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De la crise financiĂšre Ă  la crise Ă©conomique : une analyse comparative
                                            France – Etats-Unis



                               Christophe Blot, Sabine Le Bayon, Matthieu Lemoine et Sandrine Levasseur
                                                                                                 OFCE


                                                 Version provisoire


Introduction
           La crise financiÚre, qui a éclaté en 2007 et se prolonge depuis, a sérieusement assombri
les perspectives d’emploi et de croissance. La France n’échappera probablement pas Ă  la
rĂ©cession en 2009. DĂ©jĂ , la situation s’est dĂ©gradĂ©e sur le front de l’emploi. Entre dĂ©cembre
2007 et 2008, le nombre d’inscrits Ă  l’ANPE a augmentĂ© de 217 000 personnes. La production
industrielle enregistre également une chute prononcée ; le dernier chiffre de novembre faisant
apparaßtre une baisse de plus de 9 % en rythme annuel. Si dÚs le départ, on pouvait anticiper
des rĂ©percussions rĂ©elles de la crise financiĂšre, l’ampleur et les mĂ©canismes prĂ©cis de la
transmission restent à mesurer. L’objectif de cet article est de proposer une premiùre
Ă©valuation des effets de la crise financiĂšre sur la France en prenant Ă©galement les Etats-Unis
comme point de comparaison. La rĂ©fĂ©rence amĂ©ricaine est d’autant plus pertinente que c’est
outre-Atlantique que la crise financiĂšre a Ă©clatĂ© et qu’elle prend toute sa dimension : crise
immobiliĂšre, crise bancaire et crise boursiĂšre.

                                                                             1
           De nombreuses tentatives d’évaluation du coĂ»t des crises bancaires et financiĂšres ont
Ă©tĂ© menĂ©es. Il s’agit systĂ©matiquement d’évaluations rĂ©alisĂ©es ex-post. De fait, l’issue de la crise
étant encore hautement incertaine, nous ne pouvons prétendre en mesurer tous les effets.
Simplement, notre ambition est d’aller au-delĂ  de l’analyse consistant Ă  prendre en rĂ©fĂ©rence la
dégradation observée du PIB dans quelques crises majeures2 pour inférer les risques et
l’ampleur de la rĂ©cession. Nous excluons dĂšs lors le recours aux mĂ©thodes purement
statistiques qui évaluent le coût de la crise à partir des différences de niveaux ou de taux de


1
    Voir Hoggarth et Saporta (2001) pour une revue de littérature.
2
    Voir Reinhart et Rogoff (2008).


                                                                                                     1
croissance du PIB entre une période de référence pré-crise et la période de crise3. Ces
approches se heurtent à des problÚmes de mesure assez épineux. PremiÚrement, il faut définir
précisément la durée de la crise. Ensuite, le coût dépend non seulement du type de mesure
retenu (taux ou niveau de la croissance) mais aussi du calcul d’une croissance de rĂ©fĂ©rence.
Bien souvent, on retient le taux de croissance moyen sur les 3 ou 5 années précédentes. Ce
type de calcul fournit des Ă©lĂ©ments d’apprĂ©ciation intĂ©ressants et surtout il permet d’établir
des comparaisons entre diffĂ©rentes crises sur la base d’un critĂšre commun4. D’autres
approches consistent Ă  dater prĂ©cisĂ©ment la crise et Ă  tester l’impact de l’occurrence d’une
crise sur le PIB dans des rĂ©gressions en panel oĂč la crise est reprĂ©sentĂ©e par des indicatrices
(DemirgĂŒc-Kunt, Detragiache et Gupta en 2000 ou Barrell, Davis et Pomerantz, 2006). MalgrĂ©
l’introduction de variables macroĂ©conomiques de contrĂŽle, cette approche ne prend pas en
compte la nature particuliĂšre du choc propre Ă  chaque pays sur les variables financiĂšres (taux
d’intĂ©rĂȘt, cours boursiers ou variables de crĂ©dits). Dans l’ensemble, ces Ă©valuations reposent
donc sur des hypothĂšses ad-hoc. Surtout, elles ne s’appuient pas sur les mĂ©canismes de
transmission des chocs et peinent à rendre compte des causalités structurelles.


         Une approche alternative et rigoureuse reposerait sur l’estimation d’équations
structurelles Ă  partir d’un modĂšle macroĂ©conomĂ©trique. Malheureusement, si les mĂ©canismes
théoriques de transmission des chocs, rappelés dans une premiÚre partie, sont clairement
identifiés, il reste que les analyses empiriques peinent à les mettre clairement et précisément
en Ă©vidence. C’est en particulier le cas des effets de richesse et d’amplification financiĂšre. Pour
ces derniers, les Ă©tudes basĂ©es sur des panels de banques ou d’entreprises donnent des
résultats probants5 mais ces effets sont ensuite faiblement significatifs au niveau agrégé. Dans
ces conditions, les modÚles macro-économétriques ne parviennent pas à modéliser de façon
satisfaisante les liens macro-financiers et les évaluations des effets des crises qui en découlent
doivent s’appuyer sur des hypothĂšses trop fortes qui ne sont pas forcĂ©ment rĂ©alistes. Barrel et
alii (2006) mesurent ainsi l’effet d’un choc financier en supposant notamment que les spread
entre les taux débiteur et créditeur - ou entre les taux privés et publics - augmentent de 8
points au moment du choc avant de diminuer progressivement pendant trois ans. C’est
pourquoi nous avons privilégié une modélisation de type VAR, présentée dans la deuxiÚme

3
  Voir Claessens, Kose et Terrones (2008) pour une analyse récente ou Bordo et alii (2001) pour une analyse
historique sur longue période.
4
  Un autre critĂšre d’évaluation consiste Ă  regarder le coĂ»t fiscal des opĂ©rations de sauvetage du systĂšme financier.
Cette approche dépend néanmoins de la stratégie budgétaire adoptée ce qui rend les comparaisons plus
délicates.
5
  Voir Loupias et alii (2003) ou Chatelain et alli (2003) pour des Ă©tudes sur la zone euro.


                                                                                                                   2
partie, qui permet d’estimer un modĂšle parcimonieux oĂč la nature des chocs et les causalitĂ©s
sont clairement identifiées. En utilisant la méthode des fonctions de réponse généralisée de
Pesaran et Shin (2008), nous montrons dans la troisiĂšme partie que les crises financiĂšres,
identifiĂ©es par des chocs boursiers, de taux d’intĂ©rĂȘt et d’incertitude, expliquent
significativement l’évolution de l’activitĂ© Ă©conomique. La dĂ©composition historique des chocs
nous conduit ensuite Ă  Ă©valuer la contribution des chocs financiers Ă  la baisse de la production
industrielle en France et aux Etats-Unis. En novembre 2008, un quart du cycle industriel serait
expliqué par la crise financiÚre en France. La transmission serait plus tardive aux Etats-Unis et
devrait plutĂŽt s’opĂ©rer dans les mois qui viennent.


1. Mise en perspective théorique de la transmission des chocs financiers
       La crise financiÚre actuelle marquée par la chute des bourses, le ralentissement (ou la
baisse) des prix immobiliers et la paralysie du marché interbancaire entraßne de nombreux
chocs qui vont se rĂ©percuter sur les dĂ©cisions de consommation et d’investissements des
agents non financiers et in fine sur la production. En effet, les agents font face Ă  un choc sur les
conditions de financement, sur leur richesse et enfin un choc d’incertitude (Spilimbergo et al.,
2008). Ce sont les mécanismes de transmission de ces chocs que nous présentons
successivement.


1.1. Le canal du coĂ»t du capital (ou canal du taux d’intĂ©rĂȘt)
       Le canal du coĂ»t du capital (autrement appelĂ©, canal du taux d’intĂ©rĂȘt) constitue le
principal mĂ©canisme de transmission de la politique monĂ©taire dans tout modĂšle d’inspiration
keynésienne. Dans un contexte de rigidités nominales des prix et des salaires, une baisse du
taux d’intĂ©rĂȘt, parce qu’elle diminue le coĂ»t du capital, se traduit par une hausse de
l’investissement des entreprises et donc, de la demande globale et de la production. Un
raisonnement symĂ©trique s’applique aux dĂ©cisions d’investissement en logement et
d’acquisitions de biens durables des mĂ©nages, oĂč la baisse du taux d’intĂ©rĂȘt correspond Ă  une
baisse du coĂ»t de l’emprunt.


       Pour que le canal du taux d’intĂ©rĂȘt opĂšre, deux Ă©lĂ©ments clĂ©s sont Ă  considĂ©rer (voir
Mishkin, 1995, 1996). D’une part, c’est le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el – plutĂŽt que nominal – qui affecte
les décisions des entreprises et des ménages, ce qui nécessite que les prix soient rigides.
D’autre part, puisque c’est le taux d’intĂ©rĂȘt Ă  long terme – plutĂŽt qu’à court terme – qui
gouverne leurs dĂ©cisions, il faut que les modifications du taux d’intĂ©rĂȘt Ă  court terme induites


                                                                                                  3
par les actions de la banque centrale entraĂźnent une modification correspondante du taux
                      6
(réel) à long terme .


         Dans le contexte actuel faiblement inflationniste et oĂč les taux d’intĂ©rĂȘt nominaux des
banques centrales se rapprochent de zĂ©ro, le fait que ce soit le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el (et non
nominal) qui influence les décisions des entreprises et ménages constitue un élément important
de la capacitĂ© des banques centrales Ă  stimuler l’économie. Toute nouvelle baisse du taux
d’intĂ©rĂȘt nominal, si elle suscite un regain d’inflation anticipĂ©e, diminue le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el et
par suite stimule l’investissement des entreprises, et donc la production. Dùs lors, des
anticipations dĂ©flationnistes (du fait d’un manque de confiance, par exemple) miment la
capacitĂ© des autoritĂ©s monĂ©taires Ă  soutenir l’activitĂ© via une baisse du taux d’intĂ©rĂȘt.7 A cela
s’ajoute les dĂ©lais de transmission du taux d’intĂ©rĂȘt directeur aux taux dĂ©biteurs pratiquĂ©s par
les banques commerciales8.


         Si l’intuition suggĂšre que ce canal puisse jouer un rĂŽle, l’incapacitĂ© des Ă©tudes
empiriques Ă  mettre en Ă©vidence une influence forte des taux d’intĂ©rĂȘt sur les dĂ©cisions
d’investissement des entreprises ou mĂȘme sur les dĂ©penses des mĂ©nages a conduit Ă  affiner les
canaux de transmission de la politique monétaire, et notamment à considérer le canal du crédit
et les effets « richesse ».


1.2. L’effet richesse
         L’effet richesse trouve ses fondements thĂ©oriques dans le revenu permanent de
Friedman. L’individu (ou « le mĂ©nage ») dispose d’une richesse, constituĂ©e de ses revenus
salariaux, de son patrimoine financier (actions, obligations etc.) et non financier (immobilier).
Cette richesse lui permet de dégager son revenu permanent (moyenne actualisée de ses


6
  Si, conformĂ©ment Ă  l’hypothĂšse des anticipations de la structure par terme, le taux d’intĂ©rĂȘt Ă  long terme est
une moyenne des prĂ©visions des taux d’intĂ©rĂȘt futurs Ă  court terme, la baisse du taux court (rĂ©el) entraĂźne une
baisse du taux long (réel) qui stimule investissement des entreprises et dépenses des ménages.
7
  Cette efficacitĂ© des autoritĂ©s monĂ©taires Ă  soutenir l’activitĂ© et ce, mĂȘme lorsque les taux d’intĂ©rĂȘt nominaux
tendent vers zĂ©ro, a constituĂ© l’un des principaux thĂšmes des dĂ©bats monĂ©taristes visant Ă  expliquer pourquoi
une politique monétaire expansionniste aurait pu éviter la chute de la production lors de la dépression des années
1930. L’efficacitĂ© supposĂ©e de la politique monĂ©taire est toutefois conditionnĂ©e par la capacitĂ© des autoritĂ©s Ă 
modifier les anticipations d’inflation.
8
  Ces délais différents selon le type de crédits ont été évalués à deux ou trois mois pour la France sur la derniÚre
décennie (Coffinet, 2005). Toutefois on ne peut pas exclure que la dégradation de la situation financiÚre des
banques les conduisent à moins répercuter et/ou plus tardivement les baisses des taux directeurs de la banque
centrale. Voir aussi Mishkin (2009) sur les délais de transmission des baisses de taux directeurs aux taux pratiqués
sur les crédits aux ménages et entreprises dans le cas de la crise actuelle aux USA.



                                                                                                                  4
revenus présents et futurs anticipés) sur lequel est fondée sa consommation. DÚs lors, tout
choc affectant nĂ©gativement la richesse de l’individu (e.g. une baisse du prix des actions et/ou
de l’immobilier) va rĂ©duire son revenu permanent et donc sa consommation. Si le choc nĂ©gatif
est transitoire – ou perçu comme tel –, l’impact sur la consommation sera lui-mĂȘme transitoire
et de faible ampleur du fait de l’actualisation sur l’ensemble des revenus prĂ©sents et futurs. En
revanche, si le choc nĂ©gatif est perçu comme permanent (e.g. l’éclatement de bulles sur le
marché boursier et immobilier), la réduction du revenu permanent sera importante, entraßnant
par là une réduction durable de la consommation.


        Au niveau empirique, la prise en compte des effets richesse pour expliquer la
consommation (agrĂ©gĂ©e) des mĂ©nages a Ă©tĂ© jusqu’à maintenant relativement dĂ©cevante, sauf
pour les USA ou encore le Royaume Uni. Deux principaux Ă©lĂ©ments expliquent cela. D’une
part, les mĂ©nages d’Europe continentale dĂ©tiennent une part relativement faible de leur
richesse en placements financiers, comparativement aux mĂ©nages amĂ©ricains ou mĂȘme
            9
britanniques . Cela a pour effet de rendre la consommation des mĂ©nages d’Europe
continentale peu sensible aux mouvements des cours boursiers. D’autre part, les mĂ©nages
anglo-saxons peuvent accroĂźtre leur endettement au fur et Ă  mesure que leur logement prend
de la valeur, source de financement qui se tarit lorsque l’immobilier se retourne, ce qui
contribue à faire baisser les dépenses des ménages. En Europe continentale, et tout
particuliĂšrement en France, le non recours au crĂ©dit hypothĂ©caire et la mise en place d’un
systĂšme de garantie alternative (la caution d’un tiers en cas de dĂ©faillance de l’emprunteur)
freine considĂ©rablement l’effet « richesse immobiliĂšre » (voir ECB, 2009). Pour ces deux
raisons, la croissance des revenus salariaux détermine davantage la croissance de la
                                                                              10
consommation en Europe continentale, comparativement aux USA ou au Royaume Uni . Le
corollaire est que la baisse du prix de l’immobilier (observĂ©e aux Etats-Unis depuis 2007) et la
chute des bourses depuis l’étĂ© 2007 nous permettent d’anticiper un impact plus faible sur
l’économie rĂ©elle en Europe continentale.




9
   Par exemple, Ă  la fin dĂ©cembre 2006, les placements financiers (produits d’assurance vie et fonds de pension
inclus) représentaient un peu plus de 23 % du patrimoine des ménages français contre 56 % de celui des ménages
américains. Les ménages britanniques étaient dans une position intermédiaire avec une part des placements
financiers comptant pour 36,5 % de leur patrimoine (Aviat et al., 2007).
10
   Pour une estimation des effets richesse, voir Houizot et al.(2000), Aviat et al.(2007), ECB (2009).


                                                                                                             5
1.3. L’importance des effets financiers
         La nature mĂȘme du choc qui affecte aujourd’hui l’économie place la sphĂšre financiĂšre
au cƓur de sa transmission vers l’économie rĂ©elle. Notamment, depuis les travaux dĂ©veloppĂ©s
par Bernanke et Blinder (1988) et Bernanke et Gertler (1995 et 1996), il est apparu que les
imperfections financiĂšres, rĂ©sultant des asymĂ©tries d’information, contribuent Ă  la transmission
mais aussi Ă  l’amplification des chocs monĂ©taires, rĂ©els ou financiers11.


