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La Cellule Economique et Politique (CEP) de l’association
          Njàccaar Visionnaire Africain présente :



          LES CAHIERS DE NJACCAAR
L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE




                         Mars 2012
I. GENERALITES SUR LE PETROLE
    I.1 - Qu’est ce que le Pétrole ?

        Formation, Piégeage, Exploration et Production du Pétrole

        Les différentes utilisations du Pétrole

    I.2 - Le Pétrole dans le Monde

        Production et Consommation de Pétrole dans le monde

        Une nouvelle donne mondiale

II. L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE
    II.1 - Géopolitique du Pétrole en Afrique

         Répartition des réserves et Production du Pétrole en Afrique

         Partenaires historiques VS Partenaires nouveaux

   II.2 - Economie du Pétrole en Afrique

        Multinationales VS Compagnies Nationales : Quel modèle pour l’Afrique ?

        Impact de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine

III. PERSPECTIVES PETROLIERES POUR L’AFRIQUE
   III.1 - Prospective sur le pétrole et l’énergie en Afrique

        Quel futur pour l’exploitation pétrolière en Afrique ?

        Croissance de la population africaine et besoins énergétiques du continent

   III.2 – Les problèmes actuels et les facteurs sur lesquels nous pouvons agir

        Les problèmes actuels : Détournements d’argent et modèle économique

        Importance de la situation politique et de la formation scientifique

IV. GLOSSAIRE ET SOURCES
I. GENERALITES SUR LE PETROLE
I.1 - Qu’est ce que le Pétrole

Formation, Piégeage, Exploration et Production du Pétrole

Le pétrole est une substance liquide de couleur noire que l’on trouve à l’état naturel dans le
sous-sol. Composé très riche en hydrocarbures, le pétrole et ses dérivés (kérogène, Gazole,
Naphta etc) sont utilisés dans de très nombreux domaines comme le transport, l’industrie
pharmaceutique, la fabrication de composés plastiques etc. Le pétrole est considéré comme
une ressource non renouvelable (à échelle humaine) car sa formation est liée à un processus
qui dure des millions d’années. Ce processus de formation est le suivant :

    Des végétaux marins, souvent des algues microscopiques appelées phytoplancton,
     captent l’énergie lumineuse du soleil grâce à la photosynthèse.

    Lors de la photosynthèse, ces végétaux créent de la matière organique qu’elles
     stockent dans leurs tissus et dans leurs cellules. Cette matière organique est très
     riche en Carbone.

    Lorsqu’ils meurent, ces végétaux et leur matière organique vont s’accumuler dans la
     vase argileuse des fonds marins où ils sont rapidement recouverts par d’autres
     couches de vase ou de sable.

    L’accumulation de ces nouvelles couches sur la matière organique enfonce celle-ci
     dans le sous-sol marin. Quelques bactéries enfouies dans le sous sol dégradent cette
     matière organique et la transforment en un produit noirâtre appelé kérogène. Celui-
     ci continue à s’enfoncer dans le sous-sol. Ce processus d’enfoncement peut durer des
     milliers d’années.

    La température du sous-sol augmentant avec la profondeur, le kérogène va devenir
     de plus en plus chauffé au fur et à mesure qu’il s’enfonce. Vers 1000 à 1500 mètres
     de profondeur, la température atteint les 60°C et le kérogène, un mélange solide de
     boue, de molécules riches en soufre et d’hydrocarbures, commence à se transformer
     en Pétrole liquide sous l’effet de la chaleur. Cette transformation qui s’arrête vers
     4000 mètres de profondeur c'est-à-dire aux alentours de 140°C, est très lente et peut
     durer des millions d’années !

    Apres cette très longue « cuisson » sous l’effet de la chaleur interne de la terre, le
     pétrole liquide se forme, migre vers un endroit imperméable où il peut s’accumuler
     (un piège). Ce piège est souvent constitué par des structures souterraines et
     imperméables en forme de dôme que les géologues appellent « Anticlinaux ».
 Sous ces anticlinaux, le pétrole s’accumule dans une roche poreuse, le plus souvent
     du sable ou du calcaire, que les géologues appellent roche réservoir. Le pétrole,
     souvent avec de l’eau et du gaz, imbibe la roche réservoir en remplissant les espaces
     vides c'est-à-dire la porosité de la roche. Ainsi les « champs » de pétrole doivent
     plutôt être vus comme une éponge imbibée de liquides divers (pétrole, gaz et eau) et
     non comme un lac souterrain !




                          Les différentes étapes de la formation du pétrole

Pour trouver du Pétrole, les géologues recherchent des indices favorables comme l’existence
de fossiles marins, de couches argileuses riches en kérogène (le précurseur du pétrole) ou
encore la présence de dômes souterrains, c’est à dire d’anticlinaux. La recherche de fossiles
ou de couches rocheuses riches en kérogène se fait sur le terrain. La recherche de pièges
anticlinaux souterrains nécessite l’intervention de techniques géophysiques sophistiquées
comme la sismique. La sismique va permettre de se faire une image assez fidele du sous-sol,
un peu comme une échographie révèle ce qui ne peut être vu à l’œil nu.

Une fois que l’existence d’un piège comme l’anticlinal est avérée, il faut ensuite s’assurer
qu’il y’a bien du pétrole qui s’est accumulé en dessous ou à proximité du piège. Cette
vérification est cruciale et elle s’effectue à l’aide de forages d’exploration qui coûtent
plusieurs dizaines de millions de dollars. A cette occasion, des foreuses vont percer la roche
sur plusieurs milliers de mètres (cela peut durer des mois) pour atteindre la zone cible où
l’on pense qu’il y’a du pétrole. Si on trouve du pétrole en quantité suffisante dans la roche
réservoir recouverte par le piège, le forage est dit « positif ». Mais cela n’arrive pas très
souvent.
En effet on estime qu’en moyenne seul un forage sur 4 est positif, le reste étant des
forages « secs », c'est-à-dire ne contenant pas de pétrole ou tres peu pour être exploitable
et rentable. Ainsi lorsque le forage est sec, c'est-à-dire la plupart du temps, la compagnie
pétrolière perd tout l’argent qu’elle a investi dans l’exploration.

Dans le cas d’un forage positif, on effectue ce qu’on appelle une évaluation réservoir, pour
savoir combien de millions de litres de pétrole pourront être tirés de la roche réservoir
(sable ou calcaire imbibé). Ce travail effectué par des ingénieurs nécessite des modélisations
précises et tres gourmandes en calcul informatique. Une fois que le réservoir est évalué, on
envoie d’autres équipes de forage qui vont cette fois-ci procéder à la mise en place de puits
de production. Ceux-ci vont servir de conduits où le pétrole pourra remonter à la surface
pour être recueilli. Cette remontée se fait d’abord naturellement - le pétrole remonte dans
le puits grâce à la pression naturelle du réservoir - puis il faut ensuite « aspirer »
mécaniquement le pétrole afin qu’il sorte du réservoir où il s’était accumulé. On peut
également injecter d’autres fluides (comme de l’eau ou du gaz) dans le réservoir afin
d’expulser le pétrole vers la surface.




                           Les techniques de production du pétrole
Les différentes utilisations du Pétrole

Le pétrole existe à l’état naturel mais il n’est pas une substance pure. Il est composé de
plusieurs hydrocarbures. Au début de son exploitation intensive à la fin des années 1800 aux
Etats Unis, le pétrole a d’abord été utilisé comme combustible dans les lampes à pétrole.
Mais tres rapidement, son raffinage, c'est-à-dire sa séparation en ses hydrocarbures
constitutifs, a permis l’utilisation du pétrole et de ses dérivés dans plusieurs domaines qui
sont entre autres :

La Production d’électricité grâce aux centrales thermiques où l’on brûle le pétrole lourd
appelé fuel.

Le Transport (automobile, aérien ou maritime) avec les carburants dérivés du pétrole :
essence, gazole, kérosène (à ne pas confondre avec kérogène!) etc.

L’Industrie plastique avec les polymères hydrocarbonés issus du raffinage. C’est grâce à cela
que l’on crée des sachets plastiques, des bouteilles d’eau en plastique.

L’industrie cosmétique, textile et pharmaceutique avec l’utilisation de composés
hydrocarbonés dans la fabrication des lotions, des tissus, des médicaments etc.

I.2 - Le Pétrole dans le Monde

Production et Consommation de Pétrole dans le monde

La découverte de l’énergie électrique ainsi que l’avènement de l’automobile et de l’avion ont
fait exploser la demande mondiale de pétrole, la faisant progresser sans discontinuité depuis
le début du XXème siècle. Aujourd’hui, la demande mondiale de pétrole est estimée à 82
millions de barils par jour (1 baril = 159 L). Cette demande est satisfaite par une production
équivalente essentiellement assurée par La Russie, L’Arabie Saoudite, Les Etats-Unis, L’Iran,
La Chine, L’Irak, Le Venezuela et d’autres pays membres de l’OPEP comme Le Qatar, Le
Nigéria ou encore le Koweït.

La demande mondiale de pétrole est quant à elle due à trois grands pôles de consommation
que sont les Etats-Unis, L’Europe et L’Asie du Sud-Est (Chine, Inde, Japon, Corée) avec
respectivement 21%, 22% et 31 % de la demande mondiale. Ainsi, bien qu’étant troisième et
cinquième producteurs mondiaux avec respectivement 7,5 et 4 Mbaril/jour, les Etats-Unis et
la Chine sont obligés d’importer de grandes quantités de pétrole pour satisfaire leur
demande interne.
L’Afrique, aussi bien dans la production que dans la consommation, voit sa part sans cesse
augmenter alors que les consommations européenne et nord-américaine semblent stagner
depuis le début des années 2000.




    Production et Consommation de Pétrole dans le monde 1985-2010 (BP Review 2011)

Une nouvelle donne mondiale

Apres la suprématie américaine dans la production jusque dans les années 1970, les pays du
golfe avec à leur tête l’Arabie Saoudite ont pris les rênes de l’industrie de production
mondiale de pétrole. Disposant de champs géants voire ultra-géants, disposant d’un pétrole
facilement exploitable à bas prix, ces pays ont joué le rôle de régulateur dans le marché
mondial du pétrole (chocs pétroliers de 1973 et 1979, Hausse de leur production pour pallier
à des accidents naturels ou garder un certain niveau de prix etc). Cependant, la hausse du
baril depuis le début des années 2000, a poussé les compagnies pétrolières et les Etats riches
en réserves à explorer de nouvelles contrées comme l’offshore (le pétrole situé en mer) ou
les pétroles non conventionnels comme les sables bitumineux de l’Athabasca au Canada ou
les huiles lourdes de l’Orénoque vénézuélien. Outre ces « nouvelles puissances pétrolières »,
on assiste depuis une décennie à la renaissance de la production de la Russie : Une Russie
qui est même devenue en 2011, premier producteur mondial de pétrole devant l’Arabie
Saoudite et ses champs de pétroles géants mais vieillissants.
Cela fait également 20 ans que l’Afrique s’affirme comme l’une des nouvelles places fortes
de la production mondiale de pétrole. En effet, sa production globale est passée de 6,6
Mbaril/jour en 1990 à un peu plus de 10 Mbaril/jour en 2010 soit autant que les productions
russe ou saoudienne. A titre de comparaison, la production Nord-Américaine (USA, Canada,
Mexique) est passée de 13,8 Mbaril/jour en 1990 à…13,8 Mbaril/jour en 2010 ! Loin de cette
stagnation, la hausse de la production africaine est essentiellement assurée par quelques
géants « traditionnels » comme le Nigéria, l’Algérie ou la Lybie. Mais force est de reconnaitre
que la production africaine s’est également beaucoup décentralisée lors de la dernière
décennie avec l’émergence d’un nouveau géant , l’Angola, et la part de plus en plus
importante de pays comme le Soudan, le Tchad ou encore la Guinée Equatoriale.

