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IEP de Toulouse
Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications
français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché
oligopolistique
Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST
Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE
Date : 2013
IEP de Toulouse
Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications
français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché
oligopolistique
Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST
Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE
Date : 2013
Remerciements
Je remercie toutes les personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce mémoire et
notamment M. Jérôme VICENTE qui, en tant que Directeur du mémoire et Professeur
d’économie à l’IEP de Toulouse, m’a donné les clés utiles à ma réflexion à travers les cours
magistraux et séminaires dispensés.
L’élaboration de ce mémoire a été possible grâce à plusieurs personnes qui ont su
m’aiguiller dans mes recherches et que je tiens à remercier, notamment M. Frédéric
GRAZZINI, Directeur de la practice Human Capital Management du cabinet Sopra
Consulting, ainsi que les collaborateurs d’Orange que j’ai rencontrés lors de ma mission pour
leur accueil et leurs conseils avisés.
Je remercie également chaleureusement mon père pour sa contribution et son soutien à
la rédaction de ce mémoire, grâce à son expérience professionnelle de plus de 25 ans dans les
télécommunications.
Avertissement : L’IEP de Toulouse n’entend donner aucune approbation, ni improbation
dans les mémoires de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur
auteur(e).
Abréviations
3G : Norme de téléphonie mobile de 3e
génération
4G : Norme de téléphonie mobile de 4e
génération
ADSL : Asymmetric Digital Subscriber Line
ANFR : Agence Nationale des Fréquences
ARCEP : Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes
BLR : Boucle Locale Radio
CEPT : Conférence Européenne des administrations des Postes et Télécommunications
CSA : Conseil Supérieur de l’Audiovisuel
EDGE : Enhanced Data Rates for GSM Evolution
FFT : Fédération Française des Télécoms
FSI : Fonds Stratégique d’Investissement
GPRS : General Packet Radio Service
GSM : Groupe Spécial Mobile
Mhz : Megahertz
MMS : Multimedia Messaging Service
MVNO : Mobile Virtual Network Operator
NFC : Near Field Communication
NMT : Nordic Mobile Telephone
OTT : Over The Top
PME : Petite et Moyenne Entreprise
RTC : Réseau Téléphonique Commuté
SIM : Subscriber Identity Module
SMS : Short Message Service
TPE : Très Petite Entreprise
UIT : Union Internationale des Télécommunications
UMTS : Universal Mobile Telecommunications System
VoIP : Voix sur IP
SOMMAIRE
INTRODUCTION....................................................................................................................1
PREMIÈRE PARTIE - LA STRUCTURE DU SECTEUR TRÈS RENTABLE DES
TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE..........................................................................7
CHAPITRE 1- DU MONOPOLE À L’OLIGOPOLE .........................................................................8
CHAPITRE 2- UN SECTEUR MAJEUR DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE ..........................................21
DEUXIÈME PARTIE - L’ARRIVÉE D’UN NOUVEL ENTRANT SUR LE
MARCHÉ, UN BOULEVERSEMENT MAJEUR POUR LE SECTEUR.......................34
CHAPITRE 1- LA MODIFICATION DU PAYSAGE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE.......35
CHAPITRE 2- LE RENOUVELLEMENT DES STRATÉGIES DES OPÉRATEURS DE
TÉLÉCOMMUNICATIONS.........................................................................................................46
CONCLUSION.......................................................................................................................57
1
Introduction
Arnaud Montebourg, Ministre du Redressement Productif, et Fleur Pellerin, Ministre
déléguée à l’Economie Numérique, qui ont saisi en novembre 2012 l’Autorité de la
concurrence sur le contrat signé entre Free Mobile et Orange, écrivent dans une tribune
intitulée « Enfin une politique industrielle pour les télécoms » publiée le 12 mars 2013 dans
Le Figaro1
, avoir trouvé « en arrivant aux responsabilités, un secteur des télécoms meurtri,
méprisé, en proie au doute et au déclin. Quel paradoxe pour un secteur d’avenir ! », accusant
leurs prédécesseurs d’avoir privilégié les consommateurs aux dépends des producteurs. Au
troisième trimestre 2012, Bouygues Télécom annonçait une perte nette de 16 millions
d’euros. Chez SFR, c’est un plan social concernant la suppression d’environ 1000 postes qui a
été lancé. La valeur boursière de France Telecom a quant à elle été divisée par deux, soit une
perte sèche de 7 milliards d’euros pour le patrimoine de l’Etat actionnaire.
Ce constat est symptomatique de la modification du paysage du secteur des
télécommunications français. Celui-ci est en effet en proie à de multiples interrogations et à
de nouveaux enjeux qui l’entrainent dans une recomposition permanente et une redéfinition
constante des stratégies de ses acteurs. Malgré cela, le marché des télécoms poursuit son
développement et continue d’innover à différents niveaux. Ce mémoire s’attachera à
comprendre les mécanismes d’un secteur clé de l’économie, au potentiel de croissance
prouvé, les télécommunications.
***
1
http://www.lefigaro.fr/mon-figaro/2013/03/12/10001-20130312ARTFIG00469-enfin-une-politique-industrielle-
pour-les-telecoms.php
2
Mon choix de prendre comme objet d’étude pour ce mémoire le secteur des opérateurs
de télécommunications français repose sur trois piliers. Premièrement, je souhaite orienter ma
carrière professionnelle vers ce domaine, parce que c’est un secteur qui innove constamment,
aussi bien dans la technologie que dans les usages, et dans lequel les enjeux pour l’avenir sont
forts. Deuxièmement, la période de choix de ce sujet a coïncidé avec l’arrivée sur le marché
du quatrième opérateur de téléphonie mobile. Or, j’ai été fortement interpellé par le tapage
médiatique provoqué par cette entrée, et ce de manière unilatérale. En effet, je me suis étonné
que tous les commentateurs, à quelques exceptions près, encensent les bienfaits de ce
renforcement concurrentiel en vantant les mérites d’un acteur qui allait révolutionner le
secteur, alors que dans ce type d’opération avantages et inconvénients cohabitent souvent.
Troisièmement, je souhaitais travailler à l’occasion de la rédaction de ce mémoire sur un cas
concret à partir d’une base théorique. Le secteur français des opérateurs de
télécommunications constituant un exemple intéressant d’oligopole, cela a été l’occasion pour
moi de m’appuyer sur les fondamentaux théoriques acquis à l’IEP de Toulouse en matière
d’économie.
***
Les télécommunications se définissent comme « transmission, émission ou réception
d'informations par fil, radioélectricité, optique, ou d'autres systèmes électromagnétiques »2
. A
l’origine, elles concernent des inventions telles que le télégraphe (Antonio Meucci), le
téléphone (Alexander Graham Bell) ou encore la radio (Guglielmo Marconi). Dans son
acceptation moderne, on parle de services de télécommunications pour la téléphonie fixe et
mobile, ainsi que pour l’accès à internet, pour les ménages et les entreprises. Outre ces
services B to C3
(marché final, 84% du CA des télécommunications), le secteur comprend
également les services B to B4
(marché intermédiaire entre opérateurs, 16% du CA du
secteur) qui concernent les services de transmission des données, c’est-à-dire l’établissement
d’interconnexions entre opérateurs.
Le marché français des télécommunications est dominé par une poignée d’acteurs, ce
qui le place en situation d’oligopole. Longtemps l’opérateur historique qu’est France Télécom
se trouvait en situation de monopole, avant l’ouverture à la concurrence qui a vu l’émergence
de deux autres acteurs, SFR et Bouygues Télécom, puis récemment l’arrivée de Free (Groupe
2
Dictionnaire Larrousse
3
Business to Consumer
4
Business to Business
3
Iliad) en tant que quatrième opérateur de réseau dans la téléphonie mobile. Dans ce mémoire,
l’accent sera mis sur les opérateurs de télécommunications « mobiles », bien qu’il ne soit pas
possible d’écarter la partie « fixe » puisque les entreprises dont nous parlons sont présentes
sur les deux segments. Néanmoins, l’entrée de Free sur le marché concernant la partie mobile
du secteur, il semble plus intéressant de se focaliser dessus.
Le faible nombre d’acteurs tient aux caractéristiques techniques de l’activité
(infrastructures en réseau) mais aussi au coût très élevé des investissements requis pour une
pénétration du marché. En effet, les services de télécommunications sont techniquement
caractérisés par l’installation et la gestion des réseaux de communications, ce qui requiert de
lourds investissements. Ils peuvent être de type terrestre (câbles en cuivre, fibre optique, etc)
ou aériens (antennes hertziennes, satellites).
Les services en réseaux tels que les télécommunications génèrent des externalités
positives, également appelées externalités de réseaux, qui peuvent conduire à un phénomène
de monopole5
. De même, une des spécificités des services en réseaux tient à la structure des
coûts de cette activité. En effet, les coûts fixes sont extrêmement élevés en ce qui concerne le
déploiement des infrastructures, ce qui limite d’autant plus les possibilités de concurrence.
Quant aux coûts liés aux services (coûts fixes élevés, coûts marginaux faibles), ils assoient
l’intérêt de diffusion au plus grand nombre. Les externalités de réseaux d’une part, et les coûts
de réseaux d’autre part, provoquent une dynamique de diffusion des services en réseaux
répondant à la loi des rétroactions positives. Cette loi stipule qu’une hausse de la demande va
entraîner une hausse de l’offre (notamment grâce aux économies d’échelle), celle-ci stimulant
à son tour la demande, etc. Les économistes parlent dans ce cas de « causalité circulaire ». De
facto, les effets de rétroactions positives favorisent les situations d’oligopole.
Un oligopole est une branche de l’économie (industrie ou services) dans laquelle un
petit nombre de firmes est en concurrence. Une des caractéristiques principales de ce type de
marché réside dans le fait que les firmes ne peuvent pas ignorer le comportement de leurs
concurrents. Les interactions stratégiques entre ces firmes sont au cœur de la théorie de
l’oligopole, représenté ici par le secteur français des télécommunications, c’est pourquoi ce
mémoire s’efforcera de les analyser.
5
J. Vicente, Cours de microéconomie, ch. « Les externalités de réseaux », IEP de Toulouse, 1e
année
4
Les opérateurs de télécommunications physiques français sont au nombre de quatre :
Orange, SFR, Bouygues Télécom et, depuis janvier 2012, Free. Ce passage de trois à quatre
acteurs ne change pas le caractère oligopolistique du secteur. Pour exemple, aux Etats-Unis, le
secteur des télécommunications est reconnu comme étant un oligopole avec quatre
concurrents en présence : AT&T, Sprint, T-Mobile et Verizon.
Cette situation de « marché imparfait6
» peut également être analysée au travers de la
théorie des jeux7
. Selon cette théorie, l’interaction entre les stratégies de deux individus ou
firmes maximisant leur gain les conduit à une situation sous-optimale au sens de Pareto : c’est
l’équilibre de Nash. On peut comprendre grâce à ce modèle la stabilité des stratégies des
opérateurs avant l’arrivée de Free sur le marché, puisqu’aucun d’entre eux ne pouvait
réellement modifier sa stratégie sans affaiblir sa position.
***
Dans ce contexte, une situation optimale peut être obtenue via une entente entre les
différents acteurs, ce qui est interdit par les autorités de concurrence. Ainsi, le Conseil de la
concurrence français a condamné le 1er
décembre 2005 les opérateurs Orange, SFR et
Bouygues Télécom à des amendes de plusieurs dizaines de millions d’euros pour entente. Il
leur est reproché d’avoir échangé entre 1997 et 2003 des informations précises concernant le
volume de leurs ventes. Ce type d’échanges est de nature à altérer le jeu de la concurrence,
puisque les opérateurs ont défini ensemble les parts de marché qu’ils s’octroyaient.
Au sens de Pareto, cette situation est optimale. Cependant, on peut légitimement se
demander si ce système est optimal du point de vue du consommateur, notamment en ce qui
concerne les prix d’accès aux services. Lors de l’introduction de Free sur le marché et le
lancement de ses offres « low cost », l’entreprise et les commentateurs ont souligné le gain de
pouvoir d’achat octroyé aux clients. L’enjeu de ce mémoire sera de déterminer si cet
effondrement des prix ne sera pas destructeur de valeur à long terme, et comment les
opérateurs adaptent leurs stratégies à ce nouveau contexte.
Dans l’hypothèse où l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un secteur faiblement
concurrentiel a entraîné une révolution dudit secteur, un certain nombre de questions,
6
La théorie de la concurrence imparfaite a été développée par l’entre-deux guerres par Edward Chamberlain au
Etats-Unis et par Joan Robinson en Angleterre.
7
La théorie des jeux a été développée par John von Neumann et Oskar Morgenstern en 1944 dans un ouvrage
intitulé Theory of Games and Economic Behavior.
5
auxquelles ce mémoire tentera de répondre, se posent. Est-ce que les opérateurs français de
télécommunications auront toujours les moyens d’investir dans des infrastructures aux coûts
extrêmement élevés ? Pourront-ils innover de la même manière qu’ils l’ont fait depuis 25
ans ? Les clients bénéficieront-ils toujours de la qualité d’un réseau performant sur le long
terme ? Les nouvelles offres proposées par les opérateurs donnent-elles réellement un gain de
pouvoir d’achat aux consommateurs ?
Ces questions que soulève le contexte du sujet font apparaître un paradoxe. Dans un
secteur faiblement concurrentiel, l’arrivée d’un nouvel acteur n’est assurément pas neutre. En
effet, alors que le nombre d’abonnés est en constante augmentation (la France compte 40
millions d’abonnements à la téléphonie fixe, 73 millions au mobile et 23 millions à internet),
avec un taux de pénétration aujourd’hui supérieur à 100% pour la téléphonie mobile, le
chiffre d’affaires des télécommunications en France est en baisse (-6,4% au premier trimestre
2013), du fait de la naissance d’un quatrième opérateur. Dans ce contexte, comment les
opérateurs de télécommunications français doivent-ils repenser leurs stratégies pour retrouver
le chemin de la croissance ?
***
La méthodologie de ce mémoire de recherche s’appuie essentiellement sur la lecture
de travaux universitaires, d’études, d’articles de presse, ainsi que sur les témoignages
d’experts que j’ai eu l’occasion de rencontrer durant mon stage de fin d’études8
. Cette base
documentaire capitalisée pendant plusieurs mois a permis de nourrir ma réflexion sur le sujet,
puis d’élaborer une problématique pertinente au regard du sujet ainsi qu’un plan qui permette
d’exposer ces recherches de manière cohérente. Les difficultés auxquelles j’ai été confronté
tiennent au fait que ce sujet fait référence à un événement récent, pour lequel il est ardu
d’avoir le recul nécessaire à son analyse. Peu d’ouvrages empiriques ont été publiés sur
l’introduction de Free sur le marché. En termes de statistiques du secteur, il n’a pas été
difficile de trouver des rapports riches en données, comme l’étude Xerfi sur le secteur des
Télécommunications publiée en 2012 9
. Cependant malgré de nombreuses recherches et
contacts à des organismes, certaines données statistiques qui auraient été importantes pour ce
mémoire sont restées introuvables, notamment en ce qui concerne les données internes aux
entreprises. Malgré un nombre important de sollicitations d’acteurs pour des entretiens, peu
8
Stage de fin d’études réalisé dans le cabinet de conseil Sopra Consulting, avec une mission de 5 mois chez
Orange.
9
Xerfi 700, « Télécommunications », Juillet 2012
6
ont accepté de répondre aux questions posées. Face à leur volonté de rester anonymes, leurs
points de vue seront exposés dans ce mémoire sans présentation de l’auteur. En outre, il n’est
pas possible de prévoir avec certitude les stratégies qui seront déployées par les forces en
présence, mais des tendances se dégagent et des préconisations peuvent être formulées.
***
Afin d’apporter des éléments de réponse à cette problématique qui nous servira de fil
conducteur, la rédaction de ce mémoire s’articulera autour de deux parties.
La première s’attachera à expliquer l’organisation d’un secteur majeur de l’économie
française, à travers le prisme de ses évolutions technologiques, commerciales et
institutionnelles. Nous verrons en quoi ces évolutions ont fait passer le secteur d’un monopole
détenu par France Télécom à un oligopole plus réglementé, puis nous étudierons les
caractéristiques de l’économie de ce secteur : tissu économique, forces en présence, segments
de croissance, etc.
La seconde partie traitera concrètement du bouleversement provoqué par l’entrée sur le
marché d’un nouveau concurrent, Free, notamment en termes de conséquences macro et
micro sur l’économie. Enfin, nous traiterons du renouvellement des stratégies déployées par
les opérateurs de télécommunications, entre modèles de croissance remis en cause et accent
mis sur l’innovation pour maintenir une création de valeur.
Nous verrons que le principal résultat obtenu est qu’une concentration se dessine dans
le secteur. Si une fusion entre opérateurs, souvent entendue mais peu probable
économiquement, est à écarter, une mutualisation plus poussée des réseaux semble être la
voie vers laquelle se tourne les acteurs du secteur, et ce afin de palier des coûts fixes très
élevés de développement d’infrastructures.
7
Première partie - La structure du secteur très rentable des
télécommunications en France
Afin de mieux analyser les nouvelles stratégies mises en place par les opérateurs de
télécommunications, il convient en premier lieu de faire un rappel sur les grands jalons qui
ont marqué l’évolution de ce secteur. Du monopole détenu originellement par France
Télécom à la situation à la veille de l’introduction de Free sur le marché, comment s’est
développé ce secteur ? Quelles technologies ont été déployées au cours des décennies ? En
quoi le cadre réglementaire a façonné le visage d’un nouveau marché ? Pourquoi parle-t-on
d’un marché oligopolistique ? Autant de questions qui nous permettront d’appréhender ce
secteur à travers une histoire, des institutions, des technologies.
Etudier la composition du tissu économique et des segments de croissance nous
permettra dans un deuxième temps de nous forger une vision globale du secteur. Quelles sont
les caractéristiques structurelles des services de télécommunications ? Pourquoi parle-t-on de
convergence entre ces métiers, ceux des médias et du numérique ? Quelles sont les forces en
présence ? Outre les opérateurs « physiques » disposant de leurs propres infrastructures, quels
autres acteurs jouent un rôle dans cet univers éclectique ? Sur quels piliers a reposé la
croissance de ces services ?
Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que c’est un
secteur en pleine croissance qui a du s’adapter à l’arrivée d’un nouveau concurrent.
8
Chapitre 1- Du monopole à l’oligopole
Des télécoms comme services industriels de l’Etat à l’existence d’entreprises privées
cotées en bourse, le visage du secteur a énormément évolué, notamment du point de vue du
marché et du cadre réglementaire.
Section 1- L’évolution du cadre réglementaire : entre libéralisation et
régulation
Les premiers services de télécommunications en France ont été instaurés par l’Etat
sous la Révolution Française puisque, en 1792, est déployé le réseau de télégraphie optique de
Chappe, afin d’acheminer rapidement les informations dans un contexte d’instabilité politique
et de guerre civile.
En 1878, suite au remplacement du télégraphe optique par le télégraphe électrique,
puis l’invention du téléphone, l’Etat français crée un ministère des Postes et Télégraphes. Il
faudra attendre 1923 pour que les « PTT » (Postes, télégraphes et téléphones) voient le jour,
administrés à partir de 1941 par la Direction générale des Télécommunications.
(I) La libéralisation du secteur
C’est à partir de 1988 que s’amorça une déréglementation du secteur qui s’est traduite
par une ouverture à la concurrence dans le domaine de la téléphonie mobile. En effet, suite à
la diffusion par la Commission européenne d’une directive de mise en concurrence des
services de télécommunications10
, la Direction générale des télécommunications devient
France Télécom le 1er
juillet 1988.
« La présente directive s'inscrit dans le processus de libéralisation des marchés des
télécommunications dans l'Union européenne, processus engagé au milieu des années 80.
Une des principales impulsions à cette ouverture a été donnée en 1987 par le livre vert de la
Commission sur le développement d'un marché commun pour les services et équipements de
télécommunication. Deux objectifs y étaient fixés: mettre en place un réseau de
10
Directive 88/301/CEE de la Commission européenne, 16 mai 1988
9
télécommunications intégré au niveau européen, et favoriser le développement de services
aux plus bas tarifs possibles ». La directive « vise à libéraliser les marchés de terminaux de
télécommunication. Elle prévoit l'abolition des droits spéciaux ou exclusifs pour
l'importation, la commercialisation, le raccordement, la mise en service et l'entretien des
équipements terminaux de télécommunication »11
.
La loi du 2 juillet 1990 transforme France Télécom en une entité dotée d’une
personnalité morale distincte de l’Etat en lui octroyant une indépendance financière, son
budget n’étant dorénavant plus voté par l’Assemblée Nationale. Cette déréglementation
concernant la téléphonie mobile, les opérateurs ont donc du obtenir des licences
d’exploitation octroyées par l’Etat français. Chaque opérateur retenu avait ainsi l’obligation
d’investir dans son propre réseau et sa licence comportait des obligations de couverture
géographique. En 1991, ce sont donc France Télécom et SFR qui obtiennent les deux
premières licences, rejoins en 1995 par Bouygues Télécom.
Le 26 juillet 1996, c’est la téléphonie fixe qui est à son tour soumise à la concurrence.
En effet, la loi de réglementation des télécommunications12
votée à cette date a procédé à la
transposition des directives communautaires libéralisant les télécommunications13
.
« Les dispositions de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, en tant
qu'elles permettent l'établissement et l'exploitation, par des opérateurs autres que France
Télécom, de réseaux ouverts au public, en vue de la fourniture de tous services de
télécommunications autres que le service téléphonique au public entre points fixes, prennent
effet à compter du 1er juillet 1996 … la fourniture au public, par des opérateurs autres que
France Télécom, du service téléphonique entre points fixes sur les réseaux autorisés en
application de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications ne pourra, sous
réserve de l'application de l'article 2 de la loi n° 96-299 du 10 avril 1996 relative aux
expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information, prendre effet
qu'à compter du 1er janvier 1998. A la demande des opérateurs concernés, les autorisations
correspondantes pourront être délivrées à compter du 1er janvier 1997 »14
.
