Ania International 09 2008 R Favier Iaa Ferment De CompéTitivité
Executive summary Eric Vaxelaire MOP3 ESSEC
1. « Comment moderniser la filière Monoï de Tahiti afin de stimuler les ventes auprès de l’industrie cosmétique ?»
Eric Vaxelaire MOP3 ESSEC Mars 2016
Directeur de mémoire René Mauget– Président du Jury Jean-Marc Xuereb -Tuteur entreprise Olivier Touboul
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Executive summary
« Comment moderniser la filière Monoï de Tahiti afin de stimuler les ventes auprès de
l’industrie cosmétique ?» est le titre de mon mémoire.
Produit traditionnel de la Polynésie française, fabriqué à partir des produits locaux
emblématiques que sont la fleur de Tiaré Tahiti et la noix de coco, le Monoï de Tahiti est le
fruit d’une pratique ancestrale mécanisée pour répondre aux exigences qualitatives,
normatives et commerciales des marchés internationaux.
Le succès de cette filière tient dans son organisation. Elle se structure autour de la
reconnaissance d’une appellation d’origine permettant de sécuriser la valeur du produit et
s’appuie sur une maîtrise de la chaîne de production.
Le succès international du Monoï de Tahiti, d’abord comme huile solaire pendant 30 ans,
trouve maintenant un nouveau souffle dans l’industrie cosmétique, basé sur la redécouverte
des propriétés des ingrédients actifs qui en ont fait l’un des produits essentiels à la
pharmacopée et à la culture traditionnelle. Les professionnels qui ont construit cette aventure
commerciale pendant les années 1970 et ceux qui depuis 1992 en assurent son
développement, continuent à écrire son histoire et font du Monoï une huile à nulle autre
pareille.
Si l’économie, la notoriété et l’image du Monoï de Tahiti n’ont jamais été aussi bonnes, la
filière est confrontée depuis peu à plusieurs défis majeurs et remises en question dont celle de
sa structure fédératrice, le Groupement Interprofessionnel du Monoï de Tahiti (G.I.M.T.).
Bien que ce mémoire traite principalement du Monoï de Tahiti, il propose une analyse des
problématiques et des solutions à travers l’étude de secteurs similaires car les
questionnements sont souvent les mêmes.
Dans ce qui fait le succès et la force des produits et filières étudiés dans ce mémoire (Perle de
culture de Tahiti, Vanille de Tahiti, huile d’argan, noix de Grenoble et Champagne), se
démarque la qualité intrinsèque du produit. Cette qualité est le fruit de la nature mais
également d’un savoir-faire original, de gestes souvent ancestraux d’artisans et d’industriels
qui une fois réunis ont développé la notoriété et l’image d’excellence de leur production.
Cette réputation, ils l’ont toujours construite patiemment et l’ont souvent confortée par des
labels forts et reconnus des consommateurs. On remarque également un travail souvent plus
discret mais tout aussi important autour de la recherche et le développement, éléments qui
aident les acteurs de la filière à optimiser, sécuriser et améliorer la compétitivité de leur
produit face à la concurrence. On note enfin une vraie démarche et l’importance des moyens
associés concernant la propriété intellectuelle utilisée comme un véritable instrument de
conquête et de communication.
2. « Comment moderniser la filière Monoï de Tahiti afin de stimuler les ventes auprès de l’industrie cosmétique ?»
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Bien qu’elles soient relatives comparées à des filières non organisées, les tensions entre
membres représentent une faiblesse récurrente, ponctuelle qui peut devenir un véritable frein
et blocage nuisant au processus collectif de valorisation.
Ces produits et filières disposent de nombreuses opportunités qui doivent leur permettre de
poursuivre leur développement sur leur marché domestique et à l’international. La première
est la hausse du niveau de vie moyen qui permet l’accès à un nombre croissant de
consommateurs à des produits de grande consommation. La seconde est la mondialisation des
échanges qui contrairement à d’autres filières est un levier de croissance pour ces produits et
entreprises. On y trouve également des poches de productivité avec l’évolution technologique
des outils de production, la professionnalisation des équipes dont les équipes commerciales à
l’export.
Enfin ces secteurs sont confrontés à une triple menace qui augmente. La première est
l’approvisionnement des matières premières que les maladies, aléas climatiques, déséquilibres
entre producteurs et acheteurs rendent de plus en plus incertains. La seconde est la politique
de maitrise du « risque zéro » qui entraîne un durcissement des réglementations
internationales, renchéri les coûts et pénalise la créativité et les petites structures. La dernière,
celle de trop se concentrer sur l’interne avec le risque d’oublier le produit, les consommateurs,
le marché et la concurrence.
Sans tomber dans l’euphorie des résultats (+42% du chiffre d’affaires en dix ans, les marques
qui intègrent du Monoï de Tahiti dans leurs cosmétiques sont passées de 200 à 450 entre 2005
et 2015), les professionnels de cette filière savent qu’ils doivent rester vigilants. Ils ont
l’expérience de 2009/2010 avec un marché qui peut se retourner brutalement et doivent garder
en mémoire de nombreux produits polynésiens qui avaient eu du succès et qui ont
soudainement chuté et dont certains ont définitivement disparu.
Si l’on devait résumer les nombreux défis que la filière Monoï de Tahiti devra encore
affronter, on pourrait citer le docteur Taivini TEAI qui à l’occasion de ce mémoire a dit :
« L’image ne sert à rien si on n’a pas le produit à commercialiser ».