Ces changements notables, aussi bien au niveau mondial qu’au niveau de l’Afrique peuvent
être imputés à l’émergence de la Chine, à l’explosion de la production offshore (très utilisée
en Afrique de l’Ouest), aux forts cours du baril qui permettent d’exploiter toujours plus loin,
et au déclin prochain ou déjà amorcé de régions historiquement productrices comme les
Etats-Unis ou la Mer du Nord.




II. L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE
II.1 - Géopolitique du Pétrole en Afrique

Répartition des réserves et Production du Pétrole en Afrique

L’Afrique reste encore un terrain largement inexploré par les compagnies pétrolières.
Disposant de larges côtes, notamment sur sa façade atlantique, le continent africain possède
de vastes bassins côtiers ou sous-marins où il pourrait y avoir du pétrole. De même, certains
grands espaces du Sahara ou de la forêt équatoriale n’ont pas encore été explorés et
fourniront peut-être quelques surprises à l’avenir.

Ces perspectives encourageantes sont quelque peu confirmées par l’augmentation des
réserves prouvées de pétrole qui ont plus que doublé, passant de 60 milliards de barils en
1985 à 130 milliards en 2010. L’augmentation de ces réserves traduit la réussite qu’ont
rencontrée les compagnies pétrolières dans le cadre de leurs nombreuses campagnes
d’exploration entamées en Afrique depuis les années 1980. Ainsi, les réserves n’augmentent
pas dans l’absolu (il n’y a pas de 60 milliards de barils de pétrole qui se sont formés en 25
ans) mais on les découvre de plus en plus car l’investissement d’exploration augmente. A ce
propos, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit des investissements (exploration et
production) cumulés de 1200 Milliards de dollars en Afrique sur la période 2007-2030.
Cet investissement est aujourd’hui essentiellement assuré par les compagnies américaines
(ExxonMobil, ChevronTexaco), européennes (Shell, Total) et asiatiques (chinoises
notamment avec la CNPC). L’investissement massif a permis de découvrir de nouveaux
champs offshore dans les pays déjà producteurs (Nigeria, Angola, Guinée Equatoriale) et a
également permis la découverte de gisements dans des pays qui n’avaient jamais produit de
pétrole comme le Ghana, le Tchad ou l’Ouganda.

Avec ses 130 milliards de barils de réserve, l’Afrique se place en troisième position mondiale,
loin derrière le Moyen-Orient et l’Amérique Latine, mais à égalité avec l’Europe (Russie
incluse). L’Afrique représente 10% des réserves mondiales de Pétrole et il est fort probable
que cette part progresse dans les décennies à venir en raison des investissements. A l’heure
actuelle, 4 pays, tous membres de l’OPEP, détiennent 80 % des réserves pétrolières
africaines, ces pays sont :

- La Lybie avec 46 Milliards de barils

- La Nigéria avec 37 Milliards de barils

- L’Angola avec 13 Milliards de barils

- L’Algérie avec 12 Milliards de barils

Cette répartition très inégale des réserves, ne signifie pas que des découvertes majeures
sont exclues ailleurs à l’avenir, mais elles montrent bien qu’il faudra compter avec ces 4
géants dans les prochaines décennies. 4 géants qui sont déjà, et de loin, les 4 plus gros
producteurs de pétrole en Afrique. En effet, 75 % des 10 Millions de barils que l’Afrique
produit quotidiennement viennent du Nigéria (2,4 Mbaril/jour), de l’Angola (1,9
Mbaril/jour), de l’Algérie (1,8 Mbaril/jour) et de la Lybie (1,7 Mbaril/jour). A cela s’ajoutent
les productions de l’Egypte (740.000 baril/jour), du Soudan (480.000 baril/jour), du Congo
Brazzaville (300.000 baril/jour), de la Guinée Equatoriale (275.000 baril/jour), du Gabon
(245.000 baril/jour) et du Tchad (120.000 baril/jour), tous les autres pays ayant pour
l’instant une production inférieure à 100.000 baril/jour.

En analysant ces données on s’aperçoit que deux grands pôles de production se dégagent :

- L’Afrique du Nord et du Nord-Est avec l’Algérie, la Lybie, l’Egypte, le Soudan et le Tchad.

- L’Afrique de l’Ouest avec le Nigéria, la Guinée Equatoriale, le Gabon, le Congo + l’Angola.
La production de pétrole en Afrique et sa part dans le monde

Cette production est également « spécialisée » en fonction de la zone : sur la terre ferme en
Afrique du Nord et en offshore, c'est-à-dire en mer, dans le golfe de Guinée et en Angola.

 Ces spécialisations peuvent entrainer quelques difficultés en vue de la mise en production.
Ainsi l’exploitation sur la terre ferme a des limites plutôt pratiques et économiques et non
technologiques comme c’est le cas en mer, notamment dans l’offshore profond. Exemple,
l’acheminement du pétrole tchadien, un néo-producteur, se fait en direction des côtes du
Cameroun grâce à un pipeline de 1100 km qui a coûté plusieurs milliards de dollars et de
longues heures de négociations entre investisseurs, état tchadien et compagnies pétrolières.
Le passage de l’exploration à la production n’est donc pas automatique et nécessite
d’importants investissements supplémentaires, notamment dans le cas de découvertes
situées à l’intérieur du continent (Tchad, Ouganda, RDC).

Partenaires historiques VS Partenaires nouveaux

La production africaine de pétrole est une industrie essentiellement tournée vers
l’exportation. En effet, l’Afrique n’a consommé que 30 % de sa production totale en 2010,
soit 3 millions de baril/jour. Les 7 millions de barils restants sont quotidiennement exportés
en direction des USA (2,2 Mbaril/jour), de l’Europe (2,6 Mbaril/jour) et de la Chine (1,3
MBaril/jour).
Ces chiffres globaux cachent cependant une très grande hétérogénéité, notamment en ce
qui concerne les partenariats entre zones d’exportation et pays consommateurs. Ainsi 75%
des exportations en direction des USA sont réalisées par l’Afrique de l’Ouest (Angola incluse)
tandis que 65 % des exportations en direction de l’Europe sont assurées par l’Afrique de
Nord : Algérie, Lybie, Egypte essentiellement. Ces chiffres illustrent le pragmatisme des
industriels du pétrole ainsi que des pays producteurs et importateurs : en effet, pour les
compagnies pétrolières européennes, qui sont implantées en Afrique depuis très longtemps,
mieux vaut investir dans l’exploration et dans la construction de pipeline dans une zone
géographiquement proche comme l’Afrique du Nord plutôt que d’aller investir au Soudan
même si le français Total - 1er producteur en Afrique - n’hésite pas à prospecter sur toute
l’étendue du continent. Les compagnies américaines, également présentes sur le continent
depuis plusieurs décennies, ne commencent véritablement à y investir massivement que
depuis le début des années 2000. C’est le cas d’ExxonMobil, qui a quasiment triplé sa
production de Pétrole en Afrique entre 2000 et 2010 avec des investissements concentrés en
Angola, au Nigéria et au Tchad.

Ces partenaires historiques que sont les grandes compagnies européennes et américaines,
sont désormais concurrencées sur le continent par de multiples compagnies plus modestes
comme Tullow Oil, Devon, Kosmos Energy mais aussi et surtout par les compagnies
asiatiques avec à leur tête la chinoise CNPC. Si la concurrence dans la production est encore
assez limitée, la guerre entre occidentaux et asiatiques fait rage dans la recherche de
nouveaux gisements, domaine dans lequel les compagnies chinoises ont énormément investi
depuis la fin des années 1990.

Pour pallier son retard historique en Afrique et gagner du terrain sur ses concurrents
européens et américain, la Chine importe de plus en plus de pétrole en contrepartie
notamment d’une assistance technique dans des grands travaux de génie-civil initiés par les
pays africains. L’augmentation des importations chinoises a été la plus importante en
Afrique sur les dix dernières années, passant de 340.000 baril/jour en 2000 à 1.300.000
baril/jour en 2010 : elle a donc plus que triplé en 10 ans ! Sur la même période, les
importations européennes sont restées stables à 2.600.000 baril/jour et les importations
américaines ont progressé de 35 % passant de 1.600.000 baril/jour à 2.200.000 baril/jour en
2010.

Il apparait donc que la Chine et dans une moindre mesure les USA, sont en train de
s’installer comme les nouveaux interlocuteurs privilégiés de l’Afrique au détriment de
l’Europe en ce qui concerne les ventes d’hydrocarbures. On voit ainsi apparaitre de
nouveaux binômes de partenariat pétrolier un peu partout sur le continent : Chine/Angola,
Etats-Unis/Tchad, Chine/Soudan.
Ceux-ci se rajoutent aux binômes traditionnels France/Gabon, France/Congo, Italie/Lybie.
Malgré tous ces partenariats, les pays producteurs de pétrole en Afrique sont le théâtre de
conflits armés (Nigéria, Congo des années 1990, Soudan, Lybie) et n’affichent pas la
prospérité des pays du golfe arabique. Ceci nous amène à poser la problématique de
l’économie du pétrole en Afrique. Est-elle réellement profitable aux pays africains et à leurs
populations ?

II.2 - Economie du Pétrole en Afrique

Multinationales VS Compagnies Nationales : Quel modèle pour l’Afrique ?

L’exploitation pétrolière mondiale est assurée par deux types de compagnies : les
compagnies multinationales privées et les compagnies nationales.

   - Les compagnies multinationales privées (CMP) avec à leur tête les « majors »
   américaines comme ExxonMobil, ChevronTexaco et les géants européens comme le
   français Total, le britannique BP ou l’hollandais Shell. Ces compagnies prospectent et
   produisent dans le monde entier à partir de concessions faites par les pays ayant du
   pétrole dans leur sous-sol (cas de la Shell au Nigéria, de Total au Gabon etc)

   - Les compagnies nationales (CN) qui sont des compagnies gérées par les pays
   producteurs et qui détiennent souvent l’exclusivité des droits de production sur le
   pétrole de leur pays. Ces compagnies ne s’exportent pas et se concentrent sur le pétrole
   national. C’est le cas du vénézuélien PDVSA, du saoudien Aramco et de l’algérien
   Sonatrach.

