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Mémoire de recherche de fin d’études
Sujet : L’impact des offres Over-The-Top (OTT) sur la télévision linéaire et plus
particulièrement sur le marché de la télévision payante.
Problématique : Le développement des offres OTT en France peut-il se traduire par un
phénomène de cord-cutting (désabonnement aux Pay-TV actuelles) comme observé aux
États-Unis ? Quel phénomène est réellement à l’œuvre ?
AUTEUR
Carraz Paul
PROFESSEUR REFERENT
Fronteau Alain
Date de parution
5 mai 2015
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SOMMAIRE
Introduction………………………………………………………………………………… 2
Partie 1 : Revue de littérature
1.	Convergence	des	médias		................................................................................................	4	
1.1 Internet et les nouvelles technologies, un environnement propice au
développement de l’Over-The-Top.............................................................................. 4
1.1.1	Internet,	un	nouveau	média		................................................................................................................................	4	
1.1.2	L’ère	du	«	Always	On	»	.........................................................................................................................................	9	
1.2 L’audiovisuel, un marché en mutation .............................................................. 12
1.2.1	La	télévision	linéaire		............................................................................................................................................	12	
1.2.2	Vers	une	consommation	délinéarisée	............................................................................................................	15	
1.2.3	De	nouveaux	entrants	:	les	services	délinéarisés,	une	menace	pour	la	(PAY)-TV	......................	25	
	
2.	Marché	américain	et	Marché	français,	deux	modèles	bien	distincts	..............................	30	
	
1.1 Marché américain, La maturité de la VoD américaine et la puissance de Netflix
................................................................................................................................... 30
1.2 Marché français, le succès de l’IPTV .................................................................. 39
	
3.	L’analyse	du	bouleversement	OTT	par	les	auteurs,	experts	et	cabinets	......................	46	
	
Partie 2 : Dispositif empirique
	
1.	Méthodologie	de	recherche		.........................................................................................	61	
1.1 Objectifs de l’enquête ......................................................................................... 61
1.2 Thèmes de l’enquête........................................................................................... 61
1.3 Type d’entretien................................................................................................... 62
1.4 Guide d’entretien ................................................................................................. 63
2.	Présentation	des	professionnels	interviewés		...............................................................	66	
Barbara Chazelle – France Télévisions
Rafael Ichou – Canal +
Joackim Le Goff – M6 Web
Valery Bonneau – Globecast
Pascal LeChevallier – What’s Hot Media / ZDNet
1	
Ludovic Bostral – Afrostream / Sebastien Faure – Molotov.tv
Bruno Da Costa Oliveira – NextRadioTV
Bruno Renkin – RTL New Media
3.	Analyse	des	entretiens		.................................................................................................	70	
3.1 Le développement de l’OTT ............................................................................... 70
3.2 Le modèle de streaming par abonnement........................................................... 73
3.3 L’environnement du marché français et sa potentielle évolution (Chronologie
des médias)............................................................................................................... 76
3.4 Les acteurs menacés par les nouveaux entrants................................................ 79
3.5 L’adaptation des acteurs traditionnels................................................................. 86
3.5.1	La	potentielle	menace	des	ligues	sportives		................................................................................................	86	
3.5.2	L’adaptation	des	acteurs	traditionnels	(Suite)		....................................................................................	88	
3.6 Les Millennials..................................................................................................... 89
3.7 Le Cord-cutting en France .................................................................................. 92
	
	
Partie 3 : Mise en tension de la problématique
	
1.	Constats		......................................................................................................................	99	
1.1 La SVOD, une force disruptive mineure en France ............................................ 99
1.2 Quel Cord-cutting à l’œuvre en France aujourd’hui .......................................... 100
1.3 Les bouleversements de la SVOD et de l’OTT ................................................. 104
2.	Perspectives		..............................................................................................................	108
2.1 Le futur de la consommation audiovisuelle chez les jeunes générations ......... 108
2.2 Le paysage audiovisuel français à moyen/long terme ...................................... 111
2.3 La neutralité du Net .......................................................................................... 113
2.4 Les potentielles futures menaces de l’OTT ....................................................... 114
						Pay-TV	et	OTT	
						Sport	et	OTT	
						IPTV	vs	Box	OTT	
	
Conclusion 121
		
Bibliographie………………………………………………………………………………124
2	
Introduction
« Dans les prochaines décennies et partout dans le monde, la télévision sur Internet
remplacera la télévision linéaire, et les applications remplaceront les chaînes. Les
télécommandes disparaîtront et les écrans proliféreront.»
Telle est la vision de Reed Hastings, PDG de Netflix, premier service de vidéo à la demande
du monde, vu comme le plus grand danger issu du web pour les acteurs de la télévision
traditionnelle. En effet ici deux mondes s’opposent : celui du linéaire proposé depuis la
naissance de la télévision par les chaînes broadcast ; puis celui du non-linéaire, du
délinéarisé, appartenant au monde du web et mettant en avant une expérience utilisateur
inégalée couplée à des contenus de plus en plus qualitatifs et, ce, accessible à n’importe
quel moment, n’importe où…
De quoi effrayer les acteurs traditionnels de la télévision, notamment de la télévision payante
qui voit en Netflix, pure-player emblématique du marché de la vidéo à la demande, une
concurrence sérieuse, féroce et pratiquement indomptable, car tout droit sortie du web.
En effet nous observons aujourd’hui de gros bouleversements sur le marché américain suite
au développement de Netflix. Cette plateforme est à l’origine d’une vague de
désabonnement massif auprès des câblodistributeurs, les téléspectateurs se tournant vers
une offre vidéo bien plus accessible, personnalisée et adaptée aux nouveaux modes de
consommation.
Cet effet de désabonnement est ce que l’on appelle le « cord-cutting »
Constatant l’arrivée de Netflix en France, il est très intéressant et nécessaire d’évaluer le
potentiel impact d’un tel service sur le paysage audiovisuel français.
Ce mémoire a donc pour but d’identifier l’impact actuel de ces pure-players dits « over-the-
top », passant au-dessus du réseau managé des opérateurs télécoms, sur la télévision
linéaire et plus précisément sur la télévision payante.
Bien que les nouveaux entrants, appartenant à l’univers dit « Over-the-top », menacent
globalement toute la télévision linéaire, il semble que l’impact soit encore plus disruptif sur la
télévision payante, sous toutes ses formes.
3	
À travers notre première grande partie, qui constituera notre revue de littérature, nous
mettrons tout d’abord en évidence dans une première sous-partie ce qui a provoqué la
naissance et l’émergence de « l’over-the-top ». Nous nous intéresserons ensuite à l’offre de
télévision et à son évolution dans un contexte de convergence des médias pour finalement
nous intéresser aux nouveaux entrants sur le marché.
Dans une deuxième sous-partie, nous nous intéresserons aux marchés français et
américains pour en faire ressortir les divergences et les similitudes. Ce qui nous permettra
déjà d’établir un constat sur les grandes différences entre les deux marchés.
Dans une troisième sous-partie, nous nous intéresserons aux différentes réponses
apportées auparavant à notre sujet par différents experts, professeurs/chercheurs et cabinet
que nous mettrons en contraste notamment aux témoignages de professionnels interviewés
dans le cadre de notre étude qualitative.
L’analyse de ce dispositif empirique donnera lieu à notre deuxième grande partie.
La troisième et dernière grande partie me permettra de confronter ma revue de littérature à
ce dispositif empirique afin de tirer des réponses claires sur la problématique choisie.
Nous essayerons finalement d’aller plus loin dans notre réflexion afin d’établir une vision
globale du futur paysage audiovisuel français et mondial.
EXTRAIT
Partie 3 : Mise en tension de la problématique
98	
Partie 3 : Mise en tension de la problématique
Nous avons introduit ce mémoire par une citation, celle de Reed Hastings, PDG de Netflix
qui affirmait, avant de lancer sa plateforme en France, que dans les prochaines décennies la
télévision sur internet et les applications remplaceraient les chaînes de télévision linéaire.
Je suis bien conscient que Reed Hastings, en proclamant ce genre de faits, prêche pour sa
paroisse. En assénant de telles « vérités », il veut avant tout persuader les consommateurs
que sa vérité est également la leur.
Après avoir établi ma revue de littérature et mon dispositif, il est temps pour moi de dire que
le marché dans lequel nous évoluons aujourd’hui se rapproche en effet de plus en plus de
cette vision.
Cependant nous aurons vu à travers nos deux premières parties que certains acteurs
traditionnels du marché sont malgré tout voués à survivre dans un univers majoritairement
dominé par internet et l’OTT.
Je vais dans cette troisième et dernière partie mettre en évidence les convergences et les
divergences entre ma revue de littérature et mon dispositif empirique, ce qui me permettra
d’établir un constat, notamment sur la position de la SVOD et de l’OTT sur le marché
français.
De ce constat, je m’engagerai alors dans l’élaboration de différentes perspectives et
hypothèses quant à l’avenir de ce marché français, mais aussi mondial. Je m’inspirerai des
conclusions établies avant moi par les différents chercheurs et professionnels, que j’aurai au
préalable confrontées, pour en exploiter finalement les plus pertinentes.
99	
1. Constats
1.1 La SVOD, une force disruptive mineure en France
Je remarque tout d’abord que les convergences entre ma première et ma deuxième partie
sont nombreuses.
Premièrement, Florence Le Borgne-Bachschmidt de l’Idate et P.LeChevallier s’accordent
pour dire que l’offre SVOD est et restera marginale à court/moyen terme sur le marché
français.
Avant l’arrivée de Netflix en France, beaucoup imaginait que la plateforme provoquerait un
séisme sur le marché à son arrivée. En effet les acteurs traditionnels avaient de quoi
s’inquiéter en observant le marché américain totalement bousculé par le développement de
Netflix. Le marché américain connaît en effet un phénomène de cord-cutting de masse
compte tenu des prix affolants des acteurs traditionnels du câble - facturant leurs services
TV à plus de 80 dollars - qui doivent faire face aux offres low-cost mais de très bonnes
qualités de la SVOD. Ces offres ont également l’avantage de ne proposer aucune publicité
contrairement à la télévision linéaire dans laquelle la publicité vient sans cesse s’imposer
entre et pendant les programmes, rendant la consommation très pénible pour les
consommateurs. Tant de défauts qui ont donc amené les consommateurs à se tourner vers
la SVOD (et l’OTT) et à délaisser la télévision linéaire payante.
En apprenant à l’époque le lancement imminent de Netflix en France, on pouvait alors
légitimement se questionner sur l’impact potentiel de l’arrivée d’un tel acteur sur le marché
français.
Notre première partie, à travers laquelle je me suis intéressé à la structure du marché
français, m’a permis d’établir de premiers éléments de réponses que sont venus confirmer
les témoignages de professionnels dans mon étude qualitative.
En effet, le marché français est bien différent de celui des États-Unis. Nous ne connaissons
pas en France de « TV providers » aussi coûteuse que la TV par câble des E-U. De plus la
publicité n’est pas aussi intempestive que chez nos voisins transatlantiques.
Nous venons ainsi d’écarter, en même pas deux lignes, une parties des principales raisons
100	
de la réussite de la SVOD et du développement du cord-cutting aux E-U. On peut en plus
ajouter le fait que la télévision gratuite soit très présente et très forte, sans oublier également
l’exception culturelle française qui veut que la majorité des Français privilégient les
programmes francophones, comme l’affirme P.LeChevallier. De ce fait, l’offre de Netflix,
concentrée sur les productions hollywoodiennes, pourrait paraitre obsolète aux yeux de la
plupart des consommateurs français, d’autant plus que la chronologie des médias, qui régit
le marché de la diffusion audiovisuelle en France, interdit la diffusion avant 36 mois des films
sortis en salles. L’offre de Netflix se résume donc en France à un catalogue majoritairement
tourné vers les productions américaines (films et séries) et en grande partie obsolètes à
cause de la chronologie des médias et surtout du piratage.
L’offre de la SVOD paraît tout de suite bien moins attrayante qu’elle ne l’était dans notre
imaginaire de consommateur avide de « binge-watching »… Netflix n’a en fait clairement
pas, en France, la puissance disruptive dont elle a fait preuve aux États-Unis. Ceci est un
premier constat qui m’amène à affirmer que le cord-cutting sera bien moins puissant qu’aux
États-Unis.
1.2 Quel cord-cutting à l’œuvre en France actuellement ?
À ce stade, je parle de cord-cutting pure, je pense donc à une personne qui a décidé de se
désabonner à son offre de télévision linéaire pour souscrire en particulier à une offre OTT. Je
m’intéresserai plus tard à l’autre forme de cord-cutting qu’est le « cord-never » et qui n’a
actuellement pas sa place en France au moment ou je vous parle.
Les premières menaces sont les chaînes thématiques comme l’ont affirmé une bonne partie
des professionnels interviewés pour ce mémoire. Les chaînes thématiques sont vouées à
disparaître de l’offre linéaire, car elles font face notamment à une offre légale comme
YouTube qui propose gratuitement l’accès un nombre de contenus inimaginables et de
meilleure qualité que les quelques programmes multidiffusés des chaines thématiques. Par
exemple une chaîne comme Maison + doit faire face à une multitude de « tutos » disponible
gratuitement sur la plateforme de Google. Économiquement ce type de chaînes ne peut
survivre sur le linéaire. D’autant plus qu’elles appartiennent généralement à une offre de
bouquet de chaînes proposées par les distributeurs, comme l’IPTV (Box Numericable,
Freebox etc) ou CanalSat, en supplément de l’offre standard. Cette course à l’offre
multichaîne la plus exhaustive s’est avérée pertinente il y a quelques années, mais elle est
aujourd’hui dépassée. En effet, les ménages ont rapidement constaté que leur
consommation linéaire s’établissait uniquement sur une dizaine, voire une quinzaine de
101	
chaînes. Les offres « premium » « multichaîne » n’ont désormais plus la côte. Ajoutez à cela
une conjoncture économique défavorable et un pouvoir d’achat des ménages globalement
en baisse, ceux-ci ce sont alors tournés vers des offres standards, sans options, voire des
offres low-cost à l’image de ce que nous observons sur le marché de la téléphonie mobile.
Les acteurs étant les mêmes (Orange, Bouygues), le modèle de l’offre low-cost s’est aussi
appliqué à la consommation audiovisuelle. De plus, comme je l’ai dit précédemment, les
offres OTT gratuites ce sont développées, initiant ou confirmant (cela dépend des cas) l’acte
de cord-cutting envers les bouquets de chaînes thématiques, parmi lesquels j’intègre
également CanalSat.
Avec du recul, nous pouvons clairement associer ce phénomène à un effet de cord-shaving
plutôt qu’au cord-cutting, car on observe un téléspectateur réduire son offre actuelle, sans
pour autant se désabonner, tout en profitant à côté d’une offre OTT, gratuite ou payante.
Sachant que nous avons identifié, en France, YouTube comme principal concurrent aux
chaînes thématiques, on peut affirmer donc que ces « cord-shavers » se sont plus tournés
vers une offre OTT gratuite. Nous citons YouTube, mais aujourd’hui beaucoup d’offres OTT
payantes, mais peu chères font leurs apparitions.
Les deuxièmes acteurs menacés par l’arrivée de nouveaux entrants sont les chaînes de
télévision à péage que je qualifierais de « premium », car contrairement aux chaînes
thématiques, elles proposent des contenus premiums (films et séries) de première fenêtre.
