1. L’évaluation
(des élèves, des étudiants...)
Représentations , pratiques, définitions, limites…
Formation des doctorants
(Ph.Watrelot) Juin 2014
2.
3. Philippe Watrelot
• 55 ans
• Professeur de Sciences économiques et
sociales au lycée Corot de Savigny sur
orge (Essonne,Ac. deVersailles)
• Professeur à l'ESPÉ de Paris en temps
partagé
• Président du CRAP-Cahiers Pédagogiques
7. • réfléchir sur les différentes dimensions de
l'évaluation
• donner des éléments sur les limites de la note
(docimologie)
8. L’évaluation
(sommaire)
• Introduction : un sujet toujours d’actualité
• L’évaluation vue par les parents, les élèves, les
enseignants...
• …et à l’université ?
• Définitions et typologie de l’évaluation
• Un peu d'histoire (et de géographie) de l’évaluation...
• La notation et ses limites (docimologie)
9. Des débats actuels
(et récurrents)
(et récurrents)
• Faut-il supprimer les notes ?
• Pour ou contre les compétences…
• les “usines à cases”
• l’“évaluationnite”, la “fièvre de l’évaluation”
• quelle est la valeur du bac ?
• Les notes sont elles fiables ?
19. L'Afev (Ass. Française des Étudiants pour la Ville) a fait
réaliser en mars 2011 une étude par l'institut Audirep,
par téléphone auprès d'un échantillon national de 1000
individus représentatifs de la population française âgés
de 15 ans et plus.
20.
21. Paroles d’élèves
Dans un livre paru en 2005 « L’élève humilié », Pierre
Merle, sociologue, a demandé à de jeunes adultes de
se remémorer un « exemple tiré de leur scolarité
d’un droit non respecté » et où ils se sont sentis
humiliés. Il est significatif de noter que ce qui arrive en
tête ce sont les situations d’évaluation.
24. Paroles d'élèves
Camille 2nde : « C'est bizarre, pour un même devoir de maths réalisé avec
une copine, on a eu des notes différentes...»
Grégoire, 1ere L : « La notation, c’est une échelle qui permet de se situer
par rapport au reste de la classe. C’est un bon système. ».
Charles, Tle S : « Pour entrer en prépa, ce sont les notes qui comptent
alors qu’elles ne sont pas représentatives.»
Bertille et Mélissa, 1ere L : « Les profs nous cataloguent et ensuite, ils
nous mettent toujours les mêmes notes ».
François, 1ere S : « Certains profs distribuent les notes à la tête du client.
»
Karim, 1ere S : «Une note, c’est toujours un peu lié à la personnalité de
l’élève. »
Jeanne, 1ere L : « Une note ne dit pas tout et surtout pas les progrès qu’on
a faits ».
Phosphore Avril 2006 pp. 10-19.
25. « Très souvent, [j'ai eu des notes qui m'ont paru
injustes]. Surtout en français, parce que les notes dans
cette matière, c"est vraiment flou. Notre prof ne nous
expliquait pas le barème et elle ne nous expliquait jamais
notre note... donc, soit on avait le don d'écrire, soit non!
Donc c"était un peu arbitraire les notes en français»
(Claire, 16 ans, CPA maroquinerie)
26. « [Des notes injustes, j'en ai eues] plein! J'en ai eues
beaucoup en SVT et en maths aussi. Une fois, j'avais mis
toutes les réponses par cœur ... on savait sur quoi on allait
être interrogé et j'avais appris les leçons du livre et j'ai eu
11. Alors qu'une autre élève, elle avait tout juste aussi et
elle a eu 14 ! Juste parce que le prof l'aimait mieux, elle...»
(Simon, 18 ans, Bac scientifique)
27. L’évaluation est une pratique professionnelle
qui demande beaucoup de temps
(chronophage ?) et qui engage les valeurs et
l’identité professionnelle de l’enseignant.
Elle dépend aussi de la “culture” de chaque
établissement
Ce que disent
et font les profs...
28. Ce que disent
et font les profs...
Témoignages
extraits de
Le monde de l’éducation
Février 2006
“Que valent les notes”
29. “Je sais que je note un peu sec. Je vois bien en conseil de classe. Et
pourtant j’ai l’impression de surnoter. Je mets des 13 et des 14 à des
devoirs qui ne le valent pas, parce que je suis bien conscient que le
jour du bac, si les élèves produisaient un devoir de ce niveau, ils
auraient effectivement un 13 ou un 14.
