Les jeunes territoriaux, relations et motivations au travail
1. Enjeux
de la protection sociale des agents territoriaux
MutuelleNationaleTerritoriale,mutuellerégieparlesdispositionsdulivreIIduCodedelamutualitéimmatriculéeaurépertoireSIRENEsouslenuméroSIREN775678584-MNT-DCAP-ServiceÉditions-J57-SEPTEMBRE2015
mutuels
Septembre 2O15 > n°24
Les jeunes agents territoriaux,
relations et motivations au travailLes jeunes agents
territoriaux : une nouvelle
génération d’agents
pour de « nouvelles
collectivités » ?
Trois personnes actives sur dix
prendront leur retraite d’ici cinq
ans.
Pourtant l’attention ne se porte
que ponctuellement sur les jeunes
agents. Y a-t-il une spécificité
de cette population jeune au
regard du reste de la population
territoriale ?
Représentent-ils une facette de
cette fameuse « génération Y »,
décrite et si souvent caricaturée ?
ou, au contraire, accordent-ils, à
la notion de service public local,
le même sens que leurs aînés :
l’importance d’exercer un métier
au service d’une population ?
Nous pourrions ainsi penser que
cet engagement serve d’autres
« causes»(militantismeassociatif,
syndical, mutualiste…).
Anne Grillon fait de nombreuses
préconisations, essentielles pour
une meilleure intégration des
jeunes agents. C’est le devenir du
fonctionnement de nos collecti-
vités en profonde transformation
qui est en jeu.
Jean-René MOREAU
Président de l’OST
Directeur Master 2 APGCL à l’UPEC
La MNT :
une approche globale
de la santé
• Première mutuelle de la fonction
publique territoriale en santé
comme en prévoyance.
• Près de 800 000 adhérents.
• 1,1 million de personnes
protégées.
• 9000correspondantsmutualistes
dans les collectivités.
• 84 sections départementales
présentes en métropole et dans
les DOM.
• Tablesd’expériencecertifiéespour
les garanties complémentaires
en maintien de salaire.
La MNT, créée et dirigée par des
agents territoriaux, bénéficie
d’une expertise de la protection
sociale complémentaire des
agents territoriaux, construite
au fil de cinquante années
d’expérience et d’échanges avec
les acteurs du monde territorial.
Avec la création de
l’Observatoire social territorial
(OST) en 2009, la MNT entend
animer le débat entre les
acteurs institutionnels de la
fonction publique territoriale
(FPT) et répondre au besoin
d’une meilleure connaissance
de l’environnement social des
agents territoriaux.
Quels que soient la
problématique des collectivités
et l’avancement de leurs actions,
la MNT est à même de proposer
des pistes et des actions
complémentaires, adaptées et
d’actualité avec les Cahiers et les
ateliers débats de l’OST, et avec
une offre de services dans les
domaines de la santé au travail
des agents, de la prévention et
de l’accompagnement social.
Une étude qualitative pour comprendre et faire connaître les motivations
des jeunes agents, leur perception du service public local, ainsi que leurs
problématiques sociales et professionnelles.
L’étudeinterrogelesystèmemanagérial
territorial face au renouvellement de
génération d’agents territoriaux.
Des agents minoritaires
Les jeunes agents sont encore très
minoritaires dans les collectivités,
mais une nouvelle génération arrive.
Dans la FPT, ils représentent 11,3 %
des agents.
Nombre d’a priori pèsent sur les
jeunes. Une littérature abondante à
la fois contradictoire et paradoxale
véhicule d’eux une image stéréotypée
et simplifiée : individualistes, peu
motivés et peu disponibles, avec une
loyauté incertaine vis-à-vis de leur
employeur. Aujourd’hui, les experts
et les chercheurs prennent du recul
face à ces marqueurs générationnels,
considérant que cette génération ne
fait que porter et amplifier ce qui
constitue un mouvement de fond.
Levier de changement pour les
collectivités
D’ici 2020, huit millions d’actifs
partiront en retraite selon l’INSEE.
