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SPORT/GOLDCUP2015
SOCIÉTÉ
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Haïti vs Panama
1 - 1» suite page 6
Les coopératives
veulent s'unir
pour renforcer
l'économie haïtienne
Par Elisée Décembre
Rose Adele Joachin :
« Ne t'inquiete pas
des propositions... »
Par Pierre Clitandre
«
Le CEP a pris des engagements,
lesquels seront tenus. Il y aura
des élections le 9 août. Dès six
heures du matin, tout sera en
place pour recevoir les électeurs. »
C’est ce qu’a déclaré au National le pré-
sident du CEP, qui a admis cependant
qu’il y avait trois raisons majeures qui
pourraient justifier le scepticisme des
citoyens. Entre 2012 et 2013, aucune
élection n’a pu avoir lieu tandis que
trois CEP avaient vu le jour pour dis-
paraître rapidement, ce qui démontrait
une incapacité réelle et un manque
de volonté de réaliser les joutes élec-
torales.
Ensuite, l’actuel CEP est le
résultat d’un compromis entre des
politiciens qui, peut-être, ne veulent
des élections que s’ils sont certains
de les gagner et, enfin, le fait qu’à
chaque élection il faut pratiquement
renouveler la machine électorale,
mobiliser d’autres ressources
humaines, qu’il faut prendre le
temps de former pour les rendre
performantes, dans un contexte de
jour en jour plus difficile, auquel
s’ajoute le retrait des troupes de
la Minustah de certaines zones du
pays.
«Les élections auront lieu»,
assure Pierre Louis OpontPar Gary Victor
HAÏTI / ÉLECTIONS
MERCREDI 8 JUILLET 2015 NUMÉRO 34
WWW.LENATIONAL.HT
QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI
ÉCONOMIE
Frustrations,
préoccupations
et incertitudes
ENTREVUE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL ÉLECTORAL PROVISOIRE AVEC LE NATIONAL
Le vice-président, Pierre Manigat Jr, et le président du CEP, Pierre Louis Opont. / Photo : J. J. Augustin
2 | N0
34 MERCREDI 8 JUILLET 2015
TRIBUNE
J
’aime la loi du marché, car
indépendante de la volonté
humaine, son jugement est
juste. Je l’aime encore plus,
car elle revient toujours avec un
principe naturel : on moissonne ce
qu’on a semé. Tout ceci pour vous
dire qu’Haïti est en train de couler
sous le poids des résultats de la mise
en œuvre des politiques publiques
fantaisistes par les gouvernements
haïtiens des quatre (4) dernières
années (2011 – 2015).
Le dernier exemple de l’amateurisme
du gouvernement est l’impuissance
des autorités centrales devant la
dépréciation de la gourde Haïtienne
par rapport au dollar Américain dès
le premier trimestre 2015. En effet,
au lendemain du tremblement de
terre du 12 janvier 2010, le pays a
entamé sa plus grande traversée du
désert, discrètement. Il ne faut pas
oublier qu’à cette époque, la solidar-
ité internationale empêchait, même
aux analystes économiques les plus
avisés, de prévoir que plus rien ne
sera comme avant pour Haïti. On ne
pouvait pas non plus prévoir que le
pays allait s’enfoncer dans une crise
financière sans précédent pour finir
par déboucher sur une crise moné-
taire dès la fin de 2014. Mais juste
avant de rentrer dans le vif du sujet,
permettez-moi d’abord d’établir la dif-
férence entre dépréciation et dévalu-
ation d’une monnaie. Ensuite, je
montrerai comment une dévaluation
peut être considérée comme un outil
de création de richesse, mais aussi
comme une arme redoutable sur les
marchés de change. Enfin, je tenterai
de montrer, à l’aide d’un cas pratique,
comment la justice haïtienne, par son
mode de fonctionnement, entrave
significativement l’investissement
direct étranger et, par conséquent,
a une grande part de responsabilité
dans cette crise monétaire.
Dépréciation et dévaluation
Il existe une différence entre « dépré-
ciation » et « dévaluation ». La pre-
mière résulte de la loi de l’offre et de
la demande. Ainsi, quand la demande
n’est pas suffisante, on peut assister
à une dépréciation de la monnaie
locale. Dans le cas d’Haïti, la gourde
n’est pas recherchée sur les marchés,
car le pays n’a presque rien à vendre.
À titre d’exemple, en 2013, selon «
Perspective Monde de l’Université
Sherbrooke », le secteur agricole a
représenté 23 % de la totale importa-
tion du pays. Alors que ce secteur
ne représente que 4 % de son expor-
tation totale pour la même année.
Cependant, sur cette même période,
Haïti a eu des produits manufactu-
rés pour 96 % de son exportation
totale. Dans ce cas, peut-être que
vous allez rapidement penser que
c’est une bonne chose pour le pays.
Pourtant, ces exportations ne créent
pas de la richesse pour la majorité de
la population haïtienne, car il s’agit
de la sous-traitance ! Alors retenez
bien cette leçon : la sous-traitance
ne peut en aucun cas, sortir un pays
de sa pauvreté. Ces économies profi-
tent uniquement à un petit groupe
d’entrepreneurs nationaux. En regar-
dant de plus près les chiffres globaux
du commerce des marchandises du
pays pour 2013, on voit que pour
cette même période, Haïti a importé
pour 3 milliards 551 millions 166
mille dollars US contre seulement
900 millions et 500 dollars US en
exportation. D’où une balance com-
merciale négative. Voici une pre-
mière explication à la dépréciation
de la gourde Haïtienne. Toutefois, un
État peut aussi laisser, de bonne foi,
déprécier sa monnaie. Mais je n’ose
pas croire que c’est le cas d’Haïti.
La seconde, à savoir la dévaluation,
consiste pour un État à diminuer la
valeur de sa monnaie nationale au
profit d’une monnaie de référence
ou d’un panier de monnaies. Mais il
faut dire que ces décisions se pren-
nent en général dans un régime de
change fixe. Reste à savoir à quel
régime économique appartient Haïti
! Car je ne suis pas en mesure de le
dire. Et je prends la responsabilité de
dire que ni le ministre de l’Économie
et des Finances, ni le gouverneur de
la Banque de la République d’Haïti
ne sait, de 2010 à juin 2015, à quel
régime économique ou modèle, pour
être moins embarrassant, appartient
l’économie Haïtienne, telle qu’elle est
en train de se dessiner sous nos yeux
tous les jours.
Dévaluation comme création
de richesse et comme arme
redoutable
J’avais dit plus haut que la dévalua-
tion peut être utilisée comme outil de
création de richesse. Effectivement,
la Chine le fait merveilleusement
bien. Cependant, c’est un pays grand
producteur. En effet, en 2014, le PIB
de la Chine était de 10,355 milliards
US, selon le Fonds Monétaire Inter-
national (FMI). Dans un tel cas de
figure, avec la dévaluation de sa mon-
naie, tout le monde peut acheter en
Chine. Par la même occasion, ce pays
devient le plus grand marché mondi-
al, car il est totalement accessible aux
petites bourses. Parallèlement, cette
dévaluation est une arme car elle
peut crever les économies des autres
pays. Ainsi, on assiste aujourd’hui
à une certaine peur mondiale de
l’ampleur du géant asiatique. Je veux
aussi ajouter que la dévaluation du
Yuan (monnaie chinoise) est réalisée
pour contrer les actions des fonds
spéculatifs. En d’autres termes, la
dévaluation de la monnaie pour un
pays qui produit massivement est un
moyen efficace pour doper son expor-
tation. Dans le cas d’Haïti, pourquoi
la Banque de la République d’Haïti
(Banque centrale Haïtienne) ne peut
pas arrêter l’hémorragie de la valeur
monétaire haïtienne ? Je veux pren-
dre le cas des personnes qui ont
emprunté de l’argent à la banque en
devise étrangère (dollar Américain).
Les dépréciations de la gourde Haïti-
enne sont particulièrement en train
d’être mal vécues par ces ménages,
car ils doivent payer plus d’argent
que prévu. Je reviens à la Banque
centrale haïtienne. Pour qu’elle
puisse assurer la conversion d’une
monnaie par rapport à une autre,
elle doit disposer de réserves dites de
change très élevées. Or la demande du
dollar Américain est bien supérieure
à celle de la demande de la gourde
Haïtienne. Ainsi, les réserves en mon-
naie étrangère chutent rapidement
et arrive l’incapacité de continuer
la conversion de la devise. Mais je
crois que le problème est encore pire,
car je ne pense pas que la Banque
Centrale dispose de moyens d’assurer
la conversion de la monnaie natio-
nale en monnaie étrangère. Il y a eu
des soupçons de prêt de la Banque
au Palais National. Si tel est le cas,
d’ici la fin de l’année, il se peut bien
qu’on utilise un chariot de gourdes
Haïtiennes pour s’acheter un sachet
de pains. Il reste à cette banque de
tenter de rassurer la population haï-
tienne !
La justice haïtienne entrave
l’investissement direct
étranger
L’autre entrave à la relance
économique haïtienne et qui est pro-
fondément responsable de la pauvre-
té dans laquelle vivote les haïtiens est
la justice haïtienne, plus particulière-
ment son mode de fonctionnement.
Il est vrai que l’économie haïtienne
est caractérisée par de maigres inves-
tissements étrangers. Mais cette situ-
ation n’est pas un hasard. En écono-
mie, il ne faut pas toujours penser
que tout ce qui est bon est juste.
Cependant, quand l’injustice règne
en maitre sur un marché, l’économie
ne pourra pas travailler à la reprise de
la croissance et de la distribution des
richesses créées. Or, la justice sociale
est la seule garante pour le peuple de
l’accès aux services sociaux de base.
Maintenant, posez-vous cette ques-
tion : « quelle garantie faut-il à un
investisseur avant d’injecter son
argent dans une économie ? » La
réponse est : « une garantie que son
argent ne sera pas volé et que l’État
du pays dans lequel il veut investir
dispose de lois fiables et d’un sys-
tème judiciaire qui inspire confiance
». Car l’économie est une affaire de
confiance. Quand le Ministère public
accepte à un procès des documents
falsifiés et qu’il s’érige en intimida-
teur, comment attirer des investisse-
ments dans une situation pareille
? Cette justice est orientée vers la
recherche de mobilisation de fonds
des mains des justiciables et non vers
la recherche de la vérité.
L’investisseur analyse toujours son
environnement extérieur. Car c’est le
facteur qu’il maitrise le moins.
Considérons la situation carcérale en
Haïti. Quand un investisseur apprend
qu’une prison qui a été construite
pour 1200 personnes, accueille 4000
prisonniers. Et que de cette popula-
tion carcérale, seulement 20 % sont
effectivement condamnés et purgent
leur peine, il va se dire que c’est un
pays ou le droit de personne n’est
respecté. De plus, il va s’imaginer
lui qui ne connait pas le pays, com-
ment il va faire pour avoir une jus-
tice équitable s’il doit se présenter
devant un tribunal. Si les libertés
individuelles ne sont pas respectées,
l’environnement ne sera pas propice
aux investissements étrangers. Car
n’importe qui peut trouver un avocat
malintentionné capable de corrom-
pre le ministère public et le juge qui
préside le dossier. À partir de ce
moment, l’investisseur qui n’a pas
de force de pression peut tout perdre.
Quand des juges sont capables de
faire, au mépris de la loi, des arresta-
tions fantaisistes et de compliquer
une situation judiciaire simple, Haïti
ne sera jamais « open for business ».
Le développement économique est
étroitement lié à la justice sociale.
Car après la création de richesse par
l’agent économique, il se peut bien
qu’un individu trouve un substitut au
Parquet d’une circonscription capa-
ble de décerner un mandat d’arrêt
illégal afin de pouvoir par la suite
confisquer l’avoir du propriétaire
sans aucune forme de procès. Jean-
Jacques Rousseau, dans la Nouvelle
Héloïse, critiquait déjà l’injustice
de sa société. Il parlait d’individus
guidés par leur amour-propre. Et
quand des personnes n’ayant aucune
affection naturelle occupent des
postes dans une chaine de justice,
elles ne sont que des génératrices
d’abus. Ces gens font fuir à toute
vitesse des investisseurs étrangers.
En comparaison avec la République
Dominicaine qui a reçu durant ces
quatre dernières années, en moyenne
annuelle un investissement direct
étranger de 2 milliards de dollars
Américains, Haïti, pour cette même
période ne dépasse pas 200 millions
de dollars Américains.
Il est un fait certain que la justice
haïtienne creuse notre tombe. Pour
répéter une jeune adolescente de
12 ans, « la justice d’un pays est un
outil incontournable de son dével-
oppement ». J’ajoute aussi que c’est
un outil à double tranchant. Si cela
continue, le pays deviendra inviv-
able et les autres pays de la région
se concerteront à mettre Haïti sous
redressement.
Aujourd’hui, Haïti est dans un état de
pourriture à tous les niveaux de la vie
nationale. Le pays est aussi en passe
de renouveler sa classe dirigeante.
Et cette question revient : « Qui doit
gouverner ? ».
TAVOILLOT (2011) nous invite à se
demander est-ce un seul ou plusieurs
ou tous qui doivent gouverner. C’est
aussi le temps de sortir des réflex-
ions sur la nature de la démocratie
haïtienne. C’est le moment de se
demander qui est le véritable peuple
haïtien. « Se depi nan kalepwa, pou
w konnen si vant ou applen ».
*1 : Pierre-Henri Tavoillot. Qui doit gou-
verner ? Une brève histoire de l’autorité.
(2011). Edition Grasset. 320 pages.
Directeur GénéralInstitut
National des Filières
Agricoles (INAFA)
La dépréciation de la gourde Haïtienne : résultat de la mise en œuvre des
politiques publiques fantaisistes et du fonctionnement de la justice des quatre
(4) dernières années en Haïti
Par JEAN-FRANCOIS Jacob Eliezer Jonas
MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0
34 | 3
ACTUALITÉ
Le nombre inorganisé
Cequin’estpasorganiséestanarchique,confus,désordonné,inorganique,inorgan-
isé.Cequin’estpasorganiséobéitàsesseulespulsionsdesurvieetatendanceà
broyer,àdétruiretoutcequinepeutnourrirsesdésirs.Ilpeutaussidétruirel’objet
desesdésirspartropdesoif.Sionn’agitpassurl’inorganisépourluidonnerune
forme,surtoutdanslebutdeluipermettredetravailleràlaréalisationsainedeses
propresdésirs,ilpeutdevenircommeunmauvaiscadrequidonneunemauvaise
perspectivesurtoutecréationnouvellejusqu’àmêmedétruiresafonctionpremière.
La route surélevée au « Carrefour Aéroport », qui fait la fierté du gouvernement,
ettouslestravauxréalisésautourdanslebutlouabledefaciliterlacirculationen
rendantlaprisedesdiversesdirectionsplusfaciles,risquentdedébouchersurun
casse-tête urbain digne du chaos haïtien. Ce n’est pas sans rappeler le spectacle
déplorabledubeaupontsurlefleuveArtibonitequiestplusieursfoisparsemaine
recouvertparunmarchépubliccequirendsatraverséealorsplusquedifficile.Aucun
pouvoirpublicn’ajugéjusqu’àprésentqu’unmarchépublicsurunpontousurune
routenationalen’étaitpasconcevabledansunpaysquiseveutenmarcheversla
modernité. N’accordons pas d’attention à ces plaisantins qui trouveront dans ces
pratiquesunespécificitéculturellehaïtienne.
À partir du « Carrefour Aéroport », quand on tourne vers l’est, direction Delmas
en venant de Nazon, on est déjà gêné par une station de taptap qui ne fait que
grandirjouraprèsjour.Véritablecourdesmiraclesavecsesenfantsmendiants,ses
voleurs, ses policiers ripoux. Direction nord, vers les agglomérations de Tabarre,
Clercine,c’estlamêmechose.Lemarchépublic,quicoloniselazone,sedéveloppe
déjàsouslaroutesurélevée.Bientôt,toutl’endroitneseraqu’unmarchéimmense
auquel seront annexées plusieurs stations de transports en commun permettant
d’allerd’unpointàl’autredecettehideusemégapolequedevientPort-au-Prince.
Les embouteillages peuvent devenir monstrueux si les autorités ne prennent pas
lesmesuresquis’imposent.
Le drame c’est que le nombre inorganisé ne se manifeste pas seulement dans la
pauvreté.Lenombreinorganisé,ilestaussiàtouteslesstratesdenotresociété.Nos
«beauxquartiers»n’ontsouventpasderoutes,pasdetrottoirs,pasd’électricité.
Cesontdesbidonvillesrichestoutsimplement.Etpuislenombreinorganisémeurt
facilement d’une simple indisposition. Une crise cardiaque à Port-au-Prince,
l’obligationdetrouverdessoinsenurgence,metsurlamêmebanquette,leriche
desprétendusbeauxquartiersetlepauvredeGrand-Ravine.
ToutunprogrammepournotrefuturprésidentdelaRépublique,n’est-cepas?
Il faut bien avoir le sens de l’humour en ces temps si moroses où il faut plus de
cinquante-troisgourdespourundollaraméricain.
Le National
Édito
Le nombre de
rapatriés baisse,
mais le processus
se poursuitSources : Alterpresse
HAÏTI/RÉPUBLIQUEDOMINICAINE/MIGRATION
D
e juin 2015 à date, 4 mille
822 rapatriements ont été
opérés à partir de postes
officiels et 10 mille 447 à
partir de points non-officiels, indique
la Direction de la protection civile
(DPC).
Quoique mise en garde par les
organismes de défense de droits
humains, la séparation des enfants
de leurs parents (en République
dominicaine) est constatée depuis la
mi-juin 2015.
Le processus de rapatriement des
migrants et travailleurs haïtiens par
la République dominicaine continue,
avec une certaine baisse observée
sur les points officiels, selon les
informations obtenues par l’agence
en ligne AlterPresse.
Une grande vague de personnes,
la plupart des migrants haïtiens, a
commencé à traverser la frontière
après la fin, le mercredi 17 juin
2015, du Plan national dominicain de
régularisation des étrangers (PNRE).
« Les gens continuent à rentrer,
mais le nombre de personnes par
jour a baissé sur les points officiels
», explique à AlterPresse le titulaire
du ministère de la communication,
Rotchild François Jr.
Plus de 18 mille personnes sont déjà
rentrées en Haïti depuis la fin du
PNRE dominicain, suivant les chiffres
officiels.
Le souhait des autorités haïtiennes,
pour l’instant, est de négocier, avec les
autorités dominicaines, l’utilisation
de deux points officiels, Malpasse/
Malpaso (Ouest) et Ouanaminthe/
Dajabon (Nord-Est) pour le processus
de rapatriement des migrants haïtiens
sans papiers.
Or, 4 mille 822 rapatriements ont été
opérés, de juin 2015 à date, à partir
de postes officiels et 10 mille 447 à
partir de points non-officiels, selon
la Direction de la protection civile
(DPC).
Arrivent, également, sur le territoire
haïtien, plusieurs Dominicaines et
Dominicains expulsés, car ils ne
sont plus reconnus par leur propre
pays suivant l’arrêt 168-13 de la
République Dominicaine, adopté le
23 septembre 2013.
Des Haïtiens sont aussi contraints, de
force, à laisser le pays voisin par des
citoyens ou des soldats dominicains.
Le Groupe d’appui aux réfugiés et
rapatriés (Garr) rapporte des cas de
rapatriement, en Haïti, d’enfants
nés sur le sol dominicain, qui sont
expulsés.
La séparation des enfants de leurs
parents, mise en garde par les
organismes de défense de droits
humains, est constatée depuis la
mi-juin 2015.
Le dernier cas, recensé le jeudi
2 juillet 2015, est celui de Nancy
Dorméus, âgée de 29 ans et qui a
laissé son pays quand elle avait 13
ans.
Elle est rentrée avec deux enfants,
tous deux nés d’un père dominicain.
Ces enfants ne parlent pas le Créole.
Quoique née en Haïti, leur mère a
perdu presque toute son habilité
à s’exprimer parfaitement dans
sa langue maternelle, raconte le
responsable de communication du
Garr, Josué Michel.
Le président haïtien, Michel Joseph
Martelly, a dénoncé, le vendredi 3
juillet 2015, le comportement des
dirigeants dominicains, qui semblent
n’avoir pas tenu promesse, quant à
une déportation respectueuse des
droits humains, lors d’un sommet
réunissant les chefs d’État et de
gouvernement des Caraïbes.
Les autorités haïtiennes entendent,
dorénavant, demander l’aide des pays
de la communauté internationale.
Le département d’État américain
se dit préoccupé du processus
de déportation des Haïtiens de la
République dominicaine.
« Nous suivons la situation de très près
(…) », fait savoir à AlterPresse Karl
Adam, porte-parole de l’ambassade
des États-Unis d’Amérique en Haïti.
Les États-Unis d’Amérique affirment
reconnaître le droit de tout pays de
régulariser sa situation migratoire.
Cependant, le département d’État
américain se déclare également
« engagé activement » auprès du
gouvernement dominicain et du
Haut-commissariat des Nations-
Unies pour les Réfugiés (HCR), et de
la communauté internationale « pour
insister sur le fait que toute action
devrait être prise, en conformité avec
les obligations et les engagements
internationaux », paraphés par la
République Dominicaine.
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PHOTOGRAPHES :
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CORRECTEURS :
JEAN ERIC FOUCHÉ, FRANTZ CLERGÉ,
JACKSON JOSEPH
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CARICATURISTE : FRANCISCO SILVA
DISTRIBUTION : PIERRE PAUL EMMANUEL
ADMINISTRATION : RACHELLE COMPÈRE
•••••••••••••
IMPRIMÉ EN HAÏTI PAR
LES ÉDITIONS DES ANTILLES S.A
4 | N0
34 MERCREDI 8 JUILLET 2015
ACTUALITÉ
» suite de la première page
H
uit conseillers électoraux,
à l’exception de Lourdes
Édith Joseph, indisponible,
étaient présents à cette
rencontre. Ils étaient accompagnés
du directeur exécutif du Conseil,
maître Mosler Georges, et celui des
opérations électorales, Jean Francky
Hortes.
Si le président du CEP, Pierre Louis
Opont, se sent confortable dans
le calendrier électoral en tenant
compte des pas déjà franchis,
tel n’est pas le cas des acteurs
politiques qui ont exprimé de
vives préoccupations par rapport
au respect de certaines échéances
insérées dans le calendrier
électoral. Aujourd’hui encore, les
hostilités électorales se font sentir
lors de cette rencontre entre les
partis politiques et les membres
du CEP. Invités à se prononcer sur
certaines modalités concernant
le choix des membres de bureaux
de vote et des mandataires, ces
dirigeants politiques ont saisi
l’occasion pour exprimer certaines
frustrations et préoccupations à
l’égard du processus électoral qui,
à leur avis, n’augure pas de beaux
jours.
Tout allait bien à la salle Franck
de l’hôtel Montana jusqu’à ce
qu’Esdras Cadet, candidat au
Sénat pour le département du
Nord pour la plateforme Vérité,
ait brandi une photo du candidat
à la présidence de cette structure
politique, Jacky Lumarque, écarté
de la course électorale au dernier
moment par le CEP pour défaut de
décharge. Cette action a suscité
de vives réactions dans la salle,
notamment des représentants de
partis politiques qui ont demandé
qu’Esdras Cadet soit mis à la
porte. Vacarme dans la salle. Petite
prise de bouche. Esdras Cadet,
Rudy Hériveaux, Yvon Feuillé,
tous d’anciens lavalassiens, se
querellent entre eux, avant que
l’ancien député Fredly Georges,
membre du Collectif des candidats
écartés par le CEP (Coce/CEP), ne
se mêle de la partie.
