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Année scolaire 2014-2015
Mémoire de fin d’études
Master 2 - ROS - Parcours de soins
Promotion 2014-2015
Juin 2015
Les aidants de personnes âgées dépendantes :
Quelle place dans les services de soins à domicile ?
M. Kévin Bisiaux
Infirmier
ii
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Table des matières
Abstract 1
Avant-Propos : Pourquoi les aidants ? 3
Introduction 5
État de la question 7
1 Une approche théorique 9
1.1 La personne âgée dépendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.1.1 Des notions-clés : la personne âgée dépendante et le vieillissement . . 13
1.1.2 Les problématiques du grand âge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.1.3 Synthèse de la politique française en faveur des personnes âgées . . . 14
1.2 Les aidants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.2.1 Histoire d’un acteur toujours présent et transparent . . . . . . . . . 15
1.2.2 La famille n’existe pas ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.2.3 Aider et être aidant : entre fonction et appartenance . . . . . . . . . 17
1.2.3.1 Les aidants professionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.3.2 Les aidants familiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.4 Rôle, place et responsabilité des aidants . . . . . . . . . . . . . . . . 19
1.2.5 Répercussions du rôle d’aidant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.2.6 Profil des aidant(e)s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
1.2.7 Besoins, attentes et dispositifs d’aide . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
1.2.8 Le handicap familial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.2.9 La proximologie : un nouveau champ de recherche . . . . . . . . . . 26
1.3 Le domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
1.3.1 Entre lieu de vie et lieu de soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.3.2 Pourquoi parler de « culture du domicile » ? . . . . . . . . . . . . . . 28
1.3.3 Les soins à domicile : entre éclatement et cloisonnement . . . . . . . 28
1.3.4 Les dispositifs d’aide à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.4 La coordination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
1.4.1 Qu’est-ce que la coordination ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
1.4.2 La coordination des personnes âgées et des aidants . . . . . . . . . . 32
1.4.3 Les aidants comme partenaires de soins . . . . . . . . . . . . . . . . 33
iii
iv Table des matières
2 Une approche empirique 35
2.1 La présentation du service . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.1.1 Cadre législatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.1.2 Financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.1.3 Population accueillie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
2.1.4 Pathologies prévalentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
2.2 La méthodologie de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
2.2.1 Choix de l’outil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
2.2.2 Population choisie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
2.3 Les résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.3.1 Des pratiques hétérogènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.3.2 Des aidants très impliqués et en attente d’information . . . . . . . . 41
2.4 L’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
2.5 La discussion et l’apport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
Conclusion 53
A Grille d’entretien 59
B Synthèse des entretiens 61
C Questionnaire 65
D Quelques données statistiques 69
E Extrait des entretiens 73
E.1 Entretien n˚1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
E.2 Entretien n˚2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
E.3 Entretien n˚3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
E.4 Entretien n˚4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
E.5 Entretien n˚5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
E.6 Entretien n˚6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
E.7 Entretien n˚7 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
E.8 Entretien n˚8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
E.9 Entretien n˚9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
E.10 Entretien n˚10 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
E.11 Entretien n˚11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
E.12 Entretien n˚12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Remerciements
En préambule de ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus sincères aux
personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à enrichir ce travail de recherche.
Je remercie, dans un premier temps, mon ami Romain, pour l’aide précieuse qu’il m’a
apportée, mais aussi pour sa gentillesse et son professionnalisme. Je le remercie sincèrement
pour son implication dans ma démarche de projet.
Je tiens également à remercier l’ASSAD du 15ème arrondissement sous la direction de Mme
S. ALFRED - directrice - et Mme H.TIOMO – cadre de santé – pour leurs conseils, leur
accompagnement et leur bienveillance, sans oublier l’ensemble des professionnels qui se
sont impliqués dans ce projet, professionnels qui effectuent un travail qui mérite respect et
considération.
Je souhaite aussi remercier l’ensemble des professionnels que j’ai rencontrés tout au long de
ces cinq années d’études. J’émets une pensée notamment pour Nicole BOULET qui m’a
toujours soutenu et valorisé dans mes projets. Ma reconnaissance et ma gratitude vont
vers Ivana NOVAKOKA et Marcelline OULOUKOI sans qui je n’aurais pu comprendre le
sens même de la gentillesse et de la dignité. Je pense également à Myriam RECURT et à
Bernadette CAMAZOLLA pour leur soutien depuis ma formation d’infirmier.
Je souhaiterais également adresser un regard sincère et bienveillant auprès de la direction
de l’hôpital de jour CEREP-PHYMENTIN pour sa flexibilité et sa patience durant ces
deux années.
Parler des familles sans évoquer la sienne n’est pas concevable pour moi. Que soient
ainsi remerciés ma mère et mon père, mes frères et ma sœur, ainsi que l’ensemble de mes
amis, particulièrement mon amie Lucile, pour leurs encouragements.
Enfin, j’adresse mes remerciements à Bastien pour sa bonne humeur, sa gentillesse et
son attention particulière, finalement, tout ce qu’il représente pour moi.
v
vi Remerciements
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Liste des sigles
AGGIR : Autonomie Gérontologique Groupe ISO-Ressources
ANESM : Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des établissements et Services
sociaux et Médico-sociaux
APA : Allocation Personnalisée d’Autonomie
ARS : Agence Régionale de Santé
ASSAD : Association de Soins et Services À Domicile
CIF ou CIH-2 : Classification Internationale du handicap et du Fonctionnement, du
handicap et de la santé
CIH : Classification Internationale du Handicap
CLIC : Centre Local d’Information et de Coordination Gérontologique
COFACE : Confédération des Organisations FAmiliales de l’Union Européenne
EHESP : Écoles des Hautes Etudes en Santé Publique
ESA : Équipe Spécialisée Alzheimer
GEVA : Guide d’Évaluation des besoins de compensation de la personne handicapée
GIR : Groupe Iso-Ressources
HAD : Hospitalisation À Domicile
HAS : Haute Autorité de Santé
IFSI : Institut de Formation en Soins Infirmiers
INSERM : Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale
vii
viii Liste des sigles
LPPR : Liste des Produits et Prestations Remboursables
MAIA : Maison pour l’Autonomie et l’Intégration des malades d’Alzheimer
MDPH : Maison Départementale pour les Personnes Handicapées
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économiques
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
PAERPA : Personnes Âgées En Risque de Perte d’Autonomie
PSAD : Prestataires de Santé À Domicile
SIDA : Syndrome de l’ImmunoDéficience Acquise
SSIAD : Services de Soins Infirmiers À Domicile
SPASAD : Services Polyvalents d’Aides et de Soins À Domicile
UPMC : Université Pierre et Marie Curie
VAE : Validation des Acquis et de l’Expérience
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Abstract
Elderly dependants’ caregivers
How can they fit in home care units ?
Abstract
Measures to enable elderly people to stay in their own home are not easy to be found. A lot
of participants are required, and caregivers need to be present. In the French health-care
system, they are 8.3 million, and they have many issues with their health. Their use of
psychotropic and the exhaustion of relatives convey a social malaise. Current health policies
provide little response on how to handler the relatives of the elderly.
This research project was conducted in home care service, in the 15th district of Paris.
It aims to understand how it would be possible to make caregivers belong to service. We
interviewed 12 professionals and asked their opinion to 77 of caregivers. The analysis of these
interviews allowed us to understand that caregivers are very involved in the management.
They expect for some information and partnership. As for professionals, they have a very
focal approach. The caregiver is not acknowledged enough in patient care.
Keywords : Care, Home, Caregivers, Partnership and Recognition
Les aidants de personnes âgées dépendantes.
Quelle place dans les services de soins à domicile ?
Résumé
Le dispositif du maintien à domicile des personnes âgées dépendantes est complexe. Celui-ci
est possible par de nombreux acteurs, notamment par la présence des aidants. Dans le
système de soins français, nous avons 8,3 millions d’aidants. Les problématiques de santé
de cette population sont nombreuses. La consommation de psychotropes et l’épuisement
des proches traduisent un malaise social. Les politiques de santé actuelles n’apportent que
peu de réponse sur la manière de prendre en charge le proche de la personne âgée.
Ce projet de recherche a été mené à Paris dans un service de soin à domicile du 15e
arrondissement.
Il tend à comprendre comment intégrer davantage les aidants au sein de cette institution.
Nous avons réalisé 12 entretiens avec les soignants et recensé l’avis de 77 aidants. L’analyse
des entretiens nous a permis de mieux comprendre l’implication des aidants. Ils sont en
attentes d’information et de partenariat. Quand aux professionnels, ils ont une approche
1
2 Abstract
très focale. L’aidant n’est que peu reconnu dans les soins du patient.
Mots-clés : Soin, domicile, aidants, partenariat et reconnaissance
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Avant-Propos : Pourquoi les aidants ?
Bien avant d’appréhender la notion d’aidant, l’implication de la famille dans les soins,
notamment à domicile a toujours été une préoccupation centrale. Durant les enseignements
dispensés en IFSI - Institut de Formation en Soins Infirmiers – la dimension des soins devait
être perceptible sous une approche holistico-dynamique. À ce sujet, la discipline infirmière
s’est construite autour de quatre concepts fondamentaux que sont la santé, la personne, les
soins infirmiers et l’environnement. J. Fawcett évoque la notion de « métaparadigme » de
la discipline infirmière [1]. Ainsi, l’ensemble des théories en soins infirmiers s’accordent à
dire que la prise en compte de l’environnement dans le projet de soins du patient implique
nécessairement la prise en considération de l’entourage de ce dernier. Celle-ci se situe dans
l’environnement relationnel, notamment entre l’infirmière et le patient, à travers une lecture
davantage microsociologique. On parle de phénomènes microscopiques qui se tissent au sein
de relations internes constituant des formes d’organisations entre petits groupes sociaux.
Même si l’on peut penser que les théories de soins infirmiers viennent éclairer et guider
nos actions, il existe souvent une non-prise en compte de l’expertise familiale dans les
soins du patient. D’ailleurs, ce n’est que depuis peu que les diagnostics infirmiers se sont
développés, ayant précisé notamment le concept « d’aidant ». D’une manière globale, ce
constat est également notable en ce qui concerne l’approche des problématiques de santé
dans le domaine du handicap, étant ainsi passée d’une approche médicale dans les années
1980 à une analyse bio-psycho-environnementale au cours des années 2000 1.
Cette nouvelle approche considère le handicap non plus comme un phénomène indivi-
duel mais bien comme un tout, indissociable du milieu dans lequel on vit. Autrement dit,
l’accompagnement des familles, notamment dans la réalisation des soins auprès des patients,
n’est pas formalisé. Les pratiques sociales sont hétérogènes. De manière schématique et
vulgaire deux situations peuvent se rencontrer à l’hôpital quant à l’appréciation de la famille
dans les soins du patient. Ceux pour qui la famille constitue « un véritable partenariat » :
l’infirmière autorise la famille à être auprès de son proche durant les soins effectués, et ceux
pour qui la famille constitue un obstacle aux soins : l’infirmière demande à l’entourage de
sortir durant la réalisation des soins. D’un point de vue « macro », cette problématique
est également présente. Il est vrai que bon nombre de structures régissent leurs propres
fonctionnements pour soutenir les familles, plus particulièrement en termes de fonctionne-
ments institutionnels. Nous pouvons citer en exemple les horaires de visite. Partant de ce
constat, ainsi que de la nécessité de mieux appréhender la famille au cours de ma profession
1. Nous faisons référence notamment à l’évolution de la classification internationale du handicap de
l’OMS sous l’appellation de la CIH en 1980 et de la CIH-2 ou CIF en 2001.
3
4 Avant-Propos
d’infirmier, le travail de fin d’études en soins infirmiers s’est porté sur « la reconnaissance
de la famille dans les soins infirmiers à domicile. Partenariat ou confrontation ? ». Puisque
le domicile comme lieu d’intervention de soins transpose le rôle et la place de chacun des
protagonistes – patient/aidant/soignant – au regard de l’organisation hospitalière, ce sujet
paraissait intéressant à approfondir. Cette initiation à la recherche avait pour objectifs
de comprendre dans quelle mesure l’infirmier reconnaissait la famille comme partenaire
de soins et d’extraire les enjeux de ce partenariat. Les entretiens ont été menés auprès de
professionnels infirmiers exerçant dans trois « secteurs » d’activité différents : une infirmière
travaillant dans le secteur libéral, une infirmière responsable d’une HAD - Hospitalisation
A Domicile - et, enfin, une infirmière-coordinatrice dans le cadre d’un SSIAD - Service des
Soins Infirmiers A Domicile -. Ce choix de diversifier les domaines d’activités des infirmières
interrogées a permis de recueillir des avis à « large spectre » quant à la manière de composer
avec les familles en lien avec les missions des professionnels. Cette étude nous a donné
l’occasion d’apporter une réflexion personnelle sur la place de la famille dans les soins
infirmiers à partir d’une situation vécue. Prendre soin de l’aidant constitue le fil conducteur
de cette démarche. À partir de ce travail, des interrogations ont été soulevées, notamment
en ce qui concerne la notion « d’approche systémique familiale » dans le domaine, non
pas des soins infirmiers mais bien des sciences infirmières. En intégrant le master sciences
cliniques infirmières de l’EHESP - Écoles des Hautes Études en Santé Publique – et au
travers des enseignements non seulement sur les fondamentaux de la discipline infirmière
mais aussi sur l’éducation thérapeutique du patient, la question de l’apprentissage des
soins auprès des familles a, de nouveau, fait écho à une problématique : celle de la « juste
place » des familles dans le soin. L’approche systémique familiale pensée par F Duhamel
[2], nous rappelle l’importance de savoir identifier le système familial dans lequel évolue la
personne soignée, afin de mieux comprendre l’influence de la famille sur les comportements
de santé des individus, ainsi que sur l’évolution d’une maladie. Dans le cadre du master 1,
une recherche sur les interventions éducatives afin de réduire le fardeau des aidants familiaux
a pu aboutir, permettant ainsi de renforcer l’ensemble des bases méthodologiques de la
recherche en santé fondées sur des données probantes. Exerçant actuellement dans un hôpital
de jour en pédopsychiatrie, j’ai constaté que le travail avec les familles était systématique.
Chaque entretien avec l’adolescent est réalisé en présence des familles. Sans cette alliance
thérapeutique, le projet de soins ne peut aboutir. C’est dire si le travail partenarial est
continuellement au coeur de notre activité. En prenant conscience du domaine lacunaire que
constitue les sciences infirmières en France, l’intégration en master 2 dispensé par l’UPMC –
Université Pierre et Marie Curie – en recherche et organisation en santé, était une occasion
(à défaut d’évoquer la notion de plaisir) de faire évoluer, non seulement ma réflexion sur
l’appréciation des aidants familiaux dans le parcours de soins du patient, mais également
d’appréhender différemment cette population. Se positionner en tant que coordinateur de
soins revient à se réinterroger sur le lien existant entre une problématique de santé et le
système familial dans lequel évolue la personne soignée.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Introduction
La place de l’entourage des personnes malades dans le système de santé est considérée
comme le pivot des soins à la personne. Depuis les lois de décentralisation, la politique,
qui se place dans le champ sanitaire et social encourage le partenariat, qui peut être défini
comme une forme de « travailler ensemble ». Se rendre disponible pour accompagner une
personne dépendante, chacun de nous peut être amené, à la faire au cours de sa vie, comme
chaque professionnel est amené à travailler en lien étroit avec les aidants et ce, dans un
contexte de soins à domicile, sous l’angle du maintien à domicile des personne âgées. Ce
travail s’inscrit dans une telle perspective.
Dans le système actuel de soins, le rôle et la place des aidants de personnes malades
ne sont pas définis de manière distincte. Les aidants sont, aujourd’hui, perdu dans le maquis
des appellations juridiques et sémantiques incertaines. De plus, peu de recommandations
permettent aux professionnels et aux institutions d’appréhender cette population. L’impact
du vieillissement sur les dépenses de santé, l’espérance de vie en augmentation, ou encore
l’émergence des maladies chroniques renforcent la présence et l’implication de ces acteurs,
rendant ainsi précaire le contexte sanitaire et social. La consommation de psychotropes et
l’altération globale de leur état de santé le prouvent quotidiennement.
Évaluer les caractéristiques des aidants qui interviennent au domicile et connaître la
position adoptée par les professionnels auprès de cette population constituent l’objet de
ce travail de recherche. Par l’adoption d’une méthodologie quantitative faisant alliance
avec une méthodologie qualitative, nous tenterons de comprendre comment il est possible
d’intégrer davantage cette population au sein d’un service de soins à domicile du 15ème
arrondissement de Paris. Pour ce faire, 12 entretiens avec des professionnels ont été réalisés.
Nous avons également recensé plus de 77 aidants intervenant au domicile des personnes
âgées dépendantes. Nous avons analysé ces deux approches à partir du cadre théorique que
nous avons élaboré dans la première partie. Les résultats issus de l’analyse - elle-même
élaborée dans la deuxième partie - nous ont permis d’envisager des perspectives et de penser
la fonction de coordinateur en santé dans un service de soins à domicile.
5
6 Introduction
Mémoire de fin d’études 2014-2015
État de la question
La population des plus de soixante ans est celle qui augmente le plus vite. Depuis 1980,
cette population a pratiquement doublé [3]. Au niveau mondial, on estime à 605 millions
le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans [4]. Le vieillissement de la population
est un indicateur de l’amélioration de la santé mondiale. Dans tous les pays de l’OCDE,
l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé à 65 ans a considérablement aug-
menté, notamment en France où elle est la meilleure [3]. Les progrès dans le domaine de la
santé, l’amélioration de nos conditions de vie, l’accès au soins ou encore le recul de certains
facteurs de risques en sont les principales raisons. Sur le territoire français, le vieillissement
de la population doit répondre à plusieurs grands défis. Le contexte socio-économique est
le premier. D’une part, parce que l’impact du vieillissement sur les dépenses de santé est
important et, d’autre part, parce que l’état peine à assurer la pérennité de son modèle.
Cependant, le défi est-il celui d’un contexte qui se veut « idéologique » ? Celui du patient
acteur et co-décideur des soins se positionnant au centre du système de santé, ayant pour
perspective une qualité de vie optimale. La prévalence des maladies chroniques, les soins de
longue durée, la diversité des professionnels de santé, les hyperspécialisations, les nouveaux
besoins en santé ou encore les déserts médicaux constituent un contexte épidémiologique et
médical à prendre en compte. En particulier, ne faut-il pas oublier la réorganisation de notre
système de santé accès sur « une culture du domicile » ? Le projet de loi sur l’adaptation
de la société au vieillissement va dans ce sens puisqu’il tend à faire du domicile « un atout
de prévention »[5]. Cette logique de soins est confirmée par l’opinion publique car dans le
domaine de la dépendance, 8 personnes sur 10 souhaitent le maintien à domicile [6].
Enfin, le contexte sanitaire et social constitue un défi prioritaire. La consommation de
psychotropes, le nombre croissant d’arrêts maladie et la fragilité du lien social mettent en
exergue l’épuisement des proches des personnes âgées dépendantes [7]. Souvent transparents
et se positionnant au travers de deux actants – le malade et l’ acteur de soin – les aidants
représenteraient, en France, plus de 8,3 millions de personnes, ceux-ci intervenant de façon
régulière au domicile de leurs proches qui ont des problèmes de santé ou un handicap.
On estime à 3,4 millions de personnes qui aident un proche de 60 ans ou plus à domicile,
dans les tâches de la vie quotidienne. De plus, 8 personnes âgées aidées sur 10 reçoivent
l’aide régulière de leur entourage. Ceci devrait s’accentuer dans le temps puisque, d’après
une récente étude sur le territoire Français, on estime que 30% des aidants de personnes
âgées dépendantes - soit la majorité des personnes interrogées - feraient en sorte de pouvoir
s’occuper de leurs proches à domicile en cas de perte d’autonomie [6]. Depuis quelques
années, les pouvoirs publics ont pris conscience de cette population [8][9]. De nombreuses
7
8 État de la question
enquêtes ont été publiées et de nombreuses actions ont été mises en œuvre, notamment
en ce qui concerne les différentes mesures publiques. La reconnaissance du statut d’aidant
familial [10], les prestations familiales [11], l’aide au placement temporaire de la personne
âgée, le droit à la formation mais aussi à la VAE - Validation des acquis et de l’expérience -
[12] ou encore l’élaboration d’un guide de l’aidant familial [13], font partie de ces mesures.
En France, les actions en faveur des aidants ont été impulsées très fortement grâce au
lobbying des associations de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Cela explique pourquoi de
nombreuses particularités locales se créent : information, constitution de groupes de parole
ou encore « le café des aidants ». Ce sont des mesures qui tendent à reconnaître l’aidant
comme un acteur social déterminant dans notre système de santé.
