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AFP
Le Parti de gauche
fait monter
la cote d’Eva Joly
Draguée par le mouvement
de Mélenchon, l’ex-candidate
EE-LV à la présidentielle en
profite pour s’assurer une place
de choix sur les listes écologistes
aux européennes de 2014.
PAGE 8
Usain Bolt,
le sprint en tête
Le Jamaïcain a
remporté, hier
aux Mondiaux
de Moscou et
sous la pluie,
un nouveau titre
sur 100m,
en 9”77.
PP. 16­17
72002ET SI RAËL AVAIT RÉUSSI
LE CLONAGE HUMAIN
TOUT L’ÉTÉ, «LIBÉ» RÉINVENTE 40 ANS D’ACTUALITÉ
CAHIER CENTRAL
Syrie
L’horreuràhuisclos
Rébellionéclatée,jihadistes
omniprésents,patrimoinedévasté,
témoinsétrangersécartés…
Al-Assadpoursuitsonmassacre.
PAGES 2­5
AlamorguedeRaqqa,samedi,danslenorddelaSyrie.PHOTOALICEMARTINS.AFP
•1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO10029 LUNDI 12 AOÛT 2013 WWW.LIBERATION.FR
IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande­Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €,
Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays­Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA.
Ni l’armée ni les rebelles ne parviennent à prendre un avantage militaire
décisif dans le conflit. Sur le plan diplomatique, la situation est gelée.
Lalongueagonie
dupeupledeSyrie
ParALEXANDRA
SCHWARTZBROD
Témoin
Dans une guerre civile,
le personnage clé, c’est
le témoin. Lui seul peut
raconter l’horreur sans
être soupçonné de
partialité. Lui seul peut
empêcher de laisser dire
un jour à ceux qui auraient
pu intervenir: «Nous ne
savions pas.» En faisant
régner la terreur,
en libérant dès le début de
la rébellion des jihadistes
prêts à tout, en laissant
proliférer des groupes
criminels qui ont fait de
l’enlèvement une industrie
prospère, le régime de
Damas est parvenu à ses
fins: tarir le flot de tous
ceux qui voulaient
apporter de l’aide
(humanitaires,
diplomates) ou témoigner
(journalistes), couper la
Syrie du monde afin de
régler le problème seul,
sous le regard bienveillant
d’un Poutine ragaillardi
par cette occasion
inespérée de peser
à nouveau sur le
(dés)équilibre de la
planète. A force d’être
vidés de tout bruit et de
toute lumière, de résonner
dans le vide et de tomber
dans l’oubli à peine
prononcés, les mots, sur
ce conflit, ne veulent plus
rien dire. «En Syrie,
il se commet un crime
contre l’humanité et les
puissances occidentales
y ont une grande part de
responsabilité [car] la non-
assistance à un peuple en
danger est un crime», nous
disait en avril le chercheur
Gilbert Achcar. Quel chef
d’Etat, de l’ONU ou de la
Commission européenne,
s’est levé depuis, pour dire
qu’il n’acceptait plus
l’intolérable? Personne.
Le pire serait pourtant de
se résigner. C’est pourquoi
nous avons choisi de
donner la meilleure place
au témoignage accablant
de Donatella Rovera.
ÉDITORIAL
A Rakka, dans l’est du pays, samedi. La seule grosse ville entièrement contrôlée par les rebelles a été bombardée par les avions de l’armée loyaliste. PHOTO NOUR FOURAT.
100000C’est, au minimum selon l’ONU,
le nombre de personnes tuées en
Syrie depuis le début de la révolte
contre le régime, en mars 2011, avec
une contestation pacifique qui s’est
vite transformée en guerre civile.
LA VILLE DE RAKAA BOMBARDÉE
Au moins 13 civils, dont sept enfants, ont péri samedi
dans un raid aérien sur la ville de Rakka, seule capitale
provinciale aux mains des rebelles, selon l’Observatoire
syrien des droits de l’homme. Libérée en mars, la ville est
dominée par l’Etat islamique en Irak et au Levant, affilié à
Al­Qaeda. Un jésuite italien critique du régime, le père
Paolo Dall’Oglio, y est porté disparu depuis début août.
REPÈRES «Sergueï Lavrov et moi ne sommes
pas toujours d’accord sur la Syrie,
mais nos deux pays sont d’accord
pour une solution politique
négociée via Genève 2.»
JohnKerrysecrétaired’Etataméricain,après
avoirrencontrésonhomologuerusse,vendredi
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20132 •
EVENEMENT
ParHALAKODMANI
L’ESSENTIEL
LE CONTEXTE
La situation ne cesse de se
dégrader en Syrie, tant au plan
humanitaire que sécuritaire,
affirme Donatella Rovera,
d’Amnesty International. Et
jusqu’au patrimoine architectural,
peu à peu emporté par la guerre.
L’ENJEU
L’objectif du régime est en passe
d’être atteint: empêcher l’entrée
de tout témoin étranger et
couper la Syrie du monde pour
mieux maintenir son emprise.
Pour Donatella Rovera, d’Amnesty International,
la situation sur le terrain empire mois après mois:
«Peu de zones sont hors
de portée des canons»
P
arfaite arabophone, Donatella Rovera,
d’Amnesty International, vient de pas-
ser un mois en Syrie dans les zones te-
nues par la rébellion.
Quelle est la situation sur place?
J’ai été très frappée de la dégradation très ra-
pide des choses par rapport à mon précédent
voyage, il y a trois mois. C’est vrai sur le plan
humanitaire et encore plus en matière sécu-
ritaire. Les enlèvements sont quotidiens,
même si l’on n’en entend pas parler à l’exté-
rieur, sauf quand il s’agit d’étran-
gers. Ils sont aussi bien le fait de
groupes criminels qui font sem-
blant d’être politiques que de
groupes politiques se finançant
par des activités criminelles. Des
groupes de miliciens liés au régime
pénètrent aussi en zone rebelle
pour de telles opérations. On sent, en outre,
une présence de plus en plus forte des grou-
pes islamistes radicaux et les affrontements
entre eux et d’autres formations de l’opposi-
tion, notamment les Kurdes, deviennent tou-
jours plus fréquents. A cela s’ajoutent des
bombardements quotidiens des forces du ré-
gime. L’aviation et les hélicoptères opèrent
moins souvent, mais les tirs d’artillerie s’in-
tensifient. Il y a très peu de zones hors de
portée des canons et des missiles Grad.
Que se passe-t-il à Alep?
La situation alimentaire et sanitaire y est très
difficile. Il n’y a pas d’eau et très peu d’élec-
tricité. L’essence qui permet de faire tourner
les générateurs est de plus en plus
chère et j’ai vu son prix augmenter
de 50% en dix jours. La ville est
toujours divisée en deux. Même s’il est im-
possible d’avoir une estimation précise, il y
a environ 800000 ou un million de person-
nes côté rebelle, et un peu plus du côté gou-
vernemental, qui ne subissent pas des bom-
bardements. Mais cette zone est désormais
totalement encerclée et ceux qui y vivent ne
peuvent plus se ravitailler que chez les rebel-
les, ce qui entraîne une envolée des prix car
il y a encore maintenant beaucoup plus d’ar-
gent côté gouvernemental. Pour limiter la
spéculation, les autorités rebelles ont fixé des
quotas pour les produits de première néces-
sité et elles interdisent de faire passer les mé-
dicaments et le lait en zone gouvernemen-
tale, mais les moyens de contournements
sont nombreux. C’est en fait dans les territoi-
res contrôlés par l’opposition que la situation
humanitaire est de loin la plus mauvaise.
Beaucoup de gens venus d’ailleurs se sont ré-
fugiés là. Ils sont totalement démunis. Il y a
un immense désespoir de la population et les
trafics d’une économie de guerre prospèrent.
Des structures politiques et administratives
ont-elles été mises en place par l’opposition?
Les conseils municipaux ou les conseils de
quartier sont de plus en plus nombreux mais,
souvent, ils ne représentent qu’eux-mêmes.
Ces structures fonctionnent en parallèle de
celles mises sur pied par les divers
groupes combattants, qui ont cha-
cun leur fief. C’est particulière-
ment évident pour les groupes is-
lamistes radicaux, le Front
al-Nusra ou l’Etat islamique en
Irak et ou Levant (EIIL), qui, au
début, étaient discrets mais, dé-
sormais, sont de plus en plus visibles. Il y a
ainsi deux tribunaux, une cour unifiée et une
cour islamique. La seconde a beaucoup plus
de pouvoir car elle dispose d’un véritable bras
armé et a les moyens de mettre en application
ses décisions alors que l’autre ne le peut pas.
Qu’avez-vous vu à Deir el-Zor, dans l’est?
Cette ville isolée, en plein désert, où il est très
difficile d’arriver et encore plus d’y entrer
car la partie tenue par les rebelles, où ne vi-
vent plus qu’une dizaine de milliers d’habi-
tants, est encerclée, avec un seul accès tou-
jours sous le feu des snipers. Mais toutes les
zones rurales autour sont contrôlées par la
rébellion. Dans la ville voisine de Hatlah, il y
a eu, mi-juillet, des affrontements
avec la population chiite.
40000 personnes ont fui en zone
gouvernementale. Le Front Al-Nusra a fait
sauter leurs mosquées et maisons pour bien
signifier qu’il n’y aura pas de retour.
Vous avez enquêté sur les crimes commis. Où
en est-on?
Les forces du régime continuent leurs bom-
bardements indiscriminés sur les populations
civiles. Il est important, dans chaque cas, de
voir s’il y avait des objectifs militaires qui
pouvaient justifier de telles frappes, mais
dans un tel chaos, il n’est pas simple de me-
ner des investigations. Jusqu’ici, nous
n’avons pas non plus réussi à trouver des
preuves formelles de l’emploi d’armes chi-
miques. Les forces gouvernementales conti-
nuent par ailleurs de pratiquer des exécu-
tions sommaires, aussi bien de civils –y
compris des familles entières– que de com-
battants rebelles. Les forces de l’opposition
pratiquent elles aussi de telles exécutions,
mais à l’encontre d’ officiers, soldats ou mili-
ciens capturés, sans s’en prendre aux civils.
Mais certains groupes, notamment les jiha-
distes, se montrent de pire en pire.
Recueilli par MARC SEMO
AP
A
vec 4400 morts, le mois de
ramadan qui s’est achevé
jeudi aura été l’un des plus
sanglants depuis le début du
conflit en Syrie, au printemps 2011. La
tuerie banalisée se déroule dans le huis-
clos toujours souhaité par le régime de
Damas, bien aidé par les groupes jiha-
distes.Acoupd’enlèvementsdejourna-
listes et de menaces contre les tra-
vailleurs humanitaires, ceux-ci ont
réussi à éloigner les témoins étrangers,
en particulier dans le nord.
Tout au long du mois, le régime et l’op-
position ont marqué tour à tour des
points ou encaissé des coups, remporté
des victoires ou subit des revers sur le
terrain. Tous provisoires, dans cette
guerre d’usure asymétrique installée
dans la durée. L’épisode final aura été
l’attaque au mortier du convoi de Ba-
char al-Assad, en plein Damas, alors
qu’il se rendait à la mosquée pour la
prière de l’Aïd. L’opération, démentie
jeudi par le gouvernement, a provoqué
la panique dans la capitale, où les habi-
tants ont fêté la fin du mois sacré au son
du canon et des armes automatiques.
Dernier pied de nez de l’opposition: le
chef de la Coalition nationale a pu faire
tranquillement sa prière dans une mos-
quée de Deraa, après avoir franchi clan-
destinement la frontière jordanienne.
EMBUSCADE. Bachar al-Assad avait
pourtant des accents triomphants, fin
juillet, en félicitant ses troupes qui ve-
naient de reprendre la plus grande par-
tie de Homs, près de la frontière liba-
naise. Trois jours après, les brigades
rebelles du nord exultaient après la
conquête de la base aérienne de Min-
nigh, près d’Alep: l’aboutissement
d’une bataille menée depuis huit mois
contre l’aéroport, d’où partaient les
avions qui pilonnaient toute la région.
Le lendemain, l’opposition était acca-
blée quand plus de soixante de ses com-
battants sont tombés dans une embus-
cade tendue par l’armée régulière dans
les environs de Damas.
Ces derniers jours, l’offensive lancée
par les rebelles contre le bastion alaouite
de la région côtière de Lattaquié, appro-
chant Qardaha, village natal des Al-As-
sad, marque une escalade aussi provo-
cante que dangereuse. L’opération ne
fait pas l’unanimité, même parmi les
opposants, qui craignent des massacres
de villageois alaouites par les extrémis-
tes sunnites. «Son objectif est au con-
traire de briser le plan de partition du pays
par l’établissement d’un Etat alaouite, se-
lon Abou Ibrahim, nom de guerre d’un
chef de brigade rebelle
LIBAN
JORDANIE
IRAK
TURQUIE
SYRIE
Deraa
Palmyre
Deir el-Zor
Hama
RakkaIdlib
La aquié
Qardaha
Homs
Ras al-Aïn
Al-Qoussayr
Damas
50 km
Alep
loyaliste
zones disputées
kurde
rebelle
Territoire sous contrôle
«Nous mettrons en œuvre
toutes ses capacités pour
défendre les Kurdes
innocents menacés de mort
et de terrorisme en Syrie.»
MassoudBarzaniprésidentdela
régionautonomekurdeirakienne
Des raids aériens sur la ville
de Salma, dans la province de
Lattaquié, bastion alaouite, ont
tué au moins 20 personnes hier
alors que l’armée syrienne a lancé
depuis trois jours une vaste contre­
offensive pour reprendre le contrôle
de villages alaouites conquis ces
derniers jours par les rebelles.
LES ARMES RUSSES
La Russie a fabriqué une partie des missiles
sol­air S­300 destinés à la Syrie, mais la
livraison a été reportée à 2014 malgré un
acompte versé par Damas. Le 4 juin,
Poutine affirmait que Moscou n’avait pas
«pour l’instant» livré de S­300 pour ne pas
«rompre l’équilibre des forces».
Suite page 4
INTERVIEW
L’offensive rebelle contre le bastion
alaouite de la région côtière de
Lattaquié marque une escalade
aussi provocante que dangereuse.
REUTERS
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 • 3
L’Unesco a placé la totalité des monuments classés sur la liste
des sites en péril et assiste, impuissante, à leur dévastation.
Le patrimoine syrien
rongé par les bombes
et les pillages
L
e mausolée de Khaled
ben al-Walid n’est
qu’une victime de plus
du conflit syrien. Le
22 juillet, des tirs d’obus ont
totalement détruit ce haut
lieu de pèlerinage sunnite,
situé au plein cœur de Homs.
Construit au IXe siècle par les
seljoukides, le monument
honorait un compagnon et
le principal chef militaire
de Mahomet. Vraisemblable-
ment bombardé par l’armée
syrienne, le mausolée vient
s’ajouter à la longue liste des
chefs-d’œuvre architectu-
raux emportés par la guerre.
locale, joint par
Skype. Il ne s’agit pas, pour nous, de
conquérir la zone, mais de perturber le dé-
ploiement de l’armée pour qu’elle dégar-
nisse ses positions dans le nord.»
La division de facto du territoire syrien
entre une région centrale et côtière sous
le contrôle du régime, tandis que le
nord, l’est et une partie du sud du pays
sont dominés par les rebelles, est loin
d’être figée. Les lignes de front sont
mouvantes et chacun des deux camps
garde l’ambition de contrôler l’ensem-
ble du pays, tout comme leurs alliés in-
ternationaux et, surtout, régionaux.
PORTEFEUILLE. Car dans ce conflit où
se joue bien plus que l’avenir d’un sys-
tème politique en Syrie, les grandes
puissances occidentales ont sous-traité
le dossier aux acteurs régionaux. Or
l’Iran poursuit une stratégie de domina-
tion de tout le «croissant chiite» –entre
Téhéran et Beyrouth–, auquel s’oppo-
sent les pays sunnites, Turquie, Qatar et
Arabie Saoudite en tête. Cette dernière
a repris l’initiative depuis plusieurs se-
maines. D’abord en prenant le contrôle,
à la place du Qatar, sur la Coalition na-
tionale des forces de l’opposition sy-
rienne, élargie pour affaiblir la prépon-
dérance des Frères musulmans en son
sein et désormais présidée par Ahmad
Assi Jarba, membre de la grande tribu
des Chammar aux ramifications saou-
dienne et syrienne. Riyad s’est lancé
également dans un soutien militaire
substantiel au commandement central
de l’Armée syrienne libre, avec l’aval de
Washingtonetpoursuitsadiplomatiedu
portefeuille jusqu’en Russie. Le chef des
renseignements saoudiens, Bandar ben
Sultan, s’est rendu chez Vladimir Pou-
tine à Moscou pour l’inviter à lâcher Al-
Assad en échange de contrats d’arme-
ment de 15 milliards de dollars et de ga-
ranties pour le marché du gaz russe en
d’un plus grand rôle dans la région. Of-
fre rejetée par Moscou, d’autant moins
prêt à abattre sa carte Al-Assad, qu’il
croit sa victoire possible.
Diplomatiquement, les dernières ten-
sions entre Russes et Américains avec
l’affaire Snowden (Libération de ce
week-end) vont aussi peser sur le dos-
sier syrien déjà bien négligé. L’annonce
par les ministres des Affaires étrangères
des deux pays, vendredi à Washington,
de leur accord pour réunir une confé-
rence dite de «Genève 2», apparaît
comme un simple rappel qu’une solu-
tion politique n’est pas exclue. Encore
faut-il amener les belligérants syriens
à la table des négociations. Or Al-Assad
affiche sa détermination d’en finir par
les armes avec les «terroristes», tandis
que l’opposition, qui exige son départ
comme préalable à toute discussion, n’a
jamais su convaincre qu’elle pouvait of-
frir une alternative. Ses divisions et l’in-
compétence de ses principaux repré-
sentants ont servi de prétexte légitime
à ses alliés occidentaux, tout aussi divi-
sés et hésitants, pour mesurer leur sou-
tien, notamment militaire.
«Les positions du régime comme de l’op-
position rendent toute solution militaire ou
politique illusoire», conclut le rapport de
l’International Crisis Group, publié fin
juin, et pointant les «métastases du con-
flit». «Les alliés de chacune des parties
donnent assez pour les faire tenir, mais
pas assez pour s’imposer, faisant durer la
guerre par procuration aux dépens des
Syriens.» •
Images satellitaires du quartier Ard al­Hamra, dans le nord d’Alep, avant et deux jours après une double frappe de missiles de l’armée syrienne, dans la
A Alep, la mosquée de Khaled ben al­Walid, endommagée par des bombardements aériens. PHOTOS LENS YOUNG HOMSI. AP;ANADOLU AGENCY. AFP
La mosquée des Omeyyades d’Alep, photographiée le 16 avril et le 20 juin 2013. Le 24 avril, le minaret s’est effondré. PHOTOS DIMITAR DILKOFF. AFP
Suite de la page 3
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20134 • EVENEMENT
sur place. A ce désastre cul-
turel, il faut ajouter le fléau
des pillages et du trafic d’ob-
jets, qui se sont intensifiés
ces derniers
mois. «On sait
que des objets
provenant de si-
tes syriens ont
été saisis au Li-
ban et d’autres
circulent sur In-
ternet, explique Karim Hen-
dili. On a l’exemple récent
de l’Irak, où des pièces qui
avaient disparu n’ont jamais
été retrouvées. Nous mobili-
sons le marché de l’art afin
qu’il ne se rende pas complice,
même de manière involontaire,
de ce trafic.»
La sauvegarde des sites, tou-
jours inaccessibles à cause
des combats, est l’autre dif-
ficulté à laquelle est confron-
tée l’organisation. Un fonds
d’urgence a bien été créé,
mais il ne sera utilisable
qu’une fois «le conflit ter-
miné», ou quand l’Unesco
aura «une fenêtre pour inter-
venir».
Incendie. Il y a pourtant
urgence. En septembre, le
vieux souk d’Alep, inscrit au
Patrimoine mondial de l’hu-
manité, a été détruit dans un
incendie. En avril, dans la
même ville, c’est le minaret
de la mosquée des Omey-
yades, joyau historique
du nord de la Syrie, qui n’a
pas résisté aux combats.
L’Unesco peine même à se
tenir informée de l’état des
sites protégés. «Nous sommes
en contact sur place avec la
Direction générale des antiqui-
tés et des musées de Syrie, dé-
taille Karim Hendili. C’est
très compliqué de mesurer
l’ampleur des destructions et
on s’est rendu compte, au Mali
notamment, que nous avions
sous-estimé les dégâts. Ce
pourrait être la même chose
ici.» Avec six sites classés au
Patrimoine mondial de
l’Unesco –les vieilles villes
de Damas et Alep, la cité ro-
maine de Bosra (sud), le site
antique de Palmyre, les châ-
teaux du Krak des chevaliers
et de la forteresse de Saladin,
et une quarantaine de villa-
ges antiques du nord-ouest
du pays–, la Syrie fait figure
de perle historique au
Moyen-Orient. «Il y avait
une centaine de missions ar-
chéologiques sur place avant
la guerre», explique Karim
Hendili. Mi-juillet, le Krak
des chevaliers, un des bijoux
historiques syriens, cons-
truit pendant les croisades
entre le XIe et le XIIIe siècle,
a lui aussi été endommagé.
Depuis le début du mois en
effet, l’armée a intensifié sa
puissance de feu pour re-
prendre plusieurs positions
rebelles, une stratégie qui
s’avère catastrophique pour
l’Unesco, qui voudrait met-
tre en place des cordons de
sécurité autour des princi-
paux sites afin de prévenir
des pillages. En février, des
reliques appartenant selon la
tradition au prophète Maho-
met (trois cheveux et un
fragment de dent) ont été
dérobées dans la grande
mosquée d’Alep.
Inventaires.«On veut inciter
les pays frontaliers à renforcer
la sécurité aux frontières en
prenant des mesures fortes
pour empêcher ces objets de
quitter le pays», poursuit Ka-
rim Hendili, qui ajoute que
l’Unesco travaille main dans
la main avec Interpol et l’Or-
ganisation mondiale des
douanes. La mission s’avère
plus que complexe puisque
dans la majorité des cas, les
inventaires imposés par la
convention de l’Unesco
de 1970 manquent de préci-
sion. Impossible de fait de
déterminer les pertes exactes
dans beaucoup de cas. «Nous
faisons face à un réseau de
trafic d’objets culturels très
organisé, n’hésitant pas à pro-
fiter de la détresse des habi-
tants qui se rendent parfois
complices du trafic pour des
raisons de survie», rajoute
Karim Hendili.
La communauté internatio-
nale ne semble pas plus dé-
terminée à agir sur ce point
que sur le reste, dans ce con-
flit qui a déjà fait plus de
100000 morts. «Notre mis-
sion est de mobiliser au maxi-
mum, conclut Karim Hendili.
Le patrimoine est une partie
essentielle de l’identité des ci-
toyens. On a vu en Irak que la
destruction ou le pillage des si-
tes affectait énormément les
populations. Les gens sur
place ont besoin de se sentir
soutenus.»
THOMAS LIABOT
«Détruire l’héritage du passé
[…] ne fait qu’accentuer la
spirale de la haine et du déses-
poir», lançait mi-juillet Irina
Bokova, la directrice géné-
rale de l’Unesco, qui tente de
mobiliser la communauté
internationale. Le 20 juin,
l’organisation a ainsi placé la
totalité du Patrimoine mon-
dial syrien sur la liste des si-
tes en péril, «comme une re-
connaissance de la menace à
laquelle ils font face», com-
mente Karim Hendili, spé-
cialiste du monde arabe au
sein de l’Unesco.
En un peu plus de deux ans
de combats, les dommages
causés aux sites historiques
du pays sont considérables.
La Syrie est pourtant signa-
taire de la convention de
La Haye de 1954 pour la pro-
tection des biens culturels en
cas de conflit armé. Un argu-
ment qui semble bien mince
face aux enjeux politiques
Le Krak des chevaliers (province de Homs), inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, a été touché lors d’un raid aérien selon l’opposition. PHOTOS ABD RABBO. SIPA; AFP
Le souk de la vieille ville d’Alep, au cœur des combats rapprochés entre rebelles et loyalistes depuis le début du conflit. PHOTOS HEMIS. AFP; ABD RABBO AMMAR. ABACA
«On sait que des objets
provenant de sites syriens ont
été saisis au Liban et d’autres
circulent sur Internet.»
KarimHendilidel’Unesco
soirée du 22 février 2013, ayant fait au moins 117 morts selon Amnesty International. PHOTOS 2013 DIGITAL GLOBE; ATRIUM
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 EVENEMENT • 5
Transparence:lapromesse
incomplètedeBarackObama
Le Président veut rassurer les Américains, échaudés par l’affaire Snowden,
mais reste silencieux à propos de l’espionnage des Etats-Unis à l’étranger.
L’
Union européenne est no-
tée «3» sur la liste des
«priorités»del’espionnage
américain, révèle
aujourd’hui le magazine
allemand Der Spiegel, qui a
pu accéder à un nouveau document
volé par l’ancien agent Edward
Snowden. Sur ce dossier daté
d’avril, la National Security Agency
(NSA), chargée du renseignement
électronique des Etats-Unis, classe
sur une échelle de 1 (l’intérêt maxi-
mal) à 5 (faible intérêt) ses priorités
d’espionnage. La France y figure
comme une priorité moyenne, au
même plan que l’Allemagne ou le
Japon, mais avant l’Italie ou l’Espa-
gne. L’Union européenne (UE) ap-
paraît aussi comme une cible, avec
une priorité «3» accordée à ses
«objectifs de politique étrangère»,
son «commerce international» ou sa
«stabilité économique», mais la note
de 5 seulement en matière de «nou-
velles technologies», «sécurité
énergétique» ou «questions alimen-
taires». La révélation tombe à pic,
au moment où l’UE entame les né-
gociations avec Washington sur un
traité de libre-échange. D’autres
documents fournis par Edward
Snowden fin juin avaient déjà mon-
tré que la NSA écoutait les bureaux
de l’Union européenne à Washing-
ton, à l’ONU ou même à
Bruxelles. L’«indignation»
alors exprimée par plusieurs
dirigeants européens, surtout alle-
mands, fut discrète et embarrassée.
