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6  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017
Laurence Gygax, de FAJI SA, s’immerge dans la « réalité
augmentée » grâce à des lunettes qui offrent le rendu
d’une visite à l’intérieur de luxueuses demeures.
rke
Du virtuel à la réalité augmentée
SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017  7
Question de perception et de sensations
Il y a réalité et… réalité. Virtuel ou augmenté, le concret s’observe, se tâtonne. La réalité augmentée peut se
définir comme une interface entre données virtuelles et monde réel. Néanmoins, cette explication reste confuse.
Techniquement, ce n’est pas la réalité qui est augmentée, mais bien la perception qu’en a l’utilisateur. Nuance.
La réalité augmentée de la
2e
Journée du Club SIAMS
En plein boom, la réalité augmentée cartonne au
niveau industriel. Une vingtaine d’entrepreneurs
et de journalistes ont pu se rendre compte des
possibilités pratiques offertes par la réalité aug-
mentée lors de la 2e
Journée du Club SIAMS à
Genève le 29 juin dernier. Dans le secteur de
l’aviation, Jérôme Barthès de la société française
Diota a par exemple évoqué, lors de l’entretien
d’un Rafale, la possibilité de pouvoir visualiser,
grâce à la réalité augmentée, l’emplacement de
chaque vis, boulon, rivet désigné par une cou-
leur et un code. « Cela permet de travailler
quatre fois plus vite avec deux fois moins d’er-
reurs », a-t-il indiqué. Yves Schatzmann de la
start-up TFC à Meyrin a, quant à lui, fait la dé-
monstration d’un simulateur de vol très particu-
lier où il utilise la réalité augmentée pour accen-
tuer les effets du simulateur et de ses sensations.
Ce qui évite d’installer tout l’environnement du
simulateur, soit l’ensemble du cockpit. Marco
Mari, représentant des start-up genevoises
Scanways et Idessin, a évoqué les technologies
applicables à l’architecture concernant l’exploi-
tation des données de construction. À l'aide de
drones et d'appareils photo de haute résolution,
elles offrent des scans 3D photogrammétriques.
Une technique exploitable grâce au processus
informatique BIM (Building Information Mo-
deling). L'assemblage de tous les points créant
ainsi une maquette globale précise au millimètre
près.
Guidé à distance
Fondateur de la société Darix à Renens, Martijn
Bosch a mis au point des appareils de vision
adaptables à des casques de pompier qui per-
mettent de voir à travers la fumée grâce à un
système d’imagerie thermique. D’autre part, une
entreprise jurassienne de machines-outils est en
avance dans le domaine. Des ingénieurs envi-
sagent de proposer à leur direction de se lancer
dans la réalité augmentée pour le service après-
vente. Doté d’une paire de lunettes connectées, le
client peut ainsi, en cas de panne ou de forma-
tion, être « guidé » à distance en ayant les instruc-
tions inscrites sur sa monture. Un procédé que
de nombreuses sociétés exploitent déjà, mais
dont certaines doutent encore de l'efficacité.
Question de temps… et de mœurs. (rke)
▶▶ www.ssvar.ch
www.realite-virtuelle.com
« La réalité augmentée désigne toutes les
inter­actions entre une situation réelle et des
éléments virtuels tels que de la 3D, des images
2D ou de la géolocalisation. Cette interaction
est rendue possible par un « device », un ap-
pareil qui va faire office d’unité de calcul.
Celui-ci permet de positionner et de suivre
les éléments numériques en temps réel. »
Telle est l’explication qu’en donne le site Réa-
lité Virtuelle.com qui par ailleurs retrace
l’histoire de cette technologie, ou cette nou-
velle façon de voir les choses.
La réalité augmentée a pour la première fois
été conceptualisée par Horton Heilig, qui en
1962 crée le « Sensorama ». Il s’agit d’un
casque équipé de capteurs permettant de si-
muler une scène telle qu’une balade à moto
dans New York. Ce concept se rapproche da-
vantage de la réalité virtuelle, mais pose éga-
lement les bases de la réalité augmentée. En
1968, Ivan Sutherland invente le premier
casque à vision transparente réagissant aux
mouvements de tête. L’appareil est baptisé
« Épée de Damoclès », car il se porte directe-
ment sur la tête. Dans les années 1980, Steve
Mann invente le EyeTap, un casque permet-
tant d’afficher des informations virtuelles de-
vant les yeux de son utilisateur. Il s’agit du
premier véritable casque de réalité augmen-
tée, un concept qui se développera jusqu’à
devenir aussi léger qu’une paire de lunettes.
Des algorithmes poussés
Il existe plusieurs techniques de création de la
réalité augmentée : construire une représen-
tation se superposant au monde réel en fonc-
tion de coordonnées géographiques ou don-
nées GPS auxquelles doivent être associés des
éléments précisant la direction de la vision.