Je pense tout d’abord à Canal +. Comme l’affirme R.Ichou, la chaîne à beaucoup à craindre
des nouveaux entrants. En effet Canal+ propose une offre premium incluant séries, films et
évènements sportifs pour ne citer que les principaux programmes. La chaîne compile donc
programmes de stocks « premium », qui la différencie des chaînes gratuites, et programmes
de flux, premium également, comme la diffusion de la Ligue des Champions ou plus
simplement des principaux matchs de Ligue 1. Cette combinaison de programmes est l’une
des plus valorisantes du marché. Mais cette offre a bien sûr un prix qui est également le plus
fort du marché.
Ainsi, face à l’arrivée d’offres « low-cost » comme la SVOD - qui somme toute offre un
service de relativement bonne qualité en terme de contenus et surtout d’expérience - une
chaîne premium comme Canal + peut souffrir du désintérêt de certains abonnés pour des
raisons économiques.
Comme l’expliquait P.LeChevallier, un service comme Netflix ne pourra jamais empiéter sur
102	
une chaîne comme Canal, car la chaîne concentre son offre sur la diffusion de films et séries
de première fenêtre, ainsi que d’évènements sportifs en live. Deux axes sur lesquels Netflix
ne peut, à date, pas se positionner. Ainsi selon P.LeChevallier, Netflix ne provoque aucune
menace directe et importante pour déclencher un effet de cord-cutting.
Malgré tout, ces offres - bien que différentes sur beaucoup d’aspects - se positionnent sur un
même marché, celui de la série et du film. De ce fait, une concurrence est tout simplement
évidente entre les deux offres. L’une se veut premium et l’autre low-cost. Si, pour des
raisons de budget, un abonné de Canal + vient à se séparer de son abonnement, celui-ci
aura tout intérêt à se rattacher à une offre comme Netflix pour profiter malgré tout d’une offre
de contenus exhaustive et valorisante de par son expérience utilisateur. Je pense bien sûr à
l’outil de recommandation de Netflix qui représente un atout majeur de son offre. De plus, si
le consommateur a une appétence particulière pour les contenus premium, celui-ci peut
aisément se tourner vers l’offre illégale (qui selon moi ne peut rivaliser avec l’expérience de
consommation qu’offre Netflix). L’alliance : offre légale Netflix + offre illégale (pour la
fraicheur) me semble tout à fait pertinente, en terme de choix et de faisabilité pour un
consommateur. (Je n’affirme en aucun cas que l’offre illégale est une solution)
Je pense donc pour toutes ces raisons que le cord-cutting est, en ce moment probablement
à l’œuvre en France et que sa première victime est où sera Canal +.
Autant que Canal+, une offre comme OCS, la chaîne cinéma et séries d’Orange, a de quoi
s’inquiéter du développement de l’offre SVOD en France. Pour les mêmes raisons citées
précédemment afin de démontrer la concurrence entre Canal et ce nouvel entrant, OCS est
sous la menace d’une vague de désabonnement. Encore plus que Canal+, car l’offre
d’Orange ne se positionne pas sur le sport. Malgré tout, l’offre d’OCS se situe sur la même
tranche de prix d’un Netflix et n’a donc pas à souffrir de cette concurrence low-cost exposée
pour le cas Canal +.
La personne qui se désabonnera d’OCS pour profiter finalement d’une offre de SVOD, fera
avant tout le choix de l’exhaustivité et surtout d’un mode de consommation bien plus
actuelle, soit multi-device et personnalisé. Faut-il rappeler que l’offre est d’ores et déjà
quelque peu obsolète sachant qu’une partie de ses abonnés ont été recrutés grâce aux
offres promotionnelles d’Orange sur leurs différentes offres. OCS a-t-elle une réelle valeur
ajoutée ? Il est facile de penser que les abonnés réels sont uniquement des consommateurs
qui ne pratiquent pas le piratage. Mais sont-ils nombreux aujourd’hui ? C’est beaucoup
moins sûr.
103	
Pour récapituler, les acteurs menacés de cord-cutting sont aujourd’hui les pay-tv en tout
genre et j’englobe également dans « pay-tv » l’offre de télévision des FAI, l’IPTV.
En effet l’offre de l’IPTV, bien qu’elle soit complète (live + consommation à la demande), ne
propose pas une expérience utilisateur aboutie, de par son interface souvent trop
compliquée et sa lenteur (défaut que « j’expérimente » moi même à travers l’offre de
Numéricable)
De plus l’IPTV, naturellement TV par Internet, propose l’accès à une offre d’applications
limité. C’est à travers ce service dit « managé » qu’on arrive à distinguer finalement OTT et
IPTV. L’OTT offre lui un accès ouvert à internet.
Si les box de FAI sont aujourd’hui menacés par le cord-cutting c’est parce que l’offre de box
multimédias OTT se développe à grande vitesse. On a vu apparaître cette dernière année la
Chromecast de Google qui a également lancé tout dernièrement son Nexus Player. Chetrit &
Druel et L.Bostral s’accordent à dire que les box de FAI sont menacés, car les boitiers OTT
proposent une expérience utilisateur bien supérieure et surtout un accès plus ouvert à
internet.
Cependant ce genre de boitiers OTT s’adresse, pour l’instant, à une certaine cible de
consommateur, les early adopters (et petit à petit l’early majority) qui représentent une trop
infime partie du marché. C’est par exemple le cas de Ludovic Bostral qui avoue être un early
adopter adepte du cord-cutting.
Cet effet de cord-cutting est donc bien présent, mais reste pour l’instant très faible aux vues
de la part infime d’early adopters – cord-cutters sur le marché.
Cependant, nous l’avons vu à travers la théorie de G.A Moore dans notre première partie, ce
sont ces mêmes early adopters qui permettront ou non la démocratisation de ces nouvelles
technologies (boitiers OTT) en franchissant ou pas la phase critique de « Chasm ».
Mais comme l’envisage Barbara Chazelle, la démocratisation de l’OTT passera par la
télévision connectée. En effet, comme nous l’avons vu dans notre première partie, la
télévision connectée est de plus en plus présente dans les ménages français. Le principe de
cette télévision étant de proposer un univers OTT, je m’accorde le droit d’affirmer que la
télévision connectée a un rôle important dans la démocratisation de la consommation OTT.
Elle permettra le développement massif d’applications sur ces plateformes et forcément
l’augmentation d’abonnements à des offres tels que Netflix. Ces conclusions sont, certes, un
104	
peu hâtives, mais de nature, l’ouverture du marché à l’OTT incitera forcément à la
consommation d’applications et d’offres comme Netflix. Elles seront plus abordables
(techniquement) et plus démocratisées.
Si je rentre dans les perspectives, je peux aussi affirmer, et ces déjà le cas, que les box de
FAI s’adapteront en intégrant cet univers OTT qui leur fait aujourd’hui défaut. Comme l’a fait
dernièrement Free avec sa Freebox 4K intégrant l’interface Android TV résolument OTT.
L’IPTV des FAI répondra finalement aux attentes des consommateurs en leur proposant une
expérience utilisateur fluide et un accès internet bien moins bridé, évitant ainsi les potentiels
actes de cord-cutting.
Malgré tout, si la télévision connectée est amenée à se développer comme nous l’avons vu,
celle-ci représentera un nouveau concurrent de taille pour les box de FAI.
Je peux d’ores et déjà affirmer que les nouvelles IPTV « hybrides» ont de grandes chances
de remporter ce duel, car elles sont le produit des FAI qui contrôlent le réseau, la bande
passante. On imagine donc que l’expérience utilisateur et la fluidité du service y sera bien
meilleure en cas de streaming à forte audience. Les FAI détiennent les infrastructures
nécessaires au bon fonctionnement de l’OTT, au contraire des plateformes comme Netflix
etc.
Mais revenons à la situation présente du marché.
1.3 Les bouleversements de la SVOD et de l’OTT
Nous l’avons vu, il semble que Netflix soit bien armé pour s’implanter sérieusement sur le
marché français. Comme l’avait très bien prédit le cabinet Kurt Salmon, la stratégie adoptée
par les acteurs de la SVOD (américains) est celle de la production de contenus exclusifs afin
de remonter notamment la chronologie des médias et de proposer un contenu frais, ce qui
leur faisait défaut jusqu’à présent. On a ainsi pu observer Netflix produire plusieurs séries à
succès, sur les dernières années, telles que House Of Cards, Orange is The New Black ou
plus récemment Daredevil en partenariat avec Marvel.
Comme l’indique L.Bostral, le nerf de la guerre est en effet dans la série et non pas dans le
cinéma. Les acteurs de la SVOD ne se soucient plus vraiment de cette chronologie des
médias qu’ils arrivent à contourner facilement avec une stratégie offensive tournée vers la
création de contenus exclusifs, qui leur permet de rafraichir leurs catalogues.
105	
Pour J.Le Goff, la future création originale de Netflix, « Marseille » destiné au marché
français pourrait être un « game changer » qui bousculerait alors le marché, provoquant un
intérêt de masse pour Netflix de la part des français, notamment quand on connait leur
appétence pour les séries françaises. Cette réussite dépendra avant tout de la qualité du
contenu.
Chetrit et Druel envisagent également le développement de la SVOD en France grâce à
cette stratégie que pourraient assimiler les acteurs français de la VOD. Cependant cela est
peu envisageable aujourd’hui. En effet les acteurs de la SVOD française ne sont pas assez
développés pour se lancer dans le financement de contenus. Bien sur Canal + s’adapte et
imite les acteurs américains sur ce plan, mais cette stratégie n’impact pas son offre de
SVOD, Canalplay, qui bénéficie au mieux des séries exclusives du groupe qu’en deuxième
fenêtre diffusion. Pas de quoi séduire de nouveaux abonnés vu que le piratage aura déjà
balayé la fraicheur du contenu.
De plus, selon J.Le Goff, pour se développer et réussir dans un univers OTT, l’acteur et
l’offre doivent être internationaux afin de maximiser leurs chances d’implantation dans les
pays étrangers et ainsi générer des revenus supérieurs. Contrairement à ce que pensent
Chetrit et Druel, nous avons peu de chances, si ce n’est à long terme, de voir les acteurs
français de la SVOD créer leurs propres contenus exclusifs. Si cela se fait, c’est à petite
échelle à l’image de la web série FRAT de Canalplay. C’est un début.
Cette stratégie est en tout cas appliquée par Netflix qui répond à ces différents critères de
réussite. C’est pourquoi P.LeChevallier et Florence Le Borgne-Bachschmidt s’accordent à
dire que malgré sa présence marginale, la SVOD devrait à plus long terme avoir un réel
impact sur le marché, assez pour le faire évoluer. Globalement c’est l’OTT, représenté par
YouTube, qui a changé les modes de consommation audiovisuelle, amenant les
téléspectateurs, notamment les plus jeunes, les millennials, à se détourner de l’écran
principal du foyer pour se concentrer sur leur ordinateur portable, tablette et de plus en plus
leur Smartphone. Cette consommation croissante sur mobile modifie en profondeur la nature
des contenus produits par les « content providers ».
Chetrit & Druel et R.Ichou de Canal + se rejoignent sur ce point : la création de programmes
tend en partie vers le programme court, celui qui est de plus en plus consommé par les
jeunes générations sur leurs différents mobiles, notamment grâce à la généralisation de la
4G depuis plus d’un an. Ces programmes courts que l’on appelle aussi « shortforms »
106	
rentrent dans une dynamique de consommation en « snacking ». C’est-à-dire que le contenu
est consommé rapidement de manière à faire passer le temps dans les transports ou à
accompagner la personne lors de sa pause-déjeuner. Cette dynamique est d’autant plus
présente chez les jeunes, car cette génération est de plus en plus difficile à captiver pour les
chaînes/marques.
À l’opposé le format long est également amené à évoluer comme l’indiquent Chetrit & Druel.
Notamment celui qui est proposé par les chaînes de télévision pour réunir le plus d’audience
possible. Il se trouve que les contenus longs les plus appropriés pour ça sont les
programmes évènementiels ou live ; d’un côté l’Idate affirmait en 2010 que dans les 10 ans à
venir, la consommation à la demande dominerait le marché et que seuls les grands
évènements live seraient diffusés en linéaire, de l’autre côté les professionnels, plus
mesurés, affirment que la télévision a encore de bons arguments pour mieux résister,
concédant tout de même que, dans l’obligation de se spécialiser, les chaînes broadcasts se
concentrent en effet dans la diffusion de contenus « premiums ». Et j’entends par
« premium », évènements live et contenus originaux, tant dans le fond que dans la forme.
C’est ce qu’imagine Barbara Chazelle de France TV qui voit une évolution d’écriture qui tend
vers le transmedia afin que le contenu ait notamment une dimension « cross-device », quasi
obligatoire à l’heure de la « TV everywhere » / du multi-écran.
Je suis personnellement persuadé que les programmes de stock, notamment les films ont de
moins en moins leur place sur les chaînes linéaires de télévision. Compte tenu du piratage
de masse que nous connaissons aujourd’hui, les films deviennent rapidement obsolètes et
ne peuvent donc plus prétendre générer des audiences suffisantes à la pérennité des
chaînes gratuites comme payantes. D’un côté, la chaîne gratuite qui vit sur la publicité
amasse moins d’audience donc forcément moins de revenus publicitaires, de l’autre côté la
chaîne payante ne propose plus de contenus premiums et voit son argumentaire de vente ou
de rétention de l’abonné dévalorisé.
Malgré tout, je pense que la télévision offre et offrira toujours cette dimension
évènementielle, que la consommation à la demande (piratage inclus) n’a pas et qui nous
pousse à être à l’heure devant notre télévision pour regarder un film que nous aurons
pourtant déjà vu 5 fois. Cette excitation que procure le (semi) direct est commune à tous les
téléspectateurs et me permet donc de penser que malgré l’obsolescence croissante
provoquée par le piratage, la télévision et le cinéma sur la télévision ont encore une légitimité
certaine. La passivité qu’offre la télévision traditionnelle plait et plaira toujours à une partie
des consommateurs/téléspectateurs.
107	
On observe encore aujourd’hui de grosses audiences en prime time le dimanche soir sur du
cinéma. Mais cela reste en quelque sorte une exception. Cette « magie du direct » n’est pas
assez forte pour rassembler autant de téléspectateurs qu’il y a une dizaine d’années. De
plus, on imagine bien sûr que les jeunes générations, quasiment nées avec une tablette à la
main, seront bien moins réceptives à cette dimension du simple fait qu’ils n’auront pas grandi
avec.
C’est pourquoi l’avenir de la programmation des chaînes linéaires se joue sur l’achat de droit
de diffusion de grands évènements sportifs, qui réalisent aujourd’hui les meilleures
audiences, mais aussi sur la capacité de ces chaînes à produire leurs propres séries
exclusives à l’image de Canal +. Grâce à cette dernière stratégie, les acteurs traditionnels
valoriseront leurs offres et rivaliseront avec les nouveaux entrants qui se positionnent eux
aussi sur cette stratégie d’exclusivité, à l’image de Netflix.
Cette exclusivité s’avère être le vrai nerf de la guerre qui déterminera qui des différents
acteurs possède l’offre la plus valorisante. V.Bonneau a d’ailleurs émis une hypothèse assez
intéressante sur le sujet. Selon lui l’offre de séries exclusives va se démultiplier provoquant
la création de centaines de séries simultanément. (C’est ce qu’on commence à observer dès
maintenant). De ce fait la valeur de l’exclusivité d’une offre sera beaucoup moindre
qu’auparavant. Les séries se neutraliseront entre eux. Un peu comme les chaînes linéaires à
l’arrivée de la TNT. L’offre sera plus forte que la demande, dévalorisant énormément cette
première.