Et puis, je surnote aussi pour encourager les élèves qui travaillent.
Tout en conservant une certain degré d’exigence en me refusant de
tomber dans la complaisance. Mais je reste convaincu qu’au fond ces
copies valent moins. En fait, je surnote parce que le système incite à
cela.”
Jacques Vassevière, professeur de lettres
Le monde de l’éducation Février 2006
Ce que disent
et font les profs...
30. “En EPS, l’évaluation sert principalement à faire comprendre aux élèves où ils
en sont dans leurs apprentissages. Il ne s’agit pas forcément de noter un
niveau. Par exemple, je peux leur demander de réussir cinq fois des tirs en
course au basket sans les noter. L’évaluation est dictée par ce que je veux qu’ils
acquièrent. S’il s’agit de l’esprit d’équipe dans un sport collectif, je mets plus
l’accent sur les relations entre joueurs que sur les résultats techniques. Parfois,
je les évalue différemment. par exemple, j’appends d’abord à ceux qui ne
savent pas nager à être à l’aise dans l’eau. Ils sont alors notés sur 13 au lieu
de 20”
Samuel Wagner, professeur d’EPS
Le monde de l’éducation Février 2006
Ce que disent
et font les profs...
31. Ce que disent
et font les profs...
“Cette année avec mes élèves de 2nde et 1ère S, j’ai décidé de
tester la méthode d’évaluation dite du “contrat de confiance”.
Trois jours avant un contrôle, je leur fournis une liste de 8 à 10
exercices à réviser, représentatifs des notions à acquérir pour cette
échéance. Le jour de l’évaluation, il sont sûrs de tomber sur l’un ou
l’autre de ces problèmes. Ce système les oblige à s’investir dans
leurs révisions. Il permet aussi de relancer les élèves en perte de
confiance...”
Olivier Trappes, professeur de mathématiques
Le monde de l’éducation Février 2006
32. On dispose de quelques enquêtes sur les pratiques d’évaluation
des enseignants.
On peut citer une enquête de la DEP « Les pratiques d’évaluation
des enseignants au collège » et paru en 2004 qui offre l’avantage
de s’appuyer sur un travail important d’enquête statistique
auprès de 3561 enseignants dans 597 collèges.
Des entretiens qualitatifs ont complété cette étude.
Ce que disent
et font les profs...
34. Evaluation et
apprentissage
Le souci des enseignants, massivement partagé dans
toutes les disciplines est ...
... de veiller à la qualité des consignes qui
accompagnent les évaluations (95 % d'entre eux),
...de diversifier leurs pratiques évaluatives en faisant
varier les exercices (89 %)
et en proposant des tâches de difficulté variable (82 %)
35. Le temps...
La moitié des enseignants considère que le temps pris par
l'évaluation est d'une façon générale acceptable.
Le temps moyen estimé pour la préparation et la
correction d'une évaluation - effectuée dans la semaine
précédant la réponse au questionnaire - s'élèverait à 2h45
environ.
1/3 des enseignants y passent 2 heures au plus, 1/3 entre 2
heures et 3 heures et 1/3 plus de 3 heures.
Une activité chronophage : pour quelle efficacité?
36. Tout seul...
Les trois quarts des enseignants indiquent fixer eux-mêmes le
calendrier des évaluations au rythme de leur progression
90 % des enseignants interrogés déclarent élaborer seuls leurs
évaluations
Un travail solitaire
37. Vie et mort de
l'interro surprise...
Dans presque toutes les disciplines (à l'exception des arts
plastiques et de l'éducation musicale), la majorité des
professeurs (entre 90 et 95 % d'entre eux) déclare annoncer à
l'avance (toujours et souvent) les évaluations à leurs élèves
Plus de 80 % d'entre eux, déclarent faire connaître aux élèves
leurs attentes en termes de connaissances à mobiliser et de
compétences à mettre en oeuvre et à communiquer, dans les
mêmes proportions, le barème de notation.
38. Les Dossiers Evaluations et
Statistiques (MEN) d'octobre
2009 sont consacrés au
thème : Enseigner en collège et
lycée en 2008.
