SlideShare uma empresa Scribd logo
1 de 214
Baixar para ler offline
la langue
comme expérience
Ecole nationale supérieure d’arts Paris-Cergy
DNSEP2012
la langue comme expérience
Violaine Lochu
sous la direction de Federico Nicolao
« Elargir l’art ?
Non prends plutôt l’art avec toi pour aller
dans la voie qui est plus étroitement la
tienne. Et dégage-toi.»
			 Paul Celan
7
Ce mémoire est constitué de cinq parties. Chacune d’entre elles
regroupe une/des partitions de performances. Ce sont des textes
quej’aiécritsetquej’aiensuiteperformés/joués.Chaquepartition
estaccompagnéedenotesquisontsouventdesréflexionsautourde
la pièce. Cependant la difficulté à réaliser ce mémoire ne se situe
pastellementici.Ilyatouteunepartieinvisibleetsouterraineque
tu ne pourras lire car je ne l’ai pas écrite.Tu ne devineras que sans
doute peu le travail de chercheur, de lecteur, d’écriv(eur) qui m’a
tant nourrie. Ces 8 derniers mois ont foisonné de tentatives pour
décortiquercequejefais,saisirlesficellesdunœuddemapratique.
Essayerdelacomprendre,ladémêler,del’ouvriraumondeetdela
confronteràundomaineparticulier.Etpuisàchaqueessai,latâche
s’agrandissait.Lesujet,ouplutôtlessujets,quemontravailaborde,
passaient leur temps à m’échapper. Chacun d’entre eux était si
vaste, soulevait à lui seul tant de questions, tant de problèmes…
Jemesentaisàlafoisdépasséeparl’étenduedelatâcheetàlafois
si excitée d’en faire l’expérience. L’une des difficultés majeures
était celle d’écrire. Là où mon travail avait su aborder les choses
avec simplicité instinctive, mon écriture se faisait compliquée et
incontrôlée.Elleétaitsouventencrise,débordaitdetouslescôtés,
s’emballait d’enthousiasme angoissé. Elle s’étouffait, s’avalait
elle-même et en cela se faisait l’écho d’une difficulté à dire et à
respirer qui me préoccupe artistiquement.
introduction
8
Comment écrire, situer ma pratique dans un espace plus large  ?
Comment trouver ma voix au milieu d’une discussion depuis
longtemps amorcée ? Comment te décrire tout ce fertile fatras
d’interrogations mentales ? Comment être sûre que ce que je te
décrirai ne changera pas encore ? Et puis au fond, pourquoi fixer
l’insaisissable ? Pour cela, pour problématiser mon travail, j’ai
d’abord tenté d’adopter une méthode rigoureuse et scientifique,
à l’universitaire. J’ai essayé d’isoler, d’organiser, de dépiécer
ce bazar. Mais cette autre manière d’aborder les choses, de les
connaîtrem’étaitéloignée.Jenemesentaispasàmaplace,comme
contrainte à un mode d’écriture académique qui ne me convenait
pas. Ce moi, ou plutôt cet autre universitaire, n’était pas assez
solide et libre pour répondre à mes difficultés.
Bon voilà, je le confie, je le dis, je pose le problème (ou plutôt les
centaines de problèmes). Je t’expose les sujets que j’ai croisés et
tu te rendras compte par toi-même de la complexité :
	
Bref le langage, la parole, la langue, l’identité, le territoire, la
nationalité. Chacun de ces sujets en contient des milliers en lui-
même.Chacund’euxafaittantd’adeptesetdemortsquerienque
leur nomination nous effraie. Et puis moi, j’arrive, je me mets à
lire,desdizainesd’ouvrages,j’espèrepouvoirdirequelquechose,
encore. J’espère trouver ma place, comprendre où je me situe,
trouver ma voix, mon cri. Finalement, j’ose à peine chuchoter. Je
marche sur la pointe des pieds, sur des œufs prêts à exploser. Je
languematernelle,languevernaculaire,langued’origine,
langue interdite, langue étrangère, langue exotique,
langue minoritaire, langue adoptée, langue sociale,
langue pensée, langue balbutiante, langue chantée,
langue organe, langue intime, langue incommunicable,
languemajoritaire,languedialectale,langueimaginaire,
langueidentitaire,languenationale,languenatale,langue
amante, langue morte, langue mythique,
langue véhiculaire, langue intersistes, langue limite,
langue bégayante...
9
rêve d’eux la nuit, Saussure, Deleuze, Derrida, Bailly, Lacoue-
Labarthe,Amery... L’ignorance ingénue de ces premiers pas a été
maforcecesderniersmois.CommeK.dansLechâteau,nesachant
rien, j’ose demander l’impossible :
J’yaidédiébeaucoupdetemps.Leschosesmerésistantj’aimême
tenté de défoncer les murs. Je courais à perdre haleine vers un
horizon toujours plus lointain. Je prenais sans doute du plaisir
dansledéfi,jejouissaisdepousserplusloinleslimites.Jemontais
encoreetencoreverslesommetquin’enfinissaitpasdesedérober.
Je me rassurais à transpirer, à endurer. Cette énergie incontrôlée
c’est la même dont j’use pour réaliser mes pièces. Je joue avec les
prouesses, m’angoisse de les dépasser. C’est ainsi que j’ai voulu
parler l’anglais comme un américain (Jeff Perkins) en 10 jours,
ainsi que j’ai voulu monter toute une théorie sur une Vierge de
l’humilité du quatrocento italien en faisant l’économie de son
contexte3
,ainsiquej’auraisvouluprendrepositionsurlaquestion
de la langue... Mais voilà à un moment donné, je m’épuise, et
la tempête arrive. Je suffoque, je dois m’arrêter avec toutes les
difficultés que cela comporte. Je me replie, marmonne dans mon
coin et pleure d’impatience. Et puis je m’endors d’un sommeil
« Je suis sans doute ignorant, en tous cas la vérité demeure
et c’est triste pour moi, mais cela a tout de même aussi
l’avantage que l’ignorant a plus d’audace ; c’est pourquoi
j’ai envie d’assumer encore un moment d’ignorance et ses
conséquences fâcheuses, tant que mes forces y suffiront2
. »
2
Kafka, Le château, Paris, Flammarion, 1984, p 83
3
LaViergedel’humilitéenquestionaétéréalisévers1423parGentiledaFabriano.
Elleacecideparticulierquedescalligraphiesarabessontinscritesdanssonauréole.
On peut y lire le shahada : « la ilaha illa allah » « il n’y a pas de Dieu queAllah  »
c’est-à-dire la profession de foi musulmane. Ceci m’a dans un premier temps
surprise (bien que les échanges commerciaux et culturels féconds entre Florence
etl’Egypte,expliquentquedesartistesaientpufacilementrecopier,s’influencerde
calligraphies kufiques à partir de miniatures, tissus…). Puis m’a ensuite fascinée,
j’yvoyaisl’échoàtantdeproblématiquesliéesàmontravail;l’attraitverslabeauté
de l’étranger, son prélévement puis sa mise en situation dans un autre contexte, sa
porosité constante vers un ailleurs, son ado(a)ption…
10
profond, d’oubli, comme apaisée par l’endorphine cérébrale. Le
réveil est long et difficile mais vous êtes là.Vous me dites qu’il ne
faut pas être déçue :
Et puis, au final j’y ai gagné à ma manière, je le verrai avec le
temps. A la base, tu me le rappelles, je ne suis pas écrivain, je
suisartiste(vraiment?).Toutecetteaventuredelectureetd’effort
d’écriture nourriront la suite. La difficulté n’est pas une sanction.
Maintenant,aprèsavoirfaitl’étatdesterritoirestraversés,jepeux
rouvrir les portes.
En chant, j’ai vécu le même type d’expérience. J’ai voulu chanter
comme les femmes des Pouilles, cette voix si puissante du sud de
l’Italie. Je suis allée là bas, j’en ai rencontrées et j’ai ingurgité.
En imitant sans connaissance la beauté de leur timbre je me suis
retrouvée aphone. C’est souvent la pire des choses que d’être
muet... Je suis revenue en France et j’ai cherché à comprendre.
Professeur de chant, orthophoniste, phoniatre, tous étaient
d’accord. En chœur ils me le disaient : « respire!». Maintenant,
J’essaie de trouver une position d’ancrage pour pouvoir respirer.
Faire en sorte que mon souffle devienne ma voix sans douleur.
Chercher les résonnances au plus profond de soi. Revenir à la
base de la matière charnelle, se masturber vocalement. Respirer,
émettre. Tout simplement. Sans épuisement.
« Vous êtes si jeune, si neuf devant les choses, que je
voudraisvousprier,autantquejesaislefaire,d’êtrepatient
en face de tout ce qui n’est pas résolu dans votre cœur.
Efforcezvousd’aimervosquestionsellesmêmes,chacune
commeunepiècequivousestfermée,commeunlivreécrit
dansunelangueétrangère(…)Nevivezpourl’instantque
dans vos questions. Peut être simplement en les vivant,
finirez vous par entrer, insensiblement, un jour, dans les
réponses4
.»
4
Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, in Œuvre I prose, Paris, Le
seuil, 1966, p26
11
Ce retour aux bases, aux sources, ce début de descente, cette
recherche d’ancrage et de position a eu lieu dans ma recherche
d’écriture du mémoire. C’est vrai, je te l’avoue, je ne suis pas
toujours satisfaite du résultat que tu as entre les mains, et puis qui
l’est entre nous? On est souvent énervés à l’idée qu’on ne pourra
pasdireexactementcequel’onvoudrait,frustrésdenepasraconter
touteslesbeautésquel’onacroisées.Jesuisunpeuinquièteparce
quetutediraspeutêtre:Quelmanquederecul!Quellefumisterie !
Quel romantisme à deux balles ! Quelle envolée lyrique ! Et puis
merde,jem’enfousaufinal.Jepensequetupeuxcomprendre,que
quiquonque a recherché, a fait l’effort d’aller au bout saura être
indulgent à mon égard (ce n’est pas non plus ça que je demande,
entendons nous bien).
Bref cette aventure du « mémoire » sans être encore effective
en soi, n’ayant pas donné le résultat auquel je m’attendais, m’a
cependantaccompagnéeceshuitderniersmois.Jen’aipasencore
le recul nécessaire pour te dire ce qui adviendra par la suite. Ce
que je peux te dire c’est qu’elle m’a pris beaucoup d’énergie. Je
n’ai pas autant produit que d’habitude. Je me suis souvent sentie
comme un citron pressé auquel on demandait encore du jus. En
faisantcet effort de déconstruction etde recentrage,je ne pouvais
plus vraiment être dans le surajout. Je cherchais une position non
dans l’excitation de l’envol, mais une position terrestre qui me
permette de tenir debout, d’être suffisamment charpentée pour
affrontertouslesvents.Jenelesuistoujourspas,occupéeàprendre
soin de mon principal défaut  : celui de courir à en perdre haleine
versdesdestinéesdifficilesd’accès.Principaldéfautquiestaussi
une qualité. Mais j’essaye de ne plus le subir, de savoir qu’il est
là, d’être à l’aise avec. C’est comme les chanteurs qui font de leur
défautvocalleurempreintepersonnelle.Cetteaventure-mémoire
a aussi et surtout apporté de la matière à ma pratique, parfois de
la clarification par les mots. Elle m’a permis en me confrontant
à d’autres voix, de me situer et d’assumer d’autant plus mes
balbutiements interlinguistiques...
13
I
Stranieri ovunque
langue italiannique
15
1 - Stranieri ovunque....................................................13
2 - Notes.........................................................................29
	
	 Les textes de Claire Fontaine.....................................30
	 Réflexions sur la langue italiannique.........................32
	 Notes sur l’interlangue..............................................34
	Inspiration.................................................................35
	 Partition deTu Bella/Toi Belle...................................36
Table des matières
17
Sousl’invitationdelafondationKadistàréaliseruntravailàpartir
desœuvresdesacollection,j’aidécidédefaireuneconférencesur
l’uned’entreelles:StranieriovunqueducollectifClaireFontaine.
1 - Stranieri ovunque
(Performance, environ 20 min, réalisée à la fondation Kadist, le 26/01/11)
19
Gris
Vert
Orange
Rouge
Bleu
néologismes ou barbarismes, invention de
nouveaux mots italianiques.
Exemple : parlar qui vient de parlare à la place de parler.
traduction littérale d’expressions italiennes.
Exemple: ça se retrouve de front qui vientde ci si ritrova di
fronte à la place de on se trouve face à.
emprunt des mots ou expressions italiennes
employés tels quels, auxquels la langue
française attribue un sens qui n’est forcement
celui de la langue italienne.
Exemple : le terme opera sera utilisé selon son sens italien
originel (œuvre) et non pas selon le sens strict de 	
l’italianisme français (qui désigne un genre de récital 	
hanté ou le lieu où il est représenté).
accentuation italienne de termes français.
Exemple : société (avec accent sur le é final) qui vient de
sociétà.
ajouts de petites locutions propres à la langue
italienne.
Exemple : les ses relations vient de le sue relazione.
Consignes de lecture
20
Bonjour à toutes et à tous,
Jevaisessayeraujourd’huid’exposerlesgrandstraitsdelapensée
del’artistecollectiveClaireFontaineafindemieuxsaisirlesenjeux
de l’œuvre Stranieri ovunque acquise par la fondation Kadist.
Cette dernière, réalisée en 2005, se présente sous la forme d’une
phraseécriteaunéonquimesure100cmdelongueur,10delargeur
et 4,5 d’épaisseur. Les mots « stranieri ovunque » sont écrits en
majuscule dans une police relativement classique. Cette œuvre
appartient à une série déclinant les termes « étrangers partout »
en plusieurs langues.
Qu’est ce que signifie faire de l’art aujourd’hui ? Y-a-t-il encore
unsensàpenserproduiredesformesnouvelles?Quellesrelations
l’artisteentretient-ilaveclesformesdepouvoir?Tellessont,entre
autres,lesgrandesquestionsauxquelless’attaqueClaireFontaine.
Nous rappellerons dans un premier temps qui est Claire Fontaine
et les raisons de sa fondation. Après avoir présenté le concept
propreàl’artistecollective,àsavoir«l’artistereadymade»,nous
verrons en quoi Stranieri ovunque est une œuvre emblématique
de la pratique de Claire Fontaine. Pour cela je m’appuierai sur les
textes écrits par l’artiste collective, tels que :Artistes ready made
et grève humaine. Quelques prècisions, Document à l’usage de
France3etNotebiographiqueainsiquesuruneinterviewréalisée
parJohnKelsey.Touscesdocumentssontdisponiblessursonsite1
.
Claire Fontaine est une artiste collective formée en 2004, vivant
à Paris et qui tire son nom d’une marque populaire de cahiers
scolastiques. Le fait de se déclarer « artiste collective » crée une
ambigüité notevole, qui lui permet de ne pas rentrer dans les
catégoriesconnuestelsque«collectifd’artiste»ou«mouvement ».
L’idée de se définir en tant que telle provient entre autre du fait
qu’aujourd’hui il est impossible de se penser autosuffichient ;
l’artiste a toujours besoin d’autres personnes qui subalpatanent
lasous-traitancedecertainsaspectsdelapièce,l’organisationdes
évènements ou encore les rapports à l’argent. De plus, selon elle/
1
http://www.clairefontaine.ws/index.html
21
eux, le lavore manuel ne peut être séparé du travail intellectuel,
l’un ne prévaut pas sur l’autre. Pour ce motif, elle/ils insiste(nt)
surlefaitqueClaireFontainen’estcomposéeque«d’assistants »,
son centre de direction demeurant vide. Il est plus judicieux de
mettresousunpseudonymeletravailcollectifdeClaireFontaine ;
lapratiqueartistiquepersonnelledesmembresétantdifférenteles
uns des autres tant sur le piane qualitatif que quantitatif.
La sensation d’impotence politique, d’une manquanse de liberté
professionnelle et personnelle et d’une débolesse à résister au
système sont les éléments qui ont scaténé la naissance de Claire
Fontaine. Cette dernière est alors pensée comme un espace
d’immédiatetédanslequelonarrêteraitdequiaquéreret«d’évaluer
le pour et le contre » pour agir directement. Les modes d’actions
sont pensés autour d’un langage formel condivisé et avec comme
objectif de pratiquer, de communiquer, de sodisfare des besoins
simples.
Bien que naissant d’un certain rifiute du fonctionnement de notre
société, que l’on peut avertir dans des propos tels que « Nous
nous scontrons tous les jours contre l’inferne de la pauvreté,
contre la brutalité de l’espace quadrillé des sbires, les policiotés,
les vigiles privatés de toute espèce. (…) Nous sommes dévastés
par la violence des corps-fattes-merci qui sont l’autre face
des corps sans documents expulsés et des corps prigionniers
ammaquiés dans l’unique patumière de la société française où la
récolte différenciée n’est pas obligatoire2
.». Claire fontaine ne se
revendiquepascommepratiquantunartrévolutionnaire,ouencore
comme étant exemplaire. Elle se dit elle-même « inquinitée » par
le système « Nos corps sont les ricétacoles d’idées collectives et
de problèmes politiques qui nous traversent3
.». Elle a pleinement
conscience de ne pas être virgine, de faire partie d’une société,
d’une organisation sociale. Elle ne cherche donc pas à s’astrare
d’un fonctionnement, mais plutôt d’avoir constatemment en tête
sa propre contradiction. Elle affirme à ce propos: «Je ne suis pas
sicurequelatentativedesetireràl’extérieurdescontradictionsau
2
Claire Fontaine, Document à l’usage de France 3, op.cit.	
3
ibidem
22
moyend’unepositiondevérginitédonnesesfruits.ClaireFontaine
ne croit pas, à l’exemplarité et aux relations politiques et sociales
quiendérivent4
.».L’artn’auraitpasunemissionrévolutionnaire,
ne chercherait pas à interromper l’ordine des choses. La pratique
artistique serait plutôt pensée comme un moyen d’expression
d’éléments qui seraient autrement affogatés et englobés du flux
dumonde.L’artauraitenprimedetoutunrôled’accompagnateur
d’unemanifestationhumaineplusglobale:«l’artestunemanière
derestersvégliésjusqu’àcequecesmomentsseproduisent.Nous
les accompagnons là où ils se manifestent, nous n’avons pas
l’ambitsion de les produire5
.».
Unetelleconceptionduruoledel’artetdel’artistenepeutcondurer
Claire Fontaine qu’à être sceptique aux confrons du monde de
l’art contemporain qui le circonde. Seconde elle, le monde de
l’art, tout comme le reste de la nostre société, serait costitué de
subjectivités standardisées. En effet les artistes vivant seconde
les mêmes critères en seraient arrivés se somiglier tous. Cela
dériverait en partie du fait qu’il n’existerait plus ni moments ni
luogues pour coltiver sa propre exception. Les « laboratoires de
subjectivité  » tels que les grandes métropoles occidentales ou les
maisons occupées seraient de toutes parts contrôlés et répréssés
de tous points de vue par le potère en charge. L’artiste croisserait
alors dans une ambiance définie, il appartiendrait à « cette masse
degensproductrice/consommatricequisespotentd’inauguration
en inauguration dans les grandes capitales, de résidence en
résidence, de fiera en biennales6
.». Formatatés par les scuoles
d’art, les mercates, les galerie, la stampe, les artistes auraient les
mêmes goustes, les mêmes vestitement, les mêmes rifériments
bien qu’ils habitent à une millaine de kilomètres de distance.
Etant confrontatés aux stesses critères de jugement, ayant accès
aux stesses mezzo techniches ils se trouvent donc de front à un
processus analogue de stimulation de créativité. Ca s’arriverait
alors à une «crise du caractère singolaire des productions ».
4
Claire Fontaine, Claire Fontaine interviewée par John Kelsey, op.cit, p2	
5
ibidem	
6
Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions,
op.cit., p3
23
Comme l’imagine Foucault, si l’ont ne gardait des opéras que les
titolesenannulantlenomdel’auteur,onferaitbeaucoupdefatigue
à remonter à la paternité du lavore.
De conséquence, dans de telles conditsions de production de la
sogetivité artistique, aldelà d’une crise de la productsion, ça se
retrouve de front à une crise de la singolarité de l’auteur. Pour
Claire fontaine on ne peut donc parler aujourd’hui que d’artistes
ready-made, d’altronde elle-même s’auto-diquiare comme ça :
«  l’artiste elle-même est l’équivalent subjectif d’un orinale ou
d’une scatole Brillo, aussi en dehors de lieu, privatée de sa valeur
d’use et intercambiale comme les produits qu’elle crée7
.»
Claire Fontaine ne mire donc pas à créare des formes nuoves et
originales.Deconséquence,moultdelessesopérassontcostituées
d’imaginesoudetestespréexistants.Parésiempedanslediptyque
We are really made artist et we are all bad consumers, l’artiste
a dépeint ces phrases sur les Marylins de Warhol. Dans le cas de
Stranieri ovunuque, la phrase scrittée est le nom d’un collective
anarquiste de Torino qui combat le racisme dans les ses diverses
manifestatsions.Danscelal’artistecollectivediquiarepratiquare
de l’expropriationisme plutôt que de l’appropriationisme :
«  Je cherche (…) à créare une condivisense, une accessibilité,
un réinvestissement politique de le ce que je produque. Je
n’attribusque rien à moi-stesse en tant que sujette. Je ne rube que
pour redistribuir8
. ». Ce qui est richercaté n’est pas tant le lavore
prodotté mais plutôt l’effet qu’il va émaner : « ce qu’on chiame le
nostre«lavore»n’aenquantquetelaucunintérêt,cequecompte
est ce qui attraverse de lui et malgré lui se communique, c’est ça
le valore concrète de ses contenus9
. ».
L’œuvre Stranieri ovunque apostrophe, s’impose à l’attention à
travers l’ambivalence, la polysémie innée de cette association de
paroles qui en français signifique -étrangers partout-. Le mode
7
Claire Fontaine, Note biographique, op.cit	
8
Claire Fontaine, Claire Fontaine interviewée par John Kelsey, op.cit, p5	
9
Claire Fontaine, Document à l’usage de France 3, op.cit.
24
dans lequel l’opéra vient être présentée ne fait qu’amplifiquer
cette ambigüité : espostée sous forme de néons sur une paroi
négro, elle est coupée de dehors de le son conteste d’origine, ne
seréféricheàriendepréchis.Lasatypographiesobrenelarendque
d’autant plus neutrale, a-spatiale et atemporale. Claire Fontaine
donne trois interprétations de cette opéra dans la sa intervue avec
John Kelsey. Dans un prime temps ça pourrait se lire cette opéra
comme si elle se riférissait à les phénomènes d’immigration et
d’émigration, problèmes politiches moult actuels. D’altronde
ces notions préoccupent un sac l’artiste collective qui a scritté le
spectaculaire teste militant Etrangers partout. Les ses membres
sembrent être eux-mêmes colpités diretament parce que certains
d’euxsareberaientd’originestranière,étantallésviadeleurmaison
« sans motifs particulièrs sinon celle de ne être plus à maison
propre10
».
Puis la phrase persiste, nous interrogue nous-stesses ; si le
stranière est ovunque n’est-ce pas en nous-stesse qu’il existe en
prime luogue? N’avons-nous tous pas gia prouver une sensation
de dépossetssion en respect à l’identité présuntée que nous
raprésentons pour la société? Les principales cambes du potere
par une série d’interventes nous marquent depuis la nascite, nous
classifientsegondlenostresesse,lanostreorigine,lanostreclasse
ect…ClaireFontaineconstate«lesnoscorpssontattraverséspar
les rapports de potere et les nos divenirs orientatés des moyens
attraversés lesquels nous nous opponiamons à le stesse potere
ou nous en sposiamons les flux11
. ». L’opéra agiche donc en
ce qu’elle produche une prèse de conchience en respect à soi-
stesse. Elle interrompe le normal cours des choses, comporte
une prèse de distantse qui nous trasforme en spetatores estériores
de nous-stesses. Diventamons stranières à travers une sorte de
soste, un interstice se scave entre l’ordine instituité et la notre
appartenance à cet ultime. Chiara Fonte fait en mode que les ses
opéras innesquinent ce phénomène d’éstranation (qu’elle diche
ritrouvare chez Brecht). Parle de « prisme de le stranière » qui
10
Claire Fontaine, Note biographique, op.cit	
11
Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions,
op.cit., p1
25
nouspermettreberait d’afferareleslégameslogichesetpolitiches
qui restannent pour la majore partie du tempo invisibiles ou pour
le moins véssutés inconschiemment. L’espérience esthétique
dève fare scattare un « spaesamente salutare » qui nous permette
de vinchérer en lucidité. Chiara Fonte avichine les effets de cet
«  art comme fonte, essendant un dispositive et non un luogue de
réalisatsion de les affétivité vives12
» avec celles d’un schiopere.
Cetteultimeraprésentemoinsundiretteàlaviolentsequ’undirette
à se sostrare à celle que le donneur de lavore eserchite sur les
ses impiégates. Est la fin de les relatsions qui sottometonent les
uns à les altres. Fait perdère la familiarité avec la misère de le
sfrutatement ordinare, rend éstragnier un phénomène quotidian
et assimilité. Pouvons parlare de prochessus révolustionnare.
Nonostante comment le fare perdurare dans le tempo? Comment
créareunschiopèrevéramentradicalequiserebait unmezzo sans
fine?ChiaraFontealorsimaginesonconcheptde«grèvehumaine 
qu’elle définiche cosi : « Elle est piu dgénérale de le sciopère
dgénéral et elle a pour sciope la transformatsion des relatsions
sochiales informalles qui sont à la base de la dominatsion. Le
caratèreradicaldecetypederivolteestqu’elleneconochepasde
risultate réformiste de lequel elle saverait se sodisfare13
. ».
Enultimeluogue,ChiareFontespièguequeStranieriovunque,piu
que nous interrogare sur la nostre straniété, de provoquare queste
phénomène de prèse de conchience, de «spaesamente salutare  »,
requiame ce le que Gilles Deleuze quiame « la lingue dans la
lingue  ». Quinde je finisque par le citare ;
“Uno stile, è riuscire a balbettare nella propria lingua (…) non
essere balbuziente nelle sue parole, ma essere balbuziente nel
linguaggio stesso. Essere come uno straniero nella sua propria
lingua. (…) Dobbiamo essere bilingue anche in una sola lingua,
dobbiamo avere una lingua minore all’interno della nostra
lingua, dobbiamo fare della nostra lingua un utilizzo minore. Il
multi-linguismo non è solo la possessione di più sistemi di cui
12
Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions,
op.cit., p8
13
Ibidem, p9
26
ognuno sarebbe omogeneo in se stesso; è prima la linea di fuga
o di variazione che intacca ogni sistema impedendogli di essere
omogeneo. Non parlare come un irlandese o rumeno in un’altra
lingua che la propria ma al contrario, parlare la propria lingua
come uno straniero14
”.
14 Gilles Deleuze et Félix Guattari, Kafka, pour une littérature mineure, Paris,
éditions de minuit, collection critique, 1975
29
2 - Notes
30
Stranieri ovunque m’a dès le premier regard interrogée. Sa
phrase résonnait en moi de sa polysémie et se faisait l’écho à
de nombreuses sensations. L’œuvre m’a tout naturellement
conduite aux textes du collectif Claire Fontaine. J’ai été frappée
par son écriture : son engagement, sa teneur, ses références. Un
contenu littéraire magnifique m’était donnée tel un readymade.
Mon intervention consistait alors à injecter formellement ce que
certains propos stipulaient.
Les textes de Claire Fontaine
31
«JK:LapratiquedeClaireFontainesembletournerautourdumot
«étranger »…peux tu dire quelque chose sur ce concept – si ça en
est un – et comment il informe (infecte) tes activités et tactiques ?
CF:Lasériedesnéonsenplusieurslangues«Etrangerspartout»,
par exemple, vient du nom d’un collectif d’anarchistes de
Turin qui combat le racisme dans ses multiples manifestations.
L’ambivalencedeleurnomm’afaitpenserauxeffetsqu’ilpourrait
avoir s’il avait été matériellement déplacé dans des lieux et des
contextes différents. Il est clair qu’aujourd’hui l’immigration
et l’émigration sont plus des simples épiphénomènes liés à
l’économie. Ce sont des expériences existentielles et perceptives
à part entière.
Quant à l’étrangeté que nous pouvons tous ressentir devant un
mondeentièrementfabriquéetgouvernépardeslogiquesinsensées,
elle peut certainement être un moteur pour la lutte. Dans l’idée de
grève humaine il y a beaucoup de choses qui viennent de Brecht,
decequ’ildécritcommeunprocessusde«devenirétranger  »aux
rapports de pouvoir qui nous constituent, pour produire - dans cet
intervalledufluxnormaldeschoses-desévénements.Jecroisaussi
quedansnotretravaill’usagededifférenteslanguesn’estpasune
coquetterie. Il vient du fait d’être des gens qui sont nés ailleurs et
sont partis sans une raison particulière si ce n’est que celle de ne
plusêtrechez-soi.Dansl’usaged’unelanguequin’estpaslasienne
propre se manifestent des contradictions, des rapports de force,
des violences, que la langue maternelle noie ou émousse. La lutte
aveclesensdonnealorsformeàcequeDeleuzeetGuattaridisent
trouver chez Kafka, la« langue étrangère dans la langue » et au
fondc’estbiencelle-ciquelesartistescherchentàparler.Cen’est
quedanscetteimpropriétéquigîtunepromessedecommunauté.1
»
1
Extrait de l’interview de Claire Fontaine par John Kelsey, http://www.claire-
fontaine.ws/pdf/jk_interview.pdf
32
Le texte de la performance conférence sur l’œuvre Stranieri
ovunque pourrait se lire comme jouant avec certaines difficultés
liées au passage entre deux langues (ici entre le français qui
est la langue source à l’italien représentant la langue cible).
Traduire signifie : passer dans une langue à une autre en visant
à l’équivalence entre l’énoncé original et l’énoncé obtenu. La
traduction se déroule selon un processus que l’on pourrait diviser
en trois étapes majeures. Dans un premier temps on cherche à
comprendre,onassimilelesensvéhiculéparletexte.Parlasuiteon
déverbalisec'est-à-direquel’onoublielesmots,lesphrasesdebase
pour en conserver le sens. Enfin on en arrive à une réexpression ;
une reformulation du vouloir dire dans la langue cible.
Dans le cas de conférence sur l’œuvre Stranieri ovunque, on se
situedansunesortedeflottemententrelesétapesdelatraduction.
Les éléments stylistiques ne s’expriment dans aucune des deux
langues,hésitententrelesdeux.Onpourraitrapprochercetypede
langage d’une mauvaise traduction qu’aurait fait un italien d’un
texte français. Cependant nous sommes bien loin de ce type de
balbutiement,ouencored’unequelquonqueanalyselinguistique.
Les « fautes » de traduction ne sont pas des erreurs dues à un
manquedeconnaissance.Ellessontvoulues,ellessontpenséeset
recherchéesselondesrèglesbienprécisesetgarantesd’unnouveau
langage. Ce dernier pourrait se situer comme au carrefour entre
l’italien et le français, le mix de ces deux langues en donnerait
une troisième. Il se rapprocherait alors d’une langue poétique, ou
plutôt d’un exercice stylistique proche du macaronisme qui est
aussi une langue mêlée, hybride, mélangeant le latin à d’autres
dialectesoulangues:«Macaronique:espècedepoèmeburlesque
consistant en un mélange de mots de plusieurs langues, ainsi que
Réflexion sur la langue italiannique
33
d’expressions de la langue vulgaire latinisée, ou de mots latins
à terminaisons modernes. Caelius Rhodiginus fait observer
que chez les italiens le mot macaroni signifie un homme d’un
comiquegrossieretparcequecettepoésieestcomposéedemotsde
diverseslanguesetd’expressionsextravagantes,ilsl’ontnommée
macaronique1
. ». Cette définition manque pourtant de rigueur
car « la vraie macaronée a ses règles 2
». L’écrivain macaronique
(Dante, Rabelais, Molière, Queneau…) prend le radicale de sa
languematernelleetyajouteuneflexionlatine.Unetellepratique
nécessiteuneprofondeconnaissancedulatin,elleoscilleentreun
amusement et une occupation très sérieuse et difficile.
Lalanguequejenommeitaliannique,dontj’usedanslaconférence-
performance Stranieri ovunque, agit de la même manière. J’ai
construitcettedernièreselondesrèglesstrictesquiprennenteffet
au fur et à mesure. Ce qui peut paraître amusant pour celui qui
n’a pas de notion de l’italien, semble logique à quelqu’un qui fait
usagedesdeuxlangues.Lalangueitalianniqueestpraticablepour
quiquonque a une pratique assidue du français et de l’italien car
elle est une interlangue.
1
Définition issue de l’Encyclopédie britannique citée par Octave Delepierre in
«  Macaroneana ou mélange de littératures macaroniques des différents peuples
de l’Europe », Brighton, Ghancia, 1852, p 16
2
Octave Delepierre, ibidem, p10
34
27/12/10, Evron
Voilà comment je décrirais l’apprentissage d’une
langue…
Les premiers temps, unique sensation sonore, on en-
tend la langue de l’extérieur, une sorte de musique
dans laquelle on n’attribue rien à rien.
Au fur et à mesure l’oreille se dresse, découpe et
décompose, repère les constituants, entend l’unité.
Elle finit par quitter la forme pour le contenu.
Alors commence la comparaison, comprendre l’étran-
ger en le référant à son propre système, calquer mot
pour mot, nommer, référer, contrôler ce qui reste en
dehors.
Puis, un jour la contamination a eu lieu sans qu’on
ait eu vraiment le temps de s’en apercevoir. Le mot
vient de lui-même, naturellement sans qu’on y ait
réfléchi. Il a pris la même place qu’un autre. L’ex-
pression et la syntaxe se logent dans la bouche sans
préméditation.
La langue jusque là étrangère ne l’est plus, elle
vous sort d’entre les lèvres, comme ça. Quelque part
cet apprentissage vous a fait prendre une sorte de
recul face à votre propre langue. En apprendre une
autre fait prendre conscience de phénomènes jusque
là évidents. Le mot maternel ne sonne plus aussi
bien qu’avant, on le réentend comme pour la première
fois. Il n’y a plus l’inconsistance de l’habitude,
sa matière vous revient en mémoire, ça bégaye de
nouveau, ça gazouille comme les premiers jours.
Malgré cette rupture avec la langue mère, l’autre,
l’adoptive vous reste pourtant à jamais étrangère.
L’impuissance d’y être admis totalement s’exprime
dans l’accent traitre qui démasque. Sensation d’im-
posture constante ?
C’est alors qu’arrive la langue mêlée, l’interlan-
gage. Un lien, enfin entre le couple qui s’entre-
choque.
Note d’insomnie sur l’interlangue
35
C.F est un collectif qui vis à Paris fondée dans
le 2004. Après avoir pris son nom de une mark des
caiers scolastiques, C.F as définit soi même un
artist ready made et ell a commencée à élaboréer une
versions d’art neo conceptuelle qui souventes est
symilaire aux travaux de autres gens.
Ell’utilisés du neon, les vidéos, la sculpture, la
péinture et l’expression écrit, son travaux peux
être descript comment une interpellation « in pro-
gress » sur l’impotence politique et le cris de
singoularitée que aparement caractérizés l’art de
notre temps. Mais si l’artiste même est l’équiva-
lent subjectif de une toilette ou de boite brillo
autrement en dehors de lieux decontextualizée de son
valéur d’utilizarion et interchangeable commént les
produites qui fabriqués soi mêmes, sert tojours le
possibilitée d’un grêve humaine.
A l’âge de deux ans CF utilizes la freshness et la
geunesse pour transformer in singolaritée chaques
teroristés esistentielle en recherce d’emancipa-
tion subjective. Elle grandis entrés les rouines de
la fonction de l’autor en essayent avec des métodes
collectif de productions, détournement et avec la
création des différentés excamotagée pour la parta-
ger de la propriété primat e de l’esprit intellec-
tuel.
Inspiration
(Nota biografica de Claire Fontaine donnée à
traduire en français à un ami italien.)
36
CetexteestlapartitiondelaperformanceTubella/Toibellependant
laquelleestdiffuséunenregistrementd’unchantpopulaireitalien
des Pouilles dont je viens chuchoter la traduction au micro. Au
départ le chuchotement est inaudible puis au fur et à mesure de
la performance le volume du chant italien s’amoindrit jusqu’à ce
que l’on n’entende plus que sa traduction française. L’italien et le
français se rejettent et se marient, cafouillent et s’affrontent dans
lecreuxdel’oreille,donnentnaissanceàunedoubleécoute,àune
langue hésitante cousine de la langue italiannique.
Partition de Tu bella/Toi belle
Tu bella calu tieni lu piettu tunu
Num sacciu ci so minne o so cutugne
Stateve citti, stave en silenzio
ca chiu ve le sentite lu miu cantari
Bella lu mare, bella la marina
bella la figlia de lu marinaru
Tu bella tra gli belli e tu bella sei
e tra gli belli la parma porti
O rondine ci rondinu lu mare
Ferma quannu ti dicu o doï paroli
Tu bella calu tieni lu piettu tunu
Num sacciu ci so minne o so cutugne
Stateve citti, stave en silenzio
ca chiu ve le sentite lu miu cantari
Toi ma belle tu as les pectoraux bien tendus
on sait pas si c’est des seins ou des coins
Restez en silence restez silencieux
comme ça vous l’entendez plus mon chant
Belle est la mer, belle est la marine
Belle est la fille du marin
Toi entre toutes les belles et toi belle tu es
et entre tous les beaux la parme tu portes
O petite ronde ô ronde de la mer
Arrête quand je te dis ô deux paroles
Toi ma belle tu as les pectoraux bien tendus
on sait pas si c’est des seins ou des coins
Restez en silence restez silencieux
comme ça vous l’entendez plus mon chant
Tu bella/Toi belle
39
II
LSMM
langue des signes moniale musicale
41
I - LSMM......................................................................43
	
