1. FONDS VERTS
Un marché atone
Avril 2012
E
n 2008, on parlait de « bulle verte » et les fonds climat ou énergies propres se multipliaient.
Le centre de recherche ISR de Novethic avait consacré une étude à près de 200 fonds
thématiques environnementaux européens recensés à l’époque. Quatre ans et deux
crises financières majeures plus tard, il a analysé les évolutions de ce marché. Il est composé
en principe de fonds sélectionnant des actions d’entreprises qui, soit exercent exclusivement des métiers
liés à l’environnement, soit réalisent une part importante de leur chiffre d’affaires grâce à des
activités vertes.
Une niche bien peu dynamique
194 fonds thématiques dont la stratégie fait explicitement référence à l’environnement gérés dans 18 pays européens ont été
identifiés. Les fonds thématiques exclusivement liés au bien-être social ou à la santé ont été écartés. De même, les fonds dont la
dénomination associe ressources naturelles et durabilité n’ont pas été retenus dans cette étude parce qu’ils sont investis dans des
entreprises d’extraction minière, pétrolière ou gazière, voire dans des producteurs d’intrants dédiés à l’agriculture intensive (pesti-
cides, engrais, semences).
Évolution des encours des fonds verts, en milliards d’euros
Des encours très modestes
20 18,2 17,2 Avec 13,3 milliards d’euros d’encours en Europe, il
est difficile de considérer que les fonds thématiques
environnementaux contribuent de façon significative
15 13,2 13,3 à doper la croissance verte et à amener l’épargne
des particuliers, tout comme les investissements
des institutionnels, vers des entreprises cleantech.
10 À titre de comparaison, rien qu’en France, les fonds
ISR pesaient 64 milliards d’euros à fin 2011.
5
0 L’élan de 2007 est retombé
2008 2009 2010 2011
Les fonds thématiques environnementaux ont
Répartition des fonds verts par date de création suscité un intérêt croissant jusqu’en 2007 année de
,
création de près d’un tiers du panel. L ’effet conjugué
de la crise financière, qui a frappé de plein fouet les
70
fonds verts, et le recul de l’intérêt pour les questions
60 58 environnementales lié à l’échec du Sommet de
Copenhague expliquent sans doute qu’on a retrouvé,
50 en 2011, le niveau de création d’avant 1995. En
41 outre, une trentaine de fonds créés depuis 2006 ont
40 déjà été clôturés.
30 Si deux tiers des fonds sont gérés dans quatre
pays (France, Suisse, Royaume-Uni et Allemagne), il
20 16 18 14 15 14 faut noter une baisse sensible du nombre de fonds
9 environnementaux allemands (23 fonds en 2011 soit
10 4 5 -34% par rapport à 2008) et le développement de
l’offre de produits suisses (+29%).
0 < 1990 1991 1996 2001 2006 2007 2008 2009 2010 2011
1995 2000 2005
Fonds thématiques environnementaux, un marché atone - Enquête réalisée par le centre de recherche ISR de Novethic - Avril 2012 1
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2. Données financières
Évolution de la performance annuelle moyenne des fonds verts
40
30 27,2%
20
10
6,6%
2008 2011
0
2009 2010
-10
-20
-19%
-30
-40
-50
-41,6%
Une performance financière handicapante
La crise financière a particulièrement fragilisé des fonds caractérisés par leur faible diversification. Les entreprises cotées vertes ne
sont pas si nombreuses. Leur développement dépend souvent de leur capacité à obtenir des crédits et leur attractivité boursière est
pénalisée par leur manque de liquidité. C’est pourquoi elles ont été lourdement sanctionnées par les marchés en 2008, année noire
s’il en fut. Un phénomène similaire s’est produit en 2011, renforcé par la réduction drastique des subventions publiques accordées
aux producteurs d’énergies renouvelables. Ce contexte a éloigné encore un peu plus de ces fonds les investisseurs, qu’ils soient
particuliers ou institutionnels.