En effet lorsqu’on interroge les professionnels de secteurs d’activités aussi variés que la
distribution, la restauration ou le tourisme, la première préoccupation lorsqu’ils parlent de
produits polynésiens, n’est pas tant la qualité du produit, ni même son prix ou son originalité.
Le problème numéro un est le risque de ne pouvoir s’approvisionner du produit qu’ils ont
sélectionné. De ne pas pouvoir être régulièrement livré du même produit toute l’année. D’être
en rupture et de ne pouvoir offrir un produit de substitution comparable. Dans cette
problématique que l’on retrouve dans une moindre mesure dans les filières étudiées à
l’occasion de ce mémoire, on ne peut que constater que bien que la Polynésie française
regorge de ressources naturelles de qualité et parfois originales, ses produits et filières
3. « Comment moderniser la filière Monoï de Tahiti afin de stimuler les ventes auprès de l’industrie cosmétique ?»
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manquent cruellement de constance.
Si le problème peut provenir de dérèglements climatiques ou de maladies qui peuvent affecter
les matières premières et la production, on constate que bien souvent ces ruptures proviennent
d’un manque de compétence dans un ou plusieurs chainons de la filière. Ce défaut ou
désorganisation de certains pans de l’économie locale, l’intervention mal ciblée ou non
coordonnée entre l’administration territoriale et les professionnels et le manque d’esprit
collectif de certains entrepreneurs fait qu’un produit à fort potentiel peut s’écrouler ou
disparaître.
La filière Monoï de Tahiti a jusqu’à présent évité ces ruptures mais des changements récents,
démontrent qu’elle n’est plus à l’abri. Par le récent dialogue engagé bien au delà des
producteurs/fabricants, les professionnels se donnent les moyens de mieux préparer l’avenir et
réduire ces risques de rupture qui réduiraient la compétitivité du Monoï de Tahiti sur le
marché. Garantir l’approvisionnement en Tiare Tahiti, et obtenir un juste prix pour l’huile
raffinée de coprah est un nouveau défi. Mal entrepris il pourrait entrainer la perte des clients
si difficilement acquis, bien géré il permettra au contraire de sécuriser la filière, gagner en
crédibilité et poursuivre le développement du Monoï de Tahiti.
Le deuxième risque est le retour à l’individualisme. Pour le Monoï de Tahiti et après quelques
années de concorde, elle se cristallise depuis 2013 à travers des tensions entre deux groupes
de producteurs qui ont des résultats économiques opposés. Un groupe de trois fabricants
surnommé par les médias locaux les « frondeurs », s’affronte avec le Comité du G.I.M.T. au
sujet des missions et actions de la filière. Minoritaires en nombre, en voix et représentant un
quart de l’activité, ce collectif a créé une association concurrente, milite pour la dissolution du
groupement et un changement radical de la stratégie de promotion.
Le comité majoritaire composé des cinq autres producteurs représente trois quart de la
production, plus de 80% du chiffre d’affaires et des emplois. Ce groupe souhaite engager une
modernisation de la filière à travers la création à très court terme d’un GIE très opérationnel.
Deux raisons à cela. La première est que le G.I.M.T. créé en 1992 est devenu trop
administratif du fait de la rédaction de ses statuts et de sa dépendance aux pouvoirs publics.
La seconde est que l’existence même du groupement est légalement contestée par les
frondeurs, raisons qui poussent le comité majoritaire à trouver une nouvelle dynamique. Ces
cinq producteurs souhaitent par contre la poursuite de l’actuelle stratégie. Celle-ci vise à
développer l’activité matière première auprès de l’industrie cosmétique tout en renforçant
l’activité de conditionnement de produits finis en Polynésie.
Dans un contexte de renforcement de la concurrence internationale et de recrudescence des
tentatives de contrefaçon, les huit producteurs doivent s’interroger si l’appellation, une seule
structure fédératrice au lieu de deux ne leur apporte pas plus de sécurité, d’opportunité de
croissance et enfin de valeur à leur entreprise. C’est dans ce sens que le gouvernement
pourrait intervenir et confier à la structure la plus représentative de la filière la gestion de la
défense des intérêts du Monoï de Tahiti.
4. « Comment moderniser la filière Monoï de Tahiti afin de stimuler les ventes auprès de l’industrie cosmétique ?»
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Le dernier enjeu qui est de continuer à stimuler les ventes auprès de l’industrie cosmétique se
trouve dans chaque entreprise. Il passe par l’organisation et les moyens que chaque
entrepreneur met quotidiennement en place afin d’être plus performant face à la concurrence.
Investir dans sa propre recherche et développement, son outil de production, son organisation
et dans ses équipes. Sur ce point certains fabricants pourraient se renforcer et proposer une
stratégie et structure commerciale mieux adaptée aux exigences de l’industrie cosmétique et à
la concurrence internationale.
Après avoir analysé les problématiques de la filière Monoï de Tahiti et à la lumière d’autres
secteurs similaires, nous espérons que ce mémoire pourra contribuer au développement de
l’industrie cosmétique polynésienne et à faire avancer la réflexion et les politiques de
« valorisation des savoir-faire locaux et des produits polynésiens ».
Par ailleurs et pour conclure, nous ne pouvons que souhaiter que dans un avenir proche, les
producteurs se soudent à nouveau car il en est de leur propre intérêt et de l’intérêt de toute la
Polynésie française.