	 Psaume 90.................................................................48
	 SalveRegina..............................................................60
II - Note d’intention.....................................................77
TABLE DES MATIERES
43
Lestextesquisuiventsontlespartitions-traductionsdedeuxchants
cisterciens latins (Psaume 90 et Salve regina misericordiae) en
langue des signes moniales. Je les ai performés dans la salle des
chapitres de l’abbaye de Maubuisson. Le premier, étant de nature
rythmique,étaittraduitautempodelapulsationd’unmétronome.
Le second, de caractère plus mélodique, était accompagné de la
diffusion d’une partition qui retraçait le parcours vocal du chant
d’origine1
.
1
Pour plus d’information vous pouvez consulter la note d’intention p 79
1 - LSMM
(langue des signes moniales musicale)
(Performance, 6 min, réalisée le 13/05/11 à l’abbaye de Maubuisson)
45
Consignes de lecture
MAJUSCULE
gris italique
I
Gris
Bleu
Orange
traduction du chant en LSM écrite
texte latin du chant
repères de pulsation
Dictionnairedelalanguedessignesfrançaise
d’autrefois, le langage de la physionomie et
du geste mis à la portée de tous, abbé Louis-
Marie Lambert, présenté parYves Delaporte,
collectionréférencesdel’ethnologie,éditions
du CTHS, Paris, 2005.
Geste des moines, regard des sourds, Aude
deSaint-Loup,YvesDelaporte,MarcRenard,
Siloë, Mayenne, 1997
www.sematos.eu/lsf.html
La suite est la description du geste à accomplir
pour traduire un terme. Les couleurs des mots
indiquent l’ouvrage dans lequel je les ai trouvés :
CELUI DEMEURE SOUS HAUT
Qui	 habitat in adiutorio Altissimi
I		 I	 I I I I
DANS PROTECTION CIEL DEMEURE
In	 protectione dei caeli commerabitur
I I I I I I
DIRE MAITRE SOUTIEN MIEN ET REFUGE
Dicet domino susceptor meus es tu et refugium
I	 I	 I	 I I I I	
	
DIEU MIEN ESPERANCE EN LUI
Deus meus sperabo in eum
I I I I
PARCE QUE DELIVRER MOI LACET CHASSE
Quoniam ipse liberavit me de laqueo venantium
I		 I I I	 I I
ET PAROLE TROUBLE
Et a verbo aspero
I 	 I I
psaume 90
EPAULES OMBRE COUVRIR
Scapulis suis ombubrabit tibi
I	 I I I I
ET SOUS AILES ESPERANCE
Et sub pennis euis sperabis
I I I I
BOUCLIER ENTOURER VERITE TOI
Scuto circumbabite veritas eius
I I I I I
NON CRAINDRE PEUR NUIT
Non timebis a timore nocturno
I I I I I
FLECHE VOLER JOUR
A sagitta volante in die
I I I I I
NON CHEMIN NUIT
A negotio perabulante in tenebris
I I I I I
NON CHUTE DEMONS MIDI
Ab incursu et daemonio meridiano
I I I I I
TOMBER A COTE MILLE
Cadent a latere tuo mille
I I I I
ET DIX MILLE DROITE TA
Et decem milla a dextris tuis
I I I I I
A TOI ENNEMI NON APPROCHER
Ad te autem non appropiquabit
I I I I
SUFFIT YEUX TES REGARDER
Verutamen occulis tuis considerabis
I I I I I I
ET PUNIR PECHE VOIR
Et retributionem peccatorum videbis
I I I I I
49
1- Qui
	 celui : un et vous
		 Un s’indique par le doigt levé.
		 Vous avec le V dactyl tracer un demi-cercle devant 		
		 soi.
2 - Habitat
	 habiter : maison-coucher
		 maison avec les deux mains en dos d’âne exprimer la 		
		 toiture.
		 coucher poser la main gauche sur la main droite
		 étendue.
3 - In
	 sous on passe la main sous quelque chose.
4 - Altissimi
	 haut élever la main forte.
1 - Protectione
	 protection étendre devant soi les 2 bras comme sur 		
	 quelqu’un qu’on protège
2 - Dei
	 Dieu former un trinagle avec les pouces et les index levés 		
	 en tenant les autres doigts fermés.
3 - Caeli
	 ciel demi cercle vers la voute des cieux.
4 - Comemorabitur
	reposer croiser les doigts puis croiser les bras sur le buste.
QUI1
HABITAT2
IN3
ADIUTORIO4
ALTISSIMI5
IN1
PROTECTIONE2
DEI3
CAELI4
COMEMORABITUR5
50
1 - Dicet
	 dire placer index sur la bouche et le diriger vers la
	 personne à qui on dit.
2 - Domino
	 maître amener la m.d par un mouvement circulaire comme 		
	 sur la tête de quelqu’un placé en face.
3 - Susceptor
	 soutien : aider.
		 aider appuyer l’avant du bras gauche sur la main 		
		 droite qui le soutient.
4 - Meus
	 mon indiquer sur soi même avec la main sur la poitrine.
5 - Et
	 et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 		
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
6 - Refugium
	 refuge : protéger et maison
		 protection étendre devant soi les 2 bras comme sur 		
		 quelqu’un qu’on protège.
		 maison avec les deux mains en dos d’âne exprimer la 		
		 toiture.
DICET1
DOMINO2
SUSCEPTOR3
MEUS4
ES TU ET5
REFUGIUM6
51
1 - Deus
	 dieu former un triangle avec les pouces et les index levés 		
	 en tenant les autres doigts fermés.
2 - Sperabo
	 espérance placer la m.d en __| et la main gauche en __| 		
	 un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement 		
	 du viens, viens, viens.
3 - In
	 en venir frapper la m.d dans la m.g.
1 - Quoniam
	car la m.d étendue vient frapper dans la paume de la m.g 		
	 deux fois.
2 - Liberavit
	 libérer : menotte et briser
	 menotte fermer les poings et tenir les poignets assujetis 		
	 l’un sur l’autre comme avec des menottes.
	 briser séparer les deux mains ;
3 - Laqueo
	lacet cordon
		 cordon action de l’amener en anneaux de la m.g à la 		
		 m.g ;
4 - Venantium
	 chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume de 		
	m.g.
QUONIAM2
LIBERAVIT3
ME DE LAQUEO4
VENANTIUM5
DEUS1
SPERABO2
IN3
EUM
52
1 - Et
	 et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 	
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
2 - Verbo
	 parole : dire.
Dicet/dire : placer index sur la bouche et le diriger vers
			 la personne à qui on dit.
3 - Aspero
	 trouble rouler les bras l’un autour de l’autre.
1 - Scapulis
	 épaules les indiquer sur soi même.
2 - Ombrabit
	 ombre : nuit.
		 Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule 	
		 puis les descendre en les refermant.
3 - Tibi
	 couvrir selon le cas en figurer l’acte.
ET1
A VERBO2
ASPERO3
SCAPULIS1
SUIS OMBRABIT2
TIBI3
53
1 - Et
	et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 		
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
2 - Sub
	sous on passe la main sous quelque chose.
3 - Pennis
	 ailes placer le bout du pouce sur le coin de la bouche en 		
	 étendant la main et en la remuant.
4 - Sperabo
	 espérance placer la m.d en __| et la main gauche en __| 		
	 un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement 		
	 du viens, viens, viens.
1 - Scuto
	 bouclier avec le bras gauche en figurer l’usage.
2 - Cirxumbabit
	 entourer avec l’index de la m.d tracer comme un cercle 		
	 autour de la m.g.
3 - Veritas
	 verité affirmer avec le V dactyl. De la m.d.
ET1
SUB2
PENNIS3
SPERABIS4
SCUTO1
CIRCUMBABIT2
VERITAS3
EIUS4
54
1 - Non
	 non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve	
	 ment similaire de la tête.
2 - Timebis
	 craindre reculer et trembler des mains avec expression 	
	analogique.
3 - Timore
	 peur placer la m.d sur le haut de la poitrine et exprimer la 	
	 peur avec le visage.
4 - Nocturno
	 Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule puis 	
	 les descendre en les refermant.
1 - Sagita
	 flèche en simuler le tir.
2 - Volante
	 voler en figurer l’acte.
3 - Die
	 jour enfoncer le doigt dans la joue.
NON1
TIMEBIS2
A TIMORE3
NOCTURNO4
A SAGITA1
VOLANTE2
IN DIE3
55
1 - A negotio
	 non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve		
	 ment similaire de la tête.
2 - Perabulante
	 chemin l’indiquer en éloigant devant soi les deux mains 		
	 ouvertes parallèles et verticales comme deux haies.
4 - In
	en venir frapper la m.d dans la m.g.
5 - Tenebris
	 ténèbres nuit.
	 Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule puis les 		
		 decendre en les refermant.
1 - Ab
	 ni déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouvement 		
	 similaire de la tête.
2 - Incursu
	 chûte former un N dactyl avec la m.g sur la main droite 		
	 étendue puis laisser tomber.
3 - Daemonio
	 démon on peut en simuler les cornes.
4 - Meridiano
	 midi : jour et moitié
		 jour enfoncer le doigt dans la joue.
		 Moitié indiquer l’objet et coupe la paume de la m.g 		
		 avec le tranchant de la m.d.
A NEGOTIO1
PERABULANTE2
IN4
TENEBRIS5
AB1
INCURSU2
ET DAEMONIO3
MERIDIANO4
56
1 - Cadent
	tomber former un N dactyl avec la m.g sur la main droite 		
	 étendue puis laisser tomber.
2 - A Latere
	 côté mettre la m.g paralallement sur la m.d puis ouvrir 		
	 comme une porte.
3 - Mille
	 Mille ouvrir les mains à hauteur d’épaule et les agiter trois 		
	fois.
1 - Et
	et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 		
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
2 - Decem
	dix : l’indiquer avec les doigts ouverts.
3 - Mille
	 Mille ouvrir les mains à hauteur d’épaule et les agiter trois 		
	fois.
4- Dextris
	 droite l’indiquer avec la main droite levée.
CADENT1
A LATERE2
TUO MILLE3
ET1
DECEM2
MILLE3
A DEXTRIS4
TUIS
57
1 - Ad te
	 à toi indiquer celui à qui on parle.
2 - Autem
	 ennemi darder l’un contre l’autre l’index de chaque main 		
	comme une épée.
3 - Non
	 non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve		
	 ment similaire de la tête.
4 - Apropiquabit
	 approcher rapprocher en deux ou trois temps la m.d de la 		
	 m.g sur la poitrine.
1 - Verutamen
	 suffire : assez
		 assez : passer deux ou trois fois la m.d ouverte 		
		 comme un niveau sur la m.g placée verticalement.
2 - Oculis
	œil le désigner sur soi.
3 - Considerabis
	 regarder placer l’index et le medium en V sous les yeux et 		
	 le diriger vers l’objet que l’on voit.
AD1
TE AUTEM2
NON3
APROPIQUABIT4
VERUTAMEN1
OCULIS2
TUIS CONSIDERABIS3
58
1 - Retributiomem
	 châtiment : punir
		 punir : frapper avec force le poignet droit sur le
		 poignet gauche, disposés comme dans une menotte.
2 - Peccatorum/
	Pêché se frapper la poitrine ;
3 - Videbis
	 voir placer l’index et le medium en V sous les yeux et le 		
	 diriger vers l’objet que l’on voit.
RETRIBUTIONEM1
PECCATORUM2
VIDEBIS3
SA	 LVE, RE GI NA MI SE RI COR DI AE
Sa	 lut, Rei	 ne mi sé ri cor de,
I- Salut à toi ô reine de Miséricorde
VI	 TA, DULCE DO 	 ET SPES NOS TRA, SAL VE
vie, 	 dou 	 ceur,	 espérance nô tre, sa lut
II- O vie, ô douceur, notre espérance, salut,
	 AD TE CLAMA MUS, E XU LES FI LII E VAE
	 A toi cr ier ex hil fi ls e ve
III- Enfants d’Ève, nous crions vers toi dans notre exil,
Salve regina misericordiae
E I A ERGO, ADVOCA TA NOSTRA, ILLOS TU OS MISERICOR DES
S’il vous plait, avoca te no tre, tourne tes mi sé ri cor des
O CULOS AD NOS CON CER TE
yeux vers nous com pa ti ssants
ET IE	 SUM, BE NE DIC TUM FRUCTUM VENTRIS TU I
Et Jé sus bé ni fru it ventre toi
VI- Et Jésus, le fruit béni de tes entrailles,
AD TE SUSPIRA MUS GEMENTES ET FLENTES IN HAC LA CRIMA RUM VA LLE
A toi gé mir sou pi rer	 pleurs par mi lar mes va llée
IV- Vers toi nous soupirons parmi les cris et les pleurs dans cette vallée de larmes.
V- O toi notre avocate, tournez vers nous vos yeux plein de bonté.
NO BIS POST HOC E XI LI UM OS TENDE
	 No tre après cet e xi il mon trer.
VII- après cet exil montre le nous.
O CLE MENS, O PI A
o cle mence, o pi tié
O DUL CIS MA RI A!
o dou ceur, Ma rie
VIII- Ô clémente, ô bonne, ô douce Marie !
Salut à toi ô reine de Miséricorde
SALVE, REGISNA MISERICORDIAE
Salut,	 Reine miséricorde,
O vie, ô douceur, notre espérance, salut,
VITA, DULCEDO ET SPES NOSTRA, SALVE
vie, douceur,	 espérance nôtre, salut.
Enfants d'Ève, nous crions vers toi dans notre exil,
AD TE CLAMAMUS, EXULES FILII EVAE
Toi	 crier exil fils Eve
Vers toi nous soupirons parmi les cris et les pleurs
AD TE SUSPIRAMUS, GEMENTES ET FLENTES
A toi	 gémir	 soupirer 	 pleurs
dans cette vallée de larmes.
IN HAC LACRIMARUM VALLE
parmi	 larmes vallée
Salve regina misericordia
I
II
III
IV
O toi notre avocate,
EIA ERGO, ADVOCATA NOSTRA,
S’il vous plait, avocate notre,
tournez vers nous vos yeux plein de bonté.
ILLOS TUOS MISERICORDES
tourne tes miséricordes
OCULOS AD NOS CONCERTE
yeux vers nous compatissants
Et Jésus, le fruit béni de tes entrailles,
ET IESUM, BENEDICTUM FRUCTUM VENTRIS TUI	
Et Jésus,	 béni	 fruit ventre toi
Après cet exil montre le nous.
NOBIS POST HOC EXILIUM OSTENDE
Notre après cet exil montrer.
Ô clémente, ô bonne, ô douce Marie !
O CLEMENS, O PIA, O DULCIS MARIA!
O clemence, o pitié, o douceur, Marie
V
VI
VII
VIII
66
1- Salut
	 salve le cas en précise l’acte
2 - Reine
	 regina : femme roi
		 femme indiquer sur la joue et descendant sous le 		
		 menton le ruban de la coiffe.
		 roi indiquer avec les mains une couronne sur la tête.
3 - Misericordiae
	 Miséricordes : cœur pardonné
		 cœur : décrire un cœur sur la poitrine avec les index
		
		 pardonner : pêché effacé
			 pêché se frapper la poitrine
			 effacer passer la m.d fermée sur la paume de 	
			 la main gauche.
I		 Salve1
, Regina2
misericordiae3
67
1 - Vita
	 vie remonter le long des flancs le « N » dactyl. Avec 		
	 expression d’animation.
2 - Dulcedo
	 douceur mettre le bout du doigt entre les lèvres qu’on 		
	 remue doucement.
3 - Spes
	 espérance placer la m.d en __| et la main gauche en 		
	 __| un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement du 		
	 viens, viens, viens.
4 - Nostra
	 notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à 		
	 l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi.
5 - Salut
	 salve le cas en précise l’acte
II		 Vita1
, dulcedo2
et spes3
nostra4
, salve5
68
1 - Ad te
	 à toi indiquer celui à qui on parle.
2 - Claramus
	 crier prendre un cri sur sa bouche et le lancer dans la 		
	 direction voulue.
3 - Exhules
	 exilé : chassé
		 chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume 		
		 de m.g.
4 - Filii
	 fils ou enfant remuer le petit doigt entre les lèvres.
5 - Evae
	 eve : femme première
		 femme passer deux doigts autour du front.
		 premier donné à l’index levé un léger mouvement.
	