Pour un smartphone, la boussole et les accé-
léromètres fournissent les informations né-
cessaires pour permettre au logiciel de savoir
où est l’usager et la direction vers laquelle il
est tourné. Il est également possible de s’en
remettre à la reconnaissance d’une image ou
d’un motif lié au sens augmenté pour déter-
miner la position de l’utilisateur. Dans le cas
de la vision, c’est la reconnaissance d’image
qui permet cette prouesse. Jadis, les mar-
queurs étaient monochromes et dissymé-
triques. Simples, ceux-ci sont encore utilisés
aujourd’hui par certaines applications. Désor-
mais, les ordinateurs et smartphones sont suf-
fisamment puissants pour reconnaître, grâce à
des algorithmes, des images plus complexes.
« Les applications de réalité augmentée peuvent
également analyser des flux vidéo ou des élé-
ments du corps humain, les mains ou l’en-
semble des membres, comme le fait le cap-
teur Kinect de Microsoft. Ce procédé est par
exemple utilisé par l’application de test de
maquillage L’Oréal Makeup Genious », in-
dique encore Réalité Virtuelle.com.
Entre réel et virtuel
Dans un avenir proche, il est probable que
tous les équipements portables disposent
d’un capteur de reconnaissance du corps hu-
main permettant de proposer davantage d’in-
teractions entre le réel et le virtuel. C’est déjà
le cas du smartphone Asus Zenfone AR, re-
posant sur la technologie Google Tango, pré-
senté lors du CES 2017 de Las Vegas. Selon
les rumeurs, le prochain iPhone attendu pour
la fin de l’année 2017 proposerait des fonc-
tionnalités similaires.
Si la réalité augmentée a réalisé une percée
majeure et rapide dans le domaine des jeux
vidéo, notamment en supprimant une manette
de jeu ou la remplaçant par une reconnais-
sance vocale ou faciale, ou encore en redant
plus ludiques des applications commerciales.
Microsoft a, lui, notamment développé des
applications sur Xbox 360 fonctionnant entiè-
rement par reconnaissance gestuelle et vocale,
et intègre plusieurs types d’applications telles
que des jeux de plateforme, mais également
des jeux de société ou des applications per-
mettant d’essayer un vêtement. La réalité aug-
mentée a aussi fait son entrée dans les réseaux
sociaux.
La société Papersweet3D a développé une
application qui fait apparaître sur un écran
d’ordinateur le profil d’un utilisateur lorsque
celui-ci passe devant une webcam ou un
smartphone. L’utilisateur est alors tagué et une
citation de son profil peut apparaître en su-
perposition de la réalité.
La réalité augmentée a été conceptualisée en 1962
déjà par Horton Heilig avec le « Sensorama »
Du virtuel à la réalité augmentée
8  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017
L’industrie du futur va créer
des « Employés Augmentés »
Yassin Rekik est ingénieur-concepteur en informatique de l’École nationale des sciences informatiques de
Tunis. Il est également titulaire d’un Doctorat en informatique de l’EPFL. Actuellement, il enseigne en tant
que professeur en informatique de la filière Ingénierie des technologies de l’information à la Haute école du
paysage, d’ingénierie et d’architecture (hepia) de Genève. Son regard sur la réalité virtuelle ou augmentée.
Monsieur Rekik, en pratique, existe-t-il
une corrélation entre la réalité virtuelle
(VR) et la réalité augmentée (AR) ?
La réalité virtuelle est un ensemble de tech-
niques permettant de construire un monde
virtuel (numérique, calculé, simulé) dans le-
quel l’utilisateur sera plongé. La réalité aug-
mentée, par contre, est un ensemble de tech-
niques permettant de visualiser le monde réel
tout en incrustant dans cette visualisation
réelle (on dit qu’on l’augmente) des objets 3D
virtuels. Du point de vue technique, il y a
évidemment des bases communes en termes
de techniques de modélisation 3D, de restitu-
tion ou de rendu 3D et d’animation 3D. Tou-
tefois, la réalité augmentée soulève des pro-
Fondateur de la société Darix à Renens, Martijn Bosch a mis au point des appareils de vision adaptables sur des casques de pompier qui permettent de voir à
travers la fumée grâce à un système d’imagerie thermique. – www.darix.ch
Darix
blématiques plus complexes du fait de ce
mélange entre monde réel et objets virtuels.
En effet, la réalité augmentée nécessite par
exemple la reconnaissance des objets réels et
leurs localisations dans l’espace, la superposi-
tion des objets réels et virtuels, l’occultation
des objets réels par les objets virtuels, et ainsi
de suite.
SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017  9
Qu’en est-il sur le plan des utilisations ?
Le même constat est aussi valable. Même si
certaines corrélations existent, les domaines
d’utilisation et les objectifs visés sont souvent
différents. Pour la réalité virtuelle, l’objectif
principal est la « simulation de contexte », ou
en d’autres termes la reproduction numérique-
ment d’un cadre virtuel permettant d’immer-
ger l’utilisateur et de l’isoler du monde réel.
Cette capacité d’immersion est souvent utili-
sée pour des simulations ludiques (jeux, visites
virtuelles), médicales (phobies, relaxations) et/
ou éducatives (sensibilisation, formation).
