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MAUD MARIAN
Société d’avocats inscrite au Barreau de Paris maudmarian@orange.fr
11 boulevard Sébastopol Tel : 01.80.49.38.55
75001 PARIS Fax : 01.80.27.01.60
SELARL au capital de 500 euros RCS Paris 812 379 485
Madame la Ministre de la Santé
14, avenue Duquesne
75350 PARIS 07 SP
Par Lettre recommandée avec AR
Paris, le 10 juin 2022
OBJET : Demande d’abrogation de l’article 1 8° du décret n°2021-1059 du 7 août 2021
Madame le Ministre,
J’ai l’honneur de solliciter, en ma qualité de conseil de
En effet, il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’état que « l'autorité
administrative compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement
illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa
signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à
cette date. »
Ainsi, tout acte règlementaire doit se fonder sur des motifs admissibles de fait qui
doivent pouvoir être contrôlés lors d un contrôle de légalité.
Les dispositions de l’article 1 8° du décret 2021-1059 du 7 août 2021, modifié par
le décret 2022-352 du 12 mars 2022, décret d’application de la loi du 5 août 2021, sont
illégales au regard des circonstances de droit et de fait postérieures à leur entrée en
vigueur.
Ce décret est intervenu dans un contexte particulier de crise.
Pour rappel, l’Avis n°2021.0047/AC/SEESP du 8 juillet 2021 du collège de la
Haute Autorité de santé relatif à l adaptation de la stratégie vaccinale devant
l’émergence de variants du SARS-CoV-2
“Considérant la menace liée à l expansion rapide du variant delta sur
le territoire français, la Direction générale de la santé a saisi la Haute
Autorité de santé (HAS) sur la nécessité d adapter la stratégie vaccinale
s agissant notamment du type de vaccin à recommander
préférentiellement et des schémas vaccinaux à privilégier (stratégie de
prime boost hétérologue, délais entre deux doses de vaccins...). La HAS
a pris en considération les éléments suivants :
− La situation épidémiologique actuelle, l’évolution de la diffusion du
variant delta du SARS-CoV-2 en France et la prédominance de ce
nouveau variant du SARS-CoV-2 dans des pays comme l'Inde et le
Royaume-Uni.
- Les données disponibles issues de plusieurs études de
séroneutralisation étudiant l effet de la vaccination vis-à-vis des
différents variants circulant actuellement en France dont le variant
delta du SARS-CoV-2.(…)
Conclusion
Après une fin de printemps marquée par la décélération de l’épidémie,
l’été voit une remontée rapide des contaminations liée aux nouveaux
variants plus contagieux et en particulier au variant delta. Si le nombre
de nouveaux cas demeure encore faible, la dynamique observée est
particulièrement significative et pourrait rapidement dégrader la
situation sanitaire. Cette évolution n est toutefois pas inéluctable, grâce
à la vaccination.
Ainsi :
« − conformément à sa recommandation précédente relative à l impact
potentiel de la circulation des variants du SARS-CoV-227, la HAS considère
que les nouvelles primo-vaccinations pourraient être préférentiellement
initiées avec les vaccins à ARNm en respectant un intervalle de 3 à 4
semaines entre les 2 doses afin de permettre d atteindre une immunité
optimale plus rapidement.
Elle rappelle en outre, qu au-delà de l efficacité démontrée de la vaccination
sur la survenue de formes sévères de la maladie, les données en vie réelle
récentes confirment l intérêt de la vaccination sur la transmission de la
maladie (avec une efficacité de l ordre de 80 à 90% vis-à-vis des autres
variants après deux doses de vaccin à ARNm) qui semble pouvoir être
extrapolé au variant delta.
Considérant la disponibilité des vaccins et la diffusion du variant delta sur
l ensemble du territoire, la HAS recommande que cette stratégie soit mise en
œuvre sur l ensemble du territoire national.
Enfin, la vaccination doit se poursuivre à un rythme élevé afin d assurer
rapidement une couverture vaccinale optimale de la population, compatible
avec la poursuite de la levée des restrictions et nécessaire pour garantir la
protection des plus vulnérables.
Aussi, comme elle l a rappelé à plusieurs reprises, la HAS recommande le
maintien et l amplification de toutes les politiques « d aller vers » les publics
les plus fragiles et les plus vulnérables. De plus, à la lumière des données
disponibles sur la protection des vaccins contre la transmission, la HAS
considère que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus
largement de ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt
un enjeu éthique autant que de santé publique.
C est pourquoi, au-delà des mesures incitatives, des opérations de
communication, d information et de la recherche de l'adhésion de chacun, la
HAS recommande que soit envisagée sans délai l obligation vaccinale de
l ensemble des professionnels en contact avec des personnes vulnérables.
Au-delà, au vu de la progression actuelle de l’épidémie, il est nécessaire
d entamer dès à présent la réflexion sur une extension plus importante de
cette obligation vaccinale en population générale afin de pouvoir prendre à
temps cette décision si elle s imposait
Mais également l’Avis n° 2021.0052/AC/SEESP du 15 juillet 2021 du collège de
la Haute Autorité de santé relatif au projet de loi relatif à l adaptation de nos outils
de gestion de la crise sanitaire
« (…) Enfin, la HAS a appelé, dans son avis du 8 juillet 2021 à ce que
l obligation vaccinale de l ensemble des professionnels en contact avec des
personnes vulnérables soit envisagée sans délai. La HAS considère en effet
que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de
ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu
éthique autant que de santé publique. Elle a estimé par ailleurs, qu il était
nécessaire d entamer sans attendre la réflexion sur une extension plus
importante de cette obligation vaccinale afin de pouvoir prendre à temps
cette décision si elle s imposait.
3. Concernant les professionnels ciblés par l obligation vaccinale dans le
projet de loi
Après six mois de campagne vaccinale dont les succès incontestables ne
suffisent toutefois pas à protéger suffisamment la population de la résurgence
épidémique, la HAS s est ainsi d ores et déjà prononcée pour l ouverture sans
délai du débat sur l obligation vaccinale. Mais pour se prononcer sur les
mesures présentées dans le projet de loi, une analyse à jour de la situation
épidémiologique et de la dynamique vaccinale au préalable est
indispensable.
La HAS considère les éléments suivants :
L’évolution défavorable du contexte épidémique marquée par une diffusion
rapide du variant delta, une augmentation préoccupante du nombre de cas
dans un contexte de diminution de l adhésion aux mesures barrières
La reprise de la circulation épidémique se confirme après une phase
d amélioration des indicateurs épidémiologiques.
L existence de vaccins sûrs et efficaces, notamment en prévention des formes
graves de Covid-19 liée au variant Delta et en prévention de la transmission
du virus
La vaccination encore insuffisante des professionnels au contact des plus
âgés et des professionnels exerçant en établissement de santé.
Les risques similaires associés à la contamination des professionnels en
charge ou au contact des personnes les plus vulnérables (personnel des
établissements sociaux et médico sociaux, aides à domicile, auxiliaires de vie,
sapeur pompiers et transporteurs sanitaires).
La HAS estime que l obligation vaccinale inscrite dans le projet de loi et qui
concerne l ensemble des professionnels en contact avec les personnes
vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique et que sa
mise en place est justifiée au regard de ces enjeux.
Le projet de Loi, s inscrit en effet en cohérence avec les données disponibles
sur la protection des vaccins contre la transmission du virus, et vise à assurer
à court terme :
- la protection des professionnels eux-mêmes, dont l exemplarité contribue à
l objectif de protection communautaire
- la protection de l entourage de ces professionnels
- la protection des personnes vulnérables et la limitation des infections
nosocomiales qui relève d une responsabilité d ordre éthique et
déontologique pour les professionnels les prenant en charge,
- la protection de l organisation sanitaire permettant la prise en charge
des patients et personnes
Enfin, il n est pas du ressort de la HAS de se prononcer sur les sanctions
prévues dans le projet de loi. La HAS rappelle néanmoins que l objectif est
avant tout de parvenir à convaincre l ensemble de la population de l intérêt
à la fois individuel et collectif de la vaccination.
5. Conclusion générale
Au vu de l évolution défavorable du contexte épidémique marquée par une
diffusion rapide du variant delta et une augmentation préoccupante du
nombre de cas dans un contexte de diminution de l adhésion aux mesures
barrières, la HAS a déjà appelé, dans son avis du 8 juillet 2021 à ce que soit
envisagée sans délai l obligation vaccinale de l ensemble des professionnels
en contact avec des personnes vulnérables. La HAS considère en effet que la
couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de ceux
qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu éthique
autant que de santé publique.
La HAS estime donc que la mise en œuvre de l obligation vaccinale inscrite
dans le projet de loi est justifiée au regard de ces enjeux.
Si les considérations de santé publique justifient l obligation de la
vaccination des professionnels cités dans le projet de loi, l impact sociétal
qui en découle ne peut être ignoré et il est primordial d’éviter toute
stigmatisation de ces professionnels. En outre, la dynamique de l’épidémie
appelle désormais une augmentation massive de la couverture vaccinale
comme le démontrent les modèles réalisés jusqu’à présent. Ainsi au vu de la
couverture vaccinale encore insuffisante en France, en particulier chez les
plus de 80 ans, la HAS souligne la nécessité d amplifier la vaccination, en
particulier s agissant des personnes les plus fragiles et de leur entourage.
La HAS recommande donc l ouverture rapide d un large débat sur
l’élargissement de l obligation vaccinale afin que les pouvoirs publics
puissent s appuyer sur ces discussions pour prendre à temps une décision
ciblant, le cas échéant, une population plus large que celle concernée par le
présent projet de loi (personnes vulnérables, professionnels en contact avec
le public voire population générale) si elle s avérait nécessaire et justifiée au
vu du rythme de progression de l’épidémie et de son impact prévisible sur
le système de santé.
Ce débat doit impérativement être éclairé par des éléments factuels sur les
déterminants de non-recours à la vaccination et les autres moyens
disponibles (y compris incitatifs) pour accroître la couverture vaccinale. »
La stigmatisation, redoutée par le Conseil scientifique, est également évoquée par
le COSV dans sa note du 3 février 2022
« Stigmatisation des personnes non-vaccinées et des personnes sévèrement
immunodéprimées dans le contexte de la vaccination anti-Covid-19
La présente aborde la question des impacts sociétaux de la campagne de
vaccination actuelle contre la Covid-19. Elle cible en particulier deux
points d attention : la stigmatisation des personnes non- vaccinées d une
part, et la stigmatisation des personnes immunodéprimées d autre part.
1. Stigmatisation des personnes non-vaccinées
a. Stigmate, stigmatisation et santé publique
La santé publique s’ est intéressée à ces deux notions depuis quelques
décennies, pour au moins trois raisons :
- D‘abord,certaines pathologies,mais aussi des comportements nocifs pour
la santé,peuvent devenir des stigmates pour les personnes concernées. C‘
est notamment le cas des troubles mentaux, de la séropositivité, de l’
obésité, mais aussi de l’ injection de drogues ou du tabagisme.
Depuis plusieurs décennies, ces phénomènes de stigmatisation s‘ appuient
de plus en plus sur une imputation de responsabilité aux malades.
- Ensuite, les conséquences délétères, et en particulier l impact sanitaire,
des phénomènes de stigmatisation ont largement été documentées : par
exemple, les personnes stigmatisées peuvent voir leur bien-être et leur
santé mentale affectés (en particulier si elles intériorisent le stigmate), ou
manifester un moindre recours au système de soins (en particulier
renoncer à des soins pour éviter des réactions stigmatisantes)4. Il n est
d ailleurs pas rare que les pouvoirs publics mènent des campagnes de lutte
contre la stigmatisation associée à tel ou tel handicap ou pathologie.
- Enfin, il est apparu que la stigmatisation pouvait aussi être utilisée
comme outil de prévention, au même titre que les campagnes d information
et de sensibilisation, les mesures d incitation ou « l aller vers ». Ce recours
a fait l objet de nombreux débats, car il suscite des réserves éthiques, du fait
des conséquences délétères déjà mentionnées, mais aussi parce qu il peut
s avérer contre-productif, en particulier s il devient pour certains une
ressource identitaire revendiquée. »
Cette peur de la stigmatisation fait écho à la protection contre les discriminations
telle que résultant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme :
« Consubstantiel à la société démocratique et particulièrement valorisé par
le juge européen, le principe de non-discrimination, consacré par l'article 14
de la CEDH, fait l'objet d'une interprétation visant à assurer une garantie
effective de la sanction des discriminations, en privilégiant une approche
concrète. Dans cette perspective, la Cour européenne a consacré une
remarquable extension du champ d'application de l'interdiction des
discriminations, conduisant à la formulation de nouvelles obligations à la
charge des États, et a précisé les modalités de son contrôle en faisant de la
nature du motif de distinction fondant la différence de traitement un élément
décisif . » (Hélène SURREL https://www.conseil-
constitutionnel.fr/publications/titre-vii/la-sanction-des-discriminations-par-
la-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme)
L’acceptabilité de la vaccination est, quant à elle, questionnée par la HAS le 5
octobre 2021 :
« La HAS souhaiterait également disposer d’informations
complémentaires sur l’acceptabilité de la vaccination, en particulier
sur les motifs des refus de vaccination chez les professionnels du
secteur de la santé et du médico-social.”
A compter du 12 juillet 2021, le président de la République, dans une volonté
d accélérer la campagne de vaccination et de casser la dynamique du virus, a décidé
d une part d’étendre le passe sanitaire à l ensemble des activités de la vie courante,
d autre part, à instaurer une obligation vaccinale à l’égard des personnels soignants.
Aux termes de son avis susvisé, la HAS préconise une vaccination obligatoire de
ses personnels de santé pour les raisons suivantes :
- une dégradation de la situation épidémique ;
- l efficacité des vaccins notamment à l’égard des variants ;
- le niveau insuffisant de la couverture vaccinale des professionnels au contact des
plus âgés ;
- les risques liés à la contamination des professionnels au contact des personnes
vulnérables.
Un projet de loi a donc été déposé le 19 juillet 2021 sur le bureau de l Assemblée
nationale ; Après une semaine de débat, le texte a été adopté.
Le Conseil Constitutionnel a rendu le 5 août 2021 une décision n°2021-824 DC
dans laquelle il indique :
« 121. Les sénateurs auteurs de la quatrième saisine, qui ne contestent pas
l'obligation vaccinale, font valoir que ces dispositions porteraient une
atteinte manifestement excessive à la liberté personnelle d'aller et venir, à la
liberté d'entreprendre et au droit à l'emploi (...) 125. Le Conseil
constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la
Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres
dispositions que celles examinées dans la présente décision ».
La loi du 5 août 2021 crée, pour certaines catégories de personnels en fonction de
leur profession ou de leur lieu de travail, une obligation vaccinale contre la COVID-19
et renvoie quant aux justificatifs de la réalisation de cette obligation, nommé schéma
vaccinal, à un décret pris après avis de la HAS.
Un décret du 7 août 2021 (2021-1059) est venu préciser les modalités de cette
obligation vaccinale et modifié le décret du 1er juin 2021.
Par la suite, le législateur a mis en place un passeport vaccinal à compter du 22
janvier 2022. Ce passeport vaccinal a été suspendu le 14 mars 2022. Par ailleurs, le port
du masque a également été suspendu le 16 mai 2022. Ainsi, les autorités de santé ont
validé un schéma vaccinal de primo-vaccination comprenant 1 à 2 doses de candidats
vaccins anti-COVID-19, puis une première dose de rappel (le 14 février 2022 pour les
personnels relevant de l’obligation vaccinale) et, en date du 7 avril 2022, la
gouvernement a ouvert une deuxième dose de rappel destinée aux personnes âgées de
plus de 60 ans 6 mois après le premier rappel et les plus de 80 ans 3 mois après le premier
rappel.
Il résulte de ce qui précède qu’à ce jour, le schéma vaccinal complet des
personnels soumis à l obligation vaccinale est de 3 doses, quel que soit le délai dans
lequel la première dose de rappel a été injectée.
Au regard de l’évolution de l’épidémie, du nombre de cas, des nouveaux variants
dominants, du nombre de personnes hospitalisées et du nombre de personnes
hospitalisées en soins critiques, mais également au regard des difficultés actuelles de
l’hôpital public, il vous appartient d’abroger le décret mettant en œuvre l’obligation
vaccinale des soignants en ce qu’il est illégal, l’illégalité résultant des circonstances
de faits postérieures à son entrée en vigueur.
Je souligne qu’au 1er
juin 2022, 56 personnes sont mortes du COVID-19, moins de
15000 étaient hospitalisées avec cette pathologie et 929 en soins critiques. 6184
nouveaux cas étaient à déplorer et les infections étaient uniquement liées au variant
Omicron.
Les motifs admissibles de fait et de droit qui fondaient l’article 1 8° du décret
2021-1059 ont changé et le décret ne peut donc plus atteindre les objectifs qu’il
prétend poursuivre.
Je me permets de vous rappeler que le décret, dont l’abrogation vous est demandée,
définit la notion de schéma vaccinal complet” et qu’il s inscrit, par ailleurs dans un
dispositif législatif et règlementaire destiné à atteindre l objectif de valeur
constitutionnelle de protection de la santé publique.
Compte tenu des exigences du Conseil constitutionnel en telle matière, et en ce
qu elle porte atteinte aux libertés et droits fondamentaux en conditionnant l exercice de
certaines activités professionnelles rémunérées à la présentation du justificatif d un
schéma vaccinal complet, la mesure portée par l’article 1 8° du décret 2021-1059 ne
pourra être maintenue que si elle est adéquate et nécessaire pour atteindre le but qu elle
s est fixée, elle devra, de même, être proportionnée.
