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VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT
INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
Mémoire de stage - Avril / Septembre 2012
Université de Lille 1
MASTER de Sciences et Technologies, mention
Aménagement, Urbanisme et Développement des Territoires
Spécialité : Ville & Projets - Option : Projet Urbain

Tuteur Professionnel : M. Bruno Galus
Tuteur Universitaire : M. Richard Lemeiter              Étudiant : Philippe Hurtaux
REMERCIEMENTS



      En préambule à ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus sincères à l’en-
semble des services de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin, notamment la Direction de
l’Aménagement du Territoire, pour leur accueil bienveillant et leurs conseils avisés. J’associe également
les personnes m’ayant apporté leur aide et ayant contribué à l’élaboration de ce mémoire.

       Je tiens à remercier sincèrement Monsieur Richard Lemeiter, tuteur universitaire, qui s’est montré
à l’écoute et disponible tout au long de la réalisation de ce mémoire. Son aide a ainsi été déterminante
pour guider et struturer mes travaux.

      Mes remerciements s’adressent également à Monsieur Bruno Galus, Directeur Général Adjoint
de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin chargé de l’Aménagement du Territoire, pour son
écoute et son encadrement dans les tâches qu’il a pu me confier.

       Je remercie également les collaborateurs rencontrés tout au long de l’élaboration du cahier des
charges des Cités Durables du Louvre : Monsieur Raphaël Alessandri (Mission Bassin Minier), Madame
Isabelle Colnenne (Conseil Régional), Monsieur Frédéric Delacroix (Ville de Lens), Monsieur Guillaume
Hebert (Une Fabrique de la Ville), Monsieur Gilles Pette (Conseil Régional), Madame Élisabeth Vernageau
(Ville de Lens). Ils ont bien voulu répondre patiemment et aimablement à mes nombreuses questions

     J’exprime ma gratitude à toutes les institutions et personnes rencontrées à titre professionnel et
ayant pu me faire part de leur vision du territoire et de ses spécificités : Maisons & Cités, notamment
Messieurs Hervé Walczak et Régis Jamey, la Chaine des Terrils, le CERDD et le Parc Naturel Régional
Scarpe-Escault, notamment Agnès Lavergne.

       Une pensée particulière est adressée aux membres du service Développement Économique que
j’ai côtoyés quotidiennement et dont j’ai aprécié la gentillesse et la bonne humeur.

     Merci à tous et à toutes.




                 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 3
SOMMAIRE


VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT
INTRODUCTION08


1 | LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?                             17

A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN                                      18
     L’étalement urbain (statistiques)                                          18
     Quelques raisons                                                           21
     À l’avenir                                                                 24



B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET LA
DENSIFICATION25
     Le cadre législatif                                                        25
     Densité(s), quelques définitions                                           27
     (Re)sentir la densité                                                      28
     La qualité de la ville dense, vers la ville intense                        29
     La densification en milieu urbain                                          30
     La périurbain comme territoire de projet                                   32
     La filière BIMBY                                                           34
     Une densité plus raisonnée en période de crise ?                           38



C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE                                                      38
     La pratique au cœur de l’acceptabilité                                     39
     Des perspectives BIMBY                                                     40




4 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?


 2 | L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ?
 43

 A | HISTORIQUE MINIER                                                                   44
     L’activité minière                                                                  44
     Le mode d’urbanisme minier                                                          46



 B | TYPOLOGIES DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER                                           52
     Les corons (1825 – 1890)                                                            52
     Les cités pavillonnaires (1867 – 1939)                                              54
     Les cités-jardin (1904 – 1939)                                                      56
     Les cités modernes (1946 – 1970)                                                    58
     Des premières constructions à la mutualisation d’un parc d’habitat minier           60
     Maisons  Cités (SOGINORPA – EPINORPA)                                              60
     La Société Immobilière de l’Artois (SIA)                                            62



 C | ÉVOLUTIONS, PERSPECTIVES ET LEVIERS                                                 63
     Les ayants droits                                                                   63
       L’inscription du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais sur la liste du patrimoine mon-
 dial de l’UNESCO                                                                       63
     Les Cités Durables du Louvre                                                        65



 D | LA DENSITÉ COMME NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT MINIER                                 67




               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 5
SOMMAIRE



3 | LA DENSIFICATION SUR LE TERRITOIRE DE LA CALL                               75

A | DISPOSITIFS STRATÉGIQUES                                                    76


B | LES CITÉ DURABLES DU LOUVRE                                                 78
     Périmètre de réflexion                                                     79
     La Cité des Provinces                                                      82
     La Cité du 12-14                                                           84
     La Cité du 9                                                               85
     La Cité Jeanne d’Arc                                                       87
     La Cité du 4                                                               89
     Protéger, valoriser et faire evoluer l’habitat minier avec ses habitants   91
     Vers un habitat plus respectueux de l’environnement                        92
     Créer des liens entre les cités et le louvre                               93



C | LA DÉMARCHE BIMBY                                                           94



CONCLUSION95




6 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 7
INTRODUCTION



      Quelque soit l’échelle, une certaine optimisation de l’espace est toujours recherchée ; que
vous fermiez votre valise à l’heure de partir en vacances, qu’un transporteur charge ses containers
ou qu’un aménageur finalise son projet. Il s’agit donc d’une notion que nous appréhendons tous
d’une manière ou d’une autre. En terme d’aménagement, bien que fini, l’espace offre plus de liber-
tés et semble parfois moins limité. Il a cependant un coût économique et sociétal. La considérable
augmentation du premier depuis des années en démontre la rareté. Sur le plan sociétal, les aména-
gements de terrains de plus en plus éloignés des villes impliquent des mouvements pendulaires de
plus en plus importants et consomment de plus en plus d’espaces agricoles ou naturels pourtant
indispensables à l’équilibre de nos sociétés.

      Selon l’outil européen d’observation de l’état de l’occupation des sols et de son évolution
dans le temps (Service de l’Observation et des Statistique (SOeS), CORINE Land Cover (CLC),
2006), entre 2000 et 2006, l’artificialisation des sols a augmenté de 3% en France métropolitaine.
Ces statistiques peuvent être expliquées par l’augmentation de la population durant le dernier siècle
conjuguée à la diminution de la taille des foyers et à la grande augmentation de la part de logements
individuels amenant ainsi à un étalement de l’urbanisation.

      Devant l’importance de ce phénomène, l’état a entrepris des initiatives afin de prendre en
compte les problématiques foncières. Si le sujet est d’actualité, la prise de conscience a plus de
trente ans avec les premières mises en garde contre le mitage, puis les premières mesures en 2000
à travers la loi Solidarité Renouvellement Urbain (SRU). Dernièrement, le Grenelle de l’environnement
et les lois portant Engagement National pour l’Environnement du 12 juillet 2010, dite loi Grenelle 2,
et de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 13 juillet 2010 ont fixé comme un des objectifs
de « développer un urbanisme économe en ressources foncières et énergétiques ».

      Conjuguer ces problématiques avec celles du manque de logements en France suggère de
devoir développer plus d’habitations et d’équipements sur moins d’espace, donc de densifier les
aménagements. Cette logique permet également à la puissance publique de limiter de nouveaux
investissements en rentabilisant davantage ceux existants. C’est en effet le cas de tous les réseaux,
voiries, assainissements etc. ; ceux-ci ont été construits avec des coûts importants mais ne des-
servent que peu de citoyens. La densification serait alors le moyen de « rentabiliser » ces investisse-
ments, en augmentant le nombre de personnes en bénéficiant. Dans certains cas, elle permettrait
même aux équipements de ne pas mettre en cause leur maintien. Par exemple les équipements tels
que les écoles sont parfois amenés à décliner voir à fermer dans les milieux peu denses où l’activité
est trop onéreuse et les habitants amenés à les chercher plus loin.

      Rationnellement, la densité se définit comme le rapport d’une quantité sur une unité de sur-
face. En terme de densité de population, on peut par exemple prendre en compte le nombre de
logements, le nombre d’habitants ou encore la Surface Hors Œuvre Net (SHON). Selon l’échelle
spatiale la densité est également calculée sur un kilomètre carré ou sur un hectare. Plus finement,
sur la parcelle le Coefficient d’Occupation des Sols (COS) peut également traduire une densité par
le rapport entre la surface construite et la surface constructible. Il existe donc une multitude de
façons de mesurer la densité. La notion se complexifie encore lorsque l’on parle du ressenti. En effet,

8 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
l’impression générale est souvent trompeuse dans ce domaine et l’imaginaire collectif ne correspond
souvent pas à la réalité de densité. Ces critères dépendent également de l’époque de construction
et de la qualité des aménagements liés.

       Ainsi les corons constituaient un habitat assez dense pour l’époque de leurs constructions. En
effet l’habitat industriel minier était conçu par les industriels de la mine pour que leurs ouvriers soient
le plus proche possible de la fosse. Cet aspect avec des préoccupations de rationalisation des
constructions a donc amené cet habitat atypique. Il a ainsi évolué avec son industrie, tout au long de
l’aventure charbonnière. Ce fut notamment le cas dans le Nord-Pas de Calais depuis les premiers
corons construits au début du XIXème siècle jusqu’à la fin de l’exploitation en 1990.

       Cet habitat est au cœur de la toute récente inscription du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais
sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. En effet ce sont 124 cités minières qui intègrent ce
« paysage culturel évolutif vivant ». Ce parc, parfois en très mauvais état doit donc pouvoir être réha-
bilité avec soin afin de permettre la préservation de ces qualités et des valeurs qu’il véhicule tout en le
repositionnant dans son époque actuel. Ainsi les enjeux environnementaux, sociaux et économiques
du développement durable doivent être pris en compte dans ces réhabilitations. La rénovation ther-
mique est par exemple primordiale. Qu’en est-il des questions de densité ? Le concept peut faire
peur mais est abordé dans le Schéma Directeur Euralens prévoyant les diverses opérations d’amé-
nagements pour l’arrivée du Louvre-Lens.

     Dès lors, que peut apporter la densification à l’habitat
                       industriel minier ?
       Pour répondre à cette question, nous étudierons donc les mécanismes de la densité, sa me-
sure et ses enjeux, puis nous nous intéresserons à l’habitat industriel minier dans ces différentes
typologies et ces évolutions. Ceci nous permettra d’imaginer un nouvel avenir dense pour cet habi-
tat, et enfin nous verrons les dispositifs de densification en cours sur le territoire de la Communauté
d’Agglomération de Lens-Liévin (CALL).




                 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 9
INTRODUCTION

PRÉSENTATION DU TERRITOIRE




                  Figure 1 : Les EPCI de l’AML – Source : Atlas de l’Aire métropolitaine de Lille


       Sur ces 240 km2, la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin (CALL) et ses 36 communes
(figure 2) possèdent des caractères très divers. En effet si elle est située autour d’un cœur urbain
constitué des villes de Lens et de Liévin, de nombreuses communes sont plus rurales et observent
des problématiques différentes.

      Géographiquement, le territoire de la CALL se situe dans le bassin minier lensois, lui même au
centre de l’ex-bassin minier du Nord-Pas de Calais. Cette caractéristique minière du territoire est
très prégnante et a marqué son histoire sur laquelle nous reviendrons. Cependant l’agglomération
s’étend jusqu’aux collines de l’Artois, ce qui explique la partie plus rurale plutôt concentrée au sud-
ouest.

      Comme la figure 1 le montre, la CALL est entourée d’autres Établissements Publics de Coo-
pération Intercommunale (EPCI), avec lesquels elle établit diverses collaborations, notamment la
conception du Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) avec la Communauté d’Agglomérations
d’Hénin-Carvin (CAHC). La CALL fait également partie de l’Aire Métropolitaine de Lille (AML) et par-
ticipe à ses travaux.



10 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
Figure 2 : Les communes de la CALL – Source : CALL


      Les origines de la CALL remontent aux bases de l’intercommunalité en France. En effet, le
District Urbain de l’Agglomération de Lens-Liévin a été créé le 21 Août 1968. Il regroupait 30 com-
munes et était fondé sur une idée solidaire de mise en commun des moyens pour faire face à la crise
de l’activité charbonnière qui s’annonçait. C’est en 2000 que ce District Urbain sera transformé en
Communauté d’Agglomération. Aujourd’hui elle regroupe donc 36 communes et environ 252.000
habitants.

        La CALL et le territoire sont donc marqués par ce passé minier qui les a plongé dans des
difficultés économiques et sociales importantes. Comme il l’est rappelé dans le Rapport d’Activités
2011 de la CALL, elle « demeure l’une des Communautés d’Agglomération les plus pauvres de
France ». Cependant les efforts sont fournis pour revitaliser le territoire autour de « filières d’excel-

-	 le développement durable autour du site du 11/19 à Loos-en-Gohelle
lence » porteuses d’avenir et en interactions avec le musée du Louvre-Lens :

-	 le numérique dédié à la culture
-	 les métiers d’art
-	 la logistique avec la plate-forme multimodale de Dourges et son centre de formation
-	 le sport, la santé et le bien être autour de l’Arena stade couvert régional de Liévin

               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 11
INTRODUCTION

PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE

                      Obligatoires, optionnelles ou facultatives la CALL exerce les compétences listées dans la figure 3.




                           Le développement économique étendu aux domaines de la création, de
                           l’aménagement, de l’entretien et de la gestion de zones d’activités industrielle,
                           commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire et aéroportuaire, ainsi
                           qu’aux actions de développement économique d’intérêt communautaire ;




                           L’aménagement de l’espace communautaire exercé dans les domaines                     	
  
                           suivants : schéma directeur et schéma de secteur, création et réalisation de
                           zones d’aménagement concerté d’intérêt communautaire, organisation des
Compétences Obligatoires




                           transports urbains ;




                           L’équilibre social de l’habitat : programme local de l’habitat, politique du
                                                                                                                	
  
                           logement et notamment du logement social d’intérêt communautaire et action
                           en faveur du logement des personnes défavorisées, amélioration du parc
                           immobilier bâti d’intérêt communautaire ;




                           La politique de la ville : dispositifs contractuels de développement urbain et
                                                                                                                	
  
                           d’insertion économique et social d’intérêt communautaire, dispositifs locaux
                           de prévention de la délinquance.




                                                                                                                	
  




12 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
L’eau, compétence globale qui recouvre l’entretien, la rénovation et l’extension
                           des réseaux, mais aussi la distribution en eau potable à l’usager ;
Compétences Optionnelles




                           L’assainissement ;




                           La protection et la mise en valeur de l’environnement et du cadre de vie, qui
                                                                                                                 	
  
                           se traduit par la lutte contre la pollution de l’air, contre les nuisances sonores,
                           l’élimination et la valorisation des déchets ménagers.




                           la gestion de villages de non-sédentaires ;
                                                                                                                 	
  
                           la gestion d’un refuge intercommunal pour animaux ;
                           la gestion de dépôts de matériaux inertes ;
                           la gestion d’un crématorium réalisé en commun avec la Communauté


                                                                                                                 	
  
                           d’Agglomération d’Hénin-Carvin ;
Compétences Facultatives




                           la mise en place d’un projet d’agglomération comportant l’enseignement
                           secondaire et supérieur, la culture et la communication, les sports, le tourisme,
                           les actions sanitaires et sociales ;

                           l’étude et la réalisation de tout projet, pouvant présenter un intérêt
                           intercommunal dans l’éventualité où les communes intéressées lui en


                                                                                                                 	
  
                           confieraient la responsabilité ;


                           la gestion des équipements réalisés par ses soins et des services exploités
                           en commun ;


                           l’exercice aux lieu et place des communes de la gestion de plein droit des
                           services énumérés à l’article L-164-4 de l’ancien Code des Communes,
                           remplacé par l’article L-5213-15 du Code Général des Collectivités Territoriales.


                                                                                                                 	
  
                                       Figure 3 : Compétences exercées par la CALL – Source : CALL – Réalisation : Auteur




                                       VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 13
INTRODUCTION



       Pour exercer ces compétences, la CALL, est dirigé par un conseil communautaire regroupant
171 délégués issus des communes. Celui-ci est présidé par Monsieur Jean-Pierre Kucheida, député
honoraire et Maire de la ville de Liévin. 7 commissions instruisent les dossiers et environ 200 agents

-	 un cabinet dirigé par Monsieur Sébastien Plociniczak
veillent au bon fonctionnement de l’EPCI organisé selon :

-	 une direction générale dirigée par Monsieur José Gulino

       La direction générale se subdivise en trois grands départements, l’administration générale,
l’aménagement du territoire et les services techniques. Chacun d’eux est lui même composé de
différents services selon l’organigramme suivant (figure 4). La CALL se comptent ainsi d’environ 200
agents.




                   Figure 4 : Organigramme de la CALL – Source : CALL – Réalisation : Auteur




14 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
LE POSTE DE STAGIAIRE «ÉCO-CITÉS DU LOUVRE»

      Rattaché directement auprès de Monsieur Bruno Galus, Directeur Général Adjoint en charge
de l’Aménagement du Territoire, ma mission a été principalement de travailler sur le concept des
Éco-Cités du Louvre. Dans un premier temps, il s’agissait de préciser les attentes regroupées sous
cette dénomination afin de définir et de proposer une base de réflexion sur ce sujet. Pendant la
validation politique des réflexions j’ai travaillé à la rédaction d’un cahier des charges pour une étude
urbaine et sociale visant à développer une stratégie de projets selon ces principes, objectif final dans
le cadre de ce stage.

      Au fil des réunions des différents acteurs et de la précision du projet, notamment de son arti-
culation avec les autres marchés régissant la démarche Euralens, le cahier de charge a beaucoup
évolué. Dans sa dernière mouture il défini alors une étude de programmation urbaine dont l’aspect
social et l’étude du peuplement revêt une grande importance.




                     Figure 5 : Communauté d’Aggllomération de Lens-Liévin, Site Lavoisier




               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 15
16 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
1   LA DENSIFICATION,
    PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?
    A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN
    B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET
        LA DENSIFICATION
    C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE




VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 17
1        LA DENSIFICATION,
                   PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?
A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN

      L’étalement urbain (statistiques)
      L’effet de la construction et des projets d’aménagement sur l’occupation des sols peut être
traduit selon divers indicateurs. S’ils doivent être maniés avec prudence, selon les échelles géogra-
phiques et temporelles et particularités de calcul qui correspondent à chacun d’eux, nous verrons
qu’ils convergent sur des conclusions liées à l’étalement urbain.

      En réalité l’étalement urbain est défini par l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE)
par le fait que « la surface urbanisée croît plus vite que l’augmentation de population ». En croisant
les données du SOeS, CORINE Land Cover (CLC) avec ceux d’Eurostat et de l’Institut National de la
Statistique et des Études Économiques (INSEE) on peut alors dresser un tableau comparatif (figure
6) comme Françoise Nirascou (CGDD-SOeS, 2012) le fait. Selon la définition de l’AEE, la différence
entre le taux d’évolution des surfaces urbanisées et celui de la population sur une période identique
aboutit à un indice sans unité, représentatif de l’étalement urbain sur la période. Il y aurait alors éta-
lement urbain si l’indice est supérieur à zéro.
                                   Evolution des sur-        Evolution des sur-       Evolution de la po-
                                  faces artificialisées       faces urbanisées                                   Indice d’étalement
                                                                                      pulation entre 2000
                                  entre 2000 et 2006         entre 2000 et 2006                                       urbain*
                                                                                        et 2006 (en %)
                                        (en %)                     (en %)

    Europe à 27 hors                        2,7                       1,7                       2,9                       -1,2
  Royaume-Uni et Grèce


   France Métropolitaine                     3                        2,1                       4,4                       -2,3


Valeurs              Min. :                 1,4                        1                        4,1                       -3,1
régionales en       Alsace
France Métro-        Max. :
politaine          Pays de la               5,7                       4,7                       6,2                       -1,5
                     Loire
* indice sans unité, construit selon la définition de l’Agence Européenne pour l’Environnement par différence entre le taux d’évolution
des surfaces urbanisées et celui de la population sur des périodes identiques
 Figure 6 : Comparatif des évolutions de surfaces artificialisées, urbanisées et de population – Source : SOeS, CLC ;
                                       Eurostat ; INSEE ; Françoise Nirascou


     D’après la figure 6, il n’y aurait donc pas eu, au sens de l’AEE, d’étalement urbain entre 2000
et 2006 à l’échelle de l’Europe et à celle de la France Métropolitaine.

