Revue " Le Bulletin des Jeunes Médecins Généraliste n°12" juin 2015
Les méno-métrorragies sont une cause fréquente de consultation en médecine générale. Leur prévalence est estimée entre 11 et 13 % dans la population générale. Elle augmente avec l’âge pour atteindre 24 % chez les 36-40 ans.
Définitions
Règles normales : Durée de 3 à 6 jours, < 80mL au cours du cycle.
Ménorragies : règles de plus de 7 jours avec une perte sanguine supérieure à 80 ml.
Métrorragies : saignement génital survenant en dehors des règles.
Interrogatoire
Age des premières règles
Age de la puberté
Age de la ménopause
Régularité des cycles
Volume des saignements
Contraception
Prise médicamenteuse
Tabagisme
Antécédent de maladie thromboembolique
Antécédent de maladie de Willebrand (Chez les femmes présentant des ménorragies, la prévalence de la maladie de Willebrand est augmentée par rapport à celle de la population générale).
L’interrogatoire doit également s’attacher à éliminer les causes évidentes : oubli de pilule, Nexplanon®…
L’utilisation de scores de saignement permettent une évaluation simple et reproductible des pertes sanguines menstruelles et peuvent être utilisés dans le suivi des patientes et dans l’évaluation de l’efficacité des traitements. Il est également important de demander le nombre et la taille des protections utilisées.
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1. 16 Vie professionnelle
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Thérapeutique
Prise en charge des méno-métrorragies
Les méno-métrorragies sont une cause fréquente de consultation en
médecine générale. Leur prévalence est estimée entre 11 et 13 % dans la
population générale. Elle augmente avec l’âge pour atteindre 24 % chez
les 36-40 ans.
Définitions
Règles normales : Durée de 3 à 6 jours, < 80mL au cours du cycle.
Ménorragies : règles de plus de 7 jours avec une perte sanguine supérieure à 80 ml.
Métrorragies : saignement génital survenant en dehors des règles.
Interrogatoire
K Age des premières règles
K Age de la puberté
K Age de la ménopause
K Régularité des cycles
K Volume des saignements
K Contraception
K Prise médicamenteuse
K Tabagisme
K Antécédent de maladie
thromboembolique
K Antécédent de maladie de
Willebrand (Chez les femmes
présentant des ménorragies,
la prévalence de la maladie
de Willebrand est augmen-
tée par rapport à celle de la
population générale).
L’interrogatoire doit également s’attacher à éliminer les causes
évidentes : oubli de pilule, Nexplanon®…
L’utilisation de scores de saignement permettent une évaluation
simple et reproductible des pertes sanguines menstruelles et
peuvent être utilisés dans le suivi des patientes et dans l’évaluation
de l’efficacité des traitements. Il est également important de
demander le nombre et la taille des protections utilisées.
2. 17Vie professionnelle
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Examen clinique
L’inspection vulvaire et au speculum
(sauf si patiente adolescente ou
vierge) permet d’éliminer les causes
évidentes :
K Volumineux ectropion
K Polype abouché par le col
K Cancer du col ou du vagin
K Plaie vaginale traumatique.
En l’absence d’élément à l’interrogatoire, si le score de saignement et l’examen clinique sont normaux
et en l’absence d’anémie, il est recommandé de ne pas mettre en œuvre d’exploration diagnostique.
Démarche diagnostique
Il faut distinguer deux grands cadres :
K Patiente en période d’activité génitale.
K Patiente hors période d’activité génitale.
Patiente en période d’activité génitale
q Si patiente en période d’activité génitale :
βHCG !!
• Si βHCG + : Fausse couche spontanée,
grossesse extra-utérine, menace de fausse
couche spontanée, môle hydatiforme.
• Si βHCG - : On peut commencer à réfléchir…
q Au cours de la période d’activité génitale, on
distingue 3 étapes :
• La période péripubertaire.
• La période « stable ».
• La période péri-ménopausique.
q Dans tous les cas, on fera :
• Une échographie pelvienne.
• Un bilan sanguin simple : NFS, plaquettes,
TP, TCA.