En revanche, les instances sanitaires et sociales n’apportent que peu de réponses sur
la manière d’appréhender un proche dans nos actions. L’unique recommandation de bonnes
pratiques de l’ HAS indique la nécessité de suivre médicalement les aidants naturels dans le
cadre de patients atteints de démence, sans pour autant préciser des mesures concrètes, qui
plus est, inscris au travers d’une analyse médicale [14]. Seule une recommandation émise
par l’ANESM en 2014 nous apporte des éléments de réponse. Nous nous appuierons sur
celle-ci tout au long de ce travail. Enfin, la stratégie nationale de santé [15] et le dernier
plan sur la maladie dégénérative [16] renforcent l’accompagnement et la prise en compte
de l’aidant dans les soins auprès du patient. Car le rôle des aidants représenterait sans
doute une économie abyssale de 164 milliards d’euros pour la collectivité. Les instances
gouvernementales ont, depuis peu, renforcé les missions des services médicaux-sociaux dont
l’objectif est de constituer une ressource essentielle pour les proches de personnes malades.
La coordination est le fil conducteur des missions accordées à ces structures, l’objectif
premier étant de diminuer le recours aux hospitalisations en permettant le soutien à domicile
des personnes âgées. Lorsqu’on parle de soutien à domicile, cela implique d’assurer une
prise en charge coordonnée en accord avec les attentes, les besoins et l’histoire de vie des
personnes. L’efficacité des soins et la sécurité des patients sont des enjeux primordiaux.
L’optimisation des moyens, la communication ville-hôpital, l’approche pluridisciplinaire des
situations, la maîtrise des points critiques, l’implication du patient et de son entourage sont
des stratégies à prendre en compte dans le domaine de la coordination. Ce travail s’inscrit
dans cette optique.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Chapitre 1
Une approche théorique
Objectif de la recherche
L’objectif de la recherche est de comprendre, à partir des données actuelles, les caractéris-
tiques des « aidants » qui interviennent auprès des personnes âgées dépendantes. Autrement
dit, leurs besoins, leurs attentes, leurs problématiques de santé, les aides qui sont proposées
afin de déterminer la place qu’ils occupent dans les services médicaux sociaux intervenant au
domicile des personnes. La problématique générale que nous avons élaborée est la suivante :
« Comment penser l’intégration des aidants dans les services de soins à domicile s’occupant
des personnes âgées dépendantes ? »
Questions sous-jacentes...
Domaine sociologique :
– Quels sont le rôle et la place de l’aidant dans la prise en charge de son proche ?
– Comment s’articulent le patient, l’aidant et le professionnel dans les soins à domicile ?
Domaine législatif :
– Comment est reconnu l’aidant au sein de la législation française ?
– Quels sont ses droits ?
Domaine de la santé publique :
– Quelles sont les problématiques des aidants ?
– Quel est le dispositif d’aide en faveur des aidants ? De quelles recommandations peut-il
bénéficier ?
Domaine de la psychologie :
– Quelle est la spécificité des soins à domicile ?
– Comment comprendre le domicile ?
Domaine de l’éthique :
– Est-on naturellement aidant ?
– Quelle serait la juste place de l’expertise familiale dans notre système de santé ?
– « Composer »avec la famille ne serait-ce pas modifier une logique de soin ?
9
10 Chapitre 1. Une approche théorique
Stratégie de recherche
La stratégie de recherche comprend deux axes : la recherche bibliographique et la recherche
empirique. Nous traiterons, dans cette partie, la recherche « bibliographique » permettant
d’aborder le cadre conceptuel.
La stratégie de recherche bibliographique n’est possible que par l’élaboration d’une méthode
rigoureuse, effectuée par étapes. Afin de préciser les objectifs de l’étude et de bien formuler
la question, la recherche documentaire a débuté par une recension de la littérature non
probante. Ainsi, ont été consultés les dictionnaires et les encyclopédies constituant ce que
l’on appelle la littérature grise. Cette dernière a été enrichie par des échanges entre les
professionnels du domaine en se rendant dans les différents SSIAD, notamment en région
Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, ainsi qu’en Île-de-France. Après avoir identifié les
concepts sous-jacents à la problématique, une recherche documentaire sur Internet a été
entreprise par l’intermédiaire des moteurs de recherche qui fournissent une information
volumineuse comme « Google » ou « Google scholar ». L’objectif était non seulement de
comprendre tous les concepts et de les différencier, mais également de confronter la lit-
térature avec l’expérience vécue et les interpellations ayant été identifiées. Une fois la
situation comprise et les concepts sous-jacents identifiés, des mots-clés reprenant les termes
en français et en anglais ont été définis afin de trouver des documents pertinents. Pour
ce faire, plusieurs sites ont été consultés en vue d’identifier ces mots-clés, soit CISMEF
terminologie [17], l’INSERM [18], ainsi que les différents mots Mesh utilisés dans les bases de
données tels que MEDLINE/PubMed ou encore CINAHL. En outre, lors de la consultation
d’un document, un regard a été porté sur les mots-clés utilisés, ce qui a permis de les
confronter avec ceux préalablement identifiés. La recension de la littérature probante a
été menée, avec l’idée que, seule la littérature scientifique est probante. Cette recherche
a été effectuée de manière chronologique, tout en respectant la hiérarchie du niveau des
preuves de l’information, en partant du fait que toutes les informations n’ont pas la même
valeur et qu’il existe une hiérarchie dans la confiance que l’on accorde à une information.
Pour effectuer cette recherche documentaire, les sites de guidelines et les recommandations
de bonnes pratiques ont tout d’abord été interrogés. Ensuite, l’aide de méta-moteurs de
recherche, ainsi que l’utilisation de bases de données se sont avérées utiles. Afin de bien
spécifier le sens de la recherche, nous avons identifié des critères d’inclusion et d’exclusion,
des mots-clés et, enfin, des sources d’information.
Critères d’inclusion Critères d’exclusion
Patients de + de 65 ans
– Patients de - de 65 ans
– Autres populations
Aidants et famille Autres populations (ex : nourrissons, enfants, femme enceinte)
Domicile Hôpital, Clinique, maison de retraite
Tableau 1.1 – Critères d’inclusion et d’exclusion de la recherche
Mémoire de fin d’études 2014-2015
11
Mots-clés en français Mots-clés en anglais
Personne âgée
– Older people dependency
– Dependent elderly persons
– Dependent older eprsons
Aidants et famille
– Caregivers
– Family caregivers
– Spouse caregivers
– Carers
Domicile
– Home care
– Home
Tableau 1.2 – Les mots-clés
Source d’information Commentaire
Sites de guidelines/recommandations de bonnes pratiques
NGC : National Guideline
Clearinghouse
A l’intiative de l’Agency for healthcare Research and
Quality (AHRG) dépendant du Ministère de la Santé
américaine.
NICE : National Institue of Cli-
nical Evidence
Il s’agit d’une organisation reconnue mondialement dans
la mise en place de normes pour les établissements de
santé.
HAS : Haute Autorité de Santé Organisme français qui promeut des recommandations
de bonnes pratiques auprès des usagers et des profes-
sionnels de santé.
EBNursing.be Site belge mettant à la disposition des infirmières des
échelles et des guidelines.
Méta-moteurs de recherche
SUMSearch Méta-moteur de rechercheg ratuit à partir des bases de
données telles que PubMed ou the National Guidelines
Clearhouse...
TRIP databse Site de recherche clinique permettant de trouver rapide-
ment des données probantes sur la pratique clinique.
Bases de données
JBI : Joana Briggs Institute Organisme international spécialisé dans la promotion
et le soutien des soins de santé basés sur des données
probante.
MEDLINE : National Library
of Medecine
Banque de données bibliographiques à caractère médi-
cal.
CINAHL : Cumulative Index
to Nursing and allied Health
Litterature
Revue systématique sur les effets des soins en santé.
Tableau 1.3 – Les principales sources d’information
Mémoire de fin d’études 2014-2015
12 Chapitre 1. Une approche théorique
Il nous semble primordiale de proposer une timide présentation de la personne
âgée dépendante afin de situer le contexte global dans lequel apparaît le concept
d’aidant. Nous analyserons dans cette partie les concepts clés de ce travail à savoir :
la personne âgée, la famille et l’aidant, l’environnement, la coordination. Concepts
ayant permit d’aboutir à une recherche dans ce domaine.
Point de vigilance
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.1. La personne âgée dépendante 13
1.1 La personne âgée dépendante
1.1.1 Des notions-clés : la personne âgée dépendante et le vieillissement
L’organisation mondiale de la santé et la réglementation française définissent une personne
âgée à partir de 60 ans. En France, certaines prestations ou dispositions concernant les
personnes âgées s’appuient sur une définition des personnes âgées lorsque celles-ci ont plus
de 65 ans. C’est cette définition que nous avons décidé de retenir ici. Dans la littérature, les
seuils identifiés pour déterminer cette population varient selon les auteurs et les époques.
Certains insistent sur le fait que l’âge est une construction sociale. On parle d’ailleurs de
« continuum de l’âge »[19]. De ce fait, une personne âgée est souvent définie en référence
non seulement à son âge mais aussi à son statut social. C’est pourquoi les personnes âgées
constituent un groupe hétérogène regroupant les jeunes retraités, les personnes très âgées,
les personnes âgées dépendantes, celles vivant en institution ou encore celles regroupant les
personnes âgées immigrées. Socialement, on peut distinguer deux périodes dans le processus
de vieillissement. La première, dite du troisième âge, concerne la tranche d’âge de 60 ans
à 70 ans. On parle alors de jeunes séniors ou « young old » dans la littérature. Cette
catégorie concerne les sujets sains ou malades qui demeurent autonomes. La seconde a reçu
l’appellation de quatrième âge, qui se caractérise par des sujets très âgés de plus de 80
ans, appelés « old-old ». En France, les personnes âgées de plus de 60 ans représenteraient
23,1% de la population [20]. On assiste même à un phénomène de « gérontocroissance
[21] » puisque le nombre de personnes âgées de 60 ans augmentera de 10,1 millions entre
2007 et 2060. Par définition, le vieillissement correspond à l’évolution d’un organisme mais
aussi à un affaiblissement, une altération progressive des facultés dues à l’âge [22]. Nous
avons décidé de retenir la synthèse des travaux de C. Rajons-Roux et R. Simon-Prel, qui
nous permettent d’avoir une approche systémique sur la notion de vieillissement.
Le vieillissement biologique : ensemble des modifications cellulaires, tissulaires,
morphologiques, anatomiques et physiologiques, apparentes ou non, de l’organisme.
Le vieillissement intellectuel : se distingue par un retentissement des fonctions
cognitives, une diminution des facultés d’attention, de concentration, d’apprentis-
sage.
Le vieillissement affectif : correspondant à un désinvestissement affectif.
Le vieillissement social : difficulté d’adaptation à l’évolution du monde,
altération de l’image de soi.
D’après les travaux de Rajon-Roux.C et Simon-Prel.R
Typologie du vieillissement
Évoquer la notion de vieillissement, fait apparaître celle de la dépendance. Pour certains,
ce terme induirait une vision négative du problème ainsi qu’une notion d’irréversibilité. En
fait, elle fait apparaître l’idée d’interdépendance et de solidarité. Les textes de lois évoquent
la notion de dépendance totale et de dépendance partielle. Nous décidons de retenir la
définition en gérontologie de la dépendance comme le besoin de recours à un tiers pour
réaliser les activités de la vie courante.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
14 Chapitre 1. Une approche théorique
1.1.2 Les problématiques du grand âge
Sur le plan médical, lorsqu’on évoque les problèmes liés au vieillissement, on parle de
processus normal et pathologique, dans la mesure où tout être vivant vieillit et ce, dès le
début de son existence. De ce fait, l’ensemble des fonctions physiologiques s’altère avec l’âge.
Parler de vieillissement pathologique, c’est prendre en considération les problématiques de
la gériatrie entre polypathologie, perte d’autonomie, fragilité, vulnérabilité et dépendance.
Les instances sanitaires, aux niveaux mondial et national, font des problématiques de santé
les plus fréquentes : les pathologies vasculaires et les pathologies dégénératives du cerveau
ou encore les maladies des os et des articulations, mais aussi les phénomènes de chute,
de déshydratation ou de maltraitance [23][24][25][26]. Ces préoccupations interviennent
dans divers domaines tels que la santé mentale, le capital santé, les problèmes associés
aux médicaments, la nutrition, l’activité physique, la prévention des accidents et des
traumatismes ou encore la consommation de substances addictives. À domicile, toutes ces
problématiques sont rencontrées. Nous insistons notamment sur le fait que l’état fonctionnel
cognitif caractérise les personnes en établissement et celles en ménage. Selon le territoire,
on assiste plus spécifiquement à des phénomènes de précarité, en particulier à la suite de
difficultés de conditions de logement. Cela explique pourquoi les services d’aides à domicile
instaurent des aides techniques permettant de réadapter le logement. Ces difficultés en
engendrent d’autres puisque la médicalisation du domicile est difficilement vécue par les
personnes, du fait que le logement constitue un refuge empreint de valeurs et d’histoire.
Cette profonde fragilité des personnes âgées est également caractérisée par un sentiment
de solitude, d’isolement, de tristesse et d’ennui, malgré l’implication de l’entourage. Les
multiples intervenants à domicile et la place de l’entourage conduisent à redéfinir les rôles de
chacun. C’est dans ce contexte que peuvent survenir des enjeux relationnels. Modification
de l’image corporelle et sentiment de perte de maîtrise sur la situation constituent des
problématiques récurrentes de la personne âgée à domicile. Ces problèmes se situent dans
un contexte global, dans lequel la société française véhicule une image désastreuse de la
vieillesse.
1.1.3 Synthèse de la politique française en faveur des personnes âgées
En France, la politique sociale en faveur de la personne âgée est née de la Loi de 1905
qui pose le principe de l’assistance obligatoire aux vieillards en leur donnant la possibilité
d’être accueillis dans des hospices ou de percevoir une pension [27]. Cette législation est
complétée par les lois du 5 avril 1910 et du 30 avril 1930 sur les retraites, puis sur les
assurances sociales (revenu minimum vieillesse). La période d’après-guerre est caractérisée
par l’instauration de la branche vieillesse de la sécurité sociale. Un régime est fondé sur
le principe de redistribution et de solidarité entre générations : les actifs payent pour les
pensions des retraités. Des régimes complémentaires de retraite sont mis en place et une
lutte contre la pauvreté des personnes âgées est instaurée. La notion de politique vieillesse
fait son apparition en 1960, suite aux réflexions ayant émergé dans le rapport Laroque [28].
Les objectifs principaux de cette politique - toujours d’actualité - sont de porter un autre
regard sur le vieillissement, de privilégier le soutien à domicile ou encore de développer
la coordination entre les politiques sectorielles. Plus tard, les départements se verront
confier la responsabilité de l’action sociale et de l’aide sociale[29]. Un service départemental
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 15
médico-social de soins aux personnes âgées dépendantes a été mis en place, l’objectif étant
d’attribuer les prestations, de coordonner les organismes et d’évaluer l’efficacité des services
rendus. Entre 1997 et 2011, les orientations des politiques publiques et sociales en faveur des
personnes âgées se distinguent généralement par la mise en place de prestations [30][31][32]
et d’outils permettant d’évaluer les besoins d’aide par le biais de la grille AGGIR. L’une des
grandes orientations vise la protection des personnes âgées en institution par la définition de
leurs droits fondamentaux, suite à la loi du 2 janvier 2002 [33]. Les évènements caniculaires
en 2003 permettront de réorganiser la politique en faveur des personnes âgées, notamment
par la mise en place de la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des
personnes âgées. De nombreux plans se dessineront alors, afin de prévenir les complications
de santé, de lutter contre la solitude, d’ améliorer la qualité de vie des personnes, de
maîtriser les dépenses, ou encore de prendre en charge les démences de types Alzheimer
[34][35][36]. À ce jour, un des enjeux de l’adaptation de la société au vieillissement concerne
la prise en compte des aidants de personnes âgées dépendantes.
1.2 Les aidants
1.2.1 Histoire d’un acteur toujours présent et transparent
Le proche de la personne malade a toujours existé et ce, sous différentes formes. Déjà au
1er siècle de l’ère chrétienne, Sénèque rappelait, ô combien, ses amis ont participé à sa
guérison. C’est ce même proche qui apparaît au travers de chacune de nos expressions
humaines. La peinture de la Renaissance, les scènes d’hospices du XVIII ème siècle, les
récits et, aujourd’hui, au sein même de nos activités sociales comme les forums ou encore
les animations locales. Dans notre système de santé, on reconnaît le déni des compétences
de la famille en 1707, lorsque le monopole de l’exercice de la médecine est attribué à un
seul acteur, le médecin [37]. L’hôpital devient le lieu à l’origine de la séparation entre
le malade et sa famille. Les transformations de l’organisation sociale et l’évolution de la
famille dans le domaine de la santé laissent place aux soignants, seuls à même de répondre
aux difficultés que traverse le malade. Pour autant, le proche est toujours présent, et il
se dissimule derrière les interventions des professionnels. Même à domicile, la famille est
souvent témoin d’une puissance scientifique. Au milieu du XXième siècle - après la Seconde
Guerre mondiale - la présence des proches se renforce, la médecine étant impuissante face
aux mutilés de guerre. Toujours présent mais socialement oublié, le proche est celui qui vit
au quotidien de la personne malade en dispensant les soins du corps, mais aussi ceux de
l’âme. Le vieillissement de la population et les progrès de la médecine ont fait apparaître un
nouveau fléau : les maladies chroniques. Les soins de longue durée viennent profondément
reconfigurer le paysage sanitaire et social en structurant le dispositif de soins à la personne
[33]. Plus tard, le législateur reconnaît le patient comme un être de droit[38]. L’entourage,
lui, est toujours oublié sous l’appellation de la personne de confiance ou de celle d’aidant,
inscrite au sein même de la politique en faveur des personnes handicapées [10]. Les aidants
de personnes âgées dépendantes sont de plus en plus nombreux à intervenir à domicile. Pour
preuve, les services médico-sociaux reposent sur la présence et l’implication de l’entourage
pour pérenniser le maintien à domicile de leurs proches.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
16 Chapitre 1. Une approche théorique
1.2.2 La famille n’existe pas !
Étymologiquement, le mot « famille »est issu du latin « familia » signifiant « ensemble
des habitants de la maison »[39]. La notion de famille fait donc correspondre celles des
personnes vivant réciproquement au sein d’un espace donné. Par définition, le concept de
famille renvoie à la parenté par le sang, les alliances et les adoptions [40]. Représentant
une entité sociologique, économique et juridique, le terme de famille figure dans le Code
civil[41]. Ce droit est en constante évolution. Ainsi la famille est un concept en mutation,
qui prend source au sein de la société humaine dont la description doit être élargie, compte
tenu de son évolution. Fondé traditionnellement sur le mariage, ce terme renvoie aussi à
la notion de couple, à la fois sous forme d’union libre et par un pacte civil de solidarité.
On parle également de famille homoparentale et/ou monoparentale. Il semble cependant
important de comprendre que la famille est considérée comme une unité sociale, puisque
l’État fait partie du cercle de la famille. Il en assure même le contrôle : « la notion assure à
l’individu et à la famille les conditions nécessaires à son développement »[42]. D’un point
de vue sociologique, la famille est une unité de reproduction biologique, de production, de
socialisation, de transmission, mais également de consommation [43][44]. Cette institution
ne peut exister que s’il y a d’abord une pluralité de famille que constitue la société. Cela
fait émerger la notion de filiation et les divers modèles familiaux existants. À ce jour, on
différencie deux grands types de famille que sont la famille élargie comprenant parents et
alliés, ainsi que la famille élective. Les systèmes familiaux au sein de notre société sont
divers et complexes, puisque différents types de famille peuvent coexister dans le temps
et l’espace. À ce sujet, Wright et Leahey pensent que « tout groupe qui se reconnaît en
tant que famille est une famille ». La famille est donc une unité ou les membres sont ou
non reliés par la naissance, le mariage, ou l’adoption et vivent ou non sous le même toit.
Elle suppose obligatoirement des liens affectifs et solidaires, un sentiment d’appartenance à
un groupe dans lequel chacun s’identifie comme étant membre à part entière d’une famille.
Ce sentiment d’appartenance met implicitement en évidence l’engagement qui implique les
personnes dans une responsabilité réciproque, considérant dès lors que la famille n’est pas
une réalité observable. Cette idée est reprise dans l’épistémologie systémique. En se référant
à la théorie des systèmes, la famille en soi n’existe pas. Étant vue comme un ensemble
d’éléments en interaction qui échangent des informations avec l’extérieur, ayant comme
idée générale que « le tout est autre chose que la somme des parties »[45]. Il s’agit d’une
co-construction qui permet de donner du sens à l’histoire des personnes qui la composent.
La psychanalyse parle de la famille comme une construction mentale par laquelle chaque
individu détermine un certain nombre d’éléments. Elle ne se limite pas aux personnes.
