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1
#FocusOn
volume 1
2
Première édition
Publiée le 24 Décembre 2016
Mise en page éditions ONNI
3
SOMMAIRE Présentation du projet
Remerciements
Betty Bouteiller
Sarah Daninthe
Christine Bellocq
Sophie Floreani
Martin Garanger
Thierry Cardot
Geneviève Bouché
Valérie Anne d’Asnières
Guy Lessieux
François-Xavier Leroux
Biographie Gaël Dupret
p.4
p.5
p.7
p.10
p.15
p.21
p.25
p.30
p.34
p.39
p.44
p.50
p.56
4
Mais quel intérêt de vivre ces rencontres sans les partager ?
C’est ainsi que j’ai eu l’idée d’interviewer chaque mois une personne et de
réaliser son portrait photo. Ce format permet de réaliser un portrait complet
et de lier mon métier de photographe corporate et de presse je l’ai appelé
Focus On.
Toute l’année 2016 j’ai fait un Focus On par mois qui était diffusé en priorité
aux lecteurs de ma newsletter et le mois suivant rendu public sur mon site.
Ce livre blanc est la réunion des 10 Focus On réalisés.
Projet #FocusOn
Mon métier de photographe me donne la chance de rencontrer des personnes
d’exception, des personnes différentes qui ont des métiers qui sont peu, pas
ou mal connu du grand public. Généralement ce sont des expert-e-s dans
leur domaine. Et les expert-e-s sont souvent des personnes très intéressantes
auprès desquels on apprend toujours.
Pourquoi 10 et pas 12 ?
Tout simplement parce que j’ai commencé la publication des Focus On en
février et qu’en août, ce sont les vacances !
Pourquoi un livre blanc ?
L’envie de vous offrir l’intégralité des Focus On de 2016 en un
seul volume pour bien commencer la nouvelle année 2017.
Le livre blanc permet une diffusion multi-support et d’augmenter la
transmission de ces portraits de femmes et d’hommes auprès d’un plus large
public que les milliers d’inscrits à ma newsletter et les visiteurs de mon site.
5
Remerciements
Je tiens à remercier les différentes personnes qui ont accepté l’interview, du
temps qu’elles ont passé à répondre aux questions et à l’accueil qu’elles m’ont
réservées,
Je tiens à remercier Sophie pour la phase de correction de chaque #FocusOn
avant l’envoi de mes newsletters,
Je tiens à remercier Valérie Beaudoin qui m’a formé aux techniques de
l’interview lors de mes débuts de journaliste à la République du Centre,
Et je tiens à remercier mon Père qui m’a appris la photographie,
6
Droits sur le livre blanc #FocusOn vol. 1
L’intégralité de l’œuvre (photographies, textes, illustrations, mise en page)
est protégée par les droits d’auteur et la propriété intellectuelle.
Droits de diffusion : la diffusion de ce livre blanc se fait exclusivement par
internet et l’œuvre doit rester dans son intégralité.
Il est interdit :
	 • D’en extraire une partie,
	 • De commercialiser tout ou partie de l’œuvre,
	 • De publier et / ou imprimer cette œuvre sur quelque support
qu’il soit.
Comment diffuser ?
Pour diffuser le livre blanc vous pouvez utiliser le lien direct présent sur mon
site : Gaeldupret.com/focuson-volume-1/
Ce livre est diffusé via la plateforme : Linkedin Slideshare
7
Betty Bouteiller
Bonjour je suis Betty Bouteiller et j’ai créé ONNI en novembre 2015. Avant
ONNI, j’ai fait une Prépa et un Master dans la communication visuelle
multimédia.
Pourquoi ONNI ?
Léonard et Compagnie, est mon
projet de Master. Pour le monter
j’ai rencontré plusieurs éditeurs et
j’ai eu beaucoup d’encouragements
de leur part ce qui m’a conforté
dans l’idée de lancer ce projet «
pour de vrai ». Et comme je ne
trouvais personne pour l’éditer…
j’ai créé ONNI !
C’est quoi ONNI ?
ONNI - pour Objet Numérique
Non‑Identifié - est une maison
d’édition numérique qui a pour
objectif de se spécialiser dans le récit
illustré interactif pour jeunes et
adultes. L’idée, est de montrer que
l’on peut faire des livres interactifs
intelligents : l’interactivité apporte
une valeur ajoutée au récit.
Donc tout ce qui est en plus du
texte,permetdemieuxcomprendre,
d’approfondir l’histoire et n’est pas
là uniquement pour faire joli. Cela
montre également que les tablettes
peuvent avoir des applications
intéressantes, ludiques, intelligente
et qui donnent envie de lire.
J’ai monté ONNI avec Jonathan
Helme que j’ai rencontré sur
LinkedIn. Il a fait l’école des
Gobelins que je voulais faire. En
travaillant avec Jonathan sur le
projet Métronautes on s’est rendu
compte que ça matchait bien entre
nous.
Comme le feeling et la confiance
étaient au rendez-vous, on a décidé
de monter ONNI.
Betty Bouteiller – ONNI (CEO)
8
C’est quoi un livre
interactif ?
C’est un livre dans lequel le
lecteur aura des actions à faire.
Cela peut, soit changer l’histoire,
soit faire vivre au lecteur un
passage de l’histoire pour mieux
le comprendre. Par exemple :
dans Léonard et Compagnie, à un
moment donné, le loup est perdu
et il faut l’aider à construire une
carte pour qu’il puisse se retrouver.
Les plus connus sont les livres dont
vous êtes le héros. Nous avons envie
d’en faire et de trouver de nouvelles
façons de raconter des histoires.
L’interaction donne un peu plus de
pouvoir au lecteur, mais il faut le
faire intelligemment !
Léonard 1er livre interactif
Léonard et Compagnie c’est
3 histoires de loups qui vont
rencontrer le petit chaperon rouge.
Mais ces 3 jeunes loups ont des
caractères différents et ça ne va
pas se passer comme dans le conte.
Contrairement au célèbre conte,
ces 3 histoires sont axées sur la
manière de voir, de percevoir les 3
petits loups plutôt que sur le petit
chaperon rouge.
Les histoires sont linéaires avec des
pauses interactives. L’idée est de
s’arrêter pour faire des mini-jeux
qui aident à comprendre l’enjeu
du passage. Les jeux ne sont pas
obligatoires. Par exemple un loup
est perdu, nous allons pouvoir
l’aider à sortir d’un labyrinthe, lui
construire une carte...
Les prochains projets :
Été 2016 : Un petit garçon qui va
affronter sa peur des monstres avec
ses parents et le lecteur. Celui-là
sera imprégné de l’univers du jeu
vidéo. Notamment pour montrer
qu’on peut être à la frontière du jeu
vidéo et du livre et s’amuser.
C’est une histoire que j’ai écrite
et pour les dessins c’est une
collaboration avec l’illustratrice
Natacha Lebrun.
Betty Bouteiller – ONNI (CEO)
9
Betty Bouteiller – ONNI (CEO)
Un projet plus scolaire mais qui
reste, pour le moment confidentiel.
Et un appel à projet pour faire
un livre sur noël avec un collectif
d’auteurs
En résumé
Léonard et Compagnie sort en
Février 2016 pour les tablettes sous
Androïd et iOS.
Pour en savoir plus :
Onni.fr
Linkedin.com/in/betty-bouteiller-
b07b454a
Twitter.com/ONNI_editions
Facebook.com/editiononni
10
Sarah Daninthe
Rencontrée au WEB2Business 2016, Sarah est une working girl, SHN
(Sportive de Haut Niveau) et femme au grand cœur. Sarah me reçoit en
exclusivité chez elle au gymnase Éric Srecki de Levallois-Perret ou elle
s’entraine quotidiennement.
Bonjour, je suis Sarah Daninthe, escrimeuse, épéiste, double championne du
monde, médaillée olympique, en route pour la qualification des JO de Rio
et je travaille aussi dans le digital. Actuellement je travaille dans le marketing
et communication pour Open Field une start-up spécialisée dans l’analyse
des datas.
Sarah Femme Business
Auparavant je travaillais dans un
lab, proche d’une start-up, ce
qui m’a justement incitée à me
spécialiser dans le conseil auprès de
ces entreprises. Dans un premier
temps des start-ups du milieu
sportif, du fait que je sois sportive
de haut niveau, et puis j’ai agrandi
mon champ d’action à tout type de
start-up en tant que conseillère et
bêta-testeuse.
La start-up Open Field est peu
connue en France et en Europe
car le milieu de la data commence
tout juste à s’ouvrir. Mais ils ont
levé quelques millions et signé
avec de grosses structures. Ils sont
actuellement en pour-parler avec la
NBA (Ndlr : National Basketball
Association).
Open Field ?
Open Field fait de l’analyse de
données pour mettre en place
une stratégie sur l’étude du
comportement du consommateur
dans tous les lieux connectés,
Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
11
centre commerciaux, cinémas,
aéroports…. Cela permet de faire
des profils linéaires et transverses
du consommateur, avec son accord,
afin de mettre en place une stratégie
pour lui.
Un exemple concret :
Actuellement en signature, un de
nos prospects possède un casino,
plusieurs hôtels, restaurants,
magasins… La valeur ajouté
d’Open Field c’est la réalisation
du profil personnalisé de leurs
clients. Que vous preniez une nuit
dans l’un de leurs hôtels, ou que
vous fassiez des achats dans une
de leurs boutiques, ils prendront,
avec votre accord, toutes sortes de
données d’analyse : ce que vous
aimez manger, ce que vous aimez
voir, ce que vous aimez faire, si vous
prenez une carte à l’AS Monaco ou
que l’on sache dans l’hôtel où avez
l’habitude de descendre, si vous
aimez faire du shopping et que
vous aimez les chaussures, etc.
L’ensemble des données se
rapportant à un client dans tous les
lieux connectés possibles permettra
d’établir le profil de Monsieur
X et de mettre en place une
stratégie par rapport à ces données,
mais toujours avec l’accord du
consommateur. Cela se fait avec le
téléphone du client, sinon c’est de
la data anonyme.
Du sport haut niveau au
monde de la data et du
digital ?
J’ai un parcours un peu particulier.
J’ai un Master spécialité « étude du
consommateur»etcen’estpeut-être
pas un hasard si je suis chez Open
Field aujourd’hui. Cependant,
pendant plusieurs années j’ai mis
le sport comme première priorité
avec beaucoup de persévérance. Ce
qui m’a permis de revenir médaillée
mondiale et olympique.
En parallèle j’ai toujours aimé
le numérique. Je suis une vraie
#digitalenative voire même un
peu droguée ! L’escrime n’est pas
un sport professionnel et comme
le numérique est un univers que
Sarah Daninthe – Épéiste – Équipe de France
12
j’aime, j’ai investi du temps et de
l’énergie pour y bosser.
J’ai commencé par Twitter, cherché
àencomprendrelefonctionnement,
les codes, les influenceurs. J’ai été
aidée par des personnes qui m’ont
conseillée. J’ai aussi beaucoup lu. 
A l’époque les journées étaient
bien chargées. Travail la journée,
entrainement le soir et ensuite
encore 2h sur le numérique ou je
lisais, m’interrogeais, posais des
questions…
J’ai débuté en commentant les
tweets ainsi que les autres grands
réseaux sociaux et j’ai commencé
à me faire un petit nom. J’ai
commencé par investir le milieu du
sport car mon statut de sportive de
haut niveau me légitimait. Puis je
me suis ouverte à d’autres horizons.
J’ai postulé pour un premier poste
et maintenant je m’y plais vraiment.
Conseils auprès de start-up
Je fais essentiellement du conseil
auprès de start-up dans le milieu du
numérique. Je teste des applications
en tant qu’utilisatrice. Je suis assez
accessible et sans hésitation je suis
contente de collaborer avec ces
start-ups. Je les aide en leur disant
ce que je vis au quotidien, en
quoi leurs applications pourraient
m’aider, comment ils pourraient
l’améliorer, etc. Actuellement je
travaille avec la start-up Plume Air
qui est sur la data côté météo. Je
ne suis pas une spécialiste mais je
donne mon avis d’utilisatrice finale.
Plume Air
C’est une start-up française qui
a brillé lors de la COP 21. Là
encore elle brille aux Etats Unis
sur le secteur de la data mais pas en
France. Je ne sais pas si la France
à un problème avec le secteur de
la data mais il va falloir se réveiller
! Plume Air récolte des données
et analyse l’air pour connaitre le
taux de pollution. Au début j’étais
simple utilisatrice de cette appli, je
leur ai dit ce que j’en pensais. On
s’est rencontré et ils m’ont proposé
d’être bêta-testeuse. On a parlé de
différents points dont les objets
connectés. Ils ont pris note et je
pense que dans quelque temps on
devrait en entendre parler !
« Si tu vas à Rio… »
L’équipe de France est qualifiée pour
Rio avec un quota de 3 personnes
+ 1 remplaçante. Maintenant il
va falloir qu’on se bastonne entre
nous pour Rio ! La guerre n’est pas
finie. Il nous reste 3 compétitions
mondiales pour le faire. Grace au
pacte de performance du ministère
des sports, j’ai la chance de pouvoir
travailler à mi-temps chez Open
Field et de pouvoir m’entrainer
dans mon club de Levallois ou à
l’INSEP. Je m’entraine quasi 6 jours
par semaine, des leçons avec mon
prof et les préparations physiques
avec mon entraineur, de la muscu,
du cardio, etc.
Rio, les jeux c’est quelque chose
d’assez particulier, pour l’avoir déjà
vécu. Le plus dur ce sont les qualifs
plus que la compétition parce que
c’est la guerre pendant 1 an, 1
an ½ mais ça reste une aventure
extraordinaire. On mange Rio, on
boit Rio… C’est sûr de temps en
temps j’ai envie d’aller boire des
coups avec des potes mais c’est pas
vraiment le moment ! Faut rester
Focus sur ce que l’on doit faire…
Le mental d’abord !
Le mental est primordial il faut
beaucoup de force, beaucoup de
détermination. On ne peut avoir «
juste envie » On est déterminé, on
sait ce que l’on veut, on se donne
les moyens sinon ça ne peut pas
marcher. Déjà qu’en se donnant
à fond on n’y arrive pas toujours.
Les jeux (jeux olympique NDLR)
c’est particulier. Mais ce qui est
bien avec les jeux c’est que la vraie
nature se révèle, donc si on est pas
solide on ne passe pas.
Premier de cordée
Premier de cordée est une
association qui vient en soutien
à des enfants handicapés et
13
hospitalisés. On organise des après-
midis pour les enfants. Pendant
leur hospitalisation ils rencontrent
des athlètes de haut niveau, on
organise des sorties… Tant que ça
leur change de leur quotidien et
leur donner le sourire, alors c’est
banco ! C’est aussi un soutien pour
les familles.
J’organise pour des entreprises des
demi-journées de team building : je
fais découvrir l’escrime à des salariés
d’une entreprise et je réponds à
une problématique comme un
problème de communication,
de tension, voire de guerre entre
salariés… L’argent récolté est
intégralement reversé à Premier de
cordée.
Un exemple concret, dernièrement
j’ai passé une journée dans une
entreprise en Normandie. La
problématique de cette société était
la tension et la non-communication
entre deux équipes. Les deux
équipes étaient en conflit ouvert et
refusaient de travailler ensemble.
L’objectif était de leur faire
découvrir l’escrime et aussi le travail
d’équipe. J’ai donc fait des équipes
en mélangeant les 2 groupes en
conflit et je les ai fait travailler et
communiquer ensemble. Ça s’est
bien passé.
Pour en savoir plus :
Sarahdaninthe.com
Linkedin.com/in/sarahdaninthe
Twitter.com/sarahdaninthe
Open Field : openfieldlive.com
Plume Air : plumelabs.com/en/
Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
14
Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
15
Christine Bellocq
Bonjour, je m’appelle Christine Bellocq. Je suis la fondatrice et directrice de
l’entreprise Trésya Couture. Je crée des vêtements sur mesure, en particulier
des tailleurs, pour les « Executive Women ».
A l’équivalent des tailleurs grande mesure pour hommes, je suis un tailleur
grande mesure pour femme et non pas une couturière. Je fais du tailleur
professionnel pour accompagner la carrière des femmes, leur donner la
qualité « Executive Presence » c’est à dire montrer ses capacités au leadership.
Selon diverses études faites, 97% de la communication est non verbale, 55%
de l’impression que l’on se fait d’une personne se fait dans les premières
secondes. Une des premières choses que l’on voit de la personne c’est le
vêtement. Certes il y a le regard, la voix, l’attitude, la posture… mais il
est plus facile d’avoir une stature de leadership quand on est bien habillé.
Un tailleur ça participe de cette posture On se tient mieux quand on est
bien maquillé, bien chaussé, bien habillé… ça participe de l’image que l’on
renvoi. Quand on veut décrocher un contrat, un budget auprès de son PDG,
il ne faut pas avoir l’air d’une petite souris. Il faut arriver avec l’image d’une
personne capable de gérer un projet de bout en bout, capable de faire face à
des situations de crises qu’on va forcément connaitre et le vêtement participe
de cette attitude. C’est ça que je développe au travers de mes vêtements.
Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
16
Grande mesure ?
La grande mesure ça vient de la
qualification très ancienne des
différents niveaux de couture
que l’on faisait chez les tailleurs
hommes qui ont longtemps eu
le monopole des vêtements. La
corporation des couturières a été
créée en 1675 soit un siècle et demi
après celle des tailleurs. Les femmes
s’habillaient toutes seules ou
avaient une couturière qui faisait
partie de la domesticité quand elles
étaient riches.
Voici les 3 niveaux de couture :
 1. La petite mesure : est
l’ensemble des retouches faites sur
des vêtements standards. C’était
les prémices du prêt-à-porter qui
apparut au XXème siècle. La petite
mesure ne s’emploie plus, c’est
devenu la retouche.
  2. La demie mesure : on part de
gabarits intermédiaires et que l’on
met à la taille de la personne.
  3. La grande mesure : est la
création intégrale d’un vêtement
unique pour chaque client.
En termes de coupe, de choix de
détails, de cols, de poches….
Chez les femmes, il n’y a pas
la notion de tailleur mais de
couturière, qui d’ailleurs n’avaient
pas le droit, jusqu’à récemment,
de faire les vestes. Cela restait
le monopole des tailleurs. On
parlait de vestes pour femmes. On
n’emploie pas le terme de grande
mesure mais de sur-mesure, comme
si les femmes n’avaient pas le droit
à de la grande mesure ou que l’on
avait de la couture au rabais. C’est
pour cela que j’impose le terme de
grande mesure au féminin. Parce
que je m’adresse au même type de
cliente Femmes que les Hommes
qui se font faire des costumes
grande mesure. Je travaille
uniquement pour les femmes. C’est
un choix parce que je connais leurs
besoins, je connais le secteur dans
lequel elles évoluent et que je me
sens légitime.
1,2,3… 26 mesures
Pour le travail, hormis la feuille
Excel dans laquelle je reporte les
mesures, je travaille manuellement.
Je n’ai pas de scanner laser qui
tourne autour de la personne pour
dessiner la silhouette. D’abord par
ce que cela ne sert que dans le prêt-
à-porter et non pas dans la grande
mesure et dans l’individualité, parce
que ce n’est pas rentable et que
cela n’a pas d’intérêts. La prise de
mesure ne suffit pas en elle-même.
Ainsi, pour faire un vêtement, je
ne prends pas 3 mesures, tour de
poitrine, tour de taille, tour de
hanche, mais 26, en horizontal, en
vertical et en écartement. Et même
avec ces 26 mesures, il faut faire
un gabarit toile du fait que nous
ne sommes pas symétriques. Elles
ne sont pas non plus suffisantes
pour déterminer les emplacements
des creux. C’est-à-dire que des
personnes faites avec un même tour
de poitrine et même hauteur de
bassin, les pinces se positionneront
à des endroits différents.
Ainsi un même vêtement, pour
qu’il ait la même allure, pour 2
personnes différentes, je placerai les
pinces à des endroits différents.
Je garde le gabarit à plat pour une
question d’espace, mais je pourrai
les remplir de paille, les fermer au
niveau de la tête et du bas du corps
et j’aurai ainsi des mannequins à la
taille exacte de mes clientes, comme
on voyait autrefois dans les grandes
maisons. Ces gabarits je les gardes,
et quand ma cliente revient, je lui
réessaie le gabarit. Si ses mesures
n’ont pas évolué, je sais que je peux
le réutiliser.
Après je fais un carton, sur lequel je
reporte à plat toutes les mesures et
tous les détails que j’ai détecté sur
le volume. Sur la base de ce carton
je peux faire tous les vêtements
possibles : de la lingerie au
manteau en passant par le tailleur,
un pantalon, une jupe, une robe
forme kimono, faire des manches
tailleur ou des manches droites…
Sur ce carton, va se rajouter toutes
17
les aisances et toutes les formes de
patron que l’on appelle de base :
les découpes princesse, les pinces
Dior, les découpes kimono, les
différents types de cols, aplatis,
arrondis, droits… Cela permet
d’avoir un carton avec 5 patrons de
base qui me permettent de décliner
à l’infini toutes les formes possibles.
On se rend ainsi compte qu’un
tailleur qui est plutôt minimaliste
dans sa définition, offre des
opportunités de création énorme.
A contrario du tailleur prêt-à-
porter, il permet de définir le style
de chaque personne.
C’est 80 heures de temps de travail
pour un tailleur vraiment abouti
c’est-à-dire avec tous les détails
d’un tailleur : une boutonnière
passepoilée, des poches, un col
tailleur… Sachant qu’un tailleur
ça s’entoile, il faut renforcer les
coutures au niveau des épaules, des
emmanchures parce que cela doit
résister à l’utilisation quotidienne.
Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
18
1 tailleur = 3 pièces
Quand on fait un tailleur grande
mesure on fait 3 pièces. La
première en tissu est le tailleur du
dessus. Il y a ensuite la doublure et
enfin la parmenture ; il s’agit des
revers faits dans le même tissu ou
dans un tissu contrasté pour des
effets d’esthétique mais qui sont les
parties qui ne sont pas en doublure.
Ces parmentures sont entoilées
pour donner le tombé du devant,
des bas de manche, des bas de jupe
ou de pantalons.
Après on rassemble le tailleur du
dessus et les parmentures puis au
final on fixe la doublure à la main.
Robes de mariées
Je fais des robes de mariées bien que
ce ne soit pas mon cœur de métier.
Généralement je fais des robes de
mariées pour des clientes que je
connais, qui m’ont déjà acheté des
tailleurs. A l’exception d’une fois
ou j’ai fait une robe, type princesse
en tulle blanc avec des plumes,
des strass, elle était belle mais sans
l’effet choucroute ni meringue ; mes
créations sont des robes de mariées
plutôt atypique parce que j’ai des
clientes plus mûres qui ont envie de
se faire plaisir. Par exemples, l’une
était toute en dentelle rouge et
noire, l’autre était jaune. En final ce
sont des robes de mariées avec des
coupes un peu particulières et très
personnelles qui ne ressemblent en
rien à ce que l’on voit en magasin.
Spécial cocktail
Je créée des robes ou tenues de
cocktail. Je les fais essentiellement
pour ma clientèle de cœur de
métier de tailleur qui a des soirées
cocktail mais aussi pour les
personnes participant par exemple
aux Galas de l’X où on porte
encore des robes de cocktail et des
gants longs. Je travaille avec une
brodeuse qui fait de la broderie
haute couture (broderie au crochet
ou à l’aiguille) et qui travaille
pour de grandes maisons comme
Alexander McQueen ou autre. On
fait des pièces qui permettent de se
rajouter au tailleur de jour et qui
en fait un tailleur cocktail. Nous
faisons des pièces somptueuses qui
vont venir se fixer avec des aimants
néodyme sur le col tailleur pour le
transformer.
Double moment d’émotion
Dans la création du tailleur j’aime
particulièrement deux moments.