Or, en l’état, le maintien de l obligation vaccinale des soignants à la date
présente, n’est pas adéquate par rapport au but de protection de la santé publique
qu’il poursuit, de même qu’il ne contribue pas à sa réalisation et va au-delà de ce
qui est nécessaire pour atteindre ce but. Enfin, le décret est manifestement
disproportionné au regard des atteintes portées aux droits et libertés
fondamentaux.
1. Sur l’inadéquation de la mesure de maintien de l obligation vaccinale des
soignants.
Comme l a d ailleurs exigé le législateur en la matière, le décret doit, tout au long
de son application, reposer sur des données scientifiques solides et doit tenir compte
des avis rendus par les autorités sanitaires.
En l’état, les données scientifiques, de même que les avis des autorités sanitaires
permettent d’affirmer que l’obligation vaccinale de certains personnels n’est pas en
mesure de contribuer à la réalisation de l objectif de protection de santé publique.
Cette mesure était destinée à protéger les usagers des services de santé, c est-à-dire
à éviter la propagation de la maladie dite COVID-19 en évitant la transmission vers et
depuis ces personnels du virus SARS-Cov2.
Or, préalablement de rappeler que dès l introduction des candidats vaccins en
France, le Haut Conseil de Santé Publique, dans son avis du 18 juin 2021, relevait :
« Les essais randomisés analysés montrent que les vaccins actuellement
autorisés en France présentent une efficacité vaccinale élevée (> 90 %) sur
les formes graves du Covid- 19, toutefois les données relatives à leur
efficacité sur les formes asymptomatiques et donc sur la transmission sont
très limitées.
Cette efficacité avec les vaccins à ARN messager (ARNm) est maintenue pour
le variant Alpha (20I/501Y.V1 (dit britannique)) mais la protection est plus
incertaine pour le variant Bêta détecté initialement en Afrique du Sud
(20H/501Y.V2) et le variant Gamma détecté initialement au Brésil
(20J/501Y.V3). Elle est insuffisante pour les vaccins à vecteur viral non
réplicatif vis- à-vis des variants Bêta et Gamma.
La réduction observée dans les études, bien que statistiquement significative,
apparaît cependant limitée, et sa pertinence clinique, c est-à-dire la réduction
du risque de transmission associé n est pas connue. »
Par la suite, les avis des autorités sanitaires intervenus à partir du mois de juin 2021
ont confirmé de manière constante que les études en vie réelle, destinées à déterminer
l efficacité des candidats vaccins distribués sur le territoire national, n avaient pas
permis de mettre en évidence leur efficacité sur l infection et la transmission des
variants de SarsCov2 en circulation, qu il s agisse de Delta ou d Omicron.
S agissant du variant Omicron, désormais majoritaire sur le territoire national, au
contraire, les études révèlent la très faible efficacité du vaccin.
Ainsi, le HCSP a rappelé dans son courrier du 27 décembre 2021 les éléments et
les principes pris en compte :
« Si la vaccination avec un schéma vaccinal complet selon la définition et les
recommandations en vigueur de la Haute Autorité de santé3 (HAS), tenant
compte du délai d efficacité, continue de protéger efficacement contre les
formes graves de la maladie sur le variant Delta (avec des incertitudes sur le
variant Omicron), elle protège aussi dans une moindre mesure du risque de
contamination et raccourcit la durée du portage chez un individu infecté. Les
mesures doivent être adaptées à la situation dans une perspective de gestion
des risques”
Aujourd hui, il est admis que la 3ème dose de candidat vaccin contre la COVID-19
a une durée d efficacité inconnue qui diminue dès le premier mois le COSV dans son
avis du 19/01/2022 :
« C) Données d efficacité en vie réelle
Protection contre l infection
Des études en vie réelle ont démontré une relative efficacité du rappel
vaccinal face au variant Omicron en ce qui concerne l infection, bien que
cette protection soit inférieure à celle conférée contre le variant Delta.
Une étude en vie réelle sur 12 000 ménages danois8 a montré qu un rappel
permet de réduire le risque d infection de 54% en comparaison à la primo-
vaccination seule, et que le taux d attaque secondaire SAR était de 31% et
21% dans les foyers avec le VOC Omicron et Delta, respectivement.
Par ailleurs, cette étude montre que le variant Omicron possède une très
forte capacité d’échappement chez les sujets vaccinés, et notamment chez
les sujets ayant reçu une dose booster. Le différentiel de risque de
contamination au variant Omicron en comparaison au variant Delta est
globalement plus élevé chez les sujets ayant reçu une dose de rappel (facteur
de 3.66) que chez les sujets uniquement primo-vaccinés (2.61) et les sujets
non-vaccinés (1.17).
Protection contre les formes sévères
En France, les données d hospitalisation, d admission en soins critiques et de
décès de la DREES suggèrent également que le rappel protégerait
efficacement contre les formes sévères, bien que la protection soit inférieure
contre le variant Omicron par rapport à celle contre le variant delta
4. Etat des lieux des pays ayant recommandé une quatrième dose de
vaccination
A) Israël
-Israël a débuté l administration d une quatrième dose d abord chez les
personnes âgées institutionnalisées (21/12/2021), avant d’étendre sa
recommandation aux personnes de plus de 60 ans et aux professionnels de
santé ayant reçu leur troisième dose il y a plus de 4 mois, le 31/12/2021.
A ce jour, plus de 100 000 Israéliens se sont enregistrés pour obtenir une
quatrième dose. Un élargissement à la population générale est envisagé.
-La 4eme dose a été mise en place malgré les positions divergentes des
institutions :
- Le Comité d experts sur la pandémie (groupe consultatif du gouvernement)
a recommandé au gouvernement d organiser une campagne de 4ème dose,
sur fond d inquiétudes croissantes à cause de la propagation du variant
Omicron.
-Le Comité consultatif sur la sécurité des vaccins s est quant à lui déclaré
opposé à une nouvelle dose de rappel
-Une autorisation formelle est encore attendue dans les jours qui viennent
de la part de la haute autorité de santé
-Par ailleurs, le directeur général du Ministère de la Santé, le Pr Nachman
Ash, n'a pas encore approuvé cette campagne, et examine pour l'heure les
données britanniques indiquant des effets moins graves provoqués par le
variant Omicron que par la souche Delta.
- le gouvernement israélien n'a fondé sa décision sur aucune étude
scientifique. Selon Zvika Granot, immunologue israélien à l'Université
hébraïque de Jérusalem, « l'initiative de commencer une campagne de
quatrième dose n'est basée sur aucun essai clinique. Il n'y a aucune
garantie que cela soit sans danger ».
- Hervé Bercovier, professeur de microbiologie à l Université hébraïque
de Jérusalem a expliqué cette décision : « Le problème est que les gens âgés
ont reçu leur booster dose au mois d août, il y a 4 ou 5 mois et que l on ne
sait pas pendant combien de temps elle sera efficace contre le nouveau
variant Omicron. Le dilemme sera le suivant : soit une nouvelle formule du
vaccin est disponible, soit la quatrième dose sera utilisée ».
Le COSV notait également, dans cet avis avoir « été saisi par le Ministère de
la Santé au sujet de l opportunité d une seconde dose de rappel vaccinal (ou
4ème dose de vaccination dans le cas d un schéma de vaccination classique
chez une personne non-immunodéprimée). Cette saisine intervient dans le
contexte de l’émergence du variant Omicron, face auquel la vaccination
semble perdre partiellement de son efficacité, ainsi que dans le contexte de
la persistance du variant delta. »
Selon la HAS en son avis du 13 octobre 2021, concernant l’immunogénicité du
vaccin Comirnaty
« administré en rappel à une dose de 30 μg environ 6 mois (entre 4,8 et 8
mois) après un schéma complet de primovaccination, induit une réponse
humorale robuste, d anticorps neutralisants anti-SARS-CoV-2 à 1 mois
après cette 3ème dose, chez des sujets âgés entre 18 et 55 ans sans antécédent
d infection par le SARS-CoV-2.
La réponse humorale induite 1 mois après ce rappel était non inférieure à
celle observée chez ces sujets 1 mois après leur 2nde dose. Les titres en
anticorps neutralisants dirigés contre le variant Bêta ou le variant Delta
étaient inférieurs à ceux développés contre la souche historique que ce soit
chez les sujets âgés de 18-55 ans ou de 65-85 ans. Une 3ème dose de
Comirnaty a entrainé une augmentation de la MGT en anticorps
neutralisants comparativement à la MGT observée 1 mois après
l administration de la 2ème dose de Comirnaty, contre la souche historique
et de façon plus marquée contre les variants Delta et surtout Bêta. »
Il faut en conclure que, de première part, les candidats vaccins n ont jamais
présenté une efficacité significative contre la transmission, et, de deuxième part, que
les candidats vaccins n ont jamais présenté une efficacité significative contre le
variant Omicron majoritaire actuellement sur le territoire national.
Il est donc permis de conclure des avis recueillis et études réalisées que la
mesure n est pas de nature à permettre d’éviter ni l infection, ni la transmission du
variant désormais largement majoritaire et de moindre gravité.
L objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique visant à
éviter la propagation des maladies n est donc manifestement pas servi par la mesure
mise en place par l’article 49-1 du décret du 1er
juin 2021.
Il convient d ajouter que l immunité conférée par la première dose de rappel des
candidats vaccins diminue fortement après quelques semaines, probablement 1 mois,
ne faisant ainsi plus obstacle à l infection ni à la transmission du virus et tout
particulièrement de ses récents variants extrêmement éloignés de la souche originaire.
Cet état de fait permet de s interroger sur le caractère adéquat d une obligation pour
certains personnels de présenter un justificatif de schéma vaccinal dès lors que les
personnels justifiant d un schéma vaccinal de 3 doses ne sont assurément pas immunisés
ni contre l infection, ni contre la transmission du virus.
En effet, en l’état de la science, rien ne permet de considérer qu un personnel ne
présentant pas un schéma vaccinal complet serait plus susceptible d’être infecté ou de
transmettre la maladie qu un personnel présentant un schéma vaccinal complet de plus
de 3 mois.
La DREES indique, à ce sujet
« Statut vaccinal des personnes testées ou hospitalisées avec Covid-19 –
Dernières données disponibles au 3 juin 2022
Ainsi, toujours sur la population des 40 ans ou plus :
contre le risque de développer une forme symptomatique due aux variants
Omicron (comprenant donc l’ensemble des sous-lignages), la dose de
rappel augmente la protection par rapport au schéma vaccinal initial
complet1 – lui-même apportant une protection par rapport à l’absence de
vaccin : la protection du rappel varie entre 45 % et 56 % durant les 3
premiers mois suivant son administration, mais cette protection semble
disparaitre après 3 mois » (https://drees.solidarites-
sante.gouv.fr/communique-de-presse/pendant-les-trois-premiers-mois-la-
dose-de-rappel-protege-75-de)
Dans ces conditions, l adéquation du décret avec l objectif qu il se propose
d atteindre, à savoir la protection des usagers des services de santé contre l infection par
le virus SARS-CoV2, n est pas démontrée.
S agissant du développement de formes graves de la maladie, en juin 2021 le HCSP
retenait dans son avis Les essais randomisés analysés montrent que les vaccins
actuellement autorisés en France présentent une efficacité vaccinale élevée (> 90 %)
sur les formes graves du Covid- 19, toutefois les données relatives à leur efficacité sur
les formes asymptomatiques et donc sur la transmission sont très limitées.” Ce qu il
confirmait en décembre 2021.
Le Conseil scientifique, quant à lui, énonçait en décembre 2021 qu Omicron était
de moindre gravité.
Il résulte des avis recueillis et études réalisées que si le bénéfice de la vaccination
sur les formes graves des variants antérieurs semble établie en vie réelle, tant la HAS
que le Conseil scientifiques sont contraints aux conjectures s agissant du variant
Omicron, relevant l’échappement vaccinal.
Le Conseil scientifique dans son avis du 8 décembre relevait
« S'est rajoutée depuis dix jours l'émergence d'un nouveau variant appelé
Omicron, dont le profil mutationnel apparait préoccupant, et pour lequel les
premières informations disponibles suggèrent qu'il possède une capacité
d'échappement immunitaire très conséquente.
A court terme, le risque est essentiellement porté par la circulation du virus
Delta. (…) Moderna ou Pfizer est utile maintenant dans le cadre de la 5ème
vague liée au variant Delta et le sera également dans une réponse limitée
mais présente si le variant Omicron devient prédominant. »
Puis, le 16 décembre, par une mise à jour de son précédent avis il indiquait
“ Les données sur le variant Omicron sont très évolutives et encore peu
solides. Le Conseil scientifique a souhaité faire une mise à jour des
connaissances et envisager les conséquences d une 6ème vague à Omicron
pour mieux les anticiper
3. Données préliminaires sur le risque d’échappement immunitaire des
variants Omicron. Un échappement à la protection immunitaire humorale
tant vis-à-vis de l immunité post- vaccinale que post-infectieuse…
Il résulte donc de ce qui précède que l adéquation de la mesure n’était que
conditionnelle ou probable, s agissant en tout état de cause seulement d’éviter la
saturation des hôpitaux en empêchant les formes graves de la maladie.
Au regard du chiffre des infections et du faible nombre de patients accusant des
formes graves de la maladie, mais également au regard du nombre de personnels ayant
été infecté et du faible nombre ayant développé des formes graves, il est avéré que
maintenir l obligation pour certains personnels de justifier d un schéma vaccinal complet
pour être autorisés à poursuivre leur activité professionnelle n est pas adéquate au but
recherché, le risque pour eux de développer des formes graves de la maladie en présence
du variant Omicron étant très faible.
Il n est pas indifférent de noter ici que le Conseil scientifique dans son avis du 11
mars 2021 confirmait que les personnels soignants constituant une population jeune, ils
ne sont pas exposé à la forme grave de la maladie.
En outre, dans l hypothèse même où la mesure avait pour objectif d’éviter la
saturation des hôpitaux, force est d admettre que si le passe vaccinal a été suspendu le
14 mars 2022 c est, entre autres, au regard d un risque très modeste de saturation des
hôpitaux par les malades infectés par le variant Omicron qui est aujourd hui encore plus
faible qu alors.
La question du caractère adapté du maintien de l obligation pour certains personnels
de justifier d un schéma vaccinal complet pour être autorisés à exercer leur activité se
pose d autant plus qu elle ne constitue que la prolongation d un dispositif mis en place
depuis septembre 2021 qui n a pas fait la preuve de son efficacité ni sur l infection, ni
sur la transmission, ni sur la pression exercée sur le système de santé.
L’évaluation du poids de l’épidémie sur le système de santé devra, en outre, être
relativisé au regard des conclusions de l’ATIH dans son rapport du 28 octobre 2021
« Les prises en charge hospitalières de la COVID-19 en 2020
Combien de patients ont été hospitalisés pour COVID-19 ?
218 000 patients hospitalisés en 2020 pour prise en charge de la COVID-19
Au cours de l année 2020, 218 000 patients ont été hospitalisés pour prise en charge
de la COVID-191 (Tableau 1). Les patients COVID représentent 2% de l ensemble des
patients hospitalisés au cours de l année 2020, tous champs hospitaliers confondus. »
En tout état de cause, il n est pas démontré que la mise en place de cette obligation
aurait réduit substantiellement les infections nosocomiales, ni qu elle aurait réduit
substantiellement les contaminations au niveau national.
J’ajoute, au surplus, que contrairement à ce qui a pu être décidé dans d autres pays,
les établissements hospitaliers ont considéré que les personnels vaccinés et infectés
pouvaient valablement poursuivre leur activité en dépit d un test positif au
COVID-19.
Ceci démontre, de première part, que ces personnels étaient susceptibles d’être
infectés malgré un schéma vaccinal complet, mais également que, d autre part, la
présence de personnels infectés au contact des usages des services de santé n’était plus
un objectif de santé publique.
La position des établissements de soin était conforme aux recommandation du
Conseil scientifique du 26 décembre 2021
« I. Pour les personnes infectées : personnel soignant, autres professions
d intérêt majeur...
En cas de contexte « tendu » en matière de ressources humaines l'isolement
pourrait être écourté avec, en cas de disparition précoce des symptômes, une
stratégie de dépistage quotidien par test antigénique débutant à J4 après le
premier test positif et sortie d'isolement après deux tests négatifs à 24 heures
d intervalle (ou un CT > 30 si test PCR).
A l instar de ce qui est proposé par le CDC, en cas de crise, aucune
restriction d activité n'est suggérée si la personne infectée est en capacité
de travailler. Il/elle doit toutefois limiter ses contacts, minimiser les contacts
avec les personnes extrêmement vulnérables sur le plan clinique
(immunodéprimés), s isoler des collègues lors des pauses et des repas
collectifs, et renforcer tous les gestes barrières.”
Cette appréciation de l adéquation de la mesure règlementaire devra, enfin, être
effectuée au regard de la dégradation de l offre de soins et au regard des missions
confiées par le législateur à l’Hôpital public :
Article L6112-2 du Code de Santé Publique
I.-Les établissements de santé assurant le service public hospitalier et les
professionnels de santé qui exercent en leur sein garantissent à toute
personne qui recourt à leurs services :
1° Un accueil adapté, notamment lorsque la personne est en situation de
handicap ou de précarité sociale, et un délai de prise en charge en rapport
avec son état de santé ;
2° La permanence de l'accueil et de la prise en charge, notamment dans le
cadre de la permanence des soins organisée par l'agence régionale de santé
compétente dans les conditions prévues au présent code, ou, à défaut, la prise
en charge par un autre établissement de santé ou par une autre structure en
mesure de dispenser les soins nécessaires ;
3° L'égal accès à des activités de prévention et des soins de qualité ;
4° L'absence de facturation de dépassements des tarifs fixés par l'autorité
administrative et des tarifs des honoraires prévus au 1° du I de l'article L.
