3. Généralités-Définition
• La luxation traumatique de hanche est le déplacement
permanent et post-traumatique de la tête fémorale en
dehors de la cavité acétabulaire.
• Elle peut être pure ou associée à une fracture de la
tête fémorale.
• C’est une lésion grave et représente une urgence
thérapeutique.
• Elle est la conséquence d’un traumatisme violent avec
souvent des lésions associées locales et à distances.
• Les complications ne sont pas négligeables, dominées
par le risque d’arthrose et de nécrose post-traumatique
de la tête fémorale.
4. Rappel anatomique
• La hanche est une énarthrose: d’un secteur de
mobilité très grand, dans les trois plans de l’espace.
• C’est une articulation portante.
• Articulation très emboîté, très stable, la tête
fémorale en ¾ de sphère est contenue dans une
cavité acétabulaire hémisphérique augmenté sur
les pourtour par bourrelet cotyloïdien ou
«Labrum», recouvrant la tête dans toutes les
positions.
• Un système de pression négative maintien les deux
structures emboîtés.
5. • Le système capsulo-ligamentaire est constitué
par trois puissants ligaments coxo-fémoraux
renforçant une capsule en forme de manchon
tordu.
• Le ligament rond est un ligament intra-articulaire
qui fixe la tête fémorale au cotyle.
• Le système musculaire très complexe
contribue à une stabilisation active de cette
articulation.
6.
7. • Vascularisation de la tête:
Les artères circonflexes forment un cercle péri-articulaire
qui donne des branches surtout postérieurs à la
tête fémorale, les traumatismes graves de la hanche sont
très préjudiciable à cette vascularisation.
8. Classification
• Étant donné sa grande stabilité, seuls des
traumatismes d’une grande violence sont
capables d’entraîner la luxation de l’articulation
coxofémorale.
• Ainsi les accidents de la voie publique sont les
plus grands pourvoyeurs de cette lésion (plus de
60 %).
• La variété de la luxation est fonction de la
position de la hanche lors du traumatisme.
9. Classification de Bigelow:
En 1882 Bigelow à établi une classification encore utilisée, selon l’état
du ligament de Bertin. On oppose les luxations régulières et les
luxations irrégulières.
Les luxations régulières:
Sont caractérisées par l’intégrité de ce ligament qui limite et dirige le
déplacement de la tête fémorale. Ce déplacement peut être :
postérieur: avec deux variétés: iliaque(50%), ischiatique(25%)
antérieur: deux autres variétés: obturatrice(15%) ou pubienne(10%).
Les luxations irrégulières:
Le ligament de Bertin a cédé et le déplacement de la tête fémorale
n’est ni limité ni dirigé ; on distingue les variétés sus et sous-cotyloïdiennes.
10. La luxation postérieure est de loin la plus fréquente
(75 % des cas) elle survient lorsque le point d’impact se
situe sur la face antérieure d’un genou fléchi alors que
la hanche est en flexion-adduction et rotation interne
(accident du tableau de bord).
Elle peut être iliaque (50 %) ou ischiatique (25 %).
Upadhyay a montré qu’en cas de faible rotation
interne ou d’antéversion importante du col fémoral, il
apparaît que le risque de fracture acétabulaire est plus
faible.
13. La luxation antérieure (rare 25%):
Elle survient lorsque le point d’impact est situé à
la face interne du genou fléchi et que la hanche
est en position de flexion-abduction et rotation
externe ou lorsque le traumatisme se fait sur les
pieds-jambes en extension et hanche en
rotation externe.
Elle peut être obturatrice (15 %) ou pubienne
(10 %).
15. Cinq types de luxations ont été définis par Levin:
• Type I : luxation pure sans instabilité avec réduction
concentrique.
• Type II : luxation irréductible sans fracture de la tête
ou de l’acétabulum (cotyle).
• Type III : hanche instable après réduction ou
incarcération.
• Type IV : association à une fracture de l’acétabulum.
• Type V : association à une fracture de la tête ou du
col.
16. Diagnostic
• Circonstances:
Les polytraumatismes et les accidents à
haute énergie doivent faire évoquer
systématiquement le diagnostic et
conduire à la réalisation d’une radiographie
de bassin de face, en particulier en cas de
trouble de conscience associé.
