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Construction collective de scenarios pour
appréhender l’après
Dans le cadre de la crise Covid-19, quels impacts temporaires et
bouleversements durables pour les villes européennes et les
infrastructures ?
Ce document est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas
d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.
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Contexte
La crise sanitaire de la Covid-19, et le confinement qui s’en est suivi, ont impliqué une tension majeure pour
une grande partie du tissu productif, social et organisationnel de notre société. Bien qu’encore flous à ce
stade, il est possible de commencer à entrevoir des impacts et des évolutions structurelles à cette situation.
Il est pourtant nécessaire d’avoir une compréhension de ceux-ci pour pouvoir s’outiller sur la sortie de crise.
Néanmoins, les outils méthodologiques peuvent manquer et les informations que l’on reçoit sont souvent
parcellaires ou fragmentées.
C’est dans ce contexte que Leonard, plateforme d’innovation et de prospective du Groupe VINCI, a souhaité
engager une réflexion prospective collective et ouverte sur la thématique suivante :
Dans le cadre de la crise de la Covid-19, quels impacts temporaires et bouleversements durables pour
la ville et les infrastructures ?
Une crise systémique ne peut être comprise seule.
Mutualiser les expertises et les points de vue est une des manières les plus efficaces pour appréhender les
enjeux de cette crise pour les infrastructures des villes et des territoires. En effet, celles-ci ont un nouveau
visage dans cette période unique : infrastructures hospitalières saturées, infrastructures de mobilité
désertées, infrastructures énergétiques et digitales soumises à des demandes pour le moins singulières.
Au cours de quatre ateliers organisés les 22 et 23 juin 2020 animés par Elisabeth Grosdhomme, directeur
général de Paradigmes et cætera et l’équipe Leonard, les participants ont été amenés à échanger sur :
- Les facteurs de changement imposés par cette crise ;
- Leur déclinaison en tendances et leur évaluation selon leur impact et incertitude ;
- Les scénarios qui se dessinent ;
- Les premiers signes annonciateurs dans une perspective multi-sectorielle.
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Liste des participants
ENTITE NOM PRENOM EXPERTISE
ADEME VARET Anne Environnement
AIR FRANCE CRETEL Stéphane Mobilité
ARCHES - Réseau disruptif
d'architectures extrêmes
DUFRASNES Emmanuel Urbanisme
AXA DESBIEY Olivier Assurance
CAISSE DES DEPOTS BENSA Cécile Finance/Investissement
CAPGEMINI RUTARD Julien Santé
FFB VIAL Jérôme Construction
GPSEO - Communauté urbaine Grand
Paris Seine & Oise
LAFARGE Mathieu Territoire
IBICITY BARAUD SERFATY Isabelle Territoire
IDDRI SAUJOT Mathieu Environnement
IHEDATE MOATTI Sandra Territoire
IRT B<>COM RAGOT Martin Technologie
KEOLIS AUDOUIN Maxime Mobilité
LA POSTE DELAHAYE Hélène Services
La Fabrique de la Cité VOISIN-BORMUTH Chloé Géographie/Résilience
Maison de l'Economie Développement -
Région d'Annemasse
CATOIRE Aude Territoire
MICHELIN MUSSAULT Emmanuel Mobilité
ORANGE / Jeux Olympiques BARDY Thierry Telecom
Philippe Chiambaretta Architecte RIOT Etienne Urbanisme/Architecture
TOTAL WITZIG Cécile Energie
Pour le Groupe VINCI
BON Elise Construction
BROTO André Mobilité
LANDAU Pierre Mobilité
RUNG Amélia Mobilité
SCHERRER Jean-Philippe Energie
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Tendances et facteurs de changement
Plus de 350 facteurs de changements imposés par la crise pandémique ont été identifié autour de :
- L’expérience du confinement ;
- L’expérience du déconfinement ;
- La crise économique consécutive à la crise sanitaire ;
- La relance post-crise.
Ces facteurs ont été regroupés en sept megatrends, chacune d’entre elles a été déclinée en tendances, que
vous trouverez détaillés ci-dessous :
Contexte économique
L’impact de la crise sur la consommation des ménages
La chute de la consommation des ménages en mars était de 17,9% et de 30% en avril, la plus
lourde enregistrée depuis 1980. Si un rebond a été constaté à la sortie du confinement, nous
sommes loin d’atteindre le niveau de consommation habituel. Dans ce contexte, la crise peut
avoir deux impacts distincts sur la consommation des ménages : une baisse du pouvoir d’achat
due à la crise économique ou un changement des comportements dû à l’expérience du
confinement. Ce changement peut être double : une sobriété due à la réalisation que des
privations sont possibles, ou au contraire un rebond de la consommation en raison des
frustrations que le confinement a engendré. La question de la sobriété est donc centrale, les
participants ont aussi pointé la dichotomie entre une sobriété choisie, due à une modification
des modes de vie, et une sobriété subie, à cause des impératifs économiques.
La prise de conscience d’une dépendance excessive vis-à-vis du reste du monde
Des déclarations du Président de la République aux débats sur les masques, la crise a révélé les
fortes dépendances de nos économies sur des sujets vitaux, santé et alimentation en tête. La
production européenne de paracétamol est par exemple nulle. La concurrence qui s’est faite
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pour les achats de masques en Chine est aussi un bon indicateur, des particuliers américains
ont par exemple réussi à racheter une commande de masques réservée à la région Ile-de-
France. L’état de désindustrialisation de la France – un des pays où la part de l’industrie dans le
PIB est le plus faible des économies développées – pose alors la question des relocalisations :
du manque de compétitivité chronique aux intérêts stratégiques, les avis sont tranchés.
L’impact de la crise sur les finances publiques : relance keynésienne ou austérité ?
Les très nombreuses aides publiques consenties par les autorités pour faire face à la crise ont
massivement creusé le déficit public. Si certains pays européens disposaient de marges de
manœuvre budgétaires, ce n’est pas le cas de la France, de l’Italie ou de l’Espagne, où la dette
publique s’élève à plus de 100% du PIB. Le débat sur la pérennité de ces aides publiques, voire
de leur augmentation dans le cadre d’une relance keynésienne, s’est alors posé. Le rôle de la
BCE dans ces questions est primordial. Il s’agit du seul acteur capable de maintenir des taux bas,
et par extension de rendre soutenable la dette.
La stratégie de relance comme consolidation de l’existant ou opportunité de transformation ?
Plusieurs plans de relance sont annoncés : plans de soutien nationaux, plan de relance européen,
plan d’aides locaux… La nature de ceux-ci va façonner le futur de l’économie : secteurs ciblés,
nature des investissements, conditionnalité des aides… En ces temps d’incertitudes, les
investissements publics prennent une importance encore plus forte. Il pourrait s’agir d’un plan
de relance sur un modèle de green new deal de transformation au regard des impératifs
écologiques, bien qu’à ce stade, il s’agit essentiellement de plans de sauvegarde de secteurs
traditionnels.
Géographie urbaine
L’exode métropolitain
Le confinement a produit un départ des métropolitains qui pouvaient se le permettre vers des
territoires plus ruraux. Cet exode miniature a traduit en creux la volonté d’une partie de la
population de changer ses conditions de vie, notamment à travers des logements plus spacieux,
un jardin, moins de bruit, plus de nature… En parallèle l’avènement du télétravail a rendu possible
ce départ vers des plus petites villes. Si ce départ des métropoles s’avérait pérenne, il
transformerait la manière dont on vit et la répartition territoriale.
A noter que cet exode pourrait avoir revitaliser les villes moyennes, ou alors avoir lieu dans les
périphéries métropolitaines éloignées.
Le quartier comme échelle pertinente de la vie urbaine : commerces et services de proximité,
nouvelles solidarités, mobilités douces, tiers lieux
Le confinement a créé une limite d’un kilomètre autour de son habitation pour ses
déplacements. Le quartier est donc devenu l’alpha et l’oméga des déplacements physiques,
presque une extension de son domicile. Les services qui y sont présents redoublent
d’importance, avec une envie d’avoir proche de chez soi activités et commerces. La
spécialisation des quartiers – résidentiels, d’affaires, de loisirs – se verrait remise en question.
L’arrière-pays se développera, notamment aux travers de la relocalisation
Les relocalisations sont devenues un sujet politique central au cours des derniers mois. Dans
l’hypothèse que celles-ci se concrétiseraient, elles créeraient de nouveaux bassins d’emplois
dans des territoires aujourd’hui en déshérence. Les emplois associés à ces activités
permettraient de développer ces régions de manière plus forte.
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Gouvernance des villes
Girondins vs jacobins
Le débat entre girondins et jacobins a été rouvert lors de la crise. Le sentiment d’une
centralisation bureaucratique et inefficace de la gestion de crise a été souligné lors de la crise.
Au contraire, de plus petites figures locales ont émergé de la crise comme étant compétentes
pour trouver des solutions. La nouvelle loi de décentralisation prévue par le Gouvernement
devrait continuer le transfert des pouvoirs, au profit des collectivités locales. Ce pourrait n’être
qu’une nouvelle étape importante du processus de décentralisation.
Une société civile plus active, pour construire (initiatives de terrain) ou pour bloquer (protestations)
La société civile a continué à être active lors de la crise, avec des initiatives locales pour s’aider
entre voisins. Cette société civile peut être dichotomique : force de proposition ou contestataire.
La nature que prendra son engagement pourrait façonner la manière dont les décisions sont
prises, tant à l’échelle locale que globale.
Surveillance épidémiologique, gestion optimisée des flux, contrôle d’accès aux lieux publics, …
Les débats sur l’application Stop Covid ont montré tant l’attachement des individus à leur vie
privée, que l’efficacité que pouvaient avoir les applications de traçage pour faire face à des crises
épidémiologiques. Il est possible que les citoyens s’habituent peu à peu à cette ingérence des
puissances publiques dans leur vie privée, si cela permet d’éviter une nouvelle épreuve telle que
le confinement.
