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Joseph OUAKNINE & Laurent FELS




Cahiers de Poésie 18



          Exemplaire n° 1
    Éditions Joseph Ouaknine
  www.ouaknine.fr — joseph@ouaknine.fr
© Les auteurs de la revue Les Cahiers de Poésie.

Les Cahiers de Poésie
B.P. 84
L-3901 Mondercange

Les auteurs sont eux-mêmes responsables du contenu de leurs
textes.

http://www.poesie-web.eu
contact@poesie-web.eu

juin 2009

ISBN : 978-2-35664-015-4




Éditions Joseph Ouaknine
http ://www.ouaknine.fr

54, rue du Moulin à vent
F-93100 Montreuil-sous-bois
FRANCE


Tél. : (0033) 1 48 70 06 59
Courriel : joseph@ouaknine.fr
PREMIÈRE PARTIE :
ŒUVRES POÉTIQUES




        3
Jean-Robert PAUL
        (USA)
 bobibi1000@hotmail.com




           5
Chant de pierres

l’arbre
avait tant de choses
tant de choses à dire

il a vu tant de roses
tant de roses sourire

une couronne
pour trois personnes
et tout le bonheur
au coeur de la fleur

l’arbre
avait tant de choses
tant de choses à dire

il a vu toutes les roses
toutes les roses mourir




                           7
Livre 18




                       La blessure

je vais tous effacer
mes je t’aime écrits partout
sur les murs de la ville

ton nom
une larme
ta voix
une douleur
mon cœur
la béante blessure

sculpture de marbre rose
souris, souris, souris sans fin
ils pleurent mes derniers mots




                                  8
LES CAHIERS DE POESIE




                        Réincarnation

titanic
se noient
les sabots
de Basquiat

le blues murmure
qu’il faut contre soi
descendre la pente

alors
je descends
descends
descends
vaguement
vers l’abime

tant d’autres en moi
ont déjà fait le plongeon libre
ils ont su refaire surface

saurai-je mon dieu
une fois pour toutes
comment retourner
vers l’autre moi-même ?




                                  9
Livre 18




                     Les airs du mal

bar de l’air
pas de l’heure
Baudelaire
au Bel-Air
défait les chaines
de la peine

bas de laine
robe de reine
une autre ère
le même air
dans la Seine
une mort saine
eau de bois-de-chêne
une mélopée ébène.




                           10
Jacques HERMAN
     (Suisse)
   jcmh@bluewin.ch




         11
Armée silencieuse

La cour de la ferme
Embaume la fragrance
Chaude du fumier
Marie se frotte la panse
Et prépare le café

C’est bientôt l’heure
Où le paysan va rentrer
Il met en marche le tracteur
Le char est plein de foin
On dirait bien
Qu’il va déborder

Mais le chemin de terre
Soudain poudroie
Dans la poussière
On voit
Une armée de soldats
Figés et rutilants
Qui brillent au soleil couchant

Ils ne bougent pas
Comme s’ils étaient vissés au sol
Ancrés
Enracinés à l’instar
Des peupliers
Le long du ruisseau



                               13
Livre 18




C’est une armée silencieuse
Immobile
Qui semble surgie
D’un siècle passé
Le drapeau même ne flotte pas
Malgré le vent

Le paysan fait demi-tour
Rentre chez lui
Par un détour
Plus rassurant




                            14
LES CAHIERS DE POESIE




                   Grains de temps

J’ai rempli de grains de temps
Un ancien pot de confiture
Et dans l’ombre j’attends
Qu’en surgisse une image
Un fantôme
Un relent du passé
Un signe du futur

L’heure tourne
Sur le cadran
Mais les grains dans le pot
Demeurent

Une fille surgie
D’un tableau de Balthus
Passe à côté de moi
Sourit vaguement
Ne manifeste
Aucun étonnement

Devrais-je fermer le bocal
L’étiqueter
Ajouter sur le couvercle
Attention danger

Le soir commence à tomber
J’ai l’intention d’allumer



                                 15
Livre 18




La lampe à pétrole
J’hésite
Je renonce finalement
Je m’en vais
Grains de temps
Je vous quitte
Ni contraint
Ni forcé




                        16
LES CAHIERS DE POESIE




         Le combat du jour et de la nuit

Samedi soir à l’issue du combat
Quotidien du jour et de la nuit
J’ai ramassé le corps du perdant
Que j’ai ramené chez lui

Le jour vaincu
Fait toujours triste mine
Morne et gris
Et sombre et grave infiniment
Il jalouse alors des nuits
Les méandres festifs
Aux contours indécis
Et les féeries d’étoiles

Précautionneusement
Je l’ai couché
Sur son lit défait
J’ai fermé les rideaux
Et j’ai levé les voiles




                              17
Livre 18




                         Sacrifice

Je me suis trompé de pinceau
Il n’est pas assez large
Pour repeindre le ciel
Et la couleur ne convient pas non plus
C’est un bleu-vert artificiel

Mais qu’importe après tout
Si je te porte aux nues
Comme on présente l’animal
A bout de bras
Pour un rite sacrificiel

Ô Dieu
Que la victime te plaise
Il me faut de vives braises
Qu’on m’allume le feu




                              18
Üzeyir Lokman ÇAYCI
            (France)
         uzeyir.cayci@free.fr
http://www.artepoetica.net/CAYCI.htm




                19
LES CAHIERS DE POESIE




Yine üstündeyim geçmişin

           Hazır gelmişken
   « Seni uzaktan göreyim » dedim

        Farklı yerlerde değilim
      Yine üstündeyim geçmişin

   Seninle birlikte olduğum anlar
 Hiç gitmiyor gözlerimin önünden…
           Anılar bulvarında
    Ayrılık şarkıları titretiyor içimi
  Sevda şiirleri çok dokunuyor bana
 Yaklaştıkça uzaklaşıyorum senden.

        Farklı yerlerde değilim
      Yine üstündeyim geçmişin

            Sokaklar ıssız
     Renkler farklı görünüyor…
Denizin durgunluğunda kayboluyorum
Senli duygular yalnız bırakmıyor beni.

        Farklı yerlerde değilim
      Yine üstündeyim geçmişin

          Hazır gelmişken
   «Seni uzaktan göreyim » dedim
     İçimde yağmur yağıyor yine



                  21
Livre 18




           Bakışlarım boşluğa düşüyor
             Düşlerimde üşüyorum.

             Farklı yerlerde değilim
           Yine üstündeyim geçmişin.

            Üzeyir Lokman ÇAYCI
             İstanbul, 21.10.1990




                      22
LES CAHIERS DE POESIE




         Je suis encore sur le passé

                     Puisque je suis là
           J’ai eu envie «de te voir à distance»

         Je ne suis pas à des endroits différents
                Je suis encore sur le passé

           Les moments que j’ai passés avec toi
            Sont toujours devant mes yeux…
                Au boulevard des souvenirs
       Les chansons de séparation me font vibrer
        Je suis trop sensible aux poèmes d’amour
       A force de m’approcher je m’éloigne de toi.

         Je ne suis pas à des endroits différents
                Je suis encore sur le passé

                 Les rues sont désertes
            Les couleurs semblent autres …
         Je me perds dans la quiétude de la mer
Les sentiments qui te contiennent ne me laissent pas seul.

         Je ne suis pas à des endroits différents
                Je suis encore sur le passé

                     Puisque je suis là
           J’ai eu envie «de te voir à distance »
           Il pleut encore en mon for intérieur



                            23
Livre 18




             Mes regards tombent dans le vide
                J’ai froid dans mes rêves.

           Je ne suis pas à des endroits différents
                 Je suis encore sur le passé.

                Üzeyir Lokman ÇAYCI
                 İstanbul, le 21.10.1990
           Traduit du turc par Yakup YURT ©
                 Bruxelles, le 09.05.2007




                             24
LES CAHIERS DE POESIE




  I am still hovering over the past

                 Since I am there
           I wanted «to see you remote»

        I am not in other, different places
         I am still hovering over the past

     The moments in which we crossed paths
        Are always in front of my eyes…
         On the boulevard of memories
     The songs of separation make me vibrate
      I am hypersensitive to poems of love
     By approaching myself I move from you

        I am not in other, different places
         I am still hovering over the past

               Streets are uninhabited
            Colours seem inaccurate …
        I get lost in the calmness of the sea
The feelings that contain you do not leave me alone

        I am not in other, different places
         I am still hovering over the past

                   Since I am there
          I wanted «to see you remote»
          It is still raining within me for



                         25
Livre 18




                     My looks fall in space
                    I am cold in my dreams

               I am not in other, different places
                I am still hovering over the past

                   by Uzeyir Lokman CAYCI
                      İstanbul, 21.10.1990
            Traduit par by Yakup YURT en français
                    Bruxelles, le 09.05.2007
       French free verse translated into English free verse
                     by Joneve McCormick
                           11.05.2007




                               26
Jean SAINT-VIL
       (Haïti)
 jeanssaint_vil@yahoo.fr




           27
De rire je veux mourir

De rire je veux mourir,
- Ça ne prête point à rire,
Que veux-tu ? C’est mon vœu -
Riant, gesticulant, chantant
Dans un coquerico
De chanteur d’opéra
Comme Pavarotti
Dans le conte d’Hoffmann d’Offenbach.
De rire je veux mourir,
Fou de rire comme au théâtre,
Riant, m’esclaffant, m’éclatant
Comme un fou qui se défoule
Et qui s’en fout de tout,
Même si mon cœur éclate
Dans un rire au long cours
Qui bat tous les records
De tous les rires des hommes.
De rire je veux mourir
Au sommet de l’art de rire
Pour rire de ce qui fait rire
Dans mon état de rire
A un cheveu de la mort.
De rire je veux mourir
D’un rire larme de joie,
Qui appellent rires et pleurs,
Comme une larme de fond,


                           29
Livre 18




A tous les yeux qui pleurent
En chœur comme quand on chante,
Élevant mon âme aux cieux.
De rire je veux mourir,
D’un rire coup de boomerang
Heureux de prendre son temps,
Le temps de faire des siennes
Et de faire rire à mort.
De rire je veux mourir,
D’un rire qui creuse ma tombe
Au sein d’une fosse commune
Et qui enfonce un clou
Qui blesse et qui transperce
Toute une nuit de rires.
De rire je veux mourir,
D’un rire au bord des larmes,
D’un apprenti sorcier
Qui, de ses crocs pointus,
Me prend sec en tenailles
Dans une gaieté subite.
D’un rire qui, à la mort,
Ne rira qu’aux éclats,
Croyant rire à la vie
Pour vivre plus heureux.
D’un rire tragi-comique
Qui joue le jeu du rire
Par le fait d’un comédien
Qui ne vit que de rires
Par ses mots et ses gestes.
D’un rire plus sournois
Que mon rire habituel



                         30
LES CAHIERS DE POESIE




Et qui pour une fois a juré
De ne pas rigoler
Avec le rieur que je suis
Qui joue depuis des lustres
Comme un adolescent
Avec le feu du rire.
D’un rire hirsute comme les poils
D’un fauve fou de colère
Et qui, de ses griffes acérées,
Vous passe à l’infinitif.
D’un rire qui fait rire
Tout le monde à la ronde,
Prenant sur tous les tons
Tous les temps musicaux
Sans le temps d’une pause,
Ni le temps d’un soupir
Jusqu’au dernier soupir.
D’un rire multi vitesses
Du genre vélo de course
Qui, subitement,
Me prend de vitesse
Tout en montant d’un cran
Toutes les microsecondes
Au top de la vitesse
Du délire de rire.
D’un rire fou comme un fou
Qui a perdu le nord
Et qui erre en zigzag
Sur le terrain glissant
Des accidents mortels
Qui ne finissent d’autre manière



                             31
Livre 18




Qu’en queue de poisson pilote.
D’un rire qui hausse le ton
Rien qu’en un laps de temps,
Perdant toutes les pédales
Comme un engin de mort
Et qui sur son passage,
Lamine tout ce qu’il trouve
D’un rire fleuve aux freins lâches,
Plongeant vers une falaise
Qui mène tout droit au but,
Sinon au cul-de-sac
Des entrailles de la terre.
D’un rire au bord du gouffre
Fort dans ses ralentis,
Habile dans ses coups de gueule,
Casse-cou dans les virages,
Casse-gueule aux escaliers,
Casse-tête aux coins des rues.
D’un rire au bruit d’enfer
Sur fond de verres en miettes,
Comme un œuf de poule frais
Tombant du haut des cieux
Ou du centième étage
D’un gratte-ciel délabré
Plein de lumpenprolétaires,
Sans le sou au réveil.
D’un rire coup de hache,
Creusant profondément
Mes rides dilatées
Par l’effet d’une blague
Comme un grand coup de foudre



                               32
LES CAHIERS DE POESIE




Soulevant l’hilarité
De toute une foule en liesse.
D’un rire bien délicat,
Sur le rythme délirant
D’une contagion subite
Comme une rage de rire.
D’un rire du genre couvercle
Chapeautant de son éclat
L’ensemble des autres rires
Noyés dans des torrents
Drainant sur les rives de leurs lits
Des crues de tous les dangers
Comme pour prédire ma mort
Dans une attaque foudroyante
Qui ne dit pas son nom.
D’un rire chant de cygne
De ma manie de rire
Et de mon équanimité
Et qui, d’un coup d’éclat,
Donne le coup de grâce
Qui met fin à mes rires.
D’un rire plus que grotesque
Qui se résout dans l’instant
D’un simple coup de théâtre
Comme une courte équation
Au tout premier degré
Avec pour inconnue
La mort au bout d’une crise
De rire irréversible,
Très lourd de conséquences,
Et à la clé, le temps d’une dernière grimace,



                               33
Livre 18




Ou plutôt d’un sourire
Sans le temps de dire au revoir,
Sous le signe risible
D’un rire de débile.




                              34
Claude AMMANN
       (France)
 claude.ammann@wanadoo.fr




            35
Homéopathie

Il suffirait d’un rien
ou de si peu de choses
pour qu’un jour l’on soit bien
et plus jamais moroses
en s’obligeant enfin
à savourer la vie
à très petites doses.

Pour notre quotidien
juste un menu fretin
quelques miettes de pain
deux trois gouttes de vin
quatre grammes de miel
une pincée de sel.

Sur un soupçon de pluie

quelques rais de lumière
le souffle des bougies
au clin de tes paupières
et mieux qu’un flot de larmes
les perles d’un sourire.

Pour fleurir notre vie
un seul brin de muguet
pour d’infimes plaisirs
simplement mordiller



                                 37
Livre 18




le lobe d’une oreille
l’esquisse d’un orteil
ou le bouton d’un sein.

Oublier nos ripailles
et pour se réchauffer
deux trois fétus de paille
et de ténus brandons
pour une vie à deux
s’aimer à petit feu…

Pour les jours de gala
faire voler en éclats
quelques fragments d’émail
un rayon du soleil
jeté sur un vitrail
l’univers en parcelles
et la vie en tesselles.

Pour conquérir le monde
il faut une seconde
un zeste de folie
trois grains de poésie

deux ou trois mots très courts
et pas de long discours
un filet de ma voix
quelques bouchées de toi
et deux gorgées d’amour.




                             38
LES CAHIERS DE POESIE




                  Le bonheur absolu

Des pas feutrés menus
qui progressent sans bruit,
les design courbures
d’une albe silhouette,
brusque sursaut des reins
à l’assaut imprévu
d’une douce caresse,
tu danses
et te balances
aux portes de la nuit,
le corps en équilibre
sur les toits du silence.

Coquetteries, minauderies,
habiles entrechats,
appuis sur pattes de velours,
salto agile,
siège en souverain de la couette,
vibrisses en éveil,
et muscles au repos,
fourrure épaisse de ton dos
où j’enfouis mes dix doigts.

Oreiller de tendresse,
boulochant, duveteux,
blotti tout contre moi
bien calé, si câlin,



                              39
Livre 18




lové contre mon sein
que par jeu amoureux
tu écorches ou mordilles
de tes ardeurs félines.

Compagnon exclusif
d’une seule maîtresse,
plus heureuse avec toi
qu’avec n’importe qui,
comme un joyeux ermite,
promenant, solitaire,
ma vie en chattemites,
réchauffée au grand feu
de tes deux soleils verts.




                             40
LES CAHIERS DE POESIE




            Le dernier voyage d’Alice

Lorsqu’ Alice aura brisé
tous ses miroirs
et fait voler avec eux
en éclats
chaque parcelle,
chaque petit morceau
de ses plus beaux
rêves d’enfance,
elle comprendra qu’il est
venu peut-être
le temps pour elle
de préparer
ses bagages
pour une autre aventure,
pour un nouveau voyage,
tout aussi exaltant,
tout aussi mystérieux,
tout aussi merveilleux,
sans doute,

mais surtout plus long,
bien plus long,
O oui, beaucoup plus long
que le premier.




                            41
Livre 18




                  Métisse

             Métisse, O ma métisse
           aux rondeurs pain d’épices
                   je te mords
                  et te croque
               à petites bouchées.
             Métisse, O ma métisse
             aux saveurs de réglisse
                   je te goûte
                    et te bois
               à petites gorgées.
             Métisse, O ma métisse
             aux senteurs de la mer
                    je te lèche
                   et me noie
             au sel de tes mystères.
             Métisse, O ma métisse
             aux baisers de grenade
                  je me perds
                  dans les plis
              de ta toison de jade.
             Métisse, O ma métisse
            quand je force ton corps
                     au nid de
                    tes délices
            je suis un homme mort.


                       42
Marie CHEVALIER
      (France)
   marieded@orange.fr




          43
Saturation

     Il aurait suffi de quelques mots
  En toute simplicité, en toute confiance
         Pour que je crois en elle.
           Hélas, elle m’a menti,
           Trahi mes espérances.
         Je ne pardonnerai jamais,
  Ce serait trop beau, trop lâche aussi ?
    Elle aurait le droit de m’insulter ?
   Elle aurait le droit de me faire mal ?
   Elle aurait le droit d’en rire et moi ?
         J’aurai celui de me taire ?

Je me rebelle, je crie, je hurle, je lui fais peur

 Est-ce ainsi qu’elle finira par m’écouter ?
        Parce qu’elle me craindra ?
     Qu’elle craindra ma main levée ?
           Non je ne le veux pas
      J’en ai eu envie parfois certes
    Mais pourquoi m’abaisser si bas ?
       C’est ma femme et je l’aime
   Même si verbalement je la brutalise
       Mais ce que je crains parfois
     Est que je ne puisse plus retenir
       Cette envie qui me tenaille :
        Faire de notre amour fini,
           Un champ de bataille
         Où le meilleur gagnera…


                       45
Livre 18




             Le   chagrin de Madeleine

                Le ciel était très mouvant,
               Les nuages couraient très vite
            Madeleine regardait, la tête en arrière.
                  Et donnait des formes :

                   On dirait un chapeau !
                   On dirait des sucettes !
                   On dirait des moutons !
                   On dirait des oiseaux !

            Madeleine, sais-tu qu’il va pleuvoir ?
               Lui demanda sa mère inquiète.
           Non non ! Ils sont trop beaux et blancs !
                Ils vont noircir tu vas voir !
                  Et il fera bien plus noir,
                C’est ainsi que naît la pluie.

                 Non non, répéta Madeleine,
                       Prête à sangloter
                 Non non, ils sont trop beaux
               Ils ne peuvent devenir de l’eau !
                        C’est pas juste !

                     Et à ce moment-là
                   Une goutte dans son œil
                  Tomba et sur sa joue glissa
                   Sa mère ne saura jamais



                              46
LES CAHIERS DE POESIE




 S’il s’agissait de la pluie
Ou d’un chagrin incompris
Elle fit rentrer Madeleine
  Avant que les gouttes
      Goutte à goutte
Viennent mouiller le cœur
       De Madeleine




            47
Marie-Claude MARTY
           (France)
  marty.marie_claude@aliceadsl.fr




                49
C’était une rivière…

   Aussi loin que me porte
   Mes souvenirs d’enfance,
    Elle se nichait au cœur
  De chacun, avec bonheur,
  Dans toute sa bienveillance.

   Son clapotis m’enchantait
  Quand, en parfaite harmonie
   Avec elle, elle m’entraînait,
  Par le murmure de son cours
  Dans une totale symphonie.

   Mais quand je la retrouvais
  En pleine nature, à sa source,
      Elle n’était que furie,
    Plus sauvage que jamais,
    Et pleine de ressources.

 Elle était source d’allégresse,
  Et souvent nous y pêchions
   La truite et le menu fretin
Que nous mangions sans tristesse
   À la fin de chaque matin.

 Cette rivière, un jour de brume
     Disparue de ce village,
     Enfouie sous les pavés



               51
Livre 18




             D’une route de bitume
            Qui lui servit de plombage !

                Il faut aller bien loin
               Pour la voir, en vision,
               Joyeuse et malicieuse,
              Se riant de sa condition
           De prisonnière… des voitures !




                        52
LES CAHIERS DE POESIE




       Mélancolie

  Il ne reste que ton absence,
   Trop réelle, et mes appels
 Se perdent dans ma démence,
   Et dans la nuit des temps,
      Et je pleure sur nous.

  Parfois, j’ai envie de crier,
Souvent, j’aimerais tout arrêter,
     M’envoler très loin,
    Sur une autre galaxie,
 Te chercher et te retrouver.

  Ce vide qui s’est installé,
  Ce manque de ton amour
   Au creux de mon être,
 M’accompagne chaque jour,
  A pris possession de moi

 Comme un objet trop acquis.
Cette tristesse qui me recouvre
 M’enveloppe de noirs destins,
 Chassant le soleil de l’horizon
Et voilant ma vue à tout jamais.




               53
Livre 18




                 Murmure

               Murmure du vent
            Qui me porte en écho,
             Envers et par devant
              La rumeur du jour,
           Cette voix, pleine d’amour
             Parmi les coquelicots.