       On peut également considérer l’évolution temporelle du gradient de densité. En effet la densité,
de logements ou de population est toujours plus forte dans les centres urbains qu’en périphérie (par
définition du centre urbain). Son gradient exprime alors à quelle vitesse elle décroit en fonction de
l’éloignement du centre. Ainsi plus un gradient de densité est élevé, plus la ville est concentrée et sa
densité décroit rapidement vers la périphérie. L’évolution dans le temps de ce gradient peut donc
traduire la tendance de la ville étudiée à se densifier (augmentation) ou à s’étaler (diminution). C’est
ce que l’on peut étudier sur la figure 7. Ces calculs témoignent alors un étalement des aires urbaines
de province que sont Lille et Lyon, alors que celle de Paris, déjà très dense fluctue.



18 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
L’INSEE appréhende l’étalement urbain par sa propre notion d’unité urbaine. Les unités ur-
baines sont définies par « les ensembles de communes «entre lesquelles il n’y a pas de coupure
de plus de 200 mètres et dans lesquelles résident au moins 2 000 habitants ». L’INSEE peut ainsi
déterminer les évolutions à chaque renouvellement de la base. Ainsi, entre 1999 et 2010, 1 368
communes sont passées d’un espace rural à un espace urbain, ce qui correspond à une augmen-
tation de 19% de la surface du territoire constitué par ces aires urbaines. Elles sont donc passées
de 100 000 km2 à 119 000 km2. L’INSEE signale également que cette évolution semble d’accélérer.




 Figure 7 : Calcul et évolution temporelle des gradient de densité de population pour les villes de Paris, Lyon et Lille –
                                           Source : Françoise Nirascou (2012)


       En traitant les informations des permis de construire délivrés, le SOeS a également mis au point
la base statistique Sitadel. Un travail d’anonymisation est nécessaire mais fournit des données très
précises. Une des analyses appliquée à cette base est l’étude de la distance moyenne des construc-
tions neuves au centre urbain. Ainsi, le tableau de la figure 8 témoigne de l’étalement urbain pour
différentes aires urbaines. Les résultats diffèrent selon les aires urbaines mais sur l’ensemble on peut
constater un étalement urbain important entre 1990 et 2001 puis son ralentissement jusqu’en 2010.
Cet outil ne donne cependant qu’une information de distance et non d’espace consommé.




 Figure 8 : Distance de la construction neuve par rapport au centre des aires urbaines – Source : SOeS, Sitadel (2012)




                 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 19
1      LA DENSIFICATION,
               PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



      Plus simplement, on peut considérer un sol « consommé » lorsqu’il accueille un aménagement
ou un équipement physique. On parle alors d’artificialisation des sols, laquelle est le plus souvent
irrémédiable. La consommation d’espace est alors l’artificialisation d’un sol qui ne l’était pas aupara-
vant. Sur le principe, l’étude de son évolution semble simple. Il n’en est rien et plusieurs techniques
existent allant de la projection statistique à l’observation satellitaire en passant par l’étude cadastrale.
Encore une fois les avantages et inconvénients de ces techniques dépendent de l’échelle étudiée.

     Ainsi la technique statistique de la source Teruti-Lucas permet de travailler au niveau national
ou régional et traduit les changements rapidement puisqu’elle est renouvelée annuellement.

      À l’inverse, l’utilisation des données cadastrales est beaucoup plus fine et est donc particuliè-
rement utile à l’échelle communale. Cependant, elle doit être pondérée puisqu’elle ne prend pas en
compte les espaces publics générés et ne peut actuellement pas servir de base de comparaison à
l’échelle européenne.




                           Figure 9 : Portail Corine Land Cover France – Source : CLC


      Enfin, la source Corine Land Cover, crée des cartographies (figure 9) désignant l’usage de
l’espace et peut également prendre en compte son ancienne affectation, à partir d’image satellite.
Elle est renouvelée tous les six ans et son principal inconvénient provient de la résolution que ce
traitement impose (25 ha pour l’état des sols et 5 ha en évolution). En effet, les évolutions minimes
ne sont pas toujours prises en compte. On éprouve par exemple des difficultés à mettre en évidence
le phénomène de mitage avec cet outil. Des évolutions sont attendues et devraient aboutir à un

20 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
renouvellement de l’information plus rapide (3 ans) et une résolution plus importante (1 ha au lieu de
5 ha). Le dernier renouvellement des données a permis de déterminer qu’en 2006, 5,1% de l’espace
est artificialisé en France Métropolitaine. Entre 2000 et 2006 la surface artificialisée a progressée
de 3%. Ces 3% sont majoritairement pris (88%) sur des terres agricoles, le restant l’étant sur des
milieux naturels. L’étude montre également que 75% de cet espace est utilisé pour la création de
tissu urbain (souvent discontinu) et 12% pour des zones industrielles et commerciales (UE, SOeS,
CLC, base des changements 2000-2006).

     Les villes prennent donc de plus en plus d’espace en France. Elle recouvre alors d’anciens
espaces agricoles ou naturels précieux. L’augmentation de la population doit être mise en parallèle
de ces statistiques, mais tentons de comprendre comment ce phénomène prend de l’importance.


      Quelques raisons
      Le logement est donc la première raison de consommation d’espace. La population augmen-
tant en moyenne de 0,56% par an (entre 1960 et la fin des années 2000), il est normal que nous
ayons besoin de plus en plus de logements.




Figure 10 : Évolutions annuelles moyenne de la population et du nombre de logements en France Métropolitaine (en %)
                                       – Source : INSEE, SOeS (Alain Jacquot)


     Cependant le nombre de logement est plutôt lié au nombre de ménages. En effet chaque mé-
nage a une résidence principale. Or c’est le nombre de ménage qui a considérablement augmenté
en France ces dernières années : d’en moyenne 1,32% par an sur la même période. Ceci s’explique
par une baisse considérable du nombre de personnes par ménage (0,74% par an). En effet, alors
que le nombre de personnes par ménage était de 3,06 en 1968, il était descendu à 2,29 en 2007.
Dans les années 80, cette baisse était le résultat du ralentissement du baby-boom entrainant un
nombre d’enfant par ménage moins important. L’amélioration du système de retraite, permettant
une meilleure autonomie des personnes âgées dans leur foyer a également eu de l’influence. Puis
dans les années 90, le vieillissement de la population ainsi que les évolutions sociologiques autour
du mariage ont continué à alimenter cette baisse. En effet, le vieillissement implique un nombre
important de ménages dont les enfants ont pris leur autonomie, et le désaveu du mariage implique
un nombre plus important de personnes vivant seules, et de familles monoparentales (Alain Jacquot,
CGDD-SOeS, 2012).
                 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 21
1       LA DENSIFICATION,
                PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?




Figure 11�����������������������������������������������������������
       �������������������������������������������������������������
          : Évolution de la surface habitable par personne selon différents critères – Source : INSEE, SOeS, Alain Jac-
                                                                    ���������������������������������������������������
                                                         quot


        En quarante ans, le nombre de logements en France a été multiplié par 1,7. Dans le même
temps et sous l’effet des phénomènes évoqués précédemment, la surface moyenne des résidences
principales est passée de 72,0 m2 en 1973 à 91,2 m2 en 2006. Ce qui correspond à une évolution
de 24,6 à 40,1 m2 par personne. En moyenne, le nombre de pièce d’une résidence principale était
de 3,3 pièces en 1968. Elle était passée à 4,0 pièces en 2007. Ceci peut encore une fois s’expliquer
par le vieillissement de la population. En effet, et comme le montre la figure 11, la surface habitable
par personne croit avec l’âge. C’est principalement le fait du parcours résidentiel qui permet en
vieillissant de bénéficier de biens plus importants. De plus, très peu se détachent de ce bien même
une fois que les enfants ont quitté le foyer. L’augmentation du nombre de personnes vivant seules
est également responsable de cette hausse, puisqu’elles en consomment évidemment plus.


22 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
De cette façon, Alain Jacquot (2012) a pu calculer que la surface habitable cumulée des loge-
ments en France Métropolitaine a été multipliée par 2,3 en quarante ans. Il signale également la pro-
babilité que « la surface cumulée des parcelles d’habitation a été multipliée par davantage que 2,3
(sans qu’il ne soit possible de donner un chiffre précis) ». En effet la proportion de l’habitat individuel
a considérablement augmenté dans le volume des logements construits. Plus de 60% depuis 1975
alors qu’il était aux alentours de 40% depuis la fin de la seconde guerre mondiale (figure 12). De plus
comme le montre la figure 12, la taille moyenne des parcelles sur lesquelles cet habitat individuel
se construit a également augmenté selon les mêmes périodes. Concernant le collectif, leur taille
moyenne a beaucoup diminué depuis les années 80.




  Figure 12 : Surface des logements, des terrains et nombre d’étage des bâtiments d’habitation en 2006, selon leur
                              époque de construction – Source : Alain Jacquot (2012)


      Pour trouver plus de parcelles, de tailles plus grandes, il faut s’écarter du centre ville. Ceci n’a
été possible que par l’amélioration des moyens de transport. En effet on parle ici principalement
de logements puisque le travail se situe en grande partie dans les grandes villes. Dès lors c’est le
développement du transport qui permet d’atteindre ces zones périurbaines. En effet, le choix de
l’habitation d’un ménage se fait selon un choix de localisation de confort et de temps de trajet pour
ses activités (travails, loisirs …). Le développement de l’usage de la voiture et de ses infrastructures
participe donc à l’étalement urbain.

      Dans les années 60, la France investit massivement dans des autoroutes au niveau national et
de façon plus locale dans des rocades pénétrantes dans les villes. Les conditions de voyage s’amé-
liorent et il est désormais possible d’aller plus loin plus rapidement. Ce phénomène est lié aux pro-
grès techniques, des routes, des voitures et aussi à une croissance économique compatible. Cela

                VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 23
1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



a donc pour conséquence une augmentation générale des vitesses et les individus vont se loger
encore plus loin du centre-ville.

      L’étalement urbain semble donc pouvoir s’expliquer par des critères démographiques, socié-
taux et par des avancées technologiques. Alors que ces critère semblent continuer leur évolution
dans le même sens, tentons de nous projeter dans la situation à laquelle nous aboutirons si rien n’est
fait.


     À l’avenir
       Sur le plan démographique, la population française semble continuer de progresser de la même
façon (+0,5% par an environ selon l’INSEE), tout comme l’augmentation du nombre de ménage.
Ainsi Alain Jacquot estime que le nombre moyen de personnes par ménage diminuerait jusqu’à
atteindre 2,0 en 2030. À l’inverse, la surface habitable moyenne par personne devrait continuer de
progresser. En effet, l’inverse traduirait une situation économique désastreuse pour le pays, entrai-
nant une baisse considérable du niveau de vie des ménages. En revanche, l’augmentation des prix
des carburants qui se profile, peut commencer à influencer les choix de logements des ménages. En
effet, le choix d’aller s’installer plus loin pour diminuer les charges foncières sera de moins en moins
pertinent face aux coûts engendrer par les trajets domicile-travail.

     Le bilan français est néanmoins alarmant, les 4,85 millions d’hectares qui étaient artificialisés
en 2009 représentent 9% du territoire en France Métropolitaine. Plus que cela, c’est l’accélération
du phénomène qui est à prendre en compte. En effet, entre 2006 et 2009, l’artificialisation des sols
grignote en moyenne 86 000 hectares par an. « À ce rythme, (…) les espaces agricoles et naturels
perdent 236 hectares par jour, ce qui correspond à la superficie d’un département français moyen
(610 000 hectares) tous les sept ans » (Paul-Michel Morel et René Jean, 2010). Lors de la dernière
décennie, l’artificialisation correspondait à un département tous les dix ans. Très variable selon les
départements elle n’en est que plus critique dans certains d’entre eux (Bas-Rhin, Vendée, Côtes-
d’Armor, Manche) où le gain d’artificialisation dépasse 1%.




      La demande de logement étant importante en France il peut sembler contradictoire de mettre
des limites à la construction. Cependant, la moitié des sols consommés, l’est à destination de
l’habitat. L’artificialisation des sols est un enjeu de tout premier ordre, tant elle est liée à des pro-
blématiques écologiques, environnementales, agricoles, climatiques, alimentaires, économiques et
sociales. Son accélération ces dernières années est inquiétante et n’est pas passée inaperçue. Un
certain nombre de dispositifs ont donc été imaginés afin d’endiguer ce grignotage des terres agri-
coles et naturelles.


24 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET LA
    DENSIFICATION
     Si réglementairement et stratégiquement on peut limiter l’étalement urbain et l’artificialisation
des sols, on ne peut s’en contenter. En effet, la pénurie de logements doit également être traitée et
construire plus de logements sur moins d’espace revient à développer une forme de densification.


     Le cadre législatif
       Les bases de la lutte contre l’étalement urbain ont été posées le 13 décembre 2000 par la loi
relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbain (SRU) (Loi n° 2000-1208). Elle fait suite aux poli-
tiques de lutte contre les disparités sociales et spatiales des années 1980 principalement dans les
grands ensembles. Elle vise à créer une nouvelle manière d’aménager, en travaillant sur des quartiers
existants. Il s’agit alors de rénover le cadre législatif des politiques d’aménagement et propose le
renouvellement de la ville sur elle même comme principe contre l’étalement urbain. Des disposi-
tifs d’incitations fiscales, de création de sociétés d’investissement régionales sont proposés pour
avancer sur les premières pistes en la matière : renouveler les espaces déjà urbanisés afin d’éviter
le déclin de ces zones et de ne pas générer de « fracture urbaine », limiter les développements péri-
phériques et enfin planifier les rapports ville-environnement.

      La loi de programmation pour la ville et la rénovation urbaine viendra compléter la loi SRU le 2
août 2003. Concernant la lutte contre l’artificialisation des sols, elle met en place un dispositif à court
terme contre la pénurie de terrain. Il consiste à rendre indisponible certains terrains pour la construc-
tion de logements. Elle crée également l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) le
9 février 2004. Elle permet principalement d’apporter les financements nécessaires aux projets de
renouvellement urbain dans les quartiers les plus en difficultés.

       La loi Engagement National pour l’Environnement (ENE) du 12 juillet 2010 (Loi n° 2010-788),
dite loi Grenelle 2 est le dernier dispositif législatif mis en place sur la question. Elle affirme le rôle
des outils réglementaires (PLU) et stratégiques (SCOT) de l’urbanisme dans la gestion économe
des sols. En effet ces documents doivent prévoir dès le rapport de présentation une « analyse de la
consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers » (art. L123-1-1 al. 3 du Code de l’urba-
nisme). De plus ils doivent en articulation l’un avec l’autre fixer des objectifs justifiés de consomma-
tion de l’espace. En effet le PADD doit alors fixer des « objectifs de modération de la consommation
d’espace et de lutte contre l’étalement urbain » (art. L123-1_3 du Code de l’urbanisme). Le rapport
de présentation doit alors justifier « des objectifs compris dans le PADD au regard des dynamiques
économiques et démographiques » (art. L123-1-2 al. 4 du Code de l’urbanisme). À noter également
le rôle de l’état déconcentré : le préfet a un droit de regard sur les Plans Locaux d’Urbanisme de
territoire non couvert par un Schéma de Cohérence Territoriale.

      En terme de densification, la loi Grenelle 2 évoque par exemple deux cas précis. L’alinéa 13°bis
de l’article L123-1-5 prévoit « dans des secteurs situés à proximité des transports collectifs existants
ou programmés, imposer dans des secteurs qu’il délimite une densité minimale de construction ».
Ceci est un élément marquant qui contraint une stratégie efficace liant le développement des infras-
tructures de transport avec celle de densification. Or nous avons démontré les influences mutuelles
de ces deux champs.

               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 25
1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



      Le deuxième exemple concerne les Coefficient d’Occupation des sols. La loi prévoit en effet de
pouvoir dépasser ce coefficient dans certaines conditions : « Un dépassement des règles relatives
au gabarit et à la densité d’occupation des sols résultant du plan local d’urbanisme ou du document
d’urbanisme en tenant lieu peut être autorisé, par décision du conseil municipal ou de l’organe déli-
bérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local
d’urbanisme, dans la limite de 30% et dans le respect des autres règles établies par le document,
pour les constructions satisfaisant à des critères de performance énergétique élevée ou alimentées
à partir d’équipements performants de production d’énergie renouvelable ou de récupération ». Mais
ce dépassement ne peut excéder 20 % dans un secteur sauvegardé, dans une zone de protection
du patrimoine architectural, urbain et paysager, dans le périmètre de protection d’un immeuble clas-
sé ou inscrit au titre des monuments historiques, dans un site inscrit ou classé, à l’intérieur du cœur
d’un parc national, ni aux travaux portant sur un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments
historiques ou adossé à un immeuble classé, ou sur un immeuble protégé » (art. L128-1 du Code
de l’urbanisme).

      Ces documents forment donc un cadre législatif et stratégique conséquent et permettant de
mettre en place des dispositifs ambitieux en terme de préservation des zones naturelles et agricoles.
Cependant les objectifs fixés dans ces documents ne sont pas contraignants, c’est à dire que la
commune ou l’EPCI responsable du document n’a pas d’obligation de résultat sur l’exécution de
celui-ci. Sous la pression des promoteurs, des investisseurs et des propriétaires, on peut craindre
que l’ouverture à l’urbanisation perdure. De plus, l’échelle intercommunale semble être la meilleure
solution pour cette dimension stratégique. En effet, développer certains aménagements de qualité
et d’ampleur suffisante peut permettre de préserver certaines zones de l’étalement urbain. Ces
réflexions sont considérées dans le cadre des SCOT et des PLU intercommunaux mais ils ne sont
pas encore généralisés. « Le plan local d’urbanisme est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité
de l’établissement public de coopération intercommunale lorsqu’il est doté de la compétence en
matière de plan local d’urbanisme, en concertation avec les communes membres. (…) Dans les
autres cas, le plan local d’urbanisme est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité de la com-
mune, le cas échéant en concertation avec l’établissement public de coopération intercommunale
à fiscalité propre dont elle est membre » (art. L123-6 du Code de l’urbanisme). L’échelon intercom-
munal est tout de même privilégié puisque le législateur fait du PLU intercommunal le principe et du
PLU communal l’exception.

       Les deux principes majeurs avancés dans ces documents sont donc, la limitation de l’étalement
en renforçant les contraintes d’ouverture à l’urbanisation et le développement d’une certaine forme
de densité permettant à la ville de se développer malgré tout. Si les lois évoquent ces opérations de
densification ou de projets favorisant la densité, elles ne donnent pas de solutions concrètes. Dès
lors, comment crée-t-on de la densité dans un projet urbain ?




26 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
Densité(s), quelques définitions
     La densité est le rapport entre un élément quantifiable (habitant, emploi, mètre carré de plan-
cher etc.) et la surface d’un espace de référence. Elle peut être faible ou forte et plus ou moins bien
perçue selon qu’un équilibre «subtil» s’établit entre ces différents indicateurs : la concentration de
population, l’intensité de l’activité, la densité du bâti, la proportion d’espaces verts publics, etc. En
se complétant, ces indicateurs permettent une appréhension plus globale du concept de densité.