Ce peut être une opportunité pour
les collectivités de repenser leur
schéma organisationnel et d’engager
de nouvelles pratiques. Ces nouvelles
organisations impliqueront la prise
en compte d’une autre relation au
travail des agents, jeunes et moins
jeunes : plus d’autonomie et de
responsabilités, le besoin de sens,
une articulation vie privée et vie
professionnelle.
Retrouvez ce Cahier n°15
en intégralité
ainsi que l’ensemble
des publications de
l’Observatoire social territorial sur
le site
www.observatoire-social-territorial.fr
Terrains d’étude
Deux terrains d’étude différents
ont été sélectionnés : l’Île-de-
France, avec l’Essonne (91) et la
Seine-Saint-Denis (93), et la région
Bretagne. Au total, 26 jeunes agents
de 18 à 35 ans en poste dans les
quatre niveaux de collectivités, de
catégories A, B et C, ont témoigné
de leur expérience.
Méthodologie : une étude qualitative
basée sur 40 entretiens variés
Entretiens semi-directifs avec 26
jeunes territoriaux de 18 à 35 ans
réunis en 3 groupes de 7 à 10 agents,
et suivi par l’ensemble des 11 jeunes
militants mutualistes membres du
comité jeunes, du lancement de l’étude
à sa conclusion.
Entretiens deux DRH, deux médecins
de prévention, deux assistants sociaux
et trois représentants d’organisations
syndicales.
participative associant les agents et
la reconnaissance de leur droit à la
parole sont autant de pistes crédibles
pour répondre aux attentes des jeunes
agents.
Axe 3 : réinterroger la politique
managériale
Des changements profonds sont à
engager en assurant en premier lieu
un accompagnement soutenu des
managers:rompreavecunmanagement
pyramidal et vertical pour tendre vers
davantage de transversalité, développer
des compétences relationnelles
orientées sur l’accompagnement,
l’écoute, et la capacité à faire adhérer,
et enfin reconsidérer les marges de
manœuvre des managers de proximité
aujourd’hui quasi inexistantes.
Axe 4 : maîtriser la gestion du temps
L’usage massif des TNIC et des
nouvelles formes d’organisation du
travail ne peuvent être traités dans des
règlements du temps de travail aux
dimensions comptables et juridiques.
Une réflexion approfondie, prenant en
compte différents paramètres, permet
en associant étroitement les agents, de
répondre aux besoins du service public.
Cela répond également aux attentes
des agents en veillant à la conciliation
de leur vie professionnelle et de leur vie
personnelle.
Axe 5 : développer les compétences
et offrir des perspectives
Les services publics sont en
évolution permanente en raison des
transformations des activités et des
nouvelles méthodes de travail. Si la
formation est un des leviers, nombre
d’organisations, conscientes de la
nécessité de réduire la déconnexion
entre le travail et l’apprentissage,
privilégient d’autres pratiques : MOOC
(cours en ligne), serious game, fab
lab mixant apprentissage collectif et
individuel. La carrière n’étant plus
un levier majeur de motivation des
jeunes agents, les RH formalisent
progressivement des parcours
professionnels et de formation.
Axe 6 : formaliser une politique
d’accueil et d’intégration des agents
et des jeunes
Conjuguer un accueil collectif et un
accueil individualisé assorti d’un bilan
est incontournable. Le premier, par
le biais de stages ou de séminaires,
permet à l’agent de s’intégrer dans
un réseau et un collectif de travail.
Le second se traduit par des bilans
individuels, un parrainage ou un
tutorat et, si besoin, la formalisation
d’un parcours de développement des
compétences.
L’auteur : Anne GRILLON est spécialiste des questions RH et du management dans
le secteur public ainsi que l’auteur de l’étude Le DRH dans la fonction publique
territoriale.