162-14-1 du code de la sécurité sociale.
Le patient bénéficie de ces garanties y compris lorsqu'il est transféré
temporairement dans un autre établissement de santé ou dans une autre
structure pour des actes médicaux.) »
La souffrance des personnels concernés par l obligation vaccinale est mise en
avant par les autorités sanitaires et plus particulièrement le Conseil scientifique depuis
mars 2020. De multiples alertes ont été émises par ce Conseil qui souligne l’épuisement
des personnels de santé, leur souffrance, leur démotivation (notamment avis du 11 mars
2021, du 06 mai 2021, du 20 août 2021)..
Le Conseil scientifique est très précis sur le sujet dans son avis du 11 mars 2021
C. LA CRISE SANITAIRE A DES RETENTISSEMENTS CLINIQUES
MULTIPLES
Soignants et aidants.
La crise sanitaire impacte fortement les soignants et aidants du fait de la
confrontation aux décès répétés, aux enjeux éthiques et émotionnels
rencontrés, à l’épuisement professionnel et à la difficulté à demander de l
aide psychologique. Sont observés principalement des symptômes anxieux et
dépressifs et des syndromes de stress post-traumatiques.(…)
3. La situation des soignants
Depuis un an et le début de la crise sanitaire, les soignants sont mobilisés
pour faire face à l afflux de malades atteints par une forme sévère du
COVID (355 426 patients ont été hospitalisés depuis le 1er mars 2020). Ils
ont eu à prendre en charge des patients avec une gravité plus importante
par rapport aux patients hospitalisés dans leurs services habituellement.
Alors que lors de la 1ère vague les soignants des régions les plus touchées
avaient pu bénéficier de renforts de régions moins touchées, depuis
novembre 2020, cette possibilité n est plus adaptée compte tenu d’ une
activité très soutenue dans les établissements de santé et en soins
primaires. A cela s’ ajoute un taux d absentéisme record en raison d une
part de l’épuisement progressif des soignants et d’ autre part d’ un taux de
contamination par le COVID-19 très important (parmi ces contaminations,
certaines sont des transmissions communautaires, d’ autres des
transmissions de soignant à soignant ou de patient à soignant).
Enfin, il ne faut pas oublier que les soignants sont soumis aux mêmes
restrictions que la population générale dont on sait quelles sont associées à
des troubles psychologiques.
L’ ensemble de ces changements a des conséquences sur la santé mentale
des professionnels de santé.
Dans l‘ enquête réalisée début octobre 2020 par l’ Ordre National des
Infirmiers, 57% des répondants (59 368/350 000 infirmiers) déclaraient
être en situation d’ épuisement professionnel, ce qui représente un
doublement par rapport à une période avant la crise sanitaire, et 43% ne
savaient pas s’ ils seraient infirmiers dans 5 ans. Même constat en Espagne,
où selon une étude de l’ université de Madrid, plus de la moitié des 1 200
soignants interrogés présentent des « symptômes dépressifs » et 53% des
signes « compatibles avec un stress post- traumatique ».
Partout dans le monde, des publications font état de l’ impact délétère de la
crise sanitaire sur la santé mentale des soignants.
ANNEXE 5 – SOUFFRANCE MENTALE
Soignants et aidants. La crise sanitaire impacte fortement les soignants et
aidants du fait de la confrontation aux décès répétés, aux enjeux éthiques
et émotionnels rencontrés, à l épuisement professionnel et à la difficulté à
demander de l aide psychologique. Ceux-ci présentent principalement des
symptômes anxieux et dépressifs et des syndromes de stress post-
traumatiques (El-Hage et al., 2020).
L’état psychologique et la santé mentale de ces populations
particulièrement exposées méritent par conséquence une vigilance
spécifique. »
A l heure actuelle, le maintien de la mesure alors que de nombreux établissements
de santé accusent un grave manque de personnel, que des territoires sont actuellement
dénués d offre de soins de proximité et que, par voie de conséquence, des usagers des
services de santé sont privés des soins auxquels ils doivent pouvoir prétendre au risque
de générer un autre problème de santé publique, permet de conclure de manière certaine
à son inadéquation.
En conséquence de quoi l appréciation des autres critères de légalité devront être
faite avec une rigueur particulière.
En effet, une mesure qui n est pas manifestement de nature à permettre d atteindre
le but de protection de santé publique devra à tout le moins remplir les autres conditions
de manière certaine.
2- Sur la nécessité du maintien de l’obligation vaccinale des soignants.
Si le maintien de l obligation pour certains personnels de justifier d un schéma
vaccinal complet devait être considérée comme nécessaire, encore faudrait-il démontrer
concrètement en quoi cette mesure est incontournable pour protéger les usagers des
services de santé.
Il est manifeste, tout d’abord, que le maintien de l obligation vaccinale des
soignants n’est pas la seule mesure de nature à pouvoir atteindre l objectif poursuivi, à
savoir protéger efficacement la santé des usagers des services de la santé, dans le cadre
de la crise sanitaire et particulièrement en son état actuel.
En effet, dans l appréciation de la nécessité de la mesure, je me permets de vous
rappeler que le Conseil d’état impose aux juridictions de vérifier si la mesure choisie
par le pouvoir règlementaire parmi les mesures possibles est celle qui porte le moins
atteinte aux libertés et il est d’autant plus rigoureux dans cet examen que la mesure n’est
pas adéquate, ce qui pose un doute majeur sur sa nécessité, sauf à démontrer qu aucune
autre mesure n est envisageable.
En outre, le caractère nécessaire de la mesure est fortement discutable au regard de
la position des autorités sanitaires qui confirment que l efficacité du candidat vaccin
s amenuise très fortement à peine 1 mois après la première dose de rappel et alors que
les tests PCR cumulés au respect des autres mesures dites « mesures barrières » et leur
applications strictes sont efficaces à éviter les risques de contamination. A cet égard, il
faut rappeler l avis de la HAS du 5 octobre 2021 qui souligne l efficacité des mesures
barrières et leur nécessité y compris entre les personnes vaccinées.
Parmi les mesures qui s offraient au pouvoir règlementaire, celle qui a été choisie
est de nature à mettre en danger le système de soins par l exclusion des personnels ne
présentant pas de schéma vaccinal complet.
En effet, en dépit des alertes on ne peut plus explicites du Conseil scientifique, force
est de constater que l offre de soins ne cesse de se dégrader et que la déprogrammation
des soins non COVID, enjeu majeur selon le Conseil, n a fait que s aggraver (Avis des
20 août 2021 et 19 janvier 2022 notamment).
L’obligation vaccinale apparaît comme une mesure est isolée qui ne répond
qu insuffisamment à la réalisation de l objectif de protection de la santé publique dès
lors qu aucune mesure de nature à garantir la qualité du système de santé, sa sécurité,
son efficacité et la continuité des soins (CC, 2006-504, DC 12 août 2004) ni de créer et
maintenir des mécanismes de protection sociale (même décision) n a été soumise à
l appréciation des autorités sanitaires. Ce, en dépit du positionnement particulièrement
clair du Conseil scientifique à ce sujet dans ses avis successifs.
Le maintien de cette mesure est également de nature à créer une inégalité, qui n est
pas scientifiquement justifiée, entre les personnels ne présentant pas un schéma vaccinal
complet et ceux présentant un schéma vaccinal de plus de 3 mois alors même que rien
ne permet de considérer les premiers comme plus susceptibles d’être infectés et
contagieux que les seconds.
Par ailleurs, en poursuivant l objectif de protection de la santé publique en utilisant
l outil de l obligation vaccinale des soignants en dépit de son inefficacité au bout de 3
mois, le pouvoir règlementaire fait le choix de faire peser sur les seuls personnels
présentant un schéma vaccinal complet la responsabilité de la gestion de l’épidémie et
de l efficacité du système de santé.
Tant la nature de la mesure que l absence de renforcement du système de santé
démontrent déjà que la nécessité de la mesure n est pas démontrée.
La durée de la mesure milite également pour son abrogation puisque les atteintes
qu’elle porte aux personnels concernés dépassent amplement ce qu’il est possible de
qualifier de raisonnable.
Je souligne ici que l appréciation concrète de la nécessité de la mesure de maintien
de l’obligation vaccinale est rendue impossible en l absence de données fiables et
scientifiquement étayées et dès lors qu aucune autre mesure n a été sérieusement et
scientifiquement examinée par les autorités sanitaires ou par le pouvoir règlementaire.
Non seulement rien ne démontre qu aucune autre mesure moins attentatoire
aux libertés n aurait pu être prise, mais force est de constater qu aucune
alternative de nature à préserver lesdits droits et libertés n a été envisagée.
3- Sur la proportionnalité de la mesure de maintien de l’obligation vaccinale
La proportionnalité de la mesure implique qu il existe un rapport raisonnable de
proportionnalité entre les motifs de fait fondant un acte administratif et son objet.
En outre, s'agissant d'un acte réglementaire, la violation dudit principe de
proportionnalité est constatée si la disposition attaquée apporte aux libertés une
restriction qui n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée, dans son principe et
dans son ampleur, par rapport à l'objectif poursuivi.
L appréciation du critère de proportionnalité intervient en principe seulement pour
les mesures dont l adéquation et la nécessité ont été démontrées, ce qui n est pas le cas
en l espèce.
Pour autant, cette appréciation n apparaît pas superfétatoire dès lors qu elle
confirme de plus fort que le décret doit être abrogé.
L examen de la proportionnalité de la mesure implique d examiner, lorsqu il
plusieurs moyens équivalemment efficaces se présentent à l autorité aux fins de réaliser
l objectif légitime qu elle assigne, si ladite autorité a choisi celui qui génère le moindre
préjudice pour les droits en cause.
Ainsi, il est certain que la mesure ne porte pas atteinte de manière excessive à
d autres intérêts légitimes.
S agissant de maintenir l obligation pour certaines catégories de personnels de
présenter un schéma vaccinal complet pour être autorisé à poursuivre son activité
professionnelle, le caractère proportionné s appréciera au regard, notamment, des
conséquences de la suspension de nombreux personnels concernés, du risque
scientifiquement prouvé que constitue ces personnels ne présentant pas de schéma
vaccinal complet et de l objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé
publique dans son versant épidémique confronté à cet objectif dans son versant
plus général.
La mesure apparaît disproportionnée au regard du risque que constitue les
personnels ne présentant pas de schéma vaccinal complet. En effet, le risque que
présente ces personnels n est pas scientifiquement établi et l est d autant moins que,
confronté aux personnels ayant reçu la première dose de rappel depuis plus de 3 mois
mois, il n est pas prouvé qu ils soient plus exposés à l infection ou qu ils soient plus
susceptibles de transmettre la maladie.
Bien au contraire, il est largement admis que les personnels présentant un schéma
vaccinal complet pouvait, même avant l expiration du délai de 3 mois mois après la
primo vaccination ainsi qu avant l expiration du délai de 3 mois mois après la première
dose de rappel, étaient susceptible d’être infectés et de contaminés les usagers.
C’est ce que constate le conseil scientifique dans sa note d’alerte du 20 août
2021
« Les personnes vaccinées infectées ont des pics de charge virale du même
ordre de grandeur que ceux des personnes non-vaccinées infectées, mais
pour une durée plus courte, suggérant que les personnes vaccinées infectées
pourraient être contagieuses, mais moins longtemps que les personnes non-
vaccinées infectées ;(…)
HAS :une probabilité d'isoler du virus infectieux significativement plus faible
chez les vaccinés (68,6% des cas) que chez les non vaccinés (84,9% des cas),
suggérant une moindre contagiosité des vaccinés .
Par ailleurs, les vaccins, bien que protégeant efficacement contre les formes
graves (90%), ont une efficacité limitée vis-à-vis de l infection par ce variant
Delta, avec une protection vaccinale contre les formes symptomatiques de
l'infection estimée initialement à 80-90%, puis plus récemment autour de
50%.
Les personnes vaccinées infectées étant elles-mêmes capables d'infecter leur
entourage, mais sur une durée plus courte comparées aux personnes non-
vaccinées infectées. »
La HAS, quant à elle, dans son avis du 5 octobre 2021 concluait en ces termes :
« Des données complémentaires sur la cinétique virale du variant Delta
chez des personnes primovaccinées indiquant :
‒ une excrétion virale plus courte (sur une durée de 3 jours)
comparativement aux personnes non vaccinés ;
‒ une probabilité d'isoler du virus infectieux significativement plus faible
chez les vaccinés (68,6% des cas) que chez les non vaccinés (84,9% des
cas), suggérant une moindre contagiosité des vacci- nés ;
‒ des données discordantes quant à une différence au pic de charge virale
chez des patients infectés par le variant Delta après leur primovaccination
complète comparativement à celle des personnes non vaccinées (et si la
charge virale chez les vaccinés apparait plus basse au pic, la différence
s’estompe quand on s’éloigne de la primo vaccination).
Conclusion
Si les données restent discordantes quant à l’impact de la vaccination sur
la charge virale d’une infection survenue chez des personnes
primovaccinées comparativement à des personnes non vaccinées, il semble
que dans le cas où une différence de charge virale est mise en évidence, plus
le délai depuis la primovaccination augmente, plus elle s’estompe dans le
temps.
Il apparait également que la vaccination se traduirait par une excrétion
moins longue du virus (doué d’une infectivité amoindrie), et que l’induction
d’une réponse muqueuse efficace pourrait s’accompagner d’une moindre
transmissibilité du virus chez les vaccinés.
Une étude a mis en évidence sur un faible effectif, l’association entre une
dose de rappel et une diminution statistiquement significative de la charge
virale en comparaison à celle des personnes primovaccinées qui n’avaient
pas reçu leur dose de rappel, suggérant ainsi que l’administration d’un
rappel diminuerait la contagiosité des personnes développant une infection
par le SARS-CoV-2. »
Dès lors que la seule garantie acquise du vaccin serait, selon les autorités de santé,
une excrétion virale moins longue, il faut s’interroger sur son caractère proportionnel
avec la mesure retenue, à savoir la privation de salaire des personnels ne présentant pas
un schéma vaccinal complet.
En effet, la mesure - qui consiste à ne pas permettre aux personnels concernés de
poursuivre leur activité professionnelle rémunérée - les expose à une précarité sociale
et économique majeure et les jette dans l isolement et le trouble psychologique.
Outre que la mesure, par sa durée, constitue une mise à l’écart de la société et des
moyens de subsistance qui apparaît disproportionnée par rapport au risque que présente
le variant Omicron, la mesure n ayant pas de durée déterminée, elle crée une insécurité
de nature à générer divers troubles qui viennent aggraver l’état psychologique des
personnels concernés déjà profondément marqués par une année de crise sanitaire (avis
des 11 mars et 06 mai 2021).
La mesure apparaît également disproportionnée au regard du rôle essentiel reconnu
aux soignants (avis du 11 mars 2020) et aux efforts qu ils ont faits durant les premières
vagues (avis du 6 mai 2021).
De même, il est largement admis désormais que la présentation d un test PCR
régulier est au moins aussi efficace qu une vaccination contre le COVID-19 en toutes
circonstances.
Au regard de ce qui précède, la mesure n est pas proportionnée aux risques que
présentent les personnels ne justifiant pas d un schéma vaccinal complet.
La mesure qui vise à protéger les usagers des services de santé a pour conséquence
la suspension sans traitement de nombreux personnels qui sont donc privés de leur
activité professionnelle en dépit soit de leur contrat de travail, soit de leur statut
d agents publics, soit au titre de la liberté d entreprendre en tant que libéral.
Il est possible de considérer que ces personnels subissent une maltraitante
administrative au sens de la thèse de Frederic Colin (https://hal-amu.archives-
ouvertes.fr/hal-02547451/document):
« L identification de la maltraitance émane essentiellement d acteurs
spécialisés dans la défense des droits, notamment de publics fragiles. Ainsi,
le Conseil de l Europe en a conçu une approche de définition dès 1987,
comme une violence se caractérisant par « tout acte ou omission commis par
une personne, s il porte atteinte à la vie, à l intégrité corporelle ou
psychique ou à la liberté d une autre personne ou compromet gravement le
développement de sa personnalité et/ou nuit à sa sécurité financière » (…)
L administration publique doit en tout état de cause être plus sensible que
toute autre organisation à la maltraitance : prestataire de service public, la
maltraitance lui est par définition interdite. Elle apparait pourtant dans des
études et témoignages, concernant les conditions de travail des agents du
secteur public, notamment dans le secteur médical ou para- médical.
L Assemblée nationale elle-même a même évoqué le phénomène de la
maltraitance administrative. »
En outre, ce choix est contraire au devoir de sollicitude qui s’impose à
l’employeur public vis-à-vis de ses personnels (article 41 de la Charte des Droits
fondamentaux de l’UE).
Dès lors qu elle est manifestement inadéquate et qu elle n apparaît pas nécessaire,
la mesure ne pourra naturellement pas être considérée comme proportionnée.
En tout état de cause, la question de sa proportionnalité se poserait même si son
adéquation ou sa nécessité étaient démontrées alternativement ou cumulativement.
En effet, priver de nombreux personnels du droit d exercer leur profession et les
priver de leurs revenus et de leur propriété n est manifestement pas proportionné dès
lors qu il est avéré que le variant Omicron échappe à la vaccination, qu il est contagieux
mais régresse fortement et qu il expose peu à des formes graves de la maladie.
La gravité des conséquences du maintien de la mesure au regard de l’évolution de
l’épidémie démontre amplement que la mesure n est pas proportionnée.
Enfin, la mesure qui prétend s inscrire dans la réalisation de l objectif de valeur
constitutionnelle de protection de la santé publique génère de graves
dysfonctionnement dans les services de santé.