Bâtiments et infrastructures
Diversification des usages du logement (télétravail, téléconsultation médicale, télé-enseignement…)
Les usagers sont restés confinés pendant de longues semaines dans leur seule habitation. Ils
ont donc eu le temps de voir les défauts et les avantages de leur habitation, et à réévaluer leurs
besoins. Les logements pourraient donc évoluer face à cette expérience, avec un besoin plus fort
d’évolutivité, d’espaces collectifs ou même d’espace tout court. La réponse à ces besoins peut
être diverse : changement de lieu d’habitation, achat de nouvelles sortes de logement…
Développement du télétravail > de nouvelles pratiques du travail en présentiel
Le télétravail massif lors de la crise pourrait se pérenniser, à une moindre échelle. Ce faisant les
usages des bureaux seraient amenés à évoluer : il serait moins fréquent d’aller au bureau, et ce
serait seulement pour remplir des taches précises (réunions, séminaires…). La conception des
bureaux serait alors amenée à être modifiée, avec une diminution de certains espaces au profit
d’autres.
E-commerce, télétravail, automatisation réduisent les besoins immobiliers
Le confinement a changé la manière dont on appréhende les espaces. Le logement est redevenu
central, au détriment des bâtiments du tertiaire qui se sont vus désertés. Les difficultés qu’ont
certains salariés à revenir au travail en présentiel pose la question des besoins immobiliers. Si
ceux-ci se réduisent drastiquement, une crise immobilière pourrait alors éclater.
Télé-everything
L’usage massif des instruments numériques lors du confinement a mis une pression inédite sur
les réseaux de télécommunication. Les débats qui ont eu lieu sur le démarrage anticipé de
nouveaux services de vidéos à la demande en France illustrent le besoin de réfléchir tant aux
usages des outils numériques qu’aux infrastructures qui les supportent. Ainsi certains en
profitent pour s’interroger aux besoins d’investissements dans les télécoms pour soutenir
durablement la massification de l’usage des outils numériques.
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Omniprésence de la préoccupation hygiéniste
L’omniprésence des rappels des gestes barrières dans l’espace public, la mise à disposition
massive de gel hydroalcoolique et l’obligation de porter le masque dans un grand nombre
d’espaces publics témoignent d’un regain d’intérêt pour les questions d’hygiène. Qualifiée
d’hygiéniste, cette préoccupation peut se traduire dans la conception et l’exploitation des
bâtiments, qui intégreraient cette contrainte au même titre que toutes les contraintes de
sécurité. Des nouvelles normes de ventilation, de nettoyage ou même de circulation pourraient
être mises en place.
Espace public
L’espace public comme extension des lieux privés (café > terrasse, logement > jardin en pied
d’immeuble, commerce > trottoir, …)
La réglementation sur la réouverture des restaurants a permis de privatiser une partie de
l’espace public : des trottoirs, rues ou parking sont devenus des terrasses. Ces installations
temporaires pourraient se pérenniser et changer la manière dont on conçoit l’espace public : les
limites entre public et privé se floutent. De nouveaux aménagements et de nouveaux usages
peuvent alors apparaître : jardins collectifs en pied d’immeuble, boutiques temporaires sur les
trottoirs…
Comment faire coexister de multiples usages dans l’espace public ? Redistribution statique ou
allocations dynamiques
Le déconfinement a créé un grand nombre d’aménagements temporaires sur l’espace public :
pistes cyclables temporaires, terrasses sur la voie publique, pochoirs pour maintenir la
distanciation sociale. La question est ouverte quant à la pérennisation de ces pratiques de
modifications très dynamiques de l’organisation de l’espace public, à l’encontre du paradigme
actuel.
De la valeur d’usage à la monétisation : si l’utilisation de l’espace public a une valeur, aura-t-elle
aussi un prix ?
Les problématiques de financement des dépenses publiques est encore plus central avec la crise
économique qui s’annonce. Nous avons vu lors du confinement que le simple usage de l’espace
public a une valeur insoupçonnée pour les particuliers. La question de la tarification de cette
valeur est un vieux débat, mais les problématiques de financement locaux pourraient pousser
les collectivités à chercher de nouveaux modes de tarification.
L’expérience urbaine : au-delà des infrastructures, l’offre de services
La crise a changé la vision que l’on a de notre environnement urbain. Plus qu’un simple agrégat
d’infrastructures, la perception des services qu’ils apportent est devenu forte. Les politiques
publiques locales, qui cherchent à se réinventer, pourrait à chercher à développer plus de
services urbains à partir des infrastructures existantes. Les expériences comme la mairie
itinérante à Paris sont des pistes à explorer.
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Mobilité
Tout faire à distance > se déplacer moins ?
Le développement sans précédent du télétravail à grande échelle a remis en perspective nos
habitudes de déplacement. Les déplacements pendulaires ont pu être perçus comme superflus.
De même pour les longs trajets interurbains pour une seule réunion pouvant se faire à distance.
De cette prise de conscience pourrait résulter une baisse de la mobilité, tant quotidienne
qu’interurbaine, ou, à tout le moins, une évolution de la structure de la demande de mobilité.
Crainte de la contagion, baisse des financements publics
Les règles autour de la distanciation sociale et la crainte de la contagion peuvent pousser les
usagers vers les mobilités individuelles, vélo et voiture en tête. Les transports collectifs seraient
alors délaissés et il serait même possible d’envisager une baisse de leurs financements publics.
L’engouement pour le vélo pourrait refléter cette tendance.
Prix du pétrole en berne vs préoccupations environnementales en hausse : qui l’emporte ?
La dichotomie est forte entre l’accessibilité du pétrole – illustrée à travers un bref prix négatif -
et le discours environnemental, qui s’est récemment traduit par une victoire des écologistes
dans plusieurs grandes métropoles françaises. Certaines majors du pétrole ont décidé de
déprécier la valeur de leurs actifs en arguant que la société entrait dans une phase post-pétrole.
Ces signaux faibles pourraient se traduire en une décarbonation accélérée des mobilités, tant à
travers de la voiture électrique que du vélo.
Fonctionnement de la ville
Récurrence des crises, instabilité chronique, impossibilité de prévoir, navigation à vue
La crise sanitaire n’est pas finie, la deuxième vague est toujours une possibilité, et d’autres crises
risquent aussi émerger, notamment des conséquences du réchauffement climatique. Les villes
subissent de plein fouet ces crises, et doivent donc être prêtes à y faire face. La résilience
s’impose comme le maître mot de l’action publique locale.
Assurer la continuité d’approvisionnement en toutes circonstances
L’explosion de e-commerce et les besoins d’avitailler les supermarchés dans une économie
confinée a montré l’importance croissante de la logistique dans nos économies modernes. Et
ceci d’autant plus que les chaînes de valeur sont souvent internationales. La logistique est donc
un enjeu central, tout comme la logistique du dernier kilomètre. Les politiques publiques liées à
ces éléments devraient prendre une importance croissante.
Le rôle des acteurs privés dans la traversée de la crise (distribution, santé, traitement des déchets, …)
L’intégration des acteurs privées dans la gestion de crise a été inégale. Dans la distribution, par
exemple, le secteur privé a su gérer efficacement la crise, grâce à une logistique à flux tendu et
une collaboration étroite. Dans le secteur de la santé au contraire, les cliniques ont tardé à être
mobilisées pour faire face à la crise. Le comportement des acteurs privés n’a pas été uniforme :
certains ont cherché à s’impliquer dans la gestion de la crise, d’autres au contraire se sont
révélés averses au risque. La question de la place des acteurs privés dans la gestion de la ville
de demain, qui fait face à un impératif de résilience, reste donc ouverte.
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Hypothèses et incertitudes clés
Nous avons cherché à identifier les facteurs de changement structurants sur lesquels nous avons fondé nos
scénarios. Certains étaient tendanciels, d’autres des incertitudes majeures. Les facteurs de changement
tendanciels dans un contexte de « déconfinement » étaient les suivants :
- Les acteurs de la ville ont appris l’agilité et la résilience lors de la crise. Ils ont amorcé leur transition
environnementale.
- Le pouvoir a migré parallèlement de l’échelon national à l’échelon local, voire des institutions vers
les citoyens.
- Les inégalités se sont accrues, ce qui peut s’interpréter de manière économique, mais aussi à cause
de la divergence accrue des modes de vie.
- L’aménagement de l’espace public a connu des modifications structurantes.
- La logistique urbaine a été optimisée.
- L’usage des données personnelles a tendance à se généraliser malgré une réticence voire crainte
certaine des français.
Ils sont donc communs à l’ensemble des scénarios. Au contraire, les deux incertitudes majeures, à savoir le
dynamisme économique et le maillage territorial, sont les éléments différenciant des scénarios.
Le choix des incertitudes majeures s’est fondé sur la conjonction entre l’impact et la probabilité : le groupe
était incertain quant aux facteurs de changement se relatant au futur économique et à la géographie urbaine,
mais unanime pour en faire des facteurs majeurs pour expliquer le monde de demain. Aucun autre facteur
de changement ne remplissait les mêmes critères.
C‘est sur ces deux incertitudes et la recherche de leurs extrêmes que les scénarios prospectifs ont été
construits :
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Scénarios prospectifs
Scénario 1 : La collaboration au service d'un regain économique local
En 2021 et 2022, les grands groupes industriels adoptent de plus en plus le télétravail. Il est devenu la norme
de ne travailler en présentiel que deux jours par semaine. Peu à peu, les métiers qui peuvent se le permettre
s’alignent sur cette pratique : administration publique, groupes de services… Le télétravail est aussi facilité
par l’évolution du droit du travail, plus souple quant à la question du lieu de travail.
