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MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss
mmmaaagggaaazzziiinnneee
NNNººº666 Avril 2015 – Publication trimestrielle – 2e
année
LLLeeesss aaaccctttuuuaaallliiitttééésss fffeeerrrrrrooovvviiiaaaiiirrreeesss ddduuu sssuuuddd---ooouuueeesssttt eeeuuurrrooopppéééeeennn
ÉVASION Des trains en Argentine ÉTRANGER Les OFP en Espagne
Publication trimestrielle
Version papier reliée :
France : 12,50 € / Europe : 16 €
Le TGV, une menace
pour le futur du
transport ferroviaire ?
Et aussi :
Signalisation : la variante sud-ouest
La Corrèze et le Cantal en bleu d’Auvergne
De Mignaloux à Jardres sur une desserte Fret
Et le reste de l’actualité !
MMIIDDIIEExxpprreessssmmaaggaazziinneeNNºº66
Pour une nouvelle ambition ferroviaire française
Déclaration commune
ans l'indifférence ou l'ignorance des politiques, des médias, du public, la France, pays du TGV et des trains à l'heure, est en voie
de perdre son statut de grande nation ferroviaire et de devenir un maillon faible de l'Europe ferroviaire. Pourtant nos territoires, nos
entreprises, nos ports, pour renforcer leur identité, leur compétitivité, leur attractivité ont impérativement besoin de bonnes
connexions ferroviaires entre eux et avec l'Europe. Il le faut pour valoriser notre position de carrefour européen occidental. Comme il le faut pour
renforcer les liens entre nos ports, maritimes et fluviaux, et leurs hinterlands. A ces enjeux s'ajoutent les grands défis transverses,
environnemental, énergétique, climatique.
Nous vivons la fin de l'ère des opérateurs nationaux exclusifs, supposés être en mesure de répondre à tous les besoins de leur territoire,
chacun d'eux étant le seul utilisateur de « son » réseau, placé sous son contrôle. Ce qui ne veut en aucun cas dire que ces opérateurs publics
historiques n'ont pas encore un rôle majeur à jouer. Mais les modalités en seront différentes. A défaut, ils courent à leur marginalisation. Le
moment est venu de jouer la carte de la diversité et d'une nouvelle modernité ferroviaire européennes, d'ouvrir notre réseau ferré national à de
nouveaux opérateurs, publics ou privés, de vendre notre savoir-faire ferroviaire dans d'autres pays.
Le niveau actuel d'utilisation de notre réseau ferré national, même avec les nouveaux opérateurs de fret, ne permet plus d'assurer son
équilibre économique. Ce déséquilibre structurel, insoutenable, menace sa pérennité. La France a un besoin impérieux de « nourrir » son réseau
de nouvelles utilisations, de nouveaux opérateurs. Ce qui créera de nouveaux services au public et aux entreprises. C'est le rôle du gestionnaire
du réseau, de statut public, indépendant, de les susciter et les prospecter. Il est appelé à devenir le pilier de la politique ferroviaire française. Il y
a urgence d'action.
Même s'il reste parmi les plus sûrs, les experts alertent sur le vieillissement de notre réseau et son manque d'ouverture aux technologies
modernes. Est-il acceptable en 2015 que des trains de fret se « perdent » encore ? La modernisation de notre réseau, appuyée sur la révolution
numérique, incluant le contrôle et la connexion centralisés des points sensibles, recèle d'importants gisements de sécurité, de fiabilité, de
productivité, d'économie d'énergie. Prolongée par un réseau capillaire décentralisé, géré « en proximité », cette modernisation, augmenterait la
performance nationale, européenne et territoriale du mode ferroviaire. Dès lors, pourquoi ne pas en faire un projet franco-européen contribuant à
la relance économique, mobilisateur pour des start-up françaises ?
Le fret ferroviaire, en quelques années, à contre-courant de l'exigence de report modal portée par le Grenelle de l'environnement, a chuté
en France de 16 à 9 % de part de marché. Ce recul spectaculaire, ignoré du grand public, est une exception européenne qui devient un handicap
logistique pour notre économie. La comparaison avec l'Allemagne est alarmante qui, avec 17 % de part de marché, connaît une croissance que
se partagent l'opérateur national DB Schenker et ses concurrents. Le recul de l'offre pour le wagon isolé en France est lourd de conséquences à
court et long terme. A l'heure où des chaînes logistiques virtuelles structurent le transport de fret, à l'échelle planétaire, le retard numérique du
transport ferroviaire est incompréhensible. La médiocre traçabilité qui en résulte, la complexité de l'accès aux sillons, affaiblissent son potentiel
logistique et écologique.
Dans le domaine des voyageurs, si le TER reste un succès de fréquentation, les régions ne peuvent plus assumer la montée de son coût.
Le Transilien est dans la même situation, le vieillissement du réseau et la baisse de qualité pèsent sur la vie quotidienne des Franciliens. Les
Intercités se dégradent depuis l'avènement du TGV, il y a plus de trois décennies. Le TGV, polarisé sur la concurrence aérienne, fragilisé par les
low cost, peine à trouver un nouveau souffle. La France a repoussé l'échéance de l'ouverture à la concurrence, au risque de voir son opérateur
national, et ses filiales, écartés des appels d'offres européens. Ce délai, à tout le moins, doit être utilisé pour traiter nos points faibles.
Le ferroviaire français, et il faut veiller à ce que la réforme ne l'accentue pas, souffre d'un excès de centralisation qui génère des charges de
structures élevées. Il a besoin de réactivité, d'adaptabilité, de proximité, d'un développement de sa capacité d'initiative locale. C'est une évidence
pour le TER et les Intercités. C'est tout aussi vrai pour le fret qui, contrairement à d'autres pays, dont l'Allemagne, manque cruellement de
racines territoriales et portuaires. Des PME ferroviaires réactives et flexibles pourraient aller chercher et organiser les envois dans les territoires
et amorcer les chaînes logistiques modernes à dominante ferroviaire dont notre économie a besoin. Beaucoup d'entreprises sont prêtes à
s'impliquer dans des initiatives locales pour peu qu'elles soient menées dans un esprit de partenariat et d'innovation. En particulier pour les
lignes capillaires, dont le potentiel logistique est sous-estimé, dont il faut résolument exclure la fermeture. Le bilan des premiers OFP, opérateurs
ferroviaires de proximité ou portuaires, appelle à investir ce champ d'innovation.
Le ferroviaire illustre le paradoxe français : d'un côté un potentiel technique et humain que, malgré son recul, bien des pays peuvent encore
nous envier, de l'autre la peur de l'avenir et l'illusion que cet avenir passe par le retour à un passé révolu et idéalisé.
La France, si elle l'ose et si elle le décide, peut figurer parmi les grands gagnants de l'Europe ferroviaire. La réforme le permet. Encore faut-
il que sa mise œuvre ne soit pas détournée de son objectif originel, renforcer l'efficacité de notre système ferroviaire. Pour cela, l'Etat stratège
doit impulser une stratégie innovante, appuyée sur un secteur public différencié et renforcé, une stratégie ouverte à la concurrence, à l'initiative
privée, à l'Europe.
Nous attendons du transport ferroviaire qu'il devienne un acteur du développement durable et de l'attractivité de la France. Nous mesurons
l'ambition, l'énergie, l'esprit transpartisan qu'implique ce grand projet national et européen. Nous sommes prêts à y prendre notre part.
François Asselin, président de la CGPME, Jacques Kopff, président de l'AFPI, Jean Sivardière, président de la FNAUT,
Xavier Beulin, président de FNSEA, André Marcon, président de CCI France, Louis Nègre, président de la FIF.
Denis Choumert, président de l'AUTF, Louis Nègre, président de la FIF,
D
ÉÉddiittoo
Chers lecteurs,
L’actualité ferroviaire est riche ces derniers mois. Tout d’abord, l’excellente
initiative commerciale de la SNCF en remettant en service un train classique
Paris – Bordeaux, accessible et bon marché, qui redonne enfin un peu
d’importance aux trains classiques face au « tout TGV » que beaucoup ont
dénoncé. Parmi, la Cour des Comptes qui, sous couvert d’un argumentaire
discutable, promeut l’abandon pur et simple de certaines relations les moins
rentables.
Mais pour mettre quoi à la place ? Certes la loi Macron permet désormais
de voyager en bus sur de la longue distance, mais détruire une infrastructure
capacitaire ferroviaire, avec son exploitation et ses employés, pour la remplacer
par des bus polluants sur des routes congestionnées, ce n’est pas un progrès. Il
n’aura pas fallu attendre très longtemps puisque chaque événement est
l’occasion pour supprimer des services ferroviaires déjà fragiles comme
l’effondrement de Luzenac qui a entrainé la suppression du train de nuit Paris –
Latour-de-Carol dans l’intégralité de son parcours.
Le client, autrefois appelé usager, doit se résoudre à cet état de fait, dans
un « déménagement » du territoire qui chamboule les habitudes et éloigne
chaque fois un peu plus les habitants de leur campagne pour se concentrer dans
des grandes villes reliées par un TGV hors de prix.
Est-ce la fin du train ? En France, les choses ne prennent pas le bon
chemin, et le cri d’alarme publié ci-contre n’est qu’un appel à la prise de
conscience de chacun pour défendre ses services à la mobilité, et que nous
devons relayer pour défendre notre aménagement du territoire menacé.
Camille PRIETO
Sommaire
Numéro 6 – Avril 2015 - Trimestriel
Actualités 4
Actualités internationales 10
Technique : la variante régionale Sud-Ouest des gares de voie directe
type unifié SNCF
12
Reportage : Balade de Mignaloux à Jardres 19
Nostalgie : Du bleu d’Auvergne au beau milieu du Cantal 24
Images d’histoire : Les Z7100 en Ariège 30
Étranger : Les OFP en Espagne 32
Partenariat : Revue de presse 37
Politique des transports : Volte-face sur le TGV 38
Évasion : Vapeurs en Argentine 46
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paraissant 4 fois dans l’année.
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Directeur de la publication
Camille PRIETO
Rédacteur en chef
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12,50 € libellé à l’ordre de :
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Ont contribué à ce numéro avec nos plus
grands remerciements :
Romain AMIC-DESVAUD, Thomas ARPIN, José
BANAUDO, Jérémy BOUEY, Tristan CARRÉ,
Didier DELATTRE, Alain DEMAREZ, Arnaud
DEMAREZ, Damien DERAY, Michel FALCOU,
Alexandre GILLIERON, Mikael GUERRA, Rémi
Lapeyre, Javier LÓPEZ, Víctor LURI, Gérard
MARTINAT, Nil RUIZ, Jean-Philippe SALMON-
LEGAGNEUR, Jérôme PAGÈS, Guillaume
POSTEK, Flavio TECCO, Jean THOUVENIN,
Jean-Louis TOSQUE, Georges TURPIN, Jean-
Louis VIDAL, Baptiste WEYLAND
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L.335-3 du Code de la Propriété Intellectuelle.
En couverture
Le 1
er
décembre 2013, le TER 865730
Bordeaux – Sarlat passe au pied des signaux
mécaniques du Buisson avec les X2221,
Xr6072 et X2233. ©J.-P. Salmon-Legagneur
En partenariat avec :
AAccttuuaalliittééss
4 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Latour de Carol sans trains !
ncore un
coup dur
pour le
rail pyrénéen. Le
samedi 28 mars 2015,
à la suite d’un
glissement de terrain
sur la RN 20 à hauteur
du village de Luzenac,
la préfecture de
l’Ariège décidait
l'interdiction de cette
portion de nationale et
la déviation du trafic
sur l'ancienne route
avec restriction à 12
tonnes sur le pont
SNCF de Luzenac.
L'affaissement de
terrain menaçant la
voie ferrée, le trafic en
a été interdit. Aucun train ne circule dès lors de Foix à Latour de Carol, et pas de cars non plus.
L’accès à Luzenac pour la desserte de l’usine de talc reste ouvert. Cependant, toute circulation de trains de voyageurs reste
suspendue. Pire, le train de nuit Paris – Latour de Carol 3971/3970 a été tout simplement supprimé, sans aucun report possible, et la
vente suspendue jusqu’au mois
de septembre.
La section de ligne
Luzenac – Ax-les-Thermes sera
gérée suivant la procédure de
« ligne fermée pour travaux »,
ce qui n'interdit pas la circulation
de trains de travaux pour garder
les installations en service. Pour
pouvoir maintenir les
installations en état,
(fonctionnement du circuit de
voies) un train doit circuler au
moins toutes les 72 heures
entre Foix et Luzenac, et c'est
un Régiolis qui en a la charge
chaque matin. Les rames ne
peuvent circuler qu'en mode
diesel.
Le pont SNCF est gardé
par la maréchaussée. Pas de poids lourds ni de cars après Luzenac. La fermeture du tunnel routier du Puymorens et les travaux dans
celui de Foix commencent à rendre compliqué l’accès dans l’Ariège profonde. De quoi s’inquiéter aussi car la Renfe songe à ne plus
desservir Latour de Carol en imposant désormais le terminus à Puigcerdà. Si tel est le cas, plus aucun train n’arrivera à Latour de Carol !
Malgré tout, SNCF met en place, à compter du samedi 11 avril, des services de minibus entre les gares de Foix et de Latour-de-
Carol. Ces véhicules, d'une capacité de 22 places, remplacent les trains restent coincés à Foix. Mais aucune prise en charge pour les
voyageurs de feu le train de nuit.
Côté déviation routière, également, les choses avancent. Les travaux de renforcement du pont SNCF de Luzenac vont démarrer la
semaine prochaine et devraient durer dix à quinze jours. En attendant, l'ouvrage d'art reste interdit à la circulation pour tous les véhicules
d'un poids supérieur à 12 tonnes et d'une hauteur dépassant 3,50 m. ©C.Prieto2015
E La desserte de talc par ECR
à Luzenac. ©N.Ruiz2013
Ambiance en gare de Luzenac en 1988.
©J.-L.Tosque1988
AAccttuuaalliittééss
MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 5
Eurostar commence à fréquenter le sud !
la fin de l'été 2014, les trois rames Transmanche (3203/04 +
3225/26 + 3227/28) assurant du service TGV entre Paris et Lille (et
les antennes) ont été retirées du service et envoyées
immédiatement à Conflans Jarny pour ferraillage à Baroncourt. Début 2015, la
3203/04 est revenue au Landy puis a rejoint les ateliers d'Hellemmes. Le but
de cette manœuvre était d’utiliser les remorques de cette rame pour tester les
motrices Eurostar sortant de rénovation avec la nouvelle livrée bleue qui sera
appliquée progressivement à toute la flotte Eurostar.
Le 25 mars 2015 eut lieu la première circulation de cette composition
colorée avec une marche d'essai entre Hellemmes et Dunkerque des motrices
3007 et 3008 bleues avec les remorques de la 3203/04 en livrée TGV. Mais il
ne s'agit pas d'un simple lifting peinture ! En effet, les motrices 3007/08 sont
des motrices anglaises, donc pas équipées pour circuler sous 1500V (pour
rappel il y a 4 séries de rames Eurostar : les 3000 Anglaises, les 3100 Belges, les 3200 Françaises et les 3300 NOL aujourd'hui GBE).
Seules quelques rames 3200 sont aptes à 1500V pour les dessertes BSM et MSC. Cette rénovation consiste donc à rendre les rames
3000 également compatibles à 1500V pour avoir un parc plus important.
Ces essais testent le comportement des motrices sur ligne classique puis sur LGV (AR Lille Calais) puis la validation a 200 km/h
sous 1500V et la TVM 300 (aller-retour Lille – Poitiers). Cette circulation avec une telle composition panachée sera unique, les prochains
essais se dérouleront certainement avec une rame entièrement bleue à la sortie de rénovation des remorques. La rame 3203/04
rejoindra alors définitivement Baroncourt. ©D.Delattre2015
Jeudi 26/03 essai sur LGV Nord
Hellemmes 8.57 Calais Frethun 10.35
Lille Europe 9.00 Hondeghem 11.00
Hondeghem 9.17 Lille Europe 11.21
Calais Frethun 9.48 Hellemmes 11.28
Vendredi 27/03 validation à 200 km/h sous 1500 V
Hellemmes 9.56
Lille Flandres 10.04/22
Roissy 11.29
Massy 12.07
Poitiers 13.46
À
Ci-dessous à gauche : des essais ont également eu lieu en prélude de la mise en service commerciale le 1er
mai 2015 d’une relation directe Londres – Marseille. La première salve
d’essai s’est effectuée le 1er
juin 2013 avec la rame 3218-17 sur la marche 9086, ici vue à Marseille Saint-Charles. Puis une autre circulation a eu lieu le jeudi 19 mars avec marche
9084/9087. ©D.Delattre2013
Au départ de Lille Flandres. ©D.Delattre2015 Passage à Futuroscope. ©A.Demarez2015
Passage à La Tricherie. ©A.Demarez2015
AAccttuuaalliittééss
6 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Le grand retour du Corail Paris – Bordeaux
uccès en folie pour la mise en service les fins de
semaine uniquement d’un train Corail Intercités Paris
– Bordeaux. La mise en vente au prix d’appel de 15
euros a rendu le train complet très rapidement. En effectuant le
parcours Paris – Bordeaux en 4 h 39, et desservant Angoulême,
Poitiers, Saint-Pierre-des-Corps et Les Aubrais, ce train est une
façon de concurrencer le covoiturage selon le communiqué de
presse SNCF en proposant une offre souple et accessible à toute
la clientèle. Composé de 9 voitures Corail aptes à 200 km/h, il
réutilise en fin de semaine un coupon utilisé en semaine sur Paris
– Bourges – Montluçon dont la composition est la suivante : 2
A10tu, 1 B11u et 6 B10tu.
Il est cependant regrettable que les horaires de ce train
soient exclusivement conçus pour le départ en weekend des
Parisiens. Dans le sens province – Paris, aucune alternative au
TGV n’est possible. Espérons que le succès permette la mise en
place d’un train également le vendredi et le lundi, dans les deux
sens, pour assurer une parfaite mobilité de la clientèle touristique
et étudiante qui revient à son domicile en fin de semaine ; tel était
le but de la création de ce train. ©C.Prieto2015
S
Le lundi 6 avril 2015, la BB 26034 déboule dans les
champs de vigne de Lalande de Pomerol avec le 4021
Paris-Austerlitz – Bordeaux. ©C.Prieto2015
Le même jour, le même train, mais quelques kilomètres plus
au nord à Saint-Avit. ©J.-P.Salmon-Legagneur2015
AAccttuuaalliittééss
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Sur les traces de l'Aquitaine : en cabine du premier Corail200 Paris Austerlitz – Bordeaux
l est 6 h 09 ce matin lorsque je prends mon service en gare de Paris-Austerlitz. Nous sommes aujourd'hui le samedi 4 avril
2015, premier jour de circulation commerciale des trains Intercités 4021 et 4020 entre Paris-Austerlitz et Bordeaux Saint-Jean,
et j'ai l'honneur d'assurer la conduite du 4020, départ de Paris-Austerlitz à 6h58. Après un passage à mon casier afin de
récupérer les documents nécessaires au service, je me dirige vers le bâtiment voyageur. Prise de contact avec le collègue de
l'escale : « C'est toi qui conduit le 4021 ? Tu trouveras ta rame et ta locomotive sur la voie 14 ! »
En quittant son bureau, je remarque qu'un petit buffet proposant des boissons ainsi que des cannelés bordelais a été mis à
disposition des voyageurs pour l'inauguration de cette nouvelle relation. Je me dirige donc vers la voie 14 où une BB7200 PV, affectée au
service de la manœuvre, achève la mise en place de la rame. La composition du 4021 est de 9 voitures dont certaines, non rénovées,
arborent encore leurs belles portes bleues, couleur si caractéristique des trains Corail.
Quelques instants plus tard, la rutilante BB 26018 en livrée Carmillon, marque un arrêt à quelques mètres des tampons de la
première voiture. À présent, la voie de départ est indiquée aux voyageurs et certains, lourdement chargés, commencent à monter dans
les voitures. L'attelage est réalisé, puis c'est au tour des essais de freins. Lecture du Bulletin de Freinage, paramétrage KVB (contôle de
vitesse par balises), et vers 6h45 le train 4021 à destination de Bordeaux St Jean est prêt au départ.
À 6h58 précises, des sifflets retentissent, les portières claquent, Départ ! Nous quittons donc Paris Austerlitz à la vitesse de 30
km/h. Malgré une petite pluie fine, la mise en vitesse de la rame est relativement aisée. La flèche blanche verticale indiquant que le train
a dégagé les aiguillages de la gare s'allume, 90 km/h autorisés, puis 140. La marche du train est assez détendue ce qui nous permettrait
de rattraper environ 30 minutes en cas de retard. Mais pour le moment, nous sommes à l'heure et le train 4021 s'éloigne de la capitale. À
Saint-Michel sur Orge, nous rencontrons un TIV à distance, 100 km/h impératif pour la traversée de Brétigny puis 130 pour Etampes. À
présent, nous grimpons la rampe d'Étampes à vive allure puis entrons dans la zone équipée de pré-annonce. Sur cette portion, la vitesse
est limitée à 200 km/h pour les trains autorisés à circuler à cette vitesse ; c’est notre cas aujourd'hui.
Le paysage caractéristique de la Beauce défile, Toury, Artenay, Cercottes puis l'entrée des Aubrais. Premier coup de frein, à 7 h 55
précises, notre convoi s'immobilise en gare. La gare des Aubrais constitue un petit nœud ferroviaire. En effet, trois itinéraires sont
possibles (Vierzon, Orléans ou Tours). Aussi le conducteur doit observer l'indicateur de direction afin de s'assurer qu'il est correctement
aiguillé. Trois feux sont allumés, la direction de notre train Intercités est la bonne !
Nous quittons Les Aubrais avec une poignée de minutes de retard mais la vitesse de référence, 121 pour 200 autorisés, nous
indique que nous devrions être à l'heure à Saint-Pierre-des-Corps. Après avoir longé la Loire à Blois, nous la traversons à Montlouis et de
vieilles BB 9200 garées nous indiquent que le dépôt de Saint-Pierre est proche ! Une fois l'arrêt effectué, le convoi s'ébranle à nouveau.
Ici encore, trois directions possibles : Bordeaux, Saumur ou Tours. Le prochain arrêt est Poitiers et nous circulons là encore à des
vitesses supérieures à 160 km/h, hors zone de ralentissement. À notre arrivée à Poitiers, nous sommes accueillis par deux photographes
vraisemblablement intéressés par ces nouvelles circulations. En effet, il est plutôt rare de voir des rames Corail tractées par des BB
26000, les TGV régnant en maîtres sur cet axe.
Nous repartons vers le sud et « brûlons » la petite gare de Saint-Benoît et sa bifurcation. À droite, Niort et La Rochelle ; à gauche,
une voie unique pour Limoges. Les kilomètres défilent, Saint-Saviol et Ruffec sont traversées sans arrêt. Je constate que les travaux de
la future LGV SEA avancent à grande vitesse, la caténaire et les repères LGV étant même visibles par endroits. Angoulême approche et
nous devons ralentir l'allure car un train de marchandises circulant devant nous, va être reçu sur une voie du faisceau. Le 4021 entre en
gare d'Angoulême avec 5 minutes de retard mais la BB 26018 n'a pas dit son dernier mot !
Après avoir traversé l'imposant tunnel du Livernan à la vitesse réduite de 100 km/h le paysage change et les premiers vignobles
font leur apparition. Puis l'agglomération bordelaise commence à se dessiner et nous réduisons notre vitesse à 60 km/h pour l'entrée sur
Bordeaux. Ralentissement 30 puis rappel de
ralentissement 30 ainsi qu'un avertissement sont
présentés. Nous franchissons la Garonne à faible
allure, la fin du voyage est proche ! À 11h37, le train
4021, parti de Paris à 6h58, entre en gare de
Bordeaux Saint-Jean, accueilli par une poignée de
photographes venus immortaliser l'évènement. La
BB26000 sera ensuite dirigée vers le dépôt où une
visite à l'arrivée et un examen visuel des
pantographes seront faits. RAS ! Elle assurera dès
ce soir le 4020 à destination de la capitale. Voici
donc le 1er Paris Austerlitz-Bordeaux arrivé à l'heure
à son terminus, espérons qu'il soit le premier d'une
longue série.