11
http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/legislative_framework/l24119a_fr.htm
12
Loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications
13
http://www.finances.gouv.fr/notes_bleues/nbb/nbb255/255_ouv.htm
14
Article 23 de la loi du 26 juillet 1996
10
A partir du 1er
janvier 1998, d’autres opérateurs que France Télécom peuvent donc
fournir des services de téléphonie fixe, la loi établissant la fin des monopoles de droit sur la
téléphonie fixe dans le cadre d'une réglementation asymétrique15
. Dans la déréglementation
asymétrique, l'ancien monopole, ici France Télécom, conserve son infrastructure mais doit la
mettre à la disposition de ses propres concurrents, contrairement à la déréglementation
symétrique dans laquelle les nouveaux concurrents ne sont pas aidés et tous respectent les
mêmes règles. Afin de favoriser les nouveaux entrants, une série de règles asymétriques
régulant les rapports contractuels entre l'opérateur historique et les nouveaux entrants ont été
prévus : contrôle des prix de l'opérateur historique, droit d'accès aux infrastructures (en
l'occurrence la mise à disposition du réseau de câbles en cuivre appartenant à l'opérateur
historique, qui relie les abonnés aux centraux téléphoniques, nous y reviendrons plus tard) à
un prix très proche du coût de production.
Les services de télécommunications sont, au niveau européen, régis par la directive
2002/21/CE du 7 mars 2002, également appelée « Paquet Télécom ». Elle vise à garantir un
niveau de concurrence satisfaisant dans toute l’Europe, ce qui se traduit en France par des
transpositions dans la loi. En parallèle des ces dispositions ouvrant le secteur à la concurrence,
des textes législatifs viennent donc le réglementer. La loi du 31 décembre 200316
définit
l’application du service universel aux télécommunications, obligeant à fournir un « service
téléphonique de qualité à un prix abordable », à « acheminer gratuitement les appels
d’urgence », à « fournir un service de renseignements, un annuaire », et à « garantir la
desserte du territoire en cabines téléphoniques dans le domaine public ». Cette loi prévoit
également que France télécom ne sera plus en charge du service universel, ce service pouvant
être fourni par d’autres sociétés. Néanmoins, suite à l’appel à candidature du 12 novembre
2004, l’opérateur historique fut logiquement choisi comme représentant du service universel.
Selon Philippe Deubel17
, « le dégroupage des lignes téléphoniques a malgré tout
permis l'introduction d'une réelle concurrence et l'émergence d'offres innovantes sur le
marché de l'accès à l'Internet haut débit puis du « triple play » (Internet, TV numérique, voix
IP). Des acteurs importants ont pu se développer dans ce cadre, notamment Free-Iliad ».
Nous reviendrons sur cette notion de dégroupage dans une partie consacrée aux technologies.
15
http://www.melchior.fr/France-Telecom-du-monopole-a.9893.0.html
16
Loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003, suite à la directive européenne 2002/22/CE.
17
Professeur agrégé d’économie à l’Université Lille I
11
La dernière étape de la libéralisation des télécommunications en France réside dans
l’attribution d’une quatrième licence de téléphonie mobile, qui fut octroyée au Groupe Iliad.
Le 17 décembre 2009, la candidature de Free Mobile à une licence de téléphonie mobile a en
effet été retenue par l’ARCEP18
, comme en témoigne l’article 5 de cette décision : « La
candidature de la société Free Mobile à l’obtention d’une autorisation d’utilisation de
fréquences dans la bande 2,1 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un
système mobile de troisième génération est retenue ». Cette décision se cristallisera deux ans
plus tard par l’ouverture des services de Free Mobile le 10 janvier 2012, dont nous
reviendrons dans la deuxième partie de ce mémoire sur les conditions et modalités.
Ces différentes étapes de libéralisation ne sont cependant pas synonymes de
dérégulation. En effet, sur un marché de type oligopolistique, la concurrence restera toujours
imparfaite. Ainsi, des institutions veillent à ce que la concurrence soit libre et loyale sur le
marché. En France, c’est l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des
Postes (ARCEP) qui assure cette mission et qui dispose pour cela de la possibilité de
sanctionner des contrevenants. D’autres institutions existent également de manière parallèle.
(II) La multiplication des acteurs institutionnels
Les pouvoirs publics ont toujours souhaité garder une forme de régulation dans le
secteur des télécommunications, notamment parce que certains services de téléphonie ont un
caractère de biens collectifs, comme par exemple la norme GSM (Groupe Spécial Mobile) sur
laquelle nous reviendrons plus tard. Outre les législateurs français et européen dont nous
avons fait part ci-dessus, ce sont maintenant les institutions qui nous intéressent, dans le sens
où ont pour vocation de répondre aux défaillances du marché.
Il convient en premier lieu de présenter l’Autorité de Régulation des Communications
électroniques et des postes (ARCEP19
), puisque c’est l’institution garante de la concurrence
dans le secteur des télécommunications en France. L’ARCEP est une autorité administrative
indépendante 20
, créée le 5 janvier 1997 sous le nom d’Autorité de Régulation des
Télécommunications (ART). Sa mission principale est de veiller à l’existence d’une véritable
concurrence sur ce marché, afin qu’elle soit bénéfique pour le consommateur. Dans ce cadre,
18
Décision n° 2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009
19
http://www.arcep.fr
20
Institution de l’État chargée, en son nom, d’assurer la régulation de secteurs considérés comme essentiels et
pour lesquels le Gouvernement veut éviter d’intervenir trop directement.
12
elle dispose de la compétence pour fixer des obligations générales imposées aux opérateurs,
sanctionner ces derniers si elles ne sont pas respectées, mais également attribuer les
fréquences et numérotations nécessaires à l’exercice du métier des opérateurs, à travers le
système des licences. Elle est également la garante du développement de l’emploi, de
l’innovation, et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications, tout comme celle
des intérêts des territoires et des utilisateurs dans l’accès aux services et aux équipements.
Une des missions de l’ARCEP a été de réguler les conflits portant sur l’
« interconnexion » entre les opérateurs. L’interconnexion est une notion-clé dans le cadre de
l’ouverture à la concurrence du marché des télécommunications. Dans la mesure où les
utilisateurs des réseaux des différents opérateurs doivent être capables de communiquer entre
eux puisque nous sommes en situation de marché libre, il y a la nécessité de connecter les
réseaux entre eux, phénomène appelé l’interconnexion. Dans le cas contraire, l’opérateur qui
aurait initialement le plus de clients rapporterait tout le marché. Il y aurait donc un risque
d’abus de monopole21
. L’institution, ici une autorité de régulation qu’est l’ARCEP, impose
donc des accords d’interconnexion entre opérateurs (donc une stratégie coopérative), afin
d’instaurer une concurrence. En l’absence de régulateur, le marché de la téléphonie mobile ne
se serait pas développé en France.
L’Agence Nationale des Fréquences (ANFR22
) est quant à lui un établissement public
à caractère administratif23
créé le 1er
janvier 1997. Sa mission est de coordonner sur le
territoire français l’implantation des stations radioélectriques dans le but d’assurer une
utilisation optimale des sites disponibles et de veiller au respect des normes en matière
d’exposition du public aux champs électromagnétiques. Les opérateurs ne peuvent, sans son
accord, prendre une décision d’implantation.
Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA24
) est également une institution régulant
les actions des opérateurs de télécommunications, notamment depuis qu’ils jouent un rôle
dans les métiers de l’audiovisuel (distributeur de contenus via ADSL et sur téléphones
mobiles). Selon le CSA, « ce phénomène est à l'origine d'une pression concurrentielle
21
J. Vicente, Cours de Théorie économique des institutions, ch. « Asymétries d’informations et théorie de
l’agence », IEP de Toulouse, 4e
année
22
http://www.anfr.fr
23
Personne morale de droit public disposant d’une autonomie administrative et financière afin de remplir une
mission d’intérêt général, autre qu’industrielle ou commerciale, sous le contrôle de la collectivité publique dont
il dépend (État, région, département ou commune).
24
http://www.csa.fr
13
nouvelle pour l'accès aux contenus et la vente de services. Elle contribue également à
l'accroissement de l'offre de programmes mise à la disposition du public »25
. En ce sens, elle
régule les services de communication audiovisuelle des opérateurs, tout comme l’ARCEP
régule les réseaux.
La Fédération Française de Télécoms (FFT26
), créée en 2007, réunit les associations et
les opérateurs de télécommunications français. Elle a pour mission de promouvoir une
industrie responsable et innovante au regard de la société, de l’environnement, des personnes
et des entreprises, de défendre les intérêts économiques du secteur et de valoriser l’image de
ses membres et de la profession au niveau national et international. Pour réaliser ses missions,
elle privilégie non pas la régulation contrainte mais la régulation ouverte, dans le respect des
règles de la concurrence en vigueur27
.
Au niveau européen, la Conférence européenne des administrations des postes et
télécommunications (CEPT), créée le 26 juin 1959, est une organisation de coordination entre
les entreprises européennes du secteur des télécommunications. Tout comme la FFT, elle a
pour vocation de faire de la régulation ouverte.
Au niveau international, l’Union internationale des télécommunications (UIT 28
),
agence des Nations Unies pour le développement spécialisé dans les technologies de
l'information et de la communication, fut créée en 1865. Son principe fondateur est la
coopération internationale entre les gouvernements des Etats membres et le secteur privé. Sa
principale mission est la production de normes à portée internationale.
Nous avons donc compris dans cette première section que le secteur des
télécommunications en France fait l’objet depuis 25 ans d’une libéralisation du marché tout
en restant régulé par des institutions diverses, ce qui nous permet de comprendre les raisons
pour lesquelles un nouveau concurrent est apparu en 2012. Il paraît cependant nécessaire de
revenir sur les fondamentaux de l’essor fulgurant de ce marché au cours des dernières
décennies, ce qui nous permettra de comprendre entre autres pourquoi il ne peut exister
qu’un faible nombre d’acteurs.
25
CSA, « Les opérateurs télécom, nouveaux acteurs du secteur audiovisuel », La lettre du CSA n° 217 – Juin
2008, 30 juin 2008
26
http://www.fftelecoms.org
27
http://www.fftelecoms.org/articles/qui-sommes-nous
28
http://www.itu.int/fr/
14
Section 2- L’essor du marché depuis la fin des années 1980
Cette évolution du marché peut se comprendre au travers de deux éléments : les
services et la technologie.
(I) Des technologies sans cesse renouvelées
Les technologies utilisées dans les télécommunications sont en évolution constante,
gage de la croissance du secteur (sur laquelle nous reviendrons dans une section consacrée
aux segments de croissance). Les technologies utilisées par les opérateurs de
télécommunications (mobile et fixe) répondent souvent à des normes, qui permettent une
meilleure visibilité pour le grand public et une compatibilité entre les différentes technologies.
(A) Dans la téléphonie mobile
En France, il existe plusieurs normes liées à la téléphonie mobile. Le marketing et la
communication des opérateurs ont rendu familières les normes 1G, 2G, 3G et 4G, le « G »
représentant l’abréviation « génération ».
Les normes « 1G »
Les normes « 1G » sont les normes associées à la première génération de téléphonie
mobile, la voix circulant par un canal analogique29
, le contrôle étant effectué par un canal
numérique30
. En France, cette norme fait tout d’abord référence à la technologie « Radiocom
2000 » lancée par France Télécom en 1986. Fonctionnant sous la bande de fréquence 400
MHz, c’est avec cette technologie qu’on parle pour la première fois de téléphonie cellulaire.
L’utilisation qui en est faite par la plupart des usagers concerne des appareils installés à bord
de véhicules.
En parallèle, SFR marque l’arrivée de la concurrence dans le secteur en important une
technologie des pays nordiques31
, appelée Nordic Mobile Telephone (NMT) dans la bande de
29
La transmission analogique de données consiste à faire circuler des informations sur un support physique de
transmission sous la forme d'une onde.
30
La transmission numérique consiste à faire transiter les informations sur le support physique de
communication sous forme de signaux numériques (série de 0 et de 1).
31
Finlande, Norvège, Suède, Danemark
15
450 MHz, autorisée par les pouvoirs publics. Cette technologie, qui avait prouvé son
efficacité dans plusieurs pays depuis le début des années 1980, représente donc la première
évolution technologique dans le secteur. En coopération avec Alcatel-Thomson, SFR a
transposé le savoir-faire nordique pour que la technologie soit utilisable sur le sol français, et
ce à partir de 1989.
Les normes « 2G »
Les normes de deuxième génération représentent le passage du mi-analogique/mi-
numérique au tout numérique. Cette norme a offert la possibilité, en plus de la voix,
d’envoyer des données textes (SMS) puis des messages multimédias comme le MMS. En
France, comme partout en Europe, la norme utilisée est le GSM (Global System for Mobile
Communication). Mis en place en 1992, cette norme se base en Europe sur deux fréquences :
900 MHz et 1800 MHz, raison pour laquelle on appellera les terminaux produits avec cette
norme des « bi-bandes par opposition aux « tri-bandes », qui sont les terminaux compatibles
aux Etats-Unis. En effet, la norme GSM, généralisée au niveau européen, devait asseoir la
capacité des Européens à s’affirmer sur le plan technologique face aux Etats-Unis et leur
norme CDMA32
.
Cette norme a vu le jour grâce au groupe créé par la CEPT qui a rassemblé opérateurs
et fabricants de terminaux. Le « Groupe Spécial Mobile » a ainsi été mandaté pour organiser
et résoudre les modalités techniques liées à l’utilisation de la norme. L’acceptation officielle
de la norme GSM a été signée en 1997 par les acteurs (opérateurs et fabricants) de 17 pays
différents.
La norme GSM a deux propriétés majeures :
- elle permet à l’utilisateur de passer d’un réseau à un autre, tout en assurant la
continuité du service (téléphoner et envoyer des SMS et MMS).
- elle permet aussi la mise en place de la carte SIM (Subscriber Identity Module). Celle-
ci va alors permettre aux utilisateurs de changer de téléphone tout en gardant la même
ligne.
32
Code Division Multiple Access
16
Les principaux avantages de cette norme, par rapport à Radiocom 2000 et NMT
étaient une meilleure qualité du son, une réduction des risques de piratage des lignes
téléphoniques, ou encore une diminution de la taille des téléphones mobiles.
Deux nouvelles technologies ont également vu le jour à la suite du GSM, qui
concernait uniquement les échanges de voix : il s’agit du GPRS33
(2001) et du EDGE34
dont
l’apport est l’échange de données sur réseau mobile. Le GPRS est souvent qualifié de
« 2,5G », il offre un débit deux fois supérieur à celui du GSM, ce qui permet la transmission
des données et un premier pas vers l’internet mobile. EDGE quant à lui est une évolution du
GPRS apparue à la veille des réseaux de troisième génération.
La norme « 3G »
C’est en 2004 qu’apparaît la troisième grande génération en matière de téléphonie
mobile, basée au départ sur la technologie UMTS35
dont les fréquences (900 MHz et 1800
MHz) ont été attribuées par l’ARCEP en 2001 et 200236
. La 3G, dont l’UMTS et ses
évolutions (HSDPA37
, HSPA+ et DC-HSPA+) offrent un débit théorique bien supérieur à
celui du GSM, va servir de socle technologique au développement des usages et des nouveaux
services avec la téléphonie mobile : télévision, visioconférence, accès haut débit à l’internet
mobile. Après la première génération basée sur des technologies françaises, et la deuxième
basée sur des technologies européennes, c’est désormais une norme mondiale qui est utilisée.
(B) Dans la téléphonie fixe
Pour comprendre les évolutions opérées dans le domaine du mobile, il convient
également de faire un état des lieux des différentes évolutions technologiques du domaine de
la téléphonie fixe, qui se sont faites de manière parallèle, notamment dans le cadre du
développement des accès à internet.
Les connexions physiques
33
General Packet Radio Service
34
Enhanced Data Rates for GSM Evolution
35
Universal Mobile Telecommunications System
36
Conformément à la décision n°00-0835, ARCEP, 28 juillet 2000
37
High Speed Downlink Packet Access
17
A l’origine, la téléphonie fixe (transmission de la parole à distance) est possible
techniquement grâce aux réseaux de câbles en cuivre appartenant à France Télécom, appelé
Réseau téléphonique commuté (RTC). C’est ce réseau qui est utilisé par la technologie
xDSL38
pour fournir les foyers en accès à internet, l’ADSL en étant la variante la plus connue.
Il s’agit d’une technologie qui permet d’atteindre des débits de plusieurs mégabits par
seconde (Mbits/s) sur des lignes téléphoniques classiques.
De même, le « câble » qui permettait de recevoir des chaînes de télévision
supplémentaires via une installation parallèle à celle de France Télécom permet aujourd’hui
de recevoir l’internet haut débit et le téléphone.
La fibre optique, constituée physiquement d’un fil de verre très fin permettant la
transmission d’informations à un débit très élevé grâce à des impulsions lumineuses, est en
cours de développement, notamment dans les grandes villes françaises pour les particuliers.
Les connexions sans fil
Le satellite est une technologie permettant d’acheminer des informations et d’offrir
des services de téléphonie et d’internet. Néanmoins, son coût très élevé en fait un moyen de
communication peu privilégié.
Le Wimax, technologie de transmission de données par voies hertziennes, est utilisé
dans des zones du territoire dans lesquelles il n’y a ni le câble ni l’ADSL.
Enfin, la BLR (Boucle Locale Radio) consiste à remplacer les derniers kilomètres de
lignes téléphoniques connectant un particulier ou une entreprise par des ondes radio dans des
régions à faible densité de population.
Nous avons vu que les technologies déployées par les opérateurs de
télécommunications ont évolué très rapidement depuis les années 1980, passant de normes
purement françaises à des normes internationales standardisées, notamment pour la
téléphonie mobile. Les technologies déployées ont servi de socles à des services toujours plus
enrichis pour les utilisateurs.
38
Digital Subscriber Line (Ligne numérique d’abonné)
18
(II) L’évolution des services proposés
On distingue, dans les services proposés par les opérateurs de télécommunications, les
services grand public (particuliers) et les services aux entreprises.
(A) Les services grand public
Service historique fourni par les opérateurs de télécommunication, la téléphonie peut
être dite fixe ou mobile. La téléphonie fixe fait partie intégrante des offres de fourniture
d’internet à haut débit. Elle connaît même un renouveau dans la mesure où les technologies de
voix sur IP39
(VoIP) offrent un son de qualité améliorée. Au 4e
trimestre 2011, la téléphonie
sur IP concernait 52% des abonnements40
. Le marché de la téléphonie mobile est quant à lui
en constante augmentation. Le taux d’équipement des Français en la matière est aujourd’hui
de 112%41
.
L’accès à internet est le deuxième service proposé par les opérateurs de
télécommunications. Popularisé par les offres ADSL, couplées avec l’accès à la téléphonie
fixe, voire mobile, et la télévision, le nombre de foyers équipés s’élève en 2010 à 64% de la
population, contre 12% il 10 ans auparavant42
.
Avec le développement sans précédent de l’internet mobile (24,1 millions de Français
disposent d’un smartphone, soit 44,4% de la population 43
), les opérateurs de
télécommunication offrent également des services dans les contenus. Grâce à la technologie
UMTS qui a permis d’élever sensiblement les débits de transmission des données pour que les
utilisateurs accèdent au haut débit mobile, les téléphones portables sont devenus des appareils
multifonctions permettant de se connecter à internet, de prendre des photos, des vidéos, de les
envoyer, de télécharger des films, des applications et des jeux. De même, grâce aux
connexions internet filaires de plus en plus rapides, les opérateurs peuvent désormais proposer
des services tels que la vidéo à la demande (VOD), la diffusion de la télévision en haute
définition ou encore la vidéosurveillance.
39
Mode de téléphonie utilisant le protocole de télécommunications créé pour Internet (IP pour Internet Protocol).
La voix est numérisée puis acheminée sous forme de paquets comme n'importe quelles autres données.
40
Données Xerfi
41
Selon l’Arcep, 73,8 millions de cartes SIM pour une population de 65,8 millions de personnes au 1er
trimestre
2013
42
http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1340
43
http://www.journaldunet.com/ebusiness/internet-mobile/equipement-et-usages-des-smartphones-0613.shtml
19
(B) Les services aux entreprises
Le type de services aux entreprises est similaire à ceux pour le grand public, mais les
usages sont néanmoins différents. En ce qui concerne la voix (téléphonie fixe et mobile), les
services sont identiques à ceux destinés aux particuliers, mais ils incorporent des
fonctionnalités supplémentaires comme les options de numérotation ou les conférences
téléphoniques. La voix sur IP assure des garanties de sécurité bien supérieures aux anciennes
normes de téléphonie fixe, ce qui correspond à des besoins pour des clients professionnels.
Pour leur accès à internet, les entreprises ont des besoins différents de ceux du grand
public. En effet, du fait de leur taille et donc du nombre important de postes connectés à
internet, les volumes de données qui transitent sur leurs réseaux nécessitent des connexions à
très haut débit, le plus souvent grâce à la technologie de fibre optique. Tout comme la voix,
l’accès à internet présente des enjeux forts en terme de fiabilité et de sécurité.
Les entreprises, selon leur taille, ont des besoins en terme de traitement des données.
Leur transmission doit être effectuée de manière complexe et sécurisée, comme le montrent
les enjeux actuels qui existent autour du Cloud Computing44
et du Big Data45
. Pour répondre à
ces besoins, les opérateurs fournissant l’accès à internet proposent des services tels que les
interconnexions de LAN (réseaux internes à l’entreprise) ou les liaisons louées (location de
liaisons physiques appartenant aux opérateurs pour la transmission des données, comme la
fibre optique ou le câble) pour les transferts d’un gros volume de données. Les opérateurs
proposent également des solutions de stockage à distance.
De même, les opérateurs proposent également des solutions « machine to machine »
permettant des échanges de données entre ordinateurs sans intervention humaine. Les
entreprises utilisent ce type de service notamment pour des besoins logistiques liés à la
sécurité, la monétique ou encore la gestion des équipements.
Nous l’avons compris, de la Direction générale des Télécommunications ayant le
monopole de la téléphonie fixe à la présence de plusieurs opérateurs fournissant des services
44
Utilisation de serveurs distants (en général accessibles par Internet) pour traiter ou stocker l'information.
45
Phénomène d’explosion des volumes de données de nature informatique à traiter par l’entreprise.
20
dans la téléphonie fixe et mobile, dans l’internet et dans les médias, le secteur français des
télécommunications a connu une transformation à tous niveaux : politique, institutionnelle,
réglementaire, technologique et commerciale. Après avoir étudié ce passage d’un marché en
situation de monopole à un système oligopolistique, nous allons désormais nous intéresser à
son fonctionnement d’un point de vue économique en regardant plus précisément la
composition du tissu économique ainsi que les segments de croissance sur lesquels se sont
appuyés les opérateurs.