       On distingue alors plusieurs éléments de mesure de la densité :
‐‐     Le Coefficient d’Occupation des Sols (COS), qui est un élément réglementaire traduisant un
« droit à bâtir », c’est le rapport de la surface constructible sur la surface de la parcelle. Ainsi, il ne
traduit pas d’imposition de forme, puisque la surface constructible peut se répartir sur un ou plu-
sieurs étages.
‐‐     La densité bâtie ou réelle, elle considère l’emprise au sol, ainsi que le nombre d’étages. Ainsi
il s’agit du rapport entre le Coefficient d’Emprise au Sol (CES) multiplié par le nombre moyen de
niveaux des constructions sur la surface de l’îlot considéré. En fonction de la finesse des parcelles
considérées, on calcule la densité nette ou brute. La première prend en compte la réelle occupation
des sols tandis que la deuxième compte également les espaces publics (équipements collectifs,
voiries etc.)




‐‐    La densité de population, simple rapport du nombre de logements sur une surface donnée.
Les interprétations de cette densité dépendent de l’échelle choisie (de la ville à l’îlot). Elle s’exprime
alors en habitants par km2 ou en habitants par hectare.
‐‐    Sur le même principe on peut alors décliner des densités d’emplois voir d’activité humaine
(nombre d’habitants + nombre d’emplois)

                                                                                      Source : IAURIF, 2005




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1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



     (Re)sentir la densité
      De façon générale, parler de densité, de densification ou de ville dense fait peur. Dans l’imagi-
naire collectif, la densité est souvent assimilée à des formes urbaines imposantes comme les tours
ou les grands ensembles. En réalité, et comme le montre la figure 13, densité et forme urbaine ne
sont pas liées. On peut obtenir la même densité réelle (c’est à dire en nombre de logements par
hectare) avec une tour qu’avec un tissu de logements individuels.




                 Figure 13 : Modulations morphologiques à densité fixe – Source : IAURIF (2005)


      La figure 14, dont le «  classement  » par densité bâtie ne traduit pas forcément le ressenti
des populations, vient renforcer ce sentiment. En effet, les grands ensembles ont par exemple une
densité bien plus faible (inférieure à 1) qu’un habitat de centre ville ou de centre bourg traditionnel.
Pourtant, les habitants de ces grands ensembles évoquent souvent cette sensation de vivre les uns
sur les autres. Comme l’indique Alexis Roy (DREAL Pays de la Loire, 2012), « les grands ensembles
cristallisent les jugements négatifs liés à la densité (surpopulation, anonymat, précarité, insécurité,
cadre de vie dégradé) alors que l’habitat individuel dense ou l’habitat intermédiaire, qui peuvent
atteindre des niveaux de densité bien supérieurs, sont perçus plus positivement ». La perception de
la densité est donc largement fonction de la qualité des aménagements.


28 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
La façon de faire la densité est donc aussi importante que la densité elle même. Elle doit être
acceptable voire même désirable pour les habitants qui la pratiqueront. Pour cela la densité doit
prendre en compte l’existant et intégrer la densité à un projet plus ambitieux que le simple objectif
de densification.




             Figure 14 : Quelques formes urbaines classées par densité bâtie – Source : IAURIF (2005)



     La qualité de la ville dense, vers la ville intense
       Certains préfèrent alors parler d’intensification. Lille Métropole Communauté Urbaine (LMCU)
mène par exemple sa politique de la ville et ses projets de développement urbain sous des objectifs
de ville intense. Ceux-ci sont détaillés dans une délibération-cadre intitulée faire la Ville intense depuis
2009. La notion de Ville intense y est résumé comme « une ville qui marie la qualité à la compacité ».

       Le principe général est de ne pas voir la densité comme une simple densité bâtie ou de popu-
lation. En mettant en avant un souci de qualité, l’intensité urbaine suggère une densité à niveaux

-	 d’accessibilité, rapprochant une multitude de lieu par des liaisons douces comme par des trans-
multiples au centre d’enjeux divers :



-	 d’équipements et d’aménités (commerces et services, parcs et jardins, équipements sportifs et
ports en commun selon l’échelle



-	 de mixité sociale et fonctionnelle, permettant, via certaines valeurs de partage et de solidarité, de
culturels etc.), répartis intelligemment, notamment en rapport avec l’accessibilité

contribuer à la réduction des inégalités et à la lutte contre les exclusions, de favoriser l’innovation et

-	 de maillage urbain, visant, grâce aux éléments évoqués ci-dessus, à ce que quartiers nouveaux et
l’enrichissement mutuel, enfin elle agit sur la cohésion et l’intégration des populations



-	 des enjeux environnementaux, afin de réduire les dépenses énergétiques et les pollutions, de les
anciens s’alimentent réciproquement dans de bonnes dynamiques

traiter efficacement et de préserver, voire de renforcer la biodiversité grâce à la mutualisation.


                VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 29
1      LA DENSIFICATION,
                PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?


      De façon plus concrète, d’autres éléments participent à l’acceptabilité de la densité. Ainsi, le
design architectural et urbain, la qualité des espaces publics, la présence d’espaces verts ou encore
la mixité des usages sont primordiaux dans l’appréhension de la densité. En effet, dans ce domaine
on peut se risquer à évoquer quelques préconisations de base comme le respect du tissu existant,
de l’échelle humaine, la variation des hauteurs permettant de créer des perspectives ainsi que des
formes, notamment ouvertes permettant la présence d’espaces extérieurs publics ou privatifs géné-
rateurs de mixités… Mais la densification doit surtout se faire avec son environnement. Elle doit être
innovante afin de pouvoir faire du nouveau projet un élément créateur d’interactions avec l’existant
et ainsi de limiter son impact voire d’améliorer la vie du quartier.

      Dès lors, on peut appliquer et développer la densité par des processus de qualité. Cependant
les façons de faire diffèrent selon les territoires. En effet la densification dépend de la typologie du
quartier traité et plus généralement de la densité déjà existante.


      La densification en milieu urbain


-	 Des opérations de renouvellement urbain de qualité qui permettent par leur montage d’inscrire la
      En ville, dans un milieu ayant déjà une certaine densité, elle peut y être développée grâce à :

densité au centre du nouveau projet et de prendre profondément en compte les enjeux déjà évo-
qués.




Figure 15 : Euratechnologie, dans l’ancien château industriel Leblan-Lafonts, au cœur de la ZAC des Rives de la Haute-
Deûle qui regroupera à terme 170 000 m2 de logements, 150 000 m2 d’activités tertiaires de recherche et de formation, 5
                                    000 m2 de commerce et 20 000 m2 d’équipements


30 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
-	 L’utilisation de friches afin de tirer avantage des coupures dont elles sont généralement créatrices.
En effet la conception de nouveaux projets d’aménagements sur d’anciennes friches permet de
développer la ville sur elle même. Ce type de foncier est généralement public, grâce au travail des
Établissements Publics Fonciers (EPF). En revanche ils nécessitent souvent d’être innovant afin de
traiter les problématiques de pollution à des coûts acceptables. LMCU et sa ville intense s’inscrivent
dans cette démarche avec 250 ha de friches traités entre 2001 et 2007, ainsi que 260 autres ha en
projet. Dans le cadre de la métropole lilloise, les friches, importantes et en grands nombres, per-
mettent de faire émerger des projets de grandes envergures tels que la ZAC des Rives de la Haute-
Deûle à Lille-Lomme-Lambersart ou encore la ZAC de l’Union à Tourcoing-Roubaix-Wattrelos.




 Figure 16 : Plan directeur de la ZAC de l’Union qui accueillera à terme plus de 3 000 habitants et autant d’emplois sur


-	 Proche du point précédent, la reconversion de bâtiments non résidentiels (industriels, institution-
                                   une ancienne friche – Source : SEM Ville Renouvelée




-	 Le développement de projet dans les dents creuses aussi appelé développement intercalaire
nels, commerciaux, religieux etc.) permet de créer des logements.

consiste à utiliser les terrains résiduels entre le bâti existant. Ces dispositions n’ont rien d’anec-
dotiques et contribuent souvent à la revitalisation de certains quartiers. La démarche de référentiel
foncier, initialement impulsée par les EPF, permet d’identifier efficacement ces potentialités.

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1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



     La périurbain comme territoire de projet
       De la même façon, la densification ne doit pas être oubliée dans le périurbain ou les milieux
moins denses. En effet, la périurbanisation ne doit pas être considérée comme un territoire pestiféré.
Si l’artificialisation de ces sols est irréversible, autant les exploiter un maximum et les englober dans
la « ville de demain ».

     Ainsi, la périurbanisation pourrait être vu comme un projet et non plus comme un problème,
« passer de la ”lutte contre” aux ”politiques de” » (Stéphane Cordobes, Romain Lajarge et Martin
Vanier, 2010). Il s’agirait alors de mener une politique de la périurbanisation, de la développer, non en
terme d’expansion, mais en terme de qualité. C’est à dire lui donner un sens plutôt que de s’épuiser
à échouer de la contenir. Dans le cadre des études prospectives de la Délégation interministérielle à
l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale (DATAR) intitulées Territoires 2040 les trois
chercheurs de la DATAR et de l’université de Grenoble 1 ont élaboré cinq scenarii de projets pour les
zones périurbaines. Chaque scenario traduit à la fois le fait que l’évolution de chaque zone dépend
de son contexte territorial (il n’y a pas un unique type de périurbanisation en France), et une situation
générale différente allant de contraintes environnementales critiques à des progrès techniques nous
permettant de les dépasser.

      Le premier scenario proclame le triomphe de la densification : « l’urbain compacte l’emporte,
digère le périurbain en le densifiant, et la périurbanisation s’arrête ou devient un phénomène secon-
daire ». Il suggère alors un développement très différent de la ville et de la campagne, alors destiné
à l’agriculture. Les problématiques de la ville telles qu’elles existent sont alors toujours présentes,
voire exacerbées.

       Le second, au contraire, consacre l’espace diffus : « la dispersion généralisée s’impose, grâce
aux solutions techniques rendant les faibles densités soutenables et l’accès au confort spatial dési-
rable ». Il anticipe des solutions techniques et technologiques abordables et permettant la soutenabi-
lité de la mobilité et de l’habitat individuel pour tous. Les problématiques de l’aménageur deviennent
alors principalement de la logique foncière puisque le modèle est individuel et privé au sein de
chaque propriété.

     Le troisième est plus à l’avantage des périphéries : « l’enjeu agrinaturel est central et structure
de nouveaux rapports villes-campagnes, et les espaces intermédiaires, jadis périurbains, deviennent
des conservatoires périruraux ». Dans cette situation, la situation environnementale est telle que les
espaces naturels doivent être impérativement préservés. Les périphéries de part leur proximité avec
ceux-ci en deviennent les remparts et jouissent de leur bienfait. Les projets de développement s’arti-
culent alors autour des espaces périurbains plutôt qu’urbain sans toutefois continuer de s’étendre.

      Le quatrième prévoit une grande collaboration entre les métropoles : « l’interterritorialité orga-
nise l’ancien périurbain, entre les métropoles et entre les territoires, par tous leurs sites et fonc-
tions d’interface ». Les espaces périurbains sont alors considérés comme autant d’interfaces entre
ces métropoles, autant de support au développement de polarités secondaires permettant l’accueil
d’autres fonctions (logistiques, équipements de transport, équipements récréatifs etc.). L’État serait

32 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
donc au centre de ces projets et organiserait la coordination de tous ces projets aux différentes
échelles du territoire.

      Enfin le dernier scenario consacre totalement l’urbain, dans une situation catastrophique : « le
périurbain est réquisitionné pour son intérêt écologique global par les villes qui dominent leur région
et équilibrent ainsi leur empreinte, dans un contexte de très fortes contraintes environnementales ».
La situation écologique est telle que la maîtrise foncière doit être totale et la ville se voit contrainte de
vivre et de se développer sur elle même. L’équilibre ainsi formé serait donc très fragile.

      Le deuxième scenario fait figure d’exception dans ces projections. En effet, il est le seul à
renoncer à l’action publique. Se réfugiant derrière une logique progressiste qui rendrait n’importe
quel aménagement soutenable, il laisse le marché réguler le territoire. Les aspects ségrégatifs mis
en avant dans certains autres scenarii seraient également présents dans une telle situation, de façon
moins concentrée mais peut être plus forte encore. Il constituerait également une fuite en avant
consacrant un modèle artificiellement durable (quel recul sur ces solutions technologiques, ce mo-
dèle est-il applicable sur tout le territoire, applicable par les futurs 13 milliards de terriens ?).

      Excepté le deuxième donc, les scenarii convergent vers la nécessité d’une action publique
volontariste pour concevoir l’aménagement et l’évolution de ces zones périurbaines. En somme, il
s’agit de faire avec la périurbanisation puisqu’elle est là, mais de la réinventer (Martin Vanier propose
même de changer son nom). Si les buts sont différents selon les situations, des nouvelles probléma-

-	 Une certaine « hybridation des aménités ou des biens dont cette position interterritoriale est por-
tiques se dégagent sur ces territoires (Martin Vanier, 2011) :

teuse ». C’est à dire amener une diversité des fonctions, des usages et des types d’utilisations des
sols afin de concevoir un projet collectif pour le territoire. L’idéal de « ville à la campagne » est un bon

-	 Un concept « d’espace public de nature » qui remettrait les dispositifs abstraits de trames vertes
objectif mais les tentatives individuelles n’ont que rarement abouti.

et bleues au cœur de l’urbanité positive. Elle pourrait même jouer le rôle urbanistique structurant des

-	 Une « économie transactionnelle, qui pourrait guider les relations entre centres et périphéries » afin
rues et places de la ville.

d’appréhender ces enjeux collectivement, par complémentarité entre développement et accès aux
ressources.

      Une des idées principales de cette réflexion est de promouvoir des logiques collectives pour
repenser le territoire périurbain et ces territoires de façon collaborative. Si le Partenariat Public Privé
(PPP) est particulièrement mis en avant dans le rapport, d’autres solutions sont expérimentées :
c’est le cas du projet Build In My BackYard (BIMBY) qui prône un urbanisme collaboratif.




                VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 33
1     LA DENSIFICATION,
             PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



     La filière BIMBY




               Figure 17 : L’intensification pavillonnaire selon le projet BIMBY – Source : BIMBY

34 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
BIMBY est un projet de recherche sélectionné en 2009 par l’Agence Nationale de Recherche
(ANR) dans le cadre de son appel à projet « Villes Durables ». Il rassemble dix partenaires publics :
les Communautés d’Agglomération de Rouen et de Saint-Quentin-en-Yvelines, le CAUE de l’Eure,
les Écoles Nationales Supérieures d’Architecture de Paris Belleville, Rouen et Marseille, le LATTS
(ENPC) et le RIVES (ENTPE), ainsi que deux bureaux d’études du Réseau Scientifique et Technique
du MEEDDTL : le CETE Normandie Centre (pilote du projet) et le CETE Ile-de-France (co-pilote).

      Il vise à faire émerger une nouvelle manière de créer la ville en mobilisant le tissu pavillonnaire,
son foncier et ses acteurs. Le projet tend à instaurer une dynamique de petits projets avec les acteurs
de ce milieu et de l’urbain, qu’ils soient habitants, techniciens ou élus. Elaborés spécifiquement, ces
projets sont adaptés à chaque situation et sont également compatibles avec l’intérêt général, c’est-
à-dire avec des objectifs de renouvellement urbain, de densification et de mixité sociale et fonction-
nelle. Dans cette optique le projet BIMBY préconise d’encourager, de maîtriser et de canaliser ces
projets grâce à des règles d’urbanisme pertinentes et de mettre en place un dispositif de conseil
pour chacun de ces projets.

      BIMBY serait alors une réponse aux problématiques de la ville durable. Économiquement, les
projets élaborés sur du foncier maitrisé sont donc particulièrement viables. La production d’une
quantité de logements intéressante (selon des études statistiques et prospectives sur le tissu pa-
villonnaire français, la filière BIMBY pourrait créer 150 000 terrains à bâtir supplémentaires par année)
sans étalement urbain et donc sans engendrer de pression foncière est un atout d’un point de vue
environnemental. Et enfin les projets portés l’étant pour beaucoup par les habitants sont alors autant
d’entrées permettant de créer des synergies dans un quartier.

      BIMBY se base donc sur les potentiels projets des habitants. L’équipe a donc entrepris de
tester sa démarche directement auprès de ceux-ci en les rencontrant. À travers deux expérimenta-
tions, ils ont cessé de discuter entre techniciens et élus de ce que les habitants souhaiteraient ou ne
souhaiteraient pas et sont allés massivement à leur rencontre.

        Au Tremblay-sur-Mauldre puis aux Essarts- le-Roi dans les Yvelines, chaque habitant le sou-
haitant a
 été ainsi invité à être reçu par un « architecte – médiateur » afin de discuter de ses envies
et projets et, pour les propriétaires d’une maison, des avenirs possibles de leur propre parcelle. La
filière BIMBY entendait prouver son potentiel en se donnant les moyens d’une réelle discussion de
qualité avec les habitants, c’est à dire en prenant une heure par ménage avec comme support une
maquette 3D élaborée en temps réel.

      Nombreux sont les habitants qui ont des idées, des projets et qui pourraient libérer des terrains
à bâtir si l’on décidait de faire l’urbanisme avec eux. Sur 140 ménages à avoir fait le déplacement, 6
sur 10 sont repartis de ces entretiens en ayant fait dessiner aux architectes un, voire deux logements
supplémentaires sur leur terrain. Cette expérimentation tend à montrer que dans chaque commune
de France, les jardins des propriétaires de maison constituent un gisement foncier qui pourrait ali-
menter une part significative des besoins en logements dans les années à venir.

      Les équipes BIMBY identifient ce phénomène potentiel comme une « filière libre » de la produc-
tion de logement. Cette filière vient en opposition « des filières organisées de l’individuel groupé et du
               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 35
1      LA DENSIFICATION,
               PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



lotissement ». Celles-ci interviennent à des échelles bien trop importantes pour pouvoir opérer dans
les micro-espaces disponibles au sein des quartiers pavillonnaires existants. Cette «  filière libre  »
opère à un niveau de granularité extrêmement fin : elle mobilise des acteurs locaux tant du côté maî-
trise d’ouvrage (particuliers) que du côté maîtrise d’œuvre (entreprises locales). De cette façon, elle
est la plus susceptible de mener efficacement une action au sein de tissus déjà habités et disposant
d’une multitude de micro-espaces potentiellement densifiables.

       Les pouvoirs publics doivent donc se saisir du développement de cette filière pouvant offrir
une nouvelle entrée sur les politiques d’aménagement du territoire, de politique foncière, de lutte
contre l’étalement urbain, de logements abordables, de maintien des personnes âgées à domicile,
de dépendance, de réhabilitation thermique du bâti, de la redynamisation des économies locales de
la construction etc. Ils doivent également être capable de la contrôler afin que les conditions de ce
développement croisent les intérêts du territoire. Ainsi trois aspects doivent être dégagés et pris en

-	 « un axe générateur » visant à impulser ce phénomène au niveau de tous les acteurs, habitants,
compte :



-	 « un axe régulateur » qui consiste notamment à modifier ou mettre en place les documents d’urba-
entreprises, élus, techniciens

nisme afin qu’ils permettent les aspirations des habitants mais qu’ils ne compromettent pas l’équi-

-	 « un axe systémique » permettant de ne pas laisser totalement la place à cette filière individuelle
libre et le développement du reste du territoire

mais qu’elle puisse par un jeu de coordination, faire émerger des projets de plus grandes ampleurs
lorsqu’ils sont valables.