La série, dont beaucoup pensent qu’elle est le contenu phare de demain, s’avèrerait en fait
très rapidement obsolète, tout comme le film avant elle. Je pense en effet que ce scénario
est envisageable. La série sera peut-être moins valorisante qu’on le prédit, mais je pense
aussi que l’exclusivité d’une série dépendra énormément de sa valeur intrinsèque lui
permettant de s’imposer au-dessus des autres, de par son scénario, ses acteurs, sa
direction artistique et tout ce qui fait d’une série un succès. Je pense forcément à des séries
comme Game of Thrones de HBO ou Breaking Bad et The Walking Dead de AMC qui
capitalisent un nombre d’adeptes affolant et forcément des audiences inégalées.
Je pense donc que la valeur exclusive d’une série aura des chances d’être dévalorisée, mais
des productions majeures, émanant de producteurs reconnus, tireront leurs épingles du jeu
et leur apporteront donc un succès garanti, à l’image des exemples cités ci-dessus.
La série a donc bel et bien un avenir sur le marché à long terme. Elle est et restera un
programme à forte valeur ajoutée.
108	
Ce n’est sans compter, de toute évidence, sur le piratage qui s’attaque désormais aux
créateurs de contenus avant même la première fenêtre de diffusion. C’est un phénomène
tout nouveau pour la série, que nous avons déjà pu observer sur les films et plus
fréquemment dans la musique. Le piratage crée donc une nouvelle fenêtre dans la chaîne de
vie d’un programme, rendant parfois obsolète la phase majeure qu’est son lancement. C’est
ce que nous avons ainsi pu observer tout récemment pour la cinquième saison de la série
HBO dont les cinq premiers épisodes ont leaké sur internet quelques jours avant son
lancement officiel sur la chaîne.
Le piratage est selon moi le premier facteur de cord-cutting à travers le monde. Je suis bien
conscient que je ne vous apprends rien ici. Malgré tout, il est important de l’affirmer, car nous
aurions tendance à nous enfermer dans un monde/marché parfait dans lequel le piratage
n’existe pas. Aujourd’hui, si l’on s’intéresse aux consommateurs de moins de 25 ans (peut-
être plus) on remarque que cette génération n’a presque jamais payé pour un seul contenu
audiovisuel, hormis pour aller au cinéma bien sûr. Entre la généralisation du piratage et le
développement de l’offre légale gratuite en OTT, il ne pourrait en effet rester que peu de
place pour les offres légales payantes. Le marché fait donc face à une potentielle génération
de « cord-never ».
Car si l’effet de cord-cutting immédiat n’est pas à l’œuvre en France, en tout cas pas autant
qu’aux États-Unis, une grande menace plane sur le marché à moyen terme.
Nous rentrons définitivement dans le champ des perspectives.
2. Perspectives
2.1 Le futur de la consommation audiovisuelle chez les jeunes (Millennials et Génération Z)
Cord-cutting ou abonnement ?
En effet, lorsque les professionnels interrogés imaginent ces cord-nervers dans 10 ans,
(quand ceux-ci seront potentiellement amenés à consommer plus facilement une offre
payante légale) beaucoup pensent que cette génération ne changera pas de mode de
consommation, variant entre offres OTT légales gratuites et piratage.
Ainsi, comme l’expliquent R.Ichou et B. Chazelle, tout l’enjeu pour les acteurs traditionnels
109	
est d’aller les chercher à la source, là où ils consomment afin d’imprimer les marques
payantes/traditionnelles dans leurs habitudes de consommation.
C’est pourquoi une chaîne comme Canal+ vacille entre deux bords, à la fois sur
l’abonnement, car ce modèle a fait ces preuves et qu’il est la base de leur business, mais de
plus en plus vers l’OTT, car Canal + s’est depuis quelques années implanté sur Youtube afin
de capter cette jeune génération. La stratégie de Canal n’est pas de générer des revenus,
mais bien d’affilier leur marque à l’univers de consommation des jeunes.
Nous ne pouvons dire à ce jour si cette stratégie est viable. Nous verrons dans 5 à 10 ans si
cette jeune génération de cord-nevers ce sera finalement abonnée à un service payant,
Canal + ou Canalplay, ou autre…
Vu les usages actuels et futurs privilégiés par les millenials et la génération z, il semble que
Canalplay soit l’offre la plus apte à les séduire. C’est, je pense, ce qu’a assimilé Canalplay
en intégrant dans son offre un corner spécialement dédié aux vidéos d’un MCN (Networks
regroupant plusieurs Youtubeurs).
Malgré tout, comme je le disais au début de mon raisonnement, beaucoup pensent que ces
générations resteront des cord-nevers. C’est notamment l’avis de L.Bostral, cord-cutter de la
première heure, mais aussi de Joackim Le Goff qui voit mal cette génération payer à l’avenir
pour du contenu en OTT ou en linéaire. On peut effectivement se demander si cette
génération rentrera dans les rangs, une fois mature.
La solution pour séduire ces jeunes générations se trouve peut-être dans l’évolution des
offres de SVOD vers le gratuit. On peut facilement imaginer une offre de SVOD freemium en
partie financé par la publicité qui permettrait aux jeunes de mettre un premier pied dans
l’univers du payant, hors Youtube.
J.LeGoff fait mention du phénomène bien connu qui est que les jeunes ont tendance à faire
l’inverse de ce que font les parents en signe de protestation, alors qu’une fois atteint l’âge
mûr, ces jeunes, devenus « vieux », tendent à consommer les mêmes choses que leurs
parents auparavant. C’est en tout cas un phénomène très visible dans la consommation de
produits culturels. C’est en effet une théorie très intéressante et envisageable.
On peut donc imaginer cette jeune génération rentrer dans les rangs et commencer à se
tourner vers une offre légale et payante. Du moins, retourner sur la télévision linéaire
demandant moins d’effort que d’aller chercher son programme sur un service SVOD.
110	
Je pense personnellement que ce scénario est envisageable à moyen terme. En effet, un fan
de football ne va pas regarder infiniment ses matchs en mauvaise qualité sur internet via un
site pirate. Il devra forcément souscrire à une offre payante pour profiter pleinement de son
sport favori. Deux options s’offriront donc à lui, à date : Canal + ou Bein Sport.
Vu l’appétence des jeunes générations pour l’OTT et surtout en prenant compte du prix
élevé de l’offre Canal +, il semble que le cord-nerver se tournera à coup sûr vers Bein Sport
qui propose une offre uniquement OTT pour pas cher.
Bein Sport est actuellement menacé, car son nombre d’abonnés ne justifie pas, loin de là,
toutes les dépenses en droits que réalise la chaîne, accusant ainsi des pertes colossales.
Ceci étant dit, je pense que Bein Sport à un gros potentiel et un réel avenir à jouer sur le
marché, notamment grâce aux jeunes générations qui, je le pense, se tourneront forcément
vers cette offre. Encore faut-il que la chaîne survive jusqu’ici. Tout dépendra de la capacité
des actionnaires à maintenir un niveau d’investissement similaire durant les 5 années à
venir.
C’est sans compter sur la potentielle restructuration de l’offre Canal + qui pourrait très bien
se lancer en OTT avec une offre ciblée et personnalisée, proposant ainsi un abonnement
uniquement tourné vers le sport, vers le cinéma ou la série.
C’est selon moi tout à fait envisageable, d’autant plus que Canal + a déjà entamé cette
transition sur l’univers linéaire en créant plusieurs chaînes thématiques semblables à celles
imaginées en OTT.
De plus Canal +, forcé de s’adapter pour faire face aux nouveaux entrants, a déjà un bon
pied dans l’OTT grâce à son offre multi-screen MyCanal qui offre selon moi la meilleure
plateforme et expérience OTT à ce jour.
Tout est une question de temporalité. Comme l’affirme R.Ichou de Canal +, la transition a
démarré, mais elle sera longue. On ne peut en effet pas passé d’un univers à l’autre en un
claquement de doigts.
111	
Je pense que l’univers majoritairement linéaire dans lequel nous consommons aujourd’hui
fera petit à petit place à l’OTT. En effet, les acteurs traditionnels s’adaptent aux nouveaux
usages qui tendent vers ce dernier univers.
2.2 Le paysage audiovisuel français à moyen/long terme
Alors que beaucoup de journalistes assènent des vérités en affirmant que la télévision n’est
pas en train de mourir, mais qu’elle est déjà morte, il semble que celle-ci ait encore de beaux
jours devant elle.
Premièrement, elle reste aujourd’hui le seul mass media capable de réunir autant d’audience
autour d’un même programme, ce dont ont besoin les gros annonceurs aujourd’hui comme à
l’avenir.
Aux vues des évolutions du secteur, notamment des nouveaux entrants comme Netflix - se
concentrant sur l’offre de programmes stocks de deuxième fenêtre -, mais aussi des
télévisions payantes - qui privilégient les programmes de stocks de première fenêtre - il
semble que les chaînes de télévision linéaires gratuites comme TF1, M6 ou France 2 soient,
à l’avenir, dans l’obligation de concentrer leur offre sur des programmes évènementiels afin
de construire une offre vraiment valorisante et compétitive.
Aujourd’hui, ces chaînes ce sont très bien adaptées à l’univers OTT en créant chacune leur
plateforme de télévision de rattrapage, autrement appelée catch-up, créant ainsi une offre de
valeur inégalée d’après J.Le Goff.
Selon P.LeChevallier, la catch-up française égale de près ou de loin l’offre que propose la
SVOD aujourd’hui. Je le rejoins sur ce point à condition que l’on inclue dans cette catch-up
globale celle de Canal +, qui amène le catalogue de film nécessaire pour rivaliser contre la
SVOD. En prenant en compte uniquement le replay gratuit, il est vrai que la profondeur de
catalogue est quasiment identique à celle de Netflix.
Finalement les professionnels s’accordent en majorité pour dire que le futur de la
consommation dans les ménages se fera à moitié à la demande et en linéaire.
Je pense en effet qu’à moyen/court terme nous évoluerons vers un partage égal de la
consommation entre linéaire et à la demande. L’appétence des Français pour la catch-up est
112	
en train d’exploser sur les deux dernières années. Ce qui, couplé à la généralisation des box
ou TV connectées, les guidera doucement vers une consommation majoritairement OTT.
En effet à long terme, avec l’arrivée des jeunes générations, la consommation OTT
deviendra totalement majoritaire laissant place au linéaire uniquement pour les grands
évènements live tels que le sport ou plus quotidiennement avec des émissions et les JT.
On en revient ainsi au scénario à 10 ans envisagé par l’Idate en 2010.
Je pense personnellement que celui-ci se produira encore plus tard, lorsque la génération X,
toujours adepte de la télévision linéaire, se fera plus rare avec le temps, laissant place à une
audience largement « génération Y et Z » sur le marché.
De ce que nous avons établi précédemment, les futures box « OTT » des FAI ont de
grandes chances de prendre place dans les foyers évitant de justesse la menace de cord-
cutting déclenchée en premier lieu par la multiplication des boitiers OTT, puis dans un
deuxième temps par la généralisation des télévisions connectées. Comme je l’affirmais il y a
quelques pages, je pense que les nouvelles IPTV des FAI devenues résolument OTT
effaceront la menace des TV connectées tout simplement, car ces premières ont la
mainmise sur le réseau et sont donc plus à même de délivrer une expérience de
consommation optimale en OTT. On imagine malgré tout que l’offre pseudo-OTT des FAI
bénéficiera toujours moins d’applications que la télévision connectée, à cause des multiples
deals que les FAI honorent avec les différents acteurs du marché, notamment les content
providers. Il est difficile d’imaginer l’évolution de ces différents rapports, mais il s’avère
finalement que l’offre OTT des FAI, toujours potentiellement bridée, puissent subir malgré
tout la concurrence de l’univers totalement ouvert des TV connectées et des boitiers OTT
comme l’Apple TV, le Chromecast ou Roku.
L’IPTV a encore plus à craindre de l’arrivée d’un acteur français qui a pour ambition de
mettre un terme à l’emprise des FAI sur la diffusion de la télévision française. En effet
Molotov.TV qui se lance à la rentrée veut révolutionner la manière dont nous regardons la
télévision en proposant un accès OTT aux chaînes que l’on connaît. Une sorte de Netflix
français exploitant les programmes de la télévision linéaire pour former son catalogue. Une
stratégie cohérente quand on connaît la diversité des programmes existants et la profondeur
de catalogue finale que constituent toutes les chaînes de télévision une fois rassemblées.
Reste à savoir quels seront les chaînes partenaires au projet, ou du moins les programmes
de chaînes disponibles. Car imaginé comme un modèle à la Netflix, Molotov.TV mettra avant
tout en avant le contenu et non les « marques-chaînes » qui le diffusent. On peut très bien
113	
imaginer la plateforme s’apparenter à ce que fait l’appli TiVipédia, qui propose de consulter
tous les films, toutes les séries ou toutes les émissions diffusées à un instant T. On se rend
compte plus facilement que l’offre de télévision est très qualitative et variée. L’accès aux
contenus qui nous intéressent est bien plus facile et rapide. Tout le contraire de ce que
propose l’IPTV aujourd’hui. Molotov apparaitra donc sur nos tablettes, smartphones, et
boitiers OTT à la rentrée avec pour objectif de concurrencer les FAI. Dans un marché
dominé par l’OTT à moyen-long terme il est possible d’imaginer Molotov.tv s’imposer en
leader de la diffusion télévisuelle. Mais avec un tel succès, l’application pourrait générer des
coûts croissants en bande passante or, elle ne détient pas les infrastructures nécessaires à
la bonne gestion de celle-ci.
On pourrait imaginer les FAI refuser d’assumer les coûts de bande passante de ces
applications multiples, ce qui briderait finalement leurs offres à terme. Afin que les différentes
plateformes puissent assurer à leurs consommateurs une qualité de service optimale, celles-
ci seront alors dans l’obligation de payer les FAI.
2.3 La neutralité du Net
C’est exactement ce que l’on observe aujourd’hui aux États-Unis lorsque Netflix signe un
deal avec Comcast. Mais que devient le client d’une FAI concurrente ? Doit-il se résigner à
bénéficier d’un service de moins bonne qualité alors qu’il paye le même prix que son voisin
de chez Comcast ?
C’est tout le problème que pose la neutralité du net.
D’après Barbara Chazelle de France TV, ce problème, qui pose de vraies questions
économiques, est largement sous-estimé au niveau européen. Si demain Orange se met à
délivrer la majeure partie du service audiovisuel français il devra alors assumer les coûts de
bande-passante des différents acteurs. Si Orange décide finalement de les faire payer
comme c’est le cas aux États-Unis, il est fort possible que seule les grands groupes puissent
assumer ce genre de dépenses, laissant les plus petites structures dans l’impasse, causant
éventuellement, à terme, leurs pertes. Cela pose un réel problème pour la diversité du
paysage audiovisuel français à l’avenir.
Les acteurs de l’audiovisuel français sont menacés de toute part.
114	
2.4 Les potentielles futures menaces de l’OTT
Comme l’affirmait le cabinet Kurt Salmon ainsi que Barbara Chazelle, la convergence des
médias a pour conséquence de faire disparaître les intermédiaires, ceux qui se placent entre
les créateurs de contenus et le consommateur. Cette menace s’applique notamment sur
certaines chaînes de valeur.