Esdras cadet conteste avec
véhémence la décision du CEP
d’écarter son candidat à la
présidence. « Le CEP veut-il
réaliser les élections en écartant
la plateforme Vérité, le seul
regroupement politique à avoir
3 832 candidats agréés avec 102
candidats à la députation, 15 au
Sénat pour 20 postes disponibles,
119 cartels de mairie, 352 cartels
de Casec, 339 cartels d’Asec et
80 cartels de délégués de Ville
? » se demande, perplexe, le
représentant de Vérité, invitant
les membres du CEP à faire preuve
de grandeur d’âme en publiant
la liste définitive des candidats
agréés à la présidence avec la
réintégration de Jacky Lumarque.
Les interventions se suivent et les
préoccupations sont nombreuses.
Le climat de sécurité, le
mécanisme de relocalisation des
électeurs, le financement des
élections (budget), la subvention
des partis politiques, le manque
de crédibilité qui entoure le
processus électoral sont parmi
les multiples préoccupations
soulevées par les responsables des
partis politiques à l’approche du 9
août, date retenue pour le premier
tour des législatives. Tenant
compte de tous ces soucis autour
du processus électoral, certains
politiques ont même opté pour
l’organisation d’élections en deux
temps, avec le premier tour des
législatives et de la présidentielle
le 25 octobre et le second tour,
qui inclura les collectivités
territoriales, le 27 décembre.
MêmePierreLouisOpontsemontre
préoccupé du climat d’insécurité
qui règne actuellement dans le
pays. D’ailleurs, le CEP en est déjà
victime pour avoir eu deux de ses
employés victimes d’attaques à
main armée. « Nous prenons très
au sérieux la mort du directeur
de cabinet du conseiller Jaccéus
Joseph. Surtout, il y a des gens
qui avaient publiquement déclaré
que les membres de ce CEP ne
seraient pas présents le jour du
scrutin en chantant officiellement
nos funérailles », a fait savoir le
patron de l’institution électorale,
visiblement tourmenté par le
climat d’insécurité.
Par ailleurs, Pierre-Louis Opont dit
avancer très bien dans le calendrier
électoral. « À date, nous respectons
le calendrier en ce qui concerne les
opérations électorales », a-t-il lancé,
précisant que le CEP a appliqué
l’article 139-1 en invitant les partis
politiques à choisir les membres
des bureaux de vote depuis le 9 juin
dernier, soit soixante jours avant la
tenue du scrutin. « Au courant de
cette semaine, le tirage au sort est
en train de se faire dans les régions
», a informé le président du CEP
qui dit agir dans le strict respect
de la loi.
De son côté, le directeur exécutif
du CEP, maître Mosler Georges, a
mis l’emphase sur l’importance
du jour du vote. « C’est le jour le
plus important dans le processus
électoral », dit-il, avant de rappeler
le rôle que doivent jouer les MBV,
les mandataires, les superviseurs,
les agents de sécurité et les
observateurs dans la réussite de
ce jour. Il souligne par ailleurs le
problème d’espace dans les centres
de vote. « Nos bureaux de vote n’ont
pas la capacité de recevoir toutes
ces personnes tenant compte du
nombre de candidats qui doivent
se faire représenter par un
mandataire », précise Mosler
Georges qui invite les dirigeants
politiques à aider le CEP à trouver
une formule pour gérer cette
affluence le jour du vote.
Frustrations, préoccupations
et incertitudespar Noclès Débréus
HAÏTI/ÉLECTIONS
À l’hôtel Montana, le mardi 7 juillet 2015, le Conseil électoral provisoire (CEP)
avait rendez-vous avec les partis politiques pour traiter du recrutement des 41
238 membres de bureaux de vote pour les législatives du 7 août prochain. Les
participants ont profité de l’occasion pour cracher leurs frustrations et leurs
préoccupations.
MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0
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ACTUALITÉ
Des attaques armées contre
des hommes politiquespar Pierre Paul Ancion
SUD-EST/ÉLECTIONS/INSÉCURITÉ
D
ans la nuit du dimanche 6
au lundi 7 juillet 2015, des
bandits armés ont attaqué la
résidence de Garaud Histo-
rique, membre du parti Renmen Ayiti,
dans la localité de Cibao, commune
de Belle-Anse. Plusieurs impacts de
balles sont encore visibles sur les
murs de la maison. Cependant, il n’y
a pas eu de victime.
Au cours de cette même soirée, à
l’avenue Baranquilla à Jacmel, des
hommes armés ont pénétré chez
Jean Raymond Jean-François,
candidat de la Fusion des socio-
démocrates à la mairie de Bainet.
Les bandits ont tiré sur tout ce qui
bougeait, blessant au thorax Kensly
Jean-François, 16 ans et neveu
de Jean Raymond Jean-François.
« Ils ont emporté l’une de mes
valises contenant des documents
importants », a révélé ce dernier.
Ces deux incidents ne manquent
pas d’irriter les politiciens du Sud-
Est. Jean Apollon Sayo, responsable
départemental de la Fusion, et Marc
Elder Charles, de Renmen Ayiti,
qualifient de politiques ces deux
attaques armées. Ils demandent
au CEP et à l’État haïtien de
renforcer la sécurité de la région,
pour rendre possible l’organisation
des élections. « Dans ce climat,
aucun de nos candidats n’osera
faire campagne », a commenté
Jean Apollon Sayo, qui a rappelé
l’agression du conseiller spécial du
président Martelly, Joseph Lambert,
sur l’étudiant en communication
sociale, Wesnel Jeudi, à la fin du
mois de juin, pour prouver que
la vie des politiciens est menacée
dans le Sud-Est.
Marc Elder Charles invite pour
sa part les autorités judiciaires
et policières à faire tout ce qui
est en leur pouvoir pour freiner
cette vague de violences dans le
département.
De son côté, Antonius Télémaque,
responsable départemental de
l’Organisation du peuple en lutte
(OPL) dans le Sud-Est, baptise de
« zone rouge » le département sur
la carte électorale. Il dénonce la
distribution substantielle d’armes à
feu dans les sections communales.
Monsieur Télémaque promet la
mobilisation de son parti pour,
pacifiquement, mater cette forme
d’intimidation.
Des appels téléphoniques
menaçants
Certains candidats, comme
madame Yolande Jean-Baptiste
Pascal, disent recevoir des menaces
à travers des appels téléphoniques
anonymes et des SMS.
Position de la Police
nationale
À la tête d’une délégation de
l’Inspection générale, l’inspecteur
général de la Police nationale
d’Haïti, Jean Saint-Fleur, s’est
rendu à Jacmel, ce lundi 6 juillet,
pour discuter de la sécurité
des élections avec le directeur
départemental de la PNH, Frantz
Elbe, et les institutions impliquées
directement dans le processus
électoral.
Dans une rencontre avec la
presse régionale, en marge de sa
mission, l’inspecteur Saint-Fleur
a donné la garantie que la PNH
allait assurer correctement la
sécurité des personnes et des biens
durant la période électorale. « Le
Sud-Est, a-t-il déploré, est le seul
département du pays où il n’y a pas
de militaires de la Minustah. Il y a
seulement des policiers nationaux
et des UNPOL, cependant pour les
élections, il est prévu d’envoyer
plusieurs militaires dans toute la
région. »
Comme l’a dénoncé le responsable
départemental de l’OPL, plusieurs
régions du Sud-Est telles que
Cayes-Jacmel et Belle-Anse, sont
toujours en ébullition en période
électorale.
Cette année, la majorité des partis
politiques et les citoyens avisés
craignent davantage de violences,
à cause de la quantité importante
d’armes à feu qui circulent dans le
département.
Cayes-Jacmel, Marigot et Belle-
Anse sont les communes où les
gens armés exhibent le plus leurs
armes. En 2012, à Pérédo, localité
de Marigot, une distribution de
produits alimentaires par un
organisme international a été pillée
par des jeunes armés de pistolets
9 mm. Ces jeunes, de 20 ans en
moyenne, ont mis en déroute les
responsables de la distribution en
pointant leurs armes.
» suite de la première page
« Les élections auront lieu »,
assure Pierre Louis Opontpar Gary Victor
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ACTUALITÉ
ENTREVUEDUPRÉSIDENTDUCONSEILÉLECTORALPROVISOIREAVECLENATIONAL
Le président du CEP s’est dit
confiant quant à la mise en place
du mécanisme de vote. Certes, à
un mois des élections, assure-t-
il, il reste encore à travailler à la
formation du personnel électoral,
au recrutement des membres
des bureaux de vote (MBV) et
finalement la publication de la liste
électorale. À presque trente jours
des élections, les partis politiques,
comme prévu à l’article 139-1
du décret électoral, n’avaient pas
encore fait parvenir au CEP ce lundi
6 juillet les noms des membres des
BV qu’ils devaient choisir sur une
liste fournie par des organisations
de la société civile.
Avec ce retard dans le calendrier, le
CEP devra convenir avec les partis
politiques d’autres modalités pour
le choix des membres des MBV
pour rester dans les temps.
Pierre-Louis Opont n’a, par contre,
manifesté aucune inquiétude
concernant les 22 millions de
dollars américains manquant au
budget électoral. Le gouvernement
fera le nécessaire pour que cette
somme soit disponible à temps,
a promis le Premier ministre
Évans Paul. Le président du CEP
s’en tient donc à la promesse du
gouvernement : « Le CEP n’a aucune
préoccupation de financement. Les
36 millions dont nous disposons
déjà suffisent pour le premier tour.
On donne au gouvernement le
temps nécessaire pour la recherche
des fonds additionnels. »
Le Pnud et le CEP
Pour ce qui a trait à l’implication
du Programme des Nations unies
pour le développement (Pnud)
dans le processus électoral, Pierre
Louis Opont a tenu à rappeler que
cet organisme ne finance pas les
élections mais ne fait que gérer
un Trust Found, opération pour
laquelle il prélève 7 à 12 % pour ses
frais de gestion. Qui contribue à ce
fonds ? Les États-Unis d’Amérique,
la France, le Japon, le Canada, le
Brésil, l’Union européenne et l’État
Haïtien, ce dernier à la hauteur de
14millions de dollars américains.
Pourquoi le Pnud gère-t-il ces
fonds, même ceux du Trésor public
? Jusqu’en 2012, selon le président
du Conseil électoral provisoire, le
Pnud ne gérait que la contribution
étrangère alors que la part du Trésor
public était gérée par le Conseil
électoral provisoire. En 2010, le
gouvernement avait demandé de
confier tous les fonds au CEP afin
de responsabiliser l’organisme en
l’habituant à la gestion directe
de ses propres ressources. Les
bailleurs avaient alors manifesté
de grandes réticences.
En 2012, continue Pierre Louis
Opont, pour une raison non
clairement définie, l’État haïtien a
choisi de confier ses prérogatives
de gestion de ses propres fonds au
Pnud. Les responsables du CEP, en
particulier son président d’alors,
Emmanuel Ménard, avaient refusé
de signer cet engagement. Le
ministère de la Planification avait
pris la responsabilité de parapher
le document, manifestant ainsi
la volonté de l’État haïtien de
transférer sa souveraineté au Pnud
contre l’avis des membres du CEP.
« Le fait que les fonds ne soient
pas gérés par le CEP implique que
toutes ses dépenses sont soumises
aux procédures du Pnud », a confié
Pierre Louis Opont. Cela explique
la décision de donner le contrat à
une firme de Dubaï (Émirats arabes
unis) pour l’impression de 30 % des
bulletins de vote.
« Les procédures du Pnud, le
peu de temps dont on disposait,
entre la finalisation des listes et
l’impression des bulletins liés à
d’autres contraintes du marché, ne
permettaient pas la participation
des imprimeurs haïtiens. Mais nous
allons faire en sorte que les firmes
haïtiennes puissent participer aux
appels d’offres pour l’impression
des bulletins pour le second tour
le 25 octobre et peut-être pour
le troisième tour le 27 décembre
2015. »
Le National a voulu rappeler au
président du CEP la période trouble
des élections de 2011 ayant abouti
à l’élection de Michel Martelly en
lui demandant s’il ne craignait
pas encore une intervention de
la communauté internationale
«Il n’est pas question que ce CEP
publie d’autres résultats que ceux
des urnes », a riposté Pierre-Louis
Opont, précisant que « le CEP a
toujours eu toute la latitude de
respecter le verdict des urnes ».
Sans entrer dans le détail des
circonstances ayant provoqué cette
mainmise de l’international dans
le processus en 2011, il a tenu à
assurer que le Centre de tabulation
où doivent être acheminés tous
les procès-verbaux est totalement
sous le contrôle de cadres haïtiens
qualifiés. En 2011, rappelle-t-il,
c’est un technicien international
qui était responsable de la
coordination des activités au CTV. Il
jouait également le rôle d’assistant
technique chargé d’entraîner le
personnel haïtien. « Aujourd’hui,
nous contrôlons tout le processus. »
Le cas Lumarque
La question des critiques adressées
au Conseil électoral provisoire,
Le président du CEP, Pierre Louis Opont. / Photo : J. J. Augustin
entre autres, dans la gestion
des cas Level et Lumarque a été
évoqué au cours de l’entrevue.
Ces deux candidats évincés, entre
sommations, déploiement d’une
impressionnante campagne de
presse et mouvements de rue,
défraient la chronique. Pierre
Louis Opont affiche la plus parfaite
sérénité. « Aucun des candidats
ayant contesté une décision du CEP
n’a pu argumenter sa position avec
des preuves valables. » Dans le cas
Lumarque, il a rappelé que l’article
90-H du décret électoral exige de
tout candidat ayant été gestionnaire
de fonds publics la présentation
d’un certificat de décharge au
moment de l’inscription. Le CEP
demande au candidat un résumé
de carrière pour savoir si nécessité
de décharge il y a. Il est vrai que le
CV de Lumarque n’avait pas permis
au CEP d’estimer nécessaire une
décharge, reconnaît Pierre-Louis
Opont.
« Il n’avait présenté qu’un papier
pour un poste à l’Institut national
de la formation professionnelle
(INFP) en 1990. Mais quand les
partis politiques nous ont informés
du cas Lumarque, en mettant sur
le tapis sa position à la tête de la
Commission présidentielle sur
l’éducation et les correspondances
de la CSCCA à l’effet qu’il lui fallait
un certificat de décharge. Nous
avons dû réétudier son dossier. Le
fait est qu’il devait avoir décharge
et qu’il n’avait pas produit la pièce
au moment de l’enregistrement.
» Pierre-Louis Opont a soumis au
National deux correspondances de
la Cour supérieure des comptes,
les deux signées de son président
Fritz Robert Saint Paul, la dernière
en date du 2 juin 2015 adressée
à Jean Renel Sanon, le Secrétaire
général du Palais national, où il est
clairement dit qu’une commission
a été formée pour auditer la gestion
de Jacky Lumarque.
Dans cette lettre, on peut lire ce qui
suit : « La CSCCA apprécierait que
vous preniez toutes les dispositions
nécessaires pour permettre à la
commission d’effectuer son travail.
À cet égard, elle vous saurait gré de
lui faire savoir quand l’accès aux
documents comptables lui sera
donné. »
Le National a bien vérifié que cette
dernière lettre a été effectivement
transmisele2juin2015.Cependant,
un certificat de décharge est délivré
à Jacky Lumarque après un arrêt
de quitus rendu le mercredi 3
juin 2015 par la Chambre des
affaires financières composée des
conseillers Fritz Robert Saint Paul,
président, Jean Ariel Joseph et
Saint Juste Momprévil, membres.
« Jacky Lumarque n’avait pas ce
certificat de décharge au moment
de son inscription. Débat clos »,
tranche Pierre Louis Opont sans
questionner cet arrêt. « Le CEP ne
reviendra pas sur sa décision. »
Nouveau décret électoral
et innovations
Le président du Conseil électoral
provisoire a tenu à souligner pour
Le National ce qui fait la différence
entre le nouveau décret électoral
et les législations antérieures.
Pour lui, ce décret comporte trois
innovations majeures. D’abord,
précise-t-il, il y a une modification
des instances contentieuses. «
Aujourd’hui, le CEP n’est plus juge
et partie. Toute décision, explique-
t-il, est prise à la majorité des juges
siégeant au niveau des instances
contentieuses. Le CEP ne dispose
pas de la majorité des voix.
Le Bureau du contentieux électoral
communal (BCEC) est composé de
trois juges : un membre du Bureau
électoral communal (BEC), tiré au
sort, un avocat choisi au hasard sur
une liste fournie par le barreau de
la région, et un juge de siège choisi
également au hasard sur une liste
fournie par le Conseil supérieur du
pouvoir judiciaire (CSPJ). Même
procédé au niveau du Bureau du
contentieux électoral départemental
(BCED) : un membre du Bureau
électoral départemental (BED),
par tirage au sort, un avocat et un
juge. Le Bureau du contentieux
électoral national (BCEN), qui juge
en dernier recours, est composé de
deux conseillers électoraux tirés au
sort, deux avocats de la Fédération
nationale des barreaux d’Haïti, et
un juge de la Cour d’appel fourni
par le CSPJ. Donc le CEP n’a plus
le contrôle des décisions au niveau
des instances contentieuses. »
La deuxième innovation, selon
Pierre-Louis Opont, est le mode de
choix des membres des bureaux
de vote qui sont choisis par les
partis politiques sur une liste
fournie par des organisations de
la société civile. La dernière, et la
plus marquante peut-être, est la
transmission par voie électronique
des résultats des procès-verbaux
affichés sur les murs des bureaux
de vote. Après dépouillement, les
procès-verbaux seront disponibles
sur le net, ce qui permettra aux
candidats de pouvoir examiner
leur parcours avant même que les
procès-verbaux n’arrivent au Centre
de tabulation. « Un téléphone
sécurisé sera fourni à chaque
bureau de vote pour cela. Nous
aurons un accès aussi sécurisé pour
la transmission des données à Port-
au-Prince. Cet accès ne pourra pas
être piraté », a certifié le président
du Conseil électoral provisoire.
Le coût des élections
et la question sécuritaire
À la question de savoir s’il n’était
pas possible à l’avenir de réduire
les coûts des élections, le président
du Conseil est convaincu qu’on
devrait repenser complètement le
modèle électoral actuel en Haïti,
ce qui par ailleurs remet sur le
tapis la nécessité d’une institution
permanente avec un personnel
permanent et qualifié.
La question sécuritaire a été
également évoquée au cours
de cette entrevue. « Toutes les
mesures seront prises pour assurer
la sécurité pendant la période
électorale et le jour du vote. On a eu
des garanties de la Minustah et de
la Police nationale qui ont travaillé
à un plan de sécurité. » Mais il se
dit conscient que ce sont là des
éléments hors de contrôle directe du
Conseil électoral provisoire, alors
que c’est « une question cruciale
de la problématique électorale ».
Un proche du conseiller électoral
Jaccéus Joseph a été assassiné
dimanche soir. « Nous prenons au
sérieux maintenant les menaces
qu’on nous a faites », a dit Pierre-
Louis Opont. « Nous ne pensions
pas que ces gens passeraient à
l’action. Nous avons eu tort. Nous
avons eu une rencontre en ce
sens avec le ministre chargé des
questions électorales et la sécurité
des conseillers et de leurs proches
a été renforcée. » Le flot des
rapatriés aura-t-il un impact sur les
élections ? Réponse laconique de
Pierre-Louis Opont : « Ils ne sont pas
sur les listes électorales, cependant
nous espérons que l’État haïtien
prendra toutes les dispositions pour
éviter que cette situation n’affecte
le processus électoral. »
Cap donc vers les élections ?
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ACTUALITÉ
ÉCHO
Financement des
candidats : le CEP
attend les moyens
Le gouvernement haïtien tarde
encore à fournir au Conseil
électoral provisoire des fonds
nécessaires en vue de financer les
candidats aux prochaines élections
législatives. C’est ce qu’a révélé
Frantz Bernadin, Porte-parole du
CEP, qui a fait remarquer qu’il
revient à l’organisme électoral
de décider du montant à allouer
aux partis politiques en fonction
du nombre de candidats agréés.
Aucune subvention financière
ne sera allouée aux candidats
indépendants. La campagne pour
les législatives débute ce 8 juillet.
Le CEP forme les ASE
du 13 au 25 juillet
prochains
Le Conseil électoral provisoire
travaille actuellement sur le
recrutement des agents de sécurité
électorale (ASE) ainsi que des
superviseurs. Le corps de sécurité
électorale devrait avoir un effectif
de 5 000 membres, selon un
communiqué du CEP informant
que la formation pour ces agents
se tiendra du 13 au 25 juillet 2015,
à travers tout le pays.
Haïti-RD, l'OEA se
réunit sur le dossier
de déportations
Le Conseil permanent de
l’Organisation des États américains
(OEA) organise, ce mercredi 8
juillet 2015, une réunion spéciale
autour de l’expulsion du territoire
dominicain des migrants haïtiens
illégaux ainsi que des personnes
d’origine haïtienne frappées
par l’arrêt 168-13 de la Cour
constitutionnelle dominicaine.
Cette rencontre se tiendra au siège
de l’OEA à la Salle Simón Bolívar
à Washington DC. Lener Renauld,
ministre des Affaires étrangères
d’Haïti, soumettra un rapport sur
l’évolution de la situation entre
Haïti et la République dominicaine,
informe un communiqué de l’OEA
indiquant que cette réunion sera
diffusée en direct sur son site Web.
La FNP,
pour l'érection d'un
mur sur la frontière
haïtiano-dominicaine
Les dirigeants de la Force nationale
progressiste (Fuerza Nacional
Progresista - FNP) proposent
d’établir un système complet de
surveillance de la frontière haïtiano-
dominicaine. Ils préconisent la
construction d’un mur sur 388 km
entre la République dominicaine
et Haïti. Selon les nouvelles, ces
dirigeants estiment non nécessaire
que ce mur soit construit sur toute
la ligne frontalière en raison de
l’existence des zones escarpées qui
empêchent le passage des migrants
illégaux et entravent la contrebande
de toute sorte sur le territoire
dominicain.
Une nouvelle
commission communale
à Fort-Liberté
Un nouveau conseil exécutif
intérimaire est installé, lundi, à la
tête de la mairie de Fort-Liberté.
Ce conseil est présidé par Ken
Lafosse, qui a remplacé Guito
Pierre actuellement candidat à
la députation aux prochaines
élections. L’installation est faite en
présence d’Hugo Charles, délégué
départemental du Nord-Est, qui a
conseillé à monsieur Lafosse de
travailler au progrès de la commune.
Cayes : EPPLS annonce
un projet
de construction
de 300 maisons
L’Entreprise publique de promotion
de logements sociaux (EPPLS) a
inauguré récemment un modèle de
six unités de logement au quartier
de La Savane dans la ville des
Cayes. Le projet vise la construction
de 300 maisons. En attendant la
disponibilité des fonds nécessaires
à l’exécution intégrale du projet,
l’EPPLS a construit trois duplexes.
C’est ce qu’a indiqué Esson
Dorisca, son directeur, informant
que ces constructions ont pu être
effectuées grâce aux cotisations de
bénéficiaires des logements sociaux
gérés par l’EPPLS.
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MONDE
4
43 Américains ont remis leur
très officielle Déclaration de
candidature à la commission
électorale fédérale, pour
l’élection présidentielle américaine
de novembre 2016. Une poignée
seulementaseschances,évidemment.
Vous aviez déjà des difficultés à
vous y retrouver parmi la vingtaine
de prétendants républicains «
sérieux » qui souhaitent défier la
favorite démocrate Hillary Clinton
dans la course à la Maison-Blanche
en 2016 ?