III Ad1
te clamamus2,
exules3
filii4
Evae5
69
1 - Ad te
	 à toi indiquer celui à qui on parle.
2 - Suspiramus
	 soupirer : soupir fatigue
		 soupir en exprimer l’acte.
		 fatigue mettre les paumes des deux mains contre la 		
		 poitrine, la m.d en haut et la m.g en bas et inverser.
3 - Gementes
	 cris prendre un cri sur sa bouche et le lancer dans la 		
	 direction voulue.
4 - Et
	 et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 		
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
5 - Flentes
	 pleurs avec l’index de chaque main indiquer 			
	 alternativement comme des larmes qui coulent des yeux.
6 - In hac
	 parmi lever le petit doigt et le pouce du poing fermé et 		
	 venir taper sur la paume de la m.g.
7 - Lacrimarum
	 larmes fomer une boucle avec l’index et le pouce et 		
	 descendre le long de la joue.
8 - Valle
	 vallée : montagne
		 montagne avec les mains en dessiner les sinuosités 		
		 montantes et descendantes.
IV	 Ad te1
suspiramus2
, gementes3
et flentes4
	
		in hac5
lacrimarum6
valle7
70
1 - Eia ergo
	 s’il vous plait : je prie
		 prier joindre les mains, les doigts entrelacés.
2 - Advocata
	 avocate : Marie est l’avocate des pêcheurs : Marie pêché 		
	aider
		 marie : femme dieu
			 femme passer deux doigts autour du front
			 dieu former un triangle avec les pouces et 		
		 les index levés en tenant les autres doigts fermés.
3 - Nostra
	 notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à 		
	 l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi.
4 - Illos
	 tourner m.d en griffe effectue trois tours devant la poitrine.
5 - Tuos
	 tes : toi
		 toi indiquer celui à qui on parle.
6 - Misericordiae
	 miséricordes : cœur pardonné
		 cœur décrire un cœur sur la poitrine avec les index
	 	pardonner : pêché effacé
			 pêché se frapper la poitrine
			 effacer passer la m.d fermée sur la paume de 	
			 la main gauche.
V		 Eia ergo1
, advocata2
nostra3
,illos4
tuos5	
		
misericordes6
oculos7
ad nos8
concerte9
71
7 - Oculos
	 yeux : œil
		 Œil : l’indiquer sur soi même
8 - Ad
	 vers : geste ou mouvement indicateur _ souvent le cas et 		
	 l’objet en précise le signe.
9 - Nos
	 nous : décrire un cercle de gauche à droite devant soi à 		
	 l’aide de l’index.
10 - Concerte
	 compatissant : bon compassion
		 Bon passer doucement à plusieurs reprises sur la 		
		 poitrine la main étendue.
		 Compassion avec le médius de la m.d se piquer le 		
		 cœur avec expression analogue.
72
1 - Et
	 et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme 		
	 pour repousser quelque chose de gauche à droite.
2 - Iesum
	 jésus : le signe de dieu et de croix.
		 dieu former un triangle avec les pouces et les index 		
		 levés en tenant les autres doigts fermés.
		 croix croiser les index sans les remuer.
3 - Bénedictum
	 béni décrire une croix en l’air avec la main étendue.
4 - Fructum
	 fruit frapper du creux de la main le coude gauche en tenant 	
	 l’avant bras élevé.
5 - Ventris
	 entrailles : entrailles de mère : mère, cœur, tendre
		 mère : femme enfantant
			 femme : passer deux doigts autour du front
			 enfanter : appuyer les deux mains ouvertes 		
			 sur les flancs, les ramener l’une vers l’autre 		
			 en avant.
	
		 cœur : décrire un cœur sur la poitrine avec l’index.
		 tendre : action de pétrir ou palper quelque chose de	 	
		 mou.
VI	Et1
Iesum2
, benedictum3
fructum4
ventris5
tui6
73
1 - Nobis
	 notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à 		
	 l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi.
2 - Post hoc
	 après porter la main étendue près de la hanche en la 		
	 mouvant en arrière.
3 - Exilium
	 exilé : chassé
		 chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume 		
		 de m.g.
4 - Ostende
	montrer présenter la main gauche ouverte et y porter 		
	 l’index et le doigt du milieu, s.indicatif.
VII	 Nobis1
post2
hoc exilium3
ostende4
74
1 - O
	o traduire le vocalise par une vaguelette avec la main
2 - Clemens
	 clément : Cœur pardonnant
		 cœur décrire un cœur sur la poitrine avec l’index.
		 pardonner : pêché effacé
			 pêché se frapper la poitrine
			 effacer passer la m.d fermée sur la paume de 	
			 la main gauche.
3 - O
	 o traduire le vocalise par une vaguelette avec la main
4 - Pia
	 piété : dieu aimé
		 dieu former un triangle avec les pouces et les index 		
		 levés en tenant les autres doigts fermés.
		 aimer placer une des deux mains sur le cœur avec 		
		 expression analogue.
5 - Dulcis
	 douceur mettre le bout du doigt entre les lèvres qu’on 		
	 remue doucement.
6 - Maria
	marie : le signe de femme et de dieu
		 femme passer deux doigts autour du front
		 dieu former un triangle avec les pouces et les index 		
		 levés en tenant les autres doigts fermés.
VIII	O1
clemens2
, o3
pia4
, o5
dulcis6
Maria7
77
2 - Note d’intention
(rédigée à l’intention du site d’art
contemporain de l’abbaye de Maubuisson
enamontdelaréalisationdelaperformance)
78
Réaliser un projet à l’abbaye de Maubuisson m’a forcement
amenée à me pencher sur deux aspects qui sont récurrents dans
ma pratique artistique à savoir le langage et la musique. Hors le
propred’uneabbayecistercienne,commecelledeMaubuisson,est
sans doute son ambiance silencieuse. La parole était proscrite en
dehorsdelasalledeschapitres,lieuoùonseréunissaitl’ensemble
des membres de l’abbaye pour organiser la vie collective mais
surtout pour faire la lecture des chapitres du jour, se confesser,
chanter.Dansunpremiertempsjeprésenteraibrièvementcequ’est
laLanguedesSignesdesMoinesetlechantcistercien.Parlasuite
je décrirai la manière dont je prépare ma performance et la mise
en œuvre de cette dernière.
La moniale était toujours en position de priante, en permanence
attentiveàlaparoledeDieu.Riennedevaitdoncperturbersapaix
intérieure,cetteconversationsacréepermanente.C’estpourcette
raison, que les abbayes cisterciennes étaient souvent bâties dans
deslieuxreculés,queleursarchitecturesétaientépurées,etsurtout
que le temps de parole était extrêmement modéré. Les moniales
faisaient « vœu de silence» cela signifiait qu’elles réservaient
l’usagedelavoixauxdialoguescommunautairesetauxentretiens
personnels avec le supérieur. La conversation spontanée était
réservéeàderaresoccasionsspéciales.Afindecommuniquerdans
1 - Deux langages…
a - La LSM
79
le quotidien, les moniales développèrent une langue des signes
quicouvraitledomainedelaviemonastique;nourriture,boisson,
objetsliturgiques,membresdelacommunauté,bâtiments…Aux
277 signes codifiés s’en rajoutèrent d’autres issus du contexte
particulier ou de l’imagination des moniales. Ce système de
communicationpeutêtredéfinicommeunelangueetnoncomme
un simple français signé ou encore des codes frustres, dans la
mesureoùilremplittouteslesfonctionscomplexesattribuéesaux
languesnaturelles(commel’humouretlamétaphoreparexemple).
Comme la langue vocale possède des phonèmes, la LSM a des
gestèmes.
« L’originalité du système monastique vient de s’être imposé une
contrainte volontaire, alors qu’il n’y avait pas d’obstacle concret
pourcommuniqueroralement,cequejustifiaientdansd’autrescas
la distance, les échanges avec des étrangers, le besoin d’un secret
d’initiés qui ne pouvaient s’isoler, l’effet amplificateur du geste
qui soutient et garantit la portée d’un discours ou d’un serment
etc.…Etenréalitépourlesmoinesderéserverlaparoleauxsujets
divins dans les moments et des lieux choisis.1
»
L’un des lieux et moment choisis était la récitation de psaumes,
d’antiennes, de versets, de compiles chantés dans la salle du
chapitre.Lechantcistercienestuneréformedeschantsgrégoriens
par Bernard de Clairvaux. Tout comme le chant grégorien, ce
type de chant est sacré, anonyme, interprété par un chœur ou un
soliste et destiné à soutenir le texte liturgique en latin. En effet
cettemusiquerécitativeprendsonoriginedansletexteetfavorise
l’intériorisationetlaconsciencedesparoleschantées.Ilexistedeux
grands types de passages. Les premiers sont les psalmodiques ou
syllabique dont le rythme provient des paroles et où l’on récite le
textesurunenoteunique.D’autrespassagessontditsneumatiques
1
Aude de saint loup « vie des signes monastiques dans l’histoire » in Gestes
des moines, regard des sourds, Aude de Saint Loup, Yves Delaporte et Marc
Renard, Siloé, collections rencontres, Laval, 1997	
b - Le chant cistercien
80
ou mélismatiques ce qui signifie qu’une syllabe est chargée de
plusieurs notes, la mélodie est prépondérante.
Ainsi une même personne (en occurrence une moniale) portait
en elle deux types de langages très différents et étanches l’un
à l’autre. Le latin est vocal et destiné à dieu tandis que l’autre
est gestuel, réservé aux tâches triviales et quotidiennes et sert
à la communication avec d’autres bas-mortels. Mon idée est
d’entrecroiser ces deux langues, créer une confusion dans l’ordre
établi. Je traduis des chants cisterciens en langue des signes.
LatraductiondulatinenLSMcomportedenombreusesdifficultés.
La première d’entre elles est de trouver des ouvrages tels des
dictionnaires ou des méthodes nécessaires à la traduction. La
transcription écrite de la LSM n’est venue que tardivement par
rapportàl’anciennetédesapratique.Maissurtoutl’écrits’estvoulu
dès le début restrictif par rapport à l’imagination débordante des
moines qui en étaient arrivés à tout dire. Car rappelons que « (…)
le point de départ de ce système n’était pas de substituer un mode
de communication à un autre mais de limiter les conversations
au strict minimum2
. ». De plus l’écrit permet d’harmoniser, de
réduire à une base commune la diversité des langues gestuelles
pratiquées différemment dans chaque abbaye. En somme, l’écrit
amène à un contrôle de la part des supérieurs de l’église sur les
moines. Le catalogue le plus riche de la langue des moines est
sans aucun doute Le langage par signes chez les moines. Un
catalogue des signes de l’abbaye de Fleury de Davril Anselme3
qui est cependant rédigé en latin (que je ne comprends pas). J’ai
2
Aude de saint loup « vie des signes monastiques dans l’histoire », opus cit, p 50
3
« Le langage par signes chez les moines. Un catalogue des signes de l’abbaye de
Fleury », DavrilAnselme, in Sous la règle de saint Benoît structures monastiques
et sociétés en France du Moyen Age à l’époque moderne, colloque (Paris 1980),
collection Centre de recherches d’histoire et de philologie de la IV°section de
l’Ecole pratique des Hautes Etudes ; V . Hautes études médiévales et modernes,
librairie Droz, Genève, 1982
2 -La performance
a -Passage du latin à la langue des signes
81
par la suite trouvé un ouvrage contenant un catalogue en français
; Gestes des moines, regard des sourds4
. Cependant les termes
rapportés sont en nombre très limités (pour les raisons que j’ai
expliquées avant). J’ai donc eu besoin d’un dictionnaire plus
complet pour réaliser une traduction intégrale des chants. Pour
cela j’ai utilisé le Dictionnaire de la langue des signes française
d’autrefois5
. Ce dernier est au plus proche de ma démarche pour
deux raisons fondamentales. D’une c’est le premier dictionnaire
bilingue LSF français qui prend pour parti de mettre en place une
traduction la plus ouverte possible. Elle laisse une grande liberté
àceluiquil’interprète,n’amèneversquelquechosed’apprisetde
figécommelaLanguedesSourdsFrançaisd’aujourd’hui.Elleest
« plutôt un stimulant et à un appel à la nature, qu’une pédagogie
descriptive de la position des bras et des mains6
. ». L’approche
instinctive se prêtait plus à mon projet, me laissait davantage de
liberté que la LSF contemporaine. De plus ce dictionnaire a été
écritparunhommed’église,bonnombredetermesreligieux(qui
reviennent souvent dans les chants) sont décrits avec précisions.
Je pense notamment au terme avocate, l’abbé précise « Marie est
l’avocate des pêcheurs7
» et donne une indication précise quant
à la manière de traduire ce concept religieux, tandis qu’un autre
dictionnaire de LSF de taille équivalente ne signale que avocate,
dans son sens le plus connu, celui qui travaille au tribunal.
En dernier cas j’ai utilisé un dictionnaire de LSF8
pour les termes
que je n’arrivais pas à trouver ailleurs, ou alors dont la gestuelle
meparaissaitplusadaptée(plusexpressivegestuellementparlant).
Si je précise mes sources c’est parce que chacune d’entres elles a
une manière différente de transcrire la langue des signes. En effet
iln’existepasdesystèmed’écriturepropreàcettelangue,onpeut
4
Gestes des moines, regard des sourds, opus.cit
5
Dictionnaire de la langue des signes française d’autrefois, le langage de la
physionomie et du geste mis à la portée de tous, abbé Louis-Marie Lambert,
présenté par Yves Delaporte,collection références de l’ethnologie, éditions du
CTHS, Paris, 2005.
6
L’abbé Lambert in Dictionnaire de la langue des signes française d’autre-
fois, le langage de la physionomie et du geste mis à la portée de tous, opus
cit., p 16	
7
Ibidem, p 126	
8
www.sematos.eu/lsf.html
82
utiliserdesdessins,desvidéosmaissurtoutdesdescriptions.Celles
de l’abbé sont plus ou moins précises et datées, celles des moines
sont allusives tandis que celles de la LSF sont plus arrêtées. Ces
phrases laissent plus ou moins une interprétation de la part de
celui qui s’en empare et sont différentes les unes des autres dans
la description d’un geste, je les trouve presque poétiques. Elles
sont lisibles sur la partition9
.
Lelangagegestuelquejemetsenœuvren’estdoncpasl’application
de la LSM, qu’il m’est impossible de reconstituer avec le peu de
sources que j’ai, mais plutôt un collage entre différentes langues
des signes. Cette idée de « collage » ne peut être que d’autant plus
mise en avant avec le fait que j’ai composé les traductions des
chantsnonpasdansl’idéed’unetraductionausensstrictduterme
(danslebutdecommuniqueràdessourdsuncontenusémantique),
maisaveccommeobjectifd’accompagnerunchant,d’êtreauplus
près de sa structure musicale. Ce que j’articule gestuellement ne
peutdoncpasêtreconsidérécommelangageausensstrictduterme.
«Aucun ne contestera que son apprentissage (de la LSF) requiert
autant d’efforts que celui de n’importe quelle langue étrangère  ;
et tous savent que la part la plus difficile est précisément celle
qui, fondée sur des structures de transfert, nécessite l’acquisition
de subtiles stratégies et l’abandon de toute référence à la logique
linéaire et discontinue des langues vocales10
.»
9
pour la réalisation de ma performance j’ai réalisé une partition qui reprend
chaque phrase descriptive du signe interprété. La source de chaque élément est
signalée par une couleur.
10
Yves delaporte « présentation dictionnaire de la langue des signes » in
Dictionnaire de la langue des signes française d’autrefois, le langage de la
physionomie et du geste mis à la portée de tous, opus cit.
83
b - Traduction du chant
Comment traduire un chant ? Déjà d’une langue vocale à une
autre le chant, tout comme la poésie, est une forme difficilement
traduisible:commentêtreprochedusensdutextetoutenrentrant
dans la structure rythmique et mélodique de base ? Dans le cas de
la traduction en LSMM, on ne peut pas calquer la rythmique du
textechantésurceluiparlégestuellement(commeonpeutlefaire
par exemple avec d’un chant en italien vers le français). Un mot
quicomporteplusieurssyllabescommeparexemple«espérance »
se traduit par un unique signe. Par conséquent c’est la manière
d’enchaîner,dedéployerlessignesdansl’espacequivontpouvoir
donneruneidéedelavaleurmusicaleduchanttraduit.Lalongueur
dudéploiementdugeste,sonenchainementaveclesignesuivant,
son expression, donneront une idée du rythme, des liaisons, des
nuances, voire de la mélodie du chant cistercien.
Il existe des traductions en LSF de certaines chansons, et même
une fête de la musique pour les malentendants11
. J’ai pu voir
sur internet des clips ou des concerts en LSF12
. Le traducteur
évoque corporellement le chant, il est à la limite de la danse et du
langage13
. Même pour celui qui ne comprend pas la LSF, on peut
pourtant ressentir la cadence, l’univers du chant en regardant le
traducteur.D’unepartparcequecertainssignessontassezfacilesà
comprendre,assezlittérauxdansleurimage.D’autrepartparceque
la personne déploie ses mouvements selon une certaine énergie.
11
L’association sourds du Morbihan a organisé l’an dernier la fête
des mains, une fête de la musique pour les sourds qui a lieu le 20 juin
2009 à Vannes http://www.unapeda.asso.fr/article.php3?id_article=834	
12
On peut regarder des clips en LSF sur http://www.websourd.org/spip.
php?article118875	
13
Le chorégraphe Philippe Découflé s’empare de cette danse de la langue des
signe notamment dans ce clip du p’tit bal :
http://www.dailymotion.com/video/xt5qn_philippe-decoufle-le-p-tit-bal_mu-
sic
84
Dans le cas de la performance LSMM, je ne veux pas qu’on
entende le chant cistercien initial. La traduction musicale se fera
visuellement, à la fois à travers le rythme et l’expression de mes
gestes.Jeveuxquelechantsoitressentiautrementqueparl’écoute.
La performance se déroulera en deux temps. La première partie
est la « traduction » du Psaume 90 Scuto circumdabit te veritas
eius/Savéritét’entoureracommeunbouclier,tunecraindraspas
les terreurs de la nuit qui est récité le soir à l’office des complies,
l’undesderniersdelajournée,quiévoquelapromessed’unenuit
apaisée. Comme je le disais plus haut, le psaume a la particularité
d’être récité sur une même note et dans le cas de celui-ci sur des
structures rythmiques régulières à un tempo de 64 à la noire. Lors
de cette première partie je traduirai ce chant selon le tempo et le
rythme du chant initial. Le son d’un métronome viendra donner
la pulsation à cette traduction..
La deuxième partie est la traduction de l’antienne Salve regina
misericordiae/Salut reine des miséricordes qui est récité chaque
soir de l’année à la fin des compiles. Ce chant est mélismatique,
c'est-à-dire que l’aspect mélodique prédomine. Je traduirai de la
mêmemanièrecechantenLSMMtandisqueseraprojetéederrière
moilapartition14
decemorceau.Lesneumespasserontdunoirau
gris au fur et à mesure de l’avancée du morceau, comme le font
les paroles des chants karaokés.
14
cf p 62
c - Mise en place de la performance
87
III
Stranièrois
89
1 - Salvons le stranièrois !..............................91
	 (performance, environ 3 heures, réalisée le 7/10/11
	 lors de la semaine FRASQ au Générateur)
	