         DiffĂ©rents mĂ©canismes conduisent Ă  ces phĂ©nomĂšnes d’amplification financiĂšre. Dans le
cadre du modĂšle d’accĂ©lĂ©rateur financier, les emprunteurs subissent une prime de financement
                                                                                         12
externe ; prime qui est propre à chaque débiteur et qui dépend de sa situation financiÚre . Le
coĂ»t du financement externe est alors d’autant plus Ă©levĂ© que les asymĂ©tries d’information
sont importantes et il diminue avec la richesse nette13. Dans ces conditions, tout choc –
monĂ©taire, rĂ©el ou financier – qui modifie les flux de revenu des agents non financiers ou rĂ©duit
la valeur des collatéraux se traduit par une augmentation de la prime de financement externe.
Les projets d’investissement ou de consommation14 des agents financiùrement contraints s’en
trouvent donc affectés, ce qui amplifie le choc initial. En outre, puisque la prime de financement
externe dépend de la richesse nette, les chocs entraßnent des effets de composition touchant
plus fortement les « petites » que les « grandes » entreprises.


         Le choc financier en cours, se traduisant Ă  la fois par un durcissement des conditions
financiĂšres, une baisse des prix des actifs financiers et immobiliers et un ralentissement des
perspectives de croissance future, dégrade automatiquement la situation financiÚre des agents
non financiers. L’accĂ©lĂ©rateur financier constitue de fait un vecteur important par lequel le choc
affectera la sphĂšre rĂ©elle via une baisse de l’investissement et de la consommation allant au-
delĂ  des effets de richesse ou de l’augmentation du coĂ»t du capital.


         Si l’accĂ©lĂ©rateur financier opĂšre une distinction entre financement interne et
financement externe, il n’accorde pas un rĂŽle spĂ©cifique aux banques dans ce processus.


11
   Voir Clerc et Pfister (2002) ou Bean et al. (2003) pour des revues de la littérature sur les différents mécanismes
d’amplification financiùre des chocs.
12
   La prime est liée aux coûts supplémentaires engagés par les créanciers pour contrÎler et vérifier les résultats
obtenus et dĂ©clarĂ©s par l’emprunteur.
13
   C’est-Ă -dire la capacitĂ© de l’emprunteur – mĂ©nage ou sociĂ©tĂ© non financiĂšre - Ă  apporter des garanties
constituĂ©es d’actifs (immobiliers et financiers) non gagĂ©s et diminuĂ©es des dettes.
14
   Les modùles envisagent initialement uniquement l’effet sur l’investissement mais il est assez direct de faire une
transposition Ă  la consommation des mĂ©nages oĂč les biens immobiliers sont utilisĂ©s comme collatĂ©ral (voir
Goodhart et Hofmann, 2007 ou Mishkin, 2007).


                                                                                                                   6
Pourtant, en tant que pilier du systĂšme financier, les banques jouent un rĂŽle essentiel dans le
financement de l’activitĂ© Ă©conomique. Le canal du crĂ©dit bancaire Ă©tablit justement que les
                                                                                       15
banques peuvent ĂȘtre amenĂ©es Ă  restreindre leur offre de crĂ©dits                            si elles sont dans
l’incapacitĂ© de trouver des substituts lors d’un choc rĂ©duisant leur financement16.


         C’est le sens des craintes soulevĂ©es actuellement sur le risque de credit crunch, c’est-Ă -
dire d’un rationnement de l’offre de crĂ©dits17, faisant suite au blocage du marchĂ© interbancaire.
Les banques centrales ont certes pris le relai en augmentant leurs interventions, mais il reste
que ce dysfonctionnement du marchĂ© prive les banques d’une partie de leur refinancement. En
outre, le choc peut ĂȘtre relayĂ© par un ralentissement probable de l’activitĂ© de titrisation. En
effet, Altunbas, Gambacorta et MarquÚs (2007) ont récemment montré que la titrisation avait
réduit la portée du canal du crédit en apportant une source de liquidité supplémentaire aux
établissements de crédit et en leur permettant de se soustraire aux exigences de fonds
propres. Si les opportunités de titrisation sont subitement réduites, le canal du crédit serait
rĂ©activĂ© en mĂȘme temps que les banques verraient une source de financement supplĂ©mentaire
se tarir.


         Enfin, Peek et Rosengren (1995) Ă©tablissent que les chocs sur le capital bancaire
peuvent Ă©galement conduire les banques Ă  restreindre leur offre de crĂ©dits dĂšs lors qu’elles
sont contraintes par des exigences réglementaires en matiÚre de fonds propres, ce qui
renforcerait alors le canal du crédit18. En effet, pour satisfaire leurs ratios prudentiels à la suite
d’un choc financier dĂ©gradant la qualitĂ© des actifs, les Ă©tablissements de crĂ©dit auraient le choix
entre diminuer leur exposition au risque en restreignant leur offre de crédits ou augmenter
leurs fonds propres. L’existence d’asymĂ©tries d’information rend nĂ©anmoins coĂ»teuse
l’émission de capital en particulier lorsque le contexte Ă©conomique et financier se dĂ©tĂ©riore. La
crise financiĂšre qui a Ă©clatĂ© durant l’étĂ© 2007 est particuliĂšrement propice Ă  des effets liĂ©s au
capital bancaire dans la mesure oĂč elle entraĂźne de multiples dĂ©prĂ©ciations d’actifs liĂ©s aux
dĂ©fauts sur les crĂ©ances immobiliĂšres, Ă  l’illiquiditĂ© des produits structurĂ©s et enfin Ă  la chute
des valeurs boursiĂšres. Si la recapitalisation des Ă©tablissements bancaires a pu en partie ĂȘtre

15
   Voir ECB (2008) pour une revue complÚte de cette littérature.
16
   Notamment les banques considérées comme « petites », celles qui sont moins bien capitalisées ou dont la
position est moins liquide. De nombreuses études sur les banques européennes insistent sur le rÎle de la liquidité
des Ă©tablissements (Erhman et alii, 2003 ou Loupiac, Savignac et Sevestre, 2003). Ashcraft (2006) pour les Etats-
Unis montre rĂ©cemment que l’appartenance Ă  un groupe bancaire attĂ©nue la portĂ©e du canal du crĂ©dit.
17
   On parle de rationnement quantitatif du crĂ©dit lorsqu’à conditions de financement et de risque identiques, les
banques réduisent leur distribution de crédit.
18
   On parle alors de canal du capital bancaire (voir Van den Heuvel, 2002).


                                                                                                                7
prise en charge par les gouvernements, le risque d’un ajustement du portefeuille de crĂ©dits
reste Ă©levĂ©. Ainsi, cette fois-ci, c’est par le biais d’une baisse de l’offre de crĂ©dits bancaires que
les dépenses des agents non financiers sont touchées.


1.4. Choc et incertitude
           Outre les aspects financiers liés au choc et à sa transmission, la crise en cours se traduit
par une augmentation de l’incertitude. Les perspectives de croissance et d’emploi sont non
seulement orientées à la baisse mais également plus incertaines (OFCE, 2008). Les entreprises
et mĂ©nages doivent alors prendre leurs dĂ©cisions d’investissement et de consommation dans
un environnement plus risqué, ce qui est susceptible de générer des comportements
attentistes. En prĂ©sence d’incertitude, l’épargne des mĂ©nages s’accroĂźt en raison du motif de
prĂ©caution ; effet qui est rĂ©guliĂšrement mis en avant dans les Ă©quations de consommation oĂč
                                                               19
l’incertitude est mesurĂ©e par les variations du taux de chĂŽmage . Pour les entreprises,
l’argument avancĂ© est liĂ© Ă  l’irrĂ©versibilitĂ© des dĂ©penses d’investissement. En effet, une fois
engagĂ©s, les coĂ»ts d’installation du capital peuvent difficilement ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©s. La dĂ©cision
d’investir peut alors ĂȘtre comparĂ©e Ă  l’exercice d’une option (Pyndick, 1988) : comme la
dĂ©cision est irrĂ©versible, la firme renonce Ă  l’opportunitĂ© d’investir en vue de le faire Ă  un
moment plus opportun. Ainsi, l’investissement ne devient rentable que lorsque les gains sont
supĂ©rieurs aux coĂ»ts d’installation du capital et au prix implicite de l’option, lequel s’accroĂźt
avec la volatilitĂ©. L’incertitude globale autour de la situation macroĂ©conomique devrait donc
inciter les entreprises Ă  reporter leurs dĂ©cisions d’investissement, freinant ainsi les dĂ©penses et
la production20.


2.       Une       modélisation          empirique         des   chocs     financiers :      aspects
méthodologiques
           Le recours à un modÚle de type VAR permet de simuler un cadre macroéconomique
simplifiĂ© et d’évaluer (de quantifier) l’impact de la crise financiĂšre sur l’économie. D’abord,
nous présentons les variables retenues dans notre modélisation puis nous précisons les aspects
méthodologiques ainsi que les estimations effectuées.


2.1. Les variables


19
     Voir Aviat et alii (2007) pour une modélisation récente.
20
     Cet argument est plus récemment repris par Bloom (2007).


                                                                                                     8
La spécification VAR retenue considÚre 6 variables : une variable réelle (l'indice de
production industrielle), une variable de prix (l'indice des prix Ă  la consommation), une variable
de coût du refinancement bancaire (le taux interbancaire à 3 mois) et trois variables visant à
capturer spécifiquement les canaux de transmission de la crise actuelle (le spread interbancaire,
les cours boursiers et la volatilité de ces derniers). Les estimations sont effectuées sur données
mensuelles sur la période 1974:1-2008:11, la date de fin de l'échantillon étant déterminée par
                                                       21
la disponibilité de l'indice de production industrielle .


         PrĂ©cisons l’introduction dans le VAR - et l’interprĂ©tation - de nos quatre derniĂšres
variables. En premiĂšre approximation, le taux interbancaire Ă  trois mois peut ĂȘtre considĂ©rĂ©
comme reflétant la politique monétaire menée par les autorités à court terme, puisqu'il intÚgre
les anticipations des marchĂ©s financiers sur les taux directeurs Ă  trois mois22. C’est notamment
le cas en période « normale ». Néanmoins, en période de crise, le taux interbancaire reflÚte
aussi les problĂšmes de liquiditĂ© des banques et, notamment d’assĂšchement en liquiditĂ©s23.


         Le spread interbancaire, qui mesure la différence entre le taux interbancaire à 3 mois et
le taux directeur (repo), constitue de ce point de vue un autre indicateur des difficultés de
refinancement des banques en période de crise. Idéalement, la variable pertinente pour rendre
compte de l’assĂšchement en liquiditĂ©s en pĂ©riode de crise - ou tout du moins, de « tensions » -
aurait Ă©tĂ© le volume des Ă©changes sur le marchĂ© interbancaire. Mais cette variable n’est pas
disponible en fréquence mensuelle sur longue période. La variable de spread interbancaire
constitue donc une proxy des problÚmes (quantitatifs) de liquidités auxquels font face les
banques en période de crise, au-delà du seul coût de la liquidité qui est lui mesuré par le taux
interbancaire. Notre spécification, avec taux interbancaire et spread interbancaire, ne prend en
compte que les premiers maillons de transmission de la crise actuelle. L’absence de sĂ©ries
longues sur le montant et le coût des crédits distribués aux entreprises et aux ménages ne
nous a pas permis de tester directement l’impact de la crise sur les conditions de financement
(prix et volumes de financement) des agents non financiers.


21
   Le traitement et les sources des données sont détaillés en annexe 1.
22
   Dans le cas de la France, la Banque de France jusqu’en 1999 et la Banque centrale europĂ©enne depuis lors ont
fixé les taux directeurs. Depuis 1999, le taux directeur est donc déterminé par les conditions économiques de la
zone euro et non pas seulement de la France. Toutefois, la conjoncture française est fortement corrélée à celle de
la zone euro.
23
   Pour illustration : entre le 16 septembre (suite Ă  la chute de Lehman Brothers) et le 10 octobre 2008 (jour de la
baisse du taux directeur de la BCE), le taux interbancaire a augmentĂ© en Europe de 50 points de base du fait d’un
assÚchement du marché en liquidités.


                                                                                                                  9
Le graphique 1 retrace l'Ă©volution des spreads interbancaires depuis 1974 pour la
France et met en exergue les chocs sur les spread (les « chocs » étant définis comme les écarts
                                                       24
supérieurs à 1,65 fois l'écart-type de la série centrée ) en explicitant les « évÚnements » qui les
sous-tendent (anticipations de changements de politique monétaire, notamment lors de
tensions sur le marché des changes, défiance entre banques etc.)25. Il faut noter que le choc de
spread actuel est beaucoup plus faible en France (et dans tout pays de la zone euro) qu’il ne
l’est aux Etats-Unis (110 points de base et 310 points respectivement en octobre 2008, au plus
fort des tensions)26. De prime abord, le choc de spread actuel apparait aussi relativement faible
par rapport aux chocs qui ont affecté la France au milieu des années 70 et à la fin des années
80-début des années 1990. Mais, depuis la fin des turbulences au sein du mécanisme de change
européen en 1996, la moyenne de ce spread a considérablement baissé (de 52 points de base
sur 1974-1995 Ă  27 points sur 1996-2008) de mĂȘme que son Ă©cart-type (de 63 points sur
1974-1995 à 23 points sur 1996-2008). L'épisode récent de hausse du spread
interbancaire apparait donc atypique par son ampleur et sa durée dans le contexte français de
la derniÚre décennie.


            Un autre indicateur confirme l’importance des tensions sur le marchĂ© interbancaire
dans la période récente : le spread entre le taux interbancaire à 3 mois et le taux sur bons du
TrĂ©sor français sur la mĂȘme Ă©chĂ©ance. Ce spread est non affectĂ© par les anticipations de
politique monĂ©taire, puisqu’elles sont inscrites dans les deux sĂ©ries, et reflĂšte donc uniquement
les assÚchements sur le marché interbancaire. Il était fin 2008 à un niveau historiquement
élevé27.
            Le cours boursier est un proxy de la richesse totale des agents. Malgré leur importance
pour le patrimoine des ménages, les prix immobiliers n'ont pas été retenus, car ils ne sont pas
disponibles en fréquence mensuelle. On peut toutefois considérer que les prix des actions sont
un bon indicateur de la richesse des différents agents privés (entreprises, ménages et
institutions financiĂšres). Au-delĂ  de cet effet de richesse, la chute des cours boursiers rend plus

24
     Ce qui revient à sélectionner 10 % des chocs considérés comme représentatifs des chocs importants.

25
  “Perhaps the most striking indicator of the various stages in the current crisis is the spread between the three-month
Euribor, an indicative rate for unsecured lending among banks, and the three-month euro overnight index average (Eonia)
swap rate. A strong increase of the spread in summer 2007 and in September 2008 reflects the reluctance of banks to
lend to each other, closely related to a general lack of transparency about the risks individual banks have been carrying
on their books” ( Gertrude Tumpel-Gugerell, Member of the Executive Board of the ECB, Speech of 22 January
2009).

26
     Le graphique représentant le spread interbancaire des Etats-Unis se trouve en annexe 2.
27
     La sĂ©rie n’étant disponible que depuis 1986, elle n’a pas pu ĂȘtre retenue pour l’estimation du VAR.


                                                                                                                     10
difficile le financement des entreprises et dégrade le bilan des entreprises et des institutions
financiÚres dont les actifs sont estimés à leur valeur de marché, ce qui pénalise les différents
projets d'investissement.