Accrochez-vous: au total, ce sont
443 candidats qui se sont déjà
déclarés pour l’élection présiden-
tielle américaine. Un nombre qui
marque une nette inflation des
vocations: ils étaient 417 en 2012
et 369 en 2008.
100 Républicains, 72
Démocrates et les autres...
La plupart n’a aucune chance
d’aller au bout des primaires,
ni même de commencer ce
processus long et coûteux. Mais
ces 443 Américains ont rempli la
Déclaration de candidature.
Ce document doit être soumis
à la commission électorale
fédérale, dans les 15 jours après
que le candidat s’est lancé dans
la bataille et dès qu’il a levé plus
de 5 000 dollars pour financer sa
campagne. Parmi ces aspirants
au Bureau-Ovale, figurent 100
Républicains, 72 Démocrates,
11 Libertariens, 3 Ecologistes, 1
Fédéraliste... et surtout beaucoup
d’indépendants ou de non-inscrits.
[Voir notre tableau de répartition].
Au-delà des étiquettes, qui sont
ces candidats? Mais surtout d’où
viennent-ils? Le site Mother Jones
(qui a dénombré 448 candidats au
total) les a situés sur une carte:
c’est de Californie que viennent le
plus de candidats (59). La Floride
(42), le Texas (41), l’Etat de New
York (32) et la Pennsylvanie (18)
sont les autres gros pourvoyeurs
en candidats.
Le seul Etat qui n’en fournit
aucun: l’Alaska... Mais que fait
Sarah Palin?
Etats-Unis: Bush, Clinton, Trump et les 440
autres candidats à la Maison-Blanche
Sources : LEXPRESS.fr
Le retour d'Edward Snowden
aux États-Unis envisagésources : Lefigaro.fr
L
’ancien ministre de la justice,
Eric Holder, a laissé enten-
dre que la justice américaine
pourrait négocier un accord
avec l’ex-consultant informatique de
la NSA. Des poursuites judiciaires
seraient néanmoins maintenues.
En mars dernier, son avocat lais-
sait entendre qu’Edward Snowden
souhaitait rentrer aux États-Unis.
Son retour semble désormais aussi
envisageable pour les États-Unis.
Dans une interview accordée à
Yahoo News, Eric Holder, l’ancien
ministre américain de la Justice, a
indiqué que «la possibilité existe»
pour le département américain de
la Justice de conclure un accord
avec l’ancien consultant informa-
tique de la NSA. Ce dernier devrait
néanmoins faire face à des pour-
suites judiciaires.
Trois sources proches du dossier,
citées par les médias américains,
estiment qu’Edward Snowden ne
pourra rentrer aux États-Unis qu’à
condition de plaider coupable et
purgerait une peine de prison de
trois à cinq ans. Il devrait aussi
coopérer pleinement avec le gou-
vernement américain.
En mars dernier, Edward Snowden,
actuellement en Russie, avait
exprimé le souhait de regagner
les États-Unis. Son avocat avait
annoncé que des efforts étaient
entrepris en ce sens, mais à la
condition qu’on lui garantisse un
procès légal et équitable.
Eric Holder, alors encore en poste
au ministère, avait uniquement
fait la promesse qu’il ne serait pas
condamné à mort. Une sentence à
laquelle il s’est exposé après avoir
révélé les pratiques de surveil-
lance de la NSA, en violation du
Espionage Act de 1917.
Ces déclarations d’Eric Holder
sont les premières à affirmer que
la justice américaine pourrait
négocier avec Edward Snowden,
mais elles ne disent pas si le gou-
vernement d’Obama à changer de
position sur l’affaire Snowden.
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MONDE
Q
uatre pays parrainant les
pourparlers entre le gou-
vernement colombien et les
Farc (Forces armées révolu-
tionnaires de Colombie) ont appelé
mardi à une « désescalade urgente »
des violences qui menacent de faire
dérailler le processus de paix.
« Nous exhortons les parties à
s’abstenir strictement de toute
action causant des victimes ou des
souffrances en Colombie, et à accé-
lérer la mise en œuvre des mesures
d’établissement de la confiance »,
peut-on lire dans un communiqué
signé de la Norvège, de Cuba, du
Chili et du Venezuela. « Nous con-
sidérons ces mesures comme essen-
tielles. »
Le principal négociateur du gou-
vernement colombien a menacé de
quitter les négociations en raison
de cette récente intensification des
violences sur le terrain.
Les Farc réclament pour leur part
un cessez-le-feu bilatéral, ce que
Bogota refuse, s’appuyant sur des
exemples passés de trêves que les
rebelles avaient mises à profit pour
se réarmer.
Le conflit le plus long de
l’Amérique latine a fait 220 000
morts et des millions de déplacés
depuis 1964. Les pourparlers de
La Havane, qui ont débuté en
novembre 2012, ont produit des
résultats encourageants, les plus
importants jamais engrangés
lors de négociations de paix
entre les deux parties. Mais les
violences se sont intensifiées ces
dernières semaines, depuis une
embuscade rebelle qui a coûté la
vie à dix militaires en avril et qui a
conduit le président Juan Manuel
Santos à ordonner une reprise des
bombardements aériens contre la
rébellion, qu’il avait suspendus
un mois plus tôt en gage de bonne
volonté. Depuis le début des
pourparlers, Bogota et les Farc ont
réglé plusieurs points importants,
sur la réforme agraire, l’avenir
politique des Farc et la fin du trafic
de drogue.
Deux dossiers restent à régler, celui
de l’indemnisation des victimes et
la démobilisation des Farc.
Les pourparlers de paix sur la Colombie
menacés de déraillementSources : Reuters
Grèce: une sortie de l'euro pas exclue
pour la Commission européenne
sources : AFP
U
ne sortie de la Grèce de la
zone euro n’est « pas exclue
» si Athènes ne présente pas
« un paquet de réformes
crédibles », a estimé mardi Valdis
Dombrovskis, vice-président de la
Commission européenne, avant un
sommet extraordinaire qui va explor-
er les minces chances de sauvetage
du pays.
« Si la confiance n’est pas établie,
si aucun programme de réformes
crédible n’est présenté », une
sortie de l’euro « ne peut être
exclue », a déclaré le commissaire
européen chargé de l’Euro, à son
arrivée à une réunion des minis-
tres des Finances de la zone euro
à Bruxelles.
Afin d’ « éviter le scénario du pire
» auquel la Commission « ne se
résigne pas », il revient aux Grecs
de « présenter des propositions
complètes, concrètes, crédibles
pour pouvoir démarrer la discus-
sion », a dit de son côté Pierre
Moscovici, commissaire euro-
péen aux affaires économiques.«
Les réponses de M. Tsakalotos
(nouveau ministre des Finances
grec, ndlr) doivent être concrètes,
crédibles, tangibles efficaces »,
a-t-il insisté.
A leur arrivée à cette réunion, les
ministres des Finances de Slova-
quie, Lettonie et de Malte ont
déclaré que le scénario du Grexit,
la sortie de la Grèce de la zone
euro, était désormais clairement
envisagé. « C’est une solution
que les marchés (financiers) ont
déjà envisagée depuis un moment
maintenant et ce ne sera pas un
problème pour l’Europe », a dit le
Letton Janis Reirs.
Pour le Maltais Edward Scicluna,
« nous devons envisager les deux
possibilités » d’un maintien ou
d’une sortie de la Grèce de la zone
euro, cette dernière possibilité
étant désormais « réaliste ». « Il
faut s’assurer qu’elle est très bien
gérée et pas utilisée comme un
bâton », a-t-il relevé.
« Personnellement je suis scep-
tique sur la possibilité d’un accord
» entre la Grèce et ses créanciers,
a dit le Slovaque Peter Kazimir
dont le pays fait partie du camp
des plus durs à l’égard d’Athènes.
A l’inverse, le ministre des Financ-
es espagnol Luis de Guindos s’est
voulu optimiste, assurant que le
scénario du Grexit n’était « pas
sur la table ». « La balle est dans
le camp grec », selon lui.
Le Grec Euclide Tsakalotos,
successeur de Yanis Varoufakis
comme ministre des Finances
d’Alexis Tsipras, ne s’est pas expri-
mé à son arrivée à l’Eurogroupe,
tout comme le Français Michel
Sapin.
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ÉCONOMIE
L'université populaire d'été pour
le renforcement de l'économie
sociale et solidairePar Karenine Francesca Théosmy / AlterPresse
L’université populaire d’été 2015 aurait permis de prendre des résolutions pour renforcer les expériences
d’économie sociale et solidaire en Haïti, apprend AlterPresse.
L
’événement s’est déroulé sur
dix jours, du dimanche 21 juin
au mercredi 1er juillet 2015,
avec la participation de près
d’une centaine de représentantes et
représentants d’organisations pay-
sannes, de jeunes et de femmes.
Comme en 2014, les échanges
ont tourné autour de l’économie
sociale et solidaire pour la trans-
formation sociale, thème retenu
pour trois ans.
« L’on a pu prendre des résolu-
tions pour faire atterrir l’économie
sociale et solidaire. Parce que
beaucoup d’expériences ont lieu
dans ce domaine [en Haïti] et
nous avons pris des résolutions
pour améliorer ces expériences »,
déclare à AlterPresse Guy Numa,
responsable de programme au sein
de l’Institut culturel Karl Levêque
(Ickl).
Une déclaration finale, en prépa-
ration, devrait bientôt être rendue
publique.
L’édition 2015 a signé des « évo-
lutions importantes, positives »,
aux yeux du professeur Camille
Chalmers, directeur exécutif de la
Plateforme haïtienne de plaidoyer
pour un développement alternatif
(Papda).
« Cette année, nous avons pu con-
crétiser, pendant les deux premiers
jours, un échange magnifique
entre 16 étudiants - qui sont en
maîtrise au niveau de l’université
publique… - et les participants à
l’université d’été », dit-il.
Les étudiants ont « produit des
résultats très intéressants sur le
plan des nouveautés, des inno-
vations, de la créativité et sur le
plan de la nécessité de mainte-
nir un dialogue fécond entre les
mécanismes de recherches de
l’université publique et les efforts
de la population ».
Les étudiants ont également eu la
possibilité de présenter, en ate-
liers, leurs recherches et de rece-
voir les critiques.
Des expériences d’économie soci-
ale et solidaire, en milieu rural
et urbain, dont une expérience
de boulangerie alternative dans
quatre départements du pays, ont
pu être présentées avec la partici-
pation des étudiants.
« Cela a été un échange absolu-
ment égalitaire, qui s’est déroulé
dans une ambiance cordiale et qui
a montré combien les étudiants
travaillaient dans leurs recherch-
es, sans avoir vraiment beaucoup
d’informations sur ce qui se passe
dans le pays, sans être connectés
aux dynamiques collectives des
organisations de base », relève
le professeur Camille Chalmers,
parlant d’une expérience positive
pour l’avenir.
Des discussions autour de sous-
thèmes en trois groupes ont égale-
ment eu lieu.
Un groupe s’est penché sur
l’économie sociale et solidaire
sous la houlette de la Papda.
Un deuxième a considéré
l’économie sociale et solidaire
et la communication, sous les
auspices de Sosyete animasyon
ak kominikasyon sosyal (Société
d’animation et de communication
sociale / Saks).
Le troisième groupe a abordé la
lutte des femmes et l’économie
sociale et solidaire, avec la Soli-
darité des femmes haïtiennes
(Sofa).
Ont pris la parole plusieurs
intervenantes et intervenants, à
l’image de Kenidd Acelin, Evelyne
Larrieux, Olga Benoît et Carole
Pierre-Paul Jacob (toutes les 4 de
Sofa), du professeur Jean Rénold
Elie, coordonnateur général de la
Faculté des sciences humaines
(Fasch) de l’Université d’Etat
d’Haïti (Ueh), du professeur Ary
Régis, directeur général de la Saks
et responsable du département de
communication de la Fasch, ainsi
que de Marc Arthur Fils-Aîmé et
Muller Pierre-Louis de l’Ickl.
Cette université populaire, initia-
tive du mouvement social haïtien,
a pris naissance depuis déjà une
dizaine d’années avec l’Ickl. Par la
suite, l’ont rejoint d’autres institu-
tions, comme la Papda, la Saks, la
Sofa, le Programme alternatif de
justice (Paj) et l’Institut de tech-
nologie et d’animation (Iteca).
Entre l’édition 2015 et la pro-
chaine, ces organisations con-
tinueront à travailler, en réalisant,
notamment, une évaluation des
5 dernières éditions, des forums
intermédiaires et un processus
d’accompagnement des expéri-
ences menées à la base, selon
Chalmers.
Le contexte sera marqué par les
élections, prévues entre août et
décembre 2015, pour le renouvel-
lement de tous les postes électifs,
sauf 10 au sénat de la république.
« L’on peut s’attendre à ce qu’au
niveau des joutes électorales, il y
ait beaucoup plus de présence des
organisations sociales et populai-
res… pour que les débats ne soient
pas concentrés sur un individu »,
mais abordent aussi des thèmes,
tels la réforme agraire, l’eau pota-
ble, la reforestation, l’éducation,
entre autres, annonce Chalmers.
Par ailleurs, le directeur de la
Papda souligne les difficultés de
financer l’université populaire.
Cette année, un grand nombre
de volontaires ont participé à son
organisation, de même qu’une
entreprise sociale et solidaire de
restauration, Konbit Fanm Saj.
HAÏTI-DÉVELOPPEMENTDURABLE
Les participants ont pu prendre des résolutions pour faire atterrir l’économie sociale et solidaire. / Photo: Fritznelson Fortuné
MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0
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ÉCONOMIE
Les coopératives veulent s'unir
pour renforcer l'économie haïtiennePar Elisée Décembre
ÉCONOMIESOCIALE
OCDE : Le monde doit prendre en compte le coût
réel du charbon pour vraiment protéger le climat
Les gouvernements devraient reconsidérer le rôle du charbon dans les approvisionnements énergétiques, car l’ampleur des nouveaux
investissements consacrés aux centrales à charbon polluantes représente la menace climatique la plus pressante, a déclaré le Secrétaire
général de l’OCDE, Angel Gurría.
Les pays devraient procéder à une évaluation plus rigoureuse du coût réel du charbon. Comme les prix ne tiennent pas pleinement
compte des coûts environnementaux, sanitaires et financiers de ce combustible, beaucoup de centrales électriques aujourd’hui en
construction devront peut-être être fermées avant la fin de leur durée de vie utile, a souligné M. Gurría lors d’une conférence donnée
à l’invitation de la London School of Economics (LSE) et d’Aviva Investors, associés à ClimateWise.
S’il s’avère que les énergies de remplacement du charbon sobres en carbone ne sont pas à la portée de certains pays en développement,
les pays donneurs devraient mobiliser des financements pour combler l’écart.
« Le charbon n’est pas une énergie bon marché, a noté M. Gurría. Les gouvernements doivent se demander sérieusement si le choix de
cette énergie est bénéfique pour les citoyens. »
En l’absence de nouvelles mesures d’atténuation, on estime que la production d’énergie à partir de charbon émettra plus de 500 mil-
liards de tonnes de CO2 entre aujourd’hui et 2050, ce qui représente la moitié environ du « budget carbone » qu’il s’agira de ne pas
dépasser pour maintenir l’élévation de la température mondiale en dessous de 2 °C.
www.timounaid.org
C
ette journée de réflexion
autourduthème«Tètansanm
nan mitan fanmi kooperativ
yo » organisée au local de «
Koprofer kenbe » à Cazeau a permis
à ces acteurs de l’économie solidaire
et sociale d’évaluer les interventions
qui, de 1951 à nos jours, épaulent sur
le terrain la masse populaire avec leur
dispositif de microfinance.
La journée internationale des
coopératives ne date pas d’hier.
Elle a été instaurée dans les
annales des journées mondiales
par l’Association des coopératives
internationales (ACI) depuis 1922,
soit 32 ans après leur création.
Pour célébrer ce 93e anniversaire,
l’ACI a retenu comme thème : «
Opter pour les coopératives, opter
pour l’égalité. » Une grande théma-
tique qui invite au positionnement
militant. « Il nous fallait réagir
cette année devant une telle per-
spective » a indiqué Frantz Prinvil,
l’un des membres de CCH.
Dans le cadre de cette journée,
un représentant du ministère des
Affaires sociales s’est prononcé
sur « la protection sociale et les
coopératives » et la séance s’est
terminée par des échanges relatifs
aux objectifs visés par le Collec-
tif. « Notre vision est assez osée »,
avoue Mr Prinvil, car nous voulons
de prime abord avoir un recense-
ment de toutes les coopératives
du pays pour ensuite les inviter à
intégrer les rangs de l’Association
des coopératives internationales
(l’ACI) et de la Confédération des
coopératives de l’Amérique cen-
trale (CCCA).
« Nous occupons une place
prépondérante dans l’industrie
de la microfinance en Haïti. Nous
faisons un travail de proximité.
Nous sommes présents dans tous
les recoins du pays, du départe-
ment du Sud au Nord-Ouest en
passant par l’Ouest et le Centre
il n’y a pas une ville du pays où
l’on ne retrouve pas au moins une
coopérative », s’enorgueillit Frantz
Prinvil.
De la plus ancienne coopérative
d’Haïti, la Caisse populaire Sainte
Anne fondée en 1951 à la Vallée
de Jacmel, à toutes celles qui ont
pris naissance au cours des années
après, le souci est clair : aider les
petites bourses à survivre dans
un pays où l’emploi est comme
une denrée rare. « Il est clair
que la présence de ces coopéra-
tives exerce un impact positif sur
l’économie haïtienne ».
Frantz Prinvil pense que c’est un
affront à l’égard des coopératives
le fait d’enlever de la constitution
la phrase qui stipulait que : « Haïti
est une République coopératiste. »
Un accident de parcours pour le
Collectif des coopératives haïti-
ennes dont la mission est de défen-
dre les intérêts des coopératives
en Haïti.
La commémoration de la journée internationale des coopératives, ce samedi 4 juillet écoulé, a été l’occasion
de la création du Collectif des coopératives haïtiennes (CCH), une association qui regroupe la majorité des
coopératives du pays et qui se fixe déjà de grands objectifs.
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ÉCONOMIE
Les péchés d'HaïtiPar Eduardo Galeano*
Ce texte de l’auteur des « Veines ouvertes de l’Amérique Latine » date de 1996. Galeano y revient sur l’Histoire
d’Haïti. Et il explique comment l’Occident a construit la malédiction de cette île au fur et à mesure des ans, parce
qu’elle était habitée par des noirs.
PAGERETROUVÉE
L
a démocratie haïtienne est née
il y a un moment. Dans son
bref temps de vie, cette créa-
ture affamée et malade n’a reçu
que des gifles. Elle était nouvelle-née,
dans les jours de 1991, quand elle a
été assassinée par le coup de force
militaire du général Raoul Cedras.
Trois ans plus tard, elle a
ressuscité. Après avoir subi et
être sortie de tant de dictatures
militaires, les États-Unis sont
venus et ont mis en place le
président Jean-Bertrand Aristide,
qui avait été le premier président
dans toute l’histoire d’Haïti élu
par un vote populaire et qui avait
eu la folle idée de vouloir un pays
moins injuste.
Le vote et le veto
Pour gommer les traces de la
participation américaine dans la
dictature carnassière du général
Cedras, les marines ont emporté
160 000 pages de dossiers secrets.
Aristide est revenu enchaîné. Ils
lui ont donné la permission de
récupérer le gouvernement, mais
lui ils ont interdit le pouvoir.
Son successeur, René Préval, a
obtenu presque 90% des votes,
mais n’importe quelle personne
de quatrième catégorie du FMI ou
de la Banque Mondiale a plus de
pouvoir que Préval, même si le
peuple haïtien ne l’a pas choisi.
Le veto peut plus que le vote.
Veto aux réformes : chaque fois
que Préval, ou quelqu’un de
son gouvernement, demande
des crédits internationaux pour
donner du pain aux affamés, des
lettres aux analphabètes ou une
terre aux paysans, il ne reçoit pas
de réponse, ou ils lui répondent
en lui ordonnant : - Récitez la
leçon. Et comme le gouvernement
haïtien n’en finit pas d’apprendre
qu’il faut démanteler le peu de
services publics qui restent, les
dernières pauvres protections
pour l’un des peuples les plus
abandonnés du monde, les
professeurs considèrent l’examen
comme perdu.
L’alibi démographique
À la fin de l’an passé quatre
députés allemands ont visité
Haïti. Ils n’étaient pas arrivés que
la misère du peuple les a frappés.
Alors l’ambassadeur d’Allemagne
leur a expliqués, à Port-au-Prince,
quel est le problème : - C’est un
pays surpeuplé - a-t-il dit-. La
femme haïtienne veut toujours,
et l’homme haïtien peut toujours.
Et voilà qu’il a ri. Les députés se
sont tus. Cette nuit, l’un d’eux,
Winfried Wolf, a consulté les
chiffres. Et voilà qu’il a vérifié
qu’Haïti est, avec le Salvador,
le pays le plus surpeuplé des
Amériques, mais il est aussi
surpeuplé que l’Allemagne :
il a presque la même quantité
d’habitants au kilomètre carré.
Durant son séjour en Haïti, le
député Wolf a été frappé par la
misère : il a aussi été ébloui par la
capacité de création des peintres
populaires. Et voilà qu’il est
arrivé à la conclusion qu’Haïti est
surpeuplé... d’artistes. En réalité,
l’alibi démographique est plus
ou moins récent. Jusqu’à il y a
quelques années, les puissances
occidentales parlaient plus
clairement.
La tradition raciste
Les États-Unis ont envahi Haïti en
1915 et ils ont gouverné le pays
jusqu’en 1934. Ils se sont retirés
quand ils ont réussi leurs deux
objectifs : faire payer les dettes
de la City Bank et abroger l’article
constitutionnel qui interdisait
de vendre les plantations aux
étrangers. Robert Lansing,
Secrétaire d’État de l’époque,
a justifié la longue et féroce
occupation militaire en expliquant
que la race noire était incapable
de se gouverner elle-même, qu’elle
a “une tendance inhérente à la
vie sauvage et une incapacité
physique de civilisation”. L’un
des responsables de l’invasion,
William Philips, avait forgé
quelque temps auparavant cette
idée sagace : “Ils sont un peuple
inférieur, incapable de conserver
la civilisation que les français leur
avaient laissés”.
Haïti avait été la perle de la
couronne, la colonie la plus riche
de France : une grande plantation
de sucre, avec une main-d’œuvre
d’esclaves. Dans L’esprit des lois,
Montesquieu avait expliqué sans
tergiverser : “Le sucre serait trop
cher si les esclaves ne travaillaient
pas dans sa production. Les
esclaves sont noirs depuis les
pieds jusqu’à la tête et ils ont le
nez si écrasé qu’il est presque
impossible d’avoir pitié d’eux. Il
semble impensable que Dieu, qui
est un être très savant, ai mis une
âme, et surtout une bonne âme,
dans un corps entièrement noir”.
En revanche, Dieu avait mis un
fouet dans la main du berger. Les
esclaves qui ne se distinguaient
pas par leur volonté de travail. Les
noirs étaient esclaves par nature
et feignants aussi par nature, et
la nature, complice de l’ordre
social, était l’œuvre de Dieu : un
esclave devait servir le maître et
le maître devait punir l’esclave qui
ne montrait pas un tant soit peu
d’enthousiasme pour remplir le
dessein divin. Karl Von Linneo,
contemporain de Montesquieu,
avait fait précisément un savant
portrait du noir : “Un vagabond,
paresseux, négligent, indolent
avec des coutumes dissolues”.