Dès le 6 mai 2021 le Conseil scientifique soulignait ces dysfonctionnements
« B . UN RETENTISSEMENT MAJEUR, DURABLE ET SOUS-ESTIME
SUR LE SYSTEME DE SOINS
1. La prise en charge des patients non-COVID est dégradée
Dans les périodes de recrudescence épidémique, l impact de la pandémie et
la tension sur les lits d hospitalisation, notamment de réanimation, conduit
à une baisse globale de l activité de soins médicaux et chirurgicaux hors
COVID.
On observe une déprogrammation des interventions programmées dites non
urgentes (chirurgie à visée de dépistage et curative), qui vise à libérer des lits
d hospitalisation et du personnel soignant. Les chirurgies en lien avec des
pathologies cancéreuses ou avec des greffes font par exemple partie des
interventions déprogrammées même si on essaie de le limiter. Les reports
représentent des pertes de chance pour les patients.
Déprogrammer une intervention nécessite par ailleurs de choisir des patients
jugés prioritaires par rapport à d autres. Il en est de même du report de bilans
programmés dans un parcours de soins perturbé, soit par la réduction
mécanique de l offre, soit par les décisions des patients d’éviter des contacts
avec des structures hospitalières en tension. Si un certain nombre
d interventions n ont pas de caractère d urgence vitale, leur report peut
néanmoins entraîner des pertes de chance pour ces patients, qui restent sur
une liste en attente d’être reprogrammés. Ces déprogrammations et l attente
qui en résultent peuvent s avérer anxiogènes pour ces patients, souvent
atteints de maladies chroniques ou graves.
Un sentiment d abandon peut être observé chez ces patients, qui nécessitent
un véritable accompagnement. Les équipes soignantes sont fortement
affectées par cette situation ainsi que par les enjeux éthiques qui
l accompagnent, en termes de priorisation notamment.
Par exemple, en Ile-de-France, lors de la dernière vague, l ARS a demandé
une déprogrammation de 40% des activités de chirurgie dans les hôpitaux
publics et privés pour permettre la prise en charge des patients COVID. La
semaine du 26 avril 2021, les données de l AP-HP (ensemble des GHU hors
pédiatrie) attestaient d une déprogrammation de 42% des activités
chirurgicales, avec 48% des salles de blocs opératoires fermées.
Il est à noter que les populations les plus vulnérables (notamment les patients
précaires et les patients âgés) sont plus exposées aux conséquences de ces
désorganisations de l activité engendrées par la prise en charge d un grand
nombre de patients COVID. Pour les personnes âgées, en particulier, cette
désorganisation et les reports d interventions chirurgicales fonctionnelles
qu elle entraine peuvent réduire leur autonomie.
Ces difficultés de prise en charge peuvent conduire, chez ces patients souvent
poly-pathologiques, à une réduction de mobilité (imposée ou volontaire,
avec une aggravation de la sarcopénie).
Actuellement, leur suivi n est pas organisé.
En maintenant un niveau élevé de circulation du virus, l impact sur la prise
en charge des patients non-COVID risque de se prolonger, entrainant de
réelles pertes de chance, d autonomie et d espérance de vie pour toutes ces
personnes. »
Le Conseil scientifique réitérait dans son avis du 5 octobre 2021
„ANNEXE 2 : QUEL RETARD PRIS POUR LA PRISE EN CHARGE DES
PATHOLOGIES NON-COVID.
L impact des vagues épidémiques successives sur un cours laps de temps sur
la prise en charge des autres pathologies est difficile à évaluer.
La fédération Unicancer (18 centres français de lutte contre le cancer
regroupant des établissements privés à but non lucratif qui traitent un quart
des patients atteints de cancer en France) a récemment publié des chiffres
sur le retard de prise en charge des patients atteints de cancer.
Il existe des données européennes qui suggèrent des retards à la prise en
charge des infarctus du myocarde avec élévation du segment ST pendant la
pandémie.
Ces deux exemples montrent que l activité médicale liée à la pandémie a
impacté la prise en charge hospitalière d autres pathologies avec des
conséquences à long terme probablement importantes. Les données sont
encore plus inconnues pour les soins de santé primaires.
De plus, le retard pris dans les différentes prises en charge n a pas pu être
rattrapé. Ainsi, le 6ème rapport de l’étude EPI-PHARE publié le 27 mai 2021
souligne que, malgré une reprise de la délivrance et de l utilisation de
produits de préparation aux actes de coloscopie, IRM et scanner -trois actes
indispensables pour diagnostiquer et suivre certains cancers ou maladies
graves, celles-ci sont insuffisantes pour combler le retard accumulé en
2020.
Le Conseil scientifique considère par ailleurs qu il est urgent de mener un
travail scientifique d ampleur pour évaluer ces retards et proposer une
politique de santé publique adaptée afin de minimiser au mieux les
conséquences de ces défauts de prise en charge, que ce soit pour les soins,
mais aussi pour les délais de suivi et de prévention secondaire. »
Le Conseil scientifique persistait dans son avis du 6 octobre 2021
“LES ENJEUX SOCIETAUX
(iii) Pour la gestion de l’épidémie, avec une vision à moyen terme, en 2022,
sont également à prendre en compte :
- La fragilité actuelle du système de soins avec un pourcentage significatif
de lits fermés et une forme d’épuisement des soignants ;
- La survenue probable, cet automne/hiver, d un nombre plus important
d infections respiratoires (grippe, bronchiolites...) y compris dans la
population des jeunes enfants non immunisés ;
- L impact réel actuellement mal chiffré sur le retard de prise en charge
des pathologies non-COVID. »
Toujours le 8 décembre 2021
« 7. Hôpital : les enjeux à court, moyen et long terme
La capacité du système de soins à répondre à cette nouvelle vague de forte
intensité se pose donc dans des conditions différentes des vagues
précédentes.
Ce constat doit inciter les ARS à prévoir dès maintenant la montée en charge
des organisations en secteur conventionnel comme en soins critiques pour in
fine être capable de gérer 2 350 hospitalisations par jour de patients COVID
au pic de la 5ème vague. Il est capital que les ARS soient vigilantes dans
chaque territoire à ce que la solidarité territoriale entre établissements
publics et privés soit partagée tant en ce qui concerne la prise en charge des
patients COVID positifs que les patients non-COVID et ce en particulier sur
deux points:
En amont, la déprogrammation chirurgicale doit être anticipée et
équitable entre tous les établissements, publics et privés »
A nouveau le 13 janvier 2022
« 2. La situation sanitaire et vaccinale actuelle est caractérisée par les
points suivants :
Le retentissement sur le système de soins va être important jusqu’à au
moins début mars 2022, avec un niveau élevé d occupation des lits de soins
intensifs et d hospitalisations conventionnelles conduisant à des
déprogrammations de patients non-COVID. »
Dès lors, lorsqu on met en balance l objectif de protection de la santé publique au
regard de l’épidémie et l objectif plus général de protection de la santé publique en
général, il est manifeste que la mesure n est pas proportionnée en ce qu elle a des
conséquences pour les malades qui sont privés de soins, des conséquences pour les
personnels en activité dont la situation était déjà alarmante en août 2021 et l est encore
plus aujourd hui et qu elle a des conséquences pour le maintien même du système de
santé dont on peut lire dans la presse et de la part des acteurs majeurs du secteur
qu il est au bord de la rupture.
A titre d’illustration, Philippe JUVIN, chef des urgences de l’Hôpital Georges-
Pompidou a tiré la sonnette d’alarme, une étude mondiale détermine que la moitié des
urgentistes sont en burn-out après le Covid-19.
Le Collectif interhôpitaux du CHU d’Angers appelle à une mobilisation nationale
pour la défense de l’hôpital public, 19.000 patients de l’agglomération d’Angers se
trouveraient sans médecin traitant, Les urgences de l’Hôpital de Chinon ont fermé et les
accouchements à la maternité ont cessé, l’unité de soins palliatifs de la Seyne a fermé,
l’Ile de France est particulièrement touchée par la fermeture des services, faute de
personnel, les urgences de l’Hôpital de Senlis ont fermé depuis le mois de décembre
2021, les urgences de Lariboisière sont débordées, même Martin Hirsch alerte devant la
pénurie de personnel soulignant que 1400 personnels infirmiers manquent à l’APHP.
Dans toutes les régions les établissements hospitaliers sont en sous-effectif, les
services ferment, les soins ne sont plus assurés.
La situation a alerté le Conseil scientifique qui a apporté toutes précisions à ce sujet
dans son avis du 5 octobre 2021
« Des données concordantes recueillies auprès des grandes structures
hospitalières du pays dans les plus grandes régions françaises sont
concordantes et font état de :
- Un grand nombre d‘ emplois vacants avec notamment 5 professions en
tension : IDE, IBODE, IADE, manipulateurs de radiologie et masseurs-
kinésithérapeutes.
- Un recours déjà important et en augmentation aux heures
supplémentaires et à l intérim avec malgré tout un pourcentage important
de lits fermés chiffré à environ 20% et touchant tous les secteurs de soins
(médecine dont soins critiques, chirurgie et obstétrique) mais aussi à un
moindre degré les services de pédiatrie (réanimation et hospitalisation
conventionnelle) qui dans certaines régions sont déjà en tension alors que
nous sommes qu‘ au début des épidémies automnales et hivernales virales
hors COVID. »
A nouveau il sera rappelé que le Conseil scientifique souligne tout au long de ses
avis à la fois la fragilité du système de santé, l importance de maintenir une offre de
soins de bonne qualité, le stress que génère pour les soignants l incertitude de ne pouvoir
garantir le meilleur soin aux patients COVID et non COVID et l impératif de soutenir
le soin primaire (note d alerte du 20 août 2021) .
Les lits fermés, le manque de personnel, l absentéisme, la souffrance des soignants
en activité sont, comme les troubles mentaux auxquels les personnels sont exposés
constituent un objectif de santé publique au même titre que la lutte contre l’épidémie.
Le Conseil scientifique insiste sur la nécessité de remettre au premier plan cet
objectif général de protection de la santé publique le 6 mai 2021.
2. Des soignants en souffrance
Brutalement en février 2020, les hôpitaux et les professionnels de santé ont
été confrontés à un afflux massif de patients présentant des formes graves
de COVID-19 avec une augmentation très rapide de la mortalité dans les
services hospitaliers. En mars 2020, les soignants mais aussi les
autres catégories socio-professionnelles des hôpitaux ont dû s’ adapter en
urgence et depuis adapter sans relâche l’ offre de soins en fonction des
vagues épidémiques.
Dans l’ ensemble, les hôpitaux ont fait preuve d’ une remarquable
adaptation, et si la charge de travail a été parfois très importante, « l‘
hôpital » n’ a jamais semblé débordé au point de ne pas pouvoir admettre
les patients dans des services de soins adaptés à leur état.
Cependant, cet effort qui dure depuis plus d’ un an n’ est pas sans
conséquence ni pour les soignants et les autres personnels des hôpitaux, ni
pour les patients.
Le stress post-traumatique
La charge de travail des soignants a été multipliée, même si cette
augmentation est difficile à chiffrer, variable d un service à un autre.
Heures supplémentaires, plan blanc et suppression des congés témoignent
de cette augmentation de la charge de travail, sans repos ou période pour
se ressourcer. Les soignants ont dû faire face à des situations anxiogènes,
certaines ayant été source de syndromes de stress post-traumatique :
confrontation à l’ augmentation du nombre de décès, notamment dans des
services dans lesquels la mortalité est habituellement faible, affectation
dans un environnement technique et relationnel complètement nouveau
nécessitant l’ acquisition de nouvelles compétences en un temps très court,
accueil de malades dans des secteurs non adaptés à leur prise en charge
avec le maximum de sécurité. Par ailleurs, les soignants ont été soumis aux
mêmes restrictions sanitaires que la population avec les conséquences que l
on connait, notamment sur la santé mentale.
Le groupe d’étude français FAMIREA (Azoulay E, et al.) a évalué la
prévalence des symptômes d'anxiété, de dépression et de dissociation péri-
traumatique chez les professionnels de la santé au cours d'une étude
transversale dans 21 services de réanimation français entre le 20 avril 2020
et le 21 mai 2020. Parmi les 1 058 répondants (soit 67% des personnels des
services, âge médian de 33 ans ; 71% de femmes ; 68% de personnel
infirmier). La prévalence des symptômes d'anxiété, de dépression et de
dissociation péri-traumatique était de 50,4%, 30,4% et 32%,
respectivement, avec les taux les plus élevés chez les infirmières.
En analyse multivariée, le sexe masculin était indépendamment associé à
une prévalence plus faible des symptômes d'anxiété, de dépression et de
dissociation péri-traumatique.
Les professionnels de la santé travaillant dans des hôpitaux non affiliés à
l'université et les infirmières auxiliaires présentaient un risque élevé de
symptômes d'anxiété et de dissociation péri- traumatique. Ces auteurs ont
surtout identifié six facteurs modifiables de ces symptômes des troubles de
santé mentale: peur d'être infecté, incapacité de se reposer, incapacité à
prendre soin de la famille, être confronté à des émotions difficiles, regret
des restrictions dans les politiques de visite et être témoin d'une fin de vie
hâtive.
Dans une analyse systématique de la littérature (d Ettorre et al.), il
apparait que le risque de survenue de symptômes de stress post-traumatique
est associé aux soignants les plus jeunes, les moins expérimentés et avec une
importante charge de travail, exerçant dans un environnement non sécurisé
en raison par exemple du manque d’équipements de protection et pour
lesquels la formation et le soutien notamment psychologique étaient
insuffisants.
Il est donc à prévoir des conséquences à moyen et long terme de ces
symptômes de stress post- traumatique.
En effet, quand il n est pas pris en charge le syndrome de stress post-
traumatique peut se chroniciser (20 % des cas), s accompagner d autres
troubles co- morbides (troubles anxieux,
dépressions), avoir des conséquences somatiques et amener un
retentissement fonctionnel important sur la vie sociale, affective et
professionnelle.
Le Conseil scientifique a surtout jugé utile de rédiger une note d’alerte dédiée à
cette problématique et a fait nombre recommandations le 20 août 2021
„V. UN CLIMAT SOCIAL TENDU CHEZ LES SOIGNANTS
Le Conseil scientifique alerte sur le climat d’épuisement, parfois de
démotivation, des personnels soignants en général et les personnels
hospitaliers en particulier. Ce climat concerne d'abord les équipes qui
gèrent les patients atteints de COVID, mais aussi l ensemble des équipes,
services et disciplines de l'hôpital. Cette situation est d‘ autant plus critique
dans les zones où le virus circule le plus actuellement (zones côtières et
départements et territoires d outre-mer), dans cette période de congés
estivaux.
Devant une évolution défavorable de la situation des soignants, et face à l’absence
de mesures, le Conseil scientifique réitère son alerte et fait un constat grave le 5 octobre
2021
E. UNE SITUATION DIFFICILE DANS LES ETABLISSEMENTS DE
SANTE AVEC UN EPUISEMENT DES SOIGNANTS.
La vaccination de masse de la population française permet d aborder l‘
automne et l hiver de façon plus sereine qu’ en 2020, pour autant il est
impossible d exclure complètement un débordement du système de soins
en raison d une part du risque de circulation des deux virus responsables
des épidémies saisonnières : la grippe et le VRS et d autre part de
l’épuisement des soignants qui réduit la capacité de prise en charge des
patients.
Des données concordantes recueillies auprès des grandes structures
hospitalières françaises (administratives et médicales) font état d un
système de santé en souffrance avec : 1) un grand
nombre d emplois vacants (5 professions en tension : IDE, IBODE, IADE,
manipulateurs de radiologie et masseurs-kinésithérapeutes); 2) dans les
grands CHR, quelle que soit la région, un pourcentage significatif de lits
fermés en raison du manque de personnel et ce, dans tous les secteurs de
soins dont la pédiatrie. Ces chiffres semblent supérieurs aux automnes
précédents ; 3) une activité des services d urgence qui a retrouvé son niveau
de septembre 2019, 4) et enfin un nombre important de patients « COVID »
toujours hospitalisés.
Le système de soins est fragilisé après cette longue période COVID, où il a
été en permanence en première ligne. Sa capacité à répondre à une
éventuelle nouvelle vague, même plus faible, se pose donc dans des
conditions différentes des vagues différentes.
D’ après une étude française menée dans les services de réanimation la
souffrance des soignants est élevée et se traduit par 1) de l’ insomnie
(37,9% dont 7,7% prenaient quotidiennement un psychotrope, 2) des
symptômes d'anxiété, de dépression, de trouble de stress post-traumatique
et d'épuisement professionnel chez 60,0%, 36,1%, 28,4% et 45,1 % des
répondants, respectivement.
En conclusion les symptômes de troubles mentaux chez les soignants
demeurent très élevés.
Le Conseil scientifique considère qu’ un objectif de santé publique devrait
être de proposer pour chaque soignant une évaluation de ces troubles et le
cas échéant lui proposer une prise en charge adaptée.
Le Conseil scientifique a, enfin, évaluer les enjeux de la situation des soignants dans
son avis du 8 décembre 2021
« 7. Hôpital : les enjeux à court, moyen et long terme Depuis le début de
la crise sanitaire, les soignants sont mobilisés pour faire face à l afflux de
malades atteints par une forme sévère du COVID (au 6 décembre 2021, 544
385 patients ont été hospitalisés depuis le 1er mars 2020). Ils ont eu à
prendre en charge des patients présentant une gravité plus importante par
rapport aux patients hospitalisés dans leurs services habituellement. Cette
vague survient (avis du Conseil scientifique COVID-19 du 5 octobre 2021)
alors que le système de santé est en souffrance avec : (i) un nombre
important d emplois vacants (5 professions en tension : IDE, IBODE, IADE,
manipulateurs de radiologie et masseurs- kinésithérapeutes); (ii) un
pourcentage significatif de lits fermés variable selon les territoires en
raison du manque de personnel et ce, dans tous les secteurs de soins dont
la pédiatrie et la psychiatrie de l‘ enfant et de l’ adolescent (spécialités en
grande tension du fait des épidémies hivernales et des troubles
pédopsychiatriques relevant de soins hospitaliers)
La capacité du système de soins à répondre à cette nouvelle vague de forte
intensité se pose donc dans des conditions différentes des vagues
précédentes.”
