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La Función Consultiva
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                                 Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa




                La fonction
      consultative juridique centrale.
        Approche de droit comparé
             Gérard Marcou
            Professeur À l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne



A la différence de la juridiction administrative, la fonction consultative a donné lieu
a très peu d’études en droit comparé, tout au plus quelques développements dans des
travaux d’organisations internationales portant sur l’organisation gouvernementale
ou l’amélioration de la qualité de la législation. Son importance ne cesse cependant
de croître, avec les besoins en expertise qui accompagnent aujourd’hui toutes les
politiques publiques.
     La fonction consultative a cependant donné lieu en France à un certain nombre
de réflexions doctrinales, et sans doute ne faut-il pas s’en étonner, si l’on veut bien
se rappeler la conception napoléonienne de l’administration qui a durablement
marqué la France, selon laquelle, si délibérer est le fait de plusieurs, agir est le fait
d’un seul, et qui est à l’origine de la double fonction contentieuse et consultative du
Conseil d’Etat moderne.
     Maurice Hauriou est, semble-t-il, le premier à avoir introduit l’expression
«administration consultative», pour l’opposer à l’«administration active» et
désigner les nombreux conseils ou commissions entourant le gouvernement1. Yves
Weber a tenté d’en faire la théorie au moment où elle était en train de changer. Selon
la définition qu’il en donne, «l’administration consultative peut s’entendre comme
l’expression juridique d’opinions émises individuellement ou collégialement à l’égard
d’une autorité administrative, seule habilitée à prendre l’acte de décision à propos
duquel intervient la consultation»; cela suppose une institution dont la mission est
d’être consultée, l’autorité consultante peut être le gouvernement2. Selon l’auteur, la
consultation répond à trois exigences: l’efficacité, en éclairant l’administration; la
représentation des intérêts; la garantie des droits individuels3. La seconde, la plus
récente, qui s’est développée avec l’administration économique et sociale, en change
en fait la nature: avec la représentation des intérêts, la fonction consultative tend
à absorber le pouvoir reconnu à l’autorité consultante4. Mais en ce qui concerne

1
    Précis de droit administratif. Paris, Sirey, 9ème éd., 1927.
2
    Y. Weber. L’administration consultative. Paris, LGDJ, 1968, Bibl. de Droit Public n° 82, pp.1 et 2.
3
    Ibid. notamment pp.16-43.
4
    Ibid. pp. 305-306.
                                                                                                          247
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      del Consejo de Estado Francés



        la première, Y. Weber distingue nettement la fonction consultative juridique,
        essentiellement exercée par le Conseil d’Etat, et la fonction consultative associée
        aux différents domaines «techniques» de l’action administrative5. L’importance de
        cette distinction avait été soulignée avant lui par Gilbert Dauphin, qui distinguait
        simplement, au sein de l’administration consultative centrale, entre le Conseil d’Etat
        et «le reste»6. Mais cet auteur livrait une observation de plus grande portée en
        remarquant que le Conseil d’Etat avait assuré la pérennité de sa prééminence en
        évitant la pénétration en son sein des «techniciens» dont le concours était sans
        cesse plus indispensable aux pouvoirs publics, et en se restreignant aux plus hautes
        sphères de la vie juridique7.
             Cette fonction consultative juridique doit en effet être nettement distinguée des
        innombrables instances consultatives instituées au niveau du gouvernement central
        comme au niveau local. Plus que jamais, on voit s’affirmer l’existence d’une fonction
        consultative juridique centrale au sein de l’Etat. Elle s’oppose par la généralité de sa
        vocation, qui s’applique au moment juridique de l’expression de toutes les politiques
        publiques, aux divers organes de consultation technique dont la nature de l’expertise
        limite l’intervention à des secteurs d’activité plus ou moins étroitement définis. Elle
        s’impose par la complexité croissante du droit et des rapports entre les ordres juridiques.
             Cette distinction ne diminue par l’importance qu’il convient également de
        reconnaître aux différentes procédures et instances consultatives qui mobilisent
        des expertises techniques ou permettent de prendre en compte les attentes ou les
        comportements anticipés des destinataires des normes. Au contraire, elle a été
        consacrée par de nombreux travaux sur l’amélioration de la qualité réglementaire
        ou la «réforme de la réglementation» (regulatory reform), dont l’attention sur
        porte sur la simplification, la mesure de l’impact, économique notamment, de la
        réglementation sous toutes ses formes8.
             Les deux fonctions ne sont pas concurrentes ni contradictoires. La question
        de la qualité réglementaire ainsi comprise ne se pose que si la sécurité juridique est
        garantie, et la fonction consultative juridique centrale doit prendre en compte les
        objectifs de qualité réglementaire. Mais la fonction consultative juridique centrale
        a un sens spécifique : elle désigne l’organisation par l’Etat d’une capacité d’expertise
        juridique indépendante pour assister le gouvernement (et plous généralement le
        pouvoir exécutif ) dans sa mission d’élaboration de projets de loi et de règlements,
        tout en préservant l’autonomie de la capacité de décision du politique, ce qui signifie
        qu’elle ne doit dépendre d’aucun corps ou groupe extérieur.
             Ainsi définie, la fonction consultative juridique centrale existe sous les formes les
        plus diverses sans doute dans la plupart des pays, mais les institutions que l’on peut


