2009 - Le défi numérique : réinventer le service public
1. 19 E
JOURNEE DE RENCONTRE DE L'OBSERVATOIRE TECHNOLOGIQUE
Le défi numérique: réinventer le service public
La 19è
Journée de rencontre de l’Observatoire technologique organisée le 20 novembre 2009 était consacrée à l'impact des technologies numériques
dans le service public et à leur potentiel d'innovation. Plus de 250 personnes ont assisté à la manifestation et ont pu prendre la mesure des
opportunités et des défis liés à cette problématique.
Au détour du troisième millénaire les
technologies de l’information et de la
communication influencent profondément
notre société, tant au niveau individuel que
collectif. Ce changement de paradigme
favorise l’émergence des réseaux sociaux
et renforce ainsi nos capacités à échanger
et à collaborer, souvent dans une
approche pluri-disciplinaire. Il impose
surtout la réalité d’un citoyen qui
revendique toujours plus la possibilité
d’être un acteur à part entière de la
création des contenus, des services ou
des produits qu’il utilise. De nouvelles
démarches d’innovation s’appuient sur ces
tendances et sont mises en œuvre avec
succès dans le secteur privé.
Mais si l’innovation est devenue un enjeu
aussi vital qu’évident pour le monde
économique, elle reste souvent un tabou
pour le secteur public. Rares sont les
organisations publiques qui revendiquent
une réelle démarche d’innovation et qui
ont lancé des initiatives dans ce sens. Et
pourtant les potentialités sont là ! Le
service public n’aurait-il aucune légitimité à
innover ? Les obstacles sont-ils si
insurmontables ?
A l’heure où le programme d’administration
en ligne genevois est sur les rails, il nous a
semblé nécessaire de nous pencher sur la
question. Cette 19è
Journée de rencontre
proposait ainsi de mettre en perspective la
problématique de l’innovation dans le
secteur public en l’abordant sous diverses
facettes témoignant de la diversité des
approches envisagées...
Davantage d’informations sur ot.geneve.ch
approches envisagées ainsi que de la
richesse des résultats obtenus.
Les orateurs suivants ont contribué au
succès de cet après-midi d'échanges :
Georges Amar est responsable de l’unité
Prospective et développement de
l’innovation à la RATP. Il a pour mission de
détecter, générer et diffuser des idées et
des connaissances nouvelles et de
contribuer à leur traduction en projets et
produits efficients.
Loïc Haÿ est spécialiste des services et
usages des technologies de l’information
au service du développement territorial. Il
est chargé de mission à ARTESI Ile-de-
France.
Michael Mesfin a une formation de
sociologue. Il est activement engagé dans
plusieurs initiatives liées à l’innovation
dans notre région. Il est un des fondateurs
de l’espace d’incubation Muse 2 lancé à
Genève à l'automne 2009.
Stéphane Vincent est directeur du projet
« La 27e Région », la première agence
française d’innovation publique qui permet
aux Régions de préparer l’avenir et de
changer leurs méthodes d’action.
Robert Monin, secrétaire général du
Département des constructions et des
technologies de l'information ainsi que
Jean-Marie Leclerc, directeur général du
Centre des technologies de l’information
se sont également exprimés sur les enjeux
liés au défi numérique pour notre service
public.
UN OBSERVATOIRE TECHNOLOGIQUE,
POUR QUOI FAIRE ?
L’Observatoire technologique (OT) a pour
principal mandat d'aider l'administration et
les entités genevoises à intégrer une
vision sociétale dans leurs réflexions liées
aux technologies de l'information et de la
communication.
Cela passe par une veille stratégique et
technologique, à l’intersection de la
recherche, des technologies de pointe et
de la société. De larges domaines sont
ainsi explorés, au-delà des seules
questions technologiques et tout en
replaçant l’individu et la société au centre
de la réflexion. C’est dans cette
perspective que l’OT a élaboré en 2002 le
« référentiel e-Société ».