Plus généreusement, un autre
contemporain, David Hume,
avait vérifié que le noir “peut
développer une certaine habileté à
s’humaniser, comme le perroquet
qui parle quelques mots”.
L’humiliation impardonnable
En 1803 les noirs d’Haïti ont
administré une raclée terrible aux
troupes de Napoléon Bonaparte,
et l’Europe n’a jamais pardonné
cette humiliation infligée à la race
blanche. Haïti a été le premier
pays libre des Amériques. Les
États-Unis avaient conquis avant
son indépendance, mais il avait
environ un million d’esclaves qui
travaillaient dans les plantations
de coton et de tabac. Jefferson,
qui était propriétaire d’esclaves,
disait que tous les hommes sont
égaux, mais il disait aussi que les
noirs ont été, sont et resteront
inférieurs. Le drapeau des libertés
a été dressé sur des ruines. La
terre haïtienne avait été dévastée
par la monoculture du sucre et
détruite par les calamités de la
guerre contre la France, et un tiers
de la population était tombée au
combat. Alors a commencé le
blocage. LA nation nouvellement
née a été condamnée à la solitude.
Personne ne li achetait, personne
ne lui vendait, personne ne la
reconnaissait.
Le délit de la dignité
Même Simón Bolívar, qui si brave
qu’il pu être, n’a pas eu le courage
de signer une reconnaissance
diplomatique du pays noir. Bolivar
avait pu reprendre sa lutte pour
une indépendance américaine,
quand l’Espagne l’avait déjà battu,
grâce à l’appui d’Haïti.
Le gouvernement haïtien lui avait
remis sept navires et beaucoup
d’armes et de soldats, avec pour
seule condition que Bolivar libéra
les esclaves, une idée qui n’était
pas due au Libérateur. Bolivar a
rempli son contrat, mais après
sa victoire, quand il gouvernait
déjà la Grande Colombie, il a
tourné le dos au pays qui l’avait
sauvé. Et quand il a convoqué les
nations américaines à la réunion
de Panama, il n’a pas invité Haïti
mais il a invité l’Angleterre.
Les États-Unis ont reconnu Haïti
récemment 60 ans après la fin de
la guerre d’indépendance, tandis
qu’Etienne Serres, un génie
français de l’anatomie, découvrait
à Paris que les noirs sont primitifs
parce que chez eux la distance
entre le nombril et le pénis est
courte.
A ce moment là, Haïti était déjà
aux mains de dictatures militaires
carnassières qui destinaient les
ressources faméliques du pays
au paiement de la dette française
: L’Europe avait imposé à Haïti
l’obligation de payer à la France
une indemnisation gigantesque
[Lire “La dette extérieure d’Haïti,
une hypocrisie française”]**, à la
manière d’une dette du pardon
pour avoir commis le délit de la
dignité.
Cette histoire de persécution
contre Haïti, qui de nos jours
prend des dimensions de tragédie,
est aussi une histoire du racisme
dans la civilisation occidentale.
*Los pecados de Haití :
originalement publié par
Eduardo Galeano – Brecha 556,
Montevideo, 26 juillet 1996.
**La dette extérieure d’Haïti, une
hypocrisie française” : http://www.
primitivi.org/spip.php?article180
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SOCIÉTÉ
Qui sont-ils ?
Il est dimanche matin, Jamson et
Rosena, respectivement neuf et
onze ans, enlèvent les étiquettes
sur les bouteilles plastiques dans
un site de stockage à l’angle des
rues des Miracles et Pavée où envi-
ron une dizaine de collecteurs
informels préparent et emballent
leurs marchandises vers les entre-
prises clientes. Ils nous expliquent
: « on aide notre grand-mère. C’est
grâce à cette activité qu’elle paie
l’école et nous donne à manger ».
Cependant, si Jamson et Rosena
sont pris en charge par leur grand-
mère, Watson, enfant de cité soleil
de 12 ans, pratique cette activité
depuis la mort de sa mère. Train-
ant un gros sac dans lequel il met
des objets ramassés devant le parc
industriel Sonapi à Trois mains
sous un soleil de 14 heures, il nous
explique : « c’est avec cela que je
gagne un peu d’argent pour nourrir
mes frères et sœurs et moi. Maman
est morte, papa nous a abandonnés
et depuis, je suis devenu kokorat ».
Pour Osnel, un jeune garçon de 20
ans à Delmas 9, s’il ne quitte pas
cette activité, explique-t-il, c’est
parce qu’il n’a aucun autre moyen
de survivre avec sa famille dont il
est l’ainé. « Imagine-toi, quand tu
portes le sac sur ta tête, un liquide
puant mêlé de tout ruisselle jusqu’à
ta bouche, ce n’est pas bon pour ton
cerveau», argumente-t-il avec une
voix morne. Quant à Fritzner, 32
ans, père de deux enfants, en plus
de la journée, il sort à la tombée
de la nuit pour rentrer à l’aube.
Comme tous les autres collecteurs
interrogés, Fritzner n’utilise aucun
matériel de protection. Ni masque,
ni gants, ni chaussures appropriés
mais il est obligé, explique-t-il
debout au milieu des déchets col-
lectés à l’angle des rues Saint-hon-
oré et Réunion : « on nous dit que
nous mettons nos mains dans la
matière fécale, mais je sais ce que
je cherche », déclare-t-il.
Pour Silvia, 61 ans, elle a peur du
risque de chercher dans les ravins
cependant il lui arrive quand même
de se faire blesser la main par les
tessons de bouteilles, explique-t-
elle, non loin d’un ravin à Bois-
Verna. Mais, n’ayant aucune assis-
tance de l’État, elle doit continuer
pour gagner environ 300 gourdes
contre une grande balle (plusieurs
sacs cousus ensemble, qu’elle dit
remplir dans environ trois jours de
travail) afin d’aider ses enfants.
Quel risque encourent ces
citoyens en fait?
Abdias JOACHIM, un médecin de
SODEC Hospital, n’hésite pas (sans
aucune intention de minimisation)
à qualifier ces citoyens d’ « infec-
tions ambulantes ». Ces citoyens
qui achètent à manger en faisant
leurs activités sans la possibilité de
se laver les mains, ne sont à l’abri
d’aucune des maladies que nos
déchets peuvent transmettre, nous
explique-t-il. Et leur entourage n’en
est pas non plus à l’abri. De plus,
étant sans matériels de protec-
tion, ils courent conséquemment
le risque d’attraper la leptospirose,
une maladie attrapée à partir de
l’urine des rongeurs provoquant
de fortes douleurs articulaires,
et de fièvres continues. Est-ce là
la cause des douleurs atroces et
longues fièvres d’Osnel ( 20 ans ) et
de Silvia (61 ans ) qu’ils associent
aux fatigues de leusr activités ? En
fait, le risque de maladie le plus
évident que courent ces concitoy-
ens restent la gastro-entérite qui
agit sur l’estomac et les intestins et
provoquent des diarrhées et vom-
issements.
Ces citoyens doivent-ils
cesser ces activités à haut
risque?
Si tous nos interviewés confessent
qu’ils ne peuvent, malgré leur volo-
nté, suspendre ces activités, Fritz
Gerald Louis, un expert en anal-
yse économique et développement
international, cadre de la direc-
tion des études du ministère de
l’économie et des finances, pense
que tous les métiers ont un certain
niveau de risque et que les métiers
à hauts risques existent partout
dans le monde. S’ils en sont arrivés
là, c’est à cause de la faiblesse de la
protection sociale de l’État, pense-
t-il. Ce qu’il faut, dit-il, c’est de
réguler le secteur. Il faut des normes
pour la collection, mais ses activi-
tés rapportent, c’est du travail, cela
rend les pratiquants autonomes et
aide à l’assainissement, explique
l’expert. Quelle économie ? Celle
des bourgeois marchands, sous-
traitants qui achètent les déchets
de ces survivants à huit gourdes le
kilo comme l’a confié Watson, sous
prétexte de recyclage dans le pays
? Une de ces entreprises, sise à
bon repos à laquelle plusieurs col-
lecteurs disent vendre les déchets,
n’a pas voulu trop réagir sur le tra-
vail pourtant rentable.
Les grandes théories de l’État
l’attribuent la protection des citoy-
ens qui le constituent. Même si
certaines théories voient dans la
mission de l’État (bourgeois) la
protection des dominants de la
société, cependant certaines socié-
tés établissent des mécanismes de
prise en charge des plus démunis
du système avec l’argent des con-
tribuables. Ces mécanismes de
protection sociale dont il convient
de parler d’assistance dans le cas
de ces démunis travaillant dans
l’informel ne touchent aucun des
interrogés. Seul Sonson, un autre
enfant de 13 ans à la rue Saint-
Honoré, a dit avoir déjà vu de distri-
butions de kits cependant les «gwo
nèg » (plus âgés violents), pour
reprendre son expression, l’ont
toujours empêché d’en bénéficier.
Pour ce qui est de savoir s’il est de
la volonté des citoyens de prendre
ces risque ou si c’est l’inadéquation
de la protection sociale de l’état qui
ne les en empêche pas, des cadres
du ministère des affaires sociales
et du travail ont répondu que « les
programmes ne peuvent pas touch-
er tout le monde. On doit accepter
le fait que les gens font leur travail
et qu’il faut c’est de les encadrer ».
Au fait, aucun de la gamme des
droits universels de l’homme (à la
santé, art 25 ; à la sécurité socia-
le, art 22 ; au travail, à la protec-
tion, art 23 ; à un niveau de vie
suffisant, art 25 ; à l’éducation,
art 26) promu par l’occident et en
vogue dans le pays surtout depuis
1986, n’arrive à empêcher ces
citoyens d’arriver à ce niveau de
contradiction pour reproduire leur
vie. Ces droits seraient-ils ceux
des individus égoïstes, repliés
sur eux mêmes; droits favorisant
(occultant) l’exploitation comme
le pense Marx dans la « question
juive » (1843, p 22-23) ? En fait,
ni la liberté, ni l’égalité, ni la fra-
ternité de ces droits, et triade de
notre drapeau, n’empêche les citoy-
ens de risquer leur vie sans aucune
protection, aucune assistance dans
ces ravins et décharges aux déchets
mêlés. Dans l’individualisme (exac-
erbé avec le capitalisme), on pense
que seul son bonheur et « celui des
siens » importent. Mais est-il vrai,
comme le laisse croire le capital-
isme, qu’on peut construire son
bonheur ignorant celui des autres,
autrement dit, sur le mal-être des
autres? Nous qui prétendons ignor-
er le sort de ces concitoyens-là,
n’est-il pas incohérent même dans
la logique individualiste et égoïste,
dans la mesure où ces enfants qui
ne vont pas à l’école et aspirent
au bonheur comme tout le monde
risquent de devenir des hors la loi
(comme aucune loi ne les ont jamais
protégé) et nuisent à notre bonheur
égoïste en générant de l’insécurité
? Ces grands-mères qui font les
courses aux mêmes marchés que
nous, ne risquent-elles pas de con-
taminer notre cuisine égoïste par
toutes sortes de maladies? En tout,
cas réfléchissez sur votre individu-
alisme exacerbé !
Enfin, est-ce que ces citoyens vont
être pris en charge par le nouveau
gouvernement où est-ce qu’avec
ces milliers de citoyens (personnes
plutôt?) « rapatriés » par l’autre
partie de l’Ile ils seront encore plus
à prendre ce risque mortel pour,
paradoxalement, reproduire leur
vie? En tout cas, si Silvia a résolu
qu’elle ne votera plus, malgré la
déception dont fait mention tous
les potentiels votants de nos inter-
rogés. Ceux- ci attendent les pro-
chaines élections pour aller voter.
Alors, peut-être que de ces milliers
de candidats ils trouveront des
concitoyens qui, une fois élus, ne
les oublieront pas jusqu’aux pro-
chaines élections, comme l’a pensé
Fitzner qui. Malgré tout, pense
voter.
Un gagne-pain à double impactpar Sabry ICCENAT
HAÏTISOCIÉTÉ/RÉCUPÉRATEURSDEDÉCHETS
Qui ne tombe pas encore sur un de ces concitoyens en train de fouiller dans les poubelles, les montagnes de
débris en pleine rue ou les ravins ? Sans aucune distinction de sexe ni d’âge, ils cherchent dans les déchets des
objets en plastique, des canettes, du fer, du cuivre. Bref, tout objet ayant une valeur marchande.
Des enfants au travail sur un site de stockage à l’angle des rue pavée et des
miracles.
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SOCIÉTÉ
La robe noire taillée
LN-Je fais une chose non profes-
sionnelle en te félicitant pub-
liquement pour ta beauté noire
et lumineuse. En espérant que ce
compliment sera pris dans son élé-
gance sociale, engageons les sujets
de notre entretien. Il se déroulera
sur ton parcours dans la vie, sur
l’entreprise Raj Magazine, sur tes
croyances religieuses et tes sou-
haits pour ta terre, madame, pour
la prochaine décennie. Tu es née à
Port-au-Prince? Ou ? Dans quel joli
bourg d’Haïti as-tu pris naissance ?
RAJ -Merci pour les compliments,
Pierre. J’apprécie l’élégance inves-
tie dans la formulation de ta pensée.
J’ai pris naissance à Port-à-Piment
dans le Sud, là où se trouve l’une
des plus belles grottes des Caraïbes:
la grotte Marie-Jeanne.
Je ne m’accroche à aucune dénomi-
nation religieuse précisément. Je
crois en Dieu, en sa puissance, en
sa présence en chacun de nous. Je
suis en quête de Lui. Je cherche à
pouvoir communiquer avec Lui en
vue de trouver ma paix intérieure.
Mes souhaits pour Haïti, ma terre,
pour la prochaine décennie, c’est de
voir émerger une classe moyenne
capable de répondre à ses besoins.
Mon engagement personnel veut
que je m’investisse à apporter, à
travers Raj Magazine, ma singulière
contribution dans la revalorisation
de la conscience de l’Haïtien en
l’encourageant à capitaliser sur le
positif...
LN.Quels sont les meilleurs souve-
nirs qui te restent de ton adoles-
cence? Une nostalgie amoureuse?
Un succès de classe ? Un deuil ?
Une belle robe ? Un poème, à toi,
dédié ?
RAJ- En élémentaire II, je ne con-
nais pas la nouvelle nomenclature
dans l’enseignement, j’étais la
moins âgée et la plus menue de la
classe. Un jour, à la récitation, la
professeure s’est rendue compte
que j’étais l’unique élève à réciter
convenablement toute la leçon
d’histoire. Pour marquer cette
performance, elle m’avait invitée
à monter sur son bureau pour être
applaudie par toute la classe. Enfin,
j’avais droit, pour mon exploit, à une
surette (un bonbon). J’étais fière
de moi ! De plus, j’ai en mémoire
cette belle robe noire que je m’avais
taillée, elle épousait parfaitement
mes lignes... Le tissu rétrécissait
après lavage. Un jour tandis que je
m’en suis revêtue pour me rendre
à l’INAGHEI (1ère année), ma mère
pestait contre ma tenue. Elle avait
trouvé que c’était un juste-au-corps
et que cette robe laissait lire tous
les détails de ma morphologie.
Catégoriquement, elle m’interdisait
de laisser la maison accoutrée de
ma belle robe dont j’étais si fière.
Je me souviens d’avoir essayé de la
convaincre.
Entre temps, je ne sais par quel
miracle, la robe allait reprendre ses
dimensions normales et redevenir
décentes. Elle ne se laissait prendre
à mes fantaisies et mes réponses
ne faisaient pas le poids. Quand
elle a compris que j’étais entêtée
à porter ma robe malgré tout, elle
m’a appelée et de ses ciseaux, l’a a
fendue de haut en bas. Là, elle m’a
invitée à sortir en lambeaux... si j’y
tenais encore. J’étais en colère ce
jour-là contre ma mère. Mais, avec
l’âge et le raisonnement, j’ai fini par
comprendre cette éducation ferme
et disciplinée... De nos jours, nos
jeunes s’habillent n’importe com-
ment et affichent n’importe quel
comportement antisocial voire
déviant. Les parents n’exercent
sur eux aucun contrôle et la société
devient de plus en plus permissive.
Y AVAIT-IL DES PROPOSITIONS
INDECENTES ?
LN. Qu’est-ce qui t’avait porté à
créer Raj Magazine ?
Mon amour pour Haïti. Mon désir
de contribuer à l’évolution de notre
société et surtout mon engoue-
ment à encourager la culture de
la positivité chez nos lectrices et
nos lecteurs, et bien sûr, chez nos
collaboratrices et collaborateurs et
chez moi (la charité bien ordonnée
commence par soi. Rires).
LN. Femme, cela a dû être dur pour
toi de faire comprendre ce projet ?
C’est malheureusement dur, en
effet, pour les femmes de faire
valoir leur projet. Mais la déter-
mination, la persévérance, la pas-
sion et l’amour pour Haïti, pour ce
travail, ont permis à Raj Magazine
d’exister encore. C’est tout un pro-
blème de discrimination.
LN. Quel a été le plus grand défi
pour toi ? La rédaction ou le sup-
port financier ?
Mes collaborateurs aiment autant
que moi l’idée de vendre Haïti
autrement que la promotion de ses
sites naturels et historiques. Donc,
la rédaction n’a jamais été un trop
grand défi. Le support financier,
oui, c’est le plus grand défi de Raj
Magazine. Au fait, ce serait mieux
de trouver des mécènes, des entre-
preneurs pour des engagements
à long terme plutôt que de courir
derrière des patronages tout au
long de l’année pour assurer la
pérennité de Raj Magazine. Nous
envisageons tant de choses pour
promouvoir positivement Haïti
(avoir une version audio pour les
non-voyants comme nous l’a sug-
géré le Dr Michel A. Péan. Une ver-
sion vidéo qui serait publiée sur
YouTube, FaceBook et les télés qui
voudraient bien; organiser au moins
quatre activités culturelles par an;
inviter des jeunes à nous accom-
pagner dans les villes de province
à chaque déplacement pour leur
permettre de visiter le pays, etc.)
Dans tous les pays du monde, il
existe pas mal magazines à dévelop-
per des thématiques différentes. En
Haïti, on dirait même que c’est une
fierté de voir des revues naître un
jour et mourir un à trois ans plus
tard. Bien souvent des entreprises
de sponsorisation me déclarent
qu’elles n’y sont pas intéressées
parce qu’en général les magazines
ne vivent pas longtemps. Elles
feignent d’ignorer que justement
c’est par leur déni de support que
ces initiatives meurent aussi rap-
idement. D’ailleurs, RAJ Magazine
est distribué gratuitement. L’argent
doit circuler pour asseoir une classe
moyenne qui soit en mesure de se
procurer les biens et les services
de ces entreprises... En faisant ce
travail de promotion du pays, ces
entreprises contribueraient à la
promotion de leur environnement
et les retombées leur seraient favo-
rables dans le temps.
L’objectif de Raj Magazine par
exemple est de porter les touristes
à venir en Haïti, à influencer les
gens positivement (les lecteurs
de Raj Magazine) en vue de les
encourager à réfléchir et agir dif-
féremment... Comme si rien de ce
qui a rapport avec la collectivité, la
culture de la positivité, la promo-
tion du pays et des artistes qui nous
distraient ne nous intéresse... C’est
à se demander qu’est-ce qui peut
bien faire réagir certains Haïtiens
de nos jours? Nou pa konen nan
kisa nou kwè.
LN. J’enragerais de savoir que, sur
le plan des contacts avec le milieu
des affaires, on t’aurait fait des
“propositions indécentes”.
Eh bien! Ne te gêne surtout pas,
Pierre. Cette attitude fait partie du
lot. C’est un véritable problème
auquel j’ai fait face plus d’une fois.
Mais ne t’inquiète pas parce que
j’aurais préféré voir Raj Magazine
aux oubliettes plutôt que de
succomber à ces ‘’propositions
indécentes’’. Comment comprends-
tu que je fais la promotion de notre
pays avec Raj Magazine mettant
en exergue le côté positif des
gens, encourageant ses lecteurs à
consommer les fruits et légumes
du terroir..., ce que toute haïtienne,
tout haïtien conséquents devraient
encourager... Je devrais me
compromettre moi-même pour y
parvenir?... Franchement, Pierre?
Autant faire taire mon patriotisme
et me trouver un pis-aller dans une
ONG, ou fuir Haïti comme fait la
majorité de la jeunesse du pays livré
à lui-même... Il est grand temps que
les hommes apprennent à apprécier
le travail des femmes plutôt que de
les considérer comme de vulgaires
marchandises. C’est odieux...
L.N. Quels sont les meilleurs
numéros que tu as imprimés ?
Pour moi, chaque numéro de Raj
Magazine a sa singularité et sa
beauté. Mais, j’avoue apprécier
plus les hors-séries: ‘’Frank Etienne
l’Immortel’’, ‘’Rhum Barbancourt
l’Or du temps’’, ‘’l’Age d’Or’’, les
numéros réguliers: ‘’Destination
Sud-Est’’, ‘’Bienvenue dans le
Marien’’, ‘’Destination Grand’Anse’’,
‘’Destination Môle Saint-Nicolas’’,
‘’Regard sur l’Art en Haïti’’ un
numéro fin prêt, mais que nous
avons des difficultés à imprimer
faute de 13 000.00 $ US pour
l’occasion... Je profite de cette
entrevue pour solliciter le support
financier de certaines entreprises
moyennant des pages publicitaires
en contre -partie.
12- J’ai aimé, Rose, ta photo avec
le bouquet de fleurs dans le numéro
sur la BPH.
Merci pour ton appréciation. Les
couleurs de mon sourire reflètent
la beauté de mon âme. Mes plus
beaux sourires viennent de mon
cœur, Pierre...
Rose Adele Joachin :
« Ne t'inquiete pas
des propositions... »Par Pierre Clitandre
FOCUS
Rose Adèle Joachin est belle. Responsable de RAJ Magazine, elle se bat pour la
présentation d’une image positive du pays. Cela ne se fait pas sans déceptions. Elle
nous raconte son aventure avec des nuances qui disent qu’elle veut garder certains
secrets…
Rose Adele Joachin.
16 | N0
34 MERCREDI 8 JUILLET 2015
SOCIÉTÉ
M
arche pacifique, danse,
témoignages, chants,
scènes de théâtre, ont été
les principales activités
réalisées pour marquer cette céré-
monie de clôture.
Il s’agit d’un séminaire de for-
mation et de sensibilisation à
l’intention de 60 élèves de la
classe de 5e année fondamentale
de l’École nationale Toussaint
Louverture (Lascahobas) contre
les violences (physiques, émo-
tionnelles et sexuelles) faites aux
enfants dans les milieux scolaires.
À cette formation ont pris égale-
ment part près de 51 élèves de 7e,
8e et de 9e année fondamentale
de l’institution Mixte de l’Avenir
(Carrefour-Feuilles) et 30 profes-
seurs, dont 15 de Lascahobas et
15 de Port-au-Prince. Des séances
de sensibilisation ont été réalisées
à l’intention des parents sur la dis-
cipline positive en lieu et place de
la violence.
Droits de l’enfant, participation
citoyenne, leadership et protec-
tion contre la violence ont été,
entre autres, les thèmes agités
lors de ces séances de formation,
débutées en avril dernier.
La protection des enfants con-
stitue l’une des grandes priorités
de l’IBESR, affirme le représent-
ant de l’IBESR, Elie Serge. C’est
dans cette perspective qu’il a
établi un bureau à travers les dif-
férents départements du pays et
déployé un ensemble d’agents de
protection des mineurs afin de
veiller au strict respect des droits
des enfants, notamment les plus
vulnérables.