	 Pétition signée le 7/10/11.......................................106
2 - Stranièrois..............................................................109
(sommaire et premier chapitre du Que sais-je sur le peuple stranièrois)
3 - Les nouilles quitareux au conilliou de pommé...123
	 (recette stranièroise extraite de l’encyclopédie wikipédia)
4 - notes.......................................................................129
Table des matières
91
Ce texte accompagné d’images est la transcription d’une
performance qui consistait à présenter un mouvement militant
nommé Salvons le Stranièrois, défenseur d’une culture et d’une
langue aujourd’hui disparues. S’en suit la pétition avec les
signatures récoltées lors de la performance.
1 - Salvons le stranièrois
(performance, environ 3 heures, réalisée le 7/10/11, FRASQ au Générateur)
92
93
Bonjour à toutes et à tous,
Jemeprésente,jesuisViolaineLochu,unedesreprésentantesdu
mouvement Salvons le stranierois. Je chercherai à vous décrire
toutaulongdecetteprésentationcequ’estSalvonslestranierois.
Dans un premier temps je ferai un bref retour historique pour
rappeler ce que sont la langue et la culture stranièroises. Je
présenterai ensuite les membres de notre bureau ainsi que nos
objectifs et activités.
Je suppose que peu d’entre vous connaissent le stranièrois. C’est
en effet une langue qui a quasiment disparue et qui n’a jamais
eu beaucoup de locuteurs. Le stranièrois est né en Mayenne, un
départementdel’ouestdelaFrancequisesitueentreRennesetLe
mans.Ilétaitsurtoutparléparlaminoritéstranièroiseauxalentours
d’Evron,c’est-à-direaunordestdelaMayenne.Cettelangueestun
savantmélangedegrammaireitaliennedesonoritésmayennaises
etd’expressionsd’autreslanguesd’oïl.Pourcomprendrecomment
apunaîtreunetellelangueàcetendroit,ilestnécessairederappeler
l’histoire des stranièrois.
Le peuple stranièrois s’est réfugié au XVIe en Mayenne pour
des motifs politiques et religieux. En effet c’est une communauté
italiennequiaduquitterlesAbruzzessuiteàl’inquisitionitalienne
duXVesiècle.Lesstranièrois,alorsappelésstrangipi,pratiquaient
unritetrèsspécifiquequel’égliseavaitjugéàl’époquehérétique.
Malgré les interdictions du clergé, le peuple continue à adorer
saintDominicodiCucolloetsesserpents.Laterriblenuitdu7mai
Le stranièrois
Le peuple stranièrois
94
1477, les inquisiteurs mènent au bûcher les prêtres stranièrois
accusés de profanation. S’en suit une rébellion dans le village de
Prezzaoùleshabitantsstranièroisessayèrentdesauverleurcuréet
s’attaquèrentauxautorités.Lesinquisiteurs,aidésdelapopulation
locale, se mettent alors à traquer et assassiner l’ensemble des
stranièrois. En quelques semaines, la population stranièroise est
décimée.
LepeuderescapésdecemassacrequittelesAbruzzes;commencent
alors de dures années d’exil pendant lesquelles les stranièrois
cherchent un endroit où s’établir. Leur quête les mène dans le
nord de la France et plus précisément dans l’actuelle Mayenne.
Acette époque la Mayenne sort d’une longue période de guerre
éprouvante. Les anglais au cours de randonnées dévastatrices
La Mayenne, territoire du stranièrois
95
avaient mis à sac des villages, réduisant à néant de nombreuses
airesd’agriculture.Leslocauxontbesoindemaind’œuvreetsont
intéressés par les nombreuses connaissances des stranièrois. En
effet ceux-ci leur font découvrir entre autre l’usage de la chaux
pour rendre plus fertile les terrains de plantation. Les seigneurs
locaux accueillent et garantissent la sécurité aux stranièrois sous
certainesconditions(lourdimpôtfoncier,libertédeculterestreinte,
interdiction de prosélytisme, incapacité juridique).
C’estainsiquelesstranièroiss’établissentauxalentoursd’Evronen
1581.IlsconstruisentunechapellesurleMontaiguoùilsdéposent
les reliques de Saint Dominico di Cucullo et fondent le village de
Stramière(actuellementHambers).Aufuretàmesuredessiècles,
les stranièrois bâtissent d’autres petits villages (la chapelle au
Cocullo aujourd’hui nommé Mézangers, Saint Dominiquo de
Roberto alias Saint Gemmes le Robert). Ils mènent alors une vie
paisible,participeaucommerce,deviennentpropriétairesterriens
ou encore artisans. Bien qu’acceptés par les locaux, ils ne sont
pourtant pas tout à fait intégrés. Ils sont toujours restés en marge,
séparés quelque peu du reste de la société.
Le culte de San Domenico et ses serpents
96
A la fin du XIXe siècle, une partie des stranièrois s’emploient
au travail saisonnier dans certaines industries mayennaises. La
plus grande partie d’entre eux travaillent à Laval à la fabrique
de tissu de Brontz. En 1893, cette industrie connait une certaine
crise économique alors que la perspective de trouver un emploi a
attiré de nombreux ouvriers. Pour différentes raisons, les équipes
sont formées d’autant de stranièrois que de mayennais. Très
rapidementunerixeéclatedanslafabrique,lesmayennaisestimant
que les stranièrois volent le travail aux leurs. Celle-ci dégénère
et entraine la mort de deux mayennais. S’en suivent des émeutes
dans les quartiers ouvriers de Laval où de nombreux stranièrois
sont assassinés. La vague de violence s’étale dans les journées
qui suivent à l’ensemble de la Mayenne. Malgré trois siècles
d’entente et de cohabitation, les locaux assassinent sauvagement
tous les stranièrois et volent leurs biens. Ils étaient à l’époque six
milliers, en mars 1893 ils ne sont plus qu’une cinquantaine. Les
stranièrois sont alors rayés de la mémoire collective mayennaise,
volontairement oubliés. Ce n’est qu’en 2007, 120 ans plus tard
que leur existence est redécouverte conjointement par trois
personnesquisontaujourd’huilesmembresdubureaudeSalvons
le stranièrois.
Famille stranièroise, Les Lomoreï en 1892
97
98
En 2007 Pierre entreprend un doctorat
en histoire sur les fabriques de toile
mayennaise. Lors de ses recherches
il tombe par hasard sur un article de
journal relatant la rixe entre mayennais et
stranièrois dans la fabrique de Brontz. Il
découvrealorsl’existencedesstranièroiset
voueunepassionàcettecommunautédont
jamaispersonnenesemblaitavoirentendu
parler. Depuis il a fondé en 2008 le mouvement.
Président : Pierre Bourdais
La vice présidente : Julie Lebrun
Le bureau
Interprète de chant mayennais mais aussi
de chants du monde, Julie fait partie de
plusieurs formations telles que A ba dame
di ! et Porto Largo, et est professeure dans
plusieurs école de musique. Lors d’un
vide grenier à Ste Gemmes Le Robert,
elle tombe par hasard sur un vieux carnet
de chansons dont elle ne parvient pas à
identifier le langage malgré des mélodies
voisinesdelamusiquetraditionnellelocale;ils’agitdustranièrois.
Elle est aujourd’hui co-fondatrice du mouvement.
99
Loic s’est depuis toujours questionné
sur l’origine de son nom qui n’a rien de
mayennais. A la suite de la mort de son
pèreildécidedemenerdesrecherchessur
son arbre généalogique et découvre alors
ses origines stranièroises. Ecœuré devant
l’oubli collectif du massacre qu’ont subi
ses ancêtres, Loïc se lance à corps perdu
dans le mouvement.
Le secrétaire : Loic Gemignoigni
Les bénévoles
Salvons le Stranierois a fait depuis deux ans des bonds de
géants qui n’auraient pas été possibles sans la participation de
ses nombreux membres et bénévoles. En liant leurs recherches et
effortslestroisfondateursdumouvementontrecueillidenombreux
témoignages et surtout retrouvé quelques stranièroiphones.
100
Aujourd’hui plusieurs milliers de personnes en Mayenne
participent aux différents évènements et activités organisés par
Salvons le Stranièrois. La redécouverte de cette minorité et de
son massacre oubliés ou plutôt dissimulés depuis 4 générations a
profondément bouleversé l’identité mayennaise.
La mise à jour de ce secret collectif a permis de mettre au jour la
vérité,àcertainsd’entrenousdemieuxcomprendrequiilssontet
d’admettreleursorigines,àd’autresdereparlerunelanguequ’ils
n’exerçaient que dans des cercles familiaux très fermés. Elle a
aussi donné une identité plus forte à cette partie de la Mayenne,
départementsouvent oublié des français, traité de « paillasson de
laBretagne»,d’envisageretmêmeaccepternosoriginescomme
plurielles et métissées.Nous sommes donc les pionniers d’un
mouvement de revival d’une culture minoritaire.
Aujourd’hui...
101
Salvons le stranièrois a pour objectif de promouvoir la culture
et la langue stranièroise. Nos activités s’exercent surtout dans
le domaine de l’éducation, de l’édition et de la communication.
Salvons le stranièrois est une fédération qui regroupe plusieurs
associations :
	
	- Chantiamons ensiemeu : chorale de chant stranièrois 		
	 animée par Julie Lebrun à l’école de musique d’Evron.
	-Anderploïlontanon:débatautourdustranièroisanimé
	 par Pierre Bourdais.
	- Stranièrons! : cours de stranièrois par Georges 		
	Lorrenzois
	-Siamonsla:éditiond’unerevuetrimestrielleenfrançais
	 et en stranièrois en collaboration avec les écoles du pays
	d’Evron.
Activités
102
- Le 20 fevrier : le stranièrois en famille, groupe de découverte
du stranièrois à la crèche des grands près à Evron.
- Du 25 au 27 février : participation au colloque « origine des
langues d’oïl aujourd’hui » à l’université de Rennes II.
- Le 12-13 mars : Salvons le stranièrois fête ses 3 ans ! au
programme concert du groupe « a ba dam di ! » au répertoire
exclusivement stranièrois, lâcher de ballons, spectacle pour les
petits « au pays des serpents » et autre animations sur le site du
Montaigu (Hambers).
Agenda janvier /février
103
Jevaisfinircetteprésentationenvousdemandantunepetiteaide.
Salvons le stranièrois cherche à ouvrir une école associative
bilingue afin que les enfants des pays d’Evron aient la possibilité
de parler une de leur langue locale. Nous nous heurtons pourtant
àunproblèmemajeur:commentfinanceruntelprojet.Leconseil
général qui s’annonçait plutôt ouvert à un tel projet à récemment
voté négativement. Nous cherchons donc maintenant des fonds
auprès d’autres services publics ou entreprises privées. Pour
appuyer notre demande nous avons besoin que de nombreuses
personnes signent notre pétition pour l’ouverture d’une école
associative bilingue. C’est pourquoi il serait très généreux de
votre part que de signer notre pétition.
Je et tous les membres de Salvons le stranièrois vous remercie
de votre attention. Venez nombreux à notre anniversaire le 12 et
13 mars !
Vive le stranièrois et à bientôt !
Nous avons besoin de vous!
105
Suite à la présentation du mouvement Salvons le stranièrois, je
passaisindividuellementdiscuteravecchaquemembredu«public»
afin de lui faire signer ma pétition. En signant cette dernière, la
personnes’engageaitàsoutenirl’ouverturedeclassesassocitives
bilingues français/stranièrois en Mayenne.
Pétitions
(feuillesA4 papier signées à la main par divers individus)
109
2 - Le stranièrois
(sommaire et premier chapitre du Que sais-je sur le peuple stranièrois)
STRANIEROIS
Violaine Lochu
PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANC
SOMMAIRE
A) histoire des stranièrois
I) origines du peuple stranièrois
	 1) particularités…
a) origine géographique ; la vallée Peligna, centre des Abruzzes
b) le culte de San Domenico et ses serpents
	 2) l’inquisition italienne
a) arrestation
b) Piazza del sangue
II) une histoire stranieroiso-mayennaise
	 1) l’arrivée en Mayenne (XVI°s)
a) contexte d’après guerre, droits et devoirs des stranièrois
b) construction des premiers regroupements et lieu de culte
c) la peste ravageuse
	 2) mise en place de la société stranieroise
a) une période faste, création de fermes
b) développement des villages
3) âge industriel
a) époque révolutionnaire
b) participation saisonnière à l’industrie (XVIII)
III) disparition et redécouverte
	
	 1) génocide
a) massacre de la fabrique de Brootz
b) les trois jours sanglants (du 10 au 13/03/1893)
	 2) de l’oubli collectif à la vérité
a) l’action de trois personnes en 2007
b) la prise de conscience commune
c) évènements et recherches sur le stranierois aujourd’hui
B) ethnographie
I) habitat et vie domestique
	 1) habitat
a) architecture
b) Mobilier et objets usuels
	 2) alimentation
a) repas quotidiens
b) repas de fêtes
II) coutumes et croyances
	
	 1) musique et danse
a) les âges de la vie ; recueil de chant
b) impacts et influences de la musique d’Italie centrale
	 2) croyances et superstition
a) description de la procession
b) gestes protecteurs
III) langue
1) grammaire et prononciation
2) expression et toponymie
3) exemple d’un texte stranierois
CHAPITRE PREMIER
ORIGINES DU PEUPLE STRANIEROIS
I- identité des stranierois : le rite de San Domenico
1) Origine géographique : la valle Peligna
Les origines du peuple stranièrois se situent dans le
centre Italie, dans les actuelles Abruzzes comprises entre
l’Adriatique et la chaîne montagneuse des Apennins. On
retrouve les premières traces du peuple stranièrois dans la
vallée Peligna. Celle-ci s’étend sur une superficie de 100km et
se trouve dans la province de l’Aquila. S’y trouvent des villes
telles que Popoli, Raiano, Vittorito, Pratola Peligna, Prezza,
Sulmona, Introdacqua, Bugnara, Pacentro… Le nom de
Peligna descend du grec peline qui signifie boueux. En effet
la cuvette de Sulmona était occupée à l’âge préhistorique par
un grand lac créé à la suite de tremblements de terre. Ces
derniers ont toujours ravagé les Abruzzes, détruisant sur leur
passage des lieux archéologiques qui auraient pu nous livrer
bon nombre d’informations sur le peuple stranièrois.
2) Les ancêtres serpantari
	 a) Le culte du serpent
Jusqu’au XVe siècle la vallée de Peligna était peuplée en
partie par les serpantari, minorité religieuse dont descendent
les stranièrois. Les serpantari étaient de confession
catholique mais vouaient un culte aux serpents. Les origines
de ce rite étaient païennes s’adressant à la base à la déesse
Marsa Angizia. Le serpent était considéré comme un animal
sacré unissant le monde sous-terrain (figure de l’inconnu et
de l’au-delà) avec le monde terrien et humain. Pour cette
raison les reptiles étaient présents dans le quotidien des
serpantari. Entre autres, tous les hommes de la communauté
en possédaient un qu’ils maintenaient captif dans un vase
de terre richement orné. Le serpent accompagnait aussi tous
les passages cruciaux de la vie. Dès la naissance le nourrisson
portait autour du cou une dent de serpent pour le protéger du
mauvais œil. Le jeune homme s’émancipait en attrapant seul
son premier serpent. Le défunt serpantari était enterré avec
le dernier reptile qu’il avait eu en sa possession etc…
	 b) San Domenico
Cesritespaïensfurenttardivementrattachésauchristianisme.
On associa vers le XIe siècle la figure de San Domenico aux
serpents. Ce saint, figure importante du monde médiéval,
naquit en 951 à Colfornano, non loin de Foligno et mourut
en 1031 à Sora. Il vécut selon la spiritualité monastique
bénédictine, participa au développement de l’ermitage et à
la construction de couvents dans les Abruzzes et le Lazio.
Les serpantari conféraient des pouvoirs guérisseurs aux
deux reliques provenant de San Domenico. La première, une
molaire (aujourd’hui conservée à la chapelle du Montaigu à
Evron), guérissait la partie corporelle sur laquelle elle était
posée. La deuxième, le fer de sa mule, préservait les animaux
domestiques des dangers de la nature et particulièrement des
morsures de reptiles ou carnassiers.
II Inquisition romaine
	
1) Arrestation
En 1480, le pape Paul III fondit sous le nom de la sacrée
congrégation l’inquisition romaine et universelle. Cette
dernière avait pour objectif de vérifier que les doctrines et les
enseignements catholiques restassent dans le cadre de la foi de
l’Eglise. Ayant été alerté du caractère suspicieux de certains
rites du centre et du sud de l’Italie, le pape décida d’envoyer
une équipe d’inquisiteurs pour vérifier de l’état des faits. La
vallée de Puligna faisait partie du parcours des inquisiteurs.
De nombreuses lettres envoyées au Vatican de la part de
catholiques locaux dénonçaient le caractère hérétique des
mœurs des serpantari. Ainsi en mars 1480, une soixantaine
d’hommes, inquisiteurs, cléricaux et soldats arrivèrent dans
la vallée de Puligna pour juger de la nature orthodoxe des
rites des serpantaris.
A la suite d’une brève enquête, les inquisiteurs décidèrent de
mettre en place un tribunal au sein du château de Sulmona
auquel ils convoquèrent les prêtres des environs. Ces derniers
durent témoigner de leurs pratiques et croyances. Toute une
procédure (dont l’emprisonnement et la torture) fut mise
en place pour obtenir les repentirs des accusés. Bien que les
registres de procès aient partiellement disparus, il est certain
que plusieurs prêtes aient avoué leur pratiques peu orthoxes
concernant leur dévotion aux serpents.
2) La piazza del sangue
Le 4 mars 1480, l’ensemble des prêtres dits serpantari furent
conduits sur la place centrale de Sulmona pour être jugés
publiquement. Le tribunal déclara la condamnation à mort
des prêtres aux centaines de personnes réunies sur la piazza
centrale. La flamme bénite du bûcher purifierait l’âme des
corps hérétiques. Un soulèvement populaire eut alors lieu ;
les serpantari s’opposant à la condamnation. La réplique de
la part des inquisiteurs et des catholiques locaux fut d’une
extrême violence.
On découvrit en 1997, lors de travaux de restauration
dans la chapelle de l’église de la sainte trinité de Fulmona,
l’existence d’une fresque dépeignant ce massacre. Le bûcher
est représenté dans la partie supérieure, non loin on y voit
l’estrade sur laquelle se trouvent les autorités cléricales et
locales. Au centre de la fresque, l’artisan a pris grand soin
à peindre les différentes façons dont les soldats ou encore
des civils s’entretuent. Le sol est couvert de corps morts,
certaines zones sont rouges de sang.
Une traque aux serpantaris dans la vallée de Puligna suivit
le massacre de Sulmona. La majorité d’entre eux furent
réunis pour être jugés par le tribunal de l’inquisition, souvent
torturés puis brûlés.
123
3 - Les nouilles quitareux
au conilliou de pommé
(recette stranièroise extraite de l’encyclopédie wikipédia)
Nouillesquitareuxauconillioudepommé
DeWikipedia,l’encyclopédielibre.
Nouillesquitareuxauconillioudepommé
Autrenom
Pâteàlastranieroise
nouillesaulapin
Lieud’origine
Evron
Placedansleservice
plat
Températuredeservice
chaude
Ingrédients
Pâtesquitareux,lapin,pommé,beurots,
oignon,carottes,laurier
modifier 
Lesnouillesquitareuxauconillioudepommésontunplatappartenantàlatraditiondelacuisinestranieroise
quel’onmangeaitaurepasdePâquesaprèslasemaineducarême.Ceplat,despâtesauragoutdelapin,resteun
symboleimportantdelaculturestranièroiseutilisantdesingrédientsduterroir.
Sommaire
  [masquer] 
•	1 Traditionsetorigines
o	1.1 nouillesquitareux
o	1.2conillioudepommée
•	2 Préparation
•	3 Voiraussi
Traductionetorigines[modifier]
Lesnouillesquitareux[modifier]
Lesnouillesquitareuxsontunevariétédepâtesàl’œufdontlalargeur(entre3-4mm)estprochedestaglioniitaliens.
L’utilisationdelaquitareuse(unestructuredeboisavecdesfilsd’acierletraversant)donneàlapâtesonépaisseurcar-
réeetuneconsistanceporeusequipermetàlasauceaveclaquelleelleestpréparéed’êtretotalementabsorbée.
Onpréparaitcetypedenouillespourdesoccasionsspéciales,leurpréparationétantlongueetlaborieusemaissur-
toutcontrairementauxsagnées,réaliséesseulementavecdel’eau,delafarineetdusel,lesnouillesquitareuxétaient
préparéesavecdesœufs.Ellesaccompagnaientsouventdesragoutsdeviande(veau,mouton,lapin).Onretrouvece
typedepâtesdanslesAbruzzesbienqu’ellessoientmoinsépaisses.
Conillioudepommé[modifier]
Leconillioudepomméestunragoutdelapincuisinéaupommé.Cedernierestunesortedeconfitureàbasedecidre
quel’onréalisaitàlafindel’automne.Laveilléedupomméduraittoutelanuit ;lesstranièroisserelayaientpourtourner
lepommé,buvaient,mangeaient,racontaientdeshistoiresetjouaientauxcartes.Lorsquelacuissondupomméétait
surlepointd’êtreterminée,onyrajoutaituneliqueurdanslaquelleonconservaitunecouleuvreàcollier(symboledela
bonnefortunedanslaculturestranièroise).
Préparation[modifier]
Larecettereposesurlasauceauconillioudepomméserviesurunniddenouillesquitareux.Onpeutyrajouterunefine
couchedebeurots(fromagedurmayennais)râpé.Enoctobre2009,PierreLeroyexpertencuisinemayennaiseadéposé
auprèsdelachambredecommerceetdel’artisanatde Nanteslarecetteofficielledesnouillesquitareuxauconillioude
pomméafindegarantirlacontinuitéetlerespectdelatraditiongastronomiquestranièroise.
Voiraussi[modifier]
SurlesautresprojetsWikimedia :
•	« nouillesquitareuxauconillioudepommé »,sur WikimediaCom-
mons (ressourcesmultimédia)
Nouilleschitareux
SurlesautresprojetsWikimedia :
•	« Nouilleschitareuxauconiglioudepommé(livredecuisine) »,surWiki-
books (livrespédagogiques)
	 Portaildel’alimentationetdelagastronomie
Catégories : 
•	Cuisinefrançaise
129
4 - Notes
130
Rencontres inattendues
(culture « originelle » mayennaise + « adoptive » italienne +
«  impossible » juive)
Inventerlepeuplestranièroisc’estcréeruneréflexionformellesur
l’échangeculturelquiauraitlieuentredeuxculturesquinesesont
jamaisàproprementrencontrées.Quesepasset-ilquandunpeuple
migre sur un autre territoire, quelles sont les conséquences sur
celui-ci?Quelstypesd’échangesouderefusd’échangepeuvent-
ils se produire ?
Pour réaliser cette fiction j’ai emprunté des éléments au réel, à
savoir la culture mayennaise et la culture desAbruzzes, l’histoire
de l’inquisition, la diaspora juive, massacre des italiens d’Aigues
Mortes, le statu de la culture juive en Pologne etc… Autant
de particules qui ont servi de terreau à mon imaginaire. J’ai
d’ailleurs l’impression de ne rien créer de nouveau si ce n’est
des rapprochements et des réinterprétations d’éléments qui me
travaillent quotidiennement. Cette fiction me laisse la liberté
d’aborder des problématiques qui travaillent notre société tout
en me procurant la légèreté de la poésie.
131
Convaincre dans l’endurance
Je suis debout derrière une table où mes notes s’éparpillent. Je
parle fort et clairement et fais défiler derrière moi des images
projetéesquiviennentillustrermondiscours.Jeprésentel’histoire
et la culture stranièroise, notre mouvement et tente de convaincre
de la nécessité d’apposer sa signature sur notre pétition. Ceci est
le premier temps « officiel » de la performance. Par la suite je
passe d’un individu à un autre, réponds aux questions de détail,
convaincs encore et encore. Je dois faire signe d’ingéniosité en
matièred’improvisation.J’inventesurlecoupdesmotsstranièrois,
mon parcours de militante et mêle ces fictions à ma propre vie.
Je suis toujoursViolaine Lochu, accordéoniste et étudiante en art
mais mène de front mon engagement dans ce mouvement qui me
tientàcœurpourdesraisonsfamiliales.Etreprécisetoutenrestant
suffisamment floue, telle est la règle.
Laplupartdesgenssontmifiguesmiraisinshésitentunpeu,tente
dedémêlerl’histoire,medemandetimidementmais«c’estvraitout
ça ? » puis finissent par se laisser tièdement convaincre. D’autres
personnessontincrédulesetdèsledépartvousannoncentfièrement
qu’elles refusent de joindre ce genre de causes communautaires
extrémistes. L’une d’entre elles finit même par m’insulter, je suis
obligée de lui rappeler le contexte dans lequel nous sommes (un
centre d’art). Il y a aussi ceux qui sont encore plus enthousiastes
que moi, qui font passer le mot, crient en faveur du mouvement,
mêlent leur force de conviction (honnête ?) à la mienne. Je
convaincs pendant deux heures et demie à coup de pétition puis
d’accordéon. Les gens réunis autour des verres du vernissage se
laissentdoucementglisserdansl’histoire.Onfinitpartrinqueràla
cause stranièroise. Il y a même une dame qui appelle le directeur
du conservatoire de Laval pour l’inciter à développer un projet
musico-pédagogique autour de la culture stranièroise…
132
Geste imposteur
Pour construire le discours, il a fallu étudier de près certains
mouvementsdéfenseursdelanguesminoritaires.Mesprincipales
sources ont été le site militant Oui au breton et aussi le site de la
maison de la culture yiddish et son petit catalogue trimestriel.
J’ai bâtipar exemplemon« agenda» ou « activités» en analysant
commeilsétaientconstruits«danslaréalité».Delamêmemanière
j’ai essayé d’être proche de ces causes dans les arguments, le ton
de voix, la mission… Je me suis amusée à démanteler un type
de discours, à mettre au jour ses mécanismes. Le même type de
geste imposteur est mis en œuvre dans le sommaire du livre Que
sais-je  ? ou dans la recette les nouilles quitareux au conilliou de
pommé«extraite»dewikipedia.Inscrirecesfictionsdansuncadre
formelpréexistantleurdonnecommeunelégitimité,lesimplante
dans le réel. Conjointement, un effet de renversement peut se
produire, nous questionne sur notre propre rapport aux histoires
qu’on nous raconte.
135
IV
Yiddish
Avant- propos
Cette partie est construite différemment des précédentes. Il n’y
a pas un document central sur lequel repose tous les autres. De
plus, elle se veut moins achevée, plus éclatée. Beaucoup de mes
recherches restent en suspens et n’ont pas abouti à une « pièce ».
Pour ces raisons, cette partie pourrait être pensée comme annexe,
moinsintéressantequelesautres.Pourtant,jepensequ’elleesttout
aussi importante que les précédentes pour au moins deux raisons.
D’une part la relation que j’ai au yiddish nourrit des réflexions,
des approches développées auparavant. D’une autre, j’espère
développerdanslesannéesàvenircertaineschosesencoreàl’état
d’embryon. Elle agit donc comme une sorte d’ouverture.
	
Je commencerai par dire que ce qui m’a amenée à cette langue et
à cette culture est mon intérêt musical. Je suis accordéoniste de
musique dite « klezmer » depuis six ans et chanteuse de yiddish
depuis 4 ans.Aujourd’hui je suis des cours de yiddish à la Maison
de la culture yiddish et ai un groupe de musique qui se produit
régulièrementdunomdeMashke.Cettesituationmefaitvivreun
certainnombredequestionnementsliésaufaitqued’unepartcette
langueasesproblématiquespropres(entreautresonévolutionvers
unesortede«disparition»etlepoidsdelashoahquil’accompagne)
et d’une autre que je n’ai pas de relation « maternelle » au yiddish
(ce n’est ni ma langue ni ma culture d’origine).
137
1 - Partitions.........................................................................139
	 a - Conte de Chelm .................................................141
	 b - La vi a roide.......................................................147
2 - Recherches......................................................................153
	 a- Voyage en Pologne.............................................155
	
		* - préparation au voyage........................157
		 ** - carnet de voyage...............................161
	 b - Entretiens
	
		*- Brama Grodzka....................................165
		** - Adva..................................................171
Table des matières
139
1 - Partitions
141
Danscettevidéo, onn’entendd’abordmavoixquis’exprimedans
une langue non identifiable. Par la suite, la caméra se rapproche
progressivement. On découvre alors mon doigt qui déchiffre
un texte français de droite à gauche. L’alphabet latin est lu dans
le sens du yiddish ; la langue dans laquelle Conte de Chelm est
originellement écrit.
a - Conte de Chelm
(Vidéo performance, 2’10)
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience
La langue comme expérience

Mais conteúdo relacionado

Mais procurados

51 les registres_litteraires
51 les registres_litteraires51 les registres_litteraires
51 les registres_litteraires
salsoumi
 

Mais procurados (13)

Guigou les entretiens de puvis de chavannes
Guigou les entretiens de puvis de chavannesGuigou les entretiens de puvis de chavannes
Guigou les entretiens de puvis de chavannes
 
Complément du Bulletin PROF-EUROPE No 7, 2006
Complément du Bulletin PROF-EUROPE No 7, 2006Complément du Bulletin PROF-EUROPE No 7, 2006
Complément du Bulletin PROF-EUROPE No 7, 2006
 
Faire mes élèves retrouver le bohneur
Faire mes élèves retrouver le bohneurFaire mes élèves retrouver le bohneur
Faire mes élèves retrouver le bohneur
 
57 sonnets spiraux
57 sonnets spiraux57 sonnets spiraux
57 sonnets spiraux
 
Discours lamine s salma d'or 2017
Discours lamine s salma d'or 2017Discours lamine s salma d'or 2017
Discours lamine s salma d'or 2017
 
L´anthologie de l´atelier d´écriture 2014
L´anthologie de l´atelier d´écriture 2014L´anthologie de l´atelier d´écriture 2014
L´anthologie de l´atelier d´écriture 2014
 
Séléction du 1er Grand Prix Littéraire du Web
Séléction du 1er Grand Prix Littéraire du WebSéléction du 1er Grand Prix Littéraire du Web
Séléction du 1er Grand Prix Littéraire du Web
 
Rossel5
Rossel5Rossel5
Rossel5
 
Journal de Lou par Lou Reimer
Journal de Lou  par Lou ReimerJournal de Lou  par Lou Reimer
Journal de Lou par Lou Reimer
 
Francais5e source pdf-ll
Francais5e source pdf-llFrancais5e source pdf-ll
Francais5e source pdf-ll
 
Dictionnaire philosophie alchimique
Dictionnaire philosophie alchimiqueDictionnaire philosophie alchimique
Dictionnaire philosophie alchimique
 
51 les registres_litteraires
51 les registres_litteraires51 les registres_litteraires
51 les registres_litteraires
 
Geisha - Arthur Golden
Geisha - Arthur GoldenGeisha - Arthur Golden
Geisha - Arthur Golden
 

Destaque

Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
SOCIEDAD JULIO GARAVITO
 
La paz tecnologica
La paz tecnologicaLa paz tecnologica
La paz tecnologica
florinica
 
Tarea de noticias
Tarea de noticiasTarea de noticias
Tarea de noticias
katherinegs
 
Palencia en verde
Palencia en verdePalencia en verde
Palencia en verde
Jesús Amor
 
Macarena y Claudia 3ºD
Macarena y Claudia 3ºDMacarena y Claudia 3ºD
Macarena y Claudia 3ºD
tecnologiaD
 

Destaque (20)

Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
Resumen de la Charla: La Sicología de la Exploración Espacial-Sábado 9 de Oct...
 