L’insuffisance de prise en charge des problèmes mentaux des enfants et des jeunes
est également soulignée par la Défenseure des droits qui vient d’alerter le Premier
Ministre à ce sujet
(https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/cp_-
_defenseur_des_droits_-_plan_durgence_pour_la_sante_mentale_des_jeunes.pdf)
Une mesure ne saurait être maintenue dès lors que ses effets sont délétères et
vont à l encontre de l objectif même qu elle s est fixée.
Il résulte de ce qui précède que l’illégalité du décret dont l’abrogation est demandée
est acquise.
Je vous prie de croire, Madame la Ministre, en l’assurance de ma haute
considération.
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Abrogation de l'obligation vaccinale des soignants

  • 1. MAUD MARIAN Société d’avocats inscrite au Barreau de Paris maudmarian@orange.fr 11 boulevard Sébastopol Tel : 01.80.49.38.55 75001 PARIS Fax : 01.80.27.01.60 SELARL au capital de 500 euros RCS Paris 812 379 485 Madame la Ministre de la Santé 14, avenue Duquesne 75350 PARIS 07 SP Par Lettre recommandée avec AR Paris, le 10 juin 2022 OBJET : Demande d’abrogation de l’article 1 8° du décret n°2021-1059 du 7 août 2021 Madame le Ministre, J’ai l’honneur de solliciter, en ma qualité de conseil de En effet, il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’état que « l'autorité administrative compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date. » Ainsi, tout acte règlementaire doit se fonder sur des motifs admissibles de fait qui doivent pouvoir être contrôlés lors d un contrôle de légalité.
  • 2. Les dispositions de l’article 1 8° du décret 2021-1059 du 7 août 2021, modifié par le décret 2022-352 du 12 mars 2022, décret d’application de la loi du 5 août 2021, sont illégales au regard des circonstances de droit et de fait postérieures à leur entrée en vigueur. Ce décret est intervenu dans un contexte particulier de crise. Pour rappel, l’Avis n°2021.0047/AC/SEESP du 8 juillet 2021 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à l adaptation de la stratégie vaccinale devant l’émergence de variants du SARS-CoV-2 “Considérant la menace liée à l expansion rapide du variant delta sur le territoire français, la Direction générale de la santé a saisi la Haute Autorité de santé (HAS) sur la nécessité d adapter la stratégie vaccinale s agissant notamment du type de vaccin à recommander préférentiellement et des schémas vaccinaux à privilégier (stratégie de prime boost hétérologue, délais entre deux doses de vaccins...). La HAS a pris en considération les éléments suivants : − La situation épidémiologique actuelle, l’évolution de la diffusion du variant delta du SARS-CoV-2 en France et la prédominance de ce nouveau variant du SARS-CoV-2 dans des pays comme l'Inde et le Royaume-Uni. - Les données disponibles issues de plusieurs études de séroneutralisation étudiant l effet de la vaccination vis-à-vis des différents variants circulant actuellement en France dont le variant delta du SARS-CoV-2.(…) Conclusion Après une fin de printemps marquée par la décélération de l’épidémie, l’été voit une remontée rapide des contaminations liée aux nouveaux variants plus contagieux et en particulier au variant delta. Si le nombre de nouveaux cas demeure encore faible, la dynamique observée est particulièrement significative et pourrait rapidement dégrader la situation sanitaire. Cette évolution n est toutefois pas inéluctable, grâce à la vaccination.
  • 3. Ainsi : « − conformément à sa recommandation précédente relative à l impact potentiel de la circulation des variants du SARS-CoV-227, la HAS considère que les nouvelles primo-vaccinations pourraient être préférentiellement initiées avec les vaccins à ARNm en respectant un intervalle de 3 à 4 semaines entre les 2 doses afin de permettre d atteindre une immunité optimale plus rapidement. Elle rappelle en outre, qu au-delà de l efficacité démontrée de la vaccination sur la survenue de formes sévères de la maladie, les données en vie réelle récentes confirment l intérêt de la vaccination sur la transmission de la maladie (avec une efficacité de l ordre de 80 à 90% vis-à-vis des autres variants après deux doses de vaccin à ARNm) qui semble pouvoir être extrapolé au variant delta. Considérant la disponibilité des vaccins et la diffusion du variant delta sur l ensemble du territoire, la HAS recommande que cette stratégie soit mise en œuvre sur l ensemble du territoire national. Enfin, la vaccination doit se poursuivre à un rythme élevé afin d assurer rapidement une couverture vaccinale optimale de la population, compatible avec la poursuite de la levée des restrictions et nécessaire pour garantir la protection des plus vulnérables. Aussi, comme elle l a rappelé à plusieurs reprises, la HAS recommande le maintien et l amplification de toutes les politiques « d aller vers » les publics les plus fragiles et les plus vulnérables. De plus, à la lumière des données disponibles sur la protection des vaccins contre la transmission, la HAS considère que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique.
  • 4. C est pourquoi, au-delà des mesures incitatives, des opérations de communication, d information et de la recherche de l'adhésion de chacun, la HAS recommande que soit envisagée sans délai l obligation vaccinale de l ensemble des professionnels en contact avec des personnes vulnérables. Au-delà, au vu de la progression actuelle de l’épidémie, il est nécessaire d entamer dès à présent la réflexion sur une extension plus importante de cette obligation vaccinale en population générale afin de pouvoir prendre à temps cette décision si elle s imposait Mais également l’Avis n° 2021.0052/AC/SEESP du 15 juillet 2021 du collège de la Haute Autorité de santé relatif au projet de loi relatif à l adaptation de nos outils de gestion de la crise sanitaire « (…) Enfin, la HAS a appelé, dans son avis du 8 juillet 2021 à ce que l obligation vaccinale de l ensemble des professionnels en contact avec des personnes vulnérables soit envisagée sans délai. La HAS considère en effet que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique. Elle a estimé par ailleurs, qu il était nécessaire d entamer sans attendre la réflexion sur une extension plus importante de cette obligation vaccinale afin de pouvoir prendre à temps cette décision si elle s imposait. 3. Concernant les professionnels ciblés par l obligation vaccinale dans le projet de loi Après six mois de campagne vaccinale dont les succès incontestables ne suffisent toutefois pas à protéger suffisamment la population de la résurgence épidémique, la HAS s est ainsi d ores et déjà prononcée pour l ouverture sans délai du débat sur l obligation vaccinale. Mais pour se prononcer sur les mesures présentées dans le projet de loi, une analyse à jour de la situation épidémiologique et de la dynamique vaccinale au préalable est indispensable.
  • 5. La HAS considère les éléments suivants : L’évolution défavorable du contexte épidémique marquée par une diffusion rapide du variant delta, une augmentation préoccupante du nombre de cas dans un contexte de diminution de l adhésion aux mesures barrières La reprise de la circulation épidémique se confirme après une phase d amélioration des indicateurs épidémiologiques. L existence de vaccins sûrs et efficaces, notamment en prévention des formes graves de Covid-19 liée au variant Delta et en prévention de la transmission du virus La vaccination encore insuffisante des professionnels au contact des plus âgés et des professionnels exerçant en établissement de santé. Les risques similaires associés à la contamination des professionnels en charge ou au contact des personnes les plus vulnérables (personnel des établissements sociaux et médico sociaux, aides à domicile, auxiliaires de vie, sapeur pompiers et transporteurs sanitaires). La HAS estime que l obligation vaccinale inscrite dans le projet de loi et qui concerne l ensemble des professionnels en contact avec les personnes vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique et que sa mise en place est justifiée au regard de ces enjeux. Le projet de Loi, s inscrit en effet en cohérence avec les données disponibles sur la protection des vaccins contre la transmission du virus, et vise à assurer à court terme : - la protection des professionnels eux-mêmes, dont l exemplarité contribue à l objectif de protection communautaire - la protection de l entourage de ces professionnels - la protection des personnes vulnérables et la limitation des infections nosocomiales qui relève d une responsabilité d ordre éthique et déontologique pour les professionnels les prenant en charge, - la protection de l organisation sanitaire permettant la prise en charge des patients et personnes
  • 6. Enfin, il n est pas du ressort de la HAS de se prononcer sur les sanctions prévues dans le projet de loi. La HAS rappelle néanmoins que l objectif est avant tout de parvenir à convaincre l ensemble de la population de l intérêt à la fois individuel et collectif de la vaccination. 5. Conclusion générale Au vu de l évolution défavorable du contexte épidémique marquée par une diffusion rapide du variant delta et une augmentation préoccupante du nombre de cas dans un contexte de diminution de l adhésion aux mesures barrières, la HAS a déjà appelé, dans son avis du 8 juillet 2021 à ce que soit envisagée sans délai l obligation vaccinale de l ensemble des professionnels en contact avec des personnes vulnérables. La HAS considère en effet que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique. La HAS estime donc que la mise en œuvre de l obligation vaccinale inscrite dans le projet de loi est justifiée au regard de ces enjeux. Si les considérations de santé publique justifient l obligation de la vaccination des professionnels cités dans le projet de loi, l impact sociétal qui en découle ne peut être ignoré et il est primordial d’éviter toute stigmatisation de ces professionnels. En outre, la dynamique de l’épidémie appelle désormais une augmentation massive de la couverture vaccinale comme le démontrent les modèles réalisés jusqu’à présent. Ainsi au vu de la couverture vaccinale encore insuffisante en France, en particulier chez les plus de 80 ans, la HAS souligne la nécessité d amplifier la vaccination, en particulier s agissant des personnes les plus fragiles et de leur entourage.
  • 7. La HAS recommande donc l ouverture rapide d un large débat sur l’élargissement de l obligation vaccinale afin que les pouvoirs publics puissent s appuyer sur ces discussions pour prendre à temps une décision ciblant, le cas échéant, une population plus large que celle concernée par le présent projet de loi (personnes vulnérables, professionnels en contact avec le public voire population générale) si elle s avérait nécessaire et justifiée au vu du rythme de progression de l’épidémie et de son impact prévisible sur le système de santé. Ce débat doit impérativement être éclairé par des éléments factuels sur les déterminants de non-recours à la vaccination et les autres moyens disponibles (y compris incitatifs) pour accroître la couverture vaccinale. » La stigmatisation, redoutée par le Conseil scientifique, est également évoquée par le COSV dans sa note du 3 février 2022 « Stigmatisation des personnes non-vaccinées et des personnes sévèrement immunodéprimées dans le contexte de la vaccination anti-Covid-19 La présente aborde la question des impacts sociétaux de la campagne de vaccination actuelle contre la Covid-19. Elle cible en particulier deux points d attention : la stigmatisation des personnes non- vaccinées d une part, et la stigmatisation des personnes immunodéprimées d autre part. 1. Stigmatisation des personnes non-vaccinées a. Stigmate, stigmatisation et santé publique La santé publique s’ est intéressée à ces deux notions depuis quelques décennies, pour au moins trois raisons : - D‘abord,certaines pathologies,mais aussi des comportements nocifs pour la santé,peuvent devenir des stigmates pour les personnes concernées. C‘ est notamment le cas des troubles mentaux, de la séropositivité, de l’ obésité, mais aussi de l’ injection de drogues ou du tabagisme. Depuis plusieurs décennies, ces phénomènes de stigmatisation s‘ appuient de plus en plus sur une imputation de responsabilité aux malades.
  • 8. - Ensuite, les conséquences délétères, et en particulier l impact sanitaire, des phénomènes de stigmatisation ont largement été documentées : par exemple, les personnes stigmatisées peuvent voir leur bien-être et leur santé mentale affectés (en particulier si elles intériorisent le stigmate), ou manifester un moindre recours au système de soins (en particulier renoncer à des soins pour éviter des réactions stigmatisantes)4. Il n est d ailleurs pas rare que les pouvoirs publics mènent des campagnes de lutte contre la stigmatisation associée à tel ou tel handicap ou pathologie. - Enfin, il est apparu que la stigmatisation pouvait aussi être utilisée comme outil de prévention, au même titre que les campagnes d information et de sensibilisation, les mesures d incitation ou « l aller vers ». Ce recours a fait l objet de nombreux débats, car il suscite des réserves éthiques, du fait des conséquences délétères déjà mentionnées, mais aussi parce qu il peut s avérer contre-productif, en particulier s il devient pour certains une ressource identitaire revendiquée. » Cette peur de la stigmatisation fait écho à la protection contre les discriminations telle que résultant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme : « Consubstantiel à la société démocratique et particulièrement valorisé par le juge européen, le principe de non-discrimination, consacré par l'article 14 de la CEDH, fait l'objet d'une interprétation visant à assurer une garantie effective de la sanction des discriminations, en privilégiant une approche concrète. Dans cette perspective, la Cour européenne a consacré une remarquable extension du champ d'application de l'interdiction des discriminations, conduisant à la formulation de nouvelles obligations à la charge des États, et a précisé les modalités de son contrôle en faisant de la nature du motif de distinction fondant la différence de traitement un élément décisif . » (Hélène SURREL https://www.conseil- constitutionnel.fr/publications/titre-vii/la-sanction-des-discriminations-par- la-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme)
  • 9. L’acceptabilité de la vaccination est, quant à elle, questionnée par la HAS le 5 octobre 2021 : « La HAS souhaiterait également disposer d’informations complémentaires sur l’acceptabilité de la vaccination, en particulier sur les motifs des refus de vaccination chez les professionnels du secteur de la santé et du médico-social.” A compter du 12 juillet 2021, le président de la République, dans une volonté d accélérer la campagne de vaccination et de casser la dynamique du virus, a décidé d une part d’étendre le passe sanitaire à l ensemble des activités de la vie courante, d autre part, à instaurer une obligation vaccinale à l’égard des personnels soignants. Aux termes de son avis susvisé, la HAS préconise une vaccination obligatoire de ses personnels de santé pour les raisons suivantes : - une dégradation de la situation épidémique ; - l efficacité des vaccins notamment à l’égard des variants ; - le niveau insuffisant de la couverture vaccinale des professionnels au contact des plus âgés ; - les risques liés à la contamination des professionnels au contact des personnes vulnérables. Un projet de loi a donc été déposé le 19 juillet 2021 sur le bureau de l Assemblée nationale ; Après une semaine de débat, le texte a été adopté. Le Conseil Constitutionnel a rendu le 5 août 2021 une décision n°2021-824 DC dans laquelle il indique : « 121. Les sénateurs auteurs de la quatrième saisine, qui ne contestent pas l'obligation vaccinale, font valoir que ces dispositions porteraient une atteinte manifestement excessive à la liberté personnelle d'aller et venir, à la liberté d'entreprendre et au droit à l'emploi (...) 125. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision ».
  • 10. La loi du 5 août 2021 crée, pour certaines catégories de personnels en fonction de leur profession ou de leur lieu de travail, une obligation vaccinale contre la COVID-19 et renvoie quant aux justificatifs de la réalisation de cette obligation, nommé schéma vaccinal, à un décret pris après avis de la HAS. Un décret du 7 août 2021 (2021-1059) est venu préciser les modalités de cette obligation vaccinale et modifié le décret du 1er juin 2021. Par la suite, le législateur a mis en place un passeport vaccinal à compter du 22 janvier 2022. Ce passeport vaccinal a été suspendu le 14 mars 2022. Par ailleurs, le port du masque a également été suspendu le 16 mai 2022. Ainsi, les autorités de santé ont validé un schéma vaccinal de primo-vaccination comprenant 1 à 2 doses de candidats vaccins anti-COVID-19, puis une première dose de rappel (le 14 février 2022 pour les personnels relevant de l’obligation vaccinale) et, en date du 7 avril 2022, la gouvernement a ouvert une deuxième dose de rappel destinée aux personnes âgées de plus de 60 ans 6 mois après le premier rappel et les plus de 80 ans 3 mois après le premier rappel. Il résulte de ce qui précède qu’à ce jour, le schéma vaccinal complet des personnels soumis à l obligation vaccinale est de 3 doses, quel que soit le délai dans lequel la première dose de rappel a été injectée. Au regard de l’évolution de l’épidémie, du nombre de cas, des nouveaux variants dominants, du nombre de personnes hospitalisées et du nombre de personnes hospitalisées en soins critiques, mais également au regard des difficultés actuelles de l’hôpital public, il vous appartient d’abroger le décret mettant en œuvre l’obligation vaccinale des soignants en ce qu’il est illégal, l’illégalité résultant des circonstances de faits postérieures à son entrée en vigueur. Je souligne qu’au 1er juin 2022, 56 personnes sont mortes du COVID-19, moins de 15000 étaient hospitalisées avec cette pathologie et 929 en soins critiques. 6184 nouveaux cas étaient à déplorer et les infections étaient uniquement liées au variant Omicron. Les motifs admissibles de fait et de droit qui fondaient l’article 1 8° du décret 2021-1059 ont changé et le décret ne peut donc plus atteindre les objectifs qu’il prétend poursuivre.