Pour la réalité augmentée, l’objectif principal
est la « richesse informationnelle », ou en
d’autres termes l’augmentation du monde réel
par des compléments visuels divers. Cette
capacité permet de décupler les capacités de
l’utilisateur et de le soutenir dans ces activités
par des mécanismes variés : alerte, orientation,
information, aide à la décision, et ainsi de
suite.
La réalité augmentée aurait-elle tout son
sens sans la technologie haptique ?
Le lien entre la réalité augmentée et la techno-
logie haptique dépend du contexte d’utilisa-
tion et du rôle de l’utilisateur. Dans des appli-
cations où la réalité augmentée est focalisée
sur l’incrustation de données additionnelles et
où l’utilisateur est passif, le recours aux tech-
nologies haptiques est inexistant. L’exemple
typique pour cette situation est l’utilisation de
la réalité augmentée dans les guides touris-
tiques 3D : annotation de sites, aide à l’orien-
tation, et suggestions de lieux. En revanche, si
le scénario d’utilisation est plus développé et
nécessite de la part de l’utilisateur d’interagir
avec son entourage (se déplacer, toucher, dé-
placer et sélectionner), alors l’intégration des
technologies haptiques devient obligatoire afin
de pouvoir simuler ces interactions entre l’uti-
lisateur et les objets virtuels. Sans l’utilisation
des technologies haptiques, la sensation de
réalisme dans les actions et le degré d’immer-
sion de l’utilisateur se voient fortement affec-
tés. D’ailleurs, cette combinaison des techno-
logies haptiques et des technologies de réalité
augmentée est actuellement un champ d’expé-
rimentation et de développement vaste et for-
tement actif.
Quel est votre rôle au sein de l’hepia dans
ce domaine et que pouvez-vous apporter
à vos élèves, sûrement attirés par ce sujet
à la mode ?
hepia est une haute école spécialisée qui se doit
d’initier ses étudiants aux technologies de
pointe du moment et de les former à les exploi-
ter et à les intégrer dans les applications réelles.
Notre rôle, en tant que professeurs à hepia, est
de suivre les évolutions et les innovations tech-
nologiques, de les étudier et de les tester afin
de les introduire progressivement dans le cur-
sus de formation. En ce qui concerne les tech-
nologies de réalité virtuelle et/ou augmentée,
elles sont présentées de manière sommaire
dans le cursus Bachelor. Elles sont traitées avec
plus de détails et d’approfondissement dans le
cursus Master. Enfin, ces technologies sont
manipulées et exploitées chaque année dans
divers projets d’étudiants (travaux de semestre
– travaux de bachelor). Au sein de la filière
Ingénierie des technologies de l’information
(ITI) à hepia, et afin de répondre à l’engoue-
ment des étudiants pour ces nouvelles techno-
logies, nous disposons d’un laboratoire com-
plet équipé avec un matériel de pointe :
ordinateurs puissants, cartes graphiques dé-
diées, Google Glasses, casques de réalité vir-
tuelle HMD (Oculus Rift – HTC VIVE), lu-
nettes de réalité augmentée (Hololens
Microsoft), caméras 360 et plein d’autres dis-
positifs associés.
Vous parlez beaucoup d’immersion. En
quoi cela peut-il vraiment convaincre à
s’immerger ? Dans la réalité augmentée…
L’immersion revient souvent quand on parle
de RV et RA, car c’est l’élément clé qui condi-
tionne l’acceptabilité de la part des utilisateurs.
Toute technologie et toute application de RV
et/ou de RA est souvent dépendante du degré
d’immersion qu’elle permet. L’immersion est
cette capacité de captiver l’utilisateur et ses
sens, de l’isoler de l’extérieur, de le transporter
« Sans les technologies haptiques, la sensation de
réalisme dans les actions et le degré d’immersion
de l’utilisateur seront fortement affectés. »
Yassin Rekik : « La réalité augmentée peut soutenir un employé en optimisant ses déplacements, en aug-
mentant son champ de vision, en accélérant ses prises de décisions, en facilitant son accès aux données
et informations contextuelles, en lui permettant d’agir à distance sur des objets télé-manipulés et en lui
permettant de communiquer avec des collègues sur son lieu de travail. »
rke
À propos de Yassin Rekik
Yassin Rekik a travaillé dix ans comme assis-
tant et chercheur à l’EPFL où il a participé à
l’enseignement de divers cours théoriques et
pratiques. Il a aussi mené et piloté divers pro-
jets de recherche dans le domaine des techno-
logies web et mobiles ainsi que leur utilisation
en eLearning/mLearning, en systèmes colla-
boratifs, et en manipulation et expérimentation
à distance. De 2006 à 2013, il a occupé le poste
de professeur d’informatique à la Haute École
Arc Ingénierie de Saint-Imier et Neuchâtel où
il s’est spécialisé dans les nouveaux moyens
d’interaction (mobile, tactile, gestuelle). Enfin,
depuis 2014, date à laquelle il a intégré hepia,
ses activités d’enseignement et de recherche
portent essentiellement sur les interfaces
intelligentes, les interactions naturelles, les
technologies des jeux, le Serious Gaming ainsi
que les technologies immersives.