Ce que Barack Obama n’a même
pas abordé en évoquant, lors de sa
conférence de presse, les réactions
à l’affaire Snowden.
INNOCUITÉ. Juste avant de s’auto-
riser une petite semaine de
vacances, le Président a énoncé
quatre propositions pour rassurer
les Américains de l’innocuité des
programmes de surveillance qui les
visent. Pas un mot n’a été dit des
programmes ciblant les «alliés»
européens ou les usagers non amé-
ricains des compagnies comme
Facebook, Google, etc., dont les
données sont passées au crible de
la NSA. «Les Européens devraient
parler plus fort pour être entendus à
Washington, observe Marc Roten-
berg, président de l’Electronic Pri-
vacy Information Center (Epic).
Obama n’ignore pas les
préoccupations des di-
rigeants européens,
avec qui il parle en
privé, mais son souci
premier, vendredi, était
de répondre aux énor-
mes inquiétudes du public améri-
cain.» L’espionnage américain est
déjà bien contrôlé et il «évite les
abus», a assuré vendredi Barack
Obama, soulignant lui-même que
les mesures qu’il propose ne visent
qu’à rendre les Américains «plus à
l’aise» avec ces programmes. «Si je
dis à Michelle que j’ai lavé la vaisselle
[…] et qu’elle est un peu sceptique,
peut-être ai-je besoin de lui montrer
les assiettes, même si j’aimerais bien
qu’elle me croie», a expliqué le Pré-
sident. Une métaphore particuliè-
rement triviale, qui lui a aussitôt
valu les railleries de la presse. Le
président américain a proposé de
«réformer» la section 215 du Patriot
Act, qui permet de collecter les re-
levés téléphoniques de pratique-
ment tous les citoyens américains.
Sans remettre ce droit en question,
il a invité le Congrès à «travailler»
avec lui pour mettre en place «une
plus grande surveillance, une plus
grande transparence, et des limites à
l’usage de cette autorité». Obama a
aussi proposé d’ajouter un repré-
sentant indépendant à la Fisc, la
cour secrète chargée d’autoriser les
écoutes qui, jusqu’à présent, n’en-
tend que les arguments du gouver-
nement. Il a promis la nomination
à la NSA d’un officier chargé du
respect de la vie privée, la création
d’un site web où les services de
renseignement publieront des do-
cuments jusqu’alors classés secrets,
et aussi la nomination d’un groupe
«d’experts extérieurs» chargés de
proposer d’autres réformes.
CADRE. Toutes ces mesures vont
dans le bon sens mais restent très
insuffisantes, selon les défenseurs
des libertés. «Ces propositions ne
sont pas sans importance, mais elles
ne vont pas assez loin, résume Marc
Rotenberg. Ce qu’il faut, c’est mettre
fin au programme actuel de collecte
des relevés téléphoniques des Améri-
cains, qui est illégal.» Pour ce qui est
de l’espionnage à l’étranger, et ce-
lui des Européens en particulier,
des changements sont aussi pos-
sibles, même si le problème est là
plus diplomatique que juridique,
explique cet expert: «Actuellement,
le droit américain ne reconnaît pas le
droit à la vie privée des citoyens non-
américains.» «Espionner des non-
Américains à l’étranger soulève des
questions diplomatiques et politiques
compliquées mais moins de problèmes
au regard de la loi américaine, puis-
qu’[ils] ne sont pas protégés par le
quatrième amendement [de la Cons-
titution américaine, qui permet de
se prémunir contre des perquisi-
tions et saisies non motivées,
ndlr]», observe Stephen Vladeck,
professeur à l’American University.
Sur ce point aussi, la réflexion a
pourtant commencé, rapporte
Marc Rotenberg, invité la semaine
dernière à la Maison Blanche à une
réunion où le besoin de protéger les
données privées au niveau interna-
tional a été évoqué. «Il faudrait un
cadre international faisant du respect
de la vie privée un droit de l’homme
fondamental, comme la commissaire
Viviane Reding a commencé à le de-
mander, côté européen», plaide le
président d’Epic à Washington.
Voilà qui pourrait aussi fournir un
très bon sujet de campagne à l’UE:
une occasion enfin positive de
montrer que les Européens peuvent
tenir tête aux Etats-Unis et sortir
d’un scandale en obtenant de nou-
velles avancées du droit.•
ParLORRAINEMILLOT
CorrespondanteàWashington
«Les Européens devraient parler
plus fort pour être entendus
à Washington.»
MarcRotenbergexpertendroitdelavieprivée
RÉCIT
Obama à la Maison Blanche, vendredi. Le chef de l’Etat s’est engagé à réformer le programme de surveillance de la NSA. PHOTO PABLO MARTINEZ. AP
LE CAS SNOWDEN
Le père d’Edward Snowden a
annoncé hier avoir un visa pour
visiter «très prochainement» son
fils. «En tant que père, j’aimerais
qu’il revienne à la maison à la
condition qu’il ait droit, en tant
qu’Américain, à l’application juste
de la justice», a­t­il déclaré.
REPÈRES
«Nous avons déjà
déclassifié un nombre
d’informations
à propos de la NSA
sans précédent. Mais
nous pouvons aller
plus loin.»
BarackObamavendredi
«Des réformes se
dessinent, pour cela, le
Président et le peuple
américains ainsi que le
monde sont redevables
à Edward Snowden.»
JulianAssangefondateur
deWikiLeaks,samedi
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20136 •
MONDE
Les Maliens se sont rendus aux urnes
dans le calme, hier, pour élire leur
nouveau président. Ils devaient choi-
sir entre Ibrahim Boubacar Keïta,
donné largement favori avec 39,7%
des voix au premier tour, et Soumaïla
Cissé (19,7%), pour sortir leur pays de
dix-huit mois de chaos. Les deux can-
didats, vétérans de la vie politique
malienne, ont appelé au «calme et à
la sérénité» après avoir voté à Bamako,
où le scrutin a été perturbé dans la
matinée par de fortes pluies. Dans les
grandes villes et régions administrati-
ves du nord du pays (Gao, Tombouc-
tou et Kidal), le vote s’est apparem-
ment déroulé sans incident.
Deux semaines après un premier tour
réussi le 28 juillet, le second tour de
la présidentielle doit rétablir l’ordre
constitutionnel interrompu par un
coup d’Etat militaire le 22 mars 2012,
précipitant la prise du nord du pays
par des groupes islamistes armés liés
à Al-Qaeda. Le scrutin est surveillé
par plusieurs centaines d’observa-
teurs nationaux et internationaux et
sa sécurité assurée par l’armée ma-
lienne, les Casques bleus de la Mi-
nusma et les forces françaises.
C
BONNE NOUVELLE LES CITOYENS DOIVENT DÉPARTAGER «IBK» ET CISSÉ
Présidentielle:leMalivotedanslecalme
Sur le lieu d’un attentat à Kerbala (au sud de Bagdad), hier. PHOTO M. MUSHTAQ. REUTERS
D
e nouveaux attentats
ont fait plus de
60 morts et des cen-
taines de blessés samedi en
Irak, visant notamment des
cafés et des marchés à Bag-
dad, alors que la population
fêtait la fin du ramadan, le
plus meurtrier depuis cinq
ans. Les violences quoti-
diennes se sont intensifiées
et font craindre une nouvelle
guerre civile, alors que des
centaines de prisonniers,
dont des hauts responsables
d’Al-Qaeda, se sont évadés
en juillet grâce à un coup de
main du réseau. En tout,
16 voitures piégées et des at-
taques ont tué 61 personnes
et blessé près de 300 autres à
travers le pays samedi.
A Bagdad, des attentats
coordonnés à la voiture pié-
gée ont fait 37 morts dans
huit quartiers, selon des
sources policières et médica-
les. Les Etats-Unis ont quali-
fié d’«ennemis de l’islam» les
auteurs de ces attaques «lâ-
ches […] dirigées contre des
familles qui célébraient l’Aïd-
el-Fitr» marquant la fin du
ramadan. Le département
d’Etat américain a rappelé
qu’une prime de 10 millions
de dollars (près de 7,5 mil-
lions d’euros)était offerte
pour «toute information qui
aiderait les autorités à tuer ou
capturer Abou Bakr al-Ba-
ghdadi», le chef d’Al-Qaeda
en Irak. Selon les Nations
unies, plus de 1000 person-
nes sont mortes en juillet, le
bilan mensuel le plus élevé
dans le pays depuis cinq ans.
Le gouvernement attribue
cette augmentation des
attaques au conflit qui fait
rage en Syrie voisine, et ac-
cuse régulièrement des pays
étrangers d’encourager ces
violences. Mais la crise poli-
tique qui oppose notamment
la majorité chiite aux sun-
nites, qui tenaient le haut du
pavé sous Saddam Hussein,
a également servi les intérêts
des extrémistes. Les sunni-
tes, qui accusent les autorités
de chercher à les marginali-
ser politiquement, orga-
nisent des manifestations
depuis la fin décembre, dé-
nonçant notamment des ar-
restations arbitraires. Les at-
tentats à grande échelle ont
repris à partir d’avril, après
que les autorités ont abattu
des dizaines de manifestants
sunnites à Hawija.
Par ailleurs, le gouverne-
ment se montre incapable de
fournir des services de base,
en particulier un approvi-
sionnement stable en élec-
tricité, et très peu de lois ont
été adoptées depuis les légis-
latives de 2010. Le Premier
ministre Nouri al-Maliki
(chiite) est souvent accusé de
chercher à monopoliser tous
les pouvoirs, et blâme pour
sa part ses opposants d’être
à la solde de l’étranger.
S.Etr.
EnIrak,l’ombred’une
nouvelleguerrecivile
TERRORISME Des attaques ont fait des dizaines
de morts samedi, concluant un ramadan meurtrier.
ParSTÉPHANIEDESILGUYIntérim
LesBritanniques
montrentlescrocscontre
leschiensméchants
D
e la prison à vie pour
les propriétaires de
chiens «dangereux et
hors de contrôle»? Dans une
consultation publique lancée
cet été par le gouvernement
britannique, les citoyens
sont appelés à donner leur
avis sur la répression envers
les molosses. Instauré
en 1991, le Dangerous Dog
Act réprime les attaques de
chiens dans les lieux publics
de deux ans de prison et
de 5 000 livres (environ
5800 euros) d’amende. Une
peine rarement appliquée
dans sa totalité. Rien n’est,
en outre, prévu pour les
agressions dans les jardins
privés comme celle survenue
en mars près de Manchester.
Une adolescente avait été
tuée par des Bullmastiffs
chez une amie. Les proprié-
taires n’ont jamais été pour-
suivis. Depuis 2005, 16 per-
sonnes sont mortes agressées
par un chien.
Avec 210000 attaques recen-
sées chaque année et
6000 hospitalisations pour
morsure, le gouvernement a
décidé de sévir. Parmi les
questions de l’enquête :
«Combien d’années de prison
faut-il instaurer pour le pro-
priétaire d’un chien qui a
blessé une personne ou qui a
tué un chien guide d’aveu-
gle ?» L’internaute peut
choisir entre des peines de
trois, cinq, sept ou dix ans.
Dans l’hypothèse où la vic-
time décède, la détention
varie de sept ou quatorze ans
à la prison à vie… Des propo-
sitions qui semblent con-
vaincre les employés qui sont
quotidiennement en contact
avec ces bêtes hargneuses.
Postiers, électriciens doivent
souvent ruser pour éviter at-
taques, morsures, pouvant
entraîner la perte d’une main
ou d’un bras. Selon le syndi-
cat des télécommunications,
23000 postiers ont été atta-
qués par des chiens ces cinq
dernières années. «Les pro-
priétaires ont au mieux été
condamnés à de la prison avec
sursis. Les autres, à payer des
peines d’amende de 100 li-
vres», se lamente Dave Joyce,
l’un de ses représentants.
Autre phénomène, les
pitbulls s’attaquent aussi aux
chiens guides d’aveugle. Le
rapport publié en juin par
l’association Guide Dogs ré-
vèle qu’il y a plus de dix
agressions par jour. Son pré-
sident lance un cri d’alarme:
«Il faut que le gouvernement
comprenne les répercussions
que cela entraîne sur les mal-
voyants. Un chien guide
d’aveugle représente deux ans
de travail et un investissement
deplusde50000euros.»Pour
la RSPCA, l’association bri-
tannique de protection ani-
male, le gouvernement de-
vrait aller encore plus loin.
«Acheter un chien n’est pas
seulement un droit. Il faut res-
ponsabiliser les propriétaires en
les obligeant à suivre des cours
pour éduquer leur animal et
donner le pouvoir aux forces de
police de les contrôler. Il faut
avant tout prévenir les atta-
ques», insiste David Bowles,
son porte-parole. Les inter-
nautes britanniques ont jus-
qu’au 1er septembre pour ré-
pondre au questionnaire.•
VU DE LONDRES
L’ancienne caserne mili­
taire de Targoviste, dans
laquelle Nicolae Ceau­
sescu, l’ancien dictateur
roumain, et sa femme,
Elena, ont été exécutés
en décembre 1989, sera
ouverte au public dès sep­
tembre. «Les visiteurs pour­
ront voir le mur où ont été
fusillés les époux Ceau­
sescu», a indiqué le direc­
teur du complexe muséal
de Targoviste, Ovidiu Cars­
tina, affirmant que «l’inté­
rieur du bâtiment a été
repeint dans les mêmes
couleurs que celles de 1989
et le mobilier sera égale­
ment identique». Le musée
est en train d’aménager la
pièce où a été improvisé le
procès, mais aussi la cham­
bre où les Ceausescu ont
passé leur dernière nuit.
L’ouverture au public de
cette ancienne caserne a
été décidée à la suite de
demandes de groupes de
touristes étrangers. Après
avoir fui Bucarest le
22 décembre 1989, les
époux Ceausescu ont été
arrêtés par l’armée (passée
du côté des protestataires)
à près de 100 km de la
capitale, et conduits dans
une caserne militaire où ils
furent fusillés trois jours
plus tard, après un procès
sommaire, et tout cela
sous l’œil des caméras.
LA MORT DES
CEAUSESCU,
COMME SI
VOUS Y ÉTIEZ
L’HISTOIRE
«On combat mieux
les préjugés en
participant, plutôt
qu’en boycottant
les Jeux olympiques
d’hiver de Sotchi.»
DavidCameron
Premierministre
britannique,quiaffirmait,
surTwittersamedimatin,
soninquiétudesurles
violationsdesdroits
deshomosexuelsenRussie,
1187C’est le nombre de nouveaux logements (793 à Jérusa­
lem­Est et 394 en Cisjordanie) pour lesquels le gouver­
nement israélien lance un appel d’offres. Les Palestiniens
dénoncent cette mesure alors que les négociations
de paix sont censées reprendre mercredi.
SOUDAN Des combats oppo-
saient toujours deux tribus
arabes hier au Darfour, au
lendemain d’affrontements
ayant fait au moins 100 morts
dans cette région, où les ri-
valités tribales alimentent un
regain de tensions après dix
ans de violences.
ÉGYPTE Les partisans du
président islamiste destitué
Mohamed Morsi ont appelé
hier à de nouvelles manifes-
tations alors qu’expire un
ultimatum de fait et que les
autorités s’apprêtent à dis-
perser de force leurs sit-in
sur deux places du Caire.
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 MONDEXPRESSO • 7
8 •
FRANCE
L’ex­candidate à la présidentielle a été invitée à la rentrée du Front de gauche, fin août. PHOTO FRANCK TOMPS
EvaJolyfait
del’effet
àMélenchon
Les proches du président
du Parti de gauche tentent un
rapprochement avec l’eurodéputée
Europe Ecologie-les Verts.
Leurs alliés communistes s’agacent.
L
a drague continue. Jean-
Luc Mélenchon et les siens
courtisent toujours Eva
Joly, alors qu’elle avait
marché à leurs côtés le 5 mai en fa-
veur d’une VIe République.
Dernière preuve d’amour: le
Parti de gauche (PG) lui a en-
voyé avant l’été une invitation à
participer à la rentrée politique du
Front de gauche, fin août à Greno-
ble. La proposition est pour l’ins-
tant restée sans réponse. Et l’en-
tourage d’Eva Joly fait mine de ne
pas être au courant… «Si Eva était
invitée, elle pourrait tout à fait y al-
ler», assure pourtant un de ses pro-
ches. Qui fixe les conditions: «Par
exemple pour parler réforme des re-
traites. Mais si c’est pour faire un pas
vers les européennes avec eux, Eva
n’en sera pas.»
RUMEUR. Alexis Corbière, lieute-
nant de Mélenchon, confirme l’ini-
tiative: «On aurait bien aimé qu’elle
y soit, elle est la bienvenue. Mais ce
serait un signe fort qu’elle n’a peut-
être pas envie de donner.» D’autant
plus fort qu’Europe Ecologie-les
Verts (EE-LV) fera sa rentrée au
même moment, à Marseille. Ses di-
rigeants enrageraient de voir les
caméras se braquer sur Grenoble.
Quant à Joly, elle ne souhaite pas
relancer les rumeurs, nées en mai,
d’un départ vers le Front de gau-
che. Dans la foulée de sa participa-
tion – contre les consignes
d’EE-LV – à la marche pour un
changement de République, cer-
tains l’annonçaient déjà sur une
liste commune avec Mélenchon aux
européennes. Avant que l’ex-ma-
gistrate ne riposte: «Je suis écolo-
giste, je suis une des fondatrices
d’Europe Ecologie, j’y suis, j’y reste.
Et je compte bien y peser.»
Mais la rumeur persiste et, au
siège du Parti communiste fran-
çais (PCF), on reste convaincu que
Mélenchon tente d’attirer l’ex-ma-
gistrate sur la liste Front de gau-
che (FG) en Ile-de-France. Manière
de prouver son attractivité avec une
belle prise. «C’est du pipeau», sou-
tient-on chez Joly. «Je n’ai jamais
discuté des européennes avec
[son] entourage», jure de son
côté Eric Coquerel, négocia-
teur en chef du PG. Reste qu’au sein
du Front de gauche, les communis-
tes s’agacent du gringue fait par
leur allié à Joly l’écologiste. Avec
d’autres composantes du Front de
gauche, ils ont clairement dit niet
à une proposition faite avant l’été
par François Delapierre (PG): que
Joly et Mélenchon donnent chacun
une «conférence» lors des estivales
du mouvement. «En dehors des lea-
ders du Front de gauche, on ne pou-
vait pas avoir seulement Eva Joly,
justifie Marie-Pierre Vieu (PCF). Et
puis à un moment, il va falloir qu’elle
énonce comment et où elle poursuit
son parcours.» La camarade Joly est
priée de choisir son camp.
Sujet de débat au Front de gauche,
la candidate écolo de la dernière
présidentielle continue de ne pas
faire l’unanimité à EE-LV. Parmi les
dirigeants, ils seraient même nom-
breux à se féliciter de la voir quitter
le navire. «Comme pendant la prési-
dentielle, elle continue de courir der-
rière Mélenchon, alors que ce n’est
pas la ligne qu’attendent nos élec-
teurs», tacle Denis Baupin, vice-
président (EE-LV) de l’Assemblée
nationale. «Eva considère que si on
gouverne avec les socialistes, ce n’est
pas infamant de discuter avec le Front
de gauche», rétorque son entou-
rage. Depuis le 5 mai, les deux an-
ciens concurrents de 2012 sont res-
tés «en bons termes» et «en
contact» par textos. Pas suffisant
toutefois pour concrétiser l’hypo-
thèse d’un transfert. L’an dernier
dans Libération, Joly avait jugé Mé-
lenchon «terriblement séduisant»,
avant de souligner que EE-LV «pro-
pose davantage qu’une protestation».
Au finale, ce jeu de séduction ren-
force surtout le souhait de Joly de
verrouiller sa place sur une liste
EE-LV aux européennes. Elle a
prévu d’annoncer lors des journées
d’été qu’elle briguera un deuxième
mandat d’eurodéputée. «Sa place
est garantie», a déjà fait savoir
Jean-Vincent Placé,
qui ne fait pas partie
de ses fans. Car, mal-
gré ses 2% à la prési-
dentielle, Joly bénéfi-
cie toujours d’une
aura certaine auprès
des militants. Ses critiques chroni-
ques contre le gouvernement et les
socialistes restent appréciées d’une
base désabusée. Or, à quelques
mois d’un congrès où le numéro 1
du mouvement, Pascal Durand, et
la ministre Cécile Duflot veulent
rassembler le plus large possible,
personne ne compte écarter une
personnalité sur qui pourraient se
cristalliser les mécontentements
internes. «Si tu sors Eva, tu fous le
boxon», convient Yannick Jadot,
son camarade à Strasbourg. Même
Daniel Cohn-Bendit –critique avec
celle qu’il était allé chercher
en 2009– y est allé de sa mise en
garde: «Arrêtez vos conneries. Si
Eva veut y aller, elle est dans le dis-
positif.» En vue des européennes,
l’entourage de Duflot aurait préféré
voir Joly libérer sa deuxième place
en Ile-de-France pour placer en
tête de liste une Italienne franco-
phone: Monica Frassoni, coprési-
dente du Parti vert européen et ex-
patronne du groupe écologiste à
Strasbourg avec Cohn-Bendit.
DÎNER. Joly tient bon. Son club po-
litique lancé l’an dernier (#Engage-
ment) est certes au point mort,
mais elle débarquera à Marseille
avec un petit livre dans son carta-
ble. Titre de travail: «l’Europe,
l’écologie, notre combat conti-
nue». Elle doit intervenir sur les
questions méditerranéennes en
ouverture, le 22 août, puis répondre
le lendemain à l’invitation de Julien
Bayou et sa Nouvelle Ecole écolo-
giste, pour faire le bilan de la parti-
cipation verte au gouvernement.
Son équipe prépare aussi, pour la
rentrée, un dîner avec des repré-
sentants de la gauche du PS. His-
toire de montrer qu’elle ne discute
pas qu’avec Mélenchon. Et qu’elle
compte bien occuper toute sa place,
à la gauche des Verts.•
ParLILIANALEMAGNA
«Je suis écologiste, je suis
une des fondatrices d’Europe
Ecologie, j’y suis, j’y reste.»
EvaJolyaumoisdemai
RÉCIT
L’ÉTÉ À GAUCHE
w EE­LV Journées d’été
du 22 au 24 août à Marseille.
w Parti de gauche Remue­
méninges du 22 au 24 août
à Grenoble.
w Front de gauche Estivales
les 25 et 26 août à Grenoble.
w Parti socialiste Université
d’été à La Rochelle du 23 au
25 août.
REPÈRES
«[Mélenchon]
est allié au Parti
communiste [qui]
est pronucléaire,
proproductiviste et
pro-infrastructures.»
EvaJolyle12avril2012
àRue89
«Je ne vais pas
attendre que ce
gouvernement coure
à l’échec, je veux
qu’il change.»
EvaJolyle9mai
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
10 • FRANCE
AParis,lesbains-
douchesdeplus
enpluspopulaires
Gratuits
depuis 2000,
les thermes
publics sont
utilisés par
plus d’un
million de
Parisiens:
SDF, mais
aussi
retraités,
étudiants,
salariés…
ParJUSTINERIGHO
PhotosRENAUDBOUCHEZ
O
n les croyait disparus ou
transformés en mythique
boîte de nuit, les bains-dou-
ches parisiens tournent à
plein régime. Avec plus d’un million de
passages, ils arrivent à saturation et
sont confrontés à l’affluence de nou-
veaux précaires.
«Ils sont étudiants,
retraités et même sa-
lariés», explique un employé municipal.
A l’instar de Karim. «Je connais tous les
horaires des bains-douches de la ville.
Dans ma sacoche, j’ai du shampooing, du
gel douche, une brosse à dent, un rasoir et
du dentifrice», explique ce travailleur
qui se douche quatre fois par semaine
dans un établissement de sa rue.
MOUSSE. Créés à la fin du XIXe siècle
pour faciliter l’accès à l’hygiène, les
bains-douches se multiplient dans les
années 30. C’est le cas de ceux de Bu-
zenval (XXe), construits en 1927 dans
un quartier populaire. A cette période,
la ville implante des salles de bains
communes pour permettre aux Pari-
siens de se laver. Après-guerre, les dou-
ches municipales se vident progressive-
ment avec l’amélioration de l’habitat
pour décliner à 300000 entrées à la fin
des années 90. En mars 2000, la mairie
de Paris décide d’en rendre l’accès gra-
tuit, notamment pour améliorer l’hy-
giène des plus démunis. Trois ans plus
tard, le cap du million de douches est
franchi. Et la tendance perdure.
Un vendredi après-midi, Paris Ve. A
quelques mètres des terrasses bondées
de la place de la Contrescarpe, ils sont
nombreux à converger au 50, rue
Lacépède, un sac plastique à la main
contenant une serviette et du savon. «Je
viens aux bains-douches trois fois par se-
maine», indique Henri, 48 ans, installé
devant l’un des quatre lavabos, un ra-
soir à la main. En arrivant, il a posé ses
affaires dans la cabine numéro 13. Il l’a
nettoyée à l’aide d’un jet à forte pres-
sion, puis a sorti sa mousse à raser.