            Murmure d’une source
            Qui jaillit de nulle part
              Et qui éclabousse,
             Étincelante au soleil,
            Le temps d’un réveil,
              Les arbustes épars.

               Murmure de vie
               En fond de toile,
               Dans cette survie,
                Et qui scintille,
               Et qui fourmille
               De mille étoiles !




                       54
Guy CREQUIE
     (France)
guy.crequie@wanadoo.fr




         55
Hommage à l’amour

                                           Gerbe de poèmes courts

La femme aimée
Est celle pour laquelle
Être homme
Est un effort sans fin…

                       L’amour est une tragédie
                       C’est toute l’existence accomplie

Tous les rêves d’humanité
S’accomplissent
Dans une perspective
D’homme ou de femme

                       Le désir du désir de l’autre
                       Fait frissonner les corps
                       Et vibrer les cœurs.

La luciole qui tourbillonne
Dans le ciel du matin
Interroge la question
Du pourquoi aimer ici
Les affres de la vie.




                              57
Livre 18




Amour
Est gravé à jamais
Ton empreinte d’existence
le temps d’un soupir
Et d’un chant balbutié

                      Mélodie de l’amour
                      Comme le temps d’une valse
                      Dont l’harmonie scellait
                      Des corps soudés
                      Que Piaf aurait aimés.




                            58
LES CAHIERS DE POESIE




                Homage to the love

                                              Stack short poems
The loved woman
Is that for which
To be man
Is an effort without end…

                      The love is a tragedy
                      It is all the accomplished existence

All dreams of humanity
Achieve themselves
From the point of view
Of man or woman

                      The desire of the desire of the other
                      Made shiver the bodies
                      And to vibrate the hearts.

The firefly which whirls
In the sky of the morning
Question the question
Why like here
Pangs of the life.




                            59
Livre 18




Love
Is engraved forever
Your print of existence
the time of a sigh
And of a stammered song

                    Melody of the love
                    Like the time of a waltz
                    Whose harmony sealed
                    Welded bodies
                    That Piaf would have liked.




                          60
LES CAHIERS DE POESIE




                 Homenaje al amor

                                         Gavilla de poemas cortos

La mujer gustada
Es la para la cual
Ser hombre
Es un esfuerzo sin final…

                       El amor es una tragedia
                       Es toda la existencia realizada

Todos los sueños de humanidad
Se realizan
En una perspectiva
Hombre o mujer

                       El deseo del deseo del otro hace
                       Temblar los cuerpos
                       Y vibrar los corazones.

La luciérnaga que se arremolina
En el cielo de la mañana
Pregunta la cuestión
De porqué gustar aquí
El tormento de la vida.




                             61
Livre 18




Amor
Se graba a nunca
Tu impresión de existencia
el tiempo de un suspiro
Y de un borde balbuceado

                      Melodía del amor
                      Como el tiempo de un vals
                      La que armonía sellaba
                      Cuerpos soldados con autógena
                      Que Piaf habrían gustado.




                             62
Saint-John KAUSS
        (Haïti)
 johnnelson57@hotmail.com




           63
Gestuelle

                                                    à Roland Morisseau
                                                       Serge Legagneur

                                                 à Jean-Richard Laforest


  « Au- delà de la glace, du nord, de la mort, notre vie, notre bonheur. »
                                                 (Rainer Maria Rilke)


compagnons de la grande rivière du nord
compagnons qui s’éveillent dans la tristesse des oiselles en
poèmes

que la marche soit lente
mais que le décompte de notre pain quotidien
soit à la mesure du cri et de l’enfant qui a faim


compagnons de la grande muraille que j’éprouve dans mes
poèmes
voix de haute haleine attachées à nos souvenirs
visages d’habiles pourvoyeurs de mots fragiles à chaque
visitation
jeunes radoteurs toujours présents au rendez-vous des
poèmes
comme au premier jour de la naissance de l’aîné des poètes



                                  65
Livre 18




je vous salue comme à la première neige
comme au premier sourire de l’enfant à peine né
je vous salue entre les gros mots et le bonheur
de nos fillettes qui se refusent au silence
je vous salue avec les mêmes mots maigres d’un petit matin à
perte d’ennui
là où habitent pécheurs et sentinelles de la garde des mots
qui n’apprivoisent que les syllabes de notre premier cri
de notre chair depuis belle lurette mise aux enchères
que saurais-je de la terre que j’embrasse dans ses tours
parallèles

vous avez ouvert la voie à la caravane des mots
des maux d’une terre mystérieuse de paradoxes et d’espoirs
vous nous avez montré du doigt le désert de Gobi
et ses squelettes et tous ces morts réconciliés dans la nuit
ces oiseaux-dinosaures ces carnivores mécontents de leur sort
en somme tous ces manuscrits délaissés aux entrepôts de
l’Histoire

le temps est insondable et les poètes
des voyants de haute lice comme à la fin d’une phrase
fieffés navigateurs d’eau douce dans la vallée des syllabes
fiers croisés dans le ventre du lexique
illuminés et rassembleurs d’étoiles pour la révolte
des sangs mêlés

vous qui avez léché le souffle des grandes caravelles
vous qui donnez dans le silence des longs murmures aux
jupes des primevères
dans le rêve et dans la nostalgie des fruits défendus
vous suaires des petitesses et des espérances muettes



                               66
LES CAHIERS DE POESIE




qui dites la faim des fossiles parmi les fous
vous pirates pauvres et coupables des fausses accusations sur
les lèvres
qui rappelez Homère dans sa souffrance et dans sa fidélité à
l’écriture
vous ramasseurs de parchemins et de blessures
quel destin que de renouer les mailles de la solitude parmi les
hommes


la vie est une garce et les poètes
glyphes de la divination
grimoires aux alphabets façonnés de crucifiés
voyants des voyelles atomisées sur une page d’histoire
jusqu’à l’usure des embruns de chaque cauchemar sédentaire

fut-ce le temps des grandes découvertes de ballades
d’odes et d’élégies spontanés pour les beaux yeux de l’aimée

ô grève des hommes et de la terre sauvages
inflexibles sous la crue de l’amande éphémère
mais pardonnés au ressac des pierres que l’on ignore

je vous salue de nouveau
Ô poètes de la liberté et de la garde des mots
frères indubitables modèles
pour la quête à la joie
et à l’ivresse des lendemains


que reste-t-il à écrire
après nous avoir ouvert les chemins de l’indolence
la grande route des alphabets jusqu’aux vêtures des saisons



                              67
Livre 18




que reste-t-il à promettre
avec la fidélité des mots et l’acharnement du bouleau
sinon les rues de notre enfance
les doigts de nos amours
les folies de nos paupières et de nos baisers partagés

le temps est indomptable et les poètes
comme des enfants aux semelles de l’exil
où je chasse la femme
l’unique désirée de cette aire énorme
l’exil de mon enfance et de mon adolescence
parmi des hommes de première main
avec les mêmes blessures et les mêmes interrogations
de crucifiés et de chasseurs de maux dans la foule
des témoins

que passent nos chemins de songes       la nuit et les poètes


                                             Repentigny, été 2002




                              68
LES CAHIERS DE POESIE




                             Motifs


                                            à Magloire Saint-Aude

                                          « Je ne crois pas; je sais. »
                                                         (Carl Jung)

ne puis-je croire que je sais
le nom des mots à la belle syllabe
la superficie du silence et de l’étoile
polaire

juste pour une seule fois
ne puis-je croire à la géographie du poème
des lieux et aux saisons des hommes
des promesses si lointaines et aux souvenirs d’enfant
quoique pour une seule fois
le battement des artères s’achève sur le néant
dans la solitude des hommes une fois seuls
avec le cœur bien trop négligé

aux dialogues des poètes interdits
parias à chaque évolution des mots
à chaque imposition des femmes qui pleurent
après la pluie

ne suis-je pas né de la complicité
des hommes et des femmes de la frontière
qu’on assassine



                                 69
Livre 18




d’un homme et d’une femme amoureux éternels
qui ont embrassé dans la joie
tous les péchés originaux
ô jours bienheureux dans la chair

Ô chair bienheureuse des motifs du poème
des dialogues et promesses inscrites dans la mélasse
et le mot de cœur du poète
condamné à errer dans les rues de la ville
la plus grande rue des ordures
Ô paria étonné qui fit sangloter l’algue

nous sommes tous déchus de nos villes endormies
lacunaires aux pas des nymphes émerveillées
nous sommes des enfants au cœur frais
des poètes aux mains larges de promesses
mais nous sommes habités par nos joies
nos amours sans cesse à recommencer

ne puis-je donc croire que je sais
le nom de la rose folle des mots
la géographie du silence
et quelques poèmes au faîte du désespoir
Ô Poésie belle à triompher

juste pour une seule fois
dialogues d’hommes libres et d’assistés
requêtes devinées d’homme seul avec la page
des pages inscrites au van de la félicité


de ce dialogue avec le poète
paria étonnant et sympathique



                              70
LES CAHIERS DE POESIE




qui fit pleurer l’algue et la mer
quoique pour une seule fois
à l’embauchement d’un cœur qui bat
je te célèbre
frère dans les mots
et de la paix
Ô Poète qu’on lit sous la pluie
dans la plus haute tendresse
et dans le plus grand silence

Port-au-Prince, 16 juillet 2001




                              71
Gilles BIZIEN
      (France)
gilles.bizien@wanadoo.fr




          73
Dix de cœur

1.
tu me dois le silence le repos
il y a encore des tremblements
sur la mer
aussi au travers des yeux
une entrée un passage
à la façon d’une frontière émiettée
nous ressemblons aux arbres d’hiver
la certitude égarée hors de nous
laisser le monde à ses viscères fumantes
puisque seul t’intéressent les astres glacés
initiaux.


2.
qui
largue le ciel
désormais
avec la force la certitude initiale
chauffante comme un feu
on dit
que quelqu’un écoute
sous la masse des eaux
sur les routes bleues des profondeurs



                                 75
Livre 18




quelqu’un écoute les fleurs marginales
et la part joyeuse de nos silences.


3.
lèvres fleuve
nous
troncs de chair
jeu avec la vase
le sort
approche retourne
liens comme e n t r a v e
la boue
lune
ce crochet d’ivoire
pour la gorge.


4.
résidence de la blancheur
ivoire de l’œil
est-ce toi
que je retrouve
à l’image d’une brume
sous la surface rose
du pétale
pourquoi justifier du désert
sur l’océan des yeux.




                               76
LES CAHIERS DE POESIE




5.
écho à la nuit
ton amplitude
soulève l’horizon
comme peut se soulever le cœur
ou l’écorce de lumière
cri
cage de cristal
main printemps
sur la plage du front
tu te promets
le volcan
le feu
l’inexactitude
alors que réduisent
l’instant et la peau.


6.
danse
sur la fleur noire
du monde
adonne-toi
au pétale
au fleuve horizon
à la renverse
des couleurs et des soleils
équilibre perdu
frôlement



                              77
Livre 18




contre l’écumoire immense
ressac étoilé
sur la rosée des jours.


8.
petitesse
insignifiance
ma taille est celle d’un grain
d’une perle
à l’extrémité du firmament
front intouché
sans brume
sans neige ou particule bleue
assures-tu encore mes pas
corde d’or
filin d’amour
fleur froide.


9.
mains safranées
de la poésie
regard
presque le monde
sueur
sang
mince mélancolie des astres



                                 78
LES CAHIERS DE POESIE




est-ce possible
(le cœur comme une jade bleue)
de vivre sans révolte
sans le savoir sensible du sable.


10.
la pluie remplace le corps
ce gris intime
familier
qui perce en toi plus loin que le rayon
larmes ou papillons bleus idem
quand tu dis
que les fleuves naissent des sanglots
sur le sable noir de l’amour
ta maison
est fichée sur une colline incolore
ton esprit s’y love comme un félin éternel
l’océan entre par tes yeux
et rampe jusqu’à ton cœur.




                               79
Luc TRIQUELL
    (France)
  atriquell@aol.com




         81
Nuage




               Une nuée de rêves
                      à la limite
  rarement il n’aura été celui qu’on éprouvait
                l’absence souvent
                    se tenir droit
devant l’éclat du monde qui chavire sans doute
              rarement tu paraîtras
              aussi belle qu’un jour
                à la limite du rêve
                   qu’on redoute




                     83
Livre 18




                    Cauchemar 1




éparpillés les belles amourettes à la brume des vies là où
semble s’éteindre la plus sombre des lumières où le ciel
cohabite avec son fatras d’étoiles
ne reste que le réel pas toujours propre pas toujours
supportable le réel
réel réel réel réel…..
une luciole déjà me fait tourner la tête
lucidité qui nous quitte
dans la nuit tu recherches l’amour
irréel irréel irréel irréel…
mais
          laisse moi crier




                           84
LES CAHIERS DE POESIE




                         fuite




   visite furtive tonnes de délires prières firmaments le
dimanche tous ensemble à retrouver son blog cosmique très
                          comique
      il y a longtemps qu’ils ont mis une croix dessus




                           85
Livre 18




                        Chanson




Tu ne peux qu’aboyer la maudite chanson du désespoir sous
l’oreiller un soir peut-être tu murmureras un cri peut-être
l’espoir qui renaîtra aboyer pourquoi ameuter les loups des
quartiers qui résonnent abreuver ton esprit malade et pétri
de petits cris
gémissements qui fusillent le plus innocent des enfants qu’on
occit.




                             86
Françoise Marie BERNARD
               (France)
         Paquita151965@aol.com
 www.geocities.com/poemasesmeralda/Entree




                   87
Pour toi esclave noir…

Une voix est montée
Depuis des temps historiques,
Pour rappeler au monde hébété
Que l’espoir est magnifique…
Une lueur merveilleuse
Que l’on voudrait éternelle
Est venue éclairer ; lumineuse ;
Le chemin d’un être fraternel…
C’est un peu comme une vengeance
De l’Histoire sur le passé,
C’est un peu comme une bienveillance
Du hasard sur le racisme qu’on veut tuer !
Pour toi Esclave de jadis,
Une étincelle de bonheur
A brillé au pays de tes malheurs,
Et ton âme a souri.
Tout un peuple en liesse
Longtemps méprisé
Verra peut-être sa noblesse
D’esprit enrichir la société…
Pour toi Esclave déraciné,
Une nouvelle ère est née
Pour qu’enfin grandisse la flamme
Pour la Paix des Êtres et le silence des armes…



                                89
Livre 18




              Para ti, esclavo negro…

Una voz ha subido
Desde tiempos históricos,
Para recordar al mundo embrutecido
Que la esperanza es magnifica…
Una luz maravillosa
Que se quisiera eterna
Ha venido aclarar; luminosa;
El rumbo de un ser fraternal…
¡Es un poco como una venganza
De la Historia sobre el pasado!
¡Es un poco como una benevolencia
Del azar sobre el racismo que se quiere matar!
Para ti, Esclavo de antaño,
Una chispa de felicidad
Ha brillado en el país de tus desgracias,
Y tu alma ha sonreído…
Todo un pueblo entusiasmado
Por mucho tiempo menospreciado
Verá tal vez su nobleza
De espíritu enriquecer la sociedad…
Para ti, Esclavo desarraigado,
Una nueva era ha nacido
Para que, por fin, crezca la llama
Para la Paz de los seres y el silencio de las armas…



                               90
LES CAHIERS DE POESIE




              Les mains du mensonge

Il y a des gens en Occident
Qui osent serrer la main
De tueurs d’Humanité
Sans se soucier du lendemain !…

Comment peut-on accepter
De commercer avec des esclavagistes
Assassinant leur propre société
En brouillant les pistes ?

Afrique ! Belle Afrique !
Réveille-toi !
Tes enfants pris de panique
Ont peur de toi !…

Tu as engendré des monstres faits de violence,
De haine et de pouvoir,
Ne pensant qu’à piller l’abondance
De ton sol pour être des pantins noirs !!!

Tout se sait un jour
Et aujourd’hui il faut parler
De ce manque d’amour
Qui ne sait que tuer !

L’Histoire est faite de bains de sang,
L’esclavagisme occidental n’est plus



                                91
Livre 18




Mais je sais qu’il existe encore, bien vivant
Dans tes contrées où la vie ne vit plus !

Les gouvernants de cette planète
Signent des pactes avec le diable
Pour quelques barils de pétrole ; bête
Sournoise et aveuglante ; monnayable !!!

Pauvres Humains innocents
Qui ne demandez qu’à vivre en paix,
On vous tient sous l’effusion de sang,
Les tortures et le manque de respect.

Où sont passés les Droits de l’Homme ?
N’avez-vous pas le droit de vous exprimer ?
Pourquoi tant de haine dans cette région du monde ?
Pourquoi ne fait-on rien pour tout arrêter ?

Et vous, Messieurs les Grands de ce Monde,
Comment pouvez-vous fermer les yeux si facilement
Sur des horreurs que vous connaissez ? Féconde
Est la richesse couleur torture teintée de sang !!!




                               92
LES CAHIERS DE POESIE




             Las manos de la mantira

¡Hay gente de Occidente
Que osa estrechar la mano
De asesinos de Humanidad
Sin preocuparse del mañana!

¿Cómo se puede aceptar
Comerciar con esclavistas
Asesinando su propia sociedad
Despistando la realidad?

¡África! ¡Bella África!
¡Despiértate!
¡Tus hijos, tomado por el pavor,
Tienen miedo de ti!

¡Tú, engendras monstruos hechos de violencia,
De odio y de poder,
Pensando sólo en saquear la abundancia
De tu suelo para ser títeres negros!!!

¡Todo se sabe un día
Y hoy hay que hablar
De esta falta de amor
Que sólo sabe matar!

La Historia está hecha de baños de sangre ;
El esclavagismo occidental no está más,



                              93
Livre 18




¡Pero se muy bien que todavía existe aún, bien vivo
En tus comarcas donde la vida no vive más!

¡Los gobernantes de este planeta
Firman pactos con el diablo
Por algunos barriles de petróleo; bestia
Hipócrita y deslumbradora; acuñable!!!

¡Pobres humanos inocentes
Que sólo piden vivir en paz,
Se los tienen bajo el derramamiento de sangre,
Torturas innobles y falta de respeto!

¿Dónde están pasados los Derechos del Ser Humano?
¿No tienen derecho a expresarse?
¿Por qué tanto odio en está región del mundo?
¿Por qué no se hace nada para detener todo esto?

¿Y Ustedes, Señores Grandes de este mundo,
Cómo pueden cerrar sus ojos tan fácilmente
Sobre horrores que Ustedes conocen? ¡Fecunda
Es la riqueza color tortura teñida de sangre!!!




                              94
Nouria OTMANI
     (Suisse)
  nouria@bluewin.ch




         95
Hiver dans ma banlieue

Bientôt nous tomberons dans le sombre du soir
Le visage de l’hiver que l’on peut percevoir
Ses rides mélancoliques à la tombée du jour
Et le froid qu’on supporte est un fardeau trop lourd

Le maçon qui bâtit la maison d’où il sort
Devra laisser aux autres la chaleur où l’on dort
Au loin une femme pleure pour cet homme qui s’alite
Elle devra supporter la misère et les mites

Les enfants qui grandissent à l’ombre du soleil
Qui connaissent le désert du monde et ses merveilles
Où sont passés les rêves les espoirs de chacun
Dans le froid du bitume et l’odeur de la faim

Les murs de mon quartier ternissent de jours en jours
Je dois pouvoir compter sur la force de l’amour
Quand l’enfant qui grandit demain ne sera rien
Peut-être un fait divers dans les lignes du destin




                              97
Livre 18




             Blanc, blanc, blanc SIDA

De longs couloirs où le blanc s’alite
Sur les murs tant de vide, la maladie s’agite
Des visages pâles, sans vie, parfois se lassent
De tout ce blanc, ces draps, ces gens qui passent

Le repos tant béni se jette sur les corps
Chacun est libre de méditer sa mort
Le sale sera lavé le matin, au réveil
On sentira alors l’odeur du sommeil

Sur le papier est inscrite la marche du virus
La fenêtre fait rentrer les plus grands autobus
Elle se referme enfin en violant les prières
Et donne sans partage l’odeur de la terre

Et toute cette espérance cachée sous un coussin
Elle éteint la lumière, elle vous croise les mains
Le sol est toujours propre quand le malade s’en va




                               98
Sandy BEL
   (France)
bel.sandy@yahoo.fr




       99
Ma patrie, un bout de l’éternité

Photo de Gildas Pasquet
                                       Ma patrie, un bout de
                                       l’éternité.
                                       Un lieu sans lieu peint
                                       sur un mirage, ailleurs.

                                       J’ai oublié ses rives.
                                       Je n’ai aucun moyen
                                       de les revoir, ni
                                       d’ailleurs        aucune
                                       envie.
                                       A cause du pain qui
                                       est cher et l’hystérie
                                       des colons.

                                      Je me souviens de la
                                      nuit où je suis partie.
                                      Il faisait noir.
                                      J’avançais courbée à
                                      travers les fleuves
                                      taris,      le     front
étincelant de désespoir et les mains implorant du ciel une
chose qui me précède.

Et plus tard quand une mémoire de larmes me prendra par le
cou, comment y retourner ?
Comment retrouver l’absurde territoire au milieu des
cendres ?



                             101
Livre 18




La guerre est terrible.
Elle a tout décimé.
L’avenir, le présent et le passé.

Souvent entre les eaux du sommeil, mon rêve entrouvre une
porte sur une terre entourée de paysages où tout est changé
pour le mieux…
Du haut de mon nid d’aigle, je vois des fleurs sur les tables
dans les cafés, au cœur de la foule le méchant Bascom qui est
devenu aveugle, distribue tout son argent, mettant fin à son
règne tyrannique depuis deux mille ans mais marquant son
retour à Dieu.
Quelle effervescence dans la ville au répit qui se maquille ?