21
Chapitre 2- Un secteur majeur de l’économie française
Le secteur des télécommunications occupe une place importante dans l’économie
française, puisqu’il pèse 3% du PIB national. Nous allons étudier dans cette partie la
composition du tissu économique d’une part ainsi que les piliers de la croissance de ce secteur
d’autre part.
Section 1- La composition du tissu économique, entre éclatement des
acteurs et concentration des métiers
Les opérateurs de télécommunications sont évidemment les acteurs les plus importants
du secteur, dans le sens où ils possèdent les réseaux physiques permettant de fournir des
services associés. Néanmoins, ils ne sont pas les seuls à jouer un rôle dans ce secteur dans
lequel la concurrence s’est nettement accrue au cours des dernières années.
(I) Evolution et caractéristiques structurelles : maille économique éclatée
et convergence
(A) Un secteur atomisé
Le marché des services de télécommunications, tels que nous les avons décrits dans la
partie précédente (téléphonie, internet, etc), est composé de plus de 4900 entreprises46
, pour la
plupart des TPE. Le chiffre d’affaires du secteur s’élève à 70,4 milliards d’euros, ce qui en
fait un poids lourd au niveau européen, environ 87% des revenus étant générés par les
activités de télécommunications filaires et sans fil.
Tableau récapitulatif des entreprises composant le secteur (Source : Xerfi)
46
Recensées en 2009, donnée Xerfi – Voir en Annexe 1 les principales sociétés du secteur
22
Attirées par la rentabilité du secteur, de nombreuses entreprises se créent, passant de
3072 en 2005 à 4581 en 2010. Ainsi, on comprend que malgré la situation d’oligopole dont
jouissent les opérateurs de télécommunications, le secteur est extrêmement concurrentiel, en
particulier pour les petites entreprises.
Cependant, le nombre de créations d’entreprises est en diminution depuis 2010, le solde
création / défaillances restant tout de même positif.
Il est également intéressant de voir dans quels sous-secteurs d’activité ces entreprises
exercent. Alors que ce sont les télécommunications sans fil (46,6%) et filaires (40,8%) qui
génèrent la majorité du chiffres d’affaires du secteur, tandis que celles par satellite (5,5%) et
les autres activités47
(7,1%) sont minoritaires, les entreprises composant le tissu économique
47
Comprend la fourniture d’applications spécialisées, l’exploitation de stations de communications, la fourniture
d’accès à internet par l’intermédiaire de réseaux dont l’opérateur n’est pas propriétaire, la fourniture de
téléphone et d’internet dans des lieux publics, la fourniture de télécommunications par la voix sur IP,
l’acquisition et la revente de capacités réseau dans services supplémentaires.
23
des télécommunications sont pour 51,6% d’entre elles présentes dans les activités annexes,
tandis qu’elles sont 38,7% dans le filaire et seulement 7% dans le sans fil.
Enfin, il convient de noter qu’une des composantes du tissu économique du secteur des
télécommunications est le taux d’investissement très élevé de la part des entreprises. Entre
2005 et 2011, les investissements ont connu une croissance de 25% pour atteindre 7,9
milliards d’euros, ce qui tient essentiellement à l’accroissement des dépenses de déploiement
des réseaux très haut débit, qui ont atteint 2,5 milliards d’euros en 2011 (1,8 M€ pour les
réseaux mobiles, 700 m€ pour les réseaux de fibre optique).
On remarque également qu’en 2011 les dépenses d’investissement ont augmenté pour la
deuxième année consécutive :
24
(B) La convergence des services et des infrastructures48
Sous l’effet de la déréglementation, de l’évolution des technologies et de la vitalité
économique du secteur, le mariage des télécommunications, de l’informatique et de
l’audiovisuel ouvre de nombreuses perspectives de développement de nouveaux services
intégrant voix, données et images. Le rapprochement entre ces industries induit un
phénomène de convergence à plusieurs niveaux.
La convergence des services
Aujourd’hui, les technologies radio permettent d’offrir des services de visiophonie ou
des accès à des applications multimédias à partir de terminaux mobiles (smartphones), grâce à
la technologie UMTS que nous avons évoquée précédemment, ce qui n’était auparavant
possible que sur des lignes fixes. Ce terminal permet aujourd’hui non seulement de passer ses
communications vocales mais également de transférer des données, d’accéder à Internet et de
payer de façon parfaitement sécurisée des services ou des biens achetés au travers soit de
serveurs en ligne, soit de manière physique grâce à la technologie NFC49
qui permet le
paiement sans contact.
Désormais, le fait de souscrire un abonnement internet permet d’accéder à plusieurs
services (téléphonie, télévision, internet) proposé par le même opérateur, preuve de la
convergence entre communications et médias. Ces services, également disponibles sur
téléphone mobile, sont proposés par les mêmes opérateurs « globaux ».
La convergence des infrastructures
L’offre de services est également de plus en plus décorrélée des plates-formes réseau.
Les technologies deviennent polyvalentes et permettent un transport de façon indifférenciée
de la voix, des données et des contenus multimédias. Les réseaux, quel que soit le support
physique qu’ils utilisent (câble, fibre optique, systèmes hertziens) sont désormais capables de
supporter des débits élevés et deviennent multiservices. Le secteur offre de nouvelles
opportunités à tout acteur disposé à se diversifier dans le secteur des services de
télécommunications, comme en témoigne le nombre élevé de créations d’entreprises. Des
48
P.-Y. Badillo, D. Roux, Les 100 mots des télécommunications, Que sais-je ? (P.U.F.), 2009
49
Near Field Communications
25
opportunités d’autant plus intéressantes que ce marché se révèle être particulièrement
attractif :
- En termes sectoriels : certains usages sont en pleine effervescence et devraient selon
les prévisions enregistrer une croissance à deux chiffres (les contenus haute définition
par exemple)50
;
- En termes de rentabilité.
Les acteurs du marché sont bien évidemment conscients de ces opportunités, comme le
montrent l’analyse des forces en présence.
(II) Les forces en présence : des opérateurs possédant des réseaux
physiques et des acteurs secondaires
L’opérateur historique des télécommunications françaises, France Télécom devenu
Orange le 1er
juillet 201351
, qui fut en situation de monopole jusqu’en 1988 pour le mobile, et
1998 pour le fixe, est toujours leader incontestable du marché. Orange capte en effet 42,5%
des abonnés à Internet et plus de 38% des abonnés à la téléphonie mobile. Il devance donc ses
trois principaux concurrents, que sont SFR, Bouygues Télécom et Free.
Outre les quatre opérateurs connus du grand public, il existe des entreprises
spécialistes des services aux entreprises, des organismes publics et des acteurs des
télécommunications. Ces opérateurs supplémentaires viennent faire concurrence à la fois aux
opérateurs historiques mais aussi aux petites entreprises qui proposent le même type de
services.
50
http://www.01net.com/editorial/585705/4g-beaucoup-des-promesses-et-quelques-realites/
51
http://www.orange.com/fr/groupe/France-Telecom-devient-Orange
26
(A) Les opérateurs de réseaux physiques
France Télécom / Orange
Détenu à 27% par l’Etat français et le FSI52
, Orange est
le leader français de la téléphonie fixe, de l’accès à internet et
de la téléphonie mobile53
. Présent à l’international, le groupe
réalise 47,6% de son chiffre d’affaires en France.
Les clients du groupe sont les particuliers, les
entreprises via sa filiale Orange Business Services ainsi que les
opérateurs mobiles virtuels (MVNO, voir partie suivante).
SFR
Filiale à 100% du groupe Vivendi54
, SFR (Société
Française du Radiotéléphone) fut créé en février 1987, lors
de l’ouverture à la concurrence de la téléphonie mobile.
Initialement spécialisé dans ce secteur, l’opérateur propose
également aujourd’hui des services d’accès à internet depuis
la fusion avec Neuf en 2007, ainsi que des contenus
multimédias.
L’entreprise occupe la deuxième place sur les
marchés de la téléphonie mobile et la troisième pour la fourniture d’accès à internet, avec une
clientèle composée de particuliers, de professionnels et d’administrations.
Bouygues Télécom
Troisième acteur historique de téléphonie mobile en France, Bouygues Télécom est
une filiale du groupe Bouygues depuis 1994. Elle occupe logiquement la 3e
place dans la
52
Fonds stratégique d’investissement
53
Voir Annexe 2 – Analyse SWOT de France Télécom
54
Membre du CAC40, Vivendi est une multinationale spécialisée dans les secteurs de la communication, des
médias et du divertissement.
27
téléphonie mobile, mais seulement la 4e
pour ce qui est du marché d’accès à internet, loin
derrière ses concurrents avec 5,7% de parts de marché en 2012.
Néanmoins, le groupe entend renforcer son poids
sur ce segment grâce au rachat des activités télécoms de
Darty en mai 2012 (300000 abonnés internet et 40000
abonnés mobile). Tout comme Orange et SFR, il propose
des services aux particuliers, aux entreprises, et loue
également son réseau aux MVNO.
Free (Groupe Iliad)
Iliad est détenu en majorité par Xavier Niel (58,6%55
). Créé en 1991, Iliad exerce à
l’origine des activités dans la fourniture de services de Minitel. C’est à partir de 1999 que le
groupe devient un fournisseur d’accès à internet et de
téléphonie fixe, notamment via sa filiale Free. Le groupe
occupe aujourd’hui la deuxième place du marché français,
devançant de peu SFR. Il est le premier opérateur à avoir
proposé une offre « triple play »56
à moins de 30 euros par
mois, affichant les prémices d’une stratégie reposant sur des
offres commerciales à bas coûts.
Depuis 2012, Iliad est également présent sur le marché de la
téléphonie mobile, ce que nous détaillerons dans la seconde partie de ce mémoire. Au premier
trimestre 2012, l’opérateur possédait déjà 3,8% de parts de marché.
Numericable Completel
Détenu par trois fonds d’investissement étrangers, Numericable Completel est leader
sur le marché des télécommunications par câble pour la télévision via le réseau Numericable
(3,42 millions d’abonnés), et de la fourniture d’accès à internet par fibre optique57
via le
55
http://www.iliad.fr/amf/2013/documentdereference2012.pdf
56
Offre composée d’un accès à internet, de téléphonie fixe et de télévision.
57
S. Godeluck, « Numericable reste le leader du très haut débit en France avec 500.000 clients », Les Echos, 13
avril 2012
28
réseau Completel, et présent dans la téléphonie fixe et mobile via le réseau de Bouygues
Télécom.
Numericable est né en 2007 de la fusion de NC Numericable, Noos et Est
videocommunications. Alors que ses offres commerciales sont destinées aux particuliers,
avec la fourniture de services similaires à ceux des autres
opérateurs, Completel est spécialisé dans les solutions de
télécommunications pour les entreprises et les
administrations. Ses 10000 km de réseau en font le premier
opérateur de télécommunications par fibre optique pour les
professionnels en France. Ses solutions comprennent des
services de téléphonie, (fixe, centres d’appel), des solutions
d’accueil58
, d’interconnexions de sites, d’accès internet et
de cloud computing.
Il est intéressant de noter que Numericable Completel utilise le réseau de Bouygues
Télécom pour la téléphonie mobile, tandis que ce dernier utilise le réseau fibre optique du
câblo-opérateur dans ses offres très haut débit.
(B) Les opérateurs de réseaux virtuels
Les MVNO (Mobile Virtual Network Operator) sont des opérateurs de téléphonie
mobile virtuels, dans le sens où ils ne possèdent pas leurs propres infrastructures ni les
fréquences de télécommunications mais les louent aux opérateurs existants (Orange, SFR,
Bouygues Télécom – Free ne louant pas son réseau pour le moment) pour proposer des offres
à leurs clients. Leur arrivée sur le marché fait suite à l’avis favorable de l’ARCEP le 10 juin
2004. Aujourd’hui, il existe une cinquantaine de MVNO en France.
C’est dans une logique de renforcement de la concurrence que l’ARCEP a souhaité
l’apparition d’opérateurs virtuels. Néanmoins, malgré une progression croissante, leur part de
marché cumulée n’atteignait que 11,2% au 1er
trimestre 201259
. Contrairement aux opérateurs
physiques qui sont présents sur tout le territoire, les MVNO privilégient des stratégies de
niche, dans le sens où ils se développent dans des régions faiblement couvertes, où le taux de
58
Numéros commençant par 0800 par exemple.
59
Source Xerfi
29
pénétration est faible, ou encore en s’adaptant à des spécificités régionales : c’est le cas par
exemple de Breizh Mobile, qui facture moins les communications passées à l’intérieur de la
Bretagne que les autres. Pour proposer des offres attractives, ces opérateurs acquièrent leurs
clients via des canaux à faibles coûts (par exemple Internet), dématérialisent leurs supports
administratifs ou encore maintiennent des coûts de structures faibles. Les clients sont, en
fonction des opérateurs, des particuliers ou des professionnels.
Parmi les MVNO les plus connus, il convient de citer M6 Mobile, CIC Mobile, qui
utilisent le réseau d’Orange, Joe Mobile, La Poste Mobile pour SFR, Numericable pour
Bouygues Télécom.
Nous avons vu que le tissu économique du secteur des télécommunications s’étendait sur un
spectre large, des opérateurs « classiques » générant plusieurs milliards d’euros de chiffre
d’affaires à de nombreuses TPE présents dans des marchés de niches, en passant par les
opérateurs mobiles virtuels. L’évolution de cette maille fait apparaître une caractéristique
qu’est la convergence entre les métiers de la téléphonie, de l’internet et des médias. En effet,
les opérateurs de télécommunications, avec les offres multiservices, proposent tous de la
téléphonie (fixe et mobile) et un accès à internet. Il convient désormais de s’intéresser aux
segments de croissance phare qui ont permis à ce secteur d’occuper une place prépondérante
dans l’économie française, et qui explique le renforcement de la concurrence de ces dernières
années marqué par l’arrivée d’un quatrième opérateur physique sur le marché de la
téléphonie mobile.
Section 2- Des segments de croissance à bout de souffle
Face à la multiplication des acteurs et le renforcement de la concurrence, les opérateurs de
télécommunications ont axé leurs stratégies sur le développement de deux segments porteurs :
la voix via une incitation à consommer plus, et les données grâce à l’essor le la consommation
de l’internet mobile.
(I) La voix, pilier de la croissance du secteur
30
En 2009, l’usage de voix (environ 200 milliards de minutes consommées) s’équilibrait
entre la téléphonie fixe et la téléphonie mobile (respectivement 50% de parts de marché).
Aujourd’hui, on observe une croissance pour le mobile et une baisse pour le fixe.
Bien que l’usage de la téléphonie fixe soit en déclin, l’usage de la voix par les
consommateurs est toujours un segment de croissance, tiré par la téléphonie mobile. Avec un
trafic de téléphonie fixe et mobile s’élevant à 61,1 milliards de minutes, la croissance reste
soutenue avec une augmentation de +4,7% en un an au premier trimestre 201360
. Ce volume,
tiré par la progression du trafic de téléphonie mobile, connaît un taux de croissance annuelle
de 20%.
La consommation de téléphonie fixe s’élève à 27,8 milliards de minutes au premier
trimestre 2013, ce qui correspond à une baisse de -8,8% en un an. Il s’agit d’une baisse
consécutive sur quatre trimestres. Le trafic des box vers les mobiles connaît en effet sa
première baisse (-4,3%), après une période de ralentissement de sa croissance en 2012. De
même, le trafic de ligne fixe à ligne fixe est en recul de 7%, ce qui correspond à 1 milliard de
minutes consommées en moins.
Le volume de consommations téléphoniques mobiles atteint quant à lui 33,3 milliards
de minutes au premier trimestre 2013, soit une augmentation de 5,4 milliards de minutes par
rapport au premier trimestre 2012 (23 minutes de plus consommées par client et par mois,
pour un total de 2h51 minutes de communications mensuelles). L’augmentation du trafic de
voix au départ des mobiles est en augmentation annuelle de 19,5%.
Néanmoins, malgré ces chiffres faisant état d’une croissance de l’usage de la
téléphonie, les revenus qui y sont associés sont eux en baisse. Le revenu des communications
mobiles ne cesse en effet pas de diminuer depuis cinq années. La voix, qui fut un segment de
croissance pour les opérateurs de télécommunications, n’est donc plus un relai de croissance,
du fait de la concurrence accrue dans ce secteur.
60
Données Arcep
31
(II) L’explosion de l’accès à internet
La croissance du réseau Internet61
et la généralisation de l’utilisation du protocole IP
(qui permet d’échanger des données d’un ordinateur à un autre) pour les réseaux de
télécommunications mobiles, pour les réseaux internes des entreprises (Intranet) ou pour les
réseaux reliant l’entreprise à ses fournisseurs et clients (Extranet), induisent une croissance
sans précédent du trafic des données à partir des années 2000.
En France, le marché de la connectivité Internet s’est fortement développé sur le
segment « entreprises », avant que les particuliers prennent le relai de la croissance. Le
nombre de SMS envoyés s’élève au premier trimestre 2013 à 49,4 milliards, avec une
croissance annuelle de 11,5%. Le volume de données transitant par les réseaux mobiles est
quant à lui de plus de 30 Pétaoctets pour le trimestre, en augmentation de 66% par rapport à
l’année dernière.
61
Ensemble des réseaux de communication électronique interconnectés entre eux et permettant à ses utilisateurs
d’échanger des informations.
32
Cependant, le revenu des données (SMS, MMS, accès à internet) dans les services
mobiles n’augmente plus non plus depuis le deuxième trimestre 2012, cette différence entre la
stagnation ou la baisse des chiffre d'affaires des opérateurs et l'augmentation importante des
volumes s'expliquant selon l'Arcep « par la baisse des prix de détail des services de
communications électroniques, que l'Insee a chiffrée à 9,5% en 2012 »62
.
On comprend donc que les segments de croissance qui ont servi de piliers aux opérateurs de
télécommunications français deviennent désuets, du fait d’un renforcement de la concurrence
du secteur et de ce qui semble être une baisse des prix.
62
« Mobile : le volume de données échangées a augmenté de 70% en 2012 », L’Expansion, 4 avril 2013
33
Le secteur des télécommunications en France se caractérise, nous l’avons vu, par une
structure oligopolistique. Cette situation s’explique par des raisons historiques (France
Télécom était un monopole pour le mobile jusqu’en 1988 et pour le fixe jusqu’en 1998) et par
d’importantes barrières à l’entrée, qui tiennent à la fois à la réglementation (attribution des
licences par l’ARCEP), aux technologies (complexité, coût de développement) et à l’économie
(importance des investissements à réaliser pour la mise en place d’un réseau). Par exemple,
l’entrée de Free sur le marché en tant que quatrième opérateur de téléphonie mobile a coûté
à Iliad la bagatelle de 2 milliards d’euros.
La filière des services de télécommunications, qui génère un chiffre d’affaires de 70,4
milliards d’euros (notamment dans les télécommunications filaires et sans fil), comprend
quelque 4900 entreprises, ce qui en fait un secteur atomisé. Cet éclatement est symptomatique
d’un renforcement de la concurrence. Bien que les parts de marché soient majoritairement
détenues par les trois acteurs « historiques » que sont Orange, SFR et Bouygues Télécom, de
nouveaux poids lourds ont fait leur apparition. Outre Free (dans le mobile) et Numericable
(surtout dans le fixe), des opérateurs virtuels (MVNO) ont fait leur apparition et réussissent à
se faire une place dans le paysage concurrentiel.
Les segments de croissance sur lesquels se sont appuyés les opérateurs de
télécommunications tendent aujourd’hui à s’effriter, du fait de cette concurrence poussée. La
croissance de la consommation n’entraîne plus une croissance des revenus, signe du
bouleversement induit par l’arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile. C’est
pourquoi nous allons tenter de comprendre dans la deuxième partie de ce mémoire les
tenants et aboutissants de ce changement majeur. Nous comprendrons notamment pourquoi
la modification du paysage concurrentiel entraîne des conséquences importantes sur
l’économie et oblige les entreprises à repenser leurs stratégies.
34
Deuxième partie - L’arrivée d’un nouvel entrant sur le marché,
un bouleversement majeur pour le secteur
Afin de comprendre en quoi l’entrée d’un nouveau concurrent sur le marché des
télécommunications a fait l’effet d’un tremblement de terre, il convient dans un premier temps
de voir en quoi cela a modifié la physionomie du secteur. Dans quelles conditions Free a-t-il
pu pénétrer un oligopole dans lequel les barrières à l’entrée sont extrêmement fortes ? Quel
rôle les pouvoirs publics ont-ils joué ? Où le nouvel opérateur a-t-il trouvé les ressources
nécessaires ? Quelles conséquences cela a-t-il pour les entreprises du secteur ? Pour
l’emploi ? Pour les consommateurs ?
Etudier les nouveaux modèles de croissance et les solutions innovantes mises en avant
nous permettra dans un deuxième temps de comprendre comment les opérateurs renouvellent
leurs stratégies pour faire face à ce bouleversement. Pourquoi Free a-t-il choisi de « casser les
prix » en ne proposant que des offres « low-cost » ? Le service est-il réellement moins cher
qu’auparavant ? Cela correspond-il à la juste valeur des services proposés ou au contraire
détruit-il de la valeur ? Les opérateurs peuvent-ils maintenir ce modèle à long terme ?
L’innovation peut-elle permettre aux opérateurs de retrouver le chemin de la croissance ?
Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que ce secteur est
en pleine transformation, mais que des solutions existent pour continuer à créer de la valeur.
35
Chapitre 1- La modification du paysage des
télécommunications en France
Nous étudierons dans ce chapitre les modalités et les conditions d’une introduction de
Free sur le marché facilitée par les pouvoirs publics, ainsi que les conséquences
macroéconomiques que cela a entraîné. Puis, nous nous intéresserons aux nouvelles
caractéristiques du secteur, au niveau environnemental et conjoncturel.
Section 1- L’introduction de Free sur le marché
(I) L’arrivée de Free : conditions et modalités
Dans le prolongement du Paquet Télécom établi en 2002 par la Commission
européenne, une mise à jour a été publiée le 13 novembre 2007, dont les dispositions
réglementaires sont applicables en 2010, et adoptée le 24 novembre 200963
. Cette nouvelle
directive encadre les conditions d’accès aux réseaux de télécommunications pour des
nouveaux entrants et permet aux régulateurs nationaux, dans le cadre d’un renforcement de la
concurrence, d’obliger les opérateurs historiques à séparer leurs activités commerciales de la
gestion de leurs infrastructures.