Il est intéressant de noter qu’à l’échelle mondiale, le rapport de forces est très déséquilibré
et apparait nettement en faveur des compagnies nationales au détriment des compagnies
multinationales privées. Les CMP qui dominaient le monde du pétrole jusque dans les
années 1970 sont petit à petit rentrées dans le rang et c’est ainsi que les 5 plus grandes CMP
à savoir ExxonMobil, Shell, BP, Total et ChevronTexaco, ne représentent plus qu’à peine 12 %
de la production actuelle de pétrole dans le monde. On peut penser que l’exploration et la
production de pétrole dans des zones difficiles comme l’offshore profond leur permettra de
faire jouer leur avance technologique pour regagner du terrain face aux CN. Celles-ci sont
très dominatrices en Amérique Latine avec Pemex au Mexique, Petrobras au Brésil et PDVSA
au Venezuela mais aussi au Moyen-Orient avec l’Aramco saoudienne et la NIOC de l’Iran.

En Afrique, le rapport de forces est plutôt en faveur des CMP, avec à leur tête Total et
ExxonMobil. L’Afrique est même devenue une part vitale pour ces deux compagnies car elle
représente 45% de la production mondiale de Total et 30 % de celle d’ExxonMobil. D’autres
géants comme Shell et ChevronTexaco mais aussi une multitude d’autres opérateurs privés,
mais qui sont de plus petite taille, exploitent également du Pétrole sur le continent.
A cela s’ajoutent les compagnies chinoises, indiennes, italiennes ou même russes. Face à
cette multitude de compagnie privées, les compagnies nationales africaines font de la
résistance voire progressent pour certaines d’entres elles. C’est le cas du géant algérien la
Sonatrach qui est la 1ere entreprise du continent et qui investit des dizaines de milliards de
dollars dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz naturel. La progression de la
production angolaise, avec des découvertes offshore comme le champ de Girassol, a
également permis l’émergence d’une nouvelle compagnie nationale puissante comme la
Sonangol. Celle-ci s’associe souvent à des CMP comme Total ou ExxonMobil pour bénéficier
de leur apport technologique tout en restant maitre dans les dividendes issus de la
production. Des pays néo-producteurs comme le Ghana avec sa GNPC adoptent également
ce système privé-public dans le cadre de leur exploitation naissante ou à venir.

En résumé, l’Afrique qui se place derrière l’Amérique Latine et le Moyen-Orient en termes de
réserves a un modèle économique différent de celui de ces deux zones. Alors que les
compagnies nationales dominent dans le Golfe et en Amérique Latine, les compagnies
privées sont leader en Afrique et y investissent de plus en plus. Or l’Amérique latine semble
redresser la barre en utilisant l’argent issu des compagnies nationales dans des programmes
socio-économiques (Venezuela, Bolivie, Brésil) et les pays du golfe profitent de leurs
ressources pétrolières exceptionnelles pour mener des projets immobiliers d’envergure et
s’exporter à l’international (achats de club de football en France et en Angleterre,
participations dans de grandes entreprises américaines etc). Nous voyons bien que les zones
qui privilégient les compagnies nationales semblent avoir de réelles retombées économiques
et sociales sur leurs Etats. Le modèle africain, dominé par les CMP, est à interroger afin de
savoir l’impact réel de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine.

Impact de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine

Avec ses 10 Mbaril/jour, l’Afrique s’affirme comme une nouvelle place forte de l’industrie
pétrolière mondiale. Et le Pétrole, qui est demandé partout et en tous temps, représente le
plus important pôle économique du commerce international. Les pays producteurs de
pétrole présentent donc une particularité économique de taille : celle d’avoir la certitude de
ne jamais manquer de devises aussi longtemps que leurs champs de pétrole seront
exploités. Ces devises sont réparties entre les compagnies exploitantes de pétrole et l’Etat.
Dans le cas où il existe une compagnie nationale, l’Etat récupère la quasi-totalité des
rentrées d’argent liées au Pétrole tandis que ce même Etat ne percevrait qu’une part
relativement modeste de l’argent du pétrole si sa production était assurée par une
compagnie multinationale. Ainsi, le Congo Brazzaville ne perçoit que 20% de l’argent récolté
de la vente de son pétrole, le reste revenant aux compagnies exploitantes comme Total. A
l’opposé, l’Etat algérien à travers la Sonatrach récupère l’essentiel de l’argent issu de ses
exploitations pétrolières et gazières.
D’un point de vue macroéconomique, les pays producteurs de Pétrole ont vu leurs Produit
Intérieur Brut (PIB) fortement progresser ces dernières années avec une croissance annuelle
moyenne de + 11 % depuis 2003 pour l’Angola, +12 % pour la Guinée Equatoriale sur la
même période. Cette manne financière nouvelle a permis par exemple à l’Angola de devenir
un investisseur important dans les banques privées…portugaises et a permis à la Guinée-
Equatoriale de bénéficier d’un nouveau poids diplomatique en Afrique centrale.

Cependant, dans la plupart de ces pays producteurs, les indicateurs sociaux n’affichent pas
des hausses similaires à celles qui ont affecté le PIB. De plus, on s’aperçoit de la persistance
de conflits ou de rébellions dans les zones exploitantes (Delta du Niger, Frontière Soudano-
Tchadienne avec le Darfour, enclave angolaise de Cabinda, Lybie etc). Or qui dit tensions
militaires dit dépenses et celles-ci viennent durablement grever le budget de l’Etat et
entrainer un ralentissement économique difficile à quantifier mais bien réel. Le pétrole qui
est donc générateur d’argent, semble également être générateur de tensions.

Notons également que dans certains cas (Guinée Equatoriale, Nigéria, Gabon, Congo
Brazzaville) l’argent du pétrole n’a que peu d’impact sur les infrastructures ou le niveau de
vie des populations. On assiste plutôt à l’émergence et à l’enrichissement de groupes
restreints détenteurs du pouvoir politique ou tournant autour des activités pétrolières. Dans
d’autres pays comme l’Angola ou plus récemment le Tchad, l’avènement de l’exploitation
massive du pétrole s’est semble-t-il accompagnée de réalisations en infrastructures routières
et immobilières mais également d’investissements dans le sport, l’éducation etc. Le Tchad,
sous la supervision volontaire de structures de surveillance non étatiques et en collaboration
avec la Banque Mondiale, a pu mettre en place en 2003 un système original qui lui a permis
de récupérer près 7 milliards de dollars de revenus pétroliers depuis cette date. Cet argent a
été réinvesti dans l’économie nationale tchadienne, dans des programmes sociaux et des
infrastructures hospitalières.

Ainsi, le pétrole peut-être une bonne chose, si l’argent qu’il génère est tracé, géré de
manière transparente et réinvesti dans l’économie nationale. Il peut cependant être source
de tensions, favoriser l’émergence d’une oligarchie nationale et ne pas profiter aux
populations si sa gestion est nébuleuse. A l’échelle mondiale et même africaine, il semblerait
que les compagnies nationales donnent plus de gages de retombées financières et socio-
économiques pour le pays producteur. En effet, lorsqu’elles viennent exploiter, les sociétés
multinationales s’occupent principalement du contractuel et traitent directement avec les
autorités étatiques…De plus les compagnies multinationales ont souvent été critiquées pour
leur impact négatif sur l’environnement dans le cadre de leur exploitation (cas du Nigéria).
Elles ont cependant fait beaucoup d’efforts dans ce domaine lors de ces dernières années,
emploient des ouvriers autochtones et s’engagent parfois à construire des équipements
scolaires et sanitaires dans leur environnement d’exploitation

.
III. PERSPECTIVES PETROLIERES POUR L’AFRIQUE
III.1 - Prospective sur le pétrole et l’énergie en Afrique

Quel futur pour l’exploitation pétrolière en Afrique ?

Avec les investissements importants qui sont annoncés, la mise en exploitation prochaine de
champs déjà découverts mais encore non exploités et le développement de l’exploration
offshore et dans les bassins intérieurs du continent, la production de pétrole en Afrique
continuera à croitre jusqu’en 2030 selon les dernières prévisions publiées par l’AIE (Agence
Internationale de l’Energie) en 2010. Selon ces estimations, la production africaine se
stabilisera à 12,8 MBaril/jour en 2030, ce qui augmentera inévitablement sa part dans la
production mondiale car il est prévu que celle ci commence à décliner entre 2015 et 2020
(Prévisions de l’ASPO : Association for the Study of Peak Oil)

D’après une publication effectuée en Février 2010 par l’USGS, l’agence nationale géologique
américaine, 4 provinces géologiques de la façade atlantique de l’Afrique recéleraient 62
milliards de barils encore non exploités. Ces provinces sont : Le Bassin Sénégalais, le Golfe de
Guinée, Le Delta du Niger et La Côte Centre-Ouest.
Provinces géologiques de la façade atlantique ouest-africaine

L’essentiel de la production africaine continuera à être assurée par les 4 pays africains
membres de l’OPEP à savoir le Nigéria, l’Angola, la Lybie et l’Algérie. Leur part s’élèvera à
10,9 Mbaril/jour sur les 12,8 que produira quotidiennement l’Afrique en 2030. Les autres
pays producteurs non-membres de l’OPEP comme La Guinée Equatoriale, l’Egypte, le Congo,
le Ghana, le Tchad, la Côte d’Ivoire, la Mauritanie ou le Cameroun produiront 1,9 Mbaril/jour
restants. Il n’est toutefois pas exclu que de nouveaux pays comme la RDC, l’Ouganda, le
Sénégal, Le Togo ou La Guinée Bissau deviennent producteurs.

Du point de vue des compagnies multinationales, on peut présager que l’influence des
compagnies européennes diminuera dans la décennie à venir au profit des compagnies
américaines et surtout chinoises qui n’hésitent pas à investir et à prospecter dans des zones
reculées ou en proie à des tensions : c’est le cas du Soudan notamment. On peut également
penser que l’axe Luanda-Pekin occupera une place de plus en plus importante dans les
relations sino-africaines, l’Angola étant déjà le deuxième exportateur de pétrole en Chine,
derrière l’Arabie Saoudite.
Croissance de la population africaine et besoins énergétiques du continent

Si la production pétrolière continentale est amenée à augmenter dans les années à venir, les
besoins de l’Afrique en pétrole, et de manière plus générale en énergie, augmenteront
également, et ce très fortement en raison d’une démographie vigoureuse. Alors qu’elle était
de 500 millions de personnes en 1985, la population africaine s’élevait à 1 milliard
d’habitants en 2010 et il est prévu qu’elle passe le cap des 2 milliards d’individus à l’horizon
2025.




                       Population par continent, période 1950-2100

Cette forte augmentation de la population africaine s’accompagnera inévitablement d’une
hausse de la demande en énergie qui s’élevait fin 2010 à 372 millions de TEP et dont on
estime qu’elle sera de 600 millions de TEP en 2030. De plus, la décennie 2000-2010 a montré
que les populations africaines étaient de plus en plus friandes de technologies gourmandes
en électricité : téléviseurs et surtout téléphones mobiles et connexion internet. C’est ainsi
que le nombre d’internautes est passé de 4 millions en 2000 à 140 millions en 2011, ce qui
fait de l’Afrique le continent ayant connu la plus forte progression en termes de population
internaute lors des dix dernières années.
L’augmentation de la demande africaine en énergie sera principalement supportée par les
hydrocarbures que sont le Pétrole et le Gaz naturel et qui assurent déjà, avec le charbon,
l’essentiel de la consommation d’énergie de l’Afrique.