2. > Le parcours d’entrée des jeunes dans les
collectivités territoriales
> Comprendre et prendre en compte les
caractéristiques et les attentes des jeunes agents
> Les jeunes agents, un levier pour la
transformation des collectivités locales
Un fort besoin de stabilité de
l’emploi
La fonction publique territoriale
(FPT) et ses métiers sont encore
méconnus. Le secteur privé,
davantage connu auprès des
jeunes en recherche d’un emploi,
inspire toutefois une certaine
méfiance en raison des pratiques
managériales et de l’instabilité de
l’emploi. À moins d’un métier s’y
exerçant principalement, la FPT
est un choix par défaut pour la
majorité des jeunes. L’engagement
des cadres A est davantage fondé
sur le service public, l’intérêt
général et le développement des
territoires. Au-delà, la FPT reste
pour tous porteuse de perspectives
d’évolutions professionnelles.
Des jeunes agents mobilisés et
engagés
Une fois en poste, les jeunes agents
se disent souvent heureux et même
fiers de « servir à quelque chose ».
Le statut de l’agent participe
également à l’intégration dans la
vie civile : relations facilitées avec
les banques (obtention de prêts
immobiliers) ou avec les bailleurs
(location d’un logement).
Un processus de recrutement
plus sélectif mais dans le respect
de la diversité
Les collectivités souhaitent
désormais privilégier un recrutement
par les compétences. Nombre
d’agents sont dans une situation
de déclassement (niveau de
qualification supérieur à celui
demandé pour son poste), acceptée
enraisondusystèmedelacarrière.Le
processus d’accueil et d’intégration,
se structure progressivement et
reste un facteur-clé de réussite
d’un nouveau collaborateur, surtout
s’il s’agit de son premier poste. La
lutte contre les discriminations à
l’embauche d’un nombre croissant
de collectivités explique leur intérêt
pour le label « diversité » de l’Afnor.
Des parcours valorisant les
compétences au cœur des
préoccupations des jeunes
agents
Les jeunes territoriaux redoutent
une obsolescence de leurs
compétences, et sont conscients
de la nécessité d’une mise à jour de
leurs connaissances. La formation
est donc très appréciée, d’autant
plus qu’ils sont aussi ouverts à des
évolutions.
La vision verticale de la carrière
régresse au profit d’une vision
plus transversale. Son principe,
une faible rémunération de départ
contre une promesse d’avancement
à long terme, ne semble plus
répondre aux attentes des jeunes
agents. Ils privilégient une évolution
plus rapide. Au terme « carrière »,
ils substituent « mobilité, parcours,
formation ».
Une information encore peu
disponible
L’écart est important entre leur vie
privée, où l’accès aux informations
est aisé, et leur vie professionnelle
où elle est bridée. Les collectivités
cultivent encore une certaine
opacité et les managers ne
semblent pas pleinement assurer
leur rôle de relais et de décryptage
de l’information. Le partage de
l’information est également freiné
par un accès très inégal des agents
à l’intranet.
Une action sociale peu prisée
Depuis plusieurs années la politique
d’action sociale monte en puissance
dans les collectivités. Les jeunes
agents n’en sont pas les premiers
consommateurs. La souscription
Les jeunes de moins de 30
ans dans les collectivités
territoriales en quelques
chiffres significatifs*
*
Rapport annuel sur l’état de la fonction
publique, édition 2014 de la DGAFP,
ministère de la Décentralisation et de la
Fonction publique, 2014
Des agents impliqués mais dans
le cadre d’une gestion du temps
maîtrisée
Pour les jeunes rencontrés, le travail
est une contrainte permettant de
satisfaire des besoins matériels et
procurant une stabilité appréciable.
L’intérêtpourletravailestréel,surtout
s’il répond à des attentes telles que
l’utilité, la diversité ou l’autonomie
et s’il est associé à un sentiment de
fierté. La relation avec les usagers
est au cœur de l’engagement. Elle
est un levier de satisfaction surtout
en régions ; en Île-de-France, en
raison du comportement de certains
usagers, elle est plus aléatoire. La
flexibilité est très appréciée : les
cadres portent un avis très positif
sur les technologies numériques de
l’information et de la communication
qui permettent une plus grande
liberté d’organisation du travail.
