2. 3. L’avenir du commerce international
1. Les notions fondamentales
2. Les outils de la politique commerciale
Le commerce internationalSéance 9
3. Les notions fondamentales
Les théories néo-classiques du libre-échange
Théorie des avantages absolus (Smith, 1776) puis théorie des avantages comparatifs
(Ricardo, 1817) => spécialisation des économies selon les dotations factorielles. Ces
avantages sont produits de l’histoire (Krugman) ou de l’intervention publique (Reich &
Thurow, 1991)
Modèle gravitationnel de Tinbergen (1962) : la distance géographique explique 75%
des flux commerciaux bilatéraux (+10% distance = -6% volume d’échanges). Effet des
coûts de transport (Evenett & Keller, 1998) et TIC.
« Effet-frontière » de McCallum (1995) : une province canadienne échange 20 fois avec
une autre province canadienne qu’avec un Etat américain de même taille et à même
distance. Barrières tarifaires, linguistiques, culturelles, volatilité des taux de change, biais
domestique des consommateurs.
=> Le commerce international est structuré autour de 3 grandes zones qui représentent
85% des échanges (UE, ALENA, ASEAN)
L’Angleterre ne possède aucun avantage absolu
par rapport au Portugal mais possède un
avantage comparatif pour la production de drap
=> L’échange commercial sera préférable à une
situation d’autarcie afin d’accroître la richesse des
deux pays (UK = drap ; PT = vin)
4. Les notions fondamentales
Les théories du commerce international
Le modèle « HOS » (Heckscher, Ohlin, Samuelson, 1941)
Hypothèse fondamentale : deux facteurs de production (L et K)
Résultats du modèle : les économies ouvertes se spécialisent dans
l’exportation de biens qui utilisent relativement + leur facteur le + abondant ;
a contrario, elles importent des biens dont le facteur de production est + rare
Théorème de Stolper-Samuelson : relation positive entre le prix international d’un bien
et la rémunération du facteur de production intensif dans sa production => lien entre
inégalités et ouverture commerciale (ex. s’accroissent aux USA et se réduisent en Chine)
« Paradoxe de Leontief » (1953) : les USA ont un K/tête plus élevé mais exportent plus
de produits relativement intensifs en facteur L => le L qualifié s’assimile à du K
(dimension qualitative des avantages comparatifs)
Une partie des échanges échappe pourtant à cette logique
Krugman (1984) : échanges intra branches, càd entre pays structurellement similaires sur
des biens similaires (44% dans l’UE en 2009, ex. San Pellegrino vs. Perrier). S’explique
par la compétition entre firmes pour des parts de marché (Brander, 1981 : dumping
réciproque) et goût pour la diversité du consommateur (Chamberlin, 1933).
=> Les ALE permettent une spécialisation entre pays de même développement mais induisent
des effets redistributifs lorsque leurs structures diffèrent (ex. USA/CAN et USA/MEX)
5. Les notions fondamentales
La mondialisation économique, un phénomène récent
Les leçons de la première mondialisation (1870-1914)
S. Berger, 2003 : « première mondialisation » entre 1870 et 1914 : séries de mutations tendant à créer
un seul marché mondial pour l’échange de biens et de services. Baisse des coûts de transports, hausse des
migrations (-10% population en Irlande). UK : excédent 9% de PIB => IDE dans l’Empire ; FRA : 3,5%
du PIB en IDE (Russie, Empire ottoman, Amérique latine)
MAIS l’ouverture trop précoce des secteurs manufacturiers des PVD à la concurrence des économies
matures a effondré les productions (OTT, Inde, Chine fin XIXème) et absence de réciprocité des
politiques commerciales (relèvement non coordonné des tarifs douaniers avant 1914, ex tarif Méline en
1892), v. Lettre Trésor Eco #93, 2011 : « Quels enseignements tirer de la première mondialisation ? »
Un faible écart entre partenaires maximise le bien-être du consommateur et l’efficacité productive (Viner, 1950)
Les défis de la mondialisation actuelle (1990-X)
Depuis 1945, l’intensification des échanges commerciaux a alimenté la *6 du PIB mondial. Accélération
début 1990s avec l’entrée des pays émergents dans la mondialisation : Chine 1er exportateur depuis
2009 (source de déséquilibres internationaux, v. séance 11). 161 membres de l’OMC en 2015 dont
Chine et Russie => baisse des droits douaniers et interdiction des quotas sauf raisons sanitaires.