©R.Amic-Desvaud2015
I
Passage du 4020 avec la BB 26034
à Mouhiers-sur-Boëme le lundi 6
avril 2015. ©R.Amic-Desvaud2015
7
AAccttuuaalliittééss
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Les Charentes
aux couleurs
du Transilien
es rames de
type RIB et
VB2N en
provenance d'Île-de-France
sont actuellement
acheminées vers le
Technicentre industriel de
Saintes (Charente-
Maritime). À cette occasion,
elles sont remorquées par
des BB 67400, via Saint-
Pierre-des-Corps et
Angoulême, empruntant
ainsi la ligne à voie unique
entre Angoulême et Saintes.
On peut noter que l'on risque d'observer, dans les semaines à venir, une
augmentation de ce type de convoi. En effet, ces trains qui circulaient jusqu'à
présent principalement en marche indéterminée vont avoir, à compter du 4 mars, un
sillon régulier (voir tableau et régime de circulation).
Régime de circulation : Mars 4 11, Avril 15 22 29, Mai 6 13 20 27.
©R.Amic-Desvaud2015
Variété de circulations en Charentes
n ce début d'année, la
diversité est au rendez-
vous sur la ligne
Angoulême-Saintes.
Malgré l'omniprésence des AGC
qui assurent la quasi-totalité des TER,
quelques circulations ont égayé le
quotidien de cette attachante ligne,
entre vallée de la Charente et vignoble
du Cognac.
Après avoir effectué des mesures
en gare d'Angoulême, la voiture Mauzin
212 a inspecté la voie entre Angoulême
et Saintes sous la marche 812639, ici à
Angeac-Charente le 11 février 2015.
Le lendemain 12 février, c'est une
rame de ballastières, emmenée par
deux BB69200 qui s'est engagée sur la
voie unique en marche indéterminée à
Mosnac. À l'arrivée à Saintes, une
partie de la rame sera laissée et l'autre
poursuivra sa route vers Bordeaux.
©R.Amic-Desvaud2015 (texte et
photos)
D
E
Le 7 avril 2015, la BB67446 acheminait aux ateliers de Saintes
une VB2N pour rénovation. Deux jours plus tard, elle remontait la
RIB593 radiée. Elle est vue alors qu'elle aborde la gare de
Jarnac et longe le château de Cressé. ©R.Amic-Desvaud2015
AAccttuuaalliittééss
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La fin des X 240
sur Le Blanc –
Argent
ernier vestige
de l’ancien réseau du
Blanc à Argent, bien
connu dans le milieu ferroviaire
sous le nom de « BA », la ligne
reliant Salbris à Valençay via
Romorantin voit encore circuler des
autorails à voie métrique de deux
séries différentes. Toutefois, les
deux autorails de la série X 240 (X
241 « Romorantin-Lanthenay » et X
242 « Valençay ») mis en service en 1984 ne roulent plus qu’exceptionnellement et devraient prochainement être retirés du service car ils
ne répondent plus aux normes actuelles d’accessibilité et leur mise à niveau serait trop coûteuse. D’autant plus qu’actuellement avec
l’exploitation « en navettes » du Blanc – Argent, deux autorails suffisent pour assurer tout le service quotidien (un autorail roulant entre
Romorantin et Valençay, l’autre entre Romorantin et Salbris). Ce qui peut être facilement assuré par les autorails à deux caisses X 74500
construits par CFD à Bagnères-de-Bigorre, il y a une dizaine d’années. Et ceci bien qu’un autorail de cette série soit hors service suite à
un accident à un passage à niveau, il y a plusieurs mois. Sur la vue jointe, l’autorail X 241 est en gare de Romorantin, en avril 2013.
©G.Turpin2015 (texte et photo)
Saignée dans les X 2200
n fin d’année 2014, la SNCF a retiré du
service plusieurs autorails X 2200. Certains
de ces engins sont aujourd’hui garés sur une
voie « de l’oubli » au nord de la gare de
Limoges-Bénédictins. Clin d’œil de l’histoire, le X 2252
attend l’issue fatale face à l’automotrice Z 4909. La grande
majorité des X2200 restants devrait être radiée au 31
décembre 2015. La région Limousin n’en possèdera plus,
et il ne restera plus qu’un petit carré de X 2200 aquitains et
charentais à la STF Aquitaine jusqu’à la mi-2016 en
attendant les fins de livraison de matériels neufs.
©G.Turpin2015
Naviland Panache
D
E
Le X 2253 à Saint-Aulaire, sur
un Ter 868371 Objat – Brive-la-
Gaillarde. ©J.Bouey2013
À la suite de problèmes techniques sur ses G1206, Naviland a fait son spectacle sur les trains Cognac – Hourcade ! ©C.Prieto2015
La BB 60004 SNCF sur le train 52775 à
Cubzac les Ponts le 1er
avril 2015.
©C.Prieto2015
La BB 75022 ETF sur le train 52775 à
Cubzac les Ponts le 8 avril 2015.
©C.Prieto2015
AAccttuuaalliittééss iinntteerrnnaattiioonnaalleess
10 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Euskotren assure de nouveau
des trains de marchandises !
près presque trois ans sans avoir exploité un seul train de marchandises sur ses lignes, Euskotren a assuré plusieurs
prestations de trains de marchandises au début de l’année 2015. La ligne de connexion à Áriz (Basauri), entre la gare de
marchandises de la Renfe et la gare d’Euskotren, a été stratégique en permettant l’échange de marchandises dans le même
espace urbain.
Le premier train a circulé en janvier avec une composition de 20 wagons chargés de bobines d’acier. Parti de la gare intermodal
d’Áriz (Renfe) et à destination d’Irún, il a été tracté par deux locomotives bimodes
2000 de l’opérateur basque EuskotrenKargo. Une fois arrivé à la frontière française, le
chargement a été transbordé sur des wagons SNCF pour continuer son trajet vers sa
destination finale en Italie. En février, une composition similaire a circulé vers la
même destination, mais ayant pour origine le port de Santander. Le convoi a donc été
entièrement acheminé par voie métrique sur le parcours espagnole grâce au réseau
des FEVE (aujourd’hui intégré à Renfe). Au mois de mars, Euskotren a transporté un
train de grumes depuis Mataporquera (en Cantabrie) jusqu’à Áriz par la voie métrique
FEVE. Puis le convoi a continué vers Lebario sur les voies des ateliers Euskotren de
Durango où le chargement a été transbordé sur des camions à destination de la
papeterie Iurreta.
C’était en juin 2011 qu’Euskotren avait assuré son dernier train de marchandises avec un trafic de bobines d’acier entre le terminal
de marchandises d’Áriz et le port de Bermeo. Un trafic de douze trains par mois était prévu (100 000 tonnes par an), mais seulement cinq
trains avaient circulé avant la suspension du service. Renfe et Euskotren ont désormais l’intention de consolider ce type d’offre à raison
d’un train hebdomadaire. Cette offre rentre dans la stratégie « Basque Country Logistics » que le Département du Développement
Durable et de la Politique Territoriale du Gouvernement basque a développé, en collaboration avec Euskotren, Renfe, les ports de Bilbao,
Bermeo et Pasaia. Des chambres de commerces et d’importantes plateformes logistiques font partie de ce projet, ce qui pourrait amener
à très court terme de nouveaux trafics pour les opérateurs ferroviaires. ©Víctor Luri2015 Traduction C.Prieto
A
La locomotive 2003 (actuellement en location chez FGC) dans le port de
Bermeo, avec un train de bobines d’acier en cours de chargement
pendant l’été 2011 lorsque les premiers trains avaient roulé. ©V.Luri2011
En mars 2015, une UM de locomotives EuskotrenKargo 2000 à
Lebario, en attente de transbordement du chargement de grumes
qu’elles ont transporté depuis Mataporquera. ©V.Luri2015
AAccttuuaalliittééss iinntteerrnnaattiioonnaalleess
MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 11
CP Carga et EMEF : la privatisation est approuvée !
e Conseil des ministres
portugais a approuvé,
le 26 mars 2015, les
décrets-lois qui vont permettre
d’avancer sur le dossier de
privatisation de la filiale
marchandises de la compagnie
nationale ferroviaire portugaise, la
CP Carga, ainsi que d’EMEF
(Empresa de Manutenção de
Equipamento Ferroviário) qui
assure l’entretien et la construction
de matériels ferroviaires. Ces
décrets sont en cours de
promulgation par le président de la
République portugais, Cavaco
Silva. Une commission devrait être
créée pour encadrer les conditions
de la privatisation ainsi que de définir un cahier des charges du processus visant à encadrer la vente des deux entreprises publiques.
Le secrétaire d’État aux transports, Sérgio Monteiro, a déclaré avoir déjà reçu des « manifestations d’intérêt, pour le moment
officieuses », et reste convaincu du succès de la vente en cours. Isabel Castelo Branco, secrétaire d’État du Trésor, souligne que la
privatisation de CP Carga est prévue dans le programme d’aide financière de l’Union européenne, ce qui n’est pas le cas d’EMEF que le
gouvernement portugais privatise volontairement. Le motif d’une telle privatisation est de forcer les entreprises ferroviaires à être plus
compétitives. Sous le joug des investissements publics de plus en plus rares à cause des coupures budgétaires portugaises, EMEF et
CP Carga doivent trouver d’autres solutions de financement que seule la privatisation peut permettre. Du moins est-ce la position du
gouvernement portugais.
Sergio Monteiro a précisé que la totalité du capital des entreprises allait être en vente, en évoquant qu’une « tranche de 5% du
capital serait réservée aux salariés des entreprises à travers une offre publique intéressante », notamment grâce à une réduction sur la
valeur de référence de chaque action.
La Direction générale de la concurrence de la Commission européenne a demandé des informations précises sur ce processus de
privatisation en cours car, comme CP Carga est déficitaire, Bruxelles avait demandé la liquidation pure et simple de l’entreprise. L’autre
privatisation à venir reste celle de la ligne de Cascais dont l’état pitoyable de l’infrastructure et du matériel a obligé à une réduction de la
fréquence. Là aussi une liquidation en vue ? ©C.Prieto2015
Le terminal ferroviaire d’Elvas va être agrandi
a mairie d’Elvas, ville située à la frontière espagnole près de Badajoz, et Transitex ont signé un protocole d’accord le 28
janvier 2015 prévoyant l’extension du terminal de conteneurs situé près de la gare d’Elvas. Les autorités se sont en effet
engagées pour améliorer
l’accès routier au terminal qui est
aujourd’hui sous-capacitaire. L’opérateur
Transitez est quant à lui maître
d’ouvrage pour agrandir le terminal afin
d’augmenter le nombre de conteneurs
traités chaque année. Le terminal actuel
est desservi par un train quotidien en
provenance d’Entroncamento avec des
conteneurs du port de Lisbonne ou bien
des entreprises de la grande couronne
lisboètes. À Elvas, le terminal est prisé
par les transporteurs espagnols,
s’affranchissant ainsi des péages des
autoroutes portugaises.
L
L
Le 29 octobre 2014, une locomotive CP4700 de la CP Carga tracte le train de conteneurs nº69180 en
provenance de Leixões et à destination du Terminal XXI. Il est vu ici dans les dunes d’Espinho.
©C.Prieto2014
La CP1962 en tête d’un train complet de
citernes s’apprête à quitter la gare d’Elvas
le 30 décembre 2011. Au fond, le terminal
de conteneurs. ©J.Cunha2011
TTeecchhnniiqquuee
12 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee
Un équipement hybride : la variante
régionale Sud-Ouest des gares de
voie directe type unifié SNCF
Texte de Jean Thouvenin
l s’agit d’une situation exceptionnelle dans l’histoire des gares de voie unique régionales en France. Elle a consisté à appliquer
le modèle unifié tout en conservant ou en réutilisant des verrous verticaux provenant des voies uniques de l’ex-PO.
La variante ainsi conçue avait la même signalisation que le type SNCF proprement dit, à savoir celle ci-après :
Par ailleurs, la variante a utilisé
deux modèles de serrure centrale. Le
programme qu’ils réalisaient était le
même et la consigne ci-contre de 1958
ne les distingue donc pas.
Comme dans le modèle SNCF, les
aiguilles d’entrée n’avaient aucun
verrouillage en direction de la voie
d’évitement et les commandes de
désaubinage (disques et sémaphores)
n’étaient pas enclenchées.
La variante n’utilisait pas le TIV de
rappel 40, mais seulement ceux pour 30
km/h ci-après :
- D’abord le modèle sud-ouest en tôle
avec un éclairage par réflexion ;
- Puis le modèle unifié avec un
caisson.
I
TTeecchhnniiqquuee
MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 13
TTeecchhnniiqquuee
14 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee
I – La variante avec la serrure centrale importée du type de « voie
directe Saint-Nazaire – Le Croisic » de la région Ouest
e type « Saint-Nazaire – Le Croisic » fonctionnait en 1942 sur la ligne Ouest (jadis PO) dont il portait le nom. Sa consigne-
type figurait alors dans le recueil des Instructions Régionales de Sécurité de cette région et ne fut abrogée qu’en septembre
1958.
Il était novateur quant à la signalisation et au programme, déjà conforme au schéma donné plus haut, avec la création du TIV de
rappel au taux de 30 km/h manœuvré par le levier du verrou indépendant d’aiguille d’entrée (ce sera aussi la pratique unifiée).
Le type « Saint-Nazaire – Le Croisic » comportait aussi une grosse serrure centrale, de conception nouvelle, organisée en régimes
mais avec 3 clés spéciales d’enclenchement. Pour autant, aucun enclenchement de « nez à nez » entre signaux des deux sens n’existait
sur la voie directe.
Dans la période 1952-1968 pour le moins, ce modèle fut en service dans des gares situées entre Niversac et Tulle (Larche,
Aubazine-Saint-Hilaire, Cornil) et entre Brive et Figeac (Turenne, Les Quatre Routes, Le Pournel).
La Région Sud-Ouest semble avoir fait ces choix pour réaliser des économies. En tout cas, l’exemplaire de serrure centrale
employé à Cornil s’y trouvait en 1954 assez rouillé…
Configuration de la serrure centrale de cette gare selon document technique daté de mai 1967
À Aubazine et aux Quatre Routes, le verrouillage à distance et son contrôle par verrou vertical existaient aux deux aiguilles
d’entrée. Dans ces deux gares, la serrure centrale possédait, à la place de son entrée V.1 de Cornil, une entrée Vv.1 dénommée
« Verrou vertical du verrou indépendant du verrou de l’aig.1 ».
La dénomination de certaines entrées de clés dans les installations purement unifiées est la même que ci-dessus. Exemple : les
entrées dénommées S sont pour les accès aux voies de service.
L
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MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 15
II – La variante avec serrure centrale de voie directe SNCF
ette serrure était du modèle
applicable aux gares de voie
directe SNCF quand ces
dernières n’avaient aucune aiguille commandée
à distance. L’image ci-contre en montre l’aspect
de principe.
La seule différence avec l’emploi de la
serrure centrale « Saint-Nazaire – Le Croisic »
était celle-là. Dans tous les cas, les
équipements unifiés disponibles et mis en
œuvre n’étaient que ceux de première
génération et donc sans les compléments
futurs : il n’y avait pas de signalisation
lumineuse, pas de circuits de voie pour
protéger la voie directe, pas d’empêchement à
l’ouverture simultanée vers elle de tous les
signaux des deux sens.
À peu près à la même époque que dans le
cas de l’autre modèle, l’équipement concerné
fut installé entre Montluçon et Saint-Sulpice-
Laurière, ainsi qu’à Marsac-sur-Tarn, sur Milhac d’Auberoche (à partir de 1955) et Thenon (depuis 1956, resté en service en août 1967).
Il fut même appliqué à La Bachellerie et à Terrasson, en remplacement de l’arrêt général qui était jusqu’alors imposé dans ces deux
gares.
Ci-après, la gare de Treignat dans sa situation au 2 mai 1961 :
C
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16 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee
TTeecchhnniiqquuee
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TTeecchhnniiqquuee
18 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee
III – Comment étaient choisies les aiguilles d’entrée dotées du
verrouillage à distance ?
ertaines n’en étaient pas pourvues, mais au moins l’aiguille la plus éloignée du BV en était munie dans chaque gare. Ce
pouvait être l’aiguille de l’une ou l’autre entrée. Des gares où ces aiguilles étaient toutes deux verrouillées à distance
existaient aussi, notamment chaque fois où les deux entrées étaient à peu près équidistantes du BV. Par ces dispositions,
l’on s’efforçait avant tout de limiter les déplacements du personnel, et même de les éviter au cours de l’exécution des croisements.
Exemple de la situation entre
Montluçon et St. Sulpice-Laurière à l’été
1954 ci-contre.
En 1978, la variante n’existait plus,
remplacée le cas échéant par le type
unifié pur et simple de voie directe. À
cette date, sur Saint-Sulpice –
Montluçon, les aiguilles que l’on avait
dotées du verrouillage à distance étaient
désormais aussi commandées à
distance (du moins celles des gares qui
étaient encore en service). Les critères
pour décider des commandes à distance
étaient en effet les mêmes dans le type
unifié, avec variante ou non.
Conclusion
Exception faite des vestiges en
gare de La Rochefoucauld, les types
régionaux Sud-Ouest de gares de voie
unique ont à présent disparu. L’on ne
trouve plus maintenant sur les lignes à
signalisation normale concernées que
des installations :
- soit unifiées : premiers types
SNCF, avec compléments
éventuels, ou modèles plus récents codifiés chacun par 4 chiffres : V G 1011 ; VD 1021, etc. ;
- soit de voie directe type ancien Ouest : équipements répandus à partir des dernières années de la Seconde Guerre mondiale sur
diverses lignes de l’ensemble du réseau national : là encore des compléments éventuels sont venus par la suite s’ajouter au
modèle de base qu’avait fait se répandre sa grande simplicité.
Mais les types régionaux du Sud-
Ouest avaient bien répondu de manière
générale aux exigences de leur temps.
Le temps où, sauf au Nord et au PLM, le
block enclenché de voie unique était
rarissime en France (il fonctionna
pourtant de Meymac à Ussel une
trentaine d’années depuis 1913). Le
temps aussi où la commande d’aiguilles
de dédoublement depuis le bâtiment des
voyageurs ou ses abords n’existait guère
chez nous : à peine quelques cas sur
l’Est, des tentatives du PLM dont une en 1932, et une aiguille du PO en service de 1928 à la guerre à Sornac-Saint-Rémy (entre Felletin
et Ussel). Tel était le contexte que la SNCF s’attacha à moderniser ensuite. L’ère du tout électrique et de l’informatique, celle des
automatismes et des télécommandes y compris pour simple voie, ne saurait faire méconnaitre les conditions de travail dans les gares de
jadis, ni des recherches d’alors qui menèrent aux progrès.
C
RReeppoorrttaaggee
MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 19
En balade de Mignaloux à Jardres
lain et Arnaud nous proposent ici une promenade dans une zone qui leur est chère et
qu’ils connaissent bien. C’était l’occasion pour MIDI Express magazine de mettre en
avant cette petite ligne à trafic restreint qui amenait auparavant les voyageurs dans un
voyage à travers les campagnes agricoles du Poitevin. Aujourd’hui, seules quelques dessertes
sporadiques de trains complets de céréales viennent rompre le silence. Retour sur les quinze
dernières années de dessertes en images.
Texte et photos de Alain et Arnaud Demarez
ituée au beau milieu d’une région de riches terres
agricoles, la gare de Poitiers conserve une activité
de transport de fret assez soutenue, en particulier
grâce aux nombreux silos embranchés le long de la ligne Paris
– Bordeaux. Engrais à l’arrivage, céréales au départ, c’est une
une bonne quinzaine d’installations terminales embranchées
(I.T.E.) qui nécessitent le détachement hebdomadaire depuis
Saint-Pierre-des-Corps de plusieurs UM de BB 60000 ou plus
rarement de BB 69000. Un train de machines circule ainsi
chaque fin de semaine ; il peut être composé d’une dizaine
d’engins en fonction de la demande en dessertes.
Si beaucoup de silos sont implantés le long des lignes
principales vers Tours, Bordeaux, La Rochelle ou bien Limoges,
certains permettent le maintien « en vie » de trois voies uniques
à trafic restreint (VUTR) régionales, et qui ont par le passé
connu leurs heures de gloire, ou tout au moins ont permis de
désenclaver ces régions agricoles. On retrouve ainsi :
- l’ancienne ligne de Poitiers à Nantes qui s’embranche à
Grand Pont au Nord de Poitiers et qui dessert deux silos
importants à Ayron et Chalandray, ainsi qu’une unité de
production de biocarburants dans cette dernière localité ;
- l’ancienne ligne de Port de Piles au Blanc qui dessert un
silo à La Haye Descartes ;
- l’ancienne ligne de Poitiers à Argenton sur Creuse qui
s’embranche en gare de Mignaloux-Nouaillé sur la ligne
de Limoges et qui dessert un silo à Jardres. C’est cette
ligne qui nous intéresse ici.
Un peu d’histoire
Si la première ligne a connu des relations de premier
ordre, notamment grâce à des trains directs Limoges – Nantes
assurés en autorails Bugatti, les deux autres sont toujours
restées beaucoup plus modestes et ont conservé un caractère
résolument rural dans leur vocation et leurs dessertes.
C’est donc à l’est de la gare de Mignaloux-Nouaillé, à 12
kilomètres de Poitiers et en direction de Limoges, que prend
naissance la ligne de Jardres, référencée officiellement sous
l’acronyme VUTR 743, au PK 348. Orientée vers le nord-est, la
petite ligne dessert la halte de Savigny l’Evescault, puis la gare
de Saint Julien-l’Ars avant d’atteindre Jardres au PK 360+7.
Inaugurée le 18 juin1883, il a fallu attendre 1889 pour
rejoindre Poitiers à Argenton sur Creuse, la ligne s’arrêtant à
Chauvigny. Mais Jardres possède déjà son embranchement
particulier ; en effet, non loin de là, à Tercé, la
société des carrières du Poitou met en service
une ligne à voie métrique de 4,5 km destinée à
évacuer la production de ses carrières,
connues sous le nom de la fameuse « pierre de
Jardres ». La petite gare devient alors un
important dépôt de pierres destinées à toutes
les régions de France et même à l’export. Deux
ponts roulants tirés par des chevaux
permettent le transbordement des blocs de
pierre sur les wagons du P.O. Le dépôt du
Blanc assure la fourniture d’engins de traction
pour la desserte de la ligne, et c’est toute la
cavalerie des vieilles bouilloires du P.O. qui
A
S
La gare de Jardres avec les transbordeurs pour
charger les pierres dans les wagons.
©Coll. C.P.
RReeppoorrttaaggee
20 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee
s’époumonent sur le profil en dents de scie avec des déclivités
contraires de 5 à 15 mm/m.
Après le premier conflit mondial, des locomotives plus
puissantes basées à Poitiers et à Argenton font leur apparition,
des 140 séries 5001/5167 ou des 040 Prussiennes à tender
séparé, puis des autorails Renault VH et ADN du centre du
Blanc.
Dès mai 1940, le service entre Poitiers et Le Blanc est
suspendu ; un train de Poitiers à Jardres, puis Chauvigny est
rétabli en 1941. Mais notre ligne ne se remettra pas du
deuxième conflit mondial, et seule une desserte marchandises
assurée par des 230 F, 140 B ou H et 141 TA des dépôts de
Poitiers et Châteauroux continuera de faire vivre cette relation
de Poitiers à Argenton jusqu’au milieu des années 1950.