Et je sens comme un feu s’allumer au coin de mon cœur et
réchauffer mon visage.
Je ne m’étonne de rien mais avant d’entrer à l’aurore je
m’approche avec le désir du partage.

A l’improviste, le vent se lève et arrête le mouvement
impétueux de mes yeux.
Une poussière se met à danser autour de ma tête.

Chuchotement de défaite. Silence de l’énigme qui crache son
étrangeté. Perte des repères de la ligne du cœur.
Dans l’impatience tout demeure inaccessible.

Sans parvenir à m’éloigner, triste je tourne, je tourne encore à
la recherche d’un autre chemin de la plaine reconquise qu’on
raconte dans les légendes.




                               102
LES CAHIERS DE POESIE




A l’heure ou Les ampoules s’éteignent, l’aube tombe le rêve
sur la grève, sa douleur retient une ombre qui dort toute nue.
Il n’y a ni distance entre nous ni vent.
Est-ce mon image ce rêve qui porte un visage familier ?

Un soir je reviendrai dans la lumière électrique.
J’y courrai avec les oiseaux migrateurs en brassant l’air comme
dans un rêve.




                             103
Carla.
   (France)
carla.p@laposte.net




       105
En échappé

 Juste une ville, comme un tribut
         - Ma négligence -
   Avec ses gris en suspension
      Ses parures ou ses plis
    Mais reste-t-il une ombre
            En échappé
       Car la lune, si douce
         Vient à manquer
Le vent se plait…Ma voix s’est tue
          Car dans l’allée
      Il reste un Homme…




               107
Livre 18




               La lumière ment

                       Rien à voir
                    La lumière ment
           Ici l’on éteint les midis de soleil
              Et l’on isole le cri, du vent
                       Rien à voir
           Avec les grands feux du dedans
             Ce qui les réchauffe là-bas
             Nous brûle ici et maintenant
                       Rien à voir
            Les mots circulent en passants
            Dévêtus des foulées d’ivresse
            Il faut danser à même le sang
                    Lèvres mordues
                  Flammes sans laisse
                       Rien à voir
                    La lumière ment




                          108
LES CAHIERS DE POESIE




Le jardin de mes rues

       Motifs affleurent
        Sur décor nu

Les impressions de ma tendresse
 Ont des couleurs tissées à cru
      Deux ou trois roses
      Un parfum d’eau…

C’est dans le jardin de mes rues
Que j’aime à perdre ton adresse
        Au fil des peaux
       Au fil des peaux…




              109
Livre 18




              Chants du regard

                  Chants du regard
               Sans parure, en négligé
               Comme un dialogue…
                    Dans les allées
                 -Nos profondeurs-
           La main récolte des bribes d’eau
              Petite pluie sans évidence
            À bord du silence et ses mots
                    Je te regarde…
                          Vivre
                  A cette couleur là




                         110
Anick ROSCHI
                  (France)
              anirosch@aliceadsl.fr
http://www.editionsducygne.com/editions-du-cygne-
            catalogue-litterature.html




                      111
Capitale Terre

Voici le temps
Partagé
De nos dernières richesses

À chaque naissance
Liberté
Une goutte d’eau
Assoiffée de rivière

À chaque naissance
Égalité
Une goutte de sueur
Épuisée de misère

À chaque naissance
Fraternité
Une goutte d’air
Souillée de déserts

Voici le temps
Exorcisé
De nos raisons planétaires

Le temps
Articulé
D’une capitale
Terre.



                             113
Léonard MOUTI
     (France)
  mouti@mageos.com




        115
Le chat persan et le cerf-volant

Un tapis d’Orient où dormait un chat persan
Rêvait à son enfance :
Un long fil en laine qui tourne autour de la terre
Il ira au soleil
Il ira au soleil
Certainement
Mais le chat dans son rêve était déjà là-bas
Au soleil…
Et la terre entière au bout du fil en laine
Était son cerf-volant
Quelle est folle la Terre !

– Maman ! A quoi servent les cerfs-volants ?




                              117
Livre 18




                        Le passé

Quatre-z-yeux
Sans visages
Se contemplaient dans les cieux
Le z’oiseau bleu du regard
Venait juste de passer…
…Un nuage de parfum
Quatre-z-yeux
Sans visages
Pleuraient, seuls, le passé



Quattro occhi
Senza volto
Si contemplavano nel cielo
L’uccello blu dello sguardo
Era appena passato…
…onda di profumo

Quattro occhi
Senza volto
Piangevano soli
Il passato




                              118
LES CAHIERS DE POESIE




                          Italièrie

Arôme de l’homme qui
À mobylette
Traversait Rome
Pour offrir à la pluie son parapluie

À l’âme italienne de toutes les hirondelles
Cet arôme y demeure
Un bouton rose
Sur les jeunes joues des vestes de la nuit…
…de Roma




Aroma dell’uomo che
In motocicletta
Attraversò Roma
Per offrire alla pioggia il suo ombrello

All’anima italiana di tutte le rondini
Quest’aroma vi resta
Un bottone rosa
Sulle giovani gote delle giacche della notte
Di Roma




                              119
Livre 18




                Les mots des poètes


Mi fugue
Mi destin
Mon incroyable chemin
Court
Il court sur mon corps
Cruel

Brûlez à l’eau forte
Les mots des poètes




                         120
Joseph ELEVEN
      (Canada)
 charline22_@hotmail.com




          121
Le poirier

                                      À Anne-Marie Poirier

Sous le grand poirier sauvage
Une vieille femme éreintée
Encombrée de lourd bagage
Récite, une prière chantée
Sous le grand poirier sauvage

Vers le ciel d’encre violâtre
Ses grands yeux bleus, délavés
Se pâme le soleil rosâtre
Ses cheveux blonds envolés
Vers le ciel d’encre violâtre

Gambille l’écrivaine rêveuse
Pirouettant sur ses patins
Une œillade amoureuse
Sur la glace des lieux saints
Gambille l’écrivaine rêveuse

Son corps mûr, plié en poire
L’âme vagabonde, dans le Nord
Au sommet d’un mont d’ivoire
Un vent glacé berce son corps
Son corps mûr, plié en poire




                                123
Livre 18




La vieille duchesse sous l’arbre
Le temps cueillant le fruit mûr
Prisonnière dans le marbre
Voyez dans la glace : l’azur
La vieille duchesse sous l’arbre.




                       Soleil basilic

Le cœur sonnette de son dard
Venin mortel, sourd amoureux.
Le crâne ceint de beauté ; hors
- Nous sommes des serpents hideux !

L’amour, cracheur de feu volage
De corps sain et joli visage.
Le doux printemps pond ses éclats
De verre. Éternel soleil. Ah !
Toujours, le matin chatoiement
(Jeunesse aux yeux de basilic)
Réveillera notre œil critique
Et souvent, muera le serpent !




                              124
LES CAHIERS DE POESIE




                        Anamnèse

Le crépuscule de mes paupières
Borde mes yeux fatigués.
Sous les draps fripés de l’âge,
Chrysalide et sylphide dorment
Dans le ventre de mes pensées.

Le cri amer du froid de l’hiver
Pénètre l’asile de mon univers givré.
Sous mes yeux se creuse une plage
Où les cocons onéreux se lézardent ;
Délivrant des papillons prématurés.

Sur les fleurs de mon âme, mère florifère !
Volettent les nouveau-nés malformés.
Suppliant Dieu, les mains au visage
De pardonner ma bouche blasphème…
Oh, Seigneur, j’aurai dû m’avorter !




                             125
Livre 18




               Le paradis des charmes

Mon corps momifié jusqu’aux rondes encolures,
Pectinés, les cils voilent mes cernes en moulures
Sous les portes cintrées de mes roses paupières
Plongé dans la contemplation ; blanches prières !

Le scaphandrier sur l’azur du ciel vogue
Scaphandre désert ; l’âme vaisseau en fugue
De l’entrave charnelle, l’esprit libre voltige.
L’œil fureteur contemple le doux vertige !

Un vent bruineux longtemps, souffle une brise
Sur l’impureté décharnée ; l’informe visage !
Sur mon front vaporeux, perlé de glaçage
L’onctueuse rosée légèrement assise !

Et un miroir d’eau couché aux reflets jade
Entre les seins montagneux ; les vallées natales !
Se lève à mon entrée, le soleil Oréade
M’accueillant sous une pluie d’orange pétales

Au bal des quatre vents, les joyeux quadrilles !
Vastes champs de lavande et d’épilobe
Froufroutante et mauve, l’ondoyante robe
S’abandonne dénouant ses parfums mantilles

Blanc duvet d’une blancheur neigeuse sublime…
Du ciel, un grand oiseau rameur, angélique !



                               126
LES CAHIERS DE POESIE




Flavescent, vers moi, son chaud rayon mystique
De ses ondes infinies de lumière, ranime

Ma chair inerte et mon cher cœur de braise !
Où mes yeux chavirés, sur la plage spectrale
Du haut plafond, de la chambre sépulcrale ;
S’ouvre, des écluses de l’œil, la mince daraise

Sur ma joue de galet, un torrent de larmes
Pleure en rosaire, le paradis des charmes !
Dans les sables mouvants s’enlisent les friables
Prières ; mon être, risée par les diables.

Sous les lourdes portes, englouties par les dunes
Ma soupente cervelle pareille à des lunes
Fendantes ; entre réalité et rêve
La Créatrice folie : tranchant du glaive !




                              127
Livre 18




              Le jardin des grimoires

Je me rappelle son long collier blanc
Bercé par les vagues de solitude
Sur les fleurs éphémères ; d’où le vent
De fraîcheur, à sa douce habitude
Parfumait la volante et immortelle
Robe, sur le jardin de l’âge d’or !
Elle a peint la plus charmante aquarelle
Au cadre de fenêtre, sans décor
Et cent fois, elle y a peint une cage
Sans foi, aux franges du brun désespoir
S’envolaient la fredaine pâturage
Et puis, le silence dans un mouchoir !
Été comme hiver, la vieille chaise
Berçante de ses longs bras oscillants
Chantèrent ensemble près de la fournaise ;
Le vieux fourneau de ses chaudrons brûlants !
Et encore, parfois, les cassolettes
Parfums d’antan, mijotent leurs recettes
À la clémence des quatre saisons ;
Les grands-mères aux châssis des maisons
Peignent le plus florissant des jardins
Dans l’éternel printemps de nos mémoires.
Dans nos cœurs émigrent les pèlerins
Souvenirs ; au nom des oiseaux grimoires !


                              128
Francine GADBOIS
       (Canada)
 patetfrancine@hotmail.com




           129
Les blues du lundi

 Elles s’accumulent tous les lundis
 Les dépêches, les correspondances
            Sur le bureau
Un tas de factures qui ne sourient pas
Les ombres qui dictent autour d’elles
   Les allées et venues des nuages
     L’accumulation des orages
  Les débats qui n’en finissent plus
           Et le téléphone
         Ne cesse de pleurer

            Dans ma tête
     Tout ce vacarme d’images
     Tout ce va et vient de mots
     Ces sensations d’automates
      Qui s’incrustent en moi

       À en perdre haleine
             Je pénètre
    Dans le tourbillon quotidien
          Des tourments
        Des insatisfactions
       Des bombardements
          Et de la colère
      Je n’ai qu’une mission
        Tout foutre en l’air




                 131
Livre 18




               Vendredi je t’attends
              Aide-moi à faire le vide
           Montre-moi le bout de ton nez
             Fais-moi entendre ta voix
              Pendant que ta douceur
                 Aiguise mes sens
           Contre la froideur de l’absence
               Et mes blues du lundi




                        132
LES CAHIERS DE POESIE




   Ton retour

     Je te perds
     Petit à petit
    Tu t’éloignes
      Je le sens
    Ta silhouette
     À l’horizon
      Disparaît
Trêve de clairvoyance
   Une hésitation
 Dans la pénombre
En est même disparue
    Mon ombre
       À jamais
   Elle te cherche
   Elle quémande
     Ton retour




        133
Livre 18




                         La critique

                    Elle n’en fait qu’à sa tête
        Consternée des réactions suscitées autour d’elle
                 Elle se fout des qu’en dira-t-on
                    Elle aime sans condition
                             Les écrits
                          Les épigraphes
                       Et tous les tableaux
               Ceux qui vous font rire aux larmes
       Et qui ressuscitent le soleil dans le cœur de l’éploré
                   Ceux qu’on n’oublie jamais
       Les bouquins classiques méritant qu’on s’y attarde
              Et qui nous éclaboussent d’émotions
       De sensations diaboliques à nous faire perdre la tête
                   Et de sentiments troublants
                   À nous faire perdre haleine

                           Elle critique
                            Sans cesse
                  Tout ce qui effleure ses sens
                  Et tout ce qui donne un sens
                             À sa vie.




                                134
LES CAHIERS DE POESIE




               C’est fini

            L’escalier des regrets
     Les enjambées de l’ignorance…
        Tant de marches à monter
            À en perdre haleine
  Pour se faire rouler dans une couverture
            Du haut de l’escalier
          D’un seul coup de balai
            D’un revers de main
            D’un croc-en-jambe
                 Jusqu’en bas

             Le parvis des mots
     N’a nullement besoin d’un escalier
        Imposant son sombre dictat
           Sur la beauté du rêve
         La recherche de l’emprise
          Son besoin de dominer
    N’aura su tromper mon œil de lynx
Férocement bien ouvert à toutes ses atrocités
            Plus aucun mystère
          Pour son cœur de pierre
                C’est fini !!!




                    135
Déa L’HOËST
     (France)
contact@dealhoest.com
  www.dealhoest.com
  www.equilyrics.com




        137
Quamille - jeune jument Haflinger
 regard de douceur avant que sa vie ne lui ait été volée…
www.lfpc.asso.fr/Affaires/Quamille/Quamille.html




                          139
sens sur ta joue

longue nuit
quand le soleil fuit
lui qui aimait éperdument
plonger son sourire étincelant
le matin, en se réveillant
dans l’or blanc si fin
de ses crins
Longue nuit
quand le sommeil fuit
devant nos rêves saccagés
devant une foule enragée
seul sur un chemin perdu
avec ce cri, déchiré,
espoir trahi, vie rompue
longue nuit
sans pleurs, juste la pluie
lave mes pages, efface
mes torrents, les traces
de mes larmes séchées
sous un soleil d’or blanc d’été
       sens sur ta joue ses cils dorés…
       pour Quamille et Lubie,
       Thierry, Arnaud, Michel qui les ont aimées
       et nos nuits blanches
       Hernan, 9 mars 2009


                               141
Livre 18




                              ses yeux

un jour,
dans son temps
ou dans dix ans,
une pouliche naîtra

crins de soie
robe d’or feu
front étoilé
avec ses yeux

ses yeux…
et tu sentira
ses cils
sur ta joue

incrédule
tu la reconnaitras


           pour Thierry
           dans le souvenir de demain
           qui attend déjà

           Hernan, 10 mars 2009
           Déa L’Hoëst




                                   142
LES CAHIERS DE POESIE




                           cinq ans…

   version française librement re-écrite d’après l’allemand « südostmond »
                                                            décembre 2006

puisque
demain les enfants
joueront toujours,
demain les camélias
fleuriront encore
là où passe
le petit chat
et des poulains
naitront au printemps

puisque
la marque
au fer rouge, trace
de ta jalousie
s’adoucira

puisque…

sous la caresse
de ma main
tu dors,
mon joli

la chaleur de midi,
le sable blanc



                                  143
Livre 18




de la dune fleurie
d’or
berce ton oubli

ars dans la rêverie
du temps,
oublie
ma tristesse,
le soleil couchant
dans le froid
sous les branches du grand pin
couché par le vent
où je t’ai quitté

oublie
tes moments
de solitude, de détresse
d’abandon…
pendant cinq ans…

reviens-moi
puisque
demain encore
je penserai
à toi

puisque
demain encore
des enfants
t’attendront
pour jouer avec toi,
avec des poulains
et le grand chat
quand refleuriront


                            144
LES CAHIERS DE POESIE




les camélias

        à Tayzon
        12 mars 2009

quart de lune
plein jour
haut dans le vent vole la neige
des vagues immensément cabrées
dans un caprice d’écume épaisse
parsemant de flocons blancs
toute la plage ; mon jeune alezan
fuit à travers la mousse salée,
cabriolant, sautillant, zigzaguant,
déchaîné dans son jeu d’éviter
ces fleurs marines qui dansent,
se défoulant au jeu volant
avec des balles ailées de plumes
poussées au souffle de la brise
qui les déchire en mille lambeaux
pour construire au pied des dunes
avec cette neige des châteaux ;

haut dans le ciel montent les vagues
aux crinières ondulées, frisées,
cabriolant sous la force du vent
piqués des dards d’un soleil couchant,
tous crins dressés pour chatouiller
les gigantesques baleines bleutées
en montagnes de nuages gris
au ciel novembre lumineux,
dressées dans leur immobilité
étonnante, étonnées, figées,



                              145
Livre 18




elles contemplent bouche bée la lune
croissant brillant blanc platine
qui couronne les dunes au sud-est
dans un ciel bleu cyan plein jour,
bien avant que ne tombe le soir




                            146
LES CAHIERS DE POESIE




                        rives de rêves

passage nocturne au détour des pages
m’ouvre la porte de plaintes tout en douceur
accrochées aux rêves, à l’image de fleurs
fanées déjà, jetées là sur le passage

voilés les souvenirs de bonheurs mutilés,
un passé qui s’impose dans le matin clair,
dicte la marche, guide les pas à l’envers :
le sommeil vole la vie au chant éveillé

paupières lourdes refusent de se fermer
dénigrent le sommeil, refusent de rêver
s’ouvrent toujours aux jours où la vie fut grande

brillent du feu d’un passé à peine perdu
pour renouer tous les fils d’une vie rompue
yeux rivés sur les rives blanches du monde



sonnet, décembre 2007




                              147
Livre 18




                         vents

vent d’été

je tourne la tête
vers le haut,
vers le chaud
sur ma peau :
dans mes yeux
dansent, rondes
dans l’indéfini de mon monde
des lumières en jeu,
boules en fête,
boules en feu

vent de pluie

je lève les yeux,
cherche le feu
chaud des boules
dans le gris
sombre monotone
d’un matin d’automne :
mais au lieu
de boules de feux
des gouttes roulent
en pluie sur mes joues

vent de nuit



                           148
LES CAHIERS DE POESIE




blottie dans ses bras
forts, le vent froid
calme le feu,
calme mes yeux,
caresse mes tempes endolories :
en bas dans la vallée
la ville endormie
se berce sans bruit
sur ailes d’éphémères
et murmure ses lumières


Hernan, 12 février 2009
impressions visuelles d’une petite fille




                                     149
Livre 18




                        tout oublié

j’ai tout oublié,
écarté
dans les recoins
de demains
d’avant-hier

tout oublié

le petit chemin,
toi chevauchant fier
ton gris-fer,
oreilles tendues,
naseaux dilatés,
humant l’air
sous les grands pins,
là où passait
parfois
le brocard solitaire,
celui, tu sais,
au bois gauche cassé
cet été là,
à force
de s’être trop battu

je l’ai oublié

cette brise



                            150
LES CAHIERS DE POESIE




salée sur ma peau
frisant tes cheveux
sur ta nuque bronzée,
les fougères
si hautes, si denses
cet été là
pliant en douceur
sous la cadence
de nos chevaux en sueur

oublié

comme tu avançais
dans le sous-bois
me tournant ton dos
un peu voûté
un peu fatigué
à force
de t’être trop battu,

aussi
comment
regard au loin
tu m’écoutais
chanter
souriant
scrutant déjà
le ciel bleu d’été
dans l’espoir
des bleues d’automne


Hernan, novembre 2008



                          151
Morgan RIET
    (France)
 morganriet@live.fr




        153
Asnelles1

Voici la mer qui bat son plein,
érodant au passage
les pontons
de la dernière guerre.

Cette rumeur qu’elle écrit
et qui s’en vient remplir
la page claire de l’instant
lui est soufflée, bien sûr,

                     par son allié
                     d’immémoriales joutes,

                                le vent.

Et nous, les déliés
de son message entêtant,
d’un pas lent et pensif,
nous longeons sa splendeur –

                     coquillage de l’oreille
                     grand ouvert

                                à sa victoire inexorable.



1   Village situé sur les plages du Débarquement.



                                     155
Livre 18




                Élégie amazonienne

Inspiration, expiration, inspiration,
                                    expiration… percevez-vous,
du poumon graillonneux de la terre
à nos frêles alvéoles,
le carcinome de nos actes
dont découle en fanfare
la clameur déchirante            des arbres ?

Inspiration, expiration, inspiration,
                           expiration… oh dites, percevez-vous,
sous la caresse rieuse
du moindre brin d’herbe,
la vertigineuse étendue d’angoisse
de la feuille
à tout jamais blanche            du monde ?




                             156
LES CAHIERS DE POESIE




                      Marin de terre

                                          à Xavier Kergoat,
                                         25 décembre 2008.

Un peu navire,
mon cher échalas,
mon ami au long cours.

Il faut les voir,
tes bras,

on dirait des mâts

prêts
à recevoir
et hisser voilures de rêves.




                               157
Livre 18




                          Neige

        Je te regarde.
Mais que dire sur toi, si ce n’est que tu tombes,
qu’invariablement tu es blanche et froide et que, bientôt,
épaisse ou non, tu finiras banalement par fondre ?

       Je me hasarde…
       Mais qu’ajouter de plus que quiconque, ici, me suit ou
bien me précède, et a pu t’observer de même, en ayant sans
nul doute rivé à meilleurs chants ta nature éphémère ?