  Figure 18 : La démarche BIMBY et ses interactions avec la révision des documents d’urbanisme – Source : BIMBY




36 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
La lutte contre l’étalement urbain se divise donc en deux champs. D’abord la limitation de la
consommation de l’espace par des cadres législatifs nationaux et diverses préconisations locales
visant à restreindre l’artificialisation des sols. Cependant ces mesures ne sont pas encore suffisantes
face aux pressions du marché donnant une valeur considérable au foncier et permettant le dévelop-
pement « facile » de certains territoires (parfois dépourvus d’autres opportunités).

      Dès lors, il faut de donner les moyens de créer de la densité, dans tous les milieux. De la den-
sité de qualité permettant d’atteindre des objectifs de logements au sein de projets beaucoup plus
vastes et transversaux. Ces considérations sont la condition de l’acceptabilité de la densité et sont
incontournables.

      Cette densité de qualité s’applique soit par l’intermédiaire de grands projets, de rénovations
urbaines, d’utilisation friches ou même dans un tissu d’origine moins dense (périurbain), soit par de
petites touches en remplissant de véritables dents creuses ou des dents creuses créées par division
parcellaire.

     Finalement, densifier consiste avant tout à innover afin de créer le contexte le plus adéquat aux
exigences d’un habitat et d’une urbanité-ruralité durable.




               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 37
1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?
C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE

      Nous avons vu que la prise en compte de l’artificialisation des sols et de la consommation de
l’espace est un enjeu mis en avant dans les politiques nationales, qu’elle est traduite législativement
et donc intégrée aux problématiques de stratégie territoriale. Ainsi les territoires se dotent de docu-
ments stratégiques d’aménagement du territoire visant la mise en place de politiques de préserva-
tion des espaces agricoles et naturels et fixant des objectifs stricts d’étalement urbain. Cependant
ces dispositifs ne sont pour la plupart que des préconisations et ne peuvent se traduire par des
sanctions.

       Dès lors, sous la pression des propriétaires, promoteurs et parfois face à cette seule opportu-
nité de développement, les acteurs publics locaux continuent d’autoriser l’urbanisation de certains
terrains. Excepté pour quelques dispositifs spécifiques ayant pris des engagements plus importants
comme certains Parcs Naturels Régionaux (PNR), le phénomène devrait continuer même s’il se
ralentit. C’est pourquoi, comme nous l’avons évoqué précédemment, certaines études prospectives
préfèrent faire du territoire périurbain un territoire de projet. De plus le développement de la densité
prend encore plus de sens, étant à la fois un moyen de moins s’étaler, mais également de rentabi-
liser les opérations foncières. En effet, densifier revient à augmenter les surfaces construites sur un
terrain, et donc les surfaces commercialisables.

      Si les villes anciennes figurent parmi les villes les plus denses, la pratique de la densité dans de
nouveaux projets n’est pas si récente. Il est donc assez difficile d’avoir un recul et des expériences
sur les bénéfices de ces densités.


     Une densité plus raisonnée en période de crise ?
      Une réflexion menée par le site eco-quartier.fr incite à orienter les réflexions sur la densité des
nouveaux quartiers en France vers des niveaux d’exigences plus bas. En effet les très grandes den-
sités développées dans les éco-quartiers français suggèrent des équipements publics de très hauts
niveaux et donc très coûteux. L’exemple des transports en commun, à la fois condition et argument
du développement de la densité, est cité. En effet, pour ces très grandes densités (de l’ordre de
100 logements par hectare) des lignes de métro ou de tramway sont mises en place. Or elles sont
extrêmement coûteuses, parfois tellement que les collectivités peineraient à investir dans de tels
projets dans le contexte économique actuel. L’hypothèse évoquée pour pallier ce problème serait
une densité moindre de ces quartiers, à l’image de certains éco-quartiers allemands, dont le fameux
quartier Vauban de Freiburg.

      Ainsi, avec une densité légèrement moins importante, les quartiers nouvellement créés pour-
raient se satisfaire d’équipements moins coûteux comme des Bus ou Trolleys à Hauts Niveaux de
Services (HNS). Alors qu’une ligne de métro peut être évaluée entre 30 et 80 millions d’euros par
kilomètre, une ligne de tramway entre 10 et 20, une ligne de bus ou trolleybus HNS ne coûterait
qu’entre 6 et 10 millions d’euros par kilomètre.

     Ce raisonnement s’appuie donc sur ces considérations économiques d’investissements pour
préconiser des densités plus faibles et de vanter dans ce cas, une plus grande place laissée aux

38 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
espaces verts et publics et en fin de compte une meilleure qualité de vie. Si les arguments écono-
miques sont contestables (au point d’être révélés par l’auteur lui même, Thomas Berthet : « une
économie réalisée ici ne se traduit-elle pas par une autre dépense ailleurs », d’autant plus lorsque
l’on considère un quartier dense dont chaque équipement revient moins cher du fait du nombre de
personne qu’il touche par phénomène de mutualisation), ils ont cependant le mérite de soulever le
cœur des problématiques liées à la densité : la qualité de vie qu’elle génère.


     La pratique au cœur de l’acceptabilité
      Cet article est symptomatique de la peur suscitée par la densité sur les habitants. En effet,
abordé le thème d’une densité moins importante a immédiatement conduit l’auteur à imaginer un
quartier plus agréable à vivre et plus vert. Comme le soulignait l’Observatoire de la Ville suite à une
étude de janvier 2007 « 65% des français pensent que la densité est quelque chose de négatif ».
Sans revenir sur les façons de mesurer la densité et le fait que ce que l’on croit les plus denses ne le
sont pas en réalité, la qualité de vie est souvent associée à tord à la densité. En effet, les nouveaux
quartiers sont rarement aussi denses que les centres-villes dont le cadre de vie est habituellement
apprécié.

      L’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) a essayé de déterminer si la densité posait problème
en soit lors d’une étude en 2003. 227 personnes originaires de quatre quartiers parisiens de den-
sités objectivement différentes ont ainsi été interrogées. Les résultats démontrent que la hauteur
objective des bâtiments est un critère déterminant de la perception de la densité : plus les habitants
vivent dans des bâtiments hauts, plus ils trouvent celle-ci oppressante et qu’un trop grand nombre
de constructions sont présentes dans le quartier. À l’inverse, le tissu resserré et homogène des
quartiers les plus anciens procurent un sentiment d’intimité et de bien être. Les petits immeubles
considérés comme éléments à « taille humaine » sont réputés pour participer aux échanges entre les
habitants. La convivialité et l’animation d’un quartier semblent donc être déterminantes quant à la
perception positive de la densité. La diversité de la population, des activités et des espaces pouvant
accueillir des animations est donc primordiale pour l’acceptabilité de la densité.

     Il ressort également de cette étude que les quartiers dans lesquels la densité est la plus facile-
ment acceptée sont les quartiers les plus anciens. Ce sont non seulement ceux qui sont construits
depuis le plus longtemps mais également ceux qui ont subi le plus de modification. Ainsi cela sug-
gère un certain nombre d’ajustements, que la densité ne c’est pas faite en un seul projet. Et c’est
bien évident, mais nous avons tendance à l’oublier au moment de faire sortir des (éco)-quartiers
denses ex-nihilo en une seule opération.

       Les aménagements du projet Lyon Confluence vont à l’opposé de cela. En effet, Michel Des-
vignes a proposé un plan d’aménagement dans le temps qu’il appelle processus de transformation.
Cela permet ainsi d’avoir une « nature intermédiaire » au fil des étapes, et de la densification du pro-
jet. Cela permet aux habitants de s’approprier l’espace et à l’inverse que celui-ci puisse muter en
fonction des attentes et usages. Ainsi les espaces extérieurs sont beaucoup plus en lien avec l’habi-
tat, et correspondent mieux aux espaces d’échanges et de vie pouvant faire de la densité un atout.

               VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 39
1     LA DENSIFICATION,
              PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?



Bien sûr le processus est ici très accéléré, mais permet d’apporter une dimension supplémentaire
à l’appréhension de la densité. Des aménagements similaires ont été proposés pour les aménage-
ments de la ZAC de l’Union mais sur un temps plus long cette fois (le projet est censé s’étaler sur
15 ans).

       Nous n’étudierons donc pas en détail les aménagements de différents quartiers exemplaires en
matière de densité, et ayant reçus ou non un bon accueil. On peut en effet, trouver des encenseurs
et des détracteurs pour chacun de ces projets. Cela traduit avant tout qu’il existe autant de façon de
faire la densité que de formes urbaines, voire plus. Nous pouvons alors explorer et exploiter toutes
ces possibilités afin d’appliquer la densité et les qualités qu’elle peut procurer. La multiplicité de ces
aspects permet également de favoriser la diversité sociale, fonctionnelle et d’attente afin de satisfaire
harmonieusement le maximum de ménages.


     Des perspectives BIMBY
      La filière BIMBY est très récente en France et n’a que deux expérimentations à son actif. De
plus ces premières expériences n’ont pas encore abouti totalement, notamment sur l’aspect régle-
mentaire de la rénovation du PLU des villes tests. Cependant la promesse d’une opportunité de
développement importante et d’un moyen de densifier le périurbain efficacement, et à moindre coût
semblent correspondre aux préoccupations actuelles.

      En effet la démarche BIMBY se base sur le gisement de la maison individuelle en France. Or
celui-ci est considérable, il regroupe 19 millions de maisons individuelles. La taille moyenne de leur
parcelle est de 1 000 m2, plus de la moitié font plus de 600 m2 et la taille médiane des parcelles
construites après 1975 pour la maison individuelle est de 700 m2. De plus, 220 000 maisons indivi-
duelles sont construites tous les ans en France, ce qui représente le tiers des logements produits en
France chaque année, mais consomme 97% de l’espace qui lui est alloué.

     L’équipe BIMBY a pour objectif que 1% de ce parc suive la méthode de division parcellaire
chaque année. Ainsi près de 190 000 nouveaux logements verraient le jour chaque année en France.
Ce chiffre correspond presque à la production annuelle de logements en ce moment et laisse donc
de bons espoirs.




40 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ?
       Les études s’accordent toutes sur une augmentation de la consommation d’espace. Ces
dernières années, nos besoins d’espaces ont beaucoup augmenté, de par nos modes de vie,
nos habitudes et par conséquent par notre choix de société. Cette évolution ne pourra pas
continuer ainsi très longtemps. En effet, nous entamons un capital foncier non renouvelable et
de plus en plus nécessaire pour ses fonctions environnementales et nourricières. Il convient alors
de préserver nos ressources en espaces naturels et agricoles. Pour cela, il faut non seulement
limiter les extensions sur ceux-ci, mais également avoir une logique de projet afin de densifier
intelligemment les espaces déjà artificialisés. C’est à dire redéployer la ville sur elle même par
l’aménagement de friches et de toutes autres opportunités, mais également densifier les espaces
périurbains autour de logiques de projets, si possible portés par les habitants afin de rendre plus
vivables ces espaces.

      En plus de cet aspect environnemental et d’orientation vers une société durable, la densité,
même si elle rebute encore de nos jours, est aussi le cheval de Troie de l’urbanité. En effet pour
qu’elle soit efficace, la densité exige une grande qualité de projet, et suscite par ces résultats ce
que l’on attend de tout projet urbain : une mixité à tous points de vue favorisant échanges et vie
de quartier.

       C’est ainsi que Jane Jacobs (cité par l’APUR, 2003) concluait sur la densité  : « … on
peut parfaitement considérer comme un bien absolu le fait de rassembler des masses de gens
dans une ville raisonnablement dense, si on croit que ces gens sont les bienvenus parce qu’ils
apportent une gigantesque vitalité et parce que, sur un espace limité, ils constituent un trésor de
différences et de possibilités ; beaucoup de ces différences sont d’ailleurs extraordinaires et inat-
tendues, ce qui fait leur prix. Si on se range à cette opinion, on ne devrait pas simplement consi-
dérer la présence de cette vaste concentration de population urbaine comme un enjeu purement
matériel. On devrait également considérer cette présence comme un bienfait et s’en réjouir. Et
cela en densifiant encore davantage la population là où cela est nécessaire pour renforcer la vie
de la cité, et ensuite, en cherchant à instaurer une vie sociale manifestement animée dans la rue,
et à susciter et encourager le maximum de diversité dans l’économie et le décor de la ville ».

                                               Les problématiques de densification que nous venons d’évo-
                                              quer sont donc d’une importance capitale et ont un caractère
                                                   universel. C’est donc le cas sur le territoire de la CALL et
                                                de l’ex-Bassin Minier du Nord-Pas de Calais en général. Ce
                                             contexte a cependant des particularités et impose ses propres
                                                  enjeux à la densité. Intéressons nous donc à ce territoire;




             VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 41
42 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
2    L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER,
     QUELLES PERSPECTIVES ?
     A | HISTORIQUE MINIER
     B | TYPOLOGIES DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER
     C | ÉVOLUTIONS, PERSPECTIVES ET LEVIERS
     D | LA DENSITÉ COMME NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT
         INDUSTRIEL MINIER




    VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 43
2      L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER,
            QUELLES PERSPECTIVES ?
A | HISTORIQUE MINIER

     L’activité minière
       Les premières exploitations de charbon dans le nord de la France datent de la fin du XVIIIe siècle
dans le Valenciennois en raison d’une pénurie de bois qui accélère les recherches de gisements.
L’économie du Nord-Pas-de-Calais repose, à l’époque, sur l’agriculture et plus particulièrement sur
la culture du blé, de la pomme de terre et de la betterave à sucre en raison des approvisionnements
incertains en provenance des Antilles. La région est donc avant tout rurale malgré la métallurgie de
Valenciennes et le textile implanté à Calais, Béthune, Lille, Boulogne, Marquise, dans la Sambre et
l’Avesnois. La découverte du charbon est tardive par rapport au bassin minier de Mons et Charleroi
en raison de sa profondeur. En effet les techniques de repérage et d’extraction sont encore hési-
tantes. En outre, l’exploitation minière se heurte à la Révolution et aux réflexions sur la notion de
propriété puisqu’elle menace les compagnies minières concessionnaires. En résulte une disette de
charbon à l’hiver 1793-94. La naissance de l’industrie charbonnière dans un milieu essentiellement
rural, a bouleversé radicalement l’organisation des campagnes. Concomitante avec l’intensification
et la mécanisation de la production agricole, elle favorise l’exode rural à cause du besoin de main
d’œuvre des compagnies minières. De facto, le paysage s’en trouve profondément changé. Avec le
développement urbain, les bourgs ruraux deviennent des villes ouvrières champignons, les réseaux
routiers et ferroviaires se densifient, les compagnies s’approprient les terres cultivables (Gilbert Noël,
2007).

       C’est au XIXe siècle que le Bassin Minier connait une forte période de développement. Un dy-
namisme démographique, une immigration importante, la reprise du développement du chemin de
fer et l’évolution des techniques de recherche déclenchent des périodes de « fièvre des houillères »
et l’essor de la métallurgie. Durant la décennie 1890, l’intervention de grands groupes métallurgiques
marque un tournant dans l’exploitation et dans la recherche qui devient méthodique. Après 1870, le
Pas de Calais fournit deux millions de tonnes de charbon par an et emploient 12 000 personnes. En
1913, la moitié de la production de France provient de la région. Le réinvestissement de la moitié des
revenus a permis une modernisation continue de l’exploitation. Cependant, la production française
a des difficultés à faire face à la concurrence de la Ruhr, de la Grande-Bretagne et de la Belgique.

      Durant les deux guerres mondiales, le Bassin Minier participe fortement à l’effort de guerre et
doit subir l’occupation allemande en fournissant de la main d’œuvre et du charbon. C’est un véri-
table enjeu stratégique pour les deux camps. C’est pourquoi, au sortir des deux guerres, la destruc-
tion des infrastructures industrielles est importante. Cette destruction fournit néanmoins l’occasion
de moderniser davantage l’exploitation. Priorité politique, le redémarrage rapide de l’extraction afin
de ne pas dépendre des importations et ainsi de faire de la région un acteur majeur de la reconstruc-
tion. À cette occasion les houillères sont nationalisées en Décembre 1944. La région prend aussi de
l’importance dans la construction européenne amorcée par la Communauté Européenne du Char-
bon et de l’Acier (CECA), basée sur les échanges de charbon et d’acier.

      Toutefois, le développement de nouvelles énergies et la crise financière des années 1970 pré-
cipitent la fin du bassin qui reposait essentiellement sur une économie mono-industrielle. L’erreur de
stratégie de développement industriel pour le Bassin Minier a été de se reposer uniquement sur le

44 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
charbon et de ne pas s’orienter vers les activités de la seconde révolution industrielle : la chimie fine,
la pharmacie, la mécanique de précision ou encore l’automobile (Éric Bussière, 2002). Le niveau de
production et le nombre de mineurs ne font que baisser jusqu’au 21 Décembre 1990, jour où on a
remonté au site 9-9 bis de Oignies, pour la dernière fois du charbon.




 Figure 19 : L’histoire du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais – Source : Bassin Minier Uni, Dossier de presse, 2012.


                VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 45
2      L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER,
            QUELLES PERSPECTIVES ?



      Par conséquent, les mines ont fortement marqué le paysage socio-culturel de la région. Mal-
gré son caractère rural au XVIIIe siècle, l’identité de la région repose de plus en plus sur un paysage
industriel bien particulier. Outre les terrils, les carreaux de fosse et les corons comme autant de
symboles, le corporatisme, les valeurs et la lutte ouvrière constituent l’identité minière. De même,
les associations (fanfares, clubs sportifs), le mouvement hygiéniste (complexe sportif art déco de
Bruay-La-Buissière) sont le fruit du paternalisme anonyme des concessions minières (Philippe Hur-
taux, Alexandre Mikolajczak, Stéphane Mouraret, Gauthier Ternisien, 2010.) auquel nous allons nous
intéresser à travers l’étude de l’urbanisme et de l’habitat minier.


     Le mode d’urbanisme minier
      Comme nous l’avons évoqué, l’urbanisme minier s’est développé sur un territoire dont la voca-
tion était à l’époque essentiellement agricole. Ce vaste territoire, encore dépourvu d’infrastructure
lourde, était uniquement parsemé de quelques cités historiques comme Douai, Valenciennes ou Bé-
thune. L’influence de ces dernières n’étant pas suffisante à l’époque, c’est donc par un système de
concessions minières accordées par l’État que le territoire a été façonné. « Les compagnies, privées
et autonomes, décidaient donc seules des choix d’aménagement à l’intérieur de la concession. Les
pouvoirs locaux n’avaient aucun droit de regard sur le développement urbain de leur commune. »
(Mission Bassin Minier, 2008)

       Ces concessions ont connu différentes organisations, il y en avait 43 avant 1914 reparties
entre 18 compagnies minières. L’activité augmentant il y en a eu jusque 27 différentes en 1925 avant
d’être nationalisées à la sortie de la seconde guerre mondiale (en 1946) dans une nouvelle struc-
ture : les Houllières du Bassin Nord-Pas de Calais (HBNPC). Elles comprendront d’abord 9 groupes
miniers, puis avec le recul progressif de l’activité n’en comptera plus que 5 à la fin des années 70.

       C’est donc en centrant l’urbanisme sur la production que les compagnies minières ont imaginé
leur implantation. Tous les sites sont donc structurés de la même façon selon une base constituée

-	 une fosse pouvant comprendre plusieurs puits et chevalements, lieu d’accès et d’extraction du
d’ :



-	 un ou des terrils afin de stocker les résidus d’extraction non-exploitables
charbon

-	 de cavaliers, voies ferrées permettant le transport du charbon et du matériel entre les différents

-	 une ou des cités minières afin de loger l’ensemble des salariés, ouvriers comme responsables ou
sites

ingénieurs




46 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
Figure 20����������������������������������������������������������������������������������������������������������������
        ������������������������������������������������������������������������������������������������������������������
           : La structure minière Terril-Fosse-Cité Minière, site du 9/9bis et la Cité Declercq à Oignies – Source : Alti-
                                               mage P. Frutier pour MBM


      Ces structures ont donc émergé partout sur le territoire sans autre logique que celle de l’impor-
tance et de la découverte des gisements. Même si l’ex-bassin minier du Nord-Pas de Calais est
maintenant identifié comme une entité morphologique, ce mode de développement accumulatif et
aléatoire n’a pas aidé à la lecture de celui-ci. En effet, sans concertation entre les compagnies, cer-
taines installations se situent sur plusieurs communes et laissent parfois des espaces vides.