Détail de la croissance des encours verts entre 2008 et 2011, en milliards d’euros
20
15 13,21 13,34
Collecte
Performance
+0,91
10 -0,79
5
0
2008 2011
Une collecte faible
En quatre ans, le panel des 194 fonds thématiques environnementaux analysés par Novethic n’a pratiquement pas évolué avec un
peu plus de 13 milliards d’euros d’encours. Les fonds verts existants ont beaucoup souffert tant en termes de performance que
de collecte, les deux étant relativement liées. Si entre 2008 et 2011, 910 millions d’euros ont été collectés sur les marchés pour
investir dans la «
thématique environnementale, il est important de souligner que les fonds concernés se sont progressivement
»
éloignés des « pure players » pour investir dans de plus grosses capitalisations, moins risquées sur un plan financier mais nettement
moins orientées vers un bénéfice environnemental mesurable.
La contribution des marchés cotés à la croissance verte est donc plus que modeste. Pour évaluer les besoins de financement,
on peut citer le Syndicat des Énergies Renouvelables, qui estime à 7 milliards d’euros par an les investissements nécessaires en
France afin que les énergies renouvelables représentent 25% du mix énergétique à horizon 2020.
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3. Analyse des thématiques et des portefeuilles
Le positionnement marketing des fonds verts n’a pas considérablement évolué en trois ans même si le nombre
de fonds cleantech, climat et environnement a sensiblement augmenté, passant de 55% à 67% du panel entre 2008 et
2011. La part des thématiques plus spécifiques, comme l’eau ou les énergies alternatives, a elle légèrement reculé.
Les sociétés de gestion publient très peu d’informations sur leurs critères d’investissement
vert. Rares sont celles qui publient un seuil minimum d’activités environnementales pour les entreprises éligibles. De
même, il est difficile de savoir si des critères ESG sont pris en compte en complément de l’approche thématique ce qui
explique qu’un quart seulement du panel peut être qualifié d’ISR.
Des thématiques trompeuses Les 194 fonds thématiques du panel ont été classés
Nombre de fonds par Thématique suggérée par le nom du fonds dans six catégories :
Thématique effectivement investie • au : activités liées à la gestion, la distribution et le
E
100
90
traitement de l’eau ;
• nergies alternatives : énergies renouvelables ou
É
80
« propres » (fabrication de machines, développement et
62
60 exploitation) ;
• Cleantech » : activités liées à l’eau, aux énergies
«
38
40 34 34 renouvelables ou à la gestion des déchets ;
25
20
17 15
14 16 • limat : production d’énergies renouvelables ou acti-
C
13 12 11
7 vités liées à l’efficience énergétique afin de lutter
0 0 contre le changement climatique ;
0
h
t
at
u
at ne
ra t
en e
na ies
• nvironnement : ensemble des activités visant à
E
en
ue
e
le
es
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du en
Ea
m nc
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ta
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ne ma
Cl
protéger l’environnement (regroupe les catégories
ne
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on
Cl
précédentes) ;
vir erf
lo
vir
ve
en P
En
Dé
• éveloppement durable : toutes les activités de
D
Thématiques très larges l’environnement auxquelles s’ajoutent la santé ou le
Seule la moitié des fonds du panel présente des investissements bien-être.
focalisés sur la thématique annoncée par leur marketing. 34%
ont des portefeuilles placés dans de multiples secteurs d’activité Les fonds du panel ont été analysés à l’aune des entre-
alors qu’ils ne sont que 6% à être présentés comme tels. La théma- prises en portefeuille grâce à des bases de données
tique eau fait exception puisque deux fonds sur dix-sept ne sont pas spécialisées. Dans l’ensemble, les secteurs d’activité
cantonnés aux activités liées à l’eau. investis par les fonds environnementaux sont plus
diversifiés que ce que les thématiques affichées
Des choix d’entreprises contestables laissent entendre. Certains fonds s’autorisent même à
investir dans tous les secteurs d’activité, ce qui a conduit
Si les termes « énergie propre ou «
» énergie alternative évoquent les
» le centre de recherche de Novethic à créer deux autres
énergies renouvelables, nombre des fonds concernés considèrent que catégories :
le gaz et l’énergie nucléaire sont éligibles car moins polluants que le
• erformance environnementale : fonds qui ne privi-
P
pétrole ou le charbon.
légient pas les activités vertes mais sélectionnent
Certains gérants choisissent d’investir dans des conglomérats industriels,
les entreprises sur des critères environnementaux
des énergéticiens, voire des pétroliers, alors que les technologies vertes
(exemple : cimentiers économes en énergie) ;
ne représentent qu’une toute petite partie de leur chiffre d’affaires.