Ajd, BPC excédentaires : Allemagne (7% PIB), Pays-Bas (9%), Chine (3%) vs. déficitaires : USA (-4%),
France (-3%). Taux d’ouverture (X/PIB) plus élevés en UE (France 30%, Allemagne 40% vs. USA 10%)
=> Nouveaux enjeux = intégration des chaines de valeur mondiales, réduction des avantages CSU et
taux de change des émergents, apparition d’une classe moyenne et réduction de la pauvreté dans
les PVD, hausse des inégalités dans les pays développés
7. 1. Les notions fondamentales
3. L’avenir du commerce international
2. Les outils de la politique commerciale
Le commerce internationalSéance 9
8. Les approches non coopératives (1/2) : Le protectionnisme
Les justifications théoriques du protectionnisme
Protéger des industries naissantes à titre transitoire (List, 1857 ; Akamatsu, 1937)
Protéger des industries de haute technologie (inciter à l’innovation et à la montée en gamme)
Protéger des industries en déclin pour accompagner les ajustements (ex. agro en Argentine)
Favoriser l’émergence de champions industriels en concurrence imparfaite (Spencer, 1983)
Protéger un secteur stratégique (ex. duopole Boeing – Airbus)
Les outils du protectionnisme
Droits de douane : transfert de revenu du consommateur vers le producteur et/ou les APU (ex.
UE sur le photovoltaïque chinois en 2013 et l’acier inoxydable en 2015)
Quotas : perte de bien-être pour le consommateur sans recette pour les APU
Subventions à l’exportation : moins préjudiciables pour les consommateurs, dépenses APU
Barrières non tarifaires : moins faciles à lever dans les négociations OMC
Les effets du protectionnisme
Coût pour le consommateur : 1,5% PIB aux USA, 220k€/emploi sauvé en UE (Messerlin, 1990)
Made in France : -2000€ de pouvoir d’achat/ménage et -35k emplois en 2 ans (CEPII, 2013)
Protectionnisme pro-cyclique en période de crise (ex. tarifs Smoot-Hawley en 1930)
Effet boomerang après mesures de rétorsions contre les entreprises nationales
Les outils de la politique commerciale
9. Les approches non coopératives (2/2) : La dévaluation externe
Condition de Marshall-Lerner (1945) ou théorème des élasticités critiques : après une
dévaluation compétitive, la BCP suit une courbe en J (elle se dégrade avant de
s’améliorer) car les prix s’ajustent plus vite que les quantités
La dévaluation n’est donc efficace que si la somme des valeurs ajoutées des élasticités-prix
de l’offre d’exportation et de la demande d’importation est supérieure à 1, c’est-à-dire si
l’effet de substitution l’emporte sur l’effet de valorisation, ou encore si l’augmentation du
volume d’exports est supérieure au renchérissement des imports
Ex. dévaluation réussie : Islande 2009-14 (-70% monnaie et -14% PIB => +4,5% ajd)
Dévaluations par les BC critiquées car accroissent la volatilité des taux de change et ne
modifient pas tjs les taux dans la direction
souhaitée (Dominguez & Frankel, 1993)
« Guerre des monnaies » depuis 2013 :
dépréciation de l’USD et du Yen par rapport
au RMB et de l’€ par rapport à l’USD
=> MAIS pas d’impact majeur sur les Y
Les outils de la politique commerciale
10. Les approches coopératives (1/2) : L’aide publique au développement
Plan Marshall : prêt de 1,2% PIB USA => rattrapage en K détruit pdt la guerre
(« Big Push » pour Lucas). 5% croissance en my (1945-73) en FR, IT, RFA
Ajd, APD = 140 Md$ vers Sud (0,5% PIB pays développés)
Modalités : aides bilatérales, aides multilatérales et annulations de dettes
Financements : budgets nationaux, facilités d’emprunts, taxe billets d’avion
1er donateur en VA = USA (20 Md$, 0,2% PIB). JP, UK, FR, AL 10 Md$/an (UE27 = 50%
APD). SU, NO, DK ~ 1% PIB.
Objectif OMD : réduire par 2 le nb de pauvres (< 1,25 $/j), et APD 0,7% PIB à horizon
2015 => pas réalisé
Corrélation avec la réduction de la pauvreté monétaire (52% en 1980 vs.
22% en 2010 même si elle a augmenté en VA : 1,2 Md vs. 1,9 Md).
1% de croissance en plus dans le monde => 20 M de pauvres en moins
MAIS critiquée car ne préjuge pas de son utilisation => importance d’une bonne
gouvernance (Williamson, 1989) et effet de l’ouverture au commerce (Frankel &
Romer, « Does Trade Cause Growth? », 1999) ex Doi Moi du Vietnam => PIB *5
entre 1985 et 2011 (entrée ASEAN en 1995 et OMC en 2007)
Nouvelles approches « épidémiologiques » lutte c/ la pauvreté : ex. formation des
enseignants vs. bourses scolaires (Duflo, 2010)
Les outils de la politique commerciale
11. Les approches coopératives (2/2) : L’Organisation mondiale du commerce
Chap. IX & X Charte NU => signature du GATT en 1947 (OMC en 1994, 162 mb)
Abaissement des droits de douane (-40% entre 1947 et 1961 => 12% Europe et 18% USA ;
Kennedy Round 1964-67 les abaisse resp. à 8% et 13% ; ajd 2,2% et 3,3% en my)
Réduction des restrictions quantitatives ou qualitatives
Clauses de la nation la plus favorisée et du traitement national (non discrimination et réciprocité)
Politiques commerciales régionales pas exclues ex. tarif extérieur commun Traité de
Rome 10% du budget communautaire (commerce intra-zone = 2/3 des X en UE)
MAIS critiquée pour favoriser les délocalisations (-13,5k emplois/an en France entre
1995 et 2001, soit 3% destructions annuelles, dont 50% vers pays développés).