En effet, animaux domestiques et éléments matériels peuvent faire partir des éléments
constitutifs du cercle familial. La proximité des membres avec leurs proches est une des
caractéristiques qui fonde la famille. La survenue d’un accident, l’apparition d’une maladie,
le déclin des fonctions physiques et psychologiques d’une personne modifie la dynamique
familiale. Elle peut entraîner un ou plusieurs de ses membres à prendre soin de la personne
affectée. Accompagner un proche dans ses difficultés amène la famille à occuper une fonction
particulière. C’est dans ce contexte que l’on parle du concept d’aidant.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 17
1.2.3 Aider et être aidant : entre fonction et appartenance
Se rapportant à sa définition, le terme « d’ aidant » signifie « les personnes qui prêtent
leur concours à quelqu’un, qui aident quelqu’un »[46]. Le concept d’aidant fait référence
aux concepts d’identité, de famille appartenant au courant de la sociologie. La notion
d’aidant trouve son origine en Outre Atlantique ou le proche de la personne malade se
nomme « Carer ». Ce terme désigne aussi bien les soins prodigués qu’une certaine disposition
affective. Il s’agit d’un concept récemment étudié (début du XXI ième siècle). Plusieurs
qualificatifs viennent enrichir ce concept aussi large que complexe : aidant naturel, aidant
de fait, aidant familial, aidant informel, personne de soutien, le proche-aidant ou encore
l’aidant professionnel. L’aidant est officiellement défini en 1998 par le conseil de l’Europe
qui évoque une personne sans statut professionnel. Il correspond à « des membres de la
famille, des voisins ou d’autres personnes qui prodiguent des soins ou accompagnent des
personnes dépendantes ». En 2006, la COFACE propose une définition similaire de l’aidant,
inscrite dans la charte européenne de l’aidant familial [47]. Dans certains pays européen,
c’est surtout le concept de « proche aidant » qui est identifié. Au sein de la législation
française, le concept « d’aidant » est apparu pour la première fois en 2005, dans le domaine
du handicap. « L’aidant naturel » correspond à la personne qui est désignée par le patient
afin d’accomplir des actes de soins prescrits par un médecin, après une éducation et un
apprentissage adaptés et encadrés par décret d’application. La loi précise que l’aidant doit
être informé, formé et accompagné dans ses démarches [10]. Le concept d’aidant sera ensuite
élargi sous l’appellation d’« aidant familial » au sein de la politique de l’action sociale et de
la famille. Il désigne :
« ... le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle la personne handicapée a conclu
un pacte civil de solidarité, l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au quatrième
degré de la personne handicapée, ou l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au
quatrième degré de l’autre membre du couple qui apporte une aide humaine. »
Tableau 1.4 – Décrét n˚2008-450 du 7 mai 2008
Code de l’action sociale et des familles
Au sein de la politique en faveur des personnes âgées le concept d’aidant n’est pas défini. Il
est vrai qu’une pluralité de termes figurent au sein de la réglementation française. On parle
d’aidant naturel et informel, de personne de confiance, de proche, de famille, d’entourage
ou encore de conjoint. Cette situation nous mène à réfléchir sur la position de l’aidant au
sein de notre société : soit une position secondaire et déséquilibrée. Dans des pays tels que
les États-Unis, le Canada ou la Chine, ce sont les termes de « Caregivers » qui sont utilisés.
Le terme de « Carers » apparaît majoritairement au Royaume-Uni, en Nouvelle Zélande ou
encore en Australie. L’ensemble des études met implicitement en évidence une contradiction
qui se retrouve dans la sémantique du terme d’« aidant ». En effet, la fonction de l’aidant,
renvoie aussi bien à une solidarité familiale qu’à une véritable professionnalisation. On
parle d’ailleurs d’aidant professionnel et non-professionnel. À ce sujet, les qualificatifs d’
« informel » et de « naturel » introduisent ces nuances sémantiques. Le premier désigne une
absence de reconnaissance de la relation entre le proche et son aidant. Le deuxième montre
que la fonction d’aidant relève d’une logique, d’un héritage et d’une disposition naturelle.
Ainsi il convient de prendre en compte ces deux dimensions : aider quelqu’un et être aidant.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
18 Chapitre 1. Une approche théorique
Dans le cadre de ce travail, nous considérerons l’aidant au sens large, à la fois professionnel
et non-professionnel, bien que nous nous intéressions davantage aux aidants familiaux.
1.2.3.1 Les aidants professionnels
Les aidants professionnels du soin à domicile sont majoritairement des femmes. L’aide
dispensée est caractérisée par un turnover important, en lien avec la pénibilité des services
proposés mais aussi avec la grande précarité des services à la personne. Les aidants pro-
fessionnels forment une équipe pluridisciplinaire dont l’objectif est d’évaluer l’autonomie
et l’environnement de la personne en vue de construire un projet individuel de soins. Ils
regroupent les auxiliaires de vie, les aides-ménagères, les aides-soignants, les infirmiers, ainsi
que toute personne intervenant à domicile et qui se positionne en tant que professionnel du
prendre soin. La réalisation de gestes et d’activités de la vie quotidienne constituent les
principales pratiques des professionnels, intervenant dans les tâches ménagères et les soins
personnels. Ils assurent une compagnie, une présence dès le lever de la personne jusqu’a son
coucher. Ainsi ces aidants n’ont que peu le temps de participer à des formations.
1.2.3.2 Les aidants familiaux
Pivot du système de soins à domicile, l’entourage de la personne aidée participe au maintien
à domicile des personnes âgées dépendantes, leur permettant de vivre le plus longtemps
possible dans le respect des choix établis. L’aidant familial n’est pas dévolu à n’importe
quelle figure familiale. Il est lié à plusieurs facteurs que sont le genre, la génération, la
qualité de la relation et la proximité géographique. Dans la grande majorité des cas, c’est
le conjoint qui est l’aidant principal. S’il est malade ou décédé, c’est souvent la fille aînée
qui est l’aidant référent. Les femmes sont choisies de manière privilégiée. Dans le cas où la
fratrie est composée de plusieurs enfants, l’aidant est celui dont la proximité géographique
et le contexte familial (marié(e) ou non, avec ou sans enfants, en activité ou non) s’avèrent
les plus propices à s’occuper d’un proche. La notion d’aidant principal renvoie surtout à
une histoire familiale et, de facto, aux membres qui la composent, faisant intervenir des
rôles et des mécanismes de régulation. La désignation de ce rôle n’est pas le fruit du hasard,
elle repose sur des critères très subjectifs et complexes. Bien souvent, ce choix n’est pas
négocié, il s’inscrit dans un dû implicite que la personne doit assumer.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 19
1.2.4 Rôle, place et responsabilité des aidants
Dans la littérature, nous constatons que les rôles et les fonctions 1 des aidants varient
selon le type et le stade d’évolution de la pathologie. Cependant, nous pouvons affirmer
que l’aidant conjugue plusieurs rôles. Celui de parent-aimant, d’accompagnant et/ou de
soignant. Ce contexte fait émerger la dimension relationnelle qu’occupent les familles en
termes de présence et de soutien moral/psychologique auprès de la personne en situation
de dépendance. Dans un contexte de soins à domicile, l’aidant est conduit à assurer deux
fonctions principales : une fonction de production domestique et une fonction de production
de soins. Certains auteurs parlent de « direct activities/tasks and indirect activities/tasks ».
Parmi ces activités, l’on compte celles liées aux soins personnels comme l’aide à la toilette et
à l’habillage et celles associées aux soins de santé comme la préparation et la surveillance des
traitements qui constituent les « soins directs ». « Les soins indirects » regroupent toute la
gestion des soins en termes de coordination entre les différentes prestations et les structures
intervenant à domicile. La gestion financière, la prise de rendez-vous ou encore les transports
font partie de ces activités, celles-ci étant réparties en fonction des intervenants à domicile
et de la capacité de la famille à les assurer. L’aidant est également perçu comme celui qui
entoure les soins dispensés par les professionnels. Qu’il soit naturel ou professionnel, l’aidant
principal est une personne ressource pour les équipes soignantes, ayant une connaissance
approfondie de l’histoire de la personne et de ses habitudes de vie. Sa propre perception sur
le vécu de l’accompagnement et sur l’évolution prévisible de la pathologie de la personne
soignée peut être un soutien pour la prise en charge de son proche. La place des aidants
dans le dispositif de soins à domicile est dynamique et évolutive, souvent située au sein
même d’une relation triangulaire - patient/aidant/soignant -. D’un point de vue théorique,
nous constatons que dans cette configuration, le professionnel prend en compte un tout
dans lequel l’un des membres est malade. Son intervention crée un système qui constitue dès
lors un élément caractéristique de ce triptyque. L’homéostasie de cette entité passe par des
moments critiques dans lesquels le système peut dysfonctionner. Le triangle de Karpman (cf
graphique ) est un outil permettant de penser en permanence chaque élément du système.
Par l’analyse transactionnelle, Karpman indique qu’il est fréquent d’observer, dans un
groupe de trois personnes, trois rôles particuliers : persécuteur, sauveteur et victime. Bien
que ces rôles soient installés, il se produit généralement « un coup de théâtre » au cours
duquel les rôles vont permuter. Citons par exemple un coordinateur de soins qui intervient
au domicile, et qui constate que le mari d’une patiente pratique un geste déraisonnable.
Le coordinateur risque de percevoir le patient comme une victime et l’épouse comme
une persécutrice. En faisant le choix d’intervenir, et en demandant à l’épouse de changer
1. Il importe de rappeler que si les termes de « rôle »et de « fonction »sont étroitement liés, ils regroupent
des définitions distinctes. Selon JL Moreno - théoricien Américain - le rôle correspond à l’ensemble des
comportements et à l’image sociale d’un individu selon son statut et sa fonction. La fonction, quant à elle,
peut être définie comme une tâche ou une mission attribuée par un individu. Le rôle désigne tantôt « le
modèle qui inspire la conduite, tantôt la conduite elle-même ». Il prend place dans un contexte social car il
repose sur les relations. Parler de rôle social, c’est prendre en compte l’aspect collectif que peut revêtir un
rôle. Homans le décrit comme une norme qui établit la relation attendue d’une personne dans une certaine
position avec l’autre. Cela revient à dire que l’aidant et l’aidé se trouvent dans une attente mutuelle. Nous
retiendrons la proposition de Rocheblave-Spelé qui met en évidence 3 niveaux de classication du rôle :
le niveau intersubjectif, dans lequel l’aidant définit son rôle par l’interaction avec l’aidé ; le niveau de la
personnalité, qui correspond au fait que l’aidant détermine lui-même son rôle ; enfin, le niveau du groupe,
qui distingue le rôle de l’aidant comme le consensus et l’expression des normes et des valeurs culturelles.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
20 Chapitre 1. Une approche théorique
de comportement, celui-ci se positionne en sauveteur. Après des échanges vigoureux ou
chacun tente de convaincre du bien-fondé de son action, le patient intervient pour mettre
fin à cette sensation désagréable qu’il ressent. Enfin, il est fort probable que ce dernier
choisisse de soutenir sa femme. Les rôles permutent : le patient accuse le professionnel d’être
un persécuteur et positionne sa femme comme une victime. Le coordinateur peut alors
éprouver un sentiment de confusion, puisque, pourtant, il cherchait à aider le patient. Cette
triangulation se centre souvent sur des enjeux de pouvoirs. La circulation de l’information
permet de maintenir ce système. Pour cela, le « je » du professionnel doit être inclus en même
temps que le « nous », permettant ainsi de former une référence collective indispensable
au maintien des relations. Trouver les mots justes, informer, créer un climat de confiance,
évaluer la vulnérabilité de l’aidant sont autant de moyens pour maintenir les relations.
Dans les services médico-sociaux, l’appréciation de la place des aidants relève de pratiques
hétérogènes. Bon nombre de services de soins à domicile ont une approche très focale,
concentrée sur la prise en charge du patient. Nous émettons l’hypothèse selon laquelle cette
approche est liée principalement à la formation des professionnels. Même si les soignants
s’appuient sur les aidants pour pouvoir assurer une continuité de la prise en charge, cet
appui est instrumentalisé car très souvent, il n’existe aucune évaluation formelle réalisée
auprès de l’aidant. Certaines institutions - influencées par le contexte politico-économique-
ont fait le choix d’intégrer pleinement les aidants de personnes âgées dépendantes. Ces
intégrations peuvent reposer sur la mise en place de groupes de parole animées par des
psychologues, de formation en partenariat avec des associations de patients ou de mise
en place d’outils logistiques dans le but de prendre en compte l’aidant. Les formations
proposées peuvent être une réponse à l’évaluation faite sur le territoire. Par exemple, citons
les formations centrées sur les gestes de premiers secours. D’autres structures ont également
intégré pas à pas l’aidant dans le projet de soins infirmiers du patient, tout en tenant
compte du contexte socio-environnemental dans lequel il apparaît. Les équipes mobiles
Alzheimer mise en place à la suite du plan Alzheimer ont impulsé grandement les actions
en faveur des aidants. Les programmes de formation des professionnels, et notamment des
assistantes de soins en gérontologie, prennent en compte la personne âgée et son aidant. Ils
permettent ainsi d’assurer une évaluation de la personne âgée, mais également de l’aidant
afin d’assurer un meilleur accompagnement tout au long de la prise en charge.
Lorsqu’on parle de la responsabilité des aidants, on prend en considération l’obligation faite
à une personne de répondre de ses actes, du fait du rôle et des charges qu’elle doit assumer.
Dans la littérature, on parle majoritairement des responsabilités que doit prendre la société
à l’égard de l’ aidant. Cependant, on note que celui-ci oscille entre plusieurs responsabilités :
responsabilités personnelles et responsabilités professionnelles. À ce sujet, on parle le plus
souvent de responsabilité morale à l’égard de la personne dépendante. Il est vrai que la
responsabilité est une notion juridique. Pour autant, elle peut aussi être définie comme un
sentiment : se sentir coupable. Même s’ils ne concordent pas toujours, ces deux versants de
la responsabilité renvoient à la capacité à être responsable pour soi-même et pour autrui.
Jonas définit la responsabilité de l’autre en réponse à sa fragilité. La sollicitude constitue
une évidence, bien avant d’être un devoir. Ainsi, cette obligation morale de prendre soin de
l’autre répond à un devoir « d’être » qui précède le devoir de « faire ». Grâce à cette idée,
nous avons une représentation du « pourquoi » être aidant. En raison d’une absence de
statut clairement défini, il est difficile de se représenter les responsabilités des aidants dans
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 21
Graphique 1.1 – Le triangle de Karpman
la fonction qu’ils occupent auprès de leurs proches. Cependant, comme tout être humain,
ils détiennent des droits et des devoirs que leur confère la société.
1.2.5 Répercussions du rôle d’aidant
Dans la littérature, le rôle de l’aidant est souvent lié à la notion de charge et de fardeau
nommé « burden ». Cette charge peut être exprimée de deux façons : une charge objective et
une charge subjective. La charge objective représente les conséquences concrètes que l’aide
engendre sur la vie de l’aidant, tandis que la charge subjective constitue l’ensemble des
conséquences physiques, psychologiques émotionnelles, sociales et financières ressenties par
l’aidant. Il s’agit de ce qui est perçu par l’aidant comme ayant un impact direct sur sa qualité
de vie et celle de son proche. De nombreuses études ont démontré l’impact négatif du rôle de
l’aidant. Il concerne tout d’abord la santé physique et psychique de l’aidant. Des symptômes
tels que la fatigue physique, l’épuisement, les palpitations et la tachycardie ont été décrits.
On évoque aussi l’apparition de maladies chroniques et d’un état de santé généralement
perçu comme délétère, pouvant conduire à une dépression. Les répercussions psychologiques
sont également évoquées en particulier le stress, l’anxiété, le surmenage et le renoncement.
Elles peuvent être en lien avec un sentiment de culpabilité, d’échec, de honte ou encore
une angoisse de perte : la perte de l’être cher et la perte du statut d’aidant. Aucune étude
ne démonte si la fatigue physique conduit à la fatigue morale ou inversement. Le facteur
temporel est un élément important à prendre en compte. La maladie et les troubles évoluant,
l’aidant est confronté à une accumulation et à une répétition des soins qui conduisent à
Mémoire de fin d’études 2014-2015
22 Chapitre 1. Une approche théorique
l’épuisement, voire à une consommation de psychotropes et de traitements médicamenteux.
Cet état de santé a des répercutions sur la vie sociale de l’aidant. Le réseau social diminue
du fait de l’implication de l’aidant et l’isolement s’installe rapidement. Les sentiments
de solitude et de « mort sociale » peuvent être ressentis par l’aidant. Certains auteurs
mettent en exergue le risque de désocialisation et de marginalisation de cette population.
L’aide n’impacte pas seulement sur la vie personnelle de l’aidant, elle bouleverse aussi
l’organisation professionnelle. Ces répercussions peuvent aller d’un simple aménagement du
temps de travail à un arrêt total de l’activité. L’aspect financier est un élément à prendre
en considération, ayant un impact sur la qualité de vie de la personne aidée, ainsi que
sur la personne aidante. Aider un proche dans le besoin peut également recouvrir des
aspects positifs. Peu d’études se sont intéressées à cette dimension de l’aide. Pour autant,
les éléments positifs ressentis par l’aidant peuvent être l’amour, la tendresse, l’optimisme
et l’acceptation. Le rapprochement et le resserrement des liens affectifs, le partage d’un
temps en commun apportent un réel échange et une proximité plus grande dans la relation.
Cette proximité peut se traduire par une relation fusionnelle. De plus, l’épanouissement
et l’enrichissement personnels peuvent apparaître, car accompagner une personne âgée,
c’est apprendre à vivre autrement, expérimenter de nouvelles choses et s’ouvrir à d’autres
conceptions de la vie. L’aspect positif de cet accompagnement est en corrélation avec la
dimension subjective de l’aide, étant donné que le sentiment de réussite et l’assurance de la
personne aidante sont des facteurs essentiels. L’aidant conjugue sans cesse avec les aspects
positifs et les aspects négatifs de l’aide. Ce contexte est propice à des sentiments mixtes
perçus par l’aidant. On parle alors d’ambivalence, entre souffrances et compétences, doute
et culpabilité, constituant le lit de souffrance familiale.
1.2.6 Profil des aidant(e)s
En nous appuyant sur les travaux de Coudin (2004), nous pouvons distinguer 4 types
d’aidant. Le premier profil est caractérisé par la valorisation attachée à ce rôle. Le soutien
apporté constitue une source de gratification mais aussi l’unique raison de vivre. L’aidant
se considère comme étant le seul à même de répondre aux besoins de son proche. Coudin
évoque le déni de la gravité de la maladie dans une posture de toute puissance. Le deuxième
profil d’aidant se distingue par des personnes sans enfants qui ont peu de maîtrise sur
la prise en charge de la maladie. Ces aidants paraissent épuisés, dépressifs et proches de
la rupture. Les aidants « rationnels » sont des conjoints dont le rôle et la fonction sont
fondamentaux. Cependant, à l’exception du premier profil d’aidant, ceux-ci comportent
d’autres sources de valorisation. Enfin, le quatrième type d’aidant est celui que l’auteur
nomme l’aidant « distancié », étant un enfant qui ne vit pas au domicile de la personne
soignée, et qui n’a pas de réticence à prendre soin de son proche. Cette classification s’avère
hypothétique mais nous aide à mieux comprendre le profil des aidants. L’évolution de ces
profils est perceptible. De ce fait, nous avons retenu les caractéristiques essentielles liées au
profil des aidants de personnes âgées dépendantes à domicile, issues des dernières recherches
dans ce domaine que voici [48][49][50] :
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 23
– Plutôt des aidantes : la majorité des aidants informels sont des femmes. La mas-
culinisation est amorcée et les aidants jeunes apparaissent. Dans certains pays, ce
phénomène existe ; on parle alors de « young carers »et de phénomènes de « génération
sandwich ».
– Des membres de la famille : parents et conjoint constituent le duo que l’on retrouve
le plus.
– Des aidants « âgés » : 57% des aidants ont plus de 50 ans.
– Une fourniture de soins quotidienne : 66% des aidants informels dispensent des
soins sur une base quotidienne. Les 34% restants prodiguent des soins sur une base
hebdomadaire. L’aidant est une personne très impliquée dans son rôle.
– Le soutien psychologique et la surveillance : ils constituent les principales aides
que fournissent les aidants auprès de leurs proches.
– Le manque de temps : il constitue l’une des difficultés que rencontrent les aidants.
– Un acteur « invisible » : les professionnels n’évaluent pas les besoins de l’aidant et
peu de conseils sont apportés.
1.2.7 Besoins, attentes et dispositifs d’aide
NB : Les besoins et les attentes des aidants ne seront pas cités par ordre de priorité. Ils
concernent principalement : [50].
– Les soins relationnels qui constituent un besoin essentiel pour les aidants. Il s’agit,
pour eux, d’être écoutés, compris, soutenus et de se montrer disponible à leur égard.
L’information sur les dispositifs de soutien aux aidants, sur les démarches administratives,
les formations, les aides financières ou encore sur le matériel existant sont les demandes
les plus récurrentes exprimées par les aidants.
– La qualité de l’accompagnement de la personne soignée. L’une des attentes des
aidants est la qualité de la prestation des services en faveur de leurs proches. Cela
passe par la capacité des professionnels à rentrer en relation avec la personne soignée,
mais aussi à prodiguer efficacement des actes de soins tels que la toilette, l’habillage ou
encore les transferts. Certaines études ont retenu des critères de qualité qui concernent :
la personnalisation des soins, la ponctualité, la bienveillance ou encore le sérieux des
professionnels dans le cadre de leur travail.