De son côté, la représentante d’«
Enpak », Jo-Ann Garnier Lafon-
tant, a indiqué que les parents et
les professeurs peuvent aider les
enfants à s’autodiscipliner sans
pour autant user de violence à
leur endroit. Les enfants, a-t-elle
ajouté, peuvent être éduqués en
passant avec eux des contrats et
par la négociation.
De l’avis de la représentante d’«
Enpak », il convient de sensibilis-
er tout un chacun à la nécessité de
s’engager dans la protection des
enfants. Car, soutient-elle, toute
action violente exercée contre un
enfant risque de conduire celui-ci
dans une spirale où il exercera à
son tour la violence sur un autre
plus petit que lui.
Pour remédier à cette situation,
Mme Lafontant appelle au respect
du droit intégral des enfants. Elle
préconise l’usage de la discipline
positive en vue d’enrayer les actes
de violence sur les enfants.
Cette série de séminaires, indique
la conseillère de « HPP AKSE »,
Marjorie K. Bertrand, s’inscrit
dans le cadre du support de
l’organisation qu’elle représente
à l’État haïtien pour aider celui-ci
à mettre en place une politique
publique via l’élaboration d’un
cadre légal devant contribuer à
prévenir la violence et à en proté-
ger les enfants.
Elle rappelle qu’une enquête réali-
sée en 2012 a révélé que plus d’un
tiers des filles interrogées ont été
victimes de violences de toutes
sortes avant d’atteindre l’âge de
18 ans. Selon ce qu’elle a indi-
qué, le milieu scolaire est désigné
comme l’endroit où les enfants
sont victimes d’abus soit de leurs
enseignants, soit des directeurs
d’écoles.
Face à cette situation, informe
Mme Bertrand, une stratégie
nationale de protection de l’enfant
est en cours d’élaboration. Elle
permettra de freiner les violenc-
es faites aux enfants en vue de
contribuer à l’épanouissement de
cette catégorie vulnérable.
Dominique Yanick, une écolière,
participant à ces séances de for-
mation, informe y avoir appris
les méthodes lui permettant de
résoudre un conflit avec ses pairs.
Elle a aussi indiqué que ce sémi-
naire a contribué à l’aider de
manière positive, arguant qu’elle
était une fille conflictuelle et que
maintenant elle ne l’est plus.
Bélizaire Stevenson, un autre
écolier également participant à
cette formation, ne tarit pas de
louanges quant aux bienfaits de
ce séminaire.
Il dit espérer que cette initiative
va s’étendre sur toute l’étendue
du territoire afin de permettre à
d’autres enfants d’en tirer profit.
Aussi se propose-t-il de partager
avec les enfants de son âge les
leçons qu’il a apprises durant ce
séminaire.
Marche de Sensibilisation Contre la Violence faite aux Enfants.
Clôture du projet Kapabpar Reynold Aris
Suite aux résultats de l’enquête sur la violence faite aux enfants (VACS) (Violence Against children survey),
commanditée par l’État haïtien, l’organisation « Enpak » (Engagement, participation et kapasite), en partenariat
avec l’Institut du bien-être social et de recherches (IBESR) et le projet « HPP AKSE », a clôturé le projet baptisé
Kapab (Konprann mwen, Ankadre m pou m aprann pi byen). La cérémonie a été tenue le dimanche 5 juillet 2015
à Lascahobas (Plateau central). Ce projet est financé par l’Agence américaine internationale de développement
(USAID) pour un montant de 42 mille dollars américains.
HAÏTI/DROITSDEL’ENFANT
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  • 1. » P. 15 »   P. 11 SPORT/GOLDCUP2015 SOCIÉTÉ » lire page 4 Haïti vs Panama 1 - 1» suite page 6 Les coopératives veulent s'unir pour renforcer l'économie haïtienne Par Elisée Décembre Rose Adele Joachin : « Ne t'inquiete pas des propositions... » Par Pierre Clitandre « Le CEP a pris des engagements, lesquels seront tenus. Il y aura des élections le 9 août. Dès six heures du matin, tout sera en place pour recevoir les électeurs. » C’est ce qu’a déclaré au National le pré- sident du CEP, qui a admis cependant qu’il y avait trois raisons majeures qui pourraient justifier le scepticisme des citoyens. Entre 2012 et 2013, aucune élection n’a pu avoir lieu tandis que trois CEP avaient vu le jour pour dis- paraître rapidement, ce qui démontrait une incapacité réelle et un manque de volonté de réaliser les joutes élec- torales. Ensuite, l’actuel CEP est le résultat d’un compromis entre des politiciens qui, peut-être, ne veulent des élections que s’ils sont certains de les gagner et, enfin, le fait qu’à chaque élection il faut pratiquement renouveler la machine électorale, mobiliser d’autres ressources humaines, qu’il faut prendre le temps de former pour les rendre performantes, dans un contexte de jour en jour plus difficile, auquel s’ajoute le retrait des troupes de la Minustah de certaines zones du pays. «Les élections auront lieu», assure Pierre Louis OpontPar Gary Victor HAÏTI / ÉLECTIONS MERCREDI 8 JUILLET 2015 NUMÉRO 34 WWW.LENATIONAL.HT QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI ÉCONOMIE Frustrations, préoccupations et incertitudes ENTREVUE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL ÉLECTORAL PROVISOIRE AVEC LE NATIONAL Le vice-président, Pierre Manigat Jr, et le président du CEP, Pierre Louis Opont. / Photo : J. J. Augustin
  • 2. 2 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 TRIBUNE J ’aime la loi du marché, car indépendante de la volonté humaine, son jugement est juste. Je l’aime encore plus, car elle revient toujours avec un principe naturel : on moissonne ce qu’on a semé. Tout ceci pour vous dire qu’Haïti est en train de couler sous le poids des résultats de la mise en œuvre des politiques publiques fantaisistes par les gouvernements haïtiens des quatre (4) dernières années (2011 – 2015). Le dernier exemple de l’amateurisme du gouvernement est l’impuissance des autorités centrales devant la dépréciation de la gourde Haïtienne par rapport au dollar Américain dès le premier trimestre 2015. En effet, au lendemain du tremblement de terre du 12 janvier 2010, le pays a entamé sa plus grande traversée du désert, discrètement. Il ne faut pas oublier qu’à cette époque, la solidar- ité internationale empêchait, même aux analystes économiques les plus avisés, de prévoir que plus rien ne sera comme avant pour Haïti. On ne pouvait pas non plus prévoir que le pays allait s’enfoncer dans une crise financière sans précédent pour finir par déboucher sur une crise moné- taire dès la fin de 2014. Mais juste avant de rentrer dans le vif du sujet, permettez-moi d’abord d’établir la dif- férence entre dépréciation et dévalu- ation d’une monnaie. Ensuite, je montrerai comment une dévaluation peut être considérée comme un outil de création de richesse, mais aussi comme une arme redoutable sur les marchés de change. Enfin, je tenterai de montrer, à l’aide d’un cas pratique, comment la justice haïtienne, par son mode de fonctionnement, entrave significativement l’investissement direct étranger et, par conséquent, a une grande part de responsabilité dans cette crise monétaire. Dépréciation et dévaluation Il existe une différence entre « dépré- ciation » et « dévaluation ». La pre- mière résulte de la loi de l’offre et de la demande. Ainsi, quand la demande n’est pas suffisante, on peut assister à une dépréciation de la monnaie locale. Dans le cas d’Haïti, la gourde n’est pas recherchée sur les marchés, car le pays n’a presque rien à vendre. À titre d’exemple, en 2013, selon « Perspective Monde de l’Université Sherbrooke », le secteur agricole a représenté 23 % de la totale importa- tion du pays. Alors que ce secteur ne représente que 4 % de son expor- tation totale pour la même année. Cependant, sur cette même période, Haïti a eu des produits manufactu- rés pour 96 % de son exportation totale. Dans ce cas, peut-être que vous allez rapidement penser que c’est une bonne chose pour le pays. Pourtant, ces exportations ne créent pas de la richesse pour la majorité de la population haïtienne, car il s’agit de la sous-traitance ! Alors retenez bien cette leçon : la sous-traitance ne peut en aucun cas, sortir un pays de sa pauvreté. Ces économies profi- tent uniquement à un petit groupe d’entrepreneurs nationaux. En regar- dant de plus près les chiffres globaux du commerce des marchandises du pays pour 2013, on voit que pour cette même période, Haïti a importé pour 3 milliards 551 millions 166 mille dollars US contre seulement 900 millions et 500 dollars US en exportation. D’où une balance com- merciale négative. Voici une pre- mière explication à la dépréciation de la gourde Haïtienne. Toutefois, un État peut aussi laisser, de bonne foi, déprécier sa monnaie. Mais je n’ose pas croire que c’est le cas d’Haïti. La seconde, à savoir la dévaluation, consiste pour un État à diminuer la valeur de sa monnaie nationale au profit d’une monnaie de référence ou d’un panier de monnaies. Mais il faut dire que ces décisions se pren- nent en général dans un régime de change fixe. Reste à savoir à quel régime économique appartient Haïti ! Car je ne suis pas en mesure de le dire. Et je prends la responsabilité de dire que ni le ministre de l’Économie et des Finances, ni le gouverneur de la Banque de la République d’Haïti ne sait, de 2010 à juin 2015, à quel régime économique ou modèle, pour être moins embarrassant, appartient l’économie Haïtienne, telle qu’elle est en train de se dessiner sous nos yeux tous les jours. Dévaluation comme création de richesse et comme arme redoutable J’avais dit plus haut que la dévalua- tion peut être utilisée comme outil de création de richesse. Effectivement, la Chine le fait merveilleusement bien. Cependant, c’est un pays grand producteur. En effet, en 2014, le PIB de la Chine était de 10,355 milliards US, selon le Fonds Monétaire Inter- national (FMI). Dans un tel cas de figure, avec la dévaluation de sa mon- naie, tout le monde peut acheter en Chine. Par la même occasion, ce pays devient le plus grand marché mondi- al, car il est totalement accessible aux petites bourses. Parallèlement, cette dévaluation est une arme car elle peut crever les économies des autres pays. Ainsi, on assiste aujourd’hui à une certaine peur mondiale de l’ampleur du géant asiatique. Je veux aussi ajouter que la dévaluation du Yuan (monnaie chinoise) est réalisée pour contrer les actions des fonds spéculatifs. En d’autres termes, la dévaluation de la monnaie pour un pays qui produit massivement est un moyen efficace pour doper son expor- tation. Dans le cas d’Haïti, pourquoi la Banque de la République d’Haïti (Banque centrale Haïtienne) ne peut pas arrêter l’hémorragie de la valeur monétaire haïtienne ? Je veux pren- dre le cas des personnes qui ont emprunté de l’argent à la banque en devise étrangère (dollar Américain). Les dépréciations de la gourde Haïti- enne sont particulièrement en train d’être mal vécues par ces ménages, car ils doivent payer plus d’argent que prévu. Je reviens à la Banque centrale haïtienne. Pour qu’elle puisse assurer la conversion d’une monnaie par rapport à une autre, elle doit disposer de réserves dites de change très élevées. Or la demande du dollar Américain est bien supérieure à celle de la demande de la gourde Haïtienne. Ainsi, les réserves en mon- naie étrangère chutent rapidement et arrive l’incapacité de continuer la conversion de la devise. Mais je crois que le problème est encore pire, car je ne pense pas que la Banque Centrale dispose de moyens d’assurer la conversion de la monnaie natio- nale en monnaie étrangère. Il y a eu des soupçons de prêt de la Banque au Palais National. Si tel est le cas, d’ici la fin de l’année, il se peut bien qu’on utilise un chariot de gourdes Haïtiennes pour s’acheter un sachet de pains. Il reste à cette banque de tenter de rassurer la population haï- tienne ! La justice haïtienne entrave l’investissement direct étranger L’autre entrave à la relance économique haïtienne et qui est pro- fondément responsable de la pauvre- té dans laquelle vivote les haïtiens est la justice haïtienne, plus particulière- ment son mode de fonctionnement. Il est vrai que l’économie haïtienne est caractérisée par de maigres inves- tissements étrangers. Mais cette situ- ation n’est pas un hasard. En écono- mie, il ne faut pas toujours penser que tout ce qui est bon est juste. Cependant, quand l’injustice règne en maitre sur un marché, l’économie ne pourra pas travailler à la reprise de la croissance et de la distribution des richesses créées. Or, la justice sociale est la seule garante pour le peuple de l’accès aux services sociaux de base. Maintenant, posez-vous cette ques- tion : « quelle garantie faut-il à un investisseur avant d’injecter son argent dans une économie ? » La réponse est : « une garantie que son argent ne sera pas volé et que l’État du pays dans lequel il veut investir dispose de lois fiables et d’un sys- tème judiciaire qui inspire confiance ». Car l’économie est une affaire de confiance. Quand le Ministère public accepte à un procès des documents falsifiés et qu’il s’érige en intimida- teur, comment attirer des investisse- ments dans une situation pareille ? Cette justice est orientée vers la recherche de mobilisation de fonds des mains des justiciables et non vers la recherche de la vérité. L’investisseur analyse toujours son environnement extérieur. Car c’est le facteur qu’il maitrise le moins. Considérons la situation carcérale en Haïti. Quand un investisseur apprend qu’une prison qui a été construite pour 1200 personnes, accueille 4000 prisonniers. Et que de cette popula- tion carcérale, seulement 20 % sont effectivement condamnés et purgent leur peine, il va se dire que c’est un pays ou le droit de personne n’est respecté. De plus, il va s’imaginer lui qui ne connait pas le pays, com- ment il va faire pour avoir une jus- tice équitable s’il doit se présenter devant un tribunal. Si les libertés individuelles ne sont pas respectées, l’environnement ne sera pas propice aux investissements étrangers. Car n’importe qui peut trouver un avocat malintentionné capable de corrom- pre le ministère public et le juge qui préside le dossier. À partir de ce moment, l’investisseur qui n’a pas de force de pression peut tout perdre. Quand des juges sont capables de faire, au mépris de la loi, des arresta- tions fantaisistes et de compliquer une situation judiciaire simple, Haïti ne sera jamais « open for business ». Le développement économique est étroitement lié à la justice sociale. Car après la création de richesse par l’agent économique, il se peut bien qu’un individu trouve un substitut au Parquet d’une circonscription capa- ble de décerner un mandat d’arrêt illégal afin de pouvoir par la suite confisquer l’avoir du propriétaire sans aucune forme de procès. Jean- Jacques Rousseau, dans la Nouvelle Héloïse, critiquait déjà l’injustice de sa société. Il parlait d’individus guidés par leur amour-propre. Et quand des personnes n’ayant aucune affection naturelle occupent des postes dans une chaine de justice, elles ne sont que des génératrices d’abus. Ces gens font fuir à toute vitesse des investisseurs étrangers. En comparaison avec la République Dominicaine qui a reçu durant ces quatre dernières années, en moyenne annuelle un investissement direct étranger de 2 milliards de dollars Américains, Haïti, pour cette même période ne dépasse pas 200 millions de dollars Américains. Il est un fait certain que la justice haïtienne creuse notre tombe. Pour répéter une jeune adolescente de 12 ans, « la justice d’un pays est un outil incontournable de son dével- oppement ». J’ajoute aussi que c’est un outil à double tranchant. Si cela continue, le pays deviendra inviv- able et les autres pays de la région se concerteront à mettre Haïti sous redressement. Aujourd’hui, Haïti est dans un état de pourriture à tous les niveaux de la vie nationale. Le pays est aussi en passe de renouveler sa classe dirigeante. Et cette question revient : « Qui doit gouverner ? ». TAVOILLOT (2011) nous invite à se demander est-ce un seul ou plusieurs ou tous qui doivent gouverner. C’est aussi le temps de sortir des réflex- ions sur la nature de la démocratie haïtienne. C’est le moment de se demander qui est le véritable peuple haïtien. « Se depi nan kalepwa, pou w konnen si vant ou applen ». *1 : Pierre-Henri Tavoillot. Qui doit gou- verner ? Une brève histoire de l’autorité. (2011). Edition Grasset. 320 pages. Directeur GénéralInstitut National des Filières Agricoles (INAFA) La dépréciation de la gourde Haïtienne : résultat de la mise en œuvre des politiques publiques fantaisistes et du fonctionnement de la justice des quatre (4) dernières années en Haïti Par JEAN-FRANCOIS Jacob Eliezer Jonas
  • 3. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 3 ACTUALITÉ Le nombre inorganisé Cequin’estpasorganiséestanarchique,confus,désordonné,inorganique,inorgan- isé.Cequin’estpasorganiséobéitàsesseulespulsionsdesurvieetatendanceà broyer,àdétruiretoutcequinepeutnourrirsesdésirs.Ilpeutaussidétruirel’objet desesdésirspartropdesoif.Sionn’agitpassurl’inorganisépourluidonnerune forme,surtoutdanslebutdeluipermettredetravailleràlaréalisationsainedeses propresdésirs,ilpeutdevenircommeunmauvaiscadrequidonneunemauvaise perspectivesurtoutecréationnouvellejusqu’àmêmedétruiresafonctionpremière. La route surélevée au « Carrefour Aéroport », qui fait la fierté du gouvernement, ettouslestravauxréalisésautourdanslebutlouabledefaciliterlacirculationen rendantlaprisedesdiversesdirectionsplusfaciles,risquentdedébouchersurun casse-tête urbain digne du chaos haïtien. Ce n’est pas sans rappeler le spectacle déplorabledubeaupontsurlefleuveArtibonitequiestplusieursfoisparsemaine recouvertparunmarchépubliccequirendsatraverséealorsplusquedifficile.Aucun pouvoirpublicn’ajugéjusqu’àprésentqu’unmarchépublicsurunpontousurune routenationalen’étaitpasconcevabledansunpaysquiseveutenmarcheversla modernité. N’accordons pas d’attention à ces plaisantins qui trouveront dans ces pratiquesunespécificitéculturellehaïtienne. À partir du « Carrefour Aéroport », quand on tourne vers l’est, direction Delmas en venant de Nazon, on est déjà gêné par une station de taptap qui ne fait que grandirjouraprèsjour.Véritablecourdesmiraclesavecsesenfantsmendiants,ses voleurs, ses policiers ripoux. Direction nord, vers les agglomérations de Tabarre, Clercine,c’estlamêmechose.Lemarchépublic,quicoloniselazone,sedéveloppe déjàsouslaroutesurélevée.Bientôt,toutl’endroitneseraqu’unmarchéimmense auquel seront annexées plusieurs stations de transports en commun permettant d’allerd’unpointàl’autredecettehideusemégapolequedevientPort-au-Prince. Les embouteillages peuvent devenir monstrueux si les autorités ne prennent pas lesmesuresquis’imposent. Le drame c’est que le nombre inorganisé ne se manifeste pas seulement dans la pauvreté.Lenombreinorganisé,ilestaussiàtouteslesstratesdenotresociété.Nos «beauxquartiers»n’ontsouventpasderoutes,pasdetrottoirs,pasd’électricité. Cesontdesbidonvillesrichestoutsimplement.Etpuislenombreinorganisémeurt facilement d’une simple indisposition. Une crise cardiaque à Port-au-Prince, l’obligationdetrouverdessoinsenurgence,metsurlamêmebanquette,leriche desprétendusbeauxquartiersetlepauvredeGrand-Ravine. ToutunprogrammepournotrefuturprésidentdelaRépublique,n’est-cepas? Il faut bien avoir le sens de l’humour en ces temps si moroses où il faut plus de cinquante-troisgourdespourundollaraméricain. Le National Édito Le nombre de rapatriés baisse, mais le processus se poursuitSources : Alterpresse HAÏTI/RÉPUBLIQUEDOMINICAINE/MIGRATION D e juin 2015 à date, 4 mille 822 rapatriements ont été opérés à partir de postes officiels et 10 mille 447 à partir de points non-officiels, indique la Direction de la protection civile (DPC). Quoique mise en garde par les organismes de défense de droits humains, la séparation des enfants de leurs parents (en République dominicaine) est constatée depuis la mi-juin 2015. Le processus de rapatriement des migrants et travailleurs haïtiens par la République dominicaine continue, avec une certaine baisse observée sur les points officiels, selon les informations obtenues par l’agence en ligne AlterPresse. Une grande vague de personnes, la plupart des migrants haïtiens, a commencé à traverser la frontière après la fin, le mercredi 17 juin 2015, du Plan national dominicain de régularisation des étrangers (PNRE). « Les gens continuent à rentrer, mais le nombre de personnes par jour a baissé sur les points officiels », explique à AlterPresse le titulaire du ministère de la communication, Rotchild François Jr. Plus de 18 mille personnes sont déjà rentrées en Haïti depuis la fin du PNRE dominicain, suivant les chiffres officiels. Le souhait des autorités haïtiennes, pour l’instant, est de négocier, avec les autorités dominicaines, l’utilisation de deux points officiels, Malpasse/ Malpaso (Ouest) et Ouanaminthe/ Dajabon (Nord-Est) pour le processus de rapatriement des migrants haïtiens sans papiers. Or, 4 mille 822 rapatriements ont été opérés, de juin 2015 à date, à partir de postes officiels et 10 mille 447 à partir de points non-officiels, selon la Direction de la protection civile (DPC). Arrivent, également, sur le territoire haïtien, plusieurs Dominicaines et Dominicains expulsés, car ils ne sont plus reconnus par leur propre pays suivant l’arrêt 168-13 de la République Dominicaine, adopté le 23 septembre 2013. Des Haïtiens sont aussi contraints, de force, à laisser le pays voisin par des citoyens ou des soldats dominicains. Le Groupe d’appui aux réfugiés et rapatriés (Garr) rapporte des cas de rapatriement, en Haïti, d’enfants nés sur le sol dominicain, qui sont expulsés. La séparation des enfants de leurs parents, mise en garde par les organismes de défense de droits humains, est constatée depuis la mi-juin 2015. Le dernier cas, recensé le jeudi 2 juillet 2015, est celui de Nancy Dorméus, âgée de 29 ans et qui a laissé son pays quand elle avait 13 ans. Elle est rentrée avec deux enfants, tous deux nés d’un père dominicain. Ces enfants ne parlent pas le Créole. Quoique née en Haïti, leur mère a perdu presque toute son habilité à s’exprimer parfaitement dans sa langue maternelle, raconte le responsable de communication du Garr, Josué Michel. Le président haïtien, Michel Joseph Martelly, a dénoncé, le vendredi 3 juillet 2015, le comportement des dirigeants dominicains, qui semblent n’avoir pas tenu promesse, quant à une déportation respectueuse des droits humains, lors d’un sommet réunissant les chefs d’État et de gouvernement des Caraïbes. Les autorités haïtiennes entendent, dorénavant, demander l’aide des pays de la communauté internationale. Le département d’État américain se dit préoccupé du processus de déportation des Haïtiens de la République dominicaine. « Nous suivons la situation de très près (…) », fait savoir à AlterPresse Karl Adam, porte-parole de l’ambassade des États-Unis d’Amérique en Haïti. Les États-Unis d’Amérique affirment reconnaître le droit de tout pays de régulariser sa situation migratoire. Cependant, le département d’État américain se déclare également « engagé activement » auprès du gouvernement dominicain et du Haut-commissariat des Nations- Unies pour les Réfugiés (HCR), et de la communauté internationale « pour insister sur le fait que toute action devrait être prise, en conformité avec les obligations et les engagements internationaux », paraphés par la République Dominicaine.