«J’aime venir ici, c’est comme un culte,
une église, cela m’aide. Et puis moi j’aime
les gens!» clame d’une voix grave ce
grand gaillard. Chez lui, à Vitry-sur-
Seine (Val-de-Marne), il n’a pas d’eau
chaude, car «cela coûte trop cher».
Après s’être lavé, Danana(1), 36 ans,
glane quelques renseignements. «C’est
la première fois que je viens», annonce-
t-il, souriant. Arrivé de Lyon pour
signer un CDD de six mois, ce maître-
nageur s’est retrouvé subitement sans
logement. «Je devais récupérer l’appar-
tement d’un ami, mais cela ne s’est pas
fait. En attendant, je dors dans ma voi-
ture. […] Je ne suis pas désocialisé, donc
mentalement c’est facile à avaler.» Carte
de l’Ile-de-France en mains, il grimpe
sur son vélo pour rejoindre sa voiture,
à 14 kilomètres de là.
Un samedi midi, dans le XIXe arrondis-
sement. «Inch’Allah! Un jour peut-être,
j’aurais une douche chez moi», espère
Halima, après s’être lavée dans l’une
des 49 douches de la rue de Meaux.
«Cela fait onze ans que je viens ici.»
Construit dans les années 70, en pé-
riode d’immigration, cet établissement
accueille plus de 100000 visiteurs cha-
que année, dont 10% à 15% de femmes.
Sous le numéro de cabine, un large bout
de scotch permet à l’agent d’inscrire à
la craie l’heure d’entrée. «Normalement,
c’est vingt minutes. Mais quand on peut,
on leur laisse plus de temps», indique
Marc Albéri. Agent rue de Meaux depuis
six ans, il constate que la fréquentation
des migrants évolue en fonction de la
«proximité des conflits. Au moment du
printemps arabe, il y avait plus de Tuni-
siens. Et aujourd’hui, il y a davantage de
Maliens».
SQUAT. Un dimanche matin, dans le
XXe arrondissement. Aux magnifiques
bains-douches des Haies à la façade
classée, un groupe de cinq Maliens finit
de se préparer. Devant la glace depuis
dix bonnes minutes, la tête sous le sé-
choir, un peigne à la main, Oumar,
20 ans, se coiffe avec application.
Autour de son poignet, un
bracelet aux couleurs de
l’Italie, d’où il vient d’arri-
ver. Pour l’heure, il dort à
Montry (Seine-et-Marne),
dans un squat «sans eau et
sans électricité»,
avec 80 personnes. «J’ai honte et ne sais
pas quoi faire pour m’en sortir», s’in-
quiète celui qui a quitté ses études à
cause des troubles dans son pays. «Je
veux apprendre le français», jure-t-il
dans un italien impeccable. A la sortie,
ses colocataires ne l’ont pas attendu. Il
est midi. Les grilles se ferment derrière
lui. «Je dois aller à Pyrénées, indique le
chef d’établissement à l’un de ses
agents. Ils ont cassé la vitre de la porte
d’entrée, car on ne les a pas laissés se
doucher.»•
(1) Son prénom a été modifié à sa demande.
«J’aime venir ici, c’est comme
un culte, une église, cela m’aide.
Et puis, moi, j’aime les gens!»
Henri48ans
REPORTAGE
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
FRANCE • 11
Aux bains­douches
de la rue des Haies, dans
le XXe arrondissement
de Paris, en mai.
L’établissement a été
construit en 1927.
Il accueille aujourd’hui
aussi bien des habitués
que des migrants fuyant
des conflits.
REPÈRES
17C’est le nombre de bains­douches que
compte la ville de Paris. A la fin de l’année,
la mairie devrait rouvrir un établissement
rue Rocher, dans le VIIIe arrondissement.
«Nous avons un ancien militaire
qui continue de venir alors qu’il
a une salle de bains. Il a toujours
été habitué aux bains-douches
et préfère voir du monde
que d’être seul.»
MarcAlbériagentauxbains­douchesdelarue
deMeauxàParis(XIXe arrondissement)
1 km
PARIS Ier
IIe
IIIe
IVe
Ve
VIe
VIIe
VIIIe
IXe
Xe
XIe
XIIe
XIIIe
XIVe
XVe
XVIe
XVIIe
XVIIIe
XIXe
XXe
Bains-douches
de Paris
Créées à la fin du XIXe avec le mouve­
ment hygiéniste, les douches municipales
sont un service public venant s’ajouter aux
fontaines publiques et aux vespasiennes.
Payantes, elles se généralisent dans les
années 1920­1930, sont modernisées dans
les années 50, et ont tendance à fermer
dans les années 80, mais sont encore un
service public dans des communes comme
Paris, Nantes, Rouen ou Clermont­Ferrand.
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
12 • FRANCEXPRESSO
U
n militaire de 23 ans, «proche
des idées de l’extrême droite ra-
dicale», selon le ministère de
l’Intérieur, a été déféré hier devant la
section antiterroriste du parquet de
Paris après quatre jours de garde à vue
dans les locaux de la Direction cen-
trale du renseignement intérieur
(DCRI). Interpellé sur la base aérienne
de Lyon-Mont Verdun le suspect
«avait projeté de tirer à l’arme à feu
contre une mosquée de la région lyon-
naise», indique le communiqué de la
Place Beauvau. Selon des sources pro-
ches de l’enquête, ce jeune soldat
aurait lancé, l’année dernière, un
cocktail Molotov sur la porte d’une
mosquée près de Bordeaux, ne faisant
que peu de dégâts et pas de victime.
Le ministre de l’Intérieur, Manuel
Valls, a félicité les agents de la DCRI
pour avoir «permis de mettre [le sus-
pect] préventivement à la disposition de
la justice et hors d’état de nuire». Et il
a réitéré «son engagement le plus résolu
à lutter contre toutes les violences s’ins-
pirant des idéologies les plus extrémistes
[…] qui ont pour seul objectif de propa-
ger un climat de haine. Aucune tolérance
ne sera admise.»
G
À CHAUD LE SUSPECT A ÉTÉ DÉFÉRÉ HIER DEVANT LES JUGES ANTITERRORISTES
UnsoldatauraitcibléunemosquéeàLyon
Le procureur de Marseille, Jean­Jacques Fagni, devant la presse hier. PHOTO BORIS HORVAT.AFP
L’
émotion était grande
hier en fin de journée
dans le centre de Mar-
seille, sur les lieux où un
homme de 22 ans a été poi-
gnardé vendredi. Une tren-
taine d’habitants et d’étu-
diants de la même école
(Euromed) que la victime se
sont recueillis dans le silence
en présence de Patrick Men-
nucci, le maire (PS) du sec-
teur. Le matin, Jérémie, ori-
ginaire des Vosges et venu en
vacances chez des amis, avait
succombé au coup de cou-
teau qu’il avait reçu la veille
en allant chercher une amie
à la gare Saint-Charles.
Samedi soir, un individu
d’une quarantaine d’années,
qui semble correspondre au
suspect repéré sur les images
des caméras de surveillance,
a été interpellé. D’après les
premiers éléments, il s’agi-
rait d’un SDF, connu des
services de police pour vols
et violences. Et souffrant
de troubles psychiatriques.
Dans un communiqué, le
ministre de l’Intérieur, Ma-
nuel Valls, évoque un indi-
vidu «manifestement et gra-
vement déséquilibré, qui fera
l’objet de soins psychiatriques
sans consentement».
L’auteur présumé de l’agres-
sion, qui se trouve dans un
état «très délirant», a été
examiné par un expert psy-
chiatre qui a ordonné son in-
ternement. L’arrestation de
ce marginal, qui s’est faite
sans difficulté, a été rendue
possible grâce aux recoupe-
ments faits entre l’enquête
de voisinage effectuée par les
policiers et les images de
vidéosurveillance.
L’agression de l’étudiant a eu
lieu vendredi soir, aux alen-
tours de 23 heures. Grave-
ment blessé à la gorge, il se
rend dans un bar situé boule-
vard d’Athènes et explique à
la gérante avoir été agressé,
avant de s’effondrer. Son
téléphone portable n’ayant
pas été retrouvé sur les lieux
de l’agression, les enquêteurs
n’ont pas écarté, dans un
premier temps, l’hypothèse
d’une rixe provoquée par le
vol du téléphone. Selon une
source proche de l’enquête,
l’homme interpellé, «qui ne
semble pas avoir pris cons-
cience de ses actes», est «bien
sûr» le suspect numéro 1,
«même s’il n’a pas pu être en-
tendu», en raison de son état.
A Marseille, la droite s’est
emparée de ce drame pour
relancer la polémique sur
l’insécurité dans la cité pho-
céenne. Pour le maire (UMP)
de Marseille, Jean-Claude
Gaudin, «cet acte de violence
[…] démontre la nécessité ab-
solue pour l’Etat d’augmenter
les effectifs et la présence poli-
cière dans les rues de la
deuxième ville de France». Le
ministre de l’Intérieur a, lui,
appelé tous les responsables
publics à la retenue, «afin
d’éviter les surenchères et
polémiques déplacées».
G.Li (avec AFP)
EtudianttuéàMarseille:
unsuspectinterné
MEURTRE L’agresseur présumé de Jérémie, 22 ans,
serait un SDF déséquilibré connu de la police.
L
a riposte du ministre de
la Défense, Jean-Yves
Le Drian, à l’enquête
consacrée par Libération le
9 août au Bugaled Breizh ne
s’est pas fait attendre. Dans
sa missive, le patron des mi-
litaires affirme que «tout a
été fait depuis l’ouverture de
l’enquête judiciaire pour faire
émerger la vérité dans cette
affaire tragique».
Le 15 janvier 2004, le chalu-
tier finistérien sombrait avec
cinq marins à son bord, pro-
bablement crocheté par un
sous-marin militaire partici-
pant à un exercice de l’Otan.
Mais, après presque dix ans
d’enquête, la justice s’apprê-
terait à rendre un non-lieu,
ce qui fait dire aux familles
des victimes que «les autori-
tés ont sciemment fait entrave
à la manifestation de la
vérité». Sur ce point, Jean-
Yves Le Drian précise «qu’à
chaque demande par la justice
de déclassification de docu-
ments classés “secret défense”
ou “confidentiel défense”, le
ministre se doit de solliciter
l’avis de la commission
consultative du secret de la dé-
fense nationale. Cette commis-
sion a émis à six reprises un
avis favorable à la déclassifica-
tion des documents réclamés
par les juges. Avis que nous
avons systématiquement sui-
vis», fait-il valoir. Mais cette
mise au point ne convainc
pas Dominique Tricaud, l’un
des avocats des parties civi-
les: «Il est aujourd’hui établi
que l’armée française a menti
en niant les manœuvres sous-
marines à proximité du lieu du
naufrage, en ne montrant aux
familles qu’un côté de l’épave
du “Bugaled Breizh” [celui où
l’on ne voit pas l’implosion
de la cale, ndlr], et en inven-
tant la fable d’un cargo voyou
reprise en chœur par les gou-
vernements successifs.»
A ce jour, le ministère n’a pas
accédéàlademandedespar-
ties civiles qui réclament la
déclassification des journaux
de bord de certains bâti-
ments en manœuvre au mo-
ment du naufrage, comme
l’aviso Commandant Blaison
ou la frégate Primauguet. Or,
ces journaux consignent tous
les mouvements observés au
cours de la navigation, que ce
soit en veille visuelle, radar
de surface ou en surveillance
sous-marine. D’où leur im-
portance cruciale.•
PROFANATION La façade
d’une petite salle de prière
musulmane de Lesparre-
Médoc (Gironde) a de nou-
veau été dégradée dans la
nuit de vendredi par des tags
de croix gammées. Elle avait
déjà fait l’objet, mardi, d’un
début d’incendie et d’ins-
criptions similaires.
ACCIDENT Un passager du
car, dont l’accident a fait
deux morts et une trentaine
de blessés, hier dans l’Aude,
a avoué avoir fait donner un
brusque coup de volant au
chauffeur. Pour une raison
indéterminée, cet Ukrainien
souhaitait qu’il s’arrête. Cinq
autres personnes sont mortes
sur la route, samedi près de
Carcassonne.
ÉCHANGES Matignon sera
le théâtre mercredi d’une
«conversation entre [le phi-
losophe] Marcel Gauchet
et le Premier ministre, en-
touré de ses conseillers», ont
annoncé samedi les services
de Jean-Marc Ayrault.
Aujourd’hui, une autre «con-
versation» est prévue, avec
une dizaine d’enfants.
ROUGE L’automobiliste dé-
cédée après une collision
avec un TGV, samedi soir sur
un passage à niveau en Sa-
voie, s’était engagée alors
que le feu de signalisation
était rouge. La femme d’une
trentaine d’années aurait
calé sur le passage à niveau
avant que les demi-barrières
ne se rabattent.
53%des Français sont oppo­
sés aux restrictions
à l’accès à la propriété sur
l’Ile de Beauté proposées
par Paul Giacobbi, prési­
dent du Conseil exécutif
de Corse, d’après un
sondage Ifop pour le JDD,
réalisé les 8 et 9 août.
«Je le dis à tout le monde:
il y a un Premier ministre,
la succession n’est pas
ouverte.» L’adresse est
venue hier dans le Journal
du dimanche de François
Rebsamen, le président
hollandais des sénateurs
socialistes. Le message
vaut pour le ministre du
Redressement productif,
Arnaud Montebourg, et le
président de l’Assemblée,
Claude Bartolone –qui se
retrouveront le 18 à Fran­
gy­en­Bresse (Saône­et­
Loire)–, mais aussi pour le
locataire de la place Beau­
vau, Manuel Valls. Ce der­
nier «sait être au service de
sa popularité», une
méthode qui «lui réussit
plutôt bien», juge le maire
de Dijon, qui se serait bien
vu premier flic de France.
Sur l’exercice du pouvoir,
Rebsamen a regretté qu’il y
ait «par moments une ges­
tion trop technocratique»,
appelant l’exécutif à
s’appuyer davantage sur
les parlementaires. Et
enjoint les ministres et le
PS à faire la pédagogie de
l’action engagée, soutenant
que le chef de l’Etat, lui, «a
fait ce devoir d’explica­
tion». PHOTO REUTERS
REBSAMEN
DÉFEND AYRAULT
ET TACLE VALLS
LES GENS«C’est une information bidon.
[…] Visiblement, certains n’ont pas
attendu le 15 août pour terminer la trêve,
certaines petites manœuvres
mesquines commencent.»
JulienDrayvice­présidentduconseilgénérald’Ile­de­
France,réfutantsurlesiteLelab.europe1.frqueFrançois
Hollandeluiaitproposéd’êtretêtedelisteauxeuropéennes,
commel’affirmaithierleJournaldudimanche
ParWILLYLEDEVIN
«BugaledBreizh»:
justeunemiseaupoint
DROIT DE SUITE
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
AprèslacatastrophedeDacca,
lacasseouvrièrecontinue
Depuis l’effondrement au Bangladesh de l’immeuble du Rana Plaza, l’absence
de prise en charge des employés rescapés est dénoncée dans un rapport.
S
elon un think tank bangla-
dais indépendant, 750 em-
ployés du Rana Plaza n’ont
toujours pas reçu d’indem-
nisation, plus de cent jours après
l’effondrement de cet immeuble
dans la banlieue de Dacca qui a fait
1131 morts le 24 avril.
«Ils n’ont plus de travail, pas d’ar-
gent. Ils sont dans une situation mi-
sérable», dénonce Kalpona Akhter,
une activiste. Pire: le syndicat des
patrons du textile, le BGMEA (1),
est incapable d’identifier les em-
ployés présents le jour du drame. Il
parle de 2760 person-
nes. En réalité, il s’agi-
rait plutôt de 3900. En
publiant ces données dans un rap-
port du 3 août, le Centre pour un
dialogue politique (CPD) a fustigé
le «manque de stratégie» du gou-
vernement et du patronat.
La situation est grave: certains
blessés ne peuvent pas payer leur
traitement médical, des familles
sont sans ressources car elles n’ont
pas retrouvé d’emploi. Les em-
ployeurs n’ont pas réglé l’intégra-
lité des salaires, ni des heures sup-
plémentaires (pour 60 heures de
travail par semaine, payées 30 à
80 euros par mois), ni les indemni-
tés de licenciement ou les assuran-
ces décès (1000 euros par mort). Et
tous les ouvriers ne bénéficiaient
pas d’assurances…
CERCLE VICIEUX. La confédération
syndicale IndustriALL chiffre les
besoins d’indemnisation à 54 mil-
lions d’euros, bien plus que ce que
le textile bangladais est prêt à
payer. Syndicats et ONG tentent
donc d’impliquer les marques occi-
dentales qui s’approvisionnent au
Bangladesh. Mais peu d’entre elles
ont accepté. Une réunion est pré-
vue en septembre à Genève pour les
inciter à participer.
En juillet, les groupes occidentaux
ont passé deux accords séparés
(80 européens d’un côté, plus le ja-
ponais Uniqlo depuis jeudi, et
17 nord-américains de l’autre) pour
améliorer la sécurité dans les usines
bangladaises qui les fournissent et
financer des travaux de rénova-
tion. Mais l’accord américain reste
non contraignant.
Et comment répertorier des usines
qui bourgeonnent sans aucun con-
trôle? Comment les superviser
avec seulement 51 inspecteurs pour
6000 entreprises (200 supplémen-
taires doivent être embauchés d’ici
la fin de l’année)? Comment s’as-
surer que les travaux sont réalisés?
Autre problème: à chaque accident,
le pays annonce des mesures qui
n’entrent jamais en vigueur, faute
de contrôles. Comment sortir du
cercle vicieux? Le CPD réclame
«un plan concret, des responsabilités
bien établies, un échéancier précis»,
ainsi que de la transparence, un
code de conduite et des organes in-
dépendants de contrôle.
Mais rien de tel n’existe dans ce
pays gangrené par la corruption.
Mêmes inquiétudes pour le statut
des syndicats. Sur 5000, seules
quelques dizaines d’usines textiles
en ont. La loi a légèrement changé
mi-juillet. Jusqu’ici, le patron était
prévenu quand un employé se syn-
diquait: le harcèlement commen-
çait alors, jusqu’au licenciement.
Cette clause a été supprimée mais,
selon la militante Kalpona Akhter,
«ça ne signifie pas que les tra-
vailleurs vont rejoindre les syndicats.
Dès qu’ils commencent à s’organiser,
les patrons les en empêchent. Il fau-
drait une protection des délégués.»
Le problème est plus
profond, déplore le
président du CPD, Re-
hman Sobhan: «Pour
que nous soyons com-
pétitifs, il faut que les
employés n’aient aucun
droit, qu’on puisse les licencier sans
problème. C’est la flexibilité qui nous
permet d’être compétitifs.» Le Rana
Plaza a tragiquement illustré les
conséquences d’un manque de
syndicats. «Au matin de la tragédie,
déclare Sobhan, la pression a été
mise sur les travailleurs qui refusaient
d’entrer [l’immeuble présentait des
fissures, ndlr]: “Si vous n’y allez
pas, vous perdrez votre job.” “Quel
choix avais-je? ont dit les employés.
Si je n’entre pas, qui va nourrir mes
enfants, qui va payer leurs études?”
Si ces ouvriers avaient fait partie d’un
syndicat, aucun employeur n’aurait
pu les obliger à risquer leurs vies.»
«SERMONS». Kalpona Akhter note
néanmoins que «l’on voit main-
tenant certains employés refuser
d’entrer dans leur usine tant que la
sécurité n’est pas améliorée». Un
petit progrès…
Mais pour Sobhan, la tragédie per-
pétuelle du Bangladesh tient à cette
«relation inégale de travail» entre
employeurs et ouvriers: «C’est un
problème systémique. Il n’y a pas de
gouvernance dans ce pays capable de
réguler la situation. La seule régula-
tion, c’est le marché.» Et l’enjeu
n’est pas circonscrit au Bangla-
desh, ajoute Sobhan. «On va avoir
des sermons de nos partenaires :
“Vous devez faire ceci et cela.” Mais
comme la concurrence va se poursui-
vre, Wal-Mart et les autres cherche-
ront toujours les fournisseurs les
moins chers car les clients occiden-
taux regardent surtout le prix.»
Le tee-shirt acheté 5 dollars au
Bangladesh «sera toujours vendu 25
à New York». Il faut donc, selon lui,
«exiger des grandes marques qu’elles
rendent des comptes sur les richesses
que créent nos productions». Ce
n’est pas gagné.•
(1) Bangladesh Garment
Manufacturers and Exporters
Association.
ParMICHELHENRY
«Il n’y a pas de gouvernance
capable de réguler la situation. La
seule régulation, c’est le marché.»
RehmanSobhanprésidentduthinktankCPD
RÉCIT
Akhi, une ouvrière du Rana Plaza, faisait toujours partie des portés disparus le 24 mai, un mois après l’écroulement du bâtiment. PHOTO TASLIMA AKHTER
2000C’est le nombre de personnes
mortes au Bangladesh dans des
incendies ayant frappé des usi­
nes textiles depuis dix ans, selon
le rapport du think tank CPD.
BANGLADESH
Golfe du Bengale
BIRMANIE
INDE
INDE
100 km
Dacca
REPÈRES «Un grand nombre
d’usines textiles
fonctionnent en dehors
des lois et en toute
impunité.»
LethinktankCPD
danssonrapportdu3août
332victimes du Rana Plaza sont
toujours portées manquantes.
On a enterré 234 cadavres
non identifiés. Des tests ADN
sont en cours.
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
ECONOMIE
• 13
[OULAISSEZ-LE...] A.CHANGEMENTD’ADRESSE B.SUSPENSIONÉTÉ
A NOUS RENVOYER UNE DIZAINE DE JOURS
AVANT VOTRE DÉPART
A.MERCI DE NOTER MON ADRESSE DEVACANCES
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[si vous le connaissez]
MESSAGE RÉSERVÉ À NOS ABONNÉS
N
on, Pierre Moscovici
n’a pas revu à la
baisse, a-t-il martelé
hier sur RTL, la prévision de
croissance pour 2013. Oui, le
ministre de Finances a bien
assuré, la veille dans Nice-
Matin, que la «croissance sera
faible, voire étale, entre -0,1
et +0,1». Or, jusque-là, le
gouvernement Ayrault ta-
blait sur un mini-rebond
de 0,1% du PIB.
Le locataire de Bercy laisse
donc entendre que cette
prévision, qui sera affinée
le 25 septembre lors de la
présentation de la loi de fi-
nance, tient de la fourchette
haute. Et que le rebond es-
péré a plus des allures de
wishful thinking – vœu
pieux– que de réalité écono-
mique. A force de vanter les
signes de convalescence, ce
n’est plus de l’équilibrisme
auquel se livrent les autorités
françaises, c’est du funam-
bulisme. «Il y a au moins un
consensus pour dire que tout
cela ne sera pas terrible, note
un économiste. Moins 0,1 ou
+ 0,1, cela ne change pas
grand-chose à l’arrivée: cela
reste pathétiquement mau-
vais».
Mais ne pas terminer l’année
sur une note récessive tient,
pour l’exécutif, de l’impéra-
tif. «Il y a quelque chose qui se
passe», avait ainsi martelé
mardi François Hollande,
dans la foulée de son allocu-
tion du 14 Juillet, où il avait
tablé sur la «reprise» de
l’économie. Ce volontarisme
avait pris de court Moscovici
qui avait dû assurer, dans la
foulée, que la France était
«sortie de récession».
Sortie de la récession, peut-
être (après avoir reculé au
dernier trimestre 2012 et au
premier trimestre 2013): le
PIB devrait croître à nouveau
au troisième trimestre, selon
la Banque de France. Mais de
là à claironner le retour de la
croissance, il y a de la marge.
Ou de l’incantation.
Reste l’aveu, par le locataire
de Bercy, de l’augmentation
de 0,3% des prélèvements
obligatoires pour le bud-
get 2014. «Une hausse limitée,
toujours dans la justice so-
ciale», plaide Pierre Mosco-
vici. «Une erreur majeure,
s’étrangle Gilles Carrez, pré-
sident de la commission des
finances de l’Assemblée na-
tionale. Comment voulez-vous
que la consommation reparte
si le pouvoir d’achat des mé-
nages, en particulier des clas-
ses moyennes, est encore altéré
par une hausse de CSG pour le
financement de la réforme des
retraites?»
Samedi, François Bayrou,
président du Modem, avait
rappelé que la chute de
la production industrielle
(-1,4% en juin par rapport à
mai) et la hausse du déficit
de l’Etat (+2,6 milliards fin
juin sur un an) démentaient
«l’optimiste affiché par le
pouvoir».
CHRISTIAN LOSSON
«Sortiederécession»:
l’œilde«Mosco»
CROISSANCE Les prévisions du ministre des Finances,
fluctuantes, tiennent de la méthode Coué.
L’Agence internationale de l’énergie
(AIE) réduit légèrement ses prévisions
de croissance de la demande mon-
diale de pétrole pour cette année et
la suivante. Pour 2013, l’AIE table
désormais sur une hausse de
895000 barils par jour de la demande
planétaire d’or noir, à 90,8 millions,
alors qu’elle prévoyait une augmenta-
tion de 930000 en juillet, détaille-t-
elle dans son rapport mensuel sur le
marché pétrolier. Et pour 2014, elle
continue à tabler sur une accélération
de la demande, qui devrait toujours
atteindre un nouveau sommet à
92 millions de barils par jour, mais un
peu moins forte qu’auparavant. Elle
estime désormais la croissance de la
consommation de brut à 1,1 million de
barils par jour en moyenne, contre
1,2 million précédemment. L’agence
a justifié ce léger abaissement par la
révision à la baisse des prévisions de
conjoncture du Fonds monétaire in-
ternational (FMI). Cette année, le FMI
ne prévoit plus qu’une croissance de
l’économie mondiale de 3,1% (ali-
mentée par les pays émergents), con-
tre 3,3% en avril, et de 3,8% en 2014,
au lieu de 4%.
