1. Institut Mines-Télécom
La ville et ses (L)lumières
LUCAS Jean-François
Télécom ParisTech – Chaire Modélisations des
imaginaires, Innovation et Création (MODIM)
Jean-francois.lucas@telecom-paristech.fr
3. Institut Mines-Télécom
Luna Park – Coney island
• Parc d'attractions situé sur
Coney Island (NYC).
• Première ouverture entre 1903
et 1944. Réouverture en 2011.
• Au début du siècle, 1 300 000
ampoules sont nécessaires
pour illuminer le parc.
3
« Que toute cette infrastructure serve à étayer une réalité en carton-pâte pour l'essentiel,
c'est là, précisément, l'important. Luna Park est la première manifestation d'une malédiction
qui hantera la profession architecturale jusqu’à son dernier jour, et dont la formule s’énonce
comme suit : technologie + carton-pâte (ou tout autre matériau inconsistant) = réalité »
Rem Koolkass, New-York Délire, p.41
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
7. Institut Mines-Télécom
Luna Park – Coney island
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« Désormais, c'est la ville elle-même dont il s'agit de
profiter selon le système de roulement ; la ville électrique,
émanation fantomatique de la ‘‘vraie’’ ville, est un
instrument encore plus efficace pour la réalisation des
fantasmes. »
L'électricité, « élément essentiel de la nouvelle panoplie
de l'illusion, comme duplicateur architectural. A la lumière
du jour, les petites tours de Luna prennent un aspect
pathétique, une aura de vulgarité émana d'elles ; mais, en
superposant au skyline initial tout un réseau de fils et de
prises électriques, Thompson parvient à créer un second
skyline (illusoire celui-ci) encore plus impressionnant que
le premier, une cité de la nuit. »
Rem Koolkass, New-York Délire, p.41
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
8. Institut Mines-Télécom
Las Vegas
8
« Las Vegas n'a jamais été rien d'autre que la plus grosse ampoule électrique du monde. »
J.G Ballard, Hello America
« Las Vegas est comme la foudre, elle associe ‘‘chaleur et électricité’’ »
Bruce Bégout, Zéropolis, p.16
Las Vegas comme foudre, pile électrique ou encore comme « ville nucléaire sans
noyau » - Bruce Bégout, Zéropolis, pp.16-18
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
12. Institut Mines-Télécom
Las Vegas
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« Derrière chaque enseigne
lumineuse, ne se creuse aucun
espace, ne s'esquisse aucun
monde. Tout est là, tout est plat (…)
il serait inopportun de supposer que,
derrière cet étalage de couleurs, de
lignes et de chiffres, quelque chose
de substantiel pût combler le vide. »
« Teinté par les éclats irradiants des
néons, sous la porte cochère, en
forme de bouquet, du Flamingo, on
se sent soi-même partie (dès)-
intégrante de cet écran vivant,
hologramme coloré sans épaisseur
ni position. »
Bruce Bégout, Zéropolis, p.20 & 21
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
13. Institut Mines-Télécom
L’ambivalence des représentations
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Ø Luna Park, début du siècle, la fée électricité : discours messianique
Ø Las Vegas, discours contemporain, le « trop-plein de puissance
électrique » : discours catastrophique
Exemple de Las Vegas
« Immatérielle et transcendante, la lumière du néon n'est pas sans évoquer l'expérience
de la divinité. » - Bégout, Zéropolis, p.71
« Sous la lumière du jour, le complexe du Caesar's Palace ressemble à une prison de
femmes à Téhéran ; en revanche, la nuit, c'est le suprême casino de Las Vegas »
Anderton & Chase, Las Vegas, The success of the excess, p.30.
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
16. Institut Mines-Télécom
Réseau naturel et réseau artificiel
16 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
« D’un côté le réseau électrique est merveilleux, car il
apporte la lumière et la vie, et de l’autre, les poulpes
monstrueux, horribles, vivent dans l’obscurité des
cavernes sous-marines (…) Le réseau artificiel
électrique offre la visibilité, même la nuit, ce qui le
rapproche de la divinité, alors que le réseau naturel
est invisible, caché au fond des océans et assimilé
au diable, à l’enfer et à la mort. Tous deux enlacent le
globe de leurs fils et tentacules : l’un au fond des
mers, l’autre sur terre. Ombres et lumières des deux
réseaux, l’un naturel et l’autre artificiel, se
réfléchissent ainsi dans la fiction de Jules Verne. »
Pierre Musso, Critique des réseaux, p.265
17. Institut Mines-Télécom
La naturalisation du réseau électrique
17
« Le réseau technique électrique est naturalisé sur le modèle
organistique. »
Pierre Musso, Critique des réseaux, p.260
« L'électricité est le sang de la vie industrielle des temps modernes. »
Beltran et Carré, La fée et la servante, p.72 (in Pierre Musso, p.256)
L'électricité « s'est infiltrée peu à peu jusqu'à devenir le cerveau et le
système nerveux chargés des mises en route et des modifications
d'allure. »
Bulletin d'information et de propagande (BIP), n°109, décembre 1937, p.58 (in Pierre Musso, p.256)
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
18. Institut Mines-Télécom
La naturalisation du réseau électrique
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« Les milliers, d'ampoules électriques, privées de leur fluide vital,
s'échauffent au soleil et parfois éclatent de manière soudaine en petit bruit
sec comme un os qui se fend ».
