semble
plus proche de la Russie que de
l’OTAN ; Milorad Dodik, l’homme
fort de la Republika srpska, qui s’oppose à l’UE, est un proche de
Kostunica. Les Etats-Unis multiplient les pressions craignant de voir
la Russie gagner de nouvelles sympathies, et le Président Vladimir
Poutine, tout en dénonçant les “pays
de l’OTAN. qui gonflent leurs muscles” aux frontières de la Russie,
affirme qu’à ses yeux, le Kosovo et
le bouclier antimissile américain qui
concerne l’Europe centrale, constituent des “lignes rouges”.
Les Balkans toujours terre de crise et
de marchandage.
11 janvier 2008
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6

Culture

Aventures et mésaventures du judéo-espagnol
par Haïm-Vidal SEPHIHA

Cycle langues juives* : Professeur émérite des Universités, Chaire de judéo-espagnol en Sorbonne Nouvelle, notre ami H-V Sephiha développe ici 500 ans et plus d’histoire du judéo-espagnol, cas d’espèce des judéo-langues. La richesse de cette présentation nous a contraint à le publier en deux numéros de la PNM.
.../...

(Lire début de l’article dans la
PNM n° 251 de décembre 2007)

Le ladino évolue à peine Le djudezmo évolue énormément

C

e ladino, par son caractère semisacré est resté pour ainsi dire intouché, alors que le djudezmo a considérablement évolué. En fait, le ladino
(judéo-espagnol calque) est et fut la langue
liturgique de tous les Séfarades hispanophones, qu’ils fussent judéo-hispanophones comme dans l’ex-Empire Ottoman, ou
castillanophones, voire lusophones comme
dans le Sud-Ouest de la France ou aux
Pays-Bas, deux contrées où jamais ne fut
parlé le judéo-espagnol qui ne put y naître
pour des raisons historiques bien sûr.
Même les auteurs juifs les plus hispanophones comme Isaac Cardoso dans Las
Excelencias de los Hebreos recourent aux
versions en ladino de la Bible de Ferrare et
de ses multiples réimpressions, chaque fois
qu’ils citent un verset biblique8. Et,
contrairement à ce que dit l’ignorant qui
a
rédigé l’article
“Press” dans
l’Encyclopaedia Judaica (t.13, cols. 23 et
24), La Gazeta de Amsterdam (1675) n’est
pas “written in ladino (Judeo-Spanish) [sic,
quel confusion !], the first Jewish newspaper [...]”. Premier journal juif, certes, mais
pas en ladino. Si c’est là du ladino, l’espagnol de Cervantès en est aussi. Le commentateur de cet article se paie de mots.
C’est grave ! Avec un tel article par trop
superficiel, on induit en erreur une ou plusieurs générations entières ! Comment
pourrons-nous réparer les dégâts d’une
telle aberration, qui aujourd’hui fait si
cruellement autorité !

Le ladino est plus archaïque
que le djudezmo
Mais revenons au ladino ou judéo-espagnol calque. Il contient plus d’archaïsmes
que le djudezmo et en tout cas des archaïsmes plus anciens que ceux du djudezmo.
Il contient aussi des arabismes qu’on ne
retrouve pas en djudezmo, ainsi “alcrebite” 9 pour le soufre et “alcemema” avec
“cayin” pour l’hébreu “MiTsNeFeth”,
‘turban’ (Lévitique 16,4) etc.

Emprunts lexicaux multiples
aux langues en contact
Il faut également remarquer qu’y figurent
des mots bien espagnols mais qui ont
disparu - pour des raisons à rechercher et
souvent édifiantes - de la langue vernaculaire. C’est ainsi que le lapin, “Chafan” en
hébreu, interdit à la consommation
(Deutéronome,14,7) est traduit par “konejo”
dans le Pentateuque de Constantinople
(1547), mot qui correspond bien à l’espagnol “conejo”, mais qui a disparu du djudezmo, précisément, parce que interdit. De
sorte que, lorsque, se laïcisant, les Judéoespagnols ont commencé à manger du
lapin, ils ont adopté le mot turc “tavsan”
[tav`s’an].
C’est là un fait de société qu’illustre également l’adoption du mot grec “piruni”,
‘fourchette’, instrument qui n’existait pas
lors de l’expulsion. Il va de soi que l’objet
fut adopté avec son nom (cf. “Les mots et
les choses”), substantif hispanisé en

“pirón” alors qu’en turc on a “çatal”.
Les emprunts au turc seront très nombreux
(comme le seront, au Maroc, les emprunts à l’arabe) et subiront différents mécanismes

influence du français ira jusqu’à substituer
pardón à pedrón, lui même issu de perdón,
par métathèse de -rd- en -dr-. Ce qu’illustre bien ce proverbe judéo-espagnol, kon un
pardón [ et non pedrón] se mata a un franko, “avec un pardon on tue un français [ou
un occidental]”.

d’intégration bien hispaniques. C’est ainsi
que tous les emprunts verbalisés le seront
en -ear : “eglenmek” donnera “englenearse”, ‘s’amuser’ - “bozmak” donnera
Gallomanie et anglomanie
“bozear” et “bozdear”, ‘abîmer’ - etc. , tout
interfèrent
comme l’hébreu “herem” ‘excommunication’ donnera “heremear”, ‘excommunier’.
Une nouvelle étape anglocentriste, cette
Excepté lorsqu’un modèle espagnol préalafois, apparaîtra après 1945. Cette anglomable s’y oppose : ainsi
nie interférera avec la gallo“batak”, ‘boue,bourbier’
manie et donnera par exemple
donne “embatakarse”,
las santral elektrik à partir de
‘se salir, se saloper’sur le
las santralas elektrikas, qui
modèle préexistant de
correspond à l’emprunt pho“ensuzyarse”, ‘se salir’.
nétique total du français et à
De ces derniers exeml’invariabilité de l’anglais au
ples et de tant d’autres on
lieu de las sentrales elektrikas.
peut apprendre bien des
Situation actuelle
choses sur la vie de nos
communautés dont la
Aujourd’hui, le judéo-espalangue est le miroir... La
gnol de Turquie est de plus en
boue (batak), fréquente
plus turquisé et francisé à traalors, a dû frapper les
vers le turc, lui aussi francisé.
imaginations et favoriser
En 1968, M.S.Uysal 11 dénomcet “embatakar” dont le
brait, en turc, plus de 5.000
premier sens fut ‘se saloemprunts au français. C’est
per’, et le second, par
dire que le judéo-espagnol
banalisation, ‘se salir’.
contient paradoxalement des
De même, tout en
archaïsmes
“tonitruants”
exploitant les formants
comme trokar, ‘changer’ ou
espagnols, le djudezmo a
merkar, ‘acheter’et des néolopu se créer toute une
gismes aussi détonnants que
panoplie pour désigner
amüzarse, angajar ou maltoutes sortes de manies,
orozo. Tout cela assaisonné
Pentateuque de Constantinople
notamment en -dero :
d’emprunts divers aux langues
(1547)
eskrividero, asentadero,
en contact, l’hébreu 12 bien sûr,
lambedero, etc., manies d’écrire, de s’asmême au ladino (kada uno i uno [ hébr. kol
seoir, de lécher, etc.
ehad ve-ehad ] un chichit, ‘chacun avec son
Ainsi, d’étape en étape on peut suivre les
grain de sel’ - Vidas largas [ hébr. hayyim
impacts des langues au contact desquelles
arukhim ] ke tengach !, ‘Que vous viviez
s’est trouvé ou se trouvera le judéo-espalongtemps ! Longue vie !’ lance-t-on aux
gnol, et ce, différemment selon qu’on se
nouveaux époux.
trouvât dans tel ou tel pays de l’Empire.
On le voit, l’histoire du judéo-espagnol
On peut ainsi trouver outre les emprunts au
avec ses deux modalités, calque (ladino) et
turc, d’autres faits au bulgare, au roumain,
vernaculaire ( djudezmo), est d’un intérêt
au serbe, dans ces différents pays, voire
considérable, tant du point de vue de l’hisaussi à l’allemand et à l’italien, langues
toire des mentalités que de ceux de la linenseignées respectivement par la
guistique, de la sociologie et de la littératuHilfsverein et les écoles Dante Alghieri 10.
re dont on trouvera une classification dans
Le judéo-espagnol 13 et où il faudra envisaUne gallomanie galopante :
ger la littérature ladina et la littérature en
le judéo-fragnol
djudezmo. Pour cette dernière il faudra
également y envisager une littérature écrite
Mais l’influence la plus marquante fut celle
(sans oublier la presse représentée par plus
du français qui balaiera les acquis de plude 300 titres) et une autre orale, refranes,
sieurs siècles et atteindra la syntaxe hispa‘proverbes’14,
konsejas et kuentos,
nique elle-même, puisque Dizele de venir,
‘contes’15 et romansas16.
calque du français Dis-lui de venir, se subTout un trésor que nous nous efforçons de
stituera au bien hispanique Dizele ke venga,
recueillir dans l’association Vidas Largas17
et que tant, onkl, granmaman, etc. se sub(cf.B.46, Le judéo-espagnol, “Thésaurisons,
stitueront aux termes si intimes de tiya, tiyo,
thésaurisons,thésaurisons”, pp.196-232).
nonna, etc.
Tout un trésor qu’il ne faut pas abandonner,
Le djudezmo sera pris d’une gallomanie
car il fait partie du patrimoine humain, mais
galopante au point de donner un nouvel état
aussi car il nous renseigne par tous les
de langue que dès 1972 j’ai appelé judéodocuments écrits dans cette langue, sur
fragnol. Du coup le formant -ear ne sera
l’histoire interne et externe de nos commuplus utilisé et, excepté en Bulgarie, l’équanautés.
tion -er du français = -ar de l’espagnol
Il ne faudrait pas que ce désir de conservas’imposera, si fortement, qu’ à l’ancien
tion et de perpétuation de la culture judéoenglenearse on substituera amüzarse où ü
espagnole restât un simple voeu pieux.
correspond au u français comme ö corLe judéo-espagnol sera appelé à un nouvel
respond au eu ou au e muet français, la phoavenir si nous le désirons tous, sujets parnétique et particulièrement le vocalisme
lants et chercheurs.
espagnol s’en trouvant bouleversés. Cette

Et sa reconnaissance par le “Bureau
Européen des Langues Moins Répandues “
est un véritable encouragement.
Le 1er juillet 1998, Nathan Weinstock et moi
présentions notre brochure, Yiddish et
Judéo-espagnol, Un héritage européen, au
Parlement Européen dont existe aussi une
version en anglais ( B.77 et B.78).
La bibliographie succincte de mes travaux
montre combien riche est cette langue
protoplasmique “toujours recommencée”,
toujours en contact avec d’autres langues
tantôt minoritaires, tantôt majoritaires et
souvent glossophages.
Nous sommes en pleine linguistique de
contact, en pleine “con-tactologie”, en pleine pluridisciplinarité, un terrain fécondissime pour les recherches historico-ethnopsycho-sociolinguistiques.
Ces différents aspects avec contes, proverbes et chants feront l’objet de nos prochaines chroniques.
* NDLR
PNM 248 : Jacques Varin, Panorama des
langues juives
PNM 249 : Charles Dobzynski, La langue
Yiddish, Le feu et l’éclat de la braise
PNM 250 : Haïm-Vidal Sephiha, Les judéolangues
PNM 251 : Haïm-Vidal Sephiha, Aventures
et mésaventures du judéo-espagnol (1/2)
8) H.-V.Sephiha, “El ladino (judeo-español
calco) de Ishac Cardoso”,in Proceedings of the
6th EAJS Congress Toledo 1998, Jewish Studies
at the Turn of the 20th Century, vol.II, Ed. Judit
Targarona & Angel Sáenz-Badillos - Brill,
Leiden - Boston, 1999, - pp. 637-540.
9) arabisme qui signifie soufre
10) SEPHIHA Haïm-Vidal, “Les emprunts linguistiques dans le Refranero judéo-espagnol Etude préliminaire”, in Hommage à Abdon
Yaranga Valderrama, l’Indien Quechua de
Paris, Cahiers de Recherche “Langues et cultures opprimées et minorisées”, Saint-Denis,
1993, pp.387-407.
11) M.S.Uysal, Recherches sur les emprunts
lexicaux du turc au français, Thèse de IIIème
cycle, Paris, 1968.
12) Tant en ladino qu’en djudezmo .
13) SEPHIHA Haïm-Vidal, Le judéo-espagnol ,
Ed. Entente, coll. “Langues en péril”, Paris,
1986, 242 p.
14) “Portrait de la société judéo-espagnole ou
Dis-moi tes proverbes, je te dirai qui tu es”, in
Actes du Colloque de Parémiologie, Lille, du 6
au 8 mars 1981, parus sous le titre RICHESSE DU
PROVERBE, vol.II, Typologie et fonctions, études
réunies par F.Suard et Cl.Buridant, Université de
Lille III, coll. “ Travaux et recherches”, Lille
1984, pp.199 à 209.
15) SEPHIHA Haïm-Vidal, Contes judéo-espagnols - Du miel au fiel, traduits et présentés par
H.V.Séphiha , Ed. Bibliophane, Paris, 1992.
16) Trésor conservé et chanté par Henriette
Azen, Unos romances de mi madre, textes établis et traduits par H.V.Séphiha , un disque édité
par Vidas Largas, Paris 1982
17) VIDAS LARGAS : Association pour le maintien et la promotion de la langue et de la culture
judéo-espagnoles, édite livres, brochures et
disques - 37, rue Esquirol, 75013 Paris.
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7