Des relations distanciées avec les
élus
Les jeunes s’interrogent sur leurs
rôles, leurs missions et leurs
prérogatives. Les privilèges des élus,
ou ressentis comme tels, ne passent
pas inaperçus dans un environnement
sous tension. Les cadres A ont une
autre relation, plus d’égal à égal.
Suite page 4
Une remise en cause du
management traditionnel
Nombre de jeunes agents mesurent
mal la valeur d’une ligne hiérarchique
à plusieurs niveaux. Ils sont
déstabilisés par des pratiques
managériales peu communicatives
et « déresponsabilisantes », ne
leur accordant pas suffisamment
d’autonomie. Pour eux, la hiérarchie
estuneressourceprésentequandcela
est nécessaire, tenant une fonction
de régulation plutôt que de contrôle et
s’assurant du résultat plutôt que des
moyens. Les fonctions traditionnelles
d’autorité, de prescription et de
contrôle sont remises en cause.
Leur maîtrise des outils numériques
les met, paradoxalement, en porte-
à-faux avec les plus âgés, moins à
l’aise.
Les jeunes peuvent-ils être de
bons managers ?
Confier des responsabilités mana-
gériales à de jeunes cadres incite à
s’interroger sur l’enseignement du
management. Quelques collectivités
souhaitent leur donner leur chance
et misent sur leurs atouts : regard
neuf, innovation, capacité à travail-
ler en transversalité, pour engager de
nouvelles pratiques et faire « bouger
les lignes ». L’accompagnement est
important. Ces jeunes managers
peuvent être mal perçus et susciter
un sentiment de dépossession chez
des collaborateurs plus âgés.
Des jeunes agents critiques vis-à-
vis des organisations syndicales
Si une minorité de jeunes agents leur
accorde encore du crédit pour porter
des causes collectives, la majorité
d’entre eux est partagée entre
l’incertitude concernant leur rôle et
le rejet (syndicalisme d’opportunité
et défense de causes indéfendables).
La culture de la contestation
systématique ne rencontre ni
l’assentiment, ni le soutien des
jeunes.
Des insatisfactions encore peu
nombreuses
Elles proviennent principalement
de la perception d’un écart entre le
discours sur les valeurs affichées et
les pratiques. Les jeunes demandent
plus l’équité de traitement et la justice
sociale que l’égalité. La rémunération
est perçue différemment selon
les territoires. Les jeunes agents
travaillant en régions sont plus sereins
que ceux de la région parisienne, le
coût de la vie étant moins élevé.
Catégorie A
3,4 %
4,7 %
7,3 %
Catégorie B
Catégorie C
Répartition par catégorie
Administrative
10 %
33 %
12 %
27 %
12 %
12 %
12 %14 %
9 %
9 %
13 %
Animation
Culturelle
Médico-sociale
Médico-technique
Sportive
Technique
Sécurité-Police
municipale
Sociale
Hors filière
(emplois de cabinet)
Filière indéterminée
Répartition par filière
Sans diplôme
8,7 %
32,2 %
28,7 %
30,4 %
Diplôme inférieur
au baccalauréat
Diplômés
du baccalauréat
Diplômés de
l’enseignement supérieur
Répartition par diplôme
à une complémentaire santé et
prévoyance est généralement
subordonnée à une aide financière
de l’employeur.
Tout l’enjeu des collectivités
territoriales est de prévenir les
risques de démotivation de
ces jeunes agents, encore très
impliqués malgré quelques
signes de lassitude. Tous ont
plébiscité l’autonomie, des marges
de manœuvre et la prise de
responsabilités. L’étude propose six
axes de réflexion.
Axe 1 : devenir un employeur de
choix
Le but est de susciter un
engagement davantage centré sur la
collectivité que sur le métier ou le
service, en valorisant et en prenant
appui sur ses caractéristiques :
territoire, valeurs, culture interne,
missions, projets, politique RH et
managériale... Il s’agit de susciter
une adhésion durable pour ne
plus être un employeur lambda,
interchangeable.