Certes, relation positive en France entre taux d’ouverture du secteur manufacturier (11,5%
en 1980 ; 18% en 2006) et % de l’emploi total (24% vs. 13%) mais d’autres pays ont
conservé une industrie (ALL 21% VA totale, v. séance 10)
Enjeu d’intégration des PVD au commerce international (Afrique seulement 2,4% des X
mondiales) et blocage du cycle de négociations de Doha (2001-2013)
Les outils de la politique commerciale
12. 1. Les notions fondamentales
3. L’avenir du commerce international
2. Les outils de la politique commerciale
Le commerce internationalSéance 9
13. L’avenir du commerce international
Vers la fin du multilatéralisme ?
FMI, “Slow Trade” (Constantinescu et al., 2014) : ralentissement de la croissance du
commerce international depuis 2011 (+3% en 2012 et 2013 vs. +7,1%/an en my avant
crise). Changements structurels : coûts de transport, relocalisations, nouveau modèle chinois.
Segmentation de la chaîne de valeur mondiale => poids accru des exportations de biens
intermédiaires (30% de la VA en ALL en 1995 vs. 52% en 2013), hausse du commerce
intrabranche et des échanges de services (finance, transport, ingénierie)
=> La nouvelle organisation du commerce international rend le protectionnisme
impossible (très faible substituabilité de la production nationale aux importations : 0,14 en
France). Les pays de l’OCDE doivent s’insérer dans les chaînes de valeur en conservant des
segments sophistiqués et en montant en gamme. Ex Boeing : 43 fournisseurs dans 135 pays.
MAIS les principaux protagonistes du commerce international se tournent vers le
régionalisme (FMN, pays émergents) autour de grands accords commerciaux (TPP, TTIP, etc).
CEPII, « L’OMC en quête d’un avenir » (2013) : accord de Bali a minima en 2013
(facilitation des échanges, agriculture, PVD : +1 000 Md$ escomptés) pour relancer le
cycle de Doha (1er accord depuis 1994).
En théorie, les accords régionaux ne sont pourtant qu’un optimum de second rang par
rapport au multilatéralisme et une étape intermédiaire de règles avant la mise en place
du libre-échange généralisé (Yi, 1996). 612 accords régionaux en 2015.
14. L’avenir du commerce international
Faut-il adopter le TTIP ?
Marché le plus étendu au monde (50% PIB et 30% du commerce international). Chacun
est le 1er partenaire de l’autre => TTIP = doublement du commerce bilatéral, +0,5%
PIB et +1M d’emplois d’ici 2020 (CEPII, 2013)
2 leviers : annulation des droits de douane (résiduels) et harmonisation des barrières non
tarifaires (équivalent à des droits de douane de 10 à 20%)
Incidences prévisibles : hausse des exportations automobiles de l’UE mais réduction du
commerce intra-zone. Les Etats membres dont la relation économique avec les USA est la
+ développée profiteront le + du TTIP en termes d’emploi (UK, AL, IE, PT, GR, ES).
Gains limités pour la France du fait de son faible commerce de biens avec les USA et
incidence négative sur le secteur agricole (-0,8% Y d’ici 2025)
Les points durs de la négociation : libéralisation commerce électronique (protection des
données personnelles), industrie agro-alimentaire et accès aux marchés publics (95% des
marchés européens ouverts vs. 32% des marchés américains => sommes-nous les « naïfs
du village global » ?)
Enjeu aussi pour l’avenir du commerce international : faire des standards américano-
européens la référence de futurs standards mondiaux (not. en matière environnementale)
=> La France n’est pas le pays européen qui a le plus intérêt au TTIP
15. L’avenir du commerce international
Quelle place pour la France dans le commerce international ?
Au plan de la compétitivité-prix (en compétition avec nos partenaires UE => explique 60%
des performances à l’X), CICE & PRS pour diminuer les CSU (v. séances précédentes)
Au plan de la compétitivité hors-prix (en compétition avec le Monde => explique 40%
des performances à l’X), positionnement qualité, innovation, design et marque insuffisant
pour compenser la dégradation de la compétitivité-prix
1er exportateur mondial de produits agro-alimentaires haut de gamme (Lettre Trésor Eco
#118) => spécialisation HDG permet d’atténuer le recul des parts de marché en se
positionnant sur les marchés émergents
Enjeux : faciliter l’accès des produits de luxe aux marchés
des pays tiers et assurer la protection de leur
propriété intellectuelle
MAIS peut-on être compétitif sans un fort tissu industriel ?
Quel positionnement pour la France sur les chaînes de
valeur internationales ?
=> V. séance 10 (Industrie et compétitivité)
16. FIN DE LA SÉANCE
Le commerce internationalSéance 9