        5
            Ibid. pp.16 et 19.
        6
            G. Dauphin. L’administration consultative centrale. Paris, Marcel Rivière, 1932, p. 7.
        7
            Ibid. p.70.
        8
             Voir pour la France: D. Mandelkern. Rapport du Groupe de travail interministériel sur la qualité de la
            réglementation, Paris. La Documentation Française, Ministère de la Fonction Publique, 2002, 139 pages. Sur
            le plan international, voir: The OECD Report on Regulatory Reform, 1997, qui a été suivi par un programme
            continu d’échanges et la publication de rapports par pays.
248
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                        Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



identifier comme assumant cette fonction ne répondent pas toutes à tous les éléments
de cette définition, et l’ampleur comme la qualité de cette fonction sont extrêmement
variables. Les conseils d’Etat, qui réunissent la fonction consultative et la fonction
contentieuse, sont certainement la forme la plus typique d’exercice de la fonction
consultative juridique centrale. Mais on peut observer que celle-ci peut être confiée à
des institutions fort diverses, selon l’histoire administrative de chaque pays.
     On peut ainsi en distinguer cinq catégories:
1. La fonction consultative associée à la fonction contentieuse au sein du conseil
     d’Etat;
2. La fonction consultative attribuée à un organe collégial placé auprès du
     gouvernement;
3. La fonction consultative associée au pouvoir d’action en justice du pouvoir
     exécutif;
4. La fonction consultative intégrée à l’organisation ministérielle;
5. L’institut spécialisé rattaché au gouvernement et chargé de lui apporter
     l’expertise juridique dont il a besoin.
     Sauf dans la deuxième catégorie, on verra que la fonction consultative juridique
centrale n’est jamais l’unique fonction des institutions qui l’exercent, et celles-ci n’ont
pas davantage l’exclusivité de la fonction de conseil juridique du gouvernement,
lequel peut toujours faire appel aux conseils de son choix.