On y trouvera les résultats
d'une enquête réalisée en 2008
auprès de 1200 enseignants.
Ce que disent
et font les profs...
49. “La pratique enseignante
en mutation à l'université”
Nicole Rege Colet
Marc Romainville
(sous la direction de)
De Boeck 2006
Chapitre 1
"Quand la coutume tient lieu de compétences : les pratiques
d'évaluation des acquis à l'université"
Marc Romainville
(disponible sur GoogleBooks)
50. Pratiques d'évaluation à l'université
• composante de plus en plus lourde du
métier d'enseignant-chercheur =>effets
négatifs sur la qualité de l'évaluation
• grande hétérogénéité (entre filières, au sein
d'une même filière,...)
• absence de standardisation des objectifs,
des contenus et des méthodes.
• longue tradition de “liberté académique”
51. • Une évaluation normative qui ne se fonde
pas sur des objectifs explicites de
formation
• Une absence de reconnaissance du
caractère “professionnel” de l'acte
d'évaluation.
• Une évaluation à fonction sélective et non
d'inventaire
• manque de validité, de fidélité et de fiabilité
Pratiques d'évaluation à l'université
52. Une évaluation qui
“pilote” les étudiants
• l'évaluation par la restitution appelle l'étude
en surface
• l'évaluation par la restitution est peu
compatible avec les plus hautes finalités de
l'enseignement universitaire
55. Évaluer...
(dans le dictionnaire)
Mesure à l'aide de critères déterminés des acquis d'un
élève, de la valeur d'un enseignement, etc.
Le Petit Larousse illustré 1999
29
56. Définition de
J-M. DE KETELE
J-M. DE KETELE
•Évaluer signifie...
• recueillir un ensemble d’informations suffisamment
pertinentes, valides et fiables
• et examiner le degré d’adéquation entre cet
ensemble d’informations et un ensemble de critères
adéquats aux objectifs fixés au départ ou ajustés en
cours de route,
• en vue de prendre une décision.
57. Évaluer...
ÉVALUER: aider à prendre des décisions
processus (1) par lequel on définit (2), obtient (3) et fournit (4) des
informations (5) utiles (6) permettant de juger les décisions possibles (7)
(1) processus = activité continue
(2) on définit = identifier les informations pertinentes
(3) on obtient = collecte, analyse, mesure des données
(4) on fournit = communiquer ces données
(5) des informations = faits à interpréter
(6) informations utiles = qui satisfont aux critères de pertinence
(7) décisions possibles = actions d'enseignement, d'orientation etc....
58. Évaluation ≠ notation
Mesurer les progrès, repérer les difficultés d’apprentissage,
l’acquisition de compétences,… peut se traduire autrement que
par une note (chiffrée).
30
La note sur dix à l’école et sur vingt au lycée, qui nous est si familière,
est en fait une spécialité bien française...
59. Évaluation ≠ contrôle
Contrôle : Référent stable, procédure finie
Évaluation : ajustement, processus continu
Le contrôle final n'est qu'un des aspects de l'évaluation.
60. Évaluation / jugement
L'évaluation comporte une dimension importante de jugement
(référence à une norme et à des critères)
Mais on ne peut réduire l'évaluation à cette seule dimension.
Évaluer est aussi une régulation.
61. Dominique Odry
Pour comprendre l'évaluation
Sceren-CRDP Amiens 2008
30 mots pour mieux définir
l'évaluation sous ses différents
aspects
63. L’évaluation diagnostique
L’évaluation diagnostique (ou
pronostique) : Envisagée en début d'apprentissage ou
de formation, intervient lorsqu'on se pose la question de
savoir si un sujet possède les capacités nécessaires pour
entreprendre une formation ou pour suivre un apprentissage.
Elle permet donc, en principe, le repérage des difficultés.
On peut l'utiliser aussi pour repérer les représentations.
64. L’évaluation formative
l'évaluation formative intervient dans le cours d'un
apprentissage et permet de situer la progression de l'élève par
rapport à un objectif donné.
• sur l'élève pour lui indiquer les étapes qu'il a franchies et les
difficultés qu'il rencontre
• sur le maître pour lui indiquer comment se déroule son
programme pédagogique et quels sont les obstacles auxquels il se
heurte.
double rétroaction/régulation des apprentissages
65. L’évaluation sommative
L’évaluation sommative intervient lors des bilans, au
terme d'un processus d'apprentissage ou de formation.