  • 11. Je me permets de vous rappeler que le décret, dont l’abrogation vous est demandée, définit la notion de schéma vaccinal complet” et qu’il s inscrit, par ailleurs dans un dispositif législatif et règlementaire destiné à atteindre l objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique. Compte tenu des exigences du Conseil constitutionnel en telle matière, et en ce qu elle porte atteinte aux libertés et droits fondamentaux en conditionnant l exercice de certaines activités professionnelles rémunérées à la présentation du justificatif d un schéma vaccinal complet, la mesure portée par l’article 1 8° du décret 2021-1059 ne pourra être maintenue que si elle est adéquate et nécessaire pour atteindre le but qu elle s est fixée, elle devra, de même, être proportionnée. Or, en l’état, le maintien de l obligation vaccinale des soignants à la date présente, n’est pas adéquate par rapport au but de protection de la santé publique qu’il poursuit, de même qu’il ne contribue pas à sa réalisation et va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ce but. Enfin, le décret est manifestement disproportionné au regard des atteintes portées aux droits et libertés fondamentaux. 1. Sur l’inadéquation de la mesure de maintien de l obligation vaccinale des soignants. Comme l a d ailleurs exigé le législateur en la matière, le décret doit, tout au long de son application, reposer sur des données scientifiques solides et doit tenir compte des avis rendus par les autorités sanitaires. En l’état, les données scientifiques, de même que les avis des autorités sanitaires permettent d’affirmer que l’obligation vaccinale de certains personnels n’est pas en mesure de contribuer à la réalisation de l objectif de protection de santé publique. Cette mesure était destinée à protéger les usagers des services de santé, c est-à-dire à éviter la propagation de la maladie dite COVID-19 en évitant la transmission vers et depuis ces personnels du virus SARS-Cov2.
  • 12. Or, préalablement de rappeler que dès l introduction des candidats vaccins en France, le Haut Conseil de Santé Publique, dans son avis du 18 juin 2021, relevait : « Les essais randomisés analysés montrent que les vaccins actuellement autorisés en France présentent une efficacité vaccinale élevée (> 90 %) sur les formes graves du Covid- 19, toutefois les données relatives à leur efficacité sur les formes asymptomatiques et donc sur la transmission sont très limitées. Cette efficacité avec les vaccins à ARN messager (ARNm) est maintenue pour le variant Alpha (20I/501Y.V1 (dit britannique)) mais la protection est plus incertaine pour le variant Bêta détecté initialement en Afrique du Sud (20H/501Y.V2) et le variant Gamma détecté initialement au Brésil (20J/501Y.V3). Elle est insuffisante pour les vaccins à vecteur viral non réplicatif vis- à-vis des variants Bêta et Gamma. La réduction observée dans les études, bien que statistiquement significative, apparaît cependant limitée, et sa pertinence clinique, c est-à-dire la réduction du risque de transmission associé n est pas connue. » Par la suite, les avis des autorités sanitaires intervenus à partir du mois de juin 2021 ont confirmé de manière constante que les études en vie réelle, destinées à déterminer l efficacité des candidats vaccins distribués sur le territoire national, n avaient pas permis de mettre en évidence leur efficacité sur l infection et la transmission des variants de SarsCov2 en circulation, qu il s agisse de Delta ou d Omicron. S agissant du variant Omicron, désormais majoritaire sur le territoire national, au contraire, les études révèlent la très faible efficacité du vaccin.
  • 13. Ainsi, le HCSP a rappelé dans son courrier du 27 décembre 2021 les éléments et les principes pris en compte : « Si la vaccination avec un schéma vaccinal complet selon la définition et les recommandations en vigueur de la Haute Autorité de santé3 (HAS), tenant compte du délai d efficacité, continue de protéger efficacement contre les formes graves de la maladie sur le variant Delta (avec des incertitudes sur le variant Omicron), elle protège aussi dans une moindre mesure du risque de contamination et raccourcit la durée du portage chez un individu infecté. Les mesures doivent être adaptées à la situation dans une perspective de gestion des risques” Aujourd hui, il est admis que la 3ème dose de candidat vaccin contre la COVID-19 a une durée d efficacité inconnue qui diminue dès le premier mois le COSV dans son avis du 19/01/2022 : « C) Données d efficacité en vie réelle Protection contre l infection Des études en vie réelle ont démontré une relative efficacité du rappel vaccinal face au variant Omicron en ce qui concerne l infection, bien que cette protection soit inférieure à celle conférée contre le variant Delta. Une étude en vie réelle sur 12 000 ménages danois8 a montré qu un rappel permet de réduire le risque d infection de 54% en comparaison à la primo- vaccination seule, et que le taux d attaque secondaire SAR était de 31% et 21% dans les foyers avec le VOC Omicron et Delta, respectivement. Par ailleurs, cette étude montre que le variant Omicron possède une très forte capacité d’échappement chez les sujets vaccinés, et notamment chez les sujets ayant reçu une dose booster. Le différentiel de risque de contamination au variant Omicron en comparaison au variant Delta est globalement plus élevé chez les sujets ayant reçu une dose de rappel (facteur de 3.66) que chez les sujets uniquement primo-vaccinés (2.61) et les sujets non-vaccinés (1.17).
  • 14. Protection contre les formes sévères En France, les données d hospitalisation, d admission en soins critiques et de décès de la DREES suggèrent également que le rappel protégerait efficacement contre les formes sévères, bien que la protection soit inférieure contre le variant Omicron par rapport à celle contre le variant delta 4. Etat des lieux des pays ayant recommandé une quatrième dose de vaccination A) Israël -Israël a débuté l administration d une quatrième dose d abord chez les personnes âgées institutionnalisées (21/12/2021), avant d’étendre sa recommandation aux personnes de plus de 60 ans et aux professionnels de santé ayant reçu leur troisième dose il y a plus de 4 mois, le 31/12/2021. A ce jour, plus de 100 000 Israéliens se sont enregistrés pour obtenir une quatrième dose. Un élargissement à la population générale est envisagé. -La 4eme dose a été mise en place malgré les positions divergentes des institutions : - Le Comité d experts sur la pandémie (groupe consultatif du gouvernement) a recommandé au gouvernement d organiser une campagne de 4ème dose, sur fond d inquiétudes croissantes à cause de la propagation du variant Omicron. -Le Comité consultatif sur la sécurité des vaccins s est quant à lui déclaré opposé à une nouvelle dose de rappel -Une autorisation formelle est encore attendue dans les jours qui viennent de la part de la haute autorité de santé -Par ailleurs, le directeur général du Ministère de la Santé, le Pr Nachman Ash, n'a pas encore approuvé cette campagne, et examine pour l'heure les données britanniques indiquant des effets moins graves provoqués par le variant Omicron que par la souche Delta.
  • 15. - le gouvernement israélien n'a fondé sa décision sur aucune étude scientifique. Selon Zvika Granot, immunologue israélien à l'Université hébraïque de Jérusalem, « l'initiative de commencer une campagne de quatrième dose n'est basée sur aucun essai clinique. Il n'y a aucune garantie que cela soit sans danger ». - Hervé Bercovier, professeur de microbiologie à l Université hébraïque de Jérusalem a expliqué cette décision : « Le problème est que les gens âgés ont reçu leur booster dose au mois d août, il y a 4 ou 5 mois et que l on ne sait pas pendant combien de temps elle sera efficace contre le nouveau variant Omicron. Le dilemme sera le suivant : soit une nouvelle formule du vaccin est disponible, soit la quatrième dose sera utilisée ». Le COSV notait également, dans cet avis avoir « été saisi par le Ministère de la Santé au sujet de l opportunité d une seconde dose de rappel vaccinal (ou 4ème dose de vaccination dans le cas d un schéma de vaccination classique chez une personne non-immunodéprimée). Cette saisine intervient dans le contexte de l’émergence du variant Omicron, face auquel la vaccination semble perdre partiellement de son efficacité, ainsi que dans le contexte de la persistance du variant delta. » Selon la HAS en son avis du 13 octobre 2021, concernant l’immunogénicité du vaccin Comirnaty « administré en rappel à une dose de 30 μg environ 6 mois (entre 4,8 et 8 mois) après un schéma complet de primovaccination, induit une réponse humorale robuste, d anticorps neutralisants anti-SARS-CoV-2 à 1 mois après cette 3ème dose, chez des sujets âgés entre 18 et 55 ans sans antécédent d infection par le SARS-CoV-2.
  • 16. La réponse humorale induite 1 mois après ce rappel était non inférieure à celle observée chez ces sujets 1 mois après leur 2nde dose. Les titres en anticorps neutralisants dirigés contre le variant Bêta ou le variant Delta étaient inférieurs à ceux développés contre la souche historique que ce soit chez les sujets âgés de 18-55 ans ou de 65-85 ans. Une 3ème dose de Comirnaty a entrainé une augmentation de la MGT en anticorps neutralisants comparativement à la MGT observée 1 mois après l administration de la 2ème dose de Comirnaty, contre la souche historique et de façon plus marquée contre les variants Delta et surtout Bêta. » Il faut en conclure que, de première part, les candidats vaccins n ont jamais présenté une efficacité significative contre la transmission, et, de deuxième part, que les candidats vaccins n ont jamais présenté une efficacité significative contre le variant Omicron majoritaire actuellement sur le territoire national. Il est donc permis de conclure des avis recueillis et études réalisées que la mesure n est pas de nature à permettre d’éviter ni l infection, ni la transmission du variant désormais largement majoritaire et de moindre gravité. L objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique visant à éviter la propagation des maladies n est donc manifestement pas servi par la mesure mise en place par l’article 49-1 du décret du 1er juin 2021. Il convient d ajouter que l immunité conférée par la première dose de rappel des candidats vaccins diminue fortement après quelques semaines, probablement 1 mois, ne faisant ainsi plus obstacle à l infection ni à la transmission du virus et tout particulièrement de ses récents variants extrêmement éloignés de la souche originaire. Cet état de fait permet de s interroger sur le caractère adéquat d une obligation pour certains personnels de présenter un justificatif de schéma vaccinal dès lors que les personnels justifiant d un schéma vaccinal de 3 doses ne sont assurément pas immunisés ni contre l infection, ni contre la transmission du virus.
  • 17. En effet, en l’état de la science, rien ne permet de considérer qu un personnel ne présentant pas un schéma vaccinal complet serait plus susceptible d’être infecté ou de transmettre la maladie qu un personnel présentant un schéma vaccinal complet de plus de 3 mois. La DREES indique, à ce sujet « Statut vaccinal des personnes testées ou hospitalisées avec Covid-19 – Dernières données disponibles au 3 juin 2022 Ainsi, toujours sur la population des 40 ans ou plus : contre le risque de développer une forme symptomatique due aux variants Omicron (comprenant donc l’ensemble des sous-lignages), la dose de rappel augmente la protection par rapport au schéma vaccinal initial complet1 – lui-même apportant une protection par rapport à l’absence de vaccin : la protection du rappel varie entre 45 % et 56 % durant les 3 premiers mois suivant son administration, mais cette protection semble disparaitre après 3 mois » (https://drees.solidarites- sante.gouv.fr/communique-de-presse/pendant-les-trois-premiers-mois-la- dose-de-rappel-protege-75-de) Dans ces conditions, l adéquation du décret avec l objectif qu il se propose d atteindre, à savoir la protection des usagers des services de santé contre l infection par le virus SARS-CoV2, n est pas démontrée. S agissant du développement de formes graves de la maladie, en juin 2021 le HCSP retenait dans son avis Les essais randomisés analysés montrent que les vaccins actuellement autorisés en France présentent une efficacité vaccinale élevée (> 90 %) sur les formes graves du Covid- 19, toutefois les données relatives à leur efficacité sur les formes asymptomatiques et donc sur la transmission sont très limitées.” Ce qu il confirmait en décembre 2021. Le Conseil scientifique, quant à lui, énonçait en décembre 2021 qu Omicron était de moindre gravité.
  • 18. Il résulte des avis recueillis et études réalisées que si le bénéfice de la vaccination sur les formes graves des variants antérieurs semble établie en vie réelle, tant la HAS que le Conseil scientifiques sont contraints aux conjectures s agissant du variant Omicron, relevant l’échappement vaccinal. Le Conseil scientifique dans son avis du 8 décembre relevait « S'est rajoutée depuis dix jours l'émergence d'un nouveau variant appelé Omicron, dont le profil mutationnel apparait préoccupant, et pour lequel les premières informations disponibles suggèrent qu'il possède une capacité d'échappement immunitaire très conséquente. A court terme, le risque est essentiellement porté par la circulation du virus Delta. (…) Moderna ou Pfizer est utile maintenant dans le cadre de la 5ème vague liée au variant Delta et le sera également dans une réponse limitée mais présente si le variant Omicron devient prédominant. » Puis, le 16 décembre, par une mise à jour de son précédent avis il indiquait “ Les données sur le variant Omicron sont très évolutives et encore peu solides. Le Conseil scientifique a souhaité faire une mise à jour des connaissances et envisager les conséquences d une 6ème vague à Omicron pour mieux les anticiper 3. Données préliminaires sur le risque d’échappement immunitaire des variants Omicron. Un échappement à la protection immunitaire humorale tant vis-à-vis de l immunité post- vaccinale que post-infectieuse… Il résulte donc de ce qui précède que l adéquation de la mesure n’était que conditionnelle ou probable, s agissant en tout état de cause seulement d’éviter la saturation des hôpitaux en empêchant les formes graves de la maladie. Au regard du chiffre des infections et du faible nombre de patients accusant des formes graves de la maladie, mais également au regard du nombre de personnels ayant été infecté et du faible nombre ayant développé des formes graves, il est avéré que maintenir l obligation pour certains personnels de justifier d un schéma vaccinal complet pour être autorisés à poursuivre leur activité professionnelle n est pas adéquate au but recherché, le risque pour eux de développer des formes graves de la maladie en présence du variant Omicron étant très faible.
  • 19. Il n est pas indifférent de noter ici que le Conseil scientifique dans son avis du 11 mars 2021 confirmait que les personnels soignants constituant une population jeune, ils ne sont pas exposé à la forme grave de la maladie. En outre, dans l hypothèse même où la mesure avait pour objectif d’éviter la saturation des hôpitaux, force est d admettre que si le passe vaccinal a été suspendu le 14 mars 2022 c est, entre autres, au regard d un risque très modeste de saturation des hôpitaux par les malades infectés par le variant Omicron qui est aujourd hui encore plus faible qu alors. La question du caractère adapté du maintien de l obligation pour certains personnels de justifier d un schéma vaccinal complet pour être autorisés à exercer leur activité se pose d autant plus qu elle ne constitue que la prolongation d un dispositif mis en place depuis septembre 2021 qui n a pas fait la preuve de son efficacité ni sur l infection, ni sur la transmission, ni sur la pression exercée sur le système de santé. L’évaluation du poids de l’épidémie sur le système de santé devra, en outre, être relativisé au regard des conclusions de l’ATIH dans son rapport du 28 octobre 2021 « Les prises en charge hospitalières de la COVID-19 en 2020 Combien de patients ont été hospitalisés pour COVID-19 ? 218 000 patients hospitalisés en 2020 pour prise en charge de la COVID-19 Au cours de l année 2020, 218 000 patients ont été hospitalisés pour prise en charge de la COVID-191 (Tableau 1). Les patients COVID représentent 2% de l ensemble des patients hospitalisés au cours de l année 2020, tous champs hospitaliers confondus. » En tout état de cause, il n est pas démontré que la mise en place de cette obligation aurait réduit substantiellement les infections nosocomiales, ni qu elle aurait réduit substantiellement les contaminations au niveau national. J’ajoute, au surplus, que contrairement à ce qui a pu être décidé dans d autres pays, les établissements hospitaliers ont considéré que les personnels vaccinés et infectés pouvaient valablement poursuivre leur activité en dépit d un test positif au COVID-19.