  • 4. WWW.LENATIONAL.HT 2, DELMAS 40 B EMAIL: INFO@LENATIONAL.HT PUBLICITE@LENATIONAL.HT REDACTION@LENATIONAL.HT (509) 4611-1010 / 3214-5554 PROPRIÉTAIRE : LE NATIONAL. 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Ils étaient accompagnés du directeur exécutif du Conseil, maître Mosler Georges, et celui des opérations électorales, Jean Francky Hortes. Si le président du CEP, Pierre Louis Opont, se sent confortable dans le calendrier électoral en tenant compte des pas déjà franchis, tel n’est pas le cas des acteurs politiques qui ont exprimé de vives préoccupations par rapport au respect de certaines échéances insérées dans le calendrier électoral. Aujourd’hui encore, les hostilités électorales se font sentir lors de cette rencontre entre les partis politiques et les membres du CEP. Invités à se prononcer sur certaines modalités concernant le choix des membres de bureaux de vote et des mandataires, ces dirigeants politiques ont saisi l’occasion pour exprimer certaines frustrations et préoccupations à l’égard du processus électoral qui, à leur avis, n’augure pas de beaux jours. Tout allait bien à la salle Franck de l’hôtel Montana jusqu’à ce qu’Esdras Cadet, candidat au Sénat pour le département du Nord pour la plateforme Vérité, ait brandi une photo du candidat à la présidence de cette structure politique, Jacky Lumarque, écarté de la course électorale au dernier moment par le CEP pour défaut de décharge. Cette action a suscité de vives réactions dans la salle, notamment des représentants de partis politiques qui ont demandé qu’Esdras Cadet soit mis à la porte. Vacarme dans la salle. Petite prise de bouche. Esdras Cadet, Rudy Hériveaux, Yvon Feuillé, tous d’anciens lavalassiens, se querellent entre eux, avant que l’ancien député Fredly Georges, membre du Collectif des candidats écartés par le CEP (Coce/CEP), ne se mêle de la partie. Esdras cadet conteste avec véhémence la décision du CEP d’écarter son candidat à la présidence. « Le CEP veut-il réaliser les élections en écartant la plateforme Vérité, le seul regroupement politique à avoir 3 832 candidats agréés avec 102 candidats à la députation, 15 au Sénat pour 20 postes disponibles, 119 cartels de mairie, 352 cartels de Casec, 339 cartels d’Asec et 80 cartels de délégués de Ville ? » se demande, perplexe, le représentant de Vérité, invitant les membres du CEP à faire preuve de grandeur d’âme en publiant la liste définitive des candidats agréés à la présidence avec la réintégration de Jacky Lumarque. Les interventions se suivent et les préoccupations sont nombreuses. Le climat de sécurité, le mécanisme de relocalisation des électeurs, le financement des élections (budget), la subvention des partis politiques, le manque de crédibilité qui entoure le processus électoral sont parmi les multiples préoccupations soulevées par les responsables des partis politiques à l’approche du 9 août, date retenue pour le premier tour des législatives. Tenant compte de tous ces soucis autour du processus électoral, certains politiques ont même opté pour l’organisation d’élections en deux temps, avec le premier tour des législatives et de la présidentielle le 25 octobre et le second tour, qui inclura les collectivités territoriales, le 27 décembre. MêmePierreLouisOpontsemontre préoccupé du climat d’insécurité qui règne actuellement dans le pays. D’ailleurs, le CEP en est déjà victime pour avoir eu deux de ses employés victimes d’attaques à main armée. « Nous prenons très au sérieux la mort du directeur de cabinet du conseiller Jaccéus Joseph. Surtout, il y a des gens qui avaient publiquement déclaré que les membres de ce CEP ne seraient pas présents le jour du scrutin en chantant officiellement nos funérailles », a fait savoir le patron de l’institution électorale, visiblement tourmenté par le climat d’insécurité. Par ailleurs, Pierre-Louis Opont dit avancer très bien dans le calendrier électoral. « À date, nous respectons le calendrier en ce qui concerne les opérations électorales », a-t-il lancé, précisant que le CEP a appliqué l’article 139-1 en invitant les partis politiques à choisir les membres des bureaux de vote depuis le 9 juin dernier, soit soixante jours avant la tenue du scrutin. « Au courant de cette semaine, le tirage au sort est en train de se faire dans les régions », a informé le président du CEP qui dit agir dans le strict respect de la loi. De son côté, le directeur exécutif du CEP, maître Mosler Georges, a mis l’emphase sur l’importance du jour du vote. « C’est le jour le plus important dans le processus électoral », dit-il, avant de rappeler le rôle que doivent jouer les MBV, les mandataires, les superviseurs, les agents de sécurité et les observateurs dans la réussite de ce jour. Il souligne par ailleurs le problème d’espace dans les centres de vote. « Nos bureaux de vote n’ont pas la capacité de recevoir toutes ces personnes tenant compte du nombre de candidats qui doivent se faire représenter par un mandataire », précise Mosler Georges qui invite les dirigeants politiques à aider le CEP à trouver une formule pour gérer cette affluence le jour du vote. Frustrations, préoccupations et incertitudespar Noclès Débréus HAÏTI/ÉLECTIONS À l’hôtel Montana, le mardi 7 juillet 2015, le Conseil électoral provisoire (CEP) avait rendez-vous avec les partis politiques pour traiter du recrutement des 41 238 membres de bureaux de vote pour les législatives du 7 août prochain. Les participants ont profité de l’occasion pour cracher leurs frustrations et leurs préoccupations.
  • 5. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 5 ACTUALITÉ Des attaques armées contre des hommes politiquespar Pierre Paul Ancion SUD-EST/ÉLECTIONS/INSÉCURITÉ D ans la nuit du dimanche 6 au lundi 7 juillet 2015, des bandits armés ont attaqué la résidence de Garaud Histo- rique, membre du parti Renmen Ayiti, dans la localité de Cibao, commune de Belle-Anse. Plusieurs impacts de balles sont encore visibles sur les murs de la maison. Cependant, il n’y a pas eu de victime. Au cours de cette même soirée, à l’avenue Baranquilla à Jacmel, des hommes armés ont pénétré chez Jean Raymond Jean-François, candidat de la Fusion des socio- démocrates à la mairie de Bainet. Les bandits ont tiré sur tout ce qui bougeait, blessant au thorax Kensly Jean-François, 16 ans et neveu de Jean Raymond Jean-François. « Ils ont emporté l’une de mes valises contenant des documents importants », a révélé ce dernier. Ces deux incidents ne manquent pas d’irriter les politiciens du Sud- Est. Jean Apollon Sayo, responsable départemental de la Fusion, et Marc Elder Charles, de Renmen Ayiti, qualifient de politiques ces deux attaques armées. Ils demandent au CEP et à l’État haïtien de renforcer la sécurité de la région, pour rendre possible l’organisation des élections. « Dans ce climat, aucun de nos candidats n’osera faire campagne », a commenté Jean Apollon Sayo, qui a rappelé l’agression du conseiller spécial du président Martelly, Joseph Lambert, sur l’étudiant en communication sociale, Wesnel Jeudi, à la fin du mois de juin, pour prouver que la vie des politiciens est menacée dans le Sud-Est. Marc Elder Charles invite pour sa part les autorités judiciaires et policières à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour freiner cette vague de violences dans le département. De son côté, Antonius Télémaque, responsable départemental de l’Organisation du peuple en lutte (OPL) dans le Sud-Est, baptise de « zone rouge » le département sur la carte électorale. Il dénonce la distribution substantielle d’armes à feu dans les sections communales. Monsieur Télémaque promet la mobilisation de son parti pour, pacifiquement, mater cette forme d’intimidation. Des appels téléphoniques menaçants Certains candidats, comme madame Yolande Jean-Baptiste Pascal, disent recevoir des menaces à travers des appels téléphoniques anonymes et des SMS. Position de la Police nationale À la tête d’une délégation de l’Inspection générale, l’inspecteur général de la Police nationale d’Haïti, Jean Saint-Fleur, s’est rendu à Jacmel, ce lundi 6 juillet, pour discuter de la sécurité des élections avec le directeur départemental de la PNH, Frantz Elbe, et les institutions impliquées directement dans le processus électoral. Dans une rencontre avec la presse régionale, en marge de sa mission, l’inspecteur Saint-Fleur a donné la garantie que la PNH allait assurer correctement la sécurité des personnes et des biens durant la période électorale. « Le Sud-Est, a-t-il déploré, est le seul département du pays où il n’y a pas de militaires de la Minustah. Il y a seulement des policiers nationaux et des UNPOL, cependant pour les élections, il est prévu d’envoyer plusieurs militaires dans toute la région. » Comme l’a dénoncé le responsable départemental de l’OPL, plusieurs régions du Sud-Est telles que Cayes-Jacmel et Belle-Anse, sont toujours en ébullition en période électorale. Cette année, la majorité des partis politiques et les citoyens avisés craignent davantage de violences, à cause de la quantité importante d’armes à feu qui circulent dans le département. Cayes-Jacmel, Marigot et Belle- Anse sont les communes où les gens armés exhibent le plus leurs armes. En 2012, à Pérédo, localité de Marigot, une distribution de produits alimentaires par un organisme international a été pillée par des jeunes armés de pistolets 9 mm. Ces jeunes, de 20 ans en moyenne, ont mis en déroute les responsables de la distribution en pointant leurs armes.
  • 6. » suite de la première page « Les élections auront lieu », assure Pierre Louis Opontpar Gary Victor 6 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 ACTUALITÉ ENTREVUEDUPRÉSIDENTDUCONSEILÉLECTORALPROVISOIREAVECLENATIONAL Le président du CEP s’est dit confiant quant à la mise en place du mécanisme de vote. Certes, à un mois des élections, assure-t- il, il reste encore à travailler à la formation du personnel électoral, au recrutement des membres des bureaux de vote (MBV) et finalement la publication de la liste électorale. À presque trente jours des élections, les partis politiques, comme prévu à l’article 139-1 du décret électoral, n’avaient pas encore fait parvenir au CEP ce lundi 6 juillet les noms des membres des BV qu’ils devaient choisir sur une liste fournie par des organisations de la société civile. Avec ce retard dans le calendrier, le CEP devra convenir avec les partis politiques d’autres modalités pour le choix des membres des MBV pour rester dans les temps. Pierre-Louis Opont n’a, par contre, manifesté aucune inquiétude concernant les 22 millions de dollars américains manquant au budget électoral. Le gouvernement fera le nécessaire pour que cette somme soit disponible à temps, a promis le Premier ministre Évans Paul. Le président du CEP s’en tient donc à la promesse du gouvernement : « Le CEP n’a aucune préoccupation de financement. Les 36 millions dont nous disposons déjà suffisent pour le premier tour. On donne au gouvernement le temps nécessaire pour la recherche des fonds additionnels. » Le Pnud et le CEP Pour ce qui a trait à l’implication du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) dans le processus électoral, Pierre Louis Opont a tenu à rappeler que cet organisme ne finance pas les élections mais ne fait que gérer un Trust Found, opération pour laquelle il prélève 7 à 12 % pour ses frais de gestion. Qui contribue à ce fonds ? Les États-Unis d’Amérique, la France, le Japon, le Canada, le Brésil, l’Union européenne et l’État Haïtien, ce dernier à la hauteur de 14millions de dollars américains. Pourquoi le Pnud gère-t-il ces fonds, même ceux du Trésor public ? Jusqu’en 2012, selon le président du Conseil électoral provisoire, le Pnud ne gérait que la contribution étrangère alors que la part du Trésor public était gérée par le Conseil électoral provisoire. En 2010, le gouvernement avait demandé de confier tous les fonds au CEP afin de responsabiliser l’organisme en l’habituant à la gestion directe de ses propres ressources. Les bailleurs avaient alors manifesté de grandes réticences. En 2012, continue Pierre Louis Opont, pour une raison non clairement définie, l’État haïtien a choisi de confier ses prérogatives de gestion de ses propres fonds au Pnud. Les responsables du CEP, en particulier son président d’alors, Emmanuel Ménard, avaient refusé de signer cet engagement. Le ministère de la Planification avait pris la responsabilité de parapher le document, manifestant ainsi la volonté de l’État haïtien de transférer sa souveraineté au Pnud contre l’avis des membres du CEP. « Le fait que les fonds ne soient pas gérés par le CEP implique que toutes ses dépenses sont soumises aux procédures du Pnud », a confié Pierre Louis Opont. Cela explique la décision de donner le contrat à une firme de Dubaï (Émirats arabes unis) pour l’impression de 30 % des bulletins de vote. « Les procédures du Pnud, le peu de temps dont on disposait, entre la finalisation des listes et l’impression des bulletins liés à d’autres contraintes du marché, ne permettaient pas la participation des imprimeurs haïtiens. Mais nous allons faire en sorte que les firmes haïtiennes puissent participer aux appels d’offres pour l’impression des bulletins pour le second tour le 25 octobre et peut-être pour le troisième tour le 27 décembre 2015. » Le National a voulu rappeler au président du CEP la période trouble des élections de 2011 ayant abouti à l’élection de Michel Martelly en lui demandant s’il ne craignait pas encore une intervention de la communauté internationale «Il n’est pas question que ce CEP publie d’autres résultats que ceux des urnes », a riposté Pierre-Louis Opont, précisant que « le CEP a toujours eu toute la latitude de respecter le verdict des urnes ». Sans entrer dans le détail des circonstances ayant provoqué cette mainmise de l’international dans le processus en 2011, il a tenu à assurer que le Centre de tabulation où doivent être acheminés tous les procès-verbaux est totalement sous le contrôle de cadres haïtiens qualifiés. En 2011, rappelle-t-il, c’est un technicien international qui était responsable de la coordination des activités au CTV. Il jouait également le rôle d’assistant technique chargé d’entraîner le personnel haïtien. « Aujourd’hui, nous contrôlons tout le processus. » Le cas Lumarque La question des critiques adressées au Conseil électoral provisoire, Le président du CEP, Pierre Louis Opont. / Photo : J. J. Augustin
  • 7. entre autres, dans la gestion des cas Level et Lumarque a été évoqué au cours de l’entrevue. Ces deux candidats évincés, entre sommations, déploiement d’une impressionnante campagne de presse et mouvements de rue, défraient la chronique. Pierre Louis Opont affiche la plus parfaite sérénité. « Aucun des candidats ayant contesté une décision du CEP n’a pu argumenter sa position avec des preuves valables. » Dans le cas Lumarque, il a rappelé que l’article 90-H du décret électoral exige de tout candidat ayant été gestionnaire de fonds publics la présentation d’un certificat de décharge au moment de l’inscription. Le CEP demande au candidat un résumé de carrière pour savoir si nécessité de décharge il y a. Il est vrai que le CV de Lumarque n’avait pas permis au CEP d’estimer nécessaire une décharge, reconnaît Pierre-Louis Opont. « Il n’avait présenté qu’un papier pour un poste à l’Institut national de la formation professionnelle (INFP) en 1990. Mais quand les partis politiques nous ont informés du cas Lumarque, en mettant sur le tapis sa position à la tête de la Commission présidentielle sur l’éducation et les correspondances de la CSCCA à l’effet qu’il lui fallait un certificat de décharge. Nous avons dû réétudier son dossier. Le fait est qu’il devait avoir décharge et qu’il n’avait pas produit la pièce au moment de l’enregistrement. » Pierre-Louis Opont a soumis au National deux correspondances de la Cour supérieure des comptes, les deux signées de son président Fritz Robert Saint Paul, la dernière en date du 2 juin 2015 adressée à Jean Renel Sanon, le Secrétaire général du Palais national, où il est clairement dit qu’une commission a été formée pour auditer la gestion de Jacky Lumarque. Dans cette lettre, on peut lire ce qui suit : « La CSCCA apprécierait que vous preniez toutes les dispositions nécessaires pour permettre à la commission d’effectuer son travail. À cet égard, elle vous saurait gré de lui faire savoir quand l’accès aux documents comptables lui sera donné. » Le National a bien vérifié que cette dernière lettre a été effectivement transmisele2juin2015.Cependant, un certificat de décharge est délivré à Jacky Lumarque après un arrêt de quitus rendu le mercredi 3 juin 2015 par la Chambre des affaires financières composée des conseillers Fritz Robert Saint Paul, président, Jean Ariel Joseph et Saint Juste Momprévil, membres. « Jacky Lumarque n’avait pas ce certificat de décharge au moment de son inscription. Débat clos », tranche Pierre Louis Opont sans questionner cet arrêt. « Le CEP ne reviendra pas sur sa décision. » Nouveau décret électoral et innovations Le président du Conseil électoral provisoire a tenu à souligner pour Le National ce qui fait la différence entre le nouveau décret électoral et les législations antérieures. Pour lui, ce décret comporte trois innovations majeures. D’abord, précise-t-il, il y a une modification des instances contentieuses. « Aujourd’hui, le CEP n’est plus juge et partie. Toute décision, explique- t-il, est prise à la majorité des juges siégeant au niveau des instances contentieuses. Le CEP ne dispose pas de la majorité des voix. Le Bureau du contentieux électoral communal (BCEC) est composé de trois juges : un membre du Bureau électoral communal (BEC), tiré au sort, un avocat choisi au hasard sur une liste fournie par le barreau de la région, et un juge de siège choisi également au hasard sur une liste fournie par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ). Même procédé au niveau du Bureau du contentieux électoral départemental (BCED) : un membre du Bureau électoral départemental (BED), par tirage au sort, un avocat et un juge. Le Bureau du contentieux électoral national (BCEN), qui juge en dernier recours, est composé de deux conseillers électoraux tirés au sort, deux avocats de la Fédération nationale des barreaux d’Haïti, et un juge de la Cour d’appel fourni par le CSPJ. Donc le CEP n’a plus le contrôle des décisions au niveau des instances contentieuses. » La deuxième innovation, selon Pierre-Louis Opont, est le mode de choix des membres des bureaux de vote qui sont choisis par les partis politiques sur une liste fournie par des organisations de la société civile. La dernière, et la plus marquante peut-être, est la transmission par voie électronique des résultats des procès-verbaux affichés sur les murs des bureaux de vote. Après dépouillement, les procès-verbaux seront disponibles sur le net, ce qui permettra aux candidats de pouvoir examiner leur parcours avant même que les procès-verbaux n’arrivent au Centre de tabulation. « Un téléphone sécurisé sera fourni à chaque bureau de vote pour cela. Nous aurons un accès aussi sécurisé pour la transmission des données à Port- au-Prince. Cet accès ne pourra pas être piraté », a certifié le président du Conseil électoral provisoire. Le coût des élections et la question sécuritaire À la question de savoir s’il n’était pas possible à l’avenir de réduire les coûts des élections, le président du Conseil est convaincu qu’on devrait repenser complètement le modèle électoral actuel en Haïti, ce qui par ailleurs remet sur le tapis la nécessité d’une institution permanente avec un personnel permanent et qualifié. La question sécuritaire a été également évoquée au cours de cette entrevue. « Toutes les mesures seront prises pour assurer la sécurité pendant la période électorale et le jour du vote. On a eu des garanties de la Minustah et de la Police nationale qui ont travaillé à un plan de sécurité. » Mais il se dit conscient que ce sont là des éléments hors de contrôle directe du Conseil électoral provisoire, alors que c’est « une question cruciale de la problématique électorale ». Un proche du conseiller électoral Jaccéus Joseph a été assassiné dimanche soir. « Nous prenons au sérieux maintenant les menaces qu’on nous a faites », a dit Pierre- Louis Opont. « Nous ne pensions pas que ces gens passeraient à l’action. Nous avons eu tort. Nous avons eu une rencontre en ce sens avec le ministre chargé des questions électorales et la sécurité des conseillers et de leurs proches a été renforcée. » Le flot des rapatriés aura-t-il un impact sur les élections ? Réponse laconique de Pierre-Louis Opont : « Ils ne sont pas sur les listes électorales, cependant nous espérons que l’État haïtien prendra toutes les dispositions pour éviter que cette situation n’affecte le processus électoral. » Cap donc vers les élections ? MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 7 ACTUALITÉ ÉCHO Financement des candidats : le CEP attend les moyens Le gouvernement haïtien tarde encore à fournir au Conseil électoral provisoire des fonds nécessaires en vue de financer les candidats aux prochaines élections législatives. C’est ce qu’a révélé Frantz Bernadin, Porte-parole du CEP, qui a fait remarquer qu’il revient à l’organisme électoral de décider du montant à allouer aux partis politiques en fonction du nombre de candidats agréés. Aucune subvention financière ne sera allouée aux candidats indépendants. La campagne pour les législatives débute ce 8 juillet. Le CEP forme les ASE du 13 au 25 juillet prochains Le Conseil électoral provisoire travaille actuellement sur le recrutement des agents de sécurité électorale (ASE) ainsi que des superviseurs. Le corps de sécurité électorale devrait avoir un effectif de 5 000 membres, selon un communiqué du CEP informant que la formation pour ces agents se tiendra du 13 au 25 juillet 2015, à travers tout le pays. Haïti-RD, l'OEA se réunit sur le dossier de déportations Le Conseil permanent de l’Organisation des États américains (OEA) organise, ce mercredi 8 juillet 2015, une réunion spéciale autour de l’expulsion du territoire dominicain des migrants haïtiens illégaux ainsi que des personnes d’origine haïtienne frappées par l’arrêt 168-13 de la Cour constitutionnelle dominicaine. Cette rencontre se tiendra au siège de l’OEA à la Salle Simón Bolívar à Washington DC. Lener Renauld, ministre des Affaires étrangères d’Haïti, soumettra un rapport sur l’évolution de la situation entre Haïti et la République dominicaine, informe un communiqué de l’OEA indiquant que cette réunion sera diffusée en direct sur son site Web. La FNP, pour l'érection d'un mur sur la frontière haïtiano-dominicaine Les dirigeants de la Force nationale progressiste (Fuerza Nacional Progresista - FNP) proposent d’établir un système complet de surveillance de la frontière haïtiano- dominicaine. Ils préconisent la construction d’un mur sur 388 km entre la République dominicaine et Haïti. Selon les nouvelles, ces dirigeants estiment non nécessaire que ce mur soit construit sur toute la ligne frontalière en raison de l’existence des zones escarpées qui empêchent le passage des migrants illégaux et entravent la contrebande de toute sorte sur le territoire dominicain. Une nouvelle commission communale à Fort-Liberté Un nouveau conseil exécutif intérimaire est installé, lundi, à la tête de la mairie de Fort-Liberté. Ce conseil est présidé par Ken Lafosse, qui a remplacé Guito Pierre actuellement candidat à la députation aux prochaines élections. L’installation est faite en présence d’Hugo Charles, délégué départemental du Nord-Est, qui a conseillé à monsieur Lafosse de travailler au progrès de la commune. Cayes : EPPLS annonce un projet de construction de 300 maisons L’Entreprise publique de promotion de logements sociaux (EPPLS) a inauguré récemment un modèle de six unités de logement au quartier de La Savane dans la ville des Cayes. Le projet vise la construction de 300 maisons. En attendant la disponibilité des fonds nécessaires à l’exécution intégrale du projet, l’EPPLS a construit trois duplexes. C’est ce qu’a indiqué Esson Dorisca, son directeur, informant que ces constructions ont pu être effectuées grâce aux cotisations de bénéficiaires des logements sociaux gérés par l’EPPLS.