Le premier est le moment où
l’on définit le modèle que je vais
lui faire (car c’est un travail en
collaboration). Au moment où
l’on a choisi le tissu, que le dessin
est finalisé, Il y a un moment où je
sais intimement que c’est ce tailleur
là et ma cliente aussi. Un jour une
cliente m’a dit « Je sais que l’on a
fait le bon choix car vous avez les
yeux qui pétillent ».
L’essayage final est un vrai moment
d’émotion. Je le vis intensément
mais par procuration : j’adore
observer ma cliente se regarder dans
le miroir et changer de posture.
Même si elle est en collant et qu’elle
n’a pas remis ses chaussures je la
vois se redresser, se trouver belle et
fière d’elle. Et là, oui, c’est un grand
moment de bonheur. C’est aussi à
ce moment-là que je sais que j’ai
gagné, surtout quand elle a la larme
à l’œil.
J’ai autant de plaisir à voir un
tailleur porté par ma cliente qu’elle
peut en avoir à le porter je suis
très fière de mes tailleurs et de mes
autres créations. Et heureusement
car si je n’en étais pas fière alors je
ne vois pas comment mes clientes
pourraient l’être.
Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
19
Comment devient-on
créatrice de
grande mesure ?
Je ne suis pas couturière. Je suis
artisan d’art. J’ai notamment la
lettre du président de la chambre
des métiers m’accordant la
qualification du titre d’artisan d’art
parce que je fais ce métier depuis
plus de 6 ans et que j’excelle dans
un domaine artistique qui est la
couture.
Ce n’est cependant pas ma
formation. A la base j’ai un BAC
D Mathématique et sciences de la
vie suivit d’un DEUG de science
Biochimie et physiologie Cellulaire
car dans ma famille on ne fait que
des études scientifiques. D’ailleurs
ce n’était pas passe ton bac d’abord,
mais passe ton bac+5 d’abord et
ensuite tu feras ce que tu souhaites.
Étant une fille j’avais quand même
le droit de faire Science de la Vie.
Mon premier acte de rébellion fut
le choix de Sciences Po plutôt que
l’X ou Mines. Quand j’ai annoncé
mon choix, mes parents m’ont dit
que j’allais me le financer car ils
pensaient que je sortais du cadre et
que ce n’était pas de vraies études.
J’ai adoré Sciences Po. Ça a été dur
et on bosse beaucoup mais c’est
passionnant.  Diplôme de Science
Po en poche j’ai fait le choix de
sacrifier la réalisation de mes rêves.
Je suis donc rentrée dans la finance
d’entreprise plutôt que dans des
cabinets type Deloitte ou Arthur
Andersen. Plutôt que d’intégrer
une nouvelle bulle, j’avais envie
de me confronter à la réalité du
monde. J’avais déjà été dans une
bulle (famille, Sciences Po), et
rentrer dans un cabinet cela aurait
été encore le même univers, la
même bulle.
Je suis donc allée dans une
entreprise pour être au contact des
gens. Ce qui ne fut pas une mince
affaire.  Quand on sort de Science
Po, on est en tailleur escarpin avec
des phrases un peu sophistiquées
et tu te rends compte que les gens
ne te comprennent pas. J’ai gardé
le tailleur escarpin mais, afin de
me faire comprendre, j’ai simplifié
ma manière de parler. J’ai appris à
travailler avec des gens qui n’avaient
pas le même âge, ni le même cursus
scolaire, ce qui fut très formateur.
J’avais la chance d’avoir un bon
profil et à part mon premier travail,
je n’ai pas eu à chercher de nouvelles
opportunités car on me chassait.
Au bout de 12 ans plus ça allait,
plus je changeais de métiers et un
jour je n’ai pas réussi à me lever.
J’ai donc quitté mon emploi et j’ai
créé ma société. Je ne l’ai pas fait
comme il le fallait : je l’ai créé car
j’avais envie de faire de la couture
pour tout le monde. Je n’avais donc
pas ciblé la clientèle, et ça n’a pas
marché. Après quelques années, je
me suis rendue à la chambre des
métiers, où on m’a expliqué que
je n’avais pas monté mon projet
initial comme il fallait.
A ce moment-là il s’est dessiné
une évidence : je devais m’adresser
à des femmes comme moi. Celles
qui avaient le même parcours et à
qui j’allais offrir le petit plus que je
m’offrais quand j’étais salariée : la
création de mes tailleurs. Il y a eu
un petit contretemps : je me suis
cassé la jambe et suis resté alitée
pendant 2 ans. Cela m’a permis
de murir le projet, d’être au clair,
de trouver les bons professionnels,
les artisanes vraiment d’exception :
ma couturière et ma brodeuse qui
travaillent avec les techniques des
maisons de haute couture.
Le projet Trésya est né en 2004,
Trésya Couture a été créé en 2008
et Trésya en mars 2014 et enfin
l’ouverture d’un showroom sur
Paris dans les prochaines semaines.
Levée de fonds
Au départ j’avais prévu une vraie
levée de fonds avec un tour de table
et des actionnaires. Cependant
quand j’ai fait appel à certains
actionnaires ils m’ont dit qu’ils
préféraient donner sans pour
autant devenir actionnaire et ils
m’ont suggéré l’idée d’utiliser
une plateforme participative. J’ai
choisi la plateforme MyAnnona
20
car c’est la plateforme dédiée à
l’entrepreneuriat féminin et parce
que j’ai aimé l’image. Annona est la
déesse romaine de l’abondance. Elle
est représentée comme une femme
sur un bateau. Et je trouvais que
j’avais fait une belle traversée.
Depuis le 28 mars la plateforme est
ouverte et les gens commencent à
donner pour la levée de fonds et
pour ouvrir un beau showroom
à Paris au cœur du monde du sur
mesure qui va avec ma clientèle et
l’image que j’ai envie de donner.
Pour en savoir plus :
Tresyacouture.com/fr
Linkedin.com/in/tresyacouture
Twitter.com/Tresyacouture
Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
21
Sophie Floreani
Sophie Floreani est responsable de la Conduite du Changement au sein de la DSI de BNP
Paribas International Retail Banking. Née de parents italiens, elle a 2 enfants et parle 9 langues
. Elle se définit comme une femme ayant du caractère, persévérante et pour qui le relationnel
est fondamental.
Mon métier me plait parce que je permets aux personnes de mieux supporter, de mieux vivre
le changement et non pas de le subir. Et dans la société actuelle, avec toutes les disruptions
que nous vivons, savoir s’adapter est indispensable. J’ai le sentiment d’être utile aux autres.
Le changement, partie intégrante de mon parcours de vie
J’ai eu un parcours riche et atypique qui m’a permis d’avoir une carrière internationale et
d’apprendre 9 langues : faire de l’audit au Brésil, participer à la structuration de la « mission
Eurostar », enseigner le français à Houston, en Indonésie, au sultanat d’Oman au Moyen-
Orient, en Russie, diriger une école de Français pour Etrangers en France, mettre en place
l’harmonisation du concours international de l’ESCP, …
J’ai intégré BNP Paribas en mars 2006. J’ai commencé par m’occuper des séminaires
d’intégration au niveau de la France et de l’international, puis une mission de 3 ans en Ukraine
pour faire adhérer au changement que représente la mise  en place du modèle Multicanal.
C’est en 2011 que la DSI me donne mon poste actuel : j’entre au CODIR. On me confie la
responsabilité des enquêtes de satisfaction des utilisateurs de l’informatique pour nos filiales,
le rôle de relai RH, Formation, Communication et surtout je dois monter une cellule de
conduite du changement…
Je c’est Nous
Je dis « JE » mais le « JE » c’est mon équipe et moi. On fonctionne en mode start-up, les
membres de l’équipe sont autonomes et responsabilisés, et du coup très innovants. J’ai
toujours eu l’âme d’une entrepreneure !
Sophie Floreani – BNP Paribas International Retail Banking - DSI
22
Se recentrer sur l’humain
Depuis novembre 2011 je travaille
dans l’informatique. Le système
éducatif français nous apprend
souvent à nous concentrer sur
la performance et la course à
l’excellence, sur le rationnel, en
négligeant parfois l’émotionnel
et l’importance de se soucier de
son corps, ce qui fait de nous des
êtres humains complets. On est
des êtres humains ! Il ne faut pas
qu’on l’oublie et on doit capitaliser
sur cette force. Plus on capitalisera
dessus, plus on sera productif
et performant pour le bien
collectif. Mettre ses compétences
individuelles au service du collectif.
C’est du gagnant-gagnant. Mon
objectif est donc de montrer que la
productivité passe par le recentrage
par l’Humain et en repensant les
organisations.    Maintenant, on
le sait, la performance purement
financière, n’est plus un gage de
réussite.
Plus qu’un effet de mode, il y a
des exemples concrets de grandes
entreprises et d’institutions qui
sont devenues performantes, en
remettant la relation humaine au
coeur de leurs actions et process.
Pour mener à bien ce changement
mon équipe et moi-même avons 
mis en place des initiatives
innovantes.
Programme PEP’S
C’est un programme
d’accompagnement du changement
auprès des collaborateurs suite à
une réorganisation de notre I.T. Il
vise à développer la motivation et la
satisfaction des collaborateurs.
Il s’agit d’ateliers ou conférences
hebdomadaires ouverts à tous sur la
base du volontariat, une bulle d’air
dans la semaine,  durant lesquels
les collaborateurs découvrent
plusieurs outils directement
applicables au quotidien autour
de différents thèmes : nouveaux
modes de management, techniques
de créativité et d’innovation,
connaissance de soi et gestion de la
relation à l’autre, nouveaux enjeux
business. Les intervenants sont
variés à l’image des sujets proposés.
Nous avons organisé des séances
de sophrologie, de PNL et de
pleine conscience (Mindfulness).
Un ancien champion du monde
de ski de vitesse a parlé de la
gestion d’énergie pour être plus
performant et un expert en GTD
(Getting Things Done) a abordé
l’organisation du temps pour la
gestion de multiprojets sans stress.
Nous avons touché quasiment tous
les collaborateurs de la DSI qui
ont dit avoir découvert des outils
concrets qu’ils utilisent maintenant
et dont ils ne soupçonnaient pas la
puissance.
About You
Pour valoriser nos collaborateurs
tous les jeudis, un collaborateur
(de Paris, Rennes ou du Maroc) est
présenté à toute notre DSI. (Plus de
500 personnes). Portrait personnel
et professionnel, le collaborateur
choisit son template, ses questions.
L’objectif est de créer du lien, leur
permettre de se découvrir entre eux.
Vis mon job
Cette action de découverte permet
à un collaborateur de recevoir
un de ses collègues pendant une
demi-journée et de lui présenter
concrètement son travail. Ça leur
permet d’apprendre à se connaitre
et de comprendre l’utilité de
l’autre dans le groupe. Lors d’un «
Vis mon job » un collaborateur a
présenté son travail et notamment
un de ses problèmes récurrent. La
personne accueillie, de son regard
neuf lui a suggéré une solution qui
s’est avérée être efficace.  Le DSI,
patron du CODIR I.T. a fait son
« Vis mon job ». Il était ravi, son
invité avait été tiré au sort par mon
équipe parmi les volontaires. Il va
maintenant être accueilli par la
personne qu’il avait reçue.
Il y a une vraie utilité à tout ça :
cela montre une image différente
de l’IT super expert, qui sont
ouverts et innovants quand on leur
propose et qu’on leur laisse le choix
23
et c’est aussi une façon d’enlever la
pyramide hiérarchique même si elle
est toujours là.
0 slides…
En 2015, lors d’une convention
nous avons donné comme consigne
aux collaborateurs de réaliser des
présentations sans aucune slide. Ils
ont tous réalisé des films décalés
mais pertinents. C’était génial ! A
ce moment-là je me suis dit qu’ils
avaient compris quelque chose
: ils ont fait ce qu’ils n’auraient
jamais fait avant : communiquer
autrement.
Les réseaux sociaux
Je suis très active sur les réseaux
sociaux, en particulier sur Linkedin,
car ils permettent de s’enrichir
de nouvelles connaissances et
de partager des convictions ou
des initiatives dans lesquelles
on croit. C’est un puissant outil
d’échanges, d’information et de
communication. Cela fait partie
du relationnel dans notre société
actuelle et pour l’avenir.
Je suis d’ailleurs impliquée dans
un collectif de bénévoles pour
l’emploi créé par Alban Jarry, 
#i4emploi représentant plus
d’1 Million de followers. Nous
accompagnons depuis 7 mois plus
de 270 demandeurs d’emplois
dans leur recherche sur Twitter. Le
collectif est d’ailleurs nominé dans
la catégorie « Transformation de
l‘économie traditionnelle » pour
le prix « du Capital Humain » des
ACSEL’R Awards 2016, qui sera
décerné ce lundi 2 mai.
Un livre blanc et un M.B.A.
Le comité scientifique de l’Ecole
Polytechnique d’Assurances (EPA)
présidé par Luc Ferry auquel
j’ai participé a permis d’aboutir
à la rédaction d’un livre blanc
«  L’Humain… dans le numérique
et le Big Data » ainsi que la création
d’un M.B.A. en Data Science en
assurance  en partenariat avec
Télécom ParisTech.
L’idée de ce M.B.A. est de former
des Data Scientists éclairés qui
ne soient pas que des supers
experts en DataScience, mais
aussi professionnels qui remettent
l’humain au centre. Ce M.B.A.
donne un enseignement sur
la stratégie, sur l’éthique et le
management. C’est naturellement
sur la partie enseignement
managériale, qui dure 8 jours,
que je suis intervenue. Je l’ai
construit, pensé et je suis ensuite
allée chercher les bonnes personnes
pour l’enseigner. L’idée c’est de
leur enseigner l’humain dans le
management (on est vraiment
dans l’innovation managériale)
et les nouveaux modes
d’organisation. C’est leur faire
vivre des pratiques d’intelligence
collective, leur apprendre un mode
de fonctionnement collaboratif. 
C’est la manière dont nous avons
d’ailleurs fonctionné au sein de ce
Comité Scientifique qui compte
une quarantaine de personnes
volontaires. Si nous avons pu créer
ce MBA, c’est parce que nous avons
mis nos égos de côté et apporté nos
compétences individuelles au profit
du collectif.
Le mot de la fin
« Tout seul on va plus vite, ensemble
on va plus loin »
Proverbe africain
Pour en savoir plus :
Linkedin.com/in/sophf
Twitter.com/sophiefloreani
24
Sophie Floreani – BNP Paribas International Retail Banking - DSI
25
Martin Garanger
Bonjour, je suis Martin Garanger, je suis tireur et photographe.
L’Atelier Martin Garanger est né le 2 janvier 2001. C’est un atelier
d’impression numérique jet d’encre à pigment micro encapsulé.
J’ai commencé avec la première imprimante au monde qui utilisait des encres à
pigments : une Epson qui passait des rouleaux d’1m12 de large. Contrairement
aux précédentes imprimantes qui utilisaient des encres à colorant, elle permettait,
de par sa qualité, la réalisation de tirages non seulement d’exposition mais aussi
de collection. Cela vient, notamment, du fait que, les encres à pigment résistent
longtemps aux UV. On peut également choisir le support d’impression comme
des papiers pur coton sans acide, des papiers d’art mat ou brillant, des supports
plus ou moins blancs, plus ou moins texturés, etc. On fait des tirages qui par la
nature du papier ne vont pas jaunir : ils ont une durée de vie de plus ou moins
cent ans.
Martin Garanger – Atelier Martin Garanger (Fondateur et CEO)
Comment es-tu devenu
tireur ?
Je suis tombé dans la photo quand
j’étais petit : mon père (NDLR :
Marc Garanger) était photographe.
Aujourd’hui il est à la retraite et ne
produit plus de photos mais il a
beaucoup voyagé et a notamment
travaillé sur les campagnes de pub
pour Kodak.  Etant jeune je me
suis posé la question d’être, comme
mon père, auteur photographe
mais je n’ai pas réussi à trouver mon
style et mon book était rempli de
photos hétéroclites. Finalement j’ai
travaillé dans l’audiovisuel en régie,
casting et tournages.
En 1999 j’ai travaillé pour l’agence
Paysages fondée par Daniel
Quesney un ancien photographe
de l’Observatoire Photographique
26
du Paysage. Il avait besoin d’une
personne pour numériser les
tirages photos fournis par les
photographes de l’agence. C’était
des tirages 18×24 ou 24×30 cm
que je numérisais sur un scanner
à plat Epson ou Agfa à 600 DPI.
Cela générait des fichiers de taille
importante mais permettait de
conserver une image de très haute
qualité afin de répondre à toutes
les demandes et même au-delà. A
l’automne 2000 Daniel Quesney
me suggère d’aller au salon de
la photo. Epson y présente sa
première imprimante au monde
avec des encres à pigments :  une
révolution dans le milieu. Fort de
mon expérience auprès de l’agence
Paysage et d’une somme perçue
d’un héritage, j’en ai acheté une et
me suis inscrit à la Chambre des
Métiers en tant qu’artisan.
Je me suis lancé dans ma toute
nouvelle entreprise en tant que
tireur avec mes quelques bases,
directement sans avoir été tireur
chez un confrère ce qui est
généralement le cursus du métier.
J’ai quand même fait un stage chez
Picto et chez Georges Fèvre (NDLR
: tireur de Robert Doisneau et
Henri Cartier Bresson) avec qui j’ai
énormément appris.
Dans le domaine de la couleur
j’étais un novice mais j’ai appris
rapidement. Ainsi, les premières
années de mon atelier, j’ai travaillé
en collaboration avec le tireur
Philippe Guilvard qui était à
l’époque le grand spécialiste du
tirage d’après négatif couleur à
l’agrandisseur. J’ai beaucoup appris
à ses côtés ; et de son côté cela lui
permettait de pouvoir proposer
à ses clients des impressions jet
d’encres.
Mon métier c’est d’accompagner
un photographe, un peintre ou
un plasticien en intervenant sur
les aspects techniques de choix
d’agrandissements, du papier,
de la définition, de la retouche,
de la chromie, de la densité, du
contraste, etc. Je suis très à l’aise
et j’y prends un vrai plaisir ! Ça
ne m’empêche pas à mes heures
de taquiner l’obturateur mais mon
métier c’est le tirage, ça l’est depuis
plus de 15 an.
Tireur d’exception
J’ai la chance de pouvoir travailler
avec de grands photographes qui
viennent de loin pour que ce soit
moi qui tire leurs photos. Je pense
notamment à Stefanie Dworkin
qui prend son billet d’avion de
New-York pour faire ses tirages
ici avec moi et qui repart avec ses
tirages sous le bras. En 2015 Henri
Clément, un ami photographe de
mon père, m’invite au vernissage
de son exposition de photos
lenticulaires. Alors qu’il était avec
un de ses amis, il me présente en
lui disant « Je te présente Martin
Garanger un des meilleurs tireurs
d’impression numérique ».
J’apporte un grand investissement à
chacun de mes clients, qu’ils soient
grands artistes ou amateurs éclairés.
Leurs retours me permettent
d’évoluer dans ma pratique, et leur
reconnaissance alimente ma passion
pour mon métier. Participer par
mon travail à l’immortalisation des
œuvres de ces photographes est un
grand privilège.
Mon plus grand tirage
Il fait 10m de haut sur 18m de large.
Il est composé de 68 laizes qui font
chacune 1m de large sur 2m40 de
haut (taille des plaques réalisées par
le maçon). Pour réaliser ce tirage, il
m’a fallu 1 mois de travail, 3 jeux
complets de cartouches d’encre et
l’impression de 100 laizes et pour
avoir les 68 bonnes.
Il s’agit d’un tirage accroché sur
un plafond en biais du Nouveau
Théâtre LE MANEGE à MONS
en Belgique. Il se trouve au dos
des gradins en biais et devant
il y a une verrière composée de
vitres transparentes intercalées
de vitres dépolies. La photo
que j’ai tirée est une création de
l’association Caravana Obscura
fondée par Christine Felten et
de Véronique Massinger. Pour la
réalisation de cette photo elles
ont transformé une caravane en
27
appareil photographique à sténopé
géant. (NDLR : Un appareil
photographique à sténopé se
présente sous la forme d’une boîte
dont l’une des faces est percée
d’un trou minuscule qui laisse
entrer la lumière. Sur la surface
opposée à cette ouverture vient se
former l’image inversée de la réalité
extérieure, que l’on peut capturer
sur un support photosensible, tel
que du papier photographique.
Comme l’œil, le sténopé capture
des images inversées du visible.
(Voir article Wikipédia).
Elles ont utilisé du papier inversible
couleur Cibachrome (NDLR :
L’Ilfochrome, connu aussi sous
le nom de Cibachrome, est un
procédé de tirage photographique
couleur depuis un film inversible,
souvent sous la forme d’une
diapositive couleur, produit par
Ilford jusqu’en 2013) d’1m de haut
sur 1m80 de large collé au fond
de la caravane pour « imprimer »
l’image. La durée de prise de vue est
très longue : 1 journée, on voit ainsi
par étape le déplacement du soleil.
Cette photo représente un paysage
avec une grande partie de ciel bleu
très dégradé qui s’assombrit dans les
coins. Ce travail photographique
nécessite un gros travail de repérage
et de préparation…
Pour que je puisse tirer la photo, il
a fallu numériser l’image originale
chez Picto Front de Seine où il y a
un scanner géant. Seulement c’est
un scanner fait pour la réduction
et non pas pour l’agrandissement,
par exemple pour les peintres qui
font des grands formats et qui ont
besoin de visuels plus petits pour
l’édition. On a donc scanné avec
la plus haute résolution possible et
il y a eu un fort ré-échantillonnage
à l’impression pour conserver un
rendu fidèle à la photo initiale.
Ma plus grande crainte concernait
le ciel qui était composé d’un très
grand nombre de laizes car lors de
l’impression il m’était impossible
d’avoir suffisamment de recul
pour savoir si le dégradé allait être
fluide d’une laize à l’autre pour un
assemblage final harmonieux et
fidèle. Je suis allé à l’inauguration
du théâtre et c’était magnifique.
Illustration du fonctionnement schématique d’un sténopé.
28
Le tirage le plus long
Il fait 38m de long sur 20cm
de haut en 1 seule laize que
j’ai imprimé en 2 exemplaires.
L’impression a duré 3h mais il a
fallu rester attentif tout le long
pour vérifier que le papier restait
bien droit malgré son changement
de volume dû à l’encrage. La
finition a pris beaucoup de temps
également : un rouleau fait 1m20
de largeur et 40m de longueur, il a
donc fallu réaliser les découpes sur
chaque longueur des 2 exemplaires,
soit 4x38m à raison d’1m par 1m.
C’est la première fois que j’utilisais
un rouleau dans son intégralité
pour un seul tirage. Il s’agissait
d’un papier mat de 115g qui avait
besoin d’être fin pour qu’une fois
roulé l’objet ne soit pas trop épais.
La photo finale se regarde de gauche
à droite et se manipule comme une
Torah mais en image : on la fait
défiler avec des manettes de gauche
à droite C’est un ami photographe
qui a offert cet objet à ses parents
qui fêtaient leurs 50 ans de mariage
et c’était toute leur vie en photos
sur 38mètres de long.
Le tirage le plus petit
Il est à peine plus grand qu’un
timbre-poste et fait 2cm sur 3cm.
C’est une artiste qui avait fixé ses
tirages au mur avec une loupe
à côté des tirages pour que le
spectateur puis les regarder. Le
résultat m’a impressionné : avec
la même imprimante que pour
mon tirage de 38m de long, j’ai pu
réaliser ceux de 2cm sur 3cm et cela
reste des photos de qualité et non
pas des points d’encres qui donnent
un semblant d’image.
Être Fils de…
Quand j’étais plus jeune c’était plus
difficile pour moi de trouver ma
place. Mais ce qui est vraiment bien
dans le fait d’être devenu tireur c’est
que je peux travailler avec mon père
en apportant ma valeur ajoutée.
Nous sommes complémentaires  :
Portrait de Martin Garanger dans son atelier de Montreuil.