HBO a récemment lancé son offre totalement OTT, HBO Now. Cette offre menace donc
l’acteur qui avant lui distribuait le service, soit les MCPTV (Multichannel Pay TV providers),
qui, dans la logique de ce raisonnement, seront à terme amenés à disparaître aux États-
Unis.
En France, le service qui distribue majoritairement les contenus HBO n’est autre qu’OCS.
Pour l’instant l’offre HBO Now n’est présente qu’aux États Unis. Mais si HBO décide de
lancer son offre OTT à l’international, lui permettant ainsi d’accéder directement au marché
Fançais, la chaîne rendrait totalement obsolète l’offre d’OCS, causant, dans le pire des cas,
la perte de la chaîne, au mieux une vague de cord-cutting.
Cependant ce scénario est envisageable uniquement si HBO considère qu’une diffusion OTT
est aussi, voire plus, rentable que la vente de ses droits de diffusion à OCS. Aujourd’hui il
semble que ce ne soit pas le cas.
À long terme, lorsque la consommation OTT sera majoritaire en France, ce scénario sera
alors envisageable. Je pense personnellement qu’il le sera.
Globalement ce sont toutes les chaînes qui sont potentiellement menacées par ce
phénomène. Comme nous l’avons dit en début de partie, celles-ci doivent privilégier la
création originale comme le fait de plus en plus Canal +. Notamment des productions
internationales, assurant une exposition mondiale au contenu et forcément des revenus plus
forts. (Tunnel pour Canal +, Marseille pour Netflix dont la diffusion n’est pas uniquement
limitée à la France)
Les chaînes linéaires seront attaquées d’une part sur les programmes de stocks, mais aussi
potentiellement sur les programmes de flux.
Illégalement c’est déjà le cas depuis longtemps via différents sites de streaming pirate,
encore plus aujourd’hui avec le détournement d’applications comme Periscope et Meerkat à
115	
travers lesquelles nous avons pu tout dernièrement streamer le fameux « match de boxe du
siècle » entre Mayweather et Pacquiao. Cet événement était pourtant extrêmement
confidentiel se réservant aux abonnés Showtime et HBO ainsi qu’aux courageux prêts à
débourser la somme de 80 $ en pay-per-view.
La concurrence illégale est donc forte, mais elle souffre de sa qualité, généralement
mauvaise.
Une offre OTT légale de sport live pourrait-elle faire son apparition sur le marché ?
Comme le précisait l’un de nos interlocuteurs, la diffusion OTT d’évènements sportifs est
déjà d’actualité, à l’image de ce que fait la NBA ou la MLS aux États-Unis. Celle-ci reste
marginale face à la consommation linéaire qui est faite de ce programme.
On observe des diffusions OTT de sports de second rang qui généralement n’ont pas de
fenêtre de diffusion en linéaire, en tout cas pas sur des chaînes nationales/historiques
Mais le lancement d’une offre sportive OTT pourrait-elle venir concurrencer une offre comme
Canal + ?
Comme nous l’avons vu, la convergence des médias élimine petit à petit les intermédiaires
entre créateurs de contenus et consommateurs.
Grâce à l’OTT on peut donc imaginer les ligues sportives diffuser elles-mêmes leurs propres
contenus. La LFP pourrait-elle alors abandonner la vente de ses droits de diffusion à Canal+
et BeIN Sport pour privilégier une diffusion directe en OTT ?
Le scénario est très peu envisageable. Tout simplement parce que les revenus que touche la
LFP grâce à la vente de ses droits, sont astronomiques (748 millions par an). De ce fait, il
faudrait un nombre d’abonnés potentiels extrêmement conséquent pour que le projet OTT
soit économiquement aussi rentable. C’est forcément loin d’être le cas, du moins à
court/moyen terme. Car dans un paysage audiovisuel dominé par l’OTT à long terme
(Omniprésence TV connectée + développement des applications et de la consommation
OTT), le nombre d’abonnés potentiels serait bien plus élevé et peut être assez conséquent
pour développer le projet. Cette offre viendrait alors concurrencer celles de BeIN (que nous
avons précédemment évaluée comme étant l’offre avec le plus de potentiel pour les années
116	
à venir) et de Canal + qui aura, elle aussi, dans le meilleur des cas lancé son offre sportive
OTT.
Il semble impossible que la LFP décide de se séparer de ses contrats de diffusion avec ces
principaux clients (Canal+, Bein). La somme récupérée est bien trop importante et tend à
augmenter depuis l’arrivée de Bein Sport, qui pousse la LFP à redistribuer les cartes et,
Canal +, à s’engager plus que jamais. Le sport représente l’offre la plus valorisante de cette
dernière et le cœur de métier de Bein. Tous deux sont donc prêts à payer le prix fort pour
acquérir certains droits de diffusion. La LFP profite de cette situation et s’enrichit d’année en
année. Pourquoi donc abandonner cette situation pour lancer sa propre chaîne OTT ?
Nous sommes aujourd’hui très loin d’un tel scénario. On peut imaginer la LFP créer sa
plateforme OTT pour la diffusion de certains matchs de Ligue 2 ou de National, en tout cas
de matchs dont la diffusion broadcast n’est pas nécessairement assurée aujourd’hui. La LFP
bénéficierait de revenus additionnels (sans compter les infrastructures à mettre en place).
La LFP a déjà tenté cet exercice en 2011 en créant la chaîne linéaire CFoot qui n’aura
finalement duré que 1 an, faute d’abonnés. Celle-ci avait pour programmation les contenus
cités plus haut. Pas de matchs de Ligue 1 donc. La chaîne souffrait d’un manque d’intérêt. Si
cette offre n’a pas fonctionné en linéaire, elle ne fonctionnera pas plus en OTT. Peut-elle
alors intégrer la Ligue 1 dans sa programmation afin de proposer une réelle offre de valeur ?
Une chose est sûre, la LFP n’a aucune raison de rompre ses contrats de diffusions actuelles.
Plusieurs scénarios sont envisageables à partir de ce point :
Scénario 1 : La LFP décide de revoir (à la baisse) ces contrats de diffusions avec ces
différents partenaires actuels pour lancer en parallèle sa propre offre d’abonnement. Son but
étant d’élargir au maximum la diffusion et la portée de la Ligue 1 et du football français.
Sachant que la Ligue 1 est l’offre de valeur principale de Canal + et de Bein, ces derniers ne
seront pas en position de négocier de grosses baisses sur les droits de diffusion. Ainsi la
LFP engendrerait de potentiels revenus additionnels grâce à son offre d’abonnement, sans
souffrir d’une baisse trop forte de ses contrats de diffusions avec ses partenaires. L’avantage
de ce scénario étant l’ouverture du football français à tous. Ne connaissant personnellement
pas bien les droits instaurés sur ce marché et les contrats qui lient les différents acteurs, je
ne peux assurer à 100 % que ce scénario est envisageable. Dans les faits et vu l’évolution
du marché OTT, je pense que ce scénario 1 n’est pas à écarter.
117	
Scénario 2 : Tout comme le scénario 1, Canal + et Bein se placent toujours sur la diffusion
des matches de Ligue 1 (voire 2). En parallèle, la LFP propose (au lieu d’une offre
d’abonnement) une offre d’achat à l’acte de ses matchs. Ce modèle est notamment exploité
aux États-Unis sur de gros évènements annuels. Il pourrait s’appliquer à une diffusion plus
hebdomadaire, permettant aux supporters/consommateurs de voir uniquement les matchs
qui les intéressent sans pour autant payer un abonnement. Le prix de l’achat à l’acte est
ensuite à déterminer selon le prix que seraient prêts à mettre les consommateurs.
Tout comme le scénario 1, ce deuxième déroulement n’est pas à écarter malgré la législation
et les contrats en places qui pourraient le freiner.
Le point faible de ces deux scénarios réside dans la faible valeur ajoutée d’une offre
exclusivement Ligue 1, Ligue 2. Tout fan de foot souhaite regarder Ligue 1, Premier League
(Bundesliga etc..) et surtout Ligue des Champions. Il n’est pas sûr qu’un fan envisage de
s’abonner uniquement à l’offre de la LFP. Même si l’offre de la LFP inclut des matchs de
Ligue 1 à forte valeur ajoutée, celle-ci serait tout de même incomplète pour satisfaire ces
clients. C’est en tout cas le réel point faible du premier scénario. L’offre du second scénario
pourrait se positionner comme une offre additionnelle à celle déjà en place (Canal +, Bein).
Scénario 3 : Dans un marché qui vit une désintermédiation croissante, quel serait le scénario
final à long terme ? Si on explore l’évolution du phénomène, on peut alors imaginer un club
comme le PSG qui propose un abonnement (ou l’achat à l’acte) OTT pour le visionnage de
tous ces matchs. Ce genre d’offre ciblerait les fans d’un club en particulier, et ils sont
nombreux. Le client pourrait alors suivre son club préféré dans toutes les compétitions. Cette
offre pourrait ainsi se suffire. Pour les plus fans, elle s’additionnerait à celle de Bein ou Canal
qui leur permet de voir les championnats étrangers, indispensables pour certains.
Afin d’établir des scénarios cohérents, il aurait été d’usage de réaliser une étude quantitative
auprès des consommateurs pour connaître leurs attentes et leurs avis sur ces potentielles
évolutions. Me plaçant moi même comme un consommateur invétéré de football, j’ai donc
établi des scénarios et des offres qui répondent à mes besoins tout en prenant en compte à
un certain degré la faisabilité côté diffuseurs.
118	
Et si Netflix se lançait dans le live ?
P.LeChevallier nous a appris qu’un tel projet était déjà en cours afin de créer un Talk-Show
de deuxième partie de soirée.
Une première expérimentation pour Netflix, qui pourrait donc être amenée à réitérer
l’expérience jusqu’à, pourquoi pas, se lancer définitivement dans le live. Le service formerait
ainsi à lui-même une vraie plateforme tournante de l’audiovisuel. Un tel service aurait alors
une puissance disruptive majeure sur les acteurs traditionnels, notamment les chaines
linéaires qui voyaient dans le programme de flux « évènementiel » leur atout majeur face aux
nouveaux entrants. Comme l’affirme L.Bostral : « si Netflix se met au live, ils ne seront pas
loin de la vérité… »
Cette force disruptive serait encore plus dévastatrice si Netflix se lance dans la diffusion
d’évènements sportifs majeurs, s’ajoutant au marché déjà bien compétitif partagé entre Bein
et Canal (et potentiellement l’offre de la LFP).
Cependant, pas sûr que les sports populaires français soient un positionnement majeur pour
Netlifx.
La plateforme pourrait être friande d’évènements sportifs mondiaux comme une coupe du
monde. Mais cela semble également très peu envisageable aujourd’hui. Premièrement, car
de tels événements doivent obligatoirement avoir une fenêtre de diffusion gratuite.
Deuxièmement, si cela était possible juridiquement, la diffusion serait techniquement
quasiment impossible à cause de la gourmandise en bande passante de tels évènements.
Afin de rentabiliser les potentiels achats en droits de diffusion, Netflix pourrait également se
lancer dans le pay-per-view pour de gros évènements.
Comme l’a dit le Chief Content Officer de Netflix, Ted Sarandos concernant le live
streaming de sports : « I will never say never, but I would say that where we sit today I don’
t think the on-demandness to sports is enough of an addition to the value proposition to
change » … « Not to say that it wouldn’t someday down the road someday make sense ».
Ainsi si la consommation livestream d’événements sportifs se développe chez les
internautes/téléspectateurs, l’arrivée de Netflix sur ce marché ne serait pas une surprise. À
119	
en croire les évolutions des modes de consommation de ces dernières années, il semble
que nous soyons sur la bonne voie.
En attendant l’arrivée de Netflix sur le Live, le modèle de consommation le plus
envisageable, sur le marché américain, réside pour l’instant dans la combinaison d’offres
OTT comme Netflix (SVOD) + Sling TV (Live TV). Les derniers chiffres de ce marché
démontrent que l’appétence pour le streaming est de plus en plus forte chez les
téléspectateurs américains.
Le renouvellement de l’Apple TV à la rentrée prochaine risque de positionner la firme de
Cupertino comme un leader du marché, proposant un modèle embarquant Live TV et
consommation à la demande.
Un modèle que proposent également les distributeurs comme Verizon afin de récupérer
leurs cord-cutters. Ce modèle de télévision que l’on appelle « custom TV » permet au
consommateur de créer sa propre expérience TV en choisissant lui même les différentes
chaînes auxquelles ils souhaitent s’abonner, évitant ainsi de payer 100$ pour ne finalement
regarder que 5 chaînes sur 200.
Comme nous l’aurons vu à travers ce mémoire, la menace des nouveaux entrants est réelle
tant que les acteurs traditionnels ne s’adaptent pas. C’est cette adaptation qui permet
aujourd’hui à Verizon ou HBO (d’envisager) de récupérer certains cord-cutters.
IPTV vs Box OTT/connectées
En France les FAI sont bousculés par les clés et box connectés de plus en plus populaires,
proposant une expérience et un univers plus évolués et plaisants aux consommateurs. Elles
offrent bien plus de contenus grâce aux multiples applications disponibles (TV linéaire
(Mycanal, bientôt Molotov) + contenus délinéarisé type Netflix, YouTube, Twitch etc.) et ce,
dans un univers soigné, fluide et personnalisé. Ce qui est loin d’être le cas des box de FAI
connue aujourd’hui.
Aujourd’hui mode d’accès principal à la télévision, l’IPTV est dans un futur proche la cible du
phénomène de cord-cutting. Si le marché poursuit son évolution vers l’OTT, l’IPTV est vouée
à disparaître pour faire place aux clés/TV connectées et aux applications, comme
l’entrevoyait ainsi Reed Hastings. L’OTT propose en effet une offre complète qui combine
contenu linéaire et délinéarisé via ses multiples applications. La télévision linéaire va
120	
notamment être révolutionnée par Molotov via son application Netflix-like exploitant les
contenus linéaires de la télévision. La manière dont nous consommons la télévision est
totalement revue, mettant le contenu au cœur de la recherche, et non plus les chaînes,
permettant ainsi au téléspectateur d’avoir une vision large de la programmation et d’accéder
plus facilement au contenu désiré.
Les applications OTT ont pris le pas sur les acteurs traditionnels à force d’innover. Elles
répondent au mieux aux attentes des consommateurs et concurrencent directement l’offre
des FAI.
Ces dernières cherchent donc à rattraper leur retard en introduisant un univers plus ouvert
dans leur box. La dernière box 4K de Free inclue ainsi l’Android TV. Cependant c’est une
Android TV bridée (certaines applications absentes) qui ne ravira pas les consommateurs les
plus gourmands. La Guerre IPTV contre Box OTT est lancée. L’IPTV à l’avantage naturel
d’être le produit des fournisseurs d’accès internet, ainsi elle bénéficiera des infrastructures
nécessaires à son bon fonctionnement (réseau / bande passante) contrairement aux acteurs
OTT. C’est peut-être ici le nerf de la guerre, car cette problématique pourrait contraindre ces
derniers à assurer des coûts supplémentaires, à destination des FAI. Il sera intéressant de
voir les relations (ententes et conflits) entre ces deux acteurs à l’avenir. Chacun bénéficie
d’avantages par rapport à l’autre, l’IPTV profite des infrastructures nécessaires et l’OTT de
sa force d’innovation. Bilan, si l’IPTV s’adapte à l’OTT et innove dans l’usage, il se peut que
les FAI entretiennent leur suprématie sur le marché.