LA VIE
DEVANT SOI
ADAPTATION THÉÂTRALE

d’après Emile AJAR

(Romain GARY)

R

omain Gary, dans les années
1970, voulant rompre avec la
notoriété de grand écrivain et ne pas
se laisser enfermer dans une identité
unique, a adopté le pseudonyme
d’Emile Ajar. Sous cette nouvelle
identité, il publie “La vie devant
soi”. Ce roman, écrit à la première
personne, retrace la relation qui s’établit entre deux personnes que
beaucoup de choses éloignent : un
enfant arabe abandonné et une
ancienne prostituée juive. C’est
pourtant le récit non seulement de la
solidarité qui les unit, de leur affection mutuelle, de leur dignité respective, mais aussi celui des valeurs
humaines nées de cette confrontation.
Le Théâtre Marigny a présenté une
très belle adaptation théâtrale de ce
roman. Celle-ci présente les thèmes
majeurs du roman, réalisant une
image plausible de celui-ci. La mise
en scène met l’accent sur la vitalité
contenue dans l’œuvre.
Il faut insister sur la performance de
l’actrice Myriam Boyer qui sait
retraduire à la fois toute la bienveillance du personnage, mais aussi
toute l’anxiété qui émerge de ses
pulsions contradictoires.
Mais ce qui fait la qualité de ce spectacle, c’est le texte écrit dans la langue simple de l’adolescent, mais
jamais dans un style populaire au
mauvais sens du terme. A vrai dire
Romain Gary invente une langue
spécifique à la situation qui traduit le
respect mutuel que se portent les
deux personnages principaux.
Jacques Lewkowicz

PALESTINE

HEROS
d’Achille à Zidane

de Hubert HADDAD

I

l s’agit d’un roman écrit
par un auteur juif berbère,
roman très singulier par la
situation qu’il décrit : Celle
d’un soldat israélien préposé
à la garde du fameux mur
qui serpente à l’intérieur du
territoire cisjordanien sous le prétexte
de protéger les colonies israéliennes.
Ce militaire essuie une attaque des
résistants palestiniens au cours de
laquelle un de ses compagnons d’armes trouve la mort et lui-même est
blessé. Fait prisonnier, il est soigné par
une mère et sa fille palestinienne. Cette
dernière lui donne l’identité de son
frère.
Ce symbole est celui de l’ensemble
de l’œuvre. L’auteur y montre qu’audelà des frontières et des nationalismes agressifs, il existe une fraternité
humaine qui ne demande qu’à s’exprimer. Car, continuant à adopter
lors de son séjour en Palestine l’identité empruntée du frère, le personnage découvre la réalité des
meurtrissures subies par la population palestinienne du fait du conflit,
en même temps que tout ce qui rend
sa situation ambiguë.
Ce récit est écrit dans une langue
extrêmement dépouillée et classique.
Rigueur stylistique qui donne encore
plus de force à la violence des sentiments qu’il fait naître chez le lecteur.
Lecture à conseiller à tous ceux qui
veulent comprendre le conflit israélopalestinien, non seulement au travers
de froides analyses géopolitiques,
mais aussi par les chauds sentiments
affectifs dont il est traversé.
JL

Culture

Une exposition* à visiter !
Tel en est le titre, surprenant, certes. De nombreux
personnages de légende y
sont magnifiés. Avec ceux
et celles de la Résistance,
Joseph Epstein tient une
place importante, et j’avoue, inattendue. Pas moins de deux
films en continuité avec témoignages
émouvants dont celui de Raymond
Aubrac. Je vous invite vivement à vous y
rendre.
HL
* Bibliothèque Nationale de France, jusqu’au
13 avril 2008. Du mardi au samedi de 10h à
19h, le dimanche de 13h à 19h sauf J.F.
TP 5 € TR 3,50 €

R
E
P
R
I
S
E
!

R
E
P
R
I
S
E
!

En 2007, vous avez raté ce spectacle ?
ou vous l’avez adoré ? Autant de bonnes
raisons de courir (re)voir cette reprise
exceptionnelle de l’adaptation en yiddish, surtitrée en français, d’une pièce
d’Avrom Goldfaden réalisée par
Charlotte Messer. Plaisir garanti ! TRS
Mardi 5 février 2008
au Théâtre des Deux Portes
17 rue René Boulanger Paris 10°
Réservation : 01 47 00 14 00 (MCY)

WITZ

RETROUVÉS

* Hubert Haddad, Palestine, Ed. Zulma,
Paris, 160 p., 16,50 €

LA PNM A
REÇU ...

Le MAHJ invite plusieurs psychanalystes
qui ont une longue fréquentation de la
Bible hébraïque à nous livrer le fruit de
leurs lectures et de leurs interprétations,
tout au long de la saison 2007-2008 ...

- Une bouteille dans la mer de
Gaza de Valèrie Zenatti. Ed.
Ecole des loisirs, Paris, 2005 - 9.50€

Mercredi 13 février 2008
à 20 h 30
QOHÉLET (L’ECCLÉSIASTE) ET
LA QUESTION DU DÉSIR

AVEZ-VOUS VU ?
- “La visite de la fanfare”
réconfortant film israélien, à
recommander
(GD, Paris)
- “Faut que ça danse !” jubilatoire portrait de la famille Belinsky Inattendue
visite du Mémorial de Caen ...
Hymne à la vie ! (TRS, Paris)

par Gérard Haddad, psychanalyste
“S’il y a un écrit biblique qui devrait intéresser le psychanalyste et qui recoupe sa
pratique, c’est certainement celui-là,
QOHÉLET. (...) Lacan (...) en avait fait son
livre de chevet, citant sans relâche ce verset : Jouis de la femme que tu aimes…”
TP 4€ TR 3€ - Réservation indispensable
par mél ou téléphone au 01 53 01 86 48
(du lundi au vendredi de 14h à 18h)

DANS LA MER
DE GAZA

Mardi 29 et Jeudi 31 janvier
à 20h.
Tal, jeune israélienne de Jérusalem
et Naïm, jeune palestinien de Gaza
tentent de se parler ...
Adaptation* par la compagnie
“LES PLANCHES ET LES NUAGES” du
roman de Valérie Zenatti, suivie d’un
débat avec M. le Maire et Mme. la
Députée du XX° arrdt. de Paris.
* Organisée par la Maison Itshak Rabin au
CARRÉ DE BAUDOIN - 121 Rue de
Ménilmontant 75020 Paris M° Gambetta.
Places 15 € TR 10 € Résa: 01 55 30 02 37

CAFÉ HISTORIQUE
EN RÉGION
Mardi 5 février, 18h30
à Chateauroux
Un circuit de sauvetage
d’enfants juifs pendant la guerre
Le circuit Garel
Conférence* donnée au Café le Saint
Hubert, 25, rue de la Poste à
Châteauroux, par Katy HAZAN, historienne, responsable du Département
Archives et Histoire de l’OSE (Oeuvre
de Secours aux Enfants).
* Organisée par le Centre Européen de
Promotion de l’Histoire - 3, quai Abbé
Grégoire - 41000 BLOIS - Contact :
Florence Baraniak 02 54 56 84 27
www.cafeshistoriques.com et le Cercil
(Centre d’Etude et de Recherche sur les
camps d’internement de Beaune-la-Rolande,
Pithiviers et Jargeau et la déportation juive) 2 cloître Saint-Pierre le Puellier - 45000
Orléans - Contact : 02 38 42 03 91 www.cercil.fr

Léa MIMOUN
chante BARBARA
Samedi 9 février
à 20h30

Lectures
psychanalytiques
de la Bible

- L’encre du Caméléon (Contes,
nouvelles et récits) de David
Izraelewicz. Ed. La
Bruyère,
Paris 2007 - 14€

UNE BOUTEILLE

à l’Espace ICARE - 31 Bld Gambetta 92130 Issy-les-Moulineaux - Réservation :
01 40 93 44 50

Samedi 16 février à 20h30
UN SOURIRE

IL CONNAÎT
LES HOMMES

“Comment se fait-il - demande quelqu’un au serveur d’un restaurant - que
les pauvres vous donnent plus de
pourboire que les riches ?”
“La raison en est la même - répond-il
- les pauvres ne veulent pas que l’on
sache qu’ils sont pauvres, et les riches
ne veulent pas que l’on sache qu’ils
sont riches.”

ERRATUM

: Une coquille s’est
glissée dans l’éditorial de la PNM du
mois dernier (n° 251). En haut de
deuxième colonne, il fallait lire : PRÉLEVÉ et non RÉNOVÉ dans la phrase :
“remboursement prélevé sur l’héritage des allocations d’aide aux personnes âgées ;”

au Centre Medem - 52 Rue René
Boulanger 75010 Paris (M° Strasbourg St
Denis ou République) - Réservation :
01 42 02 17 08
www.myspace.com/leamimoun

GEFILTE SWING
Jeudi 28 Février 2008 à 21h
Musique klezmer et
chansons yiddish swing
de l’entre-deux guerres
au Bar’Oc Café - 36 rue de Sambre et
Meuse - 75010 Paris (M° Colonel Fabien ou
Belleville) - Réservation : 01 42 40 93 38
http://gefilte.swing.free.fr
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Itinéraire

Wi l l y R o n i s - L a v i e e n c o u r a n t !
Entretien par Hélène Amblard

Toute la vie de Willy Ronis est tournée vers la rue, le quotidien, le mouvement social et les instants qui les immortalisent.

Hélène Amblard : La photographie
est un art qui a pu s’imposer en partie grâce à vous.

phe, puis il a dirigé un studio de portraits, qu’il a acheté dans les années 20.