Du virtuel à la réalité augmentée
10  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017
dans une réalité numérique, mais fidèle et
réaliste, et de lui permettre de vivre une expé-
rience conviviale, fluide, cohérente, agréable
et productive. Pour la réalité augmentée, l’im-
mersion dépend de plusieurs facteurs comme
la qualité des objets virtuels, la qualité des
rendus, le respect des échelles et des repères,
la fusion entre réel et virtuel, la capacité
d’inter­agir et le réalisme de l’interaction, ainsi
de suite. Nous sommes encore loin d’une im-
mersion parfaite en réalité augmentée, mais
nous connaissons très bien les défis et les chal-
lenges et nous travaillons dessus.
On en abuse de cette Industrie 4.0. Pas
vrai ? Ne risque-t-on pas de faire pareil
avec la RA ?
En fait, le phénomène est général et ne se res-
treint pas uniquement à l’industrie 4.0 ou à la
RA. L’histoire des sciences et des technologies
nous apprend qu’avec chaque découverte ou
innovation technologique, on passe par trois
phases classiques qui sont l’euphorie initiale,
la désillusion d’après, et la maturité progres-
sive ensuite. Pour la réalité augmentée, effec-
tivement, les attentes sont énormes et l’eupho-
rie est palpable. Toutefois, il reste beaucoup de
challenges à relever pour satisfaire les besoins
et atteindre une maturité. Ces challenges sont
variés et pluridisciplinaires : algorithmiques,
techniques, ergonomiques et même éthiques.
Mais le potentiel est réel et les applications déjà
en cours montrent l’apport potentiel de ses
technologies. De mon côté, en tant que cher-
cheur, je préfère une euphorie stimulante et
motivante, malgré les risques, à un désintérêt
non productif et démotivant.
Comment l’industrie peut-elle tirer
parti de la RA ?
Plusieurs domaines et plusieurs technologies
sont en train de révolutionner l’industrie et la
changer radicalement. La réalité augmentée
en fait partie. Si je dois résumer la promesse
de la réalité augmentée dans le cadre de l’in-
dustrie du futur, je dirais qu’elle va permettre
d’avoir des « Employés Augmentés ». Il s’agit
en fait de décupler les capacités de l’employé
par des services additionnels accessibles et
exploitables via la réalité augmentée. Quelques
exemples simples pour illustrer ces dires : la
réalité augmentée peut soutenir un employé
en optimisant ses déplacements, en augmen-
tant son champ de vision, en accélérant ses
prises de décisions, en facilitant son accès aux
données et informations contextuelles, en lui
permettant d’agir à distance sur des objets
télé-manipulés, en lui permettant de commu-
niquer avec des collègues sur son lieu de tra-
vail. Avec toutes les déclinaisons possibles de
ses services accessibles via la RA, nous pou-
vons imaginer les gains pour les employés en
termes de sécurité, de productivité, de forma-
tion, de coopération et d’autonomie. Actuel-
lement, tous ces scénarios sont envisagés, mais
les défis restent énormes en termes de fiabilité,
d’ergonomie et de robustesse.
Comment se présente le marché
­actuellement ?
Le marché de la RA est en pleine croissance,
pour ne pas dire explosion. Les derniers
chiffres situent le marché mondial de la RA
entre 20 et 25 milliards de dollars. Toutefois,
cette progression est surtout notable dans le
secteur des jeux et du divertissement (environ
80%). Ce n’est que durant les cinq dernières
années que les utilisations industrielles et
médicales commencent à progresser de ma-
nière significative. En termes de matériel, les
produits sont limités et le choix n’est pas en-
core satisfaisant. Par contre, le marché du
développement graphique et logiciel est
énorme.
Selon vos dires, 65% des métiers de 2050
n’existent pas encore. Cela vous inquiète ?
Oui et non. En fait, l’apparition de nouveaux
métiers et la disparition d’autres est un phé-
nomène classique. De ce côté-là, mon affir-
mation ne m’inquiète pas. Par contre, l’am-
pleur du changement et son rythme dans le
temps sont inquiétants. Je pense que nous
assistons depuis peu à une accélération des
changements et des innovations pour laquelle
nous ne sommes pas préparés. Ni notre ma-
nière de réfléchir et d’agir, ni nos institutions,
ni nos processus et méthodes ne sont actuel-
lement capables de s’adapter au rythme actuel
des changements. Le phénomène est général
et tout le monde est touché : industriels, ingé-
nieurs, politiciens, formateurs et autres. D’un
autre côté, et pour ne pas rester sur un constat
alarmiste, je dirais que l’humain a toujours
su s’adapter et rebondir face à l’adversité et
aux challenges. Je pense que ce sera aussi le
cas pour cette évolution industrielle et socié-
tale. 
Interview :
Roland J. Keller
Jusqu’à quand l’Homme pourra-t-
il s’augmenter ? N’y a-t-il pas une
limite ?