29
Portrait de Martin Garanger dans son atelier de Montreuil.
lui produit des photos et moi je
peux les imprimer, les agrandir.
Elles sont déjà magnifiques par son
travail d’auteur et moi je peux leur
donner vie en les matérialisant.
Le mot de la fin
Je pense à l’avenir Depuis quelques
années je ne suis plus inquiet pour
l’avenirdemonatelieret,Inch’allah,
pourvu que ça dure ! Ma liberté de
travail me plaît et j’espère pouvoir
continuer de faire des tirages à mon
propre compte, car je sais que c’est
ce qui plait aussi à mes clients. Et ça
c’est très important.
Pour en savoir plus :
Martingaranger.com
Facebook.com/martin.garanger
30
Thierry Cardot
Bonjour, je suis Thierry Cardot, le fondateur de l’Atelier Aubépine. C’est
un atelier d’étude et de conception paysagère qui aménage des lieux privés
ou public. Mon métier est la valorisation des lieux de vie ou de passage. Je
considère l’histoire du lieu, des gens qui l’ont traversé ou qui le traversent
actuellement ainsi que son environnement afin de construire une nouvelle
histoire ou de continuer cette histoire commune.
Pourquoi ce nom de
l’Atelier Aubépine ?
L’aubépine, c’est cette fameuse
plante qui a été l’une des plus
récalcitrantes que j’ai rencontré lors
de ma jeunesse, celle que je voulais
absolument faire disparaitre du fond
du jardin parce qu’elle piquait et elle
m’a résisté. En 2009, 20 ans après,
c’est devenu l’Atelier Aubépine,
Aubépine Crataegus.
Mes clients
L’Atelier Aubépine travaille avec
tous, il peut s’agir d’entreprises,
d’institutionspubliques,d’associations,
de particuliers, etc. Je peux œuvrer
sur des propriétés urbaines (hôtels
particuliers, terrasses, copropriétés),
mais également sur des propriétés
domaniales ou historiques de
province ayant un passé familial et/
ou patrimonial.
Le premier projet de l’Atelier
Aubépine a été l’étude et
l’aménagement du couvent
Dominicain de l’Annonciation
(222 rue du Faubourg Saint
Honoré) à Paris. L’architecte Jean-
Marie Dutilleul venait de rénover
leur lieu et ils m’ont demandé
d’imaginer quelle suite donner à
ce cloître qui avait été chamboulé
par les réaménagements. Je leur ai
Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
31
conçu un nouveau lieu dans lequel
ils peuvent se retrouver en lien avec
leur propre démarche personnelle
et spirituelle.
Vous pouvez voir quelques un de
mes travaux sur le site internet de
l’Atelier Aubépine et notamment le
cloîtreducouventdel’Annonciation
qui fut mon premier projet et qui
peut être visité sur demande. J’ai
un projet en cours à la Maison de
la Pierre à coté de Chantilly avec
une association historique liée à
l’univers des carrières, ainsi que
la réalisation des jardins ouverts
au public de l’église Saint Pierre
de Montmartre. Pour ce dernier
projet, une recherche de mécènes
est en cours par l’association.
Comment je travaille ?
Il s’agit d’une rencontre à 3. Il y
a tout d’abord mon client, que je
préfère appeler partenaire, avec ses
désirs et envies qu’il projette. Il y a
également le lieu, qui a sa propre
histoire et enfin le paysagiste et sa
passion, son regard. Le paysagiste
réalise une histoire commune entre
ces 3 personnes.
Lors des premières rencontres
nous échangeons sur l’identité du
lieu : est-ce pour recevoir, y jouer,
méditer ; sur les personnes qui y
vivent actuellement, qui y sont
passés et même qui doivent y venir.
En fait le paysagiste travaille en
fonction du lieu, des gens et de ce
qu’il va en ressentir, il ne donne pas
son propre caractère. C’est toujours
l’approche du lieu et des gens qui
le guide dans ces réflexions et dans
la conception des propositions de
projet, en tout cas c’est ainsi que je
travaille.
Après cela je vais pouvoir faire des
propositions. Elles ne sont jamais
fixes puisqu’il s’agit d’un dialogue,
qui permet une évolution de la
proposition au fur et à mesure des
échanges. Adapter le projet permet
au propriétaire de se projeter et de
s’investir dans son lieu.
Nous validons ensemble chacune
des étapes de la réalisation jusqu’à
la réception des travaux. Cela peut
être un travail sur plusieurs années
quand le cahier des charges est
important et qu’il fluctue. C’est le
partenaire qui fixe le programme et
le paysagiste le suit ;
Cela peut-être aussi une démarche
à court terme. Par exemple en 2015
l’évêché de Pontoise a souhaité
que je les assiste à l’organisation
de l’événement « Rendez-vous
aux jardins » organisé sur un
week-end de juin par la DRAC
(Direction Régionale des Affaires
Culturelles). Dans le parc de
l’évêché, sur 1 hectare ½ environ,
il y avait différents artistes qui
venaient exposer et j’ai réalisé la
scénographie éphémère.
J’ai également une démarche de
conseil ou pédagogique : j’enseigne
auprès de différents publics : jeunes
et moins jeunes, en continuité
ou reconversion professionnelle,
agents de maitrise et jardiniers
de collectivités territoriales sur
des sujets liés à la biodiversité, le
fleurissement durable, la gestion
différenciée des espaces verts…
Artiste ?
D’abord j’ai eu une approche
technique, de jardinier, que j’ai fait
évoluer au fur et à mesure de mes
expériences et formation. Mais la
technique seule ne suffit pas pour
créer quelque chose d’unique et
adapté pour chaque projet.
Un jour je me suis posé la
question : que fait un paysagiste ?
L’architecture est un art et je pense
que l’architecture des jardins l’est
aussi. Les jardins, quels que soient
leur taille, leur fonction sont
de véritables lieux d’expression
artistique. L’école de Barbizon est
un mouvement de peintres qui
s’échappaient dans la nature pour
la peindre. C’était un mouvement
exceptionnel, enfin de mon regard.
Cela m’a amené à peindre, à
dessiner et même à photographier
la nature. Le paysagiste s’appuie
32
sur la nature pour créer un tableau,
un théâtre, un mouvement naturel
ou sophistiqué en tenant compte
de l’histoire du propriétaire, celle
du lieu, des envies et des besoins
des personnes qui y viennent et y
viendront.
L’avenir
Le futur de l’Atelier Aubépine
c’est d’ouvrir son regard tout en
continuant son travail sur des
lieux précieux botaniquement, qui
sont un peu des trésors paysagers,
tels des bijoux dans leurs écrins.
L’Atelier Aubépine va continuer
dans cette direction et va s’ouvrir
en tant «qu’ aménageurs social ».
La question de l’aménageur urbain
est de se dire : « mais qui est
l’homme dans la ville ? » et « quel
est le paysage dans la ville ? ».
La ville devient le temple de la
préservation de la biodiversité.
Dans les champs, aujourd’hui,
les insectes sont en train de
mourir, les abeilles sont en train
de disparaitre elles ont de plus en
plus de mal à retourner à la ruche,
a se géolocaliser elles-mêmes et
meurent. On se rend compte que
les insectes deviennent de plus en
plus protégés par la ville. Par la
mise en place du protocole « Zéro
phyto » dans les espaces verts, des
ruches sont installées au cœur des
villes. Ce que l’on appelle le fameux
miel béton qui d’un point de vue
énergétique et gustatif est très bon.
Les insectes sont en train de revenir
en ville, coloniser la ville, parce
que nos plantations, la réalisation
de microcosmes tels que des
squares des parcs dans la ville, des
zones tampons vertes dans la ville,
plus ces allées, créent un maillage
organique « vert », et devient donc
un temple de la préservation de la
biodiversité.
On a toujours cette image un peu
de Pagnol, de la petite maison au
bord du champ. Mais aujourd’hui
la petite maison au bord du champ
utilise beaucoup d’insecticides,
alors que dans la ville moins. Tout
n’est pas parfait, loin de là, mais
il y une véritable réflexion sur
la place de la nature dans notre
environnement citadin bétonné et
sur notre place à nous.
L’Atelier Aubépine c’est une
histoire de passion depuis l’âge de
14 ans. C’est ma rencontre avec
la nature. Jeune, je partais avec
mon vélo et j’allais me promener,
je regardais ce qui m’entourait. Le
fameux fossé du bord de la route, la
plupart des gens le regarde à peine,
et pourtant il fourmille de vie, de
nuance de couleur, de forme et de
texture. Cela m’a toujours intrigué,
je le faisais de façon insouciante à
l’époque mais ça a construit mon
regard d’aujourd’hui.
Pour en savoir plus :
Atelieraubepine.com
Linkedin.com/in/thierry-cardot-76775237
Twitter.com/atelieraubepine
Facebook.com/atelier.aubepine
Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
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Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
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Geneviève Bouché
Bonjour, je m’appelle Geneviève Bouché, je suis économiste, futurologue
et ingénieur dans le domaine des Télécoms. J’ai un cabinet de conseils qui
fait du management de l’innovation : il aide les investisseurs et les start-ups
à investir en prenant directement les orientations qui préparent le futur. J’ai
décidé de redonner vie au métier de futurologue parce que j’estime que nous
traversons une période très mouvante où les futurologues pourraient aider
par leurs savoirs faire.
Futurologue c’est quoi ?
Un futurologue c’est une personne
qui essaie de comprendre le sens
de l’histoire en s’intéressant au
passé très récent et très lointain.
Elle essaie de comprendre le sens
de l’histoire afin de déterminer
à quoi ressemblera le futur…
Par exemple le Brexit qui vient
d’avoir lieu la semaine dernière,
c’est un évènement fort, mais quand
on regarde le sens de l’histoire,
toutes les conséquences qui vont en
découler aurait dû, de toute façon
avoir lieu, et étaient prévisibles.
C’est un exemple typique de ce que
savent faire les futurologues.
J’ai appris la futurologie en
côtoyant les commissaires au plan
de l’équipe de Charles de Gaulle,
qui étaient encore en fonction à la
fin des années 70, et j’ai soutenu
ma thèse avec 2 d’entre eux (dont
Simon Nora). Un de nos chargés
de TD a également fait parler
de lui : Jacques Attali. Ces gens
avaient des méthodes de travail, des
visions et surtout une éthique que
je trouve extrêmement intéressante
à mettre à disposition de tous les
gens qui ont envie de réfléchir et
ensuite d’agir dans un changement.
Pas seulement sur le plan de
l’environnement écologique mais
sur le plan de l’environnement
Geneviève Bouché – Futurologue
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social et sur le plan économique
parce que ces 3 environnements
sont interdépendants.
Aujourd’hui mon cabinet fait du
management de l’innovation pour
les investisseurs qui veulent orienter
leur portefeuille d’investissement
en s’installant dans le sens de
l’histoire parce qu’ils investissent
à 5 ou 10 ans et même beaucoup
plus loin. Les start-ups sont pensées
pour le monde de dans 20ans.
Dans les bibliothèques on pense à
30 ou 40 ans et même au-delà. Je
mets également mon savoir-faire
à disposition de partis politique,
d’ONG, de Think tank, etc.
La politique ?
Pour la présidentielle de 2012, j’ai
réaliséunepublicationquis’appelait
« Mieux que la réindustrialisation
» et je l’ai adressée à tous les
candidats. Cette publication qui
était en créative commons a été
téléchargée plus de 2700 fois. Je me
suis rendue compte que ce que j’y
disais avait finalement été entendu,
comme les feuilles de thé dans
l’eau : ça avait infusé.
Pour la présidentielle de 2017, à
priori, je vais faire la même chose
mais dans l’autre sens : je ne vais
pas m’adresser aux candidats,
mais aux électeurs. J’ai envie de
leur dire d’arrêter de détester la
classe politique. Il me semble
plus constructif de formuler des
demandes, d’accompagner les
élus jusqu’à la réalisation, mais
également de tirer ensemble
les leçons des échecs pour les
prochaines tentatives.
Combien de futurologues en
France ?
On m’a dit un jour que nous étions
4. Je n’en connais qu’un. Si nous
sommes aussi peu en France, c’est
parce que notre métier est vraiment
peu connu. Quand on m’a donné
mon diplôme, on m’a quand même
dit qu’il y avait peu de chance que
je puisse gagner ma vie avec…
C’est vrai que dans mes premiers
jobs, je m’en suis servi sans m’en
rendre compte et dans tous les cas
de façon non-officielle. C’est en
avançant en âge, en voyant qu’on
s’enfonçait dans ce que l’on a appelé
improprement « la crise », qui n’est
pas une crise mais un changement
de civilisation,  que j’ai commencé
à prendre conscience que ce que
je savais faire pouvais beaucoup
apporter. Je m’implique dans une
structure qui a maintenant 4 ans :
La Société Française de Prospective
où l’on est 2 futurologues Thierry
Gaudin et moi. Sinon tous les
autres membres (une quarantaine)
sont des prospectivistes.
La différence entre
la prospective et la
futurologie ?
La prospective c’est pour 3 ans, 10
ans ; les prospectivistes travaillent
sur des mécanismes de différentes
scénarios : extrêmes (« Tout le
monde aime mon produit » / «
Personne n’aime mon produit »),
probables, souhaitables. On peut
ensuite dire quelle est la stratégie
qu’il faut avoir aujourd’hui pour
aller vers l’accomplissement du
scénario que l’on souhaite voir se
réaliser.
La futurologie, va plutôt s’attacher
aux évènements passés et à
leurs incidences aujourd’hui. Le
futurologue dit « oui étant donné
que là on a fait des coups foireux,
cacher la poussière sous le tapis,…
on sait, de façon certaine, que
ça va remonter à la surface… »
Le Brexit, c’est l’Angleterre qui
a au moins 3 identités d’attache
fortes mais qui ne sont pas
compatibles. Total, à tout vouloir
ils se retrouvent avec rien. Et ça va
être compliqué pour eux et pour les
problèmes qu’ils créent aux autres,
ça c’est typiquement un travail de
futurologue.
Est-ce que Tchernobyl, dont on
vient de fêter les 30 ans, peut
rentrer dans le cadre d’un job de
Futurologue ?
Le principe de la futurologie c’est
de s’affranchir de ce que l’on
appelle « la petite histoire » c’est-
à-dire qu’en fait, dans le cosmos,
tout change sans arrêt et ce qui doit
arriver, arrive. Cela peut se faire soit
à travers des processus lents que l’on
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arrive à dessiner quand justement
on s’intéresse au temps long soit
avec des évènements brutaux
difficilement prévisibles mais qui
finalement devaient arriver.
Tchernobylc’était,malheureusement,
dans le champ du possible. Il se
trouve que c’est arrivé comme ça,
du coup la déclinaison immédiate
va avoir des effets spécifiques. Je
ne sais pas si un futurologue aurait
pu le prévoir précisément, mais cet
évènement et ses conséquences nous
ont permis d’apprendre beaucoup,
non pas sur les aspects techniques
d’une centrale, mais sur la gestion
d’une crise et de l’impact que cela
a pu avoir sur chacun à différents
degré et à différentes temporalités.
De par notre développement, nous
sommes devenus énergivores, et
donclapistedunucléaireabeaucoup
séduit même si on savait que c’était
très dangereux.  Pour l’anecdote,
un des hommes qui travaillait avec
Marie Curie, était fasciné par cette
pierre fluorescente. Il la mettait
même dans sa chemise pour la
présenter lors de soirées ! Comme
pour beaucoup d’innovations et
de découvertes, on trouve souvent
au début que c’est magnifique,
révolutionnaire, etc. Et avec le
temps et un approfondissement
de nos connaissances on se rend
compte parfois des dangers terribles
que nous ne soupçonnions pas ou
de nouvelles utilisations possibles
dans des domaines tout autre que
celui au départ.
Ce n’est pas l’histoire de l’énergie
nucléaire qui m’intéresse, c’est
plutôt toute l’histoire de la
maitrise de l’énergie qui me semble
intéressante.
Si on regarde attentivement ce
qui se passe dans ce domaine,
on s’aperçoit que l’on revient
à des choses beaucoup moins
spectaculaires, et en même temps,
beaucoup plus proche de ce que
la nature fait, depuis toujours.
C’est-à-dire qu’on admet qu’un
corps vivant est à la fois producteur
et consommateur d’un certain
nombre de chose et donc l’homme
organise la production et la
consommation. Ça c’est tout à fait
fascinant. Sans vouloir raconter
mon dernier livre Changeons de
civilisation mais ce mécanisme-là
est en train de s’opérer dans tout ce
qui concerne l’information d’une
façon tout à fait symétrique.
Or l’information pour l’homme
c’est excessivement important,
Manger boire et dormir ce n’est pas
suffisant, il lui faut de l’information.
Il devient à la fois producteur et
consommateur d’information,
comme pour l’énergie. On est en
train de basculer de la loi du plus
fort à celle du plus adaptable.
Et c’est là que notre civilisation est
en train de faire un changement
phénoménal parce qu’on change
vraiment le disque dur. Le système
de base est en train de basculer. Et
ce qui est extraordinaire, c’est que
ce changement de civilisation n’est
pas porté par un pays ou une classe
sociale qui devient dominante mais
il est porté par les générations Y et
toutes celles qui sont derrière et qui
le font avec une force absolument
magnifique parce qu’elles ont peur
que la planète périclite.
Geneviève Bouché – Futurologue
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Que peut-on dire sur ce grand
changement ?
Ce qui est très anxiogène, là je
vous livre mon point de vue de
futurologue, c’est que quand
on décortique la caractéristique
du changement de civilisation
qu’on est en train de vivre par
rapport à d’autres changement de
civilisations de références comme
par exemple la chute de Rome, la
révolution de 1789, la guerre de
sécession aux Etats Unis, là c’est
un changement de civilisation
d’une amplitude comparable à ce
que nos ancêtres ont connu quand
ils se sont sédentarisés. Ils ont
également inventés ces 2 concepts
avec lesquels nous sommes toujours
empêtrés : la propriété et le produit
de la propriété, la rente.
C’est un changement de civilisation
excessivement complexe et
profond qui s’annonce. Mais le
problème, c’est que nous n’avons
pas le même délai que nos ainés.
Ils se sont sédentarisés étapes par
étapes, zone géographique par
zone géographique et sur plusieurs
milliers d’années. Nous, nous
sommesquandmêmetrèsbousculés
par les problèmes climatiques,
démographiques, économiques,
etc.  Les études prédisent une
population mondiale à 9 milliards
en 2050, la planète n’est pas faite
pour supporter autant, à 7 milliards
elle est déjà à la peine.
Le mot de la fin
Les hommes sont maîtres de leur
destin, ils peuvent faire des choses
effroyables comme des choses
extraordinaires. Mais dans tous
les cas, faire le travail de réflexion
sur notre avenir souhaitable,
qui ne sera que la résultante du
sens de l’histoire et de la suite
que nous voulons lui donner, est
indispensable. Le savoir-faire des
futurologues est encore présent en
France, il faut le faire connaitre.
Que les gens se l’approprient et
fassent des merveilles avec.
Pour en savoir plus :
Linkedin.com/in/gbouche
Lire en ligne l’édition du livre
« Mieux que la réindustrialisation »
Le site de la Société Française de
Prospective :
societefrancaisedeprospective.fr
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Geneviève Bouché – Futurologue
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Valérie Anne
d’AsnièresJe suis Valérie Anne d’Asnières. La famille est importante pour moi, elle
m’inspire beaucoup. Je suis issue d’une vieille famille normande d’Asnières
en Bessin, pays des âniers. Je tiens de ma famille mon sens de l’engagement
: mon grand-père était un des agents de renseignements d’Omaha Beach.
Pour moi, la Liberté ça a un sens, un prix et je suis très fière de ça. Je suis
une femme qui ne renonce jamais et je sais ce que veut dire l’engagement.
Mon projet est né dans ma cuisine et j’en suis fière. C’est un clin d’œil à ma
grand-mère parisienne qui était une cuisinière hors pair.
La genèse
J’ai fait des études de pharmacie
et j’ai travaillé plus de 20 ans
dans la promotion et la vente des
médicaments, mais j’ai fait un burn
out. Il a donc fallu que je pense
différemment et que je revoie ma
situation professionnelle : j’ai pris
des cours de décoration intérieure,
option ameublement, toujours en
rapport avec la matière et je suis
devenue artiste peintre plasticienne
spécialisée en art animalier.
Un jour un de mes fils m’a demandé
au petit déjeuner un chocolat
chaud mais la boite qui était
ouverte au fond du placard était
périmée depuis très longtemps…
Je ne pouvais pas lui donner, mais
je trouvais dommage de jeter ce
chocolat. Je me suis dit que ce
serait vraiment drôle de m’en servir
pour créer une nouvelle matière et
c’est de là que tout est parti. Après
ça a fait boule de neige : j’ai rédigé
Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
40
un brevet, et avant son dépôt je
me suis fait accompagner pour
créer ma première société « Cœur
de Couleur » et une marque de
peinture dans le domaine des loisirs
créatifs : « HADOINIE ».
Je travaille sur la valorisation
des déchets et des détritus
alimentaires. J’ai élaboré et mis
au point des matériaux à base de
pigments d’origine alimentaire
dans le domaine de la décoration
(peinture, vernis, enduits et encres)
ainsi qu’en cosmétique (vernis à
ongles, teinture, soins capillaire et
poudre maquillante).
Comment trouves-tu tes
matières premières ?
Je fais du « sourcing ». Certes, je
pourrai prendre une poubelle,
la trier, la valoriser, mais il est
plus judicieux de travailler par
étapes. Ainsi je travaille d’abord
sur des sous-produits. Je suis
en contact avec différentes
plateformes de valorisation des
déchets, d’aliments invendus telles
que Phenix, Eqosphere, Bien
Manger… Ça peut être aussi des
industriels de l’agro-alimentaire
qui font de la transformation ou
des collaborations comme avec
l’université de Nanterre avec
laquelle je vais travailler sur 3
résidus de produits :
  - Le pain
  - Les peaux d’oranges issus des
distributeurs de jus d’orange frais,
  - Et le café.
Je travaille avec des passionnés de
la matière. Ça va du professeur
enseignant, chercheur des mines
en passant par des architectes, des
designers, des entreprises comme
la mienne. On réfléchit comment
améliorer la gestion des déchets,
l’amélioration de la santé en
combattant la pollution due à ces
déchets.
J’ai envie de participer à la création
de nouvelles valeurs dans ces filières.
Par exemple j’aimerai rencontrer
Ladurée ou Pierre Hermé et leur
proposer une collaboration qui leur
apporte une valeur ajoutée dans
leur RSE. Comme moi ils sont en
recherche constante, de nouvelles
saveurs, couleur matière, à travers la
dégustation. La différence c’est que
je m’arrête avant la dégustation. Je
prends l’exemple de mon chocolat
périmé  qui a une seconde vie sous
la forme de peinture, pourquoi les
restes de macaron ne pourraient-il
pas devenir complètement autre
chose à leur tour ? On pourrait
travailler ensemble et créer une
encre ou un vernis à ongle à base
de macaron.
Mon projet permet un début de
solution par l’économie circulaire
: j’utilise  nos déchets pour les
transformer et les rendre utiles.
Mon projet, c’est tout un tissu
Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
41
économique, j’ai besoin de
différents corps de métiers, je suis
comme un chef d’orchestre, je veux
faire travailler beaucoup de monde
à chaque étape de mon innovation.
C’est ça qui est intéressant.
Lancement de ma première
unité de production
Actuellement, après plus d’un an
et demi de réflexion, je suis dans la
phase de création de ma première
usine. Je suis très bien entourée et
soutenue. Il ne me manque plus
que des aides financières que je vais
avoir bientôt via l’État,  je suis donc
très contente.
A la rentrée je vais faire le point
avec Paris Ouest la Défense qui
me soutient, l’Ecole des Arts et de
l’Image de Rueil Malmaison, plus
tous les acteurs qui m’entourent,
puis commencer à chercher des
locaux, estimer le budget exact et
rencontrer des investisseurs.