Les travailleurs cherchent alors à améliorer leurs conditions de travail à domicile. Pour se faire, ils n’hésitent
plus à habiter dans des villes moyennes, acceptant de faire des trajets plus longs mais moins fréquents. Ce
phénomène d’exode urbain revitalise des petites villes et crée une dynamique positive pour les économies
locales. A noter que ce phénomène est encadré par les puissances publiques, des collectivités locales à l’Etat
central, qui cherchent à éviter une surchauffe de certaines petites villes.
Cet encadrement permet de réhabiliter le patrimoine urbain délaissé des petites villes et des zones rurales,
plutôt que d’investir dans de nouveaux bâtis. Les usages de ceux-ci sont diversifiés pour les mettre en valeur.
Par exemple, les locaux scolaires sont utilisés des fins non scolaires pendant les week-ends. On cherche
aussi à optimiser leur utilisation : des services d’écrêtage du trafic naissent sur les grands axes routiers.
Les petites villes retrouvent donc un dynamisme économique certain, lié à l’afflux de cadres à hauts revenus
dans un premier temps. Le revers de la médaille est une multiplication des défis transversaux : mobilité
intercommunale, aménagement de services et de nouveaux circuits de distribution à combiner avec le
souhait des citoyens que cela contribue à limiter leurs impacts environnementaux.
Face à cette situation, les candidats aux élections locales de 2026 se coordonnent dans leurs programmes
pour assurer de nouvelles mobilités collectives entre ces villes moyennes. Se met en place un système de
navettes des métropoles vers les villes moyennes secondaires, et des villes moyennes secondaires vers les
zones rurales. Dans la volonté de répondre aux enjeux écologiques, ces navettes sont électriques, et les
exécutifs locaux ont pour ambition de les rendre autonomes.
Les pouvoir publics nationaux s’associent au mouvement, notamment lors de la réforme des finances
publiques de 2030, qui accorde aux collectivités territoriales une large part de pouvoir fiscal, en s’inspirant
du régime espagnol. Cela entérine donc le développement de pouvoirs publics locaux forts et accélère le
développement du maillage territorial. Ce dernier se fait tout en limitant l’artificialisation des sols.
Une dynamique de collaboration entre les différents acteurs se met en place : collectivités territoriales,
entreprises, citoyens, collectivités régionales, administrations centrales… Tous tendent à coopérer pour
s’assurer de la réussite des défis nouveaux de la crise. Il s’agit donc d’une rupture assez forte avec le climat
très tendu qui existait préalablement à la crise de la Covid. Le développement économique des territoires,
auparavant en marge, facilite cet apaisement. La volonté des pouvoirs publics d’impliquer les citoyens dans
les décisions locales est aussi une piste.
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Comment vit-on en 2030 ?
La vie du citoyen est profondément changée dans ce scénario :
- Le télétravail est généralisé. Il est facilité par une multiplication d’outils numériques capables de le
faciliter. Les tiers-lieux se multiplient pour pouvoir télétravailler hors de chez soi, qu’ils soient à
l’initiative des collectivités locales ou d’organismes privés.
- Les circuits courts sont devenus la norme quand ils sont associés à un bénéfice environnemental,
notamment dans l’alimentaire. Le statut de fermier est revalorisé, ainsi que l’agriculture bio et locale.
- La santé connait aussi une évolution, avec la multiplication de centres de santé locaux et de la
télécommunication. Les CHU servent avant tout aux opérations de pointe, nécessitant beaucoup de
technologies.
- L’enseignement présentiel reste la norme, bien qu’il soit complété par de l’enseignement en ligne,
ce qui change les emplois du temps.
- La mobilité est sujette à de profonds changements, en raison du nouveau maillage territorial : le
télétravail limite les voyages pendulaires, mais crée des trajets ponctuels plus longs. La mobilité est
plus choisie qu’auparavant, que ce soit dans le but, l’horaire ou la modalité. Les politiques de
transports mettent l’accent sur l’articulation des différentes mobilités et cela se ressent dans l’offre
de service proposée.
Le chômage est assez faible dans ce scénario, en partie dû à une moindre croissance démographique, ainsi
qu’à la multiplication de nouveaux modes de contrats. Parallèlement, le pouvoir d’achat augmente,
notamment grâce à des loyers moins élevés. La demande de services qui en résulte est très forte, notamment
dans les domaines de la culture et des loisirs. Le maillage territorial développe aussi des besoins de
consommation de culture et de loisirs en ligne.
Quels territoires en 2030 ?
Comme nous l’avons vu, le territoire est beaucoup plus maillé : les petites villes sont revitalisées, intégrées
dans des aires métropolitaines et intégrant leurs aires rurales. Le scénario ne suppose pas beaucoup
d’investissement, car l’essentiel du travail consiste en la remise en état du patrimoine existant. Plutôt qu’un
étalement des villes moyennes, les centres villes sont valorisés, quelle que soit l’échelle. Il existe donc un
réseau de petites villes, efficacement reliées entre elles par des offres de navettes électriques (qui
deviendront autonomes).
L’économie rurale connait un phénomène de renaissance : renouveau de l’agroalimentaire de proximité,
revitalisation des centres villes de petites villes de province, fabriques locales… La décentralisation du pouvoir
politique donne plus de marge aux collectivités territoriales pour encourager ces initiatives. Pour les soutenir,
les pouvoirs publics locaux vont proposer un nombre croissant d’offres de services publics, avec une
tarification plus dynamique pour assurer sa soutenabilité financière et inciter à des comportements vertueux.
Finalement, les métropoles s’adaptent aussi à ce changement, elles gardent une place importante,
notamment comme hub des activités à forte dimension technologique, tout en perdant le rôle d’unique pôle
de la vie économique et de concentration de la population. Les métropoles profitent de la moindre pression
démographique pour donner plus de place aux loisirs et aux mobilités actives. Les sièges sociaux mutent par
exemple, en intégrant une dimension hôtelière pour accueillir les salariés qui auraient besoin de
ponctuellement se rendre dans les bureaux.
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Scénario 2 : L’exode urbain dans un contexte de stagnation économique
De 2020 à 2022, la crise a été très dure et la reprise n’a pas vraiment eu lieu. Le chômage s’est massifié, à
l’instar des faillites d’entreprises. De nombreux urbains sont partis à la campagne à la recherche
d’opportunités économiques que les métropoles ne garantissent plus. Le télétravail est devenu la norme,
mais creuse les inégalités, le télétravail ne concerne que les cadres supérieurs. Ces derniers sont les premiers
à s’installer la campagne pour profiter d’un peu de calme et de verdure.
Pour les autres, l’incertitude est très forte. Le contexte social est explosif alors que les inégalités se creusent.
Des plans d’aides publiques sont mis en place, sans arriver à endiguer le mécontentement populaire. Les
tensions sociales s’expriment à travers de larges mouvements de contestations, parfois violents.
La recherche d’opportunités économiques ou de moyens de subsister, notamment dans le secteur de
l’agriculture ou de la sylviculture, est un des moteurs d’un large exode urbain. Il se couple aux aspirations des
habitants, à qui les métropoles n’offrent que peu d’emplois ou de loisirs, et qui veulent se rapprocher de la
nature. Cet exode massif de la population est incontrôlé par la puissance publique. Les flux de populations,
capables de revitaliser démographiquement des territoires délaissés, deviennent donc un enjeu politique
pour les collectivités. Cela se traduit par une concurrence dans les aménagements entre les petites villes, qui
cherchent à améliorer leur attractivité, notamment à travers une rénovation de leurs réseaux internet, routiers
et électriques.
Des investissements publics dans la transition écologique, couplés à la mise en place d’une économie grise
– facilitée par les nouveaux modes de paiement de pair à pair, arrivent à faire basculer le contexte dans une
dynamique de sobriété – énergétique, alimentaire et écologique - subie, mais heureuse. Le climat social
s’améliore au fur et à mesure que la transition écologique et la décroissance deviennent la nouvelle normale.
Si le chômage reste fort, environ à 20%, la situation s’améliore grâce à un faisceau d’activités non salariées
qui permettent d’améliorer les conditions de vie.
Les élections locales de 2026 voient des programmes en faveur de l’émergence de clusters locaux et entérine
la spécialisation à l’échelle des territoires. Elles s’accompagnent d’une vaste loi de décentralisation qui
redonne aux pouvoirs locaux (de l’échelon municipal) une vaste autonomie de décision.
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Comment vit-on en 2030 ?
Les habitudes ont été profondément affectées, tant par la crise économique que par l’exode vers la campagne
d’une grande partie de la population :
- Le travail traditionnel est devenu plus rare. Pour les salariés, le télétravail est devenu la norme ainsi
que le cumul les activités. Il n’est pas rare d’avoir un potager à vocation alimentaire ou une activité
artisanale par exemple.
- Les mobilités de courte distance sont privilégiées, de nombreuses pistes cyclables sont installées
en centre-ville. Le faible dynamisme économique réduit les déplacements longs de personnes
comme de marchandises. Les autoroutes ne sont utiles que pour les biens.
- Les habitats sont modifiés, avec plus d’espaces partagés, à l’échelle du quartier : potagers partagés.
- Les circuits courts se multiplient, pour réduire les dépenses des ménages, l’économie locale joue un
rôle prépondérant. Travailler dans l’économie grise est fréquent.
- Une aide alimentaire est apportée à une grande partie de la population dont les fins de mois sont
difficiles.
Quels territoires en 2030 ?
Les territoires sont plus fragmentés, les difficultés économiques rendent difficile la coopération entre les
acteurs. Ainsi, chaque ville essaie de redimensionner ses différents réseaux – internet, électriques -pour gérer
le report des réseaux professionnels vers les réseaux personnels, en raison tant du télétravail que du chômage
massif. Les systèmes énergétiques territoriaux se développent sous l’impulsion d’une gouvernance locale, de
manière à gérer les besoins locaux.