Cette question est compliquée puisqu’elle dé-
passe le cadre technologique. En effet, du point
de vue technologique, rien ne pourra arrêter
le progrès et cette augmentation de l’humain
va se poursuivre, avec comme seules limites
l’imagination et le temps. Par contre, la ques-
tion sous-jacente est surtout éthique, morale
et philosophique. Pouvons-nous tout faire ?
Est-ce bien de devenir des super-hommes ?
Quelle est la limite et qui la fixe ? Et enfin,
sommes-nous préparés à tout ça ? Je laisse la
question ouverte…
Superposition d'une pièce sur un moteur en réalité augmentée.
rke

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Du virtuel à la réalité augmentée

  • 1. 6  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017 Laurence Gygax, de FAJI SA, s’immerge dans la « réalité augmentée » grâce à des lunettes qui offrent le rendu d’une visite à l’intérieur de luxueuses demeures. rke
  • 2. Du virtuel à la réalité augmentée SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017  7 Question de perception et de sensations Il y a réalité et… réalité. Virtuel ou augmenté, le concret s’observe, se tâtonne. La réalité augmentée peut se définir comme une interface entre données virtuelles et monde réel. Néanmoins, cette explication reste confuse. Techniquement, ce n’est pas la réalité qui est augmentée, mais bien la perception qu’en a l’utilisateur. Nuance. La réalité augmentée de la 2e Journée du Club SIAMS En plein boom, la réalité augmentée cartonne au niveau industriel. Une vingtaine d’entrepreneurs et de journalistes ont pu se rendre compte des possibilités pratiques offertes par la réalité aug- mentée lors de la 2e Journée du Club SIAMS à Genève le 29 juin dernier. Dans le secteur de l’aviation, Jérôme Barthès de la société française Diota a par exemple évoqué, lors de l’entretien d’un Rafale, la possibilité de pouvoir visualiser, grâce à la réalité augmentée, l’emplacement de chaque vis, boulon, rivet désigné par une cou- leur et un code. « Cela permet de travailler quatre fois plus vite avec deux fois moins d’er- reurs », a-t-il indiqué. Yves Schatzmann de la start-up TFC à Meyrin a, quant à lui, fait la dé- monstration d’un simulateur de vol très particu- lier où il utilise la réalité augmentée pour accen- tuer les effets du simulateur et de ses sensations. Ce qui évite d’installer tout l’environnement du simulateur, soit l’ensemble du cockpit. Marco Mari, représentant des start-up genevoises Scanways et Idessin, a évoqué les technologies applicables à l’architecture concernant l’exploi- tation des données de construction. À l'aide de drones et d'appareils photo de haute résolution, elles offrent des scans 3D photogrammétriques. Une technique exploitable grâce au processus informatique BIM (Building Information Mo- deling). L'assemblage de tous les points créant ainsi une maquette globale précise au millimètre près. Guidé à distance Fondateur de la société Darix à Renens, Martijn Bosch a mis au point des appareils de vision adaptables à des casques de pompier qui per- mettent de voir à travers la fumée grâce à un système d’imagerie thermique. D’autre part, une entreprise jurassienne de machines-outils est en avance dans le domaine. Des ingénieurs envi- sagent de proposer à leur direction de se lancer dans la réalité augmentée pour le service après- vente. Doté d’une paire de lunettes connectées, le client peut ainsi, en cas de panne ou de forma- tion, être « guidé » à distance en ayant les instruc- tions inscrites sur sa monture. Un procédé que de nombreuses sociétés exploitent déjà, mais dont certaines doutent encore de l'efficacité. Question de temps… et de mœurs. (rke) ▶▶ www.ssvar.ch www.realite-virtuelle.com « La réalité augmentée désigne toutes les inter­actions entre une situation réelle et des éléments virtuels tels que de la 3D, des images 2D ou de la géolocalisation. Cette interaction est rendue possible par un « device », un ap- pareil qui va faire office d’unité de calcul. Celui-ci permet de positionner et de suivre les éléments numériques en temps réel. » Telle est l’explication qu’en donne le site Réa- lité Virtuelle.com qui par ailleurs retrace l’histoire de cette technologie, ou cette nou- velle façon de voir les choses. La réalité augmentée a pour la première fois été conceptualisée par Horton Heilig, qui en 1962 crée le « Sensorama ». Il s’agit d’un casque équipé de capteurs permettant de si- muler une scène telle qu’une balade à moto dans New York. Ce concept se rapproche da- vantage de la réalité virtuelle, mais pose éga- lement les bases de la réalité augmentée. En 1968, Ivan Sutherland invente le premier casque à vision transparente réagissant aux mouvements de tête. L’appareil est baptisé « Épée de Damoclès », car il se porte directe- ment sur la tête. Dans les années 1980, Steve Mann invente le EyeTap, un casque permet- tant d’afficher des informations virtuelles de- vant les yeux de