I.       La fonction consultative associée à la fonction
         contentieuse au sein du Conseil d’Etat
     Ce type d’institution tire son origine de l’ancien conseil du roi qui a existé
dans divers pays européens, et qui a trouvé sa forme classique avec le Conseil
d’Etat napoléonien. Le système dit de la «justice retenue» fut durablement une
caractéristique distinctive de sa fonction contentieuse. Cette dernière a aujourd’hui
disparu des pays qui ont un conseil d’Etat, le dernier pays l’ayant abandonnée étant
les Pays-Bas.
     Aujourd’hui, le conseil d’Etat est un type d’institution dont la loi garantit
l’indépendance et celle de ses membres vis-à-vis du pouvoir exécutif, et qui remplit à
la fois des fonctions consultatives pour le gouvernement, et la fonction de juridiction
administrative suprême. C’est ce statut d’indépendance qui a permis, dans les Etats
modernes, de maintenir au sein de la même institution la fonction consultative et
la fonction de juger l’administration. Les membres du conseil d’Etat ne sont pas
toujours des magistrats, mais l’indépendance que leur confère leur statut les en
rapproche.
     Les pays européens qui ont un conseil d’Etat au sens que l’on vient de définir
sont aujourd’hui, outre la France: la Belgique, la Grèce, l’Italie, les Pays-Bas. Mais
on rencontre aussi ce type d’institution en Turquie et au Liban, en Egypte et, depuis
1998, en Algérie. Certains pays d’Afrique ont également un conseil d’Etat: le Burkina
Faso, le Gabon, le Sénégal, la République Centrafricaine. Cette voie a également été
                                                                                              249
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        suivie par la Thaïlande à partir de 1979, avant d’être abandonnée en 1999 avec la
        création d’une cour administrative suprême. En Amérique Latine, la Colombie est
        le seul pays qui ait adopté un Conseil d’Etat au sens que l’on a défini9.
              Dans tous ces pays, ce sont la juridictionnalisation de la fonction contentieuse et
        l’indépendance acquise envers le pouvoir exécutif qui ont assuré à la fois la pérennité
        et l’exemplarité du conseil d’Etat.
              La question de la compatibilité de la réunion au sein de la même institution
        de la fonction contentieuse et de la fonction de conseil du pouvoir exécutif avec le
        droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant
        et impartial garanti par l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des
        Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales a été soumise à plusieurs reprises
        à la Cour européenne des Droits de l’Homme. Dans l’arrêt Procola du 28 septembre
        1995 à propos du Conseil d’Etat luxembourgeois10, la Cour a jugé à propos d’un
        arrêt du Conseil d’Etat du Luxembourg que celui-ci n’avait pas respecté ce droit,
        dès lors que certains membres de la section de jugement avait fait partie de la
        section consultative qui avait émis un avis pour le gouvernement sur les arrêtés
        réglementaires qui avaient fait l’objet du recours.
              Dans deux arrêts ultérieurs, la Cour Européenne des Droits de l’Homme
        a cependant précisé que cette jurisprudence ne mettait pas en cause le modèle
        institutionnel du conseil d’Etat en tant que tel et les conditions auxquelles sa
        compatibilité avec l’article 6 de la Convention pouvait être assurée. L’arrêt Kleyn de
        2003 mettait en cause le Conseil d’Etat des Pays-Bas11 et l’arrêt Sacilor-Lormines de
        2006 le Conseil d’Etat français12. Sur la base de ces deux arrêts, la jurisprudence de la
        Cour européenne des Droits de l’Homme peut être résumée de la façon suivante.
              La Cour admet ainsi la compatibilité du modèle institutionnel du Conseil d’Etat
        avec l’article 6 de la Convention, mais sous certaines conditions: 1. que l’indépendance
        institutionnelle des membres du conseil d’Etat soit assurée, ce qu’elle reconnaît
        explicitement comme établi dans le cas du Conseil d’Etat français ; 2. que l’exercice
        successif d’une fonction consultative et d’une fonction juridictionnelle ne comporte pas
        dans la première une implication de nature à porter atteinte à l’impartialité de l’intéressé
        dans la formation de jugement; 3. que la consultation et le jugement ne portent pas sur
        la «même affaire» ou «des questions analogues»; 4) que l’avis ait abordé la question de
        façon «générale et abstraite» s’il existe un lien entre les questions juridiques13.


        9
             G. Marcou. «Une cour administrative suprême: particularité française ou modèle en expansion?», Pouvoirs
             n°123, 2007, pp. 133-154.
        10
             CEDH 28 sept. 1995 «Procola c/ Luxembourg», série A, n° 326, RFDA 1996, n° 4, p. 795, comm. J.-L. Autin
             / F. Sudre, «La dualité fonctionnelle du Conseil d’Etat en question devant la Cour Européenne des Droits de
             l’Homme», p. 777.
        11
             CEDH Gde Ch. 6 mai 2003 «Kleyn c/Pays-Bas», RTDH 2004, p. 365, note González.
        12
             CEDH 9 novembre 2006 «Soc. Sacilor-Lormines c/ France», RFDA 2007, n° 2, p. 352, comm. J.-L. Autin /
             F. Sudre. «L’impartialité structurelle du Conseil d’Etat hors de cause?», p. 342.
        13
             Cf. G. Marcou, op. cit. Mais pour un commentateur néerlandais, B.W.N. de Waard, même dans ce cas, l’avis
             peut présenter un caractère préjudiciel: note sous l’arrêt Sacilor-Lormines. Administratiefrechtelijke Beslissingen,
             2007, Afl.34, 22 septembre, pp. 1484-1487.
250
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                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