Les infrastructures routières ont une double pression : besoin de grands axes autoroutiers pour la logistique
marchande, tandis que les personnes préfèrent avoir des infrastructures permettant la mixité des modes de
déplacements, permettant de relier les petites villes entre elles. L’espace public s’adapte aussi à ces
transformations de la mobilité, en limitant drastiquement la place de la voiture, aux profits de mobilités
actives.
Le grand gagnant de ce scénario est le village, redevenu central dans la vie économique, sociale et culturelle.
L’exode massif vers la campagne, combiné à un chômage massif, a favorisé les villages sur les villes
moyennes. Ceux-ci permettent des activités telles que l’agriculture vivrière, l’artisanat très local, et les circuits
très courts. Les flux de mobilités sont très réorientés entre ces villages, et des besoins d’investissements se
font sentir.
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Scénario 3 : Face aux ruptures territoriales, le sursaut citoyen
La crise économique qu’a créé le confinement n’a pas pu être empêchée par les mesures d’aides publiques.
Les plans de relance successifs n’arrivent pas à créer les conditions d’une croissance dynamique et durable.
Les faillites d’entreprises se multiplient, les plans sociaux aussi, le chômage explose et le niveau de vie
diminue. Le marasme économique n’est qu’à peine enrayé par les investissements publics massifs.
Au contraire, ces plans favorisent l’émergence de territoires qui arrivent à tirer leur épingle du jeu et
deviennent des pôles économiques, démographiques et politiques. Ils attirent l’essentiel de la population,
bien qu’ils n’arrivent pas à fournir assez d’emplois pour tous. La pression créée par le fort chômage empêche
l’essor du télétravail.
Face à cette crise sans précédent, de nouveaux mouvements sociaux – qualifiés de sursaut citoyen -
s’organisent : plus solidaires et très implantés localement, ils permettent de recréer du lien social dans les
plus grandes villes. Assez vite, ces mouvements sociaux se transforment en mouvements politiques. Ils
prônent une plus forte implication citoyenne dans la démocratie et la gestion locale des problématiques
technologiques, économiques et règlementaires.
Ces mouvements arrivent en tête des élections de 2026. Assez vite ils obtiennent de l’Etat des concessions
massives dans le partage du pouvoir, et s’attachent à relancer les métropoles sur un nouveau modèle. Ce
dernier promeut la sobriété heureuse et la résilience. Des tentatives de changer les modèles productifs sont
lancées, notamment avec des circuits plus courts et une moindre dépendance aux importations. Certains
territoires arrivent à organiser une sobriété heureuse, le reste la subit.
Néanmoins ces progrès sont heurtés aux faillites d’entreprises, diminuant les marges d’actions des pouvoirs
publics.
Juillet 2020
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Comment vit-on en 2030 ?
Le climat est singulièrement tendu :
- Il existe une tension entre le désir de fuir les grandes métropoles et l’obligation économique d’y
rester.
- La polarisation des opinions due à la crise crée de nombreuses tensions politiques, tant sur la scène
locale que nationale.
- La décroissance subie crée des frustrations dues à la baisse du pouvoir d’achat.
Le sursaut citoyen cherche à réduire ces tensions et à créer des conditions durables pour assurer l’avenir.
Pour se faire il cherche à impulser des changements dans les modes de vie :
- La valorisation des circuits courts, voire de l’autoconsommation alimentaire et énergétique sont
centrales
- De nouvelles solidarités, notamment dans les domaines de la dépendance, de la santé sont mises
en place. Un tissu associatif et citoyen remplace une partie des services publics qui ne sont plus
assurés.
- L’enjeux est aussi politique, l’implication citoyenne devient une priorité des pouvoirs locaux.
La frugalité impose aussi des changements : moins de mobilité, notamment de mobilité à longue distance,
moins de consommation, moins de connectivité.
Quels territoires en 2030 ?
Il existe deux types territoires, complètement séparés :
- Les territoires qui arrivent à atténuer les effets de la crise, et qui cherchent à se réinventer. Il peut
s’agir notamment des métropoles et technopoles, mais aussi des centres villes de plus petites villes.
Ils subissent moins la crise. De ce fait, ils concentrent l’essentiel de la richesse économique mais
aussi démographique. Ce sont eux qui voient la naissance des premiers mouvements de sursauts
citoyens. Leur sobriété est heureuse et planifiée, grâce à une forte organisation de la société civile.
- La vaste majorité des territoires qui subissent la crise, déplorent la faillite de ses entreprises et la
fuite de ses cerveaux. La sobriété est subie pour ces habitants, ce qui alimente un certain
mécontentement.
A noter que cette polarisation n’est pas une binarité entre métropoles et territoires ruraux, mais est
transversale : centres villes par rapport aux banlieues, zones industrielles face à des territoires délaissés. Les
inégalités d’accès à la mobilité se sont donc accentuées : réduction du nombre de transport en commun,
risques de coupures d’énergie…
De fait, l’état catastrophique des finances publiques empêche un bon niveau d’investissements dans les
infrastructures. Celles-ci sont largement délaissées. Certains acteurs associatifs tentent de pallier ces
insuffisances, mais c’est une des principales préoccupations des usagers à ce jour.
Juillet 2020
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Scénario 4 : L’emballement métropolitain
Chacun y va de son plan de relance ! L’Union européenne, les Etats, les métropoles : tous investissent
massivement, facilités par les taux avantageux d’endettement permis par une politique facilitatrice de la BCE.
Les premiers bénéficiaires sont les grandes entreprises, qui représentent un bassin d’emplois très important
(23% des emplois français). La croissance repart à la hausse, et le chômage à la baisse. Le confinement n’est
qu’un mauvais souvenir, ainsi que la plupart de ses répercussions. Le télétravail n’est jamais devenu la norme.
Les grands investissements publics se concentrent en partie dans les nouvelles technologies, le déploiement
d’un réseau 5G européen est encouragé. Dès 2021 dans les 10 plus grandes villes françaises. En parallèle,
des grands chantiers industriels s’ouvrent pour accélérer la mobilité autonome, la mobilité à hydrogène,
l’économie circulaire, l’énergie non carbonée. Ces plans ont une forte composante verte et facilitent aussi
certaines relocalisations stratégiques, par exemple dans le domaine de la santé.
Les métropoles servent de courroie de transmission aux plans de relance successifs : compétitives,
accueillant une population très formée, des centres de recherches de premier plan et disposant
d’importantes infrastructures. Ce sont elles qui organisent les réseaux de transports, d’énergie, l’économie
locale… En 2024, l’organisation des Jeux Olympiques en Ile-De-France sert autant de vitrine pour les grandes
innovations technologiques que de rappel du rôle clé joué par les métropoles.
Ces dernières se livrent une concurrence acharnée entre elles pour attirer les investissements et les
populations les plus aisées. En 2026, les élections locales voient les métropoles se faire concurrence sur les
questions d’écologie locale – mobilité active, végétalisation – mais aussi de santé – investissements
technologiques notamment. Les petites villes ne sont pas capables de faire concurrence, bien qu’elles aient
tout de même de larges aides publiques, permises par la croissance.
La croissance n’évite pas les tensions, et le scénario est prompt à l’emballement social, écologique ou même
diplomatique. La crise n’est donc jamais loin ; Les pouvoirs publics ont certes de larges moyens, mais ils font
face à un nombre croissant de problèmes potentiels – réchauffement climatique, explosion des inégalités.
Juillet 2020
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Comment vit-on en 2030 ?
Ce scénario n’introduit pas de rupture majeure dans les modes de vie, mais accentue plusieurs tendances :
- Les déplacements pendulaires, plus nombreux, sont de plus en plus longs. L’augmentation du prix
de l’immobilier pousse les urbains à s’installer dans des périphéries sans cesse en expansion. Or le
présentiel reste la norme pour un grand nombre de salariés, tant pour des raisons de management
que pour les risques psychosociaux que le télétravail peut générer – solitude, sentiment d’abandon,
perte de sens…
- L’essentiel de ce que l’on consomme provient toujours de chaînes de valeur complexes et
internationales. Néanmoins, un accent est mis sur l’aspect écologique de la production, avec
l’introduction d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de la zone de libre-échange
européenne.
- L’exemple asiatique de la gestion de la Covid a normalisé l’usage des données face aux sujets
critiques : santé, sécurité… Ainsi il n’est pas rare d’avoir une ou plusieurs applications à l’image de
« Stop covid » installée sur son portable.
Quels territoires en 2030 ?
Le monde d’après ressemble curieusement au monde d’avant. L’immobilier du centre des aires
métropolitaines reste inaccessible pour une partie croissante de la population, continuant l’étalement urbain
à l’œuvre.
Les grandes villes font l’effet de villes forteresses : les villes cherchent à perdre en densité, et multiplient les
aménagements pour augmenter la qualité de vie. L’installation d’infrastructures de mobilités actives, au
premier plan le vélo, complique l’accès de la ville aux périurbains par la voiture. Les investissements dans les
infrastructures de mobilité se concentrent entre les métropoles.
Seule exception à ce phénomène, les villes font des politiques volontaristes pour loger les travailleurs
essentiels, notamment en favorisant leur accès aux logements sociaux. Ce défi est vital pour que les
métropoles restent attractives. Néanmoins, les leviers pour se faire restent flous, et les différentes métropoles
tentent différentes innovations : baux emphytéotiques, prêt garantis, la dissociation du foncier et du bâti…
Juillet 2020
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Remerciements
Nous tenons à remercier tous les participants pour leur implication lors de cet atelier.