L’arrivée de nouveaux entrants aura également et notamment vu naître un duel féroce entre
Pay-Tv et SVOD. Tout l’enjeu de se mémoire était de connaître l’impact, en France, de ce
dernier sur le premier. Je pense et j’espère avoir abordé la majorité des sujets et explorer les
hypothèses les plus cohérentes durant cette troisième partie.
Concernant ce duel Pay-TV et SVOD, avec un peu de recul, je pense que nous évoluons
vers un marché dans lequel les plus aisés continueront à profiter de contenus premiums via,
notamment, la Pay-TV tandis que la « masse populaire » se contentera du marché
secondaire, représenté par la SVOD. Le piratage représentant dans tout ça, une sorte de
Robin des Bois des temps modernes, éternel, permettant à tous de profiter gratuitement de
contenus premiums.

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Mémoire de recherche - L’impact des offres Over-The-Top (OTT) sur le marché de la télévision payante

  • 1. 1
  • 2. 2 Mémoire de recherche de fin d’études Sujet : L’impact des offres Over-The-Top (OTT) sur la télévision linéaire et plus particulièrement sur le marché de la télévision payante. Problématique : Le développement des offres OTT en France peut-il se traduire par un phénomène de cord-cutting (désabonnement aux Pay-TV actuelles) comme observé aux États-Unis ? Quel phénomène est réellement à l’œuvre ? AUTEUR Carraz Paul PROFESSEUR REFERENT Fronteau Alain Date de parution 5 mai 2015
  • 3. 3
  • 4. 0 SOMMAIRE Introduction………………………………………………………………………………… 2 Partie 1 : Revue de littérature 1. Convergence des médias ................................................................................................ 4 1.1 Internet et les nouvelles technologies, un environnement propice au développement de l’Over-The-Top.............................................................................. 4 1.1.1 Internet, un nouveau média ................................................................................................................................ 4 1.1.2 L’ère du « Always On » ......................................................................................................................................... 9 1.2 L’audiovisuel, un marché en mutation .............................................................. 12 1.2.1 La télévision linéaire ............................................................................................................................................ 12 1.2.2 Vers une consommation délinéarisée ............................................................................................................ 15 1.2.3 De nouveaux entrants : les services délinéarisés, une menace pour la (PAY)-TV ...................... 25 2. Marché américain et Marché français, deux modèles bien distincts .............................. 30 1.1 Marché américain, La maturité de la VoD américaine et la puissance de Netflix ................................................................................................................................... 30 1.2 Marché français, le succès de l’IPTV .................................................................. 39 3. L’analyse du bouleversement OTT par les auteurs, experts et cabinets ...................... 46 Partie 2 : Dispositif empirique 1. Méthodologie de recherche ......................................................................................... 61 1.1 Objectifs de l’enquête ......................................................................................... 61 1.2 Thèmes de l’enquête........................................................................................... 61 1.3 Type d’entretien................................................................................................... 62 1.4 Guide d’entretien ................................................................................................. 63 2. Présentation des professionnels interviewés ............................................................... 66 Barbara Chazelle – France Télévisions Rafael Ichou – Canal + Joackim Le Goff – M6 Web Valery Bonneau – Globecast Pascal LeChevallier – What’s Hot Media / ZDNet
  • 5. 1 Ludovic Bostral – Afrostream / Sebastien Faure – Molotov.tv Bruno Da Costa Oliveira – NextRadioTV Bruno Renkin – RTL New Media 3. Analyse des entretiens ................................................................................................. 70 3.1 Le développement de l’OTT ............................................................................... 70 3.2 Le modèle de streaming par abonnement........................................................... 73 3.3 L’environnement du marché français et sa potentielle évolution (Chronologie des médias)............................................................................................................... 76 3.4 Les acteurs menacés par les nouveaux entrants................................................ 79 3.5 L’adaptation des acteurs traditionnels................................................................. 86 3.5.1 La potentielle menace des ligues sportives ................................................................................................ 86 3.5.2 L’adaptation des acteurs traditionnels (Suite) .................................................................................... 88 3.6 Les Millennials..................................................................................................... 89 3.7 Le Cord-cutting en France .................................................................................. 92 Partie 3 : Mise en tension de la problématique 1. Constats ...................................................................................................................... 99 1.1 La SVOD, une force disruptive mineure en France ............................................ 99 1.2 Quel Cord-cutting à l’œuvre en France aujourd’hui .......................................... 100 1.3 Les bouleversements de la SVOD et de l’OTT ................................................. 104 2. Perspectives .............................................................................................................. 108 2.1 Le futur de la consommation audiovisuelle chez les jeunes générations ......... 108 2.2 Le paysage audiovisuel français à moyen/long terme ...................................... 111 2.3 La neutralité du Net .......................................................................................... 113 2.4 Les potentielles futures menaces de l’OTT ....................................................... 114 Pay-TV et OTT Sport et OTT IPTV vs Box OTT Conclusion 121 Bibliographie………………………………………………………………………………124
  • 6. 2 Introduction « Dans les prochaines décennies et partout dans le monde, la télévision sur Internet remplacera la télévision linéaire, et les applications remplaceront les chaînes. Les télécommandes disparaîtront et les écrans proliféreront.» Telle est la vision de Reed Hastings, PDG de Netflix, premier service de vidéo à la demande du monde, vu comme le plus grand danger issu du web pour les acteurs de la télévision traditionnelle. En effet ici deux mondes s’opposent : celui du linéaire proposé depuis la naissance de la télévision par les chaînes broadcast ; puis celui du non-linéaire, du délinéarisé, appartenant au monde du web et mettant en avant une expérience utilisateur inégalée couplée à des contenus de plus en plus qualitatifs et, ce, accessible à n’importe quel moment, n’importe où… De quoi effrayer les acteurs traditionnels de la télévision, notamment de la télévision payante qui voit en Netflix, pure-player emblématique du marché de la vidéo à la demande, une concurrence sérieuse, féroce et pratiquement indomptable, car tout droit sortie du web. En effet nous observons aujourd’hui de gros bouleversements sur le marché américain suite au développement de Netflix. Cette plateforme est à l’origine d’une vague de désabonnement massif auprès des câblodistributeurs, les téléspectateurs se tournant vers une offre vidéo bien plus accessible, personnalisée et adaptée aux nouveaux modes de consommation. Cet effet de désabonnement est ce que l’on appelle le « cord-cutting » Constatant l’arrivée de Netflix en France, il est très intéressant et nécessaire d’évaluer le potentiel impact d’un tel service sur le paysage audiovisuel français. Ce mémoire a donc pour but d’identifier l’impact actuel de ces pure-players dits « over-the- top », passant au-dessus du réseau managé des opérateurs télécoms, sur la télévision linéaire et plus précisément sur la télévision payante. Bien que les nouveaux entrants, appartenant à l’univers dit « Over-the-top », menacent globalement toute la télévision linéaire, il semble que l’impact soit encore plus disruptif sur la télévision payante, sous toutes ses formes.
  • 7. 3 À travers notre première grande partie, qui constituera notre revue de littérature, nous mettrons tout d’abord en évidence dans une première sous-partie ce qui a provoqué la naissance et l’émergence de « l’over-the-top ». Nous nous intéresserons ensuite à l’offre de télévision et à son évolution dans un contexte de convergence des médias pour finalement nous intéresser aux nouveaux entrants sur le marché. Dans une deuxième sous-partie, nous nous intéresserons aux marchés français et américains pour en faire ressortir les divergences et les similitudes. Ce qui nous permettra déjà d’établir un constat sur les grandes différences entre les deux marchés. Dans une troisième sous-partie, nous nous intéresserons aux différentes réponses apportées auparavant à notre sujet par différents experts, professeurs/chercheurs et cabinet que nous mettrons en contraste notamment aux témoignages de professionnels interviewés dans le cadre de notre étude qualitative. L’analyse de ce dispositif empirique donnera lieu à notre deuxième grande partie. La troisième et dernière grande partie me permettra de confronter ma revue de littérature à ce dispositif empirique afin de tirer des réponses claires sur la problématique choisie. Nous essayerons finalement d’aller plus loin dans notre réflexion afin d’établir une vision globale du futur paysage audiovisuel français et mondial.
  • 8. EXTRAIT Partie 3 : Mise en tension de la problématique
  • 9. 98 Partie 3 : Mise en tension de la problématique Nous avons introduit ce mémoire par une citation, celle de Reed Hastings, PDG de Netflix qui affirmait, avant de lancer sa plateforme en France, que dans les prochaines décennies la télévision sur internet et les applications remplaceraient les chaînes de télévision linéaire. Je suis bien conscient que Reed Hastings, en proclamant ce genre de faits, prêche pour sa paroisse. En assénant de telles « vérités », il veut avant tout persuader les consommateurs que sa vérité est également la leur. Après avoir établi ma revue de littérature et mon dispositif, il est temps pour moi de dire que le marché dans lequel nous évoluons aujourd’hui se rapproche en effet de plus en plus de cette vision. Cependant nous aurons vu à travers nos deux premières parties que certains acteurs traditionnels du marché sont malgré tout voués à survivre dans un univers majoritairement dominé par internet et l’OTT. Je vais dans cette troisième et dernière partie mettre en évidence les convergences et les divergences entre ma revue de littérature et mon dispositif empirique, ce qui me permettra d’établir un constat, notamment sur la position de la SVOD et de l’OTT sur le marché français. De ce constat, je m’engagerai alors dans l’élaboration de différentes perspectives et hypothèses quant à l’avenir de ce marché français, mais aussi mondial. Je m’inspirerai des conclusions établies avant moi par les différents chercheurs et professionnels, que j’aurai au préalable confrontées, pour en exploiter finalement les plus pertinentes.
  • 10. 99 1. Constats 1.1 La SVOD, une force disruptive mineure en France Je remarque tout d’abord que les convergences entre ma première et ma deuxième partie sont nombreuses. Premièrement, Florence Le Borgne-Bachschmidt de l’Idate et P.LeChevallier s’accordent pour dire que l’offre SVOD est et restera marginale à court/moyen terme sur le marché français. Avant l’arrivée de Netflix en France, beaucoup imaginait que la plateforme provoquerait un séisme sur le marché à son arrivée. En effet les acteurs traditionnels avaient de quoi s’inquiéter en observant le marché américain totalement bousculé par le développement de Netflix. Le marché américain connaît en effet un phénomène de cord-cutting de masse compte tenu des prix affolants des acteurs traditionnels du câble - facturant leurs services TV à plus de 80 dollars - qui doivent faire face aux offres low-cost mais de très bonnes qualités de la SVOD. Ces offres ont également l’avantage de ne proposer aucune publicité contrairement à la télévision linéaire dans laquelle la publicité vient sans cesse s’imposer entre et pendant les programmes, rendant la consommation très pénible pour les consommateurs. Tant de défauts qui ont donc amené les consommateurs à se tourner vers la SVOD (et l’OTT) et à délaisser la télévision linéaire payante. En apprenant à l’époque le lancement imminent de Netflix en France, on pouvait alors légitimement se questionner sur l’impact potentiel de l’arrivée d’un tel acteur sur le marché français. Notre première partie, à travers laquelle je me suis intéressé à la structure du marché français, m’a permis d’établir de premiers éléments de réponses que sont venus confirmer les témoignages de professionnels dans mon étude qualitative. En effet, le marché français est bien différent de celui des États-Unis. Nous ne connaissons pas en France de « TV providers » aussi coûteuse que la TV par câble des E-U. De plus la publicité n’est pas aussi intempestive que chez nos voisins transatlantiques. Nous venons ainsi d’écarter, en même pas deux lignes, une parties des principales raisons
  • 11. 100 de la réussite de la SVOD et du développement du cord-cutting aux E-U. On peut en plus ajouter le fait que la télévision gratuite soit très présente et très forte, sans oublier également l’exception culturelle française qui veut que la majorité des Français privilégient les programmes francophones, comme l’affirme P.LeChevallier. De ce fait, l’offre de Netflix, concentrée sur les productions hollywoodiennes, pourrait paraitre obsolète aux yeux de la plupart des consommateurs français, d’autant plus que la chronologie des médias, qui régit le marché de la diffusion audiovisuelle en France, interdit la diffusion avant 36 mois des films sortis en salles. L’offre de Netflix se résume donc en France à un catalogue majoritairement tourné vers les productions américaines (films et séries) et en grande partie obsolètes à cause de la chronologie des médias et surtout du piratage. L’offre de la SVOD paraît tout de suite bien moins attrayante qu’elle ne l’était dans notre imaginaire de consommateur avide de « binge-watching »… Netflix n’a en fait clairement pas, en France, la puissance disruptive dont elle a fait preuve aux États-Unis. Ceci est un premier constat qui m’amène à affirmer que le cord-cutting sera bien moins puissant qu’aux États-Unis. 1.2 Quel cord-cutting à l’œuvre en France actuellement ? À ce stade, je parle de cord-cutting pure, je pense donc à une personne qui a décidé de se désabonner à son offre de télévision linéaire pour souscrire en particulier à une offre OTT. Je m’intéresserai plus tard à l’autre forme de cord-cutting qu’est le « cord-never » et qui n’a actuellement pas sa place en France au moment ou je vous parle. Les premières menaces sont les chaînes thématiques comme l’ont affirmé une bonne partie des professionnels interviewés pour ce mémoire. Les chaînes thématiques sont vouées à disparaître de l’offre linéaire, car elles font face notamment à une offre légale comme YouTube qui propose gratuitement l’accès un nombre de contenus inimaginables et de meilleure qualité que les quelques programmes multidiffusés des chaines thématiques. Par exemple une chaîne comme Maison + doit faire face à une multitude de « tutos » disponible gratuitement sur la plateforme de Google. Économiquement ce type de chaînes ne peut survivre sur le linéaire. D’autant plus qu’elles appartiennent généralement à une offre de bouquet de chaînes proposées par les distributeurs, comme l’IPTV (Box Numericable, Freebox etc) ou CanalSat, en supplément de l’offre standard. Cette course à l’offre multichaîne la plus exhaustive s’est avérée pertinente il y a quelques années, mais elle est aujourd’hui dépassée. En effet, les ménages ont rapidement constaté que leur consommation linéaire s’établissait uniquement sur une dizaine, voire une quinzaine de
  • 12. 101 chaînes. Les offres « premium » « multichaîne » n’ont désormais plus la côte. Ajoutez à cela une conjoncture économique défavorable et un pouvoir d’achat des ménages globalement en baisse, ceux-ci ce sont alors tournés vers des offres standards, sans options, voire des offres low-cost à l’image de ce que nous observons sur le marché de la téléphonie mobile. Les acteurs étant les mêmes (Orange, Bouygues), le modèle de l’offre low-cost s’est aussi appliqué à la consommation audiovisuelle. De plus, comme je l’ai dit précédemment, les offres OTT gratuites ce sont développées, initiant ou confirmant (cela dépend des cas) l’acte de cord-cutting envers les bouquets de chaînes thématiques, parmi lesquels j’intègre également CanalSat. Avec du recul, nous pouvons clairement associer ce phénomène à un effet de cord-shaving plutôt qu’au cord-cutting, car on observe un téléspectateur réduire son offre actuelle, sans pour autant se désabonner, tout en profitant à côté d’une offre OTT, gratuite ou payante. Sachant que nous avons identifié, en France, YouTube comme principal concurrent aux chaînes thématiques, on peut affirmer donc que ces « cord-shavers » se sont plus tournés vers une offre OTT gratuite. Nous citons YouTube, mais aujourd’hui beaucoup d’offres OTT payantes, mais peu chères font leurs apparitions. Les deuxièmes acteurs menacés par l’arrivée de nouveaux entrants sont les chaînes de télévision à péage que je qualifierais de « premium », car contrairement aux chaînes thématiques, elles proposent des contenus premiums (films et séries) de première fenêtre. Je pense tout d’abord à Canal +. Comme l’affirme R.Ichou, la chaîne à beaucoup à craindre des nouveaux entrants. En effet Canal+ propose une offre premium incluant séries, films et évènements sportifs pour ne citer que les principaux programmes. La chaîne compile donc programmes de stocks « premium », qui la différencie des chaînes gratuites, et programmes de flux, premium également, comme la diffusion de la Ligue des Champions ou plus simplement des principaux matchs de Ligue 1. Cette combinaison de programmes est l’une des plus valorisantes du marché. Mais cette offre a bien sûr un prix qui est également le plus fort du marché. Ainsi, face à l’arrivée d’offres « low-cost » comme la SVOD - qui somme toute offre un service de relativement bonne qualité en terme de contenus et surtout d’expérience - une chaîne premium comme Canal + peut souffrir du désintérêt de certains abonnés pour des raisons économiques. Comme l’expliquait P.LeChevallier, un service comme Netflix ne pourra jamais empiéter sur
  • 13. 102 une chaîne comme Canal, car la chaîne concentre son offre sur la diffusion de films et séries de première fenêtre, ainsi que d’évènements sportifs en live. Deux axes sur lesquels Netflix ne peut, à date, pas se positionner. Ainsi selon P.LeChevallier, Netflix ne provoque aucune menace directe et importante pour déclencher un effet de cord-cutting. Malgré tout, ces offres - bien que différentes sur beaucoup d’aspects - se positionnent sur un même marché, celui de la série et du film. De ce fait, une concurrence est tout simplement évidente entre les deux offres. L’une se veut premium et l’autre low-cost. Si, pour des raisons de budget, un abonné de Canal + vient à se séparer de son abonnement, celui-ci aura tout intérêt à se rattacher à une offre comme Netflix pour profiter malgré tout d’une offre de contenus exhaustive et valorisante de par son expérience utilisateur. Je pense bien sûr à l’outil de recommandation de Netflix qui représente un atout majeur de son offre. De plus, si le consommateur a une appétence particulière pour les contenus premium, celui-ci peut aisément se tourner vers l’offre illégale (qui selon moi ne peut rivaliser avec l’expérience de consommation qu’offre Netflix). L’alliance : offre légale Netflix + offre illégale (pour la fraicheur) me semble tout à fait pertinente, en terme de choix et de faisabilité pour un consommateur. (Je n’affirme en aucun cas que l’offre illégale est une solution) Je pense donc pour toutes ces raisons que le cord-cutting est, en ce moment probablement à l’œuvre en France et que sa première victime est où sera Canal +. Autant que Canal+, une offre comme OCS, la chaîne cinéma et séries d’Orange, a de quoi s’inquiéter du développement de l’offre SVOD en France. Pour les mêmes raisons citées précédemment afin de démontrer la concurrence entre Canal et ce nouvel entrant, OCS est sous la menace d’une vague de désabonnement. Encore plus que Canal+, car l’offre d’Orange ne se positionne pas sur le sport. Malgré tout, l’offre d’OCS se situe sur la même tranche de prix d’un Netflix et n’a donc pas à souffrir de cette concurrence low-cost exposée pour le cas Canal +. La personne qui se désabonnera d’OCS pour profiter finalement d’une offre de SVOD, fera avant tout le choix de l’exhaustivité et surtout d’un mode de consommation bien plus actuelle, soit multi-device et personnalisé. Faut-il rappeler que l’offre est d’ores et déjà quelque peu obsolète sachant qu’une partie de ses abonnés ont été recrutés grâce aux offres promotionnelles d’Orange sur leurs différentes offres. OCS a-t-elle une réelle valeur ajoutée ? Il est facile de penser que les abonnés réels sont uniquement des consommateurs qui ne pratiquent pas le piratage. Mais sont-ils nombreux aujourd’hui ? C’est beaucoup moins sûr.