Axe 2 : engager de nouveaux
modes de fonctionnement
Un fonctionnement en transversalité
associé à la digitalisation du travail
permettant de démultiplier les
coopérations, une approche plus
3. > Le parcours d’entrée des jeunes dans les
collectivités territoriales
> Comprendre et prendre en compte les
caractéristiques et les attentes des jeunes agents
> Les jeunes agents, un levier pour la
transformation des collectivités locales
Un fort besoin de stabilité de
l’emploi
La fonction publique territoriale
(FPT) et ses métiers sont encore
méconnus. Le secteur privé,
davantage connu auprès des
jeunes en recherche d’un emploi,
inspire toutefois une certaine
méfiance en raison des pratiques
managériales et de l’instabilité de
l’emploi. À moins d’un métier s’y
exerçant principalement, la FPT
est un choix par défaut pour la
majorité des jeunes. L’engagement
des cadres A est davantage fondé
sur le service public, l’intérêt
général et le développement des
territoires. Au-delà, la FPT reste
pour tous porteuse de perspectives
d’évolutions professionnelles.
Des jeunes agents mobilisés et
engagés
Une fois en poste, les jeunes agents
se disent souvent heureux et même
fiers de « servir à quelque chose ».
Le statut de l’agent participe
également à l’intégration dans la
vie civile : relations facilitées avec
les banques (obtention de prêts
immobiliers) ou avec les bailleurs
(location d’un logement).
Un processus de recrutement
plus sélectif mais dans le respect
de la diversité
Les collectivités souhaitent
désormais privilégier un recrutement
par les compétences. Nombre
d’agents sont dans une situation
de déclassement (niveau de
qualification supérieur à celui
demandé pour son poste), acceptée
enraisondusystèmedelacarrière.Le
processus d’accueil et d’intégration,
se structure progressivement et
reste un facteur-clé de réussite
d’un nouveau collaborateur, surtout
s’il s’agit de son premier poste. La
lutte contre les discriminations à
l’embauche d’un nombre croissant
de collectivités explique leur intérêt
pour le label « diversité » de l’Afnor.
Des parcours valorisant les
compétences au cœur des
préoccupations des jeunes
agents
Les jeunes territoriaux redoutent
une obsolescence de leurs
compétences, et sont conscients
de la nécessité d’une mise à jour de
leurs connaissances. La formation
est donc très appréciée, d’autant
plus qu’ils sont aussi ouverts à des
évolutions.
La vision verticale de la carrière
régresse au profit d’une vision
plus transversale. Son principe,
une faible rémunération de départ
contre une promesse d’avancement
à long terme, ne semble plus
répondre aux attentes des jeunes
agents. Ils privilégient une évolution
plus rapide. Au terme « carrière »,
ils substituent « mobilité, parcours,
formation ».
Une information encore peu
disponible
L’écart est important entre leur vie
privée, où l’accès aux informations
est aisé, et leur vie professionnelle
où elle est bridée. Les collectivités
cultivent encore une certaine
opacité et les managers ne
semblent pas pleinement assurer
leur rôle de relais et de décryptage
de l’information. Le partage de
l’information est également freiné
par un accès très inégal des agents
à l’intranet.
Une action sociale peu prisée
Depuis plusieurs années la politique
d’action sociale monte en puissance
dans les collectivités. Les jeunes
agents n’en sont pas les premiers
consommateurs. La souscription
Les jeunes de moins de 30
ans dans les collectivités
territoriales en quelques
chiffres significatifs*
*
Rapport annuel sur l’état de la fonction
publique, édition 2014 de la DGAFP,
ministère de la Décentralisation et de la
Fonction publique, 2014
Des agents impliqués mais dans
le cadre d’une gestion du temps
maîtrisée
Pour les jeunes rencontrés, le travail
est une contrainte permettant de
satisfaire des besoins matériels et
procurant une stabilité appréciable.
L’intérêtpourletravailestréel,surtout
s’il répond à des attentes telles que
l’utilité, la diversité ou l’autonomie
et s’il est associé à un sentiment de
fierté. La relation avec les usagers
est au cœur de l’engagement. Elle
est un levier de satisfaction surtout
en régions ; en Île-de-France, en
raison du comportement de certains
usagers, elle est plus aléatoire. La
flexibilité est très appréciée : les
cadres portent un avis très positif
sur les technologies numériques de
l’information et de la communication
qui permettent une plus grande
liberté d’organisation du travail.