17. • Examen clinique:
La déformation est souvent évidente avec une attitude vicieuse
caractéristique dépendant du type de luxation:
• Luxation iliaque: il s’agit d’une luxation postérieure; le
membre inférieur est en adduction-rotation interne et
extension.
• Luxation ischiatique: de la même façon, le membre est en
adduction-rotation interne et en flexion.
• Luxation obturatrice: il s’agit d’une luxation antérieure, le
membre est en abduction-rotation externe et flexion.
• Luxation pubienne: comme dans la luxation obturatrice, le
membre est en abduction-rotation externe et en extension.
18.
19. • Le raccourcissement est constant sauf en cas de luxation
pubienne.
• Douleur à la mobilisation active et passive.
• L’impotence fonctionnelle est absolue.
• L’examen de la hanche doit être intégré dans le cadre d’un
examen complet et bilatéral, notamment chez un patient
polytraumatisé.
• Une lésion vasculaire doit être éliminée par la palpation des
pouls distaux.
• L’exploration nerveuse, motrice et sensitive est
indispensable.
20. • Imagerie:
La Radiographie conventionnelle: La réalisation d’un bassin de face
est le minimum nécessaire et obligatoire chez un polytraumatisé,
surtout si celui-ci présente des troubles de la conscience.
Des clichés de profil ou de trois quarts sont réalisés au moindre
doute.
Il faut analyser la symétrie des interlignes coxofémoraux, le respect
du cintre cervico-obturateur, la position des hanches en rotation et
la taille respective des têtes fémorales (effet d’agrandissement). Il
faut également rechercher une lésion osseuse associée du bassin
ou de l’extrémité supérieure du fémur.
• En l’absence de lésion associée, aucune autre iconographie n’est
indispensable avant réduction car il permet de poser le
diagnostique de la luxation et de préciser sa variété.
22. ¾ Obturateur (oblique
externe):
Décubitus, oblique postérieur du
côté sain de 45°.
Le 3/4 obturateur permet l'étude
du cotyle, de la ligne innominée
(colonne antérieure) et du cadre
obturateur.
¾ Alaire (oblique interne):
Décubitus, oblique postérieur du
côté atteint de 45°.
Le 3/4 alaire permet l'étude de
l'aile iliaque, de l'articulation sacro-iliaque,
de la colonne postérieure
et du bord antérieur du cotyle.
23. La tomodensitométrie: permet de faire un bilan précis
des lésions ostéo-chondrales infra-radiologiques et de
planifier un éventuel geste chirurgical, mais elle ne doit
pas retarder la prise en charge.
Il est à noter que les lésions chondrales et
ostéochondrales sont largement méconnues par les
radiographies standards alors qu’elles jouent
probablement un rôle important dans le développement
d’une arthrose ultérieure, d’où l’intérêt de réaliser cet
examen de manière différée mais systématiquement,
même si la réduction semble parfaite.
24.
25. Lésions associées
1) Lésions articulaires:
Les lésions du cartilage de la tête fémorale sont
fréquentes, Elles sont retrouvées dans 63 % des cas par
Tehranzadeh , Il s’agit d’une encoche souvent
inférieure à 5mm et peu visible sur les radiographies
standards.
Cette encoche est antérieure dans les luxations
postérieures et postérieure dans les luxations
antérieures.
26. 2) Lésions des parties molles:
Elles sont constantes du fait de la grande violence
du traumatisme causal:
• Les lésions capsulaires (déchirure ou
désinsertion) peuvent entraîner l’irréductibilité
de la luxation par phénomène d’incarcération.
• Les lésions musculaires sont responsables de la
constitution d’hématomes et exposent au risque
d’apparition d’ostéomes qui donnent rarement
une limitation importante des mouvements.
27. 3) Lésions artérielles:
Elles peuvent être à type de déchirure, de
compression, ou de thrombose.
Lorsqu’elles intéressent les vaisseaux circonflexes
qui assurent la vascularisation de la tête fémorale,
elles exposent au risque de nécrose céphalique.