Graphique 1 : spread interbancaire en France
En points de base

                                                                                                                                            spread interbancaire en France
                                                                                                                                                                                                                                                                                   tensions sur les marchés
                                                                                                                                  nouvelles pressions contre                                                                                                                       des changes, accentuées
                                                                                                                                  le franc avant les Ă©lections                                                                                                                          par les Ă©lections
     350
                                                                                                                                   législatives de mars 1993                                                                                                                      présidentielles de mai 1995
                       sortie du franc du                                   attaques contre le franc, suite au relĂšvement des taux
                      serpent monĂ©taire                                       d'intĂ©rĂȘt allemands, aux dĂ©valuations de plusieurs
     300              en janvier 1974 et                                                                                                                                                                                                                                           nouvelles attaques contre le franc,
                                                                              monnaies au sein du SME et à l'incertitude liée au
                        maintien d'une                                        référendum sur le traité de Maastricht (septembre                                                                                                                                                   avant l'élargissement en aout 1993
                      politique monétaire                                                            1992)                                                                                                                                                                        des marges de fluctuations du MCE
     250
                            restrictive
                                                                                                          tensions sur le franc et
                                                                                                             libéralisation des
     200
                                                                                                         mouvements de capitaux                                                                                                                                                      pressions sur le franc,
                                                                                                            au 1er janvier 1990                                                                                                                                                   liées à l'incertitude autour
     150                                                                                                                                                                                                                                                                           des objectifs budgétaires
                                                                                                                                                                                                                                                                                     et de monnaie unique

     100


      50


       0


      -50
                                                                                                                                        politique monétaire
                                          tensions sur le franc                                                                       prudente malgré baisse
     -100
                                           et anticipations de                                                                            de l'inflation et
                                               dévaluation                                                                           apaisement des tensions
     -150                                                                                                                                       i d SME
            janv-74
                      janv-75
                                janv-76
                                           janv-77
                                                     janv-78
                                                               janv-79
                                                                         janv-80
                                                                                   janv-81
                                                                                             janv-82
                                                                                                       janv-83
                                                                                                                 janv-84
                                                                                                                           janv-85
                                                                                                                                      janv-86
                                                                                                                                                janv-87
                                                                                                                                                          janv-88
                                                                                                                                                                    janv-89
                                                                                                                                                                              janv-90
                                                                                                                                                                                        janv-91
                                                                                                                                                                                                  janv-92
                                                                                                                                                                                                            janv-93
                                                                                                                                                                                                                      janv-94
                                                                                                                                                                                                                                janv-95
                                                                                                                                                                                                                                          janv-96
                                                                                                                                                                                                                                                    janv-97
                                                                                                                                                                                                                                                              janv-98
                                                                                                                                                                                                                                                                        janv-99
                                                                                                                                                                                                                                                                                  janv-00
                                                                                                                                                                                                                                                                                            janv-01
                                                                                                                                                                                                                                                                                                      janv-02
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                janv-03
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          janv-04
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                    janv-05
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              janv-06
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        janv-07

                      La volatilité des cours boursiers est utilisée dans le modÚle comme proxy de                                                                                                                                                                                                                                                                janv-08


l'incertitude de l'économie globale, affectant de fait les décisions de dépenses des agents
économiques28. En période "normale", les mouvements de hausse et de baisse des cours
boursiers sont supposés graduels. Les épisodes de pics de volatilité sont dus, soit à des hausses
ou des chutes brutales du prix des actions, soit Ă  de forts Ă -coups journaliers, les hausses
succédant aux baisses dÚs qu'une nouvelle concernant la politique monétaire ou la situation de
l'économie est publiée. La chronologie de la volatilité boursiÚre pour la France depuis 1973 est
représentée dans le graphique 2. Y sont indiqués aussi les causes des chocs les plus importants,
i.e. supérieurs à 1,65 fois l'écart-type de la série centrée. Le pic de volatilité boursiÚre de
novembre 2008 en France est l'un des trois plus forts depuis trois décennies, avec celui lié au
krach boursier d'octobre 1987 et ceux de 2002-2003 liés à l'éclatement de la bulle Internet et
à la défiance comptable envers les bilans des entreprises suite aux scandales Enron et

28
     Pour d’autres proxies de l’incertitude (e.g. variabilitĂ© des profits), voir Bloom (2008).


                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                            11
Worldcom. Pour les Etats-Unis, le pic de volatilité récent est le plus fort depuis 1973, suivi de
prÚs par celui né du krach de 1987 (voir annexe 2).


Graphique 2 : volatilité boursiÚre en France
                                                                                                       volatilité mensuelle des cours boursiers en France                                                                                                                         aprÚs la faillite d'Enron
   écart-type annualisé                                                                                                                                                                                                                                                        (décembre 2001), scandale
                                                                                                                                                                                                                                                                                autour de worldcom et des
    40                                                                                                                                                                                                                                                                          manipulations comptables
                                                                                                                                           krach boursier d'octobre 1987
                                   contrĂŽle des prix
    35                             plus contraignant
                                    mis en place en
                                     octobre 1974                                          Ă©lection de
    30
                                                                                         Mitterrand aux                                                                                                                                                       attentats du 11
      1er choc                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   crise des subprime
                                                                                         présidentielles                                                                                                                                                     septembre 2001
       pétrolier
    25suite Ă  la
                                                                                                             tensions liées à
      guerre du                                                                                               la cohabitation                                                                                                          crise russe et
                 tensions liées à la                                                                                                                               Guerre du Golfe,                                                   faillite de LTCM
    20 Kippour                                                                                                entre Chirac et
                 situation en Iran et                                                                            Mitterrand                                        suite Ă  l'invasion
                   en Afghanistan                                                                              (privatisations                                         du Koweit
    15                                                                                                          notamment)
                                                                                                                                                                                                                            crise asiatique
    10


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   -10
         févr-73
                   févr-74
                             févr-75
                                       févr-76
                                                 févr-77
                                                           févr-78
                                                                     févr-79
                                                                               févr-80
                                                                                         févr-81
                                                                                                   févr-82
                                                                                                             févr-83
                                                                                                                       févr-84
                                                                                                                                 févr-85
                                                                                                                                            févr-86
                                                                                                                                                      févr-87
                                                                                                                                                                févr-88
                                                                                                                                                                          févr-89
                                                                                                                                                                                    févr-90
                                                                                                                                                                                              févr-91
                                                                                                                                                                                                        févr-92
                                                                                                                                                                                                                  févr-93
                                                                                                                                                                                                                            févr-94
                                                                                                                                                                                                                                       févr-95
                                                                                                                                                                                                                                                 févr-96
                                                                                                                                                                                                                                                           févr-97
                                                                                                                                                                                                                                                                     févr-98
                                                                                                                                                                                                                                                                               févr-99
                                                                                                                                                                                                                                                                                         févr-00
                                                                                                                                                                                                                                                                                                   févr-01
                                                                                                                                                                                                                                                                                                             févr-02
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       févr-03
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                 févr-04
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                           févr-05
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                     févr-06
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                               févr-07
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                         févr-08
2.2. La spécification du modÚle VAR
                   Dans sa forme canonique, le modĂšle VAR, estimĂ© par moindres carrĂ©s, s’écrit :
                       p
xt = c + ∑ Bi xt −i + et ,                                                               t = 1973m1,..., 2008m12
                    i =1


avec xt le vecteur (6×1) des six variables retenues, et le vecteur (6×1) des rĂ©sidus canoniques
de matrice de covariance Σ, Bi des matrices (6×6) de coefficients et p le nombre de retards.


                   Les tests statistiques et les critĂšres d'information donnant des informations
contradictoires sur le nombre de retards Ă  retenir. C'est finalement le test LR (likelihood ratio
ou rapport de vraisemblance) qui a été privilégié, sur la base des conclusions de De Serres et
Guay (1995). Selon ces derniers, les tests s'appuyant sur les critĂšres d'information (Akaike et
Schwartz) sous-estiment le nombre de retards et sont donc moins fiables que les tests
séquentiels (Wald et LR). Disposant de 419 observations mensuelles, nous avons effectué le
test LR avec un nombre maximum de retards de 6, afin de garder un nombre suffisant de
degrés de liberté. Pour la France, le test LR retient 4 retards (le critÚre d'Akaike étant minimal


                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   12
pour 2 retards). Pour les Etats-Unis, le test LR sélectionne 6 retards (le critÚre d'Akaike en
retenant 3). Nous retenons donc un modĂšle VAR d'ordre 4 pour la France et d'ordre 6 pour
les Etats-Unis.


            Les chocs structurels n’étant pas directement observables, ils doivent ĂȘtre dĂ©duits des
rĂ©sidus estimĂ©s. Plusieurs approches sont envisageables. Il s’agit en gĂ©nĂ©ral d’imposer certaines
contraintes identifiantes tel que les résidus estimés sont exprimés comme des combinaisons
linéaires des chocs structurels soit :
PΔ t = et

avec Δt le vecteur de dimension (6×1) des chocs structurels supposĂ©s rĂ©duits et P une matrice
de passage. En supposant par ailleurs que les innovations structurelles sont de variance
unitaire, on a :
PPâ€Č = ÎŁ
La décomposition de Choleski, réguliÚrement utilisée pour estimer les fonctions de réponse29,
suppose que P est triangulaire inférieure.


            L’impact de chocs non anticipĂ©s sur chacune des variables est dĂ©terminĂ© en utilisant la
reprĂ©sentation VMA (Vector moving average) du modĂšle, qui s’écrit :
               ∞                   ∞
xt = ÎŒ + ∑ Ai et −i = ÎŒ + ∑ Ai PΔ t −i ,
              i =0                i =0


oĂč l’espĂ©rance ÎŒ et les matrices Ai sont dĂ©terminĂ©es par inversion de la reprĂ©sentation
canonique. La fonction de rĂ©ponse, vecteur de dimension (6×1) contenant les rĂ©ponses de
chaque variable à un horizon (h) à un choc structurel affectant la jùme variable à l’horizon 0,
s’écrit alors :
ψ c (h) = Ah Pu j ,
  j                          h = 1, 2,...,

avec uj le vecteur (6×1) de sĂ©lection dont le jĂšme Ă©lĂ©ment est Ă©gal Ă  1 et les autres Ă©lĂ©ments sont
nuls. A chaque date (t), la dĂ©composition historique, dĂ©finie comme l’impact sur le vecteur xt
des chocs structurels passĂ©s et prĂ©sent affectant cette jĂšme variable, s’écrit :
        ∞
x cjt = ∑ Ai PU j Δ t −i ,       j = 1,..., k
       i =0




29
  Toutes les modĂ©lisations du type VAR structurel fonctionnent sur la mĂȘme logique. Elles se diffĂ©rencient
uniquement par le jeu de contraintes identifiantes adoptées.


                                                                                                             13
avec Uj la matrice (6×6) de sĂ©lection dont l’élĂ©ment de position (j,j) est Ă©gal Ă  1 et les autres
éléments sont nuls.


        Une critique inhérente à la décomposition de Choleski porte sur la dépendance des
rĂ©ponses estimĂ©es Ă  l’ordre dans lequel les variables sont placĂ©es dans le VAR. Il est alors
essentiel de placer les variables dans un ordre prĂ©cis pouvant ĂȘtre justifiĂ© par la vitesse
d’ajustement des diffĂ©rentes variables aux chocs contemporains. Ces hypothĂšses implicites
sont plus difficilement justifiables dĂšs lors que plusieurs variables financiĂšres sont introduites
dans le modĂšle. En effet, les taux d’intĂ©rĂȘt comme les variables boursiĂšres font l’objet de
cotations quotidiennes sur des marchés et devraient donc théoriquement intégrer rapidement
toute information nouvelle, c’est-Ă -dire rĂ©agir quasi-instantanĂ©ment aux chocs. Il est donc
délicat de supposer un ordre précis entre ces variables.


        C’est pourquoi nous utilisons l’approche des fonctions de rĂ©ponse gĂ©nĂ©ralisĂ©e
suggérée par Pesaran et Shin (1998). Les fonctions de réponse ainsi calculées ne dépendent
d’aucune hypothĂšse particuliĂšre mais uniquement des corrĂ©lations historiques estimĂ©es entre
les différents résidus. Elles sont alors données par la relation suivante :
               1
ψ g ( h) =             Ah ÎŁu j ,           h = 1, 2,...
               σ jj
  j


                                                                                    Ăšme
La rĂ©ponse des 6 variables Ă  l’horizon (h) Ă  un choc structurel affectant la j            variable Ă 
l’horizon 0 dĂ©pend donc, Ă  travers la matrice ÎŁ, de σjk, la covariance des rĂ©sidus des k
                                                                                           Ăšme
                                                                                                 et jĂšme
Ă©quations du VAR et de l’écart-type σjj du rĂ©sidu de la jĂšme Ă©quation. Les fonctions de rĂ©ponse
sont de fait indĂ©pendantes de l’ordre des variables ou de toute autre contrainte identifiante et
dĂ©pendent directement l’information contenue dans la matrice des variance-covariance. Il en
est de mĂȘme de la dĂ©composition historique qui, dans l’approche gĂ©nĂ©ralisĂ©e, s’écrit alors :
                 ∞
        1
xg =
 jt
        σ jj
               ∑ A ΣU e
                i =0
                        i     j t −i   .



3. La France et les Etats-Unis face Ă  la crise : une comparaison des effets de
la crise financiĂšre


3.1. Les fonctions de réponse aux différents chocs




                                                                                                    14
Les fonctions de réponse généralisées sont déterminées pour les deux modÚles
estimĂ©s : France et Etats-Unis. Avant de s’intĂ©resser plus prĂ©cisĂ©ment Ă  la contribution des
chocs à la dégradation de la production industrielle depuis le déclenchement de la crise de
2007, il est utile d’analyser les rĂ©ponses des diffĂ©rentes variables clĂ©s Ă  certains chocs
spĂ©cifiques afin d’avoir une idĂ©e plus prĂ©cise de la pertinence du cadre macroĂ©conomique.
Ainsi, il ressort que la production industrielle en France répond avec le signe attendu aux
diffĂ©rents chocs30 (graphique 3). Un choc sur l’inflation – assimilable Ă  un choc d’offre – exerce
un effet nĂ©gatif au seuil de 10 % sur la production aprĂšs 10 mois. Cet effet est durable puisqu’il
reste significatif jusqu’au 32Ăšme mois. L’impact du choc restrictif de politique monĂ©taire est
                                                           Ăšme
significatif au bout de 8 mois, atteint un pic au 13             mois et pĂ©nalise l’activitĂ© sur une durĂ©e de
15 mois. Ces rĂ©sultats sont assez conformes avec l’idĂ©e qu’il existe des dĂ©lais de transmission
de la politique monétaire et que les effets du choc sont persistants. Il ressort également que la
production industrielle réagit négativement lorsque des tensions apparaissent sur le marché
interbancaire. Une fois pris en compte les effets de la politique monétaire, une augmentation
non anticipĂ©e de l’écart entre le taux Ă  trois mois et le taux directeur de la banque centrale
dĂ©prime l’activitĂ©. L’effet est significatif aprĂšs 5 mois et jusqu’au 18Ăšme mois. Ce rĂ©sultat illustre
l’importance des conditions de refinancement des banques31 sur le marchĂ© interbancaire
comme mĂ©canisme de transmission de la crise actuelle Ă  la sphĂšre rĂ©elle32. L’impact du choc
boursier est Ă©galement significatif. La production industrielle s’amĂ©liore significativement entre
     Ăšme
du 5       au 15Ăšme mois lors d’un choc positif. Par symĂ©trie, nos estimations « prĂ©disent » une
baisse de la production industrielle en cas de choc négatif, i.e. de chute des cours boursiers.
Faute de données disponibles, notre spécification ne nous permet pas de distinguer dans la
transmission du choc boursier vers l’économie rĂ©elle, ce qui relĂšve des effets de richesse
transitant par la consommation de ce qui relĂšve des effets d’amplification financiĂšre liĂ©s Ă  la
baisse de la valeur des garanties apportées par les ménages et les entreprises. Des estimations
menées en parallÚle sur données trimestrielles semblent cependant mettre en évidence un
effet non significatif du choc boursier sur la consommation des ménages mais significatif sur
l’investissement des entreprises non financiùres33. Enfin, un accroissement de l’incertitude
fournit également une explication, généralement non prise en compte dans ce type de


30
   Des estimations ont Ă©tĂ© menĂ©es Ă  partir d’une variable d’emploi au lieu de la production industrielle mais les
résultats obtenus se sont avérés peu probants.
31
   L’effet des conditions de financement des entreprises non financiĂšres, mesurĂ© par l’écart entre les taux de
rendement des obligations privĂ©es et publiques, a Ă©galement Ă©tĂ© testĂ© mais n’est pas ressorti significativement.
33
 Globalement, des estimations rĂ©alisĂ©es sur donnĂ©es trimestrielles françaises permettaient d’obtenir des rĂ©sultats
qualitativement proches de ceux présentés ici.


                                                                                                               15
modĂ©lisation, Ă  la dĂ©gradation de la conjoncture. L’effet sur la production industrielle française
est significatif, montrant que les attitudes de wait-and-see des ménages et des entreprises en
pĂ©riode de crise constituent un Ă©lĂ©ment important de la baisse de l’activitĂ©. L’effet se transmet
assez rapidement puisqu’une augmentation de la volatilitĂ© non anticipĂ©e entraĂźne une baisse de
l’IPI dĂšs le 3Ăšme mois. L’impact maximal est observĂ© 10 mois aprĂšs le choc et n’est plus
significatif Ă  partir du 16Ăšme mois.


Graphique 3: RĂ©ponse de l’IPI France aux chocs

  0.004


  0.003


  0.002


  0.001


      0
           1   2   3   4   5   6   7   8   9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36

  -0.001


  -0.002


  -0.003


  -0.004


  -0.005

                                                  HPT3MR       HPSPRIB       HPNVOLATILITY      HPLSTOCKR        HPLCPI


Note de lecture : Les rĂ©ponses de l’IPI aux diffĂ©rents chocs ont Ă©tĂ© tronquĂ©es Ă  zĂ©ro dĂšs lors qu’elles n’étaient
pas significatives, les intervalles de confiance ayant été calculés à partir de simulations de monte carlo à plus ou
moins 1.645 Ă©cart-type soit un seuil approximatif de 10 %.