       Part des différentes énergies primaires dans le bilan énergétique par continent

Etant donné que la consommation d’énergie en Afrique est déjà marquée par le sceau des
hydrocarbures, que la production de celles-ci augmentera jusqu’en 2030 et que la demande
d’énergie continuera également à croître sur le continent, on peut penser que la part des
exportations de pétrole et de gaz naturel dans la production africaine diminuera au profit de
la consommation interne. A côté de ces hydrocarbures, le potentiel hydroélectrique
important de certains pays comme la RDC pourra également jouer un rôle important dans la
fourniture d’électricité au niveau de la sous-région de l’Afrique centrale.

III.2 – Les problèmes actuels et les facteurs sur lesquels nous pouvons agir

Les problèmes actuels : Détournements d’argent et modèle économique

Malgré quelques exemples comme celui du Tchad, l’exploitation pétrolière ne profite pas
véritablement, ou sinon très peu, aux populations africaines. La part des retombées sociales
et économiques est encore faible et devra nécessairement être augmentée par la mise en
place de systèmes de surveillance performants comme au Tchad ou par l’intermédiaire
d’une remise en cause du modèle pétrolier africain actuellement organisé autour des
multinationales.
La seule augmentation du PIB n’étant plus considérée depuis longtemps comme un
indicateur fiable pour mesurer le développement humain d’une société, il convient d’utiliser
d’autres indicateurs afin de mesurer l’impact de la manne pétrolière sur les populations des
pays producteurs. Ainsi malgré une production de 2,2 Mbaril/jour depuis 10 ans, production
qui est estimée à…400 milliards de dollars soit autant que le PIB, le Nigéria rencontre
d’énormes difficultés dans le secteur de l’éducation, la sécurité et concentre des masses
pauvres dans les bidonvilles de Lagos. L’Indice de Développement Humain (IDH) - indicateur
qui prend en compte le revenu, l’accès à la santé et l’accès à l’éducation - classe le Nigéria au
156ème rang mondial juste derrière le Sénégal, sur un total de 181 pays. Ce faible impact du
pétrole sur les populations nigérianes trouve en partie son explication dans la prédation des
revenus pétroliers et le choix du modèle économique d’exploitation. Et l’exemple du Nigéria
n’est pas un cas isolé parmi les pays producteurs.

La prédation des revenus pétroliers est une réalité qui coûte cher aux populations africaines.
En effet, d’après une étude du groupe Global Financial Integrity parue en 2009 et portant sur
les flux financiers illicites sortant de l’Afrique, c'est-à-dire les détournements d’argent, 80 %
des détournements d’argent constatés en Afrique entre 2000 et 2008, se concentraient dans
9 pays, à savoir : Nigéria, Angola, Algérie, Egypte, Soudan, Congo Brazzaville, Guinée
Equatoriale, Gabon et Tchad. Or, si l’on exclue la Lybie pour laquelle les données sont
indisponibles, ces 9 pays sont dans cet ordre les 9 plus gros producteurs de pétrole en
Afrique. Au total, ces 9 pays ont vu 216 Milliards de dollars s’échapper de leur économie en
8 ans, soit presqu’autant que le PIB de l’Egypte ! Le constat est donc accablant : alors qu’il
représente la principale source de devises du continent, l’argent du pétrole africain est
massivement détourné vers des contrées lointaines sans que les populations ne puissent en
bénéficier.

Or on constate également que les sociétés multinationales sont dominatrices en Afrique,
notamment en Afrique subsaharienne : il convient donc de s’interroger sur la pertinence de
ce modèle dans lequel un pays laisse l’exploitation des ressources pétrolières de son sous-sol
à une compagnie étrangère, ceci afin de savoir si la présence des multinationales favorise ou
non les détournements d’argent au détriment des populations.

L’actuel modèle d’exploitation pétrolière des pays africains est identique à celui ayant
prévalu pendant dans les pays du Moyen-Orient et jusqu’à plus récemment en Amérique
Latine. Dans ce modèle, les sociétés multinationales signent avec les pays disposant de
réserves pétrolières des concessions portant sur des zones d’exploration ou de production et
ce pour plusieurs dizaines d’années. Aujourd’hui, le Moyen-Orient et l’Amérique latine se
sont notablement écartés de ce modèle. En effet l’actuelle société nationale d’exploitation
du pétrole saoudien, la Saudi Aramco, est issue de la nationalisation d’une société
américaine dénommée Aramco. La NIOC qui est la société nationale d’exploitation iranienne
a été bâtie sur une partie des cendres de l’Anglo-Persian qui était devenue BP (British
Petroleum).
En Bolivie, Le président Evo Morales Ayma a procédé à la nationalisation d’une grande
partie du pétrole national au détriment des multinationales. Idem au Venezuela où le
Président Hugo Chavez a procédé à une réaffirmation du contrôle national des ressources
pétrolières lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 1998. Dans tous ces pays, la nationalisation des
sociétés d’exploitation ou d’une partie de la production pétrolière a été suivie d’une
amélioration des conditions de vie de la population (Hausse significative du PIB/habitant et
de l’espérance de vie au Moyen-Orient, programmes massifs d’alphabétisation en Bolivie,
création de 2 millions d’emplois directement ou indirectement liés à PDVSA depuis 1998 au
Venezuela etc).

Loin d’être exonéré de prédation, le modèle des sociétés nationales a néanmoins l’avantage
d’apporter beaucoup plus d’argent dans les caisses de l’Etat que les accords liés avec les
multinationales. Dans ce cas de figure dominé par les multinationales, le pays hôte ne
perçoit en général qu’un faible pourcentage de l’argent issu de la production : c’est le cas du
Congo Brazzaville. A l’inverse, et malgré l’évasion financière importante révélée par Global
Financial Integrity, l’Etat angolais bénéficie grandement de l’argent apporté par sa société
nationale d’exploitation la Sonangol. Cela lui a permis, lors de la décennie écoulée, d’investir
massivement dans les secteurs de l’éducation, des infrastructures, du sport et de la santé.
L’exemple de ces deux pays, Congo Brazzaville et Angola, illustre l’importance du modèle
économique d’exploitation pour les pays africains producteurs de pétrole.

Importance de la situation politique et de la formation scientifique

Même s’il est n’est pas disponible dans les mêmes proportions selon le modèle en place,
l’argent du pétrole ne profite réellement aux populations que s’il est bien géré. Il faut
également noter que la mise en place d’une société nationale crédible n’est pas chose aisée
et dépend de facteurs multiples qui sont entre autres la volonté des dirigeants politiques, les
ressources étatiques disponibles pour l’investissement et la qualité des ressources
humaines.

A l’heure actuelle, peu de pays africains ont la capacité financière pour supporter les
investissements nécessaires à l’exploration ou à la production pétrolière : une seule
campagne d’exploration en offshore peut coûter 600 ou 700 millions de dollars et se solder
par un échec. Ainsi si leurs économies fragiles ne leur permettent pas de se lancer dans
l’exploration/production, les pays africains, en faisant preuve de volonté politique, peuvent
aboutir à la création d’une société nationale travaillant en étroite collaboration avec les
multinationales et ayant un contrôle sur l’argent généré par le pétrole. C’est le cas de la
GNPC ghanéenne et de la Sonangol angolaise.
Enfin l’amélioration des ressources humaines, aussi bien en quantité qu’en qualité,
devient un impératif pour les pays producteurs et pour les pays africains de manière
générale. S’ils sont en plein progrès sur ce plan, les pays africains ne disposent pas encore
d’assez d’ingénieurs en mécanique, en structures métalliques, en économie des matières
premières, en géologie appliquée, en réservoir, en finances, en logistique : autant de postes
qui constituent chacun un métier clé dans le monde de l’exploitation pétrolière. La
formation scientifique apparait donc comme un secteur d’investissement de premier plan si
les pays africains veulent rapidement exploiter ou participer à l’exploitation de leurs
ressources en hydrocarbures.

IV. GLOSSAIRE ET SOURCES
AIE : Agence Internationale de l’Energie
ASPO : Association for the Study of Peak Oil
Aramco : Devenue Saudi Aramco. C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en
Arabie Saoudite.
Baril : Unité de mesure dans l’industrie pétrolière. 1 baril = 159 Litres. MBaril/jour = Millions
de barils par jour.
BP : British Petroleum. Société Multinationale d’exploitation d’hydrocarbures d’origine
britannique.
CMP : Compagnie Multinationale Privée : ExxonMobil, BP, ChevronTexaco, Total, Shell
GNPC : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole au Ghana.
IDH : Indice de Développement Humain. Il prend en compte le taux d’alphabétisation, l’accès
à la santé et le PIB/habitant.
Kérogène : C’est le précurseur chimique du pétrole. Sa transformation en pétrole se fait
grâce à la chaleur interne de la terre.
Kérosène : Carburant issu du raffinage du pétrole brut utilisé dans la combustion des
moteurs d’avions.
PDVSA : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole au Venezuela.
PIB : Produit Intérieur Brut. C’est l’ensemble des richesses crées sur le territoire d’un pays
pendant une année.
NIOC : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Iran.
OPEP : Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole. Elle comprend 12 membres : Iran,
Irak, Koweït, Qatar, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Algérie, Libye, Angola, Nigeria,
Equateur, Venezuela.
Sonangol : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Angola.
Sonatrach : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Algérie.
TEP : Tonne Equivalent Pétrole. Unité de mesure d’énergie équivalente à l’énergie produite
par la combustion d’une tonne de pétrole. On peut mesurer l’énergie nucléaire en TEP,
l’énergie hydroélectrique en TEP etc
USGS : United States Geological Survey. Agence Nationale de la Géologie aux USA.
Sources :

Eléments de Géologie - Editions Dunod, 2006, C.Pomerol et al

Pétrole : Origine, Production et Traitement - 2003, Union Pétrolière Suisse

Le Pétrole Au delà du Mythe - Editions Technip, 2004, X. Boy de La Tour.

