Par une lettre du 5 septembre 20171, la Ministre du Travail Muriel Pénicaud m’a chargé d’une mission sur l’innovation sociale au service de la lutte contre l’exclusion. C’est avec une certaine liberté de ton que je me suis prêté à l’exercice et je tiens remercier les personnes – près de 400 – qui
ont accepté de partager leur vision et leurs connaissances en vue de ce rapport.
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La croissance est de retour, on nous l’annonce. Elle va cependant d’abord bénéficier aux moins éloignés de l’emploi : elle va réduire le chômage par le haut. Or la situation des deux millions de personnes durablement éloignées du marché du travail est préoccupante.
La principale leçon du secteur de l’insertion est pourtant que « personne n’est inemployable ». Il existe toujours une solution et elle repose sur la formation, l’accompagnement et
l’emploi. Les volets de ce triptyque peuvent être mobilisés à des degrés divers, selon la nature du frein : professionnel, social, ou d’accès à l’emploi.
Si personne n’est inemployable, c’est que le concept d’employabilité donne une vision partielle de la réalité, car il sous-entend que la responsabilité du chômage incombe uniquement au demandeur d’emploi. Sortir des préjugés est un préalable à toute réforme en la matière. Dans certains territoires, ce ne sont pas les personnes qui sont éloignées de l’emploi, mais l’emploi qui est éloigné des personnes.
L’emploi est notre responsabilité collective, elle ne concerne pas seulement les chômeurs. On ne peut donc parler d’employabilité sans lui adjoindre « l’employeur-abilité », la capacité à employer, qui n’est pas naturelle à toute entreprise, et s’apprend. Les aides à l’emploi doivent accompagner les
employeurs autant que les demandeurs d’emploi.
Dans cette optique, le rapport propose de passer d’une quantité de « contrats aidés » à des « parcours emploi compétences » de qualité, car limités à des « employeurs apprenants » capables d’inclure, d’accompagner, et d’envoyer en formation leurs salariés. Les compétences que
l’occupation du poste permet d’acquérir seront inscrites dans le contrat et engageront l’employeur. Il s’agit bien d’un début de parcours, orienté vers les compétences. Deux entretiens tripartites salariéemployeur-prescripteur (le plus souvent Pôle emploi), à la signature du contrat puis 1 à 3 mois avant
la fin du contrat, permettront de contrôler le respect des engagements, et d’anticiper la sortie du contrat de travail, dans une logique de parcours.
Les parcours emploi compétences pourront aussi être intitulés de « compétences » grâce à la mise à contribution du Plan d’investissement compétence (PIC), recommandée par le rapport.
Réserver une partie de ce plan aux sortants de ces contrats d’une part, et l’attention du PIC à financer des parcours sous la forme de triptyques d’autre part, doivent permettre d’assurer des parcours de formation adaptés à l’issue du contrat de travail.