mouvement formidable avec des journaux, des illustrés, où travaillaient des
photographes venus de l’Est, qui ont
HA: Vous ne vous destiniez pas à la
influencé toute l’Europe occidentale.
photographie ?
Willy Ronis : Grâce à des photograA l’Association des Artistes et
phes humanistes, des photographes
WR: J’ai fait un an de droit parce que
Ecrivains Révolutionnaires, j’ai
reporters, oui. Pas mal d’entre eux
je voulais être compositeur de
connu Marie Claude Vaillant
étaient venus de Hongrie comme
musique. Je me disais que si je deveCouturier, photographe à “Regards”.
Capa, de Pologne comme Chim*. Il y
nais petit fonctionnaire, j’aurais le
C’était la fille de Lucien Vogel, un très
avait des Français comme Doisneau,
temps de faire de la musique et qu’il
grand journaliste fondateur d’hebdoCartier Bresson et moi-même. Et par
était bon d’avoir ces notions. Les chomadaires et d’illustrés dont “Vu”, qui
la suite, tous les autres.
a influencé “Life”, né
peu après. J’étais au
HA: Vos parents
Parti
Communiste
venaient d’Europe
sans jamais avoir été
de l’Est ?
aux Jeunesses. De
1936 à 1939, j’ai traWR: Mon père
vaillé
pour
venait d’Odessa.
“Regards”, d’autres
Ma mère a quitté la
hebdos et mensuels
Lithuanie avec sa
non communistes. En
tante à quatre ans.
fait, j’ai gagné ma vie
Elles sont restées à
correctement jusqu’à
Berlin jusqu’à son
la guerre. J’ai été
adolescence, quand
affecté dans une pousa tante l’a emmedrière à Bergerac jusnée à Paris où elle a
qu’à ma démobilisafait ses études. Ma
tion. J’ai évité d’être
mère a eu très peu
fait prisonnier de jusde notions sur les
tesse et je suis descenpogromes, sauf sur
du dans la zone Sud
ce qu’a pu lui en
où je suis resté en faidire sa tante. Elle
sant de petits boulots.
était doublement
Ma mère n’a pas été
orpheline. Je l’ai
inquiétée et pourtant,
connue sans aucun
elle portait l’étoile.
accent, alors que
A la Libération, je
mon père a gardé le
suis rentré à Paris et
sien toute sa vie. Il
j’ai tout de suite
était arrivé à Paris à
repris pied dans le
trente ans environ,
métier. Je me suis
conditionné par sa
marié
en
1946.
Le délégué, 1950 - Délégué des charpentiers de Paris en grève**
pratique du russe et
© Willy Ronis / Rapho.
Pendant dix ans, ça a
du yiddish. Ne parmarché merveilleuselant pas un mot de
ses se sont arrangées autrement parce
ment. Les difficultés ne se sont manifrançais, il s’était inscrit dans une
qu’en 1932, au retour du service, mon
festées que dans les années soixante.
amicale juive russe, où mes parents se
père m’a dit “je suis très malade, j’ai
Il y a eu une crise d’expression avec
sont probablement connus. Mon père
besoin de toi au studio”. C’était la crise ;
une prime à la photo américaine, la
ne jouait d’aucun instrument, mais il
les affaires marchaient mal. De 1932
photo dure, la photo de choc. Moi, ce
était très mélomane. Ma mère, bonne
à 1936, j’ai donc dirigé ce studio où
n’était pas mon style.
pianiste, donnait des leçons. Je suis né
j’étais entré en reculant. En 1936, à la
Je m’en suis sorti en faisant un peu
en 1910 et mon enfance est scandée
mort de mon père, après l’abandon du
de photo industrielle et de publicité
par les gammes qu’elle faisait avec ses
studio à ses créanciers, je me suis
et en 1972, j’en ai eu marre : nous
petits élèves. Quand mon frère est né,
lancé dans l’aventure de la photograavons quitté Paris pour le Midi.
j’avais huit ans. Elle a cessé ses
phie indépendante. Je suis descendu
J’ai vécu en faisant des cours
leçons, mais il m’est resté un amour
dans la rue avec un appareil d’amad’Histoire de la photo à la faculté
profond pour la musique.
teur, et j’ai fait le premier reportage
d’Aix en Provence et aux BeauxMa mère ne parlait pas yiddish ; avec
que je m’étais commandé à moiArts d’Avignon. J’ai fait également
mon père, ils ne parlaient que français.
même, le 14 juillet 1936.
des reportages couleur pour des édiBien sûr, pour les fêtes traditionnelles,
C’est là que tout a démarré. Je me
teurs parisiens sur la Provence. Nous
on allait à la synagogue mais c’était à
retrouvais chef de famille avec une
sommes restés une douzaine d’anpeu près mon seul contact avec la tradimaman qui n’avait pas de métier et
nées dans le Midi.
tion juive. Je savais qu’il existait un
un frère au lycée. Je m’étais impliAujourd’hui, je marche très mal.
mouvement juif laïque progressiste,
qué dans le mouvement antifasciste
mais j’étais avant tout préoccupé par
J’ai la chance d’avoir des archives
et je faisais des photos en partie pour
des problèmes de vie quotidienne. Ma
très importantes chez Rapho. C’est
gagner ma vie, en partie pour témoimère était croyante, mon père ne l’était
le résultat d’une longue vie de tragner sur le mouvement social
pas. Il ne voyait pas la nécessité de
vail dans des registres très difféambiant.
m’apprendre le yiddish ; il avait fort à
rents. Je m’intéressais aux gens, à la
faire pour gagner la pitance de la maiLe reportage humaniste allemand
vie quotidienne ; j’étais vraiment
son. Il était d’abord ouvrier photogrades années 20 et 30 avait impulsé un
dans le siècle.

Depuis plus de
dix ans, je ne
fais plus de
photo.
Mes
photos, je les faisais en courant !
* [NDLR] Dawid Szymin, qui se fait appeler Chim à son arrivée en France en 1931,
s’installe à New York pendant la guerre où
il prend rapidement la nationalité américaine. Il y devient David Seymour.
** Photo extraite de l’album de Willy
Ronis, Didier Daeninckx, A nous la vie !
1936-1958 Ed. hoëbeke, Paris, 1996,
ISBN 2-84230-009-2, avec l’aimable autorisation de l’agence Rapho.

REJOIGNEZ
MRJ-MOI !
Chères lectrices,
Chers lecteurs,
Il y a plus de deux ans, naissait une
nouvelle association (JO 25/06/2005) :
Mémoire des Resistants Juifs de la
M.O.I. (MRJ-MOI). Les membres
fondateurs de cette association, dont
d’anciens des bataillons résistants
juifs des FTP-MOI, de l’Union des
Juifs pour la Résistance et l’Entraide
(UJRE) ou de la Commission centrale de l’enfance (CCE), des militants
des Amis de la CCE (AaCCE), ont
pour objectif la création, au 14 rue
de Paradis, d’un lieu de mémoire
dédié à la Résistance juive de la
M.O.I. et à l’engagement progressiste et humaniste de celles et ceux qui
ont prolongé leurs combats après la
guerre, jusqu’aujourd’hui. Des
démarches sont en cours auprès des
pouvoirs publics ; l’OPAC a d’ores et
déjà intégré ce projet dans son programme de réhabilitation du “14”.
Mais il faut faire davantage pour
qu’une décision politique soit prise,
qui permette l’ouverture de ce lieu
de mémoire.
Mémoire des Résistants Juifs de la
M.O.I. lance un vibrant appel à toutes celles, à tous ceux, individus et
organisations, qui voudraient lui
apporter leur soutien, en adhérant à
l’association, en contribuant financièrement à son efficacité.
Rejoignez-nous !
------------------------BULLETIN :
J’adhère à l’association MRJ-MOI
Adhésion simple : 30 € par an
Adhésion de soutien : 50 € et plus…
Adressez votre bulletin et votre
chèque à : MRJ-MOI, 14 rue de
Paradis 75010 Paris - Internet :
pagesperso-orange.fr/ujre/pages/
mrj-moi.htm