La Face cachée du Pétrole - Editions Pocket, 2007 - Eric Laurent

Le Pétrole et le Gaz naturel en Afrique - 2009, Honoré Le Leuch

Assesment of Undiscovered Oil and Gas Ressources Africa - 2010, USGS

BP Statistical Review of Energy 2011 - British Petroleum Review, 2011, BP

BP Statistical Review of Energy 2001 - British Petroleum Review, 2001, BP

Etat de la Population Mondiale 2011 - UNFPA Nations Unies, 2011, ONU UNFPA

Rapport sur le développement humain 2011 - Nations Unies, 2011, ONU PNUD

Perspectives de l’Economie Mondiale 2011 - Fonds Monétaire International, 2011, FMI

Illicit Financial Flows From Africa - 2009, Global Financial Integrity

Understanding Crude Oil Prices - University of California, 2008, James D. Hamilton



Tous droits réservés. Ce dossier ainsi que l’ensemble des dossiers
de la série « Les Cahiers de Njàccaar » sont l’exclusive propriété de
l’Association Njàccaar Visionnaire Africain. La reproduction et la
diffusion sont permises à condition d’en citer expressément la
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[LES CAHIERS DE NJÀCCAAR] - N°1 : L'industrie pétroliére en Afrique

  • 1. La Cellule Economique et Politique (CEP) de l’association Njàccaar Visionnaire Africain présente : LES CAHIERS DE NJACCAAR L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE Mars 2012
  • 2. I. GENERALITES SUR LE PETROLE I.1 - Qu’est ce que le Pétrole ? Formation, Piégeage, Exploration et Production du Pétrole Les différentes utilisations du Pétrole I.2 - Le Pétrole dans le Monde Production et Consommation de Pétrole dans le monde Une nouvelle donne mondiale II. L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE II.1 - Géopolitique du Pétrole en Afrique Répartition des réserves et Production du Pétrole en Afrique Partenaires historiques VS Partenaires nouveaux II.2 - Economie du Pétrole en Afrique Multinationales VS Compagnies Nationales : Quel modèle pour l’Afrique ? Impact de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine III. PERSPECTIVES PETROLIERES POUR L’AFRIQUE III.1 - Prospective sur le pétrole et l’énergie en Afrique Quel futur pour l’exploitation pétrolière en Afrique ? Croissance de la population africaine et besoins énergétiques du continent III.2 – Les problèmes actuels et les facteurs sur lesquels nous pouvons agir Les problèmes actuels : Détournements d’argent et modèle économique Importance de la situation politique et de la formation scientifique IV. GLOSSAIRE ET SOURCES
  • 3. I. GENERALITES SUR LE PETROLE I.1 - Qu’est ce que le Pétrole Formation, Piégeage, Exploration et Production du Pétrole Le pétrole est une substance liquide de couleur noire que l’on trouve à l’état naturel dans le sous-sol. Composé très riche en hydrocarbures, le pétrole et ses dérivés (kérogène, Gazole, Naphta etc) sont utilisés dans de très nombreux domaines comme le transport, l’industrie pharmaceutique, la fabrication de composés plastiques etc. Le pétrole est considéré comme une ressource non renouvelable (à échelle humaine) car sa formation est liée à un processus qui dure des millions d’années. Ce processus de formation est le suivant :  Des végétaux marins, souvent des algues microscopiques appelées phytoplancton, captent l’énergie lumineuse du soleil grâce à la photosynthèse.  Lors de la photosynthèse, ces végétaux créent de la matière organique qu’elles stockent dans leurs tissus et dans leurs cellules. Cette matière organique est très riche en Carbone.  Lorsqu’ils meurent, ces végétaux et leur matière organique vont s’accumuler dans la vase argileuse des fonds marins où ils sont rapidement recouverts par d’autres couches de vase ou de sable.  L’accumulation de ces nouvelles couches sur la matière organique enfonce celle-ci dans le sous-sol marin. Quelques bactéries enfouies dans le sous sol dégradent cette matière organique et la transforment en un produit noirâtre appelé kérogène. Celui- ci continue à s’enfoncer dans le sous-sol. Ce processus d’enfoncement peut durer des milliers d’années.  La température du sous-sol augmentant avec la profondeur, le kérogène va devenir de plus en plus chauffé au fur et à mesure qu’il s’enfonce. Vers 1000 à 1500 mètres de profondeur, la température atteint les 60°C et le kérogène, un mélange solide de boue, de molécules riches en soufre et d’hydrocarbures, commence à se transformer en Pétrole liquide sous l’effet de la chaleur. Cette transformation qui s’arrête vers 4000 mètres de profondeur c'est-à-dire aux alentours de 140°C, est très lente et peut durer des millions d’années !  Apres cette très longue « cuisson » sous l’effet de la chaleur interne de la terre, le pétrole liquide se forme, migre vers un endroit imperméable où il peut s’accumuler (un piège). Ce piège est souvent constitué par des structures souterraines et imperméables en forme de dôme que les géologues appellent « Anticlinaux ».
  • 4.  Sous ces anticlinaux, le pétrole s’accumule dans une roche poreuse, le plus souvent du sable ou du calcaire, que les géologues appellent roche réservoir. Le pétrole, souvent avec de l’eau et du gaz, imbibe la roche réservoir en remplissant les espaces vides c'est-à-dire la porosité de la roche. Ainsi les « champs » de pétrole doivent plutôt être vus comme une éponge imbibée de liquides divers (pétrole, gaz et eau) et non comme un lac souterrain ! Les différentes étapes de la formation du pétrole Pour trouver du Pétrole, les géologues recherchent des indices favorables comme l’existence de fossiles marins, de couches argileuses riches en kérogène (le précurseur du pétrole) ou encore la présence de dômes souterrains, c’est à dire d’anticlinaux. La recherche de fossiles ou de couches rocheuses riches en kérogène se fait sur le terrain. La recherche de pièges anticlinaux souterrains nécessite l’intervention de techniques géophysiques sophistiquées comme la sismique. La sismique va permettre de se faire une image assez fidele du sous-sol, un peu comme une échographie révèle ce qui ne peut être vu à l’œil nu. Une fois que l’existence d’un piège comme l’anticlinal est avérée, il faut ensuite s’assurer qu’il y’a bien du pétrole qui s’est accumulé en dessous ou à proximité du piège. Cette vérification est cruciale et elle s’effectue à l’aide de forages d’exploration qui coûtent plusieurs dizaines de millions de dollars. A cette occasion, des foreuses vont percer la roche sur plusieurs milliers de mètres (cela peut durer des mois) pour atteindre la zone cible où l’on pense qu’il y’a du pétrole. Si on trouve du pétrole en quantité suffisante dans la roche réservoir recouverte par le piège, le forage est dit « positif ». Mais cela n’arrive pas très souvent.
  • 5. En effet on estime qu’en moyenne seul un forage sur 4 est positif, le reste étant des forages « secs », c'est-à-dire ne contenant pas de pétrole ou tres peu pour être exploitable et rentable. Ainsi lorsque le forage est sec, c'est-à-dire la plupart du temps, la compagnie pétrolière perd tout l’argent qu’elle a investi dans l’exploration. Dans le cas d’un forage positif, on effectue ce qu’on appelle une évaluation réservoir, pour savoir combien de millions de litres de pétrole pourront être tirés de la roche réservoir (sable ou calcaire imbibé). Ce travail effectué par des ingénieurs nécessite des modélisations précises et tres gourmandes en calcul informatique. Une fois que le réservoir est évalué, on envoie d’autres équipes de forage qui vont cette fois-ci procéder à la mise en place de puits de production. Ceux-ci vont servir de conduits où le pétrole pourra remonter à la surface pour être recueilli. Cette remontée se fait d’abord naturellement - le pétrole remonte dans le puits grâce à la pression naturelle du réservoir - puis il faut ensuite « aspirer » mécaniquement le pétrole afin qu’il sorte du réservoir où il s’était accumulé. On peut également injecter d’autres fluides (comme de l’eau ou du gaz) dans le réservoir afin d’expulser le pétrole vers la surface. Les techniques de production du pétrole
  • 6. Les différentes utilisations du Pétrole Le pétrole existe à l’état naturel mais il n’est pas une substance pure. Il est composé de plusieurs hydrocarbures. Au début de son exploitation intensive à la fin des années 1800 aux Etats Unis, le pétrole a d’abord été utilisé comme combustible dans les lampes à pétrole. Mais tres rapidement, son raffinage, c'est-à-dire sa séparation en ses hydrocarbures constitutifs, a permis l’utilisation du pétrole et de ses dérivés dans plusieurs domaines qui sont entre autres : La Production d’électricité grâce aux centrales thermiques où l’on brûle le pétrole lourd appelé fuel. Le Transport (automobile, aérien ou maritime) avec les carburants dérivés du pétrole : essence, gazole, kérosène (à ne pas confondre avec kérogène!) etc. L’Industrie plastique avec les polymères hydrocarbonés issus du raffinage. C’est grâce à cela que l’on crée des sachets plastiques, des bouteilles d’eau en plastique. L’industrie cosmétique, textile et pharmaceutique avec l’utilisation de composés hydrocarbonés dans la fabrication des lotions, des tissus, des médicaments etc. I.2 - Le Pétrole dans le Monde Production et Consommation de Pétrole dans le monde La découverte de l’énergie électrique ainsi que l’avènement de l’automobile et de l’avion ont fait exploser la demande mondiale de pétrole, la faisant progresser sans discontinuité depuis le début du XXème siècle. Aujourd’hui, la demande mondiale de pétrole est estimée à 82 millions de barils par jour (1 baril = 159 L). Cette demande est satisfaite par une production équivalente essentiellement assurée par La Russie, L’Arabie Saoudite, Les Etats-Unis, L’Iran, La Chine, L’Irak, Le Venezuela et d’autres pays membres de l’OPEP comme Le Qatar, Le Nigéria ou encore le Koweït. La demande mondiale de pétrole est quant à elle due à trois grands pôles de consommation que sont les Etats-Unis, L’Europe et L’Asie du Sud-Est (Chine, Inde, Japon, Corée) avec respectivement 21%, 22% et 31 % de la demande mondiale. Ainsi, bien qu’étant troisième et cinquième producteurs mondiaux avec respectivement 7,5 et 4 Mbaril/jour, les Etats-Unis et la Chine sont obligés d’importer de grandes quantités de pétrole pour satisfaire leur demande interne.
  • 7. L’Afrique, aussi bien dans la production que dans la consommation, voit sa part sans cesse augmenter alors que les consommations européenne et nord-américaine semblent stagner depuis le début des années 2000. Production et Consommation de Pétrole dans le monde 1985-2010 (BP Review 2011) Une nouvelle donne mondiale Apres la suprématie américaine dans la production jusque dans les années 1970, les pays du golfe avec à leur tête l’Arabie Saoudite ont pris les rênes de l’industrie de production mondiale de pétrole. Disposant de champs géants voire ultra-géants, disposant d’un pétrole facilement exploitable à bas prix, ces pays ont joué le rôle de régulateur dans le marché mondial du pétrole (chocs pétroliers de 1973 et 1979, Hausse de leur production pour pallier à des accidents naturels ou garder un certain niveau de prix etc). Cependant, la hausse du baril depuis le début des années 2000, a poussé les compagnies pétrolières et les Etats riches en réserves à explorer de nouvelles contrées comme l’offshore (le pétrole situé en mer) ou les pétroles non conventionnels comme les sables bitumineux de l’Athabasca au Canada ou les huiles lourdes de l’Orénoque vénézuélien. Outre ces « nouvelles puissances pétrolières », on assiste depuis une décennie à la renaissance de la production de la Russie : Une Russie qui est même devenue en 2011, premier producteur mondial de pétrole devant l’Arabie Saoudite et ses champs de pétroles géants mais vieillissants.