Trio Domine
Trio DomineTrio Domine
Trio Domine
 
La paz tecnologica
La paz tecnologicaLa paz tecnologica
La paz tecnologica
 
Tarea de noticias
Tarea de noticiasTarea de noticias
Tarea de noticias
 
Adif estaciones
Adif estacionesAdif estaciones
Adif estaciones
 
Trasplantes y medios de comunicacion nov 09
Trasplantes y medios de comunicacion nov 09Trasplantes y medios de comunicacion nov 09
Trasplantes y medios de comunicacion nov 09
 
♥♥♥
♥♥♥♥♥♥
♥♥♥
 
Pueden los emprendedores_salvar_el_mundo-salas-i-ppt
Pueden los emprendedores_salvar_el_mundo-salas-i-pptPueden los emprendedores_salvar_el_mundo-salas-i-ppt
Pueden los emprendedores_salvar_el_mundo-salas-i-ppt
 
HumanTalk - Commentaires, je t'aime un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout
HumanTalk - Commentaires, je t'aime un peu, beaucoup, à la folie, pas du toutHumanTalk - Commentaires, je t'aime un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout
HumanTalk - Commentaires, je t'aime un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout
 
Palencia en verde
Palencia en verdePalencia en verde
Palencia en verde
 
Comercio electronico
Comercio electronicoComercio electronico
Comercio electronico
 
Presentación de avances ConectaDEL 2012
Presentación de avances ConectaDEL 2012Presentación de avances ConectaDEL 2012
Presentación de avances ConectaDEL 2012
 
Programa de Buenas Practicas de Fabricación
Programa de Buenas Practicas de FabricaciónPrograma de Buenas Practicas de Fabricación
Programa de Buenas Practicas de Fabricación
 
Os nosos contos
Os nosos contosOs nosos contos
Os nosos contos
 
Mariana
MarianaMariana
Mariana
 
Mariana
MarianaMariana
Mariana
 
Travailler ensemble autour du PLU intercommunal : les préalables à la démarche
Travailler ensemble autour du PLU intercommunal : les préalables à la démarcheTravailler ensemble autour du PLU intercommunal : les préalables à la démarche
Travailler ensemble autour du PLU intercommunal : les préalables à la démarche
 
Construcción de la asociatividad y cooperación empresarial entre los pequeños...
Construcción de la asociatividad y cooperación empresarial entre los pequeños...Construcción de la asociatividad y cooperación empresarial entre los pequeños...
Construcción de la asociatividad y cooperación empresarial entre los pequeños...
 
Rene manual
Rene manualRene manual
Rene manual
 
Macarena y Claudia 3ºD
Macarena y Claudia 3ºDMacarena y Claudia 3ºD
Macarena y Claudia 3ºD
 

Semelhante a La langue comme expérience

34001797 les-cahiers-pour-la-folie
34001797 les-cahiers-pour-la-folie34001797 les-cahiers-pour-la-folie
34001797 les-cahiers-pour-la-folie
schizophrenie
 
Atelier d'apprentissage de soi
Atelier d'apprentissage de soiAtelier d'apprentissage de soi
Atelier d'apprentissage de soi
creativessence
 
Basesappliqueesallemand
BasesappliqueesallemandBasesappliqueesallemand
Basesappliqueesallemand
badr zaimi
 
Biographie langagiere evt1
Biographie langagiere evt1Biographie langagiere evt1
Biographie langagiere evt1
Aminatice
 
L'adolescence est elle pathologique
L'adolescence est elle  pathologiqueL'adolescence est elle  pathologique
L'adolescence est elle pathologique
AmineBenjelloun
 

Semelhante a La langue comme expérience (20)

Guide présenter efficacement en public
Guide présenter efficacement en publicGuide présenter efficacement en public
Guide présenter efficacement en public
 
Estructura y letras de la sinfonia de la vida
Estructura y letras de la sinfonia de la vidaEstructura y letras de la sinfonia de la vida
Estructura y letras de la sinfonia de la vida
 
11 fr b
11 fr b11 fr b
11 fr b
 
11 fr b
11 fr b11 fr b
11 fr b
 
Conférence Enseignants et élèves : à la recherche d’un monde commun
Conférence Enseignants et élèves : à la recherche d’un monde commun Conférence Enseignants et élèves : à la recherche d’un monde commun
Conférence Enseignants et élèves : à la recherche d’un monde commun
 
34001797 les-cahiers-pour-la-folie
34001797 les-cahiers-pour-la-folie34001797 les-cahiers-pour-la-folie
34001797 les-cahiers-pour-la-folie
 
Vincent jost juste pour te lire
Vincent jost juste pour te lireVincent jost juste pour te lire
Vincent jost juste pour te lire
 
2 tid conception-projet-cours4-présenter
2 tid conception-projet-cours4-présenter2 tid conception-projet-cours4-présenter
2 tid conception-projet-cours4-présenter
 
Plumes mêlées, une aventure epistolaire.
Plumes mêlées, une aventure epistolaire. Plumes mêlées, une aventure epistolaire.
Plumes mêlées, une aventure epistolaire.
 
Pierre St Vincent Spasmotsfolies ch1 à 6 mars 2015
Pierre St Vincent Spasmotsfolies ch1 à 6 mars 2015Pierre St Vincent Spasmotsfolies ch1 à 6 mars 2015
Pierre St Vincent Spasmotsfolies ch1 à 6 mars 2015
 
Atelier d'apprentissage de soi
Atelier d'apprentissage de soiAtelier d'apprentissage de soi
Atelier d'apprentissage de soi
 
Basesappliqueesallemand (2)
Basesappliqueesallemand (2)Basesappliqueesallemand (2)
Basesappliqueesallemand (2)
 
Basesappliqueesallemand
BasesappliqueesallemandBasesappliqueesallemand
Basesappliqueesallemand
 
Le petit nicois_3_4
Le petit nicois_3_4Le petit nicois_3_4
Le petit nicois_3_4
 
Advaïta
AdvaïtaAdvaïta
Advaïta
 
Journal du lecteur
Journal du lecteurJournal du lecteur
Journal du lecteur
 
Biographie langagiere evt1
Biographie langagiere evt1Biographie langagiere evt1
Biographie langagiere evt1
 
L'adolescence est elle pathologique
L'adolescence est elle  pathologiqueL'adolescence est elle  pathologique
L'adolescence est elle pathologique
 
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
 
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
CE N’EST PLUS DU CHINOIS !
 

Mais de violainelochu (6)

T(h)race
T(h)raceT(h)race
T(h)race
 
Interview philippe marcelé
Interview philippe marcelé Interview philippe marcelé
Interview philippe marcelé
 