Cent ans après
Dès lors des trains de desserte circulent à la demande
pour quelques rares wagons isolés. Pourtant, le 18 juin 1983,
Jardres célèbre « en fanfare » le centenaire de l’arrivée du
chemin de fer. Et la municipalité ne fait pas dans la demie
mesure puisque c’est une BB 67000 tractant trois voitures corail
qui est de la fête, cas unique de circulation de ce genre de
composition sur une telle ligne. Les Jardrais costumés
embarquent pour Chauvigny ou ils sont accueillis par l’harmonie
municipale. S’en est suivie une lente agonie allant même
jusqu’au déferrement partiel entre Argenton sur Creuse et
Jardres. De nos jours, seule subsiste une courte section de
quelques kilomètres à l’ouest de Chauvigny où circule un
vélorail. Le temps semble donc s’être arrêté sur la ligne, qui
réunit plusieurs vestiges du vieux chemin de fer comme les
passionnés aiment en rencontrer lors de leurs périples.
©Mairie de Jardres1983
La gare en bois de Savigny l'Evescaud encore dans son jus.
©A.Demarez2011
RReeppoorrttaaggee
MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 21
Mais le chemin de fer est toujours présent à Jardres, et
c’est justement là où était implanté le chantier de
transbordement des pierres de carrière que s’est construit un
immense silo. Avec une trentaine de trains de céréales au
départ et une dizaine de trains d’engrais à l’arrivée, la petite
ligne a trouvé un second souffle, mais pour combien de temps ?
De nombreux secteurs sont encore équipés de rails à doubles
champignons, et récemment les passages à niveaux ont été
automatisés, en particulier ceux coupant les grands axes
routiers que sont Poitiers – Limoges et Poitiers – Châteauroux.
Le profil en dents de scie nécessite l’UM et il faut généralement
deux rotations au départ de Poitiers pour sortir un train complet
sur la journée.
Après les derniers tours de roues des A1A A1A 68000 du
dépôt de Saint-Pierre-des-Corps, puis des BB 66000, ce sont
désormais des UM de BB 60000 ou plus rarement de BB 69000
qui assurent le trafic pour le compte de Fret SNCF. Europorte
fait également quelques apparitions avec des locomotives Euro
4000.
La vitesse est limitée à 30 km/h et les BB 60000 acceptent
620 tonnes en US à l’aller et 640 tonnes au retour, ces charges
étant doublées lorsque l’UM est utilisée. Le silo quant à lui
possède son propre engin de manœuvre, un superbe Orenstein
et Koppel reconditionné qui a remplacé un Moyse 36 TDE bien
fatigué.
Avec cette desserte particulièrement bucolique, on peut
encore déguster des trains à l’ancienne, qui sifflent à tous les
passages à niveaux, et qui brinqueballent quelque peu sur une
voie entretenue au minimum, mais quel charme !
©Alain Demarez 2015
Le 11 mai 2013, le
locotracteur dans
l’ITE de Jardres.
©A.Demarez2013
Une UM de A1A A1A 68000 part HLP chercher
des trémies le 3 août 2002. ©A.Demarez2002
Une UM de A1A A1A 68000 prête au départ au silo de Jardres. On
remarque la coupe de six trémies pleines. C’est le A1A A1A 68081 qui est
en tête du train en ce 3 août 2002, unité aujourd’hui préservée par l’activité
Matériel et en attente de réparation à Chalindrey. ©A.Demarez2002
RReeppoorrttaaggee
22 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Discussion avec l’agent de circulation de la gare de
Mignaloux Nouaillé le 31 octobre 2002. Peu après, une fois
le canton ouvert, le train partira vers Poitiers.
©A.Demarez2002
Deuxième photo, deuxième époque : le 2 septembre 2003, une UM de BB 66000 entre en gare
de Mignaloux Nouaillé. La ligne télégraphqiue est encore présente. ©A.Demarez2003
Même endroit le 12 août 2009, mais avec beaucoup de changements lors du
RVB de la ligne Poitiers – Limoges : le plan de voies a été simplifié de manière
drastique, la signalisation a été modernisée, l’armement de la voie renouvelé,
avec l’apparition de la livrée FRET et du logo carmillon. ©A.Demarez2009
RReeppoorrttaaggee
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Des panaches de fumée ! La ligne de Mignaloux à Jardres ne laisse pas sans peine les UM de BB 66000. En haut, dans la rampe de la sortie sud de Poitiers, la
BB 66061 tire une longue rame de trémies en juillet 2004. En bas, la BB 66255 s’essouffle sur une rampe en creux de la ligne à voie unique le 12 août 2009.
©A&A.Demarez
NNoossttaallggiiee
24 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Du bleu d’Auvergne au
beau milieu du Cantal
depte des balades
ferroviaires, Jérôme Pagès
passa sa jeunesse et les
premières années de sa carrière en
Corrèze. Sensible à ce que le monde
ferrovipathe appelle « le vrai chemin de
fer », il profita dans cette région des
rames tractées, des séries d’engins
moteurs et d’autorails qui ont fait leur
preuve pendant des dizaines d’années
de service commercial, de la variété
dans les livrées qui rompait fortement
avec la monotonie que nous
connaissons aujourd’hui. Place aux
photos accompagnées d’un petit texte
sur les traces de cette époque révolue.
Texte et photos de Jérôme Pagès
ntre 1996 et 1999, alors que je vivais en Corrèze
et passionné du monde ferroviaire, je pouvais
profiter pleinement des X2800 sur bon nombre de
relations : sur la ligne de Brive à Limoges via Objat, sur la ligne
de Périgueux, vers la Haute Corrèze à destination de Tulle,
Ussel et Clermont-Ferrand et, vers le sud, sur les lignes au
départ de Brive en direction d’Aurillac et Rodez. Ce matériel se
partageait alors massivement les dessertes avec les X2200 et
X2100. Toutefois, les tous jeunes X72500 en cours de livraison
commençaient déjà de timides incursions sur la desserte de
Brive à Rodez.
Jeune étudiant, il m’arrivait ponctuellement, pour profiter
du matériel et en faire quelques photos à l’occasion,
d’emprunter les trains qui cheminaient sur ces parcours. C’est à
un de ces voyages que je vous invite au fil de ces quelques
lignes.
Partant de bon matin de Brive, j’empruntais, pour débuter,
le tronc commun des lignes d’Aurillac et Rodez. Cette section
de ligne à une seule voie, équipée du block automatique à
permissivité restreinte par circuit de voie (BAPR) permettait de
gagner la gare très caractéristique de Saint-Denis-près-Martel :
poste à leviers implanté à l’air libre sur le quai nº1, signaux
mécaniques de toute part, aiguilles manœuvrées à la main, bref
un chemin de fer « à l’ancienne ». J’ignorais alors que,
quelques années plus tard, j’y serais affecté comme agent
circulation. Bien sûr, à l’époque, la rotonde et la halle
marchandise avaient déjà disparu, mais qu’importe, l’ambiance
était quand même là.
Puis, laissant sur la droite la ligne à voie unique et block
manuel vers Figeac ainsi que l’ancienne ligne de Bordeaux via
Souillac et Sarlat, l’autorail de 825 chevaux s’engageait alors
sur la ligne à une seule voie banalisée vers Bretenoux et les
gorges de la Cère. À Bretenoux, le trafic de traverses (ateliers
d’imprégnation à la créosote) faisait encore tourner un grand
nombre de wagons à bogies remorqués par des BB 66000.
Très vite, le train s’enfonçait dans un environnement plus
sauvage et plus retiré ponctué par les arrêts de Laval de Cère
et Laroquebrou.
À l’arrivée à Aurillac, outre les autorails déjà évoqués, on
trouvait encore la rame corail pour Paris via Clermont-Ferrand,
remorquée jusqu’à la capitale régionale par une BB 67400.
A
E
L’auteur, par lui-même. ©J.Pagès
Heure de pointe à Saint-Denis-près-Martel le 23 août 1999 : les autorails
en provenance de Rodez, d’Aurillac et de Brive se croisent et se
scindent dans un savant ballet répété quotidiennement. ©J.Pagès1999
NNoossttaallggiiee
MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 25
C’était avant la mise en place du service Téoz et le
démantèlement progressif des relations directes avec la
capitale grâce aux trains multi-tranches.
Puis le retour s’effectuait à bord d’un train Clermont ou
Aurillac – Toulouse jusqu’à Capdenac. Le passage de la
retenue sur la Cère, au moyen du viaduc de Ribeyrès (long de
308 mètres), était un moment émouvant. Puis la ligne
redescendait vers Figeac en desservant Bagnac et ses
carrières bien actives.
Arrivés à Figeac, nous récupérions, sur notre gauche, la
ligne en provenance de Brive. Le site de la gare de Figeac
forme un cocon ferroviaire tout particulier que j’appréciais
énormément du temps des Bleus d’Auvergne ; implantée au
milieu d’un triangle arboré formé par les lignes de Brive et
d’Aurillac vers Capdenac, cette gare a fait rêver plus d’un
modéliste ! La vue depuis le haut du tunnel (côté Capdenac)
permettait de faire des photographies de compositions
intéressantes.
Par la suite, le parcours se poursuivait jusqu’à Capdenac,
en franchissant, au lieu-dit Le Soulier (Commune de
Capdenac), la bifurcation de l’ancienne ligne Cahors –
Capdenac encore utilisée de temps en temps par une
association touristique. Dans cette gare, il suffisait alors
d’attendre la correspondance d’un autorail remontant de Rodez
à Brive. Sur cette ligne, circulait encore, à cette même époque,
un aller/retour corail de jour Rodez-Paris via Brive en plus du
train de nuit toujours en service aujourd’hui.
Suivant les heures de passage par Capdenac et Figeac, il
était aisé d’immortaliser ces rames tractées, ainsi que des
trains de ballast remorqués en BB 66000.
Un autre moment fort de la ligne était le croisement prévu
à partir de 18 h 30 chaque soir en gare de Saint-Denis près
Martel. À l’époque, cette scène semblait immuable ; et
pourtant… (voir photo p. 24). Ainsi, tous les soirs, s’orchestrait
dans cette gare un ballet ferroviaire immuable selon le schéma
suivant. Peu avant 18 h 30 arrivait de Brive sur la voie 1-2 (la
troisième voie à quai depuis le BV) un ensemble composé d’un
autorail d’une ou deux remorques à destination d’Aurillac, le
tout jumelé avec un second ensemble autorail et remorque(s) à
destination de Rodez.
Pendant que l’un des deux Agents Mouvements (AMV)
présent à cette heure-là s’afférait à dételer les deux
compositions, le second Agent Circulation (AC) réglait les
opérations de réception des autorails en provenance d’Aurillac
(voie Z, la deuxième voie à quai depuis le BV) et de Rodez
(voie 4, la première voie à quai contre le BV). Sitôt ces
mouvements rentrés, le Brive-Aurillac repartait en direction de
Bretenoux par la ligne à une seule voie équipée de BAPRS
(armement par compteur d’essieux), puis l’Aurillac – Brive
s’élançait à son tour dans le sens opposé, en direction de la
Corrèze, par la ligne à une seule voie équipée de BAPR
(détection automatique des circulations par circuit de voie)
télécommandée par le PRCI de Brive.
Une fois la voie libre rendue aux appareils de Block
Manuel de Voie Unique miniaturisé derrière le Rodez-Brive, le
Brive-Rodez pouvait à son tour être expédié sur la ligne à voie
unique en direction de Rocamadour et Figeac.
Et enfin, 5 minutes après le départ du Aurillac – Brive
Le 13 août 1999, le X 2905 accompagné d’une remorque Xr6100 part de la gare de
Saint-Denis-près-Martel sur une relation Brive – Aurillac. ©J.Pagès1999
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26 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
(temps de libération des cantons de BAPR), le Rodez – Brive
prenait à son tour la direction de la sous-préfecture de la
Corrèze où il donnait, comme son homologue d’Aurillac, la
correspondance au dernier Corail de sens Toulouse – Paris
Austerlitz (départ de Brive vers 19 heures).
Ce secteur géographique jouissait d’une belle diversité de
matériels sur des lignes qui me semblaient alors moins
moribondes qu’aujourd’hui, même si depuis je ne suis plus leur
actualité quotidiennement, ayant quitté le Limousin pour la
Gironde en passant par le Nord et l’Île de France…
Aurillac, le 24 août 1999. Le X2902 renforcé d’une remorque s’élance. Un autre X2800
attend un futur départ sous la marquise avec une Xr6100 à ses côtés. À droite, la rame du
train de jour Aurillac – PariS est déjà prête au départ en passant par Arvant. ©J.Pagès1999
Le 21 août 1999, le X2890 dessert la petite gare typique PO
de Bagnac avec un Ter Aurillac – Capdenac. ©J.Pagès1999
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Ci-dessous, une photo illustrant l’activité qui régnait en gare de Capdenac il y a 15 à peine. À la sortie nord juste avant le tunnel, une UM de BB 6600 accompagne
des trémies de ballast des carrière de Bagnac jusqu’à Toulouse le 19 juillet 2000 ; sur la gauche, le Corail Rodez – Paris attend que le signal passe à voie libre pour
s’élancer vers Paris. ©J.Pagès2000
Nous voici en gare de Capdenac le 21 août 1999. La BB 67562 encore
équipée de ses enjoliveurs démarre avec le Corail en provenance de
Paris Austerlitz et à destination de Rodez. ©J.Pagès1999
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Ci-dessous, vue plongeante sur le triangle de la gare de Figeac. Un X2100 couplé à deux remorques démarre « énergiquement » de la gare avec un Ter en
provenance d’Aurillac et à destination de Toulouse toujours le 19 juillet 2000. ©J.Pagès2000
Photo collector à Figeac pour l’ambiance fin des années 1990, début 2000 : nous sommes le 19
juillet 2000, et la BB 67416 s’immobilise avec le Corail de Paris Austerlitz vers Rodez. ©J.Pagès2000
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Ci-dessous, Rocamadour avec un X72500 encore immaculé. Après avoir desservi l’une des dernières gares champêtres en provenance de Rodez, celui-ci s’élance
vers Brive-la-Gaillarde le 21 août 2000. ©J.Pagès2000
Une vue champêtre à Betaille avec cette composition
panachée d’un X2100, X2800 et d’une remorque Xr6100
pour un Ter Aurillac – Brive-la-Gaillarde le 19 juillet 2000.
©J.Pagès2000
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30 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Des Z 7100 en
Ariège
vec la sortie récente à l’échelle HO des
automotrices Z 7100, nous en profitons pour
faire un petit retour sur un service de courte
durée des Z 7100 sur la ligne de l’Ariège entre Toulouse et
Foix. Images d’histoire à l’appui, remémorons-nous cette
époque rouge et crème version électrique.
Texte et photos de Jean-Louis Tosque
Bref historique de la ligne de l’Ariège
Au départ de Toulouse, la ligne a un tronc commun de 12 km avec l’artère Toulouse - Bayonne en voie double jusqu'à Portet-Saint-
Simon, où elle commence à remonter l'Ariège en voie unique électrifiée. Nous pouvons partager cette ligne de 170 km en quatre parties :
- Toulouse – Foix (82 km) : zone vallonnée mais peu pentue. C'est la basse vallée de l'Ariège où la déclivité ne dépasse pas 7
mm ;
- Foix – Ax-les-Thermes (41 km) où la vallée est plus encaissée et la présence de la montagne nettement plus visible. Les
déclivités atteignent 20-25 mm sur de longues distances ;
- Ax-les-Thermes – Tunnel du Puymorens. C'est le parcours le plus pittoresque et le plus montagnard. Nous sommes en haute
montagne. Nous passons de 701 m d'altitude à 1562 m (sortie sud du tunnel) en 27 km avec des déclivités atteignent 40 mm
sur presque tout le parcours avec 10 tunnels dont le tunnel hélicoïdal de Saillens (1,850 km) et le tunnel du Puymorens, long de
5,4 km ;
- Tunnel du Puymorens – Latour-de-Carol – Puigcerda. Cette partie descend le long du Carol avec une déclivité de 40 mm
jusqu'à Enveigt (13 km) et plus plat pour les 7 km restant jusqu'à Puigcerda.
A
Le 7830 avec deux Xr ABD s'approche de Foix.
©J.-L.Tosque
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Le courant de traction est fourni par les sous-stations d'Empalot (Toulouse), Cintegabelle, Pamiers, Vermajoul (Foix), Ussat, Ax,
L'Hospitalet, La Tour-de-Carol.
La ligne à écartement français (UIC) va jusqu'à Puigcerda tandis que la ligne à écartement espagnol vient jusqu'à La Tour-de-
Carol.. La section La Tour-de-Carol - Puigcerda est donc à 2 voies avec 2 écartements. En 1950, il était prévu que l'Espagne adopte un
écartement normal jusqu'à Barcelone malgré les difficultés rencontrées à l'arrivée en gare terminale.
Le service des Z 7100
Cette ligne remarquable
à bien des égards voyait
circuler un matériel de
traction traditionnellement
Sud-Ouest. Une exception
toutefois pendant une
quinzaine d'années. Le
service du train 7825/7830 a
été assuré pendant cette
période par une automotrice
Z 7100 avignonnaise avec
cependant une particularité
rare, sinon à ma
connaissance « unique en
voie unique », mais
appliquée en double voie sur
Toulouse – Brive A/R. Le
sillon de ce train avait vu
circuler pendant un temps les
Z 4700 ex-PO et à leur
amortissement pendant le
service d'hiver une rame tracté en X 2800, jusqu'en 1968 où la Z 7100 a repris ce service jusqu'à la relève par les Z 7300.
La Z 7100 utilisée sur la ligne de l'Ariège était reprise sur une rame à quatre caisses qui effectuait une relation Avignon – Toulouse
A/R. Lors de la coupure à Toulouse les remorques Zr (entre deux et quatre) étaient remisées à Raynal et une des deux automotrices était
accouplée à une ou deux Xr de la série Xr ABD 6001 à 14, 7201 à 20, 7301 à 7581, 7801 à 8018, 8101 8293 de la gérance toulousaine.
C'est la masse, de 15,5t à 19,5t, de ces remorques qui avait dicté le choix de les accoupler à la Z 7100 compte tenu des données
techniques de la ligne.
Petit rappel
technique sur cette
série de 33
automotrices
Vitesse limite de 130 km/h (avec
ZR 17100/200), elles étaient dotées de
2 moteurs d'une puissance de 470 kW
chacun, donnant une puissance de
1250ch pour la 7100 ; pour rappel,
825ch pour le diesel MGO du X2800.
Le bogie moteur était situé coté
« voyageurs », et non sous le
compartiment appareillage, certainement
pour des raisons de répartition des
masses et autres raisons techniques.
La Z 7100 du 7825 longe l'Ariège après avoir marqué l'arrêt en gare de Foix et va attaquer la première difficulté :
la rampe vers Saint-Paul-Saint-Antoine avec un profil s'échelonnant entre 12 et 25 pour mille. ©J.-L.Tosque
La Z 7100 du 7830 vient de marquer l'arrêt en gare de
Saint-Paul-Saint-Antoine et va entamer sa descente
vers Foix, son prochain arrêt. ©J.-L.Tosque
ÉÉttrraannggeerr
32 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Nouveaux OFP en Espagne
Depuis l’arrivée sur la scène ferroviaire de Acciona Rail Services et de Tracción Rail, puis
de Transitia, ces opérateurs ont révolutionné le marché des nouveaux trafics, en partenariat
avec les autres opérateurs déjà implantés depuis quelques années comme Logitren et
Continental Rail. Petit tour dans la meseta espagnole riche en couleurs !
Texte de Camille Prieto – Photos de Javier López
Continental Rail
Continental Rail S.A. est un opérateur appartement au groupe Grupo Vías (ACS), détenu à 100% par Vías y Construcciónes S.A.
C’est un opérateur déjà ancien, constitué le 17 mai 2000. Il détient également une licence pour assurer des trafics de marchandises.
Continental Rail s’est très tôt allié à Renfe Operadora pour constituer la société Constru-Rail. Cette société s’occupe des trains de
travaux pour la construction des lignes à grande vitesse espagnoles, puis s’est également spécialisé dans les rames de travaux pour le
réseau classique à écartement ibérique. Incontournable sur la scène des travaux ferroviaires, l’entreprise se déploie autour de trois
branches :
- Le transport commercial ferroviaire de marchandises ;
- Le transport de matériaux de construction et d’entretien des LGV (Barcelone – Figueras, Cordoue – Malaga, Madrid – Alicante) ;
- La gestion et l’exploitation de terminaux de marchandises, ainsi que de réseaux portuaires (Gijón).
En France, cet opérateur a été rendu célèbre pour venir jusqu’au pied des Pyrénées avec le trafic de céréales entre Martorell et
Canfranc, puis en 2012 avec un trafic de bioéthanol entre Puertollano et Babilafuente. La livrée des locomotives n’y est pas étrangère,
puisque les couleurs rappellent la livrée « taxi » des années 1990 appliquée sur le matériel Renfe.
Continental Rail possède un parc de locomotives assez important, avec 26 locomotives à écartement UIC louées à EWS (14 Class
37 et 12 Class 58), et deux locomotives à écartement ibérique (les 333.380 et 333.381). En 2007, l’entreprise a commandé à Vossloh 4
locomotives du type 335 qu’elle possède aujourd’hui et qui sont les 335.016, 335.018, 335.029 et 335.030.
La 319.321 avec un train de citernes de carburant bioéthanol
passe à Minateda le 13 juillet 2012 en provenance de Madrid-
Vicálvaro et à destination d’Escombras. ©JavierLópez2012
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Ci-dessus, à Vilches, la 335.030 accompagne un TECO Bilbao-Mercancías – Sevilla-La Negrilla le 19 juillet 2014. ©JavierLópez2014
Ci-dessous, la 333.380 passe à Villasequilla le 26 juillet 2007 avec un TECO Valence-FSL – Puerto Seco de Coslada. ©JavierLópez2007
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34 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee
Tracción Rail
Tracción Rail est un opérateur ferroviaire appartenant au groupe Azvi, groupe de travaux publics et de logistique qui s’est
récemment diversifié dans le transport ferroviaire. Le 24 juillet 2006, la société a obtenu sa Licence d’entreprise ferroviaire pour devenir
opérateur de transport ferroviaire de marchandises de niveau 1, ce qui permet le transport de denrées périssables et de marchandises
dangereuses.
C’est en 2008 que Tracción Rail a commencé son activité d’OFP par des trafics hebdomadaires d’huile de palme et de bioéthanol
pour l’entreprise Bioenergética Extremeña entre Huelva et Valdetorres (Badajoz). À partir de 2012, l’entreprise a dû abandonner ces
trafics pour cause de difficultés financières. En juin 2014, l’opérateur est revenu sur la scène en assurant des relations de transport
combiné (TECO) entre Madrid et Valence, Valence et Bilbao. Et tout récemment, Tracción Rail a remporté un trafic de conteneurs entre
Abroñigal et Séville. Afin d’assurer ses trains, l’opérateur dispose de deux locomotives Vossloh de la série 333.3 (333.384 et 333.385),
ainsi que d’une série plus ancienne 319.3 (319.324 et 319.335). L’entreprise Tracción Rail fait partie de l’Association des Entreprises
Ferroviaires Privées (AEFP).
Le 16 juillet 2012, une double traction composée des 319.335
et 319.324 tracte ce train d’huile Huelva-Cargas – Puertollano-
Refinería aux abords de Puertollano. ©JavierLópez2012
Encore une double traction avec les 333.384 et 333.385 avec un TECO
Bilbao-Mercancías – Valencia-FSL le 5 juillet 2014. ©JavierLópez2014
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Acciona Rail Services
Acciona Rail Services a été le premier opérateur à mettre fin au monopole de la Renfe le 29 janvier 2007 pour le transport de
marchandises. À cette époque, l’opérateur privé assurait un trafic entre la gare d’Aboño (Puerto de El Musel) à destination de
l’embranchement de la centrale thermique de La Robla, grâce à deux locomotives en UM et 15 wagons trémies de charbon. Mais
rapidement, cet opérateur a disparu de la circulation dès 2010 pour se concentrer sur les trains de travaux, notamment lors du RVB
Torralba – Soria.