G
À CHAUD LES PRÉVISIONS DE DEMANDE DE PÉTROLE SONT À LA BAISSE
Laplanètemoinsgourmandeenornoir
ParPHILIPPEBROCHEN
DesproduitsSamsung
boutéshorsdesEtats-Unis
L
a guerre des brevets en-
tre Apple et Samsung,
les deux leaders mon-
diaux des smartphones et ta-
blettes, ne connaît pas de
trêve estivale. La marque à la
pomme a obtenu vendredi
l’interdiction de vente aux
Etats-Unis d’appareils mobi-
les de son rival sud-coréen,
qu’il accuse de violer ses bre-
vets. La décision a été prise
par la Commission améri-
caine du commerce interna-
tional (USITC). Il y a une se-
maine, la Maison Blanche
avait cassé une décision si-
milaire prise par l’USITC à la
demande de Samsung contre
les iPhone 3GS, 4, 4S et cer-
tains iPad.
Que reproche Apple
à Samsung?
La firme de Cupertino avait
déposé plainte contre la
firme sud-coréenne en
août 2011, car elle estimait
que certains smartphones et
tablettes de son concurrent
copiaient des fonctionnalités
de ses iPhone et iPad.
L’USITC a jugé des violations
avérées pour deux brevets.
Elles portent sur des techno-
logies liées aux écrans tacti-
les et à la détection d’acces-
soires comme les écouteurs.
Apple n’a toutefois pas gagné
sur toute la ligne: l’USITC a
rejeté ses accusations contre
Samsung pour quatre autres
brevets. Deux portaient sur
la forme des appareils, et no-
tamment les coins arrondis
qui caractérisent les iPhone
et les iPad.
Quelles conséquences
pour le sud­coréen?
Samsung Electronics Ame-
rica et Samsung Telecommu-
nications America sont inter-
dits «de continuer à importer,
vendre et distribuer des articles
qui enfreignent» ces deux
brevets. La décision n’indi-
que toutefois pas quels sont
les appareils concernés. Mais
selon des sites américains,
les produits en cause seraient
ses produits phares: les Ga-
laxy S4G, Fascinate, Capti-
vate, Galaxy Tab et Galaxy
Tab 10.1, ainsi que des smart-
phones et tablettes commer-
cialisés en 2010 et 2011. Le
groupe sud-coréen a laissé
entendre que la portée de
cette décision serait limitée.
Les produits cesseront­ils
d’être vendus?
La décision de l’USITC ne
prendra effet qu’après l’ex-
piration d’un délai de deux
mois durant lequel Obama
peut opposer son veto.
Washington y a eu recours la
semaine dernière pour la
première fois depuis 1987 en
faveur d’Apple. Une décision
interprétée comme du pro-
tectionnisme par Séoul.•
DÉCRYPTAGE
La banque centrale
allemande l’assurerait:
la Grèce aura besoin
début 2014 d’un nouveau
soutien financier, selon
Der Spiegel hier, citant
un document de la
Bundesbank. Une fuite qui
pourrait relancer le débat
sur l’attitude de la chance­
lière Angela Merkel, notam­
ment soupçonnée par Peer
Steinbrück, leader du parti
social­démocrate, de mini­
miser la situation financière
de la Grèce pour ne pas
compromettre ses chances
de remporter les élections
du 22 septembre. Athènes
a déjà utilisé 90% des
240 milliards d’euros
d’aides promises…
QUERELLE
OUTRE­RHIN
SUR LA GRÈCE
L’HISTOIRE
NUCLÉAIRE Tepco, qui ex-
ploite la centrale de
Fukushima, a commencé à
pomper de l’eau souterraine
radioactive pour tenter de
réduire les rejets dans
l’océan Pacifique.
ALIMENTATION Les produc-
teurs d’œufs bretons sus-
pendent leurs actions dans
l’attente d’une réunion avec
le préfet. Ils avaient détruit
des œufs pour protester con-
tre la faiblesse des cours.
«Thorasoumis
uneoffreàplus
de1,18milliardde
dollars[885millions
d’euros,ndlr]
àEmpireState
BuildingAssociates.»
JasonMeisterdufonds
d’investissement
enimmobilier
LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 201314 • ECONOMIEXPRESSO
LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr
ET SI RAËL AVAIT RÉUSSI
LA PHOTOCOPIE HUMAINE
Untasde
clonesrit
REWIND Cet été, «Libération» transforme l’Histoire en fictions.
Reportage en 2047 au grand raout des clones de France.
C
omme chaque année, le
Clone Fest pose aujourd’hui
ses quartiers au parc naturel
du Gâtinais français
(Essonne). Le rendez-vous, instauré
en 2020, rassemble ceux qui se ressem-
blent, nés depuis 2002 grâce aux
200271973 2013
L’ÉTÉDES40ANS
ParÉRICLORETetGUILLAUMETION
EnvoyésspéciauxauparcduGâtinais(Essonne)
PHOTOJULIEGUICHES.PICTURETANK
II • 20027
LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr
efforts de la société Clonaid. Trois
jours de partage en partenariat avec les
associations 130 Millions d’Amis et Tel
quel, mais aussi de débat, car tous ne
sont pas amoureux de l’uniforme: quel-
ques associations de dissidents, on le
sait, souhaitent «rétablir les différen-
ces». Pour mieux connaître leur quoti-
dien, nous avons interrogé cinq clones
de Francis, 65 ans, retraité de la marine.
Ils ont entre 21 et 44 ans, sont ensei-
gnant ou sociologue et ont traversé la
vie dans l’ombre de leur modèle ou,
comme ils disent, leur «numéro 1».
«J’étais un peu
leur maman»
Fransix 44 ans, gardien de prison
«Dans les cloneries [fratries de clones,
ndlr], ce qui est primordial, c’est le ran-
gement. Sans ça, on n’arrive à rien. Par
exemple, 20 personnes qui cherchent
leur deuxième chaussette dans le même
dortoir, c’est pas possible. C’est un mo-
tif d’éradication. Pour la première cam-
pagne de clonage de Francis, on était
apparus une douzaine. Dès 3 ans, cha-
cun avait son rôle, par exemple, pour
Francys, c’était les organes (lire ci-
après); pour Francisse les actes admi-
nistratifs; pour moi c’était l’inten-
dance. Je devais m’occuper des onze
autres. J’étais un peu leur maman, et
avec moi, c’était carré.
«J’ai eu une enfance plutôt agréable car
on ne me demandait pas d’être bon en
classe ou de servir d’esclave sexuel. Tant
que j’arrivais à finir mes lessives, mon
repassage, mon ménage et les courses,
après avoir préparé le repas, mis la table
et l’avoir débarrassée, fait un peu de
vaisselle et rangé la maison, j’étais tran-
quille jusqu’au petit déj du lendemain.
J’avais pas à me plaindre.
«Ensuite, je me suis occupé des clones
des onze autres campagnes. Mais c’était
pas pareil, on avait des problèmes de
place, on a dû s’entasser dans des gar-
de-meubles. J’avais comme une im-
pression de déjà-vu. Et puis on était
trop différents. En âge, je veux dire.
Autant j’étais proche de mes premiers
frères, que je pouvais reconnaître à
l’odeur, autant ceux-là, j’étais infoutu
de retenir ne serait-ce que leur prénom.
Il y a eu des moments difficiles, c’est
vrai, mais comme dans toutes les fa-
milles de 145 personnes. Le pire, je
crois, c’est le jour de l’anniversaire, ou
celui du départ en vacances. L’impor-
tant dans ces cas-là, c’est de rester uni,
soudé. Une équipe.»
«Putes à volonté, buffet
gratuit soir et midi»
Francys 28 ans, enseignant
«Vous savez, on s’habitue. Chaque
Clone Fest, c’est peut-être le dernier.
On est une trentaine, je crois, à servir
de réservoir d’organes pour Francis. Et
Francis, son truc, c’est la picole. Il y a
des gens qui clopent, bon, on peut leur
changer un poumon et même avec un
seul poumon, son clone survit. Ou
un seul rein. Mais le foie, une fois qu’on
me l’aura enlevé pour l’autogreffer
à Francis, à la poubelle le Francys.
C’est le progrès : Francis va mourir
Depuis 2020,
le Clone Fest
rassemble ceux
qui se
ressemblent
grâce aux efforts
de la société
Clonaid. PHOTO
JULIE GUICHES.
PICTURETANK
• III20027
LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr
POUR DE VRAI
1997 Messager des Elohim («nos
créateurs») depuis 1973, Claude
Vorilhon dit Raël fonde Clonaid,
société promeuvant l’éternité
par le clonage.
2000 Raël abandonne la
direction de Clonaid à Brigitte
Boisselier, ex­chimiste à
Air Liquide et guide­évêque
raélienne.
26 décembre 2002 Naissance
annoncée, depuis la Floride, par
Brigitte Boisselier, d’Eve, premier
bébé cloné par sa société.
Janvier 2003 Après avoir
annoncé des preuves ADN du
clonage d’Eve (que personne n’a
jamais vue), Boisselier explique
que les parents du bébé ne sont
plus très chauds pour le test
génétique.
13 janvier 2003 Le tribunal de
Fort Lauderdale en Floride
entame une procédure judiciaire
contre Thomas Kaenzig, vice­
président de la société Clonaid.
2013 Le clonage humain
reproductif n’a toujours pas été
réalisé.
beurré comme un Petit Lu sans jamais
avoir frôlé la cirrhose. Moi, en re-
vanche…
«Bon, il y a des compensations. Putes
à volonté, buffet gratuit soir et midi.
J’ai de la chance, pour les filles, Francis
a passé un deal avec une boîte russe,
c’est de la qualité. Des clones de la
même fille tous les week-ends, pour
la sentimentalité, et des produits dif-
férents tous les soirs de semaine.
Côté bouffe, rien que du bio et du
diététique, afin d’éviter qu’on meure
d’obésité avant d’avoir livré nos
organes.
«Comme tous les CPM [clones précoce-
ment mortels, ndlr], j’ai eu à choisir un
métier en rapport avec mon savoir in-
time de la mortalité. Les pompes funè-
bres ou légiste, ça ne me disait trop
rien. J’ai fait dans la facilité. Prof de
philo. Apprendre à mourir, la révolte,
l’être, tout ça. Mais cette année, je pré-
pare des Immortels aux grandes écoles
de communication. C’est la première
fois, ça me plaît bien. Je leur fais les
œuvres complètes d’Alan Harrington
et Michel Houellebecq en extraits. Là,
j’en suis au développement créatif
comme passe-temps pour l’éternité, ça
a l’air d’accrocher. Ils ont une disserta-
tion à rendre pour l’an prochain :
“Peut-on créer continûment sans deve-
nir Dieu?” J’espère ne pas passer par la
case morgue avant d’avoir fini le pro-
gramme…»
«Même les vaches
ont des taches»
Phrancis 21 ans, sans emploi
«Je suis là mais en fait je ne suis pas là.
J’ai pas le droit d’être là. S’ils me trou-
vent ici, ils me rectifient d’emblée, s’il
vous plaît notez que je ne suis pas là…
[A la demande de Phrancis, son prénom
a été modifié, ndlr.] Tout petit, j’ai com-
mencé à me demander pourquoi on
était autant à se ressembler. Quel inté-
rêt de recouvrir la planète de personnes
identiques, sans signe distinctif. C’est
vrai, ça, même les vaches ont des ta-
ches. Et puis j’ai compris.
«Revenez dans deux cents ans, et vous
ne trouverez plus qu’une dizaine de fa-
milles qui peupleront la Terre. Le clo-
nage thérapeutique, c’est du flan. Parce
que le but, c’est pas de soigner, c’est de
sélectionner les élus qui feront partie du
grand shebaz, le voyage cosmique pour
retrouver nos ancêtres Elohim. C’est ça
la vérité, c’est aussi pour ça que le Clone
Fest est organisé, pour qu’on ne se
perde pas de vue. Les affiches du conseil
général de l’Essonne, le barbecue à
14 heures, je veux bien, mais c’est une
couverture. L’essentiel, c’est les yeux,
regardez… Je te vois, tu me vois, on se
comprend. Tu vois?
«Raël, pour moi, c’est le seul qui peut
nous sauver, il va briser le miroir. J’ai
un contact avec lui. Tous les jours,
il vient me voir, avec son manteau
blanc il entre dans ma chambre, me de-
mande si je vais bien, il prend soin de
moi. Je sais qu’il sait que nous savons
qu’ils savent. C’est pour ça que les cho-
ses vont changer, ça va être différent,
avec des différences. (Il crie) Des diffé-
rences ! Après le barbecue, vous
verrez… (Il est soudain ceinturé par des
membres de la sécurité.)»
«On veut un enfant
non né»
Francisse 39 ans, employé
«C’est en visitant la mère de Francis
que j’ai rencontré Polyne. Une fille
sympa. Je ne peux pas me plaindre.
D’ailleurs, Francis est plutôt cool avec
moi. Je fais la queue à la poste, aux As-
sédic, aux expos du Grand Palais, c’est
moi qui cause aux garçons de café, évi-
demment je travaille à sa place, bref
tout le sale boulot, mais Francis aime
bien se garder quelques activités. Par
exemple, il bosse en été, pour mater les
filles en jupettes et sandales. Pendant ce
temps, je me repose. Là, c’est un peu
pareil. Je vais voir sa mère tous les di-
manches à sa place, mais Francis ne dit
rien, rapport à mon histoire avec Po-
lyne; tant que je fais la conversation
avec sa daronne, que je lui apporte des
chocolats, que je supporte ses chanta-
ges au suicide… Polyne, c’est le clone 78
de la mère de Francis. Elle a 33 ans, elle
est coiffeuse. On l’a fabriquée à l’épo-
que où l’on croyait que Pauline, sa nu-
méro 1, avait un don de divination et
que ça pourrait servir d’en avoir plu-
sieurs en cas de guerre, de canicule, de
pénurie de lolcats… On s’est aperçu trop
tard que Pauline n’avait aucun don. Elle
se contentait d’écouter les voisins à tra-
vers la cloison et de leur prédire ce
qu’elle avait entendu.
«Avec Polyne, je crois qu’on s’aime
vraiment. On envisage de déposer une
demande de stérilisation, afin d’être
sûrs que notre enfant sera unique puis-
que non né. Vous savez, être clone, c’est
parfois dur. Je vois mon pote Rayanne,
que son numéro 1 utilise pour pratiquer
l’autofellation, c’est pas top glamour.»
«Un moyen efficace de
s’épanouir en société»
Francyx 41 ans, sociologue
«Dès 2005, le clonage a d’abord été une
préoccupation des couples homo-
sexuels, qui y voyaient un moyen sim-
ple d’avoir des enfants, avant les lois sur
l’adoption ou la PMA. Il y a eu les dé-
bordements que l’on sait dans les cou-
ples gays, chacun des partenaires se
trouvant plus beau que l’autre et insis-
tant pour que leur fils soit à son image.
Chez les lesbiennes, à l’inverse, cha-
cune voulait que la fille du couple soit
le clone de sa partenaire. Assez vite,
beaucoup de couples d’hommes se sont
séparés. Chacun trouvait plus avanta-
geux de vivre avec son seul clone que de
supporter les humeurs d’un partenaire
qui n’était, de fait, qu’une copie impar-
faite de lui-même.
«Mais la fracture décisive dans l’évolu-
tion du clonage remonte à l’affaire des
Grotowsky [en 2021, Boris Grotowksky a
épousé le clone, alors âgé de 17 ans, de sa
mère, clone qui a ensuite voulu se marier
avec le clone d’un des jumeaux qu’elle
avait eus avec Grotowsky, ndlr], qui, bien
que ressortissant davantage à la psy-
chiatrie, a eu des conséquences juridi-
ques énormes, notamment la loi de dé-
cembre 2024 sur l’encadrement marital
des clones, qui deviendra deux ans plus
tard la loi sur l’encadrement sexuel.
«Aujourd’hui, le clonage reste un
moyen efficace pour s’épanouir en so-
ciété, c’est-à-dire en restant chez soi
pendant que vos clones vous représen-
tent au dehors. Il n’a plus, de par son
encadrement juridique –et même, ne
nous voilons pas la face, par une cer-
taine lassitude de ses plus fervents sup-
porteurs– cet attrait de l’interdit gé-
mellaire et de la quête sexuelle
infra-identitaire qu’il a pu générer jadis.
Aujourd’hui, le “droit à la ressem-
blance”, c’est un truc de vieux.»•
Demain: Le rock n’est pas revenu
à la mode.
SurFranceInfojusqu’au24août
avec 40ANS
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Dulundiauvendredià9h15,lesamedià8h15etàréécoutersurfranceinfo.fr
LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr
VOUS PERMETTEZ?
Conceptstores,
duvideaubide
Une robe Alaïa, en jersey,
encolure carrée,
à 2600 euros, en vente
chez Colette? OK, on
ajoute au panier. Notre
petite entreprise ne
connaît pas la crise. Des
boucles d’oreilles «ailes»
en or blanc 18 carats, sertis
de diamants blancs et
diamants noirs, Elise Dray
à 11025 euros? Elles sont
nécessaires pour écrire, on
les fera passer en notes de
frais, tant pis pour les clips
qui pincent. La créatrice a
un «instinct artistique»,
«une énergie positive», elle
s’inspire de «son amour
pour les animaux», et «ses
idées bouillonnent», dit la
présentation. Tout comme
nous. Est-ce une chance ou
un pléonasme, d’être
ornée de son reflet? Et le
doudou? Doit-il
ressembler à l’enfant,
comme le chien à son
maître? Une marque
américaine de poupées
s’est posé cette question et
c’est une vision d’horreur
que de voir des milliers de
petites filles, Frankenstein
en goguette, choisir et
composer la poupée qui
leur ressemble le plus,
dans un espace rose,
immense, et sonore,
accompagnées d’un double
plus âgé toujours féminin,
et d’autant plus double
qu’il y a des miroirs. A
l’opposé, le concept store
Colette cultive la pièce
unique, la rareté, et, avec
elle, le manque. Concept
store? Et pourquoi pas
«marchand de couleurs»,
ou «tout à 10000 euros»?
En 2002, dans le sillage de
Colette, le concept store bat
son plein, et les boutiques
qui vendent du flan, «une
ambiance», et un peu de
soleil dans l’eau tiède,
prolifèrent. Déjà, une
dizaine d’années avant,
lors de la publication
de Qu’est-ce que la
philosophie? coécrit avec
Guattari, Deleuze
s’insurgeait que des
publicitaires s’octroient le
concept de concept, propre
à l’activité philosophique.
«C’est quoi le concept de ta
robe?» nous demande-t-
on, tandis qu’on boit de
l’eau dans le water bar de
Colette, après avoir humé
le luxe dans l’espoir et la
crainte d’être contaminée:
«un grand moment
d’émotion» comme disent
les rédactrices de mode
après les défilés. Les clients
de Colette «viennent de
toutes les provenances
sociales», c’est la
cofondatrice et directrice
artistique de la boutique
qui l’assure au magazine
Stratégie. En 2002,
cependant, coincées entre
l’éclatement de la bulle
boursière et le
11 Septembre, le luxe a
peur. Les ardeurs de la
consommation et le désir
de se distinguer
s’écrouleront-ils à leur
tour? Mais non. Tel James
Bond 007, ils ont été les
premiers à reprendre du
poil de la bête. Dans le
Nouveau Luxe, à paraître
en septembre chez Stock,
Yves Michaud explique:
«Entre 1995 et 2012, le
marché mondial du luxe est
passé de 77 milliards
d’euros à 212 milliards. Les
prévisions du cabinet Bain
and Co, spécialisé dans
l’analyse de ce marché,
tablent sur 230 milliards
d’euros en 2014.» Qui plus
est, il est devenu
immatériel. Acheter du
vent n’est plus à la portée
de toutes les bourses.•
ParANNEDIATKINE Larubriquedes
chiensnécrosés
ÇA VA ÇA VIENT L’Amibox promet un accueil éternel
à nos animaux domestiques.
J
acques Dambron est
de la race des inven-
teurs foudroyants.
Dès qu’un problème
débarque, il se creuse les
méninges et hop, eurêka,
coup de génie.
Par exemple: un jour de ciel
gris, en 2002, son chien Bilou
meurt. Un cocker. Triste his-
toire. Jacques Dambron vou-
lait enterrer Bilou mais rien
ne faisait l’affaire. «Je n’ai
pas trouvé de réceptacle, je l’ai
enveloppé dans son plaid.
C’était triste», expliquait-il à
Libé après le drame. Avec
l’énergie de l’endeuillé, il
lance l’Amibox: le cercueil
pour animaux.
Brevet. Le principe est sim-
ple, c’est comme pour les
humains sauf que la boîte est
plus petite (à voir pour les
cadavres de Saint-Bernard)
et qu’elle évite le chêne et
l’acajou. Onze ans après le
lancement, l’inventeur se
souvient: «Je commercialisais
des boîtes pour pièces anato-
miques à l’époque, des boîtes
pour recueillir les membres
amputés, un bras, une jambe.
J’ai appelé ça l’Anatbox. Je
m’en suis inspiré pour le cer-
cueil. J’ai déposé le brevet et
tout de suite j’ai été appelé par
des Anglais. Ils sont férus de
petits animaux là-bas, les sou-
ris et tout, ils sont fous de ça!»
A quoi ressemble une Ami-
box? Imaginez un cercueil
Ikea, à assembler entre deux
sanglots sur le tapis du salon.
Ni clou ni vis, les quatre
planches s’emboîtent. En-
suite, à moins de vouloir
creuser dans le potager la sé-
pulture de Riri, Fifi ou Lou-
lou, il vous faut un cimetière.
Pourquoi pas Asnières-sur-
Seine (Hauts-de-Seine)? As-
nières pour un chien, c’est le
Père-Lachaise pour un fan de
Jim Morrison, sauf que la star
ici s’appelle Rintintin. Dans
les allées, gravés sur des stè-
les marbrées, on croise les
noms de feu les fidèles com-
pagnons : Mémère, Titine
mais aussi Roro, Hulk et le
surprenant Robespierre, qui
râle au fond de son trou.
C’est qu’il y a du monde au
dortoir d’Asnières, des
chiens, des oiseaux, des la-
pins nains ou pas, des hams-
ters morts de fatigue, épuisés
d’avoir trop couru, des pois-
sons rouges, des lions, des
singes… Ils sont plusieurs di-
zaines de milliers à garnir les
allées du premier cimetière
animalier au monde, inau-
guré en 1899. Alors cette
Amibox, une arnaque? L’in-
vention d’un truc vieux de
cent quinze ans? La nuance
est dans le prix : Jacques
Dambron a pensé à celui qui
n’a pas 3540 euros à claquer
pour réserver 1 m2 de pelouse
sur vingt ans. Voilà le but de
l’Amibox: permettre, pour
un peu plus de 30 euros,
d’enterrer son furet domes-
tiqué «dans la dignité». Pro-
blème, les planches de peu-
plier n’ont pas percé.
Jouet. On aurait dû en trou-
ver au supermarché, entre le
jouet qui couine et la laisse à
grelot. Jacques Dambron es-
pérait en écouler 5000 par
mois, il se voyait précurseur
d’un secteur que la crise ne
pouvait pas plomber puisque
les chiens continueraient à
mourir, quoi qu’il arrive.
«Mais en France, le maître va
chez le véto quand il sent la fin
venir. L’animal est euthanasié
puis congelé jusqu’à ce qu’une
entreprise vienne le chercher
pour la crémation. Ça se passe
comme ça dans 90% des cas.
Après, bien sûr, il reste des
gens qui creusent leur jardin,
mais encore faut-il en avoir
un!»
Du coup, Jacques Dambron a
quitté la France. Comme
d’autres patrons. Enfin, lui
vit toujours en Alsace mais
son Amibox a traversé la
Manche. Les Anglais sont les
derniers à lui trouver une
utilité. Désormais, à Ribeau-
villé, l’inventeur se consacre
à Transhygiène, sa boîte de
boîtes pour membres ampu-
tés: «Je vends dans 350 hôpi-
taux et cliniques sur toute la
France. Ça marche bien.»
MATHIEU PALAIN
ETAUSSI
CHAUDBIZ Tousceuxqu’on«M»
A
u Maroc, mariage royal.
Rien à voir avec une version
raï de Fred Astaire, mais de
vraies épousailles entre Moham-
med VI, monarque de droit divin, et
Salma Bennani, jeune informati-
cienne originaire de Fès (pas de bla-
gues, svp). Elizabeth II est tristou-
nette, elle perd sa mère, la bien
nommée «reine mère» et sa sœur
Margaret la même année. Chez les
roturiers, Macaulay Culkin, qui avait
été élu «l’enfant le plus mignon du
monde» en 1994 (par un jury qui
n’était pas uniquement composé de
Michael Jackson), sort avec Mila Ku-
nis (toujours pas de blague, svp). Ils
resteront ensemble jusqu’en 2010.
SURPRISE
Ni clou ni vis, les quatre planches s’emboîtent. PHOTO DR
IV • 20027
LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr
D’un côté les bars à ginjinha où les anciens trempent leur moustache, de l’autre, la jeunesse et ses hangars discothèques au bord du Tage. PHOTO ALPH.B.SENY.DIVERGENCE
Lisbonne comme
du bon pain
ÇA A EU LIEU Destination prisée, la ville est alors
convoitée pour sa capacité à mêler le neuf et l’ancien.
L
es villes ont leur
temps et leurs mo-
des. Un peu avant
Berlin et après Bar-
celone, Lisbonne est
l’une des destinations françai-
ses branchées autour de 2000.