       Mon souffle avare !
       Et pourtant… l’encre à opposer à ta blancheur de
matin vespéral.




                            158
Môh TSU
  (France)
m.oumama@free.fr




      159
Le chat sur le mur

Le vent souffle des pensées noires à ma mémoire
Je revois l’automobile venir et repartir dans le noir
Et un vent glacial l’accompagnait, suivi de regards
Faits d’interrogations, des commentaires du parloir.

C’était devant cette maison devant laquelle je suis
Que traverse un chat loin des sirènes, loin du bruit
Le silence ayant pris possession des lieux maudits
Dont un volet grinçant rappelle une trace de la vie.

Et le chat à ma vue, étrangement seul, dans la cour,
Après être descendu du grand mur, soudain à son tour,
Se met à miauler, à geindre, devant le portail mort,
Rouillé comme les chaines qui pendent au dehors !

C’est bien dans cette maison que tout s’était produit,
Que l’horreur a pris corps, un monstre a ôté la vie
À la fillette venue demander du lait pour le chat !
Depuis, dit-on, on l’entend et on l’aperçoit parfois.




                              161
Livre 18




                       Vieux Louis

Je quitte cette maison abandonnée en direction du centre
Et voilà à qu’à ma surprise, au hasard d’une rencontre
Je retrouve le vieux Louis comme on aime à l’appeler ici.
Un homme gentil, avec le teint pâle et les cheveux gris.

Ses rides montrent qu’il avait vécu dans l’âpre misère,
Le fin fond de l’isolement connu de l’enfant sans sa mère.
Brave homme qui n’a pas eu de chance durant sa vie…
Et à qui on connait pour seule compagnie l’eau de vie.

Cette eau de vie qui le rend ivre mort à la sortie du bar
Où il passe ses journées à jouer aux cartes et à boire ;
À tuer le temps en attendant que lui fasse "son heure"
Comme il dit avec un rire efficace, la main sur le cœur.

Comme toujours, me salue en m’appelant "mon garçon"
Comme pour rappeler à sa vie ce manque d’affection
Qui donne envie à tout être humain de vivre en famille.
Mais lui a toujours été seul, enfermé dans la petite ville.

Je le salue aussi et m’arrête un instant le voir s’éloigner,
Le pas comme le cœur, lourds, vers l’endroit où j’étais…
Il s’y arrête et regarde le chat miauler, seul comme lui.
Une tranche de vie de celui qu’on appelle ici vieux Louis.




                               162
LES CAHIERS DE POESIE




                   Cœurs sans deuil

J’avance dans la ville, la pensée ailleurs, face au vent.
En allant rejoindre une précieuse amie qui m’attend…
Pour un rendez-vous, discuter et planifier son avenir,
Quand je vois, triste, le mélancolique passé resurgir,
En me dirigeant vers le restaurant où j’avais réservé,
J’ai vu cette femme connue de la ville, assez pressée,
Sortir du bar-tabac, le visage et l’être décomposés,
L’âme ailleurs comme d’habitude, en femme brisée.
Une femme qu’on dit aussi folle, perdue, sans âme,
Mais avec des états d’âmes avec la douleur du drame
Qu’elle a vécu, il y a de cela plusieurs années déjà
Alors mère de la fillette morte un jour de grand froid.
On dit qu’elle n’arrive jamais fait le deuil et s’en veut
D’avoir connu ce monstre qui a pris «son précieux»…
Trésor pour une femme : son cœur, sa vie, son enfant.
C’était son ex compagnon, jaloux d’un pseudo amant.
Certains lui prêtaient une liaison avec le vieux Louis,
Sans rien prouver. Et par vengeance, l’autre a ôté la vie
À sa petite fille dont personne ne connait le vrai père.
Mais que ces mêmes langues disent enfant d’adultère.
Alors que je marche encore et arrive près du restaurant,
Je me retourne brusquement comme les autres passants.
Au loin sa voiture a freiné sec, sans savoir pourquoi…
Avant d’apercevoir sur une voiture du bas côté le chat.



                              163
Max DE BACKER
   (Belgique)
   max@dfib.net




       165
L’écrit vain

Envie d’écrire
De partager
Notre Amour naissant
Présent
Aux échanges de pupilles dilatées
Bleutées et grisées de désir
Réciproque
Envie de partager
D’être enfin
Ce que nous n’avons jamais pu
Nous avouer

Mais en vain…




                             167
Livre 18




                       Éclaircie

Nuages de pages blanches
Où viennent se crasher mes maux
Solitaires accomplis
Indispensables à ma survie

Dure prérogative
Que celle
De ne rien demander ni attendre

Éclaircies

Apprécier
Ces sens uniques
Se dessiner enfin
À ma vie…




                           168
LES CAHIERS DE POESIE




                            Belle

Belle
Clandestine passion de nos cœurs
Saveurs paisibles
De bulles et rythmes effervescents
Incitation à vivre uniquement
Du présent

Belle
Sensible et sentimentale
Accordant chaque corde de nos violoncelles
Pour que jamais aucune note
Diabolique et victime
Ne vienne
Nous envenimer

Belle
Réceptive à nos charmes
À la sincérité de nos regards

Belle
Blanche ailée

La plus belle…




                                169
Nicolas CHEVALIER
    BAHUAUD
           (France)
     nicolas.chevalier@free.fr




   Photo : Wenceslas Chevalier
 www.constantine-photography.com




               171
Si belle Essaouira

Le jour paré des flots d’entre les fonds s’éclaire
Un matin solitaire au fil au ras des eaux
Seul un trait, un halo, un horizon de terre
La ville sur la mer comme un seul oripeau

Le vent les fait briller d’une écume de sable
Le ciel est noir de nuit et la ville endormie
Lorsque revient le jour, on chante alors la fable
Des bateaux des marins aux mers ainsi soumis

Cette Afrique si blanche est venue de mon rêve
D’un passé animé de canons en bastions
Des cendres des absents et des vagues de sève
Ligne lasse elle étend les maisons les missions

De la mer, l’azur bleu couronne ces beautés
Le jour n’est que matin triomphant et heureux
Quand l’océan fougueux s’enflamme à ses côtés
Essaouira s’éveille ardente au cœur joyeux




                               173
Livre 18




                             Avec toi

Ne me laisse pas mourir
Seul avec un inconnu
Ne me laisse pas partir
Sans toi sans t’avoir revu

Dis-moi, au dernier instant
Je veux de tes bras ballants
Des caresses de tes mains
Un geste, un rire un destin

C’est toi qui me porteras
Et tes doigts dans mes cheveux
A toi qui me mèneras
Là, je pourrai dire adieu

Dis-moi, au moment ultime
Tu seras là ? Là tout près
Contre moi face au vent frais
Qui m’attire dans l’abîme




                                174
LES CAHIERS DE POESIE




              Les Evzones d’Athènes

Guerre
Inconnu
Toi
Gardien de la stèle
Garde
Immortel
Toi
Gardien République
Marche
Et martèle
Toi
Et marche soldat
Claque
Frappe et frappe
Toi
Un deux en sabot
Veille
Et surveille
Toi
Et au pas au pas
Vent
Bondissant
Loin
Et vole gardien



                       175
Jean-Michel A. HATTON
             (USA)
      jm.a.hatton@gmail.com
   http://lencrier.wordpress.com




               177
Rebelle

Sa chevelure lèche le ciel;
troupeau de gazelles

bondissantes, lapant les
steppes azurées de leur sabots

de soie.

Ses bras
découvrent les chemins
que ses doigts griffent dans l’air,

sa respiration enveloppe ses élans
comme un châle frémit par le vent,

ses lèvres et ses paupières
haletantes

enfièvrent la rocaille sèche
de la robe de ses
dérobées, Ô tellement fraiches.

Ses anches
telles les ailes d’un papillon
fouillent
chaque recoin d’air,




                                 179
Livre 18




traduisent
avidement une à une les
runes oubliées,
et

s’abreuvent
d’une langue qui ne
s’épanche qu’avec le corps.

Oh, laissez-la, vous!

Ses pas, pulsant le sol saoul,

brûlent de l’aquilon Afghan
la poussière en diamants,

au son de cette musique
longtemps
interdite par les Talibans.

De la rebelle en treillis, la Kalashnikov
et les grenades ont disparus,
déchus
par des perles de sueur

que ses danses
tissent en rivière

sur son cou mat;

aux yeux de ce jeune soldat
un petit homme de pas plus de seize




                                 180
LES CAHIERS DE POESIE




elle
n’est plus qu’un
cygne dans le désert

et il en pleure.
Il en pleure des pleurs saccadés,
qui sentent si bon la liberté

car

le môme ne savait pas que c’était si beau
de voir

une femme danser.




                              181
Frédéric BRULS
    (Belgique)
 hp281271@hotmail.com




         183
Le papillon

       Traçant dans l’air d’été son folâtre dessin,
      Le papillon recherche un nectar qui l’enivre :
      Bienheureux l’animal qui n’a d’autre dessein
      Qu’un calice ignorant les morsures du givre !

     Comme une feuille flotte au dessus du chemin,
     Il s’envole à la mort qu’un vent noir lui délivre,
       Mais l’instinct qui le fait oublieux du demain
       Le préserve toujours de la douleur de vivre.

     Lorsque l’angoisse épie et pourchasse mon cœur,
A l’heure où sans un bruit, d’un geste ample et vainqueur,
        La nuit rabat sur moi son filet d’étincelles,

     Je ne peux, pris aux rets de ces soleils lointains,
     Percé de leurs rayons depuis longtemps éteints,
     Déployer qu’un regard peint d’aveugles ocelles.




                            185
Livre 18




                                 Storm

            Soudain, dans l’ouragan que leur galop déchaîne,
               Les nuages gonflés de fureur et de haine,
           Montés sur leurs chevaux que n’apaise aucun frein,
           Font luire dans les airs leurs longs sabres d’airain !

            Fantassins en rempart dressant leurs hallebardes,
            Les lisières des bois se tiennent sur leurs gardes,
            Mais le choc est si dur que leurs corps fracassés
             Tombent en gémissant, dans la fosse, entassés.

           Je vois étinceler, sur les eaux qui refluent,
       Les éperons aux flancs des coursiers qui se ruent
    Dans les roulements sourds des tambours en renforts…

              Une nuée au loin se déchire et s’enflamme,
           Comme le drapeau blanc qui tremblote et réclame
           Un lit pour les blessés, un tombeau pour les morts.




                                    186
LES CAHIERS DE POESIE




         Le sacre de l’automne

    A ta beauté je veux offrir cette couronne ;
A vous, chemins des bois par la grume embaumés !
     Je hume le parfum de tes cheveux aimés
Où tombent en langueur les frondaisons d’automne.

 Sous ces fauves couverts que la sève abandonne,
  Rêveur, je me repose, et mes regards charmés
  Suivent les mouvements des rameaux alarmés
    Par la brise du soir où le soleil frissonne.

 Cascatelle qui croule et glisse en longs froufrous,
    Ton flot tumultueux teinte de reflets roux,
 Sur un lit de rochers, la mousse, et la renverse…

  Tends-moi ta chevelure aux filaments de miel,
   Et je la dénouerai de ma main qui la berce,
   Ma reine, pour couvrir l’immensité du ciel.




                        187
Livre 18




                      Tombeau du chat

                  Ami du pharaon, confident du poète,
                Il n’obéit jamais qu’aux lois de son désir,
            Et d’un songe lointain prolongeant la conquête,
            Il nous prend d’un regard impossible à saisir…

            Le mystère est ton arme, étrange et noble bête,
                Jalouse de se plaire et de s’appartenir,
            Dont je caresse encore en un coin de ma tête,
              Grisé par son pouvoir, le vibrant souvenir.

           Dans ton pelage épais et chaud comme une laine,
           Cependant que mes doigts dessinaient en douceur
            Le motif amoureux dont mon âme était pleine,

             Tu savais de ta griffe, avec un air moqueur,
            Agacer mon chandail pour l’effiler sans peine,
            Et débrouiller ainsi l’écheveau de mon cœur…


                         Tout çà pour chat…




                                 188
Diane MERLI
    (France)
dianemerli@hotmail.fr




        189
Weeds

 Le serpent gît sous les décombres
      Comme un bandeau de fer
C’est de son revers qu’on le distingue
     Comme un soulier de verre
 C’est de son reflet que l’on s’écarte
 Le serpent vit sous les décombres
         Trahi par son venin
  Il reste seul sous les décombres.




        Underground

       J’épie les regards froissés
    J’épie le vent caresser ta peau
     J’épie ta raison et te déteste
  J’envie les rayons qui te blessent




                 191
Livre 18




                     Clair-obscur

          Le noir couloir de mes sombres victoires
  Au lendemain d’un monde de funestes espoirs et d’éternels
                             regrets
       De ta douce voix siffle une chanson pour sourds
      Pour ceux qui perçoivent ce que l’on n’entend plus
            Un triste matin fait de lumière et d’or
                  De rose et de bleu te noie
                   Ton matin est un souffle
               Une bise qui réchauffe ma peau
               Ma peau, mon sel, mon essence
             Ma douce peine n’est plus qu’un air
            Un air triste que l’on ne fredonne plus
         Un de ces air que l’on ne peut plus entendre
                         Un air de rien




                           Rion

                  Les décombre abstraits
                  Aveuglent les penseurs
                  Aux chemins divergents
                  Du mal et de ses fleurs



                            192
LES CAHIERS DE POESIE




                           Bar 3

  Je rêve d’un monde de silence, où tout se sait sans se dire.
    Une omniscience sans précédent. Un monde simple et
utopique. Mais c’est un monde sans double sens. Un monde
    de triste solitude. Un peuple et son opium. Un odieux
 châtiment dont l’origine écœure. Une silhouette sans forme
trahissant les décombre d’un rêve suspendu. Un rêve tenace
rongé par ses idées. Aucun pied sur une terre qui s’effondre.
 Mais l’espoir, encore, dans son obscur nuage, de rage et de
                           démence.
   Et tout recommencer une fois de plus. Et tout perdre à
 nouveau, sans chercher à comprendre l’absence de vertige.
   Une conscience des sens. Une ruine funeste. Une abjecte
    suffisance de sulfureuses jalousies. Une fausse passion
      fondée sur l’impuissance, l’incapacité même d’être
                      seulement soi-même.




                    Up side Down

            Un gouffre nous sépare : les autres.
                         Dédale.
                        Détalles!



                             193
Livre 18




                       John Jane June

                       L’académie des mots.
                        Des amants morts.
                             Déments.




                         Montobello

           Des hommes en bleu blanc rouge sous la fumée.
                     Un peuple et sa patrie.
                    Sous la fumée, la mort.




                               One

                         Laissons-les dires.
                         Laissons-les faire.
                         Défaire ces mots.



                                194
Yaïr BIRAN
      (Israël)
ybiran@netvision.net.il




         195
Les vraies vacances

Quand on prend les grandes vacances de la vie
les saisons n’ont plus d’importance
l’été, l’automne ou l’hiver, qu’importe
excepté le printemps avec sa douceur
ses fleurs ses odeurs ses caresses.
Quand on prend les grandes vacances de la vie
plus de contraintes ni d’obligations
trop dures, imposées d’en haut,
sauf celles qu’on s’impose soi-même
dans l’idée qu’il est bon de faire quelque chose.
Pensez donc, on se lève à son heure
on déjeune comme on veut quand on veut
on musarde et on joue
à cache-cache avec le temps avec son épouse
ou avec les petits-enfants rieurs espiègles.
Il y a encore bien des choses
dans les grandes vacances de la vie
finalement le temps est court
on voudrait toucher à tout, tout faire
à chaque jour ne suffit pas sa peine.
C’est le temps gagné sur le temps
le temps des cerises et des fraises
celui qu’on goûte sans trop penser au lendemain
le rab, la rallonge en somme
celui qui toujours fait du bien.


                              197
Livre 18




                    C’est incroyable

Toujours l’événement gêne la pensée
le sentiment domine
l’émotion brouille la vue
les yeux pleurent avant
d’avoir compris ce qu’il en est
c’est ce qui n’est pas qui compte
le je ne sais quoi est tout
presque rien n’est compréhensible
et le reste à l’avenant…
on veut retrouver l’intelligible
on n’y parvient pas
c’est ça l’aventure du hasard
c’est ça le fruit des jours
qui passent et reviennent
des jours qui fuient indéchiffrables
les jours perdus impénétrables
transpercés de mille hasards.
Et nous toujours nous resterons
abandonnés dépassés déplacés
détrompés par le réel tortueux
trompés par nos frères humains
impénétrables eux mais révoltés
notre naïveté sans bornes
toujours trébuchera d’une déception
à l’autre sans cesse et encore
seul le Malin y retrouve ses petits.



                              198
LES CAHIERS DE POESIE




                     Le bleu du ciel

Que le ciel est bleu, mais quel bleu
le ciel est bleu d’un bleu infini
un bleu rêvé mais quelle palette
cette immensité que l’on aime
vers laquelle on aspire transporté

alors c’est si beau
on voudrait chanter cet espace
ce champ illimité des espoirs
la promenade immortelle des fleurs bleues
où il n’y a que des nuages de sérénité

nous regardons et c’est trop beau
l’esprit vagabonde l’imagination s’envole
trop d’images poétiques qui affluent
le peintre prend son pinceau
et brosse un tableau de rêve enchanté

Que le ciel est bleu d’un bleu profond
nous on chavire on a l’âme ravie
et pourtant ces cieux sont trompeurs
en dessous il y a des hommes qui eux
ne rêvent pas comme nous sauf plaies et bosses
leur méchanceté leur hargne se déchaînent
pour démentir le bleu des cieux
et le larder de griffes rouges de feu
et de sang.



                              199
Livre 18




                         Retrouver

Retrouver la tranquillité des jours
de peur de l’avoir perdue
la naïveté de l’enfance
et ses tableaux ses aquarelles

Retrouver l’émerveillement de jadis
le chatoiement des feuilles au soleil
le gazouillis des oiseaux
la rosée du matin chantant

Quelque chose que nous avons aimé
un passé que nous croyons plus beau
à ce jour vu de loin
parce que c’est en nous
filtré par les ans les saisons
mais toujours il nous est cher
et nous voulons donc le revoir
le revivre le respirer le sentir

C’était la tranquillité des jours
celle dont on se souvient
qui nous emplissait de joie discrète
Ah ! quand la reverrons-nous ?




                              200
LES CAHIERS DE POESIE




                      Ah la parole !

Mes nuits sont plus longues que vos jours !
Mais qu’est-ce que cela veut dire
comment est-ce possible ?
ça n’a ni queue ni tête
où sont la logique le bon sens
n’importe où n’importe quoi
on parle à tort et à travers
voyez-moi ça ça cause ça dit
on ne sait quoi à vous donner le tournis
C’est ça, n’est-ce pas, la machine à paroles !
Comme disait Noam Chomsky
chaque locuteur sait inventer
une infinité de phrases
et c’est ça le discours.
Alors j’invente…




                               201
Josée KRATOCHWIL
   (Luxembourg)
     tycho@pt.lu




        203
Parles

Parles,
comme si tu entendais pour la première fois ta voix
et rencontre tes mots
avant qu’ils appartiennent à d’autres regards,
lorsque nous nous trouvons dans une image d’enfant
je désire te voir en double, pour te voir plus fort.
Tu déclencheras un feu d’artifice de joies très loin, là-bas,
où dans le mouvement d’un océan de blé,
la vie ne se révolte plus.
Quelqu’un dicte le calme,
chuchote des mots scintillants et va et vient en nous,
jaillit comme une fontaine de larves multicolores
et des pétales en noix de coco.
Les perles chantent avec leurs bouches minuscules,
les étoiles se douchent au piment
et éternuent comme un nouveau né,
les gouttes de riz se noient dans la voie lactée.
La dictée vient de celui qui sent
et entend qu’autour des choses vagabonde une force,
nous laissant pleurer en inversion
et le nacre sonnant se loge dans les cellules
comme une coquille d’œuf coucou.
Et ces voix, sons et syllabes recroquevillés,
gravés dans la mémoire comme un tatouage invisible,
les peaux reflètent un effleurage,
qui n’arrête pas de vieillir.
Au loin, un chœur de chant,



                              205
Livre 18




 si loin que nous n’apercevons
 que le mouvement des lèvres dans notre imagination,
 comme je n’aperçois seul le parfum d’une présence
 dans le coup d’air d’un passant sur le pavé inconnu
 et un jouet mobile crée des bulles de savon
 propulsant le temps en couleurs d’arcs-en-ciel
 et c’est comme si tu parlais encore
 en ignorant le miel et le poivre,
 dans le choix de tes mots.




                            206
Daniel ARANJO
       (France)
 daniel.aranjo@univ-tln.fr




           207
Cri

Sombre, et claire amante, d’où viens-tu ?
où,
ô fille-gazelle-sœur,
où repars-tu déjà ?
Je t’aimerai de loin, ô reine,
puisqu’il le faut bien, capricieuse enfant
nue comme un sourire,
vêtue de l’ombre d’un seul diamant -
ah mais ah
que nous préférerions embrasser,
nous, Sapphô
(ton pharaon et aussi ton roi),
de près
(en un seul rire, fluide, de chemise)
jusqu’au fond tes
noirs
et longs cheveux égyptiens micacés
à poudre luisante d’encre
et te
les […]



                               209
Monique NUGHEDU
                   (France)
monique.nughedu@charente-maritime.pref.gouv.fr




Mikis Théodorakis en train de diriger un orchestre,
     à l’encre de chine sur papier noir. 1973.