     L’arrêt Procola a conduit à une réforme fondamentale du Conseil d’Etat du
Luxembourg. La constitution du 17 octobre 1868 a été révisée (12 juillet 1996).
Une Cour administrative a été instituée par le nouvel article 95bis dans le chapitre
VI («De la Justice»); l’ensemble du contentieux administratif jusqu’alors de la
compétence du Conseil d’Etat lui a été transféré. Ce dernier est maintenu mais
avec ses seules attributions consultatives (art.83bis). La loi du 7 novembre 1996 a
réorganisé la justice administrative sur cette base.
     En Belgique, en France et aux Pays-Bas, des réformes de l’organisation interne du
Conseil d’Etat ont été adoptées dans le but de prévenir tout risque de mise en cause
de l’institution sur la base de l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde
des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales.
     Le Conseil d’Etat de Belgique est régi par une sorte de code connu sous le
nom de «lois sur le Conseil d’Etat coordonnées le 12 janvier 1973». Il se compose
d’une section de législation et d’une section du contentieux administratif, ainsi
nommée depuis la loi du 15 septembre 2006. C’est la section de législation qui
exerce la fonction consultative, pour le gouvernement fédéral comme pour les
gouvernements des communautés et des régions qui composent la Belgique. La
loi du 15 mai 1999 a prévu que les auditeurs affectés par priorité à la section de
Législation (lois coordonnées: art. 76) ne peuvent connaître des recours dirigés
contre les actes sur lesquels ils ont été amenés à donner un avis dans la section de
Législation (art. 29); enfin, il existe une procédure de récusation des membres de la
section d’Administration (art. 29).En outre, la section du contentieux administratif
se compose des présidents et des conseillers d’Etat qui ne font pas partie de la section
de législation (art. 89).
     En France, le décret du 6 mars 2008 a modifié assez profondément l’organisation
interne du Conseil d’Etat. Outre la création d’une section administrative
(consultative) supplémentaire, la section de l’Administration, qui sera chargée des
questions de fonction publique, de contrats, de propriétés publiques et des relations
avec les usagers, le décret introduit deux règles nouvelles importantes au regard de
la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (code de justice
administrative: art. R.122-21 et 122-21-1 et 2). D’une part, le président de la
section administrative qui a eu à délibérer d’un avis relatif à un acte faisant l’objet
d’un recours venant en assemblée du contentieux ne peut plus y siéger et sera suppléé
par un président adjoint d’une autre section. D’autre part, les membres du Conseil
d’Etat ayant participé à la délibération de cet avis ne peuvent plus participer à une
formation contentieuse, quelle qu’elle soit, devant statuer sur un recours contre cet
acte, et la liste en est communiquée au requérant qui en fait la demande14.
     Aux Pays-Bas, les arrêts Kleyn et Sacilor-Lormines ont mis fin aux débats sur
une réforme fondamentale et le projet de loi (n° 30 385)15, déposé en septembre
2006, toujours au stade de la discussion parlementaire, prévoit une réforme de

14
     F. Moderne et P. Delvolvé, «La réforme du Conseil d’Etat». RFDA 2008, n° 2, p. 213, suivi d’un entretien
     avec Bernard Stirn, président de la section du contentieux, et des nouvelles dispositions du code de justice
     administrative.
15
     Kamerstukken II 2005/2006. 30 585, n° 1-4, 27 septembre 2006.
                                                                                                                    251
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      del Consejo de Estado Francés



        l’organisation interne du Conseil d’Etat pour assurer le respect de l’article 6. Alors
        que, selon l’organisation actuelle, les avis sont adoptés par l’assemblée plénière sur
        rapport des sections administratives, le Conseil d’Etat serait organisé à l’avenir en
        deux sections distinctes: la section consultative et la section juridictionnelle. Le
        principe est maintenu que certains membres du Conseil d’Etat participent aux deux
        sections, mais leur nombre serait plus limité, et surtout un membre du Conseil ne
        pourrait statuer au contentieux dans une «affaire» à laquelle se rapporterait un avis
        auquel il aurait participé dans la section consultative.
              En Italie, l’organisation du Conseil d’Etat évite depuis longtemps la participation
        à la fonction juridictionnelle de membres des sections administratives. Beaucoup de
        pays qui ont introduit un conseil d’Etat ont rattaché celui-ci au pouvoir judiciaire,
        et attribuent à ses membres le statut de magistrats ; ils sont alors recrutés de la même
        manière que les juges ordinaires (Grèce, Turquie, Egypte, Liban).


        II.         La fonction consultative attribuée à un organe collégial
                    placé auprès du gouvernement
             Cette conception connaît deux variantes assez différentes par leur origine, mais
        qui ne sont pas sans points communs, du point de vue fonctionnel. La première
        correspond aux conseils d’Etat maintenus ayant perdu leur fonction contentieuse
        initiale; la seconde à l’introduction d’une organe spécialisé de conseil juridique au
        gouvernement, essentiellement en matière de législation, introduit dans des pays
        connaissant un système de dualité de juridiction avec une cour administrative
        suprême n’exerçant aucune fonction consultative.