       Une étude a d’ailleurs été menée sur l’évolution de villages ruraux dans le bassin minier. Elle
cite entre autres, les exemples du village de Lozinghem et de Maisnil-les-Ruitz (voir figures 21 et 22).
Le village de Lozinghem a conservé son aspect traditionnel même s’il est devenu un village binu-
cléaire par la projection à l’extérieur du village de la cité minière. Le tissu urbain de Maisnil-les-Ruitz
a été plus profondément restructuré par l’activité charbonnière (Gilbert Noël, 2007).

        Le charbon et particulièrement son point d’extraction devient le cœur de la forme urbaine, soit
dans une nouvelle entité ex-nihilo attachée presque artificiellement à l’ancienne, soit en modifiant un
profondeur le village. Dans les deux cas, les extensions liées à l’activité minière ont profondément
changé la morphologie des villages et témoignent de cette organisation aléatoire livrée à la produc-
tivité.



                 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 47
2      L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER,
            QUELLES PERSPECTIVES ?




Figure 21 : Organisation spatiale de la commune de Lozinghem (Source : NOËL G., Étude patrimoniale des communes
                              de la Communauté d’Agglomération de l’Artois.com, 2007)




        Figure 22 : photographie aérienne de la commune de Maisnil-les-Ruitz (Source : Google Earth 2007)


48 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
Vers une nouvelle étape de l'habitat industriel minier, la densification ?
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Vers une nouvelle étape de l'habitat industriel minier, la densification ?