A travers cette démarche, l’objectif initial était d’apporter un éclairage dans les prises de décision stratégique
que tous doivent prendre dans ce contexte incertain et complexe. La mutualisation des expertises en était
l’ingrédient essentiel. La contribution active et constante des participants au cours de ces quatre ateliers a
confirmé cette intuition.
Maintenons cette dynamique pour partager cette vision et engager des partenariats durables !
Juillet 2020
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ANNEXES
Juillet 2020
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Résultat global de l’évaluation des tendances selon leur impact et leur incertitude par les participants

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Construction collective de scenarios pour appréhender l’après

  • 1. Construction collective de scenarios pour appréhender l’après Dans le cadre de la crise Covid-19, quels impacts temporaires et bouleversements durables pour les villes européennes et les infrastructures ? Ce document est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.
  • 2. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Contexte La crise sanitaire de la Covid-19, et le confinement qui s’en est suivi, ont impliqué une tension majeure pour une grande partie du tissu productif, social et organisationnel de notre société. Bien qu’encore flous à ce stade, il est possible de commencer à entrevoir des impacts et des évolutions structurelles à cette situation. Il est pourtant nécessaire d’avoir une compréhension de ceux-ci pour pouvoir s’outiller sur la sortie de crise. Néanmoins, les outils méthodologiques peuvent manquer et les informations que l’on reçoit sont souvent parcellaires ou fragmentées. C’est dans ce contexte que Leonard, plateforme d’innovation et de prospective du Groupe VINCI, a souhaité engager une réflexion prospective collective et ouverte sur la thématique suivante : Dans le cadre de la crise de la Covid-19, quels impacts temporaires et bouleversements durables pour la ville et les infrastructures ? Une crise systémique ne peut être comprise seule. Mutualiser les expertises et les points de vue est une des manières les plus efficaces pour appréhender les enjeux de cette crise pour les infrastructures des villes et des territoires. En effet, celles-ci ont un nouveau visage dans cette période unique : infrastructures hospitalières saturées, infrastructures de mobilité désertées, infrastructures énergétiques et digitales soumises à des demandes pour le moins singulières. Au cours de quatre ateliers organisés les 22 et 23 juin 2020 animés par Elisabeth Grosdhomme, directeur général de Paradigmes et cætera et l’équipe Leonard, les participants ont été amenés à échanger sur : - Les facteurs de changement imposés par cette crise ; - Leur déclinaison en tendances et leur évaluation selon leur impact et incertitude ; - Les scénarios qui se dessinent ; - Les premiers signes annonciateurs dans une perspective multi-sectorielle.
  • 3. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Liste des participants ENTITE NOM PRENOM EXPERTISE ADEME VARET Anne Environnement AIR FRANCE CRETEL Stéphane Mobilité ARCHES - Réseau disruptif d'architectures extrêmes DUFRASNES Emmanuel Urbanisme AXA DESBIEY Olivier Assurance CAISSE DES DEPOTS BENSA Cécile Finance/Investissement CAPGEMINI RUTARD Julien Santé FFB VIAL Jérôme Construction GPSEO - Communauté urbaine Grand Paris Seine & Oise LAFARGE Mathieu Territoire IBICITY BARAUD SERFATY Isabelle Territoire IDDRI SAUJOT Mathieu Environnement IHEDATE MOATTI Sandra Territoire IRT B<>COM RAGOT Martin Technologie KEOLIS AUDOUIN Maxime Mobilité LA POSTE DELAHAYE Hélène Services La Fabrique de la Cité VOISIN-BORMUTH Chloé Géographie/Résilience Maison de l'Economie Développement - Région d'Annemasse CATOIRE Aude Territoire MICHELIN MUSSAULT Emmanuel Mobilité ORANGE / Jeux Olympiques BARDY Thierry Telecom Philippe Chiambaretta Architecte RIOT Etienne Urbanisme/Architecture TOTAL WITZIG Cécile Energie Pour le Groupe VINCI BON Elise Construction BROTO André Mobilité LANDAU Pierre Mobilité RUNG Amélia Mobilité SCHERRER Jean-Philippe Energie
  • 4. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Tendances et facteurs de changement Plus de 350 facteurs de changements imposés par la crise pandémique ont été identifié autour de : - L’expérience du confinement ; - L’expérience du déconfinement ; - La crise économique consécutive à la crise sanitaire ; - La relance post-crise. Ces facteurs ont été regroupés en sept megatrends, chacune d’entre elles a été déclinée en tendances, que vous trouverez détaillés ci-dessous : Contexte économique L’impact de la crise sur la consommation des ménages La chute de la consommation des ménages en mars était de 17,9% et de 30% en avril, la plus lourde enregistrée depuis 1980. Si un rebond a été constaté à la sortie du confinement, nous sommes loin d’atteindre le niveau de consommation habituel. Dans ce contexte, la crise peut avoir deux impacts distincts sur la consommation des ménages : une baisse du pouvoir d’achat due à la crise économique ou un changement des comportements dû à l’expérience du confinement. Ce changement peut être double : une sobriété due à la réalisation que des privations sont possibles, ou au contraire un rebond de la consommation en raison des frustrations que le confinement a engendré. La question de la sobriété est donc centrale, les participants ont aussi pointé la dichotomie entre une sobriété choisie, due à une modification des modes de vie, et une sobriété subie, à cause des impératifs économiques. La prise de conscience d’une dépendance excessive vis-à-vis du reste du monde Des déclarations du Président de la République aux débats sur les masques, la crise a révélé les fortes dépendances de nos économies sur des sujets vitaux, santé et alimentation en tête. La production européenne de paracétamol est par exemple nulle. La concurrence qui s’est faite
  • 5. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International pour les achats de masques en Chine est aussi un bon indicateur, des particuliers américains ont par exemple réussi à racheter une commande de masques réservée à la région Ile-de- France. L’état de désindustrialisation de la France – un des pays où la part de l’industrie dans le PIB est le plus faible des économies développées – pose alors la question des relocalisations : du manque de compétitivité chronique aux intérêts stratégiques, les avis sont tranchés. L’impact de la crise sur les finances publiques : relance keynésienne ou austérité ? Les très nombreuses aides publiques consenties par les autorités pour faire face à la crise ont massivement creusé le déficit public. Si certains pays européens disposaient de marges de manœuvre budgétaires, ce n’est pas le cas de la France, de l’Italie ou de l’Espagne, où la dette publique s’élève à plus de 100% du PIB. Le débat sur la pérennité de ces aides publiques, voire de leur augmentation dans le cadre d’une relance keynésienne, s’est alors posé. Le rôle de la BCE dans ces questions est primordial. Il s’agit du seul acteur capable de maintenir des taux bas, et par extension de rendre soutenable la dette. La stratégie de relance comme consolidation de l’existant ou opportunité de transformation ? Plusieurs plans de relance sont annoncés : plans de soutien nationaux, plan de relance européen, plan d’aides locaux… La nature de ceux-ci va façonner le futur de l’économie : secteurs ciblés, nature des investissements, conditionnalité des aides… En ces temps d’incertitudes, les investissements publics prennent une importance encore plus forte. Il pourrait s’agir d’un plan de relance sur un modèle de green new deal de transformation au regard des impératifs écologiques, bien qu’à ce stade, il s’agit essentiellement de plans de sauvegarde de secteurs traditionnels. Géographie urbaine L’exode métropolitain Le confinement a produit un départ des métropolitains qui pouvaient se le permettre vers des territoires plus ruraux. Cet exode miniature a traduit en creux la volonté d’une partie de la population de changer ses conditions de vie, notamment à travers des logements plus spacieux, un jardin, moins de bruit, plus de nature… En parallèle l’avènement du télétravail a rendu possible ce départ vers des plus petites villes. Si ce départ des métropoles s’avérait pérenne, il transformerait la manière dont on vit et la répartition territoriale. A noter que cet exode pourrait avoir revitaliser les villes moyennes, ou alors avoir lieu dans les périphéries métropolitaines éloignées. Le quartier comme échelle pertinente de la vie urbaine : commerces et services de proximité, nouvelles solidarités, mobilités douces, tiers lieux Le confinement a créé une limite d’un kilomètre autour de son habitation pour ses déplacements. Le quartier est donc devenu l’alpha et l’oméga des déplacements physiques, presque une extension de son domicile. Les services qui y sont présents redoublent d’importance, avec une envie d’avoir proche de chez soi activités et commerces. La spécialisation des quartiers – résidentiels, d’affaires, de loisirs – se verrait remise en question. L’arrière-pays se développera, notamment aux travers de la relocalisation Les relocalisations sont devenues un sujet politique central au cours des derniers mois. Dans l’hypothèse que celles-ci se concrétiseraient, elles créeraient de nouveaux bassins d’emplois dans des territoires aujourd’hui en déshérence. Les emplois associés à ces activités permettraient de développer ces régions de manière plus forte.