Bruce Bégout, Zéropolis, p.35
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
19. Institut Mines-Télécom
La naturalisation du réseau électrique
19 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
« L’ingénieur donne un corps au réseau technique en l’assimilant au système nerveux
et au cerveau, voire à ses composantes neuronales. Le réseau technique est censé
réguler le social, comme le cerveau contrôle le corps humain. » - Pierre Musso, Critique des
réseaux, p.289
« Réciproquement, les sciences sociales empruntent à l’ingénierie, pour penser les
relations sociales et les organisations à l’aide de la notion de réseau. » - Pierre Musso,
Critique des réseaux, p.289
Ø L’ingénieur s’inspire de la biologie pour naturaliser le réseau technique
Ø Le sociologue emprunte à la figure du réseau l’ingénieur pour techniciser et
rationaliser les relations et organisations sociales
Ø Réseau technique et réseau biologique se prolongent jusqu’à se confondre
Musso, Critique des réseaux, p.296.
20. Institut Mines-Télécom
Du réseau électrique au réseau de
connaissance
20
« Aujourd’hui, après plus d’un siècle de technologie de
l’électricité, c’est notre système nerveux central lui-même que
nous avons jeté comme un filet sur l’ensemble du globe,
abolissant ainsi l’espace et le temps. »
« La technologie électrique est directement reliée à notre
système nerveux central. »
Marshall McLuhan, Pour comprendre les médias, 1968, p.21 et p. 91
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
21. Institut Mines-Télécom
Du réseau électrique au réseau de
connaissance
21
« L’homme se transforme progressivement en ''neurone de la Terre'', intégré au système
nerveux qu’il a créé. Le mariage de la biosphère et de la technosphère dans sa forme la plus
avancée et la plus dématérialisée est à l’origine de la constitution du cerveau planétaire et de la
société en temps réel ».
Le cerveau planétaire, Joël de Rosnay
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
Le « cerveau global » d'Howard Bloom
Le « cyberespace » de William Gibson
23. Institut Mines-Télécom
La smart city : l'ambition d'une meilleure
gestion des ressources
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« La recherche d’une meilleure efficacité
environnementale constitue (…) le principal
objectif de la smart city, qu’il s’agisse de
diminuer sa consommation d’énergie ou le
volume d’ordures qu’elle génère ».
Antoine Picon, Smart Cities, Théorie et Critique d’un idéal
auto-réalisateur, Editions B2, 2013, p.17
10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
24. Institut Mines-Télécom
Le partage de données pour une meilleure
gestion des ressources ?
24 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
• Projet « Trash Track » du
SENSEable City du MIT : Projet qui
a suivi le circuit de déchets dans la
ville de Seattle (identification grâce à
des puces électroniques).
• A Séoul, le prix du ramassage des
ordures est indexé sur la quantité
produite (technologie RFID).
• L e c o m p t e u r é l e c t r i q u e
« communicant » d'EDF ou les
radiateurs numériques Q.rad
25. Institut Mines-Télécom
Les ambivalences de la smart city
25 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
Open Data VS. Gestion centralisée
Sécurité VS. Cyber-attaque
Liberté VS. Intrusion dans la vie privée
(Cisco à Séoul, IBM à Rio ; GDF Suez à Barcelone, les poubelles avec caméra à Londres, etc.)
26. Institut Mines-Télécom
Les ambivalences de la smart city
26 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
Économie d'énergie VS. Consommation excessive
(Les TIC consomment 10% de la consommation électrique mondiale, soit 50% d'énergie de plus que le
transport aérien dans sa totalité)
28. Institut Mines-Télécom
Pour conclure
28 10/12/13 LUCAS JF Le Laboratoire de Paris
• Pour penser « l'énergie du futur » il faut mobiliser les ambivalences des
représentations qui y sont liées.
Ø L'électricité n'est pas simplement « la fée électricité », comme la
« smart city » n'est pas que intelligente (pensons également aux
ambivalences de l'énergie nucléaire).
• Des représentations s’actualisent ou se réactualisent avec l’évolution des
techniques et des technologies (ex. les représentations liées à la smart
city sont extrêmement liées à celles du réseau).
• Ces ambivalences ne sont pas uniquement liées aux usages et pratiques
que nous avons ou faisons d'une technique ou d'une technologie. Ces
représentations naissent d'un corpus d'imaginaires plus large : des textes,
des images, des sensations du corps (T.I.C).