Positionnement
des grandes maisons
cosmétiques
par rapport à toi ?
J’ai des retours très positifs ! J’ai
passé plusieurs concours et il y’en
a un dans lequel je suis arrivé 5ème
sur 70, j’étais le petit outsider
face aux grands. La lauréate a
travaillé sur la génétique des
plantes pendant des années avec
toute une équipe derrière elle ; et
je suis vraiment ravie d’être arrivée
5ème et d’avoir pu pitcher devant
les grands noms de la cosmétique.
La Cosmetic Valley m’a dit que
mon intervention avait beaucoup
intéressé et suscité beaucoup de
questions.
Pour mes projets dans la cosmétique
j’ai dû travailler sur la question
de la qualité, de la traçabilité des
produits sans risques d’allergie : les
Safety Agrements.
J’ai donc proposé aux industriels
de l’agro-alimentaire d’ajouter à
leur batterie de tests toxicologiques
et bactériologiques déjà existante
certaines analyses leur permettant
d’avoir le label Safety Agreements
pour les produits qui seront ensuite
réutilisés. Les industriels de la
cosmétique trouvent ça génial, car
ça augmente la qualité, la sécurité
et la traçabilité. Le coût de ces
nouveaux tests n’est pas très élevé et
cela permet par la suite de travailler
avec les « déchets » agro-alimentaire
devenus des matières premières
sûres.
Les consommateurs sont de de
plus en plus éclairés et exigeants, ils
veulent de l’innovation du Safety,
du bio, ils veulent tout. J’essaye
de répondre à leur demande
en leur proposant des produits
différents dans leur conception. 
Cette gestion optimisée de nos
ressources est plus respectueuse de
l’environnement, et les produits
conçus sont d’excellente qualité.
Les streets artists
Je me lance dans la cosmétique,
mais je n’oublie mes autres projets
! J’attache la même exigence de
qualité à tous mes produits.
L’artiste graffeur Socrome (qui
évolue au sein du collectif Le Chat
Noir) a réalisé une performance le
soir de l’inauguration du 20ème
salon du chocolat en utilisant
mes peintures que j’avais pour
l’occasion conditionnées en format
Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur –
Fondateur et CEOFondateur et CEO
42
aérosols avec un gaz propre.
En discutant avec les streets artists
de Vitry sur Seine en particulier
j’ai compris qu’il y avait un réel
potentiel au niveau des peintures.
J’ai compris leurs contraintes et, à
leur demande, j’ai réalisé un cahier
des charges afin de pouvoir leur
fournir des peintures naturelles
en aérosols qui leur permettent de
travailler en intérieur sans masques
et de pouvoir proposer des ateliers
auprès d’un plus large public
comme les enfants.
Avec le cahier des charges j’ai
commencé ma première étude de
faisabilité. C’est loin d’être fini,
mais après un an de travail, je pense
que ce sera abouti d’ici une dizaine
de jours. Je vais pouvoir envoyer les
premiers dosages en prototypage. Si
les artistes valident mon produit, je
pense que je lancerai une campagne
de crowfunding. Elle servira à me
faire connaitre, mais aussi estimer
les premières sorties de flacons.
De l’économie circulaire à
la tour Eiffel en chocolat
Mon projet fait vivre beaucoup de
monde, je crée du lien, de l’emploi
et de la solidarité. Mon meilleur
exemple est ma rencontre avec la
Mairie de Paris que j’ai fait rire. Je
suis allée les voir en leur parlant de
mon rêve : récolter tous les résidus
de cacao partout en France, que tout
le monde s’y mette du petit citoyen
qui va à l’école, aux brasseries et
aux grosses entreprises ; fabriquer
ainsi 60 tonnes de peinture pour
repeindre la tour Eiffel afin de
montrer que l’économie circulaire
ça marche si chacun de nous se
lance ! Vous imaginez tout ce qui
serait possible si nous étions tous
sensibilisés et avancions pour une
cause commune.
BPW
C’est une des plus vieilles ONG
de femmes au monde qui a
été créée en 1930 par le Dr
Lena Madesin Phillips. Nous
travaillons sur l’égalité Homme
Femme et la discrimination
dans le monde du travail et
luttons contre les stéréotypes.
BPW travaille sur la valorisation
et l’autonomie des femmes.
Cette ONG internationale a mis en
place la Journée de l’égalité salariale
(Equal Pay Day). Cet indicateur
permet de mettre en évidence le
nombre de jours supplémentaires
que les femmes doivent travailler
pour atteindre les mêmes salaires
que les hommes l’année précédente.
Ce jour-là j’aimerai mettre en place
une performance artistique avec
la réalisation d’une fresque par
des femmes et des hommes streets
artistes.
J’aimerai aussi proposer une
association avec Marc Jacob qui
vient de sortir un vernis à ongle
pour hommes afin que tous les
hommes et les femmes soient vernis.
Il est important que nous soyons
tous mobilisé et je sais déjà qu’il y a
plusieurs réseaux qui seraient partie
prenante, pour nous soutenir.
Pour moi BPW c’est certes un
engagement mais c’est joindre
l’utile à l’agréable. Cela fait partie
de moi. J’aimerai en faire un avec
VoxFemina car chez BPW nous
sommes toutes experte dans notre
domaine et on a toutes besoin de se
soutenir, de savoir se valoriser.
Le mot de la fin
Je vais commencer à rédiger une
conférence pour expliquer mon
innovation, ce que j’en ai fait et
ce que je vais en faire. Je souhaite
que mon expérience puisse
aider d’autres femmes dans leurs
projets respectifs. C’est là mon
engagement.
 
Pour en savoir plus :
Linkedin.com/in/valerieanne
Twitter.com/Hadoinie
Site de Phenix : wearephenix.com
Site d’Eqosphère : eqosphere.com
Site de Socrome : socrome.com
43
Valérie Anne d’Asnière – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
44
Guy Lessieux
Guy Lessieux, j’ai 74 ans, j’ai toujours souhaité être médecin, ça a été mon
objectif depuis toujours. J’ai fait mes études à la faculté de médecine de
Paris, il n’y avait qu’une seule faculté de médecine à l’époque et c’est le
putsch des étudiants en 1968 qui a permis l’ouverture de plusieurs facultés.
Toute ma carrière a été faite en médecine générale. Conjointement à
l’exercice libéral, j’ai été médecin de soins à la RATP et j’ai assuré pendant
20 ans les fonctions de médecin directeur du service d’hygiène de la ville de
Boulogne Billancourt. A 65 ans j’ai cessé mon activité professionnelle.
Comment j’ai débuté à
l’Ordre de Malte ?
Un soir de 1997, alors que j’allais
faire une séance de vaccination
contre la grippe, mon épouse qui
était infirmière me demande si je
vaccinais les sans-abris. Elle me
pose une problématique que je
n’imaginais pas.
J’ai pris contact avec la mairie
de Boulogne Billancourt qui
m’informe que l’ordre de Malte
réfléchissait à la création d’une
structure médicale pour les sans-
abris. C’est ainsi que j’ai commencé
à travailler comme bénévole à
l’Ordre de Malte.
SAMU social médical : 40
personnes au service des
SDF
Dans la nuit du 6 au 7 février 1998,
a eu lieu la première maraude
médicalisée dans les Hauts de
Seine.
Au début nous étions moins d’une
dizaine de bénévoles (2 médecins,
2 infirmières, 1 pharmacienne, 2
assistants et 1 ou 2 conducteurs),
et nous ne tournions que le mardi
Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
45
soir à partir de 20h30 jusqu’à
parfois 5h du matin ! Nous ne
pouvions pas proposer plus de
sorties au vu de notre petit effectif.
Depuis le nombre de médecins
et de bénévoles a augmenté
régulièrement et nous pouvons
assurer 2 maraudes par semaines :
le mardi et jeudi soir. Actuellement
nous sommes 40 bénévoles : 10
médecins, 10 infirmières, 10
conducteurs et 10 assistants.
Une pratique illégale
Le SAMU social médicalisé était,
à ses débuts, une activité illégale :
le Conseil de l’Ordre des Médecins
interdit de faire de la « médecine
foraine».J’aidoncécritauPrésident
du Conseil de l’Ordre des Hauts de
Seine qui a trouvé la question trop
complexe pour pouvoir donner son
accord. Il a transmis la demande
au président du Conseil National
de l’Ordre des Médecins qui a
répondu immédiatement en nous
approuvant à 100%. Certes la
médecine foraine est interdite mais
il a donné son accord au nom de la
nécessité médicale.
Qu’est-ce que la médecine
foraine ?
Un médecin, soit il est appelé
au chevet d’un malade chez lui,
soit le patient vient au cabinet.
La médecine foraine, pratique
interdite en France, c’est faire
de la médecine dans la rue.
En maraude la réalité du terrain
diffère de la théorie de la médecine :
les SDF montent dans l’ambulance
pour recevoir le diagnostic et les
soins nécessaires uniquement
quand ils le veulent bien. Mais
la majorité du temps on fait
diagnostics et soins sur le trottoir
et c’est contre la règle théorique de
l’exercice de la médecine.
Comment ça se passe sur
le terrain ? Comment vous
accueillent les SDF ?
La plupart du temps, très
chaleureusement avec un grand
sourire, ce sont des amis. On se
serre souvent dans les bras. Parfois
lorsqu’ils sont très alcoolisés, ils
peuvent être agressifs et nous
envoyer promener. L’alcool est
une des pathologies les plus
courantes du monde de la rue.
Nous tissons des liens avec chaque
personne. Cela peut prendre du
temps, mais dans l’ensemble ils
attendent nos visites et sont peinés
lorsqu’ils ne nous voient pas.
Un patient qui avait des lésions
monstrueuses au membre inférieur
droit avec un œdème et des plaies
refusait totalement les soins. Au fur
et à mesure, il a accepté que nous
le soignons. Il refusait de monter
dans l’ambulance, mais il a accepté
qu’on lui fasse le pansement sur le
trottoir. Les passants dans la rue sur
le trottoir regardaient ça avec de
grands yeux, surpris et étonnés. Cet
homme c’est un miracle : on a mis
4 ans pour pouvoir le soigner et le
sauver.
Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
46
Comment trouves-tu
les SDF ? Quel réseau te
permet de pouvoir les
géolocaliser ?
LesSDFsontsignalésparleséquipes
de maraudes non médicalisé de
l’Ordre de Malte, il y a 2 équipes
(Rueil Malmaison et Boulogne
Billancourt), mais également par
le 115 ou les autres équipes de
maraudes non médicalisées. Toutes
les associations et institutions
connaissent mes coordonnées
et m’envoient les signalements.
C’est un vrai maillage : on ne peut
pas travailler seul. Nous travaillons
tous ensemble, en réseau. Mais nous
ne fournissons aucune information
médicale à nos partenaires. Le
serment d’Hippocrate me lie au
secret médical absolu. Je peux dire
si j’ai vu X ou Y mais jamais pour
quelle pathologie.
Refus de soins ?
Pour les SDF c’est comme pour
toi, je ne peux pas t’obliger à te
faire soigner même si je te dis que
ta vie est en danger. Cependant, en
psychiatrie, il y a l’Hospitalisation
d’Office lorsque la personne est
dangereuse pour elle ou pour
autrui.  Ça m’est déjà arrivé de
devoir réaliser un certificat de
ce type. Cependant lorsqu’ils
ressortent de l’établissement
psychiatrique, généralement ils
sont très mécontents, c’est un
moment dur, pénible pour eux.
Par sécurité pour les bénévoles et
pour moi, les SDF ne savent jamais
qui fait le certificat. Je suis un peu
prudent !
Combien réussissent
vraiment à s’en sortir ?
A retrouver un toit, une
sociabilisation ?
C’est un monde extrêmement
difficile ne soyons ni pessimiste
ni optimiste, peut-être 10%…
Ce n’est pas beaucoup. Lorsqu’on
est au fond d’un gouffre il faut
remonter les marches les unes après
les autres. Pour te faire comprendre
voici l’histoire vraie de Madame L.
Il y a au moins 15 ans, dans
une ville X, près de la boutique
Orange. C’était une personne à
qui nous proposions des soins,
de la nourriture… elle refusait
tout. Elle était toujours allongée
sous sa couverture, son matelas
et nous ne savions même pas si
elle était grande ou petite.  Un
jour elle me dit qu’elle a mal au
thorax. Je lui demande de monter
dans l’ambulance pour se défaire
afin que je puisse l’examiner. A
force de persuasion elle accepte et
nous avons tendu des draps par
discrétion. Elle s’est légèrement
dévêtue et j’ai vu un « magnifique »
Zona Intercostal. C’est une
infection virale, qui fait très mal. Je
lui donne les médicaments adaptés
à son zona. On lui offre aussi une
Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
47
soupe qu’elle accepte non pas pour
son plaisir mais pour nous faire
plaisir.
Je la revois la semaine suivante
ou elle m’annonce être guérie :
ses lésions avaient effectivement
disparues. C’était miraculeux.
Elle a accepté une soupe,
toujours pour nous faire plaisir.
Les services sociaux la prennent
en charge et la reloge dans un
petit 2 pièces. On pensait que
c’était un beau résultat. Et que si
cela pouvait se faire pour tous les
sans-abris se serait merveilleux.
Un jour elle a demandé à ce que
nous passions la voir chez elle dans
son petit appartement pour nous
offrir un apéritif chaleureux. Nous
y sommes allés. Elle ne dormait pas
dans sa chambre, dans son lit mais
par terre dans sa cuisine contre
des sacs en plastique : on ne peut
pas changer les habitudes. Sur une
planche entre 2 tréteaux, elle avait
préparé l’apéritif : une bouteille
de vin blanc, de l’eau si on voulait
couper le vin blanc, des verres et sur
une assiette en plastique, du pain
coupé en lamelle avec un kleenex
par-dessus par propreté et hygiène,
une véritable évolution par rapport
à sa vie dans la rue. Elle nous sert
l’apéritif et demande à voir le
docteur, moi en l’occurrence.
Par discrétion et par réserve, nous
allons dans la pièce d’à côté et je
lui demande ce qui se passe.  Elle
me demande un médicament
pour dormir. Je lui demande si
elle dort mal, mais elle me répond
que Non ! elle veut le médicament
pour dormir dé-fi-ni-ti-ve-ment.
C’est-à-dire qu’elle voulait mourir.
Extrêmement penné d’entendre
cela je lui demande ce qu’il se passe.
Et là elle m’a dit qu’elle a connu la
pire des choses : la rue. Maintenant
elle est dans le luxe, elle est bien et
elle peut s’endormir définitivement.
Conclusion de l’histoire : elle a
regrimpé les marches trop vite.
Il faut que les personnes de la
rue remontent étape par étape
progressivement pour qu’ils se
reconstruisent c’est extrêmement
important, mais il y a de ça 15 ans
on ne le savait pas encore. Il n’y
a pas encore de cours à la faculté
pour apprendre la réinsertion et les
soins des malades de la rue. C’est
l’expérience qui nous l’apportent et
là maintenant nous en avons tiré la
leçon.
Nous travaillons avec des Centre
d’hébergement qui permettent
ce temps de reconstruction
et d’accompagnement vers
l’autonomie. L’Ordre de Malte
a plusieurs structures de ce type.
Nous travaillons en particulier avec
la Péniche Le Fleuron Saint Jean à
Paris qui accueille des gens venant
de la rue qui vont avoir besoin de
beaucoup de temps, et la Péniche le
Fleuron Saint Michel à Asnières où
le public accueilli est déjà dans des
démarches d’insertion.
1er novembre : la trêve
hivernale – Qu’est-ce qui se
passe ?
Le gouvernement donne plus de
moyens et ouvre des lieux d’accueil
supplémentaires pour les SDF.
Certes ça leur apporte un toit, ils
sont mis à l’abri pour la durée de
l’hiver, malheureusement ces lieux
sont fermés le reste de l’année et ça
pose problème. Et chaque année
à partir d’avril, recommence le
problème du manque de place.
Les médias n’en parlent pas mais
l’été est plus dramatique que
l’hiver. Malgré la mise en place
de « plan canicule », la prise en
charge des personnes SDF durant
la belle saison est encore largement
insuffisante. Lorsqu’il fait très
chaud ils ne boivent pas de l’eau
mais du vin de la bière ou des alcools
fort, voire de l’eau de Cologne (à
même dose d’alcool nous, nous
serions morts) ce qui les déshydrate
fortement. Le risque d’insolation
est donc accru pour ce public,
avec malheureusement parfois des
conséquences dramatiques.
En 2016, il n’est vraiment pas
normal que des gens se retrouvent
sans solution d’hébergement,
malgré leur demande ! C’est
d’autant plus révoltant quand on
sait que des structures adaptées
48
Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
49
existent, mais ne sont pas accessibles
pour des raisons saisonnières…
De quoi l’Ordre de Malte
a besoin pour changer la
donne ?
Nous avons besoins de plus de
bénévoles. Je suis à la recherche
de médecins, d’infirmières, car
bien que nous soyons une dizaine
de médecins, parallèlement à la
maraude médicale, nous créons
des consultations dans les foyers,
et actuellement je suis en train
de créer une 9ème consultation
hebdomadaire dans un foyer
d’hébergement.
C’est extrêmement important
de le développer : la plupart du
temps, ils ne peuvent pas aller
consulter ailleurs et très souvent
ils oublient les rdv. Il est donc
important qu’ils puissent consulter
sur les lieux même qui les accueille
au quotidien. Les foyers sont les
accueils de jour ou nocturne. Par
exemple au Fleuron Saint Jean nous
consultons 3 fois par semaine. Ce
sont des passagers qui arrivent à 18
h et qui repartent à 8h le lendemain
matin. Y’a d’autres foyers ou les
accueils et consultations se font
dans la journée.
Régis de Nacfaire de Saint Paulet
le Directeur Général de l’Ordre
de Malte a annoncé en 2015 qu’il
y aurait 8 structures en France
d’ici 2020. Il vient de se créer une
consultation médicale à Lille et
cette année une maraude médicale
va se faire à Annecy. Il y en a une
prévue à Montpellier et une dans
les Yvelines, les choses bougent.
Nous travaillons à l’acquisition
d’une nouvelle ambulance pour
les maraudes médicalisées du 92.
Nous avons besoin de 55.000€ en
fonds public et fonds privés. C’est
la division du don et legs qui gère
cette partie pour récolter les fonds
; il y a déjà plusieurs contacts dont
la famille Bettencourt [L’Oréal
NDLR].
Le mot de la fin
Les personnes SDF ne doivent
pas être réduites à leur condition
de personnes sans-abris. Ce sont
des personnes courageuses qui
nous peuvent nous apporter
énormément si nous prenons le
temps d’être à leur écoute.
Pour en savoir plus :
Ordredemaltefrance.org
Le site du Samu Social International :
Samu-social-international.com
Le baromètre du 115 sur le site de la
FNARS :
Fnars.org/publications-fnars/barometre-115
Collectif Les Morts de la Rue :
Mortsdelarue.org
Gaël Dupret/MaxPPP Maraude Médicalisée de l’Ordre de Malte
50
François-Xavier
Leroux
Bonjour, je m’appelle François-Xavier, vigneron. Après plusieurs années de
préparation j’ai lancé ma maison de champagne « Hippolyte Leroux ». 2016
est ma deuxième année de commercialisation.
J’ai passé mon BAC en région Champagne à Avize puis un BTS en
apprentissage à Beaune en Bourgogne et une Licence Professionnelle de
Commerce à Chalon-sur-Saône. J’ai continué mes études en Suisse à
Changins la Haute Ecole de Viticulture et Œnologie de Nyon (entre Genève
et Lausanne). Je suis une personne curieuse de tout et je lis énormément sur
le vin, la nature, l’architecture, ainsi que l’art en général.
Ma grande passion et mon métier c’est le Vin. J’adore faire des dégustations,
découvrir de nouvelles régions, de nouveaux vins. Depuis deux ans je
fais parti d’un club de dégustation des vins étrangers. Cela me permet de
découvrir des vins réalisés avec des terroirs différents mais aussi un état
d’esprit et une culture différente de la nôtre. Les histoires de ces vignerons,
qui se sont lancés sans aucun héritage ni savoir-faire et qui font tout pour
faire la meilleure qualité sont riches en enseignements. On découvre
également d’autres vignobles d’Europe qui ont 1000 ou 2000 ans mais dont
on n’entend pas parler en France…
François Xavier Leroux – Maison Hippolyte Leroux – Fondateur et CEO
51
La maison Hippolyte
Leroux
Il y a un siècle, mon arrière-
grand-père Hippolyte a perdu son
père très jeune. Il s’est retrouvé
propriétaire d’une ferme avec
toutes les activités agricoles de
l’élevage à la viticulture. A la fin
du 19ème siècle, les maladies
et les parasites, notamment le
phylloxéra, le mildiou, et l’oïdium
apparaissent sans que les vignerons
n’aient de solutions viables pour
les combattre. La première Guerre
Mondiale a également ravagé la
région par les bombardements
intensifs. Sortie de la guerre, il
fallait reconstruire car la ferme avait
bien souffert, le vignoble avait été
ravagé.
Créer un vignoble coûte de l’argent
et à l’époque le champagne n’était
pas aussi répandu qu’aujourd’hui
(c’était une toute petite partie de la
Champagne qui était entre Epernay
et Reims), il a donc pris la décision
de ne pas recréer le vignoble. Près
de 70 années se sont écoulées avant
que mon grand-père et mon père
prennent le choix de recréer le
vignoble. Comme il reste encore
beaucoup de terres à planter, j’ai
repris le flambeau en créant mon
vignoble.
Pourquoi avoir recréé ton
vignoble ?
Par passion. Mes parents m’ont
toujours fait gouté un peu de vin
aux repas de famille pour éveiller
mon palais et à 16 ans j’achetais mes
premières bouteilles. Au collège,
lorsqu’on doit choisir un métier,
vigneron s’est imposé comme une
évidence. De plus c’est un métier
complet qui t’offre l’équilibre d’être
en pleine nature, dans la campagne
et en parallèle il y a la production et
la commercialisation du vin… c’est
très varié.
Savoir s’entourer
Le vin c’est vraiment très long à
élaborer et nécessite un savoir-
faire complexe que l’on acquière
au fil des années. Quand un
peintre ou un artisan veut créer
un objet, il va essayer, se tromper
et va recommencer, … alors que
le vin c’est une fois par an. Là où
Picasso faisait plusieurs dizaines ou
centaines de dessins par jour pour
s’entrainer et pour travailler son
geste le vigneron a dans toute sa
vie, 40 voire au mieux 50 tentatives
pour faire le meilleur vin…
Ainsi, pour mon champagne j’ai
décidé de m’entourer de partenaires
compétents pour réaliser le meilleur
champagne possible. J’ai appris à
mettre en place des collaborations
qui permettent de profiter des
expériences et des savoir-faire de
chacun. Le vin est un milieu très
complet : on peut tout faire mais il
faut aussi savoir déléguer pour faire
de la qualité.
S-California ?
C’est ma première cuvée.
La prochaine est en cours
d’élaboration.
C’est en pleine crise de 2008 que
je décide de faire du champagne.
Quand j’ai commencé à planter
mon vignoble tout allait bien
en Champagne, les ventes
augmentaient chaque année. La
crise arrive, les consommateurs
réduisent leurs achats et le
champagne voit ses ventes baisser.
Initialement, comme toutes les
maisons de champagne, je pensais
faire mon champagne, coller une
étiquette et le vendre. Seulement
l’avenir devenant incertain je me
suis posé beaucoup de questions
sur la faisabilité de mon projet,
mon marché, mon positionnement
vis-à-vis de celui-ci. Autour de moi
les grandes maisons révisaient leurs
budgets communication, leurs
stratégies…
52
J’ai augmenté les recherches,
les études, rencontré un grand
nombre de personnes travaillant
dans le vin mais aussi dans des
métiers complètement externes
à mon univers. Grâce à internet,
j’ai regardé les trajectoires et les
conseils d’entrepreneurs, et surtout
ceux qui avaient vécu des crises et
comprendre comment ils avaient
fait pour la dépasser sans que cela
n’ait trop d’impact sur eux.