Au point qu’en 2002, la nou-
velle bande dessinée la célèbre
en carnets de voyage. Il y a Du-
puy et Berberian, aux éditions
Cornélius, qui croquent l’acti-
vité flegmatique de la capitale:
silhouettes au téléphone, en
voiture, sur des bancs, comme
détachés des décors baroques
de la cité. A chaque page, Lis-
bonne apparaît comme un
spectacle dont les deux dessi-
nateurs chercheraient à com-
prendre la mise en scène. Peu
après, Nicolas de Crécy livre
chez Casterman son Lisbonne,
voyage imaginaire, une quaran-
taine d’aquarelles obsédées par
les enchevêtrements de rails,
lignes électrifiées de tram,
tremblement au loin d’une
coupole blanche. Côté texte,
Raphael Meltz (future revue R,
de réel) raconte la ville sans
l’avoir visitée, d’où l’«imagi-
naire» du titre.
Pourquoi Lisbonne à ce mo-
ment-là ? Les visiteurs de
l’époque ont ce sentiment, qui
caractérise toute ville exci-
tante, que l’ancien et le neuf
s’y fertilisent mutuellement
sous leurs yeux. D’un côté,
azulejos et vieux bars à ginjinha
(liqueur de griottes) où les an-
ciens trempent leur moustache
dès 9 heures du mat, et de
l’autre, une jeunesse qui car-
bure à la Sagres dans des han-
gars démesurés au bord du
Tage, friches industrielles de-
venues temples postmodernes,
certains ressemblant à Gotham
City autant que les christs en
cire des églises ressemblent ici,
avec leurs perruques de crin, à
des épouvantails divins.
L’économie portugaise s’est
fortement développée dans
les années 80, et depuis 1994
l’Union européenne distribue
au titre du développement «ré-
gional» 3 milliards d’euros
chaque année au pays, soit 3%
à 4% de son PIB. L’embellie de
Lisbonne est alors fulgurante,
boostée en particulier par l’Ex-
position internationale de 1998
qui pousse à la rénovation de
ses infrastructures (le gigan-
tesque pont Vasco-de-Gama en
est l’exemple phare), décrasse
les façades du quartier popu-
laire de l’Alfama et déchaîne
l’urbanisme sur les docks. Mais
peu après 2002, la manne
commence à s’épuiser.
ÉRIC LORET
ÇA PASSE OU ÇA CLASSE Mickaël
T
on prénom n’est pas anodin: il fait entrer
la société française dans l’ère de l’inven-
tivité à tout crin, de la créativité bon mar-
ché dans les maternités. En particulier, les or-
thographes multiples sont prisées. Exemple pour
toi: Michael, Mickaël, Michæl, et ses dérivés,
Mika, Michal, Michelhouellebecq… A part avec
ce dernier, tu as peu de chance de finir DG ou DA
d’une entreprise. La faute aux Michael (Jackson,
Jordan) dont le nom a été francisé avec l’accent.
Tu es le grand frère CSP- de tous les pauvres gars
à venir: Kevin, Logan, Brandon, Ryan…
Tout l’été, coupez, collez
et reconstituez le
dessin de Stéphane
Blanquet sur une page
de Libé (du 9 juillet).
Les puzzles complets
gagneront une surprise.
PUZZLE
• V20027
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
Liberation . Syrie
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Liberation . Syrie

  • 1. AFP Le Parti de gauche fait monter la cote d’Eva Joly Draguée par le mouvement de Mélenchon, l’ex-candidate EE-LV à la présidentielle en profite pour s’assurer une place de choix sur les listes écologistes aux européennes de 2014. PAGE 8 Usain Bolt, le sprint en tête Le Jamaïcain a remporté, hier aux Mondiaux de Moscou et sous la pluie, un nouveau titre sur 100m, en 9”77. PP. 16­17 72002ET SI RAËL AVAIT RÉUSSI LE CLONAGE HUMAIN TOUT L’ÉTÉ, «LIBÉ» RÉINVENTE 40 ANS D’ACTUALITÉ CAHIER CENTRAL Syrie L’horreuràhuisclos Rébellionéclatée,jihadistes omniprésents,patrimoinedévasté, témoinsétrangersécartés… Al-Assadpoursuitsonmassacre. PAGES 2­5 AlamorguedeRaqqa,samedi,danslenorddelaSyrie.PHOTOALICEMARTINS.AFP •1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO10029 LUNDI 12 AOÛT 2013 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande­Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €, Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays­Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA.
  • 2. Ni l’armée ni les rebelles ne parviennent à prendre un avantage militaire décisif dans le conflit. Sur le plan diplomatique, la situation est gelée. Lalongueagonie dupeupledeSyrie ParALEXANDRA SCHWARTZBROD Témoin Dans une guerre civile, le personnage clé, c’est le témoin. Lui seul peut raconter l’horreur sans être soupçonné de partialité. Lui seul peut empêcher de laisser dire un jour à ceux qui auraient pu intervenir: «Nous ne savions pas.» En faisant régner la terreur, en libérant dès le début de la rébellion des jihadistes prêts à tout, en laissant proliférer des groupes criminels qui ont fait de l’enlèvement une industrie prospère, le régime de Damas est parvenu à ses fins: tarir le flot de tous ceux qui voulaient apporter de l’aide (humanitaires, diplomates) ou témoigner (journalistes), couper la Syrie du monde afin de régler le problème seul, sous le regard bienveillant d’un Poutine ragaillardi par cette occasion inespérée de peser à nouveau sur le (dés)équilibre de la planète. A force d’être vidés de tout bruit et de toute lumière, de résonner dans le vide et de tomber dans l’oubli à peine prononcés, les mots, sur ce conflit, ne veulent plus rien dire. «En Syrie, il se commet un crime contre l’humanité et les puissances occidentales y ont une grande part de responsabilité [car] la non- assistance à un peuple en danger est un crime», nous disait en avril le chercheur Gilbert Achcar. Quel chef d’Etat, de l’ONU ou de la Commission européenne, s’est levé depuis, pour dire qu’il n’acceptait plus l’intolérable? Personne. Le pire serait pourtant de se résigner. C’est pourquoi nous avons choisi de donner la meilleure place au témoignage accablant de Donatella Rovera. ÉDITORIAL A Rakka, dans l’est du pays, samedi. La seule grosse ville entièrement contrôlée par les rebelles a été bombardée par les avions de l’armée loyaliste. PHOTO NOUR FOURAT. 100000C’est, au minimum selon l’ONU, le nombre de personnes tuées en Syrie depuis le début de la révolte contre le régime, en mars 2011, avec une contestation pacifique qui s’est vite transformée en guerre civile. LA VILLE DE RAKAA BOMBARDÉE Au moins 13 civils, dont sept enfants, ont péri samedi dans un raid aérien sur la ville de Rakka, seule capitale provinciale aux mains des rebelles, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Libérée en mars, la ville est dominée par l’Etat islamique en Irak et au Levant, affilié à Al­Qaeda. Un jésuite italien critique du régime, le père Paolo Dall’Oglio, y est porté disparu depuis début août. REPÈRES «Sergueï Lavrov et moi ne sommes pas toujours d’accord sur la Syrie, mais nos deux pays sont d’accord pour une solution politique négociée via Genève 2.» JohnKerrysecrétaired’Etataméricain,après avoirrencontrésonhomologuerusse,vendredi LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20132 • EVENEMENT
  • 3. ParHALAKODMANI L’ESSENTIEL LE CONTEXTE La situation ne cesse de se dégrader en Syrie, tant au plan humanitaire que sécuritaire, affirme Donatella Rovera, d’Amnesty International. Et jusqu’au patrimoine architectural, peu à peu emporté par la guerre. L’ENJEU L’objectif du régime est en passe d’être atteint: empêcher l’entrée de tout témoin étranger et couper la Syrie du monde pour mieux maintenir son emprise. Pour Donatella Rovera, d’Amnesty International, la situation sur le terrain empire mois après mois: «Peu de zones sont hors de portée des canons» P arfaite arabophone, Donatella Rovera, d’Amnesty International, vient de pas- ser un mois en Syrie dans les zones te- nues par la rébellion. Quelle est la situation sur place? J’ai été très frappée de la dégradation très ra- pide des choses par rapport à mon précédent voyage, il y a trois mois. C’est vrai sur le plan humanitaire et encore plus en matière sécu- ritaire. Les enlèvements sont quotidiens, même si l’on n’en entend pas parler à l’exté- rieur, sauf quand il s’agit d’étran- gers. Ils sont aussi bien le fait de groupes criminels qui font sem- blant d’être politiques que de groupes politiques se finançant par des activités criminelles. Des groupes de miliciens liés au régime pénètrent aussi en zone rebelle pour de telles opérations. On sent, en outre, une présence de plus en plus forte des grou- pes islamistes radicaux et les affrontements entre eux et d’autres formations de l’opposi- tion, notamment les Kurdes, deviennent tou- jours plus fréquents. A cela s’ajoutent des bombardements quotidiens des forces du ré- gime. L’aviation et les hélicoptères opèrent moins souvent, mais les tirs d’artillerie s’in- tensifient. Il y a très peu de zones hors de portée des canons et des missiles Grad. Que se passe-t-il à Alep? La situation alimentaire et sanitaire y est très difficile. Il n’y a pas d’eau et très peu d’élec- tricité. L’essence qui permet de faire tourner les générateurs est de plus en plus chère et j’ai vu son prix augmenter de 50% en dix jours. La ville est toujours divisée en deux. Même s’il est im- possible d’avoir une estimation précise, il y a environ 800000 ou un million de person- nes côté rebelle, et un peu plus du côté gou- vernemental, qui ne subissent pas des bom- bardements. Mais cette zone est désormais totalement encerclée et ceux qui y vivent ne peuvent plus se ravitailler que chez les rebel- les, ce qui entraîne une envolée des prix car il y a encore maintenant beaucoup plus d’ar- gent côté gouvernemental. Pour limiter la spéculation, les autorités rebelles ont fixé des quotas pour les produits de première néces- sité et elles interdisent de faire passer les mé- dicaments et le lait en zone gouvernemen- tale, mais les moyens de contournements sont nombreux. C’est en fait dans les territoi- res contrôlés par l’opposition que la situation humanitaire est de loin la plus mauvaise. Beaucoup de gens venus d’ailleurs se sont ré- fugiés là. Ils sont totalement démunis. Il y a un immense désespoir de la population et les trafics d’une économie de guerre prospèrent. Des structures politiques et administratives ont-elles été mises en place par l’opposition? Les conseils municipaux ou les conseils de quartier sont de plus en plus nombreux mais, souvent, ils ne représentent qu’eux-mêmes. Ces structures fonctionnent en parallèle de celles mises sur pied par les divers groupes combattants, qui ont cha- cun leur fief. C’est particulière- ment évident pour les groupes is- lamistes radicaux, le Front al-Nusra ou l’Etat islamique en Irak et ou Levant (EIIL), qui, au début, étaient discrets mais, dé- sormais, sont de plus en plus visibles. Il y a ainsi deux tribunaux, une cour unifiée et une cour islamique. La seconde a beaucoup plus de pouvoir car elle dispose d’un véritable bras armé et a les moyens de mettre en application ses décisions alors que l’autre ne le peut pas. Qu’avez-vous vu à Deir el-Zor, dans l’est? Cette ville isolée, en plein désert, où il est très difficile d’arriver et encore plus d’y entrer car la partie tenue par les rebelles, où ne vi- vent plus qu’une dizaine de milliers d’habi- tants, est encerclée, avec un seul accès tou- jours sous le feu des snipers. Mais toutes les zones rurales autour sont contrôlées par la rébellion. Dans la ville voisine de Hatlah, il y a eu, mi-juillet, des affrontements avec la population chiite. 40000 personnes ont fui en zone gouvernementale. Le Front Al-Nusra a fait sauter leurs mosquées et maisons pour bien signifier qu’il n’y aura pas de retour. Vous avez enquêté sur les crimes commis. Où en est-on? Les forces du régime continuent leurs bom- bardements indiscriminés sur les populations civiles. Il est important, dans chaque cas, de voir s’il y avait des objectifs militaires qui pouvaient justifier de telles frappes, mais dans un tel chaos, il n’est pas simple de me- ner des investigations. Jusqu’ici, nous n’avons pas non plus réussi à trouver des preuves formelles de l’emploi d’armes chi- miques. Les forces gouvernementales conti- nuent par ailleurs de pratiquer des exécu- tions sommaires, aussi bien de civils –y compris des familles entières– que de com- battants rebelles. Les forces de l’opposition pratiquent elles aussi de telles exécutions, mais à l’encontre d’ officiers, soldats ou mili- ciens capturés, sans s’en prendre aux civils. Mais certains groupes, notamment les jiha- distes, se montrent de pire en pire. Recueilli par MARC SEMO AP A vec 4400 morts, le mois de ramadan qui s’est achevé jeudi aura été l’un des plus sanglants depuis le début du conflit en Syrie, au printemps 2011. La tuerie banalisée se déroule dans le huis- clos toujours souhaité par le régime de Damas, bien aidé par les groupes jiha- distes.Acoupd’enlèvementsdejourna- listes et de menaces contre les tra- vailleurs humanitaires, ceux-ci ont réussi à éloigner les témoins étrangers, en particulier dans le nord. Tout au long du mois, le régime et l’op- position ont marqué tour à tour des points ou encaissé des coups, remporté des victoires ou subit des revers sur le terrain. Tous provisoires, dans cette guerre d’usure asymétrique installée dans la durée. L’épisode final aura été l’attaque au mortier du convoi de Ba- char al-Assad, en plein Damas, alors qu’il se rendait à la mosquée pour la prière de l’Aïd. L’opération, démentie jeudi par le gouvernement, a provoqué la panique dans la capitale, où les habi- tants ont fêté la fin du mois sacré au son du canon et des armes automatiques. Dernier pied de nez de l’opposition: le chef de la Coalition nationale a pu faire tranquillement sa prière dans une mos- quée de Deraa, après avoir franchi clan- destinement la frontière jordanienne. EMBUSCADE. Bachar al-Assad avait pourtant des accents triomphants, fin juillet, en félicitant ses troupes qui ve- naient de reprendre la plus grande par- tie de Homs, près de la frontière liba- naise. Trois jours après, les brigades rebelles du nord exultaient après la conquête de la base aérienne de Min- nigh, près d’Alep: l’aboutissement d’une bataille menée depuis huit mois contre l’aéroport, d’où partaient les avions qui pilonnaient toute la région. Le lendemain, l’opposition était acca- blée quand plus de soixante de ses com- battants sont tombés dans une embus- cade tendue par l’armée régulière dans les environs de Damas. Ces derniers jours, l’offensive lancée par les rebelles contre le bastion alaouite de la région côtière de Lattaquié, appro- chant Qardaha, village natal des Al-As- sad, marque une escalade aussi provo- cante que dangereuse. L’opération ne fait pas l’unanimité, même parmi les opposants, qui craignent des massacres de villageois alaouites par les extrémis- tes sunnites. «Son objectif est au con- traire de briser le plan de partition du pays par l’établissement d’un Etat alaouite, se- lon Abou Ibrahim, nom de guerre d’un chef de brigade rebelle LIBAN JORDANIE IRAK TURQUIE SYRIE Deraa Palmyre Deir el-Zor Hama RakkaIdlib La aquié Qardaha Homs Ras al-Aïn Al-Qoussayr Damas 50 km Alep loyaliste zones disputées kurde rebelle Territoire sous contrôle «Nous mettrons en œuvre toutes ses capacités pour défendre les Kurdes innocents menacés de mort et de terrorisme en Syrie.» MassoudBarzaniprésidentdela régionautonomekurdeirakienne Des raids aériens sur la ville de Salma, dans la province de Lattaquié, bastion alaouite, ont tué au moins 20 personnes hier alors que l’armée syrienne a lancé depuis trois jours une vaste contre­ offensive pour reprendre le contrôle de villages alaouites conquis ces derniers jours par les rebelles. LES ARMES RUSSES La Russie a fabriqué une partie des missiles sol­air S­300 destinés à la Syrie, mais la livraison a été reportée à 2014 malgré un acompte versé par Damas. Le 4 juin, Poutine affirmait que Moscou n’avait pas «pour l’instant» livré de S­300 pour ne pas «rompre l’équilibre des forces». Suite page 4 INTERVIEW L’offensive rebelle contre le bastion alaouite de la région côtière de Lattaquié marque une escalade aussi provocante que dangereuse. REUTERS LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 • 3
  • 4. L’Unesco a placé la totalité des monuments classés sur la liste des sites en péril et assiste, impuissante, à leur dévastation. Le patrimoine syrien rongé par les bombes et les pillages L e mausolée de Khaled ben al-Walid n’est qu’une victime de plus du conflit syrien. Le 22 juillet, des tirs d’obus ont totalement détruit ce haut lieu de pèlerinage sunnite, situé au plein cœur de Homs. Construit au IXe siècle par les seljoukides, le monument honorait un compagnon et le principal chef militaire de Mahomet. Vraisemblable- ment bombardé par l’armée syrienne, le mausolée vient s’ajouter à la longue liste des chefs-d’œuvre architectu- raux emportés par la guerre. locale, joint par Skype. Il ne s’agit pas, pour nous, de conquérir la zone, mais de perturber le dé- ploiement de l’armée pour qu’elle dégar- nisse ses positions dans le nord.» La division de facto du territoire syrien entre une région centrale et côtière sous le contrôle du régime, tandis que le nord, l’est et une partie du sud du pays sont dominés par les rebelles, est loin d’être figée. Les lignes de front sont mouvantes et chacun des deux camps garde l’ambition de contrôler l’ensem- ble du pays, tout comme leurs alliés in- ternationaux et, surtout, régionaux. PORTEFEUILLE. Car dans ce conflit où se joue bien plus que l’avenir d’un sys- tème politique en Syrie, les grandes puissances occidentales ont sous-traité le dossier aux acteurs régionaux. Or l’Iran poursuit une stratégie de domina- tion de tout le «croissant chiite» –entre Téhéran et Beyrouth–, auquel s’oppo- sent les pays sunnites, Turquie, Qatar et Arabie Saoudite en tête. Cette dernière a repris l’initiative depuis plusieurs se- maines. D’abord en prenant le contrôle, à la place du Qatar, sur la Coalition na- tionale des forces de l’opposition sy- rienne, élargie pour affaiblir la prépon- dérance des Frères musulmans en son sein et désormais présidée par Ahmad Assi Jarba, membre de la grande tribu des Chammar aux ramifications saou- dienne et syrienne. Riyad s’est lancé également dans un soutien militaire substantiel au commandement central de l’Armée syrienne libre, avec l’aval de Washingtonetpoursuitsadiplomatiedu portefeuille jusqu’en Russie. Le chef des renseignements saoudiens, Bandar ben Sultan, s’est rendu chez Vladimir Pou- tine à Moscou pour l’inviter à lâcher Al- Assad en échange de contrats d’arme- ment de 15 milliards de dollars et de ga- ranties pour le marché du gaz russe en d’un plus grand rôle dans la région. Of- fre rejetée par Moscou, d’autant moins prêt à abattre sa carte Al-Assad, qu’il croit sa victoire possible. Diplomatiquement, les dernières ten- sions entre Russes et Américains avec l’affaire Snowden (Libération de ce week-end) vont aussi peser sur le dos- sier syrien déjà bien négligé. L’annonce par les ministres des Affaires étrangères des deux pays, vendredi à Washington, de leur accord pour réunir une confé- rence dite de «Genève 2», apparaît comme un simple rappel qu’une solu- tion politique n’est pas exclue. Encore faut-il amener les belligérants syriens à la table des négociations. Or Al-Assad affiche sa détermination d’en finir par les armes avec les «terroristes», tandis que l’opposition, qui exige son départ comme préalable à toute discussion, n’a jamais su convaincre qu’elle pouvait of- frir une alternative. Ses divisions et l’in- compétence de ses principaux repré- sentants ont servi de prétexte légitime à ses alliés occidentaux, tout aussi divi- sés et hésitants, pour mesurer leur sou- tien, notamment militaire. «Les positions du régime comme de l’op- position rendent toute solution militaire ou politique illusoire», conclut le rapport de l’International Crisis Group, publié fin juin, et pointant les «métastases du con- flit». «Les alliés de chacune des parties donnent assez pour les faire tenir, mais pas assez pour s’imposer, faisant durer la guerre par procuration aux dépens des Syriens.» • Images satellitaires du quartier Ard al­Hamra, dans le nord d’Alep, avant et deux jours après une double frappe de missiles de l’armée syrienne, dans la A Alep, la mosquée de Khaled ben al­Walid, endommagée par des bombardements aériens. PHOTOS LENS YOUNG HOMSI. AP;ANADOLU AGENCY. AFP La mosquée des Omeyyades d’Alep, photographiée le 16 avril et le 20 juin 2013. Le 24 avril, le minaret s’est effondré. PHOTOS DIMITAR DILKOFF. AFP Suite de la page 3 LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20134 • EVENEMENT
  • 5. sur place. A ce désastre cul- turel, il faut ajouter le fléau des pillages et du trafic d’ob- jets, qui se sont intensifiés ces derniers mois. «On sait que des objets provenant de si- tes syriens ont été saisis au Li- ban et d’autres circulent sur In- ternet, explique Karim Hen- dili. On a l’exemple récent de l’Irak, où des pièces qui avaient disparu n’ont jamais été retrouvées. Nous mobili- sons le marché de l’art afin qu’il ne se rende pas complice, même de manière involontaire, de ce trafic.» La sauvegarde des sites, tou- jours inaccessibles à cause des combats, est l’autre dif- ficulté à laquelle est confron- tée l’organisation. Un fonds d’urgence a bien été créé, mais il ne sera utilisable qu’une fois «le conflit ter- miné», ou quand l’Unesco aura «une fenêtre pour inter- venir». Incendie. Il y a pourtant urgence. En septembre, le vieux souk d’Alep, inscrit au Patrimoine mondial de l’hu- manité, a été détruit dans un incendie. En avril, dans la même ville, c’est le minaret de la mosquée des Omey- yades, joyau historique du nord de la Syrie, qui n’a pas résisté aux combats. L’Unesco peine même à se tenir informée de l’état des sites protégés. «Nous sommes en contact sur place avec la Direction générale des antiqui- tés et des musées de Syrie, dé- taille Karim Hendili. C’est très compliqué de mesurer l’ampleur des destructions et on s’est rendu compte, au Mali notamment, que nous avions sous-estimé les dégâts. Ce pourrait être la même chose ici.» Avec six sites classés au Patrimoine mondial de l’Unesco –les vieilles villes de Damas et Alep, la cité ro- maine de Bosra (sud), le site antique de Palmyre, les châ- teaux du Krak des chevaliers et de la forteresse de Saladin, et une quarantaine de villa- ges antiques du nord-ouest du pays–, la Syrie fait figure de perle historique au Moyen-Orient. «Il y avait une centaine de missions ar- chéologiques sur place avant la guerre», explique Karim Hendili. Mi-juillet, le Krak des chevaliers, un des bijoux historiques syriens, cons- truit pendant les croisades entre le XIe et le XIIIe siècle, a lui aussi été endommagé. Depuis le début du mois en effet, l’armée a intensifié sa puissance de feu pour re- prendre plusieurs positions rebelles, une stratégie qui s’avère catastrophique pour l’Unesco, qui voudrait met- tre en place des cordons de sécurité autour des princi- paux sites afin de prévenir des pillages. En février, des reliques appartenant selon la tradition au prophète Maho- met (trois cheveux et un fragment de dent) ont été dérobées dans la grande mosquée d’Alep. Inventaires.«On veut inciter les pays frontaliers à renforcer la sécurité aux frontières en prenant des mesures fortes pour empêcher ces objets de quitter le pays», poursuit Ka- rim Hendili, qui ajoute que l’Unesco travaille main dans la main avec Interpol et l’Or- ganisation mondiale des douanes. La mission s’avère plus que complexe puisque dans la majorité des cas, les inventaires imposés par la convention de l’Unesco de 1970 manquent de préci- sion. Impossible de fait de déterminer les pertes exactes dans beaucoup de cas. «Nous faisons face à un réseau de trafic d’objets culturels très organisé, n’hésitant pas à pro- fiter de la détresse des habi- tants qui se rendent parfois complices du trafic pour des raisons de survie», rajoute Karim Hendili. La communauté internatio- nale ne semble pas plus dé- terminée à agir sur ce point que sur le reste, dans ce con- flit qui a déjà fait plus de 100000 morts. «Notre mis- sion est de mobiliser au maxi- mum, conclut Karim Hendili. Le patrimoine est une partie essentielle de l’identité des ci- toyens. On a vu en Irak que la destruction ou le pillage des si- tes affectait énormément les populations. Les gens sur place ont besoin de se sentir soutenus.» THOMAS LIABOT «Détruire l’héritage du passé […] ne fait qu’accentuer la spirale de la haine et du déses- poir», lançait mi-juillet Irina Bokova, la directrice géné- rale de l’Unesco, qui tente de mobiliser la communauté internationale. Le 20 juin, l’organisation a ainsi placé la totalité du Patrimoine mon- dial syrien sur la liste des si- tes en péril, «comme une re- connaissance de la menace à laquelle ils font face», com- mente Karim Hendili, spé- cialiste du monde arabe au sein de l’Unesco. En un peu plus de deux ans de combats, les dommages causés aux sites historiques du pays sont considérables. La Syrie est pourtant signa- taire de la convention de La Haye de 1954 pour la pro- tection des biens culturels en cas de conflit armé. Un argu- ment qui semble bien mince face aux enjeux politiques Le Krak des chevaliers (province de Homs), inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, a été touché lors d’un raid aérien selon l’opposition. PHOTOS ABD RABBO. SIPA; AFP Le souk de la vieille ville d’Alep, au cœur des combats rapprochés entre rebelles et loyalistes depuis le début du conflit. PHOTOS HEMIS. AFP; ABD RABBO AMMAR. ABACA «On sait que des objets provenant de sites syriens ont été saisis au Liban et d’autres circulent sur Internet.» KarimHendilidel’Unesco soirée du 22 février 2013, ayant fait au moins 117 morts selon Amnesty International. PHOTOS 2013 DIGITAL GLOBE; ATRIUM LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 EVENEMENT • 5