Période péri-pubertaire
Il est très fréquent d’avoir des méno-métror-
ragies à cette période dues à l’immaturité de
l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Le
réglage hormonal n’étant pas encore au point.
Cependant, il ne faut pas méconnaître certaines
étiologies.
• Avoir les βHCG faciles
• Troubles de l’hémostase fréquents à éliminer
avec bilan sanguin (NFS, plaquettes, TP, TCA)
• Tumeur ovarienne oestrogénosécrétante
• Eliminer un saignement d’une autre origine :
urologique ou digestif.
Si une étiologie est retrouvée, le traitement est
celui de la cause.
La plupart du temps, aucune étiologie n’est
retrouvée, il s’agit le plus souvent d’une
insuffisance lutéale ou d’une hyperoestrogénie
relative. Dans ce cas, il ne faut pas chercher à
réguler de manière parfaite les règles avec une
pilule oestro-progestative, car il y a un risque
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de bloquer l’axe hypothalamo-hypophysaire.
Il est préférable de procéder à un soutien lutéal
en 2ème
partie de cycle (Duphaston® du 16ème
au
25ème
jour du cycle) et rassurer.
Point sur l’hyperoestrogénie relative ou insuffi-
sance lutéale : Lors d’un cycle menstruel, il faut
des œstrogènes pour la croissance folliculaire,
qui eux-mêmes fabriqueront des œstrogènes. En
cas de diminution des œstrogènes, la fabrication
des follicules est altérée, l’ovulation sera donc
de moins bonne qualité tout comme le corps
jaune. La production de progestérone sera donc
diminuée. Il y aura donc davantage d’œstrogène
que de progestérone d’où l’hyperoestrogénie
relative. Il s’agit bien d’une insuffisance lutéale.
Les signes cliniques sont stéréotypés : métrorra-
gies, gonflement abdominal, céphalées, tension
mammaires.
Période « stable »
De la même manière, il ne faut pas passer à
côté d’une pathologie de l’hémostase : NFS,
plaquettes, TP, TCA. On ne fait pas de bilan
hormonal sauf si on a une franche irrégularité
du cycle. L’échographie pelvienne par voie
abdominale et vaginale permet de faire le
diagnostic.
• Kyste ovarien
L’ovulation peut être perturbée par la pré-
sence du kyste, il y a donc une absence de
corps jaune et donc une insuffisance lutéale.
Il s’agit souvent de métrorragies intermit-
tentes, plutôt en milieu de cycle, en géné-
ral de faible abondance. Le traitement est
fonction du type de kyste : expectative pour
les kystes fonctionnels, chirurgical pour les
kystes organiques.
• Fibrome utérin
Leur développement est soumis aux hor-
mones. Il n’y a pas de fibrome avant la puber-
té et ils régressent à la ménopause. Seuls les
fibromes en rapport avec la cavité (sous-mu-
queux, interstitiels et endocavitaires) seront
responsables de saignements.
Le traitement peut être conservateur :
médical (progestatifs, Esmya®) ou chirurgical
(myomectomie) ou radical : hystérectomie
totale inter ovarienne. On ne fait en général
pas de traitement conservateur après 45 ans.
• Adénomyose
Il s’agit d’une infiltration du myomètre par de
l’endomètre. Elle concerne 50 % des femmes
après 50 ans. Elle est asymptomatique dans
35 % des cas. Elle est souvent associée à des
fibromes et à de l’endométriose. Ce serait
la principale cause de ménométrorragies
après 40-45 ans, mais son diagnostic est peu
connu et difficile. A l’échographie elle est
souvent confondue avec un utérus myoma-
teux. L’IRM et l’hystéroscopie peuvent aider.
Le traitement peut être médical (analogues
LH-RH, DIU au levonorgestrel, macroproges-
tatifs) même si peu efficace ou chirurgical
(endométrectomie (grossesse ultérieure
impossible), hystérectomie).
• Polype de l’endomètre
La prise en charge se fait par résection hys-
téroscopie du polype, associée à un DIU
au lévonorgestrel en l’absence de désir de
grossesse.