  • 1. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? Mémoire de stage - Avril / Septembre 2012 Université de Lille 1 MASTER de Sciences et Technologies, mention Aménagement, Urbanisme et Développement des Territoires Spécialité : Ville & Projets - Option : Projet Urbain Tuteur Professionnel : M. Bruno Galus Tuteur Universitaire : M. Richard Lemeiter Étudiant : Philippe Hurtaux
  • 2.
  • 3. REMERCIEMENTS En préambule à ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus sincères à l’en- semble des services de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin, notamment la Direction de l’Aménagement du Territoire, pour leur accueil bienveillant et leurs conseils avisés. J’associe également les personnes m’ayant apporté leur aide et ayant contribué à l’élaboration de ce mémoire. Je tiens à remercier sincèrement Monsieur Richard Lemeiter, tuteur universitaire, qui s’est montré à l’écoute et disponible tout au long de la réalisation de ce mémoire. Son aide a ainsi été déterminante pour guider et struturer mes travaux. Mes remerciements s’adressent également à Monsieur Bruno Galus, Directeur Général Adjoint de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin chargé de l’Aménagement du Territoire, pour son écoute et son encadrement dans les tâches qu’il a pu me confier. Je remercie également les collaborateurs rencontrés tout au long de l’élaboration du cahier des charges des Cités Durables du Louvre : Monsieur Raphaël Alessandri (Mission Bassin Minier), Madame Isabelle Colnenne (Conseil Régional), Monsieur Frédéric Delacroix (Ville de Lens), Monsieur Guillaume Hebert (Une Fabrique de la Ville), Monsieur Gilles Pette (Conseil Régional), Madame Élisabeth Vernageau (Ville de Lens). Ils ont bien voulu répondre patiemment et aimablement à mes nombreuses questions J’exprime ma gratitude à toutes les institutions et personnes rencontrées à titre professionnel et ayant pu me faire part de leur vision du territoire et de ses spécificités : Maisons & Cités, notamment Messieurs Hervé Walczak et Régis Jamey, la Chaine des Terrils, le CERDD et le Parc Naturel Régional Scarpe-Escault, notamment Agnès Lavergne. Une pensée particulière est adressée aux membres du service Développement Économique que j’ai côtoyés quotidiennement et dont j’ai aprécié la gentillesse et la bonne humeur. Merci à tous et à toutes. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 3
  • 4. SOMMAIRE VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INTRODUCTION08 1 | LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? 17 A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN 18 L’étalement urbain (statistiques) 18 Quelques raisons 21 À l’avenir 24 B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET LA DENSIFICATION25 Le cadre législatif 25 Densité(s), quelques définitions 27 (Re)sentir la densité 28 La qualité de la ville dense, vers la ville intense 29 La densification en milieu urbain 30 La périurbain comme territoire de projet 32 La filière BIMBY 34 Une densité plus raisonnée en période de crise ? 38 C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE 38 La pratique au cœur de l’acceptabilité 39 Des perspectives BIMBY 40 4 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 5. INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? 2 | L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ? 43 A | HISTORIQUE MINIER 44 L’activité minière 44 Le mode d’urbanisme minier 46 B | TYPOLOGIES DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER 52 Les corons (1825 – 1890) 52 Les cités pavillonnaires (1867 – 1939) 54 Les cités-jardin (1904 – 1939) 56 Les cités modernes (1946 – 1970) 58 Des premières constructions à la mutualisation d’un parc d’habitat minier 60 Maisons Cités (SOGINORPA – EPINORPA) 60 La Société Immobilière de l’Artois (SIA) 62 C | ÉVOLUTIONS, PERSPECTIVES ET LEVIERS 63 Les ayants droits 63 L’inscription du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais sur la liste du patrimoine mon- dial de l’UNESCO 63 Les Cités Durables du Louvre 65 D | LA DENSITÉ COMME NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT MINIER 67 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 5
  • 6. SOMMAIRE 3 | LA DENSIFICATION SUR LE TERRITOIRE DE LA CALL 75 A | DISPOSITIFS STRATÉGIQUES 76 B | LES CITÉ DURABLES DU LOUVRE 78 Périmètre de réflexion 79 La Cité des Provinces 82 La Cité du 12-14 84 La Cité du 9 85 La Cité Jeanne d’Arc 87 La Cité du 4 89 Protéger, valoriser et faire evoluer l’habitat minier avec ses habitants 91 Vers un habitat plus respectueux de l’environnement 92 Créer des liens entre les cités et le louvre 93 C | LA DÉMARCHE BIMBY 94 CONCLUSION95 6 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 7. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 7
  • 8. INTRODUCTION Quelque soit l’échelle, une certaine optimisation de l’espace est toujours recherchée ; que vous fermiez votre valise à l’heure de partir en vacances, qu’un transporteur charge ses containers ou qu’un aménageur finalise son projet. Il s’agit donc d’une notion que nous appréhendons tous d’une manière ou d’une autre. En terme d’aménagement, bien que fini, l’espace offre plus de liber- tés et semble parfois moins limité. Il a cependant un coût économique et sociétal. La considérable augmentation du premier depuis des années en démontre la rareté. Sur le plan sociétal, les aména- gements de terrains de plus en plus éloignés des villes impliquent des mouvements pendulaires de plus en plus importants et consomment de plus en plus d’espaces agricoles ou naturels pourtant indispensables à l’équilibre de nos sociétés. Selon l’outil européen d’observation de l’état de l’occupation des sols et de son évolution dans le temps (Service de l’Observation et des Statistique (SOeS), CORINE Land Cover (CLC), 2006), entre 2000 et 2006, l’artificialisation des sols a augmenté de 3% en France métropolitaine. Ces statistiques peuvent être expliquées par l’augmentation de la population durant le dernier siècle conjuguée à la diminution de la taille des foyers et à la grande augmentation de la part de logements individuels amenant ainsi à un étalement de l’urbanisation. Devant l’importance de ce phénomène, l’état a entrepris des initiatives afin de prendre en compte les problématiques foncières. Si le sujet est d’actualité, la prise de conscience a plus de trente ans avec les premières mises en garde contre le mitage, puis les premières mesures en 2000 à travers la loi Solidarité Renouvellement Urbain (SRU). Dernièrement, le Grenelle de l’environnement et les lois portant Engagement National pour l’Environnement du 12 juillet 2010, dite loi Grenelle 2, et de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 13 juillet 2010 ont fixé comme un des objectifs de « développer un urbanisme économe en ressources foncières et énergétiques ». Conjuguer ces problématiques avec celles du manque de logements en France suggère de devoir développer plus d’habitations et d’équipements sur moins d’espace, donc de densifier les aménagements. Cette logique permet également à la puissance publique de limiter de nouveaux investissements en rentabilisant davantage ceux existants. C’est en effet le cas de tous les réseaux, voiries, assainissements etc. ; ceux-ci ont été construits avec des coûts importants mais ne des- servent que peu de citoyens. La densification serait alors le moyen de « rentabiliser » ces investisse- ments, en augmentant le nombre de personnes en bénéficiant. Dans certains cas, elle permettrait même aux équipements de ne pas mettre en cause leur maintien. Par exemple les équipements tels que les écoles sont parfois amenés à décliner voir à fermer dans les milieux peu denses où l’activité est trop onéreuse et les habitants amenés à les chercher plus loin. Rationnellement, la densité se définit comme le rapport d’une quantité sur une unité de sur- face. En terme de densité de population, on peut par exemple prendre en compte le nombre de logements, le nombre d’habitants ou encore la Surface Hors Œuvre Net (SHON). Selon l’échelle spatiale la densité est également calculée sur un kilomètre carré ou sur un hectare. Plus finement, sur la parcelle le Coefficient d’Occupation des Sols (COS) peut également traduire une densité par le rapport entre la surface construite et la surface constructible. Il existe donc une multitude de façons de mesurer la densité. La notion se complexifie encore lorsque l’on parle du ressenti. En effet, 8 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 9. l’impression générale est souvent trompeuse dans ce domaine et l’imaginaire collectif ne correspond souvent pas à la réalité de densité. Ces critères dépendent également de l’époque de construction et de la qualité des aménagements liés. Ainsi les corons constituaient un habitat assez dense pour l’époque de leurs constructions. En effet l’habitat industriel minier était conçu par les industriels de la mine pour que leurs ouvriers soient le plus proche possible de la fosse. Cet aspect avec des préoccupations de rationalisation des constructions a donc amené cet habitat atypique. Il a ainsi évolué avec son industrie, tout au long de l’aventure charbonnière. Ce fut notamment le cas dans le Nord-Pas de Calais depuis les premiers corons construits au début du XIXème siècle jusqu’à la fin de l’exploitation en 1990. Cet habitat est au cœur de la toute récente inscription du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. En effet ce sont 124 cités minières qui intègrent ce « paysage culturel évolutif vivant ». Ce parc, parfois en très mauvais état doit donc pouvoir être réha- bilité avec soin afin de permettre la préservation de ces qualités et des valeurs qu’il véhicule tout en le repositionnant dans son époque actuel. Ainsi les enjeux environnementaux, sociaux et économiques du développement durable doivent être pris en compte dans ces réhabilitations. La rénovation ther- mique est par exemple primordiale. Qu’en est-il des questions de densité ? Le concept peut faire peur mais est abordé dans le Schéma Directeur Euralens prévoyant les diverses opérations d’amé- nagements pour l’arrivée du Louvre-Lens. Dès lors, que peut apporter la densification à l’habitat industriel minier ? Pour répondre à cette question, nous étudierons donc les mécanismes de la densité, sa me- sure et ses enjeux, puis nous nous intéresserons à l’habitat industriel minier dans ces différentes typologies et ces évolutions. Ceci nous permettra d’imaginer un nouvel avenir dense pour cet habi- tat, et enfin nous verrons les dispositifs de densification en cours sur le territoire de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin (CALL). VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 9
  • 10. INTRODUCTION PRÉSENTATION DU TERRITOIRE Figure 1 : Les EPCI de l’AML – Source : Atlas de l’Aire métropolitaine de Lille Sur ces 240 km2, la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin (CALL) et ses 36 communes (figure 2) possèdent des caractères très divers. En effet si elle est située autour d’un cœur urbain constitué des villes de Lens et de Liévin, de nombreuses communes sont plus rurales et observent des problématiques différentes. Géographiquement, le territoire de la CALL se situe dans le bassin minier lensois, lui même au centre de l’ex-bassin minier du Nord-Pas de Calais. Cette caractéristique minière du territoire est très prégnante et a marqué son histoire sur laquelle nous reviendrons. Cependant l’agglomération s’étend jusqu’aux collines de l’Artois, ce qui explique la partie plus rurale plutôt concentrée au sud- ouest. Comme la figure 1 le montre, la CALL est entourée d’autres Établissements Publics de Coo- pération Intercommunale (EPCI), avec lesquels elle établit diverses collaborations, notamment la conception du Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) avec la Communauté d’Agglomérations d’Hénin-Carvin (CAHC). La CALL fait également partie de l’Aire Métropolitaine de Lille (AML) et par- ticipe à ses travaux. 10 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 11. Figure 2 : Les communes de la CALL – Source : CALL Les origines de la CALL remontent aux bases de l’intercommunalité en France. En effet, le District Urbain de l’Agglomération de Lens-Liévin a été créé le 21 Août 1968. Il regroupait 30 com- munes et était fondé sur une idée solidaire de mise en commun des moyens pour faire face à la crise de l’activité charbonnière qui s’annonçait. C’est en 2000 que ce District Urbain sera transformé en Communauté d’Agglomération. Aujourd’hui elle regroupe donc 36 communes et environ 252.000 habitants. La CALL et le territoire sont donc marqués par ce passé minier qui les a plongé dans des difficultés économiques et sociales importantes. Comme il l’est rappelé dans le Rapport d’Activités 2011 de la CALL, elle « demeure l’une des Communautés d’Agglomération les plus pauvres de France ». Cependant les efforts sont fournis pour revitaliser le territoire autour de « filières d’excel- - le développement durable autour du site du 11/19 à Loos-en-Gohelle lence » porteuses d’avenir et en interactions avec le musée du Louvre-Lens : - le numérique dédié à la culture - les métiers d’art - la logistique avec la plate-forme multimodale de Dourges et son centre de formation - le sport, la santé et le bien être autour de l’Arena stade couvert régional de Liévin VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 11
  • 12. INTRODUCTION PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE Obligatoires, optionnelles ou facultatives la CALL exerce les compétences listées dans la figure 3. Le développement économique étendu aux domaines de la création, de l’aménagement, de l’entretien et de la gestion de zones d’activités industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire et aéroportuaire, ainsi qu’aux actions de développement économique d’intérêt communautaire ; L’aménagement de l’espace communautaire exercé dans les domaines   suivants : schéma directeur et schéma de secteur, création et réalisation de zones d’aménagement concerté d’intérêt communautaire, organisation des Compétences Obligatoires transports urbains ; L’équilibre social de l’habitat : programme local de l’habitat, politique du   logement et notamment du logement social d’intérêt communautaire et action en faveur du logement des personnes défavorisées, amélioration du parc immobilier bâti d’intérêt communautaire ; La politique de la ville : dispositifs contractuels de développement urbain et   d’insertion économique et social d’intérêt communautaire, dispositifs locaux de prévention de la délinquance.   12 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 13. L’eau, compétence globale qui recouvre l’entretien, la rénovation et l’extension des réseaux, mais aussi la distribution en eau potable à l’usager ; Compétences Optionnelles L’assainissement ; La protection et la mise en valeur de l’environnement et du cadre de vie, qui   se traduit par la lutte contre la pollution de l’air, contre les nuisances sonores, l’élimination et la valorisation des déchets ménagers. la gestion de villages de non-sédentaires ;   la gestion d’un refuge intercommunal pour animaux ; la gestion de dépôts de matériaux inertes ; la gestion d’un crématorium réalisé en commun avec la Communauté   d’Agglomération d’Hénin-Carvin ; Compétences Facultatives la mise en place d’un projet d’agglomération comportant l’enseignement secondaire et supérieur, la culture et la communication, les sports, le tourisme, les actions sanitaires et sociales ; l’étude et la réalisation de tout projet, pouvant présenter un intérêt intercommunal dans l’éventualité où les communes intéressées lui en   confieraient la responsabilité ; la gestion des équipements réalisés par ses soins et des services exploités en commun ; l’exercice aux lieu et place des communes de la gestion de plein droit des services énumérés à l’article L-164-4 de l’ancien Code des Communes, remplacé par l’article L-5213-15 du Code Général des Collectivités Territoriales.   Figure 3 : Compétences exercées par la CALL – Source : CALL – Réalisation : Auteur VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 13
  • 14. INTRODUCTION Pour exercer ces compétences, la CALL, est dirigé par un conseil communautaire regroupant 171 délégués issus des communes. Celui-ci est présidé par Monsieur Jean-Pierre Kucheida, député honoraire et Maire de la ville de Liévin. 7 commissions instruisent les dossiers et environ 200 agents - un cabinet dirigé par Monsieur Sébastien Plociniczak veillent au bon fonctionnement de l’EPCI organisé selon : - une direction générale dirigée par Monsieur José Gulino La direction générale se subdivise en trois grands départements, l’administration générale, l’aménagement du territoire et les services techniques. Chacun d’eux est lui même composé de différents services selon l’organigramme suivant (figure 4). La CALL se comptent ainsi d’environ 200 agents. Figure 4 : Organigramme de la CALL – Source : CALL – Réalisation : Auteur 14 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 15. LE POSTE DE STAGIAIRE «ÉCO-CITÉS DU LOUVRE» Rattaché directement auprès de Monsieur Bruno Galus, Directeur Général Adjoint en charge de l’Aménagement du Territoire, ma mission a été principalement de travailler sur le concept des Éco-Cités du Louvre. Dans un premier temps, il s’agissait de préciser les attentes regroupées sous cette dénomination afin de définir et de proposer une base de réflexion sur ce sujet. Pendant la validation politique des réflexions j’ai travaillé à la rédaction d’un cahier des charges pour une étude urbaine et sociale visant à développer une stratégie de projets selon ces principes, objectif final dans le cadre de ce stage. Au fil des réunions des différents acteurs et de la précision du projet, notamment de son arti- culation avec les autres marchés régissant la démarche Euralens, le cahier de charge a beaucoup évolué. Dans sa dernière mouture il défini alors une étude de programmation urbaine dont l’aspect social et l’étude du peuplement revêt une grande importance. Figure 5 : Communauté d’Aggllomération de Lens-Liévin, Site Lavoisier VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 15
  • 16. 16 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 17. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET LA DENSIFICATION C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 17
  • 18. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? A | CAUSES ET ENJEUX DE L’ÉTALEMENT URBAIN L’étalement urbain (statistiques) L’effet de la construction et des projets d’aménagement sur l’occupation des sols peut être traduit selon divers indicateurs. S’ils doivent être maniés avec prudence, selon les échelles géogra- phiques et temporelles et particularités de calcul qui correspondent à chacun d’eux, nous verrons qu’ils convergent sur des conclusions liées à l’étalement urbain. En réalité l’étalement urbain est défini par l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE) par le fait que « la surface urbanisée croît plus vite que l’augmentation de population ». En croisant les données du SOeS, CORINE Land Cover (CLC) avec ceux d’Eurostat et de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) on peut alors dresser un tableau comparatif (figure 6) comme Françoise Nirascou (CGDD-SOeS, 2012) le fait. Selon la définition de l’AEE, la différence entre le taux d’évolution des surfaces urbanisées et celui de la population sur une période identique aboutit à un indice sans unité, représentatif de l’étalement urbain sur la période. Il y aurait alors éta- lement urbain si l’indice est supérieur à zéro. Evolution des sur- Evolution des sur- Evolution de la po-   faces artificialisées faces urbanisées Indice d’étalement pulation entre 2000 entre 2000 et 2006 entre 2000 et 2006 urbain* et 2006 (en %) (en %) (en %) Europe à 27 hors 2,7 1,7 2,9 -1,2 Royaume-Uni et Grèce France Métropolitaine 3 2,1 4,4 -2,3 Valeurs Min. : 1,4 1 4,1 -3,1 régionales en Alsace France Métro- Max. : politaine Pays de la 5,7 4,7 6,2 -1,5 Loire * indice sans unité, construit selon la définition de l’Agence Européenne pour l’Environnement par différence entre le taux d’évolution des surfaces urbanisées et celui de la population sur des périodes identiques Figure 6 : Comparatif des évolutions de surfaces artificialisées, urbanisées et de population – Source : SOeS, CLC ; Eurostat ; INSEE ; Françoise Nirascou D’après la figure 6, il n’y aurait donc pas eu, au sens de l’AEE, d’étalement urbain entre 2000 et 2006 à l’échelle de l’Europe et à celle de la France Métropolitaine. On peut également considérer l’évolution temporelle du gradient de densité. En effet la densité, de logements ou de population est toujours plus forte dans les centres urbains qu’en périphérie (par définition du centre urbain). Son gradient exprime alors à quelle vitesse elle décroit en fonction de l’éloignement du centre. Ainsi plus un gradient de densité est élevé, plus la ville est concentrée et sa densité décroit rapidement vers la périphérie. L’évolution dans le temps de ce gradient peut donc traduire la tendance de la ville étudiée à se densifier (augmentation) ou à s’étaler (diminution). C’est ce que l’on peut étudier sur la figure 7. Ces calculs témoignent alors un étalement des aires urbaines de province que sont Lille et Lyon, alors que celle de Paris, déjà très dense fluctue. 18 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 19. L’INSEE appréhende l’étalement urbain par sa propre notion d’unité urbaine. Les unités ur- baines sont définies par « les ensembles de communes «entre lesquelles il n’y a pas de coupure de plus de 200 mètres et dans lesquelles résident au moins 2 000 habitants ». L’INSEE peut ainsi déterminer les évolutions à chaque renouvellement de la base. Ainsi, entre 1999 et 2010, 1 368 communes sont passées d’un espace rural à un espace urbain, ce qui correspond à une augmen- tation de 19% de la surface du territoire constitué par ces aires urbaines. Elles sont donc passées de 100 000 km2 à 119 000 km2. L’INSEE signale également que cette évolution semble d’accélérer. Figure 7 : Calcul et évolution temporelle des gradient de densité de population pour les villes de Paris, Lyon et Lille – Source : Françoise Nirascou (2012) En traitant les informations des permis de construire délivrés, le SOeS a également mis au point la base statistique Sitadel. Un travail d’anonymisation est nécessaire mais fournit des données très précises. Une des analyses appliquée à cette base est l’étude de la distance moyenne des construc- tions neuves au centre urbain. Ainsi, le tableau de la figure 8 témoigne de l’étalement urbain pour différentes aires urbaines. Les résultats diffèrent selon les aires urbaines mais sur l’ensemble on peut constater un étalement urbain important entre 1990 et 2001 puis son ralentissement jusqu’en 2010. Cet outil ne donne cependant qu’une information de distance et non d’espace consommé. Figure 8 : Distance de la construction neuve par rapport au centre des aires urbaines – Source : SOeS, Sitadel (2012) VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 19
  • 20. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? Plus simplement, on peut considérer un sol « consommé » lorsqu’il accueille un aménagement ou un équipement physique. On parle alors d’artificialisation des sols, laquelle est le plus souvent irrémédiable. La consommation d’espace est alors l’artificialisation d’un sol qui ne l’était pas aupara- vant. Sur le principe, l’étude de son évolution semble simple. Il n’en est rien et plusieurs techniques existent allant de la projection statistique à l’observation satellitaire en passant par l’étude cadastrale. Encore une fois les avantages et inconvénients de ces techniques dépendent de l’échelle étudiée. Ainsi la technique statistique de la source Teruti-Lucas permet de travailler au niveau national ou régional et traduit les changements rapidement puisqu’elle est renouvelée annuellement. À l’inverse, l’utilisation des données cadastrales est beaucoup plus fine et est donc particuliè- rement utile à l’échelle communale. Cependant, elle doit être pondérée puisqu’elle ne prend pas en compte les espaces publics générés et ne peut actuellement pas servir de base de comparaison à l’échelle européenne. Figure 9 : Portail Corine Land Cover France – Source : CLC Enfin, la source Corine Land Cover, crée des cartographies (figure 9) désignant l’usage de l’espace et peut également prendre en compte son ancienne affectation, à partir d’image satellite. Elle est renouvelée tous les six ans et son principal inconvénient provient de la résolution que ce traitement impose (25 ha pour l’état des sols et 5 ha en évolution). En effet, les évolutions minimes ne sont pas toujours prises en compte. On éprouve par exemple des difficultés à mettre en évidence le phénomène de mitage avec cet outil. Des évolutions sont attendues et devraient aboutir à un 20 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 21. renouvellement de l’information plus rapide (3 ans) et une résolution plus importante (1 ha au lieu de 5 ha). Le dernier renouvellement des données a permis de déterminer qu’en 2006, 5,1% de l’espace est artificialisé en France Métropolitaine. Entre 2000 et 2006 la surface artificialisée a progressée de 3%. Ces 3% sont majoritairement pris (88%) sur des terres agricoles, le restant l’étant sur des milieux naturels. L’étude montre également que 75% de cet espace est utilisé pour la création de tissu urbain (souvent discontinu) et 12% pour des zones industrielles et commerciales (UE, SOeS, CLC, base des changements 2000-2006). Les villes prennent donc de plus en plus d’espace en France. Elle recouvre alors d’anciens espaces agricoles ou naturels précieux. L’augmentation de la population doit être mise en parallèle de ces statistiques, mais tentons de comprendre comment ce phénomène prend de l’importance. Quelques raisons Le logement est donc la première raison de consommation d’espace. La population augmen- tant en moyenne de 0,56% par an (entre 1960 et la fin des années 2000), il est normal que nous ayons besoin de plus en plus de logements. Figure 10 : Évolutions annuelles moyenne de la population et du nombre de logements en France Métropolitaine (en %) – Source : INSEE, SOeS (Alain Jacquot) Cependant le nombre de logement est plutôt lié au nombre de ménages. En effet chaque mé- nage a une résidence principale. Or c’est le nombre de ménage qui a considérablement augmenté en France ces dernières années : d’en moyenne 1,32% par an sur la même période. Ceci s’explique par une baisse considérable du nombre de personnes par ménage (0,74% par an). En effet, alors que le nombre de personnes par ménage était de 3,06 en 1968, il était descendu à 2,29 en 2007. Dans les années 80, cette baisse était le résultat du ralentissement du baby-boom entrainant un nombre d’enfant par ménage moins important. L’amélioration du système de retraite, permettant une meilleure autonomie des personnes âgées dans leur foyer a également eu de l’influence. Puis dans les années 90, le vieillissement de la population ainsi que les évolutions sociologiques autour du mariage ont continué à alimenter cette baisse. En effet, le vieillissement implique un nombre important de ménages dont les enfants ont pris leur autonomie, et le désaveu du mariage implique un nombre plus important de personnes vivant seules, et de familles monoparentales (Alain Jacquot, CGDD-SOeS, 2012). VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 21