  • 6. Transparence:lapromesse incomplètedeBarackObama Le Président veut rassurer les Américains, échaudés par l’affaire Snowden, mais reste silencieux à propos de l’espionnage des Etats-Unis à l’étranger. L’ Union européenne est no- tée «3» sur la liste des «priorités»del’espionnage américain, révèle aujourd’hui le magazine allemand Der Spiegel, qui a pu accéder à un nouveau document volé par l’ancien agent Edward Snowden. Sur ce dossier daté d’avril, la National Security Agency (NSA), chargée du renseignement électronique des Etats-Unis, classe sur une échelle de 1 (l’intérêt maxi- mal) à 5 (faible intérêt) ses priorités d’espionnage. La France y figure comme une priorité moyenne, au même plan que l’Allemagne ou le Japon, mais avant l’Italie ou l’Espa- gne. L’Union européenne (UE) ap- paraît aussi comme une cible, avec une priorité «3» accordée à ses «objectifs de politique étrangère», son «commerce international» ou sa «stabilité économique», mais la note de 5 seulement en matière de «nou- velles technologies», «sécurité énergétique» ou «questions alimen- taires». La révélation tombe à pic, au moment où l’UE entame les né- gociations avec Washington sur un traité de libre-échange. D’autres documents fournis par Edward Snowden fin juin avaient déjà mon- tré que la NSA écoutait les bureaux de l’Union européenne à Washing- ton, à l’ONU ou même à Bruxelles. L’«indignation» alors exprimée par plusieurs dirigeants européens, surtout alle- mands, fut discrète et embarrassée. Ce que Barack Obama n’a même pas abordé en évoquant, lors de sa conférence de presse, les réactions à l’affaire Snowden. INNOCUITÉ. Juste avant de s’auto- riser une petite semaine de vacances, le Président a énoncé quatre propositions pour rassurer les Américains de l’innocuité des programmes de surveillance qui les visent. Pas un mot n’a été dit des programmes ciblant les «alliés» européens ou les usagers non amé- ricains des compagnies comme Facebook, Google, etc., dont les données sont passées au crible de la NSA. «Les Européens devraient parler plus fort pour être entendus à Washington, observe Marc Roten- berg, président de l’Electronic Pri- vacy Information Center (Epic). Obama n’ignore pas les préoccupations des di- rigeants européens, avec qui il parle en privé, mais son souci premier, vendredi, était de répondre aux énor- mes inquiétudes du public améri- cain.» L’espionnage américain est déjà bien contrôlé et il «évite les abus», a assuré vendredi Barack Obama, soulignant lui-même que les mesures qu’il propose ne visent qu’à rendre les Américains «plus à l’aise» avec ces programmes. «Si je dis à Michelle que j’ai lavé la vaisselle […] et qu’elle est un peu sceptique, peut-être ai-je besoin de lui montrer les assiettes, même si j’aimerais bien qu’elle me croie», a expliqué le Pré- sident. Une métaphore particuliè- rement triviale, qui lui a aussitôt valu les railleries de la presse. Le président américain a proposé de «réformer» la section 215 du Patriot Act, qui permet de collecter les re- levés téléphoniques de pratique- ment tous les citoyens américains. Sans remettre ce droit en question, il a invité le Congrès à «travailler» avec lui pour mettre en place «une plus grande surveillance, une plus grande transparence, et des limites à l’usage de cette autorité». Obama a aussi proposé d’ajouter un repré- sentant indépendant à la Fisc, la cour secrète chargée d’autoriser les écoutes qui, jusqu’à présent, n’en- tend que les arguments du gouver- nement. Il a promis la nomination à la NSA d’un officier chargé du respect de la vie privée, la création d’un site web où les services de renseignement publieront des do- cuments jusqu’alors classés secrets, et aussi la nomination d’un groupe «d’experts extérieurs» chargés de proposer d’autres réformes. CADRE. Toutes ces mesures vont dans le bon sens mais restent très insuffisantes, selon les défenseurs des libertés. «Ces propositions ne sont pas sans importance, mais elles ne vont pas assez loin, résume Marc Rotenberg. Ce qu’il faut, c’est mettre fin au programme actuel de collecte des relevés téléphoniques des Améri- cains, qui est illégal.» Pour ce qui est de l’espionnage à l’étranger, et ce- lui des Européens en particulier, des changements sont aussi pos- sibles, même si le problème est là plus diplomatique que juridique, explique cet expert: «Actuellement, le droit américain ne reconnaît pas le droit à la vie privée des citoyens non- américains.» «Espionner des non- Américains à l’étranger soulève des questions diplomatiques et politiques compliquées mais moins de problèmes au regard de la loi américaine, puis- qu’[ils] ne sont pas protégés par le quatrième amendement [de la Cons- titution américaine, qui permet de se prémunir contre des perquisi- tions et saisies non motivées, ndlr]», observe Stephen Vladeck, professeur à l’American University. Sur ce point aussi, la réflexion a pourtant commencé, rapporte Marc Rotenberg, invité la semaine dernière à la Maison Blanche à une réunion où le besoin de protéger les données privées au niveau interna- tional a été évoqué. «Il faudrait un cadre international faisant du respect de la vie privée un droit de l’homme fondamental, comme la commissaire Viviane Reding a commencé à le de- mander, côté européen», plaide le président d’Epic à Washington. Voilà qui pourrait aussi fournir un très bon sujet de campagne à l’UE: une occasion enfin positive de montrer que les Européens peuvent tenir tête aux Etats-Unis et sortir d’un scandale en obtenant de nou- velles avancées du droit.• ParLORRAINEMILLOT CorrespondanteàWashington «Les Européens devraient parler plus fort pour être entendus à Washington.» MarcRotenbergexpertendroitdelavieprivée RÉCIT Obama à la Maison Blanche, vendredi. Le chef de l’Etat s’est engagé à réformer le programme de surveillance de la NSA. PHOTO PABLO MARTINEZ. AP LE CAS SNOWDEN Le père d’Edward Snowden a annoncé hier avoir un visa pour visiter «très prochainement» son fils. «En tant que père, j’aimerais qu’il revienne à la maison à la condition qu’il ait droit, en tant qu’Américain, à l’application juste de la justice», a­t­il déclaré. REPÈRES «Nous avons déjà déclassifié un nombre d’informations à propos de la NSA sans précédent. Mais nous pouvons aller plus loin.» BarackObamavendredi «Des réformes se dessinent, pour cela, le Président et le peuple américains ainsi que le monde sont redevables à Edward Snowden.» JulianAssangefondateur deWikiLeaks,samedi LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 20136 • MONDE
  • 7. Les Maliens se sont rendus aux urnes dans le calme, hier, pour élire leur nouveau président. Ils devaient choi- sir entre Ibrahim Boubacar Keïta, donné largement favori avec 39,7% des voix au premier tour, et Soumaïla Cissé (19,7%), pour sortir leur pays de dix-huit mois de chaos. Les deux can- didats, vétérans de la vie politique malienne, ont appelé au «calme et à la sérénité» après avoir voté à Bamako, où le scrutin a été perturbé dans la matinée par de fortes pluies. Dans les grandes villes et régions administrati- ves du nord du pays (Gao, Tombouc- tou et Kidal), le vote s’est apparem- ment déroulé sans incident. Deux semaines après un premier tour réussi le 28 juillet, le second tour de la présidentielle doit rétablir l’ordre constitutionnel interrompu par un coup d’Etat militaire le 22 mars 2012, précipitant la prise du nord du pays par des groupes islamistes armés liés à Al-Qaeda. Le scrutin est surveillé par plusieurs centaines d’observa- teurs nationaux et internationaux et sa sécurité assurée par l’armée ma- lienne, les Casques bleus de la Mi- nusma et les forces françaises. C BONNE NOUVELLE LES CITOYENS DOIVENT DÉPARTAGER «IBK» ET CISSÉ Présidentielle:leMalivotedanslecalme Sur le lieu d’un attentat à Kerbala (au sud de Bagdad), hier. PHOTO M. MUSHTAQ. REUTERS D e nouveaux attentats ont fait plus de 60 morts et des cen- taines de blessés samedi en Irak, visant notamment des cafés et des marchés à Bag- dad, alors que la population fêtait la fin du ramadan, le plus meurtrier depuis cinq ans. Les violences quoti- diennes se sont intensifiées et font craindre une nouvelle guerre civile, alors que des centaines de prisonniers, dont des hauts responsables d’Al-Qaeda, se sont évadés en juillet grâce à un coup de main du réseau. En tout, 16 voitures piégées et des at- taques ont tué 61 personnes et blessé près de 300 autres à travers le pays samedi. A Bagdad, des attentats coordonnés à la voiture pié- gée ont fait 37 morts dans huit quartiers, selon des sources policières et médica- les. Les Etats-Unis ont quali- fié d’«ennemis de l’islam» les auteurs de ces attaques «lâ- ches […] dirigées contre des familles qui célébraient l’Aïd- el-Fitr» marquant la fin du ramadan. Le département d’Etat américain a rappelé qu’une prime de 10 millions de dollars (près de 7,5 mil- lions d’euros)était offerte pour «toute information qui aiderait les autorités à tuer ou capturer Abou Bakr al-Ba- ghdadi», le chef d’Al-Qaeda en Irak. Selon les Nations unies, plus de 1000 person- nes sont mortes en juillet, le bilan mensuel le plus élevé dans le pays depuis cinq ans. Le gouvernement attribue cette augmentation des attaques au conflit qui fait rage en Syrie voisine, et ac- cuse régulièrement des pays étrangers d’encourager ces violences. Mais la crise poli- tique qui oppose notamment la majorité chiite aux sun- nites, qui tenaient le haut du pavé sous Saddam Hussein, a également servi les intérêts des extrémistes. Les sunni- tes, qui accusent les autorités de chercher à les marginali- ser politiquement, orga- nisent des manifestations depuis la fin décembre, dé- nonçant notamment des ar- restations arbitraires. Les at- tentats à grande échelle ont repris à partir d’avril, après que les autorités ont abattu des dizaines de manifestants sunnites à Hawija. Par ailleurs, le gouverne- ment se montre incapable de fournir des services de base, en particulier un approvi- sionnement stable en élec- tricité, et très peu de lois ont été adoptées depuis les légis- latives de 2010. Le Premier ministre Nouri al-Maliki (chiite) est souvent accusé de chercher à monopoliser tous les pouvoirs, et blâme pour sa part ses opposants d’être à la solde de l’étranger. S.Etr. EnIrak,l’ombred’une nouvelleguerrecivile TERRORISME Des attaques ont fait des dizaines de morts samedi, concluant un ramadan meurtrier. ParSTÉPHANIEDESILGUYIntérim LesBritanniques montrentlescrocscontre leschiensméchants D e la prison à vie pour les propriétaires de chiens «dangereux et hors de contrôle»? Dans une consultation publique lancée cet été par le gouvernement britannique, les citoyens sont appelés à donner leur avis sur la répression envers les molosses. Instauré en 1991, le Dangerous Dog Act réprime les attaques de chiens dans les lieux publics de deux ans de prison et de 5 000 livres (environ 5800 euros) d’amende. Une peine rarement appliquée dans sa totalité. Rien n’est, en outre, prévu pour les agressions dans les jardins privés comme celle survenue en mars près de Manchester. Une adolescente avait été tuée par des Bullmastiffs chez une amie. Les proprié- taires n’ont jamais été pour- suivis. Depuis 2005, 16 per- sonnes sont mortes agressées par un chien. Avec 210000 attaques recen- sées chaque année et 6000 hospitalisations pour morsure, le gouvernement a décidé de sévir. Parmi les questions de l’enquête : «Combien d’années de prison faut-il instaurer pour le pro- priétaire d’un chien qui a blessé une personne ou qui a tué un chien guide d’aveu- gle ?» L’internaute peut choisir entre des peines de trois, cinq, sept ou dix ans. Dans l’hypothèse où la vic- time décède, la détention varie de sept ou quatorze ans à la prison à vie… Des propo- sitions qui semblent con- vaincre les employés qui sont quotidiennement en contact avec ces bêtes hargneuses. Postiers, électriciens doivent souvent ruser pour éviter at- taques, morsures, pouvant entraîner la perte d’une main ou d’un bras. Selon le syndi- cat des télécommunications, 23000 postiers ont été atta- qués par des chiens ces cinq dernières années. «Les pro- priétaires ont au mieux été condamnés à de la prison avec sursis. Les autres, à payer des peines d’amende de 100 li- vres», se lamente Dave Joyce, l’un de ses représentants. Autre phénomène, les pitbulls s’attaquent aussi aux chiens guides d’aveugle. Le rapport publié en juin par l’association Guide Dogs ré- vèle qu’il y a plus de dix agressions par jour. Son pré- sident lance un cri d’alarme: «Il faut que le gouvernement comprenne les répercussions que cela entraîne sur les mal- voyants. Un chien guide d’aveugle représente deux ans de travail et un investissement deplusde50000euros.»Pour la RSPCA, l’association bri- tannique de protection ani- male, le gouvernement de- vrait aller encore plus loin. «Acheter un chien n’est pas seulement un droit. Il faut res- ponsabiliser les propriétaires en les obligeant à suivre des cours pour éduquer leur animal et donner le pouvoir aux forces de police de les contrôler. Il faut avant tout prévenir les atta- ques», insiste David Bowles, son porte-parole. Les inter- nautes britanniques ont jus- qu’au 1er septembre pour ré- pondre au questionnaire.• VU DE LONDRES L’ancienne caserne mili­ taire de Targoviste, dans laquelle Nicolae Ceau­ sescu, l’ancien dictateur roumain, et sa femme, Elena, ont été exécutés en décembre 1989, sera ouverte au public dès sep­ tembre. «Les visiteurs pour­ ront voir le mur où ont été fusillés les époux Ceau­ sescu», a indiqué le direc­ teur du complexe muséal de Targoviste, Ovidiu Cars­ tina, affirmant que «l’inté­ rieur du bâtiment a été repeint dans les mêmes couleurs que celles de 1989 et le mobilier sera égale­ ment identique». Le musée est en train d’aménager la pièce où a été improvisé le procès, mais aussi la cham­ bre où les Ceausescu ont passé leur dernière nuit. L’ouverture au public de cette ancienne caserne a été décidée à la suite de demandes de groupes de touristes étrangers. Après avoir fui Bucarest le 22 décembre 1989, les époux Ceausescu ont été arrêtés par l’armée (passée du côté des protestataires) à près de 100 km de la capitale, et conduits dans une caserne militaire où ils furent fusillés trois jours plus tard, après un procès sommaire, et tout cela sous l’œil des caméras. LA MORT DES CEAUSESCU, COMME SI VOUS Y ÉTIEZ L’HISTOIRE «On combat mieux les préjugés en participant, plutôt qu’en boycottant les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi.» DavidCameron Premierministre britannique,quiaffirmait, surTwittersamedimatin, soninquiétudesurles violationsdesdroits deshomosexuelsenRussie, 1187C’est le nombre de nouveaux logements (793 à Jérusa­ lem­Est et 394 en Cisjordanie) pour lesquels le gouver­ nement israélien lance un appel d’offres. Les Palestiniens dénoncent cette mesure alors que les négociations de paix sont censées reprendre mercredi. SOUDAN Des combats oppo- saient toujours deux tribus arabes hier au Darfour, au lendemain d’affrontements ayant fait au moins 100 morts dans cette région, où les ri- valités tribales alimentent un regain de tensions après dix ans de violences. ÉGYPTE Les partisans du président islamiste destitué Mohamed Morsi ont appelé hier à de nouvelles manifes- tations alors qu’expire un ultimatum de fait et que les autorités s’apprêtent à dis- perser de force leurs sit-in sur deux places du Caire. LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 MONDEXPRESSO • 7
  • 8. 8 • FRANCE L’ex­candidate à la présidentielle a été invitée à la rentrée du Front de gauche, fin août. PHOTO FRANCK TOMPS EvaJolyfait del’effet àMélenchon Les proches du président du Parti de gauche tentent un rapprochement avec l’eurodéputée Europe Ecologie-les Verts. Leurs alliés communistes s’agacent. L a drague continue. Jean- Luc Mélenchon et les siens courtisent toujours Eva Joly, alors qu’elle avait marché à leurs côtés le 5 mai en fa- veur d’une VIe République. Dernière preuve d’amour: le Parti de gauche (PG) lui a en- voyé avant l’été une invitation à participer à la rentrée politique du Front de gauche, fin août à Greno- ble. La proposition est pour l’ins- tant restée sans réponse. Et l’en- tourage d’Eva Joly fait mine de ne pas être au courant… «Si Eva était invitée, elle pourrait tout à fait y al- ler», assure pourtant un de ses pro- ches. Qui fixe les conditions: «Par exemple pour parler réforme des re- traites. Mais si c’est pour faire un pas vers les européennes avec eux, Eva n’en sera pas.» RUMEUR. Alexis Corbière, lieute- nant de Mélenchon, confirme l’ini- tiative: «On aurait bien aimé qu’elle y soit, elle est la bienvenue. Mais ce serait un signe fort qu’elle n’a peut- être pas envie de donner.» D’autant plus fort qu’Europe Ecologie-les Verts (EE-LV) fera sa rentrée au même moment, à Marseille. Ses di- rigeants enrageraient de voir les caméras se braquer sur Grenoble. Quant à Joly, elle ne souhaite pas relancer les rumeurs, nées en mai, d’un départ vers le Front de gau- che. Dans la foulée de sa participa- tion – contre les consignes d’EE-LV – à la marche pour un changement de République, cer- tains l’annonçaient déjà sur une liste commune avec Mélenchon aux européennes. Avant que l’ex-ma- gistrate ne riposte: «Je suis écolo- giste, je suis une des fondatrices d’Europe Ecologie, j’y suis, j’y reste. Et je compte bien y peser.» Mais la rumeur persiste et, au siège du Parti communiste fran- çais (PCF), on reste convaincu que Mélenchon tente d’attirer l’ex-ma- gistrate sur la liste Front de gau- che (FG) en Ile-de-France. Manière de prouver son attractivité avec une belle prise. «C’est du pipeau», sou- tient-on chez Joly. «Je n’ai jamais discuté des européennes avec [son] entourage», jure de son côté Eric Coquerel, négocia- teur en chef du PG. Reste qu’au sein du Front de gauche, les communis- tes s’agacent du gringue fait par leur allié à Joly l’écologiste. Avec d’autres composantes du Front de gauche, ils ont clairement dit niet à une proposition faite avant l’été par François Delapierre (PG): que Joly et Mélenchon donnent chacun une «conférence» lors des estivales du mouvement. «En dehors des lea- ders du Front de gauche, on ne pou- vait pas avoir seulement Eva Joly, justifie Marie-Pierre Vieu (PCF). Et puis à un moment, il va falloir qu’elle énonce comment et où elle poursuit son parcours.» La camarade Joly est priée de choisir son camp. Sujet de débat au Front de gauche, la candidate écolo de la dernière présidentielle continue de ne pas faire l’unanimité à EE-LV. Parmi les dirigeants, ils seraient même nom- breux à se féliciter de la voir quitter le navire. «Comme pendant la prési- dentielle, elle continue de courir der- rière Mélenchon, alors que ce n’est pas la ligne qu’attendent nos élec- teurs», tacle Denis Baupin, vice- président (EE-LV) de l’Assemblée nationale. «Eva considère que si on gouverne avec les socialistes, ce n’est pas infamant de discuter avec le Front de gauche», rétorque son entou- rage. Depuis le 5 mai, les deux an- ciens concurrents de 2012 sont res- tés «en bons termes» et «en contact» par textos. Pas suffisant toutefois pour concrétiser l’hypo- thèse d’un transfert. L’an dernier dans Libération, Joly avait jugé Mé- lenchon «terriblement séduisant», avant de souligner que EE-LV «pro- pose davantage qu’une protestation». Au finale, ce jeu de séduction ren- force surtout le souhait de Joly de verrouiller sa place sur une liste EE-LV aux européennes. Elle a prévu d’annoncer lors des journées d’été qu’elle briguera un deuxième mandat d’eurodéputée. «Sa place est garantie», a déjà fait savoir Jean-Vincent Placé, qui ne fait pas partie de ses fans. Car, mal- gré ses 2% à la prési- dentielle, Joly bénéfi- cie toujours d’une aura certaine auprès des militants. Ses critiques chroni- ques contre le gouvernement et les socialistes restent appréciées d’une base désabusée. Or, à quelques mois d’un congrès où le numéro 1 du mouvement, Pascal Durand, et la ministre Cécile Duflot veulent rassembler le plus large possible, personne ne compte écarter une personnalité sur qui pourraient se cristalliser les mécontentements internes. «Si tu sors Eva, tu fous le boxon», convient Yannick Jadot, son camarade à Strasbourg. Même Daniel Cohn-Bendit –critique avec celle qu’il était allé chercher en 2009– y est allé de sa mise en garde: «Arrêtez vos conneries. Si Eva veut y aller, elle est dans le dis- positif.» En vue des européennes, l’entourage de Duflot aurait préféré voir Joly libérer sa deuxième place en Ile-de-France pour placer en tête de liste une Italienne franco- phone: Monica Frassoni, coprési- dente du Parti vert européen et ex- patronne du groupe écologiste à Strasbourg avec Cohn-Bendit. DÎNER. Joly tient bon. Son club po- litique lancé l’an dernier (#Engage- ment) est certes au point mort, mais elle débarquera à Marseille avec un petit livre dans son carta- ble. Titre de travail: «l’Europe, l’écologie, notre combat conti- nue». Elle doit intervenir sur les questions méditerranéennes en ouverture, le 22 août, puis répondre le lendemain à l’invitation de Julien Bayou et sa Nouvelle Ecole écolo- giste, pour faire le bilan de la parti- cipation verte au gouvernement. Son équipe prépare aussi, pour la rentrée, un dîner avec des repré- sentants de la gauche du PS. His- toire de montrer qu’elle ne discute pas qu’avec Mélenchon. Et qu’elle compte bien occuper toute sa place, à la gauche des Verts.• ParLILIANALEMAGNA «Je suis écologiste, je suis une des fondatrices d’Europe Ecologie, j’y suis, j’y reste.» EvaJolyaumoisdemai RÉCIT L’ÉTÉ À GAUCHE w EE­LV Journées d’été du 22 au 24 août à Marseille. w Parti de gauche Remue­ méninges du 22 au 24 août à Grenoble. w Front de gauche Estivales les 25 et 26 août à Grenoble. w Parti socialiste Université d’été à La Rochelle du 23 au 25 août. REPÈRES «[Mélenchon] est allié au Parti communiste [qui] est pronucléaire, proproductiviste et pro-infrastructures.» EvaJolyle12avril2012 àRue89 «Je ne vais pas attendre que ce gouvernement coure à l’échec, je veux qu’il change.» EvaJolyle9mai LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