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  • 1. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 1 LA PRESSE NOUVELLE Magazine Progressiste Juif PNM aborde de manière critique les problèmes politiques et culturels, nationaux et internationaux. Elle se refuse à toute diabolisation et combat résolument toutes les manifestations d'antisémitisme et de racisme, ouvertes ou sournoises. PNM se prononce pour une paix juste au Moyen-Orient, sur la base du droit de l'Etat d'Israël à la sécurité, et sur la reconnaissance du droit à un Etat du peuple palestinien. N° 252 - JANVIER 2008 - 26e A N NÉE L e N° 5 , 5 0 € MENSUEL EDITE PAR L’U.J.R.E. Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide Mémoire - 27 janvier - Auschwitz libéré JOURNÉE INTERNATIONALE POUR LA MÉMOIRE DE LA SHOAH ET POUR LA PRÉVENTION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ Ce la e st arriv é , c e la pe ut arrive r e nc o r e ! Primo L E V I AUSCHWITZ VON JUDEN BLUT © M. KRAKOWSKI - USA 63 ANS DÉJÀ ! Le 27 janvier 1945, l’Armée Rouge libérait le camp d’Auschwitz, faisant découvrir au monde l’horreur des camps d’extermination nazis. Chaque traverse est une page Chaque page est un monument J’entens encore les hurlements Des plus faibles de ces otages Les cris et les coups se succèdent Puis les cris ne s’entendent plus, Vient un moment où le corps cède Ne subsiste qu’un mort tout nu. Ils ont eu l’horreur en partage, Bien rares sont les survivants, Aucun enfant ne fait son âge, Nul ne reverra ses parents. Chaque année revient une date Souvenir des crimes passés Que n’effacent pas les années. Les bourreaux ont volé nos âmes. SOUVENONS-NOUS ! Roland Wlos A D. Krakowski LE MOT DU PRÉSIDENT PROCHE-ORIENT Les négociations, otages du blocus de Gaza L’Etat juif et le conflit israélo-palestinien L. Steinberg p. 2 J. Dimet J. Fath p. 3 p. 3 L. Steinberg p. 2 M. Muller H. Levart p. 4 p. 4 R. Joseph p. 5 HISTOIRE John Rabe - Un nazi atypique SOCIÉTÉ L’Arche de Zoë - Une imposture exemplaire Sus aux Infidèles ! EUROPE Le brûlot des Balkans CULTURE (p.7) Aventures et mésaventures du judéo-espagnol H-V. Sephiha p. 6 ITINÉRAIRE Willy Ronis - La vie en courant ! Entretien avec H. Amblard p. 8 Politique de civilisation ? plusieurs reprises, N. SARKOZY vient de proclamer qu’il entend conduire “une politique de civilisation”. Au regard de celle qu’il met en oeuvre depuis qu’il est Président de la République, et du programme qu’il affiche, on ne peut qu’être sceptique, car l’affirmation de cette ambition, relève, quant au fond, d’une véritable duperie. Pour Edgar MORIN*, ce concept signifie “remettre l’humain au centre de la politique, donner la priorité à la qualité de vie et retrouver solidarité et responsabilité (...) la réduction des inégalités...” On est aux antipodes de cette finalité ; ainsi, par l’instauration d’une “franchise” sur les soins, à la manière de l’assurance automobile, (encore heureux que ne soit pas ajouté un coefficient de vétusté), ces critères bafouent la dignité humaine. La valeur d’une personne ne s’apprécie pas comme celle d’un véhicule endommagé. Un malade n’a pas à être sanctionné pour son état de santé. Alors que la solidarité constitue l’un des fondements de la civilisation, est-ce être solidaire que faire payer un malade pour d’autres malades, en faisant peser injustement des charges souvent insurmontables pour les plus démunis? Après les cadeaux fiscaux faramineux qui n’ont concerné qu’une infime minorité de privilégiés... Politique de civilisation, dites-vous ? Mais peut-on parler de civilisation quand on évalue le travail d’un ministre au nombre d’expulsions, causant la traque des individus, la séparation brutale des enfants d’avec leurs parents, et des peurs qui conduisent au pire ? Mais de quelle civilisation parle-t-on quand, à côté d’un chômage massif, des salariés vivent au-dessous du seuil de pauvreté, contraints pour certains à être sans domicile... ? Quand l’urgence de réformer le système solidaire de retraite se traduit par un allongement de la durée de cotisation ? Et qu’au lieu de faire profiter les salariés des progrès techniques et de la productivité, on allonge la durée du travail, en envisageant même d’en finir avec sa durée légale et d’autoriser le travail du dimanche... ? Est-ce encore de la civilisation lorsqu’en matière de politique internationale, le Président confirme son ralliement au modèle américain, sans se donner les moyens d’éteindre, notamment, la poudrière du Proche-Orient ? Est-ce toujours de la civilisation, quand son ambition est de donner au capital financier national les moyens de participer à la guerre économique, dans le cadre de la mondialisation libérale, en accentuant le système d’exploitation et de domination qui se traduit par la mise en concurrence des individus et des peuples ? Comme l’a dit clairement la Présidente du MEDEF : “Le Président de la République pose les actes et énonce des principes qui, à terme, structureront différemment la société française comme nous, les entrepreneurs, le souhaitons”. Ainsi la voie empruntée jusque là n’augure pas, pour le plus grand nombre, d’un “avenir de civilisation au service d’une nouvelle renaissance”. * Edgar Morin, sociologue, auteur en 1997, avec le politoloque Sami Naïr, de l’ouvrage réimprimé le 14/01/2008 “Pour une politique de civilisation” Ed. Arlea, Paris, 2002, 80 p., 5€
  • 2. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 2 P.N.M. JANVIER 2008 2 Courrier des lecteurs Elie Korenfeld, Champigny Chers amis, j’ai pris connaissance de l’article paru dans la PNM d’octobre concernant la mémoire des Résistants de la MOI. Evidemment, je me joins à votre appel, d’autant plus quej’ai connu personnellement Fingersweig, un des fusillés de “l’affiche rouge”, pendant la période noire de l’Occupation. Nous habitions le même quartier, celui de la Bastille. Résistants tous les deux, mais pas dans le même Réseau. Merci pour ce que vous entreprenez.Très amicales salutations à vous tous. Jacques Céliset, Paris Chers amis, en tant qu’abonné depuis des décennies à la PNH, je veux me joindre à l’appel pour le parrainage d’un Espace de mémoire dédié à la Résistance des immigrés juifs de la M.O.I. Je le fais en tant que juif arrêté le 16 juillet 1942 et ayant échappé au sort réservé à mes parents et à mon frère assassinés à Auschwitz moins de 10 semaines après leur déportation. Egalement en tant que Secrétaire général de l’Association Fonds Mémoire CARNET Décès Léa LESCOU et Sophie SPECULANTE ont la grande tristesse de vous faire part de la disparition dans sa 81ème année de leur soeur aînée Fanny SERMAIZE née ZYLBERSPON d’Auschwitz (AFMA), tel qu’approuvé par la direction nationale de l’Association. En vous souhaitant tout le succès pour la mise en oeuvre du projet, je vous prie de croire, chers amis, à l’assurance de mes meilleurs sentiments ainsi qu’à tous mes voeux pour l’année 2008. Annette Azenac, Paris Chers amis, je vous présente mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année en souhaitant que notre journal “La Presse Nouvelle” continue à évoluer comme elle le fait ces deux dernières années. J’apprécie pour l’essentiel la teneur du journal, il est agréable à lire, et surtout à le lire dans sa totalité. (...) Avec mes sentiments les plus cordiaux. Andrée Daspre, Toulon Chers amis, j’ai lu avec grand plaisir le dernier numéro, 249, de la Presse Nouvelle, que mon amie Marlène Steinberg a eu la bonne idée de me faire parvenir. L’orientation Rédaction - Administration : 14, rue de Paradis 75010 PARIS Tel. : 01 47 70 62 16 Fax: 01 45 23 00 96 Mèl : ujre@wanadoo.fr Site : http://ujre.monsite.wanadoo.fr (bulletin d’abonnement téléchargeable) Tarif d’abonnement : France et Union européenne: 6 mois 28 euros 1 an 55 euros Etranger, hors U.E : 70 euros IMPRIMERIE DE CHABROL PARIS Lorsque nous fatiguons ou doutons ... voila de petits mots qui nous vont droit au coeur, merci de vos encouragements ! L’équipe de la PNM S uite à la publication par “Le Monde des Religions” (n° 27 de janvier-février 2008) du dossier “Etre juif en France en 2008”, nous avons reçu deux copies de lettres de lecteurs adressées à cette publication, s’étonnant de l’omission, voire de l’ostracisme, de cette enquête à l’égard de “deux organisations juives laïques et progressistes et de leurs publications”, à savoir l’UJRE (la Presse Nouvelle Magazine) et les Amis de la CCE - COMMISSION CENTRALE DE L’ENFANCE (“La lettre des Amis de la CCE”). En voici quelques extraits : “La liste des organisations juives pp. 40 et 41 me paraît incomplète (...) je ne crois pas l’omission innocente (...) “éviter que se renouvellent des pratiques d’exclusion” J-F. Marx - “Deux associations issues de la Résistance pendant la guerre 1939-1945 (...) Omission volontaire ou involotaire de votre part ? Permettez-moi de vous inviter à compléter votre dossier en prenant contact avc ces organisations qui ont joué un très grand rôle pendant et après la guerre” (...) (S.Boski) . Nous aurons l’occasion d’y revenir dans le prochain numéro. L’équipe de la PNM LA PRESSE NOUVELLE Magazine Progressiste Juif édité par l’U.J.R.E. Comité de rédaction : Jacques Dimet, Bernard Frédérick, Nicole Mokobodzki,T.R. Staroswiecki, Lucien Steinberg, Nathan Zederman, Roland Wlos, Solange Zoldan N° paritaire 64825 (en cours de renouvellement) C.C.P. Paris 5 701 33 R Directeur de la Publication : Lucien STEINBERG générale de votre mensuel est combative, courageuse et me convient tout à fait ! Permettez-moi de vous féliciter et de marquer ma sympathie par ce versement à votre souscription. Bien cordialement. Adolphe Ekman Avec mes meilleurs voeux de SANTÉ pour l’année nouvelle 2008 à tous mes AMIS PROGRESSISTES de l’UJRE Patrick Le Mignan, Erdeven Au seuil de cette nouvelle année, ma famille et moi-même voous adressons nos voeux les meilleurs. Nous vous souhaiton une très bonne santé, bonheur et joie partagés au sein de vos foyers, paix et amour entre les peuples. Amitiés. Jacques Smusman, Montreuil Longue vie à PNM et à UJRE ! John RABE - Un nazi atypique L a mémoire de John Rabe, nazi atypique, est vive en Chine, pour une bonne raison. Cet allemand vivant hors du Reich avait adhéré au parti nazi. Il vivait en Chine, représentant du KonZern Siemens, jusqu’en 1937. Bon nazi, bon européen, il n’avait guère d’estime pour ses ouvriers chinois ; jusqu’en 1937, quand l’armée japonaise prit d’assaut Nankin, capitale provisoire de la Chine nationaliste. L’armée nippopne s’est livrée à des massacres à Nankin. Rabe en fut révolté - et il a agi. Le Japon étant l’allié du Reich, Rabe a mis en place d’immenses drapeaux à croix gammée autour de son usine. Drapeaux qui ont permis de sauver des dizaines de milliers de chinoix. Son exemple a été suivi par d’autres industriels étrangers, mais à moindre échelle. Aujourd’huu, Rabe est un héros national en Chine. Il n’en fut pas de même dans le Reich : rentré en Allemagne il voulait dénoncer les crimes de Nankin - mais le Japon étant son allié, la Gestapo a su décourager Rabe. Aujourd’hui, un film est en préparation - une coproduction sino-allemande. LS SOUSCRIPTION* n°43 (du 16 décembre 2007 au 15 janvier 2008) En ce début de l’an 2008, je tiens tout d’abord à vous présenter à toutes et à tous, chers lecteurs et amis de la PNM et de l’UJRE, mes meilleurs voeux pour vous et ceux qui vous sont chers, de santé, de joie et beaucoup d’instants de bonheur. Après une année de grisaille et de remise en cause de ce qui a toujours été au coeur du combat de l’UJRE, la SOLIDARITÉ, je forme aussi le voeu que l’action unie de tous les démocrates et des gens de coeur crée les conditions pour voir se lever un nouvel espoir pour la Paix, et pour le mieux-être. Je forme enfin le voeu, à bientôt 82 ans, de voir des amis et camarades “plus jeunes” nous rejoindre nombreux ... En effet, mon état de santé m’a cloué loin de l’UJRE et de la PNM pendant les derniers douze mois, mais la PNM et l’UJRE ont continué ! L’équipe qui a pris en main l’existence du journal et de notre Union a fait ses preuves, et je les en félicite : Ainsi, le projet de MRJ-MOI a pris corps, s’est affermi, a reçu de larges soutiens, assurant prochainement pérennité, au “14”, de la mémoire de ces “étrangers”, résistants juifs de la MOI... Ainsi, le projet de DVD pour le film “Nous continuons”, tourné par l’UJRE en 1946 “à la mémoire de ceux qui sont tombés pour que les enfants puissent vivre et rire librement”, portera-t-il témoignage aux jeunes générations des actions de sauvetage entreprises par ces “immigrés”, fondateurs de la Commission Centrale de l’Enfance auprès de l’UJRE, qui voulurent redonner toute leur dignité aux orphelins de fusillés, de déportés ... Mon action, avec cette équipe, et parmi vous, m’a rempli de joie et d’espoir. BULLETIN D'ABONNEMENT Je souhaite m'abonner à votre journal "pas comme les autres", magazine progressiste juif. Je vous adresse ci-joint mes nom, adresse postale, date de naissance, mèl et téléphone D’ores et déjà, je vous confie un article sur un personnage hors du commun, John Rabe, le nazi qui a sauvé la vie de dizaines de milliers de Chinois lors de la guerre sino-japonaise. PA R R A I N AG E (10 € pour 3 mois) J’ O F F R E U N A B O N N E M E N T À : Nom et prénom .............. Adresse ....................... Téléphone ..................... Courriel ...................... Le mot du Président Bon courage, allons de l’avant ! * Sauf mention explicite d’un don ou d’une adhésion UJRE, tout règlement reçu par le journal renouvelle, à échéance, l’abonnement à la PNM - NB: 66% des dons (Adhésions, Dons) sont déductibles des revenus déclarables. Lucien Steinberg Président de l’UJRE