Acciona Rail Services est une fililale du groupe Acciona (né lui-même de la fusion en 1997 des groupes Entrecanales y Tavora, et
de Cubiertas y MZOV, groupe spécialisé dans la construction, les services et l’énergie). Le 14 août 2014, un article d’El País annonçait
l’achat par Acciona Rail Service de matériel roulant pour 12 millions d’euros, pour finalement avoir six locomotives en panne et une partie
du personnel transféré dans des filiales du groupe. En pleine action juridique contre Renfe pour concurrence déloyale, c’était le début de
la débâcle pour l’opérateur. Finalement, un seul train d’Acciona Rail Services roule depuis juin 2014 pour un trafic de conteneurs entre
Abroñigal et Séville pour le compte du groupe Acciona Logística. L’entreprise possède des locomotives Vossloh du type 333.3 et 32
wagons trémies.
Logitren Ferroviaria
Logitren Ferroviaria S.A. appartient au groupe valencien Torrescamara y Vías. C’est en 2007 que le groupe a demandé au ministère
des Transports espagnol une licence OFP qu’il a obtenue un an plus tard. À la fin de l’année 2008, l’opérateur public de transport
voyageurs de la communauté autonome de Valence FGV achète 33% des parts de Logitren Ferroviaria, ce qui est en fait un opérateur
de fret semi-public.
Originaire de Valence, il était naturel d’obtenir les nouvelles locomotives CC diesel-électriques Vossloh du type 335 dont les usines
de fabrication se trouvent dans cette ville. Grâce à ces locomotives, l’opérateur a commencé à assurer des trafics autour du port de
Valence, puis en juillet 2010, un service régulier entre Valence et Saragosse. En 2011, l’opérateur décrocha des marchés pour des trafics
de conteneurs entre Bilbao, Madrid, et Valence. Au début de l’année 2015, Logitren Ferroviaria s’est recentré sur un trafic catalan de
conteneurs entre Granollers et San Roque-La Línea. L’opérateur possède trois locomotives : les 335.025, 335.027 et 335.028.
La 333.382 d’Acciona Rail, sur un TECO (train de conteneurs) Madrid-Abroñigal –
La Salud, passe ici à Castillejo au petit matin le 14 juillet 2014. ©JavierLópez2014
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Transitia
Transitia est l’opérateur le plus récent. Créé en 2012 en tant que filiale de Transitia S.L. spécialisée dans le transport de
marchandises dans le nord de l’Espagne, cette entreprise a fait ses débuts par un trafic entre Puerto Seco de Azuqueca et le port de
Bilbao. Concentrée au Pays Basque grâce à ses terminaux logistiques et intermodaux, l’opérateur n’a pas tardé à se déployer plus au
sud vers le Levante (Silla) avec un trafic de conteneurs vers Séville. L’opérateur a loué à Alpha Trains une lomocotive 335.014 qui a
conservé les couleurs vert et blanc de son propriétaire.
Un TECO Bilbao – Séville avec la 335.014-7 avec le logo TransitiaRail, aux alentours de Peñaflor le 10 janvier 2015. ©AdriánValencia2015
Entre Miranda de Ebro et Burgos, sur la ligne impériale, la 335.028 tracte un TECO Madrid-Abroñigal – Bilbao-
Mercancías. Elle traverse les champs fertiles de Castil de Peones le 19 juillet 2013. ©JavierLópez2013
PPaarrtteennaarriiaatt
MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 37
TREN Online Spécial (Espagne)
Un numéro spécial sur les trains de marchandises des
années 1980 en Espagne, disponible sur commande en
version papier, et en lecture gratuite sur
www.trenmania.com
TrainSpotter 56 (Portugal)
Un numéro qui rend hommage au Foguete, le premier
train rapide diesel portugais qui reliait Lisbonne à Porto.
TrainSpotter est une revue gratuite et en ligne sur
http://www.portugalferroviario.net
PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss
38 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42
VVoollttee--ffaaccee ssuurr llee TTGGVV ??
e 23 octobre 2014,
la Cour des Comptes
a publié un rapport
nommé La Grande vitesse ferroviaire :
un modèle porté au-delà de sa pertinence.
De prime abord, et par son titre, il est possible de déceler
une dualité de la grande vitesse française : à la fois une performance
hors pair, mais également un concept qui se cherche peut-être encore, ou bien qui,
à force d’être pris comme modèle, est transposé indéfiniment à tout type de transport pour relier les villes françaises. De modèle, il
deviendrait alors à un anti-modèle qui porterait préjudice à lui-même. Article au regard critique à propos de l’évolution du produit TGV.
Texte de Camille Prieto
eaucoup ont dénoncé une certaine vision libérale
du rapport en accord avec la période de contrainte
budgétaire qui pèse sur les collectivités, et le
contextualise dans une introduction à un des volets de la loi
Macron qui a été présenté à l’Assemblée nationale, à savoir
celui de la libéralisation des transports par autocars. C’est ce
point de vue que nous nous proposons d’analyser dans cette
synthèse, en nous appuyant sur un raisonnement d’économie
des transports.
Alors il devient intéressant, en gardant en parallèle le
rapport de la Cour des Comptes, de proposer une vision
critique et fondée sur un argumentaire pour tenter de voir si le
modèle du « tout-TGV » est une erreur, ou du moins
contrebalancer cette appréciation. Le TGV est-il
substantiellement un modèle dépassé ou au contraire peut-il
continuer d’être en s’adaptant à un nouvel environnement ? Car
si le modèle du TGV est actuellement vu comme une forme de
transport dépassée ou qui ne correspond plus à la réalité
économique actuelle, il n’en demeure pas moins que la
soutenabilité économique de son exploitation doit être révisée
afin de survivre et répondre aux réelles attentes de la demande.
I – Le TGV, un modèle à bout
de souffle
nauguré en 1981, le premier TGV a circulé entre Paris et Lyon.
Aujourd’hui, ce sont 2036 kilomètres de LGV qui traversent le
territoire national. Cette partie met en avant certains points
soulignés par le rapport de la Cour des Comptes, en tentant de fournir des
raisons économiques qui expliqueraient pourquoi cette activité ferroviaire est
aujourd’hui en déclin, ainsi que d’identifier les facteurs convergents motivant
une rentabilité faible et la remise en cause du mythe de l’infrastructure de
transport génératrice de croissance économique.
A – Une activité commerciale qui a évincé le
service public
e service public est une « activité d’intérêt général prise en
charge par une personne publique ou par une personne privée
mais sous le contrôle d’une personne publique » Le service
public ferroviaire est en conséquence une activité à caractère économique
relevant de la mise en place d’un service à la personne, accessible, afin
d’assurer d’un transport d’une origine vers une destination. Il est alors
commun de confondre les différentes activités ferroviaires de la SNCF avec
le service public, ce que ne fait pas par contre le rapport de la Cour des
Comptes, qui se fixe uniquement sur le cas du TGV qui est une activité
commerciale de la SNCF. L’État, actionnaire de la SNCF, exerce un contrôle
L
B
I
L
Contre-jour sur un TGV
Toulouse – Lyon à Lézignan
en novembre 2009.
©B.Weyland2009
Le saut de mouton de Lieusaint avec la rame 09 PSE sur un
TGV Paris - Marseille le 24 septembre 1983. ©M.Falcou1983
38
PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss
MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 3943
sur les prix pour deux activités de transport ferroviaire : le TER, organisé par
les régions, et les Trains d’Équilibre du Territoire, qui font intégralement
partie d’une mission d’aménagement du territoire.
Le problème est que le TGV est une activité entièrement commerciale
dans laquelle la SNCF est libre d’adopter la stratégie qui correspond le
mieux à ses intérêts, notamment au niveau de la tarification et des
dessertes. Aussi la tarification adopte-t-elle une différence. Les trains du
service public sont tarifiés au coût marginal, ce qui implique un déficit
chronique pour ce type de trains qui équivaut au coût fixe ; c’est pourquoi les
collectivités subventionnent ce type de transport afin d’assurer la pérennité
du service public. Mais ce type d’activité n’est pas financièrement rentable
pour la SNCF. En effet, elle possède une plus grande marge de manœuvre
pour la tarification TGV grâces à la mise en place de deux types de tarifs. Le
premier est le tarif binôme qui correspond à une part fixe (le coût marginal) à
laquelle on rajoute une part variable selon la politique commerciale, le
kilométrage de la distance choisie, ou encore la ligne choisie ; le second tarif
est le yield management sur le modèle de l’aviation, système de
surréservation permettant de faire varier le prix selon le taux d’occupation du
train.
Ainsi, si la SNCF est garante d’assurer un prix fixe sur des trains dits
« classiques » de service public, elle est libre de mettre en place la
tarification commerciale de son choix sur le TGV, et être maître du bénéfice
qu’elle en retire.
B – Une rentabilité faible mais génératrice
de dettes
i la SNCF est libre d’appliquer sa tarification commerciale pour
le TGV, comment expliquer que le TGV ne soit pas rentable,
ou du moins pas suffisamment rentable ? Les titres des
principaux journaux ont en effet oublié une dimension importante du secteur
ferroviaire lorsqu’ils ont souligné le « sous-investissement massif dans
l’infrastructure » lors de la sortie du rapport. Et le coupable, ce serait le TGV.
Tout d’abord, il faut rappeler le système de compensation du TGV
pour les trains classiques : une partie du prix du billet du TGV, activité qui
générait le plus de bénéfice, servait au financement des trains déficitaires ou
conventionnés avec les régions. Ensuite, le secteur ferroviaire pâtit du
problème des coûts fixes très élevés avec des rendements d’échelles
croissants potentiels. Il faut alors pouvoir faire circuler beaucoup de trains
pour amortir ce coût fixe. Mais plus il y aura de train, plus le coût marginal
augmentera tandis que le coût moyen baissera ; en effet, le coût marginal
doit tenir compte du coût du travail du personnel, des coûts administratifs et
de commercialisation qui sont totalement indépendants du nombre de trains.
Ainsi, dénoncer le nombre assez faible de TGV sur certaines relations à la
demande forte n’est pas suffisant pour expliquer le manque de rentabilité : il
faut préciser cette croissance exponentielle du coût marginal inhérente à la
mise en place de trains supplémentaires. De plus, plus il y aura de trains,
plus le réseau sera saturé, ce qui rajoute un coût de congestion, c'est-à-dire
avoir une LGV qui ne peut pas répondre à la demande sans baisser la
qualité du service offert. Avec 13 trains par heure et par sens sur Paris –
Lyon, ligne la plus rentable, une augmentation du nombre d’A/R pourrait
servir au reversement d’une part du bénéfice pour augmenter la rentabilité
des LGV les plus médiocres. Ce coût de congestion limite de suite cette
idée, et il n’est pas pris en compte comme raison à la différence entre
rentabilité a priori et a posteriori ni dans le rapport de la Cour des Comptes,
ni dans la presse économique. Dire que la rentabilité des LGV diminue dans
S
39
Le TGV 8573 Hendaye – Paris Montparnasse
près d’Ychoux le 10 février 2015. ©T.Arpin2015
Le 13 Avril 2014, tout près de la petite gare de Port la Nouvelle, une UM de TGV Duplex, la rame
Dasye 744 et Duplex 277, assure une relation Paris Gare de Lyon – Perpignan. ©G.Postek2014
PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss
4 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42
le temps est simplificateur quand on ne tient pas compte du coût de
congestion, et des efforts mis en œuvre pour augmenter la capacité des
lignes (signalisation TVM430 + ERTMS) et du matériel ferroviaire (Duplex
2N2).
Face à cette rentabilité dénoncée comme faible, il devient alors peu
pertinent de continuer à construire des LGV sur le territoire, ou alors en
trouvant des procédés permettant de ne plus assumer le coût par la seule
puissance publique. Il est dommage que cet aspect ne soit pas discuté dans
la critique. Dans une première démarche, la constitution de RFF en 1997 a
permis de dégager une dette moins importante car « diluée » entre plusieurs
entités. Mais si cette dette a augmenté, c’est qu’elle repose entièrement sur
RFF qui, en 17 ans d’existence, a assumé seul la construction de
presqu’autant de LGV que sur la période 1981 – 1997 où l’effort était
supporté par l’État. C’est pourquoi les nouvelles lignes actuelles proposent
une nouvelle forme de construction en concession ou Partenariat Public
Privé (PPP). La concession permet à un constructeur privé de réaliser
l’investissement pendant une certaine durée fixée par un contrat comme
c’est le cas pour la LGV Tours – Bordeaux, tandis que le PPP pour la LGV
Bretagne amoindrit le recours aux budgets publics pour la construction de la
ligne et transfère le risque de faible fréquentation au constructeur privé.
Aussi c’est un moyen de continuer à avoir un réseau de LGV performant tout
en diminuant le coût pour la puissance publique et de diminuer la dette sans
avoir recours à l’emprunt pour construire une infrastructure, ou bien la SNCF
qui ne serait chargée que de payer un droit de passage sur l’infrastructure,
sans pour autant baisser son coût marginal.
C – La remise en cause d’un grand projet
face à un mythe tout aussi grand
a France et la puissance publique pâtissent d’une religion des
mégaprojets faisant intégralement partie du « modèle libéral-
croissanciste ». La commission européenne a promu depuis les années
1990 le développement des infrastructures de transport, avec l’idée que leur
« insuffisance » était une barrière à la libre circulation des produits au sein
de la CEE et, par conséquent, entravait la croissance économique de
l’Europe, la « compétitivité », et l’« attractivité des territoires ». Pour résumer,
la construction d’une infrastructure de transport est vue comme un plan de
relance économique, et engendrera de la croissance économique sur les
territoires traversés. Le TGV, avec le succès du Paris – Lyon et le
rapprochement économique que connurent les deux métropoles, s’est donc
imposé comme le moyen de transport à développer après les autoroutes
pour réduire les distances et le temps. Ainsi, les échanges économiques
entre les métropoles seront favorisés, et participeront à la création de
véritables pôles de concentration ou de spécialisation économique. En se
spécialisant, un territoire va concentrer autour de lui certains avantages :
celui de la proximité entre les acteurs du tissu productif en augmentant ainsi
la compétitivité ; des avantages naturels (une ressource présente comme les
parfums à Grasse) ; des avantages d’externalités de localisation des
entreprises (échange de savoir-faire et de conception des produits). De plus,
la construction d’une LGV peut répondre à des coûts de congestion, donc
développer un trafic dédié en augmentant sa capacité. La hausse des
trafics, de la rapidité et des échanges attendus permet, toutes choses égales
par ailleurs, de favoriser la croissance économique.
Cette seule motivation économique est le seul critère souligné par la
Cour des Comptes pour dire que le modèle du TGV est en faillite ou sur le
point de l’être, car l’apposition d’une LGV sur un territoire vierge n’a pas suffi
à créer une région dynamique en termes d’emplois et d’activité économique.
Le problème est que le TGV ne sert pas uniquement à développer des
territoires et à favoriser des échanges économiques. Le TGV n’est pas
entièrement un train à la clientèle d’affaires, et c’est la Cour des Comptes
elle-même qui le dit : « les deux tiers des voyages sont personnels, et un
tiers est professionnel », ce qui veut dire que le TGV sert aussi à la clientèle
L
40
Cette UM de TGV SE composée des rames PSE 27 et 59 vient de franchir le Viaduc des Angles, sur le Rhône et
le train s'élance pour rejoindre Metz. En toile de fond l'agglomération Avignonaise, le 29 décembre 2013.
©R.Lapeyre2013
Un TGV Ouigo avec la rame 760 passe ici à Bellechaume sur
une relation Montpellier – Marne-la-Vallée le 1er
avril 2014.
©J.-P. Salmon-Legagneur2014
PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss
MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 5943
touristique. Ceci pour dire que la formation de pôles de compétitivité
(clusters) ou de spécialisation économique à mettre en place avec l’arrivée
du TGV pourrait être une hérésie, et augmenter le risque économique des
projets autour de la LGV. Le quartier Euratlantique de Bordeaux, développé
sur le modèle de Lille Europe, et censé devenir un pôle compétitif du secteur
tertiaire au carrefour du sud-ouest européen. Mais selon un récent rapport
de l’Insee qui analyse les tissus productifs locaux pour connaître la
vulnérabilité économique des territoires, la création de ces pôles
économiques exposent encore plus les régions à des chocs économiques,
et donc à terme à pénaliser la mobilité pour les voyages personnels qui
pourraient emprunter le TGV. Cette chute probable de la demande, faute de
moyens pour pouvoir payer le TGV, augmenterait la différence déjà aperçue
entre trafic estimé et trafic réel, puis rentabilité de la LGV a priori et a
posteriori.
II – Une soutenabilité
économique qui doit se
réinventer
ous l’avons dit, le modèle économique du TGV serait à bout
de souffle, car la prise de part de marché sur d’autres modes
de transports ne suffit plus à pallier les handicaps inhérents
aux LGV sur l’aménagement du territoire, et même une libéralisation
annoncée des transports par autocar ne suffira pas entièrement à régler les
problèmes en rationalisant les relations assurées par TGV.
A – Le gain relatif des parts de marché du
TGV
‘idée que le TGV a permis de gagner des parts de marché
conséquente en termes de parts modales est aujourd’hui à
relativiser. Au début de la création du TGV, le marché était
totalement pertinent sur Paris – Lyon. Le marché pertinent, ou marché de
référence, est défini comme le lieu où se rencontrent l'offre et la demande de
produits et de services qui sont considérés par les acheteurs ou les
utilisateurs comme substituables entre eux. Le consommateur pouvait ainsi
bénéficier d’une parfaite substituabilité des différents modes de transport
entre l’avion, la voiture, et le train. Le TGV a alors permis de faire une très
grande économie de temps par rapport aux autres modes de transport en
proposant un départ et une arrivée en centre-ville, de telle sorte que les
parts de marché atteignaient presque un maximum. D’un marché pertinent,
le TGV est devenu le seul mode de transport sur les relations qui s’ouvraient
peu à peu en France, en se transformant en un marché où il y a un manque
de pertinence. L’activité TGV s’assurait naturellement un monopole sur des
relations où la valeur temps prenait de la valeur : chaque déplacement de
l’usager prenait alors une valeur en réduisant les temps de parcours et en
permettant de passer plus de temps sur le lieu de travail, mais aussi de
pouvoir rentabiliser le temps passé dans le transport à travailler. Même si
elle est variable selon les individus, cette valeur temps a augmenté et a joué
en faveur du gain de parts de marchés du TGV.
Cependant, le TGV était à l’origine réservé à des trains sur ligne
dédiée LGV, mais afin de pouvoir proposer des relations plus longues et
sans rupture de charge, les relations se sont ouvertes à des destinations
que l’on ne peut atteindre que par voie classique. Si cette nouveauté a pu
permettre des gains de temps, la zone de pertinence de ce mode a été
radicalement changée. Et nous soulignons ce propos en reprenant les
termes de la Cour des Comptes : « Les TGV passent en moyenne 40% de
leur temps sur ligne classique ». La zone de pertinence prend en compte le
coût généralisé pour un individu sur un trajet, c'est-à-dire le coût monétaire
du trajet, et le coût en termes de temps généralisé (durée du trajet, temps
d’attente, confort et accessibilité du train, etc.). Le problème est que si des
TGV sont mis sur des relations où la zone de pertinence n’est plus à
l’avantage du TGV, le taux de remplissage diminuera car l’usager va
préférer le mode qui a le coût généralisé le plus faible : faire un Paris –
N
L
41
Un TGV Duplex Bourg Saint-Maurice
– Paris Gare de Lyon passe dans la
courbe de Saint-Jean de la Porte un
samedi de février 2004.
©D.Deray2004
Au PN 215 de Villefranche de Lauragais, en direction
de Toulouse, un Duplex le 11 octobre 2014.
©G.Martinat2014
PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss
6 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42
Tarbes est peut-être plus coûteux en train qu’en avion, ce qui encourage à
avoir des trains vides en fins de trajet. Si le coût généralisé augmente, par la
théorie des choix discrets, l’usager n’hésitera pas à déterminer son action en
faisant appel à un mode de transport autre que le TGV, et répètera son
action dans des conditions identiques. Ainsi, les parts de marché en faveur
du TGV gagnées sur une portion du trajet son perdues dès lors que la zone
de pertinence n’est plus attractive ; le gain de parts de marché devient
relatif.
B – La soumission au double enjeu
d’aménagement du territoire et d’irrigation
du territoire
e réseau ferroviaire a un but d’aménagement du territoire, mais
pâtit d’une révolution de penser la mobilité du fait que le TGV
est un modèle des années 1970 qui jouait sur la
complémentarité voiture-train pour se rendre en gare et prendre le train. Si
beaucoup ne connaissent pas l’origine de la complémentarité réseau
classique – réseau TGV, issue du schéma directeur des transports de 1992,
il est néanmoins intéressant de s’intéresser à l’effet tunnel provoqué par une
LGV.
La création d’une LGV pourrait pénaliser des régions en situation
intermédiaire, c'est-à-dire qui sont simplement traversées par la ligne, ou
bien qui ne bénéficie pas des contreparties économiques d’une telle
infrastructure (activité économique, localisation d’entreprises, hausse de
l’emploi). Cet effet tunnel avait été en partie comblé par la création de gares
TGV en rase campagne comme la gare TGV Haute-Picardie, ou bien
Mâcon-TGV, ou encore Vendôme TGV. L’isolation de ces gares avec le
reste du réseau de transport est flagrante, et coupe toute synergie avec une
correspondance avec un train classique, car inexistant. Le réseau routier
créé pour desservir la gare n’est pas suffisamment incitatif, ce qui
expliquerait la désertion et la faible fréquentation de ces gares
intermédiaires dans lesquels les TGV s’arrêtent et ne prennent pas
d’usagers. La recette commerciale pour le TGV est moindre car c’est autant
de clients en moins, mais c’est surtout un péage au gestionnaire
d’infrastructure plus important du fait du temps d’arrêt et du besoin d’un
sillon plus important.
De façon plus générale, le modèle TGV a minoré ces dessertes
intermédiaires en n’en tenant presque pas compte dans les prévisions de
trafic, préférant privilégier les estimations d’origine à destination de la LGV.
Or ces dessertes peuvent apporter un surcroît de trafic, et c’est pourquoi
une révolution dans la façon de penser la LGV a été engagée pour la
construction des LGV Tours – Bordeaux et Bretagne, ce dont ne parle
absolument pas la Cour des Comptes. Auparavant, ces arrêts intermédiaires
ne bénéficiaient que d'une desserte limitée et se situaient de surcroît hors
des agglomérations, éloignant les voyageurs. Aujourd’hui, ces deux LGV
sont les premières sans aucune création de nouvelle gare, en privilégiant
l’embranchement direct sur le réseau classique dans les gares du XIXe
siècle, en correspondance avec les trains régionaux. Cette perspective de
hausse de la fréquentation pourrait estomper l’effet tunnel du TGV dans les
régions traversées, et surtout confirmer les perspectives de prévisions du
trafic a priori que la Cour des Comptes a souligné comme fausses.
C – Une libéralisation qui ne mènerait qu’à
une rationalisation partielle du TGV
n article de Martine Orange paru dans Mediapart achevait
son analyse par une franche prise de position de l’auteur qui
interprète le rapport de la Cour des Comptes comme une
préparation « psychologique » justifiant la mise en œuvre de la loi Macron et
la libéralisation du transport de voyageurs par autocar. Il ne nous revient pas
de justifier ou non cette position, mais au contraire de chercher les
conséquences économiques d’une telle libéralisation.