                       211
Liberté

                                           Écrit à l’âge de 16 ans
                                      A Mikis THEODORAKIS

Toi ma patrie perdue qu’un chant d’amour résume
Existes-tu vraiment sous un tiède horizon
Ou n’es-tu que ce mot sur les murs des prisons
Liberté ! que le soir d’espérance rallume

Ah ! si vous connaissiez cet amour qui m’obsède
Vous ne comprendriez pas que je survive encor
A ce rêve absolu qui embrasse et qui mord
Et que chante pour moi la brise citharède

Sous les arbres lointains de ma patrie perdue
Souvenir d’une vie authentique et sereine
Qui dans ce monde obscur alimente ma peine
Et soutenant ma vie, tout de même me tue

Mais le ciel est si beau, au-dessus de la terre
Que tu dois exister, liberté, quelque part
Et qui sait si jamais, à ce jeu de hasard
Je ne gagnerais pas de revoir ta lumière.




                               213
Livre 18




                       À Kazantzakis

Hérakleion s’endort et te rejoint en rêve
Le sang ne coule plus mais il est dans le soir
Sur la blanche Candie un voile rouge et noir
De nostalgie mêlée au jour bleu qui s’achève

Il est libre celui qui meurt et se relève
Es-tu là victorieux ou dors-tu sans espoir
Tes yeux sont-ils ouvert sur ce qu’on ne peut voir
Ou fermés sur les joies d’une existence brève

Ton sang est retourné sur la terre de Crète
Pourquoi tant de questions puisque justice est faite
Autour de toi sont des héros les os blanchis

Au-dessus de la ville encore ta voix vibre
Sur un tombeau en quelques mots disant ceci
"Je ne crains rien, je n’espère rien, je suis libre".




                                214
LES CAHIERS DE POESIE




                      Méditerranée

C’est vrai, la mer ressemble à un vin tumultueux
Homère avait raison, elle amène aussi loin
La mer a enivré des peuples de marins
Qui partaient plus longtemps pour être moins heureux

Mais que préfère-t-on, de sortir de l’ivresse
Ou de rentrer au port ? Et le songe en allé
Ne vaut pas les trésors de la mer rapportés
Et après si longtemps de revenir en Grèce

Le vin ne t’eut pas fait connaître Calypso
La cruelle Circé, Nausicaa la fière
Qui t’accueillit aux bords de Corfou la première
Toi, Ulysse divin qu’amenèrent les flots

Et celui qui connaît l’amer goût de l’exil
Revient souvent rêver devant la mer profonde
Comme s’il attendait que, messagère, l’onde
Le rappelle, il écoute une voix, semble-t-il.

La mer se souvenant des dieux qu’elle a portés
Murmure doucement leurs noms comme une plainte
Et l’écume sans fin récrit leur gloire éteinte
Avec les mots changeants par les vents inventés




                              215
Livre 18




                         L’Evzone


Quel souvenir ému s’attache-t-il à vous
Hanches drapées de noir, taille forte et bien prise
Marbre sous le tissu qui frissonne à la brise
Chair vivante pourtant où le désir se joue

Dos à peine courbé du creux des reins au cou
Sous la tunique sombre et collante, un peu grise
A force de soleil qui la forme électrise
Dessinant sur la soie la peau qui est dessous

Chute des hanches faite et la taille exaltée
D’une étroite ceinture à peine soulignée
Pour une idée de force, aspect qui vit et brûle

Beauté d’homme portant le vivre et le mourir
Éphémère pour qui l’éternité recule
De cet instant charmeur évoquant le plaisir.