        A)          Le Conseil d’Etat comme organe seulement consultatif du
                    gouvernement
             Il existe trois cas: l’Espagne, depuis la loi Maura de 1904, qui a décidé de
        transféré la juridiction contentieuse administrative aux juridictions ordinaires, le
        Luxembourg, depuis la révision constitutionnelle de 1996, et la Thaïlande depuis
        la constitution de 1997. Dans les trois cas, c’est l’insuffisante indépendance avec
        laquelle la fonction contentieuse était exercée par rapport au pouvoir exécutif qui
        explique que celle-ci ait été finalement retirée au conseil d’Etat pour être confiée
        à une juridiction spécifique en matière administrative, et jouissant des mêmes
        garanties d’indépendance que les juridictions ordinaires16.
             On ne s’arrêtera ici que sur le cas de l’Espagne. Le système résultant de la
        réforme de 1904 a traversé les régimes politiques en conservant ses traits essentiels.
        Selon la constitution de 1978, le Conseil d’Etat est «l’organe consultatif suprême
        du gouvernement» (art. 107). Il est organisé aujourd’hui par une loi organique

        16
             G. Marcou. «Une cour administrative suprême…», op. cit.
252
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                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



de 1980, révisé en 2004, et qui a remplacé l’ancienne loi de 1944 sur le Conseil
d’Etat17.
      Selon la loi organique de 1980, le Conseil d’Etat «exerce la fonction consultative
avec l’autonomie organique et fonctionnelle qui garantit son objectivité et son
indépendance conformément à la Constitution et à la loi» (art. 1er, par. 2). Son
rôle consultatif peut cependant aller au-delà d’un avis sur la stricte légalité ou
constitutionnalité du texte présenté. Selon l’article 2 (par. 1er), le Conseil d’Etat, dans
l’exercice de ses fonctions, «veille au respect de la Constitution et de l’ensemble de
l’ordre juridique», mais il «évaluera aussi les aspects d’opportunité et d’adéquation
si la nature de l’affaire l’exige ou si il est expressément sollicité de le faire par l’autorité
consultante».
      Le Conseil d’Etat émet ses avis sur les questions qui lui sont soumises par
le gouvernement ou ses membres (art. 2, par. 2, al. 1er). Il ne peut donc prendre
l’initiative lui-même d’émettre un avis. Cependant, selon la loi organique de 2004, il
peut aussi réaliser les études, rapports, mémoires et formuler les propositions (texte
consolidé de la loi organique: art. 20, par.1er) qui lui paraissent opportuns pour
assurer au mieux ses fonctions (art. 2, par. 3), et la commission des études est créée
à cet effet (art. 23). La loi organique de 2004 a également prévu la publication d’un
rapport annuel d’activité adopté par l’assemblée plénière du Conseil d’Etat (art.
20). Dans l’élaboration des propositions constitutionnelles et législatives que lui
commande le gouvernement, le Conseil d’Etat suit les objectifs, les critères et les
limites fixés par le gouvernement, mais il peut formuler à leur sujet les observations
qu’il estime pertinentes (art. 2, par. 3, al. 2).
      La loi organique établit donc une différence de régime de régime entre les
avis (dictamen) et les autres documents adoptés par le Conseil d’Etat au titre de sa
fonction consultative.
      En effet, la loi organique précise que la consultation du Conseil d’Etat est
obligatoire dans les cas où la loi le prévoit, et facultative dans les autres cas. Les avis, en
revanche, ne lient pas l’autorité consultante, à moins que la loi n’en dispose autrement
(art. 2, par. 2, al. 2). La loi organique donne cependant une certaine portée aux avis.
Tenant compte du fait que les avis peuvent être adoptés par des formations différentes,
notamment par l’assemblée plénière (pleno) ou par la commission permanente, il
est précisé que les affaires ayant donné lieu à un avis adopté en assemblée plénière
ne peuvent soumises au rapport d’aucun autre corps ou organes de l’administration
d’Etat; les avis adoptés par la commission permanente, ne peuvent être reconsidérés
que par l’assemblée plénière. C’est au conseil des ministres de décider, dans les cas où la
consultation est obligatoire, sur les affaires dans lesquelles le ministre est en désaccord
avec l’avis du Conseil d’Etat (art. 2, par. 2, al. 3). Enfin, les dispositions ayant fait l’objet
d’un avis du Conseil d’Etat doivent préciser si elles sont conformes à cet avis ou si elles
s’en écartent (art. 2, par. 2, al. 4).
      En fait les amendements adoptés par la loi organique 3/2004 ont quelque peu
étendu la compétence et renforcé l’autorité des avis du Conseil d’Etat. La consultation