– La reconnaissance des aidants. Cette reconnaissance est ici envisagée comme l’iden-
tification des capacités et des aptitudes des personnes aidantes à soutenir leur proche.
Elle concerne également l’implication et la place de cette personne, compte tenu de leurs
difficultés et de leurs contraintes. La reconnaissance de la part des professionnels est
souvent traduite verbalement, notamment sur la valorisation de l’estime de soi et la
valeur de l’engagement de l’aidant. Le partenariat de soins auprès de cette population est
aussi une forme de reconnaissance puisqu’il s’agit d’une prise en compte de l’expertise
des aidants dans les soins menés auprès de leurs proches âgés.
– L’allègement des responsabilités. Les rôles de l’aidant sont multiples. Le rôle de co-
ordination des aidants est considéré comme le plus important, surtout lorsque la personne
est désignée comme « aidant principal ». De ce fait, elle assume une très grande respon-
sabilité de l’ensemble des interventions menées, aussi bien à domicile qu’à l’extérieur. Les
études montrent que les aidants souhaitent déléguer ce rôle de coordination, étant trop
Mémoire de fin d’études 2014-2015
24 Chapitre 1. Une approche théorique
occupés dans leurs vies. Le poids des responsabilités, notamment en termes de décisions,
est souvent verbalisé par les aidants.
Les dispositifs d’aide en faveur des aidants dépendent essentiellement des besoins et des
attentes exprimés par la personne soignée et l’aidant. Ils concernent plusieurs domaines
et peuvent être abordés de manière différente. Afin de clarifier l’ensemble des aides à
destination des aidants, nous avons décidé de les catégoriser en soutiens directs et indirects.
Les soins directs sont les actions menées pour la personne aidante. Les soins indirects
concernent l’ensemble des actions menées pour la personne soignée. Nous proposons ici une
liste des différents soutiens qui ne constitue cependant pas une typologie exhaustive de
l’aide en faveur des aidants.
Soutiens directs Soutiens indirects
– séjour et vacances
– groupe de soutiens et de paroles
– bistrots mémoires
– café des aidants
– activités sociales et culturelles
– plateforme de répit
– les dispositifs d’information : CLIC, as-
sociations de patients, Conseil général,
MDPH, Sécurité sociale, site internet ou
encore forum.
– soutien dans le cadre du travail : la loi
prévoit trois type de congés sans solde.
– les structures sanitaires : les services de
soins à domicile comme les SSAD, les
SSIAD et les SPASAD incluant les ESA,
les réseaux de santé gérontologiques, l’hô-
pital de jour, l’hôpital de nuit, l’hôpital
à temps partiel, les centres hospitaliers,
les professionnels de santé libéraux, les
centres de mémoire, centres de soins et ré-
adaptations, accueils temporaires (MAS,
FAM, EHPAD).
– les aides matérielles : exemple : téléa-
larme, lit médicalisé ou encore chaise per-
cée.
– les aides financières : APA, PCH, tierce
personne
Bien qu’il existe plusieurs mesures à destination des aidants, de nombreuses limites ap-
paraissent. L’aspect financier, le placement de la personne âgée en institution, le manque
d’information et de temps, la complexité et la diversité des intervenants sont autant de
freins qui ne permettent pas à la personne et à son aidant d’être accompagnés. En France,
nombre de dispositifs sont à destination des aidants atteints de la maladie d’Alzheimer.
Ainsi, l’ensemble des personnes aidantes, dans le cadre d’autres pathologies, ne permettent
pas d’accéder à des offres de soins.
1.2.8 Le handicap familial
Comprendre le handicap familial revient à penser le handicap lié à la dépendance d’une
personne âgée comme une rupture de « contrat ». Parfois, il arrive que la famille adopte
une dynamique de « jeu inégal » entre ses parties. Des phénomènes de maltraitance peuvent
se produire, puisque les familles ne se voient pas vulnérables. Surprotection, infantilisa-
tion, maternage/paternage, sur-stimulation, autoritarisme ou réification 2 constituent des
phénomènes comportementaux inadaptés que peuvent adopter les aidants de personnes
2. En psychologie, la réification désigne le fait de considérer autrui comme un objet.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.2. Les aidants 25
dépendantes. Citons par exemple, le thème de la sécurité, qui mène l’aidant à restreindre les
activités de son proche afin qu’il ne soit pas exposé à des risques. Ne pas traverser la rue ou
ne pas manger tel aliment trop gras peuvent être des attitudes sécuritaires identifiées comme
des freins à la reconnaissance du désir de la personne aidée. Elles rentrent en opposition
à la finalité du soin : préserver l’autonomie de la personne âgée. Ces temps de servitude
se font au détriment de la vie personnelle de l’aidant, modifiant ainsi la dynamique de la
famille et/ou du couple aidé-aidant. Ce couple, n’étant plus composé de deux personnes,
constitue dès lors une entité, où l’aidant est le porte-parole du malade. Les notions de
dette, de don et de contre-don sont centrales. Le don prend souvent sens pour la personne
aidante au travers d’un sentiment d’inutilité quand l’autre est souffrant. Derrière la notion
de don, il y a une dimension de réciprocité. La personne âgée dépendante, du fait de sa
maladie, ne peut toujours faire écho à cette demande implicite : donner, recevoir et rendre.
Elle se maintient donc dans une position d’infériorité vis-à-vis du donateur. C’est dans
ce contexte que l’aidant peut, lui aussi, être en souffrance puisqu’il fait le deuil de ce qui
ne pourra pas être rendu (le contre-don). Cette souffrance s’installe ; on parle de l’aidant
comme d’un « co-malade ». En réalité, il ne s’agit pas de don – car le don est libre – mais
de dû, puisque souvent l’aide apportée n’est pas faite pour obtenir ou faire plaisir, mais en
vertu de convention et de rôle. Les problèmes de domination et de réciprocité, de liberté et
d’excès non-contrôlés peuvent être des enjeux dans la relation. Proposer une vision éthique
au travers de la notion d’handicap familial, c’est affirmer qu’il ne peut y avoir une éthique
de l’aidant, puisque chaque situation doit être perçue et reconnue dans sa singularité. Le
rôle d’un professionnel est d’accompagner l’aidant à trouver sa juste place au sein d’un
réseau de soutien. L’aidant doit découvrir, dans un premier temps, sa place, et définir sa
mission qui ne consiste pas seulement à assurer des actes relevant d’un savoir. Il ne doit
pas prendre position dans une relation spécifique qui le contraint à s’isoler et à éprouver
une expérience au point qu’il ne s’en remettra jamais. Bien au contraire, tout l’enjeu réside
dans la manière de préserver l’humanité de la relation aidant-aidé et de l’inscrire dans la
trajectoire de vie du patient. Hugues Joublin évoque le risque d’instrumentalisation des
aidants au regard de la politique sanitaire et sociale. Est-on naturellement aidant ? Le
choix est-il déterminant dans la relation que j’ai avec mon proche ? Ces questions nous
conduisent à affirmer que l’aidant doit avoir le choix de ce qu’il souhaite faire et de ce
qu’il peut faire, sans que lui soient imposées des tâches insupportables. Devenir aidant
transforme la vision du monde et de soi et agit sur les relations interpersonnelles. De ce
fait, le professionnel de santé doit porter un regard vigilant sur la santé des aidants afin de
prévenir l’épuisement, la désocialisation et la marginalisation de cette population. Serge
Guérin indique que le professionnel doit veiller au fait que l’aidant adopte « une posture de
présence responsable » en partant de l’idée générale que le croisement des solidarités pluriels
nous renforcent réciproquement. Accompagner la personne aidante dans son implication et
son engagement est primordial. L’aidant ne doit pas s’immiscer dans une spirale infernale.
S’autoriser à passer le relais et prendre du répit, éviter le poids des décisions solitaires,
bénéficier de ressources morales et financières, constituent autant de préoccupations qui
doivent guider notre action.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
26 Chapitre 1. Une approche théorique
1.2.9 La proximologie : un nouveau champ de recherche
Ce néologisme tire son origine du latin proximus signifiant « proche » et du grec logos
signifiant « parole, discours ». Il peut être défini comme l’étude des relations entre la personne
dépendante et ses proches. Plus précisément, ce champ de recherche consiste à envisager
la présence et le rôle des aidants comme des éléments déterminants de l’environnement
du patient, participant à l’efficacité des soins et de la prise en charge [51]. Son auteur,
Hugues Joublin insiste sur la relation qui se crée entre le patient et l’aidant, soulignant sa
difficulté, sa richesse, mais aussi son caractère singulier. Plusieurs objectifs semblent être
primordiaux : assurer un accueil de qualité auprès du patient et de son entourage, partager
leurs savoirs, maintenir une relation de confiance entre le malade, ses proches et les soignants,
ou encore apporter un soutien tout au long de la maladie pour le proche et son aidant.
Hugues Joublin nous apporte des outils pour évaluer la capacité d’implication du proche.
L’hypothèse centrale est de considérer que l’implication de l’aidant fait apparaître des enjeux
à trois niveaux : pouvoir, vouloir et savoir (cf graphique ??)[52]. Certaines problématiques
de l’aidant peuvent apparaître comme le risque de maltraitance non-intentionnelle. Elle
correspond à un aidant qui a le pouvoir, et la volonté d’aider son proche, mais sans en
avoir les compétences. Le partenaire idéal serait un aidant possédant à la fois le pouvoir, le
vouloir et le savoir. Ainsi, le rôle du coordinateur est de valoriser l’implication de l’aidant,
d’apporter une réassurance pour maintenir le lien de confiance et se montrer vigilant sur
l’état de santé du proche-aidant.
1.3 Le domicile
On ne peut évoquer l’expression de « culture du domicile » sans parler du concept d’envi-
ronnement. Le terme d’ « environnement » est une notion complexe et polysémique qui n’a
cessé d’évoluer au fil des années. Il prend sa source dans l’ancien français « environnem-
nez » qui signifie « circuit, contour ». Il désigne ce qui structure et enveloppe la personne. En
linguistique, il peut prendre le sens de cadre de vie, d’ambiance ou encore de contexte. Nous
aborderons ici la notion d’environnement comme l’étude des milieux naturels, s’intéressant
à la nature mais aussi aux activités humaines et à leurs interactions, en ayant un regard
attentif sur la conception de la mésologie qui a été développée en France par le géographe
Augustin Berque.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.3. Le domicile 27
1.3.1 Entre lieu de vie et lieu de soins
Lorsqu’une personne âgée a le désir d’être soignée à domicile, c’est peut-être parce que
le domicile est un lieu qui fait partie de son identité, une identité qui se retrouve dans
l’expression même de : « chez soi ». Cette notion déploie 3 dimensions fondamentales : la
personne, l’espace et l’objet. Tout d’abord, il faut comprendre la personne en tant qu’être
humain singulier, porteur d’une histoire, d’une culture, de valeurs, de croyances, de choix,
d’expériences, mais aussi de pratiques. On peut évoquer la notion d’environnement interne
de la personne. Au sens de « caring », la personne est la composante d’une unité qui réunit
le corps, l’esprit et l’âme. Il est intéressant d’appréhender la notion d’espace au sens de
la phénoménologie 3, puisque cette notion fait apparaître deux exigences : fondationnelle
et transcendantale. Fondationnelle, parce que l’espace prend sens dans l’expérience vé-
cue avant d’être une réalité physique ; transcendantale, puisqu’elle ne se préoccupe pas
uniquement du corps propre, elle assure le lien avec les niveaux de spatialité, la sphère
visuelle ou encore la sphère du geste immédiat. La dimension de l’objet renvoie à ce qui
« meuble » cet espace, signe de l’épaisseur de la « sédimentation de la vie » et de ceux qui
vivent dans ce lieu. Il s’agit d’un lieu précis qui renvoie à une histoire, à une culture, à un
endroit unique, mais surtout à des besoins fondamentaux, tels que la sécurité, le confort,
l’intimité, la chaleur ou encore la propreté. Habiter ce lieu, c’est d’abord être, se tenir
et vivre. Cela renvoie à une expérience existentielle et à des représentations à la fois de
ce lieu, mais également de son origine et de facto, d’une identité, aussi bien individuelle
que collective. Ce lieu est communément appelé le domicile, venant de « domicilium » qui
signifie « habitation, demeure » et de « dominus » désignant « le maître ». Habiter son
domicile signifie être maître de chez soi, faisant correspondre l’idée d’une entité sociale,
d’une stabilité et d’un équilibre de vie. Cela fait référence à notre libre arbitre, à ce lieu où
se construit notre choix d’actions car nous sommes dans « une demeure légale et habituelle ».
Mais cette entité construite dans le temps ne rentre-elle pas en conflit avec
le « cadre bâti » par l’intervention même des professionnels de santé ?
Intervenir au domicile des patients et de leurs familles, revient à passer d’un espace
public à un espace résiduel, c’est-à-dire à un espace privé, intime, qui renvoie à une sécurité
physique et affective. Il s’agit d’un milieu chargé d’histoire, d’enracinement psychologique
qui s’inscrit dans l’évolution de la vie d’un individu, de sa famille voire d’un professionnel
par des liens d’attachement. De même, c’est un espace qui devient culturel car il implique
une organisation de celui-ci, une conduite à adopter, finalement, une manière d’être et de
faire, transformant cet espace – auparavant privé – en un lieu à vocation d’accueil. Certains
soignants verbalisent le fait que pénétrer chez un patient, c’est prendre des précautions,
demander certaines autorisations et parfois même être obligé de négocier, professionnels,
qui s’immiscent également au sein d’un cadre social, souvent constitué au sein de la dyade
aidant-aidé. L’adaptation du logement est symboliquement vécue comme la transformation
d’un lieu de vie en un lieu de soins. Les aides techniques et humaines viennent bouleverser
3. La phénoménologie provient du grec : « phainomenon », ce qui apparaît, et logos, étude. Il s’agit
d’un courant philosophique qui s’intéresse aux phénomènes de l’expérience vécue et des contenus de la
conscience, indépendamment des principes ou des théories, discipline fondée au début du XX ème siècle par
Edmund Husserl.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
28 Chapitre 1. Une approche théorique
la vie de la personne soignée, perdant de plus en plus la maîtrise de sa vie et de sa liberté.
Souvent, ces aides sont vécues comme une régression, faisant référence à une extension
technicisée du monde hospitalier. Pour la personne soignée et sa famille, l’intervention des
professionnels constitue dès lors une vie négociée : entre interdépendance et négociations. À
titre d’exemple, il n’est pas rare que les familles appellent afin de négocier les heures de
passages ou de demander l’intervention d’une soignante identifiée en raison de son profes-
sionnalisme et de son attachement au sein du cercle familial. Ces appels sont symboliques
et peuvent être traduits comme une demande de reconnaissance d’un espace de liberté et
d’intervention au sein d’un espace qui leur appartient.
1.3.2 Pourquoi parler de « culture du domicile » ?
L’expression de « culture du domicile » n’est pas, ici, l’expression même d’une volonté
politique sanitaire et sociale. Bernard Ennuyer, l’explique comme « la reconnaissance de
cette identité du sujet ». Elle exprime la volonté d’une culture de l’accompagnement, d’une
relation de proximité, avec l’idée de faire quelque chose de personnalisé pour quelqu’un à
un moment précis de son histoire et de son vécu. Engager « la culture du domicile », c’est
revendiquer trois dimensions essentielles qui permettent à la personne soignée de maintenir
sa dignité, mais également une certaine liberté :
– maîtriser un espace intime
– maintenir une image valorisante de soi
– permettre l’exercice d’une sociabilité choisie
Cette liberté doit être le fil conducteur des interventions à destination des patients et des
familles. Prise en charge globale, intégration des familles, respect de l’autonomie de décision
de la personne, prise en compte du frottement des temps, coordination des intervenants,
inclusion du projet des soins au sein du projet de vie, sont autant d’éléments qui donnent
du sens à cette culture du domicile.
1.3.3 Les soins à domicile : entre éclatement et cloisonnement
La politique de soins à domicile auprès de la population âgée s’est construite autour
du maintien à domicile. Cette notion peut être définie comme « l’ensemble des moyens
permettant à une personne âgée de continuer à vivre dans un cadre de vie habituel ».
Cependant, on assiste de plus en plus à une évolution sémiologique, puisque le terme de
soutien à domicile est prépondérant. Il faut donc comprendre ceci comme la possibilité
proposée à une personne âgée dépendante de rester, autant que possible, à son domicile.
Elle doit d’abord relever d’un désir et d’un choix consenti. En France, cette politique est
apparue dans les années 1960 au sujet de la politique de la vieillesse, ce qui a permis de
soulever la question éthique concernant la place des personnes âgées au sein de notre société
et d’harmoniser la prise en charge à domicile. L’organisation du maintien à domicile doit
répondre à deux objectifs centraux, celui de favoriser l’autonomie de ces personnes et celui
de préserver un lien social dans un environnement qui leur est propre. Ce dispositif est
complexe, notamment parce qu’il fait intervenir de nombreux acteurs, couvrant ainsi un
large éventail de sujets assurant les liens entre les services médico-sociaux, les systèmes de
santé, les mécanismes de financement, l’impact de la réglementation publique, ainsi que
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.3. Le domicile 29
les rôles complexes joués par les aidants. Ces défis sont également notables en Europe où
l’on parle de « home care across ». L’enjeu est aussi celui d’une politique inscrite dans une
culture de la qualité et de la bientraitance.
1.3.4 Les dispositifs d’aide à domicile
Nous aborderons dans cette partie les principaux dispositifs relevant du domaine du main-
tien à domicile des personnes âgées. Nous avons tenté de présenter un schéma relatant ces
dispositifs, en partant de l’idée que la personne soignée était au centre d’un réseau de soin,
dans lequel nous retrouvons l’aidant-partenaire(cf graphique ??).
– L’hospitalisation à domicile (HAD) : créée en 1957 en France, cette structure est
avant tout hospitalière. Elle répond à deux objectifs : le désencombrement des hôpitaux
et le développement d’une prise en charge technique au domicile des patients. Pour une
durée limitée, elle permet d’assurer au domicile d’une personne âgée dépendante les
mêmes soins pouvant être dispensés à l’hôpital. La pérennité de ce dispositif n’est possible
que par la présence et l’intervention de la famille et des proches aidants. Elle reconnaît la
famille comme une personne ayant des besoins et étant prise en compte dans le projet de
soins du malade. Pour autant, elle constitue un partenariat de soins essentiel, puisqu’une
éducation sur les soins peut être apportées. Infirmières, aides-soignantes, psychologues
ou encore ergothérapeutes sont inclus dans ce dispositif.
– Les Services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) : ce sont des établissements
médico-sociaux assurant, sur prescription médicale, des prestations de soins infirmiers sous
la forme de soins techniques et de soins d’hygiène. Leur vocation est d’éviter l’hospitalisa-
tion des personnes âgées, de faciliter le retour au domicile à la suite d’une hospitalisation,
de prévenir ou de retarder un placement en institution. L’infirmière coordinatrice est la
responsable du service en termes d’encadrement administratif et technique. Les visites à
domicile permettent d’évaluer la situation du patient leur permettant d’accéder à des
prestations de soins. Ces visites constituent le premier contact avec la famille, celle-ci
étant perçue comme un partenaire essentiel, notamment au niveau des échanges d’infor-
mations sur la situation de vie de la personne soignée. En 2004, les services polyvalents
d’aide et de soins à domicile (SPASAD) ont été créés. Ils associent les services d’aide
et d’accompagnement à domicile (SAAD) et les services de soins infirmiers à domicile
(SSIAD).
– Les libéraux : ce sont des médecins généralistes, pharmaciens, infirmiers libéraux, kiné-
sithérapeutes, psychomotriciens, psychologues, assistants sociaux, pédicures-podologues,
qui sont autant de professionnels intervenant au domicile des personnes âgées. Pour les
paramédicaux, ils interviennent toujours à la suite d’une prescription médicale.
– Les prestataires de santé à domicile (PSAD) assurent la fourniture en soins aux
patients en situation de dépendance. Ces prestations accompagnent la mise à disposition
de technologies et d’équipements nécessaires au soutien à domicile des personnes âgées.
La quasi-totalité de ces dispositifs sont délivés sur prescriptions médicales et font l’objet
d’un remboursement par l’Assurance maladie sur la base des tarifs de responsabilité
définis par la liste des produits et prestations remboursables (LPPR). Les PSAD sont
assurées par des entreprises du secteur privé et du secteur associatif.
Mémoire de fin d’études 2014-2015
30 Chapitre 1. Une approche théorique
– Les équipes mobiles de gériatries : sont regroupés sous le terme d’équipes mobiles de
gériatrie, des équipes de soins intervenant au domicile des personnes âgées dépendantes.
Elles apparaissent souvent sous forme de réseau de soins, rattachés à un établissement
hospitalier ou faisant partie d’un service médico-social. Nous pouvons citer en exemple
les équipes mobiles de soins palliatifs.
– Le conseil général est le principal acteur permettant de financer l’aide aux personnes
âgées dépendantes à leur domicile au travers de l’APA. Une équipe médico-sociale élabore
un plan d’aide après une évaluation de la personne, et notamment de son autonomie.
Ce plan comprend les besoins du demandeur et les aides nécessaires à son maintien à
domicile.