                              216
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Cahiers de Poésie 18

  • 1. Collection dirigée par Joseph OUAKNINE & Laurent FELS Cahiers de Poésie 18 Exemplaire n° 1 Éditions Joseph Ouaknine www.ouaknine.fr — joseph@ouaknine.fr
  • 2. © Les auteurs de la revue Les Cahiers de Poésie. Les Cahiers de Poésie B.P. 84 L-3901 Mondercange Les auteurs sont eux-mêmes responsables du contenu de leurs textes. http://www.poesie-web.eu contact@poesie-web.eu juin 2009 ISBN : 978-2-35664-015-4 Éditions Joseph Ouaknine http ://www.ouaknine.fr 54, rue du Moulin à vent F-93100 Montreuil-sous-bois FRANCE Tél. : (0033) 1 48 70 06 59 Courriel : joseph@ouaknine.fr
  • 4.
  • 5. Jean-Robert PAUL (USA) bobibi1000@hotmail.com 5
  • 6.
  • 7. Chant de pierres l’arbre avait tant de choses tant de choses à dire il a vu tant de roses tant de roses sourire une couronne pour trois personnes et tout le bonheur au coeur de la fleur l’arbre avait tant de choses tant de choses à dire il a vu toutes les roses toutes les roses mourir 7
  • 8. Livre 18 La blessure je vais tous effacer mes je t’aime écrits partout sur les murs de la ville ton nom une larme ta voix une douleur mon cœur la béante blessure sculpture de marbre rose souris, souris, souris sans fin ils pleurent mes derniers mots 8
  • 9. LES CAHIERS DE POESIE Réincarnation titanic se noient les sabots de Basquiat le blues murmure qu’il faut contre soi descendre la pente alors je descends descends descends vaguement vers l’abime tant d’autres en moi ont déjà fait le plongeon libre ils ont su refaire surface saurai-je mon dieu une fois pour toutes comment retourner vers l’autre moi-même ? 9
  • 10. Livre 18 Les airs du mal bar de l’air pas de l’heure Baudelaire au Bel-Air défait les chaines de la peine bas de laine robe de reine une autre ère le même air dans la Seine une mort saine eau de bois-de-chêne une mélopée ébène. 10
  • 11. Jacques HERMAN (Suisse) jcmh@bluewin.ch 11
  • 12.
  • 13. Armée silencieuse La cour de la ferme Embaume la fragrance Chaude du fumier Marie se frotte la panse Et prépare le café C’est bientôt l’heure Où le paysan va rentrer Il met en marche le tracteur Le char est plein de foin On dirait bien Qu’il va déborder Mais le chemin de terre Soudain poudroie Dans la poussière On voit Une armée de soldats Figés et rutilants Qui brillent au soleil couchant Ils ne bougent pas Comme s’ils étaient vissés au sol Ancrés Enracinés à l’instar Des peupliers Le long du ruisseau 13
  • 14. Livre 18 C’est une armée silencieuse Immobile Qui semble surgie D’un siècle passé Le drapeau même ne flotte pas Malgré le vent Le paysan fait demi-tour Rentre chez lui Par un détour Plus rassurant 14
  • 15. LES CAHIERS DE POESIE Grains de temps J’ai rempli de grains de temps Un ancien pot de confiture Et dans l’ombre j’attends Qu’en surgisse une image Un fantôme Un relent du passé Un signe du futur L’heure tourne Sur le cadran Mais les grains dans le pot Demeurent Une fille surgie D’un tableau de Balthus Passe à côté de moi Sourit vaguement Ne manifeste Aucun étonnement Devrais-je fermer le bocal L’étiqueter Ajouter sur le couvercle Attention danger Le soir commence à tomber J’ai l’intention d’allumer 15
  • 16. Livre 18 La lampe à pétrole J’hésite Je renonce finalement Je m’en vais Grains de temps Je vous quitte Ni contraint Ni forcé 16
  • 17. LES CAHIERS DE POESIE Le combat du jour et de la nuit Samedi soir à l’issue du combat Quotidien du jour et de la nuit J’ai ramassé le corps du perdant Que j’ai ramené chez lui Le jour vaincu Fait toujours triste mine Morne et gris Et sombre et grave infiniment Il jalouse alors des nuits Les méandres festifs Aux contours indécis Et les féeries d’étoiles Précautionneusement Je l’ai couché Sur son lit défait J’ai fermé les rideaux Et j’ai levé les voiles 17
  • 18. Livre 18 Sacrifice Je me suis trompé de pinceau Il n’est pas assez large Pour repeindre le ciel Et la couleur ne convient pas non plus C’est un bleu-vert artificiel Mais qu’importe après tout Si je te porte aux nues Comme on présente l’animal A bout de bras Pour un rite sacrificiel Ô Dieu Que la victime te plaise Il me faut de vives braises Qu’on m’allume le feu 18
  • 19. Üzeyir Lokman ÇAYCI (France) uzeyir.cayci@free.fr http://www.artepoetica.net/CAYCI.htm 19
  • 20.
  • 21. LES CAHIERS DE POESIE Yine üstündeyim geçmişin Hazır gelmişken « Seni uzaktan göreyim » dedim Farklı yerlerde değilim Yine üstündeyim geçmişin Seninle birlikte olduğum anlar Hiç gitmiyor gözlerimin önünden… Anılar bulvarında Ayrılık şarkıları titretiyor içimi Sevda şiirleri çok dokunuyor bana Yaklaştıkça uzaklaşıyorum senden. Farklı yerlerde değilim Yine üstündeyim geçmişin Sokaklar ıssız Renkler farklı görünüyor… Denizin durgunluğunda kayboluyorum Senli duygular yalnız bırakmıyor beni. Farklı yerlerde değilim Yine üstündeyim geçmişin Hazır gelmişken «Seni uzaktan göreyim » dedim İçimde yağmur yağıyor yine 21
  • 22. Livre 18 Bakışlarım boşluğa düşüyor Düşlerimde üşüyorum. Farklı yerlerde değilim Yine üstündeyim geçmişin. Üzeyir Lokman ÇAYCI İstanbul, 21.10.1990 22
  • 23. LES CAHIERS DE POESIE Je suis encore sur le passé Puisque je suis là J’ai eu envie «de te voir à distance» Je ne suis pas à des endroits différents Je suis encore sur le passé Les moments que j’ai passés avec toi Sont toujours devant mes yeux… Au boulevard des souvenirs Les chansons de séparation me font vibrer Je suis trop sensible aux poèmes d’amour A force de m’approcher je m’éloigne de toi. Je ne suis pas à des endroits différents Je suis encore sur le passé Les rues sont désertes Les couleurs semblent autres … Je me perds dans la quiétude de la mer Les sentiments qui te contiennent ne me laissent pas seul. Je ne suis pas à des endroits différents Je suis encore sur le passé Puisque je suis là J’ai eu envie «de te voir à distance » Il pleut encore en mon for intérieur 23
  • 24. Livre 18 Mes regards tombent dans le vide J’ai froid dans mes rêves. Je ne suis pas à des endroits différents Je suis encore sur le passé. Üzeyir Lokman ÇAYCI İstanbul, le 21.10.1990 Traduit du turc par Yakup YURT © Bruxelles, le 09.05.2007 24
  • 25. LES CAHIERS DE POESIE I am still hovering over the past Since I am there I wanted «to see you remote» I am not in other, different places I am still hovering over the past The moments in which we crossed paths Are always in front of my eyes… On the boulevard of memories The songs of separation make me vibrate I am hypersensitive to poems of love By approaching myself I move from you I am not in other, different places I am still hovering over the past Streets are uninhabited Colours seem inaccurate … I get lost in the calmness of the sea The feelings that contain you do not leave me alone I am not in other, different places I am still hovering over the past Since I am there I wanted «to see you remote» It is still raining within me for 25
  • 26. Livre 18 My looks fall in space I am cold in my dreams I am not in other, different places I am still hovering over the past by Uzeyir Lokman CAYCI İstanbul, 21.10.1990 Traduit par by Yakup YURT en français Bruxelles, le 09.05.2007 French free verse translated into English free verse by Joneve McCormick 11.05.2007 26
  • 27. Jean SAINT-VIL (Haïti) jeanssaint_vil@yahoo.fr 27
  • 28.
  • 29. De rire je veux mourir De rire je veux mourir, - Ça ne prête point à rire, Que veux-tu ? C’est mon vœu - Riant, gesticulant, chantant Dans un coquerico De chanteur d’opéra Comme Pavarotti Dans le conte d’Hoffmann d’Offenbach. De rire je veux mourir, Fou de rire comme au théâtre, Riant, m’esclaffant, m’éclatant Comme un fou qui se défoule Et qui s’en fout de tout, Même si mon cœur éclate Dans un rire au long cours Qui bat tous les records De tous les rires des hommes. De rire je veux mourir Au sommet de l’art de rire Pour rire de ce qui fait rire Dans mon état de rire A un cheveu de la mort. De rire je veux mourir D’un rire larme de joie, Qui appellent rires et pleurs, Comme une larme de fond, 29
  • 30. Livre 18 A tous les yeux qui pleurent En chœur comme quand on chante, Élevant mon âme aux cieux. De rire je veux mourir, D’un rire coup de boomerang Heureux de prendre son temps, Le temps de faire des siennes Et de faire rire à mort. De rire je veux mourir, D’un rire qui creuse ma tombe Au sein d’une fosse commune Et qui enfonce un clou Qui blesse et qui transperce Toute une nuit de rires. De rire je veux mourir, D’un rire au bord des larmes, D’un apprenti sorcier Qui, de ses crocs pointus, Me prend sec en tenailles Dans une gaieté subite. D’un rire qui, à la mort, Ne rira qu’aux éclats, Croyant rire à la vie Pour vivre plus heureux. D’un rire tragi-comique Qui joue le jeu du rire Par le fait d’un comédien Qui ne vit que de rires Par ses mots et ses gestes. D’un rire plus sournois Que mon rire habituel 30
  • 31. LES CAHIERS DE POESIE Et qui pour une fois a juré De ne pas rigoler Avec le rieur que je suis Qui joue depuis des lustres Comme un adolescent Avec le feu du rire. D’un rire hirsute comme les poils D’un fauve fou de colère Et qui, de ses griffes acérées, Vous passe à l’infinitif. D’un rire qui fait rire Tout le monde à la ronde, Prenant sur tous les tons Tous les temps musicaux Sans le temps d’une pause, Ni le temps d’un soupir Jusqu’au dernier soupir. D’un rire multi vitesses Du genre vélo de course Qui, subitement, Me prend de vitesse Tout en montant d’un cran Toutes les microsecondes Au top de la vitesse Du délire de rire. D’un rire fou comme un fou Qui a perdu le nord Et qui erre en zigzag Sur le terrain glissant Des accidents mortels Qui ne finissent d’autre manière 31
  • 32. Livre 18 Qu’en queue de poisson pilote. D’un rire qui hausse le ton Rien qu’en un laps de temps, Perdant toutes les pédales Comme un engin de mort Et qui sur son passage, Lamine tout ce qu’il trouve D’un rire fleuve aux freins lâches, Plongeant vers une falaise Qui mène tout droit au but, Sinon au cul-de-sac Des entrailles de la terre. D’un rire au bord du gouffre Fort dans ses ralentis, Habile dans ses coups de gueule, Casse-cou dans les virages, Casse-gueule aux escaliers, Casse-tête aux coins des rues. D’un rire au bruit d’enfer Sur fond de verres en miettes, Comme un œuf de poule frais Tombant du haut des cieux Ou du centième étage D’un gratte-ciel délabré Plein de lumpenprolétaires, Sans le sou au réveil. D’un rire coup de hache, Creusant profondément Mes rides dilatées Par l’effet d’une blague Comme un grand coup de foudre 32
  • 33. LES CAHIERS DE POESIE Soulevant l’hilarité De toute une foule en liesse. D’un rire bien délicat, Sur le rythme délirant D’une contagion subite Comme une rage de rire. D’un rire du genre couvercle Chapeautant de son éclat L’ensemble des autres rires Noyés dans des torrents Drainant sur les rives de leurs lits Des crues de tous les dangers Comme pour prédire ma mort Dans une attaque foudroyante Qui ne dit pas son nom. D’un rire chant de cygne De ma manie de rire Et de mon équanimité Et qui, d’un coup d’éclat, Donne le coup de grâce Qui met fin à mes rires. D’un rire plus que grotesque Qui se résout dans l’instant D’un simple coup de théâtre Comme une courte équation Au tout premier degré Avec pour inconnue La mort au bout d’une crise De rire irréversible, Très lourd de conséquences, Et à la clé, le temps d’une dernière grimace, 33
  • 34. Livre 18 Ou plutôt d’un sourire Sans le temps de dire au revoir, Sous le signe risible D’un rire de débile. 34
  • 35. Claude AMMANN (France) claude.ammann@wanadoo.fr 35
  • 36.
  • 37. Homéopathie Il suffirait d’un rien ou de si peu de choses pour qu’un jour l’on soit bien et plus jamais moroses en s’obligeant enfin à savourer la vie à très petites doses. Pour notre quotidien juste un menu fretin quelques miettes de pain deux trois gouttes de vin quatre grammes de miel une pincée de sel. Sur un soupçon de pluie quelques rais de lumière le souffle des bougies au clin de tes paupières et mieux qu’un flot de larmes les perles d’un sourire. Pour fleurir notre vie un seul brin de muguet pour d’infimes plaisirs simplement mordiller 37
  • 38. Livre 18 le lobe d’une oreille l’esquisse d’un orteil ou le bouton d’un sein. Oublier nos ripailles et pour se réchauffer deux trois fétus de paille et de ténus brandons pour une vie à deux s’aimer à petit feu… Pour les jours de gala faire voler en éclats quelques fragments d’émail un rayon du soleil jeté sur un vitrail l’univers en parcelles et la vie en tesselles. Pour conquérir le monde il faut une seconde un zeste de folie trois grains de poésie deux ou trois mots très courts et pas de long discours un filet de ma voix quelques bouchées de toi et deux gorgées d’amour. 38
  • 39. LES CAHIERS DE POESIE Le bonheur absolu Des pas feutrés menus qui progressent sans bruit, les design courbures d’une albe silhouette, brusque sursaut des reins à l’assaut imprévu d’une douce caresse, tu danses et te balances aux portes de la nuit, le corps en équilibre sur les toits du silence. Coquetteries, minauderies, habiles entrechats, appuis sur pattes de velours, salto agile, siège en souverain de la couette, vibrisses en éveil, et muscles au repos, fourrure épaisse de ton dos où j’enfouis mes dix doigts. Oreiller de tendresse, boulochant, duveteux, blotti tout contre moi bien calé, si câlin, 39
  • 40. Livre 18 lové contre mon sein que par jeu amoureux tu écorches ou mordilles de tes ardeurs félines. Compagnon exclusif d’une seule maîtresse, plus heureuse avec toi qu’avec n’importe qui, comme un joyeux ermite, promenant, solitaire, ma vie en chattemites, réchauffée au grand feu de tes deux soleils verts. 40
  • 41. LES CAHIERS DE POESIE Le dernier voyage d’Alice Lorsqu’ Alice aura brisé tous ses miroirs et fait voler avec eux en éclats chaque parcelle, chaque petit morceau de ses plus beaux rêves d’enfance, elle comprendra qu’il est venu peut-être le temps pour elle de préparer ses bagages pour une autre aventure, pour un nouveau voyage, tout aussi exaltant, tout aussi mystérieux, tout aussi merveilleux, sans doute, mais surtout plus long, bien plus long, O oui, beaucoup plus long que le premier. 41
  • 42. Livre 18 Métisse Métisse, O ma métisse aux rondeurs pain d’épices je te mords et te croque à petites bouchées. Métisse, O ma métisse aux saveurs de réglisse je te goûte et te bois à petites gorgées. Métisse, O ma métisse aux senteurs de la mer je te lèche et me noie au sel de tes mystères. Métisse, O ma métisse aux baisers de grenade je me perds dans les plis de ta toison de jade. Métisse, O ma métisse quand je force ton corps au nid de tes délices je suis un homme mort. 42
  • 43. Marie CHEVALIER (France) marieded@orange.fr 43
  • 44.
  • 45. Saturation Il aurait suffi de quelques mots En toute simplicité, en toute confiance Pour que je crois en elle. Hélas, elle m’a menti, Trahi mes espérances. Je ne pardonnerai jamais, Ce serait trop beau, trop lâche aussi ? Elle aurait le droit de m’insulter ? Elle aurait le droit de me faire mal ? Elle aurait le droit d’en rire et moi ? J’aurai celui de me taire ? Je me rebelle, je crie, je hurle, je lui fais peur Est-ce ainsi qu’elle finira par m’écouter ? Parce qu’elle me craindra ? Qu’elle craindra ma main levée ? Non je ne le veux pas J’en ai eu envie parfois certes Mais pourquoi m’abaisser si bas ? C’est ma femme et je l’aime Même si verbalement je la brutalise Mais ce que je crains parfois Est que je ne puisse plus retenir Cette envie qui me tenaille : Faire de notre amour fini, Un champ de bataille Où le meilleur gagnera… 45
  • 46. Livre 18 Le chagrin de Madeleine Le ciel était très mouvant, Les nuages couraient très vite Madeleine regardait, la tête en arrière. Et donnait des formes : On dirait un chapeau ! On dirait des sucettes ! On dirait des moutons ! On dirait des oiseaux ! Madeleine, sais-tu qu’il va pleuvoir ? Lui demanda sa mère inquiète. Non non ! Ils sont trop beaux et blancs ! Ils vont noircir tu vas voir ! Et il fera bien plus noir, C’est ainsi que naît la pluie. Non non, répéta Madeleine, Prête à sangloter Non non, ils sont trop beaux Ils ne peuvent devenir de l’eau ! C’est pas juste ! Et à ce moment-là Une goutte dans son œil Tomba et sur sa joue glissa Sa mère ne saura jamais 46
  • 47. LES CAHIERS DE POESIE S’il s’agissait de la pluie Ou d’un chagrin incompris Elle fit rentrer Madeleine Avant que les gouttes Goutte à goutte Viennent mouiller le cœur De Madeleine 47
  • 48.
  • 49. Marie-Claude MARTY (France) marty.marie_claude@aliceadsl.fr 49
  • 50.
  • 51. C’était une rivière… Aussi loin que me porte Mes souvenirs d’enfance, Elle se nichait au cœur De chacun, avec bonheur, Dans toute sa bienveillance. Son clapotis m’enchantait Quand, en parfaite harmonie Avec elle, elle m’entraînait, Par le murmure de son cours Dans une totale symphonie. Mais quand je la retrouvais En pleine nature, à sa source, Elle n’était que furie, Plus sauvage que jamais, Et pleine de ressources. Elle était source d’allégresse, Et souvent nous y pêchions La truite et le menu fretin Que nous mangions sans tristesse À la fin de chaque matin. Cette rivière, un jour de brume Disparue de ce village, Enfouie sous les pavés 51
  • 52. Livre 18 D’une route de bitume Qui lui servit de plombage ! Il faut aller bien loin Pour la voir, en vision, Joyeuse et malicieuse, Se riant de sa condition De prisonnière… des voitures ! 52
  • 53. LES CAHIERS DE POESIE Mélancolie Il ne reste que ton absence, Trop réelle, et mes appels Se perdent dans ma démence, Et dans la nuit des temps, Et je pleure sur nous. Parfois, j’ai envie de crier, Souvent, j’aimerais tout arrêter, M’envoler très loin, Sur une autre galaxie, Te chercher et te retrouver. Ce vide qui s’est installé, Ce manque de ton amour Au creux de mon être, M’accompagne chaque jour, A pris possession de moi Comme un objet trop acquis. Cette tristesse qui me recouvre M’enveloppe de noirs destins, Chassant le soleil de l’horizon Et voilant ma vue à tout jamais. 53
  • 54. Livre 18 Murmure Murmure du vent Qui me porte en écho, Envers et par devant La rumeur du jour, Cette voix, pleine d’amour Parmi les coquelicots. Murmure d’une source Qui jaillit de nulle part Et qui éclabousse, Étincelante au soleil, Le temps d’un réveil, Les arbustes épars. Murmure de vie En fond de toile, Dans cette survie, Et qui scintille, Et qui fourmille De mille étoiles ! 54
  • 55. Guy CREQUIE (France) guy.crequie@wanadoo.fr 55
  • 56.
  • 57. Hommage à l’amour Gerbe de poèmes courts La femme aimée Est celle pour laquelle Être homme Est un effort sans fin… L’amour est une tragédie C’est toute l’existence accomplie Tous les rêves d’humanité S’accomplissent Dans une perspective D’homme ou de femme Le désir du désir de l’autre Fait frissonner les corps Et vibrer les cœurs. La luciole qui tourbillonne Dans le ciel du matin Interroge la question Du pourquoi aimer ici Les affres de la vie. 57
  • 58. Livre 18 Amour Est gravé à jamais Ton empreinte d’existence le temps d’un soupir Et d’un chant balbutié Mélodie de l’amour Comme le temps d’une valse Dont l’harmonie scellait Des corps soudés Que Piaf aurait aimés. 58
  • 59. LES CAHIERS DE POESIE Homage to the love Stack short poems The loved woman Is that for which To be man Is an effort without end… The love is a tragedy It is all the accomplished existence All dreams of humanity Achieve themselves From the point of view Of man or woman The desire of the desire of the other Made shiver the bodies And to vibrate the hearts. The firefly which whirls In the sky of the morning Question the question Why like here Pangs of the life. 59
  • 60. Livre 18 Love Is engraved forever Your print of existence the time of a sigh And of a stammered song Melody of the love Like the time of a waltz Whose harmony sealed Welded bodies That Piaf would have liked. 60
  • 61. LES CAHIERS DE POESIE Homenaje al amor Gavilla de poemas cortos La mujer gustada Es la para la cual Ser hombre Es un esfuerzo sin final… El amor es una tragedia Es toda la existencia realizada Todos los sueños de humanidad Se realizan En una perspectiva Hombre o mujer El deseo del deseo del otro hace Temblar los cuerpos Y vibrar los corazones. La luciérnaga que se arremolina En el cielo de la mañana Pregunta la cuestión De porqué gustar aquí El tormento de la vida. 61
  • 62. Livre 18 Amor Se graba a nunca Tu impresión de existencia el tiempo de un suspiro Y de un borde balbuceado Melodía del amor Como el tiempo de un vals La que armonía sellaba Cuerpos soldados con autógena Que Piaf habrían gustado. 62
  • 63. Saint-John KAUSS (Haïti) johnnelson57@hotmail.com 63
  • 64.
  • 65. Gestuelle à Roland Morisseau Serge Legagneur à Jean-Richard Laforest « Au- delà de la glace, du nord, de la mort, notre vie, notre bonheur. » (Rainer Maria Rilke) compagnons de la grande rivière du nord compagnons qui s’éveillent dans la tristesse des oiselles en poèmes que la marche soit lente mais que le décompte de notre pain quotidien soit à la mesure du cri et de l’enfant qui a faim compagnons de la grande muraille que j’éprouve dans mes poèmes voix de haute haleine attachées à nos souvenirs visages d’habiles pourvoyeurs de mots fragiles à chaque visitation jeunes radoteurs toujours présents au rendez-vous des poèmes comme au premier jour de la naissance de l’aîné des poètes 65
  • 66. Livre 18 je vous salue comme à la première neige comme au premier sourire de l’enfant à peine né je vous salue entre les gros mots et le bonheur de nos fillettes qui se refusent au silence je vous salue avec les mêmes mots maigres d’un petit matin à perte d’ennui là où habitent pécheurs et sentinelles de la garde des mots qui n’apprivoisent que les syllabes de notre premier cri de notre chair depuis belle lurette mise aux enchères que saurais-je de la terre que j’embrasse dans ses tours parallèles vous avez ouvert la voie à la caravane des mots des maux d’une terre mystérieuse de paradoxes et d’espoirs vous nous avez montré du doigt le désert de Gobi et ses squelettes et tous ces morts réconciliés dans la nuit ces oiseaux-dinosaures ces carnivores mécontents de leur sort en somme tous ces manuscrits délaissés aux entrepôts de l’Histoire le temps est insondable et les poètes des voyants de haute lice comme à la fin d’une phrase fieffés navigateurs d’eau douce dans la vallée des syllabes fiers croisés dans le ventre du lexique illuminés et rassembleurs d’étoiles pour la révolte des sangs mêlés vous qui avez léché le souffle des grandes caravelles vous qui donnez dans le silence des longs murmures aux jupes des primevères dans le rêve et dans la nostalgie des fruits défendus vous suaires des petitesses et des espérances muettes 66
  • 67. LES CAHIERS DE POESIE qui dites la faim des fossiles parmi les fous vous pirates pauvres et coupables des fausses accusations sur les lèvres qui rappelez Homère dans sa souffrance et dans sa fidélité à l’écriture vous ramasseurs de parchemins et de blessures quel destin que de renouer les mailles de la solitude parmi les hommes la vie est une garce et les poètes glyphes de la divination grimoires aux alphabets façonnés de crucifiés voyants des voyelles atomisées sur une page d’histoire jusqu’à l’usure des embruns de chaque cauchemar sédentaire fut-ce le temps des grandes découvertes de ballades d’odes et d’élégies spontanés pour les beaux yeux de l’aimée ô grève des hommes et de la terre sauvages inflexibles sous la crue de l’amande éphémère mais pardonnés au ressac des pierres que l’on ignore je vous salue de nouveau Ô poètes de la liberté et de la garde des mots frères indubitables modèles pour la quête à la joie et à l’ivresse des lendemains que reste-t-il à écrire après nous avoir ouvert les chemins de l’indolence la grande route des alphabets jusqu’aux vêtures des saisons 67
  • 68. Livre 18 que reste-t-il à promettre avec la fidélité des mots et l’acharnement du bouleau sinon les rues de notre enfance les doigts de nos amours les folies de nos paupières et de nos baisers partagés le temps est indomptable et les poètes comme des enfants aux semelles de l’exil où je chasse la femme l’unique désirée de cette aire énorme l’exil de mon enfance et de mon adolescence parmi des hommes de première main avec les mêmes blessures et les mêmes interrogations de crucifiés et de chasseurs de maux dans la foule des témoins que passent nos chemins de songes la nuit et les poètes Repentigny, été 2002 68
  • 69. LES CAHIERS DE POESIE Motifs à Magloire Saint-Aude « Je ne crois pas; je sais. » (Carl Jung) ne puis-je croire que je sais le nom des mots à la belle syllabe la superficie du silence et de l’étoile polaire juste pour une seule fois ne puis-je croire à la géographie du poème des lieux et aux saisons des hommes des promesses si lointaines et aux souvenirs d’enfant quoique pour une seule fois le battement des artères s’achève sur le néant dans la solitude des hommes une fois seuls avec le cœur bien trop négligé aux dialogues des poètes interdits parias à chaque évolution des mots à chaque imposition des femmes qui pleurent après la pluie ne suis-je pas né de la complicité des hommes et des femmes de la frontière qu’on assassine 69
  • 70. Livre 18 d’un homme et d’une femme amoureux éternels qui ont embrassé dans la joie tous les péchés originaux ô jours bienheureux dans la chair Ô chair bienheureuse des motifs du poème des dialogues et promesses inscrites dans la mélasse et le mot de cœur du poète condamné à errer dans les rues de la ville la plus grande rue des ordures Ô paria étonné qui fit sangloter l’algue nous sommes tous déchus de nos villes endormies lacunaires aux pas des nymphes émerveillées nous sommes des enfants au cœur frais des poètes aux mains larges de promesses mais nous sommes habités par nos joies nos amours sans cesse à recommencer ne puis-je donc croire que je sais le nom de la rose folle des mots la géographie du silence et quelques poèmes au faîte du désespoir Ô Poésie belle à triompher juste pour une seule fois dialogues d’hommes libres et d’assistés requêtes devinées d’homme seul avec la page des pages inscrites au van de la félicité de ce dialogue avec le poète paria étonnant et sympathique 70