Le gouvernement Fillon II, dans une volonté de renforcer la concurrence dans un
secteur des télécommunications où les opérateurs ont été condamnés dans le passé pour
entente sur les prix, a lancé le 1er
août 2009 un appel à candidatures pour l’attribution d’une
quatrième licence de téléphonie mobile, après transmission de la décision de l’Arcep de
mettre en vente une quatrième licence64
. Le coût de celle-ci a été fixé à 240 millions d’euros,
bien en deçà des 619 millions d’euros que déboursèrent Orange, SFR et Bouygues Télécom
au début des années 2000 pour l’attribution de la licence pour la technologie UMTS65
.
Selon la décision de l’Arcep, le nouvel entrant doit respecter certaines conditions :
« Les obligations minimales qui seront imposées au candidat qui sera retenu à l’issue de la
63
http://www.arcep.fr/index.php?id=9578
64
Décision n° 2009-0610, Arcep, 16 juillet 2009
65
Cette baisse du prix s’explique par la division des fréquences en trois lots.
36
présente procédure sont identiques à celles qui étaient imposées dans les trois précédents
appels à candidatures. Il devra notamment respecter des obligations en matière de couverture
de la population, de fourniture de services, de disponibilité et de qualité de ces services. Il
devra obligatoirement fournir le service de téléphonie, un service de messagerie
interpersonnel, l’accès à Internet et un service de transmission de données. Ces services
devront être fournis sur l’ensemble de la zone de couverture de l’opérateur, avec un taux de
réussite dès la première tentative qui devra être, pour chaque service, d’au moins 90%. Le
candidat qui sera retenu devra couvrir a minima 25% de la population au bout de 2 ans puis
80% de la population au bout de 8 ans après la délivrance de l’autorisation ».
Outre les obligations inhérentes au nouvel entrant, la décision de l’Arcep contraint
également les opérateurs existants sur les questions de d’itinérance, de partage de sites et
d’interconnexions : « Ainsi que le prévoient les cahiers des charges 3G des opérateurs
existants, cette mise en œuvre doit se faire en privilégiant des négociations commerciales
entre opérateurs. Toutefois, en cas de litige, l’Autorité pourra être saisie en règlement de
différend, en application des dispositions de l’article L. 36-8 du code des postes et des
communications électroniques. Dans cette hypothèse, l’Autorité s’attachera à mener la
procédure dans des délais compatibles avec les impératifs commerciaux de l’opérateur
nouvel entrant, sur le fondement des objectifs de l’article L. 32-1 du code des postes et des
communications électroniques, notamment « la définition de conditions d’accès aux réseaux
ouverts au public et d’interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous
les utilisateurs de communiquer librement et l’égalité des conditions de concurrence », «
l’absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des
opérateurs » et « l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale
entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques
» ». Il est intéressant de noter que l’Arcep propose donc aux trois opérateurs de s’entendre
pour favoriser l’arrivée du nouveau concurrent, mais qu’elle s’octroie également le droit de
trancher en cas de désaccord.
L’offre la plus solide étant celle de Xavier Niel pour Free, face à des dossiers plus
faibles comme ceux de Numericable ou Virgin, l’Arcep choisit le 17 décembre 200966
cet
acteur déjà bien implanté dans la téléphonie fixe et qui a les capacités d’investir massivement
dans le développement d’un réseau de télécommunications mobiles.
66
Décision n°2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009
37
Pour permettre à Free de pénétrer ce marché aux barrières importantes, le régulateur
lui a donc accordé des avantages non négligeables. Tout d’abord, comme le montre l’extrait
de la décision de l’Arcep, un des opérateurs existants a du signer un accord d’itinérance avec
Free, puisque lors du lancement des offres, le 10 janvier 2012, ce dernier devait couvrir a
minima 25% de la population. Orange a donc accepté d’ouvrir son réseau à Free pour un
montant de 1 milliard d’euros sur 6 ans67
. Ensuite, la décision de l’Arcep prévoyait l’accès de
Free aux « points hauts » des opérateurs existants, c’est-à-dire aux meilleurs emplacements
auxquels les trois opérateurs ont installé leurs antennes. Enfin, l’opérateur a également obtenu
des avantages en ce qui concerne la terminaison d’appels68
. Lorsqu’un abonné d’un opérateur
souhaite appeler ou envoyer un SMS à un abonné d’un autre opérateur, le premier opérateur
doit s’affranchir d’un droit de péage au second. Les montants de ces redevances étant
identiques pour tous, l’équation s’équilibre au final. Or, l’Arcep, du fait que Free possèderait
peu de clients au début, a décidé de créer une asymétrie des terminaisons d’appel afin de
rééquilibrer les charges que devraient supporter le nouvel opérateur69
.
Dans un souci de renforcement de la concurrence, l’Arcep a permis l’introduction
d’un nouvel acteur sur le marché, et ce en lui procurant des avantages concurrentiels pour
qu’il puisse bâtir un réseau de télécommunications viable. Cependant, il est légitime de se
demander si cette régulation du secteur n’a pas de conséquences néfastes pour l’économie.
(II) Des conséquences importantes sur l’économie
Nous avons vu que l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché relevait d’une
décision réglementaire et politique dans la mesure où des avantages lui ont été accordés. Les
offres low-cost, sur lesquelles nous reviendrons dans une partie consacrée aux modèles de
croissance, ont immédiatement bénéficié de l’adhésion des consommateurs.
Bruno Deffains, Professeur d’économie à l’Université Paris II Panthéon-Assas70
, a
publié en 2012 une étude d’impact qui quantifie le choc au niveau de l’emploi interne des
67
Communiqué de presse d’Orange, « Free et Orange signent un accord d’itinérance pour la 2G et la 3G », 3
mars 2011
68
Tarif d’interconnexion facturé par un opérateur à ses concurrents à chaque fois qu’un de ses abonnés est
appelé par un client d’un autre réseau.
69
« L’Arcep propose une terminaison d’appel asymétrique en faveur de Free », www.freenews.fr, 14 décembre
2011
70
http://www.u-paris2.fr/1277109159778/0/fiche___annuaireksup/
38
opérateurs, de l’emploi direct auprès des partenaires de premier rang (fournisseurs,
distributeurs et administration), ainsi que sur l’emploi induit sur la chaîne des partenaires. Il
en résulte selon lui que le secteur de la téléphonie mobile a généré en 2011 dans l’économie
française 25,8 milliards d’euros de valeur ajoutée, ce qui correspond à 345000 emplois
(24000 internes, 130000 directs et 191000 induits). Les trois quarts de ces emplois n’ont pas
été créés chez les opérateurs mais dans le reste de l’économie, notamment dans la distribution
et dans les services achetés par les opérateurs (centres d’appel, maintenance, etc), secteurs
enclins à subir plus brutalement les conséquences des modèles low-cost.
L’économiste explique son analyse dans un article publié dans Les Echos71
. Selon lui,
le chiffre d’affaires des télécommunications mobiles va baisser de 6,5 milliards d’euros (soit
une baisse de 30% sur deux ans), du fait des offres commerciales à prix cassés proposés par
Free. Il prévoit dans le même temps une forte réduction des dépenses et des marges des
opérateurs, ce qui entraînerait la destruction de 61600 emplois : 10600 chez les opérateurs,
35200 chez les partenaires directs et 15800 de manière indirecte. Néanmoins, cette perte
d’emplois serait en partie compensée selon l’expert par les créations d’emplois liées au
développement du nouvel opérateur, en portant la destruction nette à 55000.
Bruno Deffains explique également qu’il n’est pas évident que des créations d’emplois
se fassent par ailleurs, au vu de la conjoncture économique actuelle72
. Le pouvoir d’achat
libéré par la baisse des prix s’orienterait d’abord vers d’autres produits de l’offre en
télécommunications, comme les téléphones par exemple. En effet, les économistes parlent de
« biens systèmes » pour évoquer la hausse de la demande d’autres composantes du système en
cas de baisse des prix sur un des segments73
. Or, des biens tels que les téléphones mobiles, ne
sont pas produits en France, ce qui ne permettrait pas la création d’emplois.
Ainsi, moins de six mois après l’arrivée de Free sur le marché, les opérateurs de
télécommunications ont annoncé des suppressions de postes74
. Chez Bouygues Télécom, un
plan de départs volontaires concernant 556 salariés a été lancé. Dans le même temps, SFR a
annoncé un plan visant à supprimer un millier d’emplois, ainsi qu’un plan de réorganisation
prévoyant une réduction des coûts de 1 milliard d’euros entre 2012 et 2014. Ces réductions de
dépenses ont également un impact négatif sur les investissements qui seront cruciaux dans les
71
B. Deffains, « Free : quand l’idéologie de la concurrence dessert l’économie », Les Echos, 11 juin 2012
72
B. Deffains, D. Thesmar, « Le choix Free, un mal ou un bien pour l’emploi ? », Les Echos, 7 février 2013
73
B. Deffains, « Pourquoi Free Mobile met l’emploi en danger », Les Echos, 18 décembre 2012
74
G. de Calignon, « Les opérateurs engagent des suppressions de postes », Les Echos, 4 juillet 2012
39
prochaines années pour le développement de nouvelles technologies comme la fibre optique
ou la 4G75
. Chez SFR par exemple, ils seront réduits de 150 à 200 millions d’euros.
A court terme, le nivellement des offres par le bas devrait avoir pour conséquence une
baisse du chiffre d’affaires du secteur et donc des destructions d’emplois et une baisse des
investissements, bien qu’à long terme un renforcement de la concurrence soit censé avoir des
conséquences positives. Nous allons désormais essayer de comprendre les grandes tendances
de la transformation du secteur à travers l’analyse de données économiques.
Section 2- Un secteur des télécommunications déstabilisé
(I) Au niveau de l’environnement
Analyse PESTEL du secteur des télécommunications (Sources : auteur et Xerfi)76
75
T. Breton, « Free menace l’innovation dans les télécoms », Le Monde, 22 juin 2012
76
En stratégie d’entreprise, l’analyse PESTEL permet d’étudier l’influence des facteurs environnementaux.
Secteur des
télécommunications
Politique
• Soutien pour le
déploiement du très haut
débit mobile et internet (+)
• Nombreuses taxes (-)
Légal
• Déréglementation au
niveau européen (+)
• Interventions de l’Arcep
dans les prix des
terminaisons d’appel (-)
Economique
• Crise économique,
chômage qui réduit la
propension des ménages à
consommer (-)
• Baisse des investissements
chez les opérateurs (-)
Ecologique
• Mouvements contre les
antennes relais (-)
Socioculturel
• Importance de la
communication, réseaux
sociaux (+)
• Taux d’équipement élevé
dans la téléphonie mobile
(-)
Technologique
• Succès des smartphones et
tablettes (+)
• Développement de la 4G
et de la fibre optique (+)
• Saturation du réseau (-)
40
Cette analyse PESTEL permet d’analyser de manière globale l’environnement externe
qui a de l’influence sur le secteur des télécommunications. Ce modèle permet notamment de
comprendre quelles sont les menaces et les opportunités qui pèsent sur le secteur, ce qui est
indispensable pour l’élaboration de stratégies d’entreprise. En prenant en compte l’influence
de cet environnement ainsi que l’arrivée de Free sur le marché, il est possible d’étudier
l’évolution des caractéristiques du secteur.
Les dépenses des ménages en services de télécommunications, à la veille de l’arrivée
de Free sur le marché, se situaient à 25,53 milliards d’euros. Bien que ce chiffre marque une
légère baisse par rapport à l’année précédente (2010), il est 1,7 fois plus grand que celui de
2000.
De même, le nombre d’abonnements à la téléphonie mobile a connu une augmentation
croissante au cours des dix dernières années, passant de 17 millions en 2011 à 49 millions
début 2012.
41
Malgré cette croissance du nombre d’abonnements souscrits, il est à souligner qu’en
2011 cette croissance tendait à diminuer, et ce depuis plusieurs années.
Ainsi, il est important de noter que des facteurs environnementaux pesaient déjà en
tant que menaces sur les opérateurs de télécommunications avant même l’entrée de Free sur le
marché, que ce soit au niveau des dépenses des consommateurs ou de la croissance des
abonnements. Le renforcement de la concurrence est donc intervenu dans un contexte
économique difficile pour les opérateurs de télécommunications.
Par ailleurs, ces dernières années ont coïncidé avec l’apparition dans l’environnement
des télécommunications d’acteurs « over-the-top77
» (OTT) que sont par exemple Apple,
Amazon, Facebook, Google et Microsoft. Principaux fournisseurs de contenus, leurs activités
surchargent les réseaux de manière exponentielle sans qu’ils financent le déploiement et la
maintenance des infrastructures 78
: c’est le paradoxe du passager clandestin 79
. Alors
qu’auparavant les opérateurs choisissaient les contenus disponibles pour leurs clients via des
portails, ils sont désormais obligés de suivre le rythme des innovations de ces entreprises
influentes au niveau mondial. Par exemple, un acteur qui refuserait de fournir un accès à
l’App Store d’Apple sur son réseau en subirait lourdement les conséquences sur le nombre de
souscriptions à des forfaits avec de l’internet mobile.
Outre les pressions concurrentielles sur l’environnement, il est important de noter que
la conjoncture est difficile depuis quelques années.
77
L’Over The Top est une position stratégique dans une chaîne de valeur. Elle consiste pour un acteur de l’OTT
à utiliser les structures existantes installées par un autre acteur pour fournir un service.
78
http://ceps-oing.org/Nos-actions/Les-publications/248
79
Mancur Olson, La logique de l’action collective, 1965
42
(II) Au niveau de la conjoncture
En 2012, plus de 4,5 millions de carte SIM ont été vendues par les opérateurs, pour
atteindre un total de 73,1 millions au mois de décembre. En un an, Free a réussi à amasser 5,2
millions de clients80
, chamboulant la répartition des parts de marché des différents opérateurs.
Source : Le Monde
L’année 2012 a été marquée par des revenus en baisse dans le secteur des
télécommunications (-4,4%) à 49,8 milliards d’euros (hors chiffre location et vente de
terminaux et d’équipements81
) pour la vente de détails et l’intermédiation (services entre
opérateurs), l’arrivée de Free sur le marché ayant affecté le chiffre d’affaires par la baisse des
80
« Free a recruté 5,2 millions d’abonnés en 2012 », Lemonde.fr avec AFP, 28 février 2013
81
Données Xerfi
43
tarifs. En effet, au cours des neuf premiers mois de l’année 2012, le chiffre d’affaires des trois
principaux opérateurs a diminué82
: -9% chez Bouygues Télécom, -6,9% chez SFR et -2,5%
chez Orange. La baisse des revenus générés par les opérateurs sur le marché de détail est
imputable à la hausse de la TVA (passée de 5,5% à 19,6%) et donc au durcissement de la
concurrence. En effet, les opérateurs ont choisi de ne pas répercuter cette hausse sur les prix
TTC des forfaits afin de rester attractifs face aux prix proposés par le nouvel entrant, ce qui
s’est mécaniquement traduit par un repli de leurs revenus hors taxes.
Ce décrochage des revenus n’est en outre pas compensé par les revenus liés au fixe, en
baisse de 3% en 2011. Ce secteur de la téléphonie fixe et de l’accès à internet est en effet
touché du fait de la diminution du nombre d’abonnements à la téléphonie fixe (en RTC) et de
ceux à l’internet bas débit, le marché du haut débit étant le seul à compenser ces baisses de
revenus (+4,1% à 10,2 Md€ en 2012). En ce qui concerne le marché intermédiaire, la chute
des revenus liés aux terminaisons d’appel (du fait d’un rapport asymétrique entre Free et les
autres opérateurs, comme nous l’avons expliqué précédemment) ne permet pas de relever les
ternes revenus tirés des autres sources rentables, le chiffre d’affaires des services
d’interconnexion ayant diminué de 5,7% en 2012. Orange, dont le revenu moyen par abonné a
baissé de 10% en 2012, craint un recul équivalent pour 201383
, ce qui n’appelle pas à
l’optimisme pour les bénéfices des opérateurs de télécommunications.
82
C. Lacombe, « Free a-t-il détruit des emplois ? », Le Point, 31 janvier – 6 février 2013
83
« France Télécom prévoit une baisse d’au moins 10% de l’Arpu en 2013 », Reuters, 20 février 2013
44
Source : Le Figaro
Les opérateurs ont certes beaucoup moins bénéficié de l’augmentation du nombre
d’abonnements enregistré en 2012, mais ils n’ont pas nécessairement « perdu » des abonnés
stricto sensu84
. Fort de 27 millions d’abonnés en 2011, Orange a par exemple fini l’année
2012 avec 27,2 millions de clients, lorsque Bouygues Télécom en a perdu 100000 pour
redescendre à 11,2 millions. SFR a davantage souffert de l’arrivée de Free, avec une perte de
800000 abonnés, pour un total de 20,78 millions de clients mobiles. Les MVNOs quant à eux
possèdent 7,6 millions de clients.
Source : Le Monde
84
G. Pépin, « Free Mobile a chamboulé le paysage mobile, sans le révolutionner », Le Monde, 28 février 2013
45
Nous avons vu dans ce chapitre comment Free avait pu pénétrer l’oligopole du
secteur français des télécommunications mobiles. Ce renforcement de la concurrence
orchestré par le régulateur des télécommunications a pu avoir lieu grâce à des avantages
accordés à ce nouvel entrant. Non sans conséquences sur l’économie, les majors français
pâtissent aujourd’hui de cette situation qui vient s’ajouter à un mouvement de baisse de la
croissance déjà initié depuis plusieurs années, comme nous l’a montrée l’analyse de
l’environnement et de la conjoncture.
La stratégie choisie par le nouvel entrant est celle des offres à bas coûts, ce qui tire
inexorablement l’ensemble des prix et des prestations traditionnelles à la baisse. Les
opérateurs mobiles, en panne de revenus, doivent donc définir de nouvelles stratégies qui leur
permettront de renouer avec la croissance et de contrer ce tout « low-cost ». C’est ce que
nous allons étudier dans ce chapitre 2.
46
Chapitre 2- Le renouvellement des stratégies des
opérateurs de télécommunications
Nous allons nous efforcer dans cette partie de décrypter la stratégie mise en œuvre par
Free tout d’abord, pour comprendre quel est son intérêt à révolutionner ce marché, puis nous
verrons que les stratégies déployées par ses concurrents sont centrées sur l’innovation,
technologique d’une part, et commerciale d’autre part.
Section 1- Une stratégie de croissance basée sur le nivellement des
prix par le bas
(I) L’avènement du low-cost et de la chute des prix
Le 10 janvier 2012, Free est arrivé sur le marché en se positionnant sur le segment de
la simplicité puisque seulement deux offres ont été lancées, tandis que les trois autres
opérateurs en possédaient plusieurs centaines 85
. La première, à 19,99€, offrait de la
téléphonie, des SMS et des MMS illimités et un quota de données de 3 Go. La seconde, à 2€,
offrait 1h d’appel et 60 SMS par mois. Ce système de forfaits « SIM only », sans engagement
et sans téléphone subventionné, rappelle les forfaits ADSL à moins de 30€ lancés par Free au
début des années 2000. Cette simplicité des offres constitue la stratégie de Free, car cela lui
évite par exemple d’avoir un système d’information lourd et coûteux, et l’opérateur peut se
permettre de communiquer sur un prix unique. Cette structure de coût légère, associée à un
service client minimal et à une distribution basée avant tout sur internet permet de garantir des
prix bas, le tout en partie financé par la trésorerie accumulée grâce à l’activité de fournisseur
d’accès à internet de Free, qui lui a permis de dégager en 2011 494 millions d’euros de
résultat d’exploitation.
Orange, SFR et Bouygues Télécom, bien que préparés à cette entrée agressive sur les
prix, se sont immédiatement lancés dans une « guerre des prix » afin de limiter la fuite de
leurs abonnés vers Free Mobile. Pour cela, ils ont mis en avant leurs propres offres « low
cost » à travers des marques comme Sosh (Orange), RED (SFR) ou B&You (Bouygues
85
« Low-cost : Free Mobile a dynamité le marché », Lesechos.fr, 18 février 2013
47
Télécom). Cependant, alors que ces forfaits sont censés être vendus uniquement par internet,
force est de constater qu’ils contaminent petit à petit le reste de la gamme. Par exemple, les
vendeurs Orange en boutique font désormais la promotion des offres Sosh pour garder leurs
clients, car « il vaut toujours mieux promouvoir ces offres moins chères que de perdre un
client qui irait chez Free »86
.
Ainsi, nous observons qu’une diminution brutale du prix des forfaits classiques (avec
subvention de téléphone), de 30 à 40% en moyenne, a eu lieu. Orange a, au moins de juin
2013, inauguré ses premières offres « quadruple play » (fixe, mobile, internet, télévision) low-
cost, dans le sens où elles ne pourront être souscrites que sur Internet, avec un service client
virtuel87
. L’opérateur historique, grâce à sa marque Sosh, possède aujourd’hui 1,2 millions de
clients low-cost (sur un total de 27 millions). De même, les nouveaux abonnés à SFR ou
Bouygues Télécom signent pour ce type d’offres. En mars 2013, ces deux opérateurs
comptaient respectivement 1,3 million et 1,4 million de clients low-cost.
Source : Le Monde
Selon Delphine Ernotte-Cunci, directrice exécutive d’Orange, le marché « va passer à
50% de low-cost dans quelques années », alors que les opérateurs n’attribuaient à ce segment
que 15% du marché maximum avant l’arrivée de Free Mobile88
. Cependant, si les opérateurs
peuvent se lancer dans cette guerre des prix, cela est beaucoup plus difficile pour les MVNOs.
Ces derniers, qui louent des capacités de réseau à un des opérateurs « physiques », peuvent
86
Henri Tcheng, associé dans le cabinet de conseil BearingPoint
87
G. de Calignon, « Orange : une offre quadruple play chez Sosh », Les Echos, 29 mai 2013
88
C. Ducourtieux, « Téléphonie mobile : le marché bascule de plus en plus vers le low cost », Le Monde, 30 mai
2013
48
difficilement suivre ce modèle économique, dans la mesure où le prix auquel ils louent le
réseau ne leur permet pas d’être rentable avec des offres low-cost. José Caballero, Directeur
Marketing de Budget Mobile, a en effet déclaré que « nous avons du diviser par deux notre
revenu par abonné, et nos marges pas trois ». De même, le patron d’un opérateur mobile
virtuel déclarait en décembre 2012 « on est dans un effet panique. Personne ne peut faire une
marge suffisante pour déployer des réseaux mobiles à ce prix-là »89
.