Ceci explique l’urgence qu’il y a à réduire les
luxations de hanche afin de limiter au maximum la
durée d’ischémie osseuse et ainsi à préserver la
vitalité céphalique.
28. 4) Lésions nerveuses:
Elles ne sont pas exceptionnelles et constituent un
argument pour la réduction en urgence. Les atteintes du
nerf grand sciatique s’observent dans 7 à 18 % des
luxations postérieures.
Les ruptures vraies sont exceptionnelles.
Leur potentiel de récupération spontané est bien sûr nul.
Dans la grande majorité des cas, l’atteinte se fait par
compression, contusion ou constitution d’un hématome.
Les lésions peuvent être tronculaires ou radiculaires.
29. L’atteinte des racines hautes est la plus fréquente.
Lorsque le déficit neurologique intéresse le contingent
fibulaire commun du nerf grand sciatique, le potentiel de
récupération spontané de ces lésions est grand: 70 à 80 %
de récupération dans un délai de 6 à 8 mois.
En revanche, lorsque les signes neurologiques intéressent
les contingents fibulaire commun et tibial, le pronostic est
beaucoup plus péjoratif.
En cas de luxation antérieure, on peut constater
exceptionnellement des atteintes obturatrices ou
fémorales.
30. 5) Lésions osseuses:
Ces lésions peuvent intéresser tous les segments du membre
traumatisé. Il est donc indispensable d’examiner le pied, la
cheville, la jambe, le genou et la cuisse du patient.
Il est impératif de réaliser, dans le bilan systématique, une
radiographie du genou de face et de profil. On retrouve, dans
26% des cas, une lésion osseuse du genou.
Une place particulière est à donner aux fractures de
l’acétabulum que l’on rencontre dans 20 % des luxations
postérieures (Fig. 4), et aux fractures de la tête fémorale qui
représentent 13 % des cas.
31. Luxation de hanche associée à une fracture de
la paroi postérieure du cotyle
32. Fracture de tête fémorale avec un fragment
antéro-inférieur et un fragment interposé au
pôle supérieur de la tête fémorale
33. Formes cliniques
• Association à une fracture du fémur.
• Formes bilatérales 1 % à 5 %.
• Formes vieillies polytraumatisé leur
traitement en est difficile:
Traction lourde et prolongée trois semaines suivie
d'une mise en abduction.
Réduction sanglante difficile et hémorragique:
risque de nécrose.
• Luxations récidivantes Exceptionnelles.
• Luxations de l'enfant: sont rares.
35. Traitement
• Réduction en urgence:
La réduction orthopédique doit être faite en urgence.
Le délai idéal de la réalisation du geste est discutable. Selon
Hooggard, le délai est idéalement >6 heures, Selon Brau, le cap
décisif se situerait à 12 heures.
donc il est préférable de réduire les luxations avant 6 heures
tout en acceptant de temporiser quelques heures si les
conditions le suggèrent.
• La réduction doit toujours se faire sous anesthésie générale
et chez un patient curarisé avec une hémodynamique stable.
• Les manoeuvres doivent être douces et si possible uniques, de
sorte à ne pas aggraver les lésions associées.
36. • Manoeuvre de Boehler:
Elle est réalisée en décubitus dorsal sur plan dur, avec un contre-appui
sur les épines iliaques antéro-supérieures. On effectue
une traction dans l’axe du fémur, hanche et genou en flexion à
90° et l’on entend un claquement audible synonyme de
réduction des luxations postérieures.
• Manoeuvre de Allis:
La traction se fait dans l’axe de la déformation pendant que la
hanche est fléchie à 90°.
De petits mouvements de rotation interne et externe sont
réalisés.
38. • Autres manoeuvres:
• Il faut éviter les manoeuvres en abduction telles qu’elles
ont été décrites par Bigelow car elles exposent à un
risque trop grand de fractures du col du fémur.
• En cas de luxation obturatrice, il faut tracter la hanche
dans l’axe puis donner un mouvement de flexion-rotation
et abduction.
• Devant une luxation pure de l’articulation coxofémorale,
il n’y a pas d’indication à la réduction chirurgicale de
première intention. Celle-ci doit être réservée aux échecs
de réduction orthopédique (irréductibilité ou persistance
d’une incongruence articulaire).