  • 71. LES CAHIERS DE POESIE qui fit pleurer l’algue et la mer quoique pour une seule fois à l’embauchement d’un cœur qui bat je te célèbre frère dans les mots et de la paix Ô Poète qu’on lit sous la pluie dans la plus haute tendresse et dans le plus grand silence Port-au-Prince, 16 juillet 2001 71
  • 72.
  • 73. Gilles BIZIEN (France) gilles.bizien@wanadoo.fr 73
  • 74.
  • 75. Dix de cœur 1. tu me dois le silence le repos il y a encore des tremblements sur la mer aussi au travers des yeux une entrée un passage à la façon d’une frontière émiettée nous ressemblons aux arbres d’hiver la certitude égarée hors de nous laisser le monde à ses viscères fumantes puisque seul t’intéressent les astres glacés initiaux. 2. qui largue le ciel désormais avec la force la certitude initiale chauffante comme un feu on dit que quelqu’un écoute sous la masse des eaux sur les routes bleues des profondeurs 75
  • 76. Livre 18 quelqu’un écoute les fleurs marginales et la part joyeuse de nos silences. 3. lèvres fleuve nous troncs de chair jeu avec la vase le sort approche retourne liens comme e n t r a v e la boue lune ce crochet d’ivoire pour la gorge. 4. résidence de la blancheur ivoire de l’œil est-ce toi que je retrouve à l’image d’une brume sous la surface rose du pétale pourquoi justifier du désert sur l’océan des yeux. 76
  • 77. LES CAHIERS DE POESIE 5. écho à la nuit ton amplitude soulève l’horizon comme peut se soulever le cœur ou l’écorce de lumière cri cage de cristal main printemps sur la plage du front tu te promets le volcan le feu l’inexactitude alors que réduisent l’instant et la peau. 6. danse sur la fleur noire du monde adonne-toi au pétale au fleuve horizon à la renverse des couleurs et des soleils équilibre perdu frôlement 77
  • 78. Livre 18 contre l’écumoire immense ressac étoilé sur la rosée des jours. 8. petitesse insignifiance ma taille est celle d’un grain d’une perle à l’extrémité du firmament front intouché sans brume sans neige ou particule bleue assures-tu encore mes pas corde d’or filin d’amour fleur froide. 9. mains safranées de la poésie regard presque le monde sueur sang mince mélancolie des astres 78
  • 79. LES CAHIERS DE POESIE est-ce possible (le cœur comme une jade bleue) de vivre sans révolte sans le savoir sensible du sable. 10. la pluie remplace le corps ce gris intime familier qui perce en toi plus loin que le rayon larmes ou papillons bleus idem quand tu dis que les fleuves naissent des sanglots sur le sable noir de l’amour ta maison est fichée sur une colline incolore ton esprit s’y love comme un félin éternel l’océan entre par tes yeux et rampe jusqu’à ton cœur. 79
  • 80.
  • 81. Luc TRIQUELL (France) atriquell@aol.com 81
  • 82.
  • 83. Nuage Une nuée de rêves à la limite rarement il n’aura été celui qu’on éprouvait l’absence souvent se tenir droit devant l’éclat du monde qui chavire sans doute rarement tu paraîtras aussi belle qu’un jour à la limite du rêve qu’on redoute 83
  • 84. Livre 18 Cauchemar 1 éparpillés les belles amourettes à la brume des vies là où semble s’éteindre la plus sombre des lumières où le ciel cohabite avec son fatras d’étoiles ne reste que le réel pas toujours propre pas toujours supportable le réel réel réel réel réel….. une luciole déjà me fait tourner la tête lucidité qui nous quitte dans la nuit tu recherches l’amour irréel irréel irréel irréel… mais laisse moi crier 84
  • 85. LES CAHIERS DE POESIE fuite visite furtive tonnes de délires prières firmaments le dimanche tous ensemble à retrouver son blog cosmique très comique il y a longtemps qu’ils ont mis une croix dessus 85
  • 86. Livre 18 Chanson Tu ne peux qu’aboyer la maudite chanson du désespoir sous l’oreiller un soir peut-être tu murmureras un cri peut-être l’espoir qui renaîtra aboyer pourquoi ameuter les loups des quartiers qui résonnent abreuver ton esprit malade et pétri de petits cris gémissements qui fusillent le plus innocent des enfants qu’on occit. 86
  • 87. Françoise Marie BERNARD (France) Paquita151965@aol.com www.geocities.com/poemasesmeralda/Entree 87
  • 88.
  • 89. Pour toi esclave noir… Une voix est montée Depuis des temps historiques, Pour rappeler au monde hébété Que l’espoir est magnifique… Une lueur merveilleuse Que l’on voudrait éternelle Est venue éclairer ; lumineuse ; Le chemin d’un être fraternel… C’est un peu comme une vengeance De l’Histoire sur le passé, C’est un peu comme une bienveillance Du hasard sur le racisme qu’on veut tuer ! Pour toi Esclave de jadis, Une étincelle de bonheur A brillé au pays de tes malheurs, Et ton âme a souri. Tout un peuple en liesse Longtemps méprisé Verra peut-être sa noblesse D’esprit enrichir la société… Pour toi Esclave déraciné, Une nouvelle ère est née Pour qu’enfin grandisse la flamme Pour la Paix des Êtres et le silence des armes… 89
  • 90. Livre 18 Para ti, esclavo negro… Una voz ha subido Desde tiempos históricos, Para recordar al mundo embrutecido Que la esperanza es magnifica… Una luz maravillosa Que se quisiera eterna Ha venido aclarar; luminosa; El rumbo de un ser fraternal… ¡Es un poco como una venganza De la Historia sobre el pasado! ¡Es un poco como una benevolencia Del azar sobre el racismo que se quiere matar! Para ti, Esclavo de antaño, Una chispa de felicidad Ha brillado en el país de tus desgracias, Y tu alma ha sonreído… Todo un pueblo entusiasmado Por mucho tiempo menospreciado Verá tal vez su nobleza De espíritu enriquecer la sociedad… Para ti, Esclavo desarraigado, Una nueva era ha nacido Para que, por fin, crezca la llama Para la Paz de los seres y el silencio de las armas… 90
  • 91. LES CAHIERS DE POESIE Les mains du mensonge Il y a des gens en Occident Qui osent serrer la main De tueurs d’Humanité Sans se soucier du lendemain !… Comment peut-on accepter De commercer avec des esclavagistes Assassinant leur propre société En brouillant les pistes ? Afrique ! Belle Afrique ! Réveille-toi ! Tes enfants pris de panique Ont peur de toi !… Tu as engendré des monstres faits de violence, De haine et de pouvoir, Ne pensant qu’à piller l’abondance De ton sol pour être des pantins noirs !!! Tout se sait un jour Et aujourd’hui il faut parler De ce manque d’amour Qui ne sait que tuer ! L’Histoire est faite de bains de sang, L’esclavagisme occidental n’est plus 91
  • 92. Livre 18 Mais je sais qu’il existe encore, bien vivant Dans tes contrées où la vie ne vit plus ! Les gouvernants de cette planète Signent des pactes avec le diable Pour quelques barils de pétrole ; bête Sournoise et aveuglante ; monnayable !!! Pauvres Humains innocents Qui ne demandez qu’à vivre en paix, On vous tient sous l’effusion de sang, Les tortures et le manque de respect. Où sont passés les Droits de l’Homme ? N’avez-vous pas le droit de vous exprimer ? Pourquoi tant de haine dans cette région du monde ? Pourquoi ne fait-on rien pour tout arrêter ? Et vous, Messieurs les Grands de ce Monde, Comment pouvez-vous fermer les yeux si facilement Sur des horreurs que vous connaissez ? Féconde Est la richesse couleur torture teintée de sang !!! 92
  • 93. LES CAHIERS DE POESIE Las manos de la mantira ¡Hay gente de Occidente Que osa estrechar la mano De asesinos de Humanidad Sin preocuparse del mañana! ¿Cómo se puede aceptar Comerciar con esclavistas Asesinando su propia sociedad Despistando la realidad? ¡África! ¡Bella África! ¡Despiértate! ¡Tus hijos, tomado por el pavor, Tienen miedo de ti! ¡Tú, engendras monstruos hechos de violencia, De odio y de poder, Pensando sólo en saquear la abundancia De tu suelo para ser títeres negros!!! ¡Todo se sabe un día Y hoy hay que hablar De esta falta de amor Que sólo sabe matar! La Historia está hecha de baños de sangre ; El esclavagismo occidental no está más, 93
  • 94. Livre 18 ¡Pero se muy bien que todavía existe aún, bien vivo En tus comarcas donde la vida no vive más! ¡Los gobernantes de este planeta Firman pactos con el diablo Por algunos barriles de petróleo; bestia Hipócrita y deslumbradora; acuñable!!! ¡Pobres humanos inocentes Que sólo piden vivir en paz, Se los tienen bajo el derramamiento de sangre, Torturas innobles y falta de respeto! ¿Dónde están pasados los Derechos del Ser Humano? ¿No tienen derecho a expresarse? ¿Por qué tanto odio en está región del mundo? ¿Por qué no se hace nada para detener todo esto? ¿Y Ustedes, Señores Grandes de este mundo, Cómo pueden cerrar sus ojos tan fácilmente Sobre horrores que Ustedes conocen? ¡Fecunda Es la riqueza color tortura teñida de sangre!!! 94
  • 95. Nouria OTMANI (Suisse) nouria@bluewin.ch 95
  • 96.
  • 97. Hiver dans ma banlieue Bientôt nous tomberons dans le sombre du soir Le visage de l’hiver que l’on peut percevoir Ses rides mélancoliques à la tombée du jour Et le froid qu’on supporte est un fardeau trop lourd Le maçon qui bâtit la maison d’où il sort Devra laisser aux autres la chaleur où l’on dort Au loin une femme pleure pour cet homme qui s’alite Elle devra supporter la misère et les mites Les enfants qui grandissent à l’ombre du soleil Qui connaissent le désert du monde et ses merveilles Où sont passés les rêves les espoirs de chacun Dans le froid du bitume et l’odeur de la faim Les murs de mon quartier ternissent de jours en jours Je dois pouvoir compter sur la force de l’amour Quand l’enfant qui grandit demain ne sera rien Peut-être un fait divers dans les lignes du destin 97
  • 98. Livre 18 Blanc, blanc, blanc SIDA De longs couloirs où le blanc s’alite Sur les murs tant de vide, la maladie s’agite Des visages pâles, sans vie, parfois se lassent De tout ce blanc, ces draps, ces gens qui passent Le repos tant béni se jette sur les corps Chacun est libre de méditer sa mort Le sale sera lavé le matin, au réveil On sentira alors l’odeur du sommeil Sur le papier est inscrite la marche du virus La fenêtre fait rentrer les plus grands autobus Elle se referme enfin en violant les prières Et donne sans partage l’odeur de la terre Et toute cette espérance cachée sous un coussin Elle éteint la lumière, elle vous croise les mains Le sol est toujours propre quand le malade s’en va 98
  • 99. Sandy BEL (France) bel.sandy@yahoo.fr 99
  • 100.
  • 101. Ma patrie, un bout de l’éternité Photo de Gildas Pasquet Ma patrie, un bout de l’éternité. Un lieu sans lieu peint sur un mirage, ailleurs. J’ai oublié ses rives. Je n’ai aucun moyen de les revoir, ni d’ailleurs aucune envie. A cause du pain qui est cher et l’hystérie des colons. Je me souviens de la nuit où je suis partie. Il faisait noir. J’avançais courbée à travers les fleuves taris, le front étincelant de désespoir et les mains implorant du ciel une chose qui me précède. Et plus tard quand une mémoire de larmes me prendra par le cou, comment y retourner ? Comment retrouver l’absurde territoire au milieu des cendres ? 101
  • 102. Livre 18 La guerre est terrible. Elle a tout décimé. L’avenir, le présent et le passé. Souvent entre les eaux du sommeil, mon rêve entrouvre une porte sur une terre entourée de paysages où tout est changé pour le mieux… Du haut de mon nid d’aigle, je vois des fleurs sur les tables dans les cafés, au cœur de la foule le méchant Bascom qui est devenu aveugle, distribue tout son argent, mettant fin à son règne tyrannique depuis deux mille ans mais marquant son retour à Dieu. Quelle effervescence dans la ville au répit qui se maquille ? Et je sens comme un feu s’allumer au coin de mon cœur et réchauffer mon visage. Je ne m’étonne de rien mais avant d’entrer à l’aurore je m’approche avec le désir du partage. A l’improviste, le vent se lève et arrête le mouvement impétueux de mes yeux. Une poussière se met à danser autour de ma tête. Chuchotement de défaite. Silence de l’énigme qui crache son étrangeté. Perte des repères de la ligne du cœur. Dans l’impatience tout demeure inaccessible. Sans parvenir à m’éloigner, triste je tourne, je tourne encore à la recherche d’un autre chemin de la plaine reconquise qu’on raconte dans les légendes. 102
  • 103. LES CAHIERS DE POESIE A l’heure ou Les ampoules s’éteignent, l’aube tombe le rêve sur la grève, sa douleur retient une ombre qui dort toute nue. Il n’y a ni distance entre nous ni vent. Est-ce mon image ce rêve qui porte un visage familier ? Un soir je reviendrai dans la lumière électrique. J’y courrai avec les oiseaux migrateurs en brassant l’air comme dans un rêve. 103
  • 104.
  • 105. Carla. (France) carla.p@laposte.net 105
  • 106.
  • 107. En échappé Juste une ville, comme un tribut - Ma négligence - Avec ses gris en suspension Ses parures ou ses plis Mais reste-t-il une ombre En échappé Car la lune, si douce Vient à manquer Le vent se plait…Ma voix s’est tue Car dans l’allée Il reste un Homme… 107
  • 108. Livre 18 La lumière ment Rien à voir La lumière ment Ici l’on éteint les midis de soleil Et l’on isole le cri, du vent Rien à voir Avec les grands feux du dedans Ce qui les réchauffe là-bas Nous brûle ici et maintenant Rien à voir Les mots circulent en passants Dévêtus des foulées d’ivresse Il faut danser à même le sang Lèvres mordues Flammes sans laisse Rien à voir La lumière ment 108
  • 109. LES CAHIERS DE POESIE Le jardin de mes rues Motifs affleurent Sur décor nu Les impressions de ma tendresse Ont des couleurs tissées à cru Deux ou trois roses Un parfum d’eau… C’est dans le jardin de mes rues Que j’aime à perdre ton adresse Au fil des peaux Au fil des peaux… 109
  • 110. Livre 18 Chants du regard Chants du regard Sans parure, en négligé Comme un dialogue… Dans les allées -Nos profondeurs- La main récolte des bribes d’eau Petite pluie sans évidence À bord du silence et ses mots Je te regarde… Vivre A cette couleur là 110
  • 111. Anick ROSCHI (France) anirosch@aliceadsl.fr http://www.editionsducygne.com/editions-du-cygne- catalogue-litterature.html 111
  • 112.
  • 113. Capitale Terre Voici le temps Partagé De nos dernières richesses À chaque naissance Liberté Une goutte d’eau Assoiffée de rivière À chaque naissance Égalité Une goutte de sueur Épuisée de misère À chaque naissance Fraternité Une goutte d’air Souillée de déserts Voici le temps Exorcisé De nos raisons planétaires Le temps Articulé D’une capitale Terre. 113
  • 114.
  • 115. Léonard MOUTI (France) mouti@mageos.com 115
  • 116.
  • 117. Le chat persan et le cerf-volant Un tapis d’Orient où dormait un chat persan Rêvait à son enfance : Un long fil en laine qui tourne autour de la terre Il ira au soleil Il ira au soleil Certainement Mais le chat dans son rêve était déjà là-bas Au soleil… Et la terre entière au bout du fil en laine Était son cerf-volant Quelle est folle la Terre ! – Maman ! A quoi servent les cerfs-volants ? 117
  • 118. Livre 18 Le passé Quatre-z-yeux Sans visages Se contemplaient dans les cieux Le z’oiseau bleu du regard Venait juste de passer… …Un nuage de parfum Quatre-z-yeux Sans visages Pleuraient, seuls, le passé Quattro occhi Senza volto Si contemplavano nel cielo L’uccello blu dello sguardo Era appena passato… …onda di profumo Quattro occhi Senza volto Piangevano soli Il passato 118
  • 119. LES CAHIERS DE POESIE Italièrie Arôme de l’homme qui À mobylette Traversait Rome Pour offrir à la pluie son parapluie À l’âme italienne de toutes les hirondelles Cet arôme y demeure Un bouton rose Sur les jeunes joues des vestes de la nuit… …de Roma Aroma dell’uomo che In motocicletta Attraversò Roma Per offrire alla pioggia il suo ombrello All’anima italiana di tutte le rondini Quest’aroma vi resta Un bottone rosa Sulle giovani gote delle giacche della notte Di Roma 119
  • 120. Livre 18 Les mots des poètes Mi fugue Mi destin Mon incroyable chemin Court Il court sur mon corps Cruel Brûlez à l’eau forte Les mots des poètes 120
  • 121. Joseph ELEVEN (Canada) charline22_@hotmail.com 121
  • 122.
  • 123. Le poirier À Anne-Marie Poirier Sous le grand poirier sauvage Une vieille femme éreintée Encombrée de lourd bagage Récite, une prière chantée Sous le grand poirier sauvage Vers le ciel d’encre violâtre Ses grands yeux bleus, délavés Se pâme le soleil rosâtre Ses cheveux blonds envolés Vers le ciel d’encre violâtre Gambille l’écrivaine rêveuse Pirouettant sur ses patins Une œillade amoureuse Sur la glace des lieux saints Gambille l’écrivaine rêveuse Son corps mûr, plié en poire L’âme vagabonde, dans le Nord Au sommet d’un mont d’ivoire Un vent glacé berce son corps Son corps mûr, plié en poire 123
  • 124. Livre 18 La vieille duchesse sous l’arbre Le temps cueillant le fruit mûr Prisonnière dans le marbre Voyez dans la glace : l’azur La vieille duchesse sous l’arbre. Soleil basilic Le cœur sonnette de son dard Venin mortel, sourd amoureux. Le crâne ceint de beauté ; hors - Nous sommes des serpents hideux ! L’amour, cracheur de feu volage De corps sain et joli visage. Le doux printemps pond ses éclats De verre. Éternel soleil. Ah ! Toujours, le matin chatoiement (Jeunesse aux yeux de basilic) Réveillera notre œil critique Et souvent, muera le serpent ! 124
  • 125. LES CAHIERS DE POESIE Anamnèse Le crépuscule de mes paupières Borde mes yeux fatigués. Sous les draps fripés de l’âge, Chrysalide et sylphide dorment Dans le ventre de mes pensées. Le cri amer du froid de l’hiver Pénètre l’asile de mon univers givré. Sous mes yeux se creuse une plage Où les cocons onéreux se lézardent ; Délivrant des papillons prématurés. Sur les fleurs de mon âme, mère florifère ! Volettent les nouveau-nés malformés. Suppliant Dieu, les mains au visage De pardonner ma bouche blasphème… Oh, Seigneur, j’aurai dû m’avorter ! 125
  • 126. Livre 18 Le paradis des charmes Mon corps momifié jusqu’aux rondes encolures, Pectinés, les cils voilent mes cernes en moulures Sous les portes cintrées de mes roses paupières Plongé dans la contemplation ; blanches prières ! Le scaphandrier sur l’azur du ciel vogue Scaphandre désert ; l’âme vaisseau en fugue De l’entrave charnelle, l’esprit libre voltige. L’œil fureteur contemple le doux vertige ! Un vent bruineux longtemps, souffle une brise Sur l’impureté décharnée ; l’informe visage ! Sur mon front vaporeux, perlé de glaçage L’onctueuse rosée légèrement assise ! Et un miroir d’eau couché aux reflets jade Entre les seins montagneux ; les vallées natales ! Se lève à mon entrée, le soleil Oréade M’accueillant sous une pluie d’orange pétales Au bal des quatre vents, les joyeux quadrilles ! Vastes champs de lavande et d’épilobe Froufroutante et mauve, l’ondoyante robe S’abandonne dénouant ses parfums mantilles Blanc duvet d’une blancheur neigeuse sublime… Du ciel, un grand oiseau rameur, angélique ! 126
  • 127. LES CAHIERS DE POESIE Flavescent, vers moi, son chaud rayon mystique De ses ondes infinies de lumière, ranime Ma chair inerte et mon cher cœur de braise ! Où mes yeux chavirés, sur la plage spectrale Du haut plafond, de la chambre sépulcrale ; S’ouvre, des écluses de l’œil, la mince daraise Sur ma joue de galet, un torrent de larmes Pleure en rosaire, le paradis des charmes ! Dans les sables mouvants s’enlisent les friables Prières ; mon être, risée par les diables. Sous les lourdes portes, englouties par les dunes Ma soupente cervelle pareille à des lunes Fendantes ; entre réalité et rêve La Créatrice folie : tranchant du glaive ! 127
  • 128. Livre 18 Le jardin des grimoires Je me rappelle son long collier blanc Bercé par les vagues de solitude Sur les fleurs éphémères ; d’où le vent De fraîcheur, à sa douce habitude Parfumait la volante et immortelle Robe, sur le jardin de l’âge d’or ! Elle a peint la plus charmante aquarelle Au cadre de fenêtre, sans décor Et cent fois, elle y a peint une cage Sans foi, aux franges du brun désespoir S’envolaient la fredaine pâturage Et puis, le silence dans un mouchoir ! Été comme hiver, la vieille chaise Berçante de ses longs bras oscillants Chantèrent ensemble près de la fournaise ; Le vieux fourneau de ses chaudrons brûlants ! Et encore, parfois, les cassolettes Parfums d’antan, mijotent leurs recettes À la clémence des quatre saisons ; Les grands-mères aux châssis des maisons Peignent le plus florissant des jardins Dans l’éternel printemps de nos mémoires. Dans nos cœurs émigrent les pèlerins Souvenirs ; au nom des oiseaux grimoires ! 128
  • 129. Francine GADBOIS (Canada) patetfrancine@hotmail.com 129
  • 130.
  • 131. Les blues du lundi Elles s’accumulent tous les lundis Les dépêches, les correspondances Sur le bureau Un tas de factures qui ne sourient pas Les ombres qui dictent autour d’elles Les allées et venues des nuages L’accumulation des orages Les débats qui n’en finissent plus Et le téléphone Ne cesse de pleurer Dans ma tête Tout ce vacarme d’images Tout ce va et vient de mots Ces sensations d’automates Qui s’incrustent en moi À en perdre haleine Je pénètre Dans le tourbillon quotidien Des tourments Des insatisfactions Des bombardements Et de la colère Je n’ai qu’une mission Tout foutre en l’air 131
  • 132. Livre 18 Vendredi je t’attends Aide-moi à faire le vide Montre-moi le bout de ton nez Fais-moi entendre ta voix Pendant que ta douceur Aiguise mes sens Contre la froideur de l’absence Et mes blues du lundi 132
  • 133. LES CAHIERS DE POESIE Ton retour Je te perds Petit à petit Tu t’éloignes Je le sens Ta silhouette À l’horizon Disparaît Trêve de clairvoyance Une hésitation Dans la pénombre En est même disparue Mon ombre À jamais Elle te cherche Elle quémande Ton retour 133
  • 134. Livre 18 La critique Elle n’en fait qu’à sa tête Consternée des réactions suscitées autour d’elle Elle se fout des qu’en dira-t-on Elle aime sans condition Les écrits Les épigraphes Et tous les tableaux Ceux qui vous font rire aux larmes Et qui ressuscitent le soleil dans le cœur de l’éploré Ceux qu’on n’oublie jamais Les bouquins classiques méritant qu’on s’y attarde Et qui nous éclaboussent d’émotions De sensations diaboliques à nous faire perdre la tête Et de sentiments troublants À nous faire perdre haleine Elle critique Sans cesse Tout ce qui effleure ses sens Et tout ce qui donne un sens À sa vie. 134
  • 135. LES CAHIERS DE POESIE C’est fini L’escalier des regrets Les enjambées de l’ignorance… Tant de marches à monter À en perdre haleine Pour se faire rouler dans une couverture Du haut de l’escalier D’un seul coup de balai D’un revers de main D’un croc-en-jambe Jusqu’en bas Le parvis des mots N’a nullement besoin d’un escalier Imposant son sombre dictat Sur la beauté du rêve La recherche de l’emprise Son besoin de dominer N’aura su tromper mon œil de lynx Férocement bien ouvert à toutes ses atrocités Plus aucun mystère Pour son cœur de pierre C’est fini !!! 135
  • 136.
  • 137. Déa L’HOËST (France) contact@dealhoest.com www.dealhoest.com www.equilyrics.com 137
  • 138.
  • 139. Quamille - jeune jument Haflinger regard de douceur avant que sa vie ne lui ait été volée… www.lfpc.asso.fr/Affaires/Quamille/Quamille.html 139
  • 140.
  • 141. sens sur ta joue longue nuit quand le soleil fuit lui qui aimait éperdument plonger son sourire étincelant le matin, en se réveillant dans l’or blanc si fin de ses crins Longue nuit quand le sommeil fuit devant nos rêves saccagés devant une foule enragée seul sur un chemin perdu avec ce cri, déchiré, espoir trahi, vie rompue longue nuit sans pleurs, juste la pluie lave mes pages, efface mes torrents, les traces de mes larmes séchées sous un soleil d’or blanc d’été sens sur ta joue ses cils dorés… pour Quamille et Lubie, Thierry, Arnaud, Michel qui les ont aimées et nos nuits blanches Hernan, 9 mars 2009 141
  • 142. Livre 18 ses yeux un jour, dans son temps ou dans dix ans, une pouliche naîtra crins de soie robe d’or feu front étoilé avec ses yeux ses yeux… et tu sentira ses cils sur ta joue incrédule tu la reconnaitras pour Thierry dans le souvenir de demain qui attend déjà Hernan, 10 mars 2009 Déa L’Hoëst 142
  • 143. LES CAHIERS DE POESIE cinq ans… version française librement re-écrite d’après l’allemand « südostmond » décembre 2006 puisque demain les enfants joueront toujours, demain les camélias fleuriront encore là où passe le petit chat et des poulains naitront au printemps puisque la marque au fer rouge, trace de ta jalousie s’adoucira puisque… sous la caresse de ma main tu dors, mon joli la chaleur de midi, le sable blanc 143
  • 144. Livre 18 de la dune fleurie d’or berce ton oubli ars dans la rêverie du temps, oublie ma tristesse, le soleil couchant dans le froid sous les branches du grand pin couché par le vent où je t’ai quitté oublie tes moments de solitude, de détresse d’abandon… pendant cinq ans… reviens-moi puisque demain encore je penserai à toi puisque demain encore des enfants t’attendront pour jouer avec toi, avec des poulains et le grand chat quand refleuriront 144
  • 145. LES CAHIERS DE POESIE les camélias à Tayzon 12 mars 2009 quart de lune plein jour haut dans le vent vole la neige des vagues immensément cabrées dans un caprice d’écume épaisse parsemant de flocons blancs toute la plage ; mon jeune alezan fuit à travers la mousse salée, cabriolant, sautillant, zigzaguant, déchaîné dans son jeu d’éviter ces fleurs marines qui dansent, se défoulant au jeu volant avec des balles ailées de plumes poussées au souffle de la brise qui les déchire en mille lambeaux pour construire au pied des dunes avec cette neige des châteaux ; haut dans le ciel montent les vagues aux crinières ondulées, frisées, cabriolant sous la force du vent piqués des dards d’un soleil couchant, tous crins dressés pour chatouiller les gigantesques baleines bleutées en montagnes de nuages gris au ciel novembre lumineux, dressées dans leur immobilité étonnante, étonnées, figées, 145
  • 146. Livre 18 elles contemplent bouche bée la lune croissant brillant blanc platine qui couronne les dunes au sud-est dans un ciel bleu cyan plein jour, bien avant que ne tombe le soir 146