Elle peut donner lieu aussi à une attestation sociale des acquis
(évaluation certificative)
66. Quand évaluer ?
Avant la
formation
Évaluation
diagnostique orienter l’action
Pendant la
formation
Évaluation
formative
réguler les
apprentissages
Après la
formation
Evaluation
sommative
Vérifier
certifier
69. Questions pour un...
De quand date la création du
baccalauréat ?
De quand date la note chiffrée ?
1808
1890
70. le Bac...
décret du 17 mars 1808
21 bacheliers en 1808
(1ère femme en 1861)
Pas de système de notation
Des boules rouges blanches et noires pour
exprimer l'avis des professeurs
71. De quand datent les notes?
Pendant la 1ère moitié du XIXe siècle, il n'y a donc pas de note au
Baccalauréat...
Bac = entretien oral (reçu ou non reçu...)
basé sur le principe jésuite de l'émulation (individuelle et collective)
2ème moitié du XIXe : C'est la nécessité d'un classement liée au
développement des concours qui aboutit au développement de la
notation sur 20.
En 1890, il était établi par un arrêté du 5 juin que « dans les
compositions, chaque copie aura sa note chiffrée de 0 à 20 »
72. Petite histoire de
l'évaluation
• Le classement précède la note
• le système d'évaluation français est
construit pour sélectionner et pour créer
de l'émulation
• "La France est un pays de concours" (Claude
Lelièvre)
73. Au XXe siècle
Le colloque d'Amiens en mars 1968 (donc avant mai !) propose de
supprimer les notes chiffrées pour “lutter contre un système élitiste”.
Cette réforme est appuyée par Alain Peyrefitte.
En 1969, la circulaire du 6 janvier évoque la relativité de la note et
l'illusion de sa précision
« les études docimologiques dont l'origine est antérieure à 1930 et qui se
sont multipliés dans les 20 dernières années ne laissent aucun doute sur
le caractère illusoire d'un tel raffinement dans la précision de la note et du
classement obtenu »
74. Le ministre de l'Éducation nationale de l'époque Edgar Faure
décrète dans cette circulaire que « la notation chiffrée peut être
abandonnée sans regrets ».
Les années 70
"Une échelle convenue d'appréciation, libérée d'une minutie excessive,
sera moins prétentieuse. En indiquant la zone dans laquelle l'élève se
situe, on cerne déjà la réalité d'assez près, on évite de multiplier
systématiquement des différences qui ne seraient pas confirmées par
d'autres correcteurs, ni par le même correcteur à une autre époque."
75. C'est le 9 juillet 1971 (circulaire 71-228) que les notes sur 20 sont à
nouveau prônées dans les classes qui comportent un examen (3ème,
terminale).
Passage à une notation par lettres (A, B, C, D, E,...).
C'est en juillet 1971 dans un arrêté que les notes sur 20 sont à
nouveau prônées dans les classes qui comportent un examen (3ème,
terminale).
Mais disparition du classement...
Depuis...
76. Chez nos voisins...
Suède : la notation définit quatre niveaux (insuffisant, passable, bien, très
bien) = 4 points
Grande Bretagne : huit niveaux du meilleur au pire
(A*, A, B, C D, E,F et G)
Italie : la notation va de 0 à 10, les résultats négatifs allant de 0 à 5 et les
résultats positifs de 6 à 10
Allemagne : l’échelle est construite sur six niveaux (6 points) très bien,
satisfaisant, moyen ou passable, insuffisant, très insuffisant
31
Claude Guillon “Les évaluations scolaires”
CRDP Franche-Comté, Hachette, 2004
77. En Finlande
Jusqu’à 9 ans les élèves ne sont absolument pas notés. Ce
n’est qu’à cet âge qu’ils sont évalués pour la première fois,
de façon non chiffrée. Puis plus rien de nouveau jusqu’à 11
ans.
Toutefois, des bulletins sont envoyés deux fois (à Noël et
en mai).
Les notes chiffrées n’apparaissent que la 6ème année quand
les enfants atteignent l’âge de 13 ans.
Les notes vont de 4 à 10
78. En Finlande
Au lycée la même échelle de 4 à 9 est conservée.