  • 6. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Gouvernance des villes Girondins vs jacobins Le débat entre girondins et jacobins a été rouvert lors de la crise. Le sentiment d’une centralisation bureaucratique et inefficace de la gestion de crise a été souligné lors de la crise. Au contraire, de plus petites figures locales ont émergé de la crise comme étant compétentes pour trouver des solutions. La nouvelle loi de décentralisation prévue par le Gouvernement devrait continuer le transfert des pouvoirs, au profit des collectivités locales. Ce pourrait n’être qu’une nouvelle étape importante du processus de décentralisation. Une société civile plus active, pour construire (initiatives de terrain) ou pour bloquer (protestations) La société civile a continué à être active lors de la crise, avec des initiatives locales pour s’aider entre voisins. Cette société civile peut être dichotomique : force de proposition ou contestataire. La nature que prendra son engagement pourrait façonner la manière dont les décisions sont prises, tant à l’échelle locale que globale. Surveillance épidémiologique, gestion optimisée des flux, contrôle d’accès aux lieux publics, … Les débats sur l’application Stop Covid ont montré tant l’attachement des individus à leur vie privée, que l’efficacité que pouvaient avoir les applications de traçage pour faire face à des crises épidémiologiques. Il est possible que les citoyens s’habituent peu à peu à cette ingérence des puissances publiques dans leur vie privée, si cela permet d’éviter une nouvelle épreuve telle que le confinement. Bâtiments et infrastructures Diversification des usages du logement (télétravail, téléconsultation médicale, télé-enseignement…) Les usagers sont restés confinés pendant de longues semaines dans leur seule habitation. Ils ont donc eu le temps de voir les défauts et les avantages de leur habitation, et à réévaluer leurs besoins. Les logements pourraient donc évoluer face à cette expérience, avec un besoin plus fort d’évolutivité, d’espaces collectifs ou même d’espace tout court. La réponse à ces besoins peut être diverse : changement de lieu d’habitation, achat de nouvelles sortes de logement… Développement du télétravail > de nouvelles pratiques du travail en présentiel Le télétravail massif lors de la crise pourrait se pérenniser, à une moindre échelle. Ce faisant les usages des bureaux seraient amenés à évoluer : il serait moins fréquent d’aller au bureau, et ce serait seulement pour remplir des taches précises (réunions, séminaires…). La conception des bureaux serait alors amenée à être modifiée, avec une diminution de certains espaces au profit d’autres. E-commerce, télétravail, automatisation réduisent les besoins immobiliers Le confinement a changé la manière dont on appréhende les espaces. Le logement est redevenu central, au détriment des bâtiments du tertiaire qui se sont vus désertés. Les difficultés qu’ont certains salariés à revenir au travail en présentiel pose la question des besoins immobiliers. Si ceux-ci se réduisent drastiquement, une crise immobilière pourrait alors éclater. Télé-everything L’usage massif des instruments numériques lors du confinement a mis une pression inédite sur les réseaux de télécommunication. Les débats qui ont eu lieu sur le démarrage anticipé de nouveaux services de vidéos à la demande en France illustrent le besoin de réfléchir tant aux usages des outils numériques qu’aux infrastructures qui les supportent. Ainsi certains en profitent pour s’interroger aux besoins d’investissements dans les télécoms pour soutenir durablement la massification de l’usage des outils numériques.
  • 7. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Omniprésence de la préoccupation hygiéniste L’omniprésence des rappels des gestes barrières dans l’espace public, la mise à disposition massive de gel hydroalcoolique et l’obligation de porter le masque dans un grand nombre d’espaces publics témoignent d’un regain d’intérêt pour les questions d’hygiène. Qualifiée d’hygiéniste, cette préoccupation peut se traduire dans la conception et l’exploitation des bâtiments, qui intégreraient cette contrainte au même titre que toutes les contraintes de sécurité. Des nouvelles normes de ventilation, de nettoyage ou même de circulation pourraient être mises en place. Espace public L’espace public comme extension des lieux privés (café > terrasse, logement > jardin en pied d’immeuble, commerce > trottoir, …) La réglementation sur la réouverture des restaurants a permis de privatiser une partie de l’espace public : des trottoirs, rues ou parking sont devenus des terrasses. Ces installations temporaires pourraient se pérenniser et changer la manière dont on conçoit l’espace public : les limites entre public et privé se floutent. De nouveaux aménagements et de nouveaux usages peuvent alors apparaître : jardins collectifs en pied d’immeuble, boutiques temporaires sur les trottoirs… Comment faire coexister de multiples usages dans l’espace public ? Redistribution statique ou allocations dynamiques Le déconfinement a créé un grand nombre d’aménagements temporaires sur l’espace public : pistes cyclables temporaires, terrasses sur la voie publique, pochoirs pour maintenir la distanciation sociale. La question est ouverte quant à la pérennisation de ces pratiques de modifications très dynamiques de l’organisation de l’espace public, à l’encontre du paradigme actuel. De la valeur d’usage à la monétisation : si l’utilisation de l’espace public a une valeur, aura-t-elle aussi un prix ? Les problématiques de financement des dépenses publiques est encore plus central avec la crise économique qui s’annonce. Nous avons vu lors du confinement que le simple usage de l’espace public a une valeur insoupçonnée pour les particuliers. La question de la tarification de cette valeur est un vieux débat, mais les problématiques de financement locaux pourraient pousser les collectivités à chercher de nouveaux modes de tarification. L’expérience urbaine : au-delà des infrastructures, l’offre de services La crise a changé la vision que l’on a de notre environnement urbain. Plus qu’un simple agrégat d’infrastructures, la perception des services qu’ils apportent est devenu forte. Les politiques publiques locales, qui cherchent à se réinventer, pourrait à chercher à développer plus de services urbains à partir des infrastructures existantes. Les expériences comme la mairie itinérante à Paris sont des pistes à explorer.
  • 8. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Mobilité Tout faire à distance > se déplacer moins ? Le développement sans précédent du télétravail à grande échelle a remis en perspective nos habitudes de déplacement. Les déplacements pendulaires ont pu être perçus comme superflus. De même pour les longs trajets interurbains pour une seule réunion pouvant se faire à distance. De cette prise de conscience pourrait résulter une baisse de la mobilité, tant quotidienne qu’interurbaine, ou, à tout le moins, une évolution de la structure de la demande de mobilité. Crainte de la contagion, baisse des financements publics Les règles autour de la distanciation sociale et la crainte de la contagion peuvent pousser les usagers vers les mobilités individuelles, vélo et voiture en tête. Les transports collectifs seraient alors délaissés et il serait même possible d’envisager une baisse de leurs financements publics. L’engouement pour le vélo pourrait refléter cette tendance. Prix du pétrole en berne vs préoccupations environnementales en hausse : qui l’emporte ? La dichotomie est forte entre l’accessibilité du pétrole – illustrée à travers un bref prix négatif - et le discours environnemental, qui s’est récemment traduit par une victoire des écologistes dans plusieurs grandes métropoles françaises. Certaines majors du pétrole ont décidé de déprécier la valeur de leurs actifs en arguant que la société entrait dans une phase post-pétrole. Ces signaux faibles pourraient se traduire en une décarbonation accélérée des mobilités, tant à travers de la voiture électrique que du vélo. Fonctionnement de la ville Récurrence des crises, instabilité chronique, impossibilité de prévoir, navigation à vue La crise sanitaire n’est pas finie, la deuxième vague est toujours une possibilité, et d’autres crises risquent aussi émerger, notamment des conséquences du réchauffement climatique. Les villes subissent de plein fouet ces crises, et doivent donc être prêtes à y faire face. La résilience s’impose comme le maître mot de l’action publique locale. Assurer la continuité d’approvisionnement en toutes circonstances L’explosion de e-commerce et les besoins d’avitailler les supermarchés dans une économie confinée a montré l’importance croissante de la logistique dans nos économies modernes. Et ceci d’autant plus que les chaînes de valeur sont souvent internationales. La logistique est donc un enjeu central, tout comme la logistique du dernier kilomètre. Les politiques publiques liées à ces éléments devraient prendre une importance croissante. Le rôle des acteurs privés dans la traversée de la crise (distribution, santé, traitement des déchets, …) L’intégration des acteurs privées dans la gestion de crise a été inégale. Dans la distribution, par exemple, le secteur privé a su gérer efficacement la crise, grâce à une logistique à flux tendu et une collaboration étroite. Dans le secteur de la santé au contraire, les cliniques ont tardé à être mobilisées pour faire face à la crise. Le comportement des acteurs privés n’a pas été uniforme : certains ont cherché à s’impliquer dans la gestion de la crise, d’autres au contraire se sont révélés averses au risque. La question de la place des acteurs privés dans la gestion de la ville de demain, qui fait face à un impératif de résilience, reste donc ouverte.