• Hyperplasie atypique de l’endomètre
Il s’agit d’un diagnostic histologique.
En cas de désir de grossesse, on effectue un
curetage avec mise en place d’un DIU au
lévonorgestrel et contrôle hystéroscopique à
6 mois. En l’absence de désir de grossesse,
on procède à une hystérectomie d’emblée
devant le risque d’évolution vers un cancer
de l’endomètre.
Parfois, l’échographie est normale.
Si la patiente est d’âge mûr, il faut avoir l’hys-
téroscopie facile pour ne pas méconnaitre un
polype ou un cancer de l’endomètre.
Si tout est normal, il s’agit en général de
déséquilibres hormonaux. On parlera de :
• Mémo-métrorragies idiopathiques.
La prise en charge peut être une expectative,
des progestatifs du 16ème ou 25 ème jour
du cycle, notamment si désir de grossesse,
une pilule oestro-progestative, un DIU au
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lévonorgestrel ou la chirurgie. Si le traite-
ment est inefficace au bout de 3 à 6 mois,
proposer une hystéroscopie.
Période péri-ménopausique
Le raisonnement est le même, toutefois il
existe souvent une irrégularité menstruelle
par hyperoestrogénie relative ; MAIS il ne faut
pas méconnaitre un cancer de l’endomètre
surtout si métrorragies et endomètre suspect à
l’échographie !
En cas d’hyperoestrogénie relative, un traitement
médical peut être instauré jusqu’à la ménopause
avec des macroprogestatifs 10 ou 20 jours par
mois si désir de contraception +/- œstrogènes
les 10 derniers jours du cycle ou un DIU au
lévonorgestrel. En cas d’échec, un traitement
chirurgical sera proposé assez facilement.
Patiente hors période d’activité génitale
On distingue :
q La période prépubertaire.
q La période post-ménopausique.
Période prépubertaire
Faire un bilan sanguin : NFS, plaquettes, TP, TCA
pour éliminer un trouble de l’hémostase et no-
tamment une maladie de Willebrand (recherche
d’antécédents familiaux), et une échographie
pelvienne pour éliminer une tumeur ovarienne
oestrogénosécrétante.
Ne pas oublier qu’il peut aussi s’agir des premières
règles. C’est toutefois une situation assez rare.
Période post-ménopausique
C’est une situation assez fréquente. Il s’agit
d’un cancer de l’endomètre jusqu’à preuve du
contraire.
On réalise une échographie pelvienne : une
épaisseur de l’endomètre < 5 mm permet d’éli-
miner 99 % des cancers, une épaisseur > 5 mm
est souvent associée à une pathologie orga-
nique sans qu’il s’agisse pour autant d’un cancer.
Une confirmation histologique est nécessaire :
pipelle de Cornier (n’a de valeur que si positive)
ou hystéroscopie diagnostique.
Place de l’IRM : Non recommandée en première
intention. Elle peut être utile en 2ème intention
pour la cartographie de fibrome ou en cas de
suspicion d’adénomyose.
Cas particuliers des métrorragies sous oestro-
progestatifs : Situation fréquente parfois source
de tâtonnement. Les pilules plus dosées, que
ce soit en œstrogènes ou en progestatifs, font
moins saigner que les pilules moins dosées. Une
pilule prise en continue provoquera moins de
saignement en abondance et en durée mais plus
de métrorragies qu’une pilule prise de manière
discontinue.
En cas de ménorragie on peut donc proposer
la prise de pilule en continue. En cas de
métrorragies, on peut augmenter la dose en
œstrogènes.
Il vaut mieux attendre 2 ou 3 mois pour
s’assurer de l’efficacité de la modification de la
contraception.
Cas particulier si fièvre : Il peut s’agir d’une
infection génitale haute hémorragique. Des
infections subaiguës comme une salpingite
chronique ou une endométrite infraclinique
peuvent également expliquer ces tableaux.
Conclusion
Situation fréquente. βHCG + échographie pelvienne + NFS, plaquettes, TP, TCA = 99 % des pro-
blèmes résolus.
Dr Camila ROVIRA