C’est ainsi que j’ai découvert l’esprit
entrepreneurial Californien. C’est
un état d’esprit de philanthrope  :
ils partagent aisément toutes les
clés, le savoir-faire de leur réussite.
L’entrepreneur français garde
précieusement ses clés de réussite.
Il ne les donnera qu’à quelques
personnes en qui il a vraiment
confiance de peur que quelqu’un
vienne « chasser sur ses terre » et
lui prenne sa place. En Californie
ils partagent pour le bien du pays,
par esprit patriotique : en donnant
les clés, les méthodes de réussite,
d’autres vont réussir, l’économie
du pays va se développer et tout le
monde sera gagnant.
Ils partent du principe que
lorsque tu as réussi tu es sur une
position dominante, et il devient
compliqué de prendre ta place.
J’ai vraiment profité de toute
cette connaissance, de toute cette
expérience et de ce savoir-faire. Ce
partage à conditionné ma vision
de l’entreprise et au final mon
champagne. Le nom S-California
c’est une forme de remerciements
car sans ce partage j’aurai fait
énormément d’erreurs et je pense
qu’aujourd’hui je n’aurais pas pu
aller aussi loin au niveau de la
qualité.
Un packaging différent
Le monde change, tout change.
Je crée ma maison dans le 21ème
siècle, l’état d’esprit diffère de celui
du 19ème ou 20ème siècle quand
les autres maisons se sont créées.
J’ai énormément travaillé
sur l’histoire des maisons de
champagne. Toutes, lors de leur
création, étaient en avance sur
leur temps. C’était des chefs
d’entreprise visionnaires qui se sont
entourés des dernières technologies
de leur époque. Ce fut par exemple
les premières entreprises à s’équiper
en électricité. La Champagne est
un des berceaux de l’aviation car
les maisons de champagne ont
sponsorisélespionniersdel’aviation
française et étrangère pour leur
permettre de se développer. Dom
Pérignon, sous Louis XIV, utilisait
lui aussi des techniques qui pour
son époque étaient étonnantes et
nouvelles.
Dans mon projet d’avant crise
je voulais faire quelque chose de
traditionnel, et au final je me suis
dit que créant ma maison au 21ème
siècle, il fallait qu’elle en soit le
reflet. Ainsi j’ai conçu l’habillage
de mes bouteilles en m’inspirant de
mon époque.
Comment es-tu perçu dans
la profession ?
L’habillage surprend beaucoup.
Que ce soit en France ou dans le
reste du monde, Il est extrêmement
rare de voir un habillage aussi
coloré. Les vignerons sont très
traditionnels mais ils aiment
également beaucoup la nouveauté.
#FocusOn Volume 1 by Gaël Durpret
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#FocusOn Volume 1 by Gaël Durpret

  • 2. 2 Première édition Publiée le 24 Décembre 2016 Mise en page éditions ONNI
  • 3. 3 SOMMAIRE Présentation du projet Remerciements Betty Bouteiller Sarah Daninthe Christine Bellocq Sophie Floreani Martin Garanger Thierry Cardot Geneviève Bouché Valérie Anne d’Asnières Guy Lessieux François-Xavier Leroux Biographie Gaël Dupret p.4 p.5 p.7 p.10 p.15 p.21 p.25 p.30 p.34 p.39 p.44 p.50 p.56
  • 4. 4 Mais quel intérêt de vivre ces rencontres sans les partager ? C’est ainsi que j’ai eu l’idée d’interviewer chaque mois une personne et de réaliser son portrait photo. Ce format permet de réaliser un portrait complet et de lier mon métier de photographe corporate et de presse je l’ai appelé Focus On. Toute l’année 2016 j’ai fait un Focus On par mois qui était diffusé en priorité aux lecteurs de ma newsletter et le mois suivant rendu public sur mon site. Ce livre blanc est la réunion des 10 Focus On réalisés. Projet #FocusOn Mon métier de photographe me donne la chance de rencontrer des personnes d’exception, des personnes différentes qui ont des métiers qui sont peu, pas ou mal connu du grand public. Généralement ce sont des expert-e-s dans leur domaine. Et les expert-e-s sont souvent des personnes très intéressantes auprès desquels on apprend toujours. Pourquoi 10 et pas 12 ? Tout simplement parce que j’ai commencé la publication des Focus On en février et qu’en août, ce sont les vacances ! Pourquoi un livre blanc ? L’envie de vous offrir l’intégralité des Focus On de 2016 en un seul volume pour bien commencer la nouvelle année 2017. Le livre blanc permet une diffusion multi-support et d’augmenter la transmission de ces portraits de femmes et d’hommes auprès d’un plus large public que les milliers d’inscrits à ma newsletter et les visiteurs de mon site.
  • 5. 5 Remerciements Je tiens à remercier les différentes personnes qui ont accepté l’interview, du temps qu’elles ont passé à répondre aux questions et à l’accueil qu’elles m’ont réservées, Je tiens à remercier Sophie pour la phase de correction de chaque #FocusOn avant l’envoi de mes newsletters, Je tiens à remercier Valérie Beaudoin qui m’a formé aux techniques de l’interview lors de mes débuts de journaliste à la République du Centre, Et je tiens à remercier mon Père qui m’a appris la photographie,
  • 6. 6 Droits sur le livre blanc #FocusOn vol. 1 L’intégralité de l’œuvre (photographies, textes, illustrations, mise en page) est protégée par les droits d’auteur et la propriété intellectuelle. Droits de diffusion : la diffusion de ce livre blanc se fait exclusivement par internet et l’œuvre doit rester dans son intégralité. Il est interdit : • D’en extraire une partie, • De commercialiser tout ou partie de l’œuvre, • De publier et / ou imprimer cette œuvre sur quelque support qu’il soit. Comment diffuser ? Pour diffuser le livre blanc vous pouvez utiliser le lien direct présent sur mon site : Gaeldupret.com/focuson-volume-1/ Ce livre est diffusé via la plateforme : Linkedin Slideshare
  • 7. 7 Betty Bouteiller Bonjour je suis Betty Bouteiller et j’ai créé ONNI en novembre 2015. Avant ONNI, j’ai fait une Prépa et un Master dans la communication visuelle multimédia. Pourquoi ONNI ? Léonard et Compagnie, est mon projet de Master. Pour le monter j’ai rencontré plusieurs éditeurs et j’ai eu beaucoup d’encouragements de leur part ce qui m’a conforté dans l’idée de lancer ce projet « pour de vrai ». Et comme je ne trouvais personne pour l’éditer… j’ai créé ONNI ! C’est quoi ONNI ? ONNI - pour Objet Numérique Non‑Identifié - est une maison d’édition numérique qui a pour objectif de se spécialiser dans le récit illustré interactif pour jeunes et adultes. L’idée, est de montrer que l’on peut faire des livres interactifs intelligents : l’interactivité apporte une valeur ajoutée au récit. Donc tout ce qui est en plus du texte,permetdemieuxcomprendre, d’approfondir l’histoire et n’est pas là uniquement pour faire joli. Cela montre également que les tablettes peuvent avoir des applications intéressantes, ludiques, intelligente et qui donnent envie de lire. J’ai monté ONNI avec Jonathan Helme que j’ai rencontré sur LinkedIn. Il a fait l’école des Gobelins que je voulais faire. En travaillant avec Jonathan sur le projet Métronautes on s’est rendu compte que ça matchait bien entre nous. Comme le feeling et la confiance étaient au rendez-vous, on a décidé de monter ONNI. Betty Bouteiller – ONNI (CEO)
  • 8. 8 C’est quoi un livre interactif ? C’est un livre dans lequel le lecteur aura des actions à faire. Cela peut, soit changer l’histoire, soit faire vivre au lecteur un passage de l’histoire pour mieux le comprendre. Par exemple : dans Léonard et Compagnie, à un moment donné, le loup est perdu et il faut l’aider à construire une carte pour qu’il puisse se retrouver. Les plus connus sont les livres dont vous êtes le héros. Nous avons envie d’en faire et de trouver de nouvelles façons de raconter des histoires. L’interaction donne un peu plus de pouvoir au lecteur, mais il faut le faire intelligemment ! Léonard 1er livre interactif Léonard et Compagnie c’est 3 histoires de loups qui vont rencontrer le petit chaperon rouge. Mais ces 3 jeunes loups ont des caractères différents et ça ne va pas se passer comme dans le conte. Contrairement au célèbre conte, ces 3 histoires sont axées sur la manière de voir, de percevoir les 3 petits loups plutôt que sur le petit chaperon rouge. Les histoires sont linéaires avec des pauses interactives. L’idée est de s’arrêter pour faire des mini-jeux qui aident à comprendre l’enjeu du passage. Les jeux ne sont pas obligatoires. Par exemple un loup est perdu, nous allons pouvoir l’aider à sortir d’un labyrinthe, lui construire une carte... Les prochains projets : Été 2016 : Un petit garçon qui va affronter sa peur des monstres avec ses parents et le lecteur. Celui-là sera imprégné de l’univers du jeu vidéo. Notamment pour montrer qu’on peut être à la frontière du jeu vidéo et du livre et s’amuser. C’est une histoire que j’ai écrite et pour les dessins c’est une collaboration avec l’illustratrice Natacha Lebrun. Betty Bouteiller – ONNI (CEO)
  • 9. 9 Betty Bouteiller – ONNI (CEO) Un projet plus scolaire mais qui reste, pour le moment confidentiel. Et un appel à projet pour faire un livre sur noël avec un collectif d’auteurs En résumé Léonard et Compagnie sort en Février 2016 pour les tablettes sous Androïd et iOS. Pour en savoir plus : Onni.fr Linkedin.com/in/betty-bouteiller- b07b454a Twitter.com/ONNI_editions Facebook.com/editiononni
  • 10. 10 Sarah Daninthe Rencontrée au WEB2Business 2016, Sarah est une working girl, SHN (Sportive de Haut Niveau) et femme au grand cœur. Sarah me reçoit en exclusivité chez elle au gymnase Éric Srecki de Levallois-Perret ou elle s’entraine quotidiennement. Bonjour, je suis Sarah Daninthe, escrimeuse, épéiste, double championne du monde, médaillée olympique, en route pour la qualification des JO de Rio et je travaille aussi dans le digital. Actuellement je travaille dans le marketing et communication pour Open Field une start-up spécialisée dans l’analyse des datas. Sarah Femme Business Auparavant je travaillais dans un lab, proche d’une start-up, ce qui m’a justement incitée à me spécialiser dans le conseil auprès de ces entreprises. Dans un premier temps des start-ups du milieu sportif, du fait que je sois sportive de haut niveau, et puis j’ai agrandi mon champ d’action à tout type de start-up en tant que conseillère et bêta-testeuse. La start-up Open Field est peu connue en France et en Europe car le milieu de la data commence tout juste à s’ouvrir. Mais ils ont levé quelques millions et signé avec de grosses structures. Ils sont actuellement en pour-parler avec la NBA (Ndlr : National Basketball Association). Open Field ? Open Field fait de l’analyse de données pour mettre en place une stratégie sur l’étude du comportement du consommateur dans tous les lieux connectés, Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
  • 11. 11 centre commerciaux, cinémas, aéroports…. Cela permet de faire des profils linéaires et transverses du consommateur, avec son accord, afin de mettre en place une stratégie pour lui. Un exemple concret : Actuellement en signature, un de nos prospects possède un casino, plusieurs hôtels, restaurants, magasins… La valeur ajouté d’Open Field c’est la réalisation du profil personnalisé de leurs clients. Que vous preniez une nuit dans l’un de leurs hôtels, ou que vous fassiez des achats dans une de leurs boutiques, ils prendront, avec votre accord, toutes sortes de données d’analyse : ce que vous aimez manger, ce que vous aimez voir, ce que vous aimez faire, si vous prenez une carte à l’AS Monaco ou que l’on sache dans l’hôtel où avez l’habitude de descendre, si vous aimez faire du shopping et que vous aimez les chaussures, etc. L’ensemble des données se rapportant à un client dans tous les lieux connectés possibles permettra d’établir le profil de Monsieur X et de mettre en place une stratégie par rapport à ces données, mais toujours avec l’accord du consommateur. Cela se fait avec le téléphone du client, sinon c’est de la data anonyme. Du sport haut niveau au monde de la data et du digital ? J’ai un parcours un peu particulier. J’ai un Master spécialité « étude du consommateur»etcen’estpeut-être pas un hasard si je suis chez Open Field aujourd’hui. Cependant, pendant plusieurs années j’ai mis le sport comme première priorité avec beaucoup de persévérance. Ce qui m’a permis de revenir médaillée mondiale et olympique. En parallèle j’ai toujours aimé le numérique. Je suis une vraie #digitalenative voire même un peu droguée ! L’escrime n’est pas un sport professionnel et comme le numérique est un univers que Sarah Daninthe – Épéiste – Équipe de France
  • 12. 12 j’aime, j’ai investi du temps et de l’énergie pour y bosser. J’ai commencé par Twitter, cherché àencomprendrelefonctionnement, les codes, les influenceurs. J’ai été aidée par des personnes qui m’ont conseillée. J’ai aussi beaucoup lu.  A l’époque les journées étaient bien chargées. Travail la journée, entrainement le soir et ensuite encore 2h sur le numérique ou je lisais, m’interrogeais, posais des questions… J’ai débuté en commentant les tweets ainsi que les autres grands réseaux sociaux et j’ai commencé à me faire un petit nom. J’ai commencé par investir le milieu du sport car mon statut de sportive de haut niveau me légitimait. Puis je me suis ouverte à d’autres horizons. J’ai postulé pour un premier poste et maintenant je m’y plais vraiment. Conseils auprès de start-up Je fais essentiellement du conseil auprès de start-up dans le milieu du numérique. Je teste des applications en tant qu’utilisatrice. Je suis assez accessible et sans hésitation je suis contente de collaborer avec ces start-ups. Je les aide en leur disant ce que je vis au quotidien, en quoi leurs applications pourraient m’aider, comment ils pourraient l’améliorer, etc. Actuellement je travaille avec la start-up Plume Air qui est sur la data côté météo. Je ne suis pas une spécialiste mais je donne mon avis d’utilisatrice finale. Plume Air C’est une start-up française qui a brillé lors de la COP 21. Là encore elle brille aux Etats Unis sur le secteur de la data mais pas en France. Je ne sais pas si la France à un problème avec le secteur de la data mais il va falloir se réveiller ! Plume Air récolte des données et analyse l’air pour connaitre le taux de pollution. Au début j’étais simple utilisatrice de cette appli, je leur ai dit ce que j’en pensais. On s’est rencontré et ils m’ont proposé d’être bêta-testeuse. On a parlé de différents points dont les objets connectés. Ils ont pris note et je pense que dans quelque temps on devrait en entendre parler ! « Si tu vas à Rio… » L’équipe de France est qualifiée pour Rio avec un quota de 3 personnes + 1 remplaçante. Maintenant il va falloir qu’on se bastonne entre nous pour Rio ! La guerre n’est pas finie. Il nous reste 3 compétitions mondiales pour le faire. Grace au pacte de performance du ministère des sports, j’ai la chance de pouvoir travailler à mi-temps chez Open Field et de pouvoir m’entrainer dans mon club de Levallois ou à l’INSEP. Je m’entraine quasi 6 jours par semaine, des leçons avec mon prof et les préparations physiques avec mon entraineur, de la muscu, du cardio, etc. Rio, les jeux c’est quelque chose d’assez particulier, pour l’avoir déjà vécu. Le plus dur ce sont les qualifs plus que la compétition parce que c’est la guerre pendant 1 an, 1 an ½ mais ça reste une aventure extraordinaire. On mange Rio, on boit Rio… C’est sûr de temps en temps j’ai envie d’aller boire des coups avec des potes mais c’est pas vraiment le moment ! Faut rester Focus sur ce que l’on doit faire… Le mental d’abord ! Le mental est primordial il faut beaucoup de force, beaucoup de détermination. On ne peut avoir « juste envie » On est déterminé, on sait ce que l’on veut, on se donne les moyens sinon ça ne peut pas marcher. Déjà qu’en se donnant à fond on n’y arrive pas toujours. Les jeux (jeux olympique NDLR) c’est particulier. Mais ce qui est bien avec les jeux c’est que la vraie nature se révèle, donc si on est pas solide on ne passe pas. Premier de cordée Premier de cordée est une association qui vient en soutien à des enfants handicapés et
  • 13. 13 hospitalisés. On organise des après- midis pour les enfants. Pendant leur hospitalisation ils rencontrent des athlètes de haut niveau, on organise des sorties… Tant que ça leur change de leur quotidien et leur donner le sourire, alors c’est banco ! C’est aussi un soutien pour les familles. J’organise pour des entreprises des demi-journées de team building : je fais découvrir l’escrime à des salariés d’une entreprise et je réponds à une problématique comme un problème de communication, de tension, voire de guerre entre salariés… L’argent récolté est intégralement reversé à Premier de cordée. Un exemple concret, dernièrement j’ai passé une journée dans une entreprise en Normandie. La problématique de cette société était la tension et la non-communication entre deux équipes. Les deux équipes étaient en conflit ouvert et refusaient de travailler ensemble. L’objectif était de leur faire découvrir l’escrime et aussi le travail d’équipe. J’ai donc fait des équipes en mélangeant les 2 groupes en conflit et je les ai fait travailler et communiquer ensemble. Ça s’est bien passé. Pour en savoir plus : Sarahdaninthe.com Linkedin.com/in/sarahdaninthe Twitter.com/sarahdaninthe Open Field : openfieldlive.com Plume Air : plumelabs.com/en/ Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
  • 14. 14 Sarah Daninthe – OPEN FIELD et Premier de Cordée
  • 15. 15 Christine Bellocq Bonjour, je m’appelle Christine Bellocq. Je suis la fondatrice et directrice de l’entreprise Trésya Couture. Je crée des vêtements sur mesure, en particulier des tailleurs, pour les « Executive Women ». A l’équivalent des tailleurs grande mesure pour hommes, je suis un tailleur grande mesure pour femme et non pas une couturière. Je fais du tailleur professionnel pour accompagner la carrière des femmes, leur donner la qualité « Executive Presence » c’est à dire montrer ses capacités au leadership. Selon diverses études faites, 97% de la communication est non verbale, 55% de l’impression que l’on se fait d’une personne se fait dans les premières secondes. Une des premières choses que l’on voit de la personne c’est le vêtement. Certes il y a le regard, la voix, l’attitude, la posture… mais il est plus facile d’avoir une stature de leadership quand on est bien habillé. Un tailleur ça participe de cette posture On se tient mieux quand on est bien maquillé, bien chaussé, bien habillé… ça participe de l’image que l’on renvoi. Quand on veut décrocher un contrat, un budget auprès de son PDG, il ne faut pas avoir l’air d’une petite souris. Il faut arriver avec l’image d’une personne capable de gérer un projet de bout en bout, capable de faire face à des situations de crises qu’on va forcément connaitre et le vêtement participe de cette attitude. C’est ça que je développe au travers de mes vêtements. Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
  • 16. 16 Grande mesure ? La grande mesure ça vient de la qualification très ancienne des différents niveaux de couture que l’on faisait chez les tailleurs hommes qui ont longtemps eu le monopole des vêtements. La corporation des couturières a été créée en 1675 soit un siècle et demi après celle des tailleurs. Les femmes s’habillaient toutes seules ou avaient une couturière qui faisait partie de la domesticité quand elles étaient riches. Voici les 3 niveaux de couture :  1. La petite mesure : est l’ensemble des retouches faites sur des vêtements standards. C’était les prémices du prêt-à-porter qui apparut au XXème siècle. La petite mesure ne s’emploie plus, c’est devenu la retouche.   2. La demie mesure : on part de gabarits intermédiaires et que l’on met à la taille de la personne.   3. La grande mesure : est la création intégrale d’un vêtement unique pour chaque client. En termes de coupe, de choix de détails, de cols, de poches…. Chez les femmes, il n’y a pas la notion de tailleur mais de couturière, qui d’ailleurs n’avaient pas le droit, jusqu’à récemment, de faire les vestes. Cela restait le monopole des tailleurs. On parlait de vestes pour femmes. On n’emploie pas le terme de grande mesure mais de sur-mesure, comme si les femmes n’avaient pas le droit à de la grande mesure ou que l’on avait de la couture au rabais. C’est pour cela que j’impose le terme de grande mesure au féminin. Parce que je m’adresse au même type de cliente Femmes que les Hommes qui se font faire des costumes grande mesure. Je travaille uniquement pour les femmes. C’est un choix parce que je connais leurs besoins, je connais le secteur dans lequel elles évoluent et que je me sens légitime. 1,2,3… 26 mesures Pour le travail, hormis la feuille Excel dans laquelle je reporte les mesures, je travaille manuellement. Je n’ai pas de scanner laser qui tourne autour de la personne pour dessiner la silhouette. D’abord par ce que cela ne sert que dans le prêt- à-porter et non pas dans la grande mesure et dans l’individualité, parce que ce n’est pas rentable et que cela n’a pas d’intérêts. La prise de mesure ne suffit pas en elle-même. Ainsi, pour faire un vêtement, je ne prends pas 3 mesures, tour de poitrine, tour de taille, tour de hanche, mais 26, en horizontal, en vertical et en écartement. Et même avec ces 26 mesures, il faut faire un gabarit toile du fait que nous ne sommes pas symétriques. Elles ne sont pas non plus suffisantes pour déterminer les emplacements des creux. C’est-à-dire que des personnes faites avec un même tour de poitrine et même hauteur de bassin, les pinces se positionneront à des endroits différents. Ainsi un même vêtement, pour qu’il ait la même allure, pour 2 personnes différentes, je placerai les pinces à des endroits différents. Je garde le gabarit à plat pour une question d’espace, mais je pourrai les remplir de paille, les fermer au niveau de la tête et du bas du corps et j’aurai ainsi des mannequins à la taille exacte de mes clientes, comme on voyait autrefois dans les grandes maisons. Ces gabarits je les gardes, et quand ma cliente revient, je lui réessaie le gabarit. Si ses mesures n’ont pas évolué, je sais que je peux le réutiliser. Après je fais un carton, sur lequel je reporte à plat toutes les mesures et tous les détails que j’ai détecté sur le volume. Sur la base de ce carton je peux faire tous les vêtements possibles : de la lingerie au manteau en passant par le tailleur, un pantalon, une jupe, une robe forme kimono, faire des manches tailleur ou des manches droites… Sur ce carton, va se rajouter toutes
  • 17. 17 les aisances et toutes les formes de patron que l’on appelle de base : les découpes princesse, les pinces Dior, les découpes kimono, les différents types de cols, aplatis, arrondis, droits… Cela permet d’avoir un carton avec 5 patrons de base qui me permettent de décliner à l’infini toutes les formes possibles. On se rend ainsi compte qu’un tailleur qui est plutôt minimaliste dans sa définition, offre des opportunités de création énorme. A contrario du tailleur prêt-à- porter, il permet de définir le style de chaque personne. C’est 80 heures de temps de travail pour un tailleur vraiment abouti c’est-à-dire avec tous les détails d’un tailleur : une boutonnière passepoilée, des poches, un col tailleur… Sachant qu’un tailleur ça s’entoile, il faut renforcer les coutures au niveau des épaules, des emmanchures parce que cela doit résister à l’utilisation quotidienne. Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