– Les CLIC (Centres Locaux d’information et de coordination) gérontologique
sont des dispositifs de proximité ayant des missions d’accueil et d’information pour les
personnes âgées et leur entourage. Il s’agit d’informer les personnes sur les dispositifs
d’aide en réponse à leurs besoins. Effectuer un dossier « APA », mettre en place des soins
infirmiers, améliorer l’habitat, orienter les personnes vers d’autres professionnels sont des
missions que remplissent les CLIC.
– Les MAIA (Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzhei-
mer) sont des dispositifs d’accueil, d’orientation et de coordination qui reposent sur une
structure préexistante, comme le Conseil général, un accueil de jour ou encore la MDPH.
Expérimentées en 2008, ces structures concernent toute personne en perte d’autonomie, et
intègrent également les aidants de personnes âgées. Les MAIA disposent d’un gestionnaire
de cas lorsque la situation des personnes est jugée « complexe ».
Mémoire de fin d’études 2014-2015
1.3. Le domicile 31
Graphique 1.2 – Les dispositifs d’aide et des soins à domicile
Mémoire de fin d’études 2014-2015
Les aidants de personnes âgées dépendantes. Quelle place dans les services de soins à domicile ?
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Les aidants de personnes âgées dépendantes. Quelle place dans les services de soins à domicile ?

  • 1. Année scolaire 2014-2015 Mémoire de fin d’études Master 2 - ROS - Parcours de soins Promotion 2014-2015 Juin 2015 Les aidants de personnes âgées dépendantes : Quelle place dans les services de soins à domicile ? M. Kévin Bisiaux Infirmier
  • 2. ii Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 3. Table des matières Abstract 1 Avant-Propos : Pourquoi les aidants ? 3 Introduction 5 État de la question 7 1 Une approche théorique 9 1.1 La personne âgée dépendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 1.1.1 Des notions-clés : la personne âgée dépendante et le vieillissement . . 13 1.1.2 Les problématiques du grand âge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 1.1.3 Synthèse de la politique française en faveur des personnes âgées . . . 14 1.2 Les aidants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 1.2.1 Histoire d’un acteur toujours présent et transparent . . . . . . . . . 15 1.2.2 La famille n’existe pas ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 1.2.3 Aider et être aidant : entre fonction et appartenance . . . . . . . . . 17 1.2.3.1 Les aidants professionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 1.2.3.2 Les aidants familiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 1.2.4 Rôle, place et responsabilité des aidants . . . . . . . . . . . . . . . . 19 1.2.5 Répercussions du rôle d’aidant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 1.2.6 Profil des aidant(e)s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 1.2.7 Besoins, attentes et dispositifs d’aide . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 1.2.8 Le handicap familial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 1.2.9 La proximologie : un nouveau champ de recherche . . . . . . . . . . 26 1.3 Le domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 1.3.1 Entre lieu de vie et lieu de soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 1.3.2 Pourquoi parler de « culture du domicile » ? . . . . . . . . . . . . . . 28 1.3.3 Les soins à domicile : entre éclatement et cloisonnement . . . . . . . 28 1.3.4 Les dispositifs d’aide à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 1.4 La coordination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 1.4.1 Qu’est-ce que la coordination ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 1.4.2 La coordination des personnes âgées et des aidants . . . . . . . . . . 32 1.4.3 Les aidants comme partenaires de soins . . . . . . . . . . . . . . . . 33 iii
  • 4. iv Table des matières 2 Une approche empirique 35 2.1 La présentation du service . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 2.1.1 Cadre législatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 2.1.2 Financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 2.1.3 Population accueillie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 2.1.4 Pathologies prévalentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 2.2 La méthodologie de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 2.2.1 Choix de l’outil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 2.2.2 Population choisie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 2.3 Les résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 2.3.1 Des pratiques hétérogènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 2.3.2 Des aidants très impliqués et en attente d’information . . . . . . . . 41 2.4 L’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 2.5 La discussion et l’apport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 Conclusion 53 A Grille d’entretien 59 B Synthèse des entretiens 61 C Questionnaire 65 D Quelques données statistiques 69 E Extrait des entretiens 73 E.1 Entretien n˚1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 E.2 Entretien n˚2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 E.3 Entretien n˚3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 E.4 Entretien n˚4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 E.5 Entretien n˚5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 E.6 Entretien n˚6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 E.7 Entretien n˚7 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 E.8 Entretien n˚8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 E.9 Entretien n˚9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 E.10 Entretien n˚10 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 E.11 Entretien n˚11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 E.12 Entretien n˚12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 5. Remerciements En préambule de ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus sincères aux personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à enrichir ce travail de recherche. Je remercie, dans un premier temps, mon ami Romain, pour l’aide précieuse qu’il m’a apportée, mais aussi pour sa gentillesse et son professionnalisme. Je le remercie sincèrement pour son implication dans ma démarche de projet. Je tiens également à remercier l’ASSAD du 15ème arrondissement sous la direction de Mme S. ALFRED - directrice - et Mme H.TIOMO – cadre de santé – pour leurs conseils, leur accompagnement et leur bienveillance, sans oublier l’ensemble des professionnels qui se sont impliqués dans ce projet, professionnels qui effectuent un travail qui mérite respect et considération. Je souhaite aussi remercier l’ensemble des professionnels que j’ai rencontrés tout au long de ces cinq années d’études. J’émets une pensée notamment pour Nicole BOULET qui m’a toujours soutenu et valorisé dans mes projets. Ma reconnaissance et ma gratitude vont vers Ivana NOVAKOKA et Marcelline OULOUKOI sans qui je n’aurais pu comprendre le sens même de la gentillesse et de la dignité. Je pense également à Myriam RECURT et à Bernadette CAMAZOLLA pour leur soutien depuis ma formation d’infirmier. Je souhaiterais également adresser un regard sincère et bienveillant auprès de la direction de l’hôpital de jour CEREP-PHYMENTIN pour sa flexibilité et sa patience durant ces deux années. Parler des familles sans évoquer la sienne n’est pas concevable pour moi. Que soient ainsi remerciés ma mère et mon père, mes frères et ma sœur, ainsi que l’ensemble de mes amis, particulièrement mon amie Lucile, pour leurs encouragements. Enfin, j’adresse mes remerciements à Bastien pour sa bonne humeur, sa gentillesse et son attention particulière, finalement, tout ce qu’il représente pour moi. v
  • 6. vi Remerciements Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 7. Liste des sigles AGGIR : Autonomie Gérontologique Groupe ISO-Ressources ANESM : Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des établissements et Services sociaux et Médico-sociaux APA : Allocation Personnalisée d’Autonomie ARS : Agence Régionale de Santé ASSAD : Association de Soins et Services À Domicile CIF ou CIH-2 : Classification Internationale du handicap et du Fonctionnement, du handicap et de la santé CIH : Classification Internationale du Handicap CLIC : Centre Local d’Information et de Coordination Gérontologique COFACE : Confédération des Organisations FAmiliales de l’Union Européenne EHESP : Écoles des Hautes Etudes en Santé Publique ESA : Équipe Spécialisée Alzheimer GEVA : Guide d’Évaluation des besoins de compensation de la personne handicapée GIR : Groupe Iso-Ressources HAD : Hospitalisation À Domicile HAS : Haute Autorité de Santé IFSI : Institut de Formation en Soins Infirmiers INSERM : Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale vii
  • 8. viii Liste des sigles LPPR : Liste des Produits et Prestations Remboursables MAIA : Maison pour l’Autonomie et l’Intégration des malades d’Alzheimer MDPH : Maison Départementale pour les Personnes Handicapées OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économiques OMS : Organisation Mondiale de la Santé PAERPA : Personnes Âgées En Risque de Perte d’Autonomie PSAD : Prestataires de Santé À Domicile SIDA : Syndrome de l’ImmunoDéficience Acquise SSIAD : Services de Soins Infirmiers À Domicile SPASAD : Services Polyvalents d’Aides et de Soins À Domicile UPMC : Université Pierre et Marie Curie VAE : Validation des Acquis et de l’Expérience Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 9. Abstract Elderly dependants’ caregivers How can they fit in home care units ? Abstract Measures to enable elderly people to stay in their own home are not easy to be found. A lot of participants are required, and caregivers need to be present. In the French health-care system, they are 8.3 million, and they have many issues with their health. Their use of psychotropic and the exhaustion of relatives convey a social malaise. Current health policies provide little response on how to handler the relatives of the elderly. This research project was conducted in home care service, in the 15th district of Paris. It aims to understand how it would be possible to make caregivers belong to service. We interviewed 12 professionals and asked their opinion to 77 of caregivers. The analysis of these interviews allowed us to understand that caregivers are very involved in the management. They expect for some information and partnership. As for professionals, they have a very focal approach. The caregiver is not acknowledged enough in patient care. Keywords : Care, Home, Caregivers, Partnership and Recognition Les aidants de personnes âgées dépendantes. Quelle place dans les services de soins à domicile ? Résumé Le dispositif du maintien à domicile des personnes âgées dépendantes est complexe. Celui-ci est possible par de nombreux acteurs, notamment par la présence des aidants. Dans le système de soins français, nous avons 8,3 millions d’aidants. Les problématiques de santé de cette population sont nombreuses. La consommation de psychotropes et l’épuisement des proches traduisent un malaise social. Les politiques de santé actuelles n’apportent que peu de réponse sur la manière de prendre en charge le proche de la personne âgée. Ce projet de recherche a été mené à Paris dans un service de soin à domicile du 15e arrondissement. Il tend à comprendre comment intégrer davantage les aidants au sein de cette institution. Nous avons réalisé 12 entretiens avec les soignants et recensé l’avis de 77 aidants. L’analyse des entretiens nous a permis de mieux comprendre l’implication des aidants. Ils sont en attentes d’information et de partenariat. Quand aux professionnels, ils ont une approche 1
  • 10. 2 Abstract très focale. L’aidant n’est que peu reconnu dans les soins du patient. Mots-clés : Soin, domicile, aidants, partenariat et reconnaissance Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 11. Avant-Propos : Pourquoi les aidants ? Bien avant d’appréhender la notion d’aidant, l’implication de la famille dans les soins, notamment à domicile a toujours été une préoccupation centrale. Durant les enseignements dispensés en IFSI - Institut de Formation en Soins Infirmiers – la dimension des soins devait être perceptible sous une approche holistico-dynamique. À ce sujet, la discipline infirmière s’est construite autour de quatre concepts fondamentaux que sont la santé, la personne, les soins infirmiers et l’environnement. J. Fawcett évoque la notion de « métaparadigme » de la discipline infirmière [1]. Ainsi, l’ensemble des théories en soins infirmiers s’accordent à dire que la prise en compte de l’environnement dans le projet de soins du patient implique nécessairement la prise en considération de l’entourage de ce dernier. Celle-ci se situe dans l’environnement relationnel, notamment entre l’infirmière et le patient, à travers une lecture davantage microsociologique. On parle de phénomènes microscopiques qui se tissent au sein de relations internes constituant des formes d’organisations entre petits groupes sociaux. Même si l’on peut penser que les théories de soins infirmiers viennent éclairer et guider nos actions, il existe souvent une non-prise en compte de l’expertise familiale dans les soins du patient. D’ailleurs, ce n’est que depuis peu que les diagnostics infirmiers se sont développés, ayant précisé notamment le concept « d’aidant ». D’une manière globale, ce constat est également notable en ce qui concerne l’approche des problématiques de santé dans le domaine du handicap, étant ainsi passée d’une approche médicale dans les années 1980 à une analyse bio-psycho-environnementale au cours des années 2000 1. Cette nouvelle approche considère le handicap non plus comme un phénomène indivi- duel mais bien comme un tout, indissociable du milieu dans lequel on vit. Autrement dit, l’accompagnement des familles, notamment dans la réalisation des soins auprès des patients, n’est pas formalisé. Les pratiques sociales sont hétérogènes. De manière schématique et vulgaire deux situations peuvent se rencontrer à l’hôpital quant à l’appréciation de la famille dans les soins du patient. Ceux pour qui la famille constitue « un véritable partenariat » : l’infirmière autorise la famille à être auprès de son proche durant les soins effectués, et ceux pour qui la famille constitue un obstacle aux soins : l’infirmière demande à l’entourage de sortir durant la réalisation des soins. D’un point de vue « macro », cette problématique est également présente. Il est vrai que bon nombre de structures régissent leurs propres fonctionnements pour soutenir les familles, plus particulièrement en termes de fonctionne- ments institutionnels. Nous pouvons citer en exemple les horaires de visite. Partant de ce constat, ainsi que de la nécessité de mieux appréhender la famille au cours de ma profession 1. Nous faisons référence notamment à l’évolution de la classification internationale du handicap de l’OMS sous l’appellation de la CIH en 1980 et de la CIH-2 ou CIF en 2001. 3
  • 12. 4 Avant-Propos d’infirmier, le travail de fin d’études en soins infirmiers s’est porté sur « la reconnaissance de la famille dans les soins infirmiers à domicile. Partenariat ou confrontation ? ». Puisque le domicile comme lieu d’intervention de soins transpose le rôle et la place de chacun des protagonistes – patient/aidant/soignant – au regard de l’organisation hospitalière, ce sujet paraissait intéressant à approfondir. Cette initiation à la recherche avait pour objectifs de comprendre dans quelle mesure l’infirmier reconnaissait la famille comme partenaire de soins et d’extraire les enjeux de ce partenariat. Les entretiens ont été menés auprès de professionnels infirmiers exerçant dans trois « secteurs » d’activité différents : une infirmière travaillant dans le secteur libéral, une infirmière responsable d’une HAD - Hospitalisation A Domicile - et, enfin, une infirmière-coordinatrice dans le cadre d’un SSIAD - Service des Soins Infirmiers A Domicile -. Ce choix de diversifier les domaines d’activités des infirmières interrogées a permis de recueillir des avis à « large spectre » quant à la manière de composer avec les familles en lien avec les missions des professionnels. Cette étude nous a donné l’occasion d’apporter une réflexion personnelle sur la place de la famille dans les soins infirmiers à partir d’une situation vécue. Prendre soin de l’aidant constitue le fil conducteur de cette démarche. À partir de ce travail, des interrogations ont été soulevées, notamment en ce qui concerne la notion « d’approche systémique familiale » dans le domaine, non pas des soins infirmiers mais bien des sciences infirmières. En intégrant le master sciences cliniques infirmières de l’EHESP - Écoles des Hautes Études en Santé Publique – et au travers des enseignements non seulement sur les fondamentaux de la discipline infirmière mais aussi sur l’éducation thérapeutique du patient, la question de l’apprentissage des soins auprès des familles a, de nouveau, fait écho à une problématique : celle de la « juste place » des familles dans le soin. L’approche systémique familiale pensée par F Duhamel [2], nous rappelle l’importance de savoir identifier le système familial dans lequel évolue la personne soignée, afin de mieux comprendre l’influence de la famille sur les comportements de santé des individus, ainsi que sur l’évolution d’une maladie. Dans le cadre du master 1, une recherche sur les interventions éducatives afin de réduire le fardeau des aidants familiaux a pu aboutir, permettant ainsi de renforcer l’ensemble des bases méthodologiques de la recherche en santé fondées sur des données probantes. Exerçant actuellement dans un hôpital de jour en pédopsychiatrie, j’ai constaté que le travail avec les familles était systématique. Chaque entretien avec l’adolescent est réalisé en présence des familles. Sans cette alliance thérapeutique, le projet de soins ne peut aboutir. C’est dire si le travail partenarial est continuellement au coeur de notre activité. En prenant conscience du domaine lacunaire que constitue les sciences infirmières en France, l’intégration en master 2 dispensé par l’UPMC – Université Pierre et Marie Curie – en recherche et organisation en santé, était une occasion (à défaut d’évoquer la notion de plaisir) de faire évoluer, non seulement ma réflexion sur l’appréciation des aidants familiaux dans le parcours de soins du patient, mais également d’appréhender différemment cette population. Se positionner en tant que coordinateur de soins revient à se réinterroger sur le lien existant entre une problématique de santé et le système familial dans lequel évolue la personne soignée. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 13. Introduction La place de l’entourage des personnes malades dans le système de santé est considérée comme le pivot des soins à la personne. Depuis les lois de décentralisation, la politique, qui se place dans le champ sanitaire et social encourage le partenariat, qui peut être défini comme une forme de « travailler ensemble ». Se rendre disponible pour accompagner une personne dépendante, chacun de nous peut être amené, à la faire au cours de sa vie, comme chaque professionnel est amené à travailler en lien étroit avec les aidants et ce, dans un contexte de soins à domicile, sous l’angle du maintien à domicile des personne âgées. Ce travail s’inscrit dans une telle perspective. Dans le système actuel de soins, le rôle et la place des aidants de personnes malades ne sont pas définis de manière distincte. Les aidants sont, aujourd’hui, perdu dans le maquis des appellations juridiques et sémantiques incertaines. De plus, peu de recommandations permettent aux professionnels et aux institutions d’appréhender cette population. L’impact du vieillissement sur les dépenses de santé, l’espérance de vie en augmentation, ou encore l’émergence des maladies chroniques renforcent la présence et l’implication de ces acteurs, rendant ainsi précaire le contexte sanitaire et social. La consommation de psychotropes et l’altération globale de leur état de santé le prouvent quotidiennement. Évaluer les caractéristiques des aidants qui interviennent au domicile et connaître la position adoptée par les professionnels auprès de cette population constituent l’objet de ce travail de recherche. Par l’adoption d’une méthodologie quantitative faisant alliance avec une méthodologie qualitative, nous tenterons de comprendre comment il est possible d’intégrer davantage cette population au sein d’un service de soins à domicile du 15ème arrondissement de Paris. Pour ce faire, 12 entretiens avec des professionnels ont été réalisés. Nous avons également recensé plus de 77 aidants intervenant au domicile des personnes âgées dépendantes. Nous avons analysé ces deux approches à partir du cadre théorique que nous avons élaboré dans la première partie. Les résultats issus de l’analyse - elle-même élaborée dans la deuxième partie - nous ont permis d’envisager des perspectives et de penser la fonction de coordinateur en santé dans un service de soins à domicile. 5
  • 14. 6 Introduction Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 15. État de la question La population des plus de soixante ans est celle qui augmente le plus vite. Depuis 1980, cette population a pratiquement doublé [3]. Au niveau mondial, on estime à 605 millions le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans [4]. Le vieillissement de la population est un indicateur de l’amélioration de la santé mondiale. Dans tous les pays de l’OCDE, l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé à 65 ans a considérablement aug- menté, notamment en France où elle est la meilleure [3]. Les progrès dans le domaine de la santé, l’amélioration de nos conditions de vie, l’accès au soins ou encore le recul de certains facteurs de risques en sont les principales raisons. Sur le territoire français, le vieillissement de la population doit répondre à plusieurs grands défis. Le contexte socio-économique est le premier. D’une part, parce que l’impact du vieillissement sur les dépenses de santé est important et, d’autre part, parce que l’état peine à assurer la pérennité de son modèle. Cependant, le défi est-il celui d’un contexte qui se veut « idéologique » ? Celui du patient acteur et co-décideur des soins se positionnant au centre du système de santé, ayant pour perspective une qualité de vie optimale. La prévalence des maladies chroniques, les soins de longue durée, la diversité des professionnels de santé, les hyperspécialisations, les nouveaux besoins en santé ou encore les déserts médicaux constituent un contexte épidémiologique et médical à prendre en compte. En particulier, ne faut-il pas oublier la réorganisation de notre système de santé accès sur « une culture du domicile » ? Le projet de loi sur l’adaptation de la société au vieillissement va dans ce sens puisqu’il tend à faire du domicile « un atout de prévention »[5]. Cette logique de soins est confirmée par l’opinion publique car dans le domaine de la dépendance, 8 personnes sur 10 souhaitent le maintien à domicile [6]. Enfin, le contexte sanitaire et social constitue un défi prioritaire. La consommation de psychotropes, le nombre croissant d’arrêts maladie et la fragilité du lien social mettent en exergue l’épuisement des proches des personnes âgées dépendantes [7]. Souvent transparents et se positionnant au travers de deux actants – le malade et l’ acteur de soin – les aidants représenteraient, en France, plus de 8,3 millions de personnes, ceux-ci intervenant de façon régulière au domicile de leurs proches qui ont des problèmes de santé ou un handicap. On estime à 3,4 millions de personnes qui aident un proche de 60 ans ou plus à domicile, dans les tâches de la vie quotidienne. De plus, 8 personnes âgées aidées sur 10 reçoivent l’aide régulière de leur entourage. Ceci devrait s’accentuer dans le temps puisque, d’après une récente étude sur le territoire Français, on estime que 30% des aidants de personnes âgées dépendantes - soit la majorité des personnes interrogées - feraient en sorte de pouvoir s’occuper de leurs proches à domicile en cas de perte d’autonomie [6]. Depuis quelques années, les pouvoirs publics ont pris conscience de cette population [8][9]. De nombreuses 7