Face à la réaction de ses concurrents, Free Mobile a décidé d’enrichir davantage son
offre à 2€, la dotant de deux heures de communications et de SMS illimités. B&You, a en
effet sorti en novembre 2012 une offre à moins de 10€ avec appels et SMS illimités,
accentuant le nivellement des prix vers le bas90
. Pour rappel, à l’automne 2011, un forfait
Sosh comprenant deux heures de communications, SMS illimités et 500 Mo de données
internet valait 19,99€. Son prix a donc été divisé par dix en moins de deux ans.
Source : Le Point
Cette guerre des prix entre les opérateurs de télécommunications mobiles a fait de la
France le pays où les forfaits sont les moins chers au monde.
89
G. de Calignon, « La guerre des prix s’accélère dans le mobile », Les Echos, 7 décembre 2012
90
« Bouygues Télécom relance la guerre des prix dans le mobile », Lesechos.fr, 6 novembre 2012
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Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

  • 1. IEP de Toulouse Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE Date : 2013
  • 2.
  • 3. IEP de Toulouse Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE Date : 2013
  • 4. Remerciements Je remercie toutes les personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce mémoire et notamment M. Jérôme VICENTE qui, en tant que Directeur du mémoire et Professeur d’économie à l’IEP de Toulouse, m’a donné les clés utiles à ma réflexion à travers les cours magistraux et séminaires dispensés. L’élaboration de ce mémoire a été possible grâce à plusieurs personnes qui ont su m’aiguiller dans mes recherches et que je tiens à remercier, notamment M. Frédéric GRAZZINI, Directeur de la practice Human Capital Management du cabinet Sopra Consulting, ainsi que les collaborateurs d’Orange que j’ai rencontrés lors de ma mission pour leur accueil et leurs conseils avisés. Je remercie également chaleureusement mon père pour sa contribution et son soutien à la rédaction de ce mémoire, grâce à son expérience professionnelle de plus de 25 ans dans les télécommunications.
  • 5. Avertissement : L’IEP de Toulouse n’entend donner aucune approbation, ni improbation dans les mémoires de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur(e).
  • 6. Abréviations 3G : Norme de téléphonie mobile de 3e génération 4G : Norme de téléphonie mobile de 4e génération ADSL : Asymmetric Digital Subscriber Line ANFR : Agence Nationale des Fréquences ARCEP : Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes BLR : Boucle Locale Radio CEPT : Conférence Européenne des administrations des Postes et Télécommunications CSA : Conseil Supérieur de l’Audiovisuel EDGE : Enhanced Data Rates for GSM Evolution FFT : Fédération Française des Télécoms FSI : Fonds Stratégique d’Investissement GPRS : General Packet Radio Service GSM : Groupe Spécial Mobile Mhz : Megahertz MMS : Multimedia Messaging Service MVNO : Mobile Virtual Network Operator NFC : Near Field Communication NMT : Nordic Mobile Telephone OTT : Over The Top PME : Petite et Moyenne Entreprise RTC : Réseau Téléphonique Commuté SIM : Subscriber Identity Module SMS : Short Message Service TPE : Très Petite Entreprise UIT : Union Internationale des Télécommunications UMTS : Universal Mobile Telecommunications System VoIP : Voix sur IP
  • 7. SOMMAIRE INTRODUCTION....................................................................................................................1 PREMIÈRE PARTIE - LA STRUCTURE DU SECTEUR TRÈS RENTABLE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE..........................................................................7 CHAPITRE 1- DU MONOPOLE À L’OLIGOPOLE .........................................................................8 CHAPITRE 2- UN SECTEUR MAJEUR DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE ..........................................21 DEUXIÈME PARTIE - L’ARRIVÉE D’UN NOUVEL ENTRANT SUR LE MARCHÉ, UN BOULEVERSEMENT MAJEUR POUR LE SECTEUR.......................34 CHAPITRE 1- LA MODIFICATION DU PAYSAGE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE.......35 CHAPITRE 2- LE RENOUVELLEMENT DES STRATÉGIES DES OPÉRATEURS DE TÉLÉCOMMUNICATIONS.........................................................................................................46 CONCLUSION.......................................................................................................................57
  • 8. 1 Introduction Arnaud Montebourg, Ministre du Redressement Productif, et Fleur Pellerin, Ministre déléguée à l’Economie Numérique, qui ont saisi en novembre 2012 l’Autorité de la concurrence sur le contrat signé entre Free Mobile et Orange, écrivent dans une tribune intitulée « Enfin une politique industrielle pour les télécoms » publiée le 12 mars 2013 dans Le Figaro1 , avoir trouvé « en arrivant aux responsabilités, un secteur des télécoms meurtri, méprisé, en proie au doute et au déclin. Quel paradoxe pour un secteur d’avenir ! », accusant leurs prédécesseurs d’avoir privilégié les consommateurs aux dépends des producteurs. Au troisième trimestre 2012, Bouygues Télécom annonçait une perte nette de 16 millions d’euros. Chez SFR, c’est un plan social concernant la suppression d’environ 1000 postes qui a été lancé. La valeur boursière de France Telecom a quant à elle été divisée par deux, soit une perte sèche de 7 milliards d’euros pour le patrimoine de l’Etat actionnaire. Ce constat est symptomatique de la modification du paysage du secteur des télécommunications français. Celui-ci est en effet en proie à de multiples interrogations et à de nouveaux enjeux qui l’entrainent dans une recomposition permanente et une redéfinition constante des stratégies de ses acteurs. Malgré cela, le marché des télécoms poursuit son développement et continue d’innover à différents niveaux. Ce mémoire s’attachera à comprendre les mécanismes d’un secteur clé de l’économie, au potentiel de croissance prouvé, les télécommunications. *** 1 http://www.lefigaro.fr/mon-figaro/2013/03/12/10001-20130312ARTFIG00469-enfin-une-politique-industrielle- pour-les-telecoms.php
  • 9. 2 Mon choix de prendre comme objet d’étude pour ce mémoire le secteur des opérateurs de télécommunications français repose sur trois piliers. Premièrement, je souhaite orienter ma carrière professionnelle vers ce domaine, parce que c’est un secteur qui innove constamment, aussi bien dans la technologie que dans les usages, et dans lequel les enjeux pour l’avenir sont forts. Deuxièmement, la période de choix de ce sujet a coïncidé avec l’arrivée sur le marché du quatrième opérateur de téléphonie mobile. Or, j’ai été fortement interpellé par le tapage médiatique provoqué par cette entrée, et ce de manière unilatérale. En effet, je me suis étonné que tous les commentateurs, à quelques exceptions près, encensent les bienfaits de ce renforcement concurrentiel en vantant les mérites d’un acteur qui allait révolutionner le secteur, alors que dans ce type d’opération avantages et inconvénients cohabitent souvent. Troisièmement, je souhaitais travailler à l’occasion de la rédaction de ce mémoire sur un cas concret à partir d’une base théorique. Le secteur français des opérateurs de télécommunications constituant un exemple intéressant d’oligopole, cela a été l’occasion pour moi de m’appuyer sur les fondamentaux théoriques acquis à l’IEP de Toulouse en matière d’économie. *** Les télécommunications se définissent comme « transmission, émission ou réception d'informations par fil, radioélectricité, optique, ou d'autres systèmes électromagnétiques »2 . A l’origine, elles concernent des inventions telles que le télégraphe (Antonio Meucci), le téléphone (Alexander Graham Bell) ou encore la radio (Guglielmo Marconi). Dans son acceptation moderne, on parle de services de télécommunications pour la téléphonie fixe et mobile, ainsi que pour l’accès à internet, pour les ménages et les entreprises. Outre ces services B to C3 (marché final, 84% du CA des télécommunications), le secteur comprend également les services B to B4 (marché intermédiaire entre opérateurs, 16% du CA du secteur) qui concernent les services de transmission des données, c’est-à-dire l’établissement d’interconnexions entre opérateurs. Le marché français des télécommunications est dominé par une poignée d’acteurs, ce qui le place en situation d’oligopole. Longtemps l’opérateur historique qu’est France Télécom se trouvait en situation de monopole, avant l’ouverture à la concurrence qui a vu l’émergence de deux autres acteurs, SFR et Bouygues Télécom, puis récemment l’arrivée de Free (Groupe 2 Dictionnaire Larrousse 3 Business to Consumer 4 Business to Business
  • 10. 3 Iliad) en tant que quatrième opérateur de réseau dans la téléphonie mobile. Dans ce mémoire, l’accent sera mis sur les opérateurs de télécommunications « mobiles », bien qu’il ne soit pas possible d’écarter la partie « fixe » puisque les entreprises dont nous parlons sont présentes sur les deux segments. Néanmoins, l’entrée de Free sur le marché concernant la partie mobile du secteur, il semble plus intéressant de se focaliser dessus. Le faible nombre d’acteurs tient aux caractéristiques techniques de l’activité (infrastructures en réseau) mais aussi au coût très élevé des investissements requis pour une pénétration du marché. En effet, les services de télécommunications sont techniquement caractérisés par l’installation et la gestion des réseaux de communications, ce qui requiert de lourds investissements. Ils peuvent être de type terrestre (câbles en cuivre, fibre optique, etc) ou aériens (antennes hertziennes, satellites). Les services en réseaux tels que les télécommunications génèrent des externalités positives, également appelées externalités de réseaux, qui peuvent conduire à un phénomène de monopole5 . De même, une des spécificités des services en réseaux tient à la structure des coûts de cette activité. En effet, les coûts fixes sont extrêmement élevés en ce qui concerne le déploiement des infrastructures, ce qui limite d’autant plus les possibilités de concurrence. Quant aux coûts liés aux services (coûts fixes élevés, coûts marginaux faibles), ils assoient l’intérêt de diffusion au plus grand nombre. Les externalités de réseaux d’une part, et les coûts de réseaux d’autre part, provoquent une dynamique de diffusion des services en réseaux répondant à la loi des rétroactions positives. Cette loi stipule qu’une hausse de la demande va entraîner une hausse de l’offre (notamment grâce aux économies d’échelle), celle-ci stimulant à son tour la demande, etc. Les économistes parlent dans ce cas de « causalité circulaire ». De facto, les effets de rétroactions positives favorisent les situations d’oligopole. Un oligopole est une branche de l’économie (industrie ou services) dans laquelle un petit nombre de firmes est en concurrence. Une des caractéristiques principales de ce type de marché réside dans le fait que les firmes ne peuvent pas ignorer le comportement de leurs concurrents. Les interactions stratégiques entre ces firmes sont au cœur de la théorie de l’oligopole, représenté ici par le secteur français des télécommunications, c’est pourquoi ce mémoire s’efforcera de les analyser. 5 J. Vicente, Cours de microéconomie, ch. « Les externalités de réseaux », IEP de Toulouse, 1e année
  • 11. 4 Les opérateurs de télécommunications physiques français sont au nombre de quatre : Orange, SFR, Bouygues Télécom et, depuis janvier 2012, Free. Ce passage de trois à quatre acteurs ne change pas le caractère oligopolistique du secteur. Pour exemple, aux Etats-Unis, le secteur des télécommunications est reconnu comme étant un oligopole avec quatre concurrents en présence : AT&T, Sprint, T-Mobile et Verizon. Cette situation de « marché imparfait6 » peut également être analysée au travers de la théorie des jeux7 . Selon cette théorie, l’interaction entre les stratégies de deux individus ou firmes maximisant leur gain les conduit à une situation sous-optimale au sens de Pareto : c’est l’équilibre de Nash. On peut comprendre grâce à ce modèle la stabilité des stratégies des opérateurs avant l’arrivée de Free sur le marché, puisqu’aucun d’entre eux ne pouvait réellement modifier sa stratégie sans affaiblir sa position. *** Dans ce contexte, une situation optimale peut être obtenue via une entente entre les différents acteurs, ce qui est interdit par les autorités de concurrence. Ainsi, le Conseil de la concurrence français a condamné le 1er décembre 2005 les opérateurs Orange, SFR et Bouygues Télécom à des amendes de plusieurs dizaines de millions d’euros pour entente. Il leur est reproché d’avoir échangé entre 1997 et 2003 des informations précises concernant le volume de leurs ventes. Ce type d’échanges est de nature à altérer le jeu de la concurrence, puisque les opérateurs ont défini ensemble les parts de marché qu’ils s’octroyaient. Au sens de Pareto, cette situation est optimale. Cependant, on peut légitimement se demander si ce système est optimal du point de vue du consommateur, notamment en ce qui concerne les prix d’accès aux services. Lors de l’introduction de Free sur le marché et le lancement de ses offres « low cost », l’entreprise et les commentateurs ont souligné le gain de pouvoir d’achat octroyé aux clients. L’enjeu de ce mémoire sera de déterminer si cet effondrement des prix ne sera pas destructeur de valeur à long terme, et comment les opérateurs adaptent leurs stratégies à ce nouveau contexte. Dans l’hypothèse où l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un secteur faiblement concurrentiel a entraîné une révolution dudit secteur, un certain nombre de questions, 6 La théorie de la concurrence imparfaite a été développée par l’entre-deux guerres par Edward Chamberlain au Etats-Unis et par Joan Robinson en Angleterre. 7 La théorie des jeux a été développée par John von Neumann et Oskar Morgenstern en 1944 dans un ouvrage intitulé Theory of Games and Economic Behavior.
  • 12. 5 auxquelles ce mémoire tentera de répondre, se posent. Est-ce que les opérateurs français de télécommunications auront toujours les moyens d’investir dans des infrastructures aux coûts extrêmement élevés ? Pourront-ils innover de la même manière qu’ils l’ont fait depuis 25 ans ? Les clients bénéficieront-ils toujours de la qualité d’un réseau performant sur le long terme ? Les nouvelles offres proposées par les opérateurs donnent-elles réellement un gain de pouvoir d’achat aux consommateurs ? Ces questions que soulève le contexte du sujet font apparaître un paradoxe. Dans un secteur faiblement concurrentiel, l’arrivée d’un nouvel acteur n’est assurément pas neutre. En effet, alors que le nombre d’abonnés est en constante augmentation (la France compte 40 millions d’abonnements à la téléphonie fixe, 73 millions au mobile et 23 millions à internet), avec un taux de pénétration aujourd’hui supérieur à 100% pour la téléphonie mobile, le chiffre d’affaires des télécommunications en France est en baisse (-6,4% au premier trimestre 2013), du fait de la naissance d’un quatrième opérateur. Dans ce contexte, comment les opérateurs de télécommunications français doivent-ils repenser leurs stratégies pour retrouver le chemin de la croissance ? *** La méthodologie de ce mémoire de recherche s’appuie essentiellement sur la lecture de travaux universitaires, d’études, d’articles de presse, ainsi que sur les témoignages d’experts que j’ai eu l’occasion de rencontrer durant mon stage de fin d’études8 . Cette base documentaire capitalisée pendant plusieurs mois a permis de nourrir ma réflexion sur le sujet, puis d’élaborer une problématique pertinente au regard du sujet ainsi qu’un plan qui permette d’exposer ces recherches de manière cohérente. Les difficultés auxquelles j’ai été confronté tiennent au fait que ce sujet fait référence à un événement récent, pour lequel il est ardu d’avoir le recul nécessaire à son analyse. Peu d’ouvrages empiriques ont été publiés sur l’introduction de Free sur le marché. En termes de statistiques du secteur, il n’a pas été difficile de trouver des rapports riches en données, comme l’étude Xerfi sur le secteur des Télécommunications publiée en 2012 9 . Cependant malgré de nombreuses recherches et contacts à des organismes, certaines données statistiques qui auraient été importantes pour ce mémoire sont restées introuvables, notamment en ce qui concerne les données internes aux entreprises. Malgré un nombre important de sollicitations d’acteurs pour des entretiens, peu 8 Stage de fin d’études réalisé dans le cabinet de conseil Sopra Consulting, avec une mission de 5 mois chez Orange. 9 Xerfi 700, « Télécommunications », Juillet 2012
  • 13. 6 ont accepté de répondre aux questions posées. Face à leur volonté de rester anonymes, leurs points de vue seront exposés dans ce mémoire sans présentation de l’auteur. En outre, il n’est pas possible de prévoir avec certitude les stratégies qui seront déployées par les forces en présence, mais des tendances se dégagent et des préconisations peuvent être formulées. *** Afin d’apporter des éléments de réponse à cette problématique qui nous servira de fil conducteur, la rédaction de ce mémoire s’articulera autour de deux parties. La première s’attachera à expliquer l’organisation d’un secteur majeur de l’économie française, à travers le prisme de ses évolutions technologiques, commerciales et institutionnelles. Nous verrons en quoi ces évolutions ont fait passer le secteur d’un monopole détenu par France Télécom à un oligopole plus réglementé, puis nous étudierons les caractéristiques de l’économie de ce secteur : tissu économique, forces en présence, segments de croissance, etc. La seconde partie traitera concrètement du bouleversement provoqué par l’entrée sur le marché d’un nouveau concurrent, Free, notamment en termes de conséquences macro et micro sur l’économie. Enfin, nous traiterons du renouvellement des stratégies déployées par les opérateurs de télécommunications, entre modèles de croissance remis en cause et accent mis sur l’innovation pour maintenir une création de valeur. Nous verrons que le principal résultat obtenu est qu’une concentration se dessine dans le secteur. Si une fusion entre opérateurs, souvent entendue mais peu probable économiquement, est à écarter, une mutualisation plus poussée des réseaux semble être la voie vers laquelle se tourne les acteurs du secteur, et ce afin de palier des coûts fixes très élevés de développement d’infrastructures.
  • 14. 7 Première partie - La structure du secteur très rentable des télécommunications en France Afin de mieux analyser les nouvelles stratégies mises en place par les opérateurs de télécommunications, il convient en premier lieu de faire un rappel sur les grands jalons qui ont marqué l’évolution de ce secteur. Du monopole détenu originellement par France Télécom à la situation à la veille de l’introduction de Free sur le marché, comment s’est développé ce secteur ? Quelles technologies ont été déployées au cours des décennies ? En quoi le cadre réglementaire a façonné le visage d’un nouveau marché ? Pourquoi parle-t-on d’un marché oligopolistique ? Autant de questions qui nous permettront d’appréhender ce secteur à travers une histoire, des institutions, des technologies. Etudier la composition du tissu économique et des segments de croissance nous permettra dans un deuxième temps de nous forger une vision globale du secteur. Quelles sont les caractéristiques structurelles des services de télécommunications ? Pourquoi parle-t-on de convergence entre ces métiers, ceux des médias et du numérique ? Quelles sont les forces en présence ? Outre les opérateurs « physiques » disposant de leurs propres infrastructures, quels autres acteurs jouent un rôle dans cet univers éclectique ? Sur quels piliers a reposé la croissance de ces services ? Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que c’est un secteur en pleine croissance qui a du s’adapter à l’arrivée d’un nouveau concurrent.