  • 3. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 3 P.N.M. JANVIER 2008 3 L’Etat juif et le conflit israélo-palestinien par Jacques FATH Après la Conférence de Paix tenue à Annapolis le 27 novembre 2007, la PNM entame une consultation des responsables politiques français, en commençant par M. Jacques FATH, responsable des relations internationales du Parti Communiste Français. PNM: Ehud OLMERT a exigé des Palestiniens qu’ils reconnaissent Israël comme un Etat juif. Qu’en pensez-vous ? E hud Olmert, Premier ministre, en a effectivement fait une condition d’un accord, lors du Sommet d’Annapolis censé rouvrir un processus de règlement politique. Cette exigence n’est évidemment pas nouvelle. Mais le fait qu’elle soit ainsi posée est nouveau. Ajoutée à la multiplication d’annonces provocatrices d’extension de la colonisation à Jérusalem, elle apparaît comme la volonté manifeste de faire échec à toute négociation. La situation est des plus préoccupantes pour l’avenir immédiat. Cependant, cette question de l’Etat juif est d’une autre portée. C’est aussi un problème fondamental. D’une façon générale, il n’est jamais rassurant de voir des dirigeants politiques définir une souveraineté étatique sur une base ethnique ou religieuse. Cela rapproche trop de l’intégrisme. Les divisions et les dominations identitaires sont productrices de répressions et de violences, et on ne connaît pas d’exemple d’Etat fondé sur une religion, d’Etat théocratique qui soit aujourd’hui démocratique. Ni l’Iran, ni l’Arabie saoudite ne brillent par le pluralisme, le respect des libertés et de l’Etat de droit. Le cas d’Israël est bien sûr spécifique, du fait de l’histoire et d’un conflit israélo-palestinien et israélo-arabe loin d’être résolu. Première question : si Israël est un Etat juif, alors quel est le statut et quels sont les droits réels des 20% de sa population palestinienne, musulmane et chrétienne ? Poser cette question c’est y répondre. Comme le dit Monseigneur Sabbah, Patriarche latin de Jérusalem, c’est la porte ouverte à la discrimination. Et cette discrimination est déjà une réalité. Tous les citoyens d’Israël ne vivent pas de la même manière car ils n’ont pas les mêmes droits, ils ne bénéficient pas des mêmes services de l’Etat, certains ont des privilèges, leur citoyenneté est loin d’être égale, ils ne sont pas considérés de la même manière, l’histoire et le passé des uns sont étouffés pour que le quotidien et l’avenir des autres soit mieux assuré…Beaucoup ont le sentiment d’être étrangers dans leur propre pays. Israël n’est pas un Etat juif démocratique, comme le dit Uri Avnery du mouvement Gush Shalom. C’est un “Etat juif démographique”. On y distri- bue de la terre aux juifs, pas aux arabes, souligne encore Avnery. Exiger d’être reconnu en tant qu’Etat juif comme condition d’une négociation israélo-palestinienne soulève une deuxième question, celle du droit au retour des réfugiés palestiniens. Voici des années que l’Autorité palestinienne et les dirigeants de l’OLP ont admis que l’application concrète de ce droit fera l’objet de négociations pourvu que le principe soit reconnu comme légitime, ce qui correspond au droit international. Affirmer en préalable au règlement de cette question qu’Israël est un Etat juif, c’est refuser par avance la reconnaissance de ce droit et toute application possible. Un tel positionnement est inacceptable sur le fond et choquant dans la forme. C’est un mépris ouvert et profond pour les droits nationaux du peuple palestinien et pour les droits des citoyens arabes palestiniens d’Israël. L’exigence de justice et de démocratie conduit à rappeler le droit légitime des Palestiniens à édifier leur propre Etat indépendant à côté d’Israël, avec Jérusalem-Est pour capitale. Elle conduit aussi à rappeler qu’un Etat démocratique doit être un Etat de tous ses citoyens et enfin que tout réfugié dispose de la reconnaissance de son droit inaliénable au retour. Ces positionnements sont décisifs car si l’on ne fonde pas un règlement politique négocié sur des valeurs et des principes, sur des droits rigoureusement définis et interprétés - conformément à la Charte et aux résolutions des Nations Unies en particulier - c’est la crédibilité et la durée même d’une solution négociée qui est en cause et qui peut être fragilisée en toutes sortes de circonstances. Cela est d’autant plus important que ce débat est marqué par certaines dérives, souvent graves, qui se nourrissent de l’impasse politique actuelle. Pour certains - notamment parce que l’emprise de la colonisation rendrait problématique la création d’un Etat palestinien viable - il faudrait en finir avec l’Etat d’Israël et créer un seul Etat multinational et multiconfessionnel. D’autres ne précisent même pas ce que deviendrait la population juive dans le cadre d’une telle “solution”… dont la nature - au delà de la simple crédibilité - n’a pour seule vertu que d’exacerber des polémiques et des confrontations, voire d’alimenter le racisme et l’antisémitisme. Ces dérives sont très minoritaires même si elles s’appuient sur la réalité d’une colonisation qui n’a jamais cessé de progresser et qui rend, il est vrai, par l’accu.../... Suite en page 5 Les négociations otages Moyen-orient du blocus de Gaza par Jacques Dimet Le blocus s’accentue sur Gaza. La situation devient dramatique pour des centaines de milliers de civils. Les négociations risquent d’en pâtir. Q uelles perspectives immédiates et à moyen terme - se dessinent aujourd’hui pour le ProcheOrient et, plus spécifiquement pour l’avenir d’Israël et de la Palestine ? Les derniers événements à Gaza n’incitent pas à l’optimisme. Le blocus de ce qu’Israël appelle désormais une “entité ennemie” (la bande de Gaza contrôlée depuis juin dernier par le Hamas) a des répercussions sur la population civile du territoire. Ce blocus, qui a conduit à la réduction de la production électrique à Gaza, rend encore plus difficile les conditions de vie et ne peut que renforcer le sentiment d’hostilité à une politique de compromis. Ce sont évidemment les éléments les plus extrémistes qui tireront bénéfice de ce type de situation. D’autant plus que par delà les déclarations d’intention, rien de concret ne bouge, qui puisse permettre une amélioration des conditions de vie. La visite du Président américain George W. Bush (sa première au Proche Orient en tant que tel) en Israël et à Jérusalem n’a pas apporté de modification substantielle à la politique de Washington, même si pour la première fois, le locataire de la Maison Blanche a parlé d’occupation et s’est prononcé contre l’installation de nouvelles colonies dans les territoires palestiniens. D’un autre côté, George Bush n’a pas hésité à dire qu’Israël était la patrie des juifs, ce qui n’est pas tout à fait la même chose que de dire qu’Israël est un Etat juif. Toujours est-il que le “deux poids, deux mesures” continue dans la politique internationale. La politique de Nicolas Sarkozy s’apparente de plus en plus, malgré parfois des propos de circonstance, à un alignement sur les positions américaines. Le couplet du Président français dans ses vœux au corps diplomatique sur les valeurs de l’Occident (après ses propos répétés sur les fondements chrétiens de la France) le prouve désormais. L’arrimage de la France à une politique américaine (celle de Bush et des néoconservateurs) est maintenant affirmé, ce qui ne manquera pas, d’ailleurs, de poser quelques problèmes en cas de victoire (probable) des démocrates aux élections présidentielle et parlementaires américaines, et particulièrement si c’est Barack Obama qui emporte la partie. Non seulement l’alignement de la France au plan diplomatique et politique n’est pas juste, mais en plus, il hypothèque l’avenir de la politique internationale de la France, et sa place dans le monde. Alors que les négociations de paix entre l’Autorité palestinienne du Président Abbas et le gouvernement israélien ont commencé, des affrontements armés ont repris entre l’armée israélienne et le Hamas à Gaza. Tsahal a intensifié ses frappes aériennes et incursions terrestres. L’ancien chef du département de planification de l’armée, Shlomo Brom explique “qu’Israël poursuit un double objectif : limiter au maximum les tirs de roquettes et affaiblir le Hamas (...) C’est réalisable, poursuit-il, à condition d’éviter une escalade de la violence incontrôlée en frappant trop fort, ce qui aurait pour effet de torpiller toute relance du processus de paix.” Pour Shlomo Brom, la seule issue possible serait un cessez-le-feu avec le Hamas. Pour le moment, ce dernier lance des roquettes sur le Sud d’Israël, en revendiquant, et ce pour la première fois, ces actes. L’invasion de Gaza a été envisagée mais, selon les analystes militaires israéliens, une telle opération d’envergure, causerait de lourdes pertes à l’armée israélienne et immobiliserait des effectifs importants. Pour les dirigeants israéliens, Ehud Olmert l’a encore récemment rappelé, il s’agit d’une guerre. “Il y a une guerre en cours, a ainsi déclaré le premier ministre israélien, et nous ferons tout notre possible pour mettre fin à ces tirs inacceptables (…) Nous allons continuer de lutter sans merci contre le Hamas, le Jihad et tous nos ennemis.” Pour les responsables palestiniens, “les raids et l’escalade militaire d’Israël visent à infliger un camouflet aux négociations de paix israélo-palestiniennes” *. Cette situation survient, comme nous l’avons indiqué, alors que des négociations directes ont été engagées entre Israéliens et Palestiniens. Ces négociations portent sur un règlement permanent du conflit et englobent les frontières du futur Etat palestinien, le démantèlement des colonies, le statut de Jérusalem et le sort des réfugiés palestiniens de 1948. Questions déjà posées lors des rencontres de Camp David et qui n’avaient pu être réglées à l’époque. Les négociations se poursuivent donc cahin-caha, marquées à la fois par la poursuite de la colonisation, et par les avertissements du président palestinien qui déclare ne pouvoir continuer à négocier dans ces conditions. Le Président américain doit en tout cas faire avancer le processus, car à la fin de l’année il devra céder la place. George Bush a affirmé qu’un accord serait trouvé d’ici là. Notons également qu’Ehud Olmert, dans un entretien donné le 1er janvier au Washington Post, a évoqué le partage de Jérusalem et le retour aux frontières de 1967. Il faudra, a-t-il dit, notamment “procéder à un compromis sur des parties d’Eretz Israël”. 22/01/2008 * Déclaration à l’AFP de Nabil Abou Roudeina, porte parole de la Présidence, le 17 janvier 2008
  • 4. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 4 P.N.M. JANVIER 2008 4 Société L’ a f f a i r e Arche de Zoë Une imposture exemplaire par Michel Muller L a tentative d’acheminement dans notre pays de cent trois enfants africains par une petite ONG prétendant secourir des enfants du Darfour, révèle dans un raccourci historique caricatural, dérisoire et tragique, la terrible et délétère logique coloniale. On sait aujourd’hui que les enfants que l’on voulait transférer en France ne sont ni des orphelins en danger de mort, ni des Darfouri. Ils sont tchadiens. Comment a-t-on pu faire fi de la marque indélébile et de l’incommensurable charge émotionnelle laissée dans la mémoire collective africaine par la tragédie multiséculaire qu’a été la traite négrière ? Le projet de l’Arche de Zoé en reprenait la trame, même si, bien sûr, il ne s’agissait pas d’aboutir à l’esclavage, mais au “sauvetage”. On se fait livrer des enfants par des intermédiaires locaux - des chefs de villages ou des marabouts sans doute aussi trompés - qui font miroiter aux parents la possibilité inespérée d’accès à l’école, à la santé et au bien-être de leurs petits. La colère des Tchadiens est à la mesure de cette mémoire. Une colère que, tout naturellement, le patron contesté du Tchad, Idriss Déby, a exploité pour, tout à la fois, faire monter les enchères parisiennes dans l’intervention militaire française pour son maintien au pouvoir et pour redorer son blason nationaliste. Pour grotesque que nous paraisse l’accusation de “trafic d’organes” qu’il a cru pouvoir porter, ce mensonge n’est pas sans écho dans une population frappée par la misère et l’horreur d’une guerre civile endémique. De l’autre côté, on a offert ces êtres humains à des gens en mal d’enfants, qui pour certains en sont à un point d’aveuglement tel que toute capacité de réflexion, d’humanité et tout simplement de respect de l’autre est oubliée, si ce n’est l’obtention de ce qui peut bien ressembler à un “enfant de compagnie”. Les membres de l’Arche ont été jugés, collectivement condamnés à une même peine et rapidement rapatriés en France. On ne peut que s’étonner de l’arrogance affichée aujourd’hui par les avocats dénonçant une “justice expéditive” alors que l’on sait que tout avait été arrangé entre le despote tchadien et son ami français. Que n’aurait-on entendu si les choses avaient traîné ! On va jusqu’à insulter les juges tchadiens qui n’en pouvaient mais face aux diktats des puissants. Comme l’un des magistrats l’a rappelé à ses détracteurs, “nous avons été formés à l’école française…”. On en est arrivé dans les médias dominants - à l’exception courageuse de France 3 qui a diffusé une remarquable enquête - à considérer les voleurs d’enfants comme des victimes. Gageons que tout était prêt pour un formidable show médiatique dégoulinant de bons sentiments et d’émotion frelatée au cas où l’opération aurait réussi. Gageons que le premier à se trouver, avec son service de propagande audio-visuel, sur les lieux de l’atterrissage en France de l’avion de l’Arche, aurait été Nicolas Sarkozy, comme d’ailleurs on l’avait laissé entendre lors d’une assemblée des “futurs parents”. Quelle plus belle démonstration de son discours de Dakar où il exhortait