  • 14. 103 Pour récapituler, les acteurs menacés de cord-cutting sont aujourd’hui les pay-tv en tout genre et j’englobe également dans « pay-tv » l’offre de télévision des FAI, l’IPTV. En effet l’offre de l’IPTV, bien qu’elle soit complète (live + consommation à la demande), ne propose pas une expérience utilisateur aboutie, de par son interface souvent trop compliquée et sa lenteur (défaut que « j’expérimente » moi même à travers l’offre de Numéricable) De plus l’IPTV, naturellement TV par Internet, propose l’accès à une offre d’applications limité. C’est à travers ce service dit « managé » qu’on arrive à distinguer finalement OTT et IPTV. L’OTT offre lui un accès ouvert à internet. Si les box de FAI sont aujourd’hui menacés par le cord-cutting c’est parce que l’offre de box multimédias OTT se développe à grande vitesse. On a vu apparaître cette dernière année la Chromecast de Google qui a également lancé tout dernièrement son Nexus Player. Chetrit & Druel et L.Bostral s’accordent à dire que les box de FAI sont menacés, car les boitiers OTT proposent une expérience utilisateur bien supérieure et surtout un accès plus ouvert à internet. Cependant ce genre de boitiers OTT s’adresse, pour l’instant, à une certaine cible de consommateur, les early adopters (et petit à petit l’early majority) qui représentent une trop infime partie du marché. C’est par exemple le cas de Ludovic Bostral qui avoue être un early adopter adepte du cord-cutting. Cet effet de cord-cutting est donc bien présent, mais reste pour l’instant très faible aux vues de la part infime d’early adopters – cord-cutters sur le marché. Cependant, nous l’avons vu à travers la théorie de G.A Moore dans notre première partie, ce sont ces mêmes early adopters qui permettront ou non la démocratisation de ces nouvelles technologies (boitiers OTT) en franchissant ou pas la phase critique de « Chasm ». Mais comme l’envisage Barbara Chazelle, la démocratisation de l’OTT passera par la télévision connectée. En effet, comme nous l’avons vu dans notre première partie, la télévision connectée est de plus en plus présente dans les ménages français. Le principe de cette télévision étant de proposer un univers OTT, je m’accorde le droit d’affirmer que la télévision connectée a un rôle important dans la démocratisation de la consommation OTT. Elle permettra le développement massif d’applications sur ces plateformes et forcément l’augmentation d’abonnements à des offres tels que Netflix. Ces conclusions sont, certes, un
  • 15. 104 peu hâtives, mais de nature, l’ouverture du marché à l’OTT incitera forcément à la consommation d’applications et d’offres comme Netflix. Elles seront plus abordables (techniquement) et plus démocratisées. Si je rentre dans les perspectives, je peux aussi affirmer, et ces déjà le cas, que les box de FAI s’adapteront en intégrant cet univers OTT qui leur fait aujourd’hui défaut. Comme l’a fait dernièrement Free avec sa Freebox 4K intégrant l’interface Android TV résolument OTT. L’IPTV des FAI répondra finalement aux attentes des consommateurs en leur proposant une expérience utilisateur fluide et un accès internet bien moins bridé, évitant ainsi les potentiels actes de cord-cutting. Malgré tout, si la télévision connectée est amenée à se développer comme nous l’avons vu, celle-ci représentera un nouveau concurrent de taille pour les box de FAI. Je peux d’ores et déjà affirmer que les nouvelles IPTV « hybrides» ont de grandes chances de remporter ce duel, car elles sont le produit des FAI qui contrôlent le réseau, la bande passante. On imagine donc que l’expérience utilisateur et la fluidité du service y sera bien meilleure en cas de streaming à forte audience. Les FAI détiennent les infrastructures nécessaires au bon fonctionnement de l’OTT, au contraire des plateformes comme Netflix etc. Mais revenons à la situation présente du marché. 1.3 Les bouleversements de la SVOD et de l’OTT Nous l’avons vu, il semble que Netflix soit bien armé pour s’implanter sérieusement sur le marché français. Comme l’avait très bien prédit le cabinet Kurt Salmon, la stratégie adoptée par les acteurs de la SVOD (américains) est celle de la production de contenus exclusifs afin de remonter notamment la chronologie des médias et de proposer un contenu frais, ce qui leur faisait défaut jusqu’à présent. On a ainsi pu observer Netflix produire plusieurs séries à succès, sur les dernières années, telles que House Of Cards, Orange is The New Black ou plus récemment Daredevil en partenariat avec Marvel. Comme l’indique L.Bostral, le nerf de la guerre est en effet dans la série et non pas dans le cinéma. Les acteurs de la SVOD ne se soucient plus vraiment de cette chronologie des médias qu’ils arrivent à contourner facilement avec une stratégie offensive tournée vers la création de contenus exclusifs, qui leur permet de rafraichir leurs catalogues.
  • 16. 105 Pour J.Le Goff, la future création originale de Netflix, « Marseille » destiné au marché français pourrait être un « game changer » qui bousculerait alors le marché, provoquant un intérêt de masse pour Netflix de la part des français, notamment quand on connait leur appétence pour les séries françaises. Cette réussite dépendra avant tout de la qualité du contenu. Chetrit et Druel envisagent également le développement de la SVOD en France grâce à cette stratégie que pourraient assimiler les acteurs français de la VOD. Cependant cela est peu envisageable aujourd’hui. En effet les acteurs de la SVOD française ne sont pas assez développés pour se lancer dans le financement de contenus. Bien sur Canal + s’adapte et imite les acteurs américains sur ce plan, mais cette stratégie n’impact pas son offre de SVOD, Canalplay, qui bénéficie au mieux des séries exclusives du groupe qu’en deuxième fenêtre diffusion. Pas de quoi séduire de nouveaux abonnés vu que le piratage aura déjà balayé la fraicheur du contenu. De plus, selon J.Le Goff, pour se développer et réussir dans un univers OTT, l’acteur et l’offre doivent être internationaux afin de maximiser leurs chances d’implantation dans les pays étrangers et ainsi générer des revenus supérieurs. Contrairement à ce que pensent Chetrit et Druel, nous avons peu de chances, si ce n’est à long terme, de voir les acteurs français de la SVOD créer leurs propres contenus exclusifs. Si cela se fait, c’est à petite échelle à l’image de la web série FRAT de Canalplay. C’est un début. Cette stratégie est en tout cas appliquée par Netflix qui répond à ces différents critères de réussite. C’est pourquoi P.LeChevallier et Florence Le Borgne-Bachschmidt s’accordent à dire que malgré sa présence marginale, la SVOD devrait à plus long terme avoir un réel impact sur le marché, assez pour le faire évoluer. Globalement c’est l’OTT, représenté par YouTube, qui a changé les modes de consommation audiovisuelle, amenant les téléspectateurs, notamment les plus jeunes, les millennials, à se détourner de l’écran principal du foyer pour se concentrer sur leur ordinateur portable, tablette et de plus en plus leur Smartphone. Cette consommation croissante sur mobile modifie en profondeur la nature des contenus produits par les « content providers ». Chetrit & Druel et R.Ichou de Canal + se rejoignent sur ce point : la création de programmes tend en partie vers le programme court, celui qui est de plus en plus consommé par les jeunes générations sur leurs différents mobiles, notamment grâce à la généralisation de la 4G depuis plus d’un an. Ces programmes courts que l’on appelle aussi « shortforms »
  • 17. 106 rentrent dans une dynamique de consommation en « snacking ». C’est-à-dire que le contenu est consommé rapidement de manière à faire passer le temps dans les transports ou à accompagner la personne lors de sa pause-déjeuner. Cette dynamique est d’autant plus présente chez les jeunes, car cette génération est de plus en plus difficile à captiver pour les chaînes/marques. À l’opposé le format long est également amené à évoluer comme l’indiquent Chetrit & Druel. Notamment celui qui est proposé par les chaînes de télévision pour réunir le plus d’audience possible. Il se trouve que les contenus longs les plus appropriés pour ça sont les programmes évènementiels ou live ; d’un côté l’Idate affirmait en 2010 que dans les 10 ans à venir, la consommation à la demande dominerait le marché et que seuls les grands évènements live seraient diffusés en linéaire, de l’autre côté les professionnels, plus mesurés, affirment que la télévision a encore de bons arguments pour mieux résister, concédant tout de même que, dans l’obligation de se spécialiser, les chaînes broadcasts se concentrent en effet dans la diffusion de contenus « premiums ». Et j’entends par « premium », évènements live et contenus originaux, tant dans le fond que dans la forme. C’est ce qu’imagine Barbara Chazelle de France TV qui voit une évolution d’écriture qui tend vers le transmedia afin que le contenu ait notamment une dimension « cross-device », quasi obligatoire à l’heure de la « TV everywhere » / du multi-écran. Je suis personnellement persuadé que les programmes de stock, notamment les films ont de moins en moins leur place sur les chaînes linéaires de télévision. Compte tenu du piratage de masse que nous connaissons aujourd’hui, les films deviennent rapidement obsolètes et ne peuvent donc plus prétendre générer des audiences suffisantes à la pérennité des chaînes gratuites comme payantes. D’un côté, la chaîne gratuite qui vit sur la publicité amasse moins d’audience donc forcément moins de revenus publicitaires, de l’autre côté la chaîne payante ne propose plus de contenus premiums et voit son argumentaire de vente ou de rétention de l’abonné dévalorisé. Malgré tout, je pense que la télévision offre et offrira toujours cette dimension évènementielle, que la consommation à la demande (piratage inclus) n’a pas et qui nous pousse à être à l’heure devant notre télévision pour regarder un film que nous aurons pourtant déjà vu 5 fois. Cette excitation que procure le (semi) direct est commune à tous les téléspectateurs et me permet donc de penser que malgré l’obsolescence croissante provoquée par le piratage, la télévision et le cinéma sur la télévision ont encore une légitimité certaine. La passivité qu’offre la télévision traditionnelle plait et plaira toujours à une partie des consommateurs/téléspectateurs.
  • 18. 107 On observe encore aujourd’hui de grosses audiences en prime time le dimanche soir sur du cinéma. Mais cela reste en quelque sorte une exception. Cette « magie du direct » n’est pas assez forte pour rassembler autant de téléspectateurs qu’il y a une dizaine d’années. De plus, on imagine bien sûr que les jeunes générations, quasiment nées avec une tablette à la main, seront bien moins réceptives à cette dimension du simple fait qu’ils n’auront pas grandi avec. C’est pourquoi l’avenir de la programmation des chaînes linéaires se joue sur l’achat de droit de diffusion de grands évènements sportifs, qui réalisent aujourd’hui les meilleures audiences, mais aussi sur la capacité de ces chaînes à produire leurs propres séries exclusives à l’image de Canal +. Grâce à cette dernière stratégie, les acteurs traditionnels valoriseront leurs offres et rivaliseront avec les nouveaux entrants qui se positionnent eux aussi sur cette stratégie d’exclusivité, à l’image de Netflix. Cette exclusivité s’avère être le vrai nerf de la guerre qui déterminera qui des différents acteurs possède l’offre la plus valorisante. V.Bonneau a d’ailleurs émis une hypothèse assez intéressante sur le sujet. Selon lui l’offre de séries exclusives va se démultiplier provoquant la création de centaines de séries simultanément. (C’est ce qu’on commence à observer dès maintenant). De ce fait la valeur de l’exclusivité d’une offre sera beaucoup moindre qu’auparavant. Les séries se neutraliseront entre eux. Un peu comme les chaînes linéaires à l’arrivée de la TNT. L’offre sera plus forte que la demande, dévalorisant énormément cette première. La série, dont beaucoup pensent qu’elle est le contenu phare de demain, s’avèrerait en fait très rapidement obsolète, tout comme le film avant elle. Je pense en effet que ce scénario est envisageable. La série sera peut-être moins valorisante qu’on le prédit, mais je pense aussi que l’exclusivité d’une série dépendra énormément de sa valeur intrinsèque lui permettant de s’imposer au-dessus des autres, de par son scénario, ses acteurs, sa direction artistique et tout ce qui fait d’une série un succès. Je pense forcément à des séries comme Game of Thrones de HBO ou Breaking Bad et The Walking Dead de AMC qui capitalisent un nombre d’adeptes affolant et forcément des audiences inégalées. Je pense donc que la valeur exclusive d’une série aura des chances d’être dévalorisée, mais des productions majeures, émanant de producteurs reconnus, tireront leurs épingles du jeu et leur apporteront donc un succès garanti, à l’image des exemples cités ci-dessus. La série a donc bel et bien un avenir sur le marché à long terme. Elle est et restera un programme à forte valeur ajoutée.