Partition fabula
Partition fabulaPartition fabula
Partition fabula
 
Portfolio
PortfolioPortfolio
Portfolio
 
Book 6 2013
Book 6 2013Book 6 2013
Book 6 2013
 
Book 6 2013 minimum
Book 6 2013 minimumBook 6 2013 minimum
Book 6 2013 minimum
 

La langue comme expérience

  • 2.
  • 3. Ecole nationale supérieure d’arts Paris-Cergy DNSEP2012 la langue comme expérience Violaine Lochu sous la direction de Federico Nicolao
  • 4.
  • 5. « Elargir l’art ? Non prends plutôt l’art avec toi pour aller dans la voie qui est plus étroitement la tienne. Et dégage-toi.» Paul Celan
  • 6.
  • 7. 7 Ce mémoire est constitué de cinq parties. Chacune d’entre elles regroupe une/des partitions de performances. Ce sont des textes quej’aiécritsetquej’aiensuiteperformés/joués.Chaquepartition estaccompagnéedenotesquisontsouventdesréflexionsautourde la pièce. Cependant la difficulté à réaliser ce mémoire ne se situe pastellementici.Ilyatouteunepartieinvisibleetsouterraineque tu ne pourras lire car je ne l’ai pas écrite.Tu ne devineras que sans doute peu le travail de chercheur, de lecteur, d’écriv(eur) qui m’a tant nourrie. Ces 8 derniers mois ont foisonné de tentatives pour décortiquercequejefais,saisirlesficellesdunœuddemapratique. Essayerdelacomprendre,ladémêler,del’ouvriraumondeetdela confronteràundomaineparticulier.Etpuisàchaqueessai,latâche s’agrandissait.Lesujet,ouplutôtlessujets,quemontravailaborde, passaient leur temps à m’échapper. Chacun d’entre eux était si vaste, soulevait à lui seul tant de questions, tant de problèmes… Jemesentaisàlafoisdépasséeparl’étenduedelatâcheetàlafois si excitée d’en faire l’expérience. L’une des difficultés majeures était celle d’écrire. Là où mon travail avait su aborder les choses avec simplicité instinctive, mon écriture se faisait compliquée et incontrôlée.Elleétaitsouventencrise,débordaitdetouslescôtés, s’emballait d’enthousiasme angoissé. Elle s’étouffait, s’avalait elle-même et en cela se faisait l’écho d’une difficulté à dire et à respirer qui me préoccupe artistiquement. introduction
  • 8. 8 Comment écrire, situer ma pratique dans un espace plus large  ? Comment trouver ma voix au milieu d’une discussion depuis longtemps amorcée ? Comment te décrire tout ce fertile fatras d’interrogations mentales ? Comment être sûre que ce que je te décrirai ne changera pas encore ? Et puis au fond, pourquoi fixer l’insaisissable ? Pour cela, pour problématiser mon travail, j’ai d’abord tenté d’adopter une méthode rigoureuse et scientifique, à l’universitaire. J’ai essayé d’isoler, d’organiser, de dépiécer ce bazar. Mais cette autre manière d’aborder les choses, de les connaîtrem’étaitéloignée.Jenemesentaispasàmaplace,comme contrainte à un mode d’écriture académique qui ne me convenait pas. Ce moi, ou plutôt cet autre universitaire, n’était pas assez solide et libre pour répondre à mes difficultés. Bon voilà, je le confie, je le dis, je pose le problème (ou plutôt les centaines de problèmes). Je t’expose les sujets que j’ai croisés et tu te rendras compte par toi-même de la complexité : Bref le langage, la parole, la langue, l’identité, le territoire, la nationalité. Chacun de ces sujets en contient des milliers en lui- même.Chacund’euxafaittantd’adeptesetdemortsquerienque leur nomination nous effraie. Et puis moi, j’arrive, je me mets à lire,desdizainesd’ouvrages,j’espèrepouvoirdirequelquechose, encore. J’espère trouver ma place, comprendre où je me situe, trouver ma voix, mon cri. Finalement, j’ose à peine chuchoter. Je marche sur la pointe des pieds, sur des œufs prêts à exploser. Je languematernelle,languevernaculaire,langued’origine, langue interdite, langue étrangère, langue exotique, langue minoritaire, langue adoptée, langue sociale, langue pensée, langue balbutiante, langue chantée, langue organe, langue intime, langue incommunicable, languemajoritaire,languedialectale,langueimaginaire, langueidentitaire,languenationale,languenatale,langue amante, langue morte, langue mythique, langue véhiculaire, langue intersistes, langue limite, langue bégayante...
  • 9. 9 rêve d’eux la nuit, Saussure, Deleuze, Derrida, Bailly, Lacoue- Labarthe,Amery... L’ignorance ingénue de ces premiers pas a été maforcecesderniersmois.CommeK.dansLechâteau,nesachant rien, j’ose demander l’impossible : J’yaidédiébeaucoupdetemps.Leschosesmerésistantj’aimême tenté de défoncer les murs. Je courais à perdre haleine vers un horizon toujours plus lointain. Je prenais sans doute du plaisir dansledéfi,jejouissaisdepousserplusloinleslimites.Jemontais encoreetencoreverslesommetquin’enfinissaitpasdesedérober. Je me rassurais à transpirer, à endurer. Cette énergie incontrôlée c’est la même dont j’use pour réaliser mes pièces. Je joue avec les prouesses, m’angoisse de les dépasser. C’est ainsi que j’ai voulu parler l’anglais comme un américain (Jeff Perkins) en 10 jours, ainsi que j’ai voulu monter toute une théorie sur une Vierge de l’humilité du quatrocento italien en faisant l’économie de son contexte3 ,ainsiquej’auraisvouluprendrepositionsurlaquestion de la langue... Mais voilà à un moment donné, je m’épuise, et la tempête arrive. Je suffoque, je dois m’arrêter avec toutes les difficultés que cela comporte. Je me replie, marmonne dans mon coin et pleure d’impatience. Et puis je m’endors d’un sommeil « Je suis sans doute ignorant, en tous cas la vérité demeure et c’est triste pour moi, mais cela a tout de même aussi l’avantage que l’ignorant a plus d’audace ; c’est pourquoi j’ai envie d’assumer encore un moment d’ignorance et ses conséquences fâcheuses, tant que mes forces y suffiront2 . » 2 Kafka, Le château, Paris, Flammarion, 1984, p 83 3 LaViergedel’humilitéenquestionaétéréalisévers1423parGentiledaFabriano. Elleacecideparticulierquedescalligraphiesarabessontinscritesdanssonauréole. On peut y lire le shahada : « la ilaha illa allah » « il n’y a pas de Dieu queAllah  » c’est-à-dire la profession de foi musulmane. Ceci m’a dans un premier temps surprise (bien que les échanges commerciaux et culturels féconds entre Florence etl’Egypte,expliquentquedesartistesaientpufacilementrecopier,s’influencerde calligraphies kufiques à partir de miniatures, tissus…). Puis m’a ensuite fascinée, j’yvoyaisl’échoàtantdeproblématiquesliéesàmontravail;l’attraitverslabeauté de l’étranger, son prélévement puis sa mise en situation dans un autre contexte, sa porosité constante vers un ailleurs, son ado(a)ption…
  • 10. 10 profond, d’oubli, comme apaisée par l’endorphine cérébrale. Le réveil est long et difficile mais vous êtes là.Vous me dites qu’il ne faut pas être déçue : Et puis, au final j’y ai gagné à ma manière, je le verrai avec le temps. A la base, tu me le rappelles, je ne suis pas écrivain, je suisartiste(vraiment?).Toutecetteaventuredelectureetd’effort d’écriture nourriront la suite. La difficulté n’est pas une sanction. Maintenant,aprèsavoirfaitl’étatdesterritoirestraversés,jepeux rouvrir les portes. En chant, j’ai vécu le même type d’expérience. J’ai voulu chanter comme les femmes des Pouilles, cette voix si puissante du sud de l’Italie. Je suis allée là bas, j’en ai rencontrées et j’ai ingurgité. En imitant sans connaissance la beauté de leur timbre je me suis retrouvée aphone. C’est souvent la pire des choses que d’être muet... Je suis revenue en France et j’ai cherché à comprendre. Professeur de chant, orthophoniste, phoniatre, tous étaient d’accord. En chœur ils me le disaient : « respire!». Maintenant, J’essaie de trouver une position d’ancrage pour pouvoir respirer. Faire en sorte que mon souffle devienne ma voix sans douleur. Chercher les résonnances au plus profond de soi. Revenir à la base de la matière charnelle, se masturber vocalement. Respirer, émettre. Tout simplement. Sans épuisement. « Vous êtes si jeune, si neuf devant les choses, que je voudraisvousprier,autantquejesaislefaire,d’êtrepatient en face de tout ce qui n’est pas résolu dans votre cœur. Efforcezvousd’aimervosquestionsellesmêmes,chacune commeunepiècequivousestfermée,commeunlivreécrit dansunelangueétrangère(…)Nevivezpourl’instantque dans vos questions. Peut être simplement en les vivant, finirez vous par entrer, insensiblement, un jour, dans les réponses4 .» 4 Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, in Œuvre I prose, Paris, Le seuil, 1966, p26
  • 11. 11 Ce retour aux bases, aux sources, ce début de descente, cette recherche d’ancrage et de position a eu lieu dans ma recherche d’écriture du mémoire. C’est vrai, je te l’avoue, je ne suis pas toujours satisfaite du résultat que tu as entre les mains, et puis qui l’est entre nous? On est souvent énervés à l’idée qu’on ne pourra pasdireexactementcequel’onvoudrait,frustrésdenepasraconter touteslesbeautésquel’onacroisées.Jesuisunpeuinquièteparce quetutediraspeutêtre:Quelmanquederecul!Quellefumisterie ! Quel romantisme à deux balles ! Quelle envolée lyrique ! Et puis merde,jem’enfousaufinal.Jepensequetupeuxcomprendre,que quiquonque a recherché, a fait l’effort d’aller au bout saura être indulgent à mon égard (ce n’est pas non plus ça que je demande, entendons nous bien). Bref cette aventure du « mémoire » sans être encore effective en soi, n’ayant pas donné le résultat auquel je m’attendais, m’a cependantaccompagnéeceshuitderniersmois.Jen’aipasencore le recul nécessaire pour te dire ce qui adviendra par la suite. Ce que je peux te dire c’est qu’elle m’a pris beaucoup d’énergie. Je n’ai pas autant produit que d’habitude. Je me suis souvent sentie comme un citron pressé auquel on demandait encore du jus. En faisantcet effort de déconstruction etde recentrage,je ne pouvais plus vraiment être dans le surajout. Je cherchais une position non dans l’excitation de l’envol, mais une position terrestre qui me permette de tenir debout, d’être suffisamment charpentée pour affrontertouslesvents.Jenelesuistoujourspas,occupéeàprendre soin de mon principal défaut  : celui de courir à en perdre haleine versdesdestinéesdifficilesd’accès.Principaldéfautquiestaussi une qualité. Mais j’essaye de ne plus le subir, de savoir qu’il est là, d’être à l’aise avec. C’est comme les chanteurs qui font de leur défautvocalleurempreintepersonnelle.Cetteaventure-mémoire a aussi et surtout apporté de la matière à ma pratique, parfois de la clarification par les mots. Elle m’a permis en me confrontant à d’autres voix, de me situer et d’assumer d’autant plus mes balbutiements interlinguistiques...
  • 12.
  • 14.
  • 15. 15 1 - Stranieri ovunque....................................................13 2 - Notes.........................................................................29 Les textes de Claire Fontaine.....................................30 Réflexions sur la langue italiannique.........................32 Notes sur l’interlangue..............................................34 Inspiration.................................................................35 Partition deTu Bella/Toi Belle...................................36 Table des matières
  • 16.
  • 18.
  • 19. 19 Gris Vert Orange Rouge Bleu néologismes ou barbarismes, invention de nouveaux mots italianiques. Exemple : parlar qui vient de parlare à la place de parler. traduction littérale d’expressions italiennes. Exemple: ça se retrouve de front qui vientde ci si ritrova di fronte à la place de on se trouve face à. emprunt des mots ou expressions italiennes employés tels quels, auxquels la langue française attribue un sens qui n’est forcement celui de la langue italienne. Exemple : le terme opera sera utilisé selon son sens italien originel (œuvre) et non pas selon le sens strict de l’italianisme français (qui désigne un genre de récital hanté ou le lieu où il est représenté). accentuation italienne de termes français. Exemple : société (avec accent sur le é final) qui vient de sociétà. ajouts de petites locutions propres à la langue italienne. Exemple : les ses relations vient de le sue relazione. Consignes de lecture
  • 20. 20 Bonjour à toutes et à tous, Jevaisessayeraujourd’huid’exposerlesgrandstraitsdelapensée del’artistecollectiveClaireFontaineafindemieuxsaisirlesenjeux de l’œuvre Stranieri ovunque acquise par la fondation Kadist. Cette dernière, réalisée en 2005, se présente sous la forme d’une phraseécriteaunéonquimesure100cmdelongueur,10delargeur et 4,5 d’épaisseur. Les mots « stranieri ovunque » sont écrits en majuscule dans une police relativement classique. Cette œuvre appartient à une série déclinant les termes « étrangers partout » en plusieurs langues. Qu’est ce que signifie faire de l’art aujourd’hui ? Y-a-t-il encore unsensàpenserproduiredesformesnouvelles?Quellesrelations l’artisteentretient-ilaveclesformesdepouvoir?Tellessont,entre autres,lesgrandesquestionsauxquelless’attaqueClaireFontaine. Nous rappellerons dans un premier temps qui est Claire Fontaine et les raisons de sa fondation. Après avoir présenté le concept propreàl’artistecollective,àsavoir«l’artistereadymade»,nous verrons en quoi Stranieri ovunque est une œuvre emblématique de la pratique de Claire Fontaine. Pour cela je m’appuierai sur les textes écrits par l’artiste collective, tels que :Artistes ready made et grève humaine. Quelques prècisions, Document à l’usage de France3etNotebiographiqueainsiquesuruneinterviewréalisée parJohnKelsey.Touscesdocumentssontdisponiblessursonsite1 . Claire Fontaine est une artiste collective formée en 2004, vivant à Paris et qui tire son nom d’une marque populaire de cahiers scolastiques. Le fait de se déclarer « artiste collective » crée une ambigüité notevole, qui lui permet de ne pas rentrer dans les catégoriesconnuestelsque«collectifd’artiste»ou«mouvement ». L’idée de se définir en tant que telle provient entre autre du fait qu’aujourd’hui il est impossible de se penser autosuffichient ; l’artiste a toujours besoin d’autres personnes qui subalpatanent lasous-traitancedecertainsaspectsdelapièce,l’organisationdes évènements ou encore les rapports à l’argent. De plus, selon elle/ 1 http://www.clairefontaine.ws/index.html
  • 21. 21 eux, le lavore manuel ne peut être séparé du travail intellectuel, l’un ne prévaut pas sur l’autre. Pour ce motif, elle/ils insiste(nt) surlefaitqueClaireFontainen’estcomposéeque«d’assistants », son centre de direction demeurant vide. Il est plus judicieux de mettresousunpseudonymeletravailcollectifdeClaireFontaine ; lapratiqueartistiquepersonnelledesmembresétantdifférenteles uns des autres tant sur le piane qualitatif que quantitatif. La sensation d’impotence politique, d’une manquanse de liberté professionnelle et personnelle et d’une débolesse à résister au système sont les éléments qui ont scaténé la naissance de Claire Fontaine. Cette dernière est alors pensée comme un espace d’immédiatetédanslequelonarrêteraitdequiaquéreret«d’évaluer le pour et le contre » pour agir directement. Les modes d’actions sont pensés autour d’un langage formel condivisé et avec comme objectif de pratiquer, de communiquer, de sodisfare des besoins simples. Bien que naissant d’un certain rifiute du fonctionnement de notre société, que l’on peut avertir dans des propos tels que « Nous nous scontrons tous les jours contre l’inferne de la pauvreté, contre la brutalité de l’espace quadrillé des sbires, les policiotés, les vigiles privatés de toute espèce. (…) Nous sommes dévastés par la violence des corps-fattes-merci qui sont l’autre face des corps sans documents expulsés et des corps prigionniers ammaquiés dans l’unique patumière de la société française où la récolte différenciée n’est pas obligatoire2 .». Claire fontaine ne se revendiquepascommepratiquantunartrévolutionnaire,ouencore comme étant exemplaire. Elle se dit elle-même « inquinitée » par le système « Nos corps sont les ricétacoles d’idées collectives et de problèmes politiques qui nous traversent3 .». Elle a pleinement conscience de ne pas être virgine, de faire partie d’une société, d’une organisation sociale. Elle ne cherche donc pas à s’astrare d’un fonctionnement, mais plutôt d’avoir constatemment en tête sa propre contradiction. Elle affirme à ce propos: «Je ne suis pas sicurequelatentativedesetireràl’extérieurdescontradictionsau 2 Claire Fontaine, Document à l’usage de France 3, op.cit. 3 ibidem
  • 22. 22 moyend’unepositiondevérginitédonnesesfruits.ClaireFontaine ne croit pas, à l’exemplarité et aux relations politiques et sociales quiendérivent4 .».L’artn’auraitpasunemissionrévolutionnaire, ne chercherait pas à interromper l’ordine des choses. La pratique artistique serait plutôt pensée comme un moyen d’expression d’éléments qui seraient autrement affogatés et englobés du flux dumonde.L’artauraitenprimedetoutunrôled’accompagnateur d’unemanifestationhumaineplusglobale:«l’artestunemanière derestersvégliésjusqu’àcequecesmomentsseproduisent.Nous les accompagnons là où ils se manifestent, nous n’avons pas l’ambitsion de les produire5 .». Unetelleconceptionduruoledel’artetdel’artistenepeutcondurer Claire Fontaine qu’à être sceptique aux confrons du monde de l’art contemporain qui le circonde. Seconde elle, le monde de l’art, tout comme le reste de la nostre société, serait costitué de subjectivités standardisées. En effet les artistes vivant seconde les mêmes critères en seraient arrivés se somiglier tous. Cela dériverait en partie du fait qu’il n’existerait plus ni moments ni luogues pour coltiver sa propre exception. Les « laboratoires de subjectivité  » tels que les grandes métropoles occidentales ou les maisons occupées seraient de toutes parts contrôlés et répréssés de tous points de vue par le potère en charge. L’artiste croisserait alors dans une ambiance définie, il appartiendrait à « cette masse degensproductrice/consommatricequisespotentd’inauguration en inauguration dans les grandes capitales, de résidence en résidence, de fiera en biennales6 .». Formatatés par les scuoles d’art, les mercates, les galerie, la stampe, les artistes auraient les mêmes goustes, les mêmes vestitement, les mêmes rifériments bien qu’ils habitent à une millaine de kilomètres de distance. Etant confrontatés aux stesses critères de jugement, ayant accès aux stesses mezzo techniches ils se trouvent donc de front à un processus analogue de stimulation de créativité. Ca s’arriverait alors à une «crise du caractère singolaire des productions ». 4 Claire Fontaine, Claire Fontaine interviewée par John Kelsey, op.cit, p2 5 ibidem 6 Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions, op.cit., p3
  • 23. 23 Comme l’imagine Foucault, si l’ont ne gardait des opéras que les titolesenannulantlenomdel’auteur,onferaitbeaucoupdefatigue à remonter à la paternité du lavore. De conséquence, dans de telles conditsions de production de la sogetivité artistique, aldelà d’une crise de la productsion, ça se retrouve de front à une crise de la singolarité de l’auteur. Pour Claire fontaine on ne peut donc parler aujourd’hui que d’artistes ready-made, d’altronde elle-même s’auto-diquiare comme ça : «  l’artiste elle-même est l’équivalent subjectif d’un orinale ou d’une scatole Brillo, aussi en dehors de lieu, privatée de sa valeur d’use et intercambiale comme les produits qu’elle crée7 .» Claire Fontaine ne mire donc pas à créare des formes nuoves et originales.Deconséquence,moultdelessesopérassontcostituées d’imaginesoudetestespréexistants.Parésiempedanslediptyque We are really made artist et we are all bad consumers, l’artiste a dépeint ces phrases sur les Marylins de Warhol. Dans le cas de Stranieri ovunuque, la phrase scrittée est le nom d’un collective anarquiste de Torino qui combat le racisme dans les ses diverses manifestatsions.Danscelal’artistecollectivediquiarepratiquare de l’expropriationisme plutôt que de l’appropriationisme : «  Je cherche (…) à créare une condivisense, une accessibilité, un réinvestissement politique de le ce que je produque. Je n’attribusque rien à moi-stesse en tant que sujette. Je ne rube que pour redistribuir8 . ». Ce qui est richercaté n’est pas tant le lavore prodotté mais plutôt l’effet qu’il va émaner : « ce qu’on chiame le nostre«lavore»n’aenquantquetelaucunintérêt,cequecompte est ce qui attraverse de lui et malgré lui se communique, c’est ça le valore concrète de ses contenus9 . ». L’œuvre Stranieri ovunque apostrophe, s’impose à l’attention à travers l’ambivalence, la polysémie innée de cette association de paroles qui en français signifique -étrangers partout-. Le mode 7 Claire Fontaine, Note biographique, op.cit 8 Claire Fontaine, Claire Fontaine interviewée par John Kelsey, op.cit, p5 9 Claire Fontaine, Document à l’usage de France 3, op.cit.
  • 24. 24 dans lequel l’opéra vient être présentée ne fait qu’amplifiquer cette ambigüité : espostée sous forme de néons sur une paroi négro, elle est coupée de dehors de le son conteste d’origine, ne seréféricheàriendepréchis.Lasatypographiesobrenelarendque d’autant plus neutrale, a-spatiale et atemporale. Claire Fontaine donne trois interprétations de cette opéra dans la sa intervue avec John Kelsey. Dans un prime temps ça pourrait se lire cette opéra comme si elle se riférissait à les phénomènes d’immigration et d’émigration, problèmes politiches moult actuels. D’altronde ces notions préoccupent un sac l’artiste collective qui a scritté le spectaculaire teste militant Etrangers partout. Les ses membres sembrent être eux-mêmes colpités diretament parce que certains d’euxsareberaientd’originestranière,étantallésviadeleurmaison « sans motifs particulièrs sinon celle de ne être plus à maison propre10 ». Puis la phrase persiste, nous interrogue nous-stesses ; si le stranière est ovunque n’est-ce pas en nous-stesse qu’il existe en prime luogue? N’avons-nous tous pas gia prouver une sensation de dépossetssion en respect à l’identité présuntée que nous raprésentons pour la société? Les principales cambes du potere par une série d’interventes nous marquent depuis la nascite, nous classifientsegondlenostresesse,lanostreorigine,lanostreclasse ect…ClaireFontaineconstate«lesnoscorpssontattraverséspar les rapports de potere et les nos divenirs orientatés des moyens attraversés lesquels nous nous opponiamons à le stesse potere ou nous en sposiamons les flux11 . ». L’opéra agiche donc en ce qu’elle produche une prèse de conchience en respect à soi- stesse. Elle interrompe le normal cours des choses, comporte une prèse de distantse qui nous trasforme en spetatores estériores de nous-stesses. Diventamons stranières à travers une sorte de soste, un interstice se scave entre l’ordine instituité et la notre appartenance à cet ultime. Chiara Fonte fait en mode que les ses opéras innesquinent ce phénomène d’éstranation (qu’elle diche ritrouvare chez Brecht). Parle de « prisme de le stranière » qui 10 Claire Fontaine, Note biographique, op.cit 11 Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions, op.cit., p1
  • 25. 25 nouspermettreberait d’afferareleslégameslogichesetpolitiches qui restannent pour la majore partie du tempo invisibiles ou pour le moins véssutés inconschiemment. L’espérience esthétique dève fare scattare un « spaesamente salutare » qui nous permette de vinchérer en lucidité. Chiara Fonte avichine les effets de cet «  art comme fonte, essendant un dispositive et non un luogue de réalisatsion de les affétivité vives12 » avec celles d’un schiopere. Cetteultimeraprésentemoinsundiretteàlaviolentsequ’undirette à se sostrare à celle que le donneur de lavore eserchite sur les ses impiégates. Est la fin de les relatsions qui sottometonent les uns à les altres. Fait perdère la familiarité avec la misère de le sfrutatement ordinare, rend éstragnier un phénomène quotidian et assimilité. Pouvons parlare de prochessus révolustionnare. Nonostante comment le fare perdurare dans le tempo? Comment créareunschiopèrevéramentradicalequiserebait unmezzo sans fine?ChiaraFontealorsimaginesonconcheptde«grèvehumaine  qu’elle définiche cosi : « Elle est piu dgénérale de le sciopère dgénéral et elle a pour sciope la transformatsion des relatsions sochiales informalles qui sont à la base de la dominatsion. Le caratèreradicaldecetypederivolteestqu’elleneconochepasde risultate réformiste de lequel elle saverait se sodisfare13 . ». Enultimeluogue,ChiareFontespièguequeStranieriovunque,piu que nous interrogare sur la nostre straniété, de provoquare queste phénomène de prèse de conchience, de «spaesamente salutare  », requiame ce le que Gilles Deleuze quiame « la lingue dans la lingue  ». Quinde je finisque par le citare ; “Uno stile, è riuscire a balbettare nella propria lingua (…) non essere balbuziente nelle sue parole, ma essere balbuziente nel linguaggio stesso. Essere come uno straniero nella sua propria lingua. (…) Dobbiamo essere bilingue anche in una sola lingua, dobbiamo avere una lingua minore all’interno della nostra lingua, dobbiamo fare della nostra lingua un utilizzo minore. Il multi-linguismo non è solo la possessione di più sistemi di cui 12 Claire Fontaine, Artistes ready made et grève humaine. Quelques précisions, op.cit., p8 13 Ibidem, p9
  • 26. 26 ognuno sarebbe omogeneo in se stesso; è prima la linea di fuga o di variazione che intacca ogni sistema impedendogli di essere omogeneo. Non parlare come un irlandese o rumeno in un’altra lingua che la propria ma al contrario, parlare la propria lingua come uno straniero14 ”. 14 Gilles Deleuze et Félix Guattari, Kafka, pour une littérature mineure, Paris, éditions de minuit, collection critique, 1975
  • 27.
  • 28.
  • 30. 30 Stranieri ovunque m’a dès le premier regard interrogée. Sa phrase résonnait en moi de sa polysémie et se faisait l’écho à de nombreuses sensations. L’œuvre m’a tout naturellement conduite aux textes du collectif Claire Fontaine. J’ai été frappée par son écriture : son engagement, sa teneur, ses références. Un contenu littéraire magnifique m’était donnée tel un readymade. Mon intervention consistait alors à injecter formellement ce que certains propos stipulaient. Les textes de Claire Fontaine
  • 31. 31 «JK:LapratiquedeClaireFontainesembletournerautourdumot «étranger »…peux tu dire quelque chose sur ce concept – si ça en est un – et comment il informe (infecte) tes activités et tactiques ? CF:Lasériedesnéonsenplusieurslangues«Etrangerspartout», par exemple, vient du nom d’un collectif d’anarchistes de Turin qui combat le racisme dans ses multiples manifestations. L’ambivalencedeleurnomm’afaitpenserauxeffetsqu’ilpourrait avoir s’il avait été matériellement déplacé dans des lieux et des contextes différents. Il est clair qu’aujourd’hui l’immigration et l’émigration sont plus des simples épiphénomènes liés à l’économie. Ce sont des expériences existentielles et perceptives à part entière. Quant à l’étrangeté que nous pouvons tous ressentir devant un mondeentièrementfabriquéetgouvernépardeslogiquesinsensées, elle peut certainement être un moteur pour la lutte. Dans l’idée de grève humaine il y a beaucoup de choses qui viennent de Brecht, decequ’ildécritcommeunprocessusde«devenirétranger  »aux rapports de pouvoir qui nous constituent, pour produire - dans cet intervalledufluxnormaldeschoses-desévénements.Jecroisaussi quedansnotretravaill’usagededifférenteslanguesn’estpasune coquetterie. Il vient du fait d’être des gens qui sont nés ailleurs et sont partis sans une raison particulière si ce n’est que celle de ne plusêtrechez-soi.Dansl’usaged’unelanguequin’estpaslasienne propre se manifestent des contradictions, des rapports de force, des violences, que la langue maternelle noie ou émousse. La lutte aveclesensdonnealorsformeàcequeDeleuzeetGuattaridisent trouver chez Kafka, la« langue étrangère dans la langue » et au fondc’estbiencelle-ciquelesartistescherchentàparler.Cen’est quedanscetteimpropriétéquigîtunepromessedecommunauté.1 » 1 Extrait de l’interview de Claire Fontaine par John Kelsey, http://www.claire- fontaine.ws/pdf/jk_interview.pdf
  • 32. 32 Le texte de la performance conférence sur l’œuvre Stranieri ovunque pourrait se lire comme jouant avec certaines difficultés liées au passage entre deux langues (ici entre le français qui est la langue source à l’italien représentant la langue cible). Traduire signifie : passer dans une langue à une autre en visant à l’équivalence entre l’énoncé original et l’énoncé obtenu. La traduction se déroule selon un processus que l’on pourrait diviser en trois étapes majeures. Dans un premier temps on cherche à comprendre,onassimilelesensvéhiculéparletexte.Parlasuiteon déverbalisec'est-à-direquel’onoublielesmots,lesphrasesdebase pour en conserver le sens. Enfin on en arrive à une réexpression ; une reformulation du vouloir dire dans la langue cible. Dans le cas de conférence sur l’œuvre Stranieri ovunque, on se situedansunesortedeflottemententrelesétapesdelatraduction. Les éléments stylistiques ne s’expriment dans aucune des deux langues,hésitententrelesdeux.Onpourraitrapprochercetypede langage d’une mauvaise traduction qu’aurait fait un italien d’un texte français. Cependant nous sommes bien loin de ce type de balbutiement,ouencored’unequelquonqueanalyselinguistique. Les « fautes » de traduction ne sont pas des erreurs dues à un manquedeconnaissance.Ellessontvoulues,ellessontpenséeset recherchéesselondesrèglesbienprécisesetgarantesd’unnouveau langage. Ce dernier pourrait se situer comme au carrefour entre l’italien et le français, le mix de ces deux langues en donnerait une troisième. Il se rapprocherait alors d’une langue poétique, ou plutôt d’un exercice stylistique proche du macaronisme qui est aussi une langue mêlée, hybride, mélangeant le latin à d’autres dialectesoulangues:«Macaronique:espècedepoèmeburlesque consistant en un mélange de mots de plusieurs langues, ainsi que Réflexion sur la langue italiannique
  • 33. 33 d’expressions de la langue vulgaire latinisée, ou de mots latins à terminaisons modernes. Caelius Rhodiginus fait observer que chez les italiens le mot macaroni signifie un homme d’un comiquegrossieretparcequecettepoésieestcomposéedemotsde diverseslanguesetd’expressionsextravagantes,ilsl’ontnommée macaronique1 . ». Cette définition manque pourtant de rigueur car « la vraie macaronée a ses règles 2 ». L’écrivain macaronique (Dante, Rabelais, Molière, Queneau…) prend le radicale de sa languematernelleetyajouteuneflexionlatine.Unetellepratique nécessiteuneprofondeconnaissancedulatin,elleoscilleentreun amusement et une occupation très sérieuse et difficile. Lalanguequejenommeitaliannique,dontj’usedanslaconférence- performance Stranieri ovunque, agit de la même manière. J’ai construitcettedernièreselondesrèglesstrictesquiprennenteffet au fur et à mesure. Ce qui peut paraître amusant pour celui qui n’a pas de notion de l’italien, semble logique à quelqu’un qui fait usagedesdeuxlangues.Lalangueitalianniqueestpraticablepour quiquonque a une pratique assidue du français et de l’italien car elle est une interlangue. 1 Définition issue de l’Encyclopédie britannique citée par Octave Delepierre in «  Macaroneana ou mélange de littératures macaroniques des différents peuples de l’Europe », Brighton, Ghancia, 1852, p 16 2 Octave Delepierre, ibidem, p10