  • 15. 8 Chapitre 1- Du monopole à l’oligopole Des télécoms comme services industriels de l’Etat à l’existence d’entreprises privées cotées en bourse, le visage du secteur a énormément évolué, notamment du point de vue du marché et du cadre réglementaire. Section 1- L’évolution du cadre réglementaire : entre libéralisation et régulation Les premiers services de télécommunications en France ont été instaurés par l’Etat sous la Révolution Française puisque, en 1792, est déployé le réseau de télégraphie optique de Chappe, afin d’acheminer rapidement les informations dans un contexte d’instabilité politique et de guerre civile. En 1878, suite au remplacement du télégraphe optique par le télégraphe électrique, puis l’invention du téléphone, l’Etat français crée un ministère des Postes et Télégraphes. Il faudra attendre 1923 pour que les « PTT » (Postes, télégraphes et téléphones) voient le jour, administrés à partir de 1941 par la Direction générale des Télécommunications. (I) La libéralisation du secteur C’est à partir de 1988 que s’amorça une déréglementation du secteur qui s’est traduite par une ouverture à la concurrence dans le domaine de la téléphonie mobile. En effet, suite à la diffusion par la Commission européenne d’une directive de mise en concurrence des services de télécommunications10 , la Direction générale des télécommunications devient France Télécom le 1er juillet 1988. « La présente directive s'inscrit dans le processus de libéralisation des marchés des télécommunications dans l'Union européenne, processus engagé au milieu des années 80. Une des principales impulsions à cette ouverture a été donnée en 1987 par le livre vert de la Commission sur le développement d'un marché commun pour les services et équipements de télécommunication. Deux objectifs y étaient fixés: mettre en place un réseau de 10 Directive 88/301/CEE de la Commission européenne, 16 mai 1988
  • 16. 9 télécommunications intégré au niveau européen, et favoriser le développement de services aux plus bas tarifs possibles ». La directive « vise à libéraliser les marchés de terminaux de télécommunication. Elle prévoit l'abolition des droits spéciaux ou exclusifs pour l'importation, la commercialisation, le raccordement, la mise en service et l'entretien des équipements terminaux de télécommunication »11 . La loi du 2 juillet 1990 transforme France Télécom en une entité dotée d’une personnalité morale distincte de l’Etat en lui octroyant une indépendance financière, son budget n’étant dorénavant plus voté par l’Assemblée Nationale. Cette déréglementation concernant la téléphonie mobile, les opérateurs ont donc du obtenir des licences d’exploitation octroyées par l’Etat français. Chaque opérateur retenu avait ainsi l’obligation d’investir dans son propre réseau et sa licence comportait des obligations de couverture géographique. En 1991, ce sont donc France Télécom et SFR qui obtiennent les deux premières licences, rejoins en 1995 par Bouygues Télécom. Le 26 juillet 1996, c’est la téléphonie fixe qui est à son tour soumise à la concurrence. En effet, la loi de réglementation des télécommunications12 votée à cette date a procédé à la transposition des directives communautaires libéralisant les télécommunications13 . « Les dispositions de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, en tant qu'elles permettent l'établissement et l'exploitation, par des opérateurs autres que France Télécom, de réseaux ouverts au public, en vue de la fourniture de tous services de télécommunications autres que le service téléphonique au public entre points fixes, prennent effet à compter du 1er juillet 1996 … la fourniture au public, par des opérateurs autres que France Télécom, du service téléphonique entre points fixes sur les réseaux autorisés en application de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications ne pourra, sous réserve de l'application de l'article 2 de la loi n° 96-299 du 10 avril 1996 relative aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information, prendre effet qu'à compter du 1er janvier 1998. A la demande des opérateurs concernés, les autorisations correspondantes pourront être délivrées à compter du 1er janvier 1997 »14 . 11 http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/legislative_framework/l24119a_fr.htm 12 Loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications 13 http://www.finances.gouv.fr/notes_bleues/nbb/nbb255/255_ouv.htm 14 Article 23 de la loi du 26 juillet 1996
  • 17. 10 A partir du 1er janvier 1998, d’autres opérateurs que France Télécom peuvent donc fournir des services de téléphonie fixe, la loi établissant la fin des monopoles de droit sur la téléphonie fixe dans le cadre d'une réglementation asymétrique15 . Dans la déréglementation asymétrique, l'ancien monopole, ici France Télécom, conserve son infrastructure mais doit la mettre à la disposition de ses propres concurrents, contrairement à la déréglementation symétrique dans laquelle les nouveaux concurrents ne sont pas aidés et tous respectent les mêmes règles. Afin de favoriser les nouveaux entrants, une série de règles asymétriques régulant les rapports contractuels entre l'opérateur historique et les nouveaux entrants ont été prévus : contrôle des prix de l'opérateur historique, droit d'accès aux infrastructures (en l'occurrence la mise à disposition du réseau de câbles en cuivre appartenant à l'opérateur historique, qui relie les abonnés aux centraux téléphoniques, nous y reviendrons plus tard) à un prix très proche du coût de production. Les services de télécommunications sont, au niveau européen, régis par la directive 2002/21/CE du 7 mars 2002, également appelée « Paquet Télécom ». Elle vise à garantir un niveau de concurrence satisfaisant dans toute l’Europe, ce qui se traduit en France par des transpositions dans la loi. En parallèle des ces dispositions ouvrant le secteur à la concurrence, des textes législatifs viennent donc le réglementer. La loi du 31 décembre 200316 définit l’application du service universel aux télécommunications, obligeant à fournir un « service téléphonique de qualité à un prix abordable », à « acheminer gratuitement les appels d’urgence », à « fournir un service de renseignements, un annuaire », et à « garantir la desserte du territoire en cabines téléphoniques dans le domaine public ». Cette loi prévoit également que France télécom ne sera plus en charge du service universel, ce service pouvant être fourni par d’autres sociétés. Néanmoins, suite à l’appel à candidature du 12 novembre 2004, l’opérateur historique fut logiquement choisi comme représentant du service universel. Selon Philippe Deubel17 , « le dégroupage des lignes téléphoniques a malgré tout permis l'introduction d'une réelle concurrence et l'émergence d'offres innovantes sur le marché de l'accès à l'Internet haut débit puis du « triple play » (Internet, TV numérique, voix IP). Des acteurs importants ont pu se développer dans ce cadre, notamment Free-Iliad ». Nous reviendrons sur cette notion de dégroupage dans une partie consacrée aux technologies. 15 http://www.melchior.fr/France-Telecom-du-monopole-a.9893.0.html 16 Loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003, suite à la directive européenne 2002/22/CE. 17 Professeur agrégé d’économie à l’Université Lille I
  • 18. 11 La dernière étape de la libéralisation des télécommunications en France réside dans l’attribution d’une quatrième licence de téléphonie mobile, qui fut octroyée au Groupe Iliad. Le 17 décembre 2009, la candidature de Free Mobile à une licence de téléphonie mobile a en effet été retenue par l’ARCEP18 , comme en témoigne l’article 5 de cette décision : « La candidature de la société Free Mobile à l’obtention d’une autorisation d’utilisation de fréquences dans la bande 2,1 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un système mobile de troisième génération est retenue ». Cette décision se cristallisera deux ans plus tard par l’ouverture des services de Free Mobile le 10 janvier 2012, dont nous reviendrons dans la deuxième partie de ce mémoire sur les conditions et modalités. Ces différentes étapes de libéralisation ne sont cependant pas synonymes de dérégulation. En effet, sur un marché de type oligopolistique, la concurrence restera toujours imparfaite. Ainsi, des institutions veillent à ce que la concurrence soit libre et loyale sur le marché. En France, c’est l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP) qui assure cette mission et qui dispose pour cela de la possibilité de sanctionner des contrevenants. D’autres institutions existent également de manière parallèle. (II) La multiplication des acteurs institutionnels Les pouvoirs publics ont toujours souhaité garder une forme de régulation dans le secteur des télécommunications, notamment parce que certains services de téléphonie ont un caractère de biens collectifs, comme par exemple la norme GSM (Groupe Spécial Mobile) sur laquelle nous reviendrons plus tard. Outre les législateurs français et européen dont nous avons fait part ci-dessus, ce sont maintenant les institutions qui nous intéressent, dans le sens où ont pour vocation de répondre aux défaillances du marché. Il convient en premier lieu de présenter l’Autorité de Régulation des Communications électroniques et des postes (ARCEP19 ), puisque c’est l’institution garante de la concurrence dans le secteur des télécommunications en France. L’ARCEP est une autorité administrative indépendante 20 , créée le 5 janvier 1997 sous le nom d’Autorité de Régulation des Télécommunications (ART). Sa mission principale est de veiller à l’existence d’une véritable concurrence sur ce marché, afin qu’elle soit bénéfique pour le consommateur. Dans ce cadre, 18 Décision n° 2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009 19 http://www.arcep.fr 20 Institution de l’État chargée, en son nom, d’assurer la régulation de secteurs considérés comme essentiels et pour lesquels le Gouvernement veut éviter d’intervenir trop directement.
  • 19. 12 elle dispose de la compétence pour fixer des obligations générales imposées aux opérateurs, sanctionner ces derniers si elles ne sont pas respectées, mais également attribuer les fréquences et numérotations nécessaires à l’exercice du métier des opérateurs, à travers le système des licences. Elle est également la garante du développement de l’emploi, de l’innovation, et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications, tout comme celle des intérêts des territoires et des utilisateurs dans l’accès aux services et aux équipements. Une des missions de l’ARCEP a été de réguler les conflits portant sur l’ « interconnexion » entre les opérateurs. L’interconnexion est une notion-clé dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du marché des télécommunications. Dans la mesure où les utilisateurs des réseaux des différents opérateurs doivent être capables de communiquer entre eux puisque nous sommes en situation de marché libre, il y a la nécessité de connecter les réseaux entre eux, phénomène appelé l’interconnexion. Dans le cas contraire, l’opérateur qui aurait initialement le plus de clients rapporterait tout le marché. Il y aurait donc un risque d’abus de monopole21 . L’institution, ici une autorité de régulation qu’est l’ARCEP, impose donc des accords d’interconnexion entre opérateurs (donc une stratégie coopérative), afin d’instaurer une concurrence. En l’absence de régulateur, le marché de la téléphonie mobile ne se serait pas développé en France. L’Agence Nationale des Fréquences (ANFR22 ) est quant à lui un établissement public à caractère administratif23 créé le 1er janvier 1997. Sa mission est de coordonner sur le territoire français l’implantation des stations radioélectriques dans le but d’assurer une utilisation optimale des sites disponibles et de veiller au respect des normes en matière d’exposition du public aux champs électromagnétiques. Les opérateurs ne peuvent, sans son accord, prendre une décision d’implantation. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA24 ) est également une institution régulant les actions des opérateurs de télécommunications, notamment depuis qu’ils jouent un rôle dans les métiers de l’audiovisuel (distributeur de contenus via ADSL et sur téléphones mobiles). Selon le CSA, « ce phénomène est à l'origine d'une pression concurrentielle 21 J. Vicente, Cours de Théorie économique des institutions, ch. « Asymétries d’informations et théorie de l’agence », IEP de Toulouse, 4e année 22 http://www.anfr.fr 23 Personne morale de droit public disposant d’une autonomie administrative et financière afin de remplir une mission d’intérêt général, autre qu’industrielle ou commerciale, sous le contrôle de la collectivité publique dont il dépend (État, région, département ou commune). 24 http://www.csa.fr
  • 20. 13 nouvelle pour l'accès aux contenus et la vente de services. Elle contribue également à l'accroissement de l'offre de programmes mise à la disposition du public »25 . En ce sens, elle régule les services de communication audiovisuelle des opérateurs, tout comme l’ARCEP régule les réseaux. La Fédération Française de Télécoms (FFT26 ), créée en 2007, réunit les associations et les opérateurs de télécommunications français. Elle a pour mission de promouvoir une industrie responsable et innovante au regard de la société, de l’environnement, des personnes et des entreprises, de défendre les intérêts économiques du secteur et de valoriser l’image de ses membres et de la profession au niveau national et international. Pour réaliser ses missions, elle privilégie non pas la régulation contrainte mais la régulation ouverte, dans le respect des règles de la concurrence en vigueur27 . Au niveau européen, la Conférence européenne des administrations des postes et télécommunications (CEPT), créée le 26 juin 1959, est une organisation de coordination entre les entreprises européennes du secteur des télécommunications. Tout comme la FFT, elle a pour vocation de faire de la régulation ouverte. Au niveau international, l’Union internationale des télécommunications (UIT 28 ), agence des Nations Unies pour le développement spécialisé dans les technologies de l'information et de la communication, fut créée en 1865. Son principe fondateur est la coopération internationale entre les gouvernements des Etats membres et le secteur privé. Sa principale mission est la production de normes à portée internationale. Nous avons donc compris dans cette première section que le secteur des télécommunications en France fait l’objet depuis 25 ans d’une libéralisation du marché tout en restant régulé par des institutions diverses, ce qui nous permet de comprendre les raisons pour lesquelles un nouveau concurrent est apparu en 2012. Il paraît cependant nécessaire de revenir sur les fondamentaux de l’essor fulgurant de ce marché au cours des dernières décennies, ce qui nous permettra de comprendre entre autres pourquoi il ne peut exister qu’un faible nombre d’acteurs. 25 CSA, « Les opérateurs télécom, nouveaux acteurs du secteur audiovisuel », La lettre du CSA n° 217 – Juin 2008, 30 juin 2008 26 http://www.fftelecoms.org 27 http://www.fftelecoms.org/articles/qui-sommes-nous 28 http://www.itu.int/fr/
  • 21. 14 Section 2- L’essor du marché depuis la fin des années 1980 Cette évolution du marché peut se comprendre au travers de deux éléments : les services et la technologie. (I) Des technologies sans cesse renouvelées Les technologies utilisées dans les télécommunications sont en évolution constante, gage de la croissance du secteur (sur laquelle nous reviendrons dans une section consacrée aux segments de croissance). Les technologies utilisées par les opérateurs de télécommunications (mobile et fixe) répondent souvent à des normes, qui permettent une meilleure visibilité pour le grand public et une compatibilité entre les différentes technologies. (A) Dans la téléphonie mobile En France, il existe plusieurs normes liées à la téléphonie mobile. Le marketing et la communication des opérateurs ont rendu familières les normes 1G, 2G, 3G et 4G, le « G » représentant l’abréviation « génération ». Les normes « 1G » Les normes « 1G » sont les normes associées à la première génération de téléphonie mobile, la voix circulant par un canal analogique29 , le contrôle étant effectué par un canal numérique30 . En France, cette norme fait tout d’abord référence à la technologie « Radiocom 2000 » lancée par France Télécom en 1986. Fonctionnant sous la bande de fréquence 400 MHz, c’est avec cette technologie qu’on parle pour la première fois de téléphonie cellulaire. L’utilisation qui en est faite par la plupart des usagers concerne des appareils installés à bord de véhicules. En parallèle, SFR marque l’arrivée de la concurrence dans le secteur en important une technologie des pays nordiques31 , appelée Nordic Mobile Telephone (NMT) dans la bande de 29 La transmission analogique de données consiste à faire circuler des informations sur un support physique de transmission sous la forme d'une onde. 30 La transmission numérique consiste à faire transiter les informations sur le support physique de communication sous forme de signaux numériques (série de 0 et de 1). 31 Finlande, Norvège, Suède, Danemark
  • 22. 15 450 MHz, autorisée par les pouvoirs publics. Cette technologie, qui avait prouvé son efficacité dans plusieurs pays depuis le début des années 1980, représente donc la première évolution technologique dans le secteur. En coopération avec Alcatel-Thomson, SFR a transposé le savoir-faire nordique pour que la technologie soit utilisable sur le sol français, et ce à partir de 1989. Les normes « 2G » Les normes de deuxième génération représentent le passage du mi-analogique/mi- numérique au tout numérique. Cette norme a offert la possibilité, en plus de la voix, d’envoyer des données textes (SMS) puis des messages multimédias comme le MMS. En France, comme partout en Europe, la norme utilisée est le GSM (Global System for Mobile Communication). Mis en place en 1992, cette norme se base en Europe sur deux fréquences : 900 MHz et 1800 MHz, raison pour laquelle on appellera les terminaux produits avec cette norme des « bi-bandes par opposition aux « tri-bandes », qui sont les terminaux compatibles aux Etats-Unis. En effet, la norme GSM, généralisée au niveau européen, devait asseoir la capacité des Européens à s’affirmer sur le plan technologique face aux Etats-Unis et leur norme CDMA32 . Cette norme a vu le jour grâce au groupe créé par la CEPT qui a rassemblé opérateurs et fabricants de terminaux. Le « Groupe Spécial Mobile » a ainsi été mandaté pour organiser et résoudre les modalités techniques liées à l’utilisation de la norme. L’acceptation officielle de la norme GSM a été signée en 1997 par les acteurs (opérateurs et fabricants) de 17 pays différents. La norme GSM a deux propriétés majeures : - elle permet à l’utilisateur de passer d’un réseau à un autre, tout en assurant la continuité du service (téléphoner et envoyer des SMS et MMS). - elle permet aussi la mise en place de la carte SIM (Subscriber Identity Module). Celle- ci va alors permettre aux utilisateurs de changer de téléphone tout en gardant la même ligne. 32 Code Division Multiple Access
  • 23. 16 Les principaux avantages de cette norme, par rapport à Radiocom 2000 et NMT étaient une meilleure qualité du son, une réduction des risques de piratage des lignes téléphoniques, ou encore une diminution de la taille des téléphones mobiles. Deux nouvelles technologies ont également vu le jour à la suite du GSM, qui concernait uniquement les échanges de voix : il s’agit du GPRS33 (2001) et du EDGE34 dont l’apport est l’échange de données sur réseau mobile. Le GPRS est souvent qualifié de « 2,5G », il offre un débit deux fois supérieur à celui du GSM, ce qui permet la transmission des données et un premier pas vers l’internet mobile. EDGE quant à lui est une évolution du GPRS apparue à la veille des réseaux de troisième génération. La norme « 3G » C’est en 2004 qu’apparaît la troisième grande génération en matière de téléphonie mobile, basée au départ sur la technologie UMTS35 dont les fréquences (900 MHz et 1800 MHz) ont été attribuées par l’ARCEP en 2001 et 200236 . La 3G, dont l’UMTS et ses évolutions (HSDPA37 , HSPA+ et DC-HSPA+) offrent un débit théorique bien supérieur à celui du GSM, va servir de socle technologique au développement des usages et des nouveaux services avec la téléphonie mobile : télévision, visioconférence, accès haut débit à l’internet mobile. Après la première génération basée sur des technologies françaises, et la deuxième basée sur des technologies européennes, c’est désormais une norme mondiale qui est utilisée. (B) Dans la téléphonie fixe Pour comprendre les évolutions opérées dans le domaine du mobile, il convient également de faire un état des lieux des différentes évolutions technologiques du domaine de la téléphonie fixe, qui se sont faites de manière parallèle, notamment dans le cadre du développement des accès à internet. Les connexions physiques 33 General Packet Radio Service 34 Enhanced Data Rates for GSM Evolution 35 Universal Mobile Telecommunications System 36 Conformément à la décision n°00-0835, ARCEP, 28 juillet 2000 37 High Speed Downlink Packet Access
  • 24. 17 A l’origine, la téléphonie fixe (transmission de la parole à distance) est possible techniquement grâce aux réseaux de câbles en cuivre appartenant à France Télécom, appelé Réseau téléphonique commuté (RTC). C’est ce réseau qui est utilisé par la technologie xDSL38 pour fournir les foyers en accès à internet, l’ADSL en étant la variante la plus connue. Il s’agit d’une technologie qui permet d’atteindre des débits de plusieurs mégabits par seconde (Mbits/s) sur des lignes téléphoniques classiques. De même, le « câble » qui permettait de recevoir des chaînes de télévision supplémentaires via une installation parallèle à celle de France Télécom permet aujourd’hui de recevoir l’internet haut débit et le téléphone. La fibre optique, constituée physiquement d’un fil de verre très fin permettant la transmission d’informations à un débit très élevé grâce à des impulsions lumineuses, est en cours de développement, notamment dans les grandes villes françaises pour les particuliers. Les connexions sans fil Le satellite est une technologie permettant d’acheminer des informations et d’offrir des services de téléphonie et d’internet. Néanmoins, son coût très élevé en fait un moyen de communication peu privilégié. Le Wimax, technologie de transmission de données par voies hertziennes, est utilisé dans des zones du territoire dans lesquelles il n’y a ni le câble ni l’ADSL. Enfin, la BLR (Boucle Locale Radio) consiste à remplacer les derniers kilomètres de lignes téléphoniques connectant un particulier ou une entreprise par des ondes radio dans des régions à faible densité de population. Nous avons vu que les technologies déployées par les opérateurs de télécommunications ont évolué très rapidement depuis les années 1980, passant de normes purement françaises à des normes internationales standardisées, notamment pour la téléphonie mobile. Les technologies déployées ont servi de socles à des services toujours plus enrichis pour les utilisateurs. 38 Digital Subscriber Line (Ligne numérique d’abonné)
  • 25. 18 (II) L’évolution des services proposés On distingue, dans les services proposés par les opérateurs de télécommunications, les services grand public (particuliers) et les services aux entreprises. (A) Les services grand public Service historique fourni par les opérateurs de télécommunication, la téléphonie peut être dite fixe ou mobile. La téléphonie fixe fait partie intégrante des offres de fourniture d’internet à haut débit. Elle connaît même un renouveau dans la mesure où les technologies de voix sur IP39 (VoIP) offrent un son de qualité améliorée. Au 4e trimestre 2011, la téléphonie sur IP concernait 52% des abonnements40 . Le marché de la téléphonie mobile est quant à lui en constante augmentation. Le taux d’équipement des Français en la matière est aujourd’hui de 112%41 . L’accès à internet est le deuxième service proposé par les opérateurs de télécommunications. Popularisé par les offres ADSL, couplées avec l’accès à la téléphonie fixe, voire mobile, et la télévision, le nombre de foyers équipés s’élève en 2010 à 64% de la population, contre 12% il 10 ans auparavant42 . Avec le développement sans précédent de l’internet mobile (24,1 millions de Français disposent d’un smartphone, soit 44,4% de la population 43 ), les opérateurs de télécommunication offrent également des services dans les contenus. Grâce à la technologie UMTS qui a permis d’élever sensiblement les débits de transmission des données pour que les utilisateurs accèdent au haut débit mobile, les téléphones portables sont devenus des appareils multifonctions permettant de se connecter à internet, de prendre des photos, des vidéos, de les envoyer, de télécharger des films, des applications et des jeux. De même, grâce aux connexions internet filaires de plus en plus rapides, les opérateurs peuvent désormais proposer des services tels que la vidéo à la demande (VOD), la diffusion de la télévision en haute définition ou encore la vidéosurveillance. 39 Mode de téléphonie utilisant le protocole de télécommunications créé pour Internet (IP pour Internet Protocol). La voix est numérisée puis acheminée sous forme de paquets comme n'importe quelles autres données. 40 Données Xerfi 41 Selon l’Arcep, 73,8 millions de cartes SIM pour une population de 65,8 millions de personnes au 1er trimestre 2013 42 http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1340 43 http://www.journaldunet.com/ebusiness/internet-mobile/equipement-et-usages-des-smartphones-0613.shtml
  • 26. 19 (B) Les services aux entreprises Le type de services aux entreprises est similaire à ceux pour le grand public, mais les usages sont néanmoins différents. En ce qui concerne la voix (téléphonie fixe et mobile), les services sont identiques à ceux destinés aux particuliers, mais ils incorporent des fonctionnalités supplémentaires comme les options de numérotation ou les conférences téléphoniques. La voix sur IP assure des garanties de sécurité bien supérieures aux anciennes normes de téléphonie fixe, ce qui correspond à des besoins pour des clients professionnels. Pour leur accès à internet, les entreprises ont des besoins différents de ceux du grand public. En effet, du fait de leur taille et donc du nombre important de postes connectés à internet, les volumes de données qui transitent sur leurs réseaux nécessitent des connexions à très haut débit, le plus souvent grâce à la technologie de fibre optique. Tout comme la voix, l’accès à internet présente des enjeux forts en terme de fiabilité et de sécurité. Les entreprises, selon leur taille, ont des besoins en terme de traitement des données. Leur transmission doit être effectuée de manière complexe et sécurisée, comme le montrent les enjeux actuels qui existent autour du Cloud Computing44 et du Big Data45 . Pour répondre à ces besoins, les opérateurs fournissant l’accès à internet proposent des services tels que les interconnexions de LAN (réseaux internes à l’entreprise) ou les liaisons louées (location de liaisons physiques appartenant aux opérateurs pour la transmission des données, comme la fibre optique ou le câble) pour les transferts d’un gros volume de données. Les opérateurs proposent également des solutions de stockage à distance. De même, les opérateurs proposent également des solutions « machine to machine » permettant des échanges de données entre ordinateurs sans intervention humaine. Les entreprises utilisent ce type de service notamment pour des besoins logistiques liés à la sécurité, la monétique ou encore la gestion des équipements. Nous l’avons compris, de la Direction générale des Télécommunications ayant le monopole de la téléphonie fixe à la présence de plusieurs opérateurs fournissant des services 44 Utilisation de serveurs distants (en général accessibles par Internet) pour traiter ou stocker l'information. 45 Phénomène d’explosion des volumes de données de nature informatique à traiter par l’entreprise.
  • 27. 20 dans la téléphonie fixe et mobile, dans l’internet et dans les médias, le secteur français des télécommunications a connu une transformation à tous niveaux : politique, institutionnelle, réglementaire, technologique et commerciale. Après avoir étudié ce passage d’un marché en situation de monopole à un système oligopolistique, nous allons désormais nous intéresser à son fonctionnement d’un point de vue économique en regardant plus précisément la composition du tissu économique ainsi que les segments de croissance sur lesquels se sont appuyés les opérateurs.