  • 19. 108 Ce n’est sans compter, de toute évidence, sur le piratage qui s’attaque désormais aux créateurs de contenus avant même la première fenêtre de diffusion. C’est un phénomène tout nouveau pour la série, que nous avons déjà pu observer sur les films et plus fréquemment dans la musique. Le piratage crée donc une nouvelle fenêtre dans la chaîne de vie d’un programme, rendant parfois obsolète la phase majeure qu’est son lancement. C’est ce que nous avons ainsi pu observer tout récemment pour la cinquième saison de la série HBO dont les cinq premiers épisodes ont leaké sur internet quelques jours avant son lancement officiel sur la chaîne. Le piratage est selon moi le premier facteur de cord-cutting à travers le monde. Je suis bien conscient que je ne vous apprends rien ici. Malgré tout, il est important de l’affirmer, car nous aurions tendance à nous enfermer dans un monde/marché parfait dans lequel le piratage n’existe pas. Aujourd’hui, si l’on s’intéresse aux consommateurs de moins de 25 ans (peut- être plus) on remarque que cette génération n’a presque jamais payé pour un seul contenu audiovisuel, hormis pour aller au cinéma bien sûr. Entre la généralisation du piratage et le développement de l’offre légale gratuite en OTT, il ne pourrait en effet rester que peu de place pour les offres légales payantes. Le marché fait donc face à une potentielle génération de « cord-never ». Car si l’effet de cord-cutting immédiat n’est pas à l’œuvre en France, en tout cas pas autant qu’aux États-Unis, une grande menace plane sur le marché à moyen terme. Nous rentrons définitivement dans le champ des perspectives. 2. Perspectives 2.1 Le futur de la consommation audiovisuelle chez les jeunes (Millennials et Génération Z) Cord-cutting ou abonnement ? En effet, lorsque les professionnels interrogés imaginent ces cord-nervers dans 10 ans, (quand ceux-ci seront potentiellement amenés à consommer plus facilement une offre payante légale) beaucoup pensent que cette génération ne changera pas de mode de consommation, variant entre offres OTT légales gratuites et piratage. Ainsi, comme l’expliquent R.Ichou et B. Chazelle, tout l’enjeu pour les acteurs traditionnels
  • 20. 109 est d’aller les chercher à la source, là où ils consomment afin d’imprimer les marques payantes/traditionnelles dans leurs habitudes de consommation. C’est pourquoi une chaîne comme Canal+ vacille entre deux bords, à la fois sur l’abonnement, car ce modèle a fait ces preuves et qu’il est la base de leur business, mais de plus en plus vers l’OTT, car Canal + s’est depuis quelques années implanté sur Youtube afin de capter cette jeune génération. La stratégie de Canal n’est pas de générer des revenus, mais bien d’affilier leur marque à l’univers de consommation des jeunes. Nous ne pouvons dire à ce jour si cette stratégie est viable. Nous verrons dans 5 à 10 ans si cette jeune génération de cord-nevers ce sera finalement abonnée à un service payant, Canal + ou Canalplay, ou autre… Vu les usages actuels et futurs privilégiés par les millenials et la génération z, il semble que Canalplay soit l’offre la plus apte à les séduire. C’est, je pense, ce qu’a assimilé Canalplay en intégrant dans son offre un corner spécialement dédié aux vidéos d’un MCN (Networks regroupant plusieurs Youtubeurs). Malgré tout, comme je le disais au début de mon raisonnement, beaucoup pensent que ces générations resteront des cord-nevers. C’est notamment l’avis de L.Bostral, cord-cutter de la première heure, mais aussi de Joackim Le Goff qui voit mal cette génération payer à l’avenir pour du contenu en OTT ou en linéaire. On peut effectivement se demander si cette génération rentrera dans les rangs, une fois mature. La solution pour séduire ces jeunes générations se trouve peut-être dans l’évolution des offres de SVOD vers le gratuit. On peut facilement imaginer une offre de SVOD freemium en partie financé par la publicité qui permettrait aux jeunes de mettre un premier pied dans l’univers du payant, hors Youtube. J.LeGoff fait mention du phénomène bien connu qui est que les jeunes ont tendance à faire l’inverse de ce que font les parents en signe de protestation, alors qu’une fois atteint l’âge mûr, ces jeunes, devenus « vieux », tendent à consommer les mêmes choses que leurs parents auparavant. C’est en tout cas un phénomène très visible dans la consommation de produits culturels. C’est en effet une théorie très intéressante et envisageable. On peut donc imaginer cette jeune génération rentrer dans les rangs et commencer à se tourner vers une offre légale et payante. Du moins, retourner sur la télévision linéaire demandant moins d’effort que d’aller chercher son programme sur un service SVOD.
  • 21. 110 Je pense personnellement que ce scénario est envisageable à moyen terme. En effet, un fan de football ne va pas regarder infiniment ses matchs en mauvaise qualité sur internet via un site pirate. Il devra forcément souscrire à une offre payante pour profiter pleinement de son sport favori. Deux options s’offriront donc à lui, à date : Canal + ou Bein Sport. Vu l’appétence des jeunes générations pour l’OTT et surtout en prenant compte du prix élevé de l’offre Canal +, il semble que le cord-nerver se tournera à coup sûr vers Bein Sport qui propose une offre uniquement OTT pour pas cher. Bein Sport est actuellement menacé, car son nombre d’abonnés ne justifie pas, loin de là, toutes les dépenses en droits que réalise la chaîne, accusant ainsi des pertes colossales. Ceci étant dit, je pense que Bein Sport à un gros potentiel et un réel avenir à jouer sur le marché, notamment grâce aux jeunes générations qui, je le pense, se tourneront forcément vers cette offre. Encore faut-il que la chaîne survive jusqu’ici. Tout dépendra de la capacité des actionnaires à maintenir un niveau d’investissement similaire durant les 5 années à venir. C’est sans compter sur la potentielle restructuration de l’offre Canal + qui pourrait très bien se lancer en OTT avec une offre ciblée et personnalisée, proposant ainsi un abonnement uniquement tourné vers le sport, vers le cinéma ou la série. C’est selon moi tout à fait envisageable, d’autant plus que Canal + a déjà entamé cette transition sur l’univers linéaire en créant plusieurs chaînes thématiques semblables à celles imaginées en OTT. De plus Canal +, forcé de s’adapter pour faire face aux nouveaux entrants, a déjà un bon pied dans l’OTT grâce à son offre multi-screen MyCanal qui offre selon moi la meilleure plateforme et expérience OTT à ce jour. Tout est une question de temporalité. Comme l’affirme R.Ichou de Canal +, la transition a démarré, mais elle sera longue. On ne peut en effet pas passé d’un univers à l’autre en un claquement de doigts.
  • 22. 111 Je pense que l’univers majoritairement linéaire dans lequel nous consommons aujourd’hui fera petit à petit place à l’OTT. En effet, les acteurs traditionnels s’adaptent aux nouveaux usages qui tendent vers ce dernier univers. 2.2 Le paysage audiovisuel français à moyen/long terme Alors que beaucoup de journalistes assènent des vérités en affirmant que la télévision n’est pas en train de mourir, mais qu’elle est déjà morte, il semble que celle-ci ait encore de beaux jours devant elle. Premièrement, elle reste aujourd’hui le seul mass media capable de réunir autant d’audience autour d’un même programme, ce dont ont besoin les gros annonceurs aujourd’hui comme à l’avenir. Aux vues des évolutions du secteur, notamment des nouveaux entrants comme Netflix - se concentrant sur l’offre de programmes stocks de deuxième fenêtre -, mais aussi des télévisions payantes - qui privilégient les programmes de stocks de première fenêtre - il semble que les chaînes de télévision linéaires gratuites comme TF1, M6 ou France 2 soient, à l’avenir, dans l’obligation de concentrer leur offre sur des programmes évènementiels afin de construire une offre vraiment valorisante et compétitive. Aujourd’hui, ces chaînes ce sont très bien adaptées à l’univers OTT en créant chacune leur plateforme de télévision de rattrapage, autrement appelée catch-up, créant ainsi une offre de valeur inégalée d’après J.Le Goff. Selon P.LeChevallier, la catch-up française égale de près ou de loin l’offre que propose la SVOD aujourd’hui. Je le rejoins sur ce point à condition que l’on inclue dans cette catch-up globale celle de Canal +, qui amène le catalogue de film nécessaire pour rivaliser contre la SVOD. En prenant en compte uniquement le replay gratuit, il est vrai que la profondeur de catalogue est quasiment identique à celle de Netflix. Finalement les professionnels s’accordent en majorité pour dire que le futur de la consommation dans les ménages se fera à moitié à la demande et en linéaire. Je pense en effet qu’à moyen/court terme nous évoluerons vers un partage égal de la consommation entre linéaire et à la demande. L’appétence des Français pour la catch-up est
  • 23. 112 en train d’exploser sur les deux dernières années. Ce qui, couplé à la généralisation des box ou TV connectées, les guidera doucement vers une consommation majoritairement OTT. En effet à long terme, avec l’arrivée des jeunes générations, la consommation OTT deviendra totalement majoritaire laissant place au linéaire uniquement pour les grands évènements live tels que le sport ou plus quotidiennement avec des émissions et les JT. On en revient ainsi au scénario à 10 ans envisagé par l’Idate en 2010. Je pense personnellement que celui-ci se produira encore plus tard, lorsque la génération X, toujours adepte de la télévision linéaire, se fera plus rare avec le temps, laissant place à une audience largement « génération Y et Z » sur le marché. De ce que nous avons établi précédemment, les futures box « OTT » des FAI ont de grandes chances de prendre place dans les foyers évitant de justesse la menace de cord- cutting déclenchée en premier lieu par la multiplication des boitiers OTT, puis dans un deuxième temps par la généralisation des télévisions connectées. Comme je l’affirmais il y a quelques pages, je pense que les nouvelles IPTV des FAI devenues résolument OTT effaceront la menace des TV connectées tout simplement, car ces premières ont la mainmise sur le réseau et sont donc plus à même de délivrer une expérience de consommation optimale en OTT. On imagine malgré tout que l’offre pseudo-OTT des FAI bénéficiera toujours moins d’applications que la télévision connectée, à cause des multiples deals que les FAI honorent avec les différents acteurs du marché, notamment les content providers. Il est difficile d’imaginer l’évolution de ces différents rapports, mais il s’avère finalement que l’offre OTT des FAI, toujours potentiellement bridée, puissent subir malgré tout la concurrence de l’univers totalement ouvert des TV connectées et des boitiers OTT comme l’Apple TV, le Chromecast ou Roku. L’IPTV a encore plus à craindre de l’arrivée d’un acteur français qui a pour ambition de mettre un terme à l’emprise des FAI sur la diffusion de la télévision française. En effet Molotov.TV qui se lance à la rentrée veut révolutionner la manière dont nous regardons la télévision en proposant un accès OTT aux chaînes que l’on connaît. Une sorte de Netflix français exploitant les programmes de la télévision linéaire pour former son catalogue. Une stratégie cohérente quand on connaît la diversité des programmes existants et la profondeur de catalogue finale que constituent toutes les chaînes de télévision une fois rassemblées. Reste à savoir quels seront les chaînes partenaires au projet, ou du moins les programmes de chaînes disponibles. Car imaginé comme un modèle à la Netflix, Molotov.TV mettra avant tout en avant le contenu et non les « marques-chaînes » qui le diffusent. On peut très bien
  • 24. 113 imaginer la plateforme s’apparenter à ce que fait l’appli TiVipédia, qui propose de consulter tous les films, toutes les séries ou toutes les émissions diffusées à un instant T. On se rend compte plus facilement que l’offre de télévision est très qualitative et variée. L’accès aux contenus qui nous intéressent est bien plus facile et rapide. Tout le contraire de ce que propose l’IPTV aujourd’hui. Molotov apparaitra donc sur nos tablettes, smartphones, et boitiers OTT à la rentrée avec pour objectif de concurrencer les FAI. Dans un marché dominé par l’OTT à moyen-long terme il est possible d’imaginer Molotov.tv s’imposer en leader de la diffusion télévisuelle. Mais avec un tel succès, l’application pourrait générer des coûts croissants en bande passante or, elle ne détient pas les infrastructures nécessaires à la bonne gestion de celle-ci. On pourrait imaginer les FAI refuser d’assumer les coûts de bande passante de ces applications multiples, ce qui briderait finalement leurs offres à terme. Afin que les différentes plateformes puissent assurer à leurs consommateurs une qualité de service optimale, celles- ci seront alors dans l’obligation de payer les FAI. 2.3 La neutralité du Net C’est exactement ce que l’on observe aujourd’hui aux États-Unis lorsque Netflix signe un deal avec Comcast. Mais que devient le client d’une FAI concurrente ? Doit-il se résigner à bénéficier d’un service de moins bonne qualité alors qu’il paye le même prix que son voisin de chez Comcast ? C’est tout le problème que pose la neutralité du net. D’après Barbara Chazelle de France TV, ce problème, qui pose de vraies questions économiques, est largement sous-estimé au niveau européen. Si demain Orange se met à délivrer la majeure partie du service audiovisuel français il devra alors assumer les coûts de bande-passante des différents acteurs. Si Orange décide finalement de les faire payer comme c’est le cas aux États-Unis, il est fort possible que seule les grands groupes puissent assumer ce genre de dépenses, laissant les plus petites structures dans l’impasse, causant éventuellement, à terme, leurs pertes. Cela pose un réel problème pour la diversité du paysage audiovisuel français à l’avenir. Les acteurs de l’audiovisuel français sont menacés de toute part.