           Les rĂ©sultats obtenus pour les Etats-Unis Ă  partir d’une modĂ©lisation proche sont
globalement moins significatifs (graphique 4). Comme pour la France, le choc d’inflation est
significatif au seuil de 10 % et nettement persistant. De façon surprenante, un choc positif de
politique monĂ©taire (i.e. une hausse du taux d’intĂ©rĂȘt) n’a aucun effet nĂ©gatif sur la production
industrielle. Il ressort mĂȘme que l’impact de ce choc est initialement positif mĂȘme s’il ne dure
que les 4 premiers mois. De mĂȘme, les conditions du marchĂ© interbancaire ne ressortent que
faiblement et ne sont significatives, avec le signe espĂ©rĂ©, qu’au 6Ăšme mois. Les effets sont plus
importants pour le choc boursier et pour le choc d’incertitude. Notamment, les effets d’une
augmentation non anticipĂ©e de l’indice boursier sur l’indice de production industrielle sont


                                                                                                                                16
significatifs dĂšs le 4Ăšme mois, atteignent un pic au bout de 10 mois puis deviennent non
significatifs aprùs 18 mois. Comme pour la France, la prise en compte de l’incertitude semble
importante. Le choc – une augmentation non anticipĂ©e de l’incertitude – dĂ©grade l’activitĂ©
pour une durée de 5 mois dÚs le 4Úme mois.


Graphique 4: RĂ©ponse de l’IPI Etats-Unis aux chocs
     0.005


     0.004


     0.003


     0.002


     0.001


         0
              1   2   3   4   5   6   7   8   9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36
     -0.001


     -0.002


     -0.003


     -0.004


     -0.005


     -0.006

                                                    HPT3MR        HPSPRIB       HPNVOLATILITY      HPLSTOCKR        HPLCPI


Note de lecture : Les rĂ©ponses de l’IPI aux diffĂ©rents chocs ont Ă©tĂ© tronques Ă  zĂ©ro dĂšs lors qu’elles n’étaient pas
significatives, les intervalles de confiance ayant été calculés à partir de simulations de monte carlo à plus ou moins
1.645 Ă©cart-type soit un seuil approximatif de 10 %.


              En dehors de la production industrielle, d’autres rĂ©sultats mĂ©ritent d’ĂȘtre soulignĂ©s34.
Premiùrement, un price puzzle apparaüt dans les deux pays35. A la suite d’un choc restrictif de
politique monétaire, les prix ont tendance à augmenter pendant les 10 premiers mois en
France et pendant la premiÚre année aux Etats-Unis. Les prix reviennent ensuite
progressivement vers leur tendance tĂ©moignant ainsi d’une dĂ©crue de l’inflation qui
interviendrait tardivement. Nous pouvons supposer que le choc monétaire est en fait une
rĂ©action Ă  une augmentation anticipĂ©e de l’inflation, de telle sorte que malgrĂ© la hausse des


34
   Les différentes représentations graphiques des fonctions de réponse ne sont pas systématiquement reproduites
mais sont disponibles auprĂšs des auteurs.
35
   L’introduction des prix du pĂ©trole n’a pas permis de lever cette Ă©nigme, que la variable soit introduite comme
une endogĂšne supplĂ©mentaire ou de façon exogĂšne dans l’ensemble des Ă©quations.


                                                                                                                                   17
taux, les délais de transmission de la politique monétaire ne permettent pas de réduire
l’inflation immĂ©diatement.


       L’analyse des rĂ©ponses du taux d’intĂ©rĂȘt de court terme permet d’illustrer en partie la
fonction de rĂ©action des autoritĂ©s monĂ©taires lors de l’occurrence de chocs. Pour la France, il
ressort (voir graphique en annexe 3) que la réponse à une augmentation non anticipée des prix
est immĂ©diate. Le taux d’intĂ©rĂȘt continue Ă  augmenter au cours des 6 premiers mois puis
revient progressivement vers sa tendance, cessant d’ĂȘtre significativement plus Ă©levĂ© au bout
d’un an. Aux Etats-Unis (voir graphique en annexe 3), la rĂ©ponse est beaucoup plus courte et
                                                                   Ăšme
moins immĂ©diate, les taux n’augmentant qu’au cours des 2                 et 3Ăšme mois. La politique
monĂ©taire de la RĂ©serve fĂ©dĂ©rale est par contre beaucoup plus rĂ©active aux chocs sur l’IPI.
Une hausse de la production industrielle entraßne une augmentation rapide et prononcée du
taux d’intĂ©rĂȘt qui de plus est, durable puisque s’étalant sur 17 mois. En France, la dynamique
des taux d’intĂ©rĂȘt suite Ă  un choc favorable sur l’activitĂ© est similaire Ă  la rĂ©action obtenue pour
le choc d’inflation. A la suite d’un choc boursier, on observe d’abord une baisse des taux
d’intĂ©rĂȘt puis un durcissement significatif de la politique monĂ©taire Ă  partir du 10Ăšme mois. La
réponse des autorités monétaires américaines au choc boursier a un profil assez proche, une
baisse initiale des taux suivie d’une augmentation au bout de 5 mois. Ces rĂ©sultats tĂ©moignent
de l’ambigĂŒitĂ© de la relation entre politique monĂ©taire et les prix d’actifs. Aux Etats-Unis, il n’y
a pas de réponse significative à une hausse de spread interbancaire. En France, les taux
augmentent pendant 6 mois puis baissent au bout d’une annĂ©e. Cette dynamique pourrait
reflĂ©ter initialement des anticipations de poursuite d’un cycle de durcissement de la politique
monĂ©taire expliquant alors la montĂ©e du taux d’intĂ©rĂȘt interbancaire Ă  3 mois. La baisse
intervenant ultĂ©rieurement rĂ©sulterait d’une rĂ©ponse aux tensions, illustrant Ă©ventuellement la
réponse tardive des autorités monétaires lorsque la situation du systÚme bancaire se dégrade.
Enfin, la rĂ©ponse au choc d’incertitude est faiblement significative en France, avec un signe
positif. La RĂ©serve fĂ©dĂ©rale serait plus sensible Ă  l’augmentation de l’incertitude. Elle rĂ©agirait
en baissant ses taux 4 mois aprÚs le choc et pour une durée de 7 mois.


       Enfin, dans les deux pays, la rĂ©ponse des cours boursiers est cohĂ©rente avec l’effet
attendu des différents chocs non anticipés (voir graphiques en annexe 3). La bourse baisse
significativement lorsque les taux d’intĂ©rĂȘt augmentent, lorsque l’inflation accĂ©lĂšre, que le
spread interbancaire se dĂ©grade et lorsque l’incertitude s’accroĂźt.




                                                                                                 18
3.2. Impact historique des chocs financiers sur la production industrielle
        En utilisant la décomposition historique du cycle industriel, il est possible de mesurer
l’impact Ă  chaque date des chocs passĂ©s et prĂ©sents d’une variable donnĂ©e. Sur le graphique 5,
l’impact des chocs financiers sur le cycle industriel français cumule l’impact des chocs de cours
boursiers, de volatilitĂ© et de spread interbancaire. Cet impact s’est avĂ©rĂ© particuliĂšrement
nĂ©gatif (au-delĂ  des -5 % de l’IPI tendanciel) suite Ă  la crise financiĂšre de 1987, suite au krach de
la bulle internet en 2001 et suite à la crise des subprime de 2007. En revanche, les récessions du
dĂ©but des annĂ©es 1980 et 1990 s’expliqueraient davantage par l’impact des chocs de politique
monĂ©taire. En fin de pĂ©riode, l’impact des chocs financiers (estimĂ© Ă  -2,0 % en novembre
2008) prĂ©domine et expliquerait environ le quart du cycle industriel (-7,6 %). A l’avenir, si les
chocs financiers futurs Ă©taient nuls, ce qui reviendrait Ă  supposer un retour Ă  la normale sur les
marchés financiers, les chocs passés continueraient à peser négativement sur le cycle industriel
avec un impact maximal en juin 2009 (de -5,8 %), partiellement compensĂ© par l’effet d’une
politique monétaire expansionniste (+1,0 %).


        Aux Etats-Unis, le krach de la bulle Internet et la crise des subprime impriment plus
fortement leur marque que les crises financiÚres précédentes (graphique 6). Les chocs de
politique monĂ©taire tĂ©moignent quant Ă  eux d’un impact moins pro-cyclique au dĂ©but des
années 1990 et deviennent nettement contra-cycliques en 1995. En fin de période,
contrairement Ă  la France, l’impact des chocs financiers (estimĂ© Ă  +0,3 % en novembre 2008)
ne pĂšse pas encore sur le cycle industriel (-5,0 %). La volatilitĂ© boursiĂšre s’étant envolĂ©e plus
tĂŽt, son impact nĂ©gatif est dĂ©jĂ  visible, mais l’accĂ©lĂ©ration de la chute des prix des actifs
boursiers et l’explosion du spread interbancaire, observĂ©es en septembre 2008, sont trop
rĂ©centes pour que leur impact nĂ©gatif apparaisse en novembre 2008. En l’absence de chocs
futurs, les chocs financiers toucheraient ensuite rapidement la production industrielle, avec un
impact maximal en février 2009 (de -5,3 %). Comme en France, cet impact serait en partie
compensĂ© par l’effet d’une politique monĂ©taire expansionniste (+1,2 %).




                                                                                                  19
Graphique 5. Impact historique des principaux chocs sur le cycle industriel français
          En % de l'IPI tendanciel
  10%




   5%




   0%




  -5%




  -10%

                                                 Cycle industriel
                                                 Impact des chocs financiers
                                                 Impact des chocs de politique monétaire
  -15%
         1975M01
                   1975M12
                             1976M11
                                       1977M10
                                                  1978M09
                                                            1979M08
                                                                      1980M07
                                                                                1981M06
                                                                                          1982M05
                                                                                                    1983M04
                                                                                                              1984M03
                                                                                                                        1985M02
                                                                                                                                  1986M01
                                                                                                                                            1986M12
                                                                                                                                                      1987M11
                                                                                                                                                                1988M10
                                                                                                                                                                          1989M09
                                                                                                                                                                                    1990M08
                                                                                                                                                                                              1991M07
                                                                                                                                                                                                        1992M06
                                                                                                                                                                                                                  1993M05
                                                                                                                                                                                                                            1994M04
                                                                                                                                                                                                                                      1995M03
                                                                                                                                                                                                                                                1996M02
                                                                                                                                                                                                                                                          1997M01
                                                                                                                                                                                                                                                                    1997M12
                                                                                                                                                                                                                                                                              1998M11
                                                                                                                                                                                                                                                                                        1999M10
                                                                                                                                                                                                                                                                                                  2000M09
                                                                                                                                                                                                                                                                                                            2001M08
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      2002M07
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                2003M06
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          2004M05
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                    2005M04
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              2006M03
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        2007M02
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                  2008M01
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                            2008M12
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      2009M11
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                2010M10
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          2011M09
Note : les chocs financiers désignent ici les chocs sur les prix boursiers, sur la volatilité boursiÚre, ainsi que les
chocs de spread interbancaire. Les chocs de politique monétaire désignent ceux portant sur le taux interbancaire à
3 mois.
Source : Datastream, calculs des auteurs.

Graphique 6. Impact historique des principaux chocs sur le cycle industriel américain
          En % de l'IPI tendanciel
  10%




   5%




   0%




  -5%




  -10%

                                                 Cycle industriel
                                                 Impact des chocs financiers
                                                 Impact des chocs de politique monétaire
  -15%
         1975M01
                   1975M12
                             1976M11
                                       1977M10
                                                  1978M09
                                                            1979M08
                                                                      1980M07
                                                                                1981M06
                                                                                          1982M05
                                                                                                    1983M04
                                                                                                              1984M03
                                                                                                                        1985M02
                                                                                                                                  1986M01
                                                                                                                                            1986M12
                                                                                                                                                      1987M11
                                                                                                                                                                1988M10
                                                                                                                                                                          1989M09
                                                                                                                                                                                    1990M08
                                                                                                                                                                                              1991M07
                                                                                                                                                                                                        1992M06
                                                                                                                                                                                                                  1993M05
                                                                                                                                                                                                                            1994M04
                                                                                                                                                                                                                                      1995M03
                                                                                                                                                                                                                                                1996M02
                                                                                                                                                                                                                                                          1997M01
                                                                                                                                                                                                                                                                    1997M12
                                                                                                                                                                                                                                                                              1998M11
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                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      2002M07
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                2003M06
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                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                  2008M01
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                            2008M12
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      2009M11
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                2010M10
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          2011M09




Note : mĂȘmes dĂ©finitions des chocs que pour le graphique prĂ©cĂ©dent.
Source : Datastream, calculs des auteurs.



                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          20
Conclusion
        Afin de mesurer l'impact de la crise financiÚre sur l'activité en France et aux Etats-Unis,
nous avons estimé un modÚle VAR structurel, contenant un bloc classique (production, prix,
taux d’intĂ©rĂȘt) et intĂ©grant en outre des variables susceptibles de rĂ©vĂ©ler les chocs financiers,
soient un spread interbancaire (pour capter l’assĂšchement en liquiditĂ©s), les cours boursiers
(pour capter les effets « richesse ») et la volatilité des cours boursiers (pour capter l'effet de
l'incertitude sur les dĂ©cisions d’investissement et de consommation des agents). Les fonctions
de rĂ©ponse aux chocs structurels ont Ă©tĂ© obtenues dans le cadre d’une approche gĂ©nĂ©ralisĂ©e Ă 
la Pesaran et Chin (1998), ce qui nous permet de ne pas formuler d’hypothùses (ad hoc) quant
aux délais de transmission de chaque type de choc. Les fonctions de réponse obtenues pour la
France et les États-Unis sont interprĂ©tables Ă©conomiquement, ce qui lĂ©gitime les estimations
obtenues et leur qualité. Ainsi, un choc d'inflation, interprétable comme un choc d'offre négatif,
a un impact récessif sur la production, tout comme un resserrement de la politique monétaire
ou des tensions sur le marché interbancaire. Une baisse des cours boursiers entraine une
chute de la production industrielle. Enfin, une augmentation de la volatilité et, donc de
l'incertitude, se traduit bien par une dĂ©gradation de la production. Dans le cas français, c’est le
choc de volatilité qui se répercute le plus rapidement sur l'activité, suivi des chocs sur le spread,
sur les actifs boursiers, puis sur les taux interbancaires et enfin sur les prix.


        Dans le cas français, nos estimations montrent que les chocs financiers (i.e. chocs
boursiers, de volatilité et de spread interbancaire) expliquent environ un quart du cycle
industriel en novembre 2008. De plus, si l’on se base sur les chocs financiers connus jusqu'en
novembre 2008, l'impact (négatif) sur l'activité serait maximal en juin 2009, et trÚs
partiellement compensé par le caractÚre expansionniste de la politique monétaire. Aux Etats-
Unis, l'impact négatif maximal serait observé en février 2009.


        Deux éléments non pris en compte par notre modÚle pourraient toutefois conduire à
des projections plus pessimistes qu’un simple redĂ©marrage Ă  partir du second semestre 2009.
D’une part, les impacts des chocs financiers sont projetĂ©s en supposant que ces chocs sont
nuls Ă  partir de dĂ©cembre 2008, ce qui n’est malheureusement pas le cas au vu des donnĂ©es les
plus rĂ©centes. Seul le spread interbancaire semble ĂȘtre revenu Ă  des niveaux « normaux » en
France. D’autre part, du fait de la faiblesse de l’historique disponible pour les enquĂȘtes sur les
conditions de crĂ©dit et pour le crĂ©dit distribuĂ©, nous n’avons pu mesurer explicitement les


                                                                                                  21
restrictions dans l’octroi des crĂ©dits, alors que des Ă©tudes rĂ©centes (Lown et Morgan, 2006)
sur donnĂ©es amĂ©ricaines montrent que cette variable permet de capter les effets d’offre de
crédit et jouent un rÎle dans la transmission à la sphÚre réelle. Le durcissement déclaré des
conditions de crédits, dÚs le troisiÚme trimestre 2007, pourrait donc également expliquer la
dĂ©gradation de la conjoncture. D’ailleurs, les analyses rĂ©centes36 visant Ă  Ă©valuer le niveau de
stress financier intÚgrent ce type de variables dans des indicateurs synthétiques.