  • 28. 21 Chapitre 2- Un secteur majeur de l’économie française Le secteur des télécommunications occupe une place importante dans l’économie française, puisqu’il pèse 3% du PIB national. Nous allons étudier dans cette partie la composition du tissu économique d’une part ainsi que les piliers de la croissance de ce secteur d’autre part. Section 1- La composition du tissu économique, entre éclatement des acteurs et concentration des métiers Les opérateurs de télécommunications sont évidemment les acteurs les plus importants du secteur, dans le sens où ils possèdent les réseaux physiques permettant de fournir des services associés. Néanmoins, ils ne sont pas les seuls à jouer un rôle dans ce secteur dans lequel la concurrence s’est nettement accrue au cours des dernières années. (I) Evolution et caractéristiques structurelles : maille économique éclatée et convergence (A) Un secteur atomisé Le marché des services de télécommunications, tels que nous les avons décrits dans la partie précédente (téléphonie, internet, etc), est composé de plus de 4900 entreprises46 , pour la plupart des TPE. Le chiffre d’affaires du secteur s’élève à 70,4 milliards d’euros, ce qui en fait un poids lourd au niveau européen, environ 87% des revenus étant générés par les activités de télécommunications filaires et sans fil. Tableau récapitulatif des entreprises composant le secteur (Source : Xerfi) 46 Recensées en 2009, donnée Xerfi – Voir en Annexe 1 les principales sociétés du secteur
  • 29. 22 Attirées par la rentabilité du secteur, de nombreuses entreprises se créent, passant de 3072 en 2005 à 4581 en 2010. Ainsi, on comprend que malgré la situation d’oligopole dont jouissent les opérateurs de télécommunications, le secteur est extrêmement concurrentiel, en particulier pour les petites entreprises. Cependant, le nombre de créations d’entreprises est en diminution depuis 2010, le solde création / défaillances restant tout de même positif. Il est également intéressant de voir dans quels sous-secteurs d’activité ces entreprises exercent. Alors que ce sont les télécommunications sans fil (46,6%) et filaires (40,8%) qui génèrent la majorité du chiffres d’affaires du secteur, tandis que celles par satellite (5,5%) et les autres activités47 (7,1%) sont minoritaires, les entreprises composant le tissu économique 47 Comprend la fourniture d’applications spécialisées, l’exploitation de stations de communications, la fourniture d’accès à internet par l’intermédiaire de réseaux dont l’opérateur n’est pas propriétaire, la fourniture de téléphone et d’internet dans des lieux publics, la fourniture de télécommunications par la voix sur IP, l’acquisition et la revente de capacités réseau dans services supplémentaires.
  • 30. 23 des télécommunications sont pour 51,6% d’entre elles présentes dans les activités annexes, tandis qu’elles sont 38,7% dans le filaire et seulement 7% dans le sans fil. Enfin, il convient de noter qu’une des composantes du tissu économique du secteur des télécommunications est le taux d’investissement très élevé de la part des entreprises. Entre 2005 et 2011, les investissements ont connu une croissance de 25% pour atteindre 7,9 milliards d’euros, ce qui tient essentiellement à l’accroissement des dépenses de déploiement des réseaux très haut débit, qui ont atteint 2,5 milliards d’euros en 2011 (1,8 M€ pour les réseaux mobiles, 700 m€ pour les réseaux de fibre optique). On remarque également qu’en 2011 les dépenses d’investissement ont augmenté pour la deuxième année consécutive :
  • 31. 24 (B) La convergence des services et des infrastructures48 Sous l’effet de la déréglementation, de l’évolution des technologies et de la vitalité économique du secteur, le mariage des télécommunications, de l’informatique et de l’audiovisuel ouvre de nombreuses perspectives de développement de nouveaux services intégrant voix, données et images. Le rapprochement entre ces industries induit un phénomène de convergence à plusieurs niveaux. La convergence des services Aujourd’hui, les technologies radio permettent d’offrir des services de visiophonie ou des accès à des applications multimédias à partir de terminaux mobiles (smartphones), grâce à la technologie UMTS que nous avons évoquée précédemment, ce qui n’était auparavant possible que sur des lignes fixes. Ce terminal permet aujourd’hui non seulement de passer ses communications vocales mais également de transférer des données, d’accéder à Internet et de payer de façon parfaitement sécurisée des services ou des biens achetés au travers soit de serveurs en ligne, soit de manière physique grâce à la technologie NFC49 qui permet le paiement sans contact. Désormais, le fait de souscrire un abonnement internet permet d’accéder à plusieurs services (téléphonie, télévision, internet) proposé par le même opérateur, preuve de la convergence entre communications et médias. Ces services, également disponibles sur téléphone mobile, sont proposés par les mêmes opérateurs « globaux ». La convergence des infrastructures L’offre de services est également de plus en plus décorrélée des plates-formes réseau. Les technologies deviennent polyvalentes et permettent un transport de façon indifférenciée de la voix, des données et des contenus multimédias. Les réseaux, quel que soit le support physique qu’ils utilisent (câble, fibre optique, systèmes hertziens) sont désormais capables de supporter des débits élevés et deviennent multiservices. Le secteur offre de nouvelles opportunités à tout acteur disposé à se diversifier dans le secteur des services de télécommunications, comme en témoigne le nombre élevé de créations d’entreprises. Des 48 P.-Y. Badillo, D. Roux, Les 100 mots des télécommunications, Que sais-je ? (P.U.F.), 2009 49 Near Field Communications
  • 32. 25 opportunités d’autant plus intéressantes que ce marché se révèle être particulièrement attractif : - En termes sectoriels : certains usages sont en pleine effervescence et devraient selon les prévisions enregistrer une croissance à deux chiffres (les contenus haute définition par exemple)50 ; - En termes de rentabilité. Les acteurs du marché sont bien évidemment conscients de ces opportunités, comme le montrent l’analyse des forces en présence. (II) Les forces en présence : des opérateurs possédant des réseaux physiques et des acteurs secondaires L’opérateur historique des télécommunications françaises, France Télécom devenu Orange le 1er juillet 201351 , qui fut en situation de monopole jusqu’en 1988 pour le mobile, et 1998 pour le fixe, est toujours leader incontestable du marché. Orange capte en effet 42,5% des abonnés à Internet et plus de 38% des abonnés à la téléphonie mobile. Il devance donc ses trois principaux concurrents, que sont SFR, Bouygues Télécom et Free. Outre les quatre opérateurs connus du grand public, il existe des entreprises spécialistes des services aux entreprises, des organismes publics et des acteurs des télécommunications. Ces opérateurs supplémentaires viennent faire concurrence à la fois aux opérateurs historiques mais aussi aux petites entreprises qui proposent le même type de services. 50 http://www.01net.com/editorial/585705/4g-beaucoup-des-promesses-et-quelques-realites/ 51 http://www.orange.com/fr/groupe/France-Telecom-devient-Orange
  • 33. 26 (A) Les opérateurs de réseaux physiques France Télécom / Orange Détenu à 27% par l’Etat français et le FSI52 , Orange est le leader français de la téléphonie fixe, de l’accès à internet et de la téléphonie mobile53 . Présent à l’international, le groupe réalise 47,6% de son chiffre d’affaires en France. Les clients du groupe sont les particuliers, les entreprises via sa filiale Orange Business Services ainsi que les opérateurs mobiles virtuels (MVNO, voir partie suivante). SFR Filiale à 100% du groupe Vivendi54 , SFR (Société Française du Radiotéléphone) fut créé en février 1987, lors de l’ouverture à la concurrence de la téléphonie mobile. Initialement spécialisé dans ce secteur, l’opérateur propose également aujourd’hui des services d’accès à internet depuis la fusion avec Neuf en 2007, ainsi que des contenus multimédias. L’entreprise occupe la deuxième place sur les marchés de la téléphonie mobile et la troisième pour la fourniture d’accès à internet, avec une clientèle composée de particuliers, de professionnels et d’administrations. Bouygues Télécom Troisième acteur historique de téléphonie mobile en France, Bouygues Télécom est une filiale du groupe Bouygues depuis 1994. Elle occupe logiquement la 3e place dans la 52 Fonds stratégique d’investissement 53 Voir Annexe 2 – Analyse SWOT de France Télécom 54 Membre du CAC40, Vivendi est une multinationale spécialisée dans les secteurs de la communication, des médias et du divertissement.
  • 34. 27 téléphonie mobile, mais seulement la 4e pour ce qui est du marché d’accès à internet, loin derrière ses concurrents avec 5,7% de parts de marché en 2012. Néanmoins, le groupe entend renforcer son poids sur ce segment grâce au rachat des activités télécoms de Darty en mai 2012 (300000 abonnés internet et 40000 abonnés mobile). Tout comme Orange et SFR, il propose des services aux particuliers, aux entreprises, et loue également son réseau aux MVNO. Free (Groupe Iliad) Iliad est détenu en majorité par Xavier Niel (58,6%55 ). Créé en 1991, Iliad exerce à l’origine des activités dans la fourniture de services de Minitel. C’est à partir de 1999 que le groupe devient un fournisseur d’accès à internet et de téléphonie fixe, notamment via sa filiale Free. Le groupe occupe aujourd’hui la deuxième place du marché français, devançant de peu SFR. Il est le premier opérateur à avoir proposé une offre « triple play »56 à moins de 30 euros par mois, affichant les prémices d’une stratégie reposant sur des offres commerciales à bas coûts. Depuis 2012, Iliad est également présent sur le marché de la téléphonie mobile, ce que nous détaillerons dans la seconde partie de ce mémoire. Au premier trimestre 2012, l’opérateur possédait déjà 3,8% de parts de marché. Numericable Completel Détenu par trois fonds d’investissement étrangers, Numericable Completel est leader sur le marché des télécommunications par câble pour la télévision via le réseau Numericable (3,42 millions d’abonnés), et de la fourniture d’accès à internet par fibre optique57 via le 55 http://www.iliad.fr/amf/2013/documentdereference2012.pdf 56 Offre composée d’un accès à internet, de téléphonie fixe et de télévision. 57 S. Godeluck, « Numericable reste le leader du très haut débit en France avec 500.000 clients », Les Echos, 13 avril 2012
  • 35. 28 réseau Completel, et présent dans la téléphonie fixe et mobile via le réseau de Bouygues Télécom. Numericable est né en 2007 de la fusion de NC Numericable, Noos et Est videocommunications. Alors que ses offres commerciales sont destinées aux particuliers, avec la fourniture de services similaires à ceux des autres opérateurs, Completel est spécialisé dans les solutions de télécommunications pour les entreprises et les administrations. Ses 10000 km de réseau en font le premier opérateur de télécommunications par fibre optique pour les professionnels en France. Ses solutions comprennent des services de téléphonie, (fixe, centres d’appel), des solutions d’accueil58 , d’interconnexions de sites, d’accès internet et de cloud computing. Il est intéressant de noter que Numericable Completel utilise le réseau de Bouygues Télécom pour la téléphonie mobile, tandis que ce dernier utilise le réseau fibre optique du câblo-opérateur dans ses offres très haut débit. (B) Les opérateurs de réseaux virtuels Les MVNO (Mobile Virtual Network Operator) sont des opérateurs de téléphonie mobile virtuels, dans le sens où ils ne possèdent pas leurs propres infrastructures ni les fréquences de télécommunications mais les louent aux opérateurs existants (Orange, SFR, Bouygues Télécom – Free ne louant pas son réseau pour le moment) pour proposer des offres à leurs clients. Leur arrivée sur le marché fait suite à l’avis favorable de l’ARCEP le 10 juin 2004. Aujourd’hui, il existe une cinquantaine de MVNO en France. C’est dans une logique de renforcement de la concurrence que l’ARCEP a souhaité l’apparition d’opérateurs virtuels. Néanmoins, malgré une progression croissante, leur part de marché cumulée n’atteignait que 11,2% au 1er trimestre 201259 . Contrairement aux opérateurs physiques qui sont présents sur tout le territoire, les MVNO privilégient des stratégies de niche, dans le sens où ils se développent dans des régions faiblement couvertes, où le taux de 58 Numéros commençant par 0800 par exemple. 59 Source Xerfi
  • 36. 29 pénétration est faible, ou encore en s’adaptant à des spécificités régionales : c’est le cas par exemple de Breizh Mobile, qui facture moins les communications passées à l’intérieur de la Bretagne que les autres. Pour proposer des offres attractives, ces opérateurs acquièrent leurs clients via des canaux à faibles coûts (par exemple Internet), dématérialisent leurs supports administratifs ou encore maintiennent des coûts de structures faibles. Les clients sont, en fonction des opérateurs, des particuliers ou des professionnels. Parmi les MVNO les plus connus, il convient de citer M6 Mobile, CIC Mobile, qui utilisent le réseau d’Orange, Joe Mobile, La Poste Mobile pour SFR, Numericable pour Bouygues Télécom. Nous avons vu que le tissu économique du secteur des télécommunications s’étendait sur un spectre large, des opérateurs « classiques » générant plusieurs milliards d’euros de chiffre d’affaires à de nombreuses TPE présents dans des marchés de niches, en passant par les opérateurs mobiles virtuels. L’évolution de cette maille fait apparaître une caractéristique qu’est la convergence entre les métiers de la téléphonie, de l’internet et des médias. En effet, les opérateurs de télécommunications, avec les offres multiservices, proposent tous de la téléphonie (fixe et mobile) et un accès à internet. Il convient désormais de s’intéresser aux segments de croissance phare qui ont permis à ce secteur d’occuper une place prépondérante dans l’économie française, et qui explique le renforcement de la concurrence de ces dernières années marqué par l’arrivée d’un quatrième opérateur physique sur le marché de la téléphonie mobile. Section 2- Des segments de croissance à bout de souffle Face à la multiplication des acteurs et le renforcement de la concurrence, les opérateurs de télécommunications ont axé leurs stratégies sur le développement de deux segments porteurs : la voix via une incitation à consommer plus, et les données grâce à l’essor le la consommation de l’internet mobile. (I) La voix, pilier de la croissance du secteur
  • 37. 30 En 2009, l’usage de voix (environ 200 milliards de minutes consommées) s’équilibrait entre la téléphonie fixe et la téléphonie mobile (respectivement 50% de parts de marché). Aujourd’hui, on observe une croissance pour le mobile et une baisse pour le fixe. Bien que l’usage de la téléphonie fixe soit en déclin, l’usage de la voix par les consommateurs est toujours un segment de croissance, tiré par la téléphonie mobile. Avec un trafic de téléphonie fixe et mobile s’élevant à 61,1 milliards de minutes, la croissance reste soutenue avec une augmentation de +4,7% en un an au premier trimestre 201360 . Ce volume, tiré par la progression du trafic de téléphonie mobile, connaît un taux de croissance annuelle de 20%. La consommation de téléphonie fixe s’élève à 27,8 milliards de minutes au premier trimestre 2013, ce qui correspond à une baisse de -8,8% en un an. Il s’agit d’une baisse consécutive sur quatre trimestres. Le trafic des box vers les mobiles connaît en effet sa première baisse (-4,3%), après une période de ralentissement de sa croissance en 2012. De même, le trafic de ligne fixe à ligne fixe est en recul de 7%, ce qui correspond à 1 milliard de minutes consommées en moins. Le volume de consommations téléphoniques mobiles atteint quant à lui 33,3 milliards de minutes au premier trimestre 2013, soit une augmentation de 5,4 milliards de minutes par rapport au premier trimestre 2012 (23 minutes de plus consommées par client et par mois, pour un total de 2h51 minutes de communications mensuelles). L’augmentation du trafic de voix au départ des mobiles est en augmentation annuelle de 19,5%. Néanmoins, malgré ces chiffres faisant état d’une croissance de l’usage de la téléphonie, les revenus qui y sont associés sont eux en baisse. Le revenu des communications mobiles ne cesse en effet pas de diminuer depuis cinq années. La voix, qui fut un segment de croissance pour les opérateurs de télécommunications, n’est donc plus un relai de croissance, du fait de la concurrence accrue dans ce secteur. 60 Données Arcep
  • 38. 31 (II) L’explosion de l’accès à internet La croissance du réseau Internet61 et la généralisation de l’utilisation du protocole IP (qui permet d’échanger des données d’un ordinateur à un autre) pour les réseaux de télécommunications mobiles, pour les réseaux internes des entreprises (Intranet) ou pour les réseaux reliant l’entreprise à ses fournisseurs et clients (Extranet), induisent une croissance sans précédent du trafic des données à partir des années 2000. En France, le marché de la connectivité Internet s’est fortement développé sur le segment « entreprises », avant que les particuliers prennent le relai de la croissance. Le nombre de SMS envoyés s’élève au premier trimestre 2013 à 49,4 milliards, avec une croissance annuelle de 11,5%. Le volume de données transitant par les réseaux mobiles est quant à lui de plus de 30 Pétaoctets pour le trimestre, en augmentation de 66% par rapport à l’année dernière. 61 Ensemble des réseaux de communication électronique interconnectés entre eux et permettant à ses utilisateurs d’échanger des informations.
  • 39. 32 Cependant, le revenu des données (SMS, MMS, accès à internet) dans les services mobiles n’augmente plus non plus depuis le deuxième trimestre 2012, cette différence entre la stagnation ou la baisse des chiffre d'affaires des opérateurs et l'augmentation importante des volumes s'expliquant selon l'Arcep « par la baisse des prix de détail des services de communications électroniques, que l'Insee a chiffrée à 9,5% en 2012 »62 . On comprend donc que les segments de croissance qui ont servi de piliers aux opérateurs de télécommunications français deviennent désuets, du fait d’un renforcement de la concurrence du secteur et de ce qui semble être une baisse des prix. 62 « Mobile : le volume de données échangées a augmenté de 70% en 2012 », L’Expansion, 4 avril 2013
  • 40. 33 Le secteur des télécommunications en France se caractérise, nous l’avons vu, par une structure oligopolistique. Cette situation s’explique par des raisons historiques (France Télécom était un monopole pour le mobile jusqu’en 1988 et pour le fixe jusqu’en 1998) et par d’importantes barrières à l’entrée, qui tiennent à la fois à la réglementation (attribution des licences par l’ARCEP), aux technologies (complexité, coût de développement) et à l’économie (importance des investissements à réaliser pour la mise en place d’un réseau). Par exemple, l’entrée de Free sur le marché en tant que quatrième opérateur de téléphonie mobile a coûté à Iliad la bagatelle de 2 milliards d’euros. La filière des services de télécommunications, qui génère un chiffre d’affaires de 70,4 milliards d’euros (notamment dans les télécommunications filaires et sans fil), comprend quelque 4900 entreprises, ce qui en fait un secteur atomisé. Cet éclatement est symptomatique d’un renforcement de la concurrence. Bien que les parts de marché soient majoritairement détenues par les trois acteurs « historiques » que sont Orange, SFR et Bouygues Télécom, de nouveaux poids lourds ont fait leur apparition. Outre Free (dans le mobile) et Numericable (surtout dans le fixe), des opérateurs virtuels (MVNO) ont fait leur apparition et réussissent à se faire une place dans le paysage concurrentiel. Les segments de croissance sur lesquels se sont appuyés les opérateurs de télécommunications tendent aujourd’hui à s’effriter, du fait de cette concurrence poussée. La croissance de la consommation n’entraîne plus une croissance des revenus, signe du bouleversement induit par l’arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile. C’est pourquoi nous allons tenter de comprendre dans la deuxième partie de ce mémoire les tenants et aboutissants de ce changement majeur. Nous comprendrons notamment pourquoi la modification du paysage concurrentiel entraîne des conséquences importantes sur l’économie et oblige les entreprises à repenser leurs stratégies.
  • 41. 34 Deuxième partie - L’arrivée d’un nouvel entrant sur le marché, un bouleversement majeur pour le secteur Afin de comprendre en quoi l’entrée d’un nouveau concurrent sur le marché des télécommunications a fait l’effet d’un tremblement de terre, il convient dans un premier temps de voir en quoi cela a modifié la physionomie du secteur. Dans quelles conditions Free a-t-il pu pénétrer un oligopole dans lequel les barrières à l’entrée sont extrêmement fortes ? Quel rôle les pouvoirs publics ont-ils joué ? Où le nouvel opérateur a-t-il trouvé les ressources nécessaires ? Quelles conséquences cela a-t-il pour les entreprises du secteur ? Pour l’emploi ? Pour les consommateurs ? Etudier les nouveaux modèles de croissance et les solutions innovantes mises en avant nous permettra dans un deuxième temps de comprendre comment les opérateurs renouvellent leurs stratégies pour faire face à ce bouleversement. Pourquoi Free a-t-il choisi de « casser les prix » en ne proposant que des offres « low-cost » ? Le service est-il réellement moins cher qu’auparavant ? Cela correspond-il à la juste valeur des services proposés ou au contraire détruit-il de la valeur ? Les opérateurs peuvent-ils maintenir ce modèle à long terme ? L’innovation peut-elle permettre aux opérateurs de retrouver le chemin de la croissance ? Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que ce secteur est en pleine transformation, mais que des solutions existent pour continuer à créer de la valeur.
  • 42. 35 Chapitre 1- La modification du paysage des télécommunications en France Nous étudierons dans ce chapitre les modalités et les conditions d’une introduction de Free sur le marché facilitée par les pouvoirs publics, ainsi que les conséquences macroéconomiques que cela a entraîné. Puis, nous nous intéresserons aux nouvelles caractéristiques du secteur, au niveau environnemental et conjoncturel. Section 1- L’introduction de Free sur le marché (I) L’arrivée de Free : conditions et modalités Dans le prolongement du Paquet Télécom établi en 2002 par la Commission européenne, une mise à jour a été publiée le 13 novembre 2007, dont les dispositions réglementaires sont applicables en 2010, et adoptée le 24 novembre 200963 . Cette nouvelle directive encadre les conditions d’accès aux réseaux de télécommunications pour des nouveaux entrants et permet aux régulateurs nationaux, dans le cadre d’un renforcement de la concurrence, d’obliger les opérateurs historiques à séparer leurs activités commerciales de la gestion de leurs infrastructures. Le gouvernement Fillon II, dans une volonté de renforcer la concurrence dans un secteur des télécommunications où les opérateurs ont été condamnés dans le passé pour entente sur les prix, a lancé le 1er août 2009 un appel à candidatures pour l’attribution d’une quatrième licence de téléphonie mobile, après transmission de la décision de l’Arcep de mettre en vente une quatrième licence64 . Le coût de celle-ci a été fixé à 240 millions d’euros, bien en deçà des 619 millions d’euros que déboursèrent Orange, SFR et Bouygues Télécom au début des années 2000 pour l’attribution de la licence pour la technologie UMTS65 . Selon la décision de l’Arcep, le nouvel entrant doit respecter certaines conditions : « Les obligations minimales qui seront imposées au candidat qui sera retenu à l’issue de la 63 http://www.arcep.fr/index.php?id=9578 64 Décision n° 2009-0610, Arcep, 16 juillet 2009 65 Cette baisse du prix s’explique par la division des fréquences en trois lots.