  • 25. 114 2.4 Les potentielles futures menaces de l’OTT Comme l’affirmait le cabinet Kurt Salmon ainsi que Barbara Chazelle, la convergence des médias a pour conséquence de faire disparaître les intermédiaires, ceux qui se placent entre les créateurs de contenus et le consommateur. Cette menace s’applique notamment sur certaines chaînes de valeur. HBO a récemment lancé son offre totalement OTT, HBO Now. Cette offre menace donc l’acteur qui avant lui distribuait le service, soit les MCPTV (Multichannel Pay TV providers), qui, dans la logique de ce raisonnement, seront à terme amenés à disparaître aux États- Unis. En France, le service qui distribue majoritairement les contenus HBO n’est autre qu’OCS. Pour l’instant l’offre HBO Now n’est présente qu’aux États Unis. Mais si HBO décide de lancer son offre OTT à l’international, lui permettant ainsi d’accéder directement au marché Fançais, la chaîne rendrait totalement obsolète l’offre d’OCS, causant, dans le pire des cas, la perte de la chaîne, au mieux une vague de cord-cutting. Cependant ce scénario est envisageable uniquement si HBO considère qu’une diffusion OTT est aussi, voire plus, rentable que la vente de ses droits de diffusion à OCS. Aujourd’hui il semble que ce ne soit pas le cas. À long terme, lorsque la consommation OTT sera majoritaire en France, ce scénario sera alors envisageable. Je pense personnellement qu’il le sera. Globalement ce sont toutes les chaînes qui sont potentiellement menacées par ce phénomène. Comme nous l’avons dit en début de partie, celles-ci doivent privilégier la création originale comme le fait de plus en plus Canal +. Notamment des productions internationales, assurant une exposition mondiale au contenu et forcément des revenus plus forts. (Tunnel pour Canal +, Marseille pour Netflix dont la diffusion n’est pas uniquement limitée à la France) Les chaînes linéaires seront attaquées d’une part sur les programmes de stocks, mais aussi potentiellement sur les programmes de flux. Illégalement c’est déjà le cas depuis longtemps via différents sites de streaming pirate, encore plus aujourd’hui avec le détournement d’applications comme Periscope et Meerkat à
  • 26. 115 travers lesquelles nous avons pu tout dernièrement streamer le fameux « match de boxe du siècle » entre Mayweather et Pacquiao. Cet événement était pourtant extrêmement confidentiel se réservant aux abonnés Showtime et HBO ainsi qu’aux courageux prêts à débourser la somme de 80 $ en pay-per-view. La concurrence illégale est donc forte, mais elle souffre de sa qualité, généralement mauvaise. Une offre OTT légale de sport live pourrait-elle faire son apparition sur le marché ? Comme le précisait l’un de nos interlocuteurs, la diffusion OTT d’évènements sportifs est déjà d’actualité, à l’image de ce que fait la NBA ou la MLS aux États-Unis. Celle-ci reste marginale face à la consommation linéaire qui est faite de ce programme. On observe des diffusions OTT de sports de second rang qui généralement n’ont pas de fenêtre de diffusion en linéaire, en tout cas pas sur des chaînes nationales/historiques Mais le lancement d’une offre sportive OTT pourrait-elle venir concurrencer une offre comme Canal + ? Comme nous l’avons vu, la convergence des médias élimine petit à petit les intermédiaires entre créateurs de contenus et consommateurs. Grâce à l’OTT on peut donc imaginer les ligues sportives diffuser elles-mêmes leurs propres contenus. La LFP pourrait-elle alors abandonner la vente de ses droits de diffusion à Canal+ et BeIN Sport pour privilégier une diffusion directe en OTT ? Le scénario est très peu envisageable. Tout simplement parce que les revenus que touche la LFP grâce à la vente de ses droits, sont astronomiques (748 millions par an). De ce fait, il faudrait un nombre d’abonnés potentiels extrêmement conséquent pour que le projet OTT soit économiquement aussi rentable. C’est forcément loin d’être le cas, du moins à court/moyen terme. Car dans un paysage audiovisuel dominé par l’OTT à long terme (Omniprésence TV connectée + développement des applications et de la consommation OTT), le nombre d’abonnés potentiels serait bien plus élevé et peut être assez conséquent pour développer le projet. Cette offre viendrait alors concurrencer celles de BeIN (que nous avons précédemment évaluée comme étant l’offre avec le plus de potentiel pour les années
  • 27. 116 à venir) et de Canal + qui aura, elle aussi, dans le meilleur des cas lancé son offre sportive OTT. Il semble impossible que la LFP décide de se séparer de ses contrats de diffusion avec ces principaux clients (Canal+, Bein). La somme récupérée est bien trop importante et tend à augmenter depuis l’arrivée de Bein Sport, qui pousse la LFP à redistribuer les cartes et, Canal +, à s’engager plus que jamais. Le sport représente l’offre la plus valorisante de cette dernière et le cœur de métier de Bein. Tous deux sont donc prêts à payer le prix fort pour acquérir certains droits de diffusion. La LFP profite de cette situation et s’enrichit d’année en année. Pourquoi donc abandonner cette situation pour lancer sa propre chaîne OTT ? Nous sommes aujourd’hui très loin d’un tel scénario. On peut imaginer la LFP créer sa plateforme OTT pour la diffusion de certains matchs de Ligue 2 ou de National, en tout cas de matchs dont la diffusion broadcast n’est pas nécessairement assurée aujourd’hui. La LFP bénéficierait de revenus additionnels (sans compter les infrastructures à mettre en place). La LFP a déjà tenté cet exercice en 2011 en créant la chaîne linéaire CFoot qui n’aura finalement duré que 1 an, faute d’abonnés. Celle-ci avait pour programmation les contenus cités plus haut. Pas de matchs de Ligue 1 donc. La chaîne souffrait d’un manque d’intérêt. Si cette offre n’a pas fonctionné en linéaire, elle ne fonctionnera pas plus en OTT. Peut-elle alors intégrer la Ligue 1 dans sa programmation afin de proposer une réelle offre de valeur ? Une chose est sûre, la LFP n’a aucune raison de rompre ses contrats de diffusions actuelles. Plusieurs scénarios sont envisageables à partir de ce point : Scénario 1 : La LFP décide de revoir (à la baisse) ces contrats de diffusions avec ces différents partenaires actuels pour lancer en parallèle sa propre offre d’abonnement. Son but étant d’élargir au maximum la diffusion et la portée de la Ligue 1 et du football français. Sachant que la Ligue 1 est l’offre de valeur principale de Canal + et de Bein, ces derniers ne seront pas en position de négocier de grosses baisses sur les droits de diffusion. Ainsi la LFP engendrerait de potentiels revenus additionnels grâce à son offre d’abonnement, sans souffrir d’une baisse trop forte de ses contrats de diffusions avec ses partenaires. L’avantage de ce scénario étant l’ouverture du football français à tous. Ne connaissant personnellement pas bien les droits instaurés sur ce marché et les contrats qui lient les différents acteurs, je ne peux assurer à 100 % que ce scénario est envisageable. Dans les faits et vu l’évolution du marché OTT, je pense que ce scénario 1 n’est pas à écarter.
  • 28. 117 Scénario 2 : Tout comme le scénario 1, Canal + et Bein se placent toujours sur la diffusion des matches de Ligue 1 (voire 2). En parallèle, la LFP propose (au lieu d’une offre d’abonnement) une offre d’achat à l’acte de ses matchs. Ce modèle est notamment exploité aux États-Unis sur de gros évènements annuels. Il pourrait s’appliquer à une diffusion plus hebdomadaire, permettant aux supporters/consommateurs de voir uniquement les matchs qui les intéressent sans pour autant payer un abonnement. Le prix de l’achat à l’acte est ensuite à déterminer selon le prix que seraient prêts à mettre les consommateurs. Tout comme le scénario 1, ce deuxième déroulement n’est pas à écarter malgré la législation et les contrats en places qui pourraient le freiner. Le point faible de ces deux scénarios réside dans la faible valeur ajoutée d’une offre exclusivement Ligue 1, Ligue 2. Tout fan de foot souhaite regarder Ligue 1, Premier League (Bundesliga etc..) et surtout Ligue des Champions. Il n’est pas sûr qu’un fan envisage de s’abonner uniquement à l’offre de la LFP. Même si l’offre de la LFP inclut des matchs de Ligue 1 à forte valeur ajoutée, celle-ci serait tout de même incomplète pour satisfaire ces clients. C’est en tout cas le réel point faible du premier scénario. L’offre du second scénario pourrait se positionner comme une offre additionnelle à celle déjà en place (Canal +, Bein). Scénario 3 : Dans un marché qui vit une désintermédiation croissante, quel serait le scénario final à long terme ? Si on explore l’évolution du phénomène, on peut alors imaginer un club comme le PSG qui propose un abonnement (ou l’achat à l’acte) OTT pour le visionnage de tous ces matchs. Ce genre d’offre ciblerait les fans d’un club en particulier, et ils sont nombreux. Le client pourrait alors suivre son club préféré dans toutes les compétitions. Cette offre pourrait ainsi se suffire. Pour les plus fans, elle s’additionnerait à celle de Bein ou Canal qui leur permet de voir les championnats étrangers, indispensables pour certains. Afin d’établir des scénarios cohérents, il aurait été d’usage de réaliser une étude quantitative auprès des consommateurs pour connaître leurs attentes et leurs avis sur ces potentielles évolutions. Me plaçant moi même comme un consommateur invétéré de football, j’ai donc établi des scénarios et des offres qui répondent à mes besoins tout en prenant en compte à un certain degré la faisabilité côté diffuseurs.
  • 29. 118 Et si Netflix se lançait dans le live ? P.LeChevallier nous a appris qu’un tel projet était déjà en cours afin de créer un Talk-Show de deuxième partie de soirée. Une première expérimentation pour Netflix, qui pourrait donc être amenée à réitérer l’expérience jusqu’à, pourquoi pas, se lancer définitivement dans le live. Le service formerait ainsi à lui-même une vraie plateforme tournante de l’audiovisuel. Un tel service aurait alors une puissance disruptive majeure sur les acteurs traditionnels, notamment les chaines linéaires qui voyaient dans le programme de flux « évènementiel » leur atout majeur face aux nouveaux entrants. Comme l’affirme L.Bostral : « si Netflix se met au live, ils ne seront pas loin de la vérité… » Cette force disruptive serait encore plus dévastatrice si Netflix se lance dans la diffusion d’évènements sportifs majeurs, s’ajoutant au marché déjà bien compétitif partagé entre Bein et Canal (et potentiellement l’offre de la LFP). Cependant, pas sûr que les sports populaires français soient un positionnement majeur pour Netlifx. La plateforme pourrait être friande d’évènements sportifs mondiaux comme une coupe du monde. Mais cela semble également très peu envisageable aujourd’hui. Premièrement, car de tels événements doivent obligatoirement avoir une fenêtre de diffusion gratuite. Deuxièmement, si cela était possible juridiquement, la diffusion serait techniquement quasiment impossible à cause de la gourmandise en bande passante de tels évènements. Afin de rentabiliser les potentiels achats en droits de diffusion, Netflix pourrait également se lancer dans le pay-per-view pour de gros évènements. Comme l’a dit le Chief Content Officer de Netflix, Ted Sarandos concernant le live streaming de sports : « I will never say never, but I would say that where we sit today I don’ t think the on-demandness to sports is enough of an addition to the value proposition to change » … « Not to say that it wouldn’t someday down the road someday make sense ». Ainsi si la consommation livestream d’événements sportifs se développe chez les internautes/téléspectateurs, l’arrivée de Netflix sur ce marché ne serait pas une surprise. À
  • 30. 119 en croire les évolutions des modes de consommation de ces dernières années, il semble que nous soyons sur la bonne voie. En attendant l’arrivée de Netflix sur le Live, le modèle de consommation le plus envisageable, sur le marché américain, réside pour l’instant dans la combinaison d’offres OTT comme Netflix (SVOD) + Sling TV (Live TV). Les derniers chiffres de ce marché démontrent que l’appétence pour le streaming est de plus en plus forte chez les téléspectateurs américains. Le renouvellement de l’Apple TV à la rentrée prochaine risque de positionner la firme de Cupertino comme un leader du marché, proposant un modèle embarquant Live TV et consommation à la demande. Un modèle que proposent également les distributeurs comme Verizon afin de récupérer leurs cord-cutters. Ce modèle de télévision que l’on appelle « custom TV » permet au consommateur de créer sa propre expérience TV en choisissant lui même les différentes chaînes auxquelles ils souhaitent s’abonner, évitant ainsi de payer 100$ pour ne finalement regarder que 5 chaînes sur 200. Comme nous l’aurons vu à travers ce mémoire, la menace des nouveaux entrants est réelle tant que les acteurs traditionnels ne s’adaptent pas. C’est cette adaptation qui permet aujourd’hui à Verizon ou HBO (d’envisager) de récupérer certains cord-cutters. IPTV vs Box OTT/connectées En France les FAI sont bousculés par les clés et box connectés de plus en plus populaires, proposant une expérience et un univers plus évolués et plaisants aux consommateurs. Elles offrent bien plus de contenus grâce aux multiples applications disponibles (TV linéaire (Mycanal, bientôt Molotov) + contenus délinéarisé type Netflix, YouTube, Twitch etc.) et ce, dans un univers soigné, fluide et personnalisé. Ce qui est loin d’être le cas des box de FAI connue aujourd’hui. Aujourd’hui mode d’accès principal à la télévision, l’IPTV est dans un futur proche la cible du phénomène de cord-cutting. Si le marché poursuit son évolution vers l’OTT, l’IPTV est vouée à disparaître pour faire place aux clés/TV connectées et aux applications, comme l’entrevoyait ainsi Reed Hastings. L’OTT propose en effet une offre complète qui combine contenu linéaire et délinéarisé via ses multiples applications. La télévision linéaire va
  • 31. 120 notamment être révolutionnée par Molotov via son application Netflix-like exploitant les contenus linéaires de la télévision. La manière dont nous consommons la télévision est totalement revue, mettant le contenu au cœur de la recherche, et non plus les chaînes, permettant ainsi au téléspectateur d’avoir une vision large de la programmation et d’accéder plus facilement au contenu désiré. Les applications OTT ont pris le pas sur les acteurs traditionnels à force d’innover. Elles répondent au mieux aux attentes des consommateurs et concurrencent directement l’offre des FAI. Ces dernières cherchent donc à rattraper leur retard en introduisant un univers plus ouvert dans leur box. La dernière box 4K de Free inclue ainsi l’Android TV. Cependant c’est une Android TV bridée (certaines applications absentes) qui ne ravira pas les consommateurs les plus gourmands. La Guerre IPTV contre Box OTT est lancée. L’IPTV à l’avantage naturel d’être le produit des fournisseurs d’accès internet, ainsi elle bénéficiera des infrastructures nécessaires à son bon fonctionnement (réseau / bande passante) contrairement aux acteurs OTT. C’est peut-être ici le nerf de la guerre, car cette problématique pourrait contraindre ces derniers à assurer des coûts supplémentaires, à destination des FAI. Il sera intéressant de voir les relations (ententes et conflits) entre ces deux acteurs à l’avenir. Chacun bénéficie d’avantages par rapport à l’autre, l’IPTV profite des infrastructures nécessaires et l’OTT de sa force d’innovation. Bilan, si l’IPTV s’adapte à l’OTT et innove dans l’usage, il se peut que les FAI entretiennent leur suprématie sur le marché. L’arrivée de nouveaux entrants aura également et notamment vu naître un duel féroce entre Pay-Tv et SVOD. Tout l’enjeu de se mémoire était de connaître l’impact, en France, de ce dernier sur le premier. Je pense et j’espère avoir abordé la majorité des sujets et explorer les hypothèses les plus cohérentes durant cette troisième partie. Concernant ce duel Pay-TV et SVOD, avec un peu de recul, je pense que nous évoluons vers un marché dans lequel les plus aisés continueront à profiter de contenus premiums via, notamment, la Pay-TV tandis que la « masse populaire » se contentera du marché secondaire, représenté par la SVOD. Le piratage représentant dans tout ça, une sorte de Robin des Bois des temps modernes, éternel, permettant à tous de profiter gratuitement de contenus premiums.