l’Afrique à sortir de “cet imaginaire où tout recommence toujours” où “il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès” pour rejoindre la mondialisation capitaliste où “le libre échange est bénéfique” et où “la concurrence est un moyen” ? L’argumentaire n’est pas nouveau. Il est vieux de plusieurs siècles. Les croisades ont été perpétrées contre les peuples du Proche-Orient au nom de la primauté - et donc de la supériorité - de la croyance chrétienne. C’est avec cette même imposture que furent perpétrées les conquêtes des Amériques et la destruction des peuples indiens. A l’esclavage - dont la victime était ravalée au rang de marchandise - les puissances du Nord ont ensuite substitué la colonisation, au nom de la supériorité de la “civilisation” occidentale, cette autre imposture qui a été parée des habits neufs des Lumières. Aujourd’hui, on dévoie la volonté de solidarité envers les plus défavorisés et les victimes, au moyen de la doctrine de l’ “ingérence humanitaire”, ce terrible artifice idéologique inventé en son temps par Bernard Kouchner et ses adeptes, destiné à légitimer les interventions militaires pour assurer l’hégémonie sur les peuples du Sud. Comme le fait Nicolas Sarkozy lorsqu’il agite pêle-mêle les spectres du Sus aux Infidèles U ne protestation générale, un tollé, une levée de boucliers : Les propos de Sarkozy, précédés de son livre sur la vocation attribuée aux religions, ont suscité inquiétude et réprobation, sentiments partagés par de nombreux croyants. Est ainsi poursuivie une œuvre de destruction dont le sombre dessein est de transformer notre République en un régime obscurantiste. De Gaulle, qui était d’une grande piété, n’a jamais dérogé au devoir de sa charge, respectant les normes éthiques de notre vie collective. L’hôte de l’Elysée, par son extravagance prosélytique, s’inspire de son homologue états-unien. Souvenons-nous de Bush, une main sur le cœur, l’autre sur la Bible, déclenchant la guerre en Irak. Il ne s’agissait pas d’une manifestation de la colère divine, mais bel et bien d’une opération géopolitique, hégémonique, à forte odeur de pétrole. Litanie d’un autre âge, notre Président, invoquant treize fois Dieu dans ses harangues, prétend restituer aux religions dont il exalte le rôle civilisateur, un magistère moral sur notre société ; apostolat réitéré lors de ses vœux aux autorités ecclésiastiques. C’est une profanation des fondements de notre laïcité, une concep- terrorisme, de la surpopulation, des inondations, d’ “une confrontation entre l’Islam et l’Occident”, de la misère du monde à l’assaut des pays de la “civilisation”. Et, dans un même souffle, on voudrait imposer aux pays du Sud, au nom de l’ “immigration choisie”, une nouvelle forme d’apartheid, en en faisant des bantoustans où l’on pourrait puiser une main d’œuvre “utile”. Un processus de néo-colonisation déjà pratiqué en Palestine occupée par les autorités israéliennes, sans que les capitales occidentales n’y trouvent à redire. Dernière imposture en date, et non des moindres, celle de la prétendue égalité que l’Europe prétend mettre en pratique avec les pays du Sud, et tout particulièrement l’Afrique. Cette “nouvelle” relation d’ “égal à égal” que l’Union européenne a voulu imposer aux pays africains le 9 décembre dernier à Lisbonne, est une vaste tromperie fondée sur une prétendue égalité entre le fort et le faible, auquel on ordonne de supprimer toute protection contre les importations des produits du Nord. Une restauration du pacte colonial. tion négative, révisionniste de la séparation de l’Etat et des Eglises qui, elles-mêmes, en reconnaissent le bien-fondé. Oser dire que seuls les croyants sont en mesure d’espérer est un outrage à la liberté de conscience, une injure aux croyants animés du désir de vivre ensemble. Déduire que la crise des banlieues s’avère être un manque de lieux de culte, proférer des incantations charismatiques, en menant simultanément une offensive de régression sociale, est révélateur d’un retour en arrière afin d’obscurcir la réalité des antagonismes sociaux, aboutir à l’acceptation, à la pérennisation de l’ordre des choses : il y a toujours eu, il y aura toujours des riches et des pauvres. Modernisme, où vas-tu te nicher ? Appréciant la fascination de Sarkozy pour le veau d’or, la Providence sait effectuer les bons choix. Les mannes financières tombent drues du firmament en faveur des nantis. La rhétorique sarkozienne est d’autant plus condamnable qu’elle s’est déclamée au Vatican et à Ryad. Or, chacun connaît la démarche dogmatique du Pape, ses penchants à rétablir les rites anciens ainsi que la sauvagerie avec laquelle les femmes peuvent être traitées en Arabie Saoudite. Quant aux valeurs chrétiennes dont serait imprégné le passé de notre pays, il s’agit là d’une vision manichéenne, d’un postulat évangélique frauduleux. Nul ne saurait nier l’apport civilisationnel des religions monothéistes, ni faire abstraction de leur emprise sur les esprits. Combien d’Abélard mis à l’Index, de persécutés par l’Inquisition, de massacres de la Saint-Barthélemy, de Jacquou le Croquant humiliés par chapelains et châtelains, de génuflexions épiscopales devant Pétain et la Collaboration, de prêtres ouvriers sommés de choisir entre leurs compagnons de travail et leur Eglise, qu’ils voulaient servir d’un cœur généreux ? Le journal La Croix note que : “Rome se réjouit du nouveau visage de la laïcité française. Les responsables du Saint-Siège ayant été agréablement surpris par le discours de Sarkozy à propos du catholicisme”. La remise en cause des orientations de Vatican II est affligeante. Bâtir un monde meilleur ici-bas, avec ceux qui l’espèrent au ciel, est notre
  • 5. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 5 P.N.M. JANVIER 2008 P.N.M. NOVEMBRE 2007 es ! Europe 5 Le brûlot des Balkans par Henri Levart inébranlable volonté. Le Siècle des Lumières, le combat pour la laïcité, les luttes du mouvement ouvrier, l’essor des sciences et des techniques, la montée du rationalisme, l’accueil des immigrés, l’accès aux soins, à la culture, aux loisirs, sont des limons qui ont matricé notre patrie. Toutes les familles spirituelles, athée comprise, y ont contribué depuis les temps les plus reculés. Les moines transcrivaient sur leurs parchemins les textes des philosophes grecs et romains. Rabelais dans son imaginaire Abbaye de Thélème rêvait de bâtiments sans murailles, où religieux et religieuses auraient la possibilité de se marier, de vivre en liberté. Les curés de campagne aidaient les paysans à rédiger les cahiers de doléances, la Révolution de 1848 était d’inspiration chrétienne. L’emblématique poème d’Aragon “La rose et le réséda” glorifie le sang mêlé des martyrs de la Résistance à laquelle nombre de juifs ont participé. Ces derniers, par leur labeur et la part prise à la vie intellectuelle, à la création artistique sont d’authentiques artisans de notre unité nationale. C’est pourquoi les actions contre les manifestations d’antisémitisme n’ont pas de connotation religieuse. L’affaire Dreyfus en est témoin. N’en déplaise au chanoine d’honneur de Saint-Jean de Latran, nous nous référons aux vraies valeurs léguées au cours des siècles. Nous poursuivons nos rêves. Jacques Chambaz a pu décrire dans son livre “La patience de l’Utopie / La civilisation en question” (prémonitoire) “L’utopie peut désigner l’idéal, l’aspiration, l’imagination enracinée dans l’investigation du monde (...) Faudrait-il l’interdire, comme certains y invitent, dans le domaine social et politique (...) L’utopie positive ne rejette pas le passé (...) Elle ne détourne pas davantage les questions les plus immédiates et les plus urgentes au nom d’une Terre promise. Elle tend au contraire à s’inscrire dans le mouvement même qui modifie l’état présent (...) Elle suppose donc d’éclairer l’expérience et de faire reculer les barrières qui empêchent des millions d’hommes et de femmes de s’approprier le mouvement des savoirs et des pouvoirs”. Nous nous y employons, foi de char23 janvier 2008 bonnier. par Robert Joseph L es dirigeants occidentaux s’enlisent dans les Balkans. Ils n’ont pu comme ils le souhaitaient concrétiser l’indépendance du Kosovo. Les accords de stabilisation et d’association de l’Union européenne (A.S.A.) avec la Serbie et la Bosnie-Herzégovine marquent le pas. Le général Mladic et Radovan Karadzic, les anciens chefs des Serbes de Bosnie recherchés comme criminels de guerre, courent toujours. La Bosnie-Herzégovine connaît une nouvelle crise et la Macédoine reste fragilisée. Dans cette région d’Europe, fertile en divergences entre Washington et Moscou, le climat politique suscite pas mal d’inquiétude. L’indépendance du Kosovo, décidée pour fin 2006, reste jusque-là en suspens. L’ancien chef terroriste de L’ E t a t j u i f et le conflit israélo-palestinien (Suite de la page 3) mulation des faits accomplis, la perspective concrète d’un Etat palestinien plus compliquée aujourd’hui. L’édification de cet Etat palestinien - revendication légitime de l’ensemble d’un peuple - reste cependant la condition décisive d’une paix durable. Notons au passage que le choix israélien d’un Etat juif interdit, pour une raison démographique évidente, la colonisation jusqu’au bout et l’annexion des territoires occupés à laquelle certains extrémistes et ultranationalistes israéliens rêvent encore. Cela ne fait que ressortir la légitimité d’un Etat palestinien et l’importance de l’action des progressistes et anticolonialistes d’Israël. Quant à l’Etat d’Israël, justement, ce n’est pas le fait d’être un Etat juif qui lui permettra de vivre durablement en sécurité. C’est le fait de devenir réellement démocratique ; c’est le fait d’être définitivement reconnu et accepté comme partenaire de paix au Proche-Orient, qui pourront lui apporter une telle garantie. Et pour en arriver là, il faut qu’une solution politique au conflit israélo-palestinien, dans le droit et la justice, puisse s’imposer. Cette simple vérité est aussi un rappel pour la France, pour ses partenaires européens, pour les Etats-Unis, pour l’ensemble des membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU… Moins on agit dans cette voie, plus on laisse faire la colonisation, plus on encourage la politique actuelle des dirigeants israéliens et plus les choses seront difficiles et dangereuses. Cela sonne comme un avertissement. Jacques FATH 25 décembre 2007 l’U.C.K., Hasim Thaçi, nouveau premier ministre, dit vouloir la proclamer unilatéralement. L’Union européenne lui recommande patience et prudence. Elle craint l’épreuve de force pour les seize mille militaires de l’O.T.A.N, et dit attendre les élections présidentielles du 20 janvier en Serbie. Avec beaucoup de crainte, les sondages donnent bien des points d’avance aux ultranationalistes de Vojislav Seselj, malgré l’emprisonnement de leur leader à La Haye. La Russie s’oppose à toute solution qui n’aurait pas l’approbation des deux parties. La Serbie ouverte à une large autonomie, rejette toute idée d’indépendance pour une parcelle de son territoire. Au sein des vingt-sept de l’UE, il y a des désaccords. Un schéma prévoyait la proclamation de l’indépendance, puis début 2008 la transmission à l’UE des pouvoirs de l’ONU, qui gère le Kosovo depuis 1999. Seulement une vingtaine de pays de l’UE se contenterait d’une proclamation unilatérale. Madrid, Athènes et d’autres ne suivraient que s’il y avait une résolution du Conseil de sécurité. Washington qui a encouragé la proclamation unilatérale, semble plus réservée. D’autant que Belgrade ne paraît plus tellement pressée de se rapprocher de l’UE malgré les efforts de la Slovénie, et de l’OTAN, dans les conditions actuelles. Les dirigeants occidentaux voudraient bien en finir, mais ils se brûlent les doigts sans trouver d’issue rassurante, avec le “cadeau” de leurs prédécesseurs qui, en 1999, bombardaient la Serbie pour “protéger” les Albanais du Kosovo, tout en affirmant l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Serbie. La Bosnie - Herzégovine voisine, qui traverse une nouvelle crise politique suit l’évolution. Si malgré les résolutions de l’ONU, le Kosovo peut être séparé de la Serbie, pourquoi la Republika Srpska ne pourrait-elle l’être de la Bosnie-Herzégovine ? La question est posée. Comme bien d’autres encore relatives à la Macédoine, au Caucase, voire … à l’Espagne. Dans cette Bosnie où la haine domine toujours, les plus importantes forces politiques en sont toujours à leurs objectifs de 1992. En Republika Srpska, il faut défendre l’Etat créé en 1992 et défini par les accords de Dayton de 1995. Or la disparition de cet Etat est revendiquée, comme au temps de la guerre civile, par Haris Silajdzic, l’ex-bras droit de feu le Président Izetbegovic, devenu à son tour membre de la présidence bosniaque. L’instauration d’un pouvoir centralisé est aussi une exigence de l’Ouest. La haine “des Serbes” et de leur Etat bosniaque, “fruit de l’agression et du génocide” dit-on à Sarajevo, imprègne nombre d’hommes politiques de la Fédération musulmanocroate. Elle n’est pas le moindre des obstacles à une normalisation de la situation. Surtout quand elle déborde largement ses frontières. Comme on parle des Juifs “peuple déicide”, des moralistes chez nous parlent sans aucune gêne des Serbes, “nation criminelle non repentie” (J. Julliard, Le Nouvel Observateur, 13-19 septembre 2007). Le même sentiment inspire bien du monde politique occidental... Ces Serbes osent faire face dans l’adversité à ceux qui les ont sans cesse depuis 1991, sanctionnés, bombardés et soumis à un permanent chantage. Les échecs subis en BosnieHerzégovine par l’UE et son “gouverneur”, actuellement le Slovaque Milorad Lajcak, ont conduit, en contribuant à attiser les haines, à prolonger le protectorat occidental sur un peuple jugé incapable de se gérer lui-même. Actuellement, une nouvelle organisation, de la police notamment, est en cause. La partie serbe rejette le découpage des circonscriptions prévues parce qu’il modifie les “frontières” des entités. Il amorcerait ainsi la liquidation de sa République. Cette opposition, diton, entrave le “processus de modernisation”. Cependant, dans la Fédération, chacun des dix cantons dispose de sa police, croate ou musulmane, et dans les cantons croates, on ne prise guère une police dirigée par des Musulmans. Maintenant, Vojislav Kostunica, le premier ministre de Serbie, semble plus proche de la Russie que de l’OTAN ; Milorad Dodik, l’homme fort de la Republika srpska, qui s’oppose à l’UE, est un proche de Kostunica. Les Etats-Unis multiplient les pressions craignant de voir la Russie gagner de nouvelles sympathies, et le Président Vladimir Poutine, tout en dénonçant les “pays de l’OTAN. qui gonflent leurs muscles” aux frontières de la Russie, affirme qu’à ses yeux, le Kosovo et le bouclier antimissile américain qui concerne l’Europe centrale, constituent des “lignes rouges”. Les Balkans toujours terre de crise et de marchandage. 11 janvier 2008