L
U
Le 27 octobre 2013, à Pompignan
(Tarn-et-Garonne), le long du canal
des deux mers, la rame TGV 374 avec
le train 8514 Toulouse – Paris
Montparnasse. ©G.Turpin2013
Le 26 février 2015, le TGV 4502 est vu ici à Vercelli en Italie, et
s’approche peu à peu des Alpes, sur une relation Milan Porta
Garibaldi – Paris Gare de Lyon. ©F.Tecco2015
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  • 1. MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee NNNººº666 Avril 2015 – Publication trimestrielle – 2e année LLLeeesss aaaccctttuuuaaallliiitttééésss fffeeerrrrrrooovvviiiaaaiiirrreeesss ddduuu sssuuuddd---ooouuueeesssttt eeeuuurrrooopppéééeeennn ÉVASION Des trains en Argentine ÉTRANGER Les OFP en Espagne Publication trimestrielle Version papier reliée : France : 12,50 € / Europe : 16 € Le TGV, une menace pour le futur du transport ferroviaire ? Et aussi : Signalisation : la variante sud-ouest La Corrèze et le Cantal en bleu d’Auvergne De Mignaloux à Jardres sur une desserte Fret Et le reste de l’actualité ! MMIIDDIIEExxpprreessssmmaaggaazziinneeNNºº66
  • 2. Pour une nouvelle ambition ferroviaire française Déclaration commune ans l'indifférence ou l'ignorance des politiques, des médias, du public, la France, pays du TGV et des trains à l'heure, est en voie de perdre son statut de grande nation ferroviaire et de devenir un maillon faible de l'Europe ferroviaire. Pourtant nos territoires, nos entreprises, nos ports, pour renforcer leur identité, leur compétitivité, leur attractivité ont impérativement besoin de bonnes connexions ferroviaires entre eux et avec l'Europe. Il le faut pour valoriser notre position de carrefour européen occidental. Comme il le faut pour renforcer les liens entre nos ports, maritimes et fluviaux, et leurs hinterlands. A ces enjeux s'ajoutent les grands défis transverses, environnemental, énergétique, climatique. Nous vivons la fin de l'ère des opérateurs nationaux exclusifs, supposés être en mesure de répondre à tous les besoins de leur territoire, chacun d'eux étant le seul utilisateur de « son » réseau, placé sous son contrôle. Ce qui ne veut en aucun cas dire que ces opérateurs publics historiques n'ont pas encore un rôle majeur à jouer. Mais les modalités en seront différentes. A défaut, ils courent à leur marginalisation. Le moment est venu de jouer la carte de la diversité et d'une nouvelle modernité ferroviaire européennes, d'ouvrir notre réseau ferré national à de nouveaux opérateurs, publics ou privés, de vendre notre savoir-faire ferroviaire dans d'autres pays. Le niveau actuel d'utilisation de notre réseau ferré national, même avec les nouveaux opérateurs de fret, ne permet plus d'assurer son équilibre économique. Ce déséquilibre structurel, insoutenable, menace sa pérennité. La France a un besoin impérieux de « nourrir » son réseau de nouvelles utilisations, de nouveaux opérateurs. Ce qui créera de nouveaux services au public et aux entreprises. C'est le rôle du gestionnaire du réseau, de statut public, indépendant, de les susciter et les prospecter. Il est appelé à devenir le pilier de la politique ferroviaire française. Il y a urgence d'action. Même s'il reste parmi les plus sûrs, les experts alertent sur le vieillissement de notre réseau et son manque d'ouverture aux technologies modernes. Est-il acceptable en 2015 que des trains de fret se « perdent » encore ? La modernisation de notre réseau, appuyée sur la révolution numérique, incluant le contrôle et la connexion centralisés des points sensibles, recèle d'importants gisements de sécurité, de fiabilité, de productivité, d'économie d'énergie. Prolongée par un réseau capillaire décentralisé, géré « en proximité », cette modernisation, augmenterait la performance nationale, européenne et territoriale du mode ferroviaire. Dès lors, pourquoi ne pas en faire un projet franco-européen contribuant à la relance économique, mobilisateur pour des start-up françaises ? Le fret ferroviaire, en quelques années, à contre-courant de l'exigence de report modal portée par le Grenelle de l'environnement, a chuté en France de 16 à 9 % de part de marché. Ce recul spectaculaire, ignoré du grand public, est une exception européenne qui devient un handicap logistique pour notre économie. La comparaison avec l'Allemagne est alarmante qui, avec 17 % de part de marché, connaît une croissance que se partagent l'opérateur national DB Schenker et ses concurrents. Le recul de l'offre pour le wagon isolé en France est lourd de conséquences à court et long terme. A l'heure où des chaînes logistiques virtuelles structurent le transport de fret, à l'échelle planétaire, le retard numérique du transport ferroviaire est incompréhensible. La médiocre traçabilité qui en résulte, la complexité de l'accès aux sillons, affaiblissent son potentiel logistique et écologique. Dans le domaine des voyageurs, si le TER reste un succès de fréquentation, les régions ne peuvent plus assumer la montée de son coût. Le Transilien est dans la même situation, le vieillissement du réseau et la baisse de qualité pèsent sur la vie quotidienne des Franciliens. Les Intercités se dégradent depuis l'avènement du TGV, il y a plus de trois décennies. Le TGV, polarisé sur la concurrence aérienne, fragilisé par les low cost, peine à trouver un nouveau souffle. La France a repoussé l'échéance de l'ouverture à la concurrence, au risque de voir son opérateur national, et ses filiales, écartés des appels d'offres européens. Ce délai, à tout le moins, doit être utilisé pour traiter nos points faibles. Le ferroviaire français, et il faut veiller à ce que la réforme ne l'accentue pas, souffre d'un excès de centralisation qui génère des charges de structures élevées. Il a besoin de réactivité, d'adaptabilité, de proximité, d'un développement de sa capacité d'initiative locale. C'est une évidence pour le TER et les Intercités. C'est tout aussi vrai pour le fret qui, contrairement à d'autres pays, dont l'Allemagne, manque cruellement de racines territoriales et portuaires. Des PME ferroviaires réactives et flexibles pourraient aller chercher et organiser les envois dans les territoires et amorcer les chaînes logistiques modernes à dominante ferroviaire dont notre économie a besoin. Beaucoup d'entreprises sont prêtes à s'impliquer dans des initiatives locales pour peu qu'elles soient menées dans un esprit de partenariat et d'innovation. En particulier pour les lignes capillaires, dont le potentiel logistique est sous-estimé, dont il faut résolument exclure la fermeture. Le bilan des premiers OFP, opérateurs ferroviaires de proximité ou portuaires, appelle à investir ce champ d'innovation. Le ferroviaire illustre le paradoxe français : d'un côté un potentiel technique et humain que, malgré son recul, bien des pays peuvent encore nous envier, de l'autre la peur de l'avenir et l'illusion que cet avenir passe par le retour à un passé révolu et idéalisé. La France, si elle l'ose et si elle le décide, peut figurer parmi les grands gagnants de l'Europe ferroviaire. La réforme le permet. Encore faut- il que sa mise œuvre ne soit pas détournée de son objectif originel, renforcer l'efficacité de notre système ferroviaire. Pour cela, l'Etat stratège doit impulser une stratégie innovante, appuyée sur un secteur public différencié et renforcé, une stratégie ouverte à la concurrence, à l'initiative privée, à l'Europe. Nous attendons du transport ferroviaire qu'il devienne un acteur du développement durable et de l'attractivité de la France. Nous mesurons l'ambition, l'énergie, l'esprit transpartisan qu'implique ce grand projet national et européen. Nous sommes prêts à y prendre notre part. François Asselin, président de la CGPME, Jacques Kopff, président de l'AFPI, Jean Sivardière, président de la FNAUT, Xavier Beulin, président de FNSEA, André Marcon, président de CCI France, Louis Nègre, président de la FIF. Denis Choumert, président de l'AUTF, Louis Nègre, président de la FIF, D
  • 3. ÉÉddiittoo Chers lecteurs, L’actualité ferroviaire est riche ces derniers mois. Tout d’abord, l’excellente initiative commerciale de la SNCF en remettant en service un train classique Paris – Bordeaux, accessible et bon marché, qui redonne enfin un peu d’importance aux trains classiques face au « tout TGV » que beaucoup ont dénoncé. Parmi, la Cour des Comptes qui, sous couvert d’un argumentaire discutable, promeut l’abandon pur et simple de certaines relations les moins rentables. Mais pour mettre quoi à la place ? Certes la loi Macron permet désormais de voyager en bus sur de la longue distance, mais détruire une infrastructure capacitaire ferroviaire, avec son exploitation et ses employés, pour la remplacer par des bus polluants sur des routes congestionnées, ce n’est pas un progrès. Il n’aura pas fallu attendre très longtemps puisque chaque événement est l’occasion pour supprimer des services ferroviaires déjà fragiles comme l’effondrement de Luzenac qui a entrainé la suppression du train de nuit Paris – Latour-de-Carol dans l’intégralité de son parcours. Le client, autrefois appelé usager, doit se résoudre à cet état de fait, dans un « déménagement » du territoire qui chamboule les habitudes et éloigne chaque fois un peu plus les habitants de leur campagne pour se concentrer dans des grandes villes reliées par un TGV hors de prix. Est-ce la fin du train ? En France, les choses ne prennent pas le bon chemin, et le cri d’alarme publié ci-contre n’est qu’un appel à la prise de conscience de chacun pour défendre ses services à la mobilité, et que nous devons relayer pour défendre notre aménagement du territoire menacé. Camille PRIETO Sommaire Numéro 6 – Avril 2015 - Trimestriel Actualités 4 Actualités internationales 10 Technique : la variante régionale Sud-Ouest des gares de voie directe type unifié SNCF 12 Reportage : Balade de Mignaloux à Jardres 19 Nostalgie : Du bleu d’Auvergne au beau milieu du Cantal 24 Images d’histoire : Les Z7100 en Ariège 30 Étranger : Les OFP en Espagne 32 Partenariat : Revue de presse 37 Politique des transports : Volte-face sur le TGV 38 Évasion : Vapeurs en Argentine 46 MMIIDDIIEEExxxppprrreeessssssmagazine ©© MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee est une revue paraissant 4 fois dans l’année. Cette revue fonctionne grâce aux contributions volontaires et bénévoles de passionnés du chemin de fer. Directeur de la publication Camille PRIETO Rédacteur en chef Camille PRIETO Maquette Camille PRIETO Collaborateurs permanents João CUNHA (Portugal) Enrique DOPICO (Espagne) Commande du numéro : Adresser votre commande par chèque bancaire de 12,50 € libellé à l’ordre de : Camille PRIETO 21 Boulevard Henri IV 75004 PARIS Ont contribué à ce numéro avec nos plus grands remerciements : Romain AMIC-DESVAUD, Thomas ARPIN, José BANAUDO, Jérémy BOUEY, Tristan CARRÉ, Didier DELATTRE, Alain DEMAREZ, Arnaud DEMAREZ, Damien DERAY, Michel FALCOU, Alexandre GILLIERON, Mikael GUERRA, Rémi Lapeyre, Javier LÓPEZ, Víctor LURI, Gérard MARTINAT, Nil RUIZ, Jean-Philippe SALMON- LEGAGNEUR, Jérôme PAGÈS, Guillaume POSTEK, Flavio TECCO, Jean THOUVENIN, Jean-Louis TOSQUE, Georges TURPIN, Jean- Louis VIDAL, Baptiste WEYLAND Envoyez vos collaborations midiexpressmagazine@yahoo.fr ©©MMIIDDII EExxpprreessss magazine est diffusé : - Sur commande par chèque ; - À la bibliothèque du CE SNCF de Bordeaux ; - Chez Transmondia, 48 rue de Douai, 75009 PARIS ; - Lors des bourses d’échange et expositions. Informations Tous droits réservés. Tout droit de reproduction soumis à autorisation de l’auteur. Toutes les photos présentes dans la revue ©MMIIDDII EExxpprreessss magazine sont la propriété intellectuelle de leurs auteurs respectifs et sont protégées par la législation en vigueur sur le droit d'auteur. Toute utilisation frauduleuse du contenu photographique de cette revue, sans autorisation expresse de l'auteur est formellement interdite (article L.122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle). Le maquillage/effacement de logo et le recadrage sont formellement interdits. Les contrevenants s'exposent à des poursuites judiciaires, conformément aux articles L.335-2 et L.335-3 du Code de la Propriété Intellectuelle. En couverture Le 1 er décembre 2013, le TER 865730 Bordeaux – Sarlat passe au pied des signaux mécaniques du Buisson avec les X2221, Xr6072 et X2233. ©J.-P. Salmon-Legagneur En partenariat avec :
  • 4. AAccttuuaalliittééss 4 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Latour de Carol sans trains ! ncore un coup dur pour le rail pyrénéen. Le samedi 28 mars 2015, à la suite d’un glissement de terrain sur la RN 20 à hauteur du village de Luzenac, la préfecture de l’Ariège décidait l'interdiction de cette portion de nationale et la déviation du trafic sur l'ancienne route avec restriction à 12 tonnes sur le pont SNCF de Luzenac. L'affaissement de terrain menaçant la voie ferrée, le trafic en a été interdit. Aucun train ne circule dès lors de Foix à Latour de Carol, et pas de cars non plus. L’accès à Luzenac pour la desserte de l’usine de talc reste ouvert. Cependant, toute circulation de trains de voyageurs reste suspendue. Pire, le train de nuit Paris – Latour de Carol 3971/3970 a été tout simplement supprimé, sans aucun report possible, et la vente suspendue jusqu’au mois de septembre. La section de ligne Luzenac – Ax-les-Thermes sera gérée suivant la procédure de « ligne fermée pour travaux », ce qui n'interdit pas la circulation de trains de travaux pour garder les installations en service. Pour pouvoir maintenir les installations en état, (fonctionnement du circuit de voies) un train doit circuler au moins toutes les 72 heures entre Foix et Luzenac, et c'est un Régiolis qui en a la charge chaque matin. Les rames ne peuvent circuler qu'en mode diesel. Le pont SNCF est gardé par la maréchaussée. Pas de poids lourds ni de cars après Luzenac. La fermeture du tunnel routier du Puymorens et les travaux dans celui de Foix commencent à rendre compliqué l’accès dans l’Ariège profonde. De quoi s’inquiéter aussi car la Renfe songe à ne plus desservir Latour de Carol en imposant désormais le terminus à Puigcerdà. Si tel est le cas, plus aucun train n’arrivera à Latour de Carol ! Malgré tout, SNCF met en place, à compter du samedi 11 avril, des services de minibus entre les gares de Foix et de Latour-de- Carol. Ces véhicules, d'une capacité de 22 places, remplacent les trains restent coincés à Foix. Mais aucune prise en charge pour les voyageurs de feu le train de nuit. Côté déviation routière, également, les choses avancent. Les travaux de renforcement du pont SNCF de Luzenac vont démarrer la semaine prochaine et devraient durer dix à quinze jours. En attendant, l'ouvrage d'art reste interdit à la circulation pour tous les véhicules d'un poids supérieur à 12 tonnes et d'une hauteur dépassant 3,50 m. ©C.Prieto2015 E La desserte de talc par ECR à Luzenac. ©N.Ruiz2013 Ambiance en gare de Luzenac en 1988. ©J.-L.Tosque1988
  • 5. AAccttuuaalliittééss MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 5 Eurostar commence à fréquenter le sud ! la fin de l'été 2014, les trois rames Transmanche (3203/04 + 3225/26 + 3227/28) assurant du service TGV entre Paris et Lille (et les antennes) ont été retirées du service et envoyées immédiatement à Conflans Jarny pour ferraillage à Baroncourt. Début 2015, la 3203/04 est revenue au Landy puis a rejoint les ateliers d'Hellemmes. Le but de cette manœuvre était d’utiliser les remorques de cette rame pour tester les motrices Eurostar sortant de rénovation avec la nouvelle livrée bleue qui sera appliquée progressivement à toute la flotte Eurostar. Le 25 mars 2015 eut lieu la première circulation de cette composition colorée avec une marche d'essai entre Hellemmes et Dunkerque des motrices 3007 et 3008 bleues avec les remorques de la 3203/04 en livrée TGV. Mais il ne s'agit pas d'un simple lifting peinture ! En effet, les motrices 3007/08 sont des motrices anglaises, donc pas équipées pour circuler sous 1500V (pour rappel il y a 4 séries de rames Eurostar : les 3000 Anglaises, les 3100 Belges, les 3200 Françaises et les 3300 NOL aujourd'hui GBE). Seules quelques rames 3200 sont aptes à 1500V pour les dessertes BSM et MSC. Cette rénovation consiste donc à rendre les rames 3000 également compatibles à 1500V pour avoir un parc plus important. Ces essais testent le comportement des motrices sur ligne classique puis sur LGV (AR Lille Calais) puis la validation a 200 km/h sous 1500V et la TVM 300 (aller-retour Lille – Poitiers). Cette circulation avec une telle composition panachée sera unique, les prochains essais se dérouleront certainement avec une rame entièrement bleue à la sortie de rénovation des remorques. La rame 3203/04 rejoindra alors définitivement Baroncourt. ©D.Delattre2015 Jeudi 26/03 essai sur LGV Nord Hellemmes 8.57 Calais Frethun 10.35 Lille Europe 9.00 Hondeghem 11.00 Hondeghem 9.17 Lille Europe 11.21 Calais Frethun 9.48 Hellemmes 11.28 Vendredi 27/03 validation à 200 km/h sous 1500 V Hellemmes 9.56 Lille Flandres 10.04/22 Roissy 11.29 Massy 12.07 Poitiers 13.46 À Ci-dessous à gauche : des essais ont également eu lieu en prélude de la mise en service commerciale le 1er mai 2015 d’une relation directe Londres – Marseille. La première salve d’essai s’est effectuée le 1er juin 2013 avec la rame 3218-17 sur la marche 9086, ici vue à Marseille Saint-Charles. Puis une autre circulation a eu lieu le jeudi 19 mars avec marche 9084/9087. ©D.Delattre2013 Au départ de Lille Flandres. ©D.Delattre2015 Passage à Futuroscope. ©A.Demarez2015 Passage à La Tricherie. ©A.Demarez2015
  • 6. AAccttuuaalliittééss 6 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Le grand retour du Corail Paris – Bordeaux uccès en folie pour la mise en service les fins de semaine uniquement d’un train Corail Intercités Paris – Bordeaux. La mise en vente au prix d’appel de 15 euros a rendu le train complet très rapidement. En effectuant le parcours Paris – Bordeaux en 4 h 39, et desservant Angoulême, Poitiers, Saint-Pierre-des-Corps et Les Aubrais, ce train est une façon de concurrencer le covoiturage selon le communiqué de presse SNCF en proposant une offre souple et accessible à toute la clientèle. Composé de 9 voitures Corail aptes à 200 km/h, il réutilise en fin de semaine un coupon utilisé en semaine sur Paris – Bourges – Montluçon dont la composition est la suivante : 2 A10tu, 1 B11u et 6 B10tu. Il est cependant regrettable que les horaires de ce train soient exclusivement conçus pour le départ en weekend des Parisiens. Dans le sens province – Paris, aucune alternative au TGV n’est possible. Espérons que le succès permette la mise en place d’un train également le vendredi et le lundi, dans les deux sens, pour assurer une parfaite mobilité de la clientèle touristique et étudiante qui revient à son domicile en fin de semaine ; tel était le but de la création de ce train. ©C.Prieto2015 S Le lundi 6 avril 2015, la BB 26034 déboule dans les champs de vigne de Lalande de Pomerol avec le 4021 Paris-Austerlitz – Bordeaux. ©C.Prieto2015 Le même jour, le même train, mais quelques kilomètres plus au nord à Saint-Avit. ©J.-P.Salmon-Legagneur2015
  • 7. AAccttuuaalliittééss MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 5 Sur les traces de l'Aquitaine : en cabine du premier Corail200 Paris Austerlitz – Bordeaux l est 6 h 09 ce matin lorsque je prends mon service en gare de Paris-Austerlitz. Nous sommes aujourd'hui le samedi 4 avril 2015, premier jour de circulation commerciale des trains Intercités 4021 et 4020 entre Paris-Austerlitz et Bordeaux Saint-Jean, et j'ai l'honneur d'assurer la conduite du 4020, départ de Paris-Austerlitz à 6h58. Après un passage à mon casier afin de récupérer les documents nécessaires au service, je me dirige vers le bâtiment voyageur. Prise de contact avec le collègue de l'escale : « C'est toi qui conduit le 4021 ? Tu trouveras ta rame et ta locomotive sur la voie 14 ! » En quittant son bureau, je remarque qu'un petit buffet proposant des boissons ainsi que des cannelés bordelais a été mis à disposition des voyageurs pour l'inauguration de cette nouvelle relation. Je me dirige donc vers la voie 14 où une BB7200 PV, affectée au service de la manœuvre, achève la mise en place de la rame. La composition du 4021 est de 9 voitures dont certaines, non rénovées, arborent encore leurs belles portes bleues, couleur si caractéristique des trains Corail. Quelques instants plus tard, la rutilante BB 26018 en livrée Carmillon, marque un arrêt à quelques mètres des tampons de la première voiture. À présent, la voie de départ est indiquée aux voyageurs et certains, lourdement chargés, commencent à monter dans les voitures. L'attelage est réalisé, puis c'est au tour des essais de freins. Lecture du Bulletin de Freinage, paramétrage KVB (contôle de vitesse par balises), et vers 6h45 le train 4021 à destination de Bordeaux St Jean est prêt au départ. À 6h58 précises, des sifflets retentissent, les portières claquent, Départ ! Nous quittons donc Paris Austerlitz à la vitesse de 30 km/h. Malgré une petite pluie fine, la mise en vitesse de la rame est relativement aisée. La flèche blanche verticale indiquant que le train a dégagé les aiguillages de la gare s'allume, 90 km/h autorisés, puis 140. La marche du train est assez détendue ce qui nous permettrait de rattraper environ 30 minutes en cas de retard. Mais pour le moment, nous sommes à l'heure et le train 4021 s'éloigne de la capitale. À Saint-Michel sur Orge, nous rencontrons un TIV à distance, 100 km/h impératif pour la traversée de Brétigny puis 130 pour Etampes. À présent, nous grimpons la rampe d'Étampes à vive allure puis entrons dans la zone équipée de pré-annonce. Sur cette portion, la vitesse est limitée à 200 km/h pour les trains autorisés à circuler à cette vitesse ; c’est notre cas aujourd'hui. Le paysage caractéristique de la Beauce défile, Toury, Artenay, Cercottes puis l'entrée des Aubrais. Premier coup de frein, à 7 h 55 précises, notre convoi s'immobilise en gare. La gare des Aubrais constitue un petit nœud ferroviaire. En effet, trois itinéraires sont possibles (Vierzon, Orléans ou Tours). Aussi le conducteur doit observer l'indicateur de direction afin de s'assurer qu'il est correctement aiguillé. Trois feux sont allumés, la direction de notre train Intercités est la bonne ! Nous quittons Les Aubrais avec une poignée de minutes de retard mais la vitesse de référence, 121 pour 200 autorisés, nous indique que nous devrions être à l'heure à Saint-Pierre-des-Corps. Après avoir longé la Loire à Blois, nous la traversons à Montlouis et de vieilles BB 9200 garées nous indiquent que le dépôt de Saint-Pierre est proche ! Une fois l'arrêt effectué, le convoi s'ébranle à nouveau. Ici encore, trois directions possibles : Bordeaux, Saumur ou Tours. Le prochain arrêt est Poitiers et nous circulons là encore à des vitesses supérieures à 160 km/h, hors zone de ralentissement. À notre arrivée à Poitiers, nous sommes accueillis par deux photographes vraisemblablement intéressés par ces nouvelles circulations. En effet, il est plutôt rare de voir des rames Corail tractées par des BB 26000, les TGV régnant en maîtres sur cet axe. Nous repartons vers le sud et « brûlons » la petite gare de Saint-Benoît et sa bifurcation. À droite, Niort et La Rochelle ; à gauche, une voie unique pour Limoges. Les kilomètres défilent, Saint-Saviol et Ruffec sont traversées sans arrêt. Je constate que les travaux de la future LGV SEA avancent à grande vitesse, la caténaire et les repères LGV étant même visibles par endroits. Angoulême approche et nous devons ralentir l'allure car un train de marchandises circulant devant nous, va être reçu sur une voie du faisceau. Le 4021 entre en gare d'Angoulême avec 5 minutes de retard mais la BB 26018 n'a pas dit son dernier mot ! Après avoir traversé l'imposant tunnel du Livernan à la vitesse réduite de 100 km/h le paysage change et les premiers vignobles font leur apparition. Puis l'agglomération bordelaise commence à se dessiner et nous réduisons notre vitesse à 60 km/h pour l'entrée sur Bordeaux. Ralentissement 30 puis rappel de ralentissement 30 ainsi qu'un avertissement sont présentés. Nous franchissons la Garonne à faible allure, la fin du voyage est proche ! À 11h37, le train 4021, parti de Paris à 6h58, entre en gare de Bordeaux Saint-Jean, accueilli par une poignée de photographes venus immortaliser l'évènement. La BB26000 sera ensuite dirigée vers le dépôt où une visite à l'arrivée et un examen visuel des pantographes seront faits. RAS ! Elle assurera dès ce soir le 4020 à destination de la capitale. Voici donc le 1er Paris Austerlitz-Bordeaux arrivé à l'heure à son terminus, espérons qu'il soit le premier d'une longue série. ©R.Amic-Desvaud2015 I Passage du 4020 avec la BB 26034 à Mouhiers-sur-Boëme le lundi 6 avril 2015. ©R.Amic-Desvaud2015 7