son utilisateur. Il s’agit du premier véritable casque de réalité augmen- tée, un concept qui se développera jusqu’à devenir aussi léger qu’une paire de lunettes. Des algorithmes poussés Il existe plusieurs techniques de création de la réalité augmentée : construire une représen- tation se superposant au monde réel en fonc- tion de coordonnées géographiques ou don- nées GPS auxquelles doivent être associés des éléments précisant la direction de la vision. Pour un smartphone, la boussole et les accé- léromètres fournissent les informations né- cessaires pour permettre au logiciel de savoir où est l’usager et la direction vers laquelle il est tourné. Il est également possible de s’en remettre à la reconnaissance d’une image ou d’un motif lié au sens augmenté pour déter- miner la position de l’utilisateur. Dans le cas de la vision, c’est la reconnaissance d’image qui permet cette prouesse. Jadis, les mar- queurs étaient monochromes et dissymé- triques. Simples, ceux-ci sont encore utilisés aujourd’hui par certaines applications. Désor- mais, les ordinateurs et smartphones sont suf- fisamment puissants pour reconnaître, grâce à des algorithmes, des images plus complexes. « Les applications de réalité augmentée peuvent également analyser des flux vidéo ou des élé- ments du corps humain, les mains ou l’en- semble des membres, comme le fait le cap- teur Kinect de Microsoft. Ce procédé est par exemple utilisé par l’application de test de maquillage L’Oréal Makeup Genious », in- dique encore Réalité Virtuelle.com. Entre réel et virtuel Dans un avenir proche, il est probable que tous les équipements portables disposent d’un capteur de reconnaissance du corps hu- main permettant de proposer davantage d’in- teractions entre le réel et le virtuel. C’est déjà le cas du smartphone Asus Zenfone AR, re- posant sur la technologie Google Tango, pré- senté lors du CES 2017 de Las Vegas. Selon les rumeurs, le prochain iPhone attendu pour la fin de l’année 2017 proposerait des fonc- tionnalités similaires. Si la réalité augmentée a réalisé une percée majeure et rapide dans le domaine des jeux vidéo, notamment en supprimant une manette de jeu ou la remplaçant par une reconnais- sance vocale ou faciale, ou encore en redant plus ludiques des applications commerciales. Microsoft a, lui, notamment développé des applications sur Xbox 360 fonctionnant entiè- rement par reconnaissance gestuelle et vocale, et intègre plusieurs types d’applications telles que des jeux de plateforme, mais également des jeux de société ou des applications per- mettant d’essayer un vêtement. La réalité aug- mentée a aussi fait son entrée dans les réseaux sociaux. La société Papersweet3D a développé une application qui fait apparaître sur un écran d’ordinateur le profil d’un utilisateur lorsque celui-ci passe devant une webcam ou un smartphone. L’utilisateur est alors tagué et une citation de son profil peut apparaître en su- perposition de la réalité. La réalité augmentée a été conceptualisée en 1962 déjà par Horton Heilig avec le « Sensorama »
  • 3. Du virtuel à la réalité augmentée 8  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017 L’industrie du futur va créer des « Employés Augmentés » Yassin Rekik est ingénieur-concepteur en informatique de l’École nationale des sciences informatiques de Tunis. Il est également titulaire d’un Doctorat en informatique de l’EPFL. Actuellement, il enseigne en tant que professeur en informatique de la filière Ingénierie des technologies de l’information à la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture (hepia) de Genève. Son regard sur la réalité virtuelle ou augmentée. Monsieur Rekik, en pratique, existe-t-il une corrélation entre la réalité virtuelle (VR) et la réalité augmentée (AR) ? La réalité virtuelle est un ensemble de tech- niques permettant de construire un monde virtuel (numérique, calculé, simulé) dans le- quel l’utilisateur sera plongé. La réalité aug- mentée, par contre, est un ensemble de tech- niques permettant de visualiser le monde réel tout en incrustant dans cette visualisation réelle (on dit qu’on l’augmente) des objets 3D virtuels. Du point de vue technique, il y a évidemment des bases communes en termes de techniques de modélisation 3D, de restitu- tion ou de rendu 3D et d’animation 3D. Tou- tefois, la réalité augmentée soulève des pro- Fondateur de la société Darix à Renens, Martijn Bosch a mis au point des appareils de vision adaptables sur des casques de pompier qui permettent de voir à travers la fumée grâce à un système d’imagerie thermique. – www.darix.ch Darix blématiques plus complexes du fait de ce mélange entre monde réel et objets virtuels. En effet, la réalité augmentée nécessite par exemple la reconnaissance des objets réels et leurs localisations dans l’espace, la superposi- tion des objets réels et virtuels, l’occultation des objets réels par les objets virtuels, et ainsi de suite.