  • 18. 18 1 tailleur = 3 pièces Quand on fait un tailleur grande mesure on fait 3 pièces. La première en tissu est le tailleur du dessus. Il y a ensuite la doublure et enfin la parmenture ; il s’agit des revers faits dans le même tissu ou dans un tissu contrasté pour des effets d’esthétique mais qui sont les parties qui ne sont pas en doublure. Ces parmentures sont entoilées pour donner le tombé du devant, des bas de manche, des bas de jupe ou de pantalons. Après on rassemble le tailleur du dessus et les parmentures puis au final on fixe la doublure à la main. Robes de mariées Je fais des robes de mariées bien que ce ne soit pas mon cœur de métier. Généralement je fais des robes de mariées pour des clientes que je connais, qui m’ont déjà acheté des tailleurs. A l’exception d’une fois ou j’ai fait une robe, type princesse en tulle blanc avec des plumes, des strass, elle était belle mais sans l’effet choucroute ni meringue ; mes créations sont des robes de mariées plutôt atypique parce que j’ai des clientes plus mûres qui ont envie de se faire plaisir. Par exemples, l’une était toute en dentelle rouge et noire, l’autre était jaune. En final ce sont des robes de mariées avec des coupes un peu particulières et très personnelles qui ne ressemblent en rien à ce que l’on voit en magasin. Spécial cocktail Je créée des robes ou tenues de cocktail. Je les fais essentiellement pour ma clientèle de cœur de métier de tailleur qui a des soirées cocktail mais aussi pour les personnes participant par exemple aux Galas de l’X où on porte encore des robes de cocktail et des gants longs. Je travaille avec une brodeuse qui fait de la broderie haute couture (broderie au crochet ou à l’aiguille) et qui travaille pour de grandes maisons comme Alexander McQueen ou autre. On fait des pièces qui permettent de se rajouter au tailleur de jour et qui en fait un tailleur cocktail. Nous faisons des pièces somptueuses qui vont venir se fixer avec des aimants néodyme sur le col tailleur pour le transformer. Double moment d’émotion Dans la création du tailleur j’aime particulièrement deux moments. Le premier est le moment où l’on définit le modèle que je vais lui faire (car c’est un travail en collaboration). Au moment où l’on a choisi le tissu, que le dessin est finalisé, Il y a un moment où je sais intimement que c’est ce tailleur là et ma cliente aussi. Un jour une cliente m’a dit « Je sais que l’on a fait le bon choix car vous avez les yeux qui pétillent ». L’essayage final est un vrai moment d’émotion. Je le vis intensément mais par procuration : j’adore observer ma cliente se regarder dans le miroir et changer de posture. Même si elle est en collant et qu’elle n’a pas remis ses chaussures je la vois se redresser, se trouver belle et fière d’elle. Et là, oui, c’est un grand moment de bonheur. C’est aussi à ce moment-là que je sais que j’ai gagné, surtout quand elle a la larme à l’œil. J’ai autant de plaisir à voir un tailleur porté par ma cliente qu’elle peut en avoir à le porter je suis très fière de mes tailleurs et de mes autres créations. Et heureusement car si je n’en étais pas fière alors je ne vois pas comment mes clientes pourraient l’être. Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
  • 19. 19 Comment devient-on créatrice de grande mesure ? Je ne suis pas couturière. Je suis artisan d’art. J’ai notamment la lettre du président de la chambre des métiers m’accordant la qualification du titre d’artisan d’art parce que je fais ce métier depuis plus de 6 ans et que j’excelle dans un domaine artistique qui est la couture. Ce n’est cependant pas ma formation. A la base j’ai un BAC D Mathématique et sciences de la vie suivit d’un DEUG de science Biochimie et physiologie Cellulaire car dans ma famille on ne fait que des études scientifiques. D’ailleurs ce n’était pas passe ton bac d’abord, mais passe ton bac+5 d’abord et ensuite tu feras ce que tu souhaites. Étant une fille j’avais quand même le droit de faire Science de la Vie. Mon premier acte de rébellion fut le choix de Sciences Po plutôt que l’X ou Mines. Quand j’ai annoncé mon choix, mes parents m’ont dit que j’allais me le financer car ils pensaient que je sortais du cadre et que ce n’était pas de vraies études. J’ai adoré Sciences Po. Ça a été dur et on bosse beaucoup mais c’est passionnant.  Diplôme de Science Po en poche j’ai fait le choix de sacrifier la réalisation de mes rêves. Je suis donc rentrée dans la finance d’entreprise plutôt que dans des cabinets type Deloitte ou Arthur Andersen. Plutôt que d’intégrer une nouvelle bulle, j’avais envie de me confronter à la réalité du monde. J’avais déjà été dans une bulle (famille, Sciences Po), et rentrer dans un cabinet cela aurait été encore le même univers, la même bulle. Je suis donc allée dans une entreprise pour être au contact des gens. Ce qui ne fut pas une mince affaire.  Quand on sort de Science Po, on est en tailleur escarpin avec des phrases un peu sophistiquées et tu te rends compte que les gens ne te comprennent pas. J’ai gardé le tailleur escarpin mais, afin de me faire comprendre, j’ai simplifié ma manière de parler. J’ai appris à travailler avec des gens qui n’avaient pas le même âge, ni le même cursus scolaire, ce qui fut très formateur. J’avais la chance d’avoir un bon profil et à part mon premier travail, je n’ai pas eu à chercher de nouvelles opportunités car on me chassait. Au bout de 12 ans plus ça allait, plus je changeais de métiers et un jour je n’ai pas réussi à me lever. J’ai donc quitté mon emploi et j’ai créé ma société. Je ne l’ai pas fait comme il le fallait : je l’ai créé car j’avais envie de faire de la couture pour tout le monde. Je n’avais donc pas ciblé la clientèle, et ça n’a pas marché. Après quelques années, je me suis rendue à la chambre des métiers, où on m’a expliqué que je n’avais pas monté mon projet initial comme il fallait. A ce moment-là il s’est dessiné une évidence : je devais m’adresser à des femmes comme moi. Celles qui avaient le même parcours et à qui j’allais offrir le petit plus que je m’offrais quand j’étais salariée : la création de mes tailleurs. Il y a eu un petit contretemps : je me suis cassé la jambe et suis resté alitée pendant 2 ans. Cela m’a permis de murir le projet, d’être au clair, de trouver les bons professionnels, les artisanes vraiment d’exception : ma couturière et ma brodeuse qui travaillent avec les techniques des maisons de haute couture. Le projet Trésya est né en 2004, Trésya Couture a été créé en 2008 et Trésya en mars 2014 et enfin l’ouverture d’un showroom sur Paris dans les prochaines semaines. Levée de fonds Au départ j’avais prévu une vraie levée de fonds avec un tour de table et des actionnaires. Cependant quand j’ai fait appel à certains actionnaires ils m’ont dit qu’ils préféraient donner sans pour autant devenir actionnaire et ils m’ont suggéré l’idée d’utiliser une plateforme participative. J’ai choisi la plateforme MyAnnona
  • 20. 20 car c’est la plateforme dédiée à l’entrepreneuriat féminin et parce que j’ai aimé l’image. Annona est la déesse romaine de l’abondance. Elle est représentée comme une femme sur un bateau. Et je trouvais que j’avais fait une belle traversée. Depuis le 28 mars la plateforme est ouverte et les gens commencent à donner pour la levée de fonds et pour ouvrir un beau showroom à Paris au cœur du monde du sur mesure qui va avec ma clientèle et l’image que j’ai envie de donner. Pour en savoir plus : Tresyacouture.com/fr Linkedin.com/in/tresyacouture Twitter.com/Tresyacouture Christine Bellocq – Trésya - Fondatrice et CEO
  • 21. 21 Sophie Floreani Sophie Floreani est responsable de la Conduite du Changement au sein de la DSI de BNP Paribas International Retail Banking. Née de parents italiens, elle a 2 enfants et parle 9 langues . Elle se définit comme une femme ayant du caractère, persévérante et pour qui le relationnel est fondamental. Mon métier me plait parce que je permets aux personnes de mieux supporter, de mieux vivre le changement et non pas de le subir. Et dans la société actuelle, avec toutes les disruptions que nous vivons, savoir s’adapter est indispensable. J’ai le sentiment d’être utile aux autres. Le changement, partie intégrante de mon parcours de vie J’ai eu un parcours riche et atypique qui m’a permis d’avoir une carrière internationale et d’apprendre 9 langues : faire de l’audit au Brésil, participer à la structuration de la « mission Eurostar », enseigner le français à Houston, en Indonésie, au sultanat d’Oman au Moyen- Orient, en Russie, diriger une école de Français pour Etrangers en France, mettre en place l’harmonisation du concours international de l’ESCP, … J’ai intégré BNP Paribas en mars 2006. J’ai commencé par m’occuper des séminaires d’intégration au niveau de la France et de l’international, puis une mission de 3 ans en Ukraine pour faire adhérer au changement que représente la mise  en place du modèle Multicanal. C’est en 2011 que la DSI me donne mon poste actuel : j’entre au CODIR. On me confie la responsabilité des enquêtes de satisfaction des utilisateurs de l’informatique pour nos filiales, le rôle de relai RH, Formation, Communication et surtout je dois monter une cellule de conduite du changement… Je c’est Nous Je dis « JE » mais le « JE » c’est mon équipe et moi. On fonctionne en mode start-up, les membres de l’équipe sont autonomes et responsabilisés, et du coup très innovants. J’ai toujours eu l’âme d’une entrepreneure ! Sophie Floreani – BNP Paribas International Retail Banking - DSI
  • 22. 22 Se recentrer sur l’humain Depuis novembre 2011 je travaille dans l’informatique. Le système éducatif français nous apprend souvent à nous concentrer sur la performance et la course à l’excellence, sur le rationnel, en négligeant parfois l’émotionnel et l’importance de se soucier de son corps, ce qui fait de nous des êtres humains complets. On est des êtres humains ! Il ne faut pas qu’on l’oublie et on doit capitaliser sur cette force. Plus on capitalisera dessus, plus on sera productif et performant pour le bien collectif. Mettre ses compétences individuelles au service du collectif. C’est du gagnant-gagnant. Mon objectif est donc de montrer que la productivité passe par le recentrage par l’Humain et en repensant les organisations.    Maintenant, on le sait, la performance purement financière, n’est plus un gage de réussite. Plus qu’un effet de mode, il y a des exemples concrets de grandes entreprises et d’institutions qui sont devenues performantes, en remettant la relation humaine au coeur de leurs actions et process. Pour mener à bien ce changement mon équipe et moi-même avons  mis en place des initiatives innovantes. Programme PEP’S C’est un programme d’accompagnement du changement auprès des collaborateurs suite à une réorganisation de notre I.T. Il vise à développer la motivation et la satisfaction des collaborateurs. Il s’agit d’ateliers ou conférences hebdomadaires ouverts à tous sur la base du volontariat, une bulle d’air dans la semaine,  durant lesquels les collaborateurs découvrent plusieurs outils directement applicables au quotidien autour de différents thèmes : nouveaux modes de management, techniques de créativité et d’innovation, connaissance de soi et gestion de la relation à l’autre, nouveaux enjeux business. Les intervenants sont variés à l’image des sujets proposés. Nous avons organisé des séances de sophrologie, de PNL et de pleine conscience (Mindfulness). Un ancien champion du monde de ski de vitesse a parlé de la gestion d’énergie pour être plus performant et un expert en GTD (Getting Things Done) a abordé l’organisation du temps pour la gestion de multiprojets sans stress. Nous avons touché quasiment tous les collaborateurs de la DSI qui ont dit avoir découvert des outils concrets qu’ils utilisent maintenant et dont ils ne soupçonnaient pas la puissance. About You Pour valoriser nos collaborateurs tous les jeudis, un collaborateur (de Paris, Rennes ou du Maroc) est présenté à toute notre DSI. (Plus de 500 personnes). Portrait personnel et professionnel, le collaborateur choisit son template, ses questions. L’objectif est de créer du lien, leur permettre de se découvrir entre eux. Vis mon job Cette action de découverte permet à un collaborateur de recevoir un de ses collègues pendant une demi-journée et de lui présenter concrètement son travail. Ça leur permet d’apprendre à se connaitre et de comprendre l’utilité de l’autre dans le groupe. Lors d’un « Vis mon job » un collaborateur a présenté son travail et notamment un de ses problèmes récurrent. La personne accueillie, de son regard neuf lui a suggéré une solution qui s’est avérée être efficace.  Le DSI, patron du CODIR I.T. a fait son « Vis mon job ». Il était ravi, son invité avait été tiré au sort par mon équipe parmi les volontaires. Il va maintenant être accueilli par la personne qu’il avait reçue. Il y a une vraie utilité à tout ça : cela montre une image différente de l’IT super expert, qui sont ouverts et innovants quand on leur propose et qu’on leur laisse le choix
  • 23. 23 et c’est aussi une façon d’enlever la pyramide hiérarchique même si elle est toujours là. 0 slides… En 2015, lors d’une convention nous avons donné comme consigne aux collaborateurs de réaliser des présentations sans aucune slide. Ils ont tous réalisé des films décalés mais pertinents. C’était génial ! A ce moment-là je me suis dit qu’ils avaient compris quelque chose : ils ont fait ce qu’ils n’auraient jamais fait avant : communiquer autrement. Les réseaux sociaux Je suis très active sur les réseaux sociaux, en particulier sur Linkedin, car ils permettent de s’enrichir de nouvelles connaissances et de partager des convictions ou des initiatives dans lesquelles on croit. C’est un puissant outil d’échanges, d’information et de communication. Cela fait partie du relationnel dans notre société actuelle et pour l’avenir. Je suis d’ailleurs impliquée dans un collectif de bénévoles pour l’emploi créé par Alban Jarry,  #i4emploi représentant plus d’1 Million de followers. Nous accompagnons depuis 7 mois plus de 270 demandeurs d’emplois dans leur recherche sur Twitter. Le collectif est d’ailleurs nominé dans la catégorie « Transformation de l‘économie traditionnelle » pour le prix « du Capital Humain » des ACSEL’R Awards 2016, qui sera décerné ce lundi 2 mai. Un livre blanc et un M.B.A. Le comité scientifique de l’Ecole Polytechnique d’Assurances (EPA) présidé par Luc Ferry auquel j’ai participé a permis d’aboutir à la rédaction d’un livre blanc «  L’Humain… dans le numérique et le Big Data » ainsi que la création d’un M.B.A. en Data Science en assurance  en partenariat avec Télécom ParisTech. L’idée de ce M.B.A. est de former des Data Scientists éclairés qui ne soient pas que des supers experts en DataScience, mais aussi professionnels qui remettent l’humain au centre. Ce M.B.A. donne un enseignement sur la stratégie, sur l’éthique et le management. C’est naturellement sur la partie enseignement managériale, qui dure 8 jours, que je suis intervenue. Je l’ai construit, pensé et je suis ensuite allée chercher les bonnes personnes pour l’enseigner. L’idée c’est de leur enseigner l’humain dans le management (on est vraiment dans l’innovation managériale) et les nouveaux modes d’organisation. C’est leur faire vivre des pratiques d’intelligence collective, leur apprendre un mode de fonctionnement collaboratif.  C’est la manière dont nous avons d’ailleurs fonctionné au sein de ce Comité Scientifique qui compte une quarantaine de personnes volontaires. Si nous avons pu créer ce MBA, c’est parce que nous avons mis nos égos de côté et apporté nos compétences individuelles au profit du collectif. Le mot de la fin « Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin » Proverbe africain Pour en savoir plus : Linkedin.com/in/sophf Twitter.com/sophiefloreani
  • 24. 24 Sophie Floreani – BNP Paribas International Retail Banking - DSI
  • 25. 25 Martin Garanger Bonjour, je suis Martin Garanger, je suis tireur et photographe. L’Atelier Martin Garanger est né le 2 janvier 2001. C’est un atelier d’impression numérique jet d’encre à pigment micro encapsulé. J’ai commencé avec la première imprimante au monde qui utilisait des encres à pigments : une Epson qui passait des rouleaux d’1m12 de large. Contrairement aux précédentes imprimantes qui utilisaient des encres à colorant, elle permettait, de par sa qualité, la réalisation de tirages non seulement d’exposition mais aussi de collection. Cela vient, notamment, du fait que, les encres à pigment résistent longtemps aux UV. On peut également choisir le support d’impression comme des papiers pur coton sans acide, des papiers d’art mat ou brillant, des supports plus ou moins blancs, plus ou moins texturés, etc. On fait des tirages qui par la nature du papier ne vont pas jaunir : ils ont une durée de vie de plus ou moins cent ans. Martin Garanger – Atelier Martin Garanger (Fondateur et CEO) Comment es-tu devenu tireur ? Je suis tombé dans la photo quand j’étais petit : mon père (NDLR : Marc Garanger) était photographe. Aujourd’hui il est à la retraite et ne produit plus de photos mais il a beaucoup voyagé et a notamment travaillé sur les campagnes de pub pour Kodak.  Etant jeune je me suis posé la question d’être, comme mon père, auteur photographe mais je n’ai pas réussi à trouver mon style et mon book était rempli de photos hétéroclites. Finalement j’ai travaillé dans l’audiovisuel en régie, casting et tournages. En 1999 j’ai travaillé pour l’agence Paysages fondée par Daniel Quesney un ancien photographe de l’Observatoire Photographique
  • 26. 26 du Paysage. Il avait besoin d’une personne pour numériser les tirages photos fournis par les photographes de l’agence. C’était des tirages 18×24 ou 24×30 cm que je numérisais sur un scanner à plat Epson ou Agfa à 600 DPI. Cela générait des fichiers de taille importante mais permettait de conserver une image de très haute qualité afin de répondre à toutes les demandes et même au-delà. A l’automne 2000 Daniel Quesney me suggère d’aller au salon de la photo. Epson y présente sa première imprimante au monde avec des encres à pigments :  une révolution dans le milieu. Fort de mon expérience auprès de l’agence Paysage et d’une somme perçue d’un héritage, j’en ai acheté une et me suis inscrit à la Chambre des Métiers en tant qu’artisan. Je me suis lancé dans ma toute nouvelle entreprise en tant que tireur avec mes quelques bases, directement sans avoir été tireur chez un confrère ce qui est généralement le cursus du métier. J’ai quand même fait un stage chez Picto et chez Georges Fèvre (NDLR : tireur de Robert Doisneau et Henri Cartier Bresson) avec qui j’ai énormément appris. Dans le domaine de la couleur j’étais un novice mais j’ai appris rapidement. Ainsi, les premières années de mon atelier, j’ai travaillé en collaboration avec le tireur Philippe Guilvard qui était à l’époque le grand spécialiste du tirage d’après négatif couleur à l’agrandisseur. J’ai beaucoup appris à ses côtés ; et de son côté cela lui permettait de pouvoir proposer à ses clients des impressions jet d’encres. Mon métier c’est d’accompagner un photographe, un peintre ou un plasticien en intervenant sur les aspects techniques de choix d’agrandissements, du papier, de la définition, de la retouche, de la chromie, de la densité, du contraste, etc. Je suis très à l’aise et j’y prends un vrai plaisir ! Ça ne m’empêche pas à mes heures de taquiner l’obturateur mais mon métier c’est le tirage, ça l’est depuis plus de 15 an. Tireur d’exception J’ai la chance de pouvoir travailler avec de grands photographes qui viennent de loin pour que ce soit moi qui tire leurs photos. Je pense notamment à Stefanie Dworkin qui prend son billet d’avion de New-York pour faire ses tirages ici avec moi et qui repart avec ses tirages sous le bras. En 2015 Henri Clément, un ami photographe de mon père, m’invite au vernissage de son exposition de photos lenticulaires. Alors qu’il était avec un de ses amis, il me présente en lui disant « Je te présente Martin Garanger un des meilleurs tireurs d’impression numérique ». J’apporte un grand investissement à chacun de mes clients, qu’ils soient grands artistes ou amateurs éclairés. Leurs retours me permettent d’évoluer dans ma pratique, et leur reconnaissance alimente ma passion pour mon métier. Participer par mon travail à l’immortalisation des œuvres de ces photographes est un grand privilège. Mon plus grand tirage Il fait 10m de haut sur 18m de large. Il est composé de 68 laizes qui font chacune 1m de large sur 2m40 de haut (taille des plaques réalisées par le maçon). Pour réaliser ce tirage, il m’a fallu 1 mois de travail, 3 jeux complets de cartouches d’encre et l’impression de 100 laizes et pour avoir les 68 bonnes. Il s’agit d’un tirage accroché sur un plafond en biais du Nouveau Théâtre LE MANEGE à MONS en Belgique. Il se trouve au dos des gradins en biais et devant il y a une verrière composée de vitres transparentes intercalées de vitres dépolies. La photo que j’ai tirée est une création de l’association Caravana Obscura fondée par Christine Felten et de Véronique Massinger. Pour la réalisation de cette photo elles ont transformé une caravane en
  • 27. 27 appareil photographique à sténopé géant. (NDLR : Un appareil photographique à sténopé se présente sous la forme d’une boîte dont l’une des faces est percée d’un trou minuscule qui laisse entrer la lumière. Sur la surface opposée à cette ouverture vient se former l’image inversée de la réalité extérieure, que l’on peut capturer sur un support photosensible, tel que du papier photographique. Comme l’œil, le sténopé capture des images inversées du visible. (Voir article Wikipédia). Elles ont utilisé du papier inversible couleur Cibachrome (NDLR : L’Ilfochrome, connu aussi sous le nom de Cibachrome, est un procédé de tirage photographique couleur depuis un film inversible, souvent sous la forme d’une diapositive couleur, produit par Ilford jusqu’en 2013) d’1m de haut sur 1m80 de large collé au fond de la caravane pour « imprimer » l’image. La durée de prise de vue est très longue : 1 journée, on voit ainsi par étape le déplacement du soleil. Cette photo représente un paysage avec une grande partie de ciel bleu très dégradé qui s’assombrit dans les coins. Ce travail photographique nécessite un gros travail de repérage et de préparation… Pour que je puisse tirer la photo, il a fallu numériser l’image originale chez Picto Front de Seine où il y a un scanner géant. Seulement c’est un scanner fait pour la réduction et non pas pour l’agrandissement, par exemple pour les peintres qui font des grands formats et qui ont besoin de visuels plus petits pour l’édition. On a donc scanné avec la plus haute résolution possible et il y a eu un fort ré-échantillonnage à l’impression pour conserver un rendu fidèle à la photo initiale. Ma plus grande crainte concernait le ciel qui était composé d’un très grand nombre de laizes car lors de l’impression il m’était impossible d’avoir suffisamment de recul pour savoir si le dégradé allait être fluide d’une laize à l’autre pour un assemblage final harmonieux et fidèle. Je suis allé à l’inauguration du théâtre et c’était magnifique. Illustration du fonctionnement schématique d’un sténopé.
  • 28. 28 Le tirage le plus long Il fait 38m de long sur 20cm de haut en 1 seule laize que j’ai imprimé en 2 exemplaires. L’impression a duré 3h mais il a fallu rester attentif tout le long pour vérifier que le papier restait bien droit malgré son changement de volume dû à l’encrage. La finition a pris beaucoup de temps également : un rouleau fait 1m20 de largeur et 40m de longueur, il a donc fallu réaliser les découpes sur chaque longueur des 2 exemplaires, soit 4x38m à raison d’1m par 1m. C’est la première fois que j’utilisais un rouleau dans son intégralité pour un seul tirage. Il s’agissait d’un papier mat de 115g qui avait besoin d’être fin pour qu’une fois roulé l’objet ne soit pas trop épais. La photo finale se regarde de gauche à droite et se manipule comme une Torah mais en image : on la fait défiler avec des manettes de gauche à droite C’est un ami photographe qui a offert cet objet à ses parents qui fêtaient leurs 50 ans de mariage et c’était toute leur vie en photos sur 38mètres de long. Le tirage le plus petit Il est à peine plus grand qu’un timbre-poste et fait 2cm sur 3cm. C’est une artiste qui avait fixé ses tirages au mur avec une loupe à côté des tirages pour que le spectateur puis les regarder. Le résultat m’a impressionné : avec la même imprimante que pour mon tirage de 38m de long, j’ai pu réaliser ceux de 2cm sur 3cm et cela reste des photos de qualité et non pas des points d’encres qui donnent un semblant d’image. Être Fils de… Quand j’étais plus jeune c’était plus difficile pour moi de trouver ma place. Mais ce qui est vraiment bien dans le fait d’être devenu tireur c’est que je peux travailler avec mon père en apportant ma valeur ajoutée. Nous sommes complémentaires  : Portrait de Martin Garanger dans son atelier de Montreuil.