  • 8. AAccttuuaalliittééss 8 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Les Charentes aux couleurs du Transilien es rames de type RIB et VB2N en provenance d'Île-de-France sont actuellement acheminées vers le Technicentre industriel de Saintes (Charente- Maritime). À cette occasion, elles sont remorquées par des BB 67400, via Saint- Pierre-des-Corps et Angoulême, empruntant ainsi la ligne à voie unique entre Angoulême et Saintes. On peut noter que l'on risque d'observer, dans les semaines à venir, une augmentation de ce type de convoi. En effet, ces trains qui circulaient jusqu'à présent principalement en marche indéterminée vont avoir, à compter du 4 mars, un sillon régulier (voir tableau et régime de circulation). Régime de circulation : Mars 4 11, Avril 15 22 29, Mai 6 13 20 27. ©R.Amic-Desvaud2015 Variété de circulations en Charentes n ce début d'année, la diversité est au rendez- vous sur la ligne Angoulême-Saintes. Malgré l'omniprésence des AGC qui assurent la quasi-totalité des TER, quelques circulations ont égayé le quotidien de cette attachante ligne, entre vallée de la Charente et vignoble du Cognac. Après avoir effectué des mesures en gare d'Angoulême, la voiture Mauzin 212 a inspecté la voie entre Angoulême et Saintes sous la marche 812639, ici à Angeac-Charente le 11 février 2015. Le lendemain 12 février, c'est une rame de ballastières, emmenée par deux BB69200 qui s'est engagée sur la voie unique en marche indéterminée à Mosnac. À l'arrivée à Saintes, une partie de la rame sera laissée et l'autre poursuivra sa route vers Bordeaux. ©R.Amic-Desvaud2015 (texte et photos) D E Le 7 avril 2015, la BB67446 acheminait aux ateliers de Saintes une VB2N pour rénovation. Deux jours plus tard, elle remontait la RIB593 radiée. Elle est vue alors qu'elle aborde la gare de Jarnac et longe le château de Cressé. ©R.Amic-Desvaud2015
  • 9. AAccttuuaalliittééss MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 9 La fin des X 240 sur Le Blanc – Argent ernier vestige de l’ancien réseau du Blanc à Argent, bien connu dans le milieu ferroviaire sous le nom de « BA », la ligne reliant Salbris à Valençay via Romorantin voit encore circuler des autorails à voie métrique de deux séries différentes. Toutefois, les deux autorails de la série X 240 (X 241 « Romorantin-Lanthenay » et X 242 « Valençay ») mis en service en 1984 ne roulent plus qu’exceptionnellement et devraient prochainement être retirés du service car ils ne répondent plus aux normes actuelles d’accessibilité et leur mise à niveau serait trop coûteuse. D’autant plus qu’actuellement avec l’exploitation « en navettes » du Blanc – Argent, deux autorails suffisent pour assurer tout le service quotidien (un autorail roulant entre Romorantin et Valençay, l’autre entre Romorantin et Salbris). Ce qui peut être facilement assuré par les autorails à deux caisses X 74500 construits par CFD à Bagnères-de-Bigorre, il y a une dizaine d’années. Et ceci bien qu’un autorail de cette série soit hors service suite à un accident à un passage à niveau, il y a plusieurs mois. Sur la vue jointe, l’autorail X 241 est en gare de Romorantin, en avril 2013. ©G.Turpin2015 (texte et photo) Saignée dans les X 2200 n fin d’année 2014, la SNCF a retiré du service plusieurs autorails X 2200. Certains de ces engins sont aujourd’hui garés sur une voie « de l’oubli » au nord de la gare de Limoges-Bénédictins. Clin d’œil de l’histoire, le X 2252 attend l’issue fatale face à l’automotrice Z 4909. La grande majorité des X2200 restants devrait être radiée au 31 décembre 2015. La région Limousin n’en possèdera plus, et il ne restera plus qu’un petit carré de X 2200 aquitains et charentais à la STF Aquitaine jusqu’à la mi-2016 en attendant les fins de livraison de matériels neufs. ©G.Turpin2015 Naviland Panache D E Le X 2253 à Saint-Aulaire, sur un Ter 868371 Objat – Brive-la- Gaillarde. ©J.Bouey2013 À la suite de problèmes techniques sur ses G1206, Naviland a fait son spectacle sur les trains Cognac – Hourcade ! ©C.Prieto2015 La BB 60004 SNCF sur le train 52775 à Cubzac les Ponts le 1er avril 2015. ©C.Prieto2015 La BB 75022 ETF sur le train 52775 à Cubzac les Ponts le 8 avril 2015. ©C.Prieto2015
  • 10. AAccttuuaalliittééss iinntteerrnnaattiioonnaalleess 10 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Euskotren assure de nouveau des trains de marchandises ! près presque trois ans sans avoir exploité un seul train de marchandises sur ses lignes, Euskotren a assuré plusieurs prestations de trains de marchandises au début de l’année 2015. La ligne de connexion à Áriz (Basauri), entre la gare de marchandises de la Renfe et la gare d’Euskotren, a été stratégique en permettant l’échange de marchandises dans le même espace urbain. Le premier train a circulé en janvier avec une composition de 20 wagons chargés de bobines d’acier. Parti de la gare intermodal d’Áriz (Renfe) et à destination d’Irún, il a été tracté par deux locomotives bimodes 2000 de l’opérateur basque EuskotrenKargo. Une fois arrivé à la frontière française, le chargement a été transbordé sur des wagons SNCF pour continuer son trajet vers sa destination finale en Italie. En février, une composition similaire a circulé vers la même destination, mais ayant pour origine le port de Santander. Le convoi a donc été entièrement acheminé par voie métrique sur le parcours espagnole grâce au réseau des FEVE (aujourd’hui intégré à Renfe). Au mois de mars, Euskotren a transporté un train de grumes depuis Mataporquera (en Cantabrie) jusqu’à Áriz par la voie métrique FEVE. Puis le convoi a continué vers Lebario sur les voies des ateliers Euskotren de Durango où le chargement a été transbordé sur des camions à destination de la papeterie Iurreta. C’était en juin 2011 qu’Euskotren avait assuré son dernier train de marchandises avec un trafic de bobines d’acier entre le terminal de marchandises d’Áriz et le port de Bermeo. Un trafic de douze trains par mois était prévu (100 000 tonnes par an), mais seulement cinq trains avaient circulé avant la suspension du service. Renfe et Euskotren ont désormais l’intention de consolider ce type d’offre à raison d’un train hebdomadaire. Cette offre rentre dans la stratégie « Basque Country Logistics » que le Département du Développement Durable et de la Politique Territoriale du Gouvernement basque a développé, en collaboration avec Euskotren, Renfe, les ports de Bilbao, Bermeo et Pasaia. Des chambres de commerces et d’importantes plateformes logistiques font partie de ce projet, ce qui pourrait amener à très court terme de nouveaux trafics pour les opérateurs ferroviaires. ©Víctor Luri2015 Traduction C.Prieto A La locomotive 2003 (actuellement en location chez FGC) dans le port de Bermeo, avec un train de bobines d’acier en cours de chargement pendant l’été 2011 lorsque les premiers trains avaient roulé. ©V.Luri2011 En mars 2015, une UM de locomotives EuskotrenKargo 2000 à Lebario, en attente de transbordement du chargement de grumes qu’elles ont transporté depuis Mataporquera. ©V.Luri2015
  • 11. AAccttuuaalliittééss iinntteerrnnaattiioonnaalleess MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 11 CP Carga et EMEF : la privatisation est approuvée ! e Conseil des ministres portugais a approuvé, le 26 mars 2015, les décrets-lois qui vont permettre d’avancer sur le dossier de privatisation de la filiale marchandises de la compagnie nationale ferroviaire portugaise, la CP Carga, ainsi que d’EMEF (Empresa de Manutenção de Equipamento Ferroviário) qui assure l’entretien et la construction de matériels ferroviaires. Ces décrets sont en cours de promulgation par le président de la République portugais, Cavaco Silva. Une commission devrait être créée pour encadrer les conditions de la privatisation ainsi que de définir un cahier des charges du processus visant à encadrer la vente des deux entreprises publiques. Le secrétaire d’État aux transports, Sérgio Monteiro, a déclaré avoir déjà reçu des « manifestations d’intérêt, pour le moment officieuses », et reste convaincu du succès de la vente en cours. Isabel Castelo Branco, secrétaire d’État du Trésor, souligne que la privatisation de CP Carga est prévue dans le programme d’aide financière de l’Union européenne, ce qui n’est pas le cas d’EMEF que le gouvernement portugais privatise volontairement. Le motif d’une telle privatisation est de forcer les entreprises ferroviaires à être plus compétitives. Sous le joug des investissements publics de plus en plus rares à cause des coupures budgétaires portugaises, EMEF et CP Carga doivent trouver d’autres solutions de financement que seule la privatisation peut permettre. Du moins est-ce la position du gouvernement portugais. Sergio Monteiro a précisé que la totalité du capital des entreprises allait être en vente, en évoquant qu’une « tranche de 5% du capital serait réservée aux salariés des entreprises à travers une offre publique intéressante », notamment grâce à une réduction sur la valeur de référence de chaque action. La Direction générale de la concurrence de la Commission européenne a demandé des informations précises sur ce processus de privatisation en cours car, comme CP Carga est déficitaire, Bruxelles avait demandé la liquidation pure et simple de l’entreprise. L’autre privatisation à venir reste celle de la ligne de Cascais dont l’état pitoyable de l’infrastructure et du matériel a obligé à une réduction de la fréquence. Là aussi une liquidation en vue ? ©C.Prieto2015 Le terminal ferroviaire d’Elvas va être agrandi a mairie d’Elvas, ville située à la frontière espagnole près de Badajoz, et Transitex ont signé un protocole d’accord le 28 janvier 2015 prévoyant l’extension du terminal de conteneurs situé près de la gare d’Elvas. Les autorités se sont en effet engagées pour améliorer l’accès routier au terminal qui est aujourd’hui sous-capacitaire. L’opérateur Transitez est quant à lui maître d’ouvrage pour agrandir le terminal afin d’augmenter le nombre de conteneurs traités chaque année. Le terminal actuel est desservi par un train quotidien en provenance d’Entroncamento avec des conteneurs du port de Lisbonne ou bien des entreprises de la grande couronne lisboètes. À Elvas, le terminal est prisé par les transporteurs espagnols, s’affranchissant ainsi des péages des autoroutes portugaises. L L Le 29 octobre 2014, une locomotive CP4700 de la CP Carga tracte le train de conteneurs nº69180 en provenance de Leixões et à destination du Terminal XXI. Il est vu ici dans les dunes d’Espinho. ©C.Prieto2014 La CP1962 en tête d’un train complet de citernes s’apprête à quitter la gare d’Elvas le 30 décembre 2011. Au fond, le terminal de conteneurs. ©J.Cunha2011
  • 12. TTeecchhnniiqquuee 12 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee Un équipement hybride : la variante régionale Sud-Ouest des gares de voie directe type unifié SNCF Texte de Jean Thouvenin l s’agit d’une situation exceptionnelle dans l’histoire des gares de voie unique régionales en France. Elle a consisté à appliquer le modèle unifié tout en conservant ou en réutilisant des verrous verticaux provenant des voies uniques de l’ex-PO. La variante ainsi conçue avait la même signalisation que le type SNCF proprement dit, à savoir celle ci-après : Par ailleurs, la variante a utilisé deux modèles de serrure centrale. Le programme qu’ils réalisaient était le même et la consigne ci-contre de 1958 ne les distingue donc pas. Comme dans le modèle SNCF, les aiguilles d’entrée n’avaient aucun verrouillage en direction de la voie d’évitement et les commandes de désaubinage (disques et sémaphores) n’étaient pas enclenchées. La variante n’utilisait pas le TIV de rappel 40, mais seulement ceux pour 30 km/h ci-après : - D’abord le modèle sud-ouest en tôle avec un éclairage par réflexion ; - Puis le modèle unifié avec un caisson. I
  • 14. TTeecchhnniiqquuee 14 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee I – La variante avec la serrure centrale importée du type de « voie directe Saint-Nazaire – Le Croisic » de la région Ouest e type « Saint-Nazaire – Le Croisic » fonctionnait en 1942 sur la ligne Ouest (jadis PO) dont il portait le nom. Sa consigne- type figurait alors dans le recueil des Instructions Régionales de Sécurité de cette région et ne fut abrogée qu’en septembre 1958. Il était novateur quant à la signalisation et au programme, déjà conforme au schéma donné plus haut, avec la création du TIV de rappel au taux de 30 km/h manœuvré par le levier du verrou indépendant d’aiguille d’entrée (ce sera aussi la pratique unifiée). Le type « Saint-Nazaire – Le Croisic » comportait aussi une grosse serrure centrale, de conception nouvelle, organisée en régimes mais avec 3 clés spéciales d’enclenchement. Pour autant, aucun enclenchement de « nez à nez » entre signaux des deux sens n’existait sur la voie directe. Dans la période 1952-1968 pour le moins, ce modèle fut en service dans des gares situées entre Niversac et Tulle (Larche, Aubazine-Saint-Hilaire, Cornil) et entre Brive et Figeac (Turenne, Les Quatre Routes, Le Pournel). La Région Sud-Ouest semble avoir fait ces choix pour réaliser des économies. En tout cas, l’exemplaire de serrure centrale employé à Cornil s’y trouvait en 1954 assez rouillé… Configuration de la serrure centrale de cette gare selon document technique daté de mai 1967 À Aubazine et aux Quatre Routes, le verrouillage à distance et son contrôle par verrou vertical existaient aux deux aiguilles d’entrée. Dans ces deux gares, la serrure centrale possédait, à la place de son entrée V.1 de Cornil, une entrée Vv.1 dénommée « Verrou vertical du verrou indépendant du verrou de l’aig.1 ». La dénomination de certaines entrées de clés dans les installations purement unifiées est la même que ci-dessus. Exemple : les entrées dénommées S sont pour les accès aux voies de service. L
  • 15. TTeecchhnniiqquuee MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 15 II – La variante avec serrure centrale de voie directe SNCF ette serrure était du modèle applicable aux gares de voie directe SNCF quand ces dernières n’avaient aucune aiguille commandée à distance. L’image ci-contre en montre l’aspect de principe. La seule différence avec l’emploi de la serrure centrale « Saint-Nazaire – Le Croisic » était celle-là. Dans tous les cas, les équipements unifiés disponibles et mis en œuvre n’étaient que ceux de première génération et donc sans les compléments futurs : il n’y avait pas de signalisation lumineuse, pas de circuits de voie pour protéger la voie directe, pas d’empêchement à l’ouverture simultanée vers elle de tous les signaux des deux sens. À peu près à la même époque que dans le cas de l’autre modèle, l’équipement concerné fut installé entre Montluçon et Saint-Sulpice- Laurière, ainsi qu’à Marsac-sur-Tarn, sur Milhac d’Auberoche (à partir de 1955) et Thenon (depuis 1956, resté en service en août 1967). Il fut même appliqué à La Bachellerie et à Terrasson, en remplacement de l’arrêt général qui était jusqu’alors imposé dans ces deux gares. Ci-après, la gare de Treignat dans sa situation au 2 mai 1961 : C
  • 18. TTeecchhnniiqquuee 18 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee III – Comment étaient choisies les aiguilles d’entrée dotées du verrouillage à distance ? ertaines n’en étaient pas pourvues, mais au moins l’aiguille la plus éloignée du BV en était munie dans chaque gare. Ce pouvait être l’aiguille de l’une ou l’autre entrée. Des gares où ces aiguilles étaient toutes deux verrouillées à distance existaient aussi, notamment chaque fois où les deux entrées étaient à peu près équidistantes du BV. Par ces dispositions, l’on s’efforçait avant tout de limiter les déplacements du personnel, et même de les éviter au cours de l’exécution des croisements. Exemple de la situation entre Montluçon et St. Sulpice-Laurière à l’été 1954 ci-contre. En 1978, la variante n’existait plus, remplacée le cas échéant par le type unifié pur et simple de voie directe. À cette date, sur Saint-Sulpice – Montluçon, les aiguilles que l’on avait dotées du verrouillage à distance étaient désormais aussi commandées à distance (du moins celles des gares qui étaient encore en service). Les critères pour décider des commandes à distance étaient en effet les mêmes dans le type unifié, avec variante ou non. Conclusion Exception faite des vestiges en gare de La Rochefoucauld, les types régionaux Sud-Ouest de gares de voie unique ont à présent disparu. L’on ne trouve plus maintenant sur les lignes à signalisation normale concernées que des installations : - soit unifiées : premiers types SNCF, avec compléments éventuels, ou modèles plus récents codifiés chacun par 4 chiffres : V G 1011 ; VD 1021, etc. ; - soit de voie directe type ancien Ouest : équipements répandus à partir des dernières années de la Seconde Guerre mondiale sur diverses lignes de l’ensemble du réseau national : là encore des compléments éventuels sont venus par la suite s’ajouter au modèle de base qu’avait fait se répandre sa grande simplicité. Mais les types régionaux du Sud- Ouest avaient bien répondu de manière générale aux exigences de leur temps. Le temps où, sauf au Nord et au PLM, le block enclenché de voie unique était rarissime en France (il fonctionna pourtant de Meymac à Ussel une trentaine d’années depuis 1913). Le temps aussi où la commande d’aiguilles de dédoublement depuis le bâtiment des voyageurs ou ses abords n’existait guère chez nous : à peine quelques cas sur l’Est, des tentatives du PLM dont une en 1932, et une aiguille du PO en service de 1928 à la guerre à Sornac-Saint-Rémy (entre Felletin et Ussel). Tel était le contexte que la SNCF s’attacha à moderniser ensuite. L’ère du tout électrique et de l’informatique, celle des automatismes et des télécommandes y compris pour simple voie, ne saurait faire méconnaitre les conditions de travail dans les gares de jadis, ni des recherches d’alors qui menèrent aux progrès. C
  • 19. RReeppoorrttaaggee MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 19 En balade de Mignaloux à Jardres lain et Arnaud nous proposent ici une promenade dans une zone qui leur est chère et qu’ils connaissent bien. C’était l’occasion pour MIDI Express magazine de mettre en avant cette petite ligne à trafic restreint qui amenait auparavant les voyageurs dans un voyage à travers les campagnes agricoles du Poitevin. Aujourd’hui, seules quelques dessertes sporadiques de trains complets de céréales viennent rompre le silence. Retour sur les quinze dernières années de dessertes en images. Texte et photos de Alain et Arnaud Demarez ituée au beau milieu d’une région de riches terres agricoles, la gare de Poitiers conserve une activité de transport de fret assez soutenue, en particulier grâce aux nombreux silos embranchés le long de la ligne Paris – Bordeaux. Engrais à l’arrivage, céréales au départ, c’est une une bonne quinzaine d’installations terminales embranchées (I.T.E.) qui nécessitent le détachement hebdomadaire depuis Saint-Pierre-des-Corps de plusieurs UM de BB 60000 ou plus rarement de BB 69000. Un train de machines circule ainsi chaque fin de semaine ; il peut être composé d’une dizaine d’engins en fonction de la demande en dessertes. Si beaucoup de silos sont implantés le long des lignes principales vers Tours, Bordeaux, La Rochelle ou bien Limoges, certains permettent le maintien « en vie » de trois voies uniques à trafic restreint (VUTR) régionales, et qui ont par le passé connu leurs heures de gloire, ou tout au moins ont permis de désenclaver ces régions agricoles. On retrouve ainsi : - l’ancienne ligne de Poitiers à Nantes qui s’embranche à Grand Pont au Nord de Poitiers et qui dessert deux silos importants à Ayron et Chalandray, ainsi qu’une unité de production de biocarburants dans cette dernière localité ; - l’ancienne ligne de Port de Piles au Blanc qui dessert un silo à La Haye Descartes ; - l’ancienne ligne de Poitiers à Argenton sur Creuse qui s’embranche en gare de Mignaloux-Nouaillé sur la ligne de Limoges et qui dessert un silo à Jardres. C’est cette ligne qui nous intéresse ici. Un peu d’histoire Si la première ligne a connu des relations de premier ordre, notamment grâce à des trains directs Limoges – Nantes assurés en autorails Bugatti, les deux autres sont toujours restées beaucoup plus modestes et ont conservé un caractère résolument rural dans leur vocation et leurs dessertes. C’est donc à l’est de la gare de Mignaloux-Nouaillé, à 12 kilomètres de Poitiers et en direction de Limoges, que prend naissance la ligne de Jardres, référencée officiellement sous l’acronyme VUTR 743, au PK 348. Orientée vers le nord-est, la petite ligne dessert la halte de Savigny l’Evescault, puis la gare de Saint Julien-l’Ars avant d’atteindre Jardres au PK 360+7. Inaugurée le 18 juin1883, il a fallu attendre 1889 pour rejoindre Poitiers à Argenton sur Creuse, la ligne s’arrêtant à Chauvigny. Mais Jardres possède déjà son embranchement particulier ; en effet, non loin de là, à Tercé, la société des carrières du Poitou met en service une ligne à voie métrique de 4,5 km destinée à évacuer la production de ses carrières, connues sous le nom de la fameuse « pierre de Jardres ». La petite gare devient alors un important dépôt de pierres destinées à toutes les régions de France et même à l’export. Deux ponts roulants tirés par des chevaux permettent le transbordement des blocs de pierre sur les wagons du P.O. Le dépôt du Blanc assure la fourniture d’engins de traction pour la desserte de la ligne, et c’est toute la cavalerie des vieilles bouilloires du P.O. qui A S La gare de Jardres avec les transbordeurs pour charger les pierres dans les wagons. ©Coll. C.P.