  • 20. Ceci démontre, de première part, que ces personnels étaient susceptibles d’être infectés malgré un schéma vaccinal complet, mais également que, d autre part, la présence de personnels infectés au contact des usages des services de santé n’était plus un objectif de santé publique. La position des établissements de soin était conforme aux recommandation du Conseil scientifique du 26 décembre 2021 « I. Pour les personnes infectées : personnel soignant, autres professions d intérêt majeur... En cas de contexte « tendu » en matière de ressources humaines l'isolement pourrait être écourté avec, en cas de disparition précoce des symptômes, une stratégie de dépistage quotidien par test antigénique débutant à J4 après le premier test positif et sortie d'isolement après deux tests négatifs à 24 heures d intervalle (ou un CT > 30 si test PCR). A l instar de ce qui est proposé par le CDC, en cas de crise, aucune restriction d activité n'est suggérée si la personne infectée est en capacité de travailler. Il/elle doit toutefois limiter ses contacts, minimiser les contacts avec les personnes extrêmement vulnérables sur le plan clinique (immunodéprimés), s isoler des collègues lors des pauses et des repas collectifs, et renforcer tous les gestes barrières.” Cette appréciation de l adéquation de la mesure règlementaire devra, enfin, être effectuée au regard de la dégradation de l offre de soins et au regard des missions confiées par le législateur à l’Hôpital public : Article L6112-2 du Code de Santé Publique I.-Les établissements de santé assurant le service public hospitalier et les professionnels de santé qui exercent en leur sein garantissent à toute personne qui recourt à leurs services : 1° Un accueil adapté, notamment lorsque la personne est en situation de handicap ou de précarité sociale, et un délai de prise en charge en rapport avec son état de santé ;
  • 21. 2° La permanence de l'accueil et de la prise en charge, notamment dans le cadre de la permanence des soins organisée par l'agence régionale de santé compétente dans les conditions prévues au présent code, ou, à défaut, la prise en charge par un autre établissement de santé ou par une autre structure en mesure de dispenser les soins nécessaires ; 3° L'égal accès à des activités de prévention et des soins de qualité ; 4° L'absence de facturation de dépassements des tarifs fixés par l'autorité administrative et des tarifs des honoraires prévus au 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale. Le patient bénéficie de ces garanties y compris lorsqu'il est transféré temporairement dans un autre établissement de santé ou dans une autre structure pour des actes médicaux.) » La souffrance des personnels concernés par l obligation vaccinale est mise en avant par les autorités sanitaires et plus particulièrement le Conseil scientifique depuis mars 2020. De multiples alertes ont été émises par ce Conseil qui souligne l’épuisement des personnels de santé, leur souffrance, leur démotivation (notamment avis du 11 mars 2021, du 06 mai 2021, du 20 août 2021).. Le Conseil scientifique est très précis sur le sujet dans son avis du 11 mars 2021 C. LA CRISE SANITAIRE A DES RETENTISSEMENTS CLINIQUES MULTIPLES Soignants et aidants. La crise sanitaire impacte fortement les soignants et aidants du fait de la confrontation aux décès répétés, aux enjeux éthiques et émotionnels rencontrés, à l’épuisement professionnel et à la difficulté à demander de l aide psychologique. Sont observés principalement des symptômes anxieux et dépressifs et des syndromes de stress post-traumatiques.(…)
  • 22. 3. La situation des soignants Depuis un an et le début de la crise sanitaire, les soignants sont mobilisés pour faire face à l afflux de malades atteints par une forme sévère du COVID (355 426 patients ont été hospitalisés depuis le 1er mars 2020). Ils ont eu à prendre en charge des patients avec une gravité plus importante par rapport aux patients hospitalisés dans leurs services habituellement. Alors que lors de la 1ère vague les soignants des régions les plus touchées avaient pu bénéficier de renforts de régions moins touchées, depuis novembre 2020, cette possibilité n est plus adaptée compte tenu d’ une activité très soutenue dans les établissements de santé et en soins primaires. A cela s’ ajoute un taux d absentéisme record en raison d une part de l’épuisement progressif des soignants et d’ autre part d’ un taux de contamination par le COVID-19 très important (parmi ces contaminations, certaines sont des transmissions communautaires, d’ autres des transmissions de soignant à soignant ou de patient à soignant). Enfin, il ne faut pas oublier que les soignants sont soumis aux mêmes restrictions que la population générale dont on sait quelles sont associées à des troubles psychologiques. L’ ensemble de ces changements a des conséquences sur la santé mentale des professionnels de santé. Dans l‘ enquête réalisée début octobre 2020 par l’ Ordre National des Infirmiers, 57% des répondants (59 368/350 000 infirmiers) déclaraient être en situation d’ épuisement professionnel, ce qui représente un doublement par rapport à une période avant la crise sanitaire, et 43% ne savaient pas s’ ils seraient infirmiers dans 5 ans. Même constat en Espagne, où selon une étude de l’ université de Madrid, plus de la moitié des 1 200 soignants interrogés présentent des « symptômes dépressifs » et 53% des signes « compatibles avec un stress post- traumatique ». Partout dans le monde, des publications font état de l’ impact délétère de la crise sanitaire sur la santé mentale des soignants.
  • 23. ANNEXE 5 – SOUFFRANCE MENTALE Soignants et aidants. La crise sanitaire impacte fortement les soignants et aidants du fait de la confrontation aux décès répétés, aux enjeux éthiques et émotionnels rencontrés, à l épuisement professionnel et à la difficulté à demander de l aide psychologique. Ceux-ci présentent principalement des symptômes anxieux et dépressifs et des syndromes de stress post- traumatiques (El-Hage et al., 2020). L’état psychologique et la santé mentale de ces populations particulièrement exposées méritent par conséquence une vigilance spécifique. » A l heure actuelle, le maintien de la mesure alors que de nombreux établissements de santé accusent un grave manque de personnel, que des territoires sont actuellement dénués d offre de soins de proximité et que, par voie de conséquence, des usagers des services de santé sont privés des soins auxquels ils doivent pouvoir prétendre au risque de générer un autre problème de santé publique, permet de conclure de manière certaine à son inadéquation. En conséquence de quoi l appréciation des autres critères de légalité devront être faite avec une rigueur particulière. En effet, une mesure qui n est pas manifestement de nature à permettre d atteindre le but de protection de santé publique devra à tout le moins remplir les autres conditions de manière certaine. 2- Sur la nécessité du maintien de l’obligation vaccinale des soignants. Si le maintien de l obligation pour certains personnels de justifier d un schéma vaccinal complet devait être considérée comme nécessaire, encore faudrait-il démontrer concrètement en quoi cette mesure est incontournable pour protéger les usagers des services de santé. Il est manifeste, tout d’abord, que le maintien de l obligation vaccinale des soignants n’est pas la seule mesure de nature à pouvoir atteindre l objectif poursuivi, à savoir protéger efficacement la santé des usagers des services de la santé, dans le cadre de la crise sanitaire et particulièrement en son état actuel.
  • 24. En effet, dans l appréciation de la nécessité de la mesure, je me permets de vous rappeler que le Conseil d’état impose aux juridictions de vérifier si la mesure choisie par le pouvoir règlementaire parmi les mesures possibles est celle qui porte le moins atteinte aux libertés et il est d’autant plus rigoureux dans cet examen que la mesure n’est pas adéquate, ce qui pose un doute majeur sur sa nécessité, sauf à démontrer qu aucune autre mesure n est envisageable. En outre, le caractère nécessaire de la mesure est fortement discutable au regard de la position des autorités sanitaires qui confirment que l efficacité du candidat vaccin s amenuise très fortement à peine 1 mois après la première dose de rappel et alors que les tests PCR cumulés au respect des autres mesures dites « mesures barrières » et leur applications strictes sont efficaces à éviter les risques de contamination. A cet égard, il faut rappeler l avis de la HAS du 5 octobre 2021 qui souligne l efficacité des mesures barrières et leur nécessité y compris entre les personnes vaccinées. Parmi les mesures qui s offraient au pouvoir règlementaire, celle qui a été choisie est de nature à mettre en danger le système de soins par l exclusion des personnels ne présentant pas de schéma vaccinal complet. En effet, en dépit des alertes on ne peut plus explicites du Conseil scientifique, force est de constater que l offre de soins ne cesse de se dégrader et que la déprogrammation des soins non COVID, enjeu majeur selon le Conseil, n a fait que s aggraver (Avis des 20 août 2021 et 19 janvier 2022 notamment). L’obligation vaccinale apparaît comme une mesure est isolée qui ne répond qu insuffisamment à la réalisation de l objectif de protection de la santé publique dès lors qu aucune mesure de nature à garantir la qualité du système de santé, sa sécurité, son efficacité et la continuité des soins (CC, 2006-504, DC 12 août 2004) ni de créer et maintenir des mécanismes de protection sociale (même décision) n a été soumise à l appréciation des autorités sanitaires. Ce, en dépit du positionnement particulièrement clair du Conseil scientifique à ce sujet dans ses avis successifs.
  • 25. Le maintien de cette mesure est également de nature à créer une inégalité, qui n est pas scientifiquement justifiée, entre les personnels ne présentant pas un schéma vaccinal complet et ceux présentant un schéma vaccinal de plus de 3 mois alors même que rien ne permet de considérer les premiers comme plus susceptibles d’être infectés et contagieux que les seconds. Par ailleurs, en poursuivant l objectif de protection de la santé publique en utilisant l outil de l obligation vaccinale des soignants en dépit de son inefficacité au bout de 3 mois, le pouvoir règlementaire fait le choix de faire peser sur les seuls personnels présentant un schéma vaccinal complet la responsabilité de la gestion de l’épidémie et de l efficacité du système de santé. Tant la nature de la mesure que l absence de renforcement du système de santé démontrent déjà que la nécessité de la mesure n est pas démontrée. La durée de la mesure milite également pour son abrogation puisque les atteintes qu’elle porte aux personnels concernés dépassent amplement ce qu’il est possible de qualifier de raisonnable. Je souligne ici que l appréciation concrète de la nécessité de la mesure de maintien de l’obligation vaccinale est rendue impossible en l absence de données fiables et scientifiquement étayées et dès lors qu aucune autre mesure n a été sérieusement et scientifiquement examinée par les autorités sanitaires ou par le pouvoir règlementaire. Non seulement rien ne démontre qu aucune autre mesure moins attentatoire aux libertés n aurait pu être prise, mais force est de constater qu aucune alternative de nature à préserver lesdits droits et libertés n a été envisagée. 3- Sur la proportionnalité de la mesure de maintien de l’obligation vaccinale La proportionnalité de la mesure implique qu il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les motifs de fait fondant un acte administratif et son objet. En outre, s'agissant d'un acte réglementaire, la violation dudit principe de proportionnalité est constatée si la disposition attaquée apporte aux libertés une restriction qui n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée, dans son principe et dans son ampleur, par rapport à l'objectif poursuivi.
  • 26. L appréciation du critère de proportionnalité intervient en principe seulement pour les mesures dont l adéquation et la nécessité ont été démontrées, ce qui n est pas le cas en l espèce. Pour autant, cette appréciation n apparaît pas superfétatoire dès lors qu elle confirme de plus fort que le décret doit être abrogé. L examen de la proportionnalité de la mesure implique d examiner, lorsqu il plusieurs moyens équivalemment efficaces se présentent à l autorité aux fins de réaliser l objectif légitime qu elle assigne, si ladite autorité a choisi celui qui génère le moindre préjudice pour les droits en cause. Ainsi, il est certain que la mesure ne porte pas atteinte de manière excessive à d autres intérêts légitimes. S agissant de maintenir l obligation pour certaines catégories de personnels de présenter un schéma vaccinal complet pour être autorisé à poursuivre son activité professionnelle, le caractère proportionné s appréciera au regard, notamment, des conséquences de la suspension de nombreux personnels concernés, du risque scientifiquement prouvé que constitue ces personnels ne présentant pas de schéma vaccinal complet et de l objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique dans son versant épidémique confronté à cet objectif dans son versant plus général. La mesure apparaît disproportionnée au regard du risque que constitue les personnels ne présentant pas de schéma vaccinal complet. En effet, le risque que présente ces personnels n est pas scientifiquement établi et l est d autant moins que, confronté aux personnels ayant reçu la première dose de rappel depuis plus de 3 mois mois, il n est pas prouvé qu ils soient plus exposés à l infection ou qu ils soient plus susceptibles de transmettre la maladie. Bien au contraire, il est largement admis que les personnels présentant un schéma vaccinal complet pouvait, même avant l expiration du délai de 3 mois mois après la primo vaccination ainsi qu avant l expiration du délai de 3 mois mois après la première dose de rappel, étaient susceptible d’être infectés et de contaminés les usagers.
  • 27. C’est ce que constate le conseil scientifique dans sa note d’alerte du 20 août 2021 « Les personnes vaccinées infectées ont des pics de charge virale du même ordre de grandeur que ceux des personnes non-vaccinées infectées, mais pour une durée plus courte, suggérant que les personnes vaccinées infectées pourraient être contagieuses, mais moins longtemps que les personnes non- vaccinées infectées ;(…) HAS :une probabilité d'isoler du virus infectieux significativement plus faible chez les vaccinés (68,6% des cas) que chez les non vaccinés (84,9% des cas), suggérant une moindre contagiosité des vaccinés . Par ailleurs, les vaccins, bien que protégeant efficacement contre les formes graves (90%), ont une efficacité limitée vis-à-vis de l infection par ce variant Delta, avec une protection vaccinale contre les formes symptomatiques de l'infection estimée initialement à 80-90%, puis plus récemment autour de 50%. Les personnes vaccinées infectées étant elles-mêmes capables d'infecter leur entourage, mais sur une durée plus courte comparées aux personnes non- vaccinées infectées. » La HAS, quant à elle, dans son avis du 5 octobre 2021 concluait en ces termes : « Des données complémentaires sur la cinétique virale du variant Delta chez des personnes primovaccinées indiquant : ‒ une excrétion virale plus courte (sur une durée de 3 jours) comparativement aux personnes non vaccinés ; ‒ une probabilité d'isoler du virus infectieux significativement plus faible chez les vaccinés (68,6% des cas) que chez les non vaccinés (84,9% des cas), suggérant une moindre contagiosité des vacci- nés ; ‒ des données discordantes quant à une différence au pic de charge virale chez des patients infectés par le variant Delta après leur primovaccination complète comparativement à celle des personnes non vaccinées (et si la charge virale chez les vaccinés apparait plus basse au pic, la différence s’estompe quand on s’éloigne de la primo vaccination). Conclusion
  • 28. Si les données restent discordantes quant à l’impact de la vaccination sur la charge virale d’une infection survenue chez des personnes primovaccinées comparativement à des personnes non vaccinées, il semble que dans le cas où une différence de charge virale est mise en évidence, plus le délai depuis la primovaccination augmente, plus elle s’estompe dans le temps. Il apparait également que la vaccination se traduirait par une excrétion moins longue du virus (doué d’une infectivité amoindrie), et que l’induction d’une réponse muqueuse efficace pourrait s’accompagner d’une moindre transmissibilité du virus chez les vaccinés. Une étude a mis en évidence sur un faible effectif, l’association entre une dose de rappel et une diminution statistiquement significative de la charge virale en comparaison à celle des personnes primovaccinées qui n’avaient pas reçu leur dose de rappel, suggérant ainsi que l’administration d’un rappel diminuerait la contagiosité des personnes développant une infection par le SARS-CoV-2. » Dès lors que la seule garantie acquise du vaccin serait, selon les autorités de santé, une excrétion virale moins longue, il faut s’interroger sur son caractère proportionnel avec la mesure retenue, à savoir la privation de salaire des personnels ne présentant pas un schéma vaccinal complet. En effet, la mesure - qui consiste à ne pas permettre aux personnels concernés de poursuivre leur activité professionnelle rémunérée - les expose à une précarité sociale et économique majeure et les jette dans l isolement et le trouble psychologique. Outre que la mesure, par sa durée, constitue une mise à l’écart de la société et des moyens de subsistance qui apparaît disproportionnée par rapport au risque que présente le variant Omicron, la mesure n ayant pas de durée déterminée, elle crée une insécurité de nature à générer divers troubles qui viennent aggraver l’état psychologique des personnels concernés déjà profondément marqués par une année de crise sanitaire (avis des 11 mars et 06 mai 2021). La mesure apparaît également disproportionnée au regard du rôle essentiel reconnu aux soignants (avis du 11 mars 2020) et aux efforts qu ils ont faits durant les premières vagues (avis du 6 mai 2021).
  • 29. De même, il est largement admis désormais que la présentation d un test PCR régulier est au moins aussi efficace qu une vaccination contre le COVID-19 en toutes circonstances. Au regard de ce qui précède, la mesure n est pas proportionnée aux risques que présentent les personnels ne justifiant pas d un schéma vaccinal complet. La mesure qui vise à protéger les usagers des services de santé a pour conséquence la suspension sans traitement de nombreux personnels qui sont donc privés de leur activité professionnelle en dépit soit de leur contrat de travail, soit de leur statut d agents publics, soit au titre de la liberté d entreprendre en tant que libéral. Il est possible de considérer que ces personnels subissent une maltraitante administrative au sens de la thèse de Frederic Colin (https://hal-amu.archives- ouvertes.fr/hal-02547451/document): « L identification de la maltraitance émane essentiellement d acteurs spécialisés dans la défense des droits, notamment de publics fragiles. Ainsi, le Conseil de l Europe en a conçu une approche de définition dès 1987, comme une violence se caractérisant par « tout acte ou omission commis par une personne, s il porte atteinte à la vie, à l intégrité corporelle ou psychique ou à la liberté d une autre personne ou compromet gravement le développement de sa personnalité et/ou nuit à sa sécurité financière » (…) L administration publique doit en tout état de cause être plus sensible que toute autre organisation à la maltraitance : prestataire de service public, la maltraitance lui est par définition interdite. Elle apparait pourtant dans des études et témoignages, concernant les conditions de travail des agents du secteur public, notamment dans le secteur médical ou para- médical. L Assemblée nationale elle-même a même évoqué le phénomène de la maltraitance administrative. » En outre, ce choix est contraire au devoir de sollicitude qui s’impose à l’employeur public vis-à-vis de ses personnels (article 41 de la Charte des Droits fondamentaux de l’UE).
  • 30. Dès lors qu elle est manifestement inadéquate et qu elle n apparaît pas nécessaire, la mesure ne pourra naturellement pas être considérée comme proportionnée. En tout état de cause, la question de sa proportionnalité se poserait même si son adéquation ou sa nécessité étaient démontrées alternativement ou cumulativement. En effet, priver de nombreux personnels du droit d exercer leur profession et les priver de leurs revenus et de leur propriété n est manifestement pas proportionné dès lors qu il est avéré que le variant Omicron échappe à la vaccination, qu il est contagieux mais régresse fortement et qu il expose peu à des formes graves de la maladie. La gravité des conséquences du maintien de la mesure au regard de l’évolution de l’épidémie démontre amplement que la mesure n est pas proportionnée. Enfin, la mesure qui prétend s inscrire dans la réalisation de l objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique génère de graves dysfonctionnement dans les services de santé. Dès le 6 mai 2021 le Conseil scientifique soulignait ces dysfonctionnements « B . UN RETENTISSEMENT MAJEUR, DURABLE ET SOUS-ESTIME SUR LE SYSTEME DE SOINS 1. La prise en charge des patients non-COVID est dégradée Dans les périodes de recrudescence épidémique, l impact de la pandémie et la tension sur les lits d hospitalisation, notamment de réanimation, conduit à une baisse globale de l activité de soins médicaux et chirurgicaux hors COVID. On observe une déprogrammation des interventions programmées dites non urgentes (chirurgie à visée de dépistage et curative), qui vise à libérer des lits d hospitalisation et du personnel soignant. Les chirurgies en lien avec des pathologies cancéreuses ou avec des greffes font par exemple partie des interventions déprogrammées même si on essaie de le limiter. Les reports représentent des pertes de chance pour les patients.