  • 147. LES CAHIERS DE POESIE rives de rêves passage nocturne au détour des pages m’ouvre la porte de plaintes tout en douceur accrochées aux rêves, à l’image de fleurs fanées déjà, jetées là sur le passage voilés les souvenirs de bonheurs mutilés, un passé qui s’impose dans le matin clair, dicte la marche, guide les pas à l’envers : le sommeil vole la vie au chant éveillé paupières lourdes refusent de se fermer dénigrent le sommeil, refusent de rêver s’ouvrent toujours aux jours où la vie fut grande brillent du feu d’un passé à peine perdu pour renouer tous les fils d’une vie rompue yeux rivés sur les rives blanches du monde sonnet, décembre 2007 147
  • 148. Livre 18 vents vent d’été je tourne la tête vers le haut, vers le chaud sur ma peau : dans mes yeux dansent, rondes dans l’indéfini de mon monde des lumières en jeu, boules en fête, boules en feu vent de pluie je lève les yeux, cherche le feu chaud des boules dans le gris sombre monotone d’un matin d’automne : mais au lieu de boules de feux des gouttes roulent en pluie sur mes joues vent de nuit 148
  • 149. LES CAHIERS DE POESIE blottie dans ses bras forts, le vent froid calme le feu, calme mes yeux, caresse mes tempes endolories : en bas dans la vallée la ville endormie se berce sans bruit sur ailes d’éphémères et murmure ses lumières Hernan, 12 février 2009 impressions visuelles d’une petite fille 149
  • 150. Livre 18 tout oublié j’ai tout oublié, écarté dans les recoins de demains d’avant-hier tout oublié le petit chemin, toi chevauchant fier ton gris-fer, oreilles tendues, naseaux dilatés, humant l’air sous les grands pins, là où passait parfois le brocard solitaire, celui, tu sais, au bois gauche cassé cet été là, à force de s’être trop battu je l’ai oublié cette brise 150
  • 151. LES CAHIERS DE POESIE salée sur ma peau frisant tes cheveux sur ta nuque bronzée, les fougères si hautes, si denses cet été là pliant en douceur sous la cadence de nos chevaux en sueur oublié comme tu avançais dans le sous-bois me tournant ton dos un peu voûté un peu fatigué à force de t’être trop battu, aussi comment regard au loin tu m’écoutais chanter souriant scrutant déjà le ciel bleu d’été dans l’espoir des bleues d’automne Hernan, novembre 2008 151
  • 152.
  • 153. Morgan RIET (France) morganriet@live.fr 153
  • 154.
  • 155. Asnelles1 Voici la mer qui bat son plein, érodant au passage les pontons de la dernière guerre. Cette rumeur qu’elle écrit et qui s’en vient remplir la page claire de l’instant lui est soufflée, bien sûr, par son allié d’immémoriales joutes, le vent. Et nous, les déliés de son message entêtant, d’un pas lent et pensif, nous longeons sa splendeur – coquillage de l’oreille grand ouvert à sa victoire inexorable. 1 Village situé sur les plages du Débarquement. 155
  • 156. Livre 18 Élégie amazonienne Inspiration, expiration, inspiration, expiration… percevez-vous, du poumon graillonneux de la terre à nos frêles alvéoles, le carcinome de nos actes dont découle en fanfare la clameur déchirante des arbres ? Inspiration, expiration, inspiration, expiration… oh dites, percevez-vous, sous la caresse rieuse du moindre brin d’herbe, la vertigineuse étendue d’angoisse de la feuille à tout jamais blanche du monde ? 156
  • 157. LES CAHIERS DE POESIE Marin de terre à Xavier Kergoat, 25 décembre 2008. Un peu navire, mon cher échalas, mon ami au long cours. Il faut les voir, tes bras, on dirait des mâts prêts à recevoir et hisser voilures de rêves. 157
  • 158. Livre 18 Neige Je te regarde. Mais que dire sur toi, si ce n’est que tu tombes, qu’invariablement tu es blanche et froide et que, bientôt, épaisse ou non, tu finiras banalement par fondre ? Je me hasarde… Mais qu’ajouter de plus que quiconque, ici, me suit ou bien me précède, et a pu t’observer de même, en ayant sans nul doute rivé à meilleurs chants ta nature éphémère ? Mon souffle avare ! Et pourtant… l’encre à opposer à ta blancheur de matin vespéral. 158
  • 159. Môh TSU (France) m.oumama@free.fr 159
  • 160.
  • 161. Le chat sur le mur Le vent souffle des pensées noires à ma mémoire Je revois l’automobile venir et repartir dans le noir Et un vent glacial l’accompagnait, suivi de regards Faits d’interrogations, des commentaires du parloir. C’était devant cette maison devant laquelle je suis Que traverse un chat loin des sirènes, loin du bruit Le silence ayant pris possession des lieux maudits Dont un volet grinçant rappelle une trace de la vie. Et le chat à ma vue, étrangement seul, dans la cour, Après être descendu du grand mur, soudain à son tour, Se met à miauler, à geindre, devant le portail mort, Rouillé comme les chaines qui pendent au dehors ! C’est bien dans cette maison que tout s’était produit, Que l’horreur a pris corps, un monstre a ôté la vie À la fillette venue demander du lait pour le chat ! Depuis, dit-on, on l’entend et on l’aperçoit parfois. 161
  • 162. Livre 18 Vieux Louis Je quitte cette maison abandonnée en direction du centre Et voilà à qu’à ma surprise, au hasard d’une rencontre Je retrouve le vieux Louis comme on aime à l’appeler ici. Un homme gentil, avec le teint pâle et les cheveux gris. Ses rides montrent qu’il avait vécu dans l’âpre misère, Le fin fond de l’isolement connu de l’enfant sans sa mère. Brave homme qui n’a pas eu de chance durant sa vie… Et à qui on connait pour seule compagnie l’eau de vie. Cette eau de vie qui le rend ivre mort à la sortie du bar Où il passe ses journées à jouer aux cartes et à boire ; À tuer le temps en attendant que lui fasse "son heure" Comme il dit avec un rire efficace, la main sur le cœur. Comme toujours, me salue en m’appelant "mon garçon" Comme pour rappeler à sa vie ce manque d’affection Qui donne envie à tout être humain de vivre en famille. Mais lui a toujours été seul, enfermé dans la petite ville. Je le salue aussi et m’arrête un instant le voir s’éloigner, Le pas comme le cœur, lourds, vers l’endroit où j’étais… Il s’y arrête et regarde le chat miauler, seul comme lui. Une tranche de vie de celui qu’on appelle ici vieux Louis. 162
  • 163. LES CAHIERS DE POESIE Cœurs sans deuil J’avance dans la ville, la pensée ailleurs, face au vent. En allant rejoindre une précieuse amie qui m’attend… Pour un rendez-vous, discuter et planifier son avenir, Quand je vois, triste, le mélancolique passé resurgir, En me dirigeant vers le restaurant où j’avais réservé, J’ai vu cette femme connue de la ville, assez pressée, Sortir du bar-tabac, le visage et l’être décomposés, L’âme ailleurs comme d’habitude, en femme brisée. Une femme qu’on dit aussi folle, perdue, sans âme, Mais avec des états d’âmes avec la douleur du drame Qu’elle a vécu, il y a de cela plusieurs années déjà Alors mère de la fillette morte un jour de grand froid. On dit qu’elle n’arrive jamais fait le deuil et s’en veut D’avoir connu ce monstre qui a pris «son précieux»… Trésor pour une femme : son cœur, sa vie, son enfant. C’était son ex compagnon, jaloux d’un pseudo amant. Certains lui prêtaient une liaison avec le vieux Louis, Sans rien prouver. Et par vengeance, l’autre a ôté la vie À sa petite fille dont personne ne connait le vrai père. Mais que ces mêmes langues disent enfant d’adultère. Alors que je marche encore et arrive près du restaurant, Je me retourne brusquement comme les autres passants. Au loin sa voiture a freiné sec, sans savoir pourquoi… Avant d’apercevoir sur une voiture du bas côté le chat. 163
  • 164.
  • 165. Max DE BACKER (Belgique) max@dfib.net 165
  • 166.
  • 167. L’écrit vain Envie d’écrire De partager Notre Amour naissant Présent Aux échanges de pupilles dilatées Bleutées et grisées de désir Réciproque Envie de partager D’être enfin Ce que nous n’avons jamais pu Nous avouer Mais en vain… 167
  • 168. Livre 18 Éclaircie Nuages de pages blanches Où viennent se crasher mes maux Solitaires accomplis Indispensables à ma survie Dure prérogative Que celle De ne rien demander ni attendre Éclaircies Apprécier Ces sens uniques Se dessiner enfin À ma vie… 168
  • 169. LES CAHIERS DE POESIE Belle Belle Clandestine passion de nos cœurs Saveurs paisibles De bulles et rythmes effervescents Incitation à vivre uniquement Du présent Belle Sensible et sentimentale Accordant chaque corde de nos violoncelles Pour que jamais aucune note Diabolique et victime Ne vienne Nous envenimer Belle Réceptive à nos charmes À la sincérité de nos regards Belle Blanche ailée La plus belle… 169
  • 170.
  • 171. Nicolas CHEVALIER BAHUAUD (France) nicolas.chevalier@free.fr Photo : Wenceslas Chevalier www.constantine-photography.com 171
  • 172.
  • 173. Si belle Essaouira Le jour paré des flots d’entre les fonds s’éclaire Un matin solitaire au fil au ras des eaux Seul un trait, un halo, un horizon de terre La ville sur la mer comme un seul oripeau Le vent les fait briller d’une écume de sable Le ciel est noir de nuit et la ville endormie Lorsque revient le jour, on chante alors la fable Des bateaux des marins aux mers ainsi soumis Cette Afrique si blanche est venue de mon rêve D’un passé animé de canons en bastions Des cendres des absents et des vagues de sève Ligne lasse elle étend les maisons les missions De la mer, l’azur bleu couronne ces beautés Le jour n’est que matin triomphant et heureux Quand l’océan fougueux s’enflamme à ses côtés Essaouira s’éveille ardente au cœur joyeux 173
  • 174. Livre 18 Avec toi Ne me laisse pas mourir Seul avec un inconnu Ne me laisse pas partir Sans toi sans t’avoir revu Dis-moi, au dernier instant Je veux de tes bras ballants Des caresses de tes mains Un geste, un rire un destin C’est toi qui me porteras Et tes doigts dans mes cheveux A toi qui me mèneras Là, je pourrai dire adieu Dis-moi, au moment ultime Tu seras là ? Là tout près Contre moi face au vent frais Qui m’attire dans l’abîme 174
  • 175. LES CAHIERS DE POESIE Les Evzones d’Athènes Guerre Inconnu Toi Gardien de la stèle Garde Immortel Toi Gardien République Marche Et martèle Toi Et marche soldat Claque Frappe et frappe Toi Un deux en sabot Veille Et surveille Toi Et au pas au pas Vent Bondissant Loin Et vole gardien 175
  • 176.
  • 177. Jean-Michel A. HATTON (USA) jm.a.hatton@gmail.com http://lencrier.wordpress.com 177
  • 178.
  • 179. Rebelle Sa chevelure lèche le ciel; troupeau de gazelles bondissantes, lapant les steppes azurées de leur sabots de soie. Ses bras découvrent les chemins que ses doigts griffent dans l’air, sa respiration enveloppe ses élans comme un châle frémit par le vent, ses lèvres et ses paupières haletantes enfièvrent la rocaille sèche de la robe de ses dérobées, Ô tellement fraiches. Ses anches telles les ailes d’un papillon fouillent chaque recoin d’air, 179
  • 180. Livre 18 traduisent avidement une à une les runes oubliées, et s’abreuvent d’une langue qui ne s’épanche qu’avec le corps. Oh, laissez-la, vous! Ses pas, pulsant le sol saoul, brûlent de l’aquilon Afghan la poussière en diamants, au son de cette musique longtemps interdite par les Talibans. De la rebelle en treillis, la Kalashnikov et les grenades ont disparus, déchus par des perles de sueur que ses danses tissent en rivière sur son cou mat; aux yeux de ce jeune soldat un petit homme de pas plus de seize 180
  • 181. LES CAHIERS DE POESIE elle n’est plus qu’un cygne dans le désert et il en pleure. Il en pleure des pleurs saccadés, qui sentent si bon la liberté car le môme ne savait pas que c’était si beau de voir une femme danser. 181
  • 182.
  • 183. Frédéric BRULS (Belgique) hp281271@hotmail.com 183
  • 184.
  • 185. Le papillon Traçant dans l’air d’été son folâtre dessin, Le papillon recherche un nectar qui l’enivre : Bienheureux l’animal qui n’a d’autre dessein Qu’un calice ignorant les morsures du givre ! Comme une feuille flotte au dessus du chemin, Il s’envole à la mort qu’un vent noir lui délivre, Mais l’instinct qui le fait oublieux du demain Le préserve toujours de la douleur de vivre. Lorsque l’angoisse épie et pourchasse mon cœur, A l’heure où sans un bruit, d’un geste ample et vainqueur, La nuit rabat sur moi son filet d’étincelles, Je ne peux, pris aux rets de ces soleils lointains, Percé de leurs rayons depuis longtemps éteints, Déployer qu’un regard peint d’aveugles ocelles. 185
  • 186. Livre 18 Storm Soudain, dans l’ouragan que leur galop déchaîne, Les nuages gonflés de fureur et de haine, Montés sur leurs chevaux que n’apaise aucun frein, Font luire dans les airs leurs longs sabres d’airain ! Fantassins en rempart dressant leurs hallebardes, Les lisières des bois se tiennent sur leurs gardes, Mais le choc est si dur que leurs corps fracassés Tombent en gémissant, dans la fosse, entassés. Je vois étinceler, sur les eaux qui refluent, Les éperons aux flancs des coursiers qui se ruent Dans les roulements sourds des tambours en renforts… Une nuée au loin se déchire et s’enflamme, Comme le drapeau blanc qui tremblote et réclame Un lit pour les blessés, un tombeau pour les morts. 186
  • 187. LES CAHIERS DE POESIE Le sacre de l’automne A ta beauté je veux offrir cette couronne ; A vous, chemins des bois par la grume embaumés ! Je hume le parfum de tes cheveux aimés Où tombent en langueur les frondaisons d’automne. Sous ces fauves couverts que la sève abandonne, Rêveur, je me repose, et mes regards charmés Suivent les mouvements des rameaux alarmés Par la brise du soir où le soleil frissonne. Cascatelle qui croule et glisse en longs froufrous, Ton flot tumultueux teinte de reflets roux, Sur un lit de rochers, la mousse, et la renverse… Tends-moi ta chevelure aux filaments de miel, Et je la dénouerai de ma main qui la berce, Ma reine, pour couvrir l’immensité du ciel. 187
  • 188. Livre 18 Tombeau du chat Ami du pharaon, confident du poète, Il n’obéit jamais qu’aux lois de son désir, Et d’un songe lointain prolongeant la conquête, Il nous prend d’un regard impossible à saisir… Le mystère est ton arme, étrange et noble bête, Jalouse de se plaire et de s’appartenir, Dont je caresse encore en un coin de ma tête, Grisé par son pouvoir, le vibrant souvenir. Dans ton pelage épais et chaud comme une laine, Cependant que mes doigts dessinaient en douceur Le motif amoureux dont mon âme était pleine, Tu savais de ta griffe, avec un air moqueur, Agacer mon chandail pour l’effiler sans peine, Et débrouiller ainsi l’écheveau de mon cœur… Tout çà pour chat… 188
  • 189. Diane MERLI (France) dianemerli@hotmail.fr 189
  • 190.
  • 191. Weeds Le serpent gît sous les décombres Comme un bandeau de fer C’est de son revers qu’on le distingue Comme un soulier de verre C’est de son reflet que l’on s’écarte Le serpent vit sous les décombres Trahi par son venin Il reste seul sous les décombres. Underground J’épie les regards froissés J’épie le vent caresser ta peau J’épie ta raison et te déteste J’envie les rayons qui te blessent 191
  • 192. Livre 18 Clair-obscur Le noir couloir de mes sombres victoires Au lendemain d’un monde de funestes espoirs et d’éternels regrets De ta douce voix siffle une chanson pour sourds Pour ceux qui perçoivent ce que l’on n’entend plus Un triste matin fait de lumière et d’or De rose et de bleu te noie Ton matin est un souffle Une bise qui réchauffe ma peau Ma peau, mon sel, mon essence Ma douce peine n’est plus qu’un air Un air triste que l’on ne fredonne plus Un de ces air que l’on ne peut plus entendre Un air de rien Rion Les décombre abstraits Aveuglent les penseurs Aux chemins divergents Du mal et de ses fleurs 192
  • 193. LES CAHIERS DE POESIE Bar 3 Je rêve d’un monde de silence, où tout se sait sans se dire. Une omniscience sans précédent. Un monde simple et utopique. Mais c’est un monde sans double sens. Un monde de triste solitude. Un peuple et son opium. Un odieux châtiment dont l’origine écœure. Une silhouette sans forme trahissant les décombre d’un rêve suspendu. Un rêve tenace rongé par ses idées. Aucun pied sur une terre qui s’effondre. Mais l’espoir, encore, dans son obscur nuage, de rage et de démence. Et tout recommencer une fois de plus. Et tout perdre à nouveau, sans chercher à comprendre l’absence de vertige. Une conscience des sens. Une ruine funeste. Une abjecte suffisance de sulfureuses jalousies. Une fausse passion fondée sur l’impuissance, l’incapacité même d’être seulement soi-même. Up side Down Un gouffre nous sépare : les autres. Dédale. Détalles! 193
  • 194. Livre 18 John Jane June L’académie des mots. Des amants morts. Déments. Montobello Des hommes en bleu blanc rouge sous la fumée. Un peuple et sa patrie. Sous la fumée, la mort. One Laissons-les dires. Laissons-les faire. Défaire ces mots. 194
  • 195. Yaïr BIRAN (Israël) ybiran@netvision.net.il 195
  • 196.
  • 197. Les vraies vacances Quand on prend les grandes vacances de la vie les saisons n’ont plus d’importance l’été, l’automne ou l’hiver, qu’importe excepté le printemps avec sa douceur ses fleurs ses odeurs ses caresses. Quand on prend les grandes vacances de la vie plus de contraintes ni d’obligations trop dures, imposées d’en haut, sauf celles qu’on s’impose soi-même dans l’idée qu’il est bon de faire quelque chose. Pensez donc, on se lève à son heure on déjeune comme on veut quand on veut on musarde et on joue à cache-cache avec le temps avec son épouse ou avec les petits-enfants rieurs espiègles. Il y a encore bien des choses dans les grandes vacances de la vie finalement le temps est court on voudrait toucher à tout, tout faire à chaque jour ne suffit pas sa peine. C’est le temps gagné sur le temps le temps des cerises et des fraises celui qu’on goûte sans trop penser au lendemain le rab, la rallonge en somme celui qui toujours fait du bien. 197
  • 198. Livre 18 C’est incroyable Toujours l’événement gêne la pensée le sentiment domine l’émotion brouille la vue les yeux pleurent avant d’avoir compris ce qu’il en est c’est ce qui n’est pas qui compte le je ne sais quoi est tout presque rien n’est compréhensible et le reste à l’avenant… on veut retrouver l’intelligible on n’y parvient pas c’est ça l’aventure du hasard c’est ça le fruit des jours qui passent et reviennent des jours qui fuient indéchiffrables les jours perdus impénétrables transpercés de mille hasards. Et nous toujours nous resterons abandonnés dépassés déplacés détrompés par le réel tortueux trompés par nos frères humains impénétrables eux mais révoltés notre naïveté sans bornes toujours trébuchera d’une déception à l’autre sans cesse et encore seul le Malin y retrouve ses petits. 198
  • 199. LES CAHIERS DE POESIE Le bleu du ciel Que le ciel est bleu, mais quel bleu le ciel est bleu d’un bleu infini un bleu rêvé mais quelle palette cette immensité que l’on aime vers laquelle on aspire transporté alors c’est si beau on voudrait chanter cet espace ce champ illimité des espoirs la promenade immortelle des fleurs bleues où il n’y a que des nuages de sérénité nous regardons et c’est trop beau l’esprit vagabonde l’imagination s’envole trop d’images poétiques qui affluent le peintre prend son pinceau et brosse un tableau de rêve enchanté Que le ciel est bleu d’un bleu profond nous on chavire on a l’âme ravie et pourtant ces cieux sont trompeurs en dessous il y a des hommes qui eux ne rêvent pas comme nous sauf plaies et bosses leur méchanceté leur hargne se déchaînent pour démentir le bleu des cieux et le larder de griffes rouges de feu et de sang. 199
  • 200. Livre 18 Retrouver Retrouver la tranquillité des jours de peur de l’avoir perdue la naïveté de l’enfance et ses tableaux ses aquarelles Retrouver l’émerveillement de jadis le chatoiement des feuilles au soleil le gazouillis des oiseaux la rosée du matin chantant Quelque chose que nous avons aimé un passé que nous croyons plus beau à ce jour vu de loin parce que c’est en nous filtré par les ans les saisons mais toujours il nous est cher et nous voulons donc le revoir le revivre le respirer le sentir C’était la tranquillité des jours celle dont on se souvient qui nous emplissait de joie discrète Ah ! quand la reverrons-nous ? 200
  • 201. LES CAHIERS DE POESIE Ah la parole ! Mes nuits sont plus longues que vos jours ! Mais qu’est-ce que cela veut dire comment est-ce possible ? ça n’a ni queue ni tête où sont la logique le bon sens n’importe où n’importe quoi on parle à tort et à travers voyez-moi ça ça cause ça dit on ne sait quoi à vous donner le tournis C’est ça, n’est-ce pas, la machine à paroles ! Comme disait Noam Chomsky chaque locuteur sait inventer une infinité de phrases et c’est ça le discours. Alors j’invente… 201
  • 202.
  • 203. Josée KRATOCHWIL (Luxembourg) tycho@pt.lu 203
  • 204.
  • 205. Parles Parles, comme si tu entendais pour la première fois ta voix et rencontre tes mots avant qu’ils appartiennent à d’autres regards, lorsque nous nous trouvons dans une image d’enfant je désire te voir en double, pour te voir plus fort. Tu déclencheras un feu d’artifice de joies très loin, là-bas, où dans le mouvement d’un océan de blé, la vie ne se révolte plus. Quelqu’un dicte le calme, chuchote des mots scintillants et va et vient en nous, jaillit comme une fontaine de larves multicolores et des pétales en noix de coco. Les perles chantent avec leurs bouches minuscules, les étoiles se douchent au piment et éternuent comme un nouveau né, les gouttes de riz se noient dans la voie lactée. La dictée vient de celui qui sent et entend qu’autour des choses vagabonde une force, nous laissant pleurer en inversion et le nacre sonnant se loge dans les cellules comme une coquille d’œuf coucou. Et ces voix, sons et syllabes recroquevillés, gravés dans la mémoire comme un tatouage invisible, les peaux reflètent un effleurage, qui n’arrête pas de vieillir. Au loin, un chœur de chant, 205
  • 206. Livre 18 si loin que nous n’apercevons que le mouvement des lèvres dans notre imagination, comme je n’aperçois seul le parfum d’une présence dans le coup d’air d’un passant sur le pavé inconnu et un jouet mobile crée des bulles de savon propulsant le temps en couleurs d’arcs-en-ciel et c’est comme si tu parlais encore en ignorant le miel et le poivre, dans le choix de tes mots. 206
  • 207. Daniel ARANJO (France) daniel.aranjo@univ-tln.fr 207
  • 208.
  • 209. Cri Sombre, et claire amante, d’où viens-tu ? où, ô fille-gazelle-sœur, où repars-tu déjà ? Je t’aimerai de loin, ô reine, puisqu’il le faut bien, capricieuse enfant nue comme un sourire, vêtue de l’ombre d’un seul diamant - ah mais ah que nous préférerions embrasser, nous, Sapphô (ton pharaon et aussi ton roi), de près (en un seul rire, fluide, de chemise) jusqu’au fond tes noirs et longs cheveux égyptiens micacés à poudre luisante d’encre et te les […] 209
  • 210.
  • 211. Monique NUGHEDU (France) monique.nughedu@charente-maritime.pref.gouv.fr Mikis Théodorakis en train de diriger un orchestre, à l’encre de chine sur papier noir. 1973. 211
  • 212.
  • 213. Liberté Écrit à l’âge de 16 ans A Mikis THEODORAKIS Toi ma patrie perdue qu’un chant d’amour résume Existes-tu vraiment sous un tiède horizon Ou n’es-tu que ce mot sur les murs des prisons Liberté ! que le soir d’espérance rallume Ah ! si vous connaissiez cet amour qui m’obsède Vous ne comprendriez pas que je survive encor A ce rêve absolu qui embrasse et qui mord Et que chante pour moi la brise citharède Sous les arbres lointains de ma patrie perdue Souvenir d’une vie authentique et sereine Qui dans ce monde obscur alimente ma peine Et soutenant ma vie, tout de même me tue Mais le ciel est si beau, au-dessus de la terre Que tu dois exister, liberté, quelque part Et qui sait si jamais, à ce jeu de hasard Je ne gagnerais pas de revoir ta lumière. 213
  • 214. Livre 18 À Kazantzakis Hérakleion s’endort et te rejoint en rêve Le sang ne coule plus mais il est dans le soir Sur la blanche Candie un voile rouge et noir De nostalgie mêlée au jour bleu qui s’achève Il est libre celui qui meurt et se relève Es-tu là victorieux ou dors-tu sans espoir Tes yeux sont-ils ouvert sur ce qu’on ne peut voir Ou fermés sur les joies d’une existence brève Ton sang est retourné sur la terre de Crète Pourquoi tant de questions puisque justice est faite Autour de toi sont des héros les os blanchis Au-dessus de la ville encore ta voix vibre Sur un tombeau en quelques mots disant ceci "Je ne crains rien, je n’espère rien, je suis libre". 214
  • 215. LES CAHIERS DE POESIE Méditerranée C’est vrai, la mer ressemble à un vin tumultueux Homère avait raison, elle amène aussi loin La mer a enivré des peuples de marins Qui partaient plus longtemps pour être moins heureux Mais que préfère-t-on, de sortir de l’ivresse Ou de rentrer au port ? Et le songe en allé Ne vaut pas les trésors de la mer rapportés Et après si longtemps de revenir en Grèce Le vin ne t’eut pas fait connaître Calypso La cruelle Circé, Nausicaa la fière Qui t’accueillit aux bords de Corfou la première Toi, Ulysse divin qu’amenèrent les flots Et celui qui connaît l’amer goût de l’exil Revient souvent rêver devant la mer profonde Comme s’il attendait que, messagère, l’onde Le rappelle, il écoute une voix, semble-t-il. La mer se souvenant des dieux qu’elle a portés Murmure doucement leurs noms comme une plainte Et l’écume sans fin récrit leur gloire éteinte Avec les mots changeants par les vents inventés 215
  • 216. Livre 18 L’Evzone Quel souvenir ému s’attache-t-il à vous Hanches drapées de noir, taille forte et bien prise Marbre sous le tissu qui frissonne à la brise Chair vivante pourtant où le désir se joue Dos à peine courbé du creux des reins au cou Sous la tunique sombre et collante, un peu grise A force de soleil qui la forme électrise Dessinant sur la soie la peau qui est dessous Chute des hanches faite et la taille exaltée D’une étroite ceinture à peine soulignée Pour une idée de force, aspect qui vit et brûle Beauté d’homme portant le vivre et le mourir Éphémère pour qui l’éternité recule De cet instant charmeur évoquant le plaisir. 216