Des relations distanciées avec les
élus
Les jeunes s’interrogent sur leurs
rôles, leurs missions et leurs
prérogatives. Les privilèges des élus,
ou ressentis comme tels, ne passent
pas inaperçus dans un environnement
sous tension. Les cadres A ont une
autre relation, plus d’égal à égal.
Suite page 4
Une remise en cause du
management traditionnel
Nombre de jeunes agents mesurent
mal la valeur d’une ligne hiérarchique
à plusieurs niveaux. Ils sont
déstabilisés par des pratiques
managériales peu communicatives
et « déresponsabilisantes », ne
leur accordant pas suffisamment
d’autonomie. Pour eux, la hiérarchie
estuneressourceprésentequandcela
est nécessaire, tenant une fonction
de régulation plutôt que de contrôle et
s’assurant du résultat plutôt que des
moyens. Les fonctions traditionnelles
d’autorité, de prescription et de
contrôle sont remises en cause.
Leur maîtrise des outils numériques
les met, paradoxalement, en porte-
à-faux avec les plus âgés, moins à
l’aise.
Les jeunes peuvent-ils être de
bons managers ?
Confier des responsabilités mana-
gériales à de jeunes cadres incite à
s’interroger sur l’enseignement du
management. Quelques collectivités
souhaitent leur donner leur chance
et misent sur leurs atouts : regard
neuf, innovation, capacité à travail-
ler en transversalité, pour engager de
nouvelles pratiques et faire « bouger
les lignes ». L’accompagnement est
important. Ces jeunes managers
peuvent être mal perçus et susciter
un sentiment de dépossession chez
des collaborateurs plus âgés.
Des jeunes agents critiques vis-à-
vis des organisations syndicales
Si une minorité de jeunes agents leur
accorde encore du crédit pour porter
des causes collectives, la majorité
d’entre eux est partagée entre
l’incertitude concernant leur rôle et
le rejet (syndicalisme d’opportunité
et défense de causes indéfendables).
La culture de la contestation
systématique ne rencontre ni
l’assentiment, ni le soutien des
jeunes.
Des insatisfactions encore peu
nombreuses
Elles proviennent principalement
de la perception d’un écart entre le
discours sur les valeurs affichées et
les pratiques. Les jeunes demandent
plus l’équité de traitement et la justice
sociale que l’égalité. La rémunération
est perçue différemment selon
les territoires. Les jeunes agents
travaillant en régions sont plus sereins
que ceux de la région parisienne, le
coût de la vie étant moins élevé.
Catégorie A
3,4 %
4,7 %
7,3 %
Catégorie B
Catégorie C
Répartition par catégorie
Administrative
10 %
33 %
12 %
27 %
12 %
12 %
12 %14 %
9 %
9 %
13 %
Animation
Culturelle
Médico-sociale
Médico-technique
Sportive
Technique
Sécurité-Police
municipale
Sociale
Hors filière
(emplois de cabinet)
Filière indéterminée
Répartition par filière
Sans diplôme
8,7 %
32,2 %
28,7 %
30,4 %
Diplôme inférieur
au baccalauréat
Diplômés
du baccalauréat
Diplômés de
l’enseignement supérieur
Répartition par diplôme
à une complémentaire santé et
prévoyance est généralement
subordonnée à une aide financière
de l’employeur.
Tout l’enjeu des collectivités
territoriales est de prévenir les
risques de démotivation de
ces jeunes agents, encore très
impliqués malgré quelques
signes de lassitude. Tous ont
plébiscité l’autonomie, des marges
de manœuvre et la prise de
responsabilités. L’étude propose six
axes de réflexion.
Axe 1 : devenir un employeur de
choix
Le but est de susciter un
engagement davantage centré sur la
collectivité que sur le métier ou le
service, en valorisant et en prenant
appui sur ses caractéristiques :
territoire, valeurs, culture interne,
missions, projets, politique RH et
managériale... Il s’agit de susciter
une adhésion durable pour ne
plus être un employeur lambda,
interchangeable.