  • 6. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 6 P.N.M. JANVIER 2008 6 Culture Aventures et mésaventures du judéo-espagnol par Haïm-Vidal SEPHIHA Cycle langues juives* : Professeur émérite des Universités, Chaire de judéo-espagnol en Sorbonne Nouvelle, notre ami H-V Sephiha développe ici 500 ans et plus d’histoire du judéo-espagnol, cas d’espèce des judéo-langues. La richesse de cette présentation nous a contraint à le publier en deux numéros de la PNM. .../... (Lire début de l’article dans la PNM n° 251 de décembre 2007) Le ladino évolue à peine Le djudezmo évolue énormément C e ladino, par son caractère semisacré est resté pour ainsi dire intouché, alors que le djudezmo a considérablement évolué. En fait, le ladino (judéo-espagnol calque) est et fut la langue liturgique de tous les Séfarades hispanophones, qu’ils fussent judéo-hispanophones comme dans l’ex-Empire Ottoman, ou castillanophones, voire lusophones comme dans le Sud-Ouest de la France ou aux Pays-Bas, deux contrées où jamais ne fut parlé le judéo-espagnol qui ne put y naître pour des raisons historiques bien sûr. Même les auteurs juifs les plus hispanophones comme Isaac Cardoso dans Las Excelencias de los Hebreos recourent aux versions en ladino de la Bible de Ferrare et de ses multiples réimpressions, chaque fois qu’ils citent un verset biblique8. Et, contrairement à ce que dit l’ignorant qui a rédigé l’article “Press” dans l’Encyclopaedia Judaica (t.13, cols. 23 et 24), La Gazeta de Amsterdam (1675) n’est pas “written in ladino (Judeo-Spanish) [sic, quel confusion !], the first Jewish newspaper [...]”. Premier journal juif, certes, mais pas en ladino. Si c’est là du ladino, l’espagnol de Cervantès en est aussi. Le commentateur de cet article se paie de mots. C’est grave ! Avec un tel article par trop superficiel, on induit en erreur une ou plusieurs générations entières ! Comment pourrons-nous réparer les dégâts d’une telle aberration, qui aujourd’hui fait si cruellement autorité ! Le ladino est plus archaïque que le djudezmo Mais revenons au ladino ou judéo-espagnol calque. Il contient plus d’archaïsmes que le djudezmo et en tout cas des archaïsmes plus anciens que ceux du djudezmo. Il contient aussi des arabismes qu’on ne retrouve pas en djudezmo, ainsi “alcrebite” 9 pour le soufre et “alcemema” avec “cayin” pour l’hébreu “MiTsNeFeth”, ‘turban’ (Lévitique 16,4) etc. Emprunts lexicaux multiples aux langues en contact Il faut également remarquer qu’y figurent des mots bien espagnols mais qui ont disparu - pour des raisons à rechercher et souvent édifiantes - de la langue vernaculaire. C’est ainsi que le lapin, “Chafan” en hébreu, interdit à la consommation (Deutéronome,14,7) est traduit par “konejo” dans le Pentateuque de Constantinople (1547), mot qui correspond bien à l’espagnol “conejo”, mais qui a disparu du djudezmo, précisément, parce que interdit. De sorte que, lorsque, se laïcisant, les Judéoespagnols ont commencé à manger du lapin, ils ont adopté le mot turc “tavsan” [tav`s’an]. C’est là un fait de société qu’illustre également l’adoption du mot grec “piruni”, ‘fourchette’, instrument qui n’existait pas lors de l’expulsion. Il va de soi que l’objet fut adopté avec son nom (cf. “Les mots et les choses”), substantif hispanisé en “pirón” alors qu’en turc on a “çatal”. Les emprunts au turc seront très nombreux (comme le seront, au Maroc, les emprunts à l’arabe) et subiront différents mécanismes influence du français ira jusqu’à substituer pardón à pedrón, lui même issu de perdón, par métathèse de -rd- en -dr-. Ce qu’illustre bien ce proverbe judéo-espagnol, kon un pardón [ et non pedrón] se mata a un franko, “avec un pardon on tue un français [ou un occidental]”. d’intégration bien hispaniques. C’est ainsi que tous les emprunts verbalisés le seront en -ear : “eglenmek” donnera “englenearse”, ‘s’amuser’ - “bozmak” donnera Gallomanie et anglomanie “bozear” et “bozdear”, ‘abîmer’ - etc. , tout interfèrent comme l’hébreu “herem” ‘excommunication’ donnera “heremear”, ‘excommunier’. Une nouvelle étape anglocentriste, cette Excepté lorsqu’un modèle espagnol préalafois, apparaîtra après 1945. Cette anglomable s’y oppose : ainsi nie interférera avec la gallo“batak”, ‘boue,bourbier’ manie et donnera par exemple donne “embatakarse”, las santral elektrik à partir de ‘se salir, se saloper’sur le las santralas elektrikas, qui modèle préexistant de correspond à l’emprunt pho“ensuzyarse”, ‘se salir’. nétique total du français et à De ces derniers exeml’invariabilité de l’anglais au ples et de tant d’autres on lieu de las sentrales elektrikas. peut apprendre bien des Situation actuelle choses sur la vie de nos communautés dont la Aujourd’hui, le judéo-espalangue est le miroir... La gnol de Turquie est de plus en boue (batak), fréquente plus turquisé et francisé à traalors, a dû frapper les vers le turc, lui aussi francisé. imaginations et favoriser En 1968, M.S.Uysal 11 dénomcet “embatakar” dont le brait, en turc, plus de 5.000 premier sens fut ‘se saloemprunts au français. C’est per’, et le second, par dire que le judéo-espagnol banalisation, ‘se salir’. contient paradoxalement des De même, tout en archaïsmes “tonitruants” exploitant les formants comme trokar, ‘changer’ ou espagnols, le djudezmo a merkar, ‘acheter’et des néolopu se créer toute une gismes aussi détonnants que panoplie pour désigner amüzarse, angajar ou maltoutes sortes de manies, orozo. Tout cela assaisonné Pentateuque de Constantinople notamment en -dero : d’emprunts divers aux langues (1547) eskrividero, asentadero, en contact, l’hébreu 12 bien sûr, lambedero, etc., manies d’écrire, de s’asmême au ladino (kada uno i uno [ hébr. kol seoir, de lécher, etc. ehad ve-ehad ] un chichit, ‘chacun avec son Ainsi, d’étape en étape on peut suivre les grain de sel’ - Vidas largas [ hébr. hayyim impacts des langues au contact desquelles arukhim ] ke tengach !, ‘Que vous viviez s’est trouvé ou se trouvera le judéo-espalongtemps ! Longue vie !’ lance-t-on aux gnol, et ce, différemment selon qu’on se nouveaux époux. trouvât dans tel ou tel pays de l’Empire. On le voit, l’histoire du judéo-espagnol On peut ainsi trouver outre les emprunts au avec ses deux modalités, calque (ladino) et turc, d’autres faits au bulgare, au roumain, vernaculaire ( djudezmo), est d’un intérêt au serbe, dans ces différents pays, voire considérable, tant du point de vue de l’hisaussi à l’allemand et à l’italien, langues toire des mentalités que de ceux de la linenseignées respectivement par la guistique, de la sociologie et de la littératuHilfsverein et les écoles Dante Alghieri 10. re dont on trouvera une classification dans Le judéo-espagnol 13 et où il faudra envisaUne gallomanie galopante : ger la littérature ladina et la littérature en le judéo-fragnol djudezmo. Pour cette dernière il faudra également y envisager une littérature écrite Mais l’influence la plus marquante fut celle (sans oublier la presse représentée par plus du français qui balaiera les acquis de plude 300 titres) et une autre orale, refranes, sieurs siècles et atteindra la syntaxe hispa‘proverbes’14, konsejas et kuentos, nique elle-même, puisque Dizele de venir, ‘contes’15 et romansas16. calque du français Dis-lui de venir, se subTout un trésor que nous nous efforçons de stituera au bien hispanique Dizele ke venga, recueillir dans l’association Vidas Largas17 et que tant, onkl, granmaman, etc. se sub(cf.B.46, Le judéo-espagnol, “Thésaurisons, stitueront aux termes si intimes de tiya, tiyo, thésaurisons,thésaurisons”, pp.196-232). nonna, etc. Tout un trésor qu’il ne faut pas abandonner, Le djudezmo sera pris d’une gallomanie car il fait partie du patrimoine humain, mais galopante au point de donner un nouvel état aussi car il nous renseigne par tous les de langue que dès 1972 j’ai appelé judéodocuments écrits dans cette langue, sur fragnol. Du coup le formant -ear ne sera l’histoire interne et externe de nos commuplus utilisé et, excepté en Bulgarie, l’équanautés. tion -er du français = -ar de l’espagnol Il ne faudrait pas que ce désir de conservas’imposera, si fortement, qu’ à l’ancien tion et de perpétuation de la culture judéoenglenearse on substituera amüzarse où ü espagnole restât un simple voeu pieux. correspond au u français comme ö corLe judéo-espagnol sera appelé à un nouvel respond au eu ou au e muet français, la phoavenir si nous le désirons tous, sujets parnétique et particulièrement le vocalisme lants et chercheurs. espagnol s’en trouvant bouleversés. Cette Et sa reconnaissance par le “Bureau Européen des Langues Moins Répandues “ est un véritable encouragement. Le 1er juillet 1998, Nathan Weinstock et moi présentions notre brochure, Yiddish et Judéo-espagnol, Un héritage européen, au Parlement Européen dont existe aussi une version en anglais ( B.77 et B.78). La bibliographie succincte de mes travaux montre combien riche est cette langue protoplasmique “toujours recommencée”, toujours en contact avec d’autres langues tantôt minoritaires, tantôt majoritaires et souvent glossophages. Nous sommes en pleine linguistique de contact, en pleine “con-tactologie”, en pleine pluridisciplinarité, un terrain fécondissime pour les recherches historico-ethnopsycho-sociolinguistiques. Ces différents aspects avec contes, proverbes et chants feront l’objet de nos prochaines chroniques. * NDLR PNM 248 : Jacques Varin, Panorama des langues juives PNM 249 : Charles Dobzynski, La langue Yiddish, Le feu et l’éclat de la braise PNM 250 : Haïm-Vidal Sephiha, Les judéolangues PNM 251 : Haïm-Vidal Sephiha, Aventures et mésaventures du judéo-espagnol (1/2) 8) H.-V.Sephiha, “El ladino (judeo-español calco) de Ishac Cardoso”,in Proceedings of the 6th EAJS Congress Toledo 1998, Jewish Studies at the Turn of the 20th Century, vol.II, Ed. Judit Targarona & Angel Sáenz-Badillos - Brill, Leiden - Boston, 1999, - pp. 637-540. 9) arabisme qui signifie soufre 10) SEPHIHA Haïm-Vidal, “Les emprunts linguistiques dans le Refranero judéo-espagnol Etude préliminaire”, in Hommage à Abdon Yaranga Valderrama, l’Indien Quechua de Paris, Cahiers de Recherche “Langues et cultures opprimées et minorisées”, Saint-Denis, 1993, pp.387-407. 11) M.S.Uysal, Recherches sur les emprunts lexicaux du turc au français, Thèse de IIIème cycle, Paris, 1968. 12) Tant en ladino qu’en djudezmo . 13) SEPHIHA Haïm-Vidal, Le judéo-espagnol , Ed. Entente, coll. “Langues en péril”, Paris, 1986, 242 p. 14) “Portrait de la société judéo-espagnole ou Dis-moi tes proverbes, je te dirai qui tu es”, in Actes du Colloque de Parémiologie, Lille, du 6 au 8 mars 1981, parus sous le titre RICHESSE DU PROVERBE, vol.II, Typologie et fonctions, études réunies par F.Suard et Cl.Buridant, Université de Lille III, coll. “ Travaux et recherches”, Lille 1984, pp.199 à 209. 15) SEPHIHA Haïm-Vidal, Contes judéo-espagnols - Du miel au fiel, traduits et présentés par H.V.Séphiha , Ed. Bibliophane, Paris, 1992. 16) Trésor conservé et chanté par Henriette Azen, Unos romances de mi madre, textes établis et traduits par H.V.Séphiha , un disque édité par Vidas Largas, Paris 1982 17) VIDAS LARGAS : Association pour le maintien et la promotion de la langue et de la culture judéo-espagnoles, édite livres, brochures et disques - 37, rue Esquirol, 75013 Paris.