Rythme des évaluations est beaucoup plus soutenu:
chaque session de 6 semaines se conclut par une
semaine pendant laquelle les élèves subissent des tests
chaque jour de 9h à 12h.
Les élèves doivent valider les deux tiers des cours
dans chaque discipline suivie.
Ils sont néanmoins encouragés à redoubler un cours
non validé.
Autre alternative : passer un examen de repêchage
(« resist exam ») le deuxième mercredi suivant la fin
d’une période
Source : Paul Robert La Finlande un modèle éducatif pour la France ? ESF 2008
79. Belgique, Suisse, Québec
Belgique : rédéfinition des programmes par compétences à partir de
1997.
Socles de compétences avec des référentiels à 14 ans et à 18 ans.
Suisse : travail par cycles et par compétences mais en 2006 une
“votation” a rétabli les notes dans le canton de Genève
Québec : travail par cycles et par compétences mais rétablissement
des notes en 2006 pour le secondaire.
84. Docimologie : Késaco ?
Le terme docimologie combine deux mots grecs :
“ dokimé ” signifie épreuve et “logos” (science)
Ce terme fut proposé par Henri Piéron pour “ l’étude systématique
des examens (modes de notations, variabilité interindividuelle et intra-
individuelle des examinateurs, facteurs subjectifs, etc...). ”
La docimologie est donc la science des examens et de la
notation et plus précisément l’étude statistique des notes
attribuées lors de la correction de copies.
85. La note est-elle fiable ?
De nombreux travaux par la suite ont permis de mettre en
évidence un ensemble d’effets contribuant à biaiser la volonté
d’”objectivité” de la notation professorale...
Apparition de la docimologie en 1922 avec PIERON et LAUGIER
Ces chercheurs comparent les résultats obtenus par un même
groupe d’élèves aux tests et les résultats obtenus au C.E.P. du mois
de juin 1922.
Ils constatent que le degré de correspondance entre les deux types
de résultats est très, très faible.
86. La note est-elle fiable ?
Premiers travaux internationaux de docimologie en 1936.
La commission française de l’enquête Carnegie (Laugier &
Weinberg) dans une expérience de multicorrection
pointe l’extrême difficulté d’une correction “objective”
On y relève des écarts très importants dans la notation
quelle que soit la discipline.
55
87. Les résultats montrèrent une forte dispersion des notes
attribuées à chaque copie par les correcteurs. Aucune
copie ne reçut deux fois la même note. L'écart maximum
des notes dépassa les prévisions.
Une copie de français fut notée entre 3 et 16 ;
En philosophie et en latin l'écart maximum était de 12
points.
Les mathématiques et la physique, réputées pour des
sciences exactes, ne furent pas épargnées : l'écart
maximum était respectivement de 9 et 8 points.
Enquête Laugier-Weinberg 1936
88. Laugier et Weinberg (1934)
• 6 matières (français, latin, anglais, maths, philosophie, physique)
• 100 vraies copies tirées au sort pour chaque matière (même
académie ; même session)
• Corrigées 6 fois (Bac + 5 correcteurs)
90. • « Pour prédire la note d’un candidat à un examen, il vaut
mieux connaître son examinateur que le candidat lui-
même »
Henri Piéron (1963)
91. La “note vraie”
Pour obtenir la “note vraie” (c’est-à-dire la
moyenne des notes ne variant plus même avec des
notes supplémentaires), il aurait fallu...
La multi-correction est-elle la solution ?
128 correcteurs en philosophie, 78 en Français,
16 en physique, 13 en mathématiques, etc.
92. La “Note vraie”…
J.-J. Bonniol en 1976 a repris l’expérience et
montré qu’il faudrait 78 correcteurs en
mathématiques et 762 en philosophie pour
neutraliser les erreurs de calcul en augmentant
le nombre de correcteurs pour améliorer
l’objectivité de la notation.
93. D’autres expériences…
• On est allé plus loin en faisant corriger la même
copie à la même personne mais avec un intervalle
de temps plus ou moins important
• Par exemple : un professeur de physiologie de la
Faculté des Sciences accepta 37 copies
-dactylographiées et anonymes - qu'il avait
corrigées trois ans et demi auparavant. Dans 7 cas
seulement, il remit la même note au même devoir.