  • 16. 8 État de la question enquêtes ont été publiées et de nombreuses actions ont été mises en œuvre, notamment en ce qui concerne les différentes mesures publiques. La reconnaissance du statut d’aidant familial [10], les prestations familiales [11], l’aide au placement temporaire de la personne âgée, le droit à la formation mais aussi à la VAE - Validation des acquis et de l’expérience - [12] ou encore l’élaboration d’un guide de l’aidant familial [13], font partie de ces mesures. En France, les actions en faveur des aidants ont été impulsées très fortement grâce au lobbying des associations de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Cela explique pourquoi de nombreuses particularités locales se créent : information, constitution de groupes de parole ou encore « le café des aidants ». Ce sont des mesures qui tendent à reconnaître l’aidant comme un acteur social déterminant dans notre système de santé. En revanche, les instances sanitaires et sociales n’apportent que peu de réponses sur la manière d’appréhender un proche dans nos actions. L’unique recommandation de bonnes pratiques de l’ HAS indique la nécessité de suivre médicalement les aidants naturels dans le cadre de patients atteints de démence, sans pour autant préciser des mesures concrètes, qui plus est, inscris au travers d’une analyse médicale [14]. Seule une recommandation émise par l’ANESM en 2014 nous apporte des éléments de réponse. Nous nous appuierons sur celle-ci tout au long de ce travail. Enfin, la stratégie nationale de santé [15] et le dernier plan sur la maladie dégénérative [16] renforcent l’accompagnement et la prise en compte de l’aidant dans les soins auprès du patient. Car le rôle des aidants représenterait sans doute une économie abyssale de 164 milliards d’euros pour la collectivité. Les instances gouvernementales ont, depuis peu, renforcé les missions des services médicaux-sociaux dont l’objectif est de constituer une ressource essentielle pour les proches de personnes malades. La coordination est le fil conducteur des missions accordées à ces structures, l’objectif premier étant de diminuer le recours aux hospitalisations en permettant le soutien à domicile des personnes âgées. Lorsqu’on parle de soutien à domicile, cela implique d’assurer une prise en charge coordonnée en accord avec les attentes, les besoins et l’histoire de vie des personnes. L’efficacité des soins et la sécurité des patients sont des enjeux primordiaux. L’optimisation des moyens, la communication ville-hôpital, l’approche pluridisciplinaire des situations, la maîtrise des points critiques, l’implication du patient et de son entourage sont des stratégies à prendre en compte dans le domaine de la coordination. Ce travail s’inscrit dans cette optique. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 17. Chapitre 1 Une approche théorique Objectif de la recherche L’objectif de la recherche est de comprendre, à partir des données actuelles, les caractéris- tiques des « aidants » qui interviennent auprès des personnes âgées dépendantes. Autrement dit, leurs besoins, leurs attentes, leurs problématiques de santé, les aides qui sont proposées afin de déterminer la place qu’ils occupent dans les services médicaux sociaux intervenant au domicile des personnes. La problématique générale que nous avons élaborée est la suivante : « Comment penser l’intégration des aidants dans les services de soins à domicile s’occupant des personnes âgées dépendantes ? » Questions sous-jacentes... Domaine sociologique : – Quels sont le rôle et la place de l’aidant dans la prise en charge de son proche ? – Comment s’articulent le patient, l’aidant et le professionnel dans les soins à domicile ? Domaine législatif : – Comment est reconnu l’aidant au sein de la législation française ? – Quels sont ses droits ? Domaine de la santé publique : – Quelles sont les problématiques des aidants ? – Quel est le dispositif d’aide en faveur des aidants ? De quelles recommandations peut-il bénéficier ? Domaine de la psychologie : – Quelle est la spécificité des soins à domicile ? – Comment comprendre le domicile ? Domaine de l’éthique : – Est-on naturellement aidant ? – Quelle serait la juste place de l’expertise familiale dans notre système de santé ? – « Composer »avec la famille ne serait-ce pas modifier une logique de soin ? 9
  • 18. 10 Chapitre 1. Une approche théorique Stratégie de recherche La stratégie de recherche comprend deux axes : la recherche bibliographique et la recherche empirique. Nous traiterons, dans cette partie, la recherche « bibliographique » permettant d’aborder le cadre conceptuel. La stratégie de recherche bibliographique n’est possible que par l’élaboration d’une méthode rigoureuse, effectuée par étapes. Afin de préciser les objectifs de l’étude et de bien formuler la question, la recherche documentaire a débuté par une recension de la littérature non probante. Ainsi, ont été consultés les dictionnaires et les encyclopédies constituant ce que l’on appelle la littérature grise. Cette dernière a été enrichie par des échanges entre les professionnels du domaine en se rendant dans les différents SSIAD, notamment en région Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, ainsi qu’en Île-de-France. Après avoir identifié les concepts sous-jacents à la problématique, une recherche documentaire sur Internet a été entreprise par l’intermédiaire des moteurs de recherche qui fournissent une information volumineuse comme « Google » ou « Google scholar ». L’objectif était non seulement de comprendre tous les concepts et de les différencier, mais également de confronter la lit- térature avec l’expérience vécue et les interpellations ayant été identifiées. Une fois la situation comprise et les concepts sous-jacents identifiés, des mots-clés reprenant les termes en français et en anglais ont été définis afin de trouver des documents pertinents. Pour ce faire, plusieurs sites ont été consultés en vue d’identifier ces mots-clés, soit CISMEF terminologie [17], l’INSERM [18], ainsi que les différents mots Mesh utilisés dans les bases de données tels que MEDLINE/PubMed ou encore CINAHL. En outre, lors de la consultation d’un document, un regard a été porté sur les mots-clés utilisés, ce qui a permis de les confronter avec ceux préalablement identifiés. La recension de la littérature probante a été menée, avec l’idée que, seule la littérature scientifique est probante. Cette recherche a été effectuée de manière chronologique, tout en respectant la hiérarchie du niveau des preuves de l’information, en partant du fait que toutes les informations n’ont pas la même valeur et qu’il existe une hiérarchie dans la confiance que l’on accorde à une information. Pour effectuer cette recherche documentaire, les sites de guidelines et les recommandations de bonnes pratiques ont tout d’abord été interrogés. Ensuite, l’aide de méta-moteurs de recherche, ainsi que l’utilisation de bases de données se sont avérées utiles. Afin de bien spécifier le sens de la recherche, nous avons identifié des critères d’inclusion et d’exclusion, des mots-clés et, enfin, des sources d’information. Critères d’inclusion Critères d’exclusion Patients de + de 65 ans – Patients de - de 65 ans – Autres populations Aidants et famille Autres populations (ex : nourrissons, enfants, femme enceinte) Domicile Hôpital, Clinique, maison de retraite Tableau 1.1 – Critères d’inclusion et d’exclusion de la recherche Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 19. 11 Mots-clés en français Mots-clés en anglais Personne âgée – Older people dependency – Dependent elderly persons – Dependent older eprsons Aidants et famille – Caregivers – Family caregivers – Spouse caregivers – Carers Domicile – Home care – Home Tableau 1.2 – Les mots-clés Source d’information Commentaire Sites de guidelines/recommandations de bonnes pratiques NGC : National Guideline Clearinghouse A l’intiative de l’Agency for healthcare Research and Quality (AHRG) dépendant du Ministère de la Santé américaine. NICE : National Institue of Cli- nical Evidence Il s’agit d’une organisation reconnue mondialement dans la mise en place de normes pour les établissements de santé. HAS : Haute Autorité de Santé Organisme français qui promeut des recommandations de bonnes pratiques auprès des usagers et des profes- sionnels de santé. EBNursing.be Site belge mettant à la disposition des infirmières des échelles et des guidelines. Méta-moteurs de recherche SUMSearch Méta-moteur de rechercheg ratuit à partir des bases de données telles que PubMed ou the National Guidelines Clearhouse... TRIP databse Site de recherche clinique permettant de trouver rapide- ment des données probantes sur la pratique clinique. Bases de données JBI : Joana Briggs Institute Organisme international spécialisé dans la promotion et le soutien des soins de santé basés sur des données probante. MEDLINE : National Library of Medecine Banque de données bibliographiques à caractère médi- cal. CINAHL : Cumulative Index to Nursing and allied Health Litterature Revue systématique sur les effets des soins en santé. Tableau 1.3 – Les principales sources d’information Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 20. 12 Chapitre 1. Une approche théorique Il nous semble primordiale de proposer une timide présentation de la personne âgée dépendante afin de situer le contexte global dans lequel apparaît le concept d’aidant. Nous analyserons dans cette partie les concepts clés de ce travail à savoir : la personne âgée, la famille et l’aidant, l’environnement, la coordination. Concepts ayant permit d’aboutir à une recherche dans ce domaine. Point de vigilance Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 21. 1.1. La personne âgée dépendante 13 1.1 La personne âgée dépendante 1.1.1 Des notions-clés : la personne âgée dépendante et le vieillissement L’organisation mondiale de la santé et la réglementation française définissent une personne âgée à partir de 60 ans. En France, certaines prestations ou dispositions concernant les personnes âgées s’appuient sur une définition des personnes âgées lorsque celles-ci ont plus de 65 ans. C’est cette définition que nous avons décidé de retenir ici. Dans la littérature, les seuils identifiés pour déterminer cette population varient selon les auteurs et les époques. Certains insistent sur le fait que l’âge est une construction sociale. On parle d’ailleurs de « continuum de l’âge »[19]. De ce fait, une personne âgée est souvent définie en référence non seulement à son âge mais aussi à son statut social. C’est pourquoi les personnes âgées constituent un groupe hétérogène regroupant les jeunes retraités, les personnes très âgées, les personnes âgées dépendantes, celles vivant en institution ou encore celles regroupant les personnes âgées immigrées. Socialement, on peut distinguer deux périodes dans le processus de vieillissement. La première, dite du troisième âge, concerne la tranche d’âge de 60 ans à 70 ans. On parle alors de jeunes séniors ou « young old » dans la littérature. Cette catégorie concerne les sujets sains ou malades qui demeurent autonomes. La seconde a reçu l’appellation de quatrième âge, qui se caractérise par des sujets très âgés de plus de 80 ans, appelés « old-old ». En France, les personnes âgées de plus de 60 ans représenteraient 23,1% de la population [20]. On assiste même à un phénomène de « gérontocroissance [21] » puisque le nombre de personnes âgées de 60 ans augmentera de 10,1 millions entre 2007 et 2060. Par définition, le vieillissement correspond à l’évolution d’un organisme mais aussi à un affaiblissement, une altération progressive des facultés dues à l’âge [22]. Nous avons décidé de retenir la synthèse des travaux de C. Rajons-Roux et R. Simon-Prel, qui nous permettent d’avoir une approche systémique sur la notion de vieillissement. Le vieillissement biologique : ensemble des modifications cellulaires, tissulaires, morphologiques, anatomiques et physiologiques, apparentes ou non, de l’organisme. Le vieillissement intellectuel : se distingue par un retentissement des fonctions cognitives, une diminution des facultés d’attention, de concentration, d’apprentis- sage. Le vieillissement affectif : correspondant à un désinvestissement affectif. Le vieillissement social : difficulté d’adaptation à l’évolution du monde, altération de l’image de soi. D’après les travaux de Rajon-Roux.C et Simon-Prel.R Typologie du vieillissement Évoquer la notion de vieillissement, fait apparaître celle de la dépendance. Pour certains, ce terme induirait une vision négative du problème ainsi qu’une notion d’irréversibilité. En fait, elle fait apparaître l’idée d’interdépendance et de solidarité. Les textes de lois évoquent la notion de dépendance totale et de dépendance partielle. Nous décidons de retenir la définition en gérontologie de la dépendance comme le besoin de recours à un tiers pour réaliser les activités de la vie courante. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 22. 14 Chapitre 1. Une approche théorique 1.1.2 Les problématiques du grand âge Sur le plan médical, lorsqu’on évoque les problèmes liés au vieillissement, on parle de processus normal et pathologique, dans la mesure où tout être vivant vieillit et ce, dès le début de son existence. De ce fait, l’ensemble des fonctions physiologiques s’altère avec l’âge. Parler de vieillissement pathologique, c’est prendre en considération les problématiques de la gériatrie entre polypathologie, perte d’autonomie, fragilité, vulnérabilité et dépendance. Les instances sanitaires, aux niveaux mondial et national, font des problématiques de santé les plus fréquentes : les pathologies vasculaires et les pathologies dégénératives du cerveau ou encore les maladies des os et des articulations, mais aussi les phénomènes de chute, de déshydratation ou de maltraitance [23][24][25][26]. Ces préoccupations interviennent dans divers domaines tels que la santé mentale, le capital santé, les problèmes associés aux médicaments, la nutrition, l’activité physique, la prévention des accidents et des traumatismes ou encore la consommation de substances addictives. À domicile, toutes ces problématiques sont rencontrées. Nous insistons notamment sur le fait que l’état fonctionnel cognitif caractérise les personnes en établissement et celles en ménage. Selon le territoire, on assiste plus spécifiquement à des phénomènes de précarité, en particulier à la suite de difficultés de conditions de logement. Cela explique pourquoi les services d’aides à domicile instaurent des aides techniques permettant de réadapter le logement. Ces difficultés en engendrent d’autres puisque la médicalisation du domicile est difficilement vécue par les personnes, du fait que le logement constitue un refuge empreint de valeurs et d’histoire. Cette profonde fragilité des personnes âgées est également caractérisée par un sentiment de solitude, d’isolement, de tristesse et d’ennui, malgré l’implication de l’entourage. Les multiples intervenants à domicile et la place de l’entourage conduisent à redéfinir les rôles de chacun. C’est dans ce contexte que peuvent survenir des enjeux relationnels. Modification de l’image corporelle et sentiment de perte de maîtrise sur la situation constituent des problématiques récurrentes de la personne âgée à domicile. Ces problèmes se situent dans un contexte global, dans lequel la société française véhicule une image désastreuse de la vieillesse. 1.1.3 Synthèse de la politique française en faveur des personnes âgées En France, la politique sociale en faveur de la personne âgée est née de la Loi de 1905 qui pose le principe de l’assistance obligatoire aux vieillards en leur donnant la possibilité d’être accueillis dans des hospices ou de percevoir une pension [27]. Cette législation est complétée par les lois du 5 avril 1910 et du 30 avril 1930 sur les retraites, puis sur les assurances sociales (revenu minimum vieillesse). La période d’après-guerre est caractérisée par l’instauration de la branche vieillesse de la sécurité sociale. Un régime est fondé sur le principe de redistribution et de solidarité entre générations : les actifs payent pour les pensions des retraités. Des régimes complémentaires de retraite sont mis en place et une lutte contre la pauvreté des personnes âgées est instaurée. La notion de politique vieillesse fait son apparition en 1960, suite aux réflexions ayant émergé dans le rapport Laroque [28]. Les objectifs principaux de cette politique - toujours d’actualité - sont de porter un autre regard sur le vieillissement, de privilégier le soutien à domicile ou encore de développer la coordination entre les politiques sectorielles. Plus tard, les départements se verront confier la responsabilité de l’action sociale et de l’aide sociale[29]. Un service départemental Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 23. 1.2. Les aidants 15 médico-social de soins aux personnes âgées dépendantes a été mis en place, l’objectif étant d’attribuer les prestations, de coordonner les organismes et d’évaluer l’efficacité des services rendus. Entre 1997 et 2011, les orientations des politiques publiques et sociales en faveur des personnes âgées se distinguent généralement par la mise en place de prestations [30][31][32] et d’outils permettant d’évaluer les besoins d’aide par le biais de la grille AGGIR. L’une des grandes orientations vise la protection des personnes âgées en institution par la définition de leurs droits fondamentaux, suite à la loi du 2 janvier 2002 [33]. Les évènements caniculaires en 2003 permettront de réorganiser la politique en faveur des personnes âgées, notamment par la mise en place de la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées. De nombreux plans se dessineront alors, afin de prévenir les complications de santé, de lutter contre la solitude, d’ améliorer la qualité de vie des personnes, de maîtriser les dépenses, ou encore de prendre en charge les démences de types Alzheimer [34][35][36]. À ce jour, un des enjeux de l’adaptation de la société au vieillissement concerne la prise en compte des aidants de personnes âgées dépendantes. 1.2 Les aidants 1.2.1 Histoire d’un acteur toujours présent et transparent Le proche de la personne malade a toujours existé et ce, sous différentes formes. Déjà au 1er siècle de l’ère chrétienne, Sénèque rappelait, ô combien, ses amis ont participé à sa guérison. C’est ce même proche qui apparaît au travers de chacune de nos expressions humaines. La peinture de la Renaissance, les scènes d’hospices du XVIII ème siècle, les récits et, aujourd’hui, au sein même de nos activités sociales comme les forums ou encore les animations locales. Dans notre système de santé, on reconnaît le déni des compétences de la famille en 1707, lorsque le monopole de l’exercice de la médecine est attribué à un seul acteur, le médecin [37]. L’hôpital devient le lieu à l’origine de la séparation entre le malade et sa famille. Les transformations de l’organisation sociale et l’évolution de la famille dans le domaine de la santé laissent place aux soignants, seuls à même de répondre aux difficultés que traverse le malade. Pour autant, le proche est toujours présent, et il se dissimule derrière les interventions des professionnels. Même à domicile, la famille est souvent témoin d’une puissance scientifique. Au milieu du XXième siècle - après la Seconde Guerre mondiale - la présence des proches se renforce, la médecine étant impuissante face aux mutilés de guerre. Toujours présent mais socialement oublié, le proche est celui qui vit au quotidien de la personne malade en dispensant les soins du corps, mais aussi ceux de l’âme. Le vieillissement de la population et les progrès de la médecine ont fait apparaître un nouveau fléau : les maladies chroniques. Les soins de longue durée viennent profondément reconfigurer le paysage sanitaire et social en structurant le dispositif de soins à la personne [33]. Plus tard, le législateur reconnaît le patient comme un être de droit[38]. L’entourage, lui, est toujours oublié sous l’appellation de la personne de confiance ou de celle d’aidant, inscrite au sein même de la politique en faveur des personnes handicapées [10]. Les aidants de personnes âgées dépendantes sont de plus en plus nombreux à intervenir à domicile. Pour preuve, les services médico-sociaux reposent sur la présence et l’implication de l’entourage pour pérenniser le maintien à domicile de leurs proches. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 24. 16 Chapitre 1. Une approche théorique 1.2.2 La famille n’existe pas ! Étymologiquement, le mot « famille »est issu du latin « familia » signifiant « ensemble des habitants de la maison »[39]. La notion de famille fait donc correspondre celles des personnes vivant réciproquement au sein d’un espace donné. Par définition, le concept de famille renvoie à la parenté par le sang, les alliances et les adoptions [40]. Représentant une entité sociologique, économique et juridique, le terme de famille figure dans le Code civil[41]. Ce droit est en constante évolution. Ainsi la famille est un concept en mutation, qui prend source au sein de la société humaine dont la description doit être élargie, compte tenu de son évolution. Fondé traditionnellement sur le mariage, ce terme renvoie aussi à la notion de couple, à la fois sous forme d’union libre et par un pacte civil de solidarité. On parle également de famille homoparentale et/ou monoparentale. Il semble cependant important de comprendre que la famille est considérée comme une unité sociale, puisque l’État fait partie du cercle de la famille. Il en assure même le contrôle : « la notion assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à son développement »[42]. D’un point de vue sociologique, la famille est une unité de reproduction biologique, de production, de socialisation, de transmission, mais également de consommation [43][44]. Cette institution ne peut exister que s’il y a d’abord une pluralité de famille que constitue la société. Cela fait émerger la notion de filiation et les divers modèles familiaux existants. À ce jour, on différencie deux grands types de famille que sont la famille élargie comprenant parents et alliés, ainsi que la famille élective. Les systèmes familiaux au sein de notre société sont divers et complexes, puisque différents types de famille peuvent coexister dans le temps et l’espace. À ce sujet, Wright et Leahey pensent que « tout groupe qui se reconnaît en tant que famille est une famille ». La famille est donc une unité ou les membres sont ou non reliés par la naissance, le mariage, ou l’adoption et vivent ou non sous le même toit. Elle suppose obligatoirement des liens affectifs et solidaires, un sentiment d’appartenance à un groupe dans lequel chacun s’identifie comme étant membre à part entière d’une famille. Ce sentiment d’appartenance met implicitement en évidence l’engagement qui implique les personnes dans une responsabilité réciproque, considérant dès lors que la famille n’est pas une réalité observable. Cette idée est reprise dans l’épistémologie systémique. En se référant à la théorie des systèmes, la famille en soi n’existe pas. Étant vue comme un ensemble d’éléments en interaction qui échangent des informations avec l’extérieur, ayant comme idée générale que « le tout est autre chose que la somme des parties »[45]. Il s’agit d’une co-construction qui permet de donner du sens à l’histoire des personnes qui la composent. La psychanalyse parle de la famille comme une construction mentale par laquelle chaque individu détermine un certain nombre d’éléments. Elle ne se limite pas aux personnes. En effet, animaux domestiques et éléments matériels peuvent faire partir des éléments constitutifs du cercle familial. La proximité des membres avec leurs proches est une des caractéristiques qui fonde la famille. La survenue d’un accident, l’apparition d’une maladie, le déclin des fonctions physiques et psychologiques d’une personne modifie la dynamique familiale. Elle peut entraîner un ou plusieurs de ses membres à prendre soin de la personne affectée. Accompagner un proche dans ses difficultés amène la famille à occuper une fonction particulière. C’est dans ce contexte que l’on parle du concept d’aidant. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 25. 1.2. Les aidants 17 1.2.3 Aider et être aidant : entre fonction et appartenance Se rapportant à sa définition, le terme « d’ aidant » signifie « les personnes qui prêtent leur concours à quelqu’un, qui aident quelqu’un »[46]. Le concept d’aidant fait référence aux concepts d’identité, de famille appartenant au courant de la sociologie. La notion d’aidant trouve son origine en Outre Atlantique ou le proche de la personne malade se nomme « Carer ». Ce terme désigne aussi bien les soins prodigués qu’une certaine disposition affective. Il s’agit d’un concept récemment étudié (début du XXI ième siècle). Plusieurs qualificatifs viennent enrichir ce concept aussi large que complexe : aidant naturel, aidant de fait, aidant familial, aidant informel, personne de soutien, le proche-aidant ou encore l’aidant professionnel. L’aidant est officiellement défini en 1998 par le conseil de l’Europe qui évoque une personne sans statut professionnel. Il correspond à « des membres de la famille, des voisins ou d’autres personnes qui prodiguent des soins ou accompagnent des personnes dépendantes ». En 2006, la COFACE propose une définition similaire de l’aidant, inscrite dans la charte européenne de l’aidant familial [47]. Dans certains pays européen, c’est surtout le concept de « proche aidant » qui est identifié. Au sein de la législation française, le concept « d’aidant » est apparu pour la première fois en 2005, dans le domaine du handicap. « L’aidant naturel » correspond à la personne qui est désignée par le patient afin d’accomplir des actes de soins prescrits par un médecin, après une éducation et un apprentissage adaptés et encadrés par décret d’application. La loi précise que l’aidant doit être informé, formé et accompagné dans ses démarches [10]. Le concept d’aidant sera ensuite élargi sous l’appellation d’« aidant familial » au sein de la politique de l’action sociale et de la famille. Il désigne : « ... le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle la personne handicapée a conclu un pacte civil de solidarité, l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au quatrième degré de la personne handicapée, ou l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au quatrième degré de l’autre membre du couple qui apporte une aide humaine. » Tableau 1.4 – Décrét n˚2008-450 du 7 mai 2008 Code de l’action sociale et des familles Au sein de la politique en faveur des personnes âgées le concept d’aidant n’est pas défini. Il est vrai qu’une pluralité de termes figurent au sein de la réglementation française. On parle d’aidant naturel et informel, de personne de confiance, de proche, de famille, d’entourage ou encore de conjoint. Cette situation nous mène à réfléchir sur la position de l’aidant au sein de notre société : soit une position secondaire et déséquilibrée. Dans des pays tels que les États-Unis, le Canada ou la Chine, ce sont les termes de « Caregivers » qui sont utilisés. Le terme de « Carers » apparaît majoritairement au Royaume-Uni, en Nouvelle Zélande ou encore en Australie. L’ensemble des études met implicitement en évidence une contradiction qui se retrouve dans la sémantique du terme d’« aidant ». En effet, la fonction de l’aidant, renvoie aussi bien à une solidarité familiale qu’à une véritable professionnalisation. On parle d’ailleurs d’aidant professionnel et non-professionnel. À ce sujet, les qualificatifs d’ « informel » et de « naturel » introduisent ces nuances sémantiques. Le premier désigne une absence de reconnaissance de la relation entre le proche et son aidant. Le deuxième montre que la fonction d’aidant relève d’une logique, d’un héritage et d’une disposition naturelle. Ainsi il convient de prendre en compte ces deux dimensions : aider quelqu’un et être aidant. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 26. 18 Chapitre 1. Une approche théorique Dans le cadre de ce travail, nous considérerons l’aidant au sens large, à la fois professionnel et non-professionnel, bien que nous nous intéressions davantage aux aidants familiaux. 1.2.3.1 Les aidants professionnels Les aidants professionnels du soin à domicile sont majoritairement des femmes. L’aide dispensée est caractérisée par un turnover important, en lien avec la pénibilité des services proposés mais aussi avec la grande précarité des services à la personne. Les aidants pro- fessionnels forment une équipe pluridisciplinaire dont l’objectif est d’évaluer l’autonomie et l’environnement de la personne en vue de construire un projet individuel de soins. Ils regroupent les auxiliaires de vie, les aides-ménagères, les aides-soignants, les infirmiers, ainsi que toute personne intervenant à domicile et qui se positionne en tant que professionnel du prendre soin. La réalisation de gestes et d’activités de la vie quotidienne constituent les principales pratiques des professionnels, intervenant dans les tâches ménagères et les soins personnels. Ils assurent une compagnie, une présence dès le lever de la personne jusqu’a son coucher. Ainsi ces aidants n’ont que peu le temps de participer à des formations. 1.2.3.2 Les aidants familiaux Pivot du système de soins à domicile, l’entourage de la personne aidée participe au maintien à domicile des personnes âgées dépendantes, leur permettant de vivre le plus longtemps possible dans le respect des choix établis. L’aidant familial n’est pas dévolu à n’importe quelle figure familiale. Il est lié à plusieurs facteurs que sont le genre, la génération, la qualité de la relation et la proximité géographique. Dans la grande majorité des cas, c’est le conjoint qui est l’aidant principal. S’il est malade ou décédé, c’est souvent la fille aînée qui est l’aidant référent. Les femmes sont choisies de manière privilégiée. Dans le cas où la fratrie est composée de plusieurs enfants, l’aidant est celui dont la proximité géographique et le contexte familial (marié(e) ou non, avec ou sans enfants, en activité ou non) s’avèrent les plus propices à s’occuper d’un proche. La notion d’aidant principal renvoie surtout à une histoire familiale et, de facto, aux membres qui la composent, faisant intervenir des rôles et des mécanismes de régulation. La désignation de ce rôle n’est pas le fruit du hasard, elle repose sur des critères très subjectifs et complexes. Bien souvent, ce choix n’est pas négocié, il s’inscrit dans un dû implicite que la personne doit assumer. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 27. 1.2. Les aidants 19 1.2.4 Rôle, place et responsabilité des aidants Dans la littérature, nous constatons que les rôles et les fonctions 1 des aidants varient selon le type et le stade d’évolution de la pathologie. Cependant, nous pouvons affirmer que l’aidant conjugue plusieurs rôles. Celui de parent-aimant, d’accompagnant et/ou de soignant. Ce contexte fait émerger la dimension relationnelle qu’occupent les familles en termes de présence et de soutien moral/psychologique auprès de la personne en situation de dépendance. Dans un contexte de soins à domicile, l’aidant est conduit à assurer deux fonctions principales : une fonction de production domestique et une fonction de production de soins. Certains auteurs parlent de « direct activities/tasks and indirect activities/tasks ». Parmi ces activités, l’on compte celles liées aux soins personnels comme l’aide à la toilette et à l’habillage et celles associées aux soins de santé comme la préparation et la surveillance des traitements qui constituent les « soins directs ». « Les soins indirects » regroupent toute la gestion des soins en termes de coordination entre les différentes prestations et les structures intervenant à domicile. La gestion financière, la prise de rendez-vous ou encore les transports font partie de ces activités, celles-ci étant réparties en fonction des intervenants à domicile et de la capacité de la famille à les assurer. L’aidant est également perçu comme celui qui entoure les soins dispensés par les professionnels. Qu’il soit naturel ou professionnel, l’aidant principal est une personne ressource pour les équipes soignantes, ayant une connaissance approfondie de l’histoire de la personne et de ses habitudes de vie. Sa propre perception sur le vécu de l’accompagnement et sur l’évolution prévisible de la pathologie de la personne soignée peut être un soutien pour la prise en charge de son proche. La place des aidants dans le dispositif de soins à domicile est dynamique et évolutive, souvent située au sein même d’une relation triangulaire - patient/aidant/soignant -. D’un point de vue théorique, nous constatons que dans cette configuration, le professionnel prend en compte un tout dans lequel l’un des membres est malade. Son intervention crée un système qui constitue dès lors un élément caractéristique de ce triptyque. L’homéostasie de cette entité passe par des moments critiques dans lesquels le système peut dysfonctionner. Le triangle de Karpman (cf graphique ) est un outil permettant de penser en permanence chaque élément du système. Par l’analyse transactionnelle, Karpman indique qu’il est fréquent d’observer, dans un groupe de trois personnes, trois rôles particuliers : persécuteur, sauveteur et victime. Bien que ces rôles soient installés, il se produit généralement « un coup de théâtre » au cours duquel les rôles vont permuter. Citons par exemple un coordinateur de soins qui intervient au domicile, et qui constate que le mari d’une patiente pratique un geste déraisonnable. Le coordinateur risque de percevoir le patient comme une victime et l’épouse comme une persécutrice. En faisant le choix d’intervenir, et en demandant à l’épouse de changer 1. Il importe de rappeler que si les termes de « rôle »et de « fonction »sont étroitement liés, ils regroupent des définitions distinctes. Selon JL Moreno - théoricien Américain - le rôle correspond à l’ensemble des comportements et à l’image sociale d’un individu selon son statut et sa fonction. La fonction, quant à elle, peut être définie comme une tâche ou une mission attribuée par un individu. Le rôle désigne tantôt « le modèle qui inspire la conduite, tantôt la conduite elle-même ». Il prend place dans un contexte social car il repose sur les relations. Parler de rôle social, c’est prendre en compte l’aspect collectif que peut revêtir un rôle. Homans le décrit comme une norme qui établit la relation attendue d’une personne dans une certaine position avec l’autre. Cela revient à dire que l’aidant et l’aidé se trouvent dans une attente mutuelle. Nous retiendrons la proposition de Rocheblave-Spelé qui met en évidence 3 niveaux de classication du rôle : le niveau intersubjectif, dans lequel l’aidant définit son rôle par l’interaction avec l’aidé ; le niveau de la personnalité, qui correspond au fait que l’aidant détermine lui-même son rôle ; enfin, le niveau du groupe, qui distingue le rôle de l’aidant comme le consensus et l’expression des normes et des valeurs culturelles. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 28. 20 Chapitre 1. Une approche théorique de comportement, celui-ci se positionne en sauveteur. Après des échanges vigoureux ou chacun tente de convaincre du bien-fondé de son action, le patient intervient pour mettre fin à cette sensation désagréable qu’il ressent. Enfin, il est fort probable que ce dernier choisisse de soutenir sa femme. Les rôles permutent : le patient accuse le professionnel d’être un persécuteur et positionne sa femme comme une victime. Le coordinateur peut alors éprouver un sentiment de confusion, puisque, pourtant, il cherchait à aider le patient. Cette triangulation se centre souvent sur des enjeux de pouvoirs. La circulation de l’information permet de maintenir ce système. Pour cela, le « je » du professionnel doit être inclus en même temps que le « nous », permettant ainsi de former une référence collective indispensable au maintien des relations. Trouver les mots justes, informer, créer un climat de confiance, évaluer la vulnérabilité de l’aidant sont autant de moyens pour maintenir les relations. Dans les services médico-sociaux, l’appréciation de la place des aidants relève de pratiques hétérogènes. Bon nombre de services de soins à domicile ont une approche très focale, concentrée sur la prise en charge du patient. Nous émettons l’hypothèse selon laquelle cette approche est liée principalement à la formation des professionnels. Même si les soignants s’appuient sur les aidants pour pouvoir assurer une continuité de la prise en charge, cet appui est instrumentalisé car très souvent, il n’existe aucune évaluation formelle réalisée auprès de l’aidant. Certaines institutions - influencées par le contexte politico-économique- ont fait le choix d’intégrer pleinement les aidants de personnes âgées dépendantes. Ces intégrations peuvent reposer sur la mise en place de groupes de parole animées par des psychologues, de formation en partenariat avec des associations de patients ou de mise en place d’outils logistiques dans le but de prendre en compte l’aidant. Les formations proposées peuvent être une réponse à l’évaluation faite sur le territoire. Par exemple, citons les formations centrées sur les gestes de premiers secours. D’autres structures ont également intégré pas à pas l’aidant dans le projet de soins infirmiers du patient, tout en tenant compte du contexte socio-environnemental dans lequel il apparaît. Les équipes mobiles Alzheimer mise en place à la suite du plan Alzheimer ont impulsé grandement les actions en faveur des aidants. Les programmes de formation des professionnels, et notamment des assistantes de soins en gérontologie, prennent en compte la personne âgée et son aidant. Ils permettent ainsi d’assurer une évaluation de la personne âgée, mais également de l’aidant afin d’assurer un meilleur accompagnement tout au long de la prise en charge. Lorsqu’on parle de la responsabilité des aidants, on prend en considération l’obligation faite à une personne de répondre de ses actes, du fait du rôle et des charges qu’elle doit assumer. Dans la littérature, on parle majoritairement des responsabilités que doit prendre la société à l’égard de l’ aidant. Cependant, on note que celui-ci oscille entre plusieurs responsabilités : responsabilités personnelles et responsabilités professionnelles. À ce sujet, on parle le plus souvent de responsabilité morale à l’égard de la personne dépendante. Il est vrai que la responsabilité est une notion juridique. Pour autant, elle peut aussi être définie comme un sentiment : se sentir coupable. Même s’ils ne concordent pas toujours, ces deux versants de la responsabilité renvoient à la capacité à être responsable pour soi-même et pour autrui. Jonas définit la responsabilité de l’autre en réponse à sa fragilité. La sollicitude constitue une évidence, bien avant d’être un devoir. Ainsi, cette obligation morale de prendre soin de l’autre répond à un devoir « d’être » qui précède le devoir de « faire ». Grâce à cette idée, nous avons une représentation du « pourquoi » être aidant. En raison d’une absence de statut clairement défini, il est difficile de se représenter les responsabilités des aidants dans Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 29. 1.2. Les aidants 21 Graphique 1.1 – Le triangle de Karpman la fonction qu’ils occupent auprès de leurs proches. Cependant, comme tout être humain, ils détiennent des droits et des devoirs que leur confère la société. 1.2.5 Répercussions du rôle d’aidant Dans la littérature, le rôle de l’aidant est souvent lié à la notion de charge et de fardeau nommé « burden ». Cette charge peut être exprimée de deux façons : une charge objective et une charge subjective. La charge objective représente les conséquences concrètes que l’aide engendre sur la vie de l’aidant, tandis que la charge subjective constitue l’ensemble des conséquences physiques, psychologiques émotionnelles, sociales et financières ressenties par l’aidant. Il s’agit de ce qui est perçu par l’aidant comme ayant un impact direct sur sa qualité de vie et celle de son proche. De nombreuses études ont démontré l’impact négatif du rôle de l’aidant. Il concerne tout d’abord la santé physique et psychique de l’aidant. Des symptômes tels que la fatigue physique, l’épuisement, les palpitations et la tachycardie ont été décrits. On évoque aussi l’apparition de maladies chroniques et d’un état de santé généralement perçu comme délétère, pouvant conduire à une dépression. Les répercussions psychologiques sont également évoquées en particulier le stress, l’anxiété, le surmenage et le renoncement. Elles peuvent être en lien avec un sentiment de culpabilité, d’échec, de honte ou encore une angoisse de perte : la perte de l’être cher et la perte du statut d’aidant. Aucune étude ne démonte si la fatigue physique conduit à la fatigue morale ou inversement. Le facteur temporel est un élément important à prendre en compte. La maladie et les troubles évoluant, l’aidant est confronté à une accumulation et à une répétition des soins qui conduisent à Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 30. 22 Chapitre 1. Une approche théorique l’épuisement, voire à une consommation de psychotropes et de traitements médicamenteux. Cet état de santé a des répercutions sur la vie sociale de l’aidant. Le réseau social diminue du fait de l’implication de l’aidant et l’isolement s’installe rapidement. Les sentiments de solitude et de « mort sociale » peuvent être ressentis par l’aidant. Certains auteurs mettent en exergue le risque de désocialisation et de marginalisation de cette population. L’aide n’impacte pas seulement sur la vie personnelle de l’aidant, elle bouleverse aussi l’organisation professionnelle. Ces répercussions peuvent aller d’un simple aménagement du temps de travail à un arrêt total de l’activité. L’aspect financier est un élément à prendre en considération, ayant un impact sur la qualité de vie de la personne aidée, ainsi que sur la personne aidante. Aider un proche dans le besoin peut également recouvrir des aspects positifs. Peu d’études se sont intéressées à cette dimension de l’aide. Pour autant, les éléments positifs ressentis par l’aidant peuvent être l’amour, la tendresse, l’optimisme et l’acceptation. Le rapprochement et le resserrement des liens affectifs, le partage d’un temps en commun apportent un réel échange et une proximité plus grande dans la relation. Cette proximité peut se traduire par une relation fusionnelle. De plus, l’épanouissement et l’enrichissement personnels peuvent apparaître, car accompagner une personne âgée, c’est apprendre à vivre autrement, expérimenter de nouvelles choses et s’ouvrir à d’autres conceptions de la vie. L’aspect positif de cet accompagnement est en corrélation avec la dimension subjective de l’aide, étant donné que le sentiment de réussite et l’assurance de la personne aidante sont des facteurs essentiels. L’aidant conjugue sans cesse avec les aspects positifs et les aspects négatifs de l’aide. Ce contexte est propice à des sentiments mixtes perçus par l’aidant. On parle alors d’ambivalence, entre souffrances et compétences, doute et culpabilité, constituant le lit de souffrance familiale. 1.2.6 Profil des aidant(e)s En nous appuyant sur les travaux de Coudin (2004), nous pouvons distinguer 4 types d’aidant. Le premier profil est caractérisé par la valorisation attachée à ce rôle. Le soutien apporté constitue une source de gratification mais aussi l’unique raison de vivre. L’aidant se considère comme étant le seul à même de répondre aux besoins de son proche. Coudin évoque le déni de la gravité de la maladie dans une posture de toute puissance. Le deuxième profil d’aidant se distingue par des personnes sans enfants qui ont peu de maîtrise sur la prise en charge de la maladie. Ces aidants paraissent épuisés, dépressifs et proches de la rupture. Les aidants « rationnels » sont des conjoints dont le rôle et la fonction sont fondamentaux. Cependant, à l’exception du premier profil d’aidant, ceux-ci comportent d’autres sources de valorisation. Enfin, le quatrième type d’aidant est celui que l’auteur nomme l’aidant « distancié », étant un enfant qui ne vit pas au domicile de la personne soignée, et qui n’a pas de réticence à prendre soin de son proche. Cette classification s’avère hypothétique mais nous aide à mieux comprendre le profil des aidants. L’évolution de ces profils est perceptible. De ce fait, nous avons retenu les caractéristiques essentielles liées au profil des aidants de personnes âgées dépendantes à domicile, issues des dernières recherches dans ce domaine que voici [48][49][50] : Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 31. 1.2. Les aidants 23 – Plutôt des aidantes : la majorité des aidants informels sont des femmes. La mas- culinisation est amorcée et les aidants jeunes apparaissent. Dans certains pays, ce phénomène existe ; on parle alors de « young carers »et de phénomènes de « génération sandwich ». – Des membres de la famille : parents et conjoint constituent le duo que l’on retrouve le plus. – Des aidants « âgés » : 57% des aidants ont plus de 50 ans. – Une fourniture de soins quotidienne : 66% des aidants informels dispensent des soins sur une base quotidienne. Les 34% restants prodiguent des soins sur une base hebdomadaire. L’aidant est une personne très impliquée dans son rôle. – Le soutien psychologique et la surveillance : ils constituent les principales aides que fournissent les aidants auprès de leurs proches. – Le manque de temps : il constitue l’une des difficultés que rencontrent les aidants. – Un acteur « invisible » : les professionnels n’évaluent pas les besoins de l’aidant et peu de conseils sont apportés. 