39. • Suites post-réductionnelles:
Lors de la réduction, un ressaut net et un claquement sont
perçus ; ce sont les deux témoins d’une bonne réduction.
La mobilité, la longueur des membres inférieurs et la stabilité
de la hanche sont vérifiées par la réalisation d’une
radiographie de bassin de face est indispensable avant de
conclure au succès de la réduction. Elle permet de s’assurer
de la parfaite congruence articulaire et de rechercher une
lésion osseuse associée qui serait passée inaperçue sur les
clichés luxés. En l’absence de lésions associées qui
nécessiteraient un traitement complémentaire spécifique, le
patient doit être mis en traction Trans-osseuse et
rééducation active douce sous couvert de la traction.
40. La durée de traction est de l’ordre de 3 semaines, Ceci vise à
diminuer les pressions intra-articulaires pour diminuer le risque
de nécrose de la tête fémorale.
On réalise systématiquement une tomodensitométrie de
l’articulation coxofémorale en urgence différée. Elle permet un
bilan lésionnel précis (lésion chondrale très fréquente, fracture
de l’acétabulum, de la tête, ou corps étranger passé inaperçu).
Le délai de décharge complète classiquement préconisé est de 2
mois et l’appui complet est proscrit pour 3 mois.
Une surveillance régulière clinique et radiologique semestrielle,
annuelle, puis tous les 3 à 4 ans, est indispensable.
41. La réduction chirurgicale:
• La chirurgie si échec de réduction
orthopédique ou lorsqu'il y a une fracture.
associée à fixer. Elle doit se faire en urgence.
• Souvent il y a interposition d’un lambeau de
capsule ou un fragment osseux intra
articulaire.
43. Résultats
• La réalisation d’une radiographie de bassin de face est
indispensable avant de conclure au succès de la réduction.
• Les résultats à courts termes sont globalement bons.
• Les complications immédiates et péri-réductionnelles
doivent être pris en compte.
• Les résultats à long terme sont nettement plus mitigés et
conditionnés par l’apparition d’une complication tardive.
• Non réduite, elle évolue vers le stade de luxation ancienne
avec des séquelles majeures (raccourcissement de 6 à 7 cm
du membre, bascule du bassin, douleurs et instabilité).
44. • Nécrose céphalique:
C’est le premier risque, apparaît de 1 à 5 ans après la
luxation, elle est plus fréquente en cas de luxation
postérieure et de délai réductionnel important.
Elle peut rester longtemps pauci-symptomatique mais
aboutit constamment à un mauvais résultat.
Le diagnostic est essentiellement clinique, épaulé
par la radiographie standard.
Le scanner et L’IRM servent ensuite à faire un bilan
lésionnel précis.
Son taux de survenue est de 0 à 10%.
46. • L’arthrose:
C’est le risque majeur à long terme.
Sa survenue est intimement liée à l’apparition d’une
nécrose ; ainsi, Olmir a mis en évidence 34 % d’arthrose en
cas de réduction avant 24 heures (10 % de nécrose avérée)
et 71 % en cas de réduction après 24 heures (40 % de
nécrose).
D’une manière générale, les résultats se dégradent
nettement avec le temps, allant jusqu’à 90 % d’arthrose
pour Hoogaard.
Le patient doit également être informé de ce risque, certes
lointain, mais très fréquent.
47. Conclusion
• La luxation traumatique de hanche est une lésion grave qui
donne de bons résultats précoces lorsque la réduction est
réalisée dans un délai de 6 heures.
• Le patient doit donc être scrupuleusement suivi à long terme et
être prévenu des risques qu’il encourt.
• Le pronostic des luxations-fractures du col fémoral ou du cotyle
est beaucoup moins bon, lié pour l’essentiel à la violence du
traumatisme qui entraîne des lésions immédiates des vaisseaux
à l’origine nécroses céphalique, ou de lésions ostéo-chondrales
source de coxarthrose.
• Même fort de toutes ces précautions, le taux de résultats
mauvais et passables reste très important (50 % à 10 ans selon
Vielpeau) et l’évolution arthrosique à long terme semble
malheureusement être hautement probable, sinon inéluctable.