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  • 10. 10 • FRANCE AParis,lesbains- douchesdeplus enpluspopulaires Gratuits depuis 2000, les thermes publics sont utilisés par plus d’un million de Parisiens: SDF, mais aussi retraités, étudiants, salariés… ParJUSTINERIGHO PhotosRENAUDBOUCHEZ O n les croyait disparus ou transformés en mythique boîte de nuit, les bains-dou- ches parisiens tournent à plein régime. Avec plus d’un million de passages, ils arrivent à saturation et sont confrontés à l’affluence de nou- veaux précaires. «Ils sont étudiants, retraités et même sa- lariés», explique un employé municipal. A l’instar de Karim. «Je connais tous les horaires des bains-douches de la ville. Dans ma sacoche, j’ai du shampooing, du gel douche, une brosse à dent, un rasoir et du dentifrice», explique ce travailleur qui se douche quatre fois par semaine dans un établissement de sa rue. MOUSSE. Créés à la fin du XIXe siècle pour faciliter l’accès à l’hygiène, les bains-douches se multiplient dans les années 30. C’est le cas de ceux de Bu- zenval (XXe), construits en 1927 dans un quartier populaire. A cette période, la ville implante des salles de bains communes pour permettre aux Pari- siens de se laver. Après-guerre, les dou- ches municipales se vident progressive- ment avec l’amélioration de l’habitat pour décliner à 300000 entrées à la fin des années 90. En mars 2000, la mairie de Paris décide d’en rendre l’accès gra- tuit, notamment pour améliorer l’hy- giène des plus démunis. Trois ans plus tard, le cap du million de douches est franchi. Et la tendance perdure. Un vendredi après-midi, Paris Ve. A quelques mètres des terrasses bondées de la place de la Contrescarpe, ils sont nombreux à converger au 50, rue Lacépède, un sac plastique à la main contenant une serviette et du savon. «Je viens aux bains-douches trois fois par se- maine», indique Henri, 48 ans, installé devant l’un des quatre lavabos, un ra- soir à la main. En arrivant, il a posé ses affaires dans la cabine numéro 13. Il l’a nettoyée à l’aide d’un jet à forte pres- sion, puis a sorti sa mousse à raser. «J’aime venir ici, c’est comme un culte, une église, cela m’aide. Et puis moi j’aime les gens!» clame d’une voix grave ce grand gaillard. Chez lui, à Vitry-sur- Seine (Val-de-Marne), il n’a pas d’eau chaude, car «cela coûte trop cher». Après s’être lavé, Danana(1), 36 ans, glane quelques renseignements. «C’est la première fois que je viens», annonce- t-il, souriant. Arrivé de Lyon pour signer un CDD de six mois, ce maître- nageur s’est retrouvé subitement sans logement. «Je devais récupérer l’appar- tement d’un ami, mais cela ne s’est pas fait. En attendant, je dors dans ma voi- ture. […] Je ne suis pas désocialisé, donc mentalement c’est facile à avaler.» Carte de l’Ile-de-France en mains, il grimpe sur son vélo pour rejoindre sa voiture, à 14 kilomètres de là. Un samedi midi, dans le XIXe arrondis- sement. «Inch’Allah! Un jour peut-être, j’aurais une douche chez moi», espère Halima, après s’être lavée dans l’une des 49 douches de la rue de Meaux. «Cela fait onze ans que je viens ici.» Construit dans les années 70, en pé- riode d’immigration, cet établissement accueille plus de 100000 visiteurs cha- que année, dont 10% à 15% de femmes. Sous le numéro de cabine, un large bout de scotch permet à l’agent d’inscrire à la craie l’heure d’entrée. «Normalement, c’est vingt minutes. Mais quand on peut, on leur laisse plus de temps», indique Marc Albéri. Agent rue de Meaux depuis six ans, il constate que la fréquentation des migrants évolue en fonction de la «proximité des conflits. Au moment du printemps arabe, il y avait plus de Tuni- siens. Et aujourd’hui, il y a davantage de Maliens». SQUAT. Un dimanche matin, dans le XXe arrondissement. Aux magnifiques bains-douches des Haies à la façade classée, un groupe de cinq Maliens finit de se préparer. Devant la glace depuis dix bonnes minutes, la tête sous le sé- choir, un peigne à la main, Oumar, 20 ans, se coiffe avec application. Autour de son poignet, un bracelet aux couleurs de l’Italie, d’où il vient d’arri- ver. Pour l’heure, il dort à Montry (Seine-et-Marne), dans un squat «sans eau et sans électricité», avec 80 personnes. «J’ai honte et ne sais pas quoi faire pour m’en sortir», s’in- quiète celui qui a quitté ses études à cause des troubles dans son pays. «Je veux apprendre le français», jure-t-il dans un italien impeccable. A la sortie, ses colocataires ne l’ont pas attendu. Il est midi. Les grilles se ferment derrière lui. «Je dois aller à Pyrénées, indique le chef d’établissement à l’un de ses agents. Ils ont cassé la vitre de la porte d’entrée, car on ne les a pas laissés se doucher.»• (1) Son prénom a été modifié à sa demande. «J’aime venir ici, c’est comme un culte, une église, cela m’aide. Et puis, moi, j’aime les gens!» Henri48ans REPORTAGE LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
  • 11. FRANCE • 11 Aux bains­douches de la rue des Haies, dans le XXe arrondissement de Paris, en mai. L’établissement a été construit en 1927. Il accueille aujourd’hui aussi bien des habitués que des migrants fuyant des conflits. REPÈRES 17C’est le nombre de bains­douches que compte la ville de Paris. A la fin de l’année, la mairie devrait rouvrir un établissement rue Rocher, dans le VIIIe arrondissement. «Nous avons un ancien militaire qui continue de venir alors qu’il a une salle de bains. Il a toujours été habitué aux bains-douches et préfère voir du monde que d’être seul.» MarcAlbériagentauxbains­douchesdelarue deMeauxàParis(XIXe arrondissement) 1 km PARIS Ier IIe IIIe IVe Ve VIe VIIe VIIIe IXe Xe XIe XIIe XIIIe XIVe XVe XVIe XVIIe XVIIIe XIXe XXe Bains-douches de Paris Créées à la fin du XIXe avec le mouve­ ment hygiéniste, les douches municipales sont un service public venant s’ajouter aux fontaines publiques et aux vespasiennes. Payantes, elles se généralisent dans les années 1920­1930, sont modernisées dans les années 50, et ont tendance à fermer dans les années 80, mais sont encore un service public dans des communes comme Paris, Nantes, Rouen ou Clermont­Ferrand. LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
  • 12. 12 • FRANCEXPRESSO U n militaire de 23 ans, «proche des idées de l’extrême droite ra- dicale», selon le ministère de l’Intérieur, a été déféré hier devant la section antiterroriste du parquet de Paris après quatre jours de garde à vue dans les locaux de la Direction cen- trale du renseignement intérieur (DCRI). Interpellé sur la base aérienne de Lyon-Mont Verdun le suspect «avait projeté de tirer à l’arme à feu contre une mosquée de la région lyon- naise», indique le communiqué de la Place Beauvau. Selon des sources pro- ches de l’enquête, ce jeune soldat aurait lancé, l’année dernière, un cocktail Molotov sur la porte d’une mosquée près de Bordeaux, ne faisant que peu de dégâts et pas de victime. Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a félicité les agents de la DCRI pour avoir «permis de mettre [le sus- pect] préventivement à la disposition de la justice et hors d’état de nuire». Et il a réitéré «son engagement le plus résolu à lutter contre toutes les violences s’ins- pirant des idéologies les plus extrémistes […] qui ont pour seul objectif de propa- ger un climat de haine. Aucune tolérance ne sera admise.» G À CHAUD LE SUSPECT A ÉTÉ DÉFÉRÉ HIER DEVANT LES JUGES ANTITERRORISTES UnsoldatauraitcibléunemosquéeàLyon Le procureur de Marseille, Jean­Jacques Fagni, devant la presse hier. PHOTO BORIS HORVAT.AFP L’ émotion était grande hier en fin de journée dans le centre de Mar- seille, sur les lieux où un homme de 22 ans a été poi- gnardé vendredi. Une tren- taine d’habitants et d’étu- diants de la même école (Euromed) que la victime se sont recueillis dans le silence en présence de Patrick Men- nucci, le maire (PS) du sec- teur. Le matin, Jérémie, ori- ginaire des Vosges et venu en vacances chez des amis, avait succombé au coup de cou- teau qu’il avait reçu la veille en allant chercher une amie à la gare Saint-Charles. Samedi soir, un individu d’une quarantaine d’années, qui semble correspondre au suspect repéré sur les images des caméras de surveillance, a été interpellé. D’après les premiers éléments, il s’agi- rait d’un SDF, connu des services de police pour vols et violences. Et souffrant de troubles psychiatriques. Dans un communiqué, le ministre de l’Intérieur, Ma- nuel Valls, évoque un indi- vidu «manifestement et gra- vement déséquilibré, qui fera l’objet de soins psychiatriques sans consentement». L’auteur présumé de l’agres- sion, qui se trouve dans un état «très délirant», a été examiné par un expert psy- chiatre qui a ordonné son in- ternement. L’arrestation de ce marginal, qui s’est faite sans difficulté, a été rendue possible grâce aux recoupe- ments faits entre l’enquête de voisinage effectuée par les policiers et les images de vidéosurveillance. L’agression de l’étudiant a eu lieu vendredi soir, aux alen- tours de 23 heures. Grave- ment blessé à la gorge, il se rend dans un bar situé boule- vard d’Athènes et explique à la gérante avoir été agressé, avant de s’effondrer. Son téléphone portable n’ayant pas été retrouvé sur les lieux de l’agression, les enquêteurs n’ont pas écarté, dans un premier temps, l’hypothèse d’une rixe provoquée par le vol du téléphone. Selon une source proche de l’enquête, l’homme interpellé, «qui ne semble pas avoir pris cons- cience de ses actes», est «bien sûr» le suspect numéro 1, «même s’il n’a pas pu être en- tendu», en raison de son état. A Marseille, la droite s’est emparée de ce drame pour relancer la polémique sur l’insécurité dans la cité pho- céenne. Pour le maire (UMP) de Marseille, Jean-Claude Gaudin, «cet acte de violence […] démontre la nécessité ab- solue pour l’Etat d’augmenter les effectifs et la présence poli- cière dans les rues de la deuxième ville de France». Le ministre de l’Intérieur a, lui, appelé tous les responsables publics à la retenue, «afin d’éviter les surenchères et polémiques déplacées». G.Li (avec AFP) EtudianttuéàMarseille: unsuspectinterné MEURTRE L’agresseur présumé de Jérémie, 22 ans, serait un SDF déséquilibré connu de la police. L a riposte du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, à l’enquête consacrée par Libération le 9 août au Bugaled Breizh ne s’est pas fait attendre. Dans sa missive, le patron des mi- litaires affirme que «tout a été fait depuis l’ouverture de l’enquête judiciaire pour faire émerger la vérité dans cette affaire tragique». Le 15 janvier 2004, le chalu- tier finistérien sombrait avec cinq marins à son bord, pro- bablement crocheté par un sous-marin militaire partici- pant à un exercice de l’Otan. Mais, après presque dix ans d’enquête, la justice s’apprê- terait à rendre un non-lieu, ce qui fait dire aux familles des victimes que «les autori- tés ont sciemment fait entrave à la manifestation de la vérité». Sur ce point, Jean- Yves Le Drian précise «qu’à chaque demande par la justice de déclassification de docu- ments classés “secret défense” ou “confidentiel défense”, le ministre se doit de solliciter l’avis de la commission consultative du secret de la dé- fense nationale. Cette commis- sion a émis à six reprises un avis favorable à la déclassifica- tion des documents réclamés par les juges. Avis que nous avons systématiquement sui- vis», fait-il valoir. Mais cette mise au point ne convainc pas Dominique Tricaud, l’un des avocats des parties civi- les: «Il est aujourd’hui établi que l’armée française a menti en niant les manœuvres sous- marines à proximité du lieu du naufrage, en ne montrant aux familles qu’un côté de l’épave du “Bugaled Breizh” [celui où l’on ne voit pas l’implosion de la cale, ndlr], et en inven- tant la fable d’un cargo voyou reprise en chœur par les gou- vernements successifs.» A ce jour, le ministère n’a pas accédéàlademandedespar- ties civiles qui réclament la déclassification des journaux de bord de certains bâti- ments en manœuvre au mo- ment du naufrage, comme l’aviso Commandant Blaison ou la frégate Primauguet. Or, ces journaux consignent tous les mouvements observés au cours de la navigation, que ce soit en veille visuelle, radar de surface ou en surveillance sous-marine. D’où leur im- portance cruciale.• PROFANATION La façade d’une petite salle de prière musulmane de Lesparre- Médoc (Gironde) a de nou- veau été dégradée dans la nuit de vendredi par des tags de croix gammées. Elle avait déjà fait l’objet, mardi, d’un début d’incendie et d’ins- criptions similaires. ACCIDENT Un passager du car, dont l’accident a fait deux morts et une trentaine de blessés, hier dans l’Aude, a avoué avoir fait donner un brusque coup de volant au chauffeur. Pour une raison indéterminée, cet Ukrainien souhaitait qu’il s’arrête. Cinq autres personnes sont mortes sur la route, samedi près de Carcassonne. ÉCHANGES Matignon sera le théâtre mercredi d’une «conversation entre [le phi- losophe] Marcel Gauchet et le Premier ministre, en- touré de ses conseillers», ont annoncé samedi les services de Jean-Marc Ayrault. Aujourd’hui, une autre «con- versation» est prévue, avec une dizaine d’enfants. ROUGE L’automobiliste dé- cédée après une collision avec un TGV, samedi soir sur un passage à niveau en Sa- voie, s’était engagée alors que le feu de signalisation était rouge. La femme d’une trentaine d’années aurait calé sur le passage à niveau avant que les demi-barrières ne se rabattent. 53%des Français sont oppo­ sés aux restrictions à l’accès à la propriété sur l’Ile de Beauté proposées par Paul Giacobbi, prési­ dent du Conseil exécutif de Corse, d’après un sondage Ifop pour le JDD, réalisé les 8 et 9 août. «Je le dis à tout le monde: il y a un Premier ministre, la succession n’est pas ouverte.» L’adresse est venue hier dans le Journal du dimanche de François Rebsamen, le président hollandais des sénateurs socialistes. Le message vaut pour le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, et le président de l’Assemblée, Claude Bartolone –qui se retrouveront le 18 à Fran­ gy­en­Bresse (Saône­et­ Loire)–, mais aussi pour le locataire de la place Beau­ vau, Manuel Valls. Ce der­ nier «sait être au service de sa popularité», une méthode qui «lui réussit plutôt bien», juge le maire de Dijon, qui se serait bien vu premier flic de France. Sur l’exercice du pouvoir, Rebsamen a regretté qu’il y ait «par moments une ges­ tion trop technocratique», appelant l’exécutif à s’appuyer davantage sur les parlementaires. Et enjoint les ministres et le PS à faire la pédagogie de l’action engagée, soutenant que le chef de l’Etat, lui, «a fait ce devoir d’explica­ tion». PHOTO REUTERS REBSAMEN DÉFEND AYRAULT ET TACLE VALLS LES GENS«C’est une information bidon. […] Visiblement, certains n’ont pas attendu le 15 août pour terminer la trêve, certaines petites manœuvres mesquines commencent.» JulienDrayvice­présidentduconseilgénérald’Ile­de­ France,réfutantsurlesiteLelab.europe1.frqueFrançois Hollandeluiaitproposéd’êtretêtedelisteauxeuropéennes, commel’affirmaithierleJournaldudimanche ParWILLYLEDEVIN «BugaledBreizh»: justeunemiseaupoint DROIT DE SUITE LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013
  • 13. AprèslacatastrophedeDacca, lacasseouvrièrecontinue Depuis l’effondrement au Bangladesh de l’immeuble du Rana Plaza, l’absence de prise en charge des employés rescapés est dénoncée dans un rapport. S elon un think tank bangla- dais indépendant, 750 em- ployés du Rana Plaza n’ont toujours pas reçu d’indem- nisation, plus de cent jours après l’effondrement de cet immeuble dans la banlieue de Dacca qui a fait 1131 morts le 24 avril. «Ils n’ont plus de travail, pas d’ar- gent. Ils sont dans une situation mi- sérable», dénonce Kalpona Akhter, une activiste. Pire: le syndicat des patrons du textile, le BGMEA (1), est incapable d’identifier les em- ployés présents le jour du drame. Il parle de 2760 person- nes. En réalité, il s’agi- rait plutôt de 3900. En publiant ces données dans un rap- port du 3 août, le Centre pour un dialogue politique (CPD) a fustigé le «manque de stratégie» du gou- vernement et du patronat. La situation est grave: certains blessés ne peuvent pas payer leur traitement médical, des familles sont sans ressources car elles n’ont pas retrouvé d’emploi. Les em- ployeurs n’ont pas réglé l’intégra- lité des salaires, ni des heures sup- plémentaires (pour 60 heures de travail par semaine, payées 30 à 80 euros par mois), ni les indemni- tés de licenciement ou les assuran- ces décès (1000 euros par mort). Et tous les ouvriers ne bénéficiaient pas d’assurances… CERCLE VICIEUX. La confédération syndicale IndustriALL chiffre les besoins d’indemnisation à 54 mil- lions d’euros, bien plus que ce que le textile bangladais est prêt à payer. Syndicats et ONG tentent donc d’impliquer les marques occi- dentales qui s’approvisionnent au Bangladesh. Mais peu d’entre elles ont accepté. Une réunion est pré- vue en septembre à Genève pour les inciter à participer. En juillet, les groupes occidentaux ont passé deux accords séparés (80 européens d’un côté, plus le ja- ponais Uniqlo depuis jeudi, et 17 nord-américains de l’autre) pour améliorer la sécurité dans les usines bangladaises qui les fournissent et financer des travaux de rénova- tion. Mais l’accord américain reste non contraignant. Et comment répertorier des usines qui bourgeonnent sans aucun con- trôle? Comment les superviser avec seulement 51 inspecteurs pour 6000 entreprises (200 supplémen- taires doivent être embauchés d’ici la fin de l’année)? Comment s’as- surer que les travaux sont réalisés? Autre problème: à chaque accident, le pays annonce des mesures qui n’entrent jamais en vigueur, faute de contrôles. Comment sortir du cercle vicieux? Le CPD réclame «un plan concret, des responsabilités bien établies, un échéancier précis», ainsi que de la transparence, un code de conduite et des organes in- dépendants de contrôle. Mais rien de tel n’existe dans ce pays gangrené par la corruption. Mêmes inquiétudes pour le statut des syndicats. Sur 5000, seules quelques dizaines d’usines textiles en ont. La loi a légèrement changé mi-juillet. Jusqu’ici, le patron était prévenu quand un employé se syn- diquait: le harcèlement commen- çait alors, jusqu’au licenciement. Cette clause a été supprimée mais, selon la militante Kalpona Akhter, «ça ne signifie pas que les tra- vailleurs vont rejoindre les syndicats. Dès qu’ils commencent à s’organiser, les patrons les en empêchent. Il fau- drait une protection des délégués.» Le problème est plus profond, déplore le président du CPD, Re- hman Sobhan: «Pour que nous soyons com- pétitifs, il faut que les employés n’aient aucun droit, qu’on puisse les licencier sans problème. C’est la flexibilité qui nous permet d’être compétitifs.» Le Rana Plaza a tragiquement illustré les conséquences d’un manque de syndicats. «Au matin de la tragédie, déclare Sobhan, la pression a été mise sur les travailleurs qui refusaient d’entrer [l’immeuble présentait des fissures, ndlr]: “Si vous n’y allez pas, vous perdrez votre job.” “Quel choix avais-je? ont dit les employés. Si je n’entre pas, qui va nourrir mes enfants, qui va payer leurs études?” Si ces ouvriers avaient fait partie d’un syndicat, aucun employeur n’aurait pu les obliger à risquer leurs vies.» «SERMONS». Kalpona Akhter note néanmoins que «l’on voit main- tenant certains employés refuser d’entrer dans leur usine tant que la sécurité n’est pas améliorée». Un petit progrès… Mais pour Sobhan, la tragédie per- pétuelle du Bangladesh tient à cette «relation inégale de travail» entre employeurs et ouvriers: «C’est un problème systémique. Il n’y a pas de gouvernance dans ce pays capable de réguler la situation. La seule régula- tion, c’est le marché.» Et l’enjeu n’est pas circonscrit au Bangla- desh, ajoute Sobhan. «On va avoir des sermons de nos partenaires : “Vous devez faire ceci et cela.” Mais comme la concurrence va se poursui- vre, Wal-Mart et les autres cherche- ront toujours les fournisseurs les moins chers car les clients occiden- taux regardent surtout le prix.» Le tee-shirt acheté 5 dollars au Bangladesh «sera toujours vendu 25 à New York». Il faut donc, selon lui, «exiger des grandes marques qu’elles rendent des comptes sur les richesses que créent nos productions». Ce n’est pas gagné.• (1) Bangladesh Garment Manufacturers and Exporters Association. ParMICHELHENRY «Il n’y a pas de gouvernance capable de réguler la situation. La seule régulation, c’est le marché.» RehmanSobhanprésidentduthinktankCPD RÉCIT Akhi, une ouvrière du Rana Plaza, faisait toujours partie des portés disparus le 24 mai, un mois après l’écroulement du bâtiment. PHOTO TASLIMA AKHTER 2000C’est le nombre de personnes mortes au Bangladesh dans des incendies ayant frappé des usi­ nes textiles depuis dix ans, selon le rapport du think tank CPD. BANGLADESH Golfe du Bengale BIRMANIE INDE INDE 100 km Dacca REPÈRES «Un grand nombre d’usines textiles fonctionnent en dehors des lois et en toute impunité.» LethinktankCPD danssonrapportdu3août 332victimes du Rana Plaza sont toujours portées manquantes. On a enterré 234 cadavres non identifiés. Des tests ADN sont en cours. LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 2013 ECONOMIE • 13
  • 14. [OULAISSEZ-LE...] A.CHANGEMENTD’ADRESSE B.SUSPENSIONÉTÉ A NOUS RENVOYER UNE DIZAINE DE JOURS AVANT VOTRE DÉPART A.MERCI DE NOTER MON ADRESSE DEVACANCES DU AU ADRESSE DE VACANCES COMPLÈTE: ADRESSE CODE POSTAL VILLE B. MERCI DE SUSPENDRE MON ABONNEMENT DU AU RÉFÉRENCE ABONNÉ(E) VOS COORDONNÉES HABITUELLES: NOM PRÉNOM ADRESSE CODE POSTAL VILLE EMMENEZ-LE Cet été, faites envoyer Libération directement à votre adresse de vacances [France métropolitaine uniquement] ou suspendez provisoirement votre abonnement COMMENT FAIRE?Rendez-vous sur www.libération.fr (pavé «gérer mon abonnement» à droite de la home page et enregistrez vous-même votre adresse d’été) ou remplissez le coupon ci-contre et renvoyez-le PAR FAX au: le 01 42 76 11 30 ou PAR COURRIER à Libération abonnement, B590-60643 CHANTILLY CEDEX [si vous le connaissez] MESSAGE RÉSERVÉ À NOS ABONNÉS N on, Pierre Moscovici n’a pas revu à la baisse, a-t-il martelé hier sur RTL, la prévision de croissance pour 2013. Oui, le ministre de Finances a bien assuré, la veille dans Nice- Matin, que la «croissance sera faible, voire étale, entre -0,1 et +0,1». Or, jusque-là, le gouvernement Ayrault ta- blait sur un mini-rebond de 0,1% du PIB. Le locataire de Bercy laisse donc entendre que cette prévision, qui sera affinée le 25 septembre lors de la présentation de la loi de fi- nance, tient de la fourchette haute. Et que le rebond es- péré a plus des allures de wishful thinking – vœu pieux– que de réalité écono- mique. A force de vanter les signes de convalescence, ce n’est plus de l’équilibrisme auquel se livrent les autorités françaises, c’est du funam- bulisme. «Il y a au moins un consensus pour dire que tout cela ne sera pas terrible, note un économiste. Moins 0,1 ou + 0,1, cela ne change pas grand-chose à l’arrivée: cela reste pathétiquement mau- vais». Mais ne pas terminer l’année sur une note récessive tient, pour l’exécutif, de l’impéra- tif. «Il y a quelque chose qui se passe», avait ainsi martelé mardi François Hollande, dans la foulée de son allocu- tion du 14 Juillet, où il avait tablé sur la «reprise» de l’économie. Ce volontarisme avait pris de court Moscovici qui avait dû assurer, dans la foulée, que la France était «sortie de récession». Sortie de la récession, peut- être (après avoir reculé au dernier trimestre 2012 et au premier trimestre 2013): le PIB devrait croître à nouveau au troisième trimestre, selon la Banque de France. Mais de là à claironner le retour de la croissance, il y a de la marge. Ou de l’incantation. Reste l’aveu, par le locataire de Bercy, de l’augmentation de 0,3% des prélèvements obligatoires pour le bud- get 2014. «Une hausse limitée, toujours dans la justice so- ciale», plaide Pierre Mosco- vici. «Une erreur majeure, s’étrangle Gilles Carrez, pré- sident de la commission des finances de l’Assemblée na- tionale. Comment voulez-vous que la consommation reparte si le pouvoir d’achat des mé- nages, en particulier des clas- ses moyennes, est encore altéré par une hausse de CSG pour le financement de la réforme des retraites?» Samedi, François Bayrou, président du Modem, avait rappelé que la chute de la production industrielle (-1,4% en juin par rapport à mai) et la hausse du déficit de l’Etat (+2,6 milliards fin juin sur un an) démentaient «l’optimiste affiché par le pouvoir». CHRISTIAN LOSSON «Sortiederécession»: l’œilde«Mosco» CROISSANCE Les prévisions du ministre des Finances, fluctuantes, tiennent de la méthode Coué. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) réduit légèrement ses prévisions de croissance de la demande mon- diale de pétrole pour cette année et la suivante. Pour 2013, l’AIE table désormais sur une hausse de 895000 barils par jour de la demande planétaire d’or noir, à 90,8 millions, alors qu’elle prévoyait une augmenta- tion de 930000 en juillet, détaille-t- elle dans son rapport mensuel sur le marché pétrolier. Et pour 2014, elle continue à tabler sur une accélération de la demande, qui devrait toujours atteindre un nouveau sommet à 92 millions de barils par jour, mais un peu moins forte qu’auparavant. Elle estime désormais la croissance de la consommation de brut à 1,1 million de barils par jour en moyenne, contre 1,2 million précédemment. L’agence a justifié ce léger abaissement par la révision à la baisse des prévisions de conjoncture du Fonds monétaire in- ternational (FMI). Cette année, le FMI ne prévoit plus qu’une croissance de l’économie mondiale de 3,1% (ali- mentée par les pays émergents), con- tre 3,3% en avril, et de 3,8% en 2014, au lieu de 4%. G À CHAUD LES PRÉVISIONS DE DEMANDE DE PÉTROLE SONT À LA BAISSE Laplanètemoinsgourmandeenornoir ParPHILIPPEBROCHEN DesproduitsSamsung boutéshorsdesEtats-Unis L a guerre des brevets en- tre Apple et Samsung, les deux leaders mon- diaux des smartphones et ta- blettes, ne connaît pas de trêve estivale. La marque à la pomme a obtenu vendredi l’interdiction de vente aux Etats-Unis d’appareils mobi- les de son rival sud-coréen, qu’il accuse de violer ses bre- vets. La décision a été prise par la Commission améri- caine du commerce interna- tional (USITC). Il y a une se- maine, la Maison Blanche avait cassé une décision si- milaire prise par l’USITC à la demande de Samsung contre les iPhone 3GS, 4, 4S et cer- tains iPad. Que reproche Apple à Samsung? La firme de Cupertino avait déposé plainte contre la firme sud-coréenne en août 2011, car elle estimait que certains smartphones et tablettes de son concurrent copiaient des fonctionnalités de ses iPhone et iPad. L’USITC a jugé des violations avérées pour deux brevets. Elles portent sur des techno- logies liées aux écrans tacti- les et à la détection d’acces- soires comme les écouteurs. Apple n’a toutefois pas gagné sur toute la ligne: l’USITC a rejeté ses accusations contre Samsung pour quatre autres brevets. Deux portaient sur la forme des appareils, et no- tamment les coins arrondis qui caractérisent les iPhone et les iPad. Quelles conséquences pour le sud­coréen? Samsung Electronics Ame- rica et Samsung Telecommu- nications America sont inter- dits «de continuer à importer, vendre et distribuer des articles qui enfreignent» ces deux brevets. La décision n’indi- que toutefois pas quels sont les appareils concernés. Mais selon des sites américains, les produits en cause seraient ses produits phares: les Ga- laxy S4G, Fascinate, Capti- vate, Galaxy Tab et Galaxy Tab 10.1, ainsi que des smart- phones et tablettes commer- cialisés en 2010 et 2011. Le groupe sud-coréen a laissé entendre que la portée de cette décision serait limitée. Les produits cesseront­ils d’être vendus? La décision de l’USITC ne prendra effet qu’après l’ex- piration d’un délai de deux mois durant lequel Obama peut opposer son veto. Washington y a eu recours la semaine dernière pour la première fois depuis 1987 en faveur d’Apple. Une décision interprétée comme du pro- tectionnisme par Séoul.• DÉCRYPTAGE La banque centrale allemande l’assurerait: la Grèce aura besoin début 2014 d’un nouveau soutien financier, selon Der Spiegel hier, citant un document de la Bundesbank. Une fuite qui pourrait relancer le débat sur l’attitude de la chance­ lière Angela Merkel, notam­ ment soupçonnée par Peer Steinbrück, leader du parti social­démocrate, de mini­ miser la situation financière de la Grèce pour ne pas compromettre ses chances de remporter les élections du 22 septembre. Athènes a déjà utilisé 90% des 240 milliards d’euros d’aides promises… QUERELLE OUTRE­RHIN SUR LA GRÈCE L’HISTOIRE NUCLÉAIRE Tepco, qui ex- ploite la centrale de Fukushima, a commencé à pomper de l’eau souterraine radioactive pour tenter de réduire les rejets dans l’océan Pacifique. ALIMENTATION Les produc- teurs d’œufs bretons sus- pendent leurs actions dans l’attente d’une réunion avec le préfet. Ils avaient détruit des œufs pour protester con- tre la faiblesse des cours. «Thorasoumis uneoffreàplus de1,18milliardde dollars[885millions d’euros,ndlr] àEmpireState BuildingAssociates.» JasonMeisterdufonds d’investissement enimmobilier LIBÉRATION LUNDI 12AOÛT 201314 • ECONOMIEXPRESSO