36
     Guichard et Turner (2008), IMF (2008) et Swiston (2008).


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  • 1. De la crise financiĂšre Ă  la crise Ă©conomique : une analyse comparative France – Etats-Unis Christophe Blot, Sabine Le Bayon, Matthieu Lemoine et Sandrine Levasseur OFCE Version provisoire Introduction La crise financiĂšre, qui a Ă©clatĂ© en 2007 et se prolonge depuis, a sĂ©rieusement assombri les perspectives d’emploi et de croissance. La France n’échappera probablement pas Ă  la rĂ©cession en 2009. DĂ©jĂ , la situation s’est dĂ©gradĂ©e sur le front de l’emploi. Entre dĂ©cembre 2007 et 2008, le nombre d’inscrits Ă  l’ANPE a augmentĂ© de 217 000 personnes. La production industrielle enregistre Ă©galement une chute prononcĂ©e ; le dernier chiffre de novembre faisant apparaĂźtre une baisse de plus de 9 % en rythme annuel. Si dĂšs le dĂ©part, on pouvait anticiper des rĂ©percussions rĂ©elles de la crise financiĂšre, l’ampleur et les mĂ©canismes prĂ©cis de la transmission restent Ă  mesurer. L’objectif de cet article est de proposer une premiĂšre Ă©valuation des effets de la crise financiĂšre sur la France en prenant Ă©galement les Etats-Unis comme point de comparaison. La rĂ©fĂ©rence amĂ©ricaine est d’autant plus pertinente que c’est outre-Atlantique que la crise financiĂšre a Ă©clatĂ© et qu’elle prend toute sa dimension : crise immobiliĂšre, crise bancaire et crise boursiĂšre. 1 De nombreuses tentatives d’évaluation du coĂ»t des crises bancaires et financiĂšres ont Ă©tĂ© menĂ©es. Il s’agit systĂ©matiquement d’évaluations rĂ©alisĂ©es ex-post. De fait, l’issue de la crise Ă©tant encore hautement incertaine, nous ne pouvons prĂ©tendre en mesurer tous les effets. Simplement, notre ambition est d’aller au-delĂ  de l’analyse consistant Ă  prendre en rĂ©fĂ©rence la dĂ©gradation observĂ©e du PIB dans quelques crises majeures2 pour infĂ©rer les risques et l’ampleur de la rĂ©cession. Nous excluons dĂšs lors le recours aux mĂ©thodes purement statistiques qui Ă©valuent le coĂ»t de la crise Ă  partir des diffĂ©rences de niveaux ou de taux de 1 Voir Hoggarth et Saporta (2001) pour une revue de littĂ©rature. 2 Voir Reinhart et Rogoff (2008). 1
  • 2. croissance du PIB entre une pĂ©riode de rĂ©fĂ©rence prĂ©-crise et la pĂ©riode de crise3. Ces approches se heurtent Ă  des problĂšmes de mesure assez Ă©pineux. PremiĂšrement, il faut dĂ©finir prĂ©cisĂ©ment la durĂ©e de la crise. Ensuite, le coĂ»t dĂ©pend non seulement du type de mesure retenu (taux ou niveau de la croissance) mais aussi du calcul d’une croissance de rĂ©fĂ©rence. Bien souvent, on retient le taux de croissance moyen sur les 3 ou 5 annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Ce type de calcul fournit des Ă©lĂ©ments d’apprĂ©ciation intĂ©ressants et surtout il permet d’établir des comparaisons entre diffĂ©rentes crises sur la base d’un critĂšre commun4. D’autres approches consistent Ă  dater prĂ©cisĂ©ment la crise et Ă  tester l’impact de l’occurrence d’une crise sur le PIB dans des rĂ©gressions en panel oĂč la crise est reprĂ©sentĂ©e par des indicatrices (DemirgĂŒc-Kunt, Detragiache et Gupta en 2000 ou Barrell, Davis et Pomerantz, 2006). MalgrĂ© l’introduction de variables macroĂ©conomiques de contrĂŽle, cette approche ne prend pas en compte la nature particuliĂšre du choc propre Ă  chaque pays sur les variables financiĂšres (taux d’intĂ©rĂȘt, cours boursiers ou variables de crĂ©dits). Dans l’ensemble, ces Ă©valuations reposent donc sur des hypothĂšses ad-hoc. Surtout, elles ne s’appuient pas sur les mĂ©canismes de transmission des chocs et peinent Ă  rendre compte des causalitĂ©s structurelles. Une approche alternative et rigoureuse reposerait sur l’estimation d’équations structurelles Ă  partir d’un modĂšle macroĂ©conomĂ©trique. Malheureusement, si les mĂ©canismes thĂ©oriques de transmission des chocs, rappelĂ©s dans une premiĂšre partie, sont clairement identifiĂ©s, il reste que les analyses empiriques peinent Ă  les mettre clairement et prĂ©cisĂ©ment en Ă©vidence. C’est en particulier le cas des effets de richesse et d’amplification financiĂšre. Pour ces derniers, les Ă©tudes basĂ©es sur des panels de banques ou d’entreprises donnent des rĂ©sultats probants5 mais ces effets sont ensuite faiblement significatifs au niveau agrĂ©gĂ©. Dans ces conditions, les modĂšles macro-Ă©conomĂ©triques ne parviennent pas Ă  modĂ©liser de façon satisfaisante les liens macro-financiers et les Ă©valuations des effets des crises qui en dĂ©coulent doivent s’appuyer sur des hypothĂšses trop fortes qui ne sont pas forcĂ©ment rĂ©alistes. Barrel et alii (2006) mesurent ainsi l’effet d’un choc financier en supposant notamment que les spread entre les taux dĂ©biteur et crĂ©diteur - ou entre les taux privĂ©s et publics - augmentent de 8 points au moment du choc avant de diminuer progressivement pendant trois ans. C’est pourquoi nous avons privilĂ©giĂ© une modĂ©lisation de type VAR, prĂ©sentĂ©e dans la deuxiĂšme 3 Voir Claessens, Kose et Terrones (2008) pour une analyse rĂ©cente ou Bordo et alii (2001) pour une analyse historique sur longue pĂ©riode. 4 Un autre critĂšre d’évaluation consiste Ă  regarder le coĂ»t fiscal des opĂ©rations de sauvetage du systĂšme financier. Cette approche dĂ©pend nĂ©anmoins de la stratĂ©gie budgĂ©taire adoptĂ©e ce qui rend les comparaisons plus dĂ©licates. 5 Voir Loupias et alii (2003) ou Chatelain et alli (2003) pour des Ă©tudes sur la zone euro. 2
  • 3. partie, qui permet d’estimer un modĂšle parcimonieux oĂč la nature des chocs et les causalitĂ©s sont clairement identifiĂ©es. En utilisant la mĂ©thode des fonctions de rĂ©ponse gĂ©nĂ©ralisĂ©e de Pesaran et Shin (2008), nous montrons dans la troisiĂšme partie que les crises financiĂšres, identifiĂ©es par des chocs boursiers, de taux d’intĂ©rĂȘt et d’incertitude, expliquent significativement l’évolution de l’activitĂ© Ă©conomique. La dĂ©composition historique des chocs nous conduit ensuite Ă  Ă©valuer la contribution des chocs financiers Ă  la baisse de la production industrielle en France et aux Etats-Unis. En novembre 2008, un quart du cycle industriel serait expliquĂ© par la crise financiĂšre en France. La transmission serait plus tardive aux Etats-Unis et devrait plutĂŽt s’opĂ©rer dans les mois qui viennent. 1. Mise en perspective thĂ©orique de la transmission des chocs financiers La crise financiĂšre actuelle marquĂ©e par la chute des bourses, le ralentissement (ou la baisse) des prix immobiliers et la paralysie du marchĂ© interbancaire entraĂźne de nombreux chocs qui vont se rĂ©percuter sur les dĂ©cisions de consommation et d’investissements des agents non financiers et in fine sur la production. En effet, les agents font face Ă  un choc sur les conditions de financement, sur leur richesse et enfin un choc d’incertitude (Spilimbergo et al., 2008). Ce sont les mĂ©canismes de transmission de ces chocs que nous prĂ©sentons successivement. 1.1. Le canal du coĂ»t du capital (ou canal du taux d’intĂ©rĂȘt) Le canal du coĂ»t du capital (autrement appelĂ©, canal du taux d’intĂ©rĂȘt) constitue le principal mĂ©canisme de transmission de la politique monĂ©taire dans tout modĂšle d’inspiration keynĂ©sienne. Dans un contexte de rigiditĂ©s nominales des prix et des salaires, une baisse du taux d’intĂ©rĂȘt, parce qu’elle diminue le coĂ»t du capital, se traduit par une hausse de l’investissement des entreprises et donc, de la demande globale et de la production. Un raisonnement symĂ©trique s’applique aux dĂ©cisions d’investissement en logement et d’acquisitions de biens durables des mĂ©nages, oĂč la baisse du taux d’intĂ©rĂȘt correspond Ă  une baisse du coĂ»t de l’emprunt. Pour que le canal du taux d’intĂ©rĂȘt opĂšre, deux Ă©lĂ©ments clĂ©s sont Ă  considĂ©rer (voir Mishkin, 1995, 1996). D’une part, c’est le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el – plutĂŽt que nominal – qui affecte les dĂ©cisions des entreprises et des mĂ©nages, ce qui nĂ©cessite que les prix soient rigides. D’autre part, puisque c’est le taux d’intĂ©rĂȘt Ă  long terme – plutĂŽt qu’à court terme – qui gouverne leurs dĂ©cisions, il faut que les modifications du taux d’intĂ©rĂȘt Ă  court terme induites 3
  • 4. par les actions de la banque centrale entraĂźnent une modification correspondante du taux 6 (rĂ©el) Ă  long terme . Dans le contexte actuel faiblement inflationniste et oĂč les taux d’intĂ©rĂȘt nominaux des banques centrales se rapprochent de zĂ©ro, le fait que ce soit le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el (et non nominal) qui influence les dĂ©cisions des entreprises et mĂ©nages constitue un Ă©lĂ©ment important de la capacitĂ© des banques centrales Ă  stimuler l’économie. Toute nouvelle baisse du taux d’intĂ©rĂȘt nominal, si elle suscite un regain d’inflation anticipĂ©e, diminue le taux d’intĂ©rĂȘt rĂ©el et par suite stimule l’investissement des entreprises, et donc la production. DĂšs lors, des anticipations dĂ©flationnistes (du fait d’un manque de confiance, par exemple) miment la capacitĂ© des autoritĂ©s monĂ©taires Ă  soutenir l’activitĂ© via une baisse du taux d’intĂ©rĂȘt.7 A cela s’ajoute les dĂ©lais de transmission du taux d’intĂ©rĂȘt directeur aux taux dĂ©biteurs pratiquĂ©s par les banques commerciales8. Si l’intuition suggĂšre que ce canal puisse jouer un rĂŽle, l’incapacitĂ© des Ă©tudes empiriques Ă  mettre en Ă©vidence une influence forte des taux d’intĂ©rĂȘt sur les dĂ©cisions d’investissement des entreprises ou mĂȘme sur les dĂ©penses des mĂ©nages a conduit Ă  affiner les canaux de transmission de la politique monĂ©taire, et notamment Ă  considĂ©rer le canal du crĂ©dit et les effets « richesse ». 1.2. L’effet richesse L’effet richesse trouve ses fondements thĂ©oriques dans le revenu permanent de Friedman. L’individu (ou « le mĂ©nage ») dispose d’une richesse, constituĂ©e de ses revenus salariaux, de son patrimoine financier (actions, obligations etc.) et non financier (immobilier). Cette richesse lui permet de dĂ©gager son revenu permanent (moyenne actualisĂ©e de ses 6 Si, conformĂ©ment Ă  l’hypothĂšse des anticipations de la structure par terme, le taux d’intĂ©rĂȘt Ă  long terme est une moyenne des prĂ©visions des taux d’intĂ©rĂȘt futurs Ă  court terme, la baisse du taux court (rĂ©el) entraĂźne une baisse du taux long (rĂ©el) qui stimule investissement des entreprises et dĂ©penses des mĂ©nages. 7 Cette efficacitĂ© des autoritĂ©s monĂ©taires Ă  soutenir l’activitĂ© et ce, mĂȘme lorsque les taux d’intĂ©rĂȘt nominaux tendent vers zĂ©ro, a constituĂ© l’un des principaux thĂšmes des dĂ©bats monĂ©taristes visant Ă  expliquer pourquoi une politique monĂ©taire expansionniste aurait pu Ă©viter la chute de la production lors de la dĂ©pression des annĂ©es 1930. L’efficacitĂ© supposĂ©e de la politique monĂ©taire est toutefois conditionnĂ©e par la capacitĂ© des autoritĂ©s Ă  modifier les anticipations d’inflation. 8 Ces dĂ©lais diffĂ©rents selon le type de crĂ©dits ont Ă©tĂ© Ă©valuĂ©s Ă  deux ou trois mois pour la France sur la derniĂšre dĂ©cennie (Coffinet, 2005). Toutefois on ne peut pas exclure que la dĂ©gradation de la situation financiĂšre des banques les conduisent Ă  moins rĂ©percuter et/ou plus tardivement les baisses des taux directeurs de la banque centrale. Voir aussi Mishkin (2009) sur les dĂ©lais de transmission des baisses de taux directeurs aux taux pratiquĂ©s sur les crĂ©dits aux mĂ©nages et entreprises dans le cas de la crise actuelle aux USA. 4
  • 5. revenus prĂ©sents et futurs anticipĂ©s) sur lequel est fondĂ©e sa consommation. DĂšs lors, tout choc affectant nĂ©gativement la richesse de l’individu (e.g. une baisse du prix des actions et/ou de l’immobilier) va rĂ©duire son revenu permanent et donc sa consommation. Si le choc nĂ©gatif est transitoire – ou perçu comme tel –, l’impact sur la consommation sera lui-mĂȘme transitoire et de faible ampleur du fait de l’actualisation sur l’ensemble des revenus prĂ©sents et futurs. En revanche, si le choc nĂ©gatif est perçu comme permanent (e.g. l’éclatement de bulles sur le marchĂ© boursier et immobilier), la rĂ©duction du revenu permanent sera importante, entraĂźnant par lĂ  une rĂ©duction durable de la consommation. Au niveau empirique, la prise en compte des effets richesse pour expliquer la consommation (agrĂ©gĂ©e) des mĂ©nages a Ă©tĂ© jusqu’à maintenant relativement dĂ©cevante, sauf pour les USA ou encore le Royaume Uni. Deux principaux Ă©lĂ©ments expliquent cela. D’une part, les mĂ©nages d’Europe continentale dĂ©tiennent une part relativement faible de leur richesse en placements financiers, comparativement aux mĂ©nages amĂ©ricains ou mĂȘme 9 britanniques . Cela a pour effet de rendre la consommation des mĂ©nages d’Europe continentale peu sensible aux mouvements des cours boursiers. D’autre part, les mĂ©nages anglo-saxons peuvent accroĂźtre leur endettement au fur et Ă  mesure que leur logement prend de la valeur, source de financement qui se tarit lorsque l’immobilier se retourne, ce qui contribue Ă  faire baisser les dĂ©penses des mĂ©nages. En Europe continentale, et tout particuliĂšrement en France, le non recours au crĂ©dit hypothĂ©caire et la mise en place d’un systĂšme de garantie alternative (la caution d’un tiers en cas de dĂ©faillance de l’emprunteur) freine considĂ©rablement l’effet « richesse immobiliĂšre » (voir ECB, 2009). Pour ces deux raisons, la croissance des revenus salariaux dĂ©termine davantage la croissance de la 10 consommation en Europe continentale, comparativement aux USA ou au Royaume Uni . Le corollaire est que la baisse du prix de l’immobilier (observĂ©e aux Etats-Unis depuis 2007) et la chute des bourses depuis l’étĂ© 2007 nous permettent d’anticiper un impact plus faible sur l’économie rĂ©elle en Europe continentale. 9 Par exemple, Ă  la fin dĂ©cembre 2006, les placements financiers (produits d’assurance vie et fonds de pension inclus) reprĂ©sentaient un peu plus de 23 % du patrimoine des mĂ©nages français contre 56 % de celui des mĂ©nages amĂ©ricains. Les mĂ©nages britanniques Ă©taient dans une position intermĂ©diaire avec une part des placements financiers comptant pour 36,5 % de leur patrimoine (Aviat et al., 2007). 10 Pour une estimation des effets richesse, voir Houizot et al.(2000), Aviat et al.(2007), ECB (2009). 5