Dans le cadre des mandats ou des
groupes de travail initiés avec ses
partenaires, l’OT a mené ses réflexions
en veillant à toujours suivre une
démarche académique basée sur un
travail de recherche approfondi.
Une conception sociétale des
technologies de l'information et de la
communication doit privilégier les
échanges pluridisciplinaires. Les
membres de l'OT veillent ainsi à cultiver
un réseau de contacts dans des
domaines variés, hors de leur champ de
compétence, tels que la sociologie, le
droit, l'éthique ou la pédagogie. La
confrontation de ces visions plurielles
enrichit le débat et permet d'éviter l'écueil
d'une approche techno-centrique.
Décembre 2009 Département des constructions et des technologies de l'information
Image: StockXpert
2. LES INTERVENTIONS EN BREF
La réinvention du service public se situe au cœur du changement de paradigme amené par la société de la connaissance et du savoir. Cette
problématique est trop vaste pour espérer en faire le tour à travers quelques exposés seulement, aussi denses et intéressants soient-ils. Mais les
orateurs de cette 19è
Journée de rencontre ont convaincu l’auditoire de la richesse du sujet et des multiples façons de l’aborder.
Rédaction: Patrick Genoud – Observatoire technologique – Tél: +41 (22) 388 13 50 – Fax: +41 (22) 388 13 57 – E-mail: ot@etat.ge.ch - Site Web: http://ot.geneve.ch
Centre des technologies de l'information – Département des constructions et des technologies de l'information – République et canton de Genève
Loïc Haÿ
Chargé de mission à ARTESI Ile-de-France
Loïc Haÿ dévoile la démarche Innovention du Web2territorial qui vise à
ancrer les outils du Web 2.0 dans des contextes d’usages professionnels
des territoires. L’objectif est d’abaisser les barrières à l’innovation pour les
acteurs locaux et de les aider à réinventer leurs métiers.
L’idée de base est d’outiller cette réinvention de l’action publique en
sélectionnant les services les mieux adaptés parmi la multitude de ceux
offerts sur le Web, ceci à des coûts ridiculement faibles par rapport à leur
valeur d’usage. Équipé de cette boîte à outils, on peut alors susciter
l’innovation en évaluant la valeur transformatrice de l’usage des outils du
Web 2.0 par la co-conception et l’expérimentation de prototypes socio-
techniques déployés en contextes réels.
On est ici dans la culture du remix et du détournement créatif, ceci dans
une démarche visitant les quatre étapes du « cycle de l’innovation »
envisagé par Loïc Haÿ : Découvrir, Imaginer, Prototyper et Essaimer.
Robert Monin
Secrétaire Général du Département des constructions et des
technologies de l’information de la République et Canton de Genève
Évoquant le défi numérique, Robert Monin rappelle que l’État de Genève
n’est pas en reste comme l’atteste notamment la renommée planétaire du
vote par Internet initié dans notre canton. Le programme d’administration
en ligne lancé en 2008 poursuit sur cette lancée : les premiers services
réalisés en 2009 sont un succès et celui concernant les autorisations de
construire programmé au début 2010 suscite beaucoup d’attentes.
Robert Monin insiste sur la nécessité d'envisager nos réalisations futures
« au service de » et non comme une fin en soi. Les questions légales,
éthiques ou celles relatives à l’e-Inclusion doivent être systématiquement
prises en compte. Il est également important d'intégrer le changement de
culture amené par le numérique à l’intérieur de l’administration.
Selon Robert Monin l’État doit envisager de se mettre en mouvement de
manière volontariste en privilégiant les approches basées sur les
partenariats et les réseaux plutôt que sur les modèles hiérarchiques.
Michael Mesfin
Co-fondateur du Creative Center Muse 2
Michael Mesfin présente l’espace d’incubation Muse 2 lancé à l’automne
2009 au centre de Genève. Il souligne la vocation de cet espace
d’échange et de rencontre à se situer aux avants-postes de l’innovation.