  • 8. 8 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 MONDE 4 43 Américains ont remis leur très officielle Déclaration de candidature à la commission électorale fédérale, pour l’élection présidentielle américaine de novembre 2016. Une poignée seulementaseschances,évidemment. Vous aviez déjà des difficultés à vous y retrouver parmi la vingtaine de prétendants républicains « sérieux » qui souhaitent défier la favorite démocrate Hillary Clinton dans la course à la Maison-Blanche en 2016 ? Accrochez-vous: au total, ce sont 443 candidats qui se sont déjà déclarés pour l’élection présiden- tielle américaine. Un nombre qui marque une nette inflation des vocations: ils étaient 417 en 2012 et 369 en 2008. 100 Républicains, 72 Démocrates et les autres... La plupart n’a aucune chance d’aller au bout des primaires, ni même de commencer ce processus long et coûteux. Mais ces 443 Américains ont rempli la Déclaration de candidature. Ce document doit être soumis à la commission électorale fédérale, dans les 15 jours après que le candidat s’est lancé dans la bataille et dès qu’il a levé plus de 5 000 dollars pour financer sa campagne. Parmi ces aspirants au Bureau-Ovale, figurent 100 Républicains, 72 Démocrates, 11 Libertariens, 3 Ecologistes, 1 Fédéraliste... et surtout beaucoup d’indépendants ou de non-inscrits. [Voir notre tableau de répartition]. Au-delà des étiquettes, qui sont ces candidats? Mais surtout d’où viennent-ils? Le site Mother Jones (qui a dénombré 448 candidats au total) les a situés sur une carte: c’est de Californie que viennent le plus de candidats (59). La Floride (42), le Texas (41), l’Etat de New York (32) et la Pennsylvanie (18) sont les autres gros pourvoyeurs en candidats. Le seul Etat qui n’en fournit aucun: l’Alaska... Mais que fait Sarah Palin? Etats-Unis: Bush, Clinton, Trump et les 440 autres candidats à la Maison-Blanche Sources : LEXPRESS.fr Le retour d'Edward Snowden aux États-Unis envisagésources : Lefigaro.fr L ’ancien ministre de la justice, Eric Holder, a laissé enten- dre que la justice américaine pourrait négocier un accord avec l’ex-consultant informatique de la NSA. Des poursuites judiciaires seraient néanmoins maintenues. En mars dernier, son avocat lais- sait entendre qu’Edward Snowden souhaitait rentrer aux États-Unis. Son retour semble désormais aussi envisageable pour les États-Unis. Dans une interview accordée à Yahoo News, Eric Holder, l’ancien ministre américain de la Justice, a indiqué que «la possibilité existe» pour le département américain de la Justice de conclure un accord avec l’ancien consultant informa- tique de la NSA. Ce dernier devrait néanmoins faire face à des pour- suites judiciaires. Trois sources proches du dossier, citées par les médias américains, estiment qu’Edward Snowden ne pourra rentrer aux États-Unis qu’à condition de plaider coupable et purgerait une peine de prison de trois à cinq ans. Il devrait aussi coopérer pleinement avec le gou- vernement américain. En mars dernier, Edward Snowden, actuellement en Russie, avait exprimé le souhait de regagner les États-Unis. Son avocat avait annoncé que des efforts étaient entrepris en ce sens, mais à la condition qu’on lui garantisse un procès légal et équitable. Eric Holder, alors encore en poste au ministère, avait uniquement fait la promesse qu’il ne serait pas condamné à mort. Une sentence à laquelle il s’est exposé après avoir révélé les pratiques de surveil- lance de la NSA, en violation du Espionage Act de 1917. Ces déclarations d’Eric Holder sont les premières à affirmer que la justice américaine pourrait négocier avec Edward Snowden, mais elles ne disent pas si le gou- vernement d’Obama à changer de position sur l’affaire Snowden.
  • 9. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 9 MONDE Q uatre pays parrainant les pourparlers entre le gou- vernement colombien et les Farc (Forces armées révolu- tionnaires de Colombie) ont appelé mardi à une « désescalade urgente » des violences qui menacent de faire dérailler le processus de paix. « Nous exhortons les parties à s’abstenir strictement de toute action causant des victimes ou des souffrances en Colombie, et à accé- lérer la mise en œuvre des mesures d’établissement de la confiance », peut-on lire dans un communiqué signé de la Norvège, de Cuba, du Chili et du Venezuela. « Nous con- sidérons ces mesures comme essen- tielles. » Le principal négociateur du gou- vernement colombien a menacé de quitter les négociations en raison de cette récente intensification des violences sur le terrain. Les Farc réclament pour leur part un cessez-le-feu bilatéral, ce que Bogota refuse, s’appuyant sur des exemples passés de trêves que les rebelles avaient mises à profit pour se réarmer. Le conflit le plus long de l’Amérique latine a fait 220 000 morts et des millions de déplacés depuis 1964. Les pourparlers de La Havane, qui ont débuté en novembre 2012, ont produit des résultats encourageants, les plus importants jamais engrangés lors de négociations de paix entre les deux parties. Mais les violences se sont intensifiées ces dernières semaines, depuis une embuscade rebelle qui a coûté la vie à dix militaires en avril et qui a conduit le président Juan Manuel Santos à ordonner une reprise des bombardements aériens contre la rébellion, qu’il avait suspendus un mois plus tôt en gage de bonne volonté. Depuis le début des pourparlers, Bogota et les Farc ont réglé plusieurs points importants, sur la réforme agraire, l’avenir politique des Farc et la fin du trafic de drogue. Deux dossiers restent à régler, celui de l’indemnisation des victimes et la démobilisation des Farc. Les pourparlers de paix sur la Colombie menacés de déraillementSources : Reuters Grèce: une sortie de l'euro pas exclue pour la Commission européenne sources : AFP U ne sortie de la Grèce de la zone euro n’est « pas exclue » si Athènes ne présente pas « un paquet de réformes crédibles », a estimé mardi Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne, avant un sommet extraordinaire qui va explor- er les minces chances de sauvetage du pays. « Si la confiance n’est pas établie, si aucun programme de réformes crédible n’est présenté », une sortie de l’euro « ne peut être exclue », a déclaré le commissaire européen chargé de l’Euro, à son arrivée à une réunion des minis- tres des Finances de la zone euro à Bruxelles. Afin d’ « éviter le scénario du pire » auquel la Commission « ne se résigne pas », il revient aux Grecs de « présenter des propositions complètes, concrètes, crédibles pour pouvoir démarrer la discus- sion », a dit de son côté Pierre Moscovici, commissaire euro- péen aux affaires économiques.« Les réponses de M. Tsakalotos (nouveau ministre des Finances grec, ndlr) doivent être concrètes, crédibles, tangibles efficaces », a-t-il insisté. A leur arrivée à cette réunion, les ministres des Finances de Slova- quie, Lettonie et de Malte ont déclaré que le scénario du Grexit, la sortie de la Grèce de la zone euro, était désormais clairement envisagé. « C’est une solution que les marchés (financiers) ont déjà envisagée depuis un moment maintenant et ce ne sera pas un problème pour l’Europe », a dit le Letton Janis Reirs. Pour le Maltais Edward Scicluna, « nous devons envisager les deux possibilités » d’un maintien ou d’une sortie de la Grèce de la zone euro, cette dernière possibilité étant désormais « réaliste ». « Il faut s’assurer qu’elle est très bien gérée et pas utilisée comme un bâton », a-t-il relevé. « Personnellement je suis scep- tique sur la possibilité d’un accord » entre la Grèce et ses créanciers, a dit le Slovaque Peter Kazimir dont le pays fait partie du camp des plus durs à l’égard d’Athènes. A l’inverse, le ministre des Financ- es espagnol Luis de Guindos s’est voulu optimiste, assurant que le scénario du Grexit n’était « pas sur la table ». « La balle est dans le camp grec », selon lui. Le Grec Euclide Tsakalotos, successeur de Yanis Varoufakis comme ministre des Finances d’Alexis Tsipras, ne s’est pas expri- mé à son arrivée à l’Eurogroupe, tout comme le Français Michel Sapin.
  • 10. 10 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 ÉCONOMIE L'université populaire d'été pour le renforcement de l'économie sociale et solidairePar Karenine Francesca Théosmy / AlterPresse L’université populaire d’été 2015 aurait permis de prendre des résolutions pour renforcer les expériences d’économie sociale et solidaire en Haïti, apprend AlterPresse. L ’événement s’est déroulé sur dix jours, du dimanche 21 juin au mercredi 1er juillet 2015, avec la participation de près d’une centaine de représentantes et représentants d’organisations pay- sannes, de jeunes et de femmes. Comme en 2014, les échanges ont tourné autour de l’économie sociale et solidaire pour la trans- formation sociale, thème retenu pour trois ans. « L’on a pu prendre des résolu- tions pour faire atterrir l’économie sociale et solidaire. Parce que beaucoup d’expériences ont lieu dans ce domaine [en Haïti] et nous avons pris des résolutions pour améliorer ces expériences », déclare à AlterPresse Guy Numa, responsable de programme au sein de l’Institut culturel Karl Levêque (Ickl). Une déclaration finale, en prépa- ration, devrait bientôt être rendue publique. L’édition 2015 a signé des « évo- lutions importantes, positives », aux yeux du professeur Camille Chalmers, directeur exécutif de la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda). « Cette année, nous avons pu con- crétiser, pendant les deux premiers jours, un échange magnifique entre 16 étudiants - qui sont en maîtrise au niveau de l’université publique… - et les participants à l’université d’été », dit-il. Les étudiants ont « produit des résultats très intéressants sur le plan des nouveautés, des inno- vations, de la créativité et sur le plan de la nécessité de mainte- nir un dialogue fécond entre les mécanismes de recherches de l’université publique et les efforts de la population ». Les étudiants ont également eu la possibilité de présenter, en ate- liers, leurs recherches et de rece- voir les critiques. Des expériences d’économie soci- ale et solidaire, en milieu rural et urbain, dont une expérience de boulangerie alternative dans quatre départements du pays, ont pu être présentées avec la partici- pation des étudiants. « Cela a été un échange absolu- ment égalitaire, qui s’est déroulé dans une ambiance cordiale et qui a montré combien les étudiants travaillaient dans leurs recherch- es, sans avoir vraiment beaucoup d’informations sur ce qui se passe dans le pays, sans être connectés aux dynamiques collectives des organisations de base », relève le professeur Camille Chalmers, parlant d’une expérience positive pour l’avenir. Des discussions autour de sous- thèmes en trois groupes ont égale- ment eu lieu. Un groupe s’est penché sur l’économie sociale et solidaire sous la houlette de la Papda. Un deuxième a considéré l’économie sociale et solidaire et la communication, sous les auspices de Sosyete animasyon ak kominikasyon sosyal (Société d’animation et de communication sociale / Saks). Le troisième groupe a abordé la lutte des femmes et l’économie sociale et solidaire, avec la Soli- darité des femmes haïtiennes (Sofa). Ont pris la parole plusieurs intervenantes et intervenants, à l’image de Kenidd Acelin, Evelyne Larrieux, Olga Benoît et Carole Pierre-Paul Jacob (toutes les 4 de Sofa), du professeur Jean Rénold Elie, coordonnateur général de la Faculté des sciences humaines (Fasch) de l’Université d’Etat d’Haïti (Ueh), du professeur Ary Régis, directeur général de la Saks et responsable du département de communication de la Fasch, ainsi que de Marc Arthur Fils-Aîmé et Muller Pierre-Louis de l’Ickl. Cette université populaire, initia- tive du mouvement social haïtien, a pris naissance depuis déjà une dizaine d’années avec l’Ickl. Par la suite, l’ont rejoint d’autres institu- tions, comme la Papda, la Saks, la Sofa, le Programme alternatif de justice (Paj) et l’Institut de tech- nologie et d’animation (Iteca). Entre l’édition 2015 et la pro- chaine, ces organisations con- tinueront à travailler, en réalisant, notamment, une évaluation des 5 dernières éditions, des forums intermédiaires et un processus d’accompagnement des expéri- ences menées à la base, selon Chalmers. Le contexte sera marqué par les élections, prévues entre août et décembre 2015, pour le renouvel- lement de tous les postes électifs, sauf 10 au sénat de la république. « L’on peut s’attendre à ce qu’au niveau des joutes électorales, il y ait beaucoup plus de présence des organisations sociales et populai- res… pour que les débats ne soient pas concentrés sur un individu », mais abordent aussi des thèmes, tels la réforme agraire, l’eau pota- ble, la reforestation, l’éducation, entre autres, annonce Chalmers. Par ailleurs, le directeur de la Papda souligne les difficultés de financer l’université populaire. Cette année, un grand nombre de volontaires ont participé à son organisation, de même qu’une entreprise sociale et solidaire de restauration, Konbit Fanm Saj. HAÏTI-DÉVELOPPEMENTDURABLE Les participants ont pu prendre des résolutions pour faire atterrir l’économie sociale et solidaire. / Photo: Fritznelson Fortuné
  • 11. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 11 ÉCONOMIE Les coopératives veulent s'unir pour renforcer l'économie haïtiennePar Elisée Décembre ÉCONOMIESOCIALE OCDE : Le monde doit prendre en compte le coût réel du charbon pour vraiment protéger le climat Les gouvernements devraient reconsidérer le rôle du charbon dans les approvisionnements énergétiques, car l’ampleur des nouveaux investissements consacrés aux centrales à charbon polluantes représente la menace climatique la plus pressante, a déclaré le Secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurría. Les pays devraient procéder à une évaluation plus rigoureuse du coût réel du charbon. Comme les prix ne tiennent pas pleinement compte des coûts environnementaux, sanitaires et financiers de ce combustible, beaucoup de centrales électriques aujourd’hui en construction devront peut-être être fermées avant la fin de leur durée de vie utile, a souligné M. Gurría lors d’une conférence donnée à l’invitation de la London School of Economics (LSE) et d’Aviva Investors, associés à ClimateWise. S’il s’avère que les énergies de remplacement du charbon sobres en carbone ne sont pas à la portée de certains pays en développement, les pays donneurs devraient mobiliser des financements pour combler l’écart. « Le charbon n’est pas une énergie bon marché, a noté M. Gurría. Les gouvernements doivent se demander sérieusement si le choix de cette énergie est bénéfique pour les citoyens. » En l’absence de nouvelles mesures d’atténuation, on estime que la production d’énergie à partir de charbon émettra plus de 500 mil- liards de tonnes de CO2 entre aujourd’hui et 2050, ce qui représente la moitié environ du « budget carbone » qu’il s’agira de ne pas dépasser pour maintenir l’élévation de la température mondiale en dessous de 2 °C. www.timounaid.org C ette journée de réflexion autourduthème«Tètansanm nan mitan fanmi kooperativ yo » organisée au local de « Koprofer kenbe » à Cazeau a permis à ces acteurs de l’économie solidaire et sociale d’évaluer les interventions qui, de 1951 à nos jours, épaulent sur le terrain la masse populaire avec leur dispositif de microfinance. La journée internationale des coopératives ne date pas d’hier. Elle a été instaurée dans les annales des journées mondiales par l’Association des coopératives internationales (ACI) depuis 1922, soit 32 ans après leur création. Pour célébrer ce 93e anniversaire, l’ACI a retenu comme thème : « Opter pour les coopératives, opter pour l’égalité. » Une grande théma- tique qui invite au positionnement militant. « Il nous fallait réagir cette année devant une telle per- spective » a indiqué Frantz Prinvil, l’un des membres de CCH. Dans le cadre de cette journée, un représentant du ministère des Affaires sociales s’est prononcé sur « la protection sociale et les coopératives » et la séance s’est terminée par des échanges relatifs aux objectifs visés par le Collec- tif. « Notre vision est assez osée », avoue Mr Prinvil, car nous voulons de prime abord avoir un recense- ment de toutes les coopératives du pays pour ensuite les inviter à intégrer les rangs de l’Association des coopératives internationales (l’ACI) et de la Confédération des coopératives de l’Amérique cen- trale (CCCA). « Nous occupons une place prépondérante dans l’industrie de la microfinance en Haïti. Nous faisons un travail de proximité. Nous sommes présents dans tous les recoins du pays, du départe- ment du Sud au Nord-Ouest en passant par l’Ouest et le Centre il n’y a pas une ville du pays où l’on ne retrouve pas au moins une coopérative », s’enorgueillit Frantz Prinvil. De la plus ancienne coopérative d’Haïti, la Caisse populaire Sainte Anne fondée en 1951 à la Vallée de Jacmel, à toutes celles qui ont pris naissance au cours des années après, le souci est clair : aider les petites bourses à survivre dans un pays où l’emploi est comme une denrée rare. « Il est clair que la présence de ces coopéra- tives exerce un impact positif sur l’économie haïtienne ». Frantz Prinvil pense que c’est un affront à l’égard des coopératives le fait d’enlever de la constitution la phrase qui stipulait que : « Haïti est une République coopératiste. » Un accident de parcours pour le Collectif des coopératives haïti- ennes dont la mission est de défen- dre les intérêts des coopératives en Haïti. La commémoration de la journée internationale des coopératives, ce samedi 4 juillet écoulé, a été l’occasion de la création du Collectif des coopératives haïtiennes (CCH), une association qui regroupe la majorité des coopératives du pays et qui se fixe déjà de grands objectifs.