  • 34. 34 27/12/10, Evron Voilà comment je décrirais l’apprentissage d’une langue… Les premiers temps, unique sensation sonore, on en- tend la langue de l’extérieur, une sorte de musique dans laquelle on n’attribue rien à rien. Au fur et à mesure l’oreille se dresse, découpe et décompose, repère les constituants, entend l’unité. Elle finit par quitter la forme pour le contenu. Alors commence la comparaison, comprendre l’étran- ger en le référant à son propre système, calquer mot pour mot, nommer, référer, contrôler ce qui reste en dehors. Puis, un jour la contamination a eu lieu sans qu’on ait eu vraiment le temps de s’en apercevoir. Le mot vient de lui-même, naturellement sans qu’on y ait réfléchi. Il a pris la même place qu’un autre. L’ex- pression et la syntaxe se logent dans la bouche sans préméditation. La langue jusque là étrangère ne l’est plus, elle vous sort d’entre les lèvres, comme ça. Quelque part cet apprentissage vous a fait prendre une sorte de recul face à votre propre langue. En apprendre une autre fait prendre conscience de phénomènes jusque là évidents. Le mot maternel ne sonne plus aussi bien qu’avant, on le réentend comme pour la première fois. Il n’y a plus l’inconsistance de l’habitude, sa matière vous revient en mémoire, ça bégaye de nouveau, ça gazouille comme les premiers jours. Malgré cette rupture avec la langue mère, l’autre, l’adoptive vous reste pourtant à jamais étrangère. L’impuissance d’y être admis totalement s’exprime dans l’accent traitre qui démasque. Sensation d’im- posture constante ? C’est alors qu’arrive la langue mêlée, l’interlan- gage. Un lien, enfin entre le couple qui s’entre- choque. Note d’insomnie sur l’interlangue
  • 35. 35 C.F est un collectif qui vis à Paris fondée dans le 2004. Après avoir pris son nom de une mark des caiers scolastiques, C.F as définit soi même un artist ready made et ell a commencée à élaboréer une versions d’art neo conceptuelle qui souventes est symilaire aux travaux de autres gens. Ell’utilisés du neon, les vidéos, la sculpture, la péinture et l’expression écrit, son travaux peux être descript comment une interpellation « in pro- gress » sur l’impotence politique et le cris de singoularitée que aparement caractérizés l’art de notre temps. Mais si l’artiste même est l’équiva- lent subjectif de une toilette ou de boite brillo autrement en dehors de lieux decontextualizée de son valéur d’utilizarion et interchangeable commént les produites qui fabriqués soi mêmes, sert tojours le possibilitée d’un grêve humaine. A l’âge de deux ans CF utilizes la freshness et la geunesse pour transformer in singolaritée chaques teroristés esistentielle en recherce d’emancipa- tion subjective. Elle grandis entrés les rouines de la fonction de l’autor en essayent avec des métodes collectif de productions, détournement et avec la création des différentés excamotagée pour la parta- ger de la propriété primat e de l’esprit intellec- tuel. Inspiration (Nota biografica de Claire Fontaine donnée à traduire en français à un ami italien.)
  • 36. 36 CetexteestlapartitiondelaperformanceTubella/Toibellependant laquelleestdiffuséunenregistrementd’unchantpopulaireitalien des Pouilles dont je viens chuchoter la traduction au micro. Au départ le chuchotement est inaudible puis au fur et à mesure de la performance le volume du chant italien s’amoindrit jusqu’à ce que l’on n’entende plus que sa traduction française. L’italien et le français se rejettent et se marient, cafouillent et s’affrontent dans lecreuxdel’oreille,donnentnaissanceàunedoubleécoute,àune langue hésitante cousine de la langue italiannique. Partition de Tu bella/Toi belle
  • 37. Tu bella calu tieni lu piettu tunu Num sacciu ci so minne o so cutugne Stateve citti, stave en silenzio ca chiu ve le sentite lu miu cantari Bella lu mare, bella la marina bella la figlia de lu marinaru Tu bella tra gli belli e tu bella sei e tra gli belli la parma porti O rondine ci rondinu lu mare Ferma quannu ti dicu o doï paroli Tu bella calu tieni lu piettu tunu Num sacciu ci so minne o so cutugne Stateve citti, stave en silenzio ca chiu ve le sentite lu miu cantari Toi ma belle tu as les pectoraux bien tendus on sait pas si c’est des seins ou des coins Restez en silence restez silencieux comme ça vous l’entendez plus mon chant Belle est la mer, belle est la marine Belle est la fille du marin Toi entre toutes les belles et toi belle tu es et entre tous les beaux la parme tu portes O petite ronde ô ronde de la mer Arrête quand je te dis ô deux paroles Toi ma belle tu as les pectoraux bien tendus on sait pas si c’est des seins ou des coins Restez en silence restez silencieux comme ça vous l’entendez plus mon chant Tu bella/Toi belle
  • 38.
  • 39. 39 II LSMM langue des signes moniale musicale
  • 40.
  • 41. 41 I - LSMM......................................................................43 Psaume 90.................................................................48 SalveRegina..............................................................60 II - Note d’intention.....................................................77 TABLE DES MATIERES
  • 42.
  • 43. 43 Lestextesquisuiventsontlespartitions-traductionsdedeuxchants cisterciens latins (Psaume 90 et Salve regina misericordiae) en langue des signes moniales. Je les ai performés dans la salle des chapitres de l’abbaye de Maubuisson. Le premier, étant de nature rythmique,étaittraduitautempodelapulsationd’unmétronome. Le second, de caractère plus mélodique, était accompagné de la diffusion d’une partition qui retraçait le parcours vocal du chant d’origine1 . 1 Pour plus d’information vous pouvez consulter la note d’intention p 79 1 - LSMM (langue des signes moniales musicale) (Performance, 6 min, réalisée le 13/05/11 à l’abbaye de Maubuisson)
  • 44.
  • 45. 45 Consignes de lecture MAJUSCULE gris italique I Gris Bleu Orange traduction du chant en LSM écrite texte latin du chant repères de pulsation Dictionnairedelalanguedessignesfrançaise d’autrefois, le langage de la physionomie et du geste mis à la portée de tous, abbé Louis- Marie Lambert, présenté parYves Delaporte, collectionréférencesdel’ethnologie,éditions du CTHS, Paris, 2005. Geste des moines, regard des sourds, Aude deSaint-Loup,YvesDelaporte,MarcRenard, Siloë, Mayenne, 1997 www.sematos.eu/lsf.html La suite est la description du geste à accomplir pour traduire un terme. Les couleurs des mots indiquent l’ouvrage dans lequel je les ai trouvés :
  • 46. CELUI DEMEURE SOUS HAUT Qui habitat in adiutorio Altissimi I I I I I I DANS PROTECTION CIEL DEMEURE In protectione dei caeli commerabitur I I I I I I DIRE MAITRE SOUTIEN MIEN ET REFUGE Dicet domino susceptor meus es tu et refugium I I I I I I I DIEU MIEN ESPERANCE EN LUI Deus meus sperabo in eum I I I I PARCE QUE DELIVRER MOI LACET CHASSE Quoniam ipse liberavit me de laqueo venantium I I I I I I ET PAROLE TROUBLE Et a verbo aspero I I I psaume 90
  • 47. EPAULES OMBRE COUVRIR Scapulis suis ombubrabit tibi I I I I I ET SOUS AILES ESPERANCE Et sub pennis euis sperabis I I I I BOUCLIER ENTOURER VERITE TOI Scuto circumbabite veritas eius I I I I I NON CRAINDRE PEUR NUIT Non timebis a timore nocturno I I I I I FLECHE VOLER JOUR A sagitta volante in die I I I I I NON CHEMIN NUIT A negotio perabulante in tenebris I I I I I NON CHUTE DEMONS MIDI Ab incursu et daemonio meridiano I I I I I
  • 48. TOMBER A COTE MILLE Cadent a latere tuo mille I I I I ET DIX MILLE DROITE TA Et decem milla a dextris tuis I I I I I A TOI ENNEMI NON APPROCHER Ad te autem non appropiquabit I I I I SUFFIT YEUX TES REGARDER Verutamen occulis tuis considerabis I I I I I I ET PUNIR PECHE VOIR Et retributionem peccatorum videbis I I I I I
  • 49. 49 1- Qui celui : un et vous Un s’indique par le doigt levé. Vous avec le V dactyl tracer un demi-cercle devant soi. 2 - Habitat habiter : maison-coucher maison avec les deux mains en dos d’âne exprimer la toiture. coucher poser la main gauche sur la main droite étendue. 3 - In sous on passe la main sous quelque chose. 4 - Altissimi haut élever la main forte. 1 - Protectione protection étendre devant soi les 2 bras comme sur quelqu’un qu’on protège 2 - Dei Dieu former un trinagle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. 3 - Caeli ciel demi cercle vers la voute des cieux. 4 - Comemorabitur reposer croiser les doigts puis croiser les bras sur le buste. QUI1 HABITAT2 IN3 ADIUTORIO4 ALTISSIMI5 IN1 PROTECTIONE2 DEI3 CAELI4 COMEMORABITUR5
  • 50. 50 1 - Dicet dire placer index sur la bouche et le diriger vers la personne à qui on dit. 2 - Domino maître amener la m.d par un mouvement circulaire comme sur la tête de quelqu’un placé en face. 3 - Susceptor soutien : aider. aider appuyer l’avant du bras gauche sur la main droite qui le soutient. 4 - Meus mon indiquer sur soi même avec la main sur la poitrine. 5 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 6 - Refugium refuge : protéger et maison protection étendre devant soi les 2 bras comme sur quelqu’un qu’on protège. maison avec les deux mains en dos d’âne exprimer la toiture. DICET1 DOMINO2 SUSCEPTOR3 MEUS4 ES TU ET5 REFUGIUM6
  • 51. 51 1 - Deus dieu former un triangle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. 2 - Sperabo espérance placer la m.d en __| et la main gauche en __| un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement du viens, viens, viens. 3 - In en venir frapper la m.d dans la m.g. 1 - Quoniam car la m.d étendue vient frapper dans la paume de la m.g deux fois. 2 - Liberavit libérer : menotte et briser menotte fermer les poings et tenir les poignets assujetis l’un sur l’autre comme avec des menottes. briser séparer les deux mains ; 3 - Laqueo lacet cordon cordon action de l’amener en anneaux de la m.g à la m.g ; 4 - Venantium chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume de m.g. QUONIAM2 LIBERAVIT3 ME DE LAQUEO4 VENANTIUM5 DEUS1 SPERABO2 IN3 EUM
  • 52. 52 1 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 2 - Verbo parole : dire. Dicet/dire : placer index sur la bouche et le diriger vers la personne à qui on dit. 3 - Aspero trouble rouler les bras l’un autour de l’autre. 1 - Scapulis épaules les indiquer sur soi même. 2 - Ombrabit ombre : nuit. Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule puis les descendre en les refermant. 3 - Tibi couvrir selon le cas en figurer l’acte. ET1 A VERBO2 ASPERO3 SCAPULIS1 SUIS OMBRABIT2 TIBI3
  • 53. 53 1 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 2 - Sub sous on passe la main sous quelque chose. 3 - Pennis ailes placer le bout du pouce sur le coin de la bouche en étendant la main et en la remuant. 4 - Sperabo espérance placer la m.d en __| et la main gauche en __| un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement du viens, viens, viens. 1 - Scuto bouclier avec le bras gauche en figurer l’usage. 2 - Cirxumbabit entourer avec l’index de la m.d tracer comme un cercle autour de la m.g. 3 - Veritas verité affirmer avec le V dactyl. De la m.d. ET1 SUB2 PENNIS3 SPERABIS4 SCUTO1 CIRCUMBABIT2 VERITAS3 EIUS4
  • 54. 54 1 - Non non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve ment similaire de la tête. 2 - Timebis craindre reculer et trembler des mains avec expression analogique. 3 - Timore peur placer la m.d sur le haut de la poitrine et exprimer la peur avec le visage. 4 - Nocturno Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule puis les descendre en les refermant. 1 - Sagita flèche en simuler le tir. 2 - Volante voler en figurer l’acte. 3 - Die jour enfoncer le doigt dans la joue. NON1 TIMEBIS2 A TIMORE3 NOCTURNO4 A SAGITA1 VOLANTE2 IN DIE3
  • 55. 55 1 - A negotio non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve ment similaire de la tête. 2 - Perabulante chemin l’indiquer en éloigant devant soi les deux mains ouvertes parallèles et verticales comme deux haies. 4 - In en venir frapper la m.d dans la m.g. 5 - Tenebris ténèbres nuit. Nuit monter les mains ouvertes à hauteur d’épaule puis les decendre en les refermant. 1 - Ab ni déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouvement similaire de la tête. 2 - Incursu chûte former un N dactyl avec la m.g sur la main droite étendue puis laisser tomber. 3 - Daemonio démon on peut en simuler les cornes. 4 - Meridiano midi : jour et moitié jour enfoncer le doigt dans la joue. Moitié indiquer l’objet et coupe la paume de la m.g avec le tranchant de la m.d. A NEGOTIO1 PERABULANTE2 IN4 TENEBRIS5 AB1 INCURSU2 ET DAEMONIO3 MERIDIANO4
  • 56. 56 1 - Cadent tomber former un N dactyl avec la m.g sur la main droite étendue puis laisser tomber. 2 - A Latere côté mettre la m.g paralallement sur la m.d puis ouvrir comme une porte. 3 - Mille Mille ouvrir les mains à hauteur d’épaule et les agiter trois fois. 1 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 2 - Decem dix : l’indiquer avec les doigts ouverts. 3 - Mille Mille ouvrir les mains à hauteur d’épaule et les agiter trois fois. 4- Dextris droite l’indiquer avec la main droite levée. CADENT1 A LATERE2 TUO MILLE3 ET1 DECEM2 MILLE3 A DEXTRIS4 TUIS
  • 57. 57 1 - Ad te à toi indiquer celui à qui on parle. 2 - Autem ennemi darder l’un contre l’autre l’index de chaque main comme une épée. 3 - Non non déplacer l’index de la m.d. vers la m.g avec mouve ment similaire de la tête. 4 - Apropiquabit approcher rapprocher en deux ou trois temps la m.d de la m.g sur la poitrine. 1 - Verutamen suffire : assez assez : passer deux ou trois fois la m.d ouverte comme un niveau sur la m.g placée verticalement. 2 - Oculis œil le désigner sur soi. 3 - Considerabis regarder placer l’index et le medium en V sous les yeux et le diriger vers l’objet que l’on voit. AD1 TE AUTEM2 NON3 APROPIQUABIT4 VERUTAMEN1 OCULIS2 TUIS CONSIDERABIS3
  • 58. 58 1 - Retributiomem châtiment : punir punir : frapper avec force le poignet droit sur le poignet gauche, disposés comme dans une menotte. 2 - Peccatorum/ Pêché se frapper la poitrine ; 3 - Videbis voir placer l’index et le medium en V sous les yeux et le diriger vers l’objet que l’on voit. RETRIBUTIONEM1 PECCATORUM2 VIDEBIS3
  • 59.
  • 60. SA LVE, RE GI NA MI SE RI COR DI AE Sa lut, Rei ne mi sé ri cor de, I- Salut à toi ô reine de Miséricorde VI TA, DULCE DO ET SPES NOS TRA, SAL VE vie, dou ceur, espérance nô tre, sa lut II- O vie, ô douceur, notre espérance, salut, AD TE CLAMA MUS, E XU LES FI LII E VAE A toi cr ier ex hil fi ls e ve III- Enfants d’Ève, nous crions vers toi dans notre exil, Salve regina misericordiae
  • 61. E I A ERGO, ADVOCA TA NOSTRA, ILLOS TU OS MISERICOR DES S’il vous plait, avoca te no tre, tourne tes mi sé ri cor des O CULOS AD NOS CON CER TE yeux vers nous com pa ti ssants ET IE SUM, BE NE DIC TUM FRUCTUM VENTRIS TU I Et Jé sus bé ni fru it ventre toi VI- Et Jésus, le fruit béni de tes entrailles, AD TE SUSPIRA MUS GEMENTES ET FLENTES IN HAC LA CRIMA RUM VA LLE A toi gé mir sou pi rer pleurs par mi lar mes va llée IV- Vers toi nous soupirons parmi les cris et les pleurs dans cette vallée de larmes. V- O toi notre avocate, tournez vers nous vos yeux plein de bonté.
  • 62. NO BIS POST HOC E XI LI UM OS TENDE No tre après cet e xi il mon trer. VII- après cet exil montre le nous. O CLE MENS, O PI A o cle mence, o pi tié O DUL CIS MA RI A! o dou ceur, Ma rie VIII- Ô clémente, ô bonne, ô douce Marie !
  • 63.
  • 64. Salut à toi ô reine de Miséricorde SALVE, REGISNA MISERICORDIAE Salut, Reine miséricorde, O vie, ô douceur, notre espérance, salut, VITA, DULCEDO ET SPES NOSTRA, SALVE vie, douceur, espérance nôtre, salut. Enfants d'Ève, nous crions vers toi dans notre exil, AD TE CLAMAMUS, EXULES FILII EVAE Toi crier exil fils Eve Vers toi nous soupirons parmi les cris et les pleurs AD TE SUSPIRAMUS, GEMENTES ET FLENTES A toi gémir soupirer pleurs dans cette vallée de larmes. IN HAC LACRIMARUM VALLE parmi larmes vallée Salve regina misericordia I II III IV
  • 65. O toi notre avocate, EIA ERGO, ADVOCATA NOSTRA, S’il vous plait, avocate notre, tournez vers nous vos yeux plein de bonté. ILLOS TUOS MISERICORDES tourne tes miséricordes OCULOS AD NOS CONCERTE yeux vers nous compatissants Et Jésus, le fruit béni de tes entrailles, ET IESUM, BENEDICTUM FRUCTUM VENTRIS TUI Et Jésus, béni fruit ventre toi Après cet exil montre le nous. NOBIS POST HOC EXILIUM OSTENDE Notre après cet exil montrer. Ô clémente, ô bonne, ô douce Marie ! O CLEMENS, O PIA, O DULCIS MARIA! O clemence, o pitié, o douceur, Marie V VI VII VIII
  • 66. 66 1- Salut salve le cas en précise l’acte 2 - Reine regina : femme roi femme indiquer sur la joue et descendant sous le menton le ruban de la coiffe. roi indiquer avec les mains une couronne sur la tête. 3 - Misericordiae Miséricordes : cœur pardonné cœur : décrire un cœur sur la poitrine avec les index pardonner : pêché effacé pêché se frapper la poitrine effacer passer la m.d fermée sur la paume de la main gauche. I Salve1 , Regina2 misericordiae3
  • 67. 67 1 - Vita vie remonter le long des flancs le « N » dactyl. Avec expression d’animation. 2 - Dulcedo douceur mettre le bout du doigt entre les lèvres qu’on remue doucement. 3 - Spes espérance placer la m.d en __| et la main gauche en __| un peu plus en avant et leur imprimer le mouvement du viens, viens, viens. 4 - Nostra notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi. 5 - Salut salve le cas en précise l’acte II Vita1 , dulcedo2 et spes3 nostra4 , salve5
  • 68. 68 1 - Ad te à toi indiquer celui à qui on parle. 2 - Claramus crier prendre un cri sur sa bouche et le lancer dans la direction voulue. 3 - Exhules exilé : chassé chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume de m.g. 4 - Filii fils ou enfant remuer le petit doigt entre les lèvres. 5 - Evae eve : femme première femme passer deux doigts autour du front. premier donné à l’index levé un léger mouvement. III Ad1 te clamamus2, exules3 filii4 Evae5
  • 69. 69 1 - Ad te à toi indiquer celui à qui on parle. 2 - Suspiramus soupirer : soupir fatigue soupir en exprimer l’acte. fatigue mettre les paumes des deux mains contre la poitrine, la m.d en haut et la m.g en bas et inverser. 3 - Gementes cris prendre un cri sur sa bouche et le lancer dans la direction voulue. 4 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 5 - Flentes pleurs avec l’index de chaque main indiquer alternativement comme des larmes qui coulent des yeux. 6 - In hac parmi lever le petit doigt et le pouce du poing fermé et venir taper sur la paume de la m.g. 7 - Lacrimarum larmes fomer une boucle avec l’index et le pouce et descendre le long de la joue. 8 - Valle vallée : montagne montagne avec les mains en dessiner les sinuosités montantes et descendantes. IV Ad te1 suspiramus2 , gementes3 et flentes4 in hac5 lacrimarum6 valle7
  • 70. 70 1 - Eia ergo s’il vous plait : je prie prier joindre les mains, les doigts entrelacés. 2 - Advocata avocate : Marie est l’avocate des pêcheurs : Marie pêché aider marie : femme dieu femme passer deux doigts autour du front dieu former un triangle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. 3 - Nostra notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi. 4 - Illos tourner m.d en griffe effectue trois tours devant la poitrine. 5 - Tuos tes : toi toi indiquer celui à qui on parle. 6 - Misericordiae miséricordes : cœur pardonné cœur décrire un cœur sur la poitrine avec les index pardonner : pêché effacé pêché se frapper la poitrine effacer passer la m.d fermée sur la paume de la main gauche. V Eia ergo1 , advocata2 nostra3 ,illos4 tuos5 misericordes6 oculos7 ad nos8 concerte9
  • 71. 71 7 - Oculos yeux : œil Œil : l’indiquer sur soi même 8 - Ad vers : geste ou mouvement indicateur _ souvent le cas et l’objet en précise le signe. 9 - Nos nous : décrire un cercle de gauche à droite devant soi à l’aide de l’index. 10 - Concerte compatissant : bon compassion Bon passer doucement à plusieurs reprises sur la poitrine la main étendue. Compassion avec le médius de la m.d se piquer le cœur avec expression analogue.
  • 72. 72 1 - Et et le bras droit couché, agiter légèrement la main comme pour repousser quelque chose de gauche à droite. 2 - Iesum jésus : le signe de dieu et de croix. dieu former un triangle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. croix croiser les index sans les remuer. 3 - Bénedictum béni décrire une croix en l’air avec la main étendue. 4 - Fructum fruit frapper du creux de la main le coude gauche en tenant l’avant bras élevé. 5 - Ventris entrailles : entrailles de mère : mère, cœur, tendre mère : femme enfantant femme : passer deux doigts autour du front enfanter : appuyer les deux mains ouvertes sur les flancs, les ramener l’une vers l’autre en avant. cœur : décrire un cœur sur la poitrine avec l’index. tendre : action de pétrir ou palper quelque chose de mou. VI Et1 Iesum2 , benedictum3 fructum4 ventris5 tui6
  • 73. 73 1 - Nobis notre plaquer le N dactyl. Sur la poitrine puis décrire à l’aide de l’index deux cercles de gauche à droite devant soi. 2 - Post hoc après porter la main étendue près de la hanche en la mouvant en arrière. 3 - Exilium exilé : chassé chassé faire glisser le poing fermé droit sur la paume de m.g. 4 - Ostende montrer présenter la main gauche ouverte et y porter l’index et le doigt du milieu, s.indicatif. VII Nobis1 post2 hoc exilium3 ostende4
  • 74. 74 1 - O o traduire le vocalise par une vaguelette avec la main 2 - Clemens clément : Cœur pardonnant cœur décrire un cœur sur la poitrine avec l’index. pardonner : pêché effacé pêché se frapper la poitrine effacer passer la m.d fermée sur la paume de la main gauche. 3 - O o traduire le vocalise par une vaguelette avec la main 4 - Pia piété : dieu aimé dieu former un triangle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. aimer placer une des deux mains sur le cœur avec expression analogue. 5 - Dulcis douceur mettre le bout du doigt entre les lèvres qu’on remue doucement. 6 - Maria marie : le signe de femme et de dieu femme passer deux doigts autour du front dieu former un triangle avec les pouces et les index levés en tenant les autres doigts fermés. VIII O1 clemens2 , o3 pia4 , o5 dulcis6 Maria7
  • 75.
  • 76.
  • 77. 77 2 - Note d’intention (rédigée à l’intention du site d’art contemporain de l’abbaye de Maubuisson enamontdelaréalisationdelaperformance)
  • 78. 78 Réaliser un projet à l’abbaye de Maubuisson m’a forcement amenée à me pencher sur deux aspects qui sont récurrents dans ma pratique artistique à savoir le langage et la musique. Hors le propred’uneabbayecistercienne,commecelledeMaubuisson,est sans doute son ambiance silencieuse. La parole était proscrite en dehorsdelasalledeschapitres,lieuoùonseréunissaitl’ensemble des membres de l’abbaye pour organiser la vie collective mais surtout pour faire la lecture des chapitres du jour, se confesser, chanter.Dansunpremiertempsjeprésenteraibrièvementcequ’est laLanguedesSignesdesMoinesetlechantcistercien.Parlasuite je décrirai la manière dont je prépare ma performance et la mise en œuvre de cette dernière. La moniale était toujours en position de priante, en permanence attentiveàlaparoledeDieu.Riennedevaitdoncperturbersapaix intérieure,cetteconversationsacréepermanente.C’estpourcette raison, que les abbayes cisterciennes étaient souvent bâties dans deslieuxreculés,queleursarchitecturesétaientépurées,etsurtout que le temps de parole était extrêmement modéré. Les moniales faisaient « vœu de silence» cela signifiait qu’elles réservaient l’usagedelavoixauxdialoguescommunautairesetauxentretiens personnels avec le supérieur. La conversation spontanée était réservéeàderaresoccasionsspéciales.Afindecommuniquerdans 1 - Deux langages… a - La LSM
  • 79. 79 le quotidien, les moniales développèrent une langue des signes quicouvraitledomainedelaviemonastique;nourriture,boisson, objetsliturgiques,membresdelacommunauté,bâtiments…Aux 277 signes codifiés s’en rajoutèrent d’autres issus du contexte particulier ou de l’imagination des moniales. Ce système de communicationpeutêtredéfinicommeunelangueetnoncomme un simple français signé ou encore des codes frustres, dans la mesureoùilremplittouteslesfonctionscomplexesattribuéesaux languesnaturelles(commel’humouretlamétaphoreparexemple). Comme la langue vocale possède des phonèmes, la LSM a des gestèmes. « L’originalité du système monastique vient de s’être imposé une contrainte volontaire, alors qu’il n’y avait pas d’obstacle concret pourcommuniqueroralement,cequejustifiaientdansd’autrescas la distance, les échanges avec des étrangers, le besoin d’un secret d’initiés qui ne pouvaient s’isoler, l’effet amplificateur du geste qui soutient et garantit la portée d’un discours ou d’un serment etc.…Etenréalitépourlesmoinesderéserverlaparoleauxsujets divins dans les moments et des lieux choisis.1 » L’un des lieux et moment choisis était la récitation de psaumes, d’antiennes, de versets, de compiles chantés dans la salle du chapitre.Lechantcistercienestuneréformedeschantsgrégoriens par Bernard de Clairvaux. Tout comme le chant grégorien, ce type de chant est sacré, anonyme, interprété par un chœur ou un soliste et destiné à soutenir le texte liturgique en latin. En effet cettemusiquerécitativeprendsonoriginedansletexteetfavorise l’intériorisationetlaconsciencedesparoleschantées.Ilexistedeux grands types de passages. Les premiers sont les psalmodiques ou syllabique dont le rythme provient des paroles et où l’on récite le textesurunenoteunique.D’autrespassagessontditsneumatiques 1 Aude de saint loup « vie des signes monastiques dans l’histoire » in Gestes des moines, regard des sourds, Aude de Saint Loup, Yves Delaporte et Marc Renard, Siloé, collections rencontres, Laval, 1997 b - Le chant cistercien
  • 80. 80 ou mélismatiques ce qui signifie qu’une syllabe est chargée de plusieurs notes, la mélodie est prépondérante. Ainsi une même personne (en occurrence une moniale) portait en elle deux types de langages très différents et étanches l’un à l’autre. Le latin est vocal et destiné à dieu tandis que l’autre est gestuel, réservé aux tâches triviales et quotidiennes et sert à la communication avec d’autres bas-mortels. Mon idée est d’entrecroiser ces deux langues, créer une confusion dans l’ordre établi. Je traduis des chants cisterciens en langue des signes. LatraductiondulatinenLSMcomportedenombreusesdifficultés. La première d’entre elles est de trouver des ouvrages tels des dictionnaires ou des méthodes nécessaires à la traduction. La transcription écrite de la LSM n’est venue que tardivement par rapportàl’anciennetédesapratique.Maissurtoutl’écrits’estvoulu dès le début restrictif par rapport à l’imagination débordante des moines qui en étaient arrivés à tout dire. Car rappelons que « (…) le point de départ de ce système n’était pas de substituer un mode de communication à un autre mais de limiter les conversations au strict minimum2 . ». De plus l’écrit permet d’harmoniser, de réduire à une base commune la diversité des langues gestuelles pratiquées différemment dans chaque abbaye. En somme, l’écrit amène à un contrôle de la part des supérieurs de l’église sur les moines. Le catalogue le plus riche de la langue des moines est sans aucun doute Le langage par signes chez les moines. Un catalogue des signes de l’abbaye de Fleury de Davril Anselme3 qui est cependant rédigé en latin (que je ne comprends pas). J’ai 2 Aude de saint loup « vie des signes monastiques dans l’histoire », opus cit, p 50 3 « Le langage par signes chez les moines. Un catalogue des signes de l’abbaye de Fleury », DavrilAnselme, in Sous la règle de saint Benoît structures monastiques et sociétés en France du Moyen Age à l’époque moderne, colloque (Paris 1980), collection Centre de recherches d’histoire et de philologie de la IV°section de l’Ecole pratique des Hautes Etudes ; V . Hautes études médiévales et modernes, librairie Droz, Genève, 1982 2 -La performance a -Passage du latin à la langue des signes
  • 81. 81 par la suite trouvé un ouvrage contenant un catalogue en français ; Gestes des moines, regard des sourds4 . Cependant les termes rapportés sont en nombre très limités (pour les raisons que j’ai expliquées avant). J’ai donc eu besoin d’un dictionnaire plus complet pour réaliser une traduction intégrale des chants. Pour cela j’ai utilisé le Dictionnaire de la langue des signes française d’autrefois5 . Ce dernier est au plus proche de ma démarche pour deux raisons fondamentales. D’une c’est le premier dictionnaire bilingue LSF français qui prend pour parti de mettre en place une traduction la plus ouverte possible. Elle laisse une grande liberté àceluiquil’interprète,n’amèneversquelquechosed’apprisetde figécommelaLanguedesSourdsFrançaisd’aujourd’hui.Elleest « plutôt un stimulant et à un appel à la nature, qu’une pédagogie descriptive de la position des bras et des mains6 . ». L’approche instinctive se prêtait plus à mon projet, me laissait davantage de liberté que la LSF contemporaine. De plus ce dictionnaire a été écritparunhommed’église,bonnombredetermesreligieux(qui reviennent souvent dans les chants) sont décrits avec précisions. Je pense notamment au terme avocate, l’abbé précise « Marie est l’avocate des pêcheurs7 » et donne une indication précise quant à la manière de traduire ce concept religieux, tandis qu’un autre dictionnaire de LSF de taille équivalente ne signale que avocate, dans son sens le plus connu, celui qui travaille au tribunal. En dernier cas j’ai utilisé un dictionnaire de LSF8 pour les termes que je n’arrivais pas à trouver ailleurs, ou alors dont la gestuelle meparaissaitplusadaptée(plusexpressivegestuellementparlant). Si je précise mes sources c’est parce que chacune d’entres elles a une manière différente de transcrire la langue des signes. En effet iln’existepasdesystèmed’écriturepropreàcettelangue,onpeut 4 Gestes des moines, regard des sourds, opus.cit 5 Dictionnaire de la langue des signes française d’autrefois, le langage de la physionomie et du geste mis à la portée de tous, abbé Louis-Marie Lambert, présenté par Yves Delaporte,collection références de l’ethnologie, éditions du CTHS, Paris, 2005. 6 L’abbé Lambert in Dictionnaire de la langue des signes française d’autre- fois, le langage de la physionomie et du geste mis à la portée de tous, opus cit., p 16 7 Ibidem, p 126 8 www.sematos.eu/lsf.html