1.2.7 Besoins, attentes et dispositifs d’aide NB : Les besoins et les attentes des aidants ne seront pas cités par ordre de priorité. Ils concernent principalement : [50]. – Les soins relationnels qui constituent un besoin essentiel pour les aidants. Il s’agit, pour eux, d’être écoutés, compris, soutenus et de se montrer disponible à leur égard. L’information sur les dispositifs de soutien aux aidants, sur les démarches administratives, les formations, les aides financières ou encore sur le matériel existant sont les demandes les plus récurrentes exprimées par les aidants. – La qualité de l’accompagnement de la personne soignée. L’une des attentes des aidants est la qualité de la prestation des services en faveur de leurs proches. Cela passe par la capacité des professionnels à rentrer en relation avec la personne soignée, mais aussi à prodiguer efficacement des actes de soins tels que la toilette, l’habillage ou encore les transferts. Certaines études ont retenu des critères de qualité qui concernent : la personnalisation des soins, la ponctualité, la bienveillance ou encore le sérieux des professionnels dans le cadre de leur travail. – La reconnaissance des aidants. Cette reconnaissance est ici envisagée comme l’iden- tification des capacités et des aptitudes des personnes aidantes à soutenir leur proche. Elle concerne également l’implication et la place de cette personne, compte tenu de leurs difficultés et de leurs contraintes. La reconnaissance de la part des professionnels est souvent traduite verbalement, notamment sur la valorisation de l’estime de soi et la valeur de l’engagement de l’aidant. Le partenariat de soins auprès de cette population est aussi une forme de reconnaissance puisqu’il s’agit d’une prise en compte de l’expertise des aidants dans les soins menés auprès de leurs proches âgés. – L’allègement des responsabilités. Les rôles de l’aidant sont multiples. Le rôle de co- ordination des aidants est considéré comme le plus important, surtout lorsque la personne est désignée comme « aidant principal ». De ce fait, elle assume une très grande respon- sabilité de l’ensemble des interventions menées, aussi bien à domicile qu’à l’extérieur. Les études montrent que les aidants souhaitent déléguer ce rôle de coordination, étant trop Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 32. 24 Chapitre 1. Une approche théorique occupés dans leurs vies. Le poids des responsabilités, notamment en termes de décisions, est souvent verbalisé par les aidants. Les dispositifs d’aide en faveur des aidants dépendent essentiellement des besoins et des attentes exprimés par la personne soignée et l’aidant. Ils concernent plusieurs domaines et peuvent être abordés de manière différente. Afin de clarifier l’ensemble des aides à destination des aidants, nous avons décidé de les catégoriser en soutiens directs et indirects. Les soins directs sont les actions menées pour la personne aidante. Les soins indirects concernent l’ensemble des actions menées pour la personne soignée. Nous proposons ici une liste des différents soutiens qui ne constitue cependant pas une typologie exhaustive de l’aide en faveur des aidants. Soutiens directs Soutiens indirects – séjour et vacances – groupe de soutiens et de paroles – bistrots mémoires – café des aidants – activités sociales et culturelles – plateforme de répit – les dispositifs d’information : CLIC, as- sociations de patients, Conseil général, MDPH, Sécurité sociale, site internet ou encore forum. – soutien dans le cadre du travail : la loi prévoit trois type de congés sans solde. – les structures sanitaires : les services de soins à domicile comme les SSAD, les SSIAD et les SPASAD incluant les ESA, les réseaux de santé gérontologiques, l’hô- pital de jour, l’hôpital de nuit, l’hôpital à temps partiel, les centres hospitaliers, les professionnels de santé libéraux, les centres de mémoire, centres de soins et ré- adaptations, accueils temporaires (MAS, FAM, EHPAD). – les aides matérielles : exemple : téléa- larme, lit médicalisé ou encore chaise per- cée. – les aides financières : APA, PCH, tierce personne Bien qu’il existe plusieurs mesures à destination des aidants, de nombreuses limites ap- paraissent. L’aspect financier, le placement de la personne âgée en institution, le manque d’information et de temps, la complexité et la diversité des intervenants sont autant de freins qui ne permettent pas à la personne et à son aidant d’être accompagnés. En France, nombre de dispositifs sont à destination des aidants atteints de la maladie d’Alzheimer. Ainsi, l’ensemble des personnes aidantes, dans le cadre d’autres pathologies, ne permettent pas d’accéder à des offres de soins. 1.2.8 Le handicap familial Comprendre le handicap familial revient à penser le handicap lié à la dépendance d’une personne âgée comme une rupture de « contrat ». Parfois, il arrive que la famille adopte une dynamique de « jeu inégal » entre ses parties. Des phénomènes de maltraitance peuvent se produire, puisque les familles ne se voient pas vulnérables. Surprotection, infantilisa- tion, maternage/paternage, sur-stimulation, autoritarisme ou réification 2 constituent des phénomènes comportementaux inadaptés que peuvent adopter les aidants de personnes 2. En psychologie, la réification désigne le fait de considérer autrui comme un objet. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 33. 1.2. Les aidants 25 dépendantes. Citons par exemple, le thème de la sécurité, qui mène l’aidant à restreindre les activités de son proche afin qu’il ne soit pas exposé à des risques. Ne pas traverser la rue ou ne pas manger tel aliment trop gras peuvent être des attitudes sécuritaires identifiées comme des freins à la reconnaissance du désir de la personne aidée. Elles rentrent en opposition à la finalité du soin : préserver l’autonomie de la personne âgée. Ces temps de servitude se font au détriment de la vie personnelle de l’aidant, modifiant ainsi la dynamique de la famille et/ou du couple aidé-aidant. Ce couple, n’étant plus composé de deux personnes, constitue dès lors une entité, où l’aidant est le porte-parole du malade. Les notions de dette, de don et de contre-don sont centrales. Le don prend souvent sens pour la personne aidante au travers d’un sentiment d’inutilité quand l’autre est souffrant. Derrière la notion de don, il y a une dimension de réciprocité. La personne âgée dépendante, du fait de sa maladie, ne peut toujours faire écho à cette demande implicite : donner, recevoir et rendre. Elle se maintient donc dans une position d’infériorité vis-à-vis du donateur. C’est dans ce contexte que l’aidant peut, lui aussi, être en souffrance puisqu’il fait le deuil de ce qui ne pourra pas être rendu (le contre-don). Cette souffrance s’installe ; on parle de l’aidant comme d’un « co-malade ». En réalité, il ne s’agit pas de don – car le don est libre – mais de dû, puisque souvent l’aide apportée n’est pas faite pour obtenir ou faire plaisir, mais en vertu de convention et de rôle. Les problèmes de domination et de réciprocité, de liberté et d’excès non-contrôlés peuvent être des enjeux dans la relation. Proposer une vision éthique au travers de la notion d’handicap familial, c’est affirmer qu’il ne peut y avoir une éthique de l’aidant, puisque chaque situation doit être perçue et reconnue dans sa singularité. Le rôle d’un professionnel est d’accompagner l’aidant à trouver sa juste place au sein d’un réseau de soutien. L’aidant doit découvrir, dans un premier temps, sa place, et définir sa mission qui ne consiste pas seulement à assurer des actes relevant d’un savoir. Il ne doit pas prendre position dans une relation spécifique qui le contraint à s’isoler et à éprouver une expérience au point qu’il ne s’en remettra jamais. Bien au contraire, tout l’enjeu réside dans la manière de préserver l’humanité de la relation aidant-aidé et de l’inscrire dans la trajectoire de vie du patient. Hugues Joublin évoque le risque d’instrumentalisation des aidants au regard de la politique sanitaire et sociale. Est-on naturellement aidant ? Le choix est-il déterminant dans la relation que j’ai avec mon proche ? Ces questions nous conduisent à affirmer que l’aidant doit avoir le choix de ce qu’il souhaite faire et de ce qu’il peut faire, sans que lui soient imposées des tâches insupportables. Devenir aidant transforme la vision du monde et de soi et agit sur les relations interpersonnelles. De ce fait, le professionnel de santé doit porter un regard vigilant sur la santé des aidants afin de prévenir l’épuisement, la désocialisation et la marginalisation de cette population. Serge Guérin indique que le professionnel doit veiller au fait que l’aidant adopte « une posture de présence responsable » en partant de l’idée générale que le croisement des solidarités pluriels nous renforcent réciproquement. Accompagner la personne aidante dans son implication et son engagement est primordial. L’aidant ne doit pas s’immiscer dans une spirale infernale. S’autoriser à passer le relais et prendre du répit, éviter le poids des décisions solitaires, bénéficier de ressources morales et financières, constituent autant de préoccupations qui doivent guider notre action. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 34. 26 Chapitre 1. Une approche théorique 1.2.9 La proximologie : un nouveau champ de recherche Ce néologisme tire son origine du latin proximus signifiant « proche » et du grec logos signifiant « parole, discours ». Il peut être défini comme l’étude des relations entre la personne dépendante et ses proches. Plus précisément, ce champ de recherche consiste à envisager la présence et le rôle des aidants comme des éléments déterminants de l’environnement du patient, participant à l’efficacité des soins et de la prise en charge [51]. Son auteur, Hugues Joublin insiste sur la relation qui se crée entre le patient et l’aidant, soulignant sa difficulté, sa richesse, mais aussi son caractère singulier. Plusieurs objectifs semblent être primordiaux : assurer un accueil de qualité auprès du patient et de son entourage, partager leurs savoirs, maintenir une relation de confiance entre le malade, ses proches et les soignants, ou encore apporter un soutien tout au long de la maladie pour le proche et son aidant. Hugues Joublin nous apporte des outils pour évaluer la capacité d’implication du proche. L’hypothèse centrale est de considérer que l’implication de l’aidant fait apparaître des enjeux à trois niveaux : pouvoir, vouloir et savoir (cf graphique ??)[52]. Certaines problématiques de l’aidant peuvent apparaître comme le risque de maltraitance non-intentionnelle. Elle correspond à un aidant qui a le pouvoir, et la volonté d’aider son proche, mais sans en avoir les compétences. Le partenaire idéal serait un aidant possédant à la fois le pouvoir, le vouloir et le savoir. Ainsi, le rôle du coordinateur est de valoriser l’implication de l’aidant, d’apporter une réassurance pour maintenir le lien de confiance et se montrer vigilant sur l’état de santé du proche-aidant. 1.3 Le domicile On ne peut évoquer l’expression de « culture du domicile » sans parler du concept d’envi- ronnement. Le terme d’ « environnement » est une notion complexe et polysémique qui n’a cessé d’évoluer au fil des années. Il prend sa source dans l’ancien français « environnem- nez » qui signifie « circuit, contour ». Il désigne ce qui structure et enveloppe la personne. En linguistique, il peut prendre le sens de cadre de vie, d’ambiance ou encore de contexte. Nous aborderons ici la notion d’environnement comme l’étude des milieux naturels, s’intéressant à la nature mais aussi aux activités humaines et à leurs interactions, en ayant un regard attentif sur la conception de la mésologie qui a été développée en France par le géographe Augustin Berque. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 35. 1.3. Le domicile 27 1.3.1 Entre lieu de vie et lieu de soins Lorsqu’une personne âgée a le désir d’être soignée à domicile, c’est peut-être parce que le domicile est un lieu qui fait partie de son identité, une identité qui se retrouve dans l’expression même de : « chez soi ». Cette notion déploie 3 dimensions fondamentales : la personne, l’espace et l’objet. Tout d’abord, il faut comprendre la personne en tant qu’être humain singulier, porteur d’une histoire, d’une culture, de valeurs, de croyances, de choix, d’expériences, mais aussi de pratiques. On peut évoquer la notion d’environnement interne de la personne. Au sens de « caring », la personne est la composante d’une unité qui réunit le corps, l’esprit et l’âme. Il est intéressant d’appréhender la notion d’espace au sens de la phénoménologie 3, puisque cette notion fait apparaître deux exigences : fondationnelle et transcendantale. Fondationnelle, parce que l’espace prend sens dans l’expérience vé- cue avant d’être une réalité physique ; transcendantale, puisqu’elle ne se préoccupe pas uniquement du corps propre, elle assure le lien avec les niveaux de spatialité, la sphère visuelle ou encore la sphère du geste immédiat. La dimension de l’objet renvoie à ce qui « meuble » cet espace, signe de l’épaisseur de la « sédimentation de la vie » et de ceux qui vivent dans ce lieu. Il s’agit d’un lieu précis qui renvoie à une histoire, à une culture, à un endroit unique, mais surtout à des besoins fondamentaux, tels que la sécurité, le confort, l’intimité, la chaleur ou encore la propreté. Habiter ce lieu, c’est d’abord être, se tenir et vivre. Cela renvoie à une expérience existentielle et à des représentations à la fois de ce lieu, mais également de son origine et de facto, d’une identité, aussi bien individuelle que collective. Ce lieu est communément appelé le domicile, venant de « domicilium » qui signifie « habitation, demeure » et de « dominus » désignant « le maître ». Habiter son domicile signifie être maître de chez soi, faisant correspondre l’idée d’une entité sociale, d’une stabilité et d’un équilibre de vie. Cela fait référence à notre libre arbitre, à ce lieu où se construit notre choix d’actions car nous sommes dans « une demeure légale et habituelle ». Mais cette entité construite dans le temps ne rentre-elle pas en conflit avec le « cadre bâti » par l’intervention même des professionnels de santé ? Intervenir au domicile des patients et de leurs familles, revient à passer d’un espace public à un espace résiduel, c’est-à-dire à un espace privé, intime, qui renvoie à une sécurité physique et affective. Il s’agit d’un milieu chargé d’histoire, d’enracinement psychologique qui s’inscrit dans l’évolution de la vie d’un individu, de sa famille voire d’un professionnel par des liens d’attachement. De même, c’est un espace qui devient culturel car il implique une organisation de celui-ci, une conduite à adopter, finalement, une manière d’être et de faire, transformant cet espace – auparavant privé – en un lieu à vocation d’accueil. Certains soignants verbalisent le fait que pénétrer chez un patient, c’est prendre des précautions, demander certaines autorisations et parfois même être obligé de négocier, professionnels, qui s’immiscent également au sein d’un cadre social, souvent constitué au sein de la dyade aidant-aidé. L’adaptation du logement est symboliquement vécue comme la transformation d’un lieu de vie en un lieu de soins. Les aides techniques et humaines viennent bouleverser 3. La phénoménologie provient du grec : « phainomenon », ce qui apparaît, et logos, étude. Il s’agit d’un courant philosophique qui s’intéresse aux phénomènes de l’expérience vécue et des contenus de la conscience, indépendamment des principes ou des théories, discipline fondée au début du XX ème siècle par Edmund Husserl. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 36. 28 Chapitre 1. Une approche théorique la vie de la personne soignée, perdant de plus en plus la maîtrise de sa vie et de sa liberté. Souvent, ces aides sont vécues comme une régression, faisant référence à une extension technicisée du monde hospitalier. Pour la personne soignée et sa famille, l’intervention des professionnels constitue dès lors une vie négociée : entre interdépendance et négociations. À titre d’exemple, il n’est pas rare que les familles appellent afin de négocier les heures de passages ou de demander l’intervention d’une soignante identifiée en raison de son profes- sionnalisme et de son attachement au sein du cercle familial. Ces appels sont symboliques et peuvent être traduits comme une demande de reconnaissance d’un espace de liberté et d’intervention au sein d’un espace qui leur appartient. 1.3.2 Pourquoi parler de « culture du domicile » ? L’expression de « culture du domicile » n’est pas, ici, l’expression même d’une volonté politique sanitaire et sociale. Bernard Ennuyer, l’explique comme « la reconnaissance de cette identité du sujet ». Elle exprime la volonté d’une culture de l’accompagnement, d’une relation de proximité, avec l’idée de faire quelque chose de personnalisé pour quelqu’un à un moment précis de son histoire et de son vécu. Engager « la culture du domicile », c’est revendiquer trois dimensions essentielles qui permettent à la personne soignée de maintenir sa dignité, mais également une certaine liberté : – maîtriser un espace intime – maintenir une image valorisante de soi – permettre l’exercice d’une sociabilité choisie Cette liberté doit être le fil conducteur des interventions à destination des patients et des familles. Prise en charge globale, intégration des familles, respect de l’autonomie de décision de la personne, prise en compte du frottement des temps, coordination des intervenants, inclusion du projet des soins au sein du projet de vie, sont autant d’éléments qui donnent du sens à cette culture du domicile. 1.3.3 Les soins à domicile : entre éclatement et cloisonnement La politique de soins à domicile auprès de la population âgée s’est construite autour du maintien à domicile. Cette notion peut être définie comme « l’ensemble des moyens permettant à une personne âgée de continuer à vivre dans un cadre de vie habituel ». Cependant, on assiste de plus en plus à une évolution sémiologique, puisque le terme de soutien à domicile est prépondérant. Il faut donc comprendre ceci comme la possibilité proposée à une personne âgée dépendante de rester, autant que possible, à son domicile. Elle doit d’abord relever d’un désir et d’un choix consenti. En France, cette politique est apparue dans les années 1960 au sujet de la politique de la vieillesse, ce qui a permis de soulever la question éthique concernant la place des personnes âgées au sein de notre société et d’harmoniser la prise en charge à domicile. L’organisation du maintien à domicile doit répondre à deux objectifs centraux, celui de favoriser l’autonomie de ces personnes et celui de préserver un lien social dans un environnement qui leur est propre. Ce dispositif est complexe, notamment parce qu’il fait intervenir de nombreux acteurs, couvrant ainsi un large éventail de sujets assurant les liens entre les services médico-sociaux, les systèmes de santé, les mécanismes de financement, l’impact de la réglementation publique, ainsi que Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 37. 1.3. Le domicile 29 les rôles complexes joués par les aidants. Ces défis sont également notables en Europe où l’on parle de « home care across ». L’enjeu est aussi celui d’une politique inscrite dans une culture de la qualité et de la bientraitance. 1.3.4 Les dispositifs d’aide à domicile Nous aborderons dans cette partie les principaux dispositifs relevant du domaine du main- tien à domicile des personnes âgées. Nous avons tenté de présenter un schéma relatant ces dispositifs, en partant de l’idée que la personne soignée était au centre d’un réseau de soin, dans lequel nous retrouvons l’aidant-partenaire(cf graphique ??). – L’hospitalisation à domicile (HAD) : créée en 1957 en France, cette structure est avant tout hospitalière. Elle répond à deux objectifs : le désencombrement des hôpitaux et le développement d’une prise en charge technique au domicile des patients. Pour une durée limitée, elle permet d’assurer au domicile d’une personne âgée dépendante les mêmes soins pouvant être dispensés à l’hôpital. La pérennité de ce dispositif n’est possible que par la présence et l’intervention de la famille et des proches aidants. Elle reconnaît la famille comme une personne ayant des besoins et étant prise en compte dans le projet de soins du malade. Pour autant, elle constitue un partenariat de soins essentiel, puisqu’une éducation sur les soins peut être apportées. Infirmières, aides-soignantes, psychologues ou encore ergothérapeutes sont inclus dans ce dispositif. – Les Services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) : ce sont des établissements médico-sociaux assurant, sur prescription médicale, des prestations de soins infirmiers sous la forme de soins techniques et de soins d’hygiène. Leur vocation est d’éviter l’hospitalisa- tion des personnes âgées, de faciliter le retour au domicile à la suite d’une hospitalisation, de prévenir ou de retarder un placement en institution. L’infirmière coordinatrice est la responsable du service en termes d’encadrement administratif et technique. Les visites à domicile permettent d’évaluer la situation du patient leur permettant d’accéder à des prestations de soins. Ces visites constituent le premier contact avec la famille, celle-ci étant perçue comme un partenaire essentiel, notamment au niveau des échanges d’infor- mations sur la situation de vie de la personne soignée. En 2004, les services polyvalents d’aide et de soins à domicile (SPASAD) ont été créés. Ils associent les services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) et les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). – Les libéraux : ce sont des médecins généralistes, pharmaciens, infirmiers libéraux, kiné- sithérapeutes, psychomotriciens, psychologues, assistants sociaux, pédicures-podologues, qui sont autant de professionnels intervenant au domicile des personnes âgées. Pour les paramédicaux, ils interviennent toujours à la suite d’une prescription médicale. – Les prestataires de santé à domicile (PSAD) assurent la fourniture en soins aux patients en situation de dépendance. Ces prestations accompagnent la mise à disposition de technologies et d’équipements nécessaires au soutien à domicile des personnes âgées. La quasi-totalité de ces dispositifs sont délivés sur prescriptions médicales et font l’objet d’un remboursement par l’Assurance maladie sur la base des tarifs de responsabilité définis par la liste des produits et prestations remboursables (LPPR). Les PSAD sont assurées par des entreprises du secteur privé et du secteur associatif. Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 38. 30 Chapitre 1. Une approche théorique – Les équipes mobiles de gériatries : sont regroupés sous le terme d’équipes mobiles de gériatrie, des équipes de soins intervenant au domicile des personnes âgées dépendantes. Elles apparaissent souvent sous forme de réseau de soins, rattachés à un établissement hospitalier ou faisant partie d’un service médico-social. Nous pouvons citer en exemple les équipes mobiles de soins palliatifs. – Le conseil général est le principal acteur permettant de financer l’aide aux personnes âgées dépendantes à leur domicile au travers de l’APA. Une équipe médico-sociale élabore un plan d’aide après une évaluation de la personne, et notamment de son autonomie. Ce plan comprend les besoins du demandeur et les aides nécessaires à son maintien à domicile. – Les CLIC (Centres Locaux d’information et de coordination) gérontologique sont des dispositifs de proximité ayant des missions d’accueil et d’information pour les personnes âgées et leur entourage. Il s’agit d’informer les personnes sur les dispositifs d’aide en réponse à leurs besoins. Effectuer un dossier « APA », mettre en place des soins infirmiers, améliorer l’habitat, orienter les personnes vers d’autres professionnels sont des missions que remplissent les CLIC. – Les MAIA (Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzhei- mer) sont des dispositifs d’accueil, d’orientation et de coordination qui reposent sur une structure préexistante, comme le Conseil général, un accueil de jour ou encore la MDPH. Expérimentées en 2008, ces structures concernent toute personne en perte d’autonomie, et intègrent également les aidants de personnes âgées. Les MAIA disposent d’un gestionnaire de cas lorsque la situation des personnes est jugée « complexe ». Mémoire de fin d’études 2014-2015
  • 39. 1.3. Le domicile 31 Graphique 1.2 – Les dispositifs d’aide et des soins à domicile Mémoire de fin d’études 2014-2015