  • 29. 29 Portrait de Martin Garanger dans son atelier de Montreuil. lui produit des photos et moi je peux les imprimer, les agrandir. Elles sont déjà magnifiques par son travail d’auteur et moi je peux leur donner vie en les matérialisant. Le mot de la fin Je pense à l’avenir Depuis quelques années je ne suis plus inquiet pour l’avenirdemonatelieret,Inch’allah, pourvu que ça dure ! Ma liberté de travail me plaît et j’espère pouvoir continuer de faire des tirages à mon propre compte, car je sais que c’est ce qui plait aussi à mes clients. Et ça c’est très important. Pour en savoir plus : Martingaranger.com Facebook.com/martin.garanger
  • 30. 30 Thierry Cardot Bonjour, je suis Thierry Cardot, le fondateur de l’Atelier Aubépine. C’est un atelier d’étude et de conception paysagère qui aménage des lieux privés ou public. Mon métier est la valorisation des lieux de vie ou de passage. Je considère l’histoire du lieu, des gens qui l’ont traversé ou qui le traversent actuellement ainsi que son environnement afin de construire une nouvelle histoire ou de continuer cette histoire commune. Pourquoi ce nom de l’Atelier Aubépine ? L’aubépine, c’est cette fameuse plante qui a été l’une des plus récalcitrantes que j’ai rencontré lors de ma jeunesse, celle que je voulais absolument faire disparaitre du fond du jardin parce qu’elle piquait et elle m’a résisté. En 2009, 20 ans après, c’est devenu l’Atelier Aubépine, Aubépine Crataegus. Mes clients L’Atelier Aubépine travaille avec tous, il peut s’agir d’entreprises, d’institutionspubliques,d’associations, de particuliers, etc. Je peux œuvrer sur des propriétés urbaines (hôtels particuliers, terrasses, copropriétés), mais également sur des propriétés domaniales ou historiques de province ayant un passé familial et/ ou patrimonial. Le premier projet de l’Atelier Aubépine a été l’étude et l’aménagement du couvent Dominicain de l’Annonciation (222 rue du Faubourg Saint Honoré) à Paris. L’architecte Jean- Marie Dutilleul venait de rénover leur lieu et ils m’ont demandé d’imaginer quelle suite donner à ce cloître qui avait été chamboulé par les réaménagements. Je leur ai Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
  • 31. 31 conçu un nouveau lieu dans lequel ils peuvent se retrouver en lien avec leur propre démarche personnelle et spirituelle. Vous pouvez voir quelques un de mes travaux sur le site internet de l’Atelier Aubépine et notamment le cloîtreducouventdel’Annonciation qui fut mon premier projet et qui peut être visité sur demande. J’ai un projet en cours à la Maison de la Pierre à coté de Chantilly avec une association historique liée à l’univers des carrières, ainsi que la réalisation des jardins ouverts au public de l’église Saint Pierre de Montmartre. Pour ce dernier projet, une recherche de mécènes est en cours par l’association. Comment je travaille ? Il s’agit d’une rencontre à 3. Il y a tout d’abord mon client, que je préfère appeler partenaire, avec ses désirs et envies qu’il projette. Il y a également le lieu, qui a sa propre histoire et enfin le paysagiste et sa passion, son regard. Le paysagiste réalise une histoire commune entre ces 3 personnes. Lors des premières rencontres nous échangeons sur l’identité du lieu : est-ce pour recevoir, y jouer, méditer ; sur les personnes qui y vivent actuellement, qui y sont passés et même qui doivent y venir. En fait le paysagiste travaille en fonction du lieu, des gens et de ce qu’il va en ressentir, il ne donne pas son propre caractère. C’est toujours l’approche du lieu et des gens qui le guide dans ces réflexions et dans la conception des propositions de projet, en tout cas c’est ainsi que je travaille. Après cela je vais pouvoir faire des propositions. Elles ne sont jamais fixes puisqu’il s’agit d’un dialogue, qui permet une évolution de la proposition au fur et à mesure des échanges. Adapter le projet permet au propriétaire de se projeter et de s’investir dans son lieu. Nous validons ensemble chacune des étapes de la réalisation jusqu’à la réception des travaux. Cela peut être un travail sur plusieurs années quand le cahier des charges est important et qu’il fluctue. C’est le partenaire qui fixe le programme et le paysagiste le suit ; Cela peut-être aussi une démarche à court terme. Par exemple en 2015 l’évêché de Pontoise a souhaité que je les assiste à l’organisation de l’événement « Rendez-vous aux jardins » organisé sur un week-end de juin par la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles). Dans le parc de l’évêché, sur 1 hectare ½ environ, il y avait différents artistes qui venaient exposer et j’ai réalisé la scénographie éphémère. J’ai également une démarche de conseil ou pédagogique : j’enseigne auprès de différents publics : jeunes et moins jeunes, en continuité ou reconversion professionnelle, agents de maitrise et jardiniers de collectivités territoriales sur des sujets liés à la biodiversité, le fleurissement durable, la gestion différenciée des espaces verts… Artiste ? D’abord j’ai eu une approche technique, de jardinier, que j’ai fait évoluer au fur et à mesure de mes expériences et formation. Mais la technique seule ne suffit pas pour créer quelque chose d’unique et adapté pour chaque projet. Un jour je me suis posé la question : que fait un paysagiste ? L’architecture est un art et je pense que l’architecture des jardins l’est aussi. Les jardins, quels que soient leur taille, leur fonction sont de véritables lieux d’expression artistique. L’école de Barbizon est un mouvement de peintres qui s’échappaient dans la nature pour la peindre. C’était un mouvement exceptionnel, enfin de mon regard. Cela m’a amené à peindre, à dessiner et même à photographier la nature. Le paysagiste s’appuie
  • 32. 32 sur la nature pour créer un tableau, un théâtre, un mouvement naturel ou sophistiqué en tenant compte de l’histoire du propriétaire, celle du lieu, des envies et des besoins des personnes qui y viennent et y viendront. L’avenir Le futur de l’Atelier Aubépine c’est d’ouvrir son regard tout en continuant son travail sur des lieux précieux botaniquement, qui sont un peu des trésors paysagers, tels des bijoux dans leurs écrins. L’Atelier Aubépine va continuer dans cette direction et va s’ouvrir en tant «qu’ aménageurs social ». La question de l’aménageur urbain est de se dire : « mais qui est l’homme dans la ville ? » et « quel est le paysage dans la ville ? ». La ville devient le temple de la préservation de la biodiversité. Dans les champs, aujourd’hui, les insectes sont en train de mourir, les abeilles sont en train de disparaitre elles ont de plus en plus de mal à retourner à la ruche, a se géolocaliser elles-mêmes et meurent. On se rend compte que les insectes deviennent de plus en plus protégés par la ville. Par la mise en place du protocole « Zéro phyto » dans les espaces verts, des ruches sont installées au cœur des villes. Ce que l’on appelle le fameux miel béton qui d’un point de vue énergétique et gustatif est très bon. Les insectes sont en train de revenir en ville, coloniser la ville, parce que nos plantations, la réalisation de microcosmes tels que des squares des parcs dans la ville, des zones tampons vertes dans la ville, plus ces allées, créent un maillage organique « vert », et devient donc un temple de la préservation de la biodiversité. On a toujours cette image un peu de Pagnol, de la petite maison au bord du champ. Mais aujourd’hui la petite maison au bord du champ utilise beaucoup d’insecticides, alors que dans la ville moins. Tout n’est pas parfait, loin de là, mais il y une véritable réflexion sur la place de la nature dans notre environnement citadin bétonné et sur notre place à nous. L’Atelier Aubépine c’est une histoire de passion depuis l’âge de 14 ans. C’est ma rencontre avec la nature. Jeune, je partais avec mon vélo et j’allais me promener, je regardais ce qui m’entourait. Le fameux fossé du bord de la route, la plupart des gens le regarde à peine, et pourtant il fourmille de vie, de nuance de couleur, de forme et de texture. Cela m’a toujours intrigué, je le faisais de façon insouciante à l’époque mais ça a construit mon regard d’aujourd’hui. Pour en savoir plus : Atelieraubepine.com Linkedin.com/in/thierry-cardot-76775237 Twitter.com/atelieraubepine Facebook.com/atelier.aubepine Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
  • 33. 33 Thierry Cardot – Atelier Aubépine – Fondateur et CEO
  • 34. 34 Geneviève Bouché Bonjour, je m’appelle Geneviève Bouché, je suis économiste, futurologue et ingénieur dans le domaine des Télécoms. J’ai un cabinet de conseils qui fait du management de l’innovation : il aide les investisseurs et les start-ups à investir en prenant directement les orientations qui préparent le futur. J’ai décidé de redonner vie au métier de futurologue parce que j’estime que nous traversons une période très mouvante où les futurologues pourraient aider par leurs savoirs faire. Futurologue c’est quoi ? Un futurologue c’est une personne qui essaie de comprendre le sens de l’histoire en s’intéressant au passé très récent et très lointain. Elle essaie de comprendre le sens de l’histoire afin de déterminer à quoi ressemblera le futur… Par exemple le Brexit qui vient d’avoir lieu la semaine dernière, c’est un évènement fort, mais quand on regarde le sens de l’histoire, toutes les conséquences qui vont en découler aurait dû, de toute façon avoir lieu, et étaient prévisibles. C’est un exemple typique de ce que savent faire les futurologues. J’ai appris la futurologie en côtoyant les commissaires au plan de l’équipe de Charles de Gaulle, qui étaient encore en fonction à la fin des années 70, et j’ai soutenu ma thèse avec 2 d’entre eux (dont Simon Nora). Un de nos chargés de TD a également fait parler de lui : Jacques Attali. Ces gens avaient des méthodes de travail, des visions et surtout une éthique que je trouve extrêmement intéressante à mettre à disposition de tous les gens qui ont envie de réfléchir et ensuite d’agir dans un changement. Pas seulement sur le plan de l’environnement écologique mais sur le plan de l’environnement Geneviève Bouché – Futurologue
  • 35. 35 social et sur le plan économique parce que ces 3 environnements sont interdépendants. Aujourd’hui mon cabinet fait du management de l’innovation pour les investisseurs qui veulent orienter leur portefeuille d’investissement en s’installant dans le sens de l’histoire parce qu’ils investissent à 5 ou 10 ans et même beaucoup plus loin. Les start-ups sont pensées pour le monde de dans 20ans. Dans les bibliothèques on pense à 30 ou 40 ans et même au-delà. Je mets également mon savoir-faire à disposition de partis politique, d’ONG, de Think tank, etc. La politique ? Pour la présidentielle de 2012, j’ai réaliséunepublicationquis’appelait « Mieux que la réindustrialisation » et je l’ai adressée à tous les candidats. Cette publication qui était en créative commons a été téléchargée plus de 2700 fois. Je me suis rendue compte que ce que j’y disais avait finalement été entendu, comme les feuilles de thé dans l’eau : ça avait infusé. Pour la présidentielle de 2017, à priori, je vais faire la même chose mais dans l’autre sens : je ne vais pas m’adresser aux candidats, mais aux électeurs. J’ai envie de leur dire d’arrêter de détester la classe politique. Il me semble plus constructif de formuler des demandes, d’accompagner les élus jusqu’à la réalisation, mais également de tirer ensemble les leçons des échecs pour les prochaines tentatives. Combien de futurologues en France ? On m’a dit un jour que nous étions 4. Je n’en connais qu’un. Si nous sommes aussi peu en France, c’est parce que notre métier est vraiment peu connu. Quand on m’a donné mon diplôme, on m’a quand même dit qu’il y avait peu de chance que je puisse gagner ma vie avec… C’est vrai que dans mes premiers jobs, je m’en suis servi sans m’en rendre compte et dans tous les cas de façon non-officielle. C’est en avançant en âge, en voyant qu’on s’enfonçait dans ce que l’on a appelé improprement « la crise », qui n’est pas une crise mais un changement de civilisation,  que j’ai commencé à prendre conscience que ce que je savais faire pouvais beaucoup apporter. Je m’implique dans une structure qui a maintenant 4 ans : La Société Française de Prospective où l’on est 2 futurologues Thierry Gaudin et moi. Sinon tous les autres membres (une quarantaine) sont des prospectivistes. La différence entre la prospective et la futurologie ? La prospective c’est pour 3 ans, 10 ans ; les prospectivistes travaillent sur des mécanismes de différentes scénarios : extrêmes (« Tout le monde aime mon produit » / « Personne n’aime mon produit »), probables, souhaitables. On peut ensuite dire quelle est la stratégie qu’il faut avoir aujourd’hui pour aller vers l’accomplissement du scénario que l’on souhaite voir se réaliser. La futurologie, va plutôt s’attacher aux évènements passés et à leurs incidences aujourd’hui. Le futurologue dit « oui étant donné que là on a fait des coups foireux, cacher la poussière sous le tapis,… on sait, de façon certaine, que ça va remonter à la surface… » Le Brexit, c’est l’Angleterre qui a au moins 3 identités d’attache fortes mais qui ne sont pas compatibles. Total, à tout vouloir ils se retrouvent avec rien. Et ça va être compliqué pour eux et pour les problèmes qu’ils créent aux autres, ça c’est typiquement un travail de futurologue. Est-ce que Tchernobyl, dont on vient de fêter les 30 ans, peut rentrer dans le cadre d’un job de Futurologue ? Le principe de la futurologie c’est de s’affranchir de ce que l’on appelle « la petite histoire » c’est- à-dire qu’en fait, dans le cosmos, tout change sans arrêt et ce qui doit arriver, arrive. Cela peut se faire soit à travers des processus lents que l’on
  • 36. 36 arrive à dessiner quand justement on s’intéresse au temps long soit avec des évènements brutaux difficilement prévisibles mais qui finalement devaient arriver. Tchernobylc’était,malheureusement, dans le champ du possible. Il se trouve que c’est arrivé comme ça, du coup la déclinaison immédiate va avoir des effets spécifiques. Je ne sais pas si un futurologue aurait pu le prévoir précisément, mais cet évènement et ses conséquences nous ont permis d’apprendre beaucoup, non pas sur les aspects techniques d’une centrale, mais sur la gestion d’une crise et de l’impact que cela a pu avoir sur chacun à différents degré et à différentes temporalités. De par notre développement, nous sommes devenus énergivores, et donclapistedunucléaireabeaucoup séduit même si on savait que c’était très dangereux.  Pour l’anecdote, un des hommes qui travaillait avec Marie Curie, était fasciné par cette pierre fluorescente. Il la mettait même dans sa chemise pour la présenter lors de soirées ! Comme pour beaucoup d’innovations et de découvertes, on trouve souvent au début que c’est magnifique, révolutionnaire, etc. Et avec le temps et un approfondissement de nos connaissances on se rend compte parfois des dangers terribles que nous ne soupçonnions pas ou de nouvelles utilisations possibles dans des domaines tout autre que celui au départ. Ce n’est pas l’histoire de l’énergie nucléaire qui m’intéresse, c’est plutôt toute l’histoire de la maitrise de l’énergie qui me semble intéressante. Si on regarde attentivement ce qui se passe dans ce domaine, on s’aperçoit que l’on revient à des choses beaucoup moins spectaculaires, et en même temps, beaucoup plus proche de ce que la nature fait, depuis toujours. C’est-à-dire qu’on admet qu’un corps vivant est à la fois producteur et consommateur d’un certain nombre de chose et donc l’homme organise la production et la consommation. Ça c’est tout à fait fascinant. Sans vouloir raconter mon dernier livre Changeons de civilisation mais ce mécanisme-là est en train de s’opérer dans tout ce qui concerne l’information d’une façon tout à fait symétrique. Or l’information pour l’homme c’est excessivement important, Manger boire et dormir ce n’est pas suffisant, il lui faut de l’information. Il devient à la fois producteur et consommateur d’information, comme pour l’énergie. On est en train de basculer de la loi du plus fort à celle du plus adaptable. Et c’est là que notre civilisation est en train de faire un changement phénoménal parce qu’on change vraiment le disque dur. Le système de base est en train de basculer. Et ce qui est extraordinaire, c’est que ce changement de civilisation n’est pas porté par un pays ou une classe sociale qui devient dominante mais il est porté par les générations Y et toutes celles qui sont derrière et qui le font avec une force absolument magnifique parce qu’elles ont peur que la planète périclite. Geneviève Bouché – Futurologue
  • 37. 37 Que peut-on dire sur ce grand changement ? Ce qui est très anxiogène, là je vous livre mon point de vue de futurologue, c’est que quand on décortique la caractéristique du changement de civilisation qu’on est en train de vivre par rapport à d’autres changement de civilisations de références comme par exemple la chute de Rome, la révolution de 1789, la guerre de sécession aux Etats Unis, là c’est un changement de civilisation d’une amplitude comparable à ce que nos ancêtres ont connu quand ils se sont sédentarisés. Ils ont également inventés ces 2 concepts avec lesquels nous sommes toujours empêtrés : la propriété et le produit de la propriété, la rente. C’est un changement de civilisation excessivement complexe et profond qui s’annonce. Mais le problème, c’est que nous n’avons pas le même délai que nos ainés. Ils se sont sédentarisés étapes par étapes, zone géographique par zone géographique et sur plusieurs milliers d’années. Nous, nous sommesquandmêmetrèsbousculés par les problèmes climatiques, démographiques, économiques, etc.  Les études prédisent une population mondiale à 9 milliards en 2050, la planète n’est pas faite pour supporter autant, à 7 milliards elle est déjà à la peine. Le mot de la fin Les hommes sont maîtres de leur destin, ils peuvent faire des choses effroyables comme des choses extraordinaires. Mais dans tous les cas, faire le travail de réflexion sur notre avenir souhaitable, qui ne sera que la résultante du sens de l’histoire et de la suite que nous voulons lui donner, est indispensable. Le savoir-faire des futurologues est encore présent en France, il faut le faire connaitre. Que les gens se l’approprient et fassent des merveilles avec. Pour en savoir plus : Linkedin.com/in/gbouche Lire en ligne l’édition du livre « Mieux que la réindustrialisation » Le site de la Société Française de Prospective : societefrancaisedeprospective.fr
  • 39. 39 Valérie Anne d’AsnièresJe suis Valérie Anne d’Asnières. La famille est importante pour moi, elle m’inspire beaucoup. Je suis issue d’une vieille famille normande d’Asnières en Bessin, pays des âniers. Je tiens de ma famille mon sens de l’engagement : mon grand-père était un des agents de renseignements d’Omaha Beach. Pour moi, la Liberté ça a un sens, un prix et je suis très fière de ça. Je suis une femme qui ne renonce jamais et je sais ce que veut dire l’engagement. Mon projet est né dans ma cuisine et j’en suis fière. C’est un clin d’œil à ma grand-mère parisienne qui était une cuisinière hors pair. La genèse J’ai fait des études de pharmacie et j’ai travaillé plus de 20 ans dans la promotion et la vente des médicaments, mais j’ai fait un burn out. Il a donc fallu que je pense différemment et que je revoie ma situation professionnelle : j’ai pris des cours de décoration intérieure, option ameublement, toujours en rapport avec la matière et je suis devenue artiste peintre plasticienne spécialisée en art animalier. Un jour un de mes fils m’a demandé au petit déjeuner un chocolat chaud mais la boite qui était ouverte au fond du placard était périmée depuis très longtemps… Je ne pouvais pas lui donner, mais je trouvais dommage de jeter ce chocolat. Je me suis dit que ce serait vraiment drôle de m’en servir pour créer une nouvelle matière et c’est de là que tout est parti. Après ça a fait boule de neige : j’ai rédigé Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
  • 40. 40 un brevet, et avant son dépôt je me suis fait accompagner pour créer ma première société « Cœur de Couleur » et une marque de peinture dans le domaine des loisirs créatifs : « HADOINIE ». Je travaille sur la valorisation des déchets et des détritus alimentaires. J’ai élaboré et mis au point des matériaux à base de pigments d’origine alimentaire dans le domaine de la décoration (peinture, vernis, enduits et encres) ainsi qu’en cosmétique (vernis à ongles, teinture, soins capillaire et poudre maquillante). Comment trouves-tu tes matières premières ? Je fais du « sourcing ». Certes, je pourrai prendre une poubelle, la trier, la valoriser, mais il est plus judicieux de travailler par étapes. Ainsi je travaille d’abord sur des sous-produits. Je suis en contact avec différentes plateformes de valorisation des déchets, d’aliments invendus telles que Phenix, Eqosphere, Bien Manger… Ça peut être aussi des industriels de l’agro-alimentaire qui font de la transformation ou des collaborations comme avec l’université de Nanterre avec laquelle je vais travailler sur 3 résidus de produits :   - Le pain   - Les peaux d’oranges issus des distributeurs de jus d’orange frais,   - Et le café. Je travaille avec des passionnés de la matière. Ça va du professeur enseignant, chercheur des mines en passant par des architectes, des designers, des entreprises comme la mienne. On réfléchit comment améliorer la gestion des déchets, l’amélioration de la santé en combattant la pollution due à ces déchets. J’ai envie de participer à la création de nouvelles valeurs dans ces filières. Par exemple j’aimerai rencontrer Ladurée ou Pierre Hermé et leur proposer une collaboration qui leur apporte une valeur ajoutée dans leur RSE. Comme moi ils sont en recherche constante, de nouvelles saveurs, couleur matière, à travers la dégustation. La différence c’est que je m’arrête avant la dégustation. Je prends l’exemple de mon chocolat périmé  qui a une seconde vie sous la forme de peinture, pourquoi les restes de macaron ne pourraient-il pas devenir complètement autre chose à leur tour ? On pourrait travailler ensemble et créer une encre ou un vernis à ongle à base de macaron. Mon projet permet un début de solution par l’économie circulaire : j’utilise  nos déchets pour les transformer et les rendre utiles. Mon projet, c’est tout un tissu Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
  • 41. 41 économique, j’ai besoin de différents corps de métiers, je suis comme un chef d’orchestre, je veux faire travailler beaucoup de monde à chaque étape de mon innovation. C’est ça qui est intéressant. Lancement de ma première unité de production Actuellement, après plus d’un an et demi de réflexion, je suis dans la phase de création de ma première usine. Je suis très bien entourée et soutenue. Il ne me manque plus que des aides financières que je vais avoir bientôt via l’État,  je suis donc très contente. A la rentrée je vais faire le point avec Paris Ouest la Défense qui me soutient, l’Ecole des Arts et de l’Image de Rueil Malmaison, plus tous les acteurs qui m’entourent, puis commencer à chercher des locaux, estimer le budget exact et rencontrer des investisseurs. Positionnement des grandes maisons cosmétiques par rapport à toi ? J’ai des retours très positifs ! J’ai passé plusieurs concours et il y’en a un dans lequel je suis arrivé 5ème sur 70, j’étais le petit outsider face aux grands. La lauréate a travaillé sur la génétique des plantes pendant des années avec toute une équipe derrière elle ; et je suis vraiment ravie d’être arrivée 5ème et d’avoir pu pitcher devant les grands noms de la cosmétique. La Cosmetic Valley m’a dit que mon intervention avait beaucoup intéressé et suscité beaucoup de questions. Pour mes projets dans la cosmétique j’ai dû travailler sur la question de la qualité, de la traçabilité des produits sans risques d’allergie : les Safety Agrements. J’ai donc proposé aux industriels de l’agro-alimentaire d’ajouter à leur batterie de tests toxicologiques et bactériologiques déjà existante certaines analyses leur permettant d’avoir le label Safety Agreements pour les produits qui seront ensuite réutilisés. Les industriels de la cosmétique trouvent ça génial, car ça augmente la qualité, la sécurité et la traçabilité. Le coût de ces nouveaux tests n’est pas très élevé et cela permet par la suite de travailler avec les « déchets » agro-alimentaire devenus des matières premières sûres. Les consommateurs sont de de plus en plus éclairés et exigeants, ils veulent de l’innovation du Safety, du bio, ils veulent tout. J’essaye de répondre à leur demande en leur proposant des produits différents dans leur conception.  Cette gestion optimisée de nos ressources est plus respectueuse de l’environnement, et les produits conçus sont d’excellente qualité. Les streets artists Je me lance dans la cosmétique, mais je n’oublie mes autres projets ! J’attache la même exigence de qualité à tous mes produits. L’artiste graffeur Socrome (qui évolue au sein du collectif Le Chat Noir) a réalisé une performance le soir de l’inauguration du 20ème salon du chocolat en utilisant mes peintures que j’avais pour l’occasion conditionnées en format Valérie Anne d’Asnières – Cœur de Couleur – Fondateur et CEOFondateur et CEO