  • 22. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? Figure 11����������������������������������������������������������� �������������������������������������������������������������  : Évolution de la surface habitable par personne selon différents critères – Source : INSEE, SOeS, Alain Jac- ��������������������������������������������������� quot En quarante ans, le nombre de logements en France a été multiplié par 1,7. Dans le même temps et sous l’effet des phénomènes évoqués précédemment, la surface moyenne des résidences principales est passée de 72,0 m2 en 1973 à 91,2 m2 en 2006. Ce qui correspond à une évolution de 24,6 à 40,1 m2 par personne. En moyenne, le nombre de pièce d’une résidence principale était de 3,3 pièces en 1968. Elle était passée à 4,0 pièces en 2007. Ceci peut encore une fois s’expliquer par le vieillissement de la population. En effet, et comme le montre la figure 11, la surface habitable par personne croit avec l’âge. C’est principalement le fait du parcours résidentiel qui permet en vieillissant de bénéficier de biens plus importants. De plus, très peu se détachent de ce bien même une fois que les enfants ont quitté le foyer. L’augmentation du nombre de personnes vivant seules est également responsable de cette hausse, puisqu’elles en consomment évidemment plus. 22 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 23. De cette façon, Alain Jacquot (2012) a pu calculer que la surface habitable cumulée des loge- ments en France Métropolitaine a été multipliée par 2,3 en quarante ans. Il signale également la pro- babilité que « la surface cumulée des parcelles d’habitation a été multipliée par davantage que 2,3 (sans qu’il ne soit possible de donner un chiffre précis) ». En effet la proportion de l’habitat individuel a considérablement augmenté dans le volume des logements construits. Plus de 60% depuis 1975 alors qu’il était aux alentours de 40% depuis la fin de la seconde guerre mondiale (figure 12). De plus comme le montre la figure 12, la taille moyenne des parcelles sur lesquelles cet habitat individuel se construit a également augmenté selon les mêmes périodes. Concernant le collectif, leur taille moyenne a beaucoup diminué depuis les années 80. Figure 12 : Surface des logements, des terrains et nombre d’étage des bâtiments d’habitation en 2006, selon leur époque de construction – Source : Alain Jacquot (2012) Pour trouver plus de parcelles, de tailles plus grandes, il faut s’écarter du centre ville. Ceci n’a été possible que par l’amélioration des moyens de transport. En effet on parle ici principalement de logements puisque le travail se situe en grande partie dans les grandes villes. Dès lors c’est le développement du transport qui permet d’atteindre ces zones périurbaines. En effet, le choix de l’habitation d’un ménage se fait selon un choix de localisation de confort et de temps de trajet pour ses activités (travails, loisirs …). Le développement de l’usage de la voiture et de ses infrastructures participe donc à l’étalement urbain. Dans les années 60, la France investit massivement dans des autoroutes au niveau national et de façon plus locale dans des rocades pénétrantes dans les villes. Les conditions de voyage s’amé- liorent et il est désormais possible d’aller plus loin plus rapidement. Ce phénomène est lié aux pro- grès techniques, des routes, des voitures et aussi à une croissance économique compatible. Cela VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 23
  • 24. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? a donc pour conséquence une augmentation générale des vitesses et les individus vont se loger encore plus loin du centre-ville. L’étalement urbain semble donc pouvoir s’expliquer par des critères démographiques, socié- taux et par des avancées technologiques. Alors que ces critère semblent continuer leur évolution dans le même sens, tentons de nous projeter dans la situation à laquelle nous aboutirons si rien n’est fait. À l’avenir Sur le plan démographique, la population française semble continuer de progresser de la même façon (+0,5% par an environ selon l’INSEE), tout comme l’augmentation du nombre de ménage. Ainsi Alain Jacquot estime que le nombre moyen de personnes par ménage diminuerait jusqu’à atteindre 2,0 en 2030. À l’inverse, la surface habitable moyenne par personne devrait continuer de progresser. En effet, l’inverse traduirait une situation économique désastreuse pour le pays, entrai- nant une baisse considérable du niveau de vie des ménages. En revanche, l’augmentation des prix des carburants qui se profile, peut commencer à influencer les choix de logements des ménages. En effet, le choix d’aller s’installer plus loin pour diminuer les charges foncières sera de moins en moins pertinent face aux coûts engendrer par les trajets domicile-travail. Le bilan français est néanmoins alarmant, les 4,85 millions d’hectares qui étaient artificialisés en 2009 représentent 9% du territoire en France Métropolitaine. Plus que cela, c’est l’accélération du phénomène qui est à prendre en compte. En effet, entre 2006 et 2009, l’artificialisation des sols grignote en moyenne 86 000 hectares par an. « À ce rythme, (…) les espaces agricoles et naturels perdent 236 hectares par jour, ce qui correspond à la superficie d’un département français moyen (610 000 hectares) tous les sept ans » (Paul-Michel Morel et René Jean, 2010). Lors de la dernière décennie, l’artificialisation correspondait à un département tous les dix ans. Très variable selon les départements elle n’en est que plus critique dans certains d’entre eux (Bas-Rhin, Vendée, Côtes- d’Armor, Manche) où le gain d’artificialisation dépasse 1%. La demande de logement étant importante en France il peut sembler contradictoire de mettre des limites à la construction. Cependant, la moitié des sols consommés, l’est à destination de l’habitat. L’artificialisation des sols est un enjeu de tout premier ordre, tant elle est liée à des pro- blématiques écologiques, environnementales, agricoles, climatiques, alimentaires, économiques et sociales. Son accélération ces dernières années est inquiétante et n’est pas passée inaperçue. Un certain nombre de dispositifs ont donc été imaginés afin d’endiguer ce grignotage des terres agri- coles et naturelles. 24 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 25. B | LA MAÎTRISE DE LA CONSOMMATION DE L’ESPACE ET LA DENSIFICATION Si réglementairement et stratégiquement on peut limiter l’étalement urbain et l’artificialisation des sols, on ne peut s’en contenter. En effet, la pénurie de logements doit également être traitée et construire plus de logements sur moins d’espace revient à développer une forme de densification. Le cadre législatif Les bases de la lutte contre l’étalement urbain ont été posées le 13 décembre 2000 par la loi relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbain (SRU) (Loi n° 2000-1208). Elle fait suite aux poli- tiques de lutte contre les disparités sociales et spatiales des années 1980 principalement dans les grands ensembles. Elle vise à créer une nouvelle manière d’aménager, en travaillant sur des quartiers existants. Il s’agit alors de rénover le cadre législatif des politiques d’aménagement et propose le renouvellement de la ville sur elle même comme principe contre l’étalement urbain. Des disposi- tifs d’incitations fiscales, de création de sociétés d’investissement régionales sont proposés pour avancer sur les premières pistes en la matière : renouveler les espaces déjà urbanisés afin d’éviter le déclin de ces zones et de ne pas générer de « fracture urbaine », limiter les développements péri- phériques et enfin planifier les rapports ville-environnement. La loi de programmation pour la ville et la rénovation urbaine viendra compléter la loi SRU le 2 août 2003. Concernant la lutte contre l’artificialisation des sols, elle met en place un dispositif à court terme contre la pénurie de terrain. Il consiste à rendre indisponible certains terrains pour la construc- tion de logements. Elle crée également l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) le 9 février 2004. Elle permet principalement d’apporter les financements nécessaires aux projets de renouvellement urbain dans les quartiers les plus en difficultés. La loi Engagement National pour l’Environnement (ENE) du 12 juillet 2010 (Loi n° 2010-788), dite loi Grenelle 2 est le dernier dispositif législatif mis en place sur la question. Elle affirme le rôle des outils réglementaires (PLU) et stratégiques (SCOT) de l’urbanisme dans la gestion économe des sols. En effet ces documents doivent prévoir dès le rapport de présentation une « analyse de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers » (art. L123-1-1 al. 3 du Code de l’urba- nisme). De plus ils doivent en articulation l’un avec l’autre fixer des objectifs justifiés de consomma- tion de l’espace. En effet le PADD doit alors fixer des « objectifs de modération de la consommation d’espace et de lutte contre l’étalement urbain » (art. L123-1_3 du Code de l’urbanisme). Le rapport de présentation doit alors justifier « des objectifs compris dans le PADD au regard des dynamiques économiques et démographiques » (art. L123-1-2 al. 4 du Code de l’urbanisme). À noter également le rôle de l’état déconcentré : le préfet a un droit de regard sur les Plans Locaux d’Urbanisme de territoire non couvert par un Schéma de Cohérence Territoriale. En terme de densification, la loi Grenelle 2 évoque par exemple deux cas précis. L’alinéa 13°bis de l’article L123-1-5 prévoit « dans des secteurs situés à proximité des transports collectifs existants ou programmés, imposer dans des secteurs qu’il délimite une densité minimale de construction ». Ceci est un élément marquant qui contraint une stratégie efficace liant le développement des infras- tructures de transport avec celle de densification. Or nous avons démontré les influences mutuelles de ces deux champs. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 25
  • 26. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? Le deuxième exemple concerne les Coefficient d’Occupation des sols. La loi prévoit en effet de pouvoir dépasser ce coefficient dans certaines conditions : « Un dépassement des règles relatives au gabarit et à la densité d’occupation des sols résultant du plan local d’urbanisme ou du document d’urbanisme en tenant lieu peut être autorisé, par décision du conseil municipal ou de l’organe déli- bérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme, dans la limite de 30% et dans le respect des autres règles établies par le document, pour les constructions satisfaisant à des critères de performance énergétique élevée ou alimentées à partir d’équipements performants de production d’énergie renouvelable ou de récupération ». Mais ce dépassement ne peut excéder 20 % dans un secteur sauvegardé, dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, dans le périmètre de protection d’un immeuble clas- sé ou inscrit au titre des monuments historiques, dans un site inscrit ou classé, à l’intérieur du cœur d’un parc national, ni aux travaux portant sur un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou adossé à un immeuble classé, ou sur un immeuble protégé » (art. L128-1 du Code de l’urbanisme). Ces documents forment donc un cadre législatif et stratégique conséquent et permettant de mettre en place des dispositifs ambitieux en terme de préservation des zones naturelles et agricoles. Cependant les objectifs fixés dans ces documents ne sont pas contraignants, c’est à dire que la commune ou l’EPCI responsable du document n’a pas d’obligation de résultat sur l’exécution de celui-ci. Sous la pression des promoteurs, des investisseurs et des propriétaires, on peut craindre que l’ouverture à l’urbanisation perdure. De plus, l’échelle intercommunale semble être la meilleure solution pour cette dimension stratégique. En effet, développer certains aménagements de qualité et d’ampleur suffisante peut permettre de préserver certaines zones de l’étalement urbain. Ces réflexions sont considérées dans le cadre des SCOT et des PLU intercommunaux mais ils ne sont pas encore généralisés. « Le plan local d’urbanisme est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité de l’établissement public de coopération intercommunale lorsqu’il est doté de la compétence en matière de plan local d’urbanisme, en concertation avec les communes membres. (…) Dans les autres cas, le plan local d’urbanisme est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité de la com- mune, le cas échéant en concertation avec l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elle est membre » (art. L123-6 du Code de l’urbanisme). L’échelon intercom- munal est tout de même privilégié puisque le législateur fait du PLU intercommunal le principe et du PLU communal l’exception. Les deux principes majeurs avancés dans ces documents sont donc, la limitation de l’étalement en renforçant les contraintes d’ouverture à l’urbanisation et le développement d’une certaine forme de densité permettant à la ville de se développer malgré tout. Si les lois évoquent ces opérations de densification ou de projets favorisant la densité, elles ne donnent pas de solutions concrètes. Dès lors, comment crée-t-on de la densité dans un projet urbain ? 26 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 27. Densité(s), quelques définitions La densité est le rapport entre un élément quantifiable (habitant, emploi, mètre carré de plan- cher etc.) et la surface d’un espace de référence. Elle peut être faible ou forte et plus ou moins bien perçue selon qu’un équilibre «subtil» s’établit entre ces différents indicateurs : la concentration de population, l’intensité de l’activité, la densité du bâti, la proportion d’espaces verts publics, etc. En se complétant, ces indicateurs permettent une appréhension plus globale du concept de densité. On distingue alors plusieurs éléments de mesure de la densité : ‐‐ Le Coefficient d’Occupation des Sols (COS), qui est un élément réglementaire traduisant un « droit à bâtir », c’est le rapport de la surface constructible sur la surface de la parcelle. Ainsi, il ne traduit pas d’imposition de forme, puisque la surface constructible peut se répartir sur un ou plu- sieurs étages. ‐‐ La densité bâtie ou réelle, elle considère l’emprise au sol, ainsi que le nombre d’étages. Ainsi il s’agit du rapport entre le Coefficient d’Emprise au Sol (CES) multiplié par le nombre moyen de niveaux des constructions sur la surface de l’îlot considéré. En fonction de la finesse des parcelles considérées, on calcule la densité nette ou brute. La première prend en compte la réelle occupation des sols tandis que la deuxième compte également les espaces publics (équipements collectifs, voiries etc.) ‐‐ La densité de population, simple rapport du nombre de logements sur une surface donnée. Les interprétations de cette densité dépendent de l’échelle choisie (de la ville à l’îlot). Elle s’exprime alors en habitants par km2 ou en habitants par hectare. ‐‐ Sur le même principe on peut alors décliner des densités d’emplois voir d’activité humaine (nombre d’habitants + nombre d’emplois) Source : IAURIF, 2005 VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 27
  • 28. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? (Re)sentir la densité De façon générale, parler de densité, de densification ou de ville dense fait peur. Dans l’imagi- naire collectif, la densité est souvent assimilée à des formes urbaines imposantes comme les tours ou les grands ensembles. En réalité, et comme le montre la figure 13, densité et forme urbaine ne sont pas liées. On peut obtenir la même densité réelle (c’est à dire en nombre de logements par hectare) avec une tour qu’avec un tissu de logements individuels. Figure 13 : Modulations morphologiques à densité fixe – Source : IAURIF (2005) La figure 14, dont le «  classement  » par densité bâtie ne traduit pas forcément le ressenti des populations, vient renforcer ce sentiment. En effet, les grands ensembles ont par exemple une densité bien plus faible (inférieure à 1) qu’un habitat de centre ville ou de centre bourg traditionnel. Pourtant, les habitants de ces grands ensembles évoquent souvent cette sensation de vivre les uns sur les autres. Comme l’indique Alexis Roy (DREAL Pays de la Loire, 2012), « les grands ensembles cristallisent les jugements négatifs liés à la densité (surpopulation, anonymat, précarité, insécurité, cadre de vie dégradé) alors que l’habitat individuel dense ou l’habitat intermédiaire, qui peuvent atteindre des niveaux de densité bien supérieurs, sont perçus plus positivement ». La perception de la densité est donc largement fonction de la qualité des aménagements. 28 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 29. La façon de faire la densité est donc aussi importante que la densité elle même. Elle doit être acceptable voire même désirable pour les habitants qui la pratiqueront. Pour cela la densité doit prendre en compte l’existant et intégrer la densité à un projet plus ambitieux que le simple objectif de densification. Figure 14 : Quelques formes urbaines classées par densité bâtie – Source : IAURIF (2005) La qualité de la ville dense, vers la ville intense Certains préfèrent alors parler d’intensification. Lille Métropole Communauté Urbaine (LMCU) mène par exemple sa politique de la ville et ses projets de développement urbain sous des objectifs de ville intense. Ceux-ci sont détaillés dans une délibération-cadre intitulée faire la Ville intense depuis 2009. La notion de Ville intense y est résumé comme « une ville qui marie la qualité à la compacité ». Le principe général est de ne pas voir la densité comme une simple densité bâtie ou de popu- lation. En mettant en avant un souci de qualité, l’intensité urbaine suggère une densité à niveaux - d’accessibilité, rapprochant une multitude de lieu par des liaisons douces comme par des trans- multiples au centre d’enjeux divers : - d’équipements et d’aménités (commerces et services, parcs et jardins, équipements sportifs et ports en commun selon l’échelle - de mixité sociale et fonctionnelle, permettant, via certaines valeurs de partage et de solidarité, de culturels etc.), répartis intelligemment, notamment en rapport avec l’accessibilité contribuer à la réduction des inégalités et à la lutte contre les exclusions, de favoriser l’innovation et - de maillage urbain, visant, grâce aux éléments évoqués ci-dessus, à ce que quartiers nouveaux et l’enrichissement mutuel, enfin elle agit sur la cohésion et l’intégration des populations - des enjeux environnementaux, afin de réduire les dépenses énergétiques et les pollutions, de les anciens s’alimentent réciproquement dans de bonnes dynamiques traiter efficacement et de préserver, voire de renforcer la biodiversité grâce à la mutualisation. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 29
  • 30. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? De façon plus concrète, d’autres éléments participent à l’acceptabilité de la densité. Ainsi, le design architectural et urbain, la qualité des espaces publics, la présence d’espaces verts ou encore la mixité des usages sont primordiaux dans l’appréhension de la densité. En effet, dans ce domaine on peut se risquer à évoquer quelques préconisations de base comme le respect du tissu existant, de l’échelle humaine, la variation des hauteurs permettant de créer des perspectives ainsi que des formes, notamment ouvertes permettant la présence d’espaces extérieurs publics ou privatifs géné- rateurs de mixités… Mais la densification doit surtout se faire avec son environnement. Elle doit être innovante afin de pouvoir faire du nouveau projet un élément créateur d’interactions avec l’existant et ainsi de limiter son impact voire d’améliorer la vie du quartier. Dès lors, on peut appliquer et développer la densité par des processus de qualité. Cependant les façons de faire diffèrent selon les territoires. En effet la densification dépend de la typologie du quartier traité et plus généralement de la densité déjà existante. La densification en milieu urbain - Des opérations de renouvellement urbain de qualité qui permettent par leur montage d’inscrire la En ville, dans un milieu ayant déjà une certaine densité, elle peut y être développée grâce à : densité au centre du nouveau projet et de prendre profondément en compte les enjeux déjà évo- qués. Figure 15 : Euratechnologie, dans l’ancien château industriel Leblan-Lafonts, au cœur de la ZAC des Rives de la Haute- Deûle qui regroupera à terme 170 000 m2 de logements, 150 000 m2 d’activités tertiaires de recherche et de formation, 5 000 m2 de commerce et 20 000 m2 d’équipements 30 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 31. - L’utilisation de friches afin de tirer avantage des coupures dont elles sont généralement créatrices. En effet la conception de nouveaux projets d’aménagements sur d’anciennes friches permet de développer la ville sur elle même. Ce type de foncier est généralement public, grâce au travail des Établissements Publics Fonciers (EPF). En revanche ils nécessitent souvent d’être innovant afin de traiter les problématiques de pollution à des coûts acceptables. LMCU et sa ville intense s’inscrivent dans cette démarche avec 250 ha de friches traités entre 2001 et 2007, ainsi que 260 autres ha en projet. Dans le cadre de la métropole lilloise, les friches, importantes et en grands nombres, per- mettent de faire émerger des projets de grandes envergures tels que la ZAC des Rives de la Haute- Deûle à Lille-Lomme-Lambersart ou encore la ZAC de l’Union à Tourcoing-Roubaix-Wattrelos. Figure 16 : Plan directeur de la ZAC de l’Union qui accueillera à terme plus de 3 000 habitants et autant d’emplois sur - Proche du point précédent, la reconversion de bâtiments non résidentiels (industriels, institution- une ancienne friche – Source : SEM Ville Renouvelée - Le développement de projet dans les dents creuses aussi appelé développement intercalaire nels, commerciaux, religieux etc.) permet de créer des logements. consiste à utiliser les terrains résiduels entre le bâti existant. Ces dispositions n’ont rien d’anec- dotiques et contribuent souvent à la revitalisation de certains quartiers. La démarche de référentiel foncier, initialement impulsée par les EPF, permet d’identifier efficacement ces potentialités. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 31
  • 32. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? La périurbain comme territoire de projet De la même façon, la densification ne doit pas être oubliée dans le périurbain ou les milieux moins denses. En effet, la périurbanisation ne doit pas être considérée comme un territoire pestiféré. Si l’artificialisation de ces sols est irréversible, autant les exploiter un maximum et les englober dans la « ville de demain ». Ainsi, la périurbanisation pourrait être vu comme un projet et non plus comme un problème, « passer de la ”lutte contre” aux ”politiques de” » (Stéphane Cordobes, Romain Lajarge et Martin Vanier, 2010). Il s’agirait alors de mener une politique de la périurbanisation, de la développer, non en terme d’expansion, mais en terme de qualité. C’est à dire lui donner un sens plutôt que de s’épuiser à échouer de la contenir. Dans le cadre des études prospectives de la Délégation interministérielle à l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale (DATAR) intitulées Territoires 2040 les trois chercheurs de la DATAR et de l’université de Grenoble 1 ont élaboré cinq scenarii de projets pour les zones périurbaines. Chaque scenario traduit à la fois le fait que l’évolution de chaque zone dépend de son contexte territorial (il n’y a pas un unique type de périurbanisation en France), et une situation générale différente allant de contraintes environnementales critiques à des progrès techniques nous permettant de les dépasser. Le premier scenario proclame le triomphe de la densification : « l’urbain compacte l’emporte, digère le périurbain en le densifiant, et la périurbanisation s’arrête ou devient un phénomène secon- daire ». Il suggère alors un développement très différent de la ville et de la campagne, alors destiné à l’agriculture. Les problématiques de la ville telles qu’elles existent sont alors toujours présentes, voire exacerbées. Le second, au contraire, consacre l’espace diffus : « la dispersion généralisée s’impose, grâce aux solutions techniques rendant les faibles densités soutenables et l’accès au confort spatial dési- rable ». Il anticipe des solutions techniques et technologiques abordables et permettant la soutenabi- lité de la mobilité et de l’habitat individuel pour tous. Les problématiques de l’aménageur deviennent alors principalement de la logique foncière puisque le modèle est individuel et privé au sein de chaque propriété. Le troisième est plus à l’avantage des périphéries : « l’enjeu agrinaturel est central et structure de nouveaux rapports villes-campagnes, et les espaces intermédiaires, jadis périurbains, deviennent des conservatoires périruraux ». Dans cette situation, la situation environnementale est telle que les espaces naturels doivent être impérativement préservés. Les périphéries de part leur proximité avec ceux-ci en deviennent les remparts et jouissent de leur bienfait. Les projets de développement s’arti- culent alors autour des espaces périurbains plutôt qu’urbain sans toutefois continuer de s’étendre. Le quatrième prévoit une grande collaboration entre les métropoles : « l’interterritorialité orga- nise l’ancien périurbain, entre les métropoles et entre les territoires, par tous leurs sites et fonc- tions d’interface ». Les espaces périurbains sont alors considérés comme autant d’interfaces entre ces métropoles, autant de support au développement de polarités secondaires permettant l’accueil d’autres fonctions (logistiques, équipements de transport, équipements récréatifs etc.). L’État serait 32 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 33. donc au centre de ces projets et organiserait la coordination de tous ces projets aux différentes échelles du territoire. Enfin le dernier scenario consacre totalement l’urbain, dans une situation catastrophique : « le périurbain est réquisitionné pour son intérêt écologique global par les villes qui dominent leur région et équilibrent ainsi leur empreinte, dans un contexte de très fortes contraintes environnementales ». La situation écologique est telle que la maîtrise foncière doit être totale et la ville se voit contrainte de vivre et de se développer sur elle même. L’équilibre ainsi formé serait donc très fragile. Le deuxième scenario fait figure d’exception dans ces projections. En effet, il est le seul à renoncer à l’action publique. Se réfugiant derrière une logique progressiste qui rendrait n’importe quel aménagement soutenable, il laisse le marché réguler le territoire. Les aspects ségrégatifs mis en avant dans certains autres scenarii seraient également présents dans une telle situation, de façon moins concentrée mais peut être plus forte encore. Il constituerait également une fuite en avant consacrant un modèle artificiellement durable (quel recul sur ces solutions technologiques, ce mo- dèle est-il applicable sur tout le territoire, applicable par les futurs 13 milliards de terriens ?). Excepté le deuxième donc, les scenarii convergent vers la nécessité d’une action publique volontariste pour concevoir l’aménagement et l’évolution de ces zones périurbaines. En somme, il s’agit de faire avec la périurbanisation puisqu’elle est là, mais de la réinventer (Martin Vanier propose même de changer son nom). Si les buts sont différents selon les situations, des nouvelles probléma- - Une certaine « hybridation des aménités ou des biens dont cette position interterritoriale est por- tiques se dégagent sur ces territoires (Martin Vanier, 2011) : teuse ». C’est à dire amener une diversité des fonctions, des usages et des types d’utilisations des sols afin de concevoir un projet collectif pour le territoire. L’idéal de « ville à la campagne » est un bon - Un concept « d’espace public de nature » qui remettrait les dispositifs abstraits de trames vertes objectif mais les tentatives individuelles n’ont que rarement abouti. et bleues au cœur de l’urbanité positive. Elle pourrait même jouer le rôle urbanistique structurant des - Une « économie transactionnelle, qui pourrait guider les relations entre centres et périphéries » afin rues et places de la ville. d’appréhender ces enjeux collectivement, par complémentarité entre développement et accès aux ressources. Une des idées principales de cette réflexion est de promouvoir des logiques collectives pour repenser le territoire périurbain et ces territoires de façon collaborative. Si le Partenariat Public Privé (PPP) est particulièrement mis en avant dans le rapport, d’autres solutions sont expérimentées : c’est le cas du projet Build In My BackYard (BIMBY) qui prône un urbanisme collaboratif. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 33