  • 4. SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017  9 Qu’en est-il sur le plan des utilisations ? Le même constat est aussi valable. Même si certaines corrélations existent, les domaines d’utilisation et les objectifs visés sont souvent différents. Pour la réalité virtuelle, l’objectif principal est la « simulation de contexte », ou en d’autres termes la reproduction numérique- ment d’un cadre virtuel permettant d’immer- ger l’utilisateur et de l’isoler du monde réel. Cette capacité d’immersion est souvent utili- sée pour des simulations ludiques (jeux, visites virtuelles), médicales (phobies, relaxations) et/ ou éducatives (sensibilisation, formation). Pour la réalité augmentée, l’objectif principal est la « richesse informationnelle », ou en d’autres termes l’augmentation du monde réel par des compléments visuels divers. Cette capacité permet de décupler les capacités de l’utilisateur et de le soutenir dans ces activités par des mécanismes variés : alerte, orientation, information, aide à la décision, et ainsi de suite. La réalité augmentée aurait-elle tout son sens sans la technologie haptique ? Le lien entre la réalité augmentée et la techno- logie haptique dépend du contexte d’utilisa- tion et du rôle de l’utilisateur. Dans des appli- cations où la réalité augmentée est focalisée sur l’incrustation de données additionnelles et où l’utilisateur est passif, le recours aux tech- nologies haptiques est inexistant. L’exemple typique pour cette situation est l’utilisation de la réalité augmentée dans les guides touris- tiques 3D : annotation de sites, aide à l’orien- tation, et suggestions de lieux. En revanche, si le scénario d’utilisation est plus développé et nécessite de la part de l’utilisateur d’interagir avec son entourage (se déplacer, toucher, dé- placer et sélectionner), alors l’intégration des technologies haptiques devient obligatoire afin de pouvoir simuler ces interactions entre l’uti- lisateur et les objets virtuels. Sans l’utilisation des technologies haptiques, la sensation de réalisme dans les actions et le degré d’immer- sion de l’utilisateur se voient fortement affec- tés. D’ailleurs, cette combinaison des techno- logies haptiques et des technologies de réalité augmentée est actuellement un champ d’expé- rimentation et de développement vaste et for- tement actif. Quel est votre rôle au sein de l’hepia dans ce domaine et que pouvez-vous apporter à vos élèves, sûrement attirés par ce sujet à la mode ? hepia est une haute école spécialisée qui se doit d’initier ses étudiants aux technologies de pointe du moment et de les former à les exploi- ter et à les intégrer dans les applications réelles. Notre rôle, en tant que professeurs à hepia, est de suivre les évolutions et les innovations tech- nologiques, de les étudier et de les tester afin de les introduire progressivement dans le cur- sus de formation. En ce qui concerne les tech- nologies de réalité virtuelle et/ou augmentée, elles sont présentées de manière sommaire dans le cursus Bachelor. Elles sont traitées avec plus de détails et d’approfondissement dans le cursus Master. Enfin, ces technologies sont manipulées et exploitées chaque année dans divers projets d’étudiants (travaux de semestre – travaux de bachelor). Au sein de la filière Ingénierie des technologies de l’information (ITI) à hepia, et afin de répondre à l’engoue- ment des étudiants pour ces nouvelles techno- logies, nous disposons d’un laboratoire com- plet équipé avec un matériel de pointe : ordinateurs puissants, cartes graphiques dé- diées, Google Glasses, casques de réalité vir- tuelle HMD (Oculus Rift – HTC VIVE), lu- nettes de réalité augmentée (Hololens Microsoft), caméras 360 et plein d’autres dis- positifs associés. Vous parlez beaucoup d’immersion. En quoi cela peut-il vraiment convaincre à s’immerger ? Dans la réalité augmentée… L’immersion revient souvent quand on parle de RV et RA, car c’est l’élément clé qui condi- tionne l’acceptabilité de la part des utilisateurs. Toute technologie et toute application de RV et/ou de RA est souvent dépendante du degré d’immersion qu’elle permet. L’immersion est cette capacité de captiver l’utilisateur et ses sens, de l’isoler de l’extérieur, de le transporter « Sans les technologies haptiques, la sensation de réalisme dans les actions et le degré d’immersion de l’utilisateur seront fortement affectés. » Yassin Rekik : « La réalité augmentée peut soutenir un employé en optimisant ses déplacements, en aug- mentant son champ de vision, en accélérant ses prises de décisions, en facilitant son accès aux données et informations contextuelles, en lui permettant d’agir à distance sur des objets télé-manipulés et en lui permettant de communiquer avec des collègues sur son lieu de travail. » rke À propos de Yassin Rekik Yassin Rekik a travaillé dix ans comme assis- tant et chercheur à l’EPFL où il a participé à l’enseignement de divers cours théoriques et pratiques. Il a aussi mené et piloté divers pro- jets de recherche dans le domaine des techno- logies web et mobiles ainsi que leur utilisation en eLearning/mLearning, en systèmes colla- boratifs, et en manipulation et expérimentation à distance. De 2006 à 2013, il a occupé le poste de professeur d’informatique à la Haute École Arc Ingénierie de Saint-Imier et Neuchâtel où il s’est spécialisé dans les nouveaux moyens d’interaction (mobile, tactile, gestuelle). Enfin, depuis 2014, date à laquelle il a intégré hepia, ses activités d’enseignement et de recherche portent essentiellement sur les interfaces intelligentes, les interactions naturelles, les technologies des jeux, le Serious Gaming ainsi que les technologies immersives.