  • 6. 1.3. L’importance des effets financiers La nature mĂȘme du choc qui affecte aujourd’hui l’économie place la sphĂšre financiĂšre au cƓur de sa transmission vers l’économie rĂ©elle. Notamment, depuis les travaux dĂ©veloppĂ©s par Bernanke et Blinder (1988) et Bernanke et Gertler (1995 et 1996), il est apparu que les imperfections financiĂšres, rĂ©sultant des asymĂ©tries d’information, contribuent Ă  la transmission mais aussi Ă  l’amplification des chocs monĂ©taires, rĂ©els ou financiers11. DiffĂ©rents mĂ©canismes conduisent Ă  ces phĂ©nomĂšnes d’amplification financiĂšre. Dans le cadre du modĂšle d’accĂ©lĂ©rateur financier, les emprunteurs subissent une prime de financement 12 externe ; prime qui est propre Ă  chaque dĂ©biteur et qui dĂ©pend de sa situation financiĂšre . Le coĂ»t du financement externe est alors d’autant plus Ă©levĂ© que les asymĂ©tries d’information sont importantes et il diminue avec la richesse nette13. Dans ces conditions, tout choc – monĂ©taire, rĂ©el ou financier – qui modifie les flux de revenu des agents non financiers ou rĂ©duit la valeur des collatĂ©raux se traduit par une augmentation de la prime de financement externe. Les projets d’investissement ou de consommation14 des agents financiĂšrement contraints s’en trouvent donc affectĂ©s, ce qui amplifie le choc initial. En outre, puisque la prime de financement externe dĂ©pend de la richesse nette, les chocs entraĂźnent des effets de composition touchant plus fortement les « petites » que les « grandes » entreprises. Le choc financier en cours, se traduisant Ă  la fois par un durcissement des conditions financiĂšres, une baisse des prix des actifs financiers et immobiliers et un ralentissement des perspectives de croissance future, dĂ©grade automatiquement la situation financiĂšre des agents non financiers. L’accĂ©lĂ©rateur financier constitue de fait un vecteur important par lequel le choc affectera la sphĂšre rĂ©elle via une baisse de l’investissement et de la consommation allant au- delĂ  des effets de richesse ou de l’augmentation du coĂ»t du capital. Si l’accĂ©lĂ©rateur financier opĂšre une distinction entre financement interne et financement externe, il n’accorde pas un rĂŽle spĂ©cifique aux banques dans ce processus. 11 Voir Clerc et Pfister (2002) ou Bean et al. (2003) pour des revues de la littĂ©rature sur les diffĂ©rents mĂ©canismes d’amplification financiĂšre des chocs. 12 La prime est liĂ©e aux coĂ»ts supplĂ©mentaires engagĂ©s par les crĂ©anciers pour contrĂŽler et vĂ©rifier les rĂ©sultats obtenus et dĂ©clarĂ©s par l’emprunteur. 13 C’est-Ă -dire la capacitĂ© de l’emprunteur – mĂ©nage ou sociĂ©tĂ© non financiĂšre - Ă  apporter des garanties constituĂ©es d’actifs (immobiliers et financiers) non gagĂ©s et diminuĂ©es des dettes. 14 Les modĂšles envisagent initialement uniquement l’effet sur l’investissement mais il est assez direct de faire une transposition Ă  la consommation des mĂ©nages oĂč les biens immobiliers sont utilisĂ©s comme collatĂ©ral (voir Goodhart et Hofmann, 2007 ou Mishkin, 2007). 6
  • 7. Pourtant, en tant que pilier du systĂšme financier, les banques jouent un rĂŽle essentiel dans le financement de l’activitĂ© Ă©conomique. Le canal du crĂ©dit bancaire Ă©tablit justement que les 15 banques peuvent ĂȘtre amenĂ©es Ă  restreindre leur offre de crĂ©dits si elles sont dans l’incapacitĂ© de trouver des substituts lors d’un choc rĂ©duisant leur financement16. C’est le sens des craintes soulevĂ©es actuellement sur le risque de credit crunch, c’est-Ă - dire d’un rationnement de l’offre de crĂ©dits17, faisant suite au blocage du marchĂ© interbancaire. Les banques centrales ont certes pris le relai en augmentant leurs interventions, mais il reste que ce dysfonctionnement du marchĂ© prive les banques d’une partie de leur refinancement. En outre, le choc peut ĂȘtre relayĂ© par un ralentissement probable de l’activitĂ© de titrisation. En effet, Altunbas, Gambacorta et MarquĂšs (2007) ont rĂ©cemment montrĂ© que la titrisation avait rĂ©duit la portĂ©e du canal du crĂ©dit en apportant une source de liquiditĂ© supplĂ©mentaire aux Ă©tablissements de crĂ©dit et en leur permettant de se soustraire aux exigences de fonds propres. Si les opportunitĂ©s de titrisation sont subitement rĂ©duites, le canal du crĂ©dit serait rĂ©activĂ© en mĂȘme temps que les banques verraient une source de financement supplĂ©mentaire se tarir. Enfin, Peek et Rosengren (1995) Ă©tablissent que les chocs sur le capital bancaire peuvent Ă©galement conduire les banques Ă  restreindre leur offre de crĂ©dits dĂšs lors qu’elles sont contraintes par des exigences rĂ©glementaires en matiĂšre de fonds propres, ce qui renforcerait alors le canal du crĂ©dit18. En effet, pour satisfaire leurs ratios prudentiels Ă  la suite d’un choc financier dĂ©gradant la qualitĂ© des actifs, les Ă©tablissements de crĂ©dit auraient le choix entre diminuer leur exposition au risque en restreignant leur offre de crĂ©dits ou augmenter leurs fonds propres. L’existence d’asymĂ©tries d’information rend nĂ©anmoins coĂ»teuse l’émission de capital en particulier lorsque le contexte Ă©conomique et financier se dĂ©tĂ©riore. La crise financiĂšre qui a Ă©clatĂ© durant l’étĂ© 2007 est particuliĂšrement propice Ă  des effets liĂ©s au capital bancaire dans la mesure oĂč elle entraĂźne de multiples dĂ©prĂ©ciations d’actifs liĂ©s aux dĂ©fauts sur les crĂ©ances immobiliĂšres, Ă  l’illiquiditĂ© des produits structurĂ©s et enfin Ă  la chute des valeurs boursiĂšres. Si la recapitalisation des Ă©tablissements bancaires a pu en partie ĂȘtre 15 Voir ECB (2008) pour une revue complĂšte de cette littĂ©rature. 16 Notamment les banques considĂ©rĂ©es comme « petites », celles qui sont moins bien capitalisĂ©es ou dont la position est moins liquide. De nombreuses Ă©tudes sur les banques europĂ©ennes insistent sur le rĂŽle de la liquiditĂ© des Ă©tablissements (Erhman et alii, 2003 ou Loupiac, Savignac et Sevestre, 2003). Ashcraft (2006) pour les Etats- Unis montre rĂ©cemment que l’appartenance Ă  un groupe bancaire attĂ©nue la portĂ©e du canal du crĂ©dit. 17 On parle de rationnement quantitatif du crĂ©dit lorsqu’à conditions de financement et de risque identiques, les banques rĂ©duisent leur distribution de crĂ©dit. 18 On parle alors de canal du capital bancaire (voir Van den Heuvel, 2002). 7
  • 8. prise en charge par les gouvernements, le risque d’un ajustement du portefeuille de crĂ©dits reste Ă©levĂ©. Ainsi, cette fois-ci, c’est par le biais d’une baisse de l’offre de crĂ©dits bancaires que les dĂ©penses des agents non financiers sont touchĂ©es. 1.4. Choc et incertitude Outre les aspects financiers liĂ©s au choc et Ă  sa transmission, la crise en cours se traduit par une augmentation de l’incertitude. Les perspectives de croissance et d’emploi sont non seulement orientĂ©es Ă  la baisse mais Ă©galement plus incertaines (OFCE, 2008). Les entreprises et mĂ©nages doivent alors prendre leurs dĂ©cisions d’investissement et de consommation dans un environnement plus risquĂ©, ce qui est susceptible de gĂ©nĂ©rer des comportements attentistes. En prĂ©sence d’incertitude, l’épargne des mĂ©nages s’accroĂźt en raison du motif de prĂ©caution ; effet qui est rĂ©guliĂšrement mis en avant dans les Ă©quations de consommation oĂč 19 l’incertitude est mesurĂ©e par les variations du taux de chĂŽmage . Pour les entreprises, l’argument avancĂ© est liĂ© Ă  l’irrĂ©versibilitĂ© des dĂ©penses d’investissement. En effet, une fois engagĂ©s, les coĂ»ts d’installation du capital peuvent difficilement ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©s. La dĂ©cision d’investir peut alors ĂȘtre comparĂ©e Ă  l’exercice d’une option (Pyndick, 1988) : comme la dĂ©cision est irrĂ©versible, la firme renonce Ă  l’opportunitĂ© d’investir en vue de le faire Ă  un moment plus opportun. Ainsi, l’investissement ne devient rentable que lorsque les gains sont supĂ©rieurs aux coĂ»ts d’installation du capital et au prix implicite de l’option, lequel s’accroĂźt avec la volatilitĂ©. L’incertitude globale autour de la situation macroĂ©conomique devrait donc inciter les entreprises Ă  reporter leurs dĂ©cisions d’investissement, freinant ainsi les dĂ©penses et la production20. 2. Une modĂ©lisation empirique des chocs financiers : aspects mĂ©thodologiques Le recours Ă  un modĂšle de type VAR permet de simuler un cadre macroĂ©conomique simplifiĂ© et d’évaluer (de quantifier) l’impact de la crise financiĂšre sur l’économie. D’abord, nous prĂ©sentons les variables retenues dans notre modĂ©lisation puis nous prĂ©cisons les aspects mĂ©thodologiques ainsi que les estimations effectuĂ©es. 2.1. Les variables 19 Voir Aviat et alii (2007) pour une modĂ©lisation rĂ©cente. 20 Cet argument est plus rĂ©cemment repris par Bloom (2007). 8
  • 9. La spĂ©cification VAR retenue considĂšre 6 variables : une variable rĂ©elle (l'indice de production industrielle), une variable de prix (l'indice des prix Ă  la consommation), une variable de coĂ»t du refinancement bancaire (le taux interbancaire Ă  3 mois) et trois variables visant Ă  capturer spĂ©cifiquement les canaux de transmission de la crise actuelle (le spread interbancaire, les cours boursiers et la volatilitĂ© de ces derniers). Les estimations sont effectuĂ©es sur donnĂ©es mensuelles sur la pĂ©riode 1974:1-2008:11, la date de fin de l'Ă©chantillon Ă©tant dĂ©terminĂ©e par 21 la disponibilitĂ© de l'indice de production industrielle . PrĂ©cisons l’introduction dans le VAR - et l’interprĂ©tation - de nos quatre derniĂšres variables. En premiĂšre approximation, le taux interbancaire Ă  trois mois peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme reflĂ©tant la politique monĂ©taire menĂ©e par les autoritĂ©s Ă  court terme, puisqu'il intĂšgre les anticipations des marchĂ©s financiers sur les taux directeurs Ă  trois mois22. C’est notamment le cas en pĂ©riode « normale ». NĂ©anmoins, en pĂ©riode de crise, le taux interbancaire reflĂšte aussi les problĂšmes de liquiditĂ© des banques et, notamment d’assĂšchement en liquiditĂ©s23. Le spread interbancaire, qui mesure la diffĂ©rence entre le taux interbancaire Ă  3 mois et le taux directeur (repo), constitue de ce point de vue un autre indicateur des difficultĂ©s de refinancement des banques en pĂ©riode de crise. IdĂ©alement, la variable pertinente pour rendre compte de l’assĂšchement en liquiditĂ©s en pĂ©riode de crise - ou tout du moins, de « tensions » - aurait Ă©tĂ© le volume des Ă©changes sur le marchĂ© interbancaire. Mais cette variable n’est pas disponible en frĂ©quence mensuelle sur longue pĂ©riode. La variable de spread interbancaire constitue donc une proxy des problĂšmes (quantitatifs) de liquiditĂ©s auxquels font face les banques en pĂ©riode de crise, au-delĂ  du seul coĂ»t de la liquiditĂ© qui est lui mesurĂ© par le taux interbancaire. Notre spĂ©cification, avec taux interbancaire et spread interbancaire, ne prend en compte que les premiers maillons de transmission de la crise actuelle. L’absence de sĂ©ries longues sur le montant et le coĂ»t des crĂ©dits distribuĂ©s aux entreprises et aux mĂ©nages ne nous a pas permis de tester directement l’impact de la crise sur les conditions de financement (prix et volumes de financement) des agents non financiers. 21 Le traitement et les sources des donnĂ©es sont dĂ©taillĂ©s en annexe 1. 22 Dans le cas de la France, la Banque de France jusqu’en 1999 et la Banque centrale europĂ©enne depuis lors ont fixĂ© les taux directeurs. Depuis 1999, le taux directeur est donc dĂ©terminĂ© par les conditions Ă©conomiques de la zone euro et non pas seulement de la France. Toutefois, la conjoncture française est fortement corrĂ©lĂ©e Ă  celle de la zone euro. 23 Pour illustration : entre le 16 septembre (suite Ă  la chute de Lehman Brothers) et le 10 octobre 2008 (jour de la baisse du taux directeur de la BCE), le taux interbancaire a augmentĂ© en Europe de 50 points de base du fait d’un assĂšchement du marchĂ© en liquiditĂ©s. 9
  • 10. Le graphique 1 retrace l'Ă©volution des spreads interbancaires depuis 1974 pour la France et met en exergue les chocs sur les spread (les « chocs » Ă©tant dĂ©finis comme les Ă©carts 24 supĂ©rieurs Ă  1,65 fois l'Ă©cart-type de la sĂ©rie centrĂ©e ) en explicitant les « Ă©vĂšnements » qui les sous-tendent (anticipations de changements de politique monĂ©taire, notamment lors de tensions sur le marchĂ© des changes, dĂ©fiance entre banques etc.)25. Il faut noter que le choc de spread actuel est beaucoup plus faible en France (et dans tout pays de la zone euro) qu’il ne l’est aux Etats-Unis (110 points de base et 310 points respectivement en octobre 2008, au plus fort des tensions)26. De prime abord, le choc de spread actuel apparait aussi relativement faible par rapport aux chocs qui ont affectĂ© la France au milieu des annĂ©es 70 et Ă  la fin des annĂ©es 80-dĂ©but des annĂ©es 1990. Mais, depuis la fin des turbulences au sein du mĂ©canisme de change europĂ©en en 1996, la moyenne de ce spread a considĂ©rablement baissĂ© (de 52 points de base sur 1974-1995 Ă  27 points sur 1996-2008) de mĂȘme que son Ă©cart-type (de 63 points sur 1974-1995 Ă  23 points sur 1996-2008). L'Ă©pisode rĂ©cent de hausse du spread interbancaire apparait donc atypique par son ampleur et sa durĂ©e dans le contexte français de la derniĂšre dĂ©cennie. Un autre indicateur confirme l’importance des tensions sur le marchĂ© interbancaire dans la pĂ©riode rĂ©cente : le spread entre le taux interbancaire Ă  3 mois et le taux sur bons du TrĂ©sor français sur la mĂȘme Ă©chĂ©ance. Ce spread est non affectĂ© par les anticipations de politique monĂ©taire, puisqu’elles sont inscrites dans les deux sĂ©ries, et reflĂšte donc uniquement les assĂšchements sur le marchĂ© interbancaire. Il Ă©tait fin 2008 Ă  un niveau historiquement Ă©levĂ©27. Le cours boursier est un proxy de la richesse totale des agents. MalgrĂ© leur importance pour le patrimoine des mĂ©nages, les prix immobiliers n'ont pas Ă©tĂ© retenus, car ils ne sont pas disponibles en frĂ©quence mensuelle. On peut toutefois considĂ©rer que les prix des actions sont un bon indicateur de la richesse des diffĂ©rents agents privĂ©s (entreprises, mĂ©nages et institutions financiĂšres). Au-delĂ  de cet effet de richesse, la chute des cours boursiers rend plus 24 Ce qui revient Ă  sĂ©lectionner 10 % des chocs considĂ©rĂ©s comme reprĂ©sentatifs des chocs importants. 25 “Perhaps the most striking indicator of the various stages in the current crisis is the spread between the three-month Euribor, an indicative rate for unsecured lending among banks, and the three-month euro overnight index average (Eonia) swap rate. A strong increase of the spread in summer 2007 and in September 2008 reflects the reluctance of banks to lend to each other, closely related to a general lack of transparency about the risks individual banks have been carrying on their books” ( Gertrude Tumpel-Gugerell, Member of the Executive Board of the ECB, Speech of 22 January 2009). 26 Le graphique reprĂ©sentant le spread interbancaire des Etats-Unis se trouve en annexe 2. 27 La sĂ©rie n’étant disponible que depuis 1986, elle n’a pas pu ĂȘtre retenue pour l’estimation du VAR. 10