  • 15. LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr ET SI RAËL AVAIT RÉUSSI LA PHOTOCOPIE HUMAINE Untasde clonesrit REWIND Cet été, «Libération» transforme l’Histoire en fictions. Reportage en 2047 au grand raout des clones de France. C omme chaque année, le Clone Fest pose aujourd’hui ses quartiers au parc naturel du Gâtinais français (Essonne). Le rendez-vous, instauré en 2020, rassemble ceux qui se ressem- blent, nés depuis 2002 grâce aux 200271973 2013 L’ÉTÉDES40ANS ParÉRICLORETetGUILLAUMETION EnvoyésspéciauxauparcduGâtinais(Essonne) PHOTOJULIEGUICHES.PICTURETANK
  • 16. II • 20027 LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr efforts de la société Clonaid. Trois jours de partage en partenariat avec les associations 130 Millions d’Amis et Tel quel, mais aussi de débat, car tous ne sont pas amoureux de l’uniforme: quel- ques associations de dissidents, on le sait, souhaitent «rétablir les différen- ces». Pour mieux connaître leur quoti- dien, nous avons interrogé cinq clones de Francis, 65 ans, retraité de la marine. Ils ont entre 21 et 44 ans, sont ensei- gnant ou sociologue et ont traversé la vie dans l’ombre de leur modèle ou, comme ils disent, leur «numéro 1». «J’étais un peu leur maman» Fransix 44 ans, gardien de prison «Dans les cloneries [fratries de clones, ndlr], ce qui est primordial, c’est le ran- gement. Sans ça, on n’arrive à rien. Par exemple, 20 personnes qui cherchent leur deuxième chaussette dans le même dortoir, c’est pas possible. C’est un mo- tif d’éradication. Pour la première cam- pagne de clonage de Francis, on était apparus une douzaine. Dès 3 ans, cha- cun avait son rôle, par exemple, pour Francys, c’était les organes (lire ci- après); pour Francisse les actes admi- nistratifs; pour moi c’était l’inten- dance. Je devais m’occuper des onze autres. J’étais un peu leur maman, et avec moi, c’était carré. «J’ai eu une enfance plutôt agréable car on ne me demandait pas d’être bon en classe ou de servir d’esclave sexuel. Tant que j’arrivais à finir mes lessives, mon repassage, mon ménage et les courses, après avoir préparé le repas, mis la table et l’avoir débarrassée, fait un peu de vaisselle et rangé la maison, j’étais tran- quille jusqu’au petit déj du lendemain. J’avais pas à me plaindre. «Ensuite, je me suis occupé des clones des onze autres campagnes. Mais c’était pas pareil, on avait des problèmes de place, on a dû s’entasser dans des gar- de-meubles. J’avais comme une im- pression de déjà-vu. Et puis on était trop différents. En âge, je veux dire. Autant j’étais proche de mes premiers frères, que je pouvais reconnaître à l’odeur, autant ceux-là, j’étais infoutu de retenir ne serait-ce que leur prénom. Il y a eu des moments difficiles, c’est vrai, mais comme dans toutes les fa- milles de 145 personnes. Le pire, je crois, c’est le jour de l’anniversaire, ou celui du départ en vacances. L’impor- tant dans ces cas-là, c’est de rester uni, soudé. Une équipe.» «Putes à volonté, buffet gratuit soir et midi» Francys 28 ans, enseignant «Vous savez, on s’habitue. Chaque Clone Fest, c’est peut-être le dernier. On est une trentaine, je crois, à servir de réservoir d’organes pour Francis. Et Francis, son truc, c’est la picole. Il y a des gens qui clopent, bon, on peut leur changer un poumon et même avec un seul poumon, son clone survit. Ou un seul rein. Mais le foie, une fois qu’on me l’aura enlevé pour l’autogreffer à Francis, à la poubelle le Francys. C’est le progrès : Francis va mourir Depuis 2020, le Clone Fest rassemble ceux qui se ressemblent grâce aux efforts de la société Clonaid. PHOTO JULIE GUICHES. PICTURETANK
  • 17. • III20027 LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr POUR DE VRAI 1997 Messager des Elohim («nos créateurs») depuis 1973, Claude Vorilhon dit Raël fonde Clonaid, société promeuvant l’éternité par le clonage. 2000 Raël abandonne la direction de Clonaid à Brigitte Boisselier, ex­chimiste à Air Liquide et guide­évêque raélienne. 26 décembre 2002 Naissance annoncée, depuis la Floride, par Brigitte Boisselier, d’Eve, premier bébé cloné par sa société. Janvier 2003 Après avoir annoncé des preuves ADN du clonage d’Eve (que personne n’a jamais vue), Boisselier explique que les parents du bébé ne sont plus très chauds pour le test génétique. 13 janvier 2003 Le tribunal de Fort Lauderdale en Floride entame une procédure judiciaire contre Thomas Kaenzig, vice­ président de la société Clonaid. 2013 Le clonage humain reproductif n’a toujours pas été réalisé. beurré comme un Petit Lu sans jamais avoir frôlé la cirrhose. Moi, en re- vanche… «Bon, il y a des compensations. Putes à volonté, buffet gratuit soir et midi. J’ai de la chance, pour les filles, Francis a passé un deal avec une boîte russe, c’est de la qualité. Des clones de la même fille tous les week-ends, pour la sentimentalité, et des produits dif- férents tous les soirs de semaine. Côté bouffe, rien que du bio et du diététique, afin d’éviter qu’on meure d’obésité avant d’avoir livré nos organes. «Comme tous les CPM [clones précoce- ment mortels, ndlr], j’ai eu à choisir un métier en rapport avec mon savoir in- time de la mortalité. Les pompes funè- bres ou légiste, ça ne me disait trop rien. J’ai fait dans la facilité. Prof de philo. Apprendre à mourir, la révolte, l’être, tout ça. Mais cette année, je pré- pare des Immortels aux grandes écoles de communication. C’est la première fois, ça me plaît bien. Je leur fais les œuvres complètes d’Alan Harrington et Michel Houellebecq en extraits. Là, j’en suis au développement créatif comme passe-temps pour l’éternité, ça a l’air d’accrocher. Ils ont une disserta- tion à rendre pour l’an prochain : “Peut-on créer continûment sans deve- nir Dieu?” J’espère ne pas passer par la case morgue avant d’avoir fini le pro- gramme…» «Même les vaches ont des taches» Phrancis 21 ans, sans emploi «Je suis là mais en fait je ne suis pas là. J’ai pas le droit d’être là. S’ils me trou- vent ici, ils me rectifient d’emblée, s’il vous plaît notez que je ne suis pas là… [A la demande de Phrancis, son prénom a été modifié, ndlr.] Tout petit, j’ai com- mencé à me demander pourquoi on était autant à se ressembler. Quel inté- rêt de recouvrir la planète de personnes identiques, sans signe distinctif. C’est vrai, ça, même les vaches ont des ta- ches. Et puis j’ai compris. «Revenez dans deux cents ans, et vous ne trouverez plus qu’une dizaine de fa- milles qui peupleront la Terre. Le clo- nage thérapeutique, c’est du flan. Parce que le but, c’est pas de soigner, c’est de sélectionner les élus qui feront partie du grand shebaz, le voyage cosmique pour retrouver nos ancêtres Elohim. C’est ça la vérité, c’est aussi pour ça que le Clone Fest est organisé, pour qu’on ne se perde pas de vue. Les affiches du conseil général de l’Essonne, le barbecue à 14 heures, je veux bien, mais c’est une couverture. L’essentiel, c’est les yeux, regardez… Je te vois, tu me vois, on se comprend. Tu vois? «Raël, pour moi, c’est le seul qui peut nous sauver, il va briser le miroir. J’ai un contact avec lui. Tous les jours, il vient me voir, avec son manteau blanc il entre dans ma chambre, me de- mande si je vais bien, il prend soin de moi. Je sais qu’il sait que nous savons qu’ils savent. C’est pour ça que les cho- ses vont changer, ça va être différent, avec des différences. (Il crie) Des diffé- rences ! Après le barbecue, vous verrez… (Il est soudain ceinturé par des membres de la sécurité.)» «On veut un enfant non né» Francisse 39 ans, employé «C’est en visitant la mère de Francis que j’ai rencontré Polyne. Une fille sympa. Je ne peux pas me plaindre. D’ailleurs, Francis est plutôt cool avec moi. Je fais la queue à la poste, aux As- sédic, aux expos du Grand Palais, c’est moi qui cause aux garçons de café, évi- demment je travaille à sa place, bref tout le sale boulot, mais Francis aime bien se garder quelques activités. Par exemple, il bosse en été, pour mater les filles en jupettes et sandales. Pendant ce temps, je me repose. Là, c’est un peu pareil. Je vais voir sa mère tous les di- manches à sa place, mais Francis ne dit rien, rapport à mon histoire avec Po- lyne; tant que je fais la conversation avec sa daronne, que je lui apporte des chocolats, que je supporte ses chanta- ges au suicide… Polyne, c’est le clone 78 de la mère de Francis. Elle a 33 ans, elle est coiffeuse. On l’a fabriquée à l’épo- que où l’on croyait que Pauline, sa nu- méro 1, avait un don de divination et que ça pourrait servir d’en avoir plu- sieurs en cas de guerre, de canicule, de pénurie de lolcats… On s’est aperçu trop tard que Pauline n’avait aucun don. Elle se contentait d’écouter les voisins à tra- vers la cloison et de leur prédire ce qu’elle avait entendu. «Avec Polyne, je crois qu’on s’aime vraiment. On envisage de déposer une demande de stérilisation, afin d’être sûrs que notre enfant sera unique puis- que non né. Vous savez, être clone, c’est parfois dur. Je vois mon pote Rayanne, que son numéro 1 utilise pour pratiquer l’autofellation, c’est pas top glamour.» «Un moyen efficace de s’épanouir en société» Francyx 41 ans, sociologue «Dès 2005, le clonage a d’abord été une préoccupation des couples homo- sexuels, qui y voyaient un moyen sim- ple d’avoir des enfants, avant les lois sur l’adoption ou la PMA. Il y a eu les dé- bordements que l’on sait dans les cou- ples gays, chacun des partenaires se trouvant plus beau que l’autre et insis- tant pour que leur fils soit à son image. Chez les lesbiennes, à l’inverse, cha- cune voulait que la fille du couple soit le clone de sa partenaire. Assez vite, beaucoup de couples d’hommes se sont séparés. Chacun trouvait plus avanta- geux de vivre avec son seul clone que de supporter les humeurs d’un partenaire qui n’était, de fait, qu’une copie impar- faite de lui-même. «Mais la fracture décisive dans l’évolu- tion du clonage remonte à l’affaire des Grotowsky [en 2021, Boris Grotowksky a épousé le clone, alors âgé de 17 ans, de sa mère, clone qui a ensuite voulu se marier avec le clone d’un des jumeaux qu’elle avait eus avec Grotowsky, ndlr], qui, bien que ressortissant davantage à la psy- chiatrie, a eu des conséquences juridi- ques énormes, notamment la loi de dé- cembre 2024 sur l’encadrement marital des clones, qui deviendra deux ans plus tard la loi sur l’encadrement sexuel. «Aujourd’hui, le clonage reste un moyen efficace pour s’épanouir en so- ciété, c’est-à-dire en restant chez soi pendant que vos clones vous représen- tent au dehors. Il n’a plus, de par son encadrement juridique –et même, ne nous voilons pas la face, par une cer- taine lassitude de ses plus fervents sup- porteurs– cet attrait de l’interdit gé- mellaire et de la quête sexuelle infra-identitaire qu’il a pu générer jadis. Aujourd’hui, le “droit à la ressem- blance”, c’est un truc de vieux.»• Demain: Le rock n’est pas revenu à la mode. SurFranceInfojusqu’au24août avec 40ANS 40jourspourrevivre40années! Dulundiauvendredià9h15,lesamedià8h15etàréécoutersurfranceinfo.fr
  • 18. LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr VOUS PERMETTEZ? Conceptstores, duvideaubide Une robe Alaïa, en jersey, encolure carrée, à 2600 euros, en vente chez Colette? OK, on ajoute au panier. Notre petite entreprise ne connaît pas la crise. Des boucles d’oreilles «ailes» en or blanc 18 carats, sertis de diamants blancs et diamants noirs, Elise Dray à 11025 euros? Elles sont nécessaires pour écrire, on les fera passer en notes de frais, tant pis pour les clips qui pincent. La créatrice a un «instinct artistique», «une énergie positive», elle s’inspire de «son amour pour les animaux», et «ses idées bouillonnent», dit la présentation. Tout comme nous. Est-ce une chance ou un pléonasme, d’être ornée de son reflet? Et le doudou? Doit-il ressembler à l’enfant, comme le chien à son maître? Une marque américaine de poupées s’est posé cette question et c’est une vision d’horreur que de voir des milliers de petites filles, Frankenstein en goguette, choisir et composer la poupée qui leur ressemble le plus, dans un espace rose, immense, et sonore, accompagnées d’un double plus âgé toujours féminin, et d’autant plus double qu’il y a des miroirs. A l’opposé, le concept store Colette cultive la pièce unique, la rareté, et, avec elle, le manque. Concept store? Et pourquoi pas «marchand de couleurs», ou «tout à 10000 euros»? En 2002, dans le sillage de Colette, le concept store bat son plein, et les boutiques qui vendent du flan, «une ambiance», et un peu de soleil dans l’eau tiède, prolifèrent. Déjà, une dizaine d’années avant, lors de la publication de Qu’est-ce que la philosophie? coécrit avec Guattari, Deleuze s’insurgeait que des publicitaires s’octroient le concept de concept, propre à l’activité philosophique. «C’est quoi le concept de ta robe?» nous demande-t- on, tandis qu’on boit de l’eau dans le water bar de Colette, après avoir humé le luxe dans l’espoir et la crainte d’être contaminée: «un grand moment d’émotion» comme disent les rédactrices de mode après les défilés. Les clients de Colette «viennent de toutes les provenances sociales», c’est la cofondatrice et directrice artistique de la boutique qui l’assure au magazine Stratégie. En 2002, cependant, coincées entre l’éclatement de la bulle boursière et le 11 Septembre, le luxe a peur. Les ardeurs de la consommation et le désir de se distinguer s’écrouleront-ils à leur tour? Mais non. Tel James Bond 007, ils ont été les premiers à reprendre du poil de la bête. Dans le Nouveau Luxe, à paraître en septembre chez Stock, Yves Michaud explique: «Entre 1995 et 2012, le marché mondial du luxe est passé de 77 milliards d’euros à 212 milliards. Les prévisions du cabinet Bain and Co, spécialisé dans l’analyse de ce marché, tablent sur 230 milliards d’euros en 2014.» Qui plus est, il est devenu immatériel. Acheter du vent n’est plus à la portée de toutes les bourses.• ParANNEDIATKINE Larubriquedes chiensnécrosés ÇA VA ÇA VIENT L’Amibox promet un accueil éternel à nos animaux domestiques. J acques Dambron est de la race des inven- teurs foudroyants. Dès qu’un problème débarque, il se creuse les méninges et hop, eurêka, coup de génie. Par exemple: un jour de ciel gris, en 2002, son chien Bilou meurt. Un cocker. Triste his- toire. Jacques Dambron vou- lait enterrer Bilou mais rien ne faisait l’affaire. «Je n’ai pas trouvé de réceptacle, je l’ai enveloppé dans son plaid. C’était triste», expliquait-il à Libé après le drame. Avec l’énergie de l’endeuillé, il lance l’Amibox: le cercueil pour animaux. Brevet. Le principe est sim- ple, c’est comme pour les humains sauf que la boîte est plus petite (à voir pour les cadavres de Saint-Bernard) et qu’elle évite le chêne et l’acajou. Onze ans après le lancement, l’inventeur se souvient: «Je commercialisais des boîtes pour pièces anato- miques à l’époque, des boîtes pour recueillir les membres amputés, un bras, une jambe. J’ai appelé ça l’Anatbox. Je m’en suis inspiré pour le cer- cueil. J’ai déposé le brevet et tout de suite j’ai été appelé par des Anglais. Ils sont férus de petits animaux là-bas, les sou- ris et tout, ils sont fous de ça!» A quoi ressemble une Ami- box? Imaginez un cercueil Ikea, à assembler entre deux sanglots sur le tapis du salon. Ni clou ni vis, les quatre planches s’emboîtent. En- suite, à moins de vouloir creuser dans le potager la sé- pulture de Riri, Fifi ou Lou- lou, il vous faut un cimetière. Pourquoi pas Asnières-sur- Seine (Hauts-de-Seine)? As- nières pour un chien, c’est le Père-Lachaise pour un fan de Jim Morrison, sauf que la star ici s’appelle Rintintin. Dans les allées, gravés sur des stè- les marbrées, on croise les noms de feu les fidèles com- pagnons : Mémère, Titine mais aussi Roro, Hulk et le surprenant Robespierre, qui râle au fond de son trou. C’est qu’il y a du monde au dortoir d’Asnières, des chiens, des oiseaux, des la- pins nains ou pas, des hams- ters morts de fatigue, épuisés d’avoir trop couru, des pois- sons rouges, des lions, des singes… Ils sont plusieurs di- zaines de milliers à garnir les allées du premier cimetière animalier au monde, inau- guré en 1899. Alors cette Amibox, une arnaque? L’in- vention d’un truc vieux de cent quinze ans? La nuance est dans le prix : Jacques Dambron a pensé à celui qui n’a pas 3540 euros à claquer pour réserver 1 m2 de pelouse sur vingt ans. Voilà le but de l’Amibox: permettre, pour un peu plus de 30 euros, d’enterrer son furet domes- tiqué «dans la dignité». Pro- blème, les planches de peu- plier n’ont pas percé. Jouet. On aurait dû en trou- ver au supermarché, entre le jouet qui couine et la laisse à grelot. Jacques Dambron es- pérait en écouler 5000 par mois, il se voyait précurseur d’un secteur que la crise ne pouvait pas plomber puisque les chiens continueraient à mourir, quoi qu’il arrive. «Mais en France, le maître va chez le véto quand il sent la fin venir. L’animal est euthanasié puis congelé jusqu’à ce qu’une entreprise vienne le chercher pour la crémation. Ça se passe comme ça dans 90% des cas. Après, bien sûr, il reste des gens qui creusent leur jardin, mais encore faut-il en avoir un!» Du coup, Jacques Dambron a quitté la France. Comme d’autres patrons. Enfin, lui vit toujours en Alsace mais son Amibox a traversé la Manche. Les Anglais sont les derniers à lui trouver une utilité. Désormais, à Ribeau- villé, l’inventeur se consacre à Transhygiène, sa boîte de boîtes pour membres ampu- tés: «Je vends dans 350 hôpi- taux et cliniques sur toute la France. Ça marche bien.» MATHIEU PALAIN ETAUSSI CHAUDBIZ Tousceuxqu’on«M» A u Maroc, mariage royal. Rien à voir avec une version raï de Fred Astaire, mais de vraies épousailles entre Moham- med VI, monarque de droit divin, et Salma Bennani, jeune informati- cienne originaire de Fès (pas de bla- gues, svp). Elizabeth II est tristou- nette, elle perd sa mère, la bien nommée «reine mère» et sa sœur Margaret la même année. Chez les roturiers, Macaulay Culkin, qui avait été élu «l’enfant le plus mignon du monde» en 1994 (par un jury qui n’était pas uniquement composé de Michael Jackson), sort avec Mila Ku- nis (toujours pas de blague, svp). Ils resteront ensemble jusqu’en 2010. SURPRISE Ni clou ni vis, les quatre planches s’emboîtent. PHOTO DR IV • 20027
  • 19. LIBÉRATION Lundi 12 août 2013 www.liberation.fr D’un côté les bars à ginjinha où les anciens trempent leur moustache, de l’autre, la jeunesse et ses hangars discothèques au bord du Tage. PHOTO ALPH.B.SENY.DIVERGENCE Lisbonne comme du bon pain ÇA A EU LIEU Destination prisée, la ville est alors convoitée pour sa capacité à mêler le neuf et l’ancien. L es villes ont leur temps et leurs mo- des. Un peu avant Berlin et après Bar- celone, Lisbonne est l’une des destinations françai- ses branchées autour de 2000. Au point qu’en 2002, la nou- velle bande dessinée la célèbre en carnets de voyage. Il y a Du- puy et Berberian, aux éditions Cornélius, qui croquent l’acti- vité flegmatique de la capitale: silhouettes au téléphone, en voiture, sur des bancs, comme détachés des décors baroques de la cité. A chaque page, Lis- bonne apparaît comme un spectacle dont les deux dessi- nateurs chercheraient à com- prendre la mise en scène. Peu après, Nicolas de Crécy livre chez Casterman son Lisbonne, voyage imaginaire, une quaran- taine d’aquarelles obsédées par les enchevêtrements de rails, lignes électrifiées de tram, tremblement au loin d’une coupole blanche. Côté texte, Raphael Meltz (future revue R, de réel) raconte la ville sans l’avoir visitée, d’où l’«imagi- naire» du titre. Pourquoi Lisbonne à ce mo- ment-là ? Les visiteurs de l’époque ont ce sentiment, qui caractérise toute ville exci- tante, que l’ancien et le neuf s’y fertilisent mutuellement sous leurs yeux. D’un côté, azulejos et vieux bars à ginjinha (liqueur de griottes) où les an- ciens trempent leur moustache dès 9 heures du mat, et de l’autre, une jeunesse qui car- bure à la Sagres dans des han- gars démesurés au bord du Tage, friches industrielles de- venues temples postmodernes, certains ressemblant à Gotham City autant que les christs en cire des églises ressemblent ici, avec leurs perruques de crin, à des épouvantails divins. L’économie portugaise s’est fortement développée dans les années 80, et depuis 1994 l’Union européenne distribue au titre du développement «ré- gional» 3 milliards d’euros chaque année au pays, soit 3% à 4% de son PIB. L’embellie de Lisbonne est alors fulgurante, boostée en particulier par l’Ex- position internationale de 1998 qui pousse à la rénovation de ses infrastructures (le gigan- tesque pont Vasco-de-Gama en est l’exemple phare), décrasse les façades du quartier popu- laire de l’Alfama et déchaîne l’urbanisme sur les docks. Mais peu après 2002, la manne commence à s’épuiser. ÉRIC LORET ÇA PASSE OU ÇA CLASSE Mickaël T on prénom n’est pas anodin: il fait entrer la société française dans l’ère de l’inven- tivité à tout crin, de la créativité bon mar- ché dans les maternités. En particulier, les or- thographes multiples sont prisées. Exemple pour toi: Michael, Mickaël, Michæl, et ses dérivés, Mika, Michal, Michelhouellebecq… A part avec ce dernier, tu as peu de chance de finir DG ou DA d’une entreprise. La faute aux Michael (Jackson, Jordan) dont le nom a été francisé avec l’accent. Tu es le grand frère CSP- de tous les pauvres gars à venir: Kevin, Logan, Brandon, Ryan… Tout l’été, coupez, collez et reconstituez le dessin de Stéphane Blanquet sur une page de Libé (du 9 juillet). Les puzzles complets gagneront une surprise. PUZZLE • V20027