C’est à Muse 2 que l’on devrait atteindre la température critique
nécessaire à initier le mouvement créatif. Pour ce faire, Muse 2 peut
s’appuyer sur la formidable caisse de résonance que constituent les
30’000 membres du réseau Rézonance.
La posture adoptée par Muse 2 se veut exploratoire : rien n’est figé, ni
dans son mode de fonctionnement, ni dans la volonté d’en dégager des
indicateurs clés permettant de mieux saisir les conditions-cadres
atypiques des projets créatifs de l’économie de demain. C’est de la
multiplicité des points de vue et d’une interaction directe entre les
différents acteurs que naîtra cette créativité.
Muse 2 est un lieu où passent les projets et les porteurs de projets. Il doit
devenir un « hub des histoires de créativité » initiées dans notre région.
Stéphane Vincent
Directeur de La 27è
Région
Stéphane Vincent présente La 27è
Région, la première agence française
d’innovation publique. Celle-ci s’est résolument engagée dans la voie de
l'innovation sociale qui positionne les citoyens comme des acteurs à part
entière de l'élaboration des services qui leur sont destinés. Elle met ainsi
l’accent sur les démarches de personnalisation et de co-conception.
Pour concrétiser cette approche la 27è
Région a lancé les « Territoires en
Résidences », des initiatives qui accueillent sur quelques semaines une
équipe pluridisciplinaire constituée notamment de designers, de
sociologues et de chercheurs, immergés au sein d’un équipement ou d’un
espace public. Un seul défi pour tous, celui de la co-conception !
Une démarche par prototypage, des méthodes et des outils adaptés ainsi
que le partage et la communication constituent les ingrédients
nécessaires pour mobiliser les gens et les énergies. Et les diverses
expérimentations lancées récemment à travers la France en illustrent
parfaitement les potentialités.
Jean-Marie Leclerc
Directeur général du Centre des technologies
de l'information de la République et canton de Genève
Jean-Marie Leclerc relève le potentiel extraordinaire de notre région
lorsqu’on évoque le nouveau paradigme de la société de la connaissance.
Nous devons cultiver ce potentiel affirme-t-il. Et le service public genevois
doit montrer l'exemple en profitant notamment de l’impulsion donnée par
le programme d’administration en ligne.
Au-delà des succès relevés une année après son lancement, un constat
plus général s’impose : « Avec l’administration en ligne, nous sommes
totalement dans une dynamique apprenante, constamment en découverte
de solutions ! » L’autre leçon retenue est que si nous voulons être
innovants il faut savoir rester humbles !
Jean-Marie Leclerc affirme que nous devons reconnaître à l’individu sa
compétence à apporter de la valeur et à enrichir les services mis à sa
disposition. La co-création et la co-conception sont ainsi des démarches
essentielles à explorer. Mais évitons de réinventer la roue ! Observons ce
qui se fait ailleurs et sachons nous inspirer de ces succès.
Georges Amar
Responsable de l’unité Prospective et
développement de l’innovation à la RATP
Georges Amar insiste sur l’importance de la pluridisciplinarité et de la co-
conception dans les processus d’innovation, gages d’enrichissement des
dimensions explorées. Il relève également la nécessité de s’appuyer sur
des méthodes et des outils adaptés qui permettent notamment d’être
créatif sans éloigner l’expertise.
Selon lui la vocation de la RATP n’est plus d’être une entreprise de
transports. Elle doit devenir une société de services à une mobilité
individuelle envisagée globalement. Et si l’on considère que les individus
sont les acteurs de leur mobilité, il faut l'imaginer à la fois comme active et
interactive en proposant les moyens de la co-créer dans une démarche
d'empowerment.
Georges Amar conclut son exposé en ébauchant le métro du 21è siècle:
un « métro des échanges », véritable plateforme de services créateurs de
liens et d'opportunités pour les foules qui y transitent ; un métro levier du
développement durable.