  • 7. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 7 P.N.M. JANVIER 2008 7 LA VIE DEVANT SOI ADAPTATION THÉÂTRALE d’après Emile AJAR (Romain GARY) R omain Gary, dans les années 1970, voulant rompre avec la notoriété de grand écrivain et ne pas se laisser enfermer dans une identité unique, a adopté le pseudonyme d’Emile Ajar. Sous cette nouvelle identité, il publie “La vie devant soi”. Ce roman, écrit à la première personne, retrace la relation qui s’établit entre deux personnes que beaucoup de choses éloignent : un enfant arabe abandonné et une ancienne prostituée juive. C’est pourtant le récit non seulement de la solidarité qui les unit, de leur affection mutuelle, de leur dignité respective, mais aussi celui des valeurs humaines nées de cette confrontation. Le Théâtre Marigny a présenté une très belle adaptation théâtrale de ce roman. Celle-ci présente les thèmes majeurs du roman, réalisant une image plausible de celui-ci. La mise en scène met l’accent sur la vitalité contenue dans l’œuvre. Il faut insister sur la performance de l’actrice Myriam Boyer qui sait retraduire à la fois toute la bienveillance du personnage, mais aussi toute l’anxiété qui émerge de ses pulsions contradictoires. Mais ce qui fait la qualité de ce spectacle, c’est le texte écrit dans la langue simple de l’adolescent, mais jamais dans un style populaire au mauvais sens du terme. A vrai dire Romain Gary invente une langue spécifique à la situation qui traduit le respect mutuel que se portent les deux personnages principaux. Jacques Lewkowicz PALESTINE HEROS d’Achille à Zidane de Hubert HADDAD I l s’agit d’un roman écrit par un auteur juif berbère, roman très singulier par la situation qu’il décrit : Celle d’un soldat israélien préposé à la garde du fameux mur qui serpente à l’intérieur du territoire cisjordanien sous le prétexte de protéger les colonies israéliennes. Ce militaire essuie une attaque des résistants palestiniens au cours de laquelle un de ses compagnons d’armes trouve la mort et lui-même est blessé. Fait prisonnier, il est soigné par une mère et sa fille palestinienne. Cette dernière lui donne l’identité de son frère. Ce symbole est celui de l’ensemble de l’œuvre. L’auteur y montre qu’audelà des frontières et des nationalismes agressifs, il existe une fraternité humaine qui ne demande qu’à s’exprimer. Car, continuant à adopter lors de son séjour en Palestine l’identité empruntée du frère, le personnage découvre la réalité des meurtrissures subies par la population palestinienne du fait du conflit, en même temps que tout ce qui rend sa situation ambiguë. Ce récit est écrit dans une langue extrêmement dépouillée et classique. Rigueur stylistique qui donne encore plus de force à la violence des sentiments qu’il fait naître chez le lecteur. Lecture à conseiller à tous ceux qui veulent comprendre le conflit israélopalestinien, non seulement au travers de froides analyses géopolitiques, mais aussi par les chauds sentiments affectifs dont il est traversé. JL Culture Une exposition* à visiter ! Tel en est le titre, surprenant, certes. De nombreux personnages de légende y sont magnifiés. Avec ceux et celles de la Résistance, Joseph Epstein tient une place importante, et j’avoue, inattendue. Pas moins de deux films en continuité avec témoignages émouvants dont celui de Raymond Aubrac. Je vous invite vivement à vous y rendre. HL * Bibliothèque Nationale de France, jusqu’au 13 avril 2008. Du mardi au samedi de 10h à 19h, le dimanche de 13h à 19h sauf J.F. TP 5 € TR 3,50 € R E P R I S E ! R E P R I S E ! En 2007, vous avez raté ce spectacle ? ou vous l’avez adoré ? Autant de bonnes raisons de courir (re)voir cette reprise exceptionnelle de l’adaptation en yiddish, surtitrée en français, d’une pièce d’Avrom Goldfaden réalisée par Charlotte Messer. Plaisir garanti ! TRS Mardi 5 février 2008 au Théâtre des Deux Portes 17 rue René Boulanger Paris 10° Réservation : 01 47 00 14 00 (MCY) WITZ RETROUVÉS * Hubert Haddad, Palestine, Ed. Zulma, Paris, 160 p., 16,50 € LA PNM A REÇU ... Le MAHJ invite plusieurs psychanalystes qui ont une longue fréquentation de la Bible hébraïque à nous livrer le fruit de leurs lectures et de leurs interprétations, tout au long de la saison 2007-2008 ... - Une bouteille dans la mer de Gaza de Valèrie Zenatti. Ed. Ecole des loisirs, Paris, 2005 - 9.50€ Mercredi 13 février 2008 à 20 h 30 QOHÉLET (L’ECCLÉSIASTE) ET LA QUESTION DU DÉSIR AVEZ-VOUS VU ? - “La visite de la fanfare” réconfortant film israélien, à recommander (GD, Paris) - “Faut que ça danse !” jubilatoire portrait de la famille Belinsky Inattendue visite du Mémorial de Caen ... Hymne à la vie ! (TRS, Paris) par Gérard Haddad, psychanalyste “S’il y a un écrit biblique qui devrait intéresser le psychanalyste et qui recoupe sa pratique, c’est certainement celui-là, QOHÉLET. (...) Lacan (...) en avait fait son livre de chevet, citant sans relâche ce verset : Jouis de la femme que tu aimes…” TP 4€ TR 3€ - Réservation indispensable par mél ou téléphone au 01 53 01 86 48 (du lundi au vendredi de 14h à 18h) DANS LA MER DE GAZA Mardi 29 et Jeudi 31 janvier à 20h. Tal, jeune israélienne de Jérusalem et Naïm, jeune palestinien de Gaza tentent de se parler ... Adaptation* par la compagnie “LES PLANCHES ET LES NUAGES” du roman de Valérie Zenatti, suivie d’un débat avec M. le Maire et Mme. la Députée du XX° arrdt. de Paris. * Organisée par la Maison Itshak Rabin au CARRÉ DE BAUDOIN - 121 Rue de Ménilmontant 75020 Paris M° Gambetta. Places 15 € TR 10 € Résa: 01 55 30 02 37 CAFÉ HISTORIQUE EN RÉGION Mardi 5 février, 18h30 à Chateauroux Un circuit de sauvetage d’enfants juifs pendant la guerre Le circuit Garel Conférence* donnée au Café le Saint Hubert, 25, rue de la Poste à Châteauroux, par Katy HAZAN, historienne, responsable du Département Archives et Histoire de l’OSE (Oeuvre de Secours aux Enfants). * Organisée par le Centre Européen de Promotion de l’Histoire - 3, quai Abbé Grégoire - 41000 BLOIS - Contact : Florence Baraniak 02 54 56 84 27 www.cafeshistoriques.com et le Cercil (Centre d’Etude et de Recherche sur les camps d’internement de Beaune-la-Rolande, Pithiviers et Jargeau et la déportation juive) 2 cloître Saint-Pierre le Puellier - 45000 Orléans - Contact : 02 38 42 03 91 www.cercil.fr Léa MIMOUN chante BARBARA Samedi 9 février à 20h30 Lectures psychanalytiques de la Bible - L’encre du Caméléon (Contes, nouvelles et récits) de David Izraelewicz. Ed. La Bruyère, Paris 2007 - 14€ UNE BOUTEILLE à l’Espace ICARE - 31 Bld Gambetta 92130 Issy-les-Moulineaux - Réservation : 01 40 93 44 50 Samedi 16 février à 20h30 UN SOURIRE IL CONNAÎT LES HOMMES “Comment se fait-il - demande quelqu’un au serveur d’un restaurant - que les pauvres vous donnent plus de pourboire que les riches ?” “La raison en est la même - répond-il - les pauvres ne veulent pas que l’on sache qu’ils sont pauvres, et les riches ne veulent pas que l’on sache qu’ils sont riches.” ERRATUM : Une coquille s’est glissée dans l’éditorial de la PNM du mois dernier (n° 251). En haut de deuxième colonne, il fallait lire : PRÉLEVÉ et non RÉNOVÉ dans la phrase : “remboursement prélevé sur l’héritage des allocations d’aide aux personnes âgées ;” au Centre Medem - 52 Rue René Boulanger 75010 Paris (M° Strasbourg St Denis ou République) - Réservation : 01 42 02 17 08 www.myspace.com/leamimoun GEFILTE SWING Jeudi 28 Février 2008 à 21h Musique klezmer et chansons yiddish swing de l’entre-deux guerres au Bar’Oc Café - 36 rue de Sambre et Meuse - 75010 Paris (M° Colonel Fabien ou Belleville) - Réservation : 01 42 40 93 38 http://gefilte.swing.free.fr
  • 8. PNM 252 BON 25/01/08 15:40 Page 8 P.N.M. JANVIER 2008 8 Itinéraire Wi l l y R o n i s - L a v i e e n c o u r a n t ! Entretien par Hélène Amblard Toute la vie de Willy Ronis est tournée vers la rue, le quotidien, le mouvement social et les instants qui les immortalisent. Hélène Amblard : La photographie est un art qui a pu s’imposer en partie grâce à vous. phe, puis il a dirigé un studio de portraits, qu’il a acheté dans les années 20. mouvement formidable avec des journaux, des illustrés, où travaillaient des photographes venus de l’Est, qui ont HA: Vous ne vous destiniez pas à la influencé toute l’Europe occidentale. photographie ? Willy Ronis : Grâce à des photograA l’Association des Artistes et phes humanistes, des photographes WR: J’ai fait un an de droit parce que Ecrivains Révolutionnaires, j’ai reporters, oui. Pas mal d’entre eux je voulais être compositeur de connu Marie Claude Vaillant étaient venus de Hongrie comme musique. Je me disais que si je deveCouturier, photographe à “Regards”. Capa, de Pologne comme Chim*. Il y nais petit fonctionnaire, j’aurais le C’était la fille de Lucien Vogel, un très avait des Français comme Doisneau, temps de faire de la musique et qu’il grand journaliste fondateur d’hebdoCartier Bresson et moi-même. Et par était bon d’avoir ces notions. Les chomadaires et d’illustrés dont “Vu”, qui la suite, tous les autres. a influencé “Life”, né peu après. J’étais au HA: Vos parents Parti Communiste venaient d’Europe sans jamais avoir été de l’Est ? aux Jeunesses. De 1936 à 1939, j’ai traWR: Mon père vaillé pour venait d’Odessa. “Regards”, d’autres Ma mère a quitté la hebdos et mensuels Lithuanie avec sa non communistes. En tante à quatre ans. fait, j’ai gagné ma vie Elles sont restées à correctement jusqu’à Berlin jusqu’à son la guerre. J’ai été adolescence, quand affecté dans une pousa tante l’a emmedrière à Bergerac jusnée à Paris où elle a qu’à ma démobilisafait ses études. Ma tion. J’ai évité d’être mère a eu très peu fait prisonnier de jusde notions sur les tesse et je suis descenpogromes, sauf sur du dans la zone Sud ce qu’a pu lui en où je suis resté en faidire sa tante. Elle sant de petits boulots. était doublement Ma mère n’a pas été orpheline. Je l’ai inquiétée et pourtant, connue sans aucun elle portait l’étoile. accent, alors que A la Libération, je mon père a gardé le suis rentré à Paris et sien toute sa vie. Il j’ai tout de suite était arrivé à Paris à repris pied dans le trente ans environ, métier. Je me suis conditionné par sa marié en 1946. Le délégué, 1950 - Délégué des charpentiers de Paris en grève** pratique du russe et © Willy Ronis / Rapho. Pendant dix ans, ça a du yiddish. Ne parmarché merveilleuselant pas un mot de ses se sont arrangées autrement parce ment. Les difficultés ne se sont manifrançais, il s’était inscrit dans une qu’en 1932, au retour du service, mon festées que dans les années soixante. amicale juive russe, où mes parents se père m’a dit “je suis très malade, j’ai Il y a eu une crise d’expression avec sont probablement connus. Mon père besoin de toi au studio”. C’était la crise ; une prime à la photo américaine, la ne jouait d’aucun instrument, mais il les affaires marchaient mal. De 1932 photo dure, la photo de choc. Moi, ce était très mélomane. Ma mère, bonne à 1936, j’ai donc dirigé ce studio où n’était pas mon style. pianiste, donnait des leçons. Je suis né j’étais entré en reculant. En 1936, à la Je m’en suis sorti en faisant un peu en 1910 et mon enfance est scandée mort de mon père, après l’abandon du de photo industrielle et de publicité par les gammes qu’elle faisait avec ses studio à ses créanciers, je me suis et en 1972, j’en ai eu marre : nous petits élèves. Quand mon frère est né, lancé dans l’aventure de la photograavons quitté Paris pour le Midi. j’avais huit ans. Elle a cessé ses phie indépendante. Je suis descendu J’ai vécu en faisant des cours leçons, mais il m’est resté un amour dans la rue avec un appareil d’amad’Histoire de la photo à la faculté profond pour la musique. teur, et j’ai fait le premier reportage d’Aix en Provence et aux BeauxMa mère ne parlait pas yiddish ; avec que je m’étais commandé à moiArts d’Avignon. J’ai fait également mon père, ils ne parlaient que français. même, le 14 juillet 1936. des reportages couleur pour des édiBien sûr, pour les fêtes traditionnelles, C’est là que tout a démarré. Je me teurs parisiens sur la Provence. Nous on allait à la synagogue mais c’était à retrouvais chef de famille avec une sommes restés une douzaine d’anpeu près mon seul contact avec la tradimaman qui n’avait pas de métier et nées dans le Midi. tion juive. Je savais qu’il existait un un frère au lycée. Je m’étais impliAujourd’hui, je marche très mal. mouvement juif laïque progressiste, qué dans le mouvement antifasciste mais j’étais avant tout préoccupé par J’ai la chance d’avoir des archives et je faisais des photos en partie pour des problèmes de vie quotidienne. Ma très importantes chez Rapho. C’est gagner ma vie, en partie pour témoimère était croyante, mon père ne l’était le résultat d’une longue vie de tragner sur le mouvement social pas. Il ne voyait pas la nécessité de vail dans des registres très difféambiant. m’apprendre le yiddish ; il avait fort à rents. Je m’intéressais aux gens, à la faire pour gagner la pitance de la maiLe reportage humaniste allemand vie quotidienne ; j’étais vraiment son. Il était d’abord ouvrier photogrades années 20 et 30 avait impulsé un dans le siècle. Depuis plus de dix ans, je ne fais plus de photo. Mes photos, je les faisais en courant ! * [NDLR] Dawid Szymin, qui se fait appeler Chim à son arrivée en France en 1931, s’installe à New York pendant la guerre où il prend rapidement la nationalité américaine. Il y devient David Seymour. ** Photo extraite de l’album de Willy Ronis, Didier Daeninckx, A nous la vie ! 1936-1958 Ed. hoëbeke, Paris, 1996, ISBN 2-84230-009-2, avec l’aimable autorisation de l’agence Rapho. REJOIGNEZ MRJ-MOI ! Chères lectrices, Chers lecteurs, Il y a plus de deux ans, naissait une nouvelle association (JO 25/06/2005) : Mémoire des Resistants Juifs de la M.O.I. (MRJ-MOI). Les membres fondateurs de cette association, dont d’anciens des bataillons résistants juifs des FTP-MOI, de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) ou de la Commission centrale de l’enfance (CCE), des militants des Amis de la CCE (AaCCE), ont pour objectif la création, au 14 rue de Paradis, d’un lieu de mémoire dédié à la Résistance juive de la M.O.I. et à l’engagement progressiste et humaniste de celles et ceux qui ont prolongé leurs combats après la guerre, jusqu’aujourd’hui. Des démarches sont en cours auprès des pouvoirs publics ; l’OPAC a d’ores et déjà intégré ce projet dans son programme de réhabilitation du “14”. Mais il faut faire davantage pour qu’une décision politique soit prise, qui permette l’ouverture de ce lieu de mémoire. Mémoire des Résistants Juifs de la M.O.I. lance un vibrant appel à toutes celles, à tous ceux, individus et organisations, qui voudraient lui apporter leur soutien, en adhérant à l’association, en contribuant financièrement à son efficacité. Rejoignez-nous ! ------------------------BULLETIN : J’adhère à l’association MRJ-MOI Adhésion simple : 30 € par an Adhésion de soutien : 50 € et plus… Adressez votre bulletin et votre chèque à : MRJ-MOI, 14 rue de Paradis 75010 Paris - Internet : pagesperso-orange.fr/ujre/pages/ mrj-moi.htm