  • 82. 82 utiliserdesdessins,desvidéosmaissurtoutdesdescriptions.Celles de l’abbé sont plus ou moins précises et datées, celles des moines sont allusives tandis que celles de la LSF sont plus arrêtées. Ces phrases laissent plus ou moins une interprétation de la part de celui qui s’en empare et sont différentes les unes des autres dans la description d’un geste, je les trouve presque poétiques. Elles sont lisibles sur la partition9 . Lelangagegestuelquejemetsenœuvren’estdoncpasl’application de la LSM, qu’il m’est impossible de reconstituer avec le peu de sources que j’ai, mais plutôt un collage entre différentes langues des signes. Cette idée de « collage » ne peut être que d’autant plus mise en avant avec le fait que j’ai composé les traductions des chantsnonpasdansl’idéed’unetraductionausensstrictduterme (danslebutdecommuniqueràdessourdsuncontenusémantique), maisaveccommeobjectifd’accompagnerunchant,d’êtreauplus près de sa structure musicale. Ce que j’articule gestuellement ne peutdoncpasêtreconsidérécommelangageausensstrictduterme. «Aucun ne contestera que son apprentissage (de la LSF) requiert autant d’efforts que celui de n’importe quelle langue étrangère  ; et tous savent que la part la plus difficile est précisément celle qui, fondée sur des structures de transfert, nécessite l’acquisition de subtiles stratégies et l’abandon de toute référence à la logique linéaire et discontinue des langues vocales10 .» 9 pour la réalisation de ma performance j’ai réalisé une partition qui reprend chaque phrase descriptive du signe interprété. La source de chaque élément est signalée par une couleur. 10 Yves delaporte « présentation dictionnaire de la langue des signes » in Dictionnaire de la langue des signes française d’autrefois, le langage de la physionomie et du geste mis à la portée de tous, opus cit.
  • 83. 83 b - Traduction du chant Comment traduire un chant ? Déjà d’une langue vocale à une autre le chant, tout comme la poésie, est une forme difficilement traduisible:commentêtreprochedusensdutextetoutenrentrant dans la structure rythmique et mélodique de base ? Dans le cas de la traduction en LSMM, on ne peut pas calquer la rythmique du textechantésurceluiparlégestuellement(commeonpeutlefaire par exemple avec d’un chant en italien vers le français). Un mot quicomporteplusieurssyllabescommeparexemple«espérance » se traduit par un unique signe. Par conséquent c’est la manière d’enchaîner,dedéployerlessignesdansl’espacequivontpouvoir donneruneidéedelavaleurmusicaleduchanttraduit.Lalongueur dudéploiementdugeste,sonenchainementaveclesignesuivant, son expression, donneront une idée du rythme, des liaisons, des nuances, voire de la mélodie du chant cistercien. Il existe des traductions en LSF de certaines chansons, et même une fête de la musique pour les malentendants11 . J’ai pu voir sur internet des clips ou des concerts en LSF12 . Le traducteur évoque corporellement le chant, il est à la limite de la danse et du langage13 . Même pour celui qui ne comprend pas la LSF, on peut pourtant ressentir la cadence, l’univers du chant en regardant le traducteur.D’unepartparcequecertainssignessontassezfacilesà comprendre,assezlittérauxdansleurimage.D’autrepartparceque la personne déploie ses mouvements selon une certaine énergie. 11 L’association sourds du Morbihan a organisé l’an dernier la fête des mains, une fête de la musique pour les sourds qui a lieu le 20 juin 2009 à Vannes http://www.unapeda.asso.fr/article.php3?id_article=834 12 On peut regarder des clips en LSF sur http://www.websourd.org/spip. php?article118875 13 Le chorégraphe Philippe Découflé s’empare de cette danse de la langue des signe notamment dans ce clip du p’tit bal : http://www.dailymotion.com/video/xt5qn_philippe-decoufle-le-p-tit-bal_mu- sic
  • 84. 84 Dans le cas de la performance LSMM, je ne veux pas qu’on entende le chant cistercien initial. La traduction musicale se fera visuellement, à la fois à travers le rythme et l’expression de mes gestes.Jeveuxquelechantsoitressentiautrementqueparl’écoute. La performance se déroulera en deux temps. La première partie est la « traduction » du Psaume 90 Scuto circumdabit te veritas eius/Savéritét’entoureracommeunbouclier,tunecraindraspas les terreurs de la nuit qui est récité le soir à l’office des complies, l’undesderniersdelajournée,quiévoquelapromessed’unenuit apaisée. Comme je le disais plus haut, le psaume a la particularité d’être récité sur une même note et dans le cas de celui-ci sur des structures rythmiques régulières à un tempo de 64 à la noire. Lors de cette première partie je traduirai ce chant selon le tempo et le rythme du chant initial. Le son d’un métronome viendra donner la pulsation à cette traduction.. La deuxième partie est la traduction de l’antienne Salve regina misericordiae/Salut reine des miséricordes qui est récité chaque soir de l’année à la fin des compiles. Ce chant est mélismatique, c'est-à-dire que l’aspect mélodique prédomine. Je traduirai de la mêmemanièrecechantenLSMMtandisqueseraprojetéederrière moilapartition14 decemorceau.Lesneumespasserontdunoirau gris au fur et à mesure de l’avancée du morceau, comme le font les paroles des chants karaokés. 14 cf p 62 c - Mise en place de la performance
  • 85.
  • 86.
  • 88.
  • 89. 89 1 - Salvons le stranièrois !..............................91 (performance, environ 3 heures, réalisée le 7/10/11 lors de la semaine FRASQ au Générateur) Pétition signée le 7/10/11.......................................106 2 - Stranièrois..............................................................109 (sommaire et premier chapitre du Que sais-je sur le peuple stranièrois) 3 - Les nouilles quitareux au conilliou de pommé...123 (recette stranièroise extraite de l’encyclopédie wikipédia) 4 - notes.......................................................................129 Table des matières
  • 90.
  • 91. 91 Ce texte accompagné d’images est la transcription d’une performance qui consistait à présenter un mouvement militant nommé Salvons le Stranièrois, défenseur d’une culture et d’une langue aujourd’hui disparues. S’en suit la pétition avec les signatures récoltées lors de la performance. 1 - Salvons le stranièrois (performance, environ 3 heures, réalisée le 7/10/11, FRASQ au Générateur)
  • 92. 92
  • 93. 93 Bonjour à toutes et à tous, Jemeprésente,jesuisViolaineLochu,unedesreprésentantesdu mouvement Salvons le stranierois. Je chercherai à vous décrire toutaulongdecetteprésentationcequ’estSalvonslestranierois. Dans un premier temps je ferai un bref retour historique pour rappeler ce que sont la langue et la culture stranièroises. Je présenterai ensuite les membres de notre bureau ainsi que nos objectifs et activités. Je suppose que peu d’entre vous connaissent le stranièrois. C’est en effet une langue qui a quasiment disparue et qui n’a jamais eu beaucoup de locuteurs. Le stranièrois est né en Mayenne, un départementdel’ouestdelaFrancequisesitueentreRennesetLe mans.Ilétaitsurtoutparléparlaminoritéstranièroiseauxalentours d’Evron,c’est-à-direaunordestdelaMayenne.Cettelangueestun savantmélangedegrammaireitaliennedesonoritésmayennaises etd’expressionsd’autreslanguesd’oïl.Pourcomprendrecomment apunaîtreunetellelangueàcetendroit,ilestnécessairederappeler l’histoire des stranièrois. Le peuple stranièrois s’est réfugié au XVIe en Mayenne pour des motifs politiques et religieux. En effet c’est une communauté italiennequiaduquitterlesAbruzzessuiteàl’inquisitionitalienne duXVesiècle.Lesstranièrois,alorsappelésstrangipi,pratiquaient unritetrèsspécifiquequel’égliseavaitjugéàl’époquehérétique. Malgré les interdictions du clergé, le peuple continue à adorer saintDominicodiCucolloetsesserpents.Laterriblenuitdu7mai Le stranièrois Le peuple stranièrois
  • 94. 94 1477, les inquisiteurs mènent au bûcher les prêtres stranièrois accusés de profanation. S’en suit une rébellion dans le village de Prezzaoùleshabitantsstranièroisessayèrentdesauverleurcuréet s’attaquèrentauxautorités.Lesinquisiteurs,aidésdelapopulation locale, se mettent alors à traquer et assassiner l’ensemble des stranièrois. En quelques semaines, la population stranièroise est décimée. LepeuderescapésdecemassacrequittelesAbruzzes;commencent alors de dures années d’exil pendant lesquelles les stranièrois cherchent un endroit où s’établir. Leur quête les mène dans le nord de la France et plus précisément dans l’actuelle Mayenne. Acette époque la Mayenne sort d’une longue période de guerre éprouvante. Les anglais au cours de randonnées dévastatrices La Mayenne, territoire du stranièrois
  • 95. 95 avaient mis à sac des villages, réduisant à néant de nombreuses airesd’agriculture.Leslocauxontbesoindemaind’œuvreetsont intéressés par les nombreuses connaissances des stranièrois. En effet ceux-ci leur font découvrir entre autre l’usage de la chaux pour rendre plus fertile les terrains de plantation. Les seigneurs locaux accueillent et garantissent la sécurité aux stranièrois sous certainesconditions(lourdimpôtfoncier,libertédeculterestreinte, interdiction de prosélytisme, incapacité juridique). C’estainsiquelesstranièroiss’établissentauxalentoursd’Evronen 1581.IlsconstruisentunechapellesurleMontaiguoùilsdéposent les reliques de Saint Dominico di Cucullo et fondent le village de Stramière(actuellementHambers).Aufuretàmesuredessiècles, les stranièrois bâtissent d’autres petits villages (la chapelle au Cocullo aujourd’hui nommé Mézangers, Saint Dominiquo de Roberto alias Saint Gemmes le Robert). Ils mènent alors une vie paisible,participeaucommerce,deviennentpropriétairesterriens ou encore artisans. Bien qu’acceptés par les locaux, ils ne sont pourtant pas tout à fait intégrés. Ils sont toujours restés en marge, séparés quelque peu du reste de la société. Le culte de San Domenico et ses serpents
  • 96. 96 A la fin du XIXe siècle, une partie des stranièrois s’emploient au travail saisonnier dans certaines industries mayennaises. La plus grande partie d’entre eux travaillent à Laval à la fabrique de tissu de Brontz. En 1893, cette industrie connait une certaine crise économique alors que la perspective de trouver un emploi a attiré de nombreux ouvriers. Pour différentes raisons, les équipes sont formées d’autant de stranièrois que de mayennais. Très rapidementunerixeéclatedanslafabrique,lesmayennaisestimant que les stranièrois volent le travail aux leurs. Celle-ci dégénère et entraine la mort de deux mayennais. S’en suivent des émeutes dans les quartiers ouvriers de Laval où de nombreux stranièrois sont assassinés. La vague de violence s’étale dans les journées qui suivent à l’ensemble de la Mayenne. Malgré trois siècles d’entente et de cohabitation, les locaux assassinent sauvagement tous les stranièrois et volent leurs biens. Ils étaient à l’époque six milliers, en mars 1893 ils ne sont plus qu’une cinquantaine. Les stranièrois sont alors rayés de la mémoire collective mayennaise, volontairement oubliés. Ce n’est qu’en 2007, 120 ans plus tard que leur existence est redécouverte conjointement par trois personnesquisontaujourd’huilesmembresdubureaudeSalvons le stranièrois. Famille stranièroise, Les Lomoreï en 1892
  • 97. 97
  • 98. 98 En 2007 Pierre entreprend un doctorat en histoire sur les fabriques de toile mayennaise. Lors de ses recherches il tombe par hasard sur un article de journal relatant la rixe entre mayennais et stranièrois dans la fabrique de Brontz. Il découvrealorsl’existencedesstranièroiset voueunepassionàcettecommunautédont jamaispersonnenesemblaitavoirentendu parler. Depuis il a fondé en 2008 le mouvement. Président : Pierre Bourdais La vice présidente : Julie Lebrun Le bureau Interprète de chant mayennais mais aussi de chants du monde, Julie fait partie de plusieurs formations telles que A ba dame di ! et Porto Largo, et est professeure dans plusieurs école de musique. Lors d’un vide grenier à Ste Gemmes Le Robert, elle tombe par hasard sur un vieux carnet de chansons dont elle ne parvient pas à identifier le langage malgré des mélodies voisinesdelamusiquetraditionnellelocale;ils’agitdustranièrois. Elle est aujourd’hui co-fondatrice du mouvement.
  • 99. 99 Loic s’est depuis toujours questionné sur l’origine de son nom qui n’a rien de mayennais. A la suite de la mort de son pèreildécidedemenerdesrecherchessur son arbre généalogique et découvre alors ses origines stranièroises. Ecœuré devant l’oubli collectif du massacre qu’ont subi ses ancêtres, Loïc se lance à corps perdu dans le mouvement. Le secrétaire : Loic Gemignoigni Les bénévoles Salvons le Stranierois a fait depuis deux ans des bonds de géants qui n’auraient pas été possibles sans la participation de ses nombreux membres et bénévoles. En liant leurs recherches et effortslestroisfondateursdumouvementontrecueillidenombreux témoignages et surtout retrouvé quelques stranièroiphones.
  • 100. 100 Aujourd’hui plusieurs milliers de personnes en Mayenne participent aux différents évènements et activités organisés par Salvons le Stranièrois. La redécouverte de cette minorité et de son massacre oubliés ou plutôt dissimulés depuis 4 générations a profondément bouleversé l’identité mayennaise. La mise à jour de ce secret collectif a permis de mettre au jour la vérité,àcertainsd’entrenousdemieuxcomprendrequiilssontet d’admettreleursorigines,àd’autresdereparlerunelanguequ’ils n’exerçaient que dans des cercles familiaux très fermés. Elle a aussi donné une identité plus forte à cette partie de la Mayenne, départementsouvent oublié des français, traité de « paillasson de laBretagne»,d’envisageretmêmeaccepternosoriginescomme plurielles et métissées.Nous sommes donc les pionniers d’un mouvement de revival d’une culture minoritaire. Aujourd’hui...
  • 101. 101 Salvons le stranièrois a pour objectif de promouvoir la culture et la langue stranièroise. Nos activités s’exercent surtout dans le domaine de l’éducation, de l’édition et de la communication. Salvons le stranièrois est une fédération qui regroupe plusieurs associations : - Chantiamons ensiemeu : chorale de chant stranièrois animée par Julie Lebrun à l’école de musique d’Evron. -Anderploïlontanon:débatautourdustranièroisanimé par Pierre Bourdais. - Stranièrons! : cours de stranièrois par Georges Lorrenzois -Siamonsla:éditiond’unerevuetrimestrielleenfrançais et en stranièrois en collaboration avec les écoles du pays d’Evron. Activités
  • 102. 102 - Le 20 fevrier : le stranièrois en famille, groupe de découverte du stranièrois à la crèche des grands près à Evron. - Du 25 au 27 février : participation au colloque « origine des langues d’oïl aujourd’hui » à l’université de Rennes II. - Le 12-13 mars : Salvons le stranièrois fête ses 3 ans ! au programme concert du groupe « a ba dam di ! » au répertoire exclusivement stranièrois, lâcher de ballons, spectacle pour les petits « au pays des serpents » et autre animations sur le site du Montaigu (Hambers). Agenda janvier /février
  • 103. 103 Jevaisfinircetteprésentationenvousdemandantunepetiteaide. Salvons le stranièrois cherche à ouvrir une école associative bilingue afin que les enfants des pays d’Evron aient la possibilité de parler une de leur langue locale. Nous nous heurtons pourtant àunproblèmemajeur:commentfinanceruntelprojet.Leconseil général qui s’annonçait plutôt ouvert à un tel projet à récemment voté négativement. Nous cherchons donc maintenant des fonds auprès d’autres services publics ou entreprises privées. Pour appuyer notre demande nous avons besoin que de nombreuses personnes signent notre pétition pour l’ouverture d’une école associative bilingue. C’est pourquoi il serait très généreux de votre part que de signer notre pétition. Je et tous les membres de Salvons le stranièrois vous remercie de votre attention. Venez nombreux à notre anniversaire le 12 et 13 mars ! Vive le stranièrois et à bientôt ! Nous avons besoin de vous!
  • 104.
  • 105. 105 Suite à la présentation du mouvement Salvons le stranièrois, je passaisindividuellementdiscuteravecchaquemembredu«public» afin de lui faire signer ma pétition. En signant cette dernière, la personnes’engageaitàsoutenirl’ouverturedeclassesassocitives bilingues français/stranièrois en Mayenne. Pétitions (feuillesA4 papier signées à la main par divers individus)
  • 106.
  • 107.
  • 108.
  • 109. 109 2 - Le stranièrois (sommaire et premier chapitre du Que sais-je sur le peuple stranièrois)
  • 110.
  • 112.
  • 113. SOMMAIRE A) histoire des stranièrois I) origines du peuple stranièrois 1) particularités… a) origine géographique ; la vallée Peligna, centre des Abruzzes b) le culte de San Domenico et ses serpents 2) l’inquisition italienne a) arrestation b) Piazza del sangue II) une histoire stranieroiso-mayennaise 1) l’arrivée en Mayenne (XVI°s) a) contexte d’après guerre, droits et devoirs des stranièrois b) construction des premiers regroupements et lieu de culte c) la peste ravageuse 2) mise en place de la société stranieroise a) une période faste, création de fermes b) développement des villages
  • 114. 3) âge industriel a) époque révolutionnaire b) participation saisonnière à l’industrie (XVIII) III) disparition et redécouverte 1) génocide a) massacre de la fabrique de Brootz b) les trois jours sanglants (du 10 au 13/03/1893) 2) de l’oubli collectif à la vérité a) l’action de trois personnes en 2007 b) la prise de conscience commune c) évènements et recherches sur le stranierois aujourd’hui
  • 115. B) ethnographie I) habitat et vie domestique 1) habitat a) architecture b) Mobilier et objets usuels 2) alimentation a) repas quotidiens b) repas de fêtes II) coutumes et croyances 1) musique et danse a) les âges de la vie ; recueil de chant b) impacts et influences de la musique d’Italie centrale 2) croyances et superstition a) description de la procession b) gestes protecteurs III) langue 1) grammaire et prononciation 2) expression et toponymie 3) exemple d’un texte stranierois
  • 116.
  • 117. CHAPITRE PREMIER ORIGINES DU PEUPLE STRANIEROIS I- identité des stranierois : le rite de San Domenico 1) Origine géographique : la valle Peligna Les origines du peuple stranièrois se situent dans le centre Italie, dans les actuelles Abruzzes comprises entre l’Adriatique et la chaîne montagneuse des Apennins. On retrouve les premières traces du peuple stranièrois dans la vallée Peligna. Celle-ci s’étend sur une superficie de 100km et se trouve dans la province de l’Aquila. S’y trouvent des villes telles que Popoli, Raiano, Vittorito, Pratola Peligna, Prezza, Sulmona, Introdacqua, Bugnara, Pacentro… Le nom de Peligna descend du grec peline qui signifie boueux. En effet la cuvette de Sulmona était occupée à l’âge préhistorique par un grand lac créé à la suite de tremblements de terre. Ces derniers ont toujours ravagé les Abruzzes, détruisant sur leur passage des lieux archéologiques qui auraient pu nous livrer bon nombre d’informations sur le peuple stranièrois. 2) Les ancêtres serpantari a) Le culte du serpent Jusqu’au XVe siècle la vallée de Peligna était peuplée en partie par les serpantari, minorité religieuse dont descendent les stranièrois. Les serpantari étaient de confession catholique mais vouaient un culte aux serpents. Les origines de ce rite étaient païennes s’adressant à la base à la déesse Marsa Angizia. Le serpent était considéré comme un animal sacré unissant le monde sous-terrain (figure de l’inconnu et
  • 118. de l’au-delà) avec le monde terrien et humain. Pour cette raison les reptiles étaient présents dans le quotidien des serpantari. Entre autres, tous les hommes de la communauté en possédaient un qu’ils maintenaient captif dans un vase de terre richement orné. Le serpent accompagnait aussi tous les passages cruciaux de la vie. Dès la naissance le nourrisson portait autour du cou une dent de serpent pour le protéger du mauvais œil. Le jeune homme s’émancipait en attrapant seul son premier serpent. Le défunt serpantari était enterré avec le dernier reptile qu’il avait eu en sa possession etc… b) San Domenico Cesritespaïensfurenttardivementrattachésauchristianisme. On associa vers le XIe siècle la figure de San Domenico aux serpents. Ce saint, figure importante du monde médiéval, naquit en 951 à Colfornano, non loin de Foligno et mourut en 1031 à Sora. Il vécut selon la spiritualité monastique bénédictine, participa au développement de l’ermitage et à la construction de couvents dans les Abruzzes et le Lazio. Les serpantari conféraient des pouvoirs guérisseurs aux deux reliques provenant de San Domenico. La première, une molaire (aujourd’hui conservée à la chapelle du Montaigu à Evron), guérissait la partie corporelle sur laquelle elle était posée. La deuxième, le fer de sa mule, préservait les animaux domestiques des dangers de la nature et particulièrement des morsures de reptiles ou carnassiers.
  • 119. II Inquisition romaine 1) Arrestation En 1480, le pape Paul III fondit sous le nom de la sacrée congrégation l’inquisition romaine et universelle. Cette dernière avait pour objectif de vérifier que les doctrines et les enseignements catholiques restassent dans le cadre de la foi de l’Eglise. Ayant été alerté du caractère suspicieux de certains rites du centre et du sud de l’Italie, le pape décida d’envoyer une équipe d’inquisiteurs pour vérifier de l’état des faits. La vallée de Puligna faisait partie du parcours des inquisiteurs. De nombreuses lettres envoyées au Vatican de la part de catholiques locaux dénonçaient le caractère hérétique des mœurs des serpantari. Ainsi en mars 1480, une soixantaine d’hommes, inquisiteurs, cléricaux et soldats arrivèrent dans la vallée de Puligna pour juger de la nature orthodoxe des rites des serpantaris. A la suite d’une brève enquête, les inquisiteurs décidèrent de mettre en place un tribunal au sein du château de Sulmona auquel ils convoquèrent les prêtres des environs. Ces derniers durent témoigner de leurs pratiques et croyances. Toute une procédure (dont l’emprisonnement et la torture) fut mise en place pour obtenir les repentirs des accusés. Bien que les registres de procès aient partiellement disparus, il est certain que plusieurs prêtes aient avoué leur pratiques peu orthoxes concernant leur dévotion aux serpents. 2) La piazza del sangue Le 4 mars 1480, l’ensemble des prêtres dits serpantari furent conduits sur la place centrale de Sulmona pour être jugés publiquement. Le tribunal déclara la condamnation à mort des prêtres aux centaines de personnes réunies sur la piazza centrale. La flamme bénite du bûcher purifierait l’âme des corps hérétiques. Un soulèvement populaire eut alors lieu ;
  • 120. les serpantari s’opposant à la condamnation. La réplique de la part des inquisiteurs et des catholiques locaux fut d’une extrême violence. On découvrit en 1997, lors de travaux de restauration dans la chapelle de l’église de la sainte trinité de Fulmona, l’existence d’une fresque dépeignant ce massacre. Le bûcher est représenté dans la partie supérieure, non loin on y voit l’estrade sur laquelle se trouvent les autorités cléricales et locales. Au centre de la fresque, l’artisan a pris grand soin à peindre les différentes façons dont les soldats ou encore des civils s’entretuent. Le sol est couvert de corps morts, certaines zones sont rouges de sang. Une traque aux serpantaris dans la vallée de Puligna suivit le massacre de Sulmona. La majorité d’entre eux furent réunis pour être jugés par le tribunal de l’inquisition, souvent torturés puis brûlés.
  • 121.
  • 122.
  • 123. 123 3 - Les nouilles quitareux au conilliou de pommé (recette stranièroise extraite de l’encyclopédie wikipédia)
  • 126. Traductionetorigines[modifier] Lesnouillesquitareux[modifier] Lesnouillesquitareuxsontunevariétédepâtesàl’œufdontlalargeur(entre3-4mm)estprochedestaglioniitaliens. L’utilisationdelaquitareuse(unestructuredeboisavecdesfilsd’acierletraversant)donneàlapâtesonépaisseurcar- réeetuneconsistanceporeusequipermetàlasauceaveclaquelleelleestpréparéed’êtretotalementabsorbée. Onpréparaitcetypedenouillespourdesoccasionsspéciales,leurpréparationétantlongueetlaborieusemaissur- toutcontrairementauxsagnées,réaliséesseulementavecdel’eau,delafarineetdusel,lesnouillesquitareuxétaient préparéesavecdesœufs.Ellesaccompagnaientsouventdesragoutsdeviande(veau,mouton,lapin).Onretrouvece typedepâtesdanslesAbruzzesbienqu’ellessoientmoinsépaisses. Conillioudepommé[modifier] Leconillioudepomméestunragoutdelapincuisinéaupommé.Cedernierestunesortedeconfitureàbasedecidre quel’onréalisaitàlafindel’automne.Laveilléedupomméduraittoutelanuit ;lesstranièroisserelayaientpourtourner lepommé,buvaient,mangeaient,racontaientdeshistoiresetjouaientauxcartes.Lorsquelacuissondupomméétait surlepointd’êtreterminée,onyrajoutaituneliqueurdanslaquelleonconservaitunecouleuvreàcollier(symboledela bonnefortunedanslaculturestranièroise). Préparation[modifier]
  • 128.
  • 130. 130 Rencontres inattendues (culture « originelle » mayennaise + « adoptive » italienne + «  impossible » juive) Inventerlepeuplestranièroisc’estcréeruneréflexionformellesur l’échangeculturelquiauraitlieuentredeuxculturesquinesesont jamaisàproprementrencontrées.Quesepasset-ilquandunpeuple migre sur un autre territoire, quelles sont les conséquences sur celui-ci?Quelstypesd’échangesouderefusd’échangepeuvent- ils se produire ? Pour réaliser cette fiction j’ai emprunté des éléments au réel, à savoir la culture mayennaise et la culture desAbruzzes, l’histoire de l’inquisition, la diaspora juive, massacre des italiens d’Aigues Mortes, le statu de la culture juive en Pologne etc… Autant de particules qui ont servi de terreau à mon imaginaire. J’ai d’ailleurs l’impression de ne rien créer de nouveau si ce n’est des rapprochements et des réinterprétations d’éléments qui me travaillent quotidiennement. Cette fiction me laisse la liberté d’aborder des problématiques qui travaillent notre société tout en me procurant la légèreté de la poésie.
  • 131. 131 Convaincre dans l’endurance Je suis debout derrière une table où mes notes s’éparpillent. Je parle fort et clairement et fais défiler derrière moi des images projetéesquiviennentillustrermondiscours.Jeprésentel’histoire et la culture stranièroise, notre mouvement et tente de convaincre de la nécessité d’apposer sa signature sur notre pétition. Ceci est le premier temps « officiel » de la performance. Par la suite je passe d’un individu à un autre, réponds aux questions de détail, convaincs encore et encore. Je dois faire signe d’ingéniosité en matièred’improvisation.J’inventesurlecoupdesmotsstranièrois, mon parcours de militante et mêle ces fictions à ma propre vie. Je suis toujoursViolaine Lochu, accordéoniste et étudiante en art mais mène de front mon engagement dans ce mouvement qui me tientàcœurpourdesraisonsfamiliales.Etreprécisetoutenrestant suffisamment floue, telle est la règle. Laplupartdesgenssontmifiguesmiraisinshésitentunpeu,tente dedémêlerl’histoire,medemandetimidementmais«c’estvraitout ça ? » puis finissent par se laisser tièdement convaincre. D’autres personnessontincrédulesetdèsledépartvousannoncentfièrement qu’elles refusent de joindre ce genre de causes communautaires extrémistes. L’une d’entre elles finit même par m’insulter, je suis obligée de lui rappeler le contexte dans lequel nous sommes (un centre d’art). Il y a aussi ceux qui sont encore plus enthousiastes que moi, qui font passer le mot, crient en faveur du mouvement, mêlent leur force de conviction (honnête ?) à la mienne. Je convaincs pendant deux heures et demie à coup de pétition puis d’accordéon. Les gens réunis autour des verres du vernissage se laissentdoucementglisserdansl’histoire.Onfinitpartrinqueràla cause stranièroise. Il y a même une dame qui appelle le directeur du conservatoire de Laval pour l’inciter à développer un projet musico-pédagogique autour de la culture stranièroise…
  • 132. 132 Geste imposteur Pour construire le discours, il a fallu étudier de près certains mouvementsdéfenseursdelanguesminoritaires.Mesprincipales sources ont été le site militant Oui au breton et aussi le site de la maison de la culture yiddish et son petit catalogue trimestriel. J’ai bâtipar exemplemon« agenda» ou « activités» en analysant commeilsétaientconstruits«danslaréalité».Delamêmemanière j’ai essayé d’être proche de ces causes dans les arguments, le ton de voix, la mission… Je me suis amusée à démanteler un type de discours, à mettre au jour ses mécanismes. Le même type de geste imposteur est mis en œuvre dans le sommaire du livre Que sais-je  ? ou dans la recette les nouilles quitareux au conilliou de pommé«extraite»dewikipedia.Inscrirecesfictionsdansuncadre formelpréexistantleurdonnecommeunelégitimité,lesimplante dans le réel. Conjointement, un effet de renversement peut se produire, nous questionne sur notre propre rapport aux histoires qu’on nous raconte.
  • 133.
  • 134.
  • 136. Avant- propos Cette partie est construite différemment des précédentes. Il n’y a pas un document central sur lequel repose tous les autres. De plus, elle se veut moins achevée, plus éclatée. Beaucoup de mes recherches restent en suspens et n’ont pas abouti à une « pièce ». Pour ces raisons, cette partie pourrait être pensée comme annexe, moinsintéressantequelesautres.Pourtant,jepensequ’elleesttout aussi importante que les précédentes pour au moins deux raisons. D’une part la relation que j’ai au yiddish nourrit des réflexions, des approches développées auparavant. D’une autre, j’espère développerdanslesannéesàvenircertaineschosesencoreàl’état d’embryon. Elle agit donc comme une sorte d’ouverture. Je commencerai par dire que ce qui m’a amenée à cette langue et à cette culture est mon intérêt musical. Je suis accordéoniste de musique dite « klezmer » depuis six ans et chanteuse de yiddish depuis 4 ans.Aujourd’hui je suis des cours de yiddish à la Maison de la culture yiddish et ai un groupe de musique qui se produit régulièrementdunomdeMashke.Cettesituationmefaitvivreun certainnombredequestionnementsliésaufaitqued’unepartcette langueasesproblématiquespropres(entreautresonévolutionvers unesortede«disparition»etlepoidsdelashoahquil’accompagne) et d’une autre que je n’ai pas de relation « maternelle » au yiddish (ce n’est ni ma langue ni ma culture d’origine).
  • 137. 137 1 - Partitions.........................................................................139 a - Conte de Chelm .................................................141 b - La vi a roide.......................................................147 2 - Recherches......................................................................153 a- Voyage en Pologne.............................................155 * - préparation au voyage........................157 ** - carnet de voyage...............................161 b - Entretiens *- Brama Grodzka....................................165 ** - Adva..................................................171 Table des matières
  • 138.
  • 140.
  • 141. 141 Danscettevidéo, onn’entendd’abordmavoixquis’exprimedans une langue non identifiable. Par la suite, la caméra se rapproche progressivement. On découvre alors mon doigt qui déchiffre un texte français de droite à gauche. L’alphabet latin est lu dans le sens du yiddish ; la langue dans laquelle Conte de Chelm est originellement écrit. a - Conte de Chelm (Vidéo performance, 2’10)