Dans les 30 autres cas, il y eut des divergences
comprises entre 1 et 10 points
94. L’avis de Paulette
"On demanda à une bachelière, Paulette, intelligente mais ignorant
tout de la question traitée, de noter à son tour ces compositions de
physiologie, après les avoir lues une fois pour se faire une idée du
sujet.
Ses notes eurent une corrélation de 0,51 avec celles attribuées par
les professeurs compétents. La bachelière ne se trouvait pas plus en
désaccord avec les spécialistes que ceux-ci entre eux".
(in Science et Vie, 1968, n° 610).
95. Les évaluateurs sont influencés
par plusieurs facteurs
Effet de l'ordre de correction : Devant un nouveau travail
ou un nouveau candidat à évaluer, on se laisser influencer par
la qualité du candidat précédent. Un travail moyen paraîtra
bon s'il suit un travail médiocre.
Effet de fatigue ou d'ennui : peut engendrer laxisme ou
sur-sévérité
58
96. Effets de contraste
Bonniol (1965)
26 copies de niveau homogène (versions anglaises de niveau
terminale)
2 groupes de 9 correcteurs
Variable = ordre de correction
Ordre direct (12–>6)
Ordre inverse (26–>1)
97. • Interprétés en termes d’instabilité de l’échelle de
correction
• Copies corrigées en comparaison à un « modèle
interne »
• Evaluation normative plutôt que criteriée
Effets de contraste
98. Les évaluateurs sont influencés
par plusieurs facteurs...
Effet de stéréotypie : Le professeur maintient un jugement
immuable sur la performance d'un élève, quelles que soient
ses variations effectives.
99. Les évaluateurs sont influencés
par plusieurs facteurs...
Effet de contamination
Les notes attribuées successivement aux différents aspects d'un
même travail s'influencent mutuellement.
Effet de tendance centrale
Par crainte de surévaluer ou de sous-évaluer un élève, le
professeur groupe ses appréciations vers le centre de l'échelle.
100. Les évaluateurs sont influencés
par plusieurs facteurs...
Effet de halo : Le professeur, influencé par des...
- caractéristiques de présentation (soin, écriture,
orthographe) ou des
- caractéristiques liées à l'élève (origine sociale, sexe)...
...surestime ou sous-estime la note.
56
101. • Dans 18 classes d'une école primaire américaine, 20
% des élèves choisis rigoureusement au hasard, furent
signalés à leurs professeurs comme ayant eu des
résultats particulièrement brillants à un test non verbal
d'intelligence générale, permettant prétendument de
prédire leur épanouissement intellectuel. Les enfants ne
savaient rien, seuls les professeurs étaient au courant.
Au bout d'une année, ces enfants avaient réellement
un gain de quotient intellectuel franchement supérieur,
en moyenne, à ceux du groupe de contrôle".
• (in Atome n° 242 article de H. Pequinot,).
Effet de halo
102. Noizet (1975)
• 12 copies d’anglais de niveau contrasté
• 12 correcteurs
• 2 mois plus tard, on demande aux mêmes correcteurs de
corriger 6 nouvelles copies (de niveau réel moyen), sur
lesquelles on fait figurer une note fictive (11,86 vs. 9,84)
Les copies présentées avec une note basse obtiennent
en moyenne 2 points de moins que les copies
présentées avec une note élevée
Effets d’attente ou de halo
103. • Lien étroit avec l’effet Pygmalion (Rosenthal et Jacobson
1968)
• Attentes fondées sur une foule de facteurs:
performances antérieures, patronyme, âge, genre, CSP
des parents, attractivité physique…
• Interprétés dans le cadre de la théorie de la dissonance
cognitive de Festinger (1957)
Effets d’attente ou de halo
105. La loi de Posthumus (1947)
Un enseignant tend à ajuster le
niveau de son enseignement et
ses appréciations des
performances des élèves de
façon à conserver d'année en
année, approximativement la
même distribution (gaussienne)
de notes.
Ce concept a été repris
dernièrement par André Antibi
sous le nom de “constante
macabre”.
62
106. 5 correcteurs => 100 copies
4 autres correcteurs => redistribution de 15 copies « bonnes »
Un effet qui se reproduit...
107. La constante macabre
André ANTIBI
“La constante macabre ou comment a t-on découragé des
générations d’élèves ?”