  • 11. difficile le financement des entreprises et dĂ©grade le bilan des entreprises et des institutions financiĂšres dont les actifs sont estimĂ©s Ă  leur valeur de marchĂ©, ce qui pĂ©nalise les diffĂ©rents projets d'investissement. Graphique 1 : spread interbancaire en France En points de base spread interbancaire en France tensions sur les marchĂ©s nouvelles pressions contre des changes, accentuĂ©es le franc avant les Ă©lections par les Ă©lections 350 lĂ©gislatives de mars 1993 prĂ©sidentielles de mai 1995 sortie du franc du attaques contre le franc, suite au relĂšvement des taux serpent monĂ©taire d'intĂ©rĂȘt allemands, aux dĂ©valuations de plusieurs 300 en janvier 1974 et nouvelles attaques contre le franc, monnaies au sein du SME et Ă  l'incertitude liĂ©e au maintien d'une rĂ©fĂ©rendum sur le traitĂ© de Maastricht (septembre avant l'Ă©largissement en aout 1993 politique monĂ©taire 1992) des marges de fluctuations du MCE 250 restrictive tensions sur le franc et libĂ©ralisation des 200 mouvements de capitaux pressions sur le franc, au 1er janvier 1990 liĂ©es Ă  l'incertitude autour 150 des objectifs budgĂ©taires et de monnaie unique 100 50 0 -50 politique monĂ©taire tensions sur le franc prudente malgrĂ© baisse -100 et anticipations de de l'inflation et dĂ©valuation apaisement des tensions -150 i d SME janv-74 janv-75 janv-76 janv-77 janv-78 janv-79 janv-80 janv-81 janv-82 janv-83 janv-84 janv-85 janv-86 janv-87 janv-88 janv-89 janv-90 janv-91 janv-92 janv-93 janv-94 janv-95 janv-96 janv-97 janv-98 janv-99 janv-00 janv-01 janv-02 janv-03 janv-04 janv-05 janv-06 janv-07 La volatilitĂ© des cours boursiers est utilisĂ©e dans le modĂšle comme proxy de janv-08 l'incertitude de l'Ă©conomie globale, affectant de fait les dĂ©cisions de dĂ©penses des agents Ă©conomiques28. En pĂ©riode "normale", les mouvements de hausse et de baisse des cours boursiers sont supposĂ©s graduels. Les Ă©pisodes de pics de volatilitĂ© sont dus, soit Ă  des hausses ou des chutes brutales du prix des actions, soit Ă  de forts Ă -coups journaliers, les hausses succĂ©dant aux baisses dĂšs qu'une nouvelle concernant la politique monĂ©taire ou la situation de l'Ă©conomie est publiĂ©e. La chronologie de la volatilitĂ© boursiĂšre pour la France depuis 1973 est reprĂ©sentĂ©e dans le graphique 2. Y sont indiquĂ©s aussi les causes des chocs les plus importants, i.e. supĂ©rieurs Ă  1,65 fois l'Ă©cart-type de la sĂ©rie centrĂ©e. Le pic de volatilitĂ© boursiĂšre de novembre 2008 en France est l'un des trois plus forts depuis trois dĂ©cennies, avec celui liĂ© au krach boursier d'octobre 1987 et ceux de 2002-2003 liĂ©s Ă  l'Ă©clatement de la bulle Internet et Ă  la dĂ©fiance comptable envers les bilans des entreprises suite aux scandales Enron et 28 Pour d’autres proxies de l’incertitude (e.g. variabilitĂ© des profits), voir Bloom (2008). 11
  • 12. Worldcom. Pour les Etats-Unis, le pic de volatilitĂ© rĂ©cent est le plus fort depuis 1973, suivi de prĂšs par celui nĂ© du krach de 1987 (voir annexe 2). Graphique 2 : volatilitĂ© boursiĂšre en France volatilitĂ© mensuelle des cours boursiers en France aprĂšs la faillite d'Enron Ă©cart-type annualisĂ© (dĂ©cembre 2001), scandale autour de worldcom et des 40 manipulations comptables krach boursier d'octobre 1987 contrĂŽle des prix 35 plus contraignant mis en place en octobre 1974 Ă©lection de 30 Mitterrand aux attentats du 11 1er choc crise des subprime prĂ©sidentielles septembre 2001 pĂ©trolier 25suite Ă  la tensions liĂ©es Ă  guerre du la cohabitation crise russe et tensions liĂ©es Ă  la Guerre du Golfe, faillite de LTCM 20 Kippour entre Chirac et situation en Iran et Mitterrand suite Ă  l'invasion en Afghanistan (privatisations du Koweit 15 notamment) crise asiatique 10 5 0 -5 -10 fĂ©vr-73 fĂ©vr-74 fĂ©vr-75 fĂ©vr-76 fĂ©vr-77 fĂ©vr-78 fĂ©vr-79 fĂ©vr-80 fĂ©vr-81 fĂ©vr-82 fĂ©vr-83 fĂ©vr-84 fĂ©vr-85 fĂ©vr-86 fĂ©vr-87 fĂ©vr-88 fĂ©vr-89 fĂ©vr-90 fĂ©vr-91 fĂ©vr-92 fĂ©vr-93 fĂ©vr-94 fĂ©vr-95 fĂ©vr-96 fĂ©vr-97 fĂ©vr-98 fĂ©vr-99 fĂ©vr-00 fĂ©vr-01 fĂ©vr-02 fĂ©vr-03 fĂ©vr-04 fĂ©vr-05 fĂ©vr-06 fĂ©vr-07 fĂ©vr-08 2.2. La spĂ©cification du modĂšle VAR Dans sa forme canonique, le modĂšle VAR, estimĂ© par moindres carrĂ©s, s’écrit : p xt = c + ∑ Bi xt −i + et , t = 1973m1,..., 2008m12 i =1 avec xt le vecteur (6×1) des six variables retenues, et le vecteur (6×1) des rĂ©sidus canoniques de matrice de covariance ÎŁ, Bi des matrices (6×6) de coefficients et p le nombre de retards. Les tests statistiques et les critĂšres d'information donnant des informations contradictoires sur le nombre de retards Ă  retenir. C'est finalement le test LR (likelihood ratio ou rapport de vraisemblance) qui a Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©, sur la base des conclusions de De Serres et Guay (1995). Selon ces derniers, les tests s'appuyant sur les critĂšres d'information (Akaike et Schwartz) sous-estiment le nombre de retards et sont donc moins fiables que les tests sĂ©quentiels (Wald et LR). Disposant de 419 observations mensuelles, nous avons effectuĂ© le test LR avec un nombre maximum de retards de 6, afin de garder un nombre suffisant de degrĂ©s de libertĂ©. Pour la France, le test LR retient 4 retards (le critĂšre d'Akaike Ă©tant minimal 12
  • 13. pour 2 retards). Pour les Etats-Unis, le test LR sĂ©lectionne 6 retards (le critĂšre d'Akaike en retenant 3). Nous retenons donc un modĂšle VAR d'ordre 4 pour la France et d'ordre 6 pour les Etats-Unis. Les chocs structurels n’étant pas directement observables, ils doivent ĂȘtre dĂ©duits des rĂ©sidus estimĂ©s. Plusieurs approches sont envisageables. Il s’agit en gĂ©nĂ©ral d’imposer certaines contraintes identifiantes tel que les rĂ©sidus estimĂ©s sont exprimĂ©s comme des combinaisons linĂ©aires des chocs structurels soit : PΔ t = et avec Δt le vecteur de dimension (6×1) des chocs structurels supposĂ©s rĂ©duits et P une matrice de passage. En supposant par ailleurs que les innovations structurelles sont de variance unitaire, on a : PPâ€Č = ÎŁ La dĂ©composition de Choleski, rĂ©guliĂšrement utilisĂ©e pour estimer les fonctions de rĂ©ponse29, suppose que P est triangulaire infĂ©rieure. L’impact de chocs non anticipĂ©s sur chacune des variables est dĂ©terminĂ© en utilisant la reprĂ©sentation VMA (Vector moving average) du modĂšle, qui s’écrit : ∞ ∞ xt = ÎŒ + ∑ Ai et −i = ÎŒ + ∑ Ai PΔ t −i , i =0 i =0 oĂč l’espĂ©rance ÎŒ et les matrices Ai sont dĂ©terminĂ©es par inversion de la reprĂ©sentation canonique. La fonction de rĂ©ponse, vecteur de dimension (6×1) contenant les rĂ©ponses de chaque variable Ă  un horizon (h) Ă  un choc structurel affectant la jĂšme variable Ă  l’horizon 0, s’écrit alors : ψ c (h) = Ah Pu j , j h = 1, 2,..., avec uj le vecteur (6×1) de sĂ©lection dont le jĂšme Ă©lĂ©ment est Ă©gal Ă  1 et les autres Ă©lĂ©ments sont nuls. A chaque date (t), la dĂ©composition historique, dĂ©finie comme l’impact sur le vecteur xt des chocs structurels passĂ©s et prĂ©sent affectant cette jĂšme variable, s’écrit : ∞ x cjt = ∑ Ai PU j Δ t −i , j = 1,..., k i =0 29 Toutes les modĂ©lisations du type VAR structurel fonctionnent sur la mĂȘme logique. Elles se diffĂ©rencient uniquement par le jeu de contraintes identifiantes adoptĂ©es. 13
  • 14. avec Uj la matrice (6×6) de sĂ©lection dont l’élĂ©ment de position (j,j) est Ă©gal Ă  1 et les autres Ă©lĂ©ments sont nuls. Une critique inhĂ©rente Ă  la dĂ©composition de Choleski porte sur la dĂ©pendance des rĂ©ponses estimĂ©es Ă  l’ordre dans lequel les variables sont placĂ©es dans le VAR. Il est alors essentiel de placer les variables dans un ordre prĂ©cis pouvant ĂȘtre justifiĂ© par la vitesse d’ajustement des diffĂ©rentes variables aux chocs contemporains. Ces hypothĂšses implicites sont plus difficilement justifiables dĂšs lors que plusieurs variables financiĂšres sont introduites dans le modĂšle. En effet, les taux d’intĂ©rĂȘt comme les variables boursiĂšres font l’objet de cotations quotidiennes sur des marchĂ©s et devraient donc thĂ©oriquement intĂ©grer rapidement toute information nouvelle, c’est-Ă -dire rĂ©agir quasi-instantanĂ©ment aux chocs. Il est donc dĂ©licat de supposer un ordre prĂ©cis entre ces variables. C’est pourquoi nous utilisons l’approche des fonctions de rĂ©ponse gĂ©nĂ©ralisĂ©e suggĂ©rĂ©e par Pesaran et Shin (1998). Les fonctions de rĂ©ponse ainsi calculĂ©es ne dĂ©pendent d’aucune hypothĂšse particuliĂšre mais uniquement des corrĂ©lations historiques estimĂ©es entre les diffĂ©rents rĂ©sidus. Elles sont alors donnĂ©es par la relation suivante : 1 ψ g ( h) = Ah ÎŁu j , h = 1, 2,... σ jj j Ăšme La rĂ©ponse des 6 variables Ă  l’horizon (h) Ă  un choc structurel affectant la j variable Ă  l’horizon 0 dĂ©pend donc, Ă  travers la matrice ÎŁ, de σjk, la covariance des rĂ©sidus des k Ăšme et jĂšme Ă©quations du VAR et de l’écart-type σjj du rĂ©sidu de la jĂšme Ă©quation. Les fonctions de rĂ©ponse sont de fait indĂ©pendantes de l’ordre des variables ou de toute autre contrainte identifiante et dĂ©pendent directement l’information contenue dans la matrice des variance-covariance. Il en est de mĂȘme de la dĂ©composition historique qui, dans l’approche gĂ©nĂ©ralisĂ©e, s’écrit alors : ∞ 1 xg = jt σ jj ∑ A ÎŁU e i =0 i j t −i . 3. La France et les Etats-Unis face Ă  la crise : une comparaison des effets de la crise financiĂšre 3.1. Les fonctions de rĂ©ponse aux diffĂ©rents chocs 14
  • 15. Les fonctions de rĂ©ponse gĂ©nĂ©ralisĂ©es sont dĂ©terminĂ©es pour les deux modĂšles estimĂ©s : France et Etats-Unis. Avant de s’intĂ©resser plus prĂ©cisĂ©ment Ă  la contribution des chocs Ă  la dĂ©gradation de la production industrielle depuis le dĂ©clenchement de la crise de 2007, il est utile d’analyser les rĂ©ponses des diffĂ©rentes variables clĂ©s Ă  certains chocs spĂ©cifiques afin d’avoir une idĂ©e plus prĂ©cise de la pertinence du cadre macroĂ©conomique. Ainsi, il ressort que la production industrielle en France rĂ©pond avec le signe attendu aux diffĂ©rents chocs30 (graphique 3). Un choc sur l’inflation – assimilable Ă  un choc d’offre – exerce un effet nĂ©gatif au seuil de 10 % sur la production aprĂšs 10 mois. Cet effet est durable puisqu’il reste significatif jusqu’au 32Ăšme mois. L’impact du choc restrictif de politique monĂ©taire est Ăšme significatif au bout de 8 mois, atteint un pic au 13 mois et pĂ©nalise l’activitĂ© sur une durĂ©e de 15 mois. Ces rĂ©sultats sont assez conformes avec l’idĂ©e qu’il existe des dĂ©lais de transmission de la politique monĂ©taire et que les effets du choc sont persistants. Il ressort Ă©galement que la production industrielle rĂ©agit nĂ©gativement lorsque des tensions apparaissent sur le marchĂ© interbancaire. Une fois pris en compte les effets de la politique monĂ©taire, une augmentation non anticipĂ©e de l’écart entre le taux Ă  trois mois et le taux directeur de la banque centrale dĂ©prime l’activitĂ©. L’effet est significatif aprĂšs 5 mois et jusqu’au 18Ăšme mois. Ce rĂ©sultat illustre l’importance des conditions de refinancement des banques31 sur le marchĂ© interbancaire comme mĂ©canisme de transmission de la crise actuelle Ă  la sphĂšre rĂ©elle32. L’impact du choc boursier est Ă©galement significatif. La production industrielle s’amĂ©liore significativement entre Ăšme du 5 au 15Ăšme mois lors d’un choc positif. Par symĂ©trie, nos estimations « prĂ©disent » une baisse de la production industrielle en cas de choc nĂ©gatif, i.e. de chute des cours boursiers. Faute de donnĂ©es disponibles, notre spĂ©cification ne nous permet pas de distinguer dans la transmission du choc boursier vers l’économie rĂ©elle, ce qui relĂšve des effets de richesse transitant par la consommation de ce qui relĂšve des effets d’amplification financiĂšre liĂ©s Ă  la baisse de la valeur des garanties apportĂ©es par les mĂ©nages et les entreprises. Des estimations menĂ©es en parallĂšle sur donnĂ©es trimestrielles semblent cependant mettre en Ă©vidence un effet non significatif du choc boursier sur la consommation des mĂ©nages mais significatif sur l’investissement des entreprises non financiĂšres33. Enfin, un accroissement de l’incertitude fournit Ă©galement une explication, gĂ©nĂ©ralement non prise en compte dans ce type de 30 Des estimations ont Ă©tĂ© menĂ©es Ă  partir d’une variable d’emploi au lieu de la production industrielle mais les rĂ©sultats obtenus se sont avĂ©rĂ©s peu probants. 31 L’effet des conditions de financement des entreprises non financiĂšres, mesurĂ© par l’écart entre les taux de rendement des obligations privĂ©es et publiques, a Ă©galement Ă©tĂ© testĂ© mais n’est pas ressorti significativement. 33 Globalement, des estimations rĂ©alisĂ©es sur donnĂ©es trimestrielles françaises permettaient d’obtenir des rĂ©sultats qualitativement proches de ceux prĂ©sentĂ©s ici. 15