Axe 2 : engager de nouveaux
modes de fonctionnement
Un fonctionnement en transversalité
associé à la digitalisation du travail
permettant de démultiplier les
coopérations, une approche plus
4. Enjeux
de la protection sociale des agents territoriaux
MutuelleNationaleTerritoriale,mutuellerégieparlesdispositionsdulivreIIduCodedelamutualitéimmatriculéeaurépertoireSIRENEsouslenuméroSIREN775678584-MNT-DCAP-ServiceÉditions-J57-SEPTEMBRE2015
mutuels
Septembre 2O15 > n°24
Les jeunes agents territoriaux,
relations et motivations au travailLes jeunes agents
territoriaux : une nouvelle
génération d’agents
pour de « nouvelles
collectivités » ?
Trois personnes actives sur dix
prendront leur retraite d’ici cinq
ans.
Pourtant l’attention ne se porte
que ponctuellement sur les jeunes
agents. Y a-t-il une spécificité
de cette population jeune au
regard du reste de la population
territoriale ?
Représentent-ils une facette de
cette fameuse « génération Y »,
décrite et si souvent caricaturée ?
ou, au contraire, accordent-ils, à
la notion de service public local,
le même sens que leurs aînés :
l’importance d’exercer un métier
au service d’une population ?
Nous pourrions ainsi penser que
cet engagement serve d’autres
« causes»(militantismeassociatif,
syndical, mutualiste…).
Anne Grillon fait de nombreuses
préconisations, essentielles pour
une meilleure intégration des
jeunes agents. C’est le devenir du
fonctionnement de nos collecti-
vités en profonde transformation
qui est en jeu.
Jean-René MOREAU
Président de l’OST
Directeur Master 2 APGCL à l’UPEC
La MNT :
une approche globale
de la santé
• Première mutuelle de la fonction
publique territoriale en santé
comme en prévoyance.
• Près de 800 000 adhérents.
• 1,1 million de personnes
protégées.
• 9000correspondantsmutualistes
dans les collectivités.
• 84 sections départementales
présentes en métropole et dans
les DOM.
• Tablesd’expériencecertifiéespour
les garanties complémentaires
en maintien de salaire.
La MNT, créée et dirigée par des
agents territoriaux, bénéficie
d’une expertise de la protection
sociale complémentaire des
agents territoriaux, construite
au fil de cinquante années
d’expérience et d’échanges avec
les acteurs du monde territorial.
Avec la création de
l’Observatoire social territorial
(OST) en 2009, la MNT entend
animer le débat entre les
acteurs institutionnels de la
fonction publique territoriale
(FPT) et répondre au besoin
d’une meilleure connaissance
de l’environnement social des
agents territoriaux.
Quels que soient la
problématique des collectivités
et l’avancement de leurs actions,
la MNT est à même de proposer
des pistes et des actions
complémentaires, adaptées et
d’actualité avec les Cahiers et les
ateliers débats de l’OST, et avec
une offre de services dans les
domaines de la santé au travail
des agents, de la prévention et
de l’accompagnement social.
Une étude qualitative pour comprendre et faire connaître les motivations
des jeunes agents, leur perception du service public local, ainsi que leurs
problématiques sociales et professionnelles.
L’étudeinterrogelesystèmemanagérial
territorial face au renouvellement de
génération d’agents territoriaux.
Des agents minoritaires
Les jeunes agents sont encore très
minoritaires dans les collectivités,
mais une nouvelle génération arrive.
Dans la FPT, ils représentent 11,3 %
des agents.
Nombre d’a priori pèsent sur les
jeunes. Une littérature abondante à
la fois contradictoire et paradoxale
véhicule d’eux une image stéréotypée
et simplifiée : individualistes, peu
motivés et peu disponibles, avec une
loyauté incertaine vis-à-vis de leur
employeur. Aujourd’hui, les experts
et les chercheurs prennent du recul
face à ces marqueurs générationnels,
considérant que cette génération ne
fait que porter et amplifier ce qui
constitue un mouvement de fond.