Editions Maths’adore
2003
108. Sociologie de l’évaluation
scolaire
Sous ce titre, Pierre Merle,
professeur de sociologie à l’IUFM
de Bretagne a produit en 1998 un
“Que sais-je” (n°3278)
C’est une lecture utile pour tous...
60
109. Dominique Odry
Pour comprendre l'évaluation
Sceren-CRDP Amiens 2008
30 mots pour mieux
définir l'évaluation
sous ses différents
aspects
110. Pierre Merle
Les Notes, Secret de fabrication
PUF 2007
Une réécriture de deux livres
plus anciens et de travaux sur
les bulletins scolaires et les
conseils de classe.
114. "Évaluer à l'heure des compétences"
Cahiers Pédagogiques
n°491 Octobre 2011
115. “Évaluer l'évaluation”
Actes du colloque
organisé par l'Iréa
Sous la coordination de
Jean-Claude Emin et
Jean-Luc Villeneuve
Le Manuscrit
116. “La pratique enseignante
en mutation à l'université”
Nicole Rege Colet
Marc Romainville
(sous la direction de)
De Boeck 2006
Chapitre 1
"Quand la coutume tient lieu de compétences : les pratiques
d'évaluation des acquis à l'université"
Marc Romainville
(disponible sur GoogleBooks)
118. Les dimensions de la
note...
• Un moyen de communication...
• Une manifestation de l’autorité (du pouvoir
?)...
• L’expression d’un système de valeurs
personnel
• un “arrangement”
• Une norme sociale propre à un groupe
119. Fonctions de la note
• La note ayant été créée pour détecter des élites, il n’est pas
étonnant de constater qu’elle entretient (crée?) les inégalités
• Elle remplit toujours les objectifs sociaux, mais barre parfois la
route des objectifs pédagogiques
• A niveau de performance identique, les élèves vont être évalués
différemment par leurs enseignants : les élèves issus de milieux
sociaux défavorisés ou de groupes sociaux stigmatisés, les élèves
au passé scolaire difficile, sont ceux qui sont les plus pénalisés.
• Ces conséquences sont d’autant plus regrettables qu’elles
découlent d’une mesure chiffrée imprécise de la performance
scolaire.
121. Évaluation
Logique du classement
(Sélection, certification)
(question de l'objectivité de la mesure)
Logique de la régulation
ouvrir "la boîte noire"
(comprendre le processus d'apprentissage
pour mieux aider à apprendre)
122. L’évaluation est une pratique sociale et donc soumise à des
normes (culture d'établissement, de la discipline, de la
génération,...) et sous-tendue par des valeurs.
L’évaluation renvoie donc chacun à sa propre conception de la
justice et à ses représentations du travail, du niveau, des
apprentissages, du pouvoir, …
C’est aussi ce qui la rend si difficile à faire évoluer car elle s’appuie
sur notre propre échelle de valeurs...
123. Une pratique chronophage et qui peut
être vidée de son sens.
Évaluationnite ou taylorisme pédagogique
Le contrôle occupe une large part du temps d’enseignement : il en
reste d’autant moins pour penser au changement. Les élèves
travaillent pour la note, la moyenne ou la promotion, ce qui
développe un "rapport utilitariste au savoir"
Pour quelle efficacité ?
124. Noter pour se dispenser
d'évaluer les acquis ?
« Mais il est bon de rappeler que l’évaluation, qui est une
évaluation de la partie, ne doit pas faire oublier le tout, le long
chemin de culture où l’école a la responsabilité de conduire chaque
personne à un moment de sa vie ; que l’évaluation, qui produit des
signes sociaux nécessaires tels que les notes ou les diplômes, doit
être au service des acquis, pour aider à les mesurer, pour leur
donner visibilité, et pas le contraire. »r
Rapport de l’IGEN « Les acquis des élèves, pierre de touche de la valeur de
l’école » (juillet 2005)
125.
126. • Donner plus de sens à l'évaluation pour l'élève et
l'enseignant pour mieux évaluer
• Aller vers une pédagogie plus explicite
• Aller vers une pédagogie plus cohérente et lisible
en travaillant d'avantage avec ses collègues
• Mieux évaluer c'est mieux communiquer et
adapter sa communication aux différents
destinataires
Mieux évaluer...