  • 9. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Hypothèses et incertitudes clés Nous avons cherché à identifier les facteurs de changement structurants sur lesquels nous avons fondé nos scénarios. Certains étaient tendanciels, d’autres des incertitudes majeures. Les facteurs de changement tendanciels dans un contexte de « déconfinement » étaient les suivants : - Les acteurs de la ville ont appris l’agilité et la résilience lors de la crise. Ils ont amorcé leur transition environnementale. - Le pouvoir a migré parallèlement de l’échelon national à l’échelon local, voire des institutions vers les citoyens. - Les inégalités se sont accrues, ce qui peut s’interpréter de manière économique, mais aussi à cause de la divergence accrue des modes de vie. - L’aménagement de l’espace public a connu des modifications structurantes. - La logistique urbaine a été optimisée. - L’usage des données personnelles a tendance à se généraliser malgré une réticence voire crainte certaine des français. Ils sont donc communs à l’ensemble des scénarios. Au contraire, les deux incertitudes majeures, à savoir le dynamisme économique et le maillage territorial, sont les éléments différenciant des scénarios. Le choix des incertitudes majeures s’est fondé sur la conjonction entre l’impact et la probabilité : le groupe était incertain quant aux facteurs de changement se relatant au futur économique et à la géographie urbaine, mais unanime pour en faire des facteurs majeurs pour expliquer le monde de demain. Aucun autre facteur de changement ne remplissait les mêmes critères. C‘est sur ces deux incertitudes et la recherche de leurs extrêmes que les scénarios prospectifs ont été construits :
  • 10. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Scénarios prospectifs Scénario 1 : La collaboration au service d'un regain économique local En 2021 et 2022, les grands groupes industriels adoptent de plus en plus le télétravail. Il est devenu la norme de ne travailler en présentiel que deux jours par semaine. Peu à peu, les métiers qui peuvent se le permettre s’alignent sur cette pratique : administration publique, groupes de services… Le télétravail est aussi facilité par l’évolution du droit du travail, plus souple quant à la question du lieu de travail. Les travailleurs cherchent alors à améliorer leurs conditions de travail à domicile. Pour se faire, ils n’hésitent plus à habiter dans des villes moyennes, acceptant de faire des trajets plus longs mais moins fréquents. Ce phénomène d’exode urbain revitalise des petites villes et crée une dynamique positive pour les économies locales. A noter que ce phénomène est encadré par les puissances publiques, des collectivités locales à l’Etat central, qui cherchent à éviter une surchauffe de certaines petites villes. Cet encadrement permet de réhabiliter le patrimoine urbain délaissé des petites villes et des zones rurales, plutôt que d’investir dans de nouveaux bâtis. Les usages de ceux-ci sont diversifiés pour les mettre en valeur. Par exemple, les locaux scolaires sont utilisés des fins non scolaires pendant les week-ends. On cherche aussi à optimiser leur utilisation : des services d’écrêtage du trafic naissent sur les grands axes routiers. Les petites villes retrouvent donc un dynamisme économique certain, lié à l’afflux de cadres à hauts revenus dans un premier temps. Le revers de la médaille est une multiplication des défis transversaux : mobilité intercommunale, aménagement de services et de nouveaux circuits de distribution à combiner avec le souhait des citoyens que cela contribue à limiter leurs impacts environnementaux. Face à cette situation, les candidats aux élections locales de 2026 se coordonnent dans leurs programmes pour assurer de nouvelles mobilités collectives entre ces villes moyennes. Se met en place un système de navettes des métropoles vers les villes moyennes secondaires, et des villes moyennes secondaires vers les zones rurales. Dans la volonté de répondre aux enjeux écologiques, ces navettes sont électriques, et les exécutifs locaux ont pour ambition de les rendre autonomes. Les pouvoir publics nationaux s’associent au mouvement, notamment lors de la réforme des finances publiques de 2030, qui accorde aux collectivités territoriales une large part de pouvoir fiscal, en s’inspirant du régime espagnol. Cela entérine donc le développement de pouvoirs publics locaux forts et accélère le développement du maillage territorial. Ce dernier se fait tout en limitant l’artificialisation des sols. Une dynamique de collaboration entre les différents acteurs se met en place : collectivités territoriales, entreprises, citoyens, collectivités régionales, administrations centrales… Tous tendent à coopérer pour s’assurer de la réussite des défis nouveaux de la crise. Il s’agit donc d’une rupture assez forte avec le climat très tendu qui existait préalablement à la crise de la Covid. Le développement économique des territoires, auparavant en marge, facilite cet apaisement. La volonté des pouvoirs publics d’impliquer les citoyens dans les décisions locales est aussi une piste.
  • 11. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Comment vit-on en 2030 ? La vie du citoyen est profondément changée dans ce scénario : - Le télétravail est généralisé. Il est facilité par une multiplication d’outils numériques capables de le faciliter. Les tiers-lieux se multiplient pour pouvoir télétravailler hors de chez soi, qu’ils soient à l’initiative des collectivités locales ou d’organismes privés. - Les circuits courts sont devenus la norme quand ils sont associés à un bénéfice environnemental, notamment dans l’alimentaire. Le statut de fermier est revalorisé, ainsi que l’agriculture bio et locale. - La santé connait aussi une évolution, avec la multiplication de centres de santé locaux et de la télécommunication. Les CHU servent avant tout aux opérations de pointe, nécessitant beaucoup de technologies. - L’enseignement présentiel reste la norme, bien qu’il soit complété par de l’enseignement en ligne, ce qui change les emplois du temps. - La mobilité est sujette à de profonds changements, en raison du nouveau maillage territorial : le télétravail limite les voyages pendulaires, mais crée des trajets ponctuels plus longs. La mobilité est plus choisie qu’auparavant, que ce soit dans le but, l’horaire ou la modalité. Les politiques de transports mettent l’accent sur l’articulation des différentes mobilités et cela se ressent dans l’offre de service proposée. Le chômage est assez faible dans ce scénario, en partie dû à une moindre croissance démographique, ainsi qu’à la multiplication de nouveaux modes de contrats. Parallèlement, le pouvoir d’achat augmente, notamment grâce à des loyers moins élevés. La demande de services qui en résulte est très forte, notamment dans les domaines de la culture et des loisirs. Le maillage territorial développe aussi des besoins de consommation de culture et de loisirs en ligne. Quels territoires en 2030 ? Comme nous l’avons vu, le territoire est beaucoup plus maillé : les petites villes sont revitalisées, intégrées dans des aires métropolitaines et intégrant leurs aires rurales. Le scénario ne suppose pas beaucoup d’investissement, car l’essentiel du travail consiste en la remise en état du patrimoine existant. Plutôt qu’un étalement des villes moyennes, les centres villes sont valorisés, quelle que soit l’échelle. Il existe donc un réseau de petites villes, efficacement reliées entre elles par des offres de navettes électriques (qui deviendront autonomes). L’économie rurale connait un phénomène de renaissance : renouveau de l’agroalimentaire de proximité, revitalisation des centres villes de petites villes de province, fabriques locales… La décentralisation du pouvoir politique donne plus de marge aux collectivités territoriales pour encourager ces initiatives. Pour les soutenir, les pouvoirs publics locaux vont proposer un nombre croissant d’offres de services publics, avec une tarification plus dynamique pour assurer sa soutenabilité financière et inciter à des comportements vertueux. Finalement, les métropoles s’adaptent aussi à ce changement, elles gardent une place importante, notamment comme hub des activités à forte dimension technologique, tout en perdant le rôle d’unique pôle de la vie économique et de concentration de la population. Les métropoles profitent de la moindre pression démographique pour donner plus de place aux loisirs et aux mobilités actives. Les sièges sociaux mutent par exemple, en intégrant une dimension hôtelière pour accueillir les salariés qui auraient besoin de ponctuellement se rendre dans les bureaux.
  • 12. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Scénario 2 : L’exode urbain dans un contexte de stagnation économique De 2020 à 2022, la crise a été très dure et la reprise n’a pas vraiment eu lieu. Le chômage s’est massifié, à l’instar des faillites d’entreprises. De nombreux urbains sont partis à la campagne à la recherche d’opportunités économiques que les métropoles ne garantissent plus. Le télétravail est devenu la norme, mais creuse les inégalités, le télétravail ne concerne que les cadres supérieurs. Ces derniers sont les premiers à s’installer la campagne pour profiter d’un peu de calme et de verdure. Pour les autres, l’incertitude est très forte. Le contexte social est explosif alors que les inégalités se creusent. Des plans d’aides publiques sont mis en place, sans arriver à endiguer le mécontentement populaire. Les tensions sociales s’expriment à travers de larges mouvements de contestations, parfois violents. La recherche d’opportunités économiques ou de moyens de subsister, notamment dans le secteur de l’agriculture ou de la sylviculture, est un des moteurs d’un large exode urbain. Il se couple aux aspirations des habitants, à qui les métropoles n’offrent que peu d’emplois ou de loisirs, et qui veulent se rapprocher de la nature. Cet exode massif de la population est incontrôlé par la puissance publique. Les flux de populations, capables de revitaliser démographiquement des territoires délaissés, deviennent donc un enjeu politique pour les collectivités. Cela se traduit par une concurrence dans les aménagements entre les petites villes, qui cherchent à améliorer leur attractivité, notamment à travers une rénovation de leurs réseaux internet, routiers et électriques. Des investissements publics dans la transition écologique, couplés à la mise en place d’une économie grise – facilitée par les nouveaux modes de paiement de pair à pair, arrivent à faire basculer le contexte dans une dynamique de sobriété – énergétique, alimentaire et écologique - subie, mais heureuse. Le climat social s’améliore au fur et à mesure que la transition écologique et la décroissance deviennent la nouvelle normale. Si le chômage reste fort, environ à 20%, la situation s’améliore grâce à un faisceau d’activités non salariées qui permettent d’améliorer les conditions de vie. Les élections locales de 2026 voient des programmes en faveur de l’émergence de clusters locaux et entérine la spécialisation à l’échelle des territoires. Elles s’accompagnent d’une vaste loi de décentralisation qui redonne aux pouvoirs locaux (de l’échelon municipal) une vaste autonomie de décision.
  • 13. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Comment vit-on en 2030 ? Les habitudes ont été profondément affectées, tant par la crise économique que par l’exode vers la campagne d’une grande partie de la population : - Le travail traditionnel est devenu plus rare. Pour les salariés, le télétravail est devenu la norme ainsi que le cumul les activités. Il n’est pas rare d’avoir un potager à vocation alimentaire ou une activité artisanale par exemple. - Les mobilités de courte distance sont privilégiées, de nombreuses pistes cyclables sont installées en centre-ville. Le faible dynamisme économique réduit les déplacements longs de personnes comme de marchandises. Les autoroutes ne sont utiles que pour les biens. - Les habitats sont modifiés, avec plus d’espaces partagés, à l’échelle du quartier : potagers partagés. - Les circuits courts se multiplient, pour réduire les dépenses des ménages, l’économie locale joue un rôle prépondérant. Travailler dans l’économie grise est fréquent. - Une aide alimentaire est apportée à une grande partie de la population dont les fins de mois sont difficiles. Quels territoires en 2030 ? Les territoires sont plus fragmentés, les difficultés économiques rendent difficile la coopération entre les acteurs. Ainsi, chaque ville essaie de redimensionner ses différents réseaux – internet, électriques -pour gérer le report des réseaux professionnels vers les réseaux personnels, en raison tant du télétravail que du chômage massif. Les systèmes énergétiques territoriaux se développent sous l’impulsion d’une gouvernance locale, de manière à gérer les besoins locaux. Les infrastructures routières ont une double pression : besoin de grands axes autoroutiers pour la logistique marchande, tandis que les personnes préfèrent avoir des infrastructures permettant la mixité des modes de déplacements, permettant de relier les petites villes entre elles. L’espace public s’adapte aussi à ces transformations de la mobilité, en limitant drastiquement la place de la voiture, aux profits de mobilités actives. Le grand gagnant de ce scénario est le village, redevenu central dans la vie économique, sociale et culturelle. L’exode massif vers la campagne, combiné à un chômage massif, a favorisé les villages sur les villes moyennes. Ceux-ci permettent des activités telles que l’agriculture vivrière, l’artisanat très local, et les circuits très courts. Les flux de mobilités sont très réorientés entre ces villages, et des besoins d’investissements se font sentir.