  • 8. Cela fait également 20 ans que l’Afrique s’affirme comme l’une des nouvelles places fortes de la production mondiale de pétrole. En effet, sa production globale est passée de 6,6 Mbaril/jour en 1990 à un peu plus de 10 Mbaril/jour en 2010 soit autant que les productions russe ou saoudienne. A titre de comparaison, la production Nord-Américaine (USA, Canada, Mexique) est passée de 13,8 Mbaril/jour en 1990 à…13,8 Mbaril/jour en 2010 ! Loin de cette stagnation, la hausse de la production africaine est essentiellement assurée par quelques géants « traditionnels » comme le Nigéria, l’Algérie ou la Lybie. Mais force est de reconnaitre que la production africaine s’est également beaucoup décentralisée lors de la dernière décennie avec l’émergence d’un nouveau géant , l’Angola, et la part de plus en plus importante de pays comme le Soudan, le Tchad ou encore la Guinée Equatoriale. Ces changements notables, aussi bien au niveau mondial qu’au niveau de l’Afrique peuvent être imputés à l’émergence de la Chine, à l’explosion de la production offshore (très utilisée en Afrique de l’Ouest), aux forts cours du baril qui permettent d’exploiter toujours plus loin, et au déclin prochain ou déjà amorcé de régions historiquement productrices comme les Etats-Unis ou la Mer du Nord. II. L’INDUSTRIE PETROLIERE EN AFRIQUE II.1 - Géopolitique du Pétrole en Afrique Répartition des réserves et Production du Pétrole en Afrique L’Afrique reste encore un terrain largement inexploré par les compagnies pétrolières. Disposant de larges côtes, notamment sur sa façade atlantique, le continent africain possède de vastes bassins côtiers ou sous-marins où il pourrait y avoir du pétrole. De même, certains grands espaces du Sahara ou de la forêt équatoriale n’ont pas encore été explorés et fourniront peut-être quelques surprises à l’avenir. Ces perspectives encourageantes sont quelque peu confirmées par l’augmentation des réserves prouvées de pétrole qui ont plus que doublé, passant de 60 milliards de barils en 1985 à 130 milliards en 2010. L’augmentation de ces réserves traduit la réussite qu’ont rencontrée les compagnies pétrolières dans le cadre de leurs nombreuses campagnes d’exploration entamées en Afrique depuis les années 1980. Ainsi, les réserves n’augmentent pas dans l’absolu (il n’y a pas de 60 milliards de barils de pétrole qui se sont formés en 25 ans) mais on les découvre de plus en plus car l’investissement d’exploration augmente. A ce propos, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit des investissements (exploration et production) cumulés de 1200 Milliards de dollars en Afrique sur la période 2007-2030.
  • 9. Cet investissement est aujourd’hui essentiellement assuré par les compagnies américaines (ExxonMobil, ChevronTexaco), européennes (Shell, Total) et asiatiques (chinoises notamment avec la CNPC). L’investissement massif a permis de découvrir de nouveaux champs offshore dans les pays déjà producteurs (Nigeria, Angola, Guinée Equatoriale) et a également permis la découverte de gisements dans des pays qui n’avaient jamais produit de pétrole comme le Ghana, le Tchad ou l’Ouganda. Avec ses 130 milliards de barils de réserve, l’Afrique se place en troisième position mondiale, loin derrière le Moyen-Orient et l’Amérique Latine, mais à égalité avec l’Europe (Russie incluse). L’Afrique représente 10% des réserves mondiales de Pétrole et il est fort probable que cette part progresse dans les décennies à venir en raison des investissements. A l’heure actuelle, 4 pays, tous membres de l’OPEP, détiennent 80 % des réserves pétrolières africaines, ces pays sont : - La Lybie avec 46 Milliards de barils - La Nigéria avec 37 Milliards de barils - L’Angola avec 13 Milliards de barils - L’Algérie avec 12 Milliards de barils Cette répartition très inégale des réserves, ne signifie pas que des découvertes majeures sont exclues ailleurs à l’avenir, mais elles montrent bien qu’il faudra compter avec ces 4 géants dans les prochaines décennies. 4 géants qui sont déjà, et de loin, les 4 plus gros producteurs de pétrole en Afrique. En effet, 75 % des 10 Millions de barils que l’Afrique produit quotidiennement viennent du Nigéria (2,4 Mbaril/jour), de l’Angola (1,9 Mbaril/jour), de l’Algérie (1,8 Mbaril/jour) et de la Lybie (1,7 Mbaril/jour). A cela s’ajoutent les productions de l’Egypte (740.000 baril/jour), du Soudan (480.000 baril/jour), du Congo Brazzaville (300.000 baril/jour), de la Guinée Equatoriale (275.000 baril/jour), du Gabon (245.000 baril/jour) et du Tchad (120.000 baril/jour), tous les autres pays ayant pour l’instant une production inférieure à 100.000 baril/jour. En analysant ces données on s’aperçoit que deux grands pôles de production se dégagent : - L’Afrique du Nord et du Nord-Est avec l’Algérie, la Lybie, l’Egypte, le Soudan et le Tchad. - L’Afrique de l’Ouest avec le Nigéria, la Guinée Equatoriale, le Gabon, le Congo + l’Angola.
  • 10. La production de pétrole en Afrique et sa part dans le monde Cette production est également « spécialisée » en fonction de la zone : sur la terre ferme en Afrique du Nord et en offshore, c'est-à-dire en mer, dans le golfe de Guinée et en Angola. Ces spécialisations peuvent entrainer quelques difficultés en vue de la mise en production. Ainsi l’exploitation sur la terre ferme a des limites plutôt pratiques et économiques et non technologiques comme c’est le cas en mer, notamment dans l’offshore profond. Exemple, l’acheminement du pétrole tchadien, un néo-producteur, se fait en direction des côtes du Cameroun grâce à un pipeline de 1100 km qui a coûté plusieurs milliards de dollars et de longues heures de négociations entre investisseurs, état tchadien et compagnies pétrolières. Le passage de l’exploration à la production n’est donc pas automatique et nécessite d’importants investissements supplémentaires, notamment dans le cas de découvertes situées à l’intérieur du continent (Tchad, Ouganda, RDC). Partenaires historiques VS Partenaires nouveaux La production africaine de pétrole est une industrie essentiellement tournée vers l’exportation. En effet, l’Afrique n’a consommé que 30 % de sa production totale en 2010, soit 3 millions de baril/jour. Les 7 millions de barils restants sont quotidiennement exportés en direction des USA (2,2 Mbaril/jour), de l’Europe (2,6 Mbaril/jour) et de la Chine (1,3 MBaril/jour).
  • 11. Ces chiffres globaux cachent cependant une très grande hétérogénéité, notamment en ce qui concerne les partenariats entre zones d’exportation et pays consommateurs. Ainsi 75% des exportations en direction des USA sont réalisées par l’Afrique de l’Ouest (Angola incluse) tandis que 65 % des exportations en direction de l’Europe sont assurées par l’Afrique de Nord : Algérie, Lybie, Egypte essentiellement. Ces chiffres illustrent le pragmatisme des industriels du pétrole ainsi que des pays producteurs et importateurs : en effet, pour les compagnies pétrolières européennes, qui sont implantées en Afrique depuis très longtemps, mieux vaut investir dans l’exploration et dans la construction de pipeline dans une zone géographiquement proche comme l’Afrique du Nord plutôt que d’aller investir au Soudan même si le français Total - 1er producteur en Afrique - n’hésite pas à prospecter sur toute l’étendue du continent. Les compagnies américaines, également présentes sur le continent depuis plusieurs décennies, ne commencent véritablement à y investir massivement que depuis le début des années 2000. C’est le cas d’ExxonMobil, qui a quasiment triplé sa production de Pétrole en Afrique entre 2000 et 2010 avec des investissements concentrés en Angola, au Nigéria et au Tchad. Ces partenaires historiques que sont les grandes compagnies européennes et américaines, sont désormais concurrencées sur le continent par de multiples compagnies plus modestes comme Tullow Oil, Devon, Kosmos Energy mais aussi et surtout par les compagnies asiatiques avec à leur tête la chinoise CNPC. Si la concurrence dans la production est encore assez limitée, la guerre entre occidentaux et asiatiques fait rage dans la recherche de nouveaux gisements, domaine dans lequel les compagnies chinoises ont énormément investi depuis la fin des années 1990. Pour pallier son retard historique en Afrique et gagner du terrain sur ses concurrents européens et américain, la Chine importe de plus en plus de pétrole en contrepartie notamment d’une assistance technique dans des grands travaux de génie-civil initiés par les pays africains. L’augmentation des importations chinoises a été la plus importante en Afrique sur les dix dernières années, passant de 340.000 baril/jour en 2000 à 1.300.000 baril/jour en 2010 : elle a donc plus que triplé en 10 ans ! Sur la même période, les importations européennes sont restées stables à 2.600.000 baril/jour et les importations américaines ont progressé de 35 % passant de 1.600.000 baril/jour à 2.200.000 baril/jour en 2010. Il apparait donc que la Chine et dans une moindre mesure les USA, sont en train de s’installer comme les nouveaux interlocuteurs privilégiés de l’Afrique au détriment de l’Europe en ce qui concerne les ventes d’hydrocarbures. On voit ainsi apparaitre de nouveaux binômes de partenariat pétrolier un peu partout sur le continent : Chine/Angola, Etats-Unis/Tchad, Chine/Soudan.
  • 12. Ceux-ci se rajoutent aux binômes traditionnels France/Gabon, France/Congo, Italie/Lybie. Malgré tous ces partenariats, les pays producteurs de pétrole en Afrique sont le théâtre de conflits armés (Nigéria, Congo des années 1990, Soudan, Lybie) et n’affichent pas la prospérité des pays du golfe arabique. Ceci nous amène à poser la problématique de l’économie du pétrole en Afrique. Est-elle réellement profitable aux pays africains et à leurs populations ? II.2 - Economie du Pétrole en Afrique Multinationales VS Compagnies Nationales : Quel modèle pour l’Afrique ? L’exploitation pétrolière mondiale est assurée par deux types de compagnies : les compagnies multinationales privées et les compagnies nationales. - Les compagnies multinationales privées (CMP) avec à leur tête les « majors » américaines comme ExxonMobil, ChevronTexaco et les géants européens comme le français Total, le britannique BP ou l’hollandais Shell. Ces compagnies prospectent et produisent dans le monde entier à partir de concessions faites par les pays ayant du pétrole dans leur sous-sol (cas de la Shell au Nigéria, de Total au Gabon etc) - Les compagnies nationales (CN) qui sont des compagnies gérées par les pays producteurs et qui détiennent souvent l’exclusivité des droits de production sur le pétrole de leur pays. Ces compagnies ne s’exportent pas et se concentrent sur le pétrole national. C’est le cas du vénézuélien PDVSA, du saoudien Aramco et de l’algérien Sonatrach. Il est intéressant de noter qu’à l’échelle mondiale, le rapport de forces est très déséquilibré et apparait nettement en faveur des compagnies nationales au détriment des compagnies multinationales privées. Les CMP qui dominaient le monde du pétrole jusque dans les années 1970 sont petit à petit rentrées dans le rang et c’est ainsi que les 5 plus grandes CMP à savoir ExxonMobil, Shell, BP, Total et ChevronTexaco, ne représentent plus qu’à peine 12 % de la production actuelle de pétrole dans le monde. On peut penser que l’exploration et la production de pétrole dans des zones difficiles comme l’offshore profond leur permettra de faire jouer leur avance technologique pour regagner du terrain face aux CN. Celles-ci sont très dominatrices en Amérique Latine avec Pemex au Mexique, Petrobras au Brésil et PDVSA au Venezuela mais aussi au Moyen-Orient avec l’Aramco saoudienne et la NIOC de l’Iran. En Afrique, le rapport de forces est plutôt en faveur des CMP, avec à leur tête Total et ExxonMobil. L’Afrique est même devenue une part vitale pour ces deux compagnies car elle représente 45% de la production mondiale de Total et 30 % de celle d’ExxonMobil. D’autres géants comme Shell et ChevronTexaco mais aussi une multitude d’autres opérateurs privés, mais qui sont de plus petite taille, exploitent également du Pétrole sur le continent.