  • 20. RReeppoorrttaaggee 20 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee s’époumonent sur le profil en dents de scie avec des déclivités contraires de 5 à 15 mm/m. Après le premier conflit mondial, des locomotives plus puissantes basées à Poitiers et à Argenton font leur apparition, des 140 séries 5001/5167 ou des 040 Prussiennes à tender séparé, puis des autorails Renault VH et ADN du centre du Blanc. Dès mai 1940, le service entre Poitiers et Le Blanc est suspendu ; un train de Poitiers à Jardres, puis Chauvigny est rétabli en 1941. Mais notre ligne ne se remettra pas du deuxième conflit mondial, et seule une desserte marchandises assurée par des 230 F, 140 B ou H et 141 TA des dépôts de Poitiers et Châteauroux continuera de faire vivre cette relation de Poitiers à Argenton jusqu’au milieu des années 1950. Cent ans après Dès lors des trains de desserte circulent à la demande pour quelques rares wagons isolés. Pourtant, le 18 juin 1983, Jardres célèbre « en fanfare » le centenaire de l’arrivée du chemin de fer. Et la municipalité ne fait pas dans la demie mesure puisque c’est une BB 67000 tractant trois voitures corail qui est de la fête, cas unique de circulation de ce genre de composition sur une telle ligne. Les Jardrais costumés embarquent pour Chauvigny ou ils sont accueillis par l’harmonie municipale. S’en est suivie une lente agonie allant même jusqu’au déferrement partiel entre Argenton sur Creuse et Jardres. De nos jours, seule subsiste une courte section de quelques kilomètres à l’ouest de Chauvigny où circule un vélorail. Le temps semble donc s’être arrêté sur la ligne, qui réunit plusieurs vestiges du vieux chemin de fer comme les passionnés aiment en rencontrer lors de leurs périples. ©Mairie de Jardres1983 La gare en bois de Savigny l'Evescaud encore dans son jus. ©A.Demarez2011
  • 21. RReeppoorrttaaggee MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 21 Mais le chemin de fer est toujours présent à Jardres, et c’est justement là où était implanté le chantier de transbordement des pierres de carrière que s’est construit un immense silo. Avec une trentaine de trains de céréales au départ et une dizaine de trains d’engrais à l’arrivée, la petite ligne a trouvé un second souffle, mais pour combien de temps ? De nombreux secteurs sont encore équipés de rails à doubles champignons, et récemment les passages à niveaux ont été automatisés, en particulier ceux coupant les grands axes routiers que sont Poitiers – Limoges et Poitiers – Châteauroux. Le profil en dents de scie nécessite l’UM et il faut généralement deux rotations au départ de Poitiers pour sortir un train complet sur la journée. Après les derniers tours de roues des A1A A1A 68000 du dépôt de Saint-Pierre-des-Corps, puis des BB 66000, ce sont désormais des UM de BB 60000 ou plus rarement de BB 69000 qui assurent le trafic pour le compte de Fret SNCF. Europorte fait également quelques apparitions avec des locomotives Euro 4000. La vitesse est limitée à 30 km/h et les BB 60000 acceptent 620 tonnes en US à l’aller et 640 tonnes au retour, ces charges étant doublées lorsque l’UM est utilisée. Le silo quant à lui possède son propre engin de manœuvre, un superbe Orenstein et Koppel reconditionné qui a remplacé un Moyse 36 TDE bien fatigué. Avec cette desserte particulièrement bucolique, on peut encore déguster des trains à l’ancienne, qui sifflent à tous les passages à niveaux, et qui brinqueballent quelque peu sur une voie entretenue au minimum, mais quel charme ! ©Alain Demarez 2015 Le 11 mai 2013, le locotracteur dans l’ITE de Jardres. ©A.Demarez2013 Une UM de A1A A1A 68000 part HLP chercher des trémies le 3 août 2002. ©A.Demarez2002 Une UM de A1A A1A 68000 prête au départ au silo de Jardres. On remarque la coupe de six trémies pleines. C’est le A1A A1A 68081 qui est en tête du train en ce 3 août 2002, unité aujourd’hui préservée par l’activité Matériel et en attente de réparation à Chalindrey. ©A.Demarez2002
  • 22. RReeppoorrttaaggee 22 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Discussion avec l’agent de circulation de la gare de Mignaloux Nouaillé le 31 octobre 2002. Peu après, une fois le canton ouvert, le train partira vers Poitiers. ©A.Demarez2002 Deuxième photo, deuxième époque : le 2 septembre 2003, une UM de BB 66000 entre en gare de Mignaloux Nouaillé. La ligne télégraphqiue est encore présente. ©A.Demarez2003 Même endroit le 12 août 2009, mais avec beaucoup de changements lors du RVB de la ligne Poitiers – Limoges : le plan de voies a été simplifié de manière drastique, la signalisation a été modernisée, l’armement de la voie renouvelé, avec l’apparition de la livrée FRET et du logo carmillon. ©A.Demarez2009
  • 23. RReeppoorrttaaggee MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 23 Des panaches de fumée ! La ligne de Mignaloux à Jardres ne laisse pas sans peine les UM de BB 66000. En haut, dans la rampe de la sortie sud de Poitiers, la BB 66061 tire une longue rame de trémies en juillet 2004. En bas, la BB 66255 s’essouffle sur une rampe en creux de la ligne à voie unique le 12 août 2009. ©A&A.Demarez
  • 24. NNoossttaallggiiee 24 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Du bleu d’Auvergne au beau milieu du Cantal depte des balades ferroviaires, Jérôme Pagès passa sa jeunesse et les premières années de sa carrière en Corrèze. Sensible à ce que le monde ferrovipathe appelle « le vrai chemin de fer », il profita dans cette région des rames tractées, des séries d’engins moteurs et d’autorails qui ont fait leur preuve pendant des dizaines d’années de service commercial, de la variété dans les livrées qui rompait fortement avec la monotonie que nous connaissons aujourd’hui. Place aux photos accompagnées d’un petit texte sur les traces de cette époque révolue. Texte et photos de Jérôme Pagès ntre 1996 et 1999, alors que je vivais en Corrèze et passionné du monde ferroviaire, je pouvais profiter pleinement des X2800 sur bon nombre de relations : sur la ligne de Brive à Limoges via Objat, sur la ligne de Périgueux, vers la Haute Corrèze à destination de Tulle, Ussel et Clermont-Ferrand et, vers le sud, sur les lignes au départ de Brive en direction d’Aurillac et Rodez. Ce matériel se partageait alors massivement les dessertes avec les X2200 et X2100. Toutefois, les tous jeunes X72500 en cours de livraison commençaient déjà de timides incursions sur la desserte de Brive à Rodez. Jeune étudiant, il m’arrivait ponctuellement, pour profiter du matériel et en faire quelques photos à l’occasion, d’emprunter les trains qui cheminaient sur ces parcours. C’est à un de ces voyages que je vous invite au fil de ces quelques lignes. Partant de bon matin de Brive, j’empruntais, pour débuter, le tronc commun des lignes d’Aurillac et Rodez. Cette section de ligne à une seule voie, équipée du block automatique à permissivité restreinte par circuit de voie (BAPR) permettait de gagner la gare très caractéristique de Saint-Denis-près-Martel : poste à leviers implanté à l’air libre sur le quai nº1, signaux mécaniques de toute part, aiguilles manœuvrées à la main, bref un chemin de fer « à l’ancienne ». J’ignorais alors que, quelques années plus tard, j’y serais affecté comme agent circulation. Bien sûr, à l’époque, la rotonde et la halle marchandise avaient déjà disparu, mais qu’importe, l’ambiance était quand même là. Puis, laissant sur la droite la ligne à voie unique et block manuel vers Figeac ainsi que l’ancienne ligne de Bordeaux via Souillac et Sarlat, l’autorail de 825 chevaux s’engageait alors sur la ligne à une seule voie banalisée vers Bretenoux et les gorges de la Cère. À Bretenoux, le trafic de traverses (ateliers d’imprégnation à la créosote) faisait encore tourner un grand nombre de wagons à bogies remorqués par des BB 66000. Très vite, le train s’enfonçait dans un environnement plus sauvage et plus retiré ponctué par les arrêts de Laval de Cère et Laroquebrou. À l’arrivée à Aurillac, outre les autorails déjà évoqués, on trouvait encore la rame corail pour Paris via Clermont-Ferrand, remorquée jusqu’à la capitale régionale par une BB 67400. A E L’auteur, par lui-même. ©J.Pagès Heure de pointe à Saint-Denis-près-Martel le 23 août 1999 : les autorails en provenance de Rodez, d’Aurillac et de Brive se croisent et se scindent dans un savant ballet répété quotidiennement. ©J.Pagès1999
  • 25. NNoossttaallggiiee MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 25 C’était avant la mise en place du service Téoz et le démantèlement progressif des relations directes avec la capitale grâce aux trains multi-tranches. Puis le retour s’effectuait à bord d’un train Clermont ou Aurillac – Toulouse jusqu’à Capdenac. Le passage de la retenue sur la Cère, au moyen du viaduc de Ribeyrès (long de 308 mètres), était un moment émouvant. Puis la ligne redescendait vers Figeac en desservant Bagnac et ses carrières bien actives. Arrivés à Figeac, nous récupérions, sur notre gauche, la ligne en provenance de Brive. Le site de la gare de Figeac forme un cocon ferroviaire tout particulier que j’appréciais énormément du temps des Bleus d’Auvergne ; implantée au milieu d’un triangle arboré formé par les lignes de Brive et d’Aurillac vers Capdenac, cette gare a fait rêver plus d’un modéliste ! La vue depuis le haut du tunnel (côté Capdenac) permettait de faire des photographies de compositions intéressantes. Par la suite, le parcours se poursuivait jusqu’à Capdenac, en franchissant, au lieu-dit Le Soulier (Commune de Capdenac), la bifurcation de l’ancienne ligne Cahors – Capdenac encore utilisée de temps en temps par une association touristique. Dans cette gare, il suffisait alors d’attendre la correspondance d’un autorail remontant de Rodez à Brive. Sur cette ligne, circulait encore, à cette même époque, un aller/retour corail de jour Rodez-Paris via Brive en plus du train de nuit toujours en service aujourd’hui. Suivant les heures de passage par Capdenac et Figeac, il était aisé d’immortaliser ces rames tractées, ainsi que des trains de ballast remorqués en BB 66000. Un autre moment fort de la ligne était le croisement prévu à partir de 18 h 30 chaque soir en gare de Saint-Denis près Martel. À l’époque, cette scène semblait immuable ; et pourtant… (voir photo p. 24). Ainsi, tous les soirs, s’orchestrait dans cette gare un ballet ferroviaire immuable selon le schéma suivant. Peu avant 18 h 30 arrivait de Brive sur la voie 1-2 (la troisième voie à quai depuis le BV) un ensemble composé d’un autorail d’une ou deux remorques à destination d’Aurillac, le tout jumelé avec un second ensemble autorail et remorque(s) à destination de Rodez. Pendant que l’un des deux Agents Mouvements (AMV) présent à cette heure-là s’afférait à dételer les deux compositions, le second Agent Circulation (AC) réglait les opérations de réception des autorails en provenance d’Aurillac (voie Z, la deuxième voie à quai depuis le BV) et de Rodez (voie 4, la première voie à quai contre le BV). Sitôt ces mouvements rentrés, le Brive-Aurillac repartait en direction de Bretenoux par la ligne à une seule voie équipée de BAPRS (armement par compteur d’essieux), puis l’Aurillac – Brive s’élançait à son tour dans le sens opposé, en direction de la Corrèze, par la ligne à une seule voie équipée de BAPR (détection automatique des circulations par circuit de voie) télécommandée par le PRCI de Brive. Une fois la voie libre rendue aux appareils de Block Manuel de Voie Unique miniaturisé derrière le Rodez-Brive, le Brive-Rodez pouvait à son tour être expédié sur la ligne à voie unique en direction de Rocamadour et Figeac. Et enfin, 5 minutes après le départ du Aurillac – Brive Le 13 août 1999, le X 2905 accompagné d’une remorque Xr6100 part de la gare de Saint-Denis-près-Martel sur une relation Brive – Aurillac. ©J.Pagès1999
  • 26. NNoossttaallggiiee 26 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee (temps de libération des cantons de BAPR), le Rodez – Brive prenait à son tour la direction de la sous-préfecture de la Corrèze où il donnait, comme son homologue d’Aurillac, la correspondance au dernier Corail de sens Toulouse – Paris Austerlitz (départ de Brive vers 19 heures). Ce secteur géographique jouissait d’une belle diversité de matériels sur des lignes qui me semblaient alors moins moribondes qu’aujourd’hui, même si depuis je ne suis plus leur actualité quotidiennement, ayant quitté le Limousin pour la Gironde en passant par le Nord et l’Île de France… Aurillac, le 24 août 1999. Le X2902 renforcé d’une remorque s’élance. Un autre X2800 attend un futur départ sous la marquise avec une Xr6100 à ses côtés. À droite, la rame du train de jour Aurillac – PariS est déjà prête au départ en passant par Arvant. ©J.Pagès1999 Le 21 août 1999, le X2890 dessert la petite gare typique PO de Bagnac avec un Ter Aurillac – Capdenac. ©J.Pagès1999
  • 27. NNoossttaallggiiee MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 25 Ci-dessous, une photo illustrant l’activité qui régnait en gare de Capdenac il y a 15 à peine. À la sortie nord juste avant le tunnel, une UM de BB 6600 accompagne des trémies de ballast des carrière de Bagnac jusqu’à Toulouse le 19 juillet 2000 ; sur la gauche, le Corail Rodez – Paris attend que le signal passe à voie libre pour s’élancer vers Paris. ©J.Pagès2000 Nous voici en gare de Capdenac le 21 août 1999. La BB 67562 encore équipée de ses enjoliveurs démarre avec le Corail en provenance de Paris Austerlitz et à destination de Rodez. ©J.Pagès1999 27
  • 28. NNoossttaallggiiee 28 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Ci-dessous, vue plongeante sur le triangle de la gare de Figeac. Un X2100 couplé à deux remorques démarre « énergiquement » de la gare avec un Ter en provenance d’Aurillac et à destination de Toulouse toujours le 19 juillet 2000. ©J.Pagès2000 Photo collector à Figeac pour l’ambiance fin des années 1990, début 2000 : nous sommes le 19 juillet 2000, et la BB 67416 s’immobilise avec le Corail de Paris Austerlitz vers Rodez. ©J.Pagès2000
  • 29. NNoossttaallggiiee MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 29 Ci-dessous, Rocamadour avec un X72500 encore immaculé. Après avoir desservi l’une des dernières gares champêtres en provenance de Rodez, celui-ci s’élance vers Brive-la-Gaillarde le 21 août 2000. ©J.Pagès2000 Une vue champêtre à Betaille avec cette composition panachée d’un X2100, X2800 et d’une remorque Xr6100 pour un Ter Aurillac – Brive-la-Gaillarde le 19 juillet 2000. ©J.Pagès2000
  • 30. IImmaaggeess dd’’hhiissttooiirree 30 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Des Z 7100 en Ariège vec la sortie récente à l’échelle HO des automotrices Z 7100, nous en profitons pour faire un petit retour sur un service de courte durée des Z 7100 sur la ligne de l’Ariège entre Toulouse et Foix. Images d’histoire à l’appui, remémorons-nous cette époque rouge et crème version électrique. Texte et photos de Jean-Louis Tosque Bref historique de la ligne de l’Ariège Au départ de Toulouse, la ligne a un tronc commun de 12 km avec l’artère Toulouse - Bayonne en voie double jusqu'à Portet-Saint- Simon, où elle commence à remonter l'Ariège en voie unique électrifiée. Nous pouvons partager cette ligne de 170 km en quatre parties : - Toulouse – Foix (82 km) : zone vallonnée mais peu pentue. C'est la basse vallée de l'Ariège où la déclivité ne dépasse pas 7 mm ; - Foix – Ax-les-Thermes (41 km) où la vallée est plus encaissée et la présence de la montagne nettement plus visible. Les déclivités atteignent 20-25 mm sur de longues distances ; - Ax-les-Thermes – Tunnel du Puymorens. C'est le parcours le plus pittoresque et le plus montagnard. Nous sommes en haute montagne. Nous passons de 701 m d'altitude à 1562 m (sortie sud du tunnel) en 27 km avec des déclivités atteignent 40 mm sur presque tout le parcours avec 10 tunnels dont le tunnel hélicoïdal de Saillens (1,850 km) et le tunnel du Puymorens, long de 5,4 km ; - Tunnel du Puymorens – Latour-de-Carol – Puigcerda. Cette partie descend le long du Carol avec une déclivité de 40 mm jusqu'à Enveigt (13 km) et plus plat pour les 7 km restant jusqu'à Puigcerda. A Le 7830 avec deux Xr ABD s'approche de Foix. ©J.-L.Tosque
  • 31. IImmaaggeess dd’’hhiissttooiirree MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 31 Le courant de traction est fourni par les sous-stations d'Empalot (Toulouse), Cintegabelle, Pamiers, Vermajoul (Foix), Ussat, Ax, L'Hospitalet, La Tour-de-Carol. La ligne à écartement français (UIC) va jusqu'à Puigcerda tandis que la ligne à écartement espagnol vient jusqu'à La Tour-de- Carol.. La section La Tour-de-Carol - Puigcerda est donc à 2 voies avec 2 écartements. En 1950, il était prévu que l'Espagne adopte un écartement normal jusqu'à Barcelone malgré les difficultés rencontrées à l'arrivée en gare terminale. Le service des Z 7100 Cette ligne remarquable à bien des égards voyait circuler un matériel de traction traditionnellement Sud-Ouest. Une exception toutefois pendant une quinzaine d'années. Le service du train 7825/7830 a été assuré pendant cette période par une automotrice Z 7100 avignonnaise avec cependant une particularité rare, sinon à ma connaissance « unique en voie unique », mais appliquée en double voie sur Toulouse – Brive A/R. Le sillon de ce train avait vu circuler pendant un temps les Z 4700 ex-PO et à leur amortissement pendant le service d'hiver une rame tracté en X 2800, jusqu'en 1968 où la Z 7100 a repris ce service jusqu'à la relève par les Z 7300. La Z 7100 utilisée sur la ligne de l'Ariège était reprise sur une rame à quatre caisses qui effectuait une relation Avignon – Toulouse A/R. Lors de la coupure à Toulouse les remorques Zr (entre deux et quatre) étaient remisées à Raynal et une des deux automotrices était accouplée à une ou deux Xr de la série Xr ABD 6001 à 14, 7201 à 20, 7301 à 7581, 7801 à 8018, 8101 8293 de la gérance toulousaine. C'est la masse, de 15,5t à 19,5t, de ces remorques qui avait dicté le choix de les accoupler à la Z 7100 compte tenu des données techniques de la ligne. Petit rappel technique sur cette série de 33 automotrices Vitesse limite de 130 km/h (avec ZR 17100/200), elles étaient dotées de 2 moteurs d'une puissance de 470 kW chacun, donnant une puissance de 1250ch pour la 7100 ; pour rappel, 825ch pour le diesel MGO du X2800. Le bogie moteur était situé coté « voyageurs », et non sous le compartiment appareillage, certainement pour des raisons de répartition des masses et autres raisons techniques. La Z 7100 du 7825 longe l'Ariège après avoir marqué l'arrêt en gare de Foix et va attaquer la première difficulté : la rampe vers Saint-Paul-Saint-Antoine avec un profil s'échelonnant entre 12 et 25 pour mille. ©J.-L.Tosque La Z 7100 du 7830 vient de marquer l'arrêt en gare de Saint-Paul-Saint-Antoine et va entamer sa descente vers Foix, son prochain arrêt. ©J.-L.Tosque
  • 32. ÉÉttrraannggeerr 32 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Nouveaux OFP en Espagne Depuis l’arrivée sur la scène ferroviaire de Acciona Rail Services et de Tracción Rail, puis de Transitia, ces opérateurs ont révolutionné le marché des nouveaux trafics, en partenariat avec les autres opérateurs déjà implantés depuis quelques années comme Logitren et Continental Rail. Petit tour dans la meseta espagnole riche en couleurs ! Texte de Camille Prieto – Photos de Javier López Continental Rail Continental Rail S.A. est un opérateur appartement au groupe Grupo Vías (ACS), détenu à 100% par Vías y Construcciónes S.A. C’est un opérateur déjà ancien, constitué le 17 mai 2000. Il détient également une licence pour assurer des trafics de marchandises. Continental Rail s’est très tôt allié à Renfe Operadora pour constituer la société Constru-Rail. Cette société s’occupe des trains de travaux pour la construction des lignes à grande vitesse espagnoles, puis s’est également spécialisé dans les rames de travaux pour le réseau classique à écartement ibérique. Incontournable sur la scène des travaux ferroviaires, l’entreprise se déploie autour de trois branches : - Le transport commercial ferroviaire de marchandises ; - Le transport de matériaux de construction et d’entretien des LGV (Barcelone – Figueras, Cordoue – Malaga, Madrid – Alicante) ; - La gestion et l’exploitation de terminaux de marchandises, ainsi que de réseaux portuaires (Gijón). En France, cet opérateur a été rendu célèbre pour venir jusqu’au pied des Pyrénées avec le trafic de céréales entre Martorell et Canfranc, puis en 2012 avec un trafic de bioéthanol entre Puertollano et Babilafuente. La livrée des locomotives n’y est pas étrangère, puisque les couleurs rappellent la livrée « taxi » des années 1990 appliquée sur le matériel Renfe. Continental Rail possède un parc de locomotives assez important, avec 26 locomotives à écartement UIC louées à EWS (14 Class 37 et 12 Class 58), et deux locomotives à écartement ibérique (les 333.380 et 333.381). En 2007, l’entreprise a commandé à Vossloh 4 locomotives du type 335 qu’elle possède aujourd’hui et qui sont les 335.016, 335.018, 335.029 et 335.030. La 319.321 avec un train de citernes de carburant bioéthanol passe à Minateda le 13 juillet 2012 en provenance de Madrid- Vicálvaro et à destination d’Escombras. ©JavierLópez2012
  • 33. ÉÉttrraannggeerr MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 33 Ci-dessus, à Vilches, la 335.030 accompagne un TECO Bilbao-Mercancías – Sevilla-La Negrilla le 19 juillet 2014. ©JavierLópez2014 Ci-dessous, la 333.380 passe à Villasequilla le 26 juillet 2007 avec un TECO Valence-FSL – Puerto Seco de Coslada. ©JavierLópez2007
  • 34. ÉÉttrraannggeerr 34 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Tracción Rail Tracción Rail est un opérateur ferroviaire appartenant au groupe Azvi, groupe de travaux publics et de logistique qui s’est récemment diversifié dans le transport ferroviaire. Le 24 juillet 2006, la société a obtenu sa Licence d’entreprise ferroviaire pour devenir opérateur de transport ferroviaire de marchandises de niveau 1, ce qui permet le transport de denrées périssables et de marchandises dangereuses. C’est en 2008 que Tracción Rail a commencé son activité d’OFP par des trafics hebdomadaires d’huile de palme et de bioéthanol pour l’entreprise Bioenergética Extremeña entre Huelva et Valdetorres (Badajoz). À partir de 2012, l’entreprise a dû abandonner ces trafics pour cause de difficultés financières. En juin 2014, l’opérateur est revenu sur la scène en assurant des relations de transport combiné (TECO) entre Madrid et Valence, Valence et Bilbao. Et tout récemment, Tracción Rail a remporté un trafic de conteneurs entre Abroñigal et Séville. Afin d’assurer ses trains, l’opérateur dispose de deux locomotives Vossloh de la série 333.3 (333.384 et 333.385), ainsi que d’une série plus ancienne 319.3 (319.324 et 319.335). L’entreprise Tracción Rail fait partie de l’Association des Entreprises Ferroviaires Privées (AEFP). Le 16 juillet 2012, une double traction composée des 319.335 et 319.324 tracte ce train d’huile Huelva-Cargas – Puertollano- Refinería aux abords de Puertollano. ©JavierLópez2012 Encore une double traction avec les 333.384 et 333.385 avec un TECO Bilbao-Mercancías – Valencia-FSL le 5 juillet 2014. ©JavierLópez2014