  • 12. 12 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 ÉCONOMIE Les péchés d'HaïtiPar Eduardo Galeano* Ce texte de l’auteur des « Veines ouvertes de l’Amérique Latine » date de 1996. Galeano y revient sur l’Histoire d’Haïti. Et il explique comment l’Occident a construit la malédiction de cette île au fur et à mesure des ans, parce qu’elle était habitée par des noirs. PAGERETROUVÉE L a démocratie haïtienne est née il y a un moment. Dans son bref temps de vie, cette créa- ture affamée et malade n’a reçu que des gifles. Elle était nouvelle-née, dans les jours de 1991, quand elle a été assassinée par le coup de force militaire du général Raoul Cedras. Trois ans plus tard, elle a ressuscité. Après avoir subi et être sortie de tant de dictatures militaires, les États-Unis sont venus et ont mis en place le président Jean-Bertrand Aristide, qui avait été le premier président dans toute l’histoire d’Haïti élu par un vote populaire et qui avait eu la folle idée de vouloir un pays moins injuste. Le vote et le veto Pour gommer les traces de la participation américaine dans la dictature carnassière du général Cedras, les marines ont emporté 160 000 pages de dossiers secrets. Aristide est revenu enchaîné. Ils lui ont donné la permission de récupérer le gouvernement, mais lui ils ont interdit le pouvoir. Son successeur, René Préval, a obtenu presque 90% des votes, mais n’importe quelle personne de quatrième catégorie du FMI ou de la Banque Mondiale a plus de pouvoir que Préval, même si le peuple haïtien ne l’a pas choisi. Le veto peut plus que le vote. Veto aux réformes : chaque fois que Préval, ou quelqu’un de son gouvernement, demande des crédits internationaux pour donner du pain aux affamés, des lettres aux analphabètes ou une terre aux paysans, il ne reçoit pas de réponse, ou ils lui répondent en lui ordonnant : - Récitez la leçon. Et comme le gouvernement haïtien n’en finit pas d’apprendre qu’il faut démanteler le peu de services publics qui restent, les dernières pauvres protections pour l’un des peuples les plus abandonnés du monde, les professeurs considèrent l’examen comme perdu. L’alibi démographique À la fin de l’an passé quatre députés allemands ont visité Haïti. Ils n’étaient pas arrivés que la misère du peuple les a frappés. Alors l’ambassadeur d’Allemagne leur a expliqués, à Port-au-Prince, quel est le problème : - C’est un pays surpeuplé - a-t-il dit-. La femme haïtienne veut toujours, et l’homme haïtien peut toujours. Et voilà qu’il a ri. Les députés se sont tus. Cette nuit, l’un d’eux, Winfried Wolf, a consulté les chiffres. Et voilà qu’il a vérifié qu’Haïti est, avec le Salvador, le pays le plus surpeuplé des Amériques, mais il est aussi surpeuplé que l’Allemagne : il a presque la même quantité d’habitants au kilomètre carré. Durant son séjour en Haïti, le député Wolf a été frappé par la misère : il a aussi été ébloui par la capacité de création des peintres populaires. Et voilà qu’il est arrivé à la conclusion qu’Haïti est surpeuplé... d’artistes. En réalité, l’alibi démographique est plus ou moins récent. Jusqu’à il y a quelques années, les puissances occidentales parlaient plus clairement. La tradition raciste Les États-Unis ont envahi Haïti en 1915 et ils ont gouverné le pays jusqu’en 1934. Ils se sont retirés quand ils ont réussi leurs deux objectifs : faire payer les dettes de la City Bank et abroger l’article constitutionnel qui interdisait de vendre les plantations aux étrangers. Robert Lansing, Secrétaire d’État de l’époque, a justifié la longue et féroce occupation militaire en expliquant que la race noire était incapable de se gouverner elle-même, qu’elle a “une tendance inhérente à la vie sauvage et une incapacité physique de civilisation”. L’un des responsables de l’invasion, William Philips, avait forgé quelque temps auparavant cette idée sagace : “Ils sont un peuple inférieur, incapable de conserver la civilisation que les français leur avaient laissés”. Haïti avait été la perle de la couronne, la colonie la plus riche de France : une grande plantation de sucre, avec une main-d’œuvre d’esclaves. Dans L’esprit des lois, Montesquieu avait expliqué sans tergiverser : “Le sucre serait trop cher si les esclaves ne travaillaient pas dans sa production. Les esclaves sont noirs depuis les pieds jusqu’à la tête et ils ont le nez si écrasé qu’il est presque impossible d’avoir pitié d’eux. Il semble impensable que Dieu, qui est un être très savant, ai mis une âme, et surtout une bonne âme, dans un corps entièrement noir”. En revanche, Dieu avait mis un fouet dans la main du berger. Les esclaves qui ne se distinguaient pas par leur volonté de travail. Les noirs étaient esclaves par nature et feignants aussi par nature, et la nature, complice de l’ordre social, était l’œuvre de Dieu : un esclave devait servir le maître et le maître devait punir l’esclave qui ne montrait pas un tant soit peu d’enthousiasme pour remplir le dessein divin. Karl Von Linneo, contemporain de Montesquieu, avait fait précisément un savant portrait du noir : “Un vagabond, paresseux, négligent, indolent avec des coutumes dissolues”. Plus généreusement, un autre contemporain, David Hume, avait vérifié que le noir “peut développer une certaine habileté à s’humaniser, comme le perroquet qui parle quelques mots”. L’humiliation impardonnable En 1803 les noirs d’Haïti ont administré une raclée terrible aux troupes de Napoléon Bonaparte, et l’Europe n’a jamais pardonné cette humiliation infligée à la race blanche. Haïti a été le premier pays libre des Amériques. Les États-Unis avaient conquis avant son indépendance, mais il avait environ un million d’esclaves qui travaillaient dans les plantations de coton et de tabac. Jefferson, qui était propriétaire d’esclaves, disait que tous les hommes sont égaux, mais il disait aussi que les noirs ont été, sont et resteront inférieurs. Le drapeau des libertés a été dressé sur des ruines. La terre haïtienne avait été dévastée par la monoculture du sucre et détruite par les calamités de la guerre contre la France, et un tiers de la population était tombée au combat. Alors a commencé le blocage. LA nation nouvellement née a été condamnée à la solitude. Personne ne li achetait, personne ne lui vendait, personne ne la reconnaissait. Le délit de la dignité Même Simón Bolívar, qui si brave qu’il pu être, n’a pas eu le courage de signer une reconnaissance diplomatique du pays noir. Bolivar avait pu reprendre sa lutte pour une indépendance américaine, quand l’Espagne l’avait déjà battu, grâce à l’appui d’Haïti. Le gouvernement haïtien lui avait remis sept navires et beaucoup d’armes et de soldats, avec pour seule condition que Bolivar libéra les esclaves, une idée qui n’était pas due au Libérateur. Bolivar a rempli son contrat, mais après sa victoire, quand il gouvernait déjà la Grande Colombie, il a tourné le dos au pays qui l’avait sauvé. Et quand il a convoqué les nations américaines à la réunion de Panama, il n’a pas invité Haïti mais il a invité l’Angleterre. Les États-Unis ont reconnu Haïti récemment 60 ans après la fin de la guerre d’indépendance, tandis qu’Etienne Serres, un génie français de l’anatomie, découvrait à Paris que les noirs sont primitifs parce que chez eux la distance entre le nombril et le pénis est courte. A ce moment là, Haïti était déjà aux mains de dictatures militaires carnassières qui destinaient les ressources faméliques du pays au paiement de la dette française : L’Europe avait imposé à Haïti l’obligation de payer à la France une indemnisation gigantesque [Lire “La dette extérieure d’Haïti, une hypocrisie française”]**, à la manière d’une dette du pardon pour avoir commis le délit de la dignité. Cette histoire de persécution contre Haïti, qui de nos jours prend des dimensions de tragédie, est aussi une histoire du racisme dans la civilisation occidentale. *Los pecados de Haití : originalement publié par Eduardo Galeano – Brecha 556, Montevideo, 26 juillet 1996. **La dette extérieure d’Haïti, une hypocrisie française” : http://www. primitivi.org/spip.php?article180
  • 13. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 13
  • 14. 14 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 SOCIÉTÉ Qui sont-ils ? Il est dimanche matin, Jamson et Rosena, respectivement neuf et onze ans, enlèvent les étiquettes sur les bouteilles plastiques dans un site de stockage à l’angle des rues des Miracles et Pavée où envi- ron une dizaine de collecteurs informels préparent et emballent leurs marchandises vers les entre- prises clientes. Ils nous expliquent : « on aide notre grand-mère. C’est grâce à cette activité qu’elle paie l’école et nous donne à manger ». Cependant, si Jamson et Rosena sont pris en charge par leur grand- mère, Watson, enfant de cité soleil de 12 ans, pratique cette activité depuis la mort de sa mère. Train- ant un gros sac dans lequel il met des objets ramassés devant le parc industriel Sonapi à Trois mains sous un soleil de 14 heures, il nous explique : « c’est avec cela que je gagne un peu d’argent pour nourrir mes frères et sœurs et moi. Maman est morte, papa nous a abandonnés et depuis, je suis devenu kokorat ». Pour Osnel, un jeune garçon de 20 ans à Delmas 9, s’il ne quitte pas cette activité, explique-t-il, c’est parce qu’il n’a aucun autre moyen de survivre avec sa famille dont il est l’ainé. « Imagine-toi, quand tu portes le sac sur ta tête, un liquide puant mêlé de tout ruisselle jusqu’à ta bouche, ce n’est pas bon pour ton cerveau», argumente-t-il avec une voix morne. Quant à Fritzner, 32 ans, père de deux enfants, en plus de la journée, il sort à la tombée de la nuit pour rentrer à l’aube. Comme tous les autres collecteurs interrogés, Fritzner n’utilise aucun matériel de protection. Ni masque, ni gants, ni chaussures appropriés mais il est obligé, explique-t-il debout au milieu des déchets col- lectés à l’angle des rues Saint-hon- oré et Réunion : « on nous dit que nous mettons nos mains dans la matière fécale, mais je sais ce que je cherche », déclare-t-il. Pour Silvia, 61 ans, elle a peur du risque de chercher dans les ravins cependant il lui arrive quand même de se faire blesser la main par les tessons de bouteilles, explique-t- elle, non loin d’un ravin à Bois- Verna. Mais, n’ayant aucune assis- tance de l’État, elle doit continuer pour gagner environ 300 gourdes contre une grande balle (plusieurs sacs cousus ensemble, qu’elle dit remplir dans environ trois jours de travail) afin d’aider ses enfants. Quel risque encourent ces citoyens en fait? Abdias JOACHIM, un médecin de SODEC Hospital, n’hésite pas (sans aucune intention de minimisation) à qualifier ces citoyens d’ « infec- tions ambulantes ». Ces citoyens qui achètent à manger en faisant leurs activités sans la possibilité de se laver les mains, ne sont à l’abri d’aucune des maladies que nos déchets peuvent transmettre, nous explique-t-il. Et leur entourage n’en est pas non plus à l’abri. De plus, étant sans matériels de protec- tion, ils courent conséquemment le risque d’attraper la leptospirose, une maladie attrapée à partir de l’urine des rongeurs provoquant de fortes douleurs articulaires, et de fièvres continues. Est-ce là la cause des douleurs atroces et longues fièvres d’Osnel ( 20 ans ) et de Silvia (61 ans ) qu’ils associent aux fatigues de leusr activités ? En fait, le risque de maladie le plus évident que courent ces concitoy- ens restent la gastro-entérite qui agit sur l’estomac et les intestins et provoquent des diarrhées et vom- issements. Ces citoyens doivent-ils cesser ces activités à haut risque? Si tous nos interviewés confessent qu’ils ne peuvent, malgré leur volo- nté, suspendre ces activités, Fritz Gerald Louis, un expert en anal- yse économique et développement international, cadre de la direc- tion des études du ministère de l’économie et des finances, pense que tous les métiers ont un certain niveau de risque et que les métiers à hauts risques existent partout dans le monde. S’ils en sont arrivés là, c’est à cause de la faiblesse de la protection sociale de l’État, pense- t-il. Ce qu’il faut, dit-il, c’est de réguler le secteur. Il faut des normes pour la collection, mais ses activi- tés rapportent, c’est du travail, cela rend les pratiquants autonomes et aide à l’assainissement, explique l’expert. Quelle économie ? Celle des bourgeois marchands, sous- traitants qui achètent les déchets de ces survivants à huit gourdes le kilo comme l’a confié Watson, sous prétexte de recyclage dans le pays ? Une de ces entreprises, sise à bon repos à laquelle plusieurs col- lecteurs disent vendre les déchets, n’a pas voulu trop réagir sur le tra- vail pourtant rentable. Les grandes théories de l’État l’attribuent la protection des citoy- ens qui le constituent. Même si certaines théories voient dans la mission de l’État (bourgeois) la protection des dominants de la société, cependant certaines socié- tés établissent des mécanismes de prise en charge des plus démunis du système avec l’argent des con- tribuables. Ces mécanismes de protection sociale dont il convient de parler d’assistance dans le cas de ces démunis travaillant dans l’informel ne touchent aucun des interrogés. Seul Sonson, un autre enfant de 13 ans à la rue Saint- Honoré, a dit avoir déjà vu de distri- butions de kits cependant les «gwo nèg » (plus âgés violents), pour reprendre son expression, l’ont toujours empêché d’en bénéficier. Pour ce qui est de savoir s’il est de la volonté des citoyens de prendre ces risque ou si c’est l’inadéquation de la protection sociale de l’état qui ne les en empêche pas, des cadres du ministère des affaires sociales et du travail ont répondu que « les programmes ne peuvent pas touch- er tout le monde. On doit accepter le fait que les gens font leur travail et qu’il faut c’est de les encadrer ». Au fait, aucun de la gamme des droits universels de l’homme (à la santé, art 25 ; à la sécurité socia- le, art 22 ; au travail, à la protec- tion, art 23 ; à un niveau de vie suffisant, art 25 ; à l’éducation, art 26) promu par l’occident et en vogue dans le pays surtout depuis 1986, n’arrive à empêcher ces citoyens d’arriver à ce niveau de contradiction pour reproduire leur vie. Ces droits seraient-ils ceux des individus égoïstes, repliés sur eux mêmes; droits favorisant (occultant) l’exploitation comme le pense Marx dans la « question juive » (1843, p 22-23) ? En fait, ni la liberté, ni l’égalité, ni la fra- ternité de ces droits, et triade de notre drapeau, n’empêche les citoy- ens de risquer leur vie sans aucune protection, aucune assistance dans ces ravins et décharges aux déchets mêlés. Dans l’individualisme (exac- erbé avec le capitalisme), on pense que seul son bonheur et « celui des siens » importent. Mais est-il vrai, comme le laisse croire le capital- isme, qu’on peut construire son bonheur ignorant celui des autres, autrement dit, sur le mal-être des autres? Nous qui prétendons ignor- er le sort de ces concitoyens-là, n’est-il pas incohérent même dans la logique individualiste et égoïste, dans la mesure où ces enfants qui ne vont pas à l’école et aspirent au bonheur comme tout le monde risquent de devenir des hors la loi (comme aucune loi ne les ont jamais protégé) et nuisent à notre bonheur égoïste en générant de l’insécurité ? Ces grands-mères qui font les courses aux mêmes marchés que nous, ne risquent-elles pas de con- taminer notre cuisine égoïste par toutes sortes de maladies? En tout, cas réfléchissez sur votre individu- alisme exacerbé ! Enfin, est-ce que ces citoyens vont être pris en charge par le nouveau gouvernement où est-ce qu’avec ces milliers de citoyens (personnes plutôt?) « rapatriés » par l’autre partie de l’Ile ils seront encore plus à prendre ce risque mortel pour, paradoxalement, reproduire leur vie? En tout cas, si Silvia a résolu qu’elle ne votera plus, malgré la déception dont fait mention tous les potentiels votants de nos inter- rogés. Ceux- ci attendent les pro- chaines élections pour aller voter. Alors, peut-être que de ces milliers de candidats ils trouveront des concitoyens qui, une fois élus, ne les oublieront pas jusqu’aux pro- chaines élections, comme l’a pensé Fitzner qui. Malgré tout, pense voter. Un gagne-pain à double impactpar Sabry ICCENAT HAÏTISOCIÉTÉ/RÉCUPÉRATEURSDEDÉCHETS Qui ne tombe pas encore sur un de ces concitoyens en train de fouiller dans les poubelles, les montagnes de débris en pleine rue ou les ravins ? Sans aucune distinction de sexe ni d’âge, ils cherchent dans les déchets des objets en plastique, des canettes, du fer, du cuivre. Bref, tout objet ayant une valeur marchande. Des enfants au travail sur un site de stockage à l’angle des rue pavée et des miracles.
  • 15. MERCREDI 8 JUILLET 2015 N0 34 | 15 SOCIÉTÉ La robe noire taillée LN-Je fais une chose non profes- sionnelle en te félicitant pub- liquement pour ta beauté noire et lumineuse. En espérant que ce compliment sera pris dans son élé- gance sociale, engageons les sujets de notre entretien. Il se déroulera sur ton parcours dans la vie, sur l’entreprise Raj Magazine, sur tes croyances religieuses et tes sou- haits pour ta terre, madame, pour la prochaine décennie. Tu es née à Port-au-Prince? Ou ? Dans quel joli bourg d’Haïti as-tu pris naissance ? RAJ -Merci pour les compliments, Pierre. J’apprécie l’élégance inves- tie dans la formulation de ta pensée. J’ai pris naissance à Port-à-Piment dans le Sud, là où se trouve l’une des plus belles grottes des Caraïbes: la grotte Marie-Jeanne. Je ne m’accroche à aucune dénomi- nation religieuse précisément. Je crois en Dieu, en sa puissance, en sa présence en chacun de nous. Je suis en quête de Lui. Je cherche à pouvoir communiquer avec Lui en vue de trouver ma paix intérieure. Mes souhaits pour Haïti, ma terre, pour la prochaine décennie, c’est de voir émerger une classe moyenne capable de répondre à ses besoins. Mon engagement personnel veut que je m’investisse à apporter, à travers Raj Magazine, ma singulière contribution dans la revalorisation de la conscience de l’Haïtien en l’encourageant à capitaliser sur le positif... LN.Quels sont les meilleurs souve- nirs qui te restent de ton adoles- cence? Une nostalgie amoureuse? Un succès de classe ? Un deuil ? Une belle robe ? Un poème, à toi, dédié ? RAJ- En élémentaire II, je ne con- nais pas la nouvelle nomenclature dans l’enseignement, j’étais la moins âgée et la plus menue de la classe. Un jour, à la récitation, la professeure s’est rendue compte que j’étais l’unique élève à réciter convenablement toute la leçon d’histoire. Pour marquer cette performance, elle m’avait invitée à monter sur son bureau pour être applaudie par toute la classe. Enfin, j’avais droit, pour mon exploit, à une surette (un bonbon). J’étais fière de moi ! De plus, j’ai en mémoire cette belle robe noire que je m’avais taillée, elle épousait parfaitement mes lignes... Le tissu rétrécissait après lavage. Un jour tandis que je m’en suis revêtue pour me rendre à l’INAGHEI (1ère année), ma mère pestait contre ma tenue. Elle avait trouvé que c’était un juste-au-corps et que cette robe laissait lire tous les détails de ma morphologie. Catégoriquement, elle m’interdisait de laisser la maison accoutrée de ma belle robe dont j’étais si fière. Je me souviens d’avoir essayé de la convaincre. Entre temps, je ne sais par quel miracle, la robe allait reprendre ses dimensions normales et redevenir décentes. Elle ne se laissait prendre à mes fantaisies et mes réponses ne faisaient pas le poids. Quand elle a compris que j’étais entêtée à porter ma robe malgré tout, elle m’a appelée et de ses ciseaux, l’a a fendue de haut en bas. Là, elle m’a invitée à sortir en lambeaux... si j’y tenais encore. J’étais en colère ce jour-là contre ma mère. Mais, avec l’âge et le raisonnement, j’ai fini par comprendre cette éducation ferme et disciplinée... De nos jours, nos jeunes s’habillent n’importe com- ment et affichent n’importe quel comportement antisocial voire déviant. Les parents n’exercent sur eux aucun contrôle et la société devient de plus en plus permissive. Y AVAIT-IL DES PROPOSITIONS INDECENTES ? LN. Qu’est-ce qui t’avait porté à créer Raj Magazine ? Mon amour pour Haïti. Mon désir de contribuer à l’évolution de notre société et surtout mon engoue- ment à encourager la culture de la positivité chez nos lectrices et nos lecteurs, et bien sûr, chez nos collaboratrices et collaborateurs et chez moi (la charité bien ordonnée commence par soi. Rires). LN. Femme, cela a dû être dur pour toi de faire comprendre ce projet ? C’est malheureusement dur, en effet, pour les femmes de faire valoir leur projet. Mais la déter- mination, la persévérance, la pas- sion et l’amour pour Haïti, pour ce travail, ont permis à Raj Magazine d’exister encore. C’est tout un pro- blème de discrimination. LN. Quel a été le plus grand défi pour toi ? La rédaction ou le sup- port financier ? Mes collaborateurs aiment autant que moi l’idée de vendre Haïti autrement que la promotion de ses sites naturels et historiques. Donc, la rédaction n’a jamais été un trop grand défi. Le support financier, oui, c’est le plus grand défi de Raj Magazine. Au fait, ce serait mieux de trouver des mécènes, des entre- preneurs pour des engagements à long terme plutôt que de courir derrière des patronages tout au long de l’année pour assurer la pérennité de Raj Magazine. Nous envisageons tant de choses pour promouvoir positivement Haïti (avoir une version audio pour les non-voyants comme nous l’a sug- géré le Dr Michel A. Péan. Une ver- sion vidéo qui serait publiée sur YouTube, FaceBook et les télés qui voudraient bien; organiser au moins quatre activités culturelles par an; inviter des jeunes à nous accom- pagner dans les villes de province à chaque déplacement pour leur permettre de visiter le pays, etc.) Dans tous les pays du monde, il existe pas mal magazines à dévelop- per des thématiques différentes. En Haïti, on dirait même que c’est une fierté de voir des revues naître un jour et mourir un à trois ans plus tard. Bien souvent des entreprises de sponsorisation me déclarent qu’elles n’y sont pas intéressées parce qu’en général les magazines ne vivent pas longtemps. Elles feignent d’ignorer que justement c’est par leur déni de support que ces initiatives meurent aussi rap- idement. D’ailleurs, RAJ Magazine est distribué gratuitement. L’argent doit circuler pour asseoir une classe moyenne qui soit en mesure de se procurer les biens et les services de ces entreprises... En faisant ce travail de promotion du pays, ces entreprises contribueraient à la promotion de leur environnement et les retombées leur seraient favo- rables dans le temps. L’objectif de Raj Magazine par exemple est de porter les touristes à venir en Haïti, à influencer les gens positivement (les lecteurs de Raj Magazine) en vue de les encourager à réfléchir et agir dif- féremment... Comme si rien de ce qui a rapport avec la collectivité, la culture de la positivité, la promo- tion du pays et des artistes qui nous distraient ne nous intéresse... C’est à se demander qu’est-ce qui peut bien faire réagir certains Haïtiens de nos jours? Nou pa konen nan kisa nou kwè. LN. J’enragerais de savoir que, sur le plan des contacts avec le milieu des affaires, on t’aurait fait des “propositions indécentes”. Eh bien! Ne te gêne surtout pas, Pierre. Cette attitude fait partie du lot. C’est un véritable problème auquel j’ai fait face plus d’une fois. Mais ne t’inquiète pas parce que j’aurais préféré voir Raj Magazine aux oubliettes plutôt que de succomber à ces ‘’propositions indécentes’’. Comment comprends- tu que je fais la promotion de notre pays avec Raj Magazine mettant en exergue le côté positif des gens, encourageant ses lecteurs à consommer les fruits et légumes du terroir..., ce que toute haïtienne, tout haïtien conséquents devraient encourager... Je devrais me compromettre moi-même pour y parvenir?... Franchement, Pierre? Autant faire taire mon patriotisme et me trouver un pis-aller dans une ONG, ou fuir Haïti comme fait la majorité de la jeunesse du pays livré à lui-même... Il est grand temps que les hommes apprennent à apprécier le travail des femmes plutôt que de les considérer comme de vulgaires marchandises. C’est odieux... L.N. Quels sont les meilleurs numéros que tu as imprimés ? Pour moi, chaque numéro de Raj Magazine a sa singularité et sa beauté. Mais, j’avoue apprécier plus les hors-séries: ‘’Frank Etienne l’Immortel’’, ‘’Rhum Barbancourt l’Or du temps’’, ‘’l’Age d’Or’’, les numéros réguliers: ‘’Destination Sud-Est’’, ‘’Bienvenue dans le Marien’’, ‘’Destination Grand’Anse’’, ‘’Destination Môle Saint-Nicolas’’, ‘’Regard sur l’Art en Haïti’’ un numéro fin prêt, mais que nous avons des difficultés à imprimer faute de 13 000.00 $ US pour l’occasion... Je profite de cette entrevue pour solliciter le support financier de certaines entreprises moyennant des pages publicitaires en contre -partie. 12- J’ai aimé, Rose, ta photo avec le bouquet de fleurs dans le numéro sur la BPH. Merci pour ton appréciation. Les couleurs de mon sourire reflètent la beauté de mon âme. Mes plus beaux sourires viennent de mon cœur, Pierre... Rose Adele Joachin : « Ne t'inquiete pas des propositions... »Par Pierre Clitandre FOCUS Rose Adèle Joachin est belle. Responsable de RAJ Magazine, elle se bat pour la présentation d’une image positive du pays. Cela ne se fait pas sans déceptions. Elle nous raconte son aventure avec des nuances qui disent qu’elle veut garder certains secrets… Rose Adele Joachin.
  • 16. 16 | N0 34 MERCREDI 8 JUILLET 2015 SOCIÉTÉ M arche pacifique, danse, témoignages, chants, scènes de théâtre, ont été les principales activités réalisées pour marquer cette céré- monie de clôture. Il s’agit d’un séminaire de for- mation et de sensibilisation à l’intention de 60 élèves de la classe de 5e année fondamentale de l’École nationale Toussaint Louverture (Lascahobas) contre les violences (physiques, émo- tionnelles et sexuelles) faites aux enfants dans les milieux scolaires. À cette formation ont pris égale- ment part près de 51 élèves de 7e, 8e et de 9e année fondamentale de l’institution Mixte de l’Avenir (Carrefour-Feuilles) et 30 profes- seurs, dont 15 de Lascahobas et 15 de Port-au-Prince. Des séances de sensibilisation ont été réalisées à l’intention des parents sur la dis- cipline positive en lieu et place de la violence. Droits de l’enfant, participation citoyenne, leadership et protec- tion contre la violence ont été, entre autres, les thèmes agités lors de ces séances de formation, débutées en avril dernier. La protection des enfants con- stitue l’une des grandes priorités de l’IBESR, affirme le représent- ant de l’IBESR, Elie Serge. C’est dans cette perspective qu’il a établi un bureau à travers les dif- férents départements du pays et déployé un ensemble d’agents de protection des mineurs afin de veiller au strict respect des droits des enfants, notamment les plus vulnérables. De son côté, la représentante d’« Enpak », Jo-Ann Garnier Lafon- tant, a indiqué que les parents et les professeurs peuvent aider les enfants à s’autodiscipliner sans pour autant user de violence à leur endroit. Les enfants, a-t-elle ajouté, peuvent être éduqués en passant avec eux des contrats et par la négociation. De l’avis de la représentante d’« Enpak », il convient de sensibilis- er tout un chacun à la nécessité de s’engager dans la protection des enfants. Car, soutient-elle, toute action violente exercée contre un enfant risque de conduire celui-ci dans une spirale où il exercera à son tour la violence sur un autre plus petit que lui. Pour remédier à cette situation, Mme Lafontant appelle au respect du droit intégral des enfants. Elle préconise l’usage de la discipline positive en vue d’enrayer les actes de violence sur les enfants. Cette série de séminaires, indique la conseillère de « HPP AKSE », Marjorie K. Bertrand, s’inscrit dans le cadre du support de l’organisation qu’elle représente à l’État haïtien pour aider celui-ci à mettre en place une politique publique via l’élaboration d’un cadre légal devant contribuer à prévenir la violence et à en proté- ger les enfants. Elle rappelle qu’une enquête réali- sée en 2012 a révélé que plus d’un tiers des filles interrogées ont été victimes de violences de toutes sortes avant d’atteindre l’âge de 18 ans. Selon ce qu’elle a indi- qué, le milieu scolaire est désigné comme l’endroit où les enfants sont victimes d’abus soit de leurs enseignants, soit des directeurs d’écoles. Face à cette situation, informe Mme Bertrand, une stratégie nationale de protection de l’enfant est en cours d’élaboration. Elle permettra de freiner les violenc- es faites aux enfants en vue de contribuer à l’épanouissement de cette catégorie vulnérable. Dominique Yanick, une écolière, participant à ces séances de for- mation, informe y avoir appris les méthodes lui permettant de résoudre un conflit avec ses pairs. Elle a aussi indiqué que ce sémi- naire a contribué à l’aider de manière positive, arguant qu’elle était une fille conflictuelle et que maintenant elle ne l’est plus. Bélizaire Stevenson, un autre écolier également participant à cette formation, ne tarit pas de louanges quant aux bienfaits de ce séminaire. Il dit espérer que cette initiative va s’étendre sur toute l’étendue du territoire afin de permettre à d’autres enfants d’en tirer profit. Aussi se propose-t-il de partager avec les enfants de son âge les leçons qu’il a apprises durant ce séminaire. Marche de Sensibilisation Contre la Violence faite aux Enfants. Clôture du projet Kapabpar Reynold Aris Suite aux résultats de l’enquête sur la violence faite aux enfants (VACS) (Violence Against children survey), commanditée par l’État haïtien, l’organisation « Enpak » (Engagement, participation et kapasite), en partenariat avec l’Institut du bien-être social et de recherches (IBESR) et le projet « HPP AKSE », a clôturé le projet baptisé Kapab (Konprann mwen, Ankadre m pou m aprann pi byen). La cérémonie a été tenue le dimanche 5 juillet 2015 à Lascahobas (Plateau central). Ce projet est financé par l’Agence américaine internationale de développement (USAID) pour un montant de 42 mille dollars américains. HAÏTI/DROITSDEL’ENFANT