  • 13. A cela s’ajoutent les compagnies chinoises, indiennes, italiennes ou même russes. Face à cette multitude de compagnie privées, les compagnies nationales africaines font de la résistance voire progressent pour certaines d’entres elles. C’est le cas du géant algérien la Sonatrach qui est la 1ere entreprise du continent et qui investit des dizaines de milliards de dollars dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz naturel. La progression de la production angolaise, avec des découvertes offshore comme le champ de Girassol, a également permis l’émergence d’une nouvelle compagnie nationale puissante comme la Sonangol. Celle-ci s’associe souvent à des CMP comme Total ou ExxonMobil pour bénéficier de leur apport technologique tout en restant maitre dans les dividendes issus de la production. Des pays néo-producteurs comme le Ghana avec sa GNPC adoptent également ce système privé-public dans le cadre de leur exploitation naissante ou à venir. En résumé, l’Afrique qui se place derrière l’Amérique Latine et le Moyen-Orient en termes de réserves a un modèle économique différent de celui de ces deux zones. Alors que les compagnies nationales dominent dans le Golfe et en Amérique Latine, les compagnies privées sont leader en Afrique et y investissent de plus en plus. Or l’Amérique latine semble redresser la barre en utilisant l’argent issu des compagnies nationales dans des programmes socio-économiques (Venezuela, Bolivie, Brésil) et les pays du golfe profitent de leurs ressources pétrolières exceptionnelles pour mener des projets immobiliers d’envergure et s’exporter à l’international (achats de club de football en France et en Angleterre, participations dans de grandes entreprises américaines etc). Nous voyons bien que les zones qui privilégient les compagnies nationales semblent avoir de réelles retombées économiques et sociales sur leurs Etats. Le modèle africain, dominé par les CMP, est à interroger afin de savoir l’impact réel de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine. Impact de l’exploitation pétrolière sur l’économie africaine Avec ses 10 Mbaril/jour, l’Afrique s’affirme comme une nouvelle place forte de l’industrie pétrolière mondiale. Et le Pétrole, qui est demandé partout et en tous temps, représente le plus important pôle économique du commerce international. Les pays producteurs de pétrole présentent donc une particularité économique de taille : celle d’avoir la certitude de ne jamais manquer de devises aussi longtemps que leurs champs de pétrole seront exploités. Ces devises sont réparties entre les compagnies exploitantes de pétrole et l’Etat. Dans le cas où il existe une compagnie nationale, l’Etat récupère la quasi-totalité des rentrées d’argent liées au Pétrole tandis que ce même Etat ne percevrait qu’une part relativement modeste de l’argent du pétrole si sa production était assurée par une compagnie multinationale. Ainsi, le Congo Brazzaville ne perçoit que 20% de l’argent récolté de la vente de son pétrole, le reste revenant aux compagnies exploitantes comme Total. A l’opposé, l’Etat algérien à travers la Sonatrach récupère l’essentiel de l’argent issu de ses exploitations pétrolières et gazières.
  • 14. D’un point de vue macroéconomique, les pays producteurs de Pétrole ont vu leurs Produit Intérieur Brut (PIB) fortement progresser ces dernières années avec une croissance annuelle moyenne de + 11 % depuis 2003 pour l’Angola, +12 % pour la Guinée Equatoriale sur la même période. Cette manne financière nouvelle a permis par exemple à l’Angola de devenir un investisseur important dans les banques privées…portugaises et a permis à la Guinée- Equatoriale de bénéficier d’un nouveau poids diplomatique en Afrique centrale. Cependant, dans la plupart de ces pays producteurs, les indicateurs sociaux n’affichent pas des hausses similaires à celles qui ont affecté le PIB. De plus, on s’aperçoit de la persistance de conflits ou de rébellions dans les zones exploitantes (Delta du Niger, Frontière Soudano- Tchadienne avec le Darfour, enclave angolaise de Cabinda, Lybie etc). Or qui dit tensions militaires dit dépenses et celles-ci viennent durablement grever le budget de l’Etat et entrainer un ralentissement économique difficile à quantifier mais bien réel. Le pétrole qui est donc générateur d’argent, semble également être générateur de tensions. Notons également que dans certains cas (Guinée Equatoriale, Nigéria, Gabon, Congo Brazzaville) l’argent du pétrole n’a que peu d’impact sur les infrastructures ou le niveau de vie des populations. On assiste plutôt à l’émergence et à l’enrichissement de groupes restreints détenteurs du pouvoir politique ou tournant autour des activités pétrolières. Dans d’autres pays comme l’Angola ou plus récemment le Tchad, l’avènement de l’exploitation massive du pétrole s’est semble-t-il accompagnée de réalisations en infrastructures routières et immobilières mais également d’investissements dans le sport, l’éducation etc. Le Tchad, sous la supervision volontaire de structures de surveillance non étatiques et en collaboration avec la Banque Mondiale, a pu mettre en place en 2003 un système original qui lui a permis de récupérer près 7 milliards de dollars de revenus pétroliers depuis cette date. Cet argent a été réinvesti dans l’économie nationale tchadienne, dans des programmes sociaux et des infrastructures hospitalières. Ainsi, le pétrole peut-être une bonne chose, si l’argent qu’il génère est tracé, géré de manière transparente et réinvesti dans l’économie nationale. Il peut cependant être source de tensions, favoriser l’émergence d’une oligarchie nationale et ne pas profiter aux populations si sa gestion est nébuleuse. A l’échelle mondiale et même africaine, il semblerait que les compagnies nationales donnent plus de gages de retombées financières et socio- économiques pour le pays producteur. En effet, lorsqu’elles viennent exploiter, les sociétés multinationales s’occupent principalement du contractuel et traitent directement avec les autorités étatiques…De plus les compagnies multinationales ont souvent été critiquées pour leur impact négatif sur l’environnement dans le cadre de leur exploitation (cas du Nigéria). Elles ont cependant fait beaucoup d’efforts dans ce domaine lors de ces dernières années, emploient des ouvriers autochtones et s’engagent parfois à construire des équipements scolaires et sanitaires dans leur environnement d’exploitation .
  • 15. III. PERSPECTIVES PETROLIERES POUR L’AFRIQUE III.1 - Prospective sur le pétrole et l’énergie en Afrique Quel futur pour l’exploitation pétrolière en Afrique ? Avec les investissements importants qui sont annoncés, la mise en exploitation prochaine de champs déjà découverts mais encore non exploités et le développement de l’exploration offshore et dans les bassins intérieurs du continent, la production de pétrole en Afrique continuera à croitre jusqu’en 2030 selon les dernières prévisions publiées par l’AIE (Agence Internationale de l’Energie) en 2010. Selon ces estimations, la production africaine se stabilisera à 12,8 MBaril/jour en 2030, ce qui augmentera inévitablement sa part dans la production mondiale car il est prévu que celle ci commence à décliner entre 2015 et 2020 (Prévisions de l’ASPO : Association for the Study of Peak Oil) D’après une publication effectuée en Février 2010 par l’USGS, l’agence nationale géologique américaine, 4 provinces géologiques de la façade atlantique de l’Afrique recéleraient 62 milliards de barils encore non exploités. Ces provinces sont : Le Bassin Sénégalais, le Golfe de Guinée, Le Delta du Niger et La Côte Centre-Ouest.
  • 16. Provinces géologiques de la façade atlantique ouest-africaine L’essentiel de la production africaine continuera à être assurée par les 4 pays africains membres de l’OPEP à savoir le Nigéria, l’Angola, la Lybie et l’Algérie. Leur part s’élèvera à 10,9 Mbaril/jour sur les 12,8 que produira quotidiennement l’Afrique en 2030. Les autres pays producteurs non-membres de l’OPEP comme La Guinée Equatoriale, l’Egypte, le Congo, le Ghana, le Tchad, la Côte d’Ivoire, la Mauritanie ou le Cameroun produiront 1,9 Mbaril/jour restants. Il n’est toutefois pas exclu que de nouveaux pays comme la RDC, l’Ouganda, le Sénégal, Le Togo ou La Guinée Bissau deviennent producteurs. Du point de vue des compagnies multinationales, on peut présager que l’influence des compagnies européennes diminuera dans la décennie à venir au profit des compagnies américaines et surtout chinoises qui n’hésitent pas à investir et à prospecter dans des zones reculées ou en proie à des tensions : c’est le cas du Soudan notamment. On peut également penser que l’axe Luanda-Pekin occupera une place de plus en plus importante dans les relations sino-africaines, l’Angola étant déjà le deuxième exportateur de pétrole en Chine, derrière l’Arabie Saoudite.
  • 17. Croissance de la population africaine et besoins énergétiques du continent Si la production pétrolière continentale est amenée à augmenter dans les années à venir, les besoins de l’Afrique en pétrole, et de manière plus générale en énergie, augmenteront également, et ce très fortement en raison d’une démographie vigoureuse. Alors qu’elle était de 500 millions de personnes en 1985, la population africaine s’élevait à 1 milliard d’habitants en 2010 et il est prévu qu’elle passe le cap des 2 milliards d’individus à l’horizon 2025. Population par continent, période 1950-2100 Cette forte augmentation de la population africaine s’accompagnera inévitablement d’une hausse de la demande en énergie qui s’élevait fin 2010 à 372 millions de TEP et dont on estime qu’elle sera de 600 millions de TEP en 2030. De plus, la décennie 2000-2010 a montré que les populations africaines étaient de plus en plus friandes de technologies gourmandes en électricité : téléviseurs et surtout téléphones mobiles et connexion internet. C’est ainsi que le nombre d’internautes est passé de 4 millions en 2000 à 140 millions en 2011, ce qui fait de l’Afrique le continent ayant connu la plus forte progression en termes de population internaute lors des dix dernières années.