  • 35. ÉÉttrraannggeerr MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 35 Acciona Rail Services Acciona Rail Services a été le premier opérateur à mettre fin au monopole de la Renfe le 29 janvier 2007 pour le transport de marchandises. À cette époque, l’opérateur privé assurait un trafic entre la gare d’Aboño (Puerto de El Musel) à destination de l’embranchement de la centrale thermique de La Robla, grâce à deux locomotives en UM et 15 wagons trémies de charbon. Mais rapidement, cet opérateur a disparu de la circulation dès 2010 pour se concentrer sur les trains de travaux, notamment lors du RVB Torralba – Soria. Acciona Rail Services est une fililale du groupe Acciona (né lui-même de la fusion en 1997 des groupes Entrecanales y Tavora, et de Cubiertas y MZOV, groupe spécialisé dans la construction, les services et l’énergie). Le 14 août 2014, un article d’El País annonçait l’achat par Acciona Rail Service de matériel roulant pour 12 millions d’euros, pour finalement avoir six locomotives en panne et une partie du personnel transféré dans des filiales du groupe. En pleine action juridique contre Renfe pour concurrence déloyale, c’était le début de la débâcle pour l’opérateur. Finalement, un seul train d’Acciona Rail Services roule depuis juin 2014 pour un trafic de conteneurs entre Abroñigal et Séville pour le compte du groupe Acciona Logística. L’entreprise possède des locomotives Vossloh du type 333.3 et 32 wagons trémies. Logitren Ferroviaria Logitren Ferroviaria S.A. appartient au groupe valencien Torrescamara y Vías. C’est en 2007 que le groupe a demandé au ministère des Transports espagnol une licence OFP qu’il a obtenue un an plus tard. À la fin de l’année 2008, l’opérateur public de transport voyageurs de la communauté autonome de Valence FGV achète 33% des parts de Logitren Ferroviaria, ce qui est en fait un opérateur de fret semi-public. Originaire de Valence, il était naturel d’obtenir les nouvelles locomotives CC diesel-électriques Vossloh du type 335 dont les usines de fabrication se trouvent dans cette ville. Grâce à ces locomotives, l’opérateur a commencé à assurer des trafics autour du port de Valence, puis en juillet 2010, un service régulier entre Valence et Saragosse. En 2011, l’opérateur décrocha des marchés pour des trafics de conteneurs entre Bilbao, Madrid, et Valence. Au début de l’année 2015, Logitren Ferroviaria s’est recentré sur un trafic catalan de conteneurs entre Granollers et San Roque-La Línea. L’opérateur possède trois locomotives : les 335.025, 335.027 et 335.028. La 333.382 d’Acciona Rail, sur un TECO (train de conteneurs) Madrid-Abroñigal – La Salud, passe ici à Castillejo au petit matin le 14 juillet 2014. ©JavierLópez2014
  • 36. ÉÉttrraannggeerr 36 MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee Transitia Transitia est l’opérateur le plus récent. Créé en 2012 en tant que filiale de Transitia S.L. spécialisée dans le transport de marchandises dans le nord de l’Espagne, cette entreprise a fait ses débuts par un trafic entre Puerto Seco de Azuqueca et le port de Bilbao. Concentrée au Pays Basque grâce à ses terminaux logistiques et intermodaux, l’opérateur n’a pas tardé à se déployer plus au sud vers le Levante (Silla) avec un trafic de conteneurs vers Séville. L’opérateur a loué à Alpha Trains une lomocotive 335.014 qui a conservé les couleurs vert et blanc de son propriétaire. Un TECO Bilbao – Séville avec la 335.014-7 avec le logo TransitiaRail, aux alentours de Peñaflor le 10 janvier 2015. ©AdriánValencia2015 Entre Miranda de Ebro et Burgos, sur la ligne impériale, la 335.028 tracte un TECO Madrid-Abroñigal – Bilbao- Mercancías. Elle traverse les champs fertiles de Castil de Peones le 19 juillet 2013. ©JavierLópez2013
  • 37. PPaarrtteennaarriiaatt MMMIIIDDDIII EEExxxppprrreeessssss mmmaaagggaaazzziiinnneee 37 TREN Online Spécial (Espagne) Un numéro spécial sur les trains de marchandises des années 1980 en Espagne, disponible sur commande en version papier, et en lecture gratuite sur www.trenmania.com TrainSpotter 56 (Portugal) Un numéro qui rend hommage au Foguete, le premier train rapide diesel portugais qui reliait Lisbonne à Porto. TrainSpotter est une revue gratuite et en ligne sur http://www.portugalferroviario.net
  • 38. PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss 38 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42 VVoollttee--ffaaccee ssuurr llee TTGGVV ?? e 23 octobre 2014, la Cour des Comptes a publié un rapport nommé La Grande vitesse ferroviaire : un modèle porté au-delà de sa pertinence. De prime abord, et par son titre, il est possible de déceler une dualité de la grande vitesse française : à la fois une performance hors pair, mais également un concept qui se cherche peut-être encore, ou bien qui, à force d’être pris comme modèle, est transposé indéfiniment à tout type de transport pour relier les villes françaises. De modèle, il deviendrait alors à un anti-modèle qui porterait préjudice à lui-même. Article au regard critique à propos de l’évolution du produit TGV. Texte de Camille Prieto eaucoup ont dénoncé une certaine vision libérale du rapport en accord avec la période de contrainte budgétaire qui pèse sur les collectivités, et le contextualise dans une introduction à un des volets de la loi Macron qui a été présenté à l’Assemblée nationale, à savoir celui de la libéralisation des transports par autocars. C’est ce point de vue que nous nous proposons d’analyser dans cette synthèse, en nous appuyant sur un raisonnement d’économie des transports. Alors il devient intéressant, en gardant en parallèle le rapport de la Cour des Comptes, de proposer une vision critique et fondée sur un argumentaire pour tenter de voir si le modèle du « tout-TGV » est une erreur, ou du moins contrebalancer cette appréciation. Le TGV est-il substantiellement un modèle dépassé ou au contraire peut-il continuer d’être en s’adaptant à un nouvel environnement ? Car si le modèle du TGV est actuellement vu comme une forme de transport dépassée ou qui ne correspond plus à la réalité économique actuelle, il n’en demeure pas moins que la soutenabilité économique de son exploitation doit être révisée afin de survivre et répondre aux réelles attentes de la demande. I – Le TGV, un modèle à bout de souffle nauguré en 1981, le premier TGV a circulé entre Paris et Lyon. Aujourd’hui, ce sont 2036 kilomètres de LGV qui traversent le territoire national. Cette partie met en avant certains points soulignés par le rapport de la Cour des Comptes, en tentant de fournir des raisons économiques qui expliqueraient pourquoi cette activité ferroviaire est aujourd’hui en déclin, ainsi que d’identifier les facteurs convergents motivant une rentabilité faible et la remise en cause du mythe de l’infrastructure de transport génératrice de croissance économique. A – Une activité commerciale qui a évincé le service public e service public est une « activité d’intérêt général prise en charge par une personne publique ou par une personne privée mais sous le contrôle d’une personne publique » Le service public ferroviaire est en conséquence une activité à caractère économique relevant de la mise en place d’un service à la personne, accessible, afin d’assurer d’un transport d’une origine vers une destination. Il est alors commun de confondre les différentes activités ferroviaires de la SNCF avec le service public, ce que ne fait pas par contre le rapport de la Cour des Comptes, qui se fixe uniquement sur le cas du TGV qui est une activité commerciale de la SNCF. L’État, actionnaire de la SNCF, exerce un contrôle L B I L Contre-jour sur un TGV Toulouse – Lyon à Lézignan en novembre 2009. ©B.Weyland2009 Le saut de mouton de Lieusaint avec la rame 09 PSE sur un TGV Paris - Marseille le 24 septembre 1983. ©M.Falcou1983 38
  • 39. PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 3943 sur les prix pour deux activités de transport ferroviaire : le TER, organisé par les régions, et les Trains d’Équilibre du Territoire, qui font intégralement partie d’une mission d’aménagement du territoire. Le problème est que le TGV est une activité entièrement commerciale dans laquelle la SNCF est libre d’adopter la stratégie qui correspond le mieux à ses intérêts, notamment au niveau de la tarification et des dessertes. Aussi la tarification adopte-t-elle une différence. Les trains du service public sont tarifiés au coût marginal, ce qui implique un déficit chronique pour ce type de trains qui équivaut au coût fixe ; c’est pourquoi les collectivités subventionnent ce type de transport afin d’assurer la pérennité du service public. Mais ce type d’activité n’est pas financièrement rentable pour la SNCF. En effet, elle possède une plus grande marge de manœuvre pour la tarification TGV grâces à la mise en place de deux types de tarifs. Le premier est le tarif binôme qui correspond à une part fixe (le coût marginal) à laquelle on rajoute une part variable selon la politique commerciale, le kilométrage de la distance choisie, ou encore la ligne choisie ; le second tarif est le yield management sur le modèle de l’aviation, système de surréservation permettant de faire varier le prix selon le taux d’occupation du train. Ainsi, si la SNCF est garante d’assurer un prix fixe sur des trains dits « classiques » de service public, elle est libre de mettre en place la tarification commerciale de son choix sur le TGV, et être maître du bénéfice qu’elle en retire. B – Une rentabilité faible mais génératrice de dettes i la SNCF est libre d’appliquer sa tarification commerciale pour le TGV, comment expliquer que le TGV ne soit pas rentable, ou du moins pas suffisamment rentable ? Les titres des principaux journaux ont en effet oublié une dimension importante du secteur ferroviaire lorsqu’ils ont souligné le « sous-investissement massif dans l’infrastructure » lors de la sortie du rapport. Et le coupable, ce serait le TGV. Tout d’abord, il faut rappeler le système de compensation du TGV pour les trains classiques : une partie du prix du billet du TGV, activité qui générait le plus de bénéfice, servait au financement des trains déficitaires ou conventionnés avec les régions. Ensuite, le secteur ferroviaire pâtit du problème des coûts fixes très élevés avec des rendements d’échelles croissants potentiels. Il faut alors pouvoir faire circuler beaucoup de trains pour amortir ce coût fixe. Mais plus il y aura de train, plus le coût marginal augmentera tandis que le coût moyen baissera ; en effet, le coût marginal doit tenir compte du coût du travail du personnel, des coûts administratifs et de commercialisation qui sont totalement indépendants du nombre de trains. Ainsi, dénoncer le nombre assez faible de TGV sur certaines relations à la demande forte n’est pas suffisant pour expliquer le manque de rentabilité : il faut préciser cette croissance exponentielle du coût marginal inhérente à la mise en place de trains supplémentaires. De plus, plus il y aura de trains, plus le réseau sera saturé, ce qui rajoute un coût de congestion, c'est-à-dire avoir une LGV qui ne peut pas répondre à la demande sans baisser la qualité du service offert. Avec 13 trains par heure et par sens sur Paris – Lyon, ligne la plus rentable, une augmentation du nombre d’A/R pourrait servir au reversement d’une part du bénéfice pour augmenter la rentabilité des LGV les plus médiocres. Ce coût de congestion limite de suite cette idée, et il n’est pas pris en compte comme raison à la différence entre rentabilité a priori et a posteriori ni dans le rapport de la Cour des Comptes, ni dans la presse économique. Dire que la rentabilité des LGV diminue dans S 39 Le TGV 8573 Hendaye – Paris Montparnasse près d’Ychoux le 10 février 2015. ©T.Arpin2015 Le 13 Avril 2014, tout près de la petite gare de Port la Nouvelle, une UM de TGV Duplex, la rame Dasye 744 et Duplex 277, assure une relation Paris Gare de Lyon – Perpignan. ©G.Postek2014
  • 40. PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss 4 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42 le temps est simplificateur quand on ne tient pas compte du coût de congestion, et des efforts mis en œuvre pour augmenter la capacité des lignes (signalisation TVM430 + ERTMS) et du matériel ferroviaire (Duplex 2N2). Face à cette rentabilité dénoncée comme faible, il devient alors peu pertinent de continuer à construire des LGV sur le territoire, ou alors en trouvant des procédés permettant de ne plus assumer le coût par la seule puissance publique. Il est dommage que cet aspect ne soit pas discuté dans la critique. Dans une première démarche, la constitution de RFF en 1997 a permis de dégager une dette moins importante car « diluée » entre plusieurs entités. Mais si cette dette a augmenté, c’est qu’elle repose entièrement sur RFF qui, en 17 ans d’existence, a assumé seul la construction de presqu’autant de LGV que sur la période 1981 – 1997 où l’effort était supporté par l’État. C’est pourquoi les nouvelles lignes actuelles proposent une nouvelle forme de construction en concession ou Partenariat Public Privé (PPP). La concession permet à un constructeur privé de réaliser l’investissement pendant une certaine durée fixée par un contrat comme c’est le cas pour la LGV Tours – Bordeaux, tandis que le PPP pour la LGV Bretagne amoindrit le recours aux budgets publics pour la construction de la ligne et transfère le risque de faible fréquentation au constructeur privé. Aussi c’est un moyen de continuer à avoir un réseau de LGV performant tout en diminuant le coût pour la puissance publique et de diminuer la dette sans avoir recours à l’emprunt pour construire une infrastructure, ou bien la SNCF qui ne serait chargée que de payer un droit de passage sur l’infrastructure, sans pour autant baisser son coût marginal. C – La remise en cause d’un grand projet face à un mythe tout aussi grand a France et la puissance publique pâtissent d’une religion des mégaprojets faisant intégralement partie du « modèle libéral- croissanciste ». La commission européenne a promu depuis les années 1990 le développement des infrastructures de transport, avec l’idée que leur « insuffisance » était une barrière à la libre circulation des produits au sein de la CEE et, par conséquent, entravait la croissance économique de l’Europe, la « compétitivité », et l’« attractivité des territoires ». Pour résumer, la construction d’une infrastructure de transport est vue comme un plan de relance économique, et engendrera de la croissance économique sur les territoires traversés. Le TGV, avec le succès du Paris – Lyon et le rapprochement économique que connurent les deux métropoles, s’est donc imposé comme le moyen de transport à développer après les autoroutes pour réduire les distances et le temps. Ainsi, les échanges économiques entre les métropoles seront favorisés, et participeront à la création de véritables pôles de concentration ou de spécialisation économique. En se spécialisant, un territoire va concentrer autour de lui certains avantages : celui de la proximité entre les acteurs du tissu productif en augmentant ainsi la compétitivité ; des avantages naturels (une ressource présente comme les parfums à Grasse) ; des avantages d’externalités de localisation des entreprises (échange de savoir-faire et de conception des produits). De plus, la construction d’une LGV peut répondre à des coûts de congestion, donc développer un trafic dédié en augmentant sa capacité. La hausse des trafics, de la rapidité et des échanges attendus permet, toutes choses égales par ailleurs, de favoriser la croissance économique. Cette seule motivation économique est le seul critère souligné par la Cour des Comptes pour dire que le modèle du TGV est en faillite ou sur le point de l’être, car l’apposition d’une LGV sur un territoire vierge n’a pas suffi à créer une région dynamique en termes d’emplois et d’activité économique. Le problème est que le TGV ne sert pas uniquement à développer des territoires et à favoriser des échanges économiques. Le TGV n’est pas entièrement un train à la clientèle d’affaires, et c’est la Cour des Comptes elle-même qui le dit : « les deux tiers des voyages sont personnels, et un tiers est professionnel », ce qui veut dire que le TGV sert aussi à la clientèle L 40 Cette UM de TGV SE composée des rames PSE 27 et 59 vient de franchir le Viaduc des Angles, sur le Rhône et le train s'élance pour rejoindre Metz. En toile de fond l'agglomération Avignonaise, le 29 décembre 2013. ©R.Lapeyre2013 Un TGV Ouigo avec la rame 760 passe ici à Bellechaume sur une relation Montpellier – Marne-la-Vallée le 1er avril 2014. ©J.-P. Salmon-Legagneur2014
  • 41. PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee 5943 touristique. Ceci pour dire que la formation de pôles de compétitivité (clusters) ou de spécialisation économique à mettre en place avec l’arrivée du TGV pourrait être une hérésie, et augmenter le risque économique des projets autour de la LGV. Le quartier Euratlantique de Bordeaux, développé sur le modèle de Lille Europe, et censé devenir un pôle compétitif du secteur tertiaire au carrefour du sud-ouest européen. Mais selon un récent rapport de l’Insee qui analyse les tissus productifs locaux pour connaître la vulnérabilité économique des territoires, la création de ces pôles économiques exposent encore plus les régions à des chocs économiques, et donc à terme à pénaliser la mobilité pour les voyages personnels qui pourraient emprunter le TGV. Cette chute probable de la demande, faute de moyens pour pouvoir payer le TGV, augmenterait la différence déjà aperçue entre trafic estimé et trafic réel, puis rentabilité de la LGV a priori et a posteriori. II – Une soutenabilité économique qui doit se réinventer ous l’avons dit, le modèle économique du TGV serait à bout de souffle, car la prise de part de marché sur d’autres modes de transports ne suffit plus à pallier les handicaps inhérents aux LGV sur l’aménagement du territoire, et même une libéralisation annoncée des transports par autocar ne suffira pas entièrement à régler les problèmes en rationalisant les relations assurées par TGV. A – Le gain relatif des parts de marché du TGV ‘idée que le TGV a permis de gagner des parts de marché conséquente en termes de parts modales est aujourd’hui à relativiser. Au début de la création du TGV, le marché était totalement pertinent sur Paris – Lyon. Le marché pertinent, ou marché de référence, est défini comme le lieu où se rencontrent l'offre et la demande de produits et de services qui sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux. Le consommateur pouvait ainsi bénéficier d’une parfaite substituabilité des différents modes de transport entre l’avion, la voiture, et le train. Le TGV a alors permis de faire une très grande économie de temps par rapport aux autres modes de transport en proposant un départ et une arrivée en centre-ville, de telle sorte que les parts de marché atteignaient presque un maximum. D’un marché pertinent, le TGV est devenu le seul mode de transport sur les relations qui s’ouvraient peu à peu en France, en se transformant en un marché où il y a un manque de pertinence. L’activité TGV s’assurait naturellement un monopole sur des relations où la valeur temps prenait de la valeur : chaque déplacement de l’usager prenait alors une valeur en réduisant les temps de parcours et en permettant de passer plus de temps sur le lieu de travail, mais aussi de pouvoir rentabiliser le temps passé dans le transport à travailler. Même si elle est variable selon les individus, cette valeur temps a augmenté et a joué en faveur du gain de parts de marchés du TGV. Cependant, le TGV était à l’origine réservé à des trains sur ligne dédiée LGV, mais afin de pouvoir proposer des relations plus longues et sans rupture de charge, les relations se sont ouvertes à des destinations que l’on ne peut atteindre que par voie classique. Si cette nouveauté a pu permettre des gains de temps, la zone de pertinence de ce mode a été radicalement changée. Et nous soulignons ce propos en reprenant les termes de la Cour des Comptes : « Les TGV passent en moyenne 40% de leur temps sur ligne classique ». La zone de pertinence prend en compte le coût généralisé pour un individu sur un trajet, c'est-à-dire le coût monétaire du trajet, et le coût en termes de temps généralisé (durée du trajet, temps d’attente, confort et accessibilité du train, etc.). Le problème est que si des TGV sont mis sur des relations où la zone de pertinence n’est plus à l’avantage du TGV, le taux de remplissage diminuera car l’usager va préférer le mode qui a le coût généralisé le plus faible : faire un Paris – N L 41 Un TGV Duplex Bourg Saint-Maurice – Paris Gare de Lyon passe dans la courbe de Saint-Jean de la Porte un samedi de février 2004. ©D.Deray2004 Au PN 215 de Villefranche de Lauragais, en direction de Toulouse, un Duplex le 11 octobre 2014. ©G.Martinat2014
  • 42. PPoolliittiiqquuee ddeess ttrraannssppoorrttss 6 MMIIDDII EExxpprreessss mmaaggaazziinnee42 Tarbes est peut-être plus coûteux en train qu’en avion, ce qui encourage à avoir des trains vides en fins de trajet. Si le coût généralisé augmente, par la théorie des choix discrets, l’usager n’hésitera pas à déterminer son action en faisant appel à un mode de transport autre que le TGV, et répètera son action dans des conditions identiques. Ainsi, les parts de marché en faveur du TGV gagnées sur une portion du trajet son perdues dès lors que la zone de pertinence n’est plus attractive ; le gain de parts de marché devient relatif. B – La soumission au double enjeu d’aménagement du territoire et d’irrigation du territoire e réseau ferroviaire a un but d’aménagement du territoire, mais pâtit d’une révolution de penser la mobilité du fait que le TGV est un modèle des années 1970 qui jouait sur la complémentarité voiture-train pour se rendre en gare et prendre le train. Si beaucoup ne connaissent pas l’origine de la complémentarité réseau classique – réseau TGV, issue du schéma directeur des transports de 1992, il est néanmoins intéressant de s’intéresser à l’effet tunnel provoqué par une LGV. La création d’une LGV pourrait pénaliser des régions en situation intermédiaire, c'est-à-dire qui sont simplement traversées par la ligne, ou bien qui ne bénéficie pas des contreparties économiques d’une telle infrastructure (activité économique, localisation d’entreprises, hausse de l’emploi). Cet effet tunnel avait été en partie comblé par la création de gares TGV en rase campagne comme la gare TGV Haute-Picardie, ou bien Mâcon-TGV, ou encore Vendôme TGV. L’isolation de ces gares avec le reste du réseau de transport est flagrante, et coupe toute synergie avec une correspondance avec un train classique, car inexistant. Le réseau routier créé pour desservir la gare n’est pas suffisamment incitatif, ce qui expliquerait la désertion et la faible fréquentation de ces gares intermédiaires dans lesquels les TGV s’arrêtent et ne prennent pas d’usagers. La recette commerciale pour le TGV est moindre car c’est autant de clients en moins, mais c’est surtout un péage au gestionnaire d’infrastructure plus important du fait du temps d’arrêt et du besoin d’un sillon plus important. De façon plus générale, le modèle TGV a minoré ces dessertes intermédiaires en n’en tenant presque pas compte dans les prévisions de trafic, préférant privilégier les estimations d’origine à destination de la LGV. Or ces dessertes peuvent apporter un surcroît de trafic, et c’est pourquoi une révolution dans la façon de penser la LGV a été engagée pour la construction des LGV Tours – Bordeaux et Bretagne, ce dont ne parle absolument pas la Cour des Comptes. Auparavant, ces arrêts intermédiaires ne bénéficiaient que d'une desserte limitée et se situaient de surcroît hors des agglomérations, éloignant les voyageurs. Aujourd’hui, ces deux LGV sont les premières sans aucune création de nouvelle gare, en privilégiant l’embranchement direct sur le réseau classique dans les gares du XIXe siècle, en correspondance avec les trains régionaux. Cette perspective de hausse de la fréquentation pourrait estomper l’effet tunnel du TGV dans les régions traversées, et surtout confirmer les perspectives de prévisions du trafic a priori que la Cour des Comptes a souligné comme fausses. C – Une libéralisation qui ne mènerait qu’à une rationalisation partielle du TGV n article de Martine Orange paru dans Mediapart achevait son analyse par une franche prise de position de l’auteur qui interprète le rapport de la Cour des Comptes comme une préparation « psychologique » justifiant la mise en œuvre de la loi Macron et la libéralisation du transport de voyageurs par autocar. Il ne nous revient pas de justifier ou non cette position, mais au contraire de chercher les conséquences économiques d’une telle libéralisation. L U Le 27 octobre 2013, à Pompignan (Tarn-et-Garonne), le long du canal des deux mers, la rame TGV 374 avec le train 8514 Toulouse – Paris Montparnasse. ©G.Turpin2013 Le 26 février 2015, le TGV 4502 est vu ici à Vercelli en Italie, et s’approche peu à peu des Alpes, sur une relation Milan Porta Garibaldi – Paris Gare de Lyon. ©F.Tecco2015