  • 14. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Scénario 3 : Face aux ruptures territoriales, le sursaut citoyen La crise économique qu’a créé le confinement n’a pas pu être empêchée par les mesures d’aides publiques. Les plans de relance successifs n’arrivent pas à créer les conditions d’une croissance dynamique et durable. Les faillites d’entreprises se multiplient, les plans sociaux aussi, le chômage explose et le niveau de vie diminue. Le marasme économique n’est qu’à peine enrayé par les investissements publics massifs. Au contraire, ces plans favorisent l’émergence de territoires qui arrivent à tirer leur épingle du jeu et deviennent des pôles économiques, démographiques et politiques. Ils attirent l’essentiel de la population, bien qu’ils n’arrivent pas à fournir assez d’emplois pour tous. La pression créée par le fort chômage empêche l’essor du télétravail. Face à cette crise sans précédent, de nouveaux mouvements sociaux – qualifiés de sursaut citoyen - s’organisent : plus solidaires et très implantés localement, ils permettent de recréer du lien social dans les plus grandes villes. Assez vite, ces mouvements sociaux se transforment en mouvements politiques. Ils prônent une plus forte implication citoyenne dans la démocratie et la gestion locale des problématiques technologiques, économiques et règlementaires. Ces mouvements arrivent en tête des élections de 2026. Assez vite ils obtiennent de l’Etat des concessions massives dans le partage du pouvoir, et s’attachent à relancer les métropoles sur un nouveau modèle. Ce dernier promeut la sobriété heureuse et la résilience. Des tentatives de changer les modèles productifs sont lancées, notamment avec des circuits plus courts et une moindre dépendance aux importations. Certains territoires arrivent à organiser une sobriété heureuse, le reste la subit. Néanmoins ces progrès sont heurtés aux faillites d’entreprises, diminuant les marges d’actions des pouvoirs publics.
  • 15. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Comment vit-on en 2030 ? Le climat est singulièrement tendu : - Il existe une tension entre le désir de fuir les grandes métropoles et l’obligation économique d’y rester. - La polarisation des opinions due à la crise crée de nombreuses tensions politiques, tant sur la scène locale que nationale. - La décroissance subie crée des frustrations dues à la baisse du pouvoir d’achat. Le sursaut citoyen cherche à réduire ces tensions et à créer des conditions durables pour assurer l’avenir. Pour se faire il cherche à impulser des changements dans les modes de vie : - La valorisation des circuits courts, voire de l’autoconsommation alimentaire et énergétique sont centrales - De nouvelles solidarités, notamment dans les domaines de la dépendance, de la santé sont mises en place. Un tissu associatif et citoyen remplace une partie des services publics qui ne sont plus assurés. - L’enjeux est aussi politique, l’implication citoyenne devient une priorité des pouvoirs locaux. La frugalité impose aussi des changements : moins de mobilité, notamment de mobilité à longue distance, moins de consommation, moins de connectivité. Quels territoires en 2030 ? Il existe deux types territoires, complètement séparés : - Les territoires qui arrivent à atténuer les effets de la crise, et qui cherchent à se réinventer. Il peut s’agir notamment des métropoles et technopoles, mais aussi des centres villes de plus petites villes. Ils subissent moins la crise. De ce fait, ils concentrent l’essentiel de la richesse économique mais aussi démographique. Ce sont eux qui voient la naissance des premiers mouvements de sursauts citoyens. Leur sobriété est heureuse et planifiée, grâce à une forte organisation de la société civile. - La vaste majorité des territoires qui subissent la crise, déplorent la faillite de ses entreprises et la fuite de ses cerveaux. La sobriété est subie pour ces habitants, ce qui alimente un certain mécontentement. A noter que cette polarisation n’est pas une binarité entre métropoles et territoires ruraux, mais est transversale : centres villes par rapport aux banlieues, zones industrielles face à des territoires délaissés. Les inégalités d’accès à la mobilité se sont donc accentuées : réduction du nombre de transport en commun, risques de coupures d’énergie… De fait, l’état catastrophique des finances publiques empêche un bon niveau d’investissements dans les infrastructures. Celles-ci sont largement délaissées. Certains acteurs associatifs tentent de pallier ces insuffisances, mais c’est une des principales préoccupations des usagers à ce jour.
  • 16. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Scénario 4 : L’emballement métropolitain Chacun y va de son plan de relance ! L’Union européenne, les Etats, les métropoles : tous investissent massivement, facilités par les taux avantageux d’endettement permis par une politique facilitatrice de la BCE. Les premiers bénéficiaires sont les grandes entreprises, qui représentent un bassin d’emplois très important (23% des emplois français). La croissance repart à la hausse, et le chômage à la baisse. Le confinement n’est qu’un mauvais souvenir, ainsi que la plupart de ses répercussions. Le télétravail n’est jamais devenu la norme. Les grands investissements publics se concentrent en partie dans les nouvelles technologies, le déploiement d’un réseau 5G européen est encouragé. Dès 2021 dans les 10 plus grandes villes françaises. En parallèle, des grands chantiers industriels s’ouvrent pour accélérer la mobilité autonome, la mobilité à hydrogène, l’économie circulaire, l’énergie non carbonée. Ces plans ont une forte composante verte et facilitent aussi certaines relocalisations stratégiques, par exemple dans le domaine de la santé. Les métropoles servent de courroie de transmission aux plans de relance successifs : compétitives, accueillant une population très formée, des centres de recherches de premier plan et disposant d’importantes infrastructures. Ce sont elles qui organisent les réseaux de transports, d’énergie, l’économie locale… En 2024, l’organisation des Jeux Olympiques en Ile-De-France sert autant de vitrine pour les grandes innovations technologiques que de rappel du rôle clé joué par les métropoles. Ces dernières se livrent une concurrence acharnée entre elles pour attirer les investissements et les populations les plus aisées. En 2026, les élections locales voient les métropoles se faire concurrence sur les questions d’écologie locale – mobilité active, végétalisation – mais aussi de santé – investissements technologiques notamment. Les petites villes ne sont pas capables de faire concurrence, bien qu’elles aient tout de même de larges aides publiques, permises par la croissance. La croissance n’évite pas les tensions, et le scénario est prompt à l’emballement social, écologique ou même diplomatique. La crise n’est donc jamais loin ; Les pouvoirs publics ont certes de larges moyens, mais ils font face à un nombre croissant de problèmes potentiels – réchauffement climatique, explosion des inégalités.
  • 17. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Comment vit-on en 2030 ? Ce scénario n’introduit pas de rupture majeure dans les modes de vie, mais accentue plusieurs tendances : - Les déplacements pendulaires, plus nombreux, sont de plus en plus longs. L’augmentation du prix de l’immobilier pousse les urbains à s’installer dans des périphéries sans cesse en expansion. Or le présentiel reste la norme pour un grand nombre de salariés, tant pour des raisons de management que pour les risques psychosociaux que le télétravail peut générer – solitude, sentiment d’abandon, perte de sens… - L’essentiel de ce que l’on consomme provient toujours de chaînes de valeur complexes et internationales. Néanmoins, un accent est mis sur l’aspect écologique de la production, avec l’introduction d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de la zone de libre-échange européenne. - L’exemple asiatique de la gestion de la Covid a normalisé l’usage des données face aux sujets critiques : santé, sécurité… Ainsi il n’est pas rare d’avoir une ou plusieurs applications à l’image de « Stop covid » installée sur son portable. Quels territoires en 2030 ? Le monde d’après ressemble curieusement au monde d’avant. L’immobilier du centre des aires métropolitaines reste inaccessible pour une partie croissante de la population, continuant l’étalement urbain à l’œuvre. Les grandes villes font l’effet de villes forteresses : les villes cherchent à perdre en densité, et multiplient les aménagements pour augmenter la qualité de vie. L’installation d’infrastructures de mobilités actives, au premier plan le vélo, complique l’accès de la ville aux périurbains par la voiture. Les investissements dans les infrastructures de mobilité se concentrent entre les métropoles. Seule exception à ce phénomène, les villes font des politiques volontaristes pour loger les travailleurs essentiels, notamment en favorisant leur accès aux logements sociaux. Ce défi est vital pour que les métropoles restent attractives. Néanmoins, les leviers pour se faire restent flous, et les différentes métropoles tentent différentes innovations : baux emphytéotiques, prêt garantis, la dissociation du foncier et du bâti…
  • 18. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Remerciements Nous tenons à remercier tous les participants pour leur implication lors de cet atelier. A travers cette démarche, l’objectif initial était d’apporter un éclairage dans les prises de décision stratégique que tous doivent prendre dans ce contexte incertain et complexe. La mutualisation des expertises en était l’ingrédient essentiel. La contribution active et constante des participants au cours de ces quatre ateliers a confirmé cette intuition. Maintenons cette dynamique pour partager cette vision et engager des partenariats durables !
  • 19. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International ANNEXES
  • 20. Juillet 2020 Document sous licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International Résultat global de l’évaluation des tendances selon leur impact et leur incertitude par les participants