  • 43. 36 présente procédure sont identiques à celles qui étaient imposées dans les trois précédents appels à candidatures. Il devra notamment respecter des obligations en matière de couverture de la population, de fourniture de services, de disponibilité et de qualité de ces services. Il devra obligatoirement fournir le service de téléphonie, un service de messagerie interpersonnel, l’accès à Internet et un service de transmission de données. Ces services devront être fournis sur l’ensemble de la zone de couverture de l’opérateur, avec un taux de réussite dès la première tentative qui devra être, pour chaque service, d’au moins 90%. Le candidat qui sera retenu devra couvrir a minima 25% de la population au bout de 2 ans puis 80% de la population au bout de 8 ans après la délivrance de l’autorisation ». Outre les obligations inhérentes au nouvel entrant, la décision de l’Arcep contraint également les opérateurs existants sur les questions de d’itinérance, de partage de sites et d’interconnexions : « Ainsi que le prévoient les cahiers des charges 3G des opérateurs existants, cette mise en œuvre doit se faire en privilégiant des négociations commerciales entre opérateurs. Toutefois, en cas de litige, l’Autorité pourra être saisie en règlement de différend, en application des dispositions de l’article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques. Dans cette hypothèse, l’Autorité s’attachera à mener la procédure dans des délais compatibles avec les impératifs commerciaux de l’opérateur nouvel entrant, sur le fondement des objectifs de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, notamment « la définition de conditions d’accès aux réseaux ouverts au public et d’interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l’égalité des conditions de concurrence », « l’absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs » et « l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques » ». Il est intéressant de noter que l’Arcep propose donc aux trois opérateurs de s’entendre pour favoriser l’arrivée du nouveau concurrent, mais qu’elle s’octroie également le droit de trancher en cas de désaccord. L’offre la plus solide étant celle de Xavier Niel pour Free, face à des dossiers plus faibles comme ceux de Numericable ou Virgin, l’Arcep choisit le 17 décembre 200966 cet acteur déjà bien implanté dans la téléphonie fixe et qui a les capacités d’investir massivement dans le développement d’un réseau de télécommunications mobiles. 66 Décision n°2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009
  • 44. 37 Pour permettre à Free de pénétrer ce marché aux barrières importantes, le régulateur lui a donc accordé des avantages non négligeables. Tout d’abord, comme le montre l’extrait de la décision de l’Arcep, un des opérateurs existants a du signer un accord d’itinérance avec Free, puisque lors du lancement des offres, le 10 janvier 2012, ce dernier devait couvrir a minima 25% de la population. Orange a donc accepté d’ouvrir son réseau à Free pour un montant de 1 milliard d’euros sur 6 ans67 . Ensuite, la décision de l’Arcep prévoyait l’accès de Free aux « points hauts » des opérateurs existants, c’est-à-dire aux meilleurs emplacements auxquels les trois opérateurs ont installé leurs antennes. Enfin, l’opérateur a également obtenu des avantages en ce qui concerne la terminaison d’appels68 . Lorsqu’un abonné d’un opérateur souhaite appeler ou envoyer un SMS à un abonné d’un autre opérateur, le premier opérateur doit s’affranchir d’un droit de péage au second. Les montants de ces redevances étant identiques pour tous, l’équation s’équilibre au final. Or, l’Arcep, du fait que Free possèderait peu de clients au début, a décidé de créer une asymétrie des terminaisons d’appel afin de rééquilibrer les charges que devraient supporter le nouvel opérateur69 . Dans un souci de renforcement de la concurrence, l’Arcep a permis l’introduction d’un nouvel acteur sur le marché, et ce en lui procurant des avantages concurrentiels pour qu’il puisse bâtir un réseau de télécommunications viable. Cependant, il est légitime de se demander si cette régulation du secteur n’a pas de conséquences néfastes pour l’économie. (II) Des conséquences importantes sur l’économie Nous avons vu que l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché relevait d’une décision réglementaire et politique dans la mesure où des avantages lui ont été accordés. Les offres low-cost, sur lesquelles nous reviendrons dans une partie consacrée aux modèles de croissance, ont immédiatement bénéficié de l’adhésion des consommateurs. Bruno Deffains, Professeur d’économie à l’Université Paris II Panthéon-Assas70 , a publié en 2012 une étude d’impact qui quantifie le choc au niveau de l’emploi interne des 67 Communiqué de presse d’Orange, « Free et Orange signent un accord d’itinérance pour la 2G et la 3G », 3 mars 2011 68 Tarif d’interconnexion facturé par un opérateur à ses concurrents à chaque fois qu’un de ses abonnés est appelé par un client d’un autre réseau. 69 « L’Arcep propose une terminaison d’appel asymétrique en faveur de Free », www.freenews.fr, 14 décembre 2011 70 http://www.u-paris2.fr/1277109159778/0/fiche___annuaireksup/
  • 45. 38 opérateurs, de l’emploi direct auprès des partenaires de premier rang (fournisseurs, distributeurs et administration), ainsi que sur l’emploi induit sur la chaîne des partenaires. Il en résulte selon lui que le secteur de la téléphonie mobile a généré en 2011 dans l’économie française 25,8 milliards d’euros de valeur ajoutée, ce qui correspond à 345000 emplois (24000 internes, 130000 directs et 191000 induits). Les trois quarts de ces emplois n’ont pas été créés chez les opérateurs mais dans le reste de l’économie, notamment dans la distribution et dans les services achetés par les opérateurs (centres d’appel, maintenance, etc), secteurs enclins à subir plus brutalement les conséquences des modèles low-cost. L’économiste explique son analyse dans un article publié dans Les Echos71 . Selon lui, le chiffre d’affaires des télécommunications mobiles va baisser de 6,5 milliards d’euros (soit une baisse de 30% sur deux ans), du fait des offres commerciales à prix cassés proposés par Free. Il prévoit dans le même temps une forte réduction des dépenses et des marges des opérateurs, ce qui entraînerait la destruction de 61600 emplois : 10600 chez les opérateurs, 35200 chez les partenaires directs et 15800 de manière indirecte. Néanmoins, cette perte d’emplois serait en partie compensée selon l’expert par les créations d’emplois liées au développement du nouvel opérateur, en portant la destruction nette à 55000. Bruno Deffains explique également qu’il n’est pas évident que des créations d’emplois se fassent par ailleurs, au vu de la conjoncture économique actuelle72 . Le pouvoir d’achat libéré par la baisse des prix s’orienterait d’abord vers d’autres produits de l’offre en télécommunications, comme les téléphones par exemple. En effet, les économistes parlent de « biens systèmes » pour évoquer la hausse de la demande d’autres composantes du système en cas de baisse des prix sur un des segments73 . Or, des biens tels que les téléphones mobiles, ne sont pas produits en France, ce qui ne permettrait pas la création d’emplois. Ainsi, moins de six mois après l’arrivée de Free sur le marché, les opérateurs de télécommunications ont annoncé des suppressions de postes74 . Chez Bouygues Télécom, un plan de départs volontaires concernant 556 salariés a été lancé. Dans le même temps, SFR a annoncé un plan visant à supprimer un millier d’emplois, ainsi qu’un plan de réorganisation prévoyant une réduction des coûts de 1 milliard d’euros entre 2012 et 2014. Ces réductions de dépenses ont également un impact négatif sur les investissements qui seront cruciaux dans les 71 B. Deffains, « Free : quand l’idéologie de la concurrence dessert l’économie », Les Echos, 11 juin 2012 72 B. Deffains, D. Thesmar, « Le choix Free, un mal ou un bien pour l’emploi ? », Les Echos, 7 février 2013 73 B. Deffains, « Pourquoi Free Mobile met l’emploi en danger », Les Echos, 18 décembre 2012 74 G. de Calignon, « Les opérateurs engagent des suppressions de postes », Les Echos, 4 juillet 2012
  • 46. 39 prochaines années pour le développement de nouvelles technologies comme la fibre optique ou la 4G75 . Chez SFR par exemple, ils seront réduits de 150 à 200 millions d’euros. A court terme, le nivellement des offres par le bas devrait avoir pour conséquence une baisse du chiffre d’affaires du secteur et donc des destructions d’emplois et une baisse des investissements, bien qu’à long terme un renforcement de la concurrence soit censé avoir des conséquences positives. Nous allons désormais essayer de comprendre les grandes tendances de la transformation du secteur à travers l’analyse de données économiques. Section 2- Un secteur des télécommunications déstabilisé (I) Au niveau de l’environnement Analyse PESTEL du secteur des télécommunications (Sources : auteur et Xerfi)76 75 T. Breton, « Free menace l’innovation dans les télécoms », Le Monde, 22 juin 2012 76 En stratégie d’entreprise, l’analyse PESTEL permet d’étudier l’influence des facteurs environnementaux. Secteur des télécommunications Politique • Soutien pour le déploiement du très haut débit mobile et internet (+) • Nombreuses taxes (-) Légal • Déréglementation au niveau européen (+) • Interventions de l’Arcep dans les prix des terminaisons d’appel (-) Economique • Crise économique, chômage qui réduit la propension des ménages à consommer (-) • Baisse des investissements chez les opérateurs (-) Ecologique • Mouvements contre les antennes relais (-) Socioculturel • Importance de la communication, réseaux sociaux (+) • Taux d’équipement élevé dans la téléphonie mobile (-) Technologique • Succès des smartphones et tablettes (+) • Développement de la 4G et de la fibre optique (+) • Saturation du réseau (-)
  • 47. 40 Cette analyse PESTEL permet d’analyser de manière globale l’environnement externe qui a de l’influence sur le secteur des télécommunications. Ce modèle permet notamment de comprendre quelles sont les menaces et les opportunités qui pèsent sur le secteur, ce qui est indispensable pour l’élaboration de stratégies d’entreprise. En prenant en compte l’influence de cet environnement ainsi que l’arrivée de Free sur le marché, il est possible d’étudier l’évolution des caractéristiques du secteur. Les dépenses des ménages en services de télécommunications, à la veille de l’arrivée de Free sur le marché, se situaient à 25,53 milliards d’euros. Bien que ce chiffre marque une légère baisse par rapport à l’année précédente (2010), il est 1,7 fois plus grand que celui de 2000. De même, le nombre d’abonnements à la téléphonie mobile a connu une augmentation croissante au cours des dix dernières années, passant de 17 millions en 2011 à 49 millions début 2012.
  • 48. 41 Malgré cette croissance du nombre d’abonnements souscrits, il est à souligner qu’en 2011 cette croissance tendait à diminuer, et ce depuis plusieurs années. Ainsi, il est important de noter que des facteurs environnementaux pesaient déjà en tant que menaces sur les opérateurs de télécommunications avant même l’entrée de Free sur le marché, que ce soit au niveau des dépenses des consommateurs ou de la croissance des abonnements. Le renforcement de la concurrence est donc intervenu dans un contexte économique difficile pour les opérateurs de télécommunications. Par ailleurs, ces dernières années ont coïncidé avec l’apparition dans l’environnement des télécommunications d’acteurs « over-the-top77 » (OTT) que sont par exemple Apple, Amazon, Facebook, Google et Microsoft. Principaux fournisseurs de contenus, leurs activités surchargent les réseaux de manière exponentielle sans qu’ils financent le déploiement et la maintenance des infrastructures 78 : c’est le paradoxe du passager clandestin 79 . Alors qu’auparavant les opérateurs choisissaient les contenus disponibles pour leurs clients via des portails, ils sont désormais obligés de suivre le rythme des innovations de ces entreprises influentes au niveau mondial. Par exemple, un acteur qui refuserait de fournir un accès à l’App Store d’Apple sur son réseau en subirait lourdement les conséquences sur le nombre de souscriptions à des forfaits avec de l’internet mobile. Outre les pressions concurrentielles sur l’environnement, il est important de noter que la conjoncture est difficile depuis quelques années. 77 L’Over The Top est une position stratégique dans une chaîne de valeur. Elle consiste pour un acteur de l’OTT à utiliser les structures existantes installées par un autre acteur pour fournir un service. 78 http://ceps-oing.org/Nos-actions/Les-publications/248 79 Mancur Olson, La logique de l’action collective, 1965
  • 49. 42 (II) Au niveau de la conjoncture En 2012, plus de 4,5 millions de carte SIM ont été vendues par les opérateurs, pour atteindre un total de 73,1 millions au mois de décembre. En un an, Free a réussi à amasser 5,2 millions de clients80 , chamboulant la répartition des parts de marché des différents opérateurs. Source : Le Monde L’année 2012 a été marquée par des revenus en baisse dans le secteur des télécommunications (-4,4%) à 49,8 milliards d’euros (hors chiffre location et vente de terminaux et d’équipements81 ) pour la vente de détails et l’intermédiation (services entre opérateurs), l’arrivée de Free sur le marché ayant affecté le chiffre d’affaires par la baisse des 80 « Free a recruté 5,2 millions d’abonnés en 2012 », Lemonde.fr avec AFP, 28 février 2013 81 Données Xerfi
  • 50. 43 tarifs. En effet, au cours des neuf premiers mois de l’année 2012, le chiffre d’affaires des trois principaux opérateurs a diminué82 : -9% chez Bouygues Télécom, -6,9% chez SFR et -2,5% chez Orange. La baisse des revenus générés par les opérateurs sur le marché de détail est imputable à la hausse de la TVA (passée de 5,5% à 19,6%) et donc au durcissement de la concurrence. En effet, les opérateurs ont choisi de ne pas répercuter cette hausse sur les prix TTC des forfaits afin de rester attractifs face aux prix proposés par le nouvel entrant, ce qui s’est mécaniquement traduit par un repli de leurs revenus hors taxes. Ce décrochage des revenus n’est en outre pas compensé par les revenus liés au fixe, en baisse de 3% en 2011. Ce secteur de la téléphonie fixe et de l’accès à internet est en effet touché du fait de la diminution du nombre d’abonnements à la téléphonie fixe (en RTC) et de ceux à l’internet bas débit, le marché du haut débit étant le seul à compenser ces baisses de revenus (+4,1% à 10,2 Md€ en 2012). En ce qui concerne le marché intermédiaire, la chute des revenus liés aux terminaisons d’appel (du fait d’un rapport asymétrique entre Free et les autres opérateurs, comme nous l’avons expliqué précédemment) ne permet pas de relever les ternes revenus tirés des autres sources rentables, le chiffre d’affaires des services d’interconnexion ayant diminué de 5,7% en 2012. Orange, dont le revenu moyen par abonné a baissé de 10% en 2012, craint un recul équivalent pour 201383 , ce qui n’appelle pas à l’optimisme pour les bénéfices des opérateurs de télécommunications. 82 C. Lacombe, « Free a-t-il détruit des emplois ? », Le Point, 31 janvier – 6 février 2013 83 « France Télécom prévoit une baisse d’au moins 10% de l’Arpu en 2013 », Reuters, 20 février 2013
  • 51. 44 Source : Le Figaro Les opérateurs ont certes beaucoup moins bénéficié de l’augmentation du nombre d’abonnements enregistré en 2012, mais ils n’ont pas nécessairement « perdu » des abonnés stricto sensu84 . Fort de 27 millions d’abonnés en 2011, Orange a par exemple fini l’année 2012 avec 27,2 millions de clients, lorsque Bouygues Télécom en a perdu 100000 pour redescendre à 11,2 millions. SFR a davantage souffert de l’arrivée de Free, avec une perte de 800000 abonnés, pour un total de 20,78 millions de clients mobiles. Les MVNOs quant à eux possèdent 7,6 millions de clients. Source : Le Monde 84 G. Pépin, « Free Mobile a chamboulé le paysage mobile, sans le révolutionner », Le Monde, 28 février 2013
  • 52. 45 Nous avons vu dans ce chapitre comment Free avait pu pénétrer l’oligopole du secteur français des télécommunications mobiles. Ce renforcement de la concurrence orchestré par le régulateur des télécommunications a pu avoir lieu grâce à des avantages accordés à ce nouvel entrant. Non sans conséquences sur l’économie, les majors français pâtissent aujourd’hui de cette situation qui vient s’ajouter à un mouvement de baisse de la croissance déjà initié depuis plusieurs années, comme nous l’a montrée l’analyse de l’environnement et de la conjoncture. La stratégie choisie par le nouvel entrant est celle des offres à bas coûts, ce qui tire inexorablement l’ensemble des prix et des prestations traditionnelles à la baisse. Les opérateurs mobiles, en panne de revenus, doivent donc définir de nouvelles stratégies qui leur permettront de renouer avec la croissance et de contrer ce tout « low-cost ». C’est ce que nous allons étudier dans ce chapitre 2.
  • 53. 46 Chapitre 2- Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications Nous allons nous efforcer dans cette partie de décrypter la stratégie mise en œuvre par Free tout d’abord, pour comprendre quel est son intérêt à révolutionner ce marché, puis nous verrons que les stratégies déployées par ses concurrents sont centrées sur l’innovation, technologique d’une part, et commerciale d’autre part. Section 1- Une stratégie de croissance basée sur le nivellement des prix par le bas (I) L’avènement du low-cost et de la chute des prix Le 10 janvier 2012, Free est arrivé sur le marché en se positionnant sur le segment de la simplicité puisque seulement deux offres ont été lancées, tandis que les trois autres opérateurs en possédaient plusieurs centaines 85 . La première, à 19,99€, offrait de la téléphonie, des SMS et des MMS illimités et un quota de données de 3 Go. La seconde, à 2€, offrait 1h d’appel et 60 SMS par mois. Ce système de forfaits « SIM only », sans engagement et sans téléphone subventionné, rappelle les forfaits ADSL à moins de 30€ lancés par Free au début des années 2000. Cette simplicité des offres constitue la stratégie de Free, car cela lui évite par exemple d’avoir un système d’information lourd et coûteux, et l’opérateur peut se permettre de communiquer sur un prix unique. Cette structure de coût légère, associée à un service client minimal et à une distribution basée avant tout sur internet permet de garantir des prix bas, le tout en partie financé par la trésorerie accumulée grâce à l’activité de fournisseur d’accès à internet de Free, qui lui a permis de dégager en 2011 494 millions d’euros de résultat d’exploitation. Orange, SFR et Bouygues Télécom, bien que préparés à cette entrée agressive sur les prix, se sont immédiatement lancés dans une « guerre des prix » afin de limiter la fuite de leurs abonnés vers Free Mobile. Pour cela, ils ont mis en avant leurs propres offres « low cost » à travers des marques comme Sosh (Orange), RED (SFR) ou B&You (Bouygues 85 « Low-cost : Free Mobile a dynamité le marché », Lesechos.fr, 18 février 2013
  • 54. 47 Télécom). Cependant, alors que ces forfaits sont censés être vendus uniquement par internet, force est de constater qu’ils contaminent petit à petit le reste de la gamme. Par exemple, les vendeurs Orange en boutique font désormais la promotion des offres Sosh pour garder leurs clients, car « il vaut toujours mieux promouvoir ces offres moins chères que de perdre un client qui irait chez Free »86 . Ainsi, nous observons qu’une diminution brutale du prix des forfaits classiques (avec subvention de téléphone), de 30 à 40% en moyenne, a eu lieu. Orange a, au moins de juin 2013, inauguré ses premières offres « quadruple play » (fixe, mobile, internet, télévision) low- cost, dans le sens où elles ne pourront être souscrites que sur Internet, avec un service client virtuel87 . L’opérateur historique, grâce à sa marque Sosh, possède aujourd’hui 1,2 millions de clients low-cost (sur un total de 27 millions). De même, les nouveaux abonnés à SFR ou Bouygues Télécom signent pour ce type d’offres. En mars 2013, ces deux opérateurs comptaient respectivement 1,3 million et 1,4 million de clients low-cost. Source : Le Monde Selon Delphine Ernotte-Cunci, directrice exécutive d’Orange, le marché « va passer à 50% de low-cost dans quelques années », alors que les opérateurs n’attribuaient à ce segment que 15% du marché maximum avant l’arrivée de Free Mobile88 . Cependant, si les opérateurs peuvent se lancer dans cette guerre des prix, cela est beaucoup plus difficile pour les MVNOs. Ces derniers, qui louent des capacités de réseau à un des opérateurs « physiques », peuvent 86 Henri Tcheng, associé dans le cabinet de conseil BearingPoint 87 G. de Calignon, « Orange : une offre quadruple play chez Sosh », Les Echos, 29 mai 2013 88 C. Ducourtieux, « Téléphonie mobile : le marché bascule de plus en plus vers le low cost », Le Monde, 30 mai 2013
  • 55. 48 difficilement suivre ce modèle économique, dans la mesure où le prix auquel ils louent le réseau ne leur permet pas d’être rentable avec des offres low-cost. José Caballero, Directeur Marketing de Budget Mobile, a en effet déclaré que « nous avons du diviser par deux notre revenu par abonné, et nos marges pas trois ». De même, le patron d’un opérateur mobile virtuel déclarait en décembre 2012 « on est dans un effet panique. Personne ne peut faire une marge suffisante pour déployer des réseaux mobiles à ce prix-là »89 . Face à la réaction de ses concurrents, Free Mobile a décidé d’enrichir davantage son offre à 2€, la dotant de deux heures de communications et de SMS illimités. B&You, a en effet sorti en novembre 2012 une offre à moins de 10€ avec appels et SMS illimités, accentuant le nivellement des prix vers le bas90 . Pour rappel, à l’automne 2011, un forfait Sosh comprenant deux heures de communications, SMS illimités et 500 Mo de données internet valait 19,99€. Son prix a donc été divisé par dix en moins de deux ans. Source : Le Point Cette guerre des prix entre les opérateurs de télécommunications mobiles a fait de la France le pays où les forfaits sont les moins chers au monde. 89 G. de Calignon, « La guerre des prix s’accélère dans le mobile », Les Echos, 7 décembre 2012 90 « Bouygues Télécom relance la guerre des prix dans le mobile », Lesechos.fr, 6 novembre 2012