Levier de changement pour les
collectivités
D’ici 2020, huit millions d’actifs
partiront en retraite selon l’INSEE.
Ce peut être une opportunité pour
les collectivités de repenser leur
schéma organisationnel et d’engager
de nouvelles pratiques. Ces nouvelles
organisations impliqueront la prise
en compte d’une autre relation au
travail des agents, jeunes et moins
jeunes : plus d’autonomie et de
responsabilités, le besoin de sens,
une articulation vie privée et vie
professionnelle.
Retrouvez ce Cahier n°15
en intégralité
ainsi que l’ensemble
des publications de
l’Observatoire social territorial sur
le site
www.observatoire-social-territorial.fr
Terrains d’étude
Deux terrains d’étude différents
ont été sélectionnés : l’Île-de-
France, avec l’Essonne (91) et la
Seine-Saint-Denis (93), et la région
Bretagne. Au total, 26 jeunes agents
de 18 à 35 ans en poste dans les
quatre niveaux de collectivités, de
catégories A, B et C, ont témoigné
de leur expérience.
Méthodologie : une étude qualitative
basée sur 40 entretiens variés
Entretiens semi-directifs avec 26
jeunes territoriaux de 18 à 35 ans
réunis en 3 groupes de 7 à 10 agents,
et suivi par l’ensemble des 11 jeunes
militants mutualistes membres du
comité jeunes, du lancement de l’étude
à sa conclusion.
Entretiens deux DRH, deux médecins
de prévention, deux assistants sociaux
et trois représentants d’organisations
syndicales.
participative associant les agents et
la reconnaissance de leur droit à la
parole sont autant de pistes crédibles
pour répondre aux attentes des jeunes
agents.
Axe 3 : réinterroger la politique
managériale
Des changements profonds sont à
engager en assurant en premier lieu
un accompagnement soutenu des
managers:rompreavecunmanagement
pyramidal et vertical pour tendre vers
davantage de transversalité, développer
des compétences relationnelles
orientées sur l’accompagnement,
l’écoute, et la capacité à faire adhérer,
et enfin reconsidérer les marges de
manœuvre des managers de proximité
aujourd’hui quasi inexistantes.
Axe 4 : maîtriser la gestion du temps
L’usage massif des TNIC et des
nouvelles formes d’organisation du
travail ne peuvent être traités dans des
règlements du temps de travail aux
dimensions comptables et juridiques.
Une réflexion approfondie, prenant en
compte différents paramètres, permet
en associant étroitement les agents, de
répondre aux besoins du service public.
Cela répond également aux attentes
des agents en veillant à la conciliation
de leur vie professionnelle et de leur vie
personnelle.
Axe 5 : développer les compétences
et offrir des perspectives
Les services publics sont en
évolution permanente en raison des
transformations des activités et des
nouvelles méthodes de travail. Si la
formation est un des leviers, nombre
d’organisations, conscientes de la
nécessité de réduire la déconnexion
entre le travail et l’apprentissage,
privilégient d’autres pratiques : MOOC
(cours en ligne), serious game, fab
lab mixant apprentissage collectif et
individuel. La carrière n’étant plus
un levier majeur de motivation des
jeunes agents, les RH formalisent
progressivement des parcours
professionnels et de formation.
Axe 6 : formaliser une politique
d’accueil et d’intégration des agents
et des jeunes
Conjuguer un accueil collectif et un
accueil individualisé assorti d’un bilan
est incontournable. Le premier, par
le biais de stages ou de séminaires,
permet à l’agent de s’intégrer dans
un réseau et un collectif de travail.
Le second se traduit par des bilans
individuels, un parrainage ou un
tutorat et, si besoin, la formalisation
d’un parcours de développement des
compétences.
L’auteur : Anne GRILLON est spécialiste des questions RH et du management dans
le secteur public ainsi que l’auteur de l’étude Le DRH dans la fonction publique
territoriale.