  • 34. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? La filière BIMBY Figure 17 : L’intensification pavillonnaire selon le projet BIMBY – Source : BIMBY 34 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 35. BIMBY est un projet de recherche sélectionné en 2009 par l’Agence Nationale de Recherche (ANR) dans le cadre de son appel à projet « Villes Durables ». Il rassemble dix partenaires publics : les Communautés d’Agglomération de Rouen et de Saint-Quentin-en-Yvelines, le CAUE de l’Eure, les Écoles Nationales Supérieures d’Architecture de Paris Belleville, Rouen et Marseille, le LATTS (ENPC) et le RIVES (ENTPE), ainsi que deux bureaux d’études du Réseau Scientifique et Technique du MEEDDTL : le CETE Normandie Centre (pilote du projet) et le CETE Ile-de-France (co-pilote). Il vise à faire émerger une nouvelle manière de créer la ville en mobilisant le tissu pavillonnaire, son foncier et ses acteurs. Le projet tend à instaurer une dynamique de petits projets avec les acteurs de ce milieu et de l’urbain, qu’ils soient habitants, techniciens ou élus. Elaborés spécifiquement, ces projets sont adaptés à chaque situation et sont également compatibles avec l’intérêt général, c’est- à-dire avec des objectifs de renouvellement urbain, de densification et de mixité sociale et fonction- nelle. Dans cette optique le projet BIMBY préconise d’encourager, de maîtriser et de canaliser ces projets grâce à des règles d’urbanisme pertinentes et de mettre en place un dispositif de conseil pour chacun de ces projets. BIMBY serait alors une réponse aux problématiques de la ville durable. Économiquement, les projets élaborés sur du foncier maitrisé sont donc particulièrement viables. La production d’une quantité de logements intéressante (selon des études statistiques et prospectives sur le tissu pa- villonnaire français, la filière BIMBY pourrait créer 150 000 terrains à bâtir supplémentaires par année) sans étalement urbain et donc sans engendrer de pression foncière est un atout d’un point de vue environnemental. Et enfin les projets portés l’étant pour beaucoup par les habitants sont alors autant d’entrées permettant de créer des synergies dans un quartier. BIMBY se base donc sur les potentiels projets des habitants. L’équipe a donc entrepris de tester sa démarche directement auprès de ceux-ci en les rencontrant. À travers deux expérimenta- tions, ils ont cessé de discuter entre techniciens et élus de ce que les habitants souhaiteraient ou ne souhaiteraient pas et sont allés massivement à leur rencontre. Au Tremblay-sur-Mauldre puis aux Essarts- le-Roi dans les Yvelines, chaque habitant le sou- haitant a
 été ainsi invité à être reçu par un « architecte – médiateur » afin de discuter de ses envies et projets et, pour les propriétaires d’une maison, des avenirs possibles de leur propre parcelle. La filière BIMBY entendait prouver son potentiel en se donnant les moyens d’une réelle discussion de qualité avec les habitants, c’est à dire en prenant une heure par ménage avec comme support une maquette 3D élaborée en temps réel. Nombreux sont les habitants qui ont des idées, des projets et qui pourraient libérer des terrains à bâtir si l’on décidait de faire l’urbanisme avec eux. Sur 140 ménages à avoir fait le déplacement, 6 sur 10 sont repartis de ces entretiens en ayant fait dessiner aux architectes un, voire deux logements supplémentaires sur leur terrain. Cette expérimentation tend à montrer que dans chaque commune de France, les jardins des propriétaires de maison constituent un gisement foncier qui pourrait ali- menter une part significative des besoins en logements dans les années à venir. Les équipes BIMBY identifient ce phénomène potentiel comme une « filière libre » de la produc- tion de logement. Cette filière vient en opposition « des filières organisées de l’individuel groupé et du VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 35
  • 36. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? lotissement ». Celles-ci interviennent à des échelles bien trop importantes pour pouvoir opérer dans les micro-espaces disponibles au sein des quartiers pavillonnaires existants. Cette «  filière libre  » opère à un niveau de granularité extrêmement fin : elle mobilise des acteurs locaux tant du côté maî- trise d’ouvrage (particuliers) que du côté maîtrise d’œuvre (entreprises locales). De cette façon, elle est la plus susceptible de mener efficacement une action au sein de tissus déjà habités et disposant d’une multitude de micro-espaces potentiellement densifiables. Les pouvoirs publics doivent donc se saisir du développement de cette filière pouvant offrir une nouvelle entrée sur les politiques d’aménagement du territoire, de politique foncière, de lutte contre l’étalement urbain, de logements abordables, de maintien des personnes âgées à domicile, de dépendance, de réhabilitation thermique du bâti, de la redynamisation des économies locales de la construction etc. Ils doivent également être capable de la contrôler afin que les conditions de ce développement croisent les intérêts du territoire. Ainsi trois aspects doivent être dégagés et pris en - « un axe générateur » visant à impulser ce phénomène au niveau de tous les acteurs, habitants, compte : - « un axe régulateur » qui consiste notamment à modifier ou mettre en place les documents d’urba- entreprises, élus, techniciens nisme afin qu’ils permettent les aspirations des habitants mais qu’ils ne compromettent pas l’équi- - « un axe systémique » permettant de ne pas laisser totalement la place à cette filière individuelle libre et le développement du reste du territoire mais qu’elle puisse par un jeu de coordination, faire émerger des projets de plus grandes ampleurs lorsqu’ils sont valables. Figure 18 : La démarche BIMBY et ses interactions avec la révision des documents d’urbanisme – Source : BIMBY 36 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 37. La lutte contre l’étalement urbain se divise donc en deux champs. D’abord la limitation de la consommation de l’espace par des cadres législatifs nationaux et diverses préconisations locales visant à restreindre l’artificialisation des sols. Cependant ces mesures ne sont pas encore suffisantes face aux pressions du marché donnant une valeur considérable au foncier et permettant le dévelop- pement « facile » de certains territoires (parfois dépourvus d’autres opportunités). Dès lors, il faut de donner les moyens de créer de la densité, dans tous les milieux. De la den- sité de qualité permettant d’atteindre des objectifs de logements au sein de projets beaucoup plus vastes et transversaux. Ces considérations sont la condition de l’acceptabilité de la densité et sont incontournables. Cette densité de qualité s’applique soit par l’intermédiaire de grands projets, de rénovations urbaines, d’utilisation friches ou même dans un tissu d’origine moins dense (périurbain), soit par de petites touches en remplissant de véritables dents creuses ou des dents creuses créées par division parcellaire. Finalement, densifier consiste avant tout à innover afin de créer le contexte le plus adéquat aux exigences d’un habitat et d’une urbanité-ruralité durable. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 37
  • 38. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? C | LA DENSITÉ EN PRATIQUE Nous avons vu que la prise en compte de l’artificialisation des sols et de la consommation de l’espace est un enjeu mis en avant dans les politiques nationales, qu’elle est traduite législativement et donc intégrée aux problématiques de stratégie territoriale. Ainsi les territoires se dotent de docu- ments stratégiques d’aménagement du territoire visant la mise en place de politiques de préserva- tion des espaces agricoles et naturels et fixant des objectifs stricts d’étalement urbain. Cependant ces dispositifs ne sont pour la plupart que des préconisations et ne peuvent se traduire par des sanctions. Dès lors, sous la pression des propriétaires, promoteurs et parfois face à cette seule opportu- nité de développement, les acteurs publics locaux continuent d’autoriser l’urbanisation de certains terrains. Excepté pour quelques dispositifs spécifiques ayant pris des engagements plus importants comme certains Parcs Naturels Régionaux (PNR), le phénomène devrait continuer même s’il se ralentit. C’est pourquoi, comme nous l’avons évoqué précédemment, certaines études prospectives préfèrent faire du territoire périurbain un territoire de projet. De plus le développement de la densité prend encore plus de sens, étant à la fois un moyen de moins s’étaler, mais également de rentabi- liser les opérations foncières. En effet, densifier revient à augmenter les surfaces construites sur un terrain, et donc les surfaces commercialisables. Si les villes anciennes figurent parmi les villes les plus denses, la pratique de la densité dans de nouveaux projets n’est pas si récente. Il est donc assez difficile d’avoir un recul et des expériences sur les bénéfices de ces densités. Une densité plus raisonnée en période de crise ? Une réflexion menée par le site eco-quartier.fr incite à orienter les réflexions sur la densité des nouveaux quartiers en France vers des niveaux d’exigences plus bas. En effet les très grandes den- sités développées dans les éco-quartiers français suggèrent des équipements publics de très hauts niveaux et donc très coûteux. L’exemple des transports en commun, à la fois condition et argument du développement de la densité, est cité. En effet, pour ces très grandes densités (de l’ordre de 100 logements par hectare) des lignes de métro ou de tramway sont mises en place. Or elles sont extrêmement coûteuses, parfois tellement que les collectivités peineraient à investir dans de tels projets dans le contexte économique actuel. L’hypothèse évoquée pour pallier ce problème serait une densité moindre de ces quartiers, à l’image de certains éco-quartiers allemands, dont le fameux quartier Vauban de Freiburg. Ainsi, avec une densité légèrement moins importante, les quartiers nouvellement créés pour- raient se satisfaire d’équipements moins coûteux comme des Bus ou Trolleys à Hauts Niveaux de Services (HNS). Alors qu’une ligne de métro peut être évaluée entre 30 et 80 millions d’euros par kilomètre, une ligne de tramway entre 10 et 20, une ligne de bus ou trolleybus HNS ne coûterait qu’entre 6 et 10 millions d’euros par kilomètre. Ce raisonnement s’appuie donc sur ces considérations économiques d’investissements pour préconiser des densités plus faibles et de vanter dans ce cas, une plus grande place laissée aux 38 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 39. espaces verts et publics et en fin de compte une meilleure qualité de vie. Si les arguments écono- miques sont contestables (au point d’être révélés par l’auteur lui même, Thomas Berthet : « une économie réalisée ici ne se traduit-elle pas par une autre dépense ailleurs », d’autant plus lorsque l’on considère un quartier dense dont chaque équipement revient moins cher du fait du nombre de personne qu’il touche par phénomène de mutualisation), ils ont cependant le mérite de soulever le cœur des problématiques liées à la densité : la qualité de vie qu’elle génère. La pratique au cœur de l’acceptabilité Cet article est symptomatique de la peur suscitée par la densité sur les habitants. En effet, abordé le thème d’une densité moins importante a immédiatement conduit l’auteur à imaginer un quartier plus agréable à vivre et plus vert. Comme le soulignait l’Observatoire de la Ville suite à une étude de janvier 2007 « 65% des français pensent que la densité est quelque chose de négatif ». Sans revenir sur les façons de mesurer la densité et le fait que ce que l’on croit les plus denses ne le sont pas en réalité, la qualité de vie est souvent associée à tord à la densité. En effet, les nouveaux quartiers sont rarement aussi denses que les centres-villes dont le cadre de vie est habituellement apprécié. L’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) a essayé de déterminer si la densité posait problème en soit lors d’une étude en 2003. 227 personnes originaires de quatre quartiers parisiens de den- sités objectivement différentes ont ainsi été interrogées. Les résultats démontrent que la hauteur objective des bâtiments est un critère déterminant de la perception de la densité : plus les habitants vivent dans des bâtiments hauts, plus ils trouvent celle-ci oppressante et qu’un trop grand nombre de constructions sont présentes dans le quartier. À l’inverse, le tissu resserré et homogène des quartiers les plus anciens procurent un sentiment d’intimité et de bien être. Les petits immeubles considérés comme éléments à « taille humaine » sont réputés pour participer aux échanges entre les habitants. La convivialité et l’animation d’un quartier semblent donc être déterminantes quant à la perception positive de la densité. La diversité de la population, des activités et des espaces pouvant accueillir des animations est donc primordiale pour l’acceptabilité de la densité. Il ressort également de cette étude que les quartiers dans lesquels la densité est la plus facile- ment acceptée sont les quartiers les plus anciens. Ce sont non seulement ceux qui sont construits depuis le plus longtemps mais également ceux qui ont subi le plus de modification. Ainsi cela sug- gère un certain nombre d’ajustements, que la densité ne c’est pas faite en un seul projet. Et c’est bien évident, mais nous avons tendance à l’oublier au moment de faire sortir des (éco)-quartiers denses ex-nihilo en une seule opération. Les aménagements du projet Lyon Confluence vont à l’opposé de cela. En effet, Michel Des- vignes a proposé un plan d’aménagement dans le temps qu’il appelle processus de transformation. Cela permet ainsi d’avoir une « nature intermédiaire » au fil des étapes, et de la densification du pro- jet. Cela permet aux habitants de s’approprier l’espace et à l’inverse que celui-ci puisse muter en fonction des attentes et usages. Ainsi les espaces extérieurs sont beaucoup plus en lien avec l’habi- tat, et correspondent mieux aux espaces d’échanges et de vie pouvant faire de la densité un atout. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 39
  • 40. 1 LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? Bien sûr le processus est ici très accéléré, mais permet d’apporter une dimension supplémentaire à l’appréhension de la densité. Des aménagements similaires ont été proposés pour les aménage- ments de la ZAC de l’Union mais sur un temps plus long cette fois (le projet est censé s’étaler sur 15 ans). Nous n’étudierons donc pas en détail les aménagements de différents quartiers exemplaires en matière de densité, et ayant reçus ou non un bon accueil. On peut en effet, trouver des encenseurs et des détracteurs pour chacun de ces projets. Cela traduit avant tout qu’il existe autant de façon de faire la densité que de formes urbaines, voire plus. Nous pouvons alors explorer et exploiter toutes ces possibilités afin d’appliquer la densité et les qualités qu’elle peut procurer. La multiplicité de ces aspects permet également de favoriser la diversité sociale, fonctionnelle et d’attente afin de satisfaire harmonieusement le maximum de ménages. Des perspectives BIMBY La filière BIMBY est très récente en France et n’a que deux expérimentations à son actif. De plus ces premières expériences n’ont pas encore abouti totalement, notamment sur l’aspect régle- mentaire de la rénovation du PLU des villes tests. Cependant la promesse d’une opportunité de développement importante et d’un moyen de densifier le périurbain efficacement, et à moindre coût semblent correspondre aux préoccupations actuelles. En effet la démarche BIMBY se base sur le gisement de la maison individuelle en France. Or celui-ci est considérable, il regroupe 19 millions de maisons individuelles. La taille moyenne de leur parcelle est de 1 000 m2, plus de la moitié font plus de 600 m2 et la taille médiane des parcelles construites après 1975 pour la maison individuelle est de 700 m2. De plus, 220 000 maisons indivi- duelles sont construites tous les ans en France, ce qui représente le tiers des logements produits en France chaque année, mais consomme 97% de l’espace qui lui est alloué. L’équipe BIMBY a pour objectif que 1% de ce parc suive la méthode de division parcellaire chaque année. Ainsi près de 190 000 nouveaux logements verraient le jour chaque année en France. Ce chiffre correspond presque à la production annuelle de logements en ce moment et laisse donc de bons espoirs. 40 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 41. LA DENSIFICATION, PANACÉE DE LA VILLE DURABLE ? Les études s’accordent toutes sur une augmentation de la consommation d’espace. Ces dernières années, nos besoins d’espaces ont beaucoup augmenté, de par nos modes de vie, nos habitudes et par conséquent par notre choix de société. Cette évolution ne pourra pas continuer ainsi très longtemps. En effet, nous entamons un capital foncier non renouvelable et de plus en plus nécessaire pour ses fonctions environnementales et nourricières. Il convient alors de préserver nos ressources en espaces naturels et agricoles. Pour cela, il faut non seulement limiter les extensions sur ceux-ci, mais également avoir une logique de projet afin de densifier intelligemment les espaces déjà artificialisés. C’est à dire redéployer la ville sur elle même par l’aménagement de friches et de toutes autres opportunités, mais également densifier les espaces périurbains autour de logiques de projets, si possible portés par les habitants afin de rendre plus vivables ces espaces. En plus de cet aspect environnemental et d’orientation vers une société durable, la densité, même si elle rebute encore de nos jours, est aussi le cheval de Troie de l’urbanité. En effet pour qu’elle soit efficace, la densité exige une grande qualité de projet, et suscite par ces résultats ce que l’on attend de tout projet urbain : une mixité à tous points de vue favorisant échanges et vie de quartier. C’est ainsi que Jane Jacobs (cité par l’APUR, 2003) concluait sur la densité  : « … on peut parfaitement considérer comme un bien absolu le fait de rassembler des masses de gens dans une ville raisonnablement dense, si on croit que ces gens sont les bienvenus parce qu’ils apportent une gigantesque vitalité et parce que, sur un espace limité, ils constituent un trésor de différences et de possibilités ; beaucoup de ces différences sont d’ailleurs extraordinaires et inat- tendues, ce qui fait leur prix. Si on se range à cette opinion, on ne devrait pas simplement consi- dérer la présence de cette vaste concentration de population urbaine comme un enjeu purement matériel. On devrait également considérer cette présence comme un bienfait et s’en réjouir. Et cela en densifiant encore davantage la population là où cela est nécessaire pour renforcer la vie de la cité, et ensuite, en cherchant à instaurer une vie sociale manifestement animée dans la rue, et à susciter et encourager le maximum de diversité dans l’économie et le décor de la ville ». Les problématiques de densification que nous venons d’évo- quer sont donc d’une importance capitale et ont un caractère universel. C’est donc le cas sur le territoire de la CALL et de l’ex-Bassin Minier du Nord-Pas de Calais en général. Ce contexte a cependant des particularités et impose ses propres enjeux à la densité. Intéressons nous donc à ce territoire; VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 41
  • 42. 42 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 43. 2 L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ? A | HISTORIQUE MINIER B | TYPOLOGIES DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER C | ÉVOLUTIONS, PERSPECTIVES ET LEVIERS D | LA DENSITÉ COMME NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 43
  • 44. 2 L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ? A | HISTORIQUE MINIER L’activité minière Les premières exploitations de charbon dans le nord de la France datent de la fin du XVIIIe siècle dans le Valenciennois en raison d’une pénurie de bois qui accélère les recherches de gisements. L’économie du Nord-Pas-de-Calais repose, à l’époque, sur l’agriculture et plus particulièrement sur la culture du blé, de la pomme de terre et de la betterave à sucre en raison des approvisionnements incertains en provenance des Antilles. La région est donc avant tout rurale malgré la métallurgie de Valenciennes et le textile implanté à Calais, Béthune, Lille, Boulogne, Marquise, dans la Sambre et l’Avesnois. La découverte du charbon est tardive par rapport au bassin minier de Mons et Charleroi en raison de sa profondeur. En effet les techniques de repérage et d’extraction sont encore hési- tantes. En outre, l’exploitation minière se heurte à la Révolution et aux réflexions sur la notion de propriété puisqu’elle menace les compagnies minières concessionnaires. En résulte une disette de charbon à l’hiver 1793-94. La naissance de l’industrie charbonnière dans un milieu essentiellement rural, a bouleversé radicalement l’organisation des campagnes. Concomitante avec l’intensification et la mécanisation de la production agricole, elle favorise l’exode rural à cause du besoin de main d’œuvre des compagnies minières. De facto, le paysage s’en trouve profondément changé. Avec le développement urbain, les bourgs ruraux deviennent des villes ouvrières champignons, les réseaux routiers et ferroviaires se densifient, les compagnies s’approprient les terres cultivables (Gilbert Noël, 2007). C’est au XIXe siècle que le Bassin Minier connait une forte période de développement. Un dy- namisme démographique, une immigration importante, la reprise du développement du chemin de fer et l’évolution des techniques de recherche déclenchent des périodes de « fièvre des houillères » et l’essor de la métallurgie. Durant la décennie 1890, l’intervention de grands groupes métallurgiques marque un tournant dans l’exploitation et dans la recherche qui devient méthodique. Après 1870, le Pas de Calais fournit deux millions de tonnes de charbon par an et emploient 12 000 personnes. En 1913, la moitié de la production de France provient de la région. Le réinvestissement de la moitié des revenus a permis une modernisation continue de l’exploitation. Cependant, la production française a des difficultés à faire face à la concurrence de la Ruhr, de la Grande-Bretagne et de la Belgique. Durant les deux guerres mondiales, le Bassin Minier participe fortement à l’effort de guerre et doit subir l’occupation allemande en fournissant de la main d’œuvre et du charbon. C’est un véri- table enjeu stratégique pour les deux camps. C’est pourquoi, au sortir des deux guerres, la destruc- tion des infrastructures industrielles est importante. Cette destruction fournit néanmoins l’occasion de moderniser davantage l’exploitation. Priorité politique, le redémarrage rapide de l’extraction afin de ne pas dépendre des importations et ainsi de faire de la région un acteur majeur de la reconstruc- tion. À cette occasion les houillères sont nationalisées en Décembre 1944. La région prend aussi de l’importance dans la construction européenne amorcée par la Communauté Européenne du Char- bon et de l’Acier (CECA), basée sur les échanges de charbon et d’acier. Toutefois, le développement de nouvelles énergies et la crise financière des années 1970 pré- cipitent la fin du bassin qui reposait essentiellement sur une économie mono-industrielle. L’erreur de stratégie de développement industriel pour le Bassin Minier a été de se reposer uniquement sur le 44 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 45. charbon et de ne pas s’orienter vers les activités de la seconde révolution industrielle : la chimie fine, la pharmacie, la mécanique de précision ou encore l’automobile (Éric Bussière, 2002). Le niveau de production et le nombre de mineurs ne font que baisser jusqu’au 21 Décembre 1990, jour où on a remonté au site 9-9 bis de Oignies, pour la dernière fois du charbon. Figure 19 : L’histoire du Bassin Minier du Nord-Pas de Calais – Source : Bassin Minier Uni, Dossier de presse, 2012. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 45
  • 46. 2 L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ? Par conséquent, les mines ont fortement marqué le paysage socio-culturel de la région. Mal- gré son caractère rural au XVIIIe siècle, l’identité de la région repose de plus en plus sur un paysage industriel bien particulier. Outre les terrils, les carreaux de fosse et les corons comme autant de symboles, le corporatisme, les valeurs et la lutte ouvrière constituent l’identité minière. De même, les associations (fanfares, clubs sportifs), le mouvement hygiéniste (complexe sportif art déco de Bruay-La-Buissière) sont le fruit du paternalisme anonyme des concessions minières (Philippe Hur- taux, Alexandre Mikolajczak, Stéphane Mouraret, Gauthier Ternisien, 2010.) auquel nous allons nous intéresser à travers l’étude de l’urbanisme et de l’habitat minier. Le mode d’urbanisme minier Comme nous l’avons évoqué, l’urbanisme minier s’est développé sur un territoire dont la voca- tion était à l’époque essentiellement agricole. Ce vaste territoire, encore dépourvu d’infrastructure lourde, était uniquement parsemé de quelques cités historiques comme Douai, Valenciennes ou Bé- thune. L’influence de ces dernières n’étant pas suffisante à l’époque, c’est donc par un système de concessions minières accordées par l’État que le territoire a été façonné. « Les compagnies, privées et autonomes, décidaient donc seules des choix d’aménagement à l’intérieur de la concession. Les pouvoirs locaux n’avaient aucun droit de regard sur le développement urbain de leur commune. » (Mission Bassin Minier, 2008) Ces concessions ont connu différentes organisations, il y en avait 43 avant 1914 reparties entre 18 compagnies minières. L’activité augmentant il y en a eu jusque 27 différentes en 1925 avant d’être nationalisées à la sortie de la seconde guerre mondiale (en 1946) dans une nouvelle struc- ture : les Houllières du Bassin Nord-Pas de Calais (HBNPC). Elles comprendront d’abord 9 groupes miniers, puis avec le recul progressif de l’activité n’en comptera plus que 5 à la fin des années 70. C’est donc en centrant l’urbanisme sur la production que les compagnies minières ont imaginé leur implantation. Tous les sites sont donc structurés de la même façon selon une base constituée - une fosse pouvant comprendre plusieurs puits et chevalements, lieu d’accès et d’extraction du d’ : - un ou des terrils afin de stocker les résidus d’extraction non-exploitables charbon - de cavaliers, voies ferrées permettant le transport du charbon et du matériel entre les différents - une ou des cités minières afin de loger l’ensemble des salariés, ouvriers comme responsables ou sites ingénieurs 46 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?
  • 47. Figure 20���������������������������������������������������������������������������������������������������������������� ������������������������������������������������������������������������������������������������������������������  : La structure minière Terril-Fosse-Cité Minière, site du 9/9bis et la Cité Declercq à Oignies – Source : Alti- mage P. Frutier pour MBM Ces structures ont donc émergé partout sur le territoire sans autre logique que celle de l’impor- tance et de la découverte des gisements. Même si l’ex-bassin minier du Nord-Pas de Calais est maintenant identifié comme une entité morphologique, ce mode de développement accumulatif et aléatoire n’a pas aidé à la lecture de celui-ci. En effet, sans concertation entre les compagnies, cer- taines installations se situent sur plusieurs communes et laissent parfois des espaces vides. Une étude a d’ailleurs été menée sur l’évolution de villages ruraux dans le bassin minier. Elle cite entre autres, les exemples du village de Lozinghem et de Maisnil-les-Ruitz (voir figures 21 et 22). Le village de Lozinghem a conservé son aspect traditionnel même s’il est devenu un village binu- cléaire par la projection à l’extérieur du village de la cité minière. Le tissu urbain de Maisnil-les-Ruitz a été plus profondément restructuré par l’activité charbonnière (Gilbert Noël, 2007). Le charbon et particulièrement son point d’extraction devient le cœur de la forme urbaine, soit dans une nouvelle entité ex-nihilo attachée presque artificiellement à l’ancienne, soit en modifiant un profondeur le village. Dans les deux cas, les extensions liées à l’activité minière ont profondément changé la morphologie des villages et témoignent de cette organisation aléatoire livrée à la produc- tivité. VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ? | 47
  • 48. 2 L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, QUELLES PERSPECTIVES ? Figure 21 : Organisation spatiale de la commune de Lozinghem (Source : NOËL G., Étude patrimoniale des communes de la Communauté d’Agglomération de l’Artois.com, 2007) Figure 22 : photographie aérienne de la commune de Maisnil-les-Ruitz (Source : Google Earth 2007) 48 | VERS UNE NOUVELLE ÉTAPE DE L’HABITAT INDUSTRIEL MINIER, LA DENSIFICATION ?