17
     Miguel Sánchez Morón (2006). Derecho administrativo. Parte general, Madrid, Tecnos, 2ème éd., pp. 287s.
                                                                                                               253
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        préalable du Conseil d’Etat en assemblée plénière est désormais obligatoire pour
        tout projet de loi constitutionnelle et sur les projets de loi se rapportant à la mise
        en œuvre ou au développement de normes issus d’engagements internationaux ou
        du droit communautaire; la consultation est également obligatoire notamment sur
        les projets de décrets législatifs, sur les problèmes d’interprétation d’engagements
        internationaux, sur les transactions judiciaires ou extrajudiciaires intéressant les
        droits du Trésor public ou les compromis ou arbitrages qui s’y rapportent, ou
        encore sur toute question à laquelle le gouvernement reconnaît une importance ou
        des répercussions particulières (art. 21). En outre, la consultation de la commission
        permanente du Conseil d’Etat est obligatoire notamment sur la nécessité d’une
        autorisation parlementaire préalable à la ratification des traités et accords
        internationaux, sur les dispositions réglementaires nécessaires à la mise en œuvre ou
        au développement d’engagements internationaux ou du droit communautaire, sur
        toutes les mesures réglementaires nécessaires à l’exécution des lois, sur les projets de
        loi organique relatifs au transfert ou à la délégation aux communautés autonomes
        de compétences de l’Etat ainsi que sur le contrôle de l’exercice des compétences
        déléguées, ou encore sur la concession de monopoles ou de services publics en
        monopole, une compétence dont el droit communautaire réduit sans cesse le champ.
        La commission permanente conserve également un rôle consultatif en matière
        contentieuse dans certains cas, que la loi organique de 2004 a un peu élargi: ainsi sur
        les recours gracieux ou en appel qui sont portés, en vertu d’une disposition législative,
        devant le conseil des ministres, des commissions déléguées du gouvernement ou la
        présidence du gouvernement; sur les recours administratifs en révision (selon sur la
        loi sur la procédure administrative; sur la révision d’office d’actes administratifs dans
        les cas prévus par la loi; sur la nullité, l’interprétation ou la résolution de contrats
        administratifs, ou encore la modification ou l’extinction de contrats de concession,
        en cas d’opposition du cocontractant ou dans des cas prévus par la loi; enfin, et ceci
        a été ajouté par la loi organique de 2004, en cas de réclamations pécuniaires d’un
        montant supérieur à 6.000 euros consécutives à un dommage ou préjudice imputé à
        l’administration d’Etat.
             La composition du Conseil d’Etat espagnol est assez complexe. En résumé, on peut
        dire qu’elle fait appel à de hautes personnalités, dont le statut et l’expérience assurent
        l’indépendance de jugement et l’autorité morale, mais qui n’assurent pas directement,
        pour la plupart d’entre elles, l’expertise juridique du Conseil d’Etat, bien que, selon
        la loi organique, «la composition du Conseil d’Etat vise à garantir la diversité de
        son expertise et son indépendance» (art. 2, par.3, al.3). La loi organique de 2004 a
        introduit les anciens chefs de gouvernement parmi les membres de droit et à vie du
        Conseil d’Etat, sous réserve qu’ils manifestent la volonté d’exercer cette charge.
             La loi organique distingue trois catégories de membres du Conseil d’Etat (art.
        7 à 9): les conseillers permanents, les conseillers de droit, les conseillers électifs. Les
        conseillers permanents, en nombre égal à celui des sections qui composent le Conseil
        d’Etat, sont nommés à vie par décret royal parmi les ministres, présidents ou membres
        des conseils exécutifs des communautés autonomes, les autres membres du Conseil
        d’Etat, les membres des conseils consultatifs des communautés autonomes, les
254
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                        Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