  • 18. L’augmentation de la demande africaine en énergie sera principalement supportée par les hydrocarbures que sont le Pétrole et le Gaz naturel et qui assurent déjà, avec le charbon, l’essentiel de la consommation d’énergie de l’Afrique. Part des différentes énergies primaires dans le bilan énergétique par continent Etant donné que la consommation d’énergie en Afrique est déjà marquée par le sceau des hydrocarbures, que la production de celles-ci augmentera jusqu’en 2030 et que la demande d’énergie continuera également à croître sur le continent, on peut penser que la part des exportations de pétrole et de gaz naturel dans la production africaine diminuera au profit de la consommation interne. A côté de ces hydrocarbures, le potentiel hydroélectrique important de certains pays comme la RDC pourra également jouer un rôle important dans la fourniture d’électricité au niveau de la sous-région de l’Afrique centrale. III.2 – Les problèmes actuels et les facteurs sur lesquels nous pouvons agir Les problèmes actuels : Détournements d’argent et modèle économique Malgré quelques exemples comme celui du Tchad, l’exploitation pétrolière ne profite pas véritablement, ou sinon très peu, aux populations africaines. La part des retombées sociales et économiques est encore faible et devra nécessairement être augmentée par la mise en place de systèmes de surveillance performants comme au Tchad ou par l’intermédiaire d’une remise en cause du modèle pétrolier africain actuellement organisé autour des multinationales.
  • 19. La seule augmentation du PIB n’étant plus considérée depuis longtemps comme un indicateur fiable pour mesurer le développement humain d’une société, il convient d’utiliser d’autres indicateurs afin de mesurer l’impact de la manne pétrolière sur les populations des pays producteurs. Ainsi malgré une production de 2,2 Mbaril/jour depuis 10 ans, production qui est estimée à…400 milliards de dollars soit autant que le PIB, le Nigéria rencontre d’énormes difficultés dans le secteur de l’éducation, la sécurité et concentre des masses pauvres dans les bidonvilles de Lagos. L’Indice de Développement Humain (IDH) - indicateur qui prend en compte le revenu, l’accès à la santé et l’accès à l’éducation - classe le Nigéria au 156ème rang mondial juste derrière le Sénégal, sur un total de 181 pays. Ce faible impact du pétrole sur les populations nigérianes trouve en partie son explication dans la prédation des revenus pétroliers et le choix du modèle économique d’exploitation. Et l’exemple du Nigéria n’est pas un cas isolé parmi les pays producteurs. La prédation des revenus pétroliers est une réalité qui coûte cher aux populations africaines. En effet, d’après une étude du groupe Global Financial Integrity parue en 2009 et portant sur les flux financiers illicites sortant de l’Afrique, c'est-à-dire les détournements d’argent, 80 % des détournements d’argent constatés en Afrique entre 2000 et 2008, se concentraient dans 9 pays, à savoir : Nigéria, Angola, Algérie, Egypte, Soudan, Congo Brazzaville, Guinée Equatoriale, Gabon et Tchad. Or, si l’on exclue la Lybie pour laquelle les données sont indisponibles, ces 9 pays sont dans cet ordre les 9 plus gros producteurs de pétrole en Afrique. Au total, ces 9 pays ont vu 216 Milliards de dollars s’échapper de leur économie en 8 ans, soit presqu’autant que le PIB de l’Egypte ! Le constat est donc accablant : alors qu’il représente la principale source de devises du continent, l’argent du pétrole africain est massivement détourné vers des contrées lointaines sans que les populations ne puissent en bénéficier. Or on constate également que les sociétés multinationales sont dominatrices en Afrique, notamment en Afrique subsaharienne : il convient donc de s’interroger sur la pertinence de ce modèle dans lequel un pays laisse l’exploitation des ressources pétrolières de son sous-sol à une compagnie étrangère, ceci afin de savoir si la présence des multinationales favorise ou non les détournements d’argent au détriment des populations. L’actuel modèle d’exploitation pétrolière des pays africains est identique à celui ayant prévalu pendant dans les pays du Moyen-Orient et jusqu’à plus récemment en Amérique Latine. Dans ce modèle, les sociétés multinationales signent avec les pays disposant de réserves pétrolières des concessions portant sur des zones d’exploration ou de production et ce pour plusieurs dizaines d’années. Aujourd’hui, le Moyen-Orient et l’Amérique latine se sont notablement écartés de ce modèle. En effet l’actuelle société nationale d’exploitation du pétrole saoudien, la Saudi Aramco, est issue de la nationalisation d’une société américaine dénommée Aramco. La NIOC qui est la société nationale d’exploitation iranienne a été bâtie sur une partie des cendres de l’Anglo-Persian qui était devenue BP (British Petroleum).
  • 20. En Bolivie, Le président Evo Morales Ayma a procédé à la nationalisation d’une grande partie du pétrole national au détriment des multinationales. Idem au Venezuela où le Président Hugo Chavez a procédé à une réaffirmation du contrôle national des ressources pétrolières lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 1998. Dans tous ces pays, la nationalisation des sociétés d’exploitation ou d’une partie de la production pétrolière a été suivie d’une amélioration des conditions de vie de la population (Hausse significative du PIB/habitant et de l’espérance de vie au Moyen-Orient, programmes massifs d’alphabétisation en Bolivie, création de 2 millions d’emplois directement ou indirectement liés à PDVSA depuis 1998 au Venezuela etc). Loin d’être exonéré de prédation, le modèle des sociétés nationales a néanmoins l’avantage d’apporter beaucoup plus d’argent dans les caisses de l’Etat que les accords liés avec les multinationales. Dans ce cas de figure dominé par les multinationales, le pays hôte ne perçoit en général qu’un faible pourcentage de l’argent issu de la production : c’est le cas du Congo Brazzaville. A l’inverse, et malgré l’évasion financière importante révélée par Global Financial Integrity, l’Etat angolais bénéficie grandement de l’argent apporté par sa société nationale d’exploitation la Sonangol. Cela lui a permis, lors de la décennie écoulée, d’investir massivement dans les secteurs de l’éducation, des infrastructures, du sport et de la santé. L’exemple de ces deux pays, Congo Brazzaville et Angola, illustre l’importance du modèle économique d’exploitation pour les pays africains producteurs de pétrole. Importance de la situation politique et de la formation scientifique Même s’il est n’est pas disponible dans les mêmes proportions selon le modèle en place, l’argent du pétrole ne profite réellement aux populations que s’il est bien géré. Il faut également noter que la mise en place d’une société nationale crédible n’est pas chose aisée et dépend de facteurs multiples qui sont entre autres la volonté des dirigeants politiques, les ressources étatiques disponibles pour l’investissement et la qualité des ressources humaines. A l’heure actuelle, peu de pays africains ont la capacité financière pour supporter les investissements nécessaires à l’exploration ou à la production pétrolière : une seule campagne d’exploration en offshore peut coûter 600 ou 700 millions de dollars et se solder par un échec. Ainsi si leurs économies fragiles ne leur permettent pas de se lancer dans l’exploration/production, les pays africains, en faisant preuve de volonté politique, peuvent aboutir à la création d’une société nationale travaillant en étroite collaboration avec les multinationales et ayant un contrôle sur l’argent généré par le pétrole. C’est le cas de la GNPC ghanéenne et de la Sonangol angolaise.
  • 21. Enfin l’amélioration des ressources humaines, aussi bien en quantité qu’en qualité, devient un impératif pour les pays producteurs et pour les pays africains de manière générale. S’ils sont en plein progrès sur ce plan, les pays africains ne disposent pas encore d’assez d’ingénieurs en mécanique, en structures métalliques, en économie des matières premières, en géologie appliquée, en réservoir, en finances, en logistique : autant de postes qui constituent chacun un métier clé dans le monde de l’exploitation pétrolière. La formation scientifique apparait donc comme un secteur d’investissement de premier plan si les pays africains veulent rapidement exploiter ou participer à l’exploitation de leurs ressources en hydrocarbures. IV. GLOSSAIRE ET SOURCES AIE : Agence Internationale de l’Energie ASPO : Association for the Study of Peak Oil Aramco : Devenue Saudi Aramco. C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Arabie Saoudite. Baril : Unité de mesure dans l’industrie pétrolière. 1 baril = 159 Litres. MBaril/jour = Millions de barils par jour. BP : British Petroleum. Société Multinationale d’exploitation d’hydrocarbures d’origine britannique. CMP : Compagnie Multinationale Privée : ExxonMobil, BP, ChevronTexaco, Total, Shell GNPC : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole au Ghana. IDH : Indice de Développement Humain. Il prend en compte le taux d’alphabétisation, l’accès à la santé et le PIB/habitant. Kérogène : C’est le précurseur chimique du pétrole. Sa transformation en pétrole se fait grâce à la chaleur interne de la terre. Kérosène : Carburant issu du raffinage du pétrole brut utilisé dans la combustion des moteurs d’avions. PDVSA : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole au Venezuela. PIB : Produit Intérieur Brut. C’est l’ensemble des richesses crées sur le territoire d’un pays pendant une année. NIOC : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Iran. OPEP : Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole. Elle comprend 12 membres : Iran, Irak, Koweït, Qatar, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Algérie, Libye, Angola, Nigeria, Equateur, Venezuela. Sonangol : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Angola. Sonatrach : C’est la société nationale d’exploitation de pétrole en Algérie. TEP : Tonne Equivalent Pétrole. Unité de mesure d’énergie équivalente à l’énergie produite par la combustion d’une tonne de pétrole. On peut mesurer l’énergie nucléaire en TEP, l’énergie hydroélectrique en TEP etc USGS : United States Geological Survey. Agence Nationale de la Géologie aux USA.
  • 22. Sources : Eléments de Géologie - Editions Dunod, 2006, C.Pomerol et al Pétrole : Origine, Production et Traitement - 2003, Union Pétrolière Suisse Le Pétrole Au delà du Mythe - Editions Technip, 2004, X. Boy de La Tour. La Face cachée du Pétrole - Editions Pocket, 2007 - Eric Laurent Le Pétrole et le Gaz naturel en Afrique - 2009, Honoré Le Leuch Assesment of Undiscovered Oil and Gas Ressources Africa - 2010, USGS BP Statistical Review of Energy 2011 - British Petroleum Review, 2011, BP BP Statistical Review of Energy 2001 - British Petroleum Review, 2001, BP Etat de la Population Mondiale 2011 - UNFPA Nations Unies, 2011, ONU UNFPA Rapport sur le développement humain 2011 - Nations Unies, 2011, ONU PNUD Perspectives de l’Economie Mondiale 2011 - Fonds Monétaire International, 2011, FMI Illicit Financial Flows From Africa - 2009, Global Financial Integrity Understanding Crude Oil Prices - University of California, 2008, James D. Hamilton Tous droits réservés. Ce dossier ainsi que l’ensemble des dossiers de la série « Les Cahiers de Njàccaar » sont l’exclusive propriété de l’Association Njàccaar Visionnaire Africain. La reproduction et la diffusion sont permises à condition d’en citer expressément la source. La Cellule Economique et Politique de Njàccaar Visionnaire Africain vous remercie. A bientôt pour un nouveau dossier « Les Cahiers de Njàccaar ».
  • 23. Njàccaar Visionnaire Africain Faire ce que nous pouvons, Avec ce que nous avons www.njaccaar.com