Enfin, l’analyse du panel montre que 38% des fonds sont investis • ucune thématique : fonds dont la composition et le
A
de façon minoritaire dans des secteurs sans lien apparent avec la processus de gestion ne révèlent aucune orientation
thématique affichée (automobile, BTP industries extractives…).
, environnementale.
Répartition par thématique réellement investie
Aucune thématique
Focus sur la composition des fonds 6%
« énergies alternatives » Environnement
15%
Seuls 38% des fonds dits « énergies propres », semblent investis Énergies
comme tels. 56% d’entre eux élargissent leur univers d’investis- alternatives
sement aux entreprises liées à l’eau, au traitement des déchets
ou à la lutte contre le changement climatique. Plus surprenant, 38%
6% de ces fonds sont investis dans des secteurs très éloignés
des énergies renouvelables. Climat
29% Cleantech
12%
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4. Financements institutionnels
Il semble difficile de trouver les moyens de financer la croissance verte européenne. Quels que soient les
modes de financements (marchés cotés, capital investissement, financements de projets), les chiffres restent
modestes, voire en baisse, malgré l’objectif de 20% d’énergies renouvelables à horizon 2020 fixé par l’Union
Européenne. La déconfiture du solaire et de l’éolien terrestre n’est pas compensée par l’émergence
de nouveaux secteurs comme les énergies marines renouvelables ou le développement de l’efficience
énergétique.
En quelques chiffres symboliques, le centre de recherche de Novethic vous propose une mise en perspective :
France
865 millions d’euros, c’est le montant investi dans des fonds thématiques verts à fin 2011 par
les institutionnels français d’après l’enquête annuelle de Novethic. 27% de ces encours (235 M€) sont aussi ISR.
-30% d’investissements des fonds de capital-risque dans les cleantech, par
rapport à 2010.
Source : Panorama des cleantech en France en 2012 de Green Univers
Europe
36 megawatts issus de la première centrale solaire pholtovoltaïque européenne de Toul-Rosières
dans l’Est de la France ont été acquis en janvier 2012 par le fonds européen 2020 pour l’énergie, le changement
climatique et les infrastructures Marguerite. Créé pour financer des projets d’énergies propres dans 27 pays
européens par des investisseurs publics et privés, le fonds Marguerite devrait investir au global 1,5 milliard d’euros.
16 milliards d’euros, soit 30% des prêts accordés par la Banque Européenne d’Investissement
(BEI) ont financé des actions en faveur du climat en Europe dans des secteurs aussi variés que l’énergie, les
transports, l’eau, l’assainissement, les déchets solides, la forêt et la recherche, développement et innovation en 2011.
Monde
+14% , c’est la croissance mondiale des investissements dans les cleantech en 2011. Pendant que les
États-Unis augmentaient de 65% leur parc d’installations solaires, la Chine décidait d’un plan quinquennal 2011-
2015 pour atteindre 40% d’énergies renouvelables en 2040 financé à hauteur de 300 milliards d’euros.
41 milliards de dollars, c’est le montant des transactions de fusions-acquisitions dans les cleantech
en 2011, soit 153% d’augmentation par rapport à 2010.
Novethic, filiale de la Caisse des Dépôts, est un centre de recherche sur l’Investissement Responsable (ISR) et la Responsabilité Sociale
des Entreprises (RSE), ainsi qu’un média expert sur le développement durable. Créé en 2001, Novethic est aujourd’hui l’unique source
de statistiques sur l’ISR en France. Le centre de recherche en analyse les grandes évolutions et y consacre des études thématiques.
Depuis 2009, Novethic labellise les fonds ISR disponibles sur le marché français. www.novethic.fr