  • 16. modĂ©lisation, Ă  la dĂ©gradation de la conjoncture. L’effet sur la production industrielle française est significatif, montrant que les attitudes de wait-and-see des mĂ©nages et des entreprises en pĂ©riode de crise constituent un Ă©lĂ©ment important de la baisse de l’activitĂ©. L’effet se transmet assez rapidement puisqu’une augmentation de la volatilitĂ© non anticipĂ©e entraĂźne une baisse de l’IPI dĂšs le 3Ăšme mois. L’impact maximal est observĂ© 10 mois aprĂšs le choc et n’est plus significatif Ă  partir du 16Ăšme mois. Graphique 3: RĂ©ponse de l’IPI France aux chocs 0.004 0.003 0.002 0.001 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 -0.001 -0.002 -0.003 -0.004 -0.005 HPT3MR HPSPRIB HPNVOLATILITY HPLSTOCKR HPLCPI Note de lecture : Les rĂ©ponses de l’IPI aux diffĂ©rents chocs ont Ă©tĂ© tronquĂ©es Ă  zĂ©ro dĂšs lors qu’elles n’étaient pas significatives, les intervalles de confiance ayant Ă©tĂ© calculĂ©s Ă  partir de simulations de monte carlo Ă  plus ou moins 1.645 Ă©cart-type soit un seuil approximatif de 10 %. Les rĂ©sultats obtenus pour les Etats-Unis Ă  partir d’une modĂ©lisation proche sont globalement moins significatifs (graphique 4). Comme pour la France, le choc d’inflation est significatif au seuil de 10 % et nettement persistant. De façon surprenante, un choc positif de politique monĂ©taire (i.e. une hausse du taux d’intĂ©rĂȘt) n’a aucun effet nĂ©gatif sur la production industrielle. Il ressort mĂȘme que l’impact de ce choc est initialement positif mĂȘme s’il ne dure que les 4 premiers mois. De mĂȘme, les conditions du marchĂ© interbancaire ne ressortent que faiblement et ne sont significatives, avec le signe espĂ©rĂ©, qu’au 6Ăšme mois. Les effets sont plus importants pour le choc boursier et pour le choc d’incertitude. Notamment, les effets d’une augmentation non anticipĂ©e de l’indice boursier sur l’indice de production industrielle sont 16
  • 17. significatifs dĂšs le 4Ăšme mois, atteignent un pic au bout de 10 mois puis deviennent non significatifs aprĂšs 18 mois. Comme pour la France, la prise en compte de l’incertitude semble importante. Le choc – une augmentation non anticipĂ©e de l’incertitude – dĂ©grade l’activitĂ© pour une durĂ©e de 5 mois dĂšs le 4Ăšme mois. Graphique 4: RĂ©ponse de l’IPI Etats-Unis aux chocs 0.005 0.004 0.003 0.002 0.001 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 -0.001 -0.002 -0.003 -0.004 -0.005 -0.006 HPT3MR HPSPRIB HPNVOLATILITY HPLSTOCKR HPLCPI Note de lecture : Les rĂ©ponses de l’IPI aux diffĂ©rents chocs ont Ă©tĂ© tronques Ă  zĂ©ro dĂšs lors qu’elles n’étaient pas significatives, les intervalles de confiance ayant Ă©tĂ© calculĂ©s Ă  partir de simulations de monte carlo Ă  plus ou moins 1.645 Ă©cart-type soit un seuil approximatif de 10 %. En dehors de la production industrielle, d’autres rĂ©sultats mĂ©ritent d’ĂȘtre soulignĂ©s34. PremiĂšrement, un price puzzle apparaĂźt dans les deux pays35. A la suite d’un choc restrictif de politique monĂ©taire, les prix ont tendance Ă  augmenter pendant les 10 premiers mois en France et pendant la premiĂšre annĂ©e aux Etats-Unis. Les prix reviennent ensuite progressivement vers leur tendance tĂ©moignant ainsi d’une dĂ©crue de l’inflation qui interviendrait tardivement. Nous pouvons supposer que le choc monĂ©taire est en fait une rĂ©action Ă  une augmentation anticipĂ©e de l’inflation, de telle sorte que malgrĂ© la hausse des 34 Les diffĂ©rentes reprĂ©sentations graphiques des fonctions de rĂ©ponse ne sont pas systĂ©matiquement reproduites mais sont disponibles auprĂšs des auteurs. 35 L’introduction des prix du pĂ©trole n’a pas permis de lever cette Ă©nigme, que la variable soit introduite comme une endogĂšne supplĂ©mentaire ou de façon exogĂšne dans l’ensemble des Ă©quations. 17
  • 18. taux, les dĂ©lais de transmission de la politique monĂ©taire ne permettent pas de rĂ©duire l’inflation immĂ©diatement. L’analyse des rĂ©ponses du taux d’intĂ©rĂȘt de court terme permet d’illustrer en partie la fonction de rĂ©action des autoritĂ©s monĂ©taires lors de l’occurrence de chocs. Pour la France, il ressort (voir graphique en annexe 3) que la rĂ©ponse Ă  une augmentation non anticipĂ©e des prix est immĂ©diate. Le taux d’intĂ©rĂȘt continue Ă  augmenter au cours des 6 premiers mois puis revient progressivement vers sa tendance, cessant d’ĂȘtre significativement plus Ă©levĂ© au bout d’un an. Aux Etats-Unis (voir graphique en annexe 3), la rĂ©ponse est beaucoup plus courte et Ăšme moins immĂ©diate, les taux n’augmentant qu’au cours des 2 et 3Ăšme mois. La politique monĂ©taire de la RĂ©serve fĂ©dĂ©rale est par contre beaucoup plus rĂ©active aux chocs sur l’IPI. Une hausse de la production industrielle entraĂźne une augmentation rapide et prononcĂ©e du taux d’intĂ©rĂȘt qui de plus est, durable puisque s’étalant sur 17 mois. En France, la dynamique des taux d’intĂ©rĂȘt suite Ă  un choc favorable sur l’activitĂ© est similaire Ă  la rĂ©action obtenue pour le choc d’inflation. A la suite d’un choc boursier, on observe d’abord une baisse des taux d’intĂ©rĂȘt puis un durcissement significatif de la politique monĂ©taire Ă  partir du 10Ăšme mois. La rĂ©ponse des autoritĂ©s monĂ©taires amĂ©ricaines au choc boursier a un profil assez proche, une baisse initiale des taux suivie d’une augmentation au bout de 5 mois. Ces rĂ©sultats tĂ©moignent de l’ambigĂŒitĂ© de la relation entre politique monĂ©taire et les prix d’actifs. Aux Etats-Unis, il n’y a pas de rĂ©ponse significative Ă  une hausse de spread interbancaire. En France, les taux augmentent pendant 6 mois puis baissent au bout d’une annĂ©e. Cette dynamique pourrait reflĂ©ter initialement des anticipations de poursuite d’un cycle de durcissement de la politique monĂ©taire expliquant alors la montĂ©e du taux d’intĂ©rĂȘt interbancaire Ă  3 mois. La baisse intervenant ultĂ©rieurement rĂ©sulterait d’une rĂ©ponse aux tensions, illustrant Ă©ventuellement la rĂ©ponse tardive des autoritĂ©s monĂ©taires lorsque la situation du systĂšme bancaire se dĂ©grade. Enfin, la rĂ©ponse au choc d’incertitude est faiblement significative en France, avec un signe positif. La RĂ©serve fĂ©dĂ©rale serait plus sensible Ă  l’augmentation de l’incertitude. Elle rĂ©agirait en baissant ses taux 4 mois aprĂšs le choc et pour une durĂ©e de 7 mois. Enfin, dans les deux pays, la rĂ©ponse des cours boursiers est cohĂ©rente avec l’effet attendu des diffĂ©rents chocs non anticipĂ©s (voir graphiques en annexe 3). La bourse baisse significativement lorsque les taux d’intĂ©rĂȘt augmentent, lorsque l’inflation accĂ©lĂšre, que le spread interbancaire se dĂ©grade et lorsque l’incertitude s’accroĂźt. 18
  • 19. 3.2. Impact historique des chocs financiers sur la production industrielle En utilisant la dĂ©composition historique du cycle industriel, il est possible de mesurer l’impact Ă  chaque date des chocs passĂ©s et prĂ©sents d’une variable donnĂ©e. Sur le graphique 5, l’impact des chocs financiers sur le cycle industriel français cumule l’impact des chocs de cours boursiers, de volatilitĂ© et de spread interbancaire. Cet impact s’est avĂ©rĂ© particuliĂšrement nĂ©gatif (au-delĂ  des -5 % de l’IPI tendanciel) suite Ă  la crise financiĂšre de 1987, suite au krach de la bulle internet en 2001 et suite Ă  la crise des subprime de 2007. En revanche, les rĂ©cessions du dĂ©but des annĂ©es 1980 et 1990 s’expliqueraient davantage par l’impact des chocs de politique monĂ©taire. En fin de pĂ©riode, l’impact des chocs financiers (estimĂ© Ă  -2,0 % en novembre 2008) prĂ©domine et expliquerait environ le quart du cycle industriel (-7,6 %). A l’avenir, si les chocs financiers futurs Ă©taient nuls, ce qui reviendrait Ă  supposer un retour Ă  la normale sur les marchĂ©s financiers, les chocs passĂ©s continueraient Ă  peser nĂ©gativement sur le cycle industriel avec un impact maximal en juin 2009 (de -5,8 %), partiellement compensĂ© par l’effet d’une politique monĂ©taire expansionniste (+1,0 %). Aux Etats-Unis, le krach de la bulle Internet et la crise des subprime impriment plus fortement leur marque que les crises financiĂšres prĂ©cĂ©dentes (graphique 6). Les chocs de politique monĂ©taire tĂ©moignent quant Ă  eux d’un impact moins pro-cyclique au dĂ©but des annĂ©es 1990 et deviennent nettement contra-cycliques en 1995. En fin de pĂ©riode, contrairement Ă  la France, l’impact des chocs financiers (estimĂ© Ă  +0,3 % en novembre 2008) ne pĂšse pas encore sur le cycle industriel (-5,0 %). La volatilitĂ© boursiĂšre s’étant envolĂ©e plus tĂŽt, son impact nĂ©gatif est dĂ©jĂ  visible, mais l’accĂ©lĂ©ration de la chute des prix des actifs boursiers et l’explosion du spread interbancaire, observĂ©es en septembre 2008, sont trop rĂ©centes pour que leur impact nĂ©gatif apparaisse en novembre 2008. En l’absence de chocs futurs, les chocs financiers toucheraient ensuite rapidement la production industrielle, avec un impact maximal en fĂ©vrier 2009 (de -5,3 %). Comme en France, cet impact serait en partie compensĂ© par l’effet d’une politique monĂ©taire expansionniste (+1,2 %). 19
  • 20. Graphique 5. Impact historique des principaux chocs sur le cycle industriel français En % de l'IPI tendanciel 10% 5% 0% -5% -10% Cycle industriel Impact des chocs financiers Impact des chocs de politique monĂ©taire -15% 1975M01 1975M12 1976M11 1977M10 1978M09 1979M08 1980M07 1981M06 1982M05 1983M04 1984M03 1985M02 1986M01 1986M12 1987M11 1988M10 1989M09 1990M08 1991M07 1992M06 1993M05 1994M04 1995M03 1996M02 1997M01 1997M12 1998M11 1999M10 2000M09 2001M08 2002M07 2003M06 2004M05 2005M04 2006M03 2007M02 2008M01 2008M12 2009M11 2010M10 2011M09 Note : les chocs financiers dĂ©signent ici les chocs sur les prix boursiers, sur la volatilitĂ© boursiĂšre, ainsi que les chocs de spread interbancaire. Les chocs de politique monĂ©taire dĂ©signent ceux portant sur le taux interbancaire Ă  3 mois. Source : Datastream, calculs des auteurs. Graphique 6. Impact historique des principaux chocs sur le cycle industriel amĂ©ricain En % de l'IPI tendanciel 10% 5% 0% -5% -10% Cycle industriel Impact des chocs financiers Impact des chocs de politique monĂ©taire -15% 1975M01 1975M12 1976M11 1977M10 1978M09 1979M08 1980M07 1981M06 1982M05 1983M04 1984M03 1985M02 1986M01 1986M12 1987M11 1988M10 1989M09 1990M08 1991M07 1992M06 1993M05 1994M04 1995M03 1996M02 1997M01 1997M12 1998M11 1999M10 2000M09 2001M08 2002M07 2003M06 2004M05 2005M04 2006M03 2007M02 2008M01 2008M12 2009M11 2010M10 2011M09 Note : mĂȘmes dĂ©finitions des chocs que pour le graphique prĂ©cĂ©dent. Source : Datastream, calculs des auteurs. 20
  • 21. Conclusion Afin de mesurer l'impact de la crise financiĂšre sur l'activitĂ© en France et aux Etats-Unis, nous avons estimĂ© un modĂšle VAR structurel, contenant un bloc classique (production, prix, taux d’intĂ©rĂȘt) et intĂ©grant en outre des variables susceptibles de rĂ©vĂ©ler les chocs financiers, soient un spread interbancaire (pour capter l’assĂšchement en liquiditĂ©s), les cours boursiers (pour capter les effets « richesse ») et la volatilitĂ© des cours boursiers (pour capter l'effet de l'incertitude sur les dĂ©cisions d’investissement et de consommation des agents). Les fonctions de rĂ©ponse aux chocs structurels ont Ă©tĂ© obtenues dans le cadre d’une approche gĂ©nĂ©ralisĂ©e Ă  la Pesaran et Chin (1998), ce qui nous permet de ne pas formuler d’hypothĂšses (ad hoc) quant aux dĂ©lais de transmission de chaque type de choc. Les fonctions de rĂ©ponse obtenues pour la France et les États-Unis sont interprĂ©tables Ă©conomiquement, ce qui lĂ©gitime les estimations obtenues et leur qualitĂ©. Ainsi, un choc d'inflation, interprĂ©table comme un choc d'offre nĂ©gatif, a un impact rĂ©cessif sur la production, tout comme un resserrement de la politique monĂ©taire ou des tensions sur le marchĂ© interbancaire. Une baisse des cours boursiers entraine une chute de la production industrielle. Enfin, une augmentation de la volatilitĂ© et, donc de l'incertitude, se traduit bien par une dĂ©gradation de la production. Dans le cas français, c’est le choc de volatilitĂ© qui se rĂ©percute le plus rapidement sur l'activitĂ©, suivi des chocs sur le spread, sur les actifs boursiers, puis sur les taux interbancaires et enfin sur les prix. Dans le cas français, nos estimations montrent que les chocs financiers (i.e. chocs boursiers, de volatilitĂ© et de spread interbancaire) expliquent environ un quart du cycle industriel en novembre 2008. De plus, si l’on se base sur les chocs financiers connus jusqu'en novembre 2008, l'impact (nĂ©gatif) sur l'activitĂ© serait maximal en juin 2009, et trĂšs partiellement compensĂ© par le caractĂšre expansionniste de la politique monĂ©taire. Aux Etats- Unis, l'impact nĂ©gatif maximal serait observĂ© en fĂ©vrier 2009. Deux Ă©lĂ©ments non pris en compte par notre modĂšle pourraient toutefois conduire Ă  des projections plus pessimistes qu’un simple redĂ©marrage Ă  partir du second semestre 2009. D’une part, les impacts des chocs financiers sont projetĂ©s en supposant que ces chocs sont nuls Ă  partir de dĂ©cembre 2008, ce qui n’est malheureusement pas le cas au vu des donnĂ©es les plus rĂ©centes. Seul le spread interbancaire semble ĂȘtre revenu Ă  des niveaux « normaux » en France. D’autre part, du fait de la faiblesse de l’historique disponible pour les enquĂȘtes sur les conditions de crĂ©dit et pour le crĂ©dit distribuĂ©, nous n’avons pu mesurer explicitement les 21
  • 22. restrictions dans l’octroi des crĂ©dits, alors que des Ă©tudes rĂ©centes (Lown et Morgan, 2006) sur donnĂ©es amĂ©ricaines montrent que cette variable permet de capter les effets d’offre de crĂ©dit et jouent un rĂŽle dans la transmission Ă  la sphĂšre rĂ©elle. Le durcissement dĂ©clarĂ© des conditions de crĂ©dits, dĂšs le troisiĂšme trimestre 2007, pourrait donc Ă©galement expliquer la dĂ©gradation de la conjoncture. D’ailleurs, les analyses rĂ©centes36 visant Ă  Ă©valuer le niveau de stress financier intĂšgrent ce type de variables dans des indicateurs synthĂ©tiques. 36 Guichard et Turner (2008), IMF (2008) et Swiston (2008). 22