  • 42. 42 aérosols avec un gaz propre. En discutant avec les streets artists de Vitry sur Seine en particulier j’ai compris qu’il y avait un réel potentiel au niveau des peintures. J’ai compris leurs contraintes et, à leur demande, j’ai réalisé un cahier des charges afin de pouvoir leur fournir des peintures naturelles en aérosols qui leur permettent de travailler en intérieur sans masques et de pouvoir proposer des ateliers auprès d’un plus large public comme les enfants. Avec le cahier des charges j’ai commencé ma première étude de faisabilité. C’est loin d’être fini, mais après un an de travail, je pense que ce sera abouti d’ici une dizaine de jours. Je vais pouvoir envoyer les premiers dosages en prototypage. Si les artistes valident mon produit, je pense que je lancerai une campagne de crowfunding. Elle servira à me faire connaitre, mais aussi estimer les premières sorties de flacons. De l’économie circulaire à la tour Eiffel en chocolat Mon projet fait vivre beaucoup de monde, je crée du lien, de l’emploi et de la solidarité. Mon meilleur exemple est ma rencontre avec la Mairie de Paris que j’ai fait rire. Je suis allée les voir en leur parlant de mon rêve : récolter tous les résidus de cacao partout en France, que tout le monde s’y mette du petit citoyen qui va à l’école, aux brasseries et aux grosses entreprises ; fabriquer ainsi 60 tonnes de peinture pour repeindre la tour Eiffel afin de montrer que l’économie circulaire ça marche si chacun de nous se lance ! Vous imaginez tout ce qui serait possible si nous étions tous sensibilisés et avancions pour une cause commune. BPW C’est une des plus vieilles ONG de femmes au monde qui a été créée en 1930 par le Dr Lena Madesin Phillips. Nous travaillons sur l’égalité Homme Femme et la discrimination dans le monde du travail et luttons contre les stéréotypes. BPW travaille sur la valorisation et l’autonomie des femmes. Cette ONG internationale a mis en place la Journée de l’égalité salariale (Equal Pay Day). Cet indicateur permet de mettre en évidence le nombre de jours supplémentaires que les femmes doivent travailler pour atteindre les mêmes salaires que les hommes l’année précédente. Ce jour-là j’aimerai mettre en place une performance artistique avec la réalisation d’une fresque par des femmes et des hommes streets artistes. J’aimerai aussi proposer une association avec Marc Jacob qui vient de sortir un vernis à ongle pour hommes afin que tous les hommes et les femmes soient vernis. Il est important que nous soyons tous mobilisé et je sais déjà qu’il y a plusieurs réseaux qui seraient partie prenante, pour nous soutenir. Pour moi BPW c’est certes un engagement mais c’est joindre l’utile à l’agréable. Cela fait partie de moi. J’aimerai en faire un avec VoxFemina car chez BPW nous sommes toutes experte dans notre domaine et on a toutes besoin de se soutenir, de savoir se valoriser. Le mot de la fin Je vais commencer à rédiger une conférence pour expliquer mon innovation, ce que j’en ai fait et ce que je vais en faire. Je souhaite que mon expérience puisse aider d’autres femmes dans leurs projets respectifs. C’est là mon engagement.   Pour en savoir plus : Linkedin.com/in/valerieanne Twitter.com/Hadoinie Site de Phenix : wearephenix.com Site d’Eqosphère : eqosphere.com Site de Socrome : socrome.com
  • 43. 43 Valérie Anne d’Asnière – Cœur de Couleur – Fondateur et CEO
  • 44. 44 Guy Lessieux Guy Lessieux, j’ai 74 ans, j’ai toujours souhaité être médecin, ça a été mon objectif depuis toujours. J’ai fait mes études à la faculté de médecine de Paris, il n’y avait qu’une seule faculté de médecine à l’époque et c’est le putsch des étudiants en 1968 qui a permis l’ouverture de plusieurs facultés. Toute ma carrière a été faite en médecine générale. Conjointement à l’exercice libéral, j’ai été médecin de soins à la RATP et j’ai assuré pendant 20 ans les fonctions de médecin directeur du service d’hygiène de la ville de Boulogne Billancourt. A 65 ans j’ai cessé mon activité professionnelle. Comment j’ai débuté à l’Ordre de Malte ? Un soir de 1997, alors que j’allais faire une séance de vaccination contre la grippe, mon épouse qui était infirmière me demande si je vaccinais les sans-abris. Elle me pose une problématique que je n’imaginais pas. J’ai pris contact avec la mairie de Boulogne Billancourt qui m’informe que l’ordre de Malte réfléchissait à la création d’une structure médicale pour les sans- abris. C’est ainsi que j’ai commencé à travailler comme bénévole à l’Ordre de Malte. SAMU social médical : 40 personnes au service des SDF Dans la nuit du 6 au 7 février 1998, a eu lieu la première maraude médicalisée dans les Hauts de Seine. Au début nous étions moins d’une dizaine de bénévoles (2 médecins, 2 infirmières, 1 pharmacienne, 2 assistants et 1 ou 2 conducteurs), et nous ne tournions que le mardi Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
  • 45. 45 soir à partir de 20h30 jusqu’à parfois 5h du matin ! Nous ne pouvions pas proposer plus de sorties au vu de notre petit effectif. Depuis le nombre de médecins et de bénévoles a augmenté régulièrement et nous pouvons assurer 2 maraudes par semaines : le mardi et jeudi soir. Actuellement nous sommes 40 bénévoles : 10 médecins, 10 infirmières, 10 conducteurs et 10 assistants. Une pratique illégale Le SAMU social médicalisé était, à ses débuts, une activité illégale : le Conseil de l’Ordre des Médecins interdit de faire de la « médecine foraine».J’aidoncécritauPrésident du Conseil de l’Ordre des Hauts de Seine qui a trouvé la question trop complexe pour pouvoir donner son accord. Il a transmis la demande au président du Conseil National de l’Ordre des Médecins qui a répondu immédiatement en nous approuvant à 100%. Certes la médecine foraine est interdite mais il a donné son accord au nom de la nécessité médicale. Qu’est-ce que la médecine foraine ? Un médecin, soit il est appelé au chevet d’un malade chez lui, soit le patient vient au cabinet. La médecine foraine, pratique interdite en France, c’est faire de la médecine dans la rue. En maraude la réalité du terrain diffère de la théorie de la médecine : les SDF montent dans l’ambulance pour recevoir le diagnostic et les soins nécessaires uniquement quand ils le veulent bien. Mais la majorité du temps on fait diagnostics et soins sur le trottoir et c’est contre la règle théorique de l’exercice de la médecine. Comment ça se passe sur le terrain ? Comment vous accueillent les SDF ? La plupart du temps, très chaleureusement avec un grand sourire, ce sont des amis. On se serre souvent dans les bras. Parfois lorsqu’ils sont très alcoolisés, ils peuvent être agressifs et nous envoyer promener. L’alcool est une des pathologies les plus courantes du monde de la rue. Nous tissons des liens avec chaque personne. Cela peut prendre du temps, mais dans l’ensemble ils attendent nos visites et sont peinés lorsqu’ils ne nous voient pas. Un patient qui avait des lésions monstrueuses au membre inférieur droit avec un œdème et des plaies refusait totalement les soins. Au fur et à mesure, il a accepté que nous le soignons. Il refusait de monter dans l’ambulance, mais il a accepté qu’on lui fasse le pansement sur le trottoir. Les passants dans la rue sur le trottoir regardaient ça avec de grands yeux, surpris et étonnés. Cet homme c’est un miracle : on a mis 4 ans pour pouvoir le soigner et le sauver. Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
  • 46. 46 Comment trouves-tu les SDF ? Quel réseau te permet de pouvoir les géolocaliser ? LesSDFsontsignalésparleséquipes de maraudes non médicalisé de l’Ordre de Malte, il y a 2 équipes (Rueil Malmaison et Boulogne Billancourt), mais également par le 115 ou les autres équipes de maraudes non médicalisées. Toutes les associations et institutions connaissent mes coordonnées et m’envoient les signalements. C’est un vrai maillage : on ne peut pas travailler seul. Nous travaillons tous ensemble, en réseau. Mais nous ne fournissons aucune information médicale à nos partenaires. Le serment d’Hippocrate me lie au secret médical absolu. Je peux dire si j’ai vu X ou Y mais jamais pour quelle pathologie. Refus de soins ? Pour les SDF c’est comme pour toi, je ne peux pas t’obliger à te faire soigner même si je te dis que ta vie est en danger. Cependant, en psychiatrie, il y a l’Hospitalisation d’Office lorsque la personne est dangereuse pour elle ou pour autrui.  Ça m’est déjà arrivé de devoir réaliser un certificat de ce type. Cependant lorsqu’ils ressortent de l’établissement psychiatrique, généralement ils sont très mécontents, c’est un moment dur, pénible pour eux. Par sécurité pour les bénévoles et pour moi, les SDF ne savent jamais qui fait le certificat. Je suis un peu prudent ! Combien réussissent vraiment à s’en sortir ? A retrouver un toit, une sociabilisation ? C’est un monde extrêmement difficile ne soyons ni pessimiste ni optimiste, peut-être 10%… Ce n’est pas beaucoup. Lorsqu’on est au fond d’un gouffre il faut remonter les marches les unes après les autres. Pour te faire comprendre voici l’histoire vraie de Madame L. Il y a au moins 15 ans, dans une ville X, près de la boutique Orange. C’était une personne à qui nous proposions des soins, de la nourriture… elle refusait tout. Elle était toujours allongée sous sa couverture, son matelas et nous ne savions même pas si elle était grande ou petite.  Un jour elle me dit qu’elle a mal au thorax. Je lui demande de monter dans l’ambulance pour se défaire afin que je puisse l’examiner. A force de persuasion elle accepte et nous avons tendu des draps par discrétion. Elle s’est légèrement dévêtue et j’ai vu un « magnifique » Zona Intercostal. C’est une infection virale, qui fait très mal. Je lui donne les médicaments adaptés à son zona. On lui offre aussi une Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
  • 47. 47 soupe qu’elle accepte non pas pour son plaisir mais pour nous faire plaisir. Je la revois la semaine suivante ou elle m’annonce être guérie : ses lésions avaient effectivement disparues. C’était miraculeux. Elle a accepté une soupe, toujours pour nous faire plaisir. Les services sociaux la prennent en charge et la reloge dans un petit 2 pièces. On pensait que c’était un beau résultat. Et que si cela pouvait se faire pour tous les sans-abris se serait merveilleux. Un jour elle a demandé à ce que nous passions la voir chez elle dans son petit appartement pour nous offrir un apéritif chaleureux. Nous y sommes allés. Elle ne dormait pas dans sa chambre, dans son lit mais par terre dans sa cuisine contre des sacs en plastique : on ne peut pas changer les habitudes. Sur une planche entre 2 tréteaux, elle avait préparé l’apéritif : une bouteille de vin blanc, de l’eau si on voulait couper le vin blanc, des verres et sur une assiette en plastique, du pain coupé en lamelle avec un kleenex par-dessus par propreté et hygiène, une véritable évolution par rapport à sa vie dans la rue. Elle nous sert l’apéritif et demande à voir le docteur, moi en l’occurrence. Par discrétion et par réserve, nous allons dans la pièce d’à côté et je lui demande ce qui se passe.  Elle me demande un médicament pour dormir. Je lui demande si elle dort mal, mais elle me répond que Non ! elle veut le médicament pour dormir dé-fi-ni-ti-ve-ment. C’est-à-dire qu’elle voulait mourir. Extrêmement penné d’entendre cela je lui demande ce qu’il se passe. Et là elle m’a dit qu’elle a connu la pire des choses : la rue. Maintenant elle est dans le luxe, elle est bien et elle peut s’endormir définitivement. Conclusion de l’histoire : elle a regrimpé les marches trop vite. Il faut que les personnes de la rue remontent étape par étape progressivement pour qu’ils se reconstruisent c’est extrêmement important, mais il y a de ça 15 ans on ne le savait pas encore. Il n’y a pas encore de cours à la faculté pour apprendre la réinsertion et les soins des malades de la rue. C’est l’expérience qui nous l’apportent et là maintenant nous en avons tiré la leçon. Nous travaillons avec des Centre d’hébergement qui permettent ce temps de reconstruction et d’accompagnement vers l’autonomie. L’Ordre de Malte a plusieurs structures de ce type. Nous travaillons en particulier avec la Péniche Le Fleuron Saint Jean à Paris qui accueille des gens venant de la rue qui vont avoir besoin de beaucoup de temps, et la Péniche le Fleuron Saint Michel à Asnières où le public accueilli est déjà dans des démarches d’insertion. 1er novembre : la trêve hivernale – Qu’est-ce qui se passe ? Le gouvernement donne plus de moyens et ouvre des lieux d’accueil supplémentaires pour les SDF. Certes ça leur apporte un toit, ils sont mis à l’abri pour la durée de l’hiver, malheureusement ces lieux sont fermés le reste de l’année et ça pose problème. Et chaque année à partir d’avril, recommence le problème du manque de place. Les médias n’en parlent pas mais l’été est plus dramatique que l’hiver. Malgré la mise en place de « plan canicule », la prise en charge des personnes SDF durant la belle saison est encore largement insuffisante. Lorsqu’il fait très chaud ils ne boivent pas de l’eau mais du vin de la bière ou des alcools fort, voire de l’eau de Cologne (à même dose d’alcool nous, nous serions morts) ce qui les déshydrate fortement. Le risque d’insolation est donc accru pour ce public, avec malheureusement parfois des conséquences dramatiques. En 2016, il n’est vraiment pas normal que des gens se retrouvent sans solution d’hébergement, malgré leur demande ! C’est d’autant plus révoltant quand on sait que des structures adaptées
  • 48. 48 Guy Lessieux pendant les maraudes médicalisées – Ordre de Malte - Médecin
  • 49. 49 existent, mais ne sont pas accessibles pour des raisons saisonnières… De quoi l’Ordre de Malte a besoin pour changer la donne ? Nous avons besoins de plus de bénévoles. Je suis à la recherche de médecins, d’infirmières, car bien que nous soyons une dizaine de médecins, parallèlement à la maraude médicale, nous créons des consultations dans les foyers, et actuellement je suis en train de créer une 9ème consultation hebdomadaire dans un foyer d’hébergement. C’est extrêmement important de le développer : la plupart du temps, ils ne peuvent pas aller consulter ailleurs et très souvent ils oublient les rdv. Il est donc important qu’ils puissent consulter sur les lieux même qui les accueille au quotidien. Les foyers sont les accueils de jour ou nocturne. Par exemple au Fleuron Saint Jean nous consultons 3 fois par semaine. Ce sont des passagers qui arrivent à 18 h et qui repartent à 8h le lendemain matin. Y’a d’autres foyers ou les accueils et consultations se font dans la journée. Régis de Nacfaire de Saint Paulet le Directeur Général de l’Ordre de Malte a annoncé en 2015 qu’il y aurait 8 structures en France d’ici 2020. Il vient de se créer une consultation médicale à Lille et cette année une maraude médicale va se faire à Annecy. Il y en a une prévue à Montpellier et une dans les Yvelines, les choses bougent. Nous travaillons à l’acquisition d’une nouvelle ambulance pour les maraudes médicalisées du 92. Nous avons besoin de 55.000€ en fonds public et fonds privés. C’est la division du don et legs qui gère cette partie pour récolter les fonds ; il y a déjà plusieurs contacts dont la famille Bettencourt [L’Oréal NDLR]. Le mot de la fin Les personnes SDF ne doivent pas être réduites à leur condition de personnes sans-abris. Ce sont des personnes courageuses qui nous peuvent nous apporter énormément si nous prenons le temps d’être à leur écoute. Pour en savoir plus : Ordredemaltefrance.org Le site du Samu Social International : Samu-social-international.com Le baromètre du 115 sur le site de la FNARS : Fnars.org/publications-fnars/barometre-115 Collectif Les Morts de la Rue : Mortsdelarue.org Gaël Dupret/MaxPPP Maraude Médicalisée de l’Ordre de Malte
  • 50. 50 François-Xavier Leroux Bonjour, je m’appelle François-Xavier, vigneron. Après plusieurs années de préparation j’ai lancé ma maison de champagne « Hippolyte Leroux ». 2016 est ma deuxième année de commercialisation. J’ai passé mon BAC en région Champagne à Avize puis un BTS en apprentissage à Beaune en Bourgogne et une Licence Professionnelle de Commerce à Chalon-sur-Saône. J’ai continué mes études en Suisse à Changins la Haute Ecole de Viticulture et Œnologie de Nyon (entre Genève et Lausanne). Je suis une personne curieuse de tout et je lis énormément sur le vin, la nature, l’architecture, ainsi que l’art en général. Ma grande passion et mon métier c’est le Vin. J’adore faire des dégustations, découvrir de nouvelles régions, de nouveaux vins. Depuis deux ans je fais parti d’un club de dégustation des vins étrangers. Cela me permet de découvrir des vins réalisés avec des terroirs différents mais aussi un état d’esprit et une culture différente de la nôtre. Les histoires de ces vignerons, qui se sont lancés sans aucun héritage ni savoir-faire et qui font tout pour faire la meilleure qualité sont riches en enseignements. On découvre également d’autres vignobles d’Europe qui ont 1000 ou 2000 ans mais dont on n’entend pas parler en France… François Xavier Leroux – Maison Hippolyte Leroux – Fondateur et CEO
  • 51. 51 La maison Hippolyte Leroux Il y a un siècle, mon arrière- grand-père Hippolyte a perdu son père très jeune. Il s’est retrouvé propriétaire d’une ferme avec toutes les activités agricoles de l’élevage à la viticulture. A la fin du 19ème siècle, les maladies et les parasites, notamment le phylloxéra, le mildiou, et l’oïdium apparaissent sans que les vignerons n’aient de solutions viables pour les combattre. La première Guerre Mondiale a également ravagé la région par les bombardements intensifs. Sortie de la guerre, il fallait reconstruire car la ferme avait bien souffert, le vignoble avait été ravagé. Créer un vignoble coûte de l’argent et à l’époque le champagne n’était pas aussi répandu qu’aujourd’hui (c’était une toute petite partie de la Champagne qui était entre Epernay et Reims), il a donc pris la décision de ne pas recréer le vignoble. Près de 70 années se sont écoulées avant que mon grand-père et mon père prennent le choix de recréer le vignoble. Comme il reste encore beaucoup de terres à planter, j’ai repris le flambeau en créant mon vignoble. Pourquoi avoir recréé ton vignoble ? Par passion. Mes parents m’ont toujours fait gouté un peu de vin aux repas de famille pour éveiller mon palais et à 16 ans j’achetais mes premières bouteilles. Au collège, lorsqu’on doit choisir un métier, vigneron s’est imposé comme une évidence. De plus c’est un métier complet qui t’offre l’équilibre d’être en pleine nature, dans la campagne et en parallèle il y a la production et la commercialisation du vin… c’est très varié. Savoir s’entourer Le vin c’est vraiment très long à élaborer et nécessite un savoir- faire complexe que l’on acquière au fil des années. Quand un peintre ou un artisan veut créer un objet, il va essayer, se tromper et va recommencer, … alors que le vin c’est une fois par an. Là où Picasso faisait plusieurs dizaines ou centaines de dessins par jour pour s’entrainer et pour travailler son geste le vigneron a dans toute sa vie, 40 voire au mieux 50 tentatives pour faire le meilleur vin… Ainsi, pour mon champagne j’ai décidé de m’entourer de partenaires compétents pour réaliser le meilleur champagne possible. J’ai appris à mettre en place des collaborations qui permettent de profiter des expériences et des savoir-faire de chacun. Le vin est un milieu très complet : on peut tout faire mais il faut aussi savoir déléguer pour faire de la qualité. S-California ? C’est ma première cuvée. La prochaine est en cours d’élaboration. C’est en pleine crise de 2008 que je décide de faire du champagne. Quand j’ai commencé à planter mon vignoble tout allait bien en Champagne, les ventes augmentaient chaque année. La crise arrive, les consommateurs réduisent leurs achats et le champagne voit ses ventes baisser. Initialement, comme toutes les maisons de champagne, je pensais faire mon champagne, coller une étiquette et le vendre. Seulement l’avenir devenant incertain je me suis posé beaucoup de questions sur la faisabilité de mon projet, mon marché, mon positionnement vis-à-vis de celui-ci. Autour de moi les grandes maisons révisaient leurs budgets communication, leurs stratégies…
  • 52. 52 J’ai augmenté les recherches, les études, rencontré un grand nombre de personnes travaillant dans le vin mais aussi dans des métiers complètement externes à mon univers. Grâce à internet, j’ai regardé les trajectoires et les conseils d’entrepreneurs, et surtout ceux qui avaient vécu des crises et comprendre comment ils avaient fait pour la dépasser sans que cela n’ait trop d’impact sur eux. C’est ainsi que j’ai découvert l’esprit entrepreneurial Californien. C’est un état d’esprit de philanthrope  : ils partagent aisément toutes les clés, le savoir-faire de leur réussite. L’entrepreneur français garde précieusement ses clés de réussite. Il ne les donnera qu’à quelques personnes en qui il a vraiment confiance de peur que quelqu’un vienne « chasser sur ses terre » et lui prenne sa place. En Californie ils partagent pour le bien du pays, par esprit patriotique : en donnant les clés, les méthodes de réussite, d’autres vont réussir, l’économie du pays va se développer et tout le monde sera gagnant. Ils partent du principe que lorsque tu as réussi tu es sur une position dominante, et il devient compliqué de prendre ta place. J’ai vraiment profité de toute cette connaissance, de toute cette expérience et de ce savoir-faire. Ce partage à conditionné ma vision de l’entreprise et au final mon champagne. Le nom S-California c’est une forme de remerciements car sans ce partage j’aurai fait énormément d’erreurs et je pense qu’aujourd’hui je n’aurais pas pu aller aussi loin au niveau de la qualité. Un packaging différent Le monde change, tout change. Je crée ma maison dans le 21ème siècle, l’état d’esprit diffère de celui du 19ème ou 20ème siècle quand les autres maisons se sont créées. J’ai énormément travaillé sur l’histoire des maisons de champagne. Toutes, lors de leur création, étaient en avance sur leur temps. C’était des chefs d’entreprise visionnaires qui se sont entourés des dernières technologies de leur époque. Ce fut par exemple les premières entreprises à s’équiper en électricité. La Champagne est un des berceaux de l’aviation car les maisons de champagne ont sponsorisélespionniersdel’aviation française et étrangère pour leur permettre de se développer. Dom Pérignon, sous Louis XIV, utilisait lui aussi des techniques qui pour son époque étaient étonnantes et nouvelles. Dans mon projet d’avant crise je voulais faire quelque chose de traditionnel, et au final je me suis dit que créant ma maison au 21ème siècle, il fallait qu’elle en soit le reflet. Ainsi j’ai conçu l’habillage de mes bouteilles en m’inspirant de mon époque. Comment es-tu perçu dans la profession ? L’habillage surprend beaucoup. Que ce soit en France ou dans le reste du monde, Il est extrêmement rare de voir un habillage aussi coloré. Les vignerons sont très traditionnels mais ils aiment également beaucoup la nouveauté.