référendaires supérieurs du Conseil d’Etat, les professeurs d’université des spécialités
juridiques, économiques et sociales ayant au moins quinze ans d’exercice, certains
hauts fonctionnaires, notamment. Les conseillers électifs sont au nombre de dix,
nommés pour quatre ans, notamment parmi les catégories suivantes : parlementaires,
deux au moins des conseillers électifs doivent avoir exercé les fonctions de président
ou de membre de conseil exécutif d’une communauté autonome, membre du
Tribunal constitutionnel ou de la Cour de Justice de la Communauté européenne,
ministre ou secrétaire d’Etat, Défenseur du Peuple, ambassadeur, maire d’un chef-
lieu de province, président de députation provinciale ou l’équivalent. Enfin, les
membres de droit, outre les anciens chefs de gouvernement comptent: les présidents
ou directeurs d’académie, le président du conseil économique et social, le procureur
général de l’Etat, le chef d’état-major de la défense, l’avocat général de l’Etat –
directeur du service juridique de l’Etat, le président de la commission générale de
codification, le président du conseil général du barreau, le gouverneur de la banque
centrale. Le président du Conseil d’Etat est nommé par décret royal délibéré en
conseil des ministres parmi les juristes «dont le prestige est reconnu» et qui ont
«l’expérience des affaires de l’Etat» (art. 6).
     On peut se demander si cette composition assure au Conseil d’Etat une capacité
d’expertise, sur les questions juridiques, et une disponibilité à la hauteur des fonctions
qui lui sont confiées. L’une et l’autre dépendent en réalité de la capacité représentée
par les référendaires chargés de préparer les délibérations, lesquels forment toutefois
un corps de juristes très réputés.
     Enfin, la plupart des communautés autonomes ont mis en place un conseil
consultatif qui remplit à l’égard du gouvernement régional les fonctions que remplit
le Conseil d’Etat au niveau national. Celles qui ne l’ont pas fait peuvent se tourner
vers le Conseil d’Etat.
     Bien que la loi organique de 2004 ait entendu renforcé la fonction consultative
du Conseil d’Etat, on ne doit pas oublier qu’il existe une autre instance d’expertise
juridique au niveau central, l’Avocature générale de l’Etat (Abogacía general
del Estado), ayant le rang d’un sous-secrétariat au sein du ministère de la justice.
L’Avocature générale est formée du corps des avocats de l’Etat (abogados del
Estado). Elle est chargée d’une part de la défense en justice des intérêts de l’Etat,
et en particulier dans les procédures devant les juridictions européennes (Cour
de Justice de la Communauté européenne et Tribunal de Première Instance, Cour
européenne des Droits de l’Homme), et d’autre part d’apporter une assistance
juridique consultative à toutes les administrations publiques. Son origine remonte
à un décret royal du 28 décembre 1849 créant la direction générale du contentieux.
Le corps des avocats de l’Etat a été créé par un décret royal du 16 mars 1886, qui
réorganisait la direction générale du contentieux. C’est aujourd’hui un corps
supérieur de l’administration de l’Etat, très prestigieux, formé de juristes recruté par
un concours réputé particulièrement difficile. L’organisation actuelle de l’Avocature
générale de l’Etat et ses deux fonctions essentielles sont définies par la loi 52/1997
du 27 novembre 1997 sur l’assistance juridique à l’Etat et aux autres institutions
publiques et par le décret royal 1474/2000 du 4 août 2000 qui fixe l’organisation
                                                                                             255
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      del Consejo de Estado Francés



        du ministère de la justice, sans préjudice, est-il précisé, des attributions du Conseil
        d’Etat. Toutefois, les textes n’indiquent pas comment la répartition des tâches entre
        le Conseil d’Etat et les avocats de l’Etat. En pratique, il semble que les avocats de
        l’Etat se concentrent, dans leur fonction consultative, sur les questions relatives aux
        droits de l’homme.


        b)           La création d’un organe spécialisé de conseil juridique
                     au gouvernement
             C’est principalement dans le but d’améliorer la qualité de la législation qu’un
        certain nombre de pays se sont dotés d’un conseil de législation (son nom précis
        peut varier d’un pays à l’autre) placé auprès du gouvernement, et chargé d’expertiser
        tous les projets de loi préparés par le gouvernement avant leur transmission au
        parlement. Il s’agit essentiellement de pays d’Europe de l’est confrontés à la nécessité
        d’adapter rapidement l’ensemble de leur législation au cadre communautaire dans
        la perspective puis en raison de leur adhésion à l’Union européenne. Mais il s’agit
        aussi de pays de droit administratif dans lesquels l’organisation de la juridiction
        administrative suit le modèle austro-allemand de la cour administrative suprême,
        laquelle est rattachée au pouvoir judiciaire, séparée du pouvoir exécutif et dépourvue
        traditionnellement d’attributions consultatives pour le gouvernement. Toutefois, un
        tel conseil de législation n’existe ni en Allemagne ni en Autriche (cf infra).
             Actuellement, on peut relever l’existence d’un conseil de législation auprès
        du gouvernement en Pologne, République Tchèque, Slovaquie et Slovénie. Sa
        composition fait habituellement appel à des professeurs de droit, de hauts magistrats
        et des experts de la haute fonction publique. Ces conseils de législation sont saisis
        de tous les projets de loi et les examine du point de vue de leur conformité à la
        constitution, au droit communautaire ou d’autres engagements internationaux, aux
        principes généraux du droit ; ils veillent aussi à la qualité du style législatif, qui doit
        être clair et compréhensible. La compétence des conseils de législation s’étend aux
        actes réglementaires de la compétence du gouvernement18.
             On s’arrêtera sur l’exemple de la Pologne19. Le conseil législatif (Rada
        Legislacyjna) est prévu par l’article 14 de la loi du 8 août 1996 sur le conseil des
        ministres. Selon ce texte, le conseil législatif est créé auprès du président du conseil
        des ministres (c’est le chef du gouvernement) qui en nomme les membres et en fixe
        par décret les tâches et le mode de fonctionnement. Le président du conseil des
        ministres arrête après avis du conseil législatif les principes de rédaction des textes
        normatifs auxquels doivent se conformer les différentes administrations. Le décret
        du président du conseil des ministres du 23 juillet 1998 définit les missions du
        conseil législatif et ses règles de fonctionnement. Le conseil législatif se compose