  • 31. Déprogrammer une intervention nécessite par ailleurs de choisir des patients jugés prioritaires par rapport à d autres. Il en est de même du report de bilans programmés dans un parcours de soins perturbé, soit par la réduction mécanique de l offre, soit par les décisions des patients d’éviter des contacts avec des structures hospitalières en tension. Si un certain nombre d interventions n ont pas de caractère d urgence vitale, leur report peut néanmoins entraîner des pertes de chance pour ces patients, qui restent sur une liste en attente d’être reprogrammés. Ces déprogrammations et l attente qui en résultent peuvent s avérer anxiogènes pour ces patients, souvent atteints de maladies chroniques ou graves. Un sentiment d abandon peut être observé chez ces patients, qui nécessitent un véritable accompagnement. Les équipes soignantes sont fortement affectées par cette situation ainsi que par les enjeux éthiques qui l accompagnent, en termes de priorisation notamment. Par exemple, en Ile-de-France, lors de la dernière vague, l ARS a demandé une déprogrammation de 40% des activités de chirurgie dans les hôpitaux publics et privés pour permettre la prise en charge des patients COVID. La semaine du 26 avril 2021, les données de l AP-HP (ensemble des GHU hors pédiatrie) attestaient d une déprogrammation de 42% des activités chirurgicales, avec 48% des salles de blocs opératoires fermées. Il est à noter que les populations les plus vulnérables (notamment les patients précaires et les patients âgés) sont plus exposées aux conséquences de ces désorganisations de l activité engendrées par la prise en charge d un grand nombre de patients COVID. Pour les personnes âgées, en particulier, cette désorganisation et les reports d interventions chirurgicales fonctionnelles qu elle entraine peuvent réduire leur autonomie. Ces difficultés de prise en charge peuvent conduire, chez ces patients souvent poly-pathologiques, à une réduction de mobilité (imposée ou volontaire, avec une aggravation de la sarcopénie). Actuellement, leur suivi n est pas organisé.
  • 32. En maintenant un niveau élevé de circulation du virus, l impact sur la prise en charge des patients non-COVID risque de se prolonger, entrainant de réelles pertes de chance, d autonomie et d espérance de vie pour toutes ces personnes. » Le Conseil scientifique réitérait dans son avis du 5 octobre 2021 „ANNEXE 2 : QUEL RETARD PRIS POUR LA PRISE EN CHARGE DES PATHOLOGIES NON-COVID. L impact des vagues épidémiques successives sur un cours laps de temps sur la prise en charge des autres pathologies est difficile à évaluer. La fédération Unicancer (18 centres français de lutte contre le cancer regroupant des établissements privés à but non lucratif qui traitent un quart des patients atteints de cancer en France) a récemment publié des chiffres sur le retard de prise en charge des patients atteints de cancer. Il existe des données européennes qui suggèrent des retards à la prise en charge des infarctus du myocarde avec élévation du segment ST pendant la pandémie. Ces deux exemples montrent que l activité médicale liée à la pandémie a impacté la prise en charge hospitalière d autres pathologies avec des conséquences à long terme probablement importantes. Les données sont encore plus inconnues pour les soins de santé primaires. De plus, le retard pris dans les différentes prises en charge n a pas pu être rattrapé. Ainsi, le 6ème rapport de l’étude EPI-PHARE publié le 27 mai 2021 souligne que, malgré une reprise de la délivrance et de l utilisation de produits de préparation aux actes de coloscopie, IRM et scanner -trois actes indispensables pour diagnostiquer et suivre certains cancers ou maladies graves, celles-ci sont insuffisantes pour combler le retard accumulé en 2020.
  • 33. Le Conseil scientifique considère par ailleurs qu il est urgent de mener un travail scientifique d ampleur pour évaluer ces retards et proposer une politique de santé publique adaptée afin de minimiser au mieux les conséquences de ces défauts de prise en charge, que ce soit pour les soins, mais aussi pour les délais de suivi et de prévention secondaire. » Le Conseil scientifique persistait dans son avis du 6 octobre 2021 “LES ENJEUX SOCIETAUX (iii) Pour la gestion de l’épidémie, avec une vision à moyen terme, en 2022, sont également à prendre en compte : - La fragilité actuelle du système de soins avec un pourcentage significatif de lits fermés et une forme d’épuisement des soignants ; - La survenue probable, cet automne/hiver, d un nombre plus important d infections respiratoires (grippe, bronchiolites...) y compris dans la population des jeunes enfants non immunisés ; - L impact réel actuellement mal chiffré sur le retard de prise en charge des pathologies non-COVID. » Toujours le 8 décembre 2021 « 7. Hôpital : les enjeux à court, moyen et long terme La capacité du système de soins à répondre à cette nouvelle vague de forte intensité se pose donc dans des conditions différentes des vagues précédentes. Ce constat doit inciter les ARS à prévoir dès maintenant la montée en charge des organisations en secteur conventionnel comme en soins critiques pour in fine être capable de gérer 2 350 hospitalisations par jour de patients COVID au pic de la 5ème vague. Il est capital que les ARS soient vigilantes dans chaque territoire à ce que la solidarité territoriale entre établissements publics et privés soit partagée tant en ce qui concerne la prise en charge des patients COVID positifs que les patients non-COVID et ce en particulier sur deux points: En amont, la déprogrammation chirurgicale doit être anticipée et équitable entre tous les établissements, publics et privés »
  • 34. A nouveau le 13 janvier 2022 « 2. La situation sanitaire et vaccinale actuelle est caractérisée par les points suivants : Le retentissement sur le système de soins va être important jusqu’à au moins début mars 2022, avec un niveau élevé d occupation des lits de soins intensifs et d hospitalisations conventionnelles conduisant à des déprogrammations de patients non-COVID. » Dès lors, lorsqu on met en balance l objectif de protection de la santé publique au regard de l’épidémie et l objectif plus général de protection de la santé publique en général, il est manifeste que la mesure n est pas proportionnée en ce qu elle a des conséquences pour les malades qui sont privés de soins, des conséquences pour les personnels en activité dont la situation était déjà alarmante en août 2021 et l est encore plus aujourd hui et qu elle a des conséquences pour le maintien même du système de santé dont on peut lire dans la presse et de la part des acteurs majeurs du secteur qu il est au bord de la rupture. A titre d’illustration, Philippe JUVIN, chef des urgences de l’Hôpital Georges- Pompidou a tiré la sonnette d’alarme, une étude mondiale détermine que la moitié des urgentistes sont en burn-out après le Covid-19. Le Collectif interhôpitaux du CHU d’Angers appelle à une mobilisation nationale pour la défense de l’hôpital public, 19.000 patients de l’agglomération d’Angers se trouveraient sans médecin traitant, Les urgences de l’Hôpital de Chinon ont fermé et les accouchements à la maternité ont cessé, l’unité de soins palliatifs de la Seyne a fermé, l’Ile de France est particulièrement touchée par la fermeture des services, faute de personnel, les urgences de l’Hôpital de Senlis ont fermé depuis le mois de décembre 2021, les urgences de Lariboisière sont débordées, même Martin Hirsch alerte devant la pénurie de personnel soulignant que 1400 personnels infirmiers manquent à l’APHP. Dans toutes les régions les établissements hospitaliers sont en sous-effectif, les services ferment, les soins ne sont plus assurés. La situation a alerté le Conseil scientifique qui a apporté toutes précisions à ce sujet dans son avis du 5 octobre 2021
  • 35. « Des données concordantes recueillies auprès des grandes structures hospitalières du pays dans les plus grandes régions françaises sont concordantes et font état de : - Un grand nombre d‘ emplois vacants avec notamment 5 professions en tension : IDE, IBODE, IADE, manipulateurs de radiologie et masseurs- kinésithérapeutes. - Un recours déjà important et en augmentation aux heures supplémentaires et à l intérim avec malgré tout un pourcentage important de lits fermés chiffré à environ 20% et touchant tous les secteurs de soins (médecine dont soins critiques, chirurgie et obstétrique) mais aussi à un moindre degré les services de pédiatrie (réanimation et hospitalisation conventionnelle) qui dans certaines régions sont déjà en tension alors que nous sommes qu‘ au début des épidémies automnales et hivernales virales hors COVID. » A nouveau il sera rappelé que le Conseil scientifique souligne tout au long de ses avis à la fois la fragilité du système de santé, l importance de maintenir une offre de soins de bonne qualité, le stress que génère pour les soignants l incertitude de ne pouvoir garantir le meilleur soin aux patients COVID et non COVID et l impératif de soutenir le soin primaire (note d alerte du 20 août 2021) . Les lits fermés, le manque de personnel, l absentéisme, la souffrance des soignants en activité sont, comme les troubles mentaux auxquels les personnels sont exposés constituent un objectif de santé publique au même titre que la lutte contre l’épidémie. Le Conseil scientifique insiste sur la nécessité de remettre au premier plan cet objectif général de protection de la santé publique le 6 mai 2021. 2. Des soignants en souffrance Brutalement en février 2020, les hôpitaux et les professionnels de santé ont été confrontés à un afflux massif de patients présentant des formes graves de COVID-19 avec une augmentation très rapide de la mortalité dans les services hospitaliers. En mars 2020, les soignants mais aussi les autres catégories socio-professionnelles des hôpitaux ont dû s’ adapter en urgence et depuis adapter sans relâche l’ offre de soins en fonction des vagues épidémiques.
  • 36. Dans l’ ensemble, les hôpitaux ont fait preuve d’ une remarquable adaptation, et si la charge de travail a été parfois très importante, « l‘ hôpital » n’ a jamais semblé débordé au point de ne pas pouvoir admettre les patients dans des services de soins adaptés à leur état. Cependant, cet effort qui dure depuis plus d’ un an n’ est pas sans conséquence ni pour les soignants et les autres personnels des hôpitaux, ni pour les patients. Le stress post-traumatique La charge de travail des soignants a été multipliée, même si cette augmentation est difficile à chiffrer, variable d un service à un autre. Heures supplémentaires, plan blanc et suppression des congés témoignent de cette augmentation de la charge de travail, sans repos ou période pour se ressourcer. Les soignants ont dû faire face à des situations anxiogènes, certaines ayant été source de syndromes de stress post-traumatique : confrontation à l’ augmentation du nombre de décès, notamment dans des services dans lesquels la mortalité est habituellement faible, affectation dans un environnement technique et relationnel complètement nouveau nécessitant l’ acquisition de nouvelles compétences en un temps très court, accueil de malades dans des secteurs non adaptés à leur prise en charge avec le maximum de sécurité. Par ailleurs, les soignants ont été soumis aux mêmes restrictions sanitaires que la population avec les conséquences que l on connait, notamment sur la santé mentale. Le groupe d’étude français FAMIREA (Azoulay E, et al.) a évalué la prévalence des symptômes d'anxiété, de dépression et de dissociation péri- traumatique chez les professionnels de la santé au cours d'une étude transversale dans 21 services de réanimation français entre le 20 avril 2020 et le 21 mai 2020. Parmi les 1 058 répondants (soit 67% des personnels des services, âge médian de 33 ans ; 71% de femmes ; 68% de personnel infirmier). La prévalence des symptômes d'anxiété, de dépression et de dissociation péri-traumatique était de 50,4%, 30,4% et 32%, respectivement, avec les taux les plus élevés chez les infirmières. En analyse multivariée, le sexe masculin était indépendamment associé à une prévalence plus faible des symptômes d'anxiété, de dépression et de dissociation péri-traumatique.
  • 37. Les professionnels de la santé travaillant dans des hôpitaux non affiliés à l'université et les infirmières auxiliaires présentaient un risque élevé de symptômes d'anxiété et de dissociation péri- traumatique. Ces auteurs ont surtout identifié six facteurs modifiables de ces symptômes des troubles de santé mentale: peur d'être infecté, incapacité de se reposer, incapacité à prendre soin de la famille, être confronté à des émotions difficiles, regret des restrictions dans les politiques de visite et être témoin d'une fin de vie hâtive. Dans une analyse systématique de la littérature (d Ettorre et al.), il apparait que le risque de survenue de symptômes de stress post-traumatique est associé aux soignants les plus jeunes, les moins expérimentés et avec une importante charge de travail, exerçant dans un environnement non sécurisé en raison par exemple du manque d’équipements de protection et pour lesquels la formation et le soutien notamment psychologique étaient insuffisants. Il est donc à prévoir des conséquences à moyen et long terme de ces symptômes de stress post- traumatique. En effet, quand il n est pas pris en charge le syndrome de stress post- traumatique peut se chroniciser (20 % des cas), s accompagner d autres troubles co- morbides (troubles anxieux, dépressions), avoir des conséquences somatiques et amener un retentissement fonctionnel important sur la vie sociale, affective et professionnelle. Le Conseil scientifique a surtout jugé utile de rédiger une note d’alerte dédiée à cette problématique et a fait nombre recommandations le 20 août 2021 „V. UN CLIMAT SOCIAL TENDU CHEZ LES SOIGNANTS Le Conseil scientifique alerte sur le climat d’épuisement, parfois de démotivation, des personnels soignants en général et les personnels hospitaliers en particulier. Ce climat concerne d'abord les équipes qui gèrent les patients atteints de COVID, mais aussi l ensemble des équipes, services et disciplines de l'hôpital. Cette situation est d‘ autant plus critique dans les zones où le virus circule le plus actuellement (zones côtières et départements et territoires d outre-mer), dans cette période de congés estivaux.
  • 38. Devant une évolution défavorable de la situation des soignants, et face à l’absence de mesures, le Conseil scientifique réitère son alerte et fait un constat grave le 5 octobre 2021 E. UNE SITUATION DIFFICILE DANS LES ETABLISSEMENTS DE SANTE AVEC UN EPUISEMENT DES SOIGNANTS. La vaccination de masse de la population française permet d aborder l‘ automne et l hiver de façon plus sereine qu’ en 2020, pour autant il est impossible d exclure complètement un débordement du système de soins en raison d une part du risque de circulation des deux virus responsables des épidémies saisonnières : la grippe et le VRS et d autre part de l’épuisement des soignants qui réduit la capacité de prise en charge des patients. Des données concordantes recueillies auprès des grandes structures hospitalières françaises (administratives et médicales) font état d un système de santé en souffrance avec : 1) un grand nombre d emplois vacants (5 professions en tension : IDE, IBODE, IADE, manipulateurs de radiologie et masseurs-kinésithérapeutes); 2) dans les grands CHR, quelle que soit la région, un pourcentage significatif de lits fermés en raison du manque de personnel et ce, dans tous les secteurs de soins dont la pédiatrie. Ces chiffres semblent supérieurs aux automnes précédents ; 3) une activité des services d urgence qui a retrouvé son niveau de septembre 2019, 4) et enfin un nombre important de patients « COVID » toujours hospitalisés. Le système de soins est fragilisé après cette longue période COVID, où il a été en permanence en première ligne. Sa capacité à répondre à une éventuelle nouvelle vague, même plus faible, se pose donc dans des conditions différentes des vagues différentes. D’ après une étude française menée dans les services de réanimation la souffrance des soignants est élevée et se traduit par 1) de l’ insomnie (37,9% dont 7,7% prenaient quotidiennement un psychotrope, 2) des symptômes d'anxiété, de dépression, de trouble de stress post-traumatique et d'épuisement professionnel chez 60,0%, 36,1%, 28,4% et 45,1 % des répondants, respectivement.
  • 39. En conclusion les symptômes de troubles mentaux chez les soignants demeurent très élevés. Le Conseil scientifique considère qu’ un objectif de santé publique devrait être de proposer pour chaque soignant une évaluation de ces troubles et le cas échéant lui proposer une prise en charge adaptée. Le Conseil scientifique a, enfin, évaluer les enjeux de la situation des soignants dans son avis du 8 décembre 2021 « 7. Hôpital : les enjeux à court, moyen et long terme Depuis le début de la crise sanitaire, les soignants sont mobilisés pour faire face à l afflux de malades atteints par une forme sévère du COVID (au 6 décembre 2021, 544 385 patients ont été hospitalisés depuis le 1er mars 2020). Ils ont eu à prendre en charge des patients présentant une gravité plus importante par rapport aux patients hospitalisés dans leurs services habituellement. Cette vague survient (avis du Conseil scientifique COVID-19 du 5 octobre 2021) alors que le système de santé est en souffrance avec : (i) un nombre important d emplois vacants (5 professions en tension : IDE, IBODE, IADE, manipulateurs de radiologie et masseurs- kinésithérapeutes); (ii) un pourcentage significatif de lits fermés variable selon les territoires en raison du manque de personnel et ce, dans tous les secteurs de soins dont la pédiatrie et la psychiatrie de l‘ enfant et de l’ adolescent (spécialités en grande tension du fait des épidémies hivernales et des troubles pédopsychiatriques relevant de soins hospitaliers) La capacité du système de soins à répondre à cette nouvelle vague de forte intensité se pose donc dans des conditions différentes des vagues précédentes.” L’insuffisance de prise en charge des problèmes mentaux des enfants et des jeunes est également soulignée par la Défenseure des droits qui vient d’alerter le Premier Ministre à ce sujet (https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/cp_- _defenseur_des_droits_-_plan_durgence_pour_la_sante_mentale_des_jeunes.pdf) Une mesure ne saurait être maintenue dès lors que ses effets sont délétères et vont à l encontre de l objectif même qu elle s est fixée.
  • 40. Il résulte de ce qui précède que l’illégalité du décret dont l’abrogation est demandée est acquise. Je vous prie de croire, Madame la Ministre, en l’assurance de ma haute considération.