  • 5. Du virtuel à la réalité augmentée 10  SWISS ENGINEERING SEPTEMBRE 2017 dans une réalité numérique, mais fidèle et réaliste, et de lui permettre de vivre une expé- rience conviviale, fluide, cohérente, agréable et productive. Pour la réalité augmentée, l’im- mersion dépend de plusieurs facteurs comme la qualité des objets virtuels, la qualité des rendus, le respect des échelles et des repères, la fusion entre réel et virtuel, la capacité d’inter­agir et le réalisme de l’interaction, ainsi de suite. Nous sommes encore loin d’une im- mersion parfaite en réalité augmentée, mais nous connaissons très bien les défis et les chal- lenges et nous travaillons dessus. On en abuse de cette Industrie 4.0. Pas vrai ? Ne risque-t-on pas de faire pareil avec la RA ? En fait, le phénomène est général et ne se res- treint pas uniquement à l’industrie 4.0 ou à la RA. L’histoire des sciences et des technologies nous apprend qu’avec chaque découverte ou innovation technologique, on passe par trois phases classiques qui sont l’euphorie initiale, la désillusion d’après, et la maturité progres- sive ensuite. Pour la réalité augmentée, effec- tivement, les attentes sont énormes et l’eupho- rie est palpable. Toutefois, il reste beaucoup de challenges à relever pour satisfaire les besoins et atteindre une maturité. Ces challenges sont variés et pluridisciplinaires : algorithmiques, techniques, ergonomiques et même éthiques. Mais le potentiel est réel et les applications déjà en cours montrent l’apport potentiel de ses technologies. De mon côté, en tant que cher- cheur, je préfère une euphorie stimulante et motivante, malgré les risques, à un désintérêt non productif et démotivant. Comment l’industrie peut-elle tirer parti de la RA ? Plusieurs domaines et plusieurs technologies sont en train de révolutionner l’industrie et la changer radicalement. La réalité augmentée en fait partie. Si je dois résumer la promesse de la réalité augmentée dans le cadre de l’in- dustrie du futur, je dirais qu’elle va permettre d’avoir des « Employés Augmentés ». Il s’agit en fait de décupler les capacités de l’employé par des services additionnels accessibles et exploitables via la réalité augmentée. Quelques exemples simples pour illustrer ces dires : la réalité augmentée peut soutenir un employé en optimisant ses déplacements, en augmen- tant son champ de vision, en accélérant ses prises de décisions, en facilitant son accès aux données et informations contextuelles, en lui permettant d’agir à distance sur des objets télé-manipulés, en lui permettant de commu- niquer avec des collègues sur son lieu de tra- vail. Avec toutes les déclinaisons possibles de ses services accessibles via la RA, nous pou- vons imaginer les gains pour les employés en termes de sécurité, de productivité, de forma- tion, de coopération et d’autonomie. Actuel- lement, tous ces scénarios sont envisagés, mais les défis restent énormes en termes de fiabilité, d’ergonomie et de robustesse. Comment se présente le marché ­actuellement ? Le marché de la RA est en pleine croissance, pour ne pas dire explosion. Les derniers chiffres situent le marché mondial de la RA entre 20 et 25 milliards de dollars. Toutefois, cette progression est surtout notable dans le secteur des jeux et du divertissement (environ 80%). Ce n’est que durant les cinq dernières années que les utilisations industrielles et médicales commencent à progresser de ma- nière significative. En termes de matériel, les produits sont limités et le choix n’est pas en- core satisfaisant. Par contre, le marché du développement graphique et logiciel est énorme. Selon vos dires, 65% des métiers de 2050 n’existent pas encore. Cela vous inquiète ? Oui et non. En fait, l’apparition de nouveaux métiers et la disparition d’autres est un phé- nomène classique. De ce côté-là, mon affir- mation ne m’inquiète pas. Par contre, l’am- pleur du changement et son rythme dans le temps sont inquiétants. Je pense que nous assistons depuis peu à une accélération des changements et des innovations pour laquelle nous ne sommes pas préparés. Ni notre ma- nière de réfléchir et d’agir, ni nos institutions, ni nos processus et méthodes ne sont actuel- lement capables de s’adapter au rythme actuel des changements. Le phénomène est général et tout le monde est touché : industriels, ingé- nieurs, politiciens, formateurs et autres. D’un autre côté, et pour ne pas rester sur un constat alarmiste, je dirais que l’humain a toujours su s’adapter et rebondir face à l’adversité et aux challenges. Je pense que ce sera aussi le cas pour cette évolution industrielle et socié- tale.  Interview : Roland J. Keller Jusqu’à quand l’Homme pourra-t- il s’augmenter ? N’y a-t-il pas une limite ? Cette question est compliquée puisqu’elle dé- passe le cadre technologique. En effet, du point de vue technologique, rien ne pourra arrêter le progrès et cette augmentation de l’humain va se poursuivre, avec comme seules limites l’imagination et le temps. Par contre, la ques- tion sous-jacente est surtout éthique, morale et philosophique. Pouvons-nous tout faire ? Est-ce bien de devenir des super-hommes ? Quelle est la limite et qui la fixe ? Et enfin, sommes-nous préparés à tout ça ? Je laisse la question ouverte… Superposition d'une pièce sur un moteur en réalité augmentée. rke