        18
             SIGMA. Regulatory management capacities of member States of the EU that joined the Union on 1st May 2004,
             SIGMA. Paper n° 42, GOV/SIGMA(2007)6, juin 2007, notamment pp. 37 et suiv.
        19
             On se fonde sur les textes de base en langue polonaise et sur un entretien au conseil législatif le 10 novembre
             2004.
256
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                          Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



de 20 membres au plus nommés par le président du conseil des ministres parmi des
représentants éminents de la science juridique et des praticiens expérimentés. Leur
mandat est de quatre ans ; le président et le vice-président ainsi que le secrétaire (ces
deux derniers sur proposition du président) sont nommés parmi les membres par
le président du conseil des ministres, qui peut également les révoquer. En revanche,
le président du conseil des ministres ne peut mettre fin au mandat des membres
avant le terme du mandat que dans des cas limitativement énumérés par le décret
sur le conseil législatif (§5, par. 1er). Tous les membres du conseil législatif sont des
professeurs de droit, des diverses disciplines juridiques, quelques anciens juges des
plus hautes juridictions.
     Le conseil législatif est consulté sur tous les projets de loi du gouvernementaux ; il
ne l’est cependant pas sur les textes proposés par les autres autorités investies du droit
d’initiative législative. Toutefois, le conseil législatif peut donner un avis sur une initiative
parlementaire ou du président si l’auteur de l’initiative le demande. Le conseil législatif
est saisi des projets de décret les plus importants. Il arrive pourtant que des projets de
loi ne soient pas soumis au conseil législatif, et davantage encore les projets de décret
réglementaire du gouvernement. Le président et le vice-président du conseil législatif sont
invités aux réunions du conseil des ministres. En outre, le conseil législatif est consulté
quotidiennement par les services du Premier ministre de manière informelle.
     Le conseil législatif se réunit environ toutes les deux semaines et examine 10 à 12
projets de loi par séance, sur la base de rapports présentés par certains de ses membres.
Le conseil législatif forme des groupes de travail pour étudier les projets. Le président du
conseil législatif peut demander des informations et des documents complémentaires
aux services qui les ont préparés, il peut inviter à la réunion du conseil législatif comme
aux réunions préparatoires des groupes de travail les fonctionnaires en charge du projet
ou des représentants d’organisations intéressées (organisations sociales, collectivités
locales, etc…) (décret du 23 juillet 1998, §§10 et 11). En pratique, l’examen d’un projet
de loi est toujours précédé de réunions de travail avec les services qui les ont préparés. Les
présidents des plus hautes juridictions ou leur vice-président ont invités aux réunions
du conseil législatif. Les avis sont transmis au conseil des ministres immédiatement
après leur adoption (§12), mais aucune disposition n’impose la confidentialité de ces
avis. Bien entendu, ils ne lient pas le gouvernement.
     Il est précisé que le directeur du Centre de législation du gouvernement ou
son délégué participent aux travaux du conseil législatif (§9, par. 3). Le Centre
de législation du gouvernement, prévu par la loi du 8 août 1996 sur le conseil
des ministres (art. 14a à 14i) est un établissement placé sous l’autorité directe du
président du conseil des ministres, qui en nomme et révoque le président et le vice-
président. Il est chargé de coordonner l’activité législative. Il s’agit d’un organisme
de gestion, mais aussi de suivi et d’étude, dont l’appui au conseil législatif peut être
important. Outre, l’édition du journal officiel polonais, le Centre de législation
du gouvernement prépare un avis juridique sur les projets d’actes juridiques du
gouvernement, coordonne les évaluations des effets socio-économiques des actes
juridiques en préparation, collabore aux avis juridiques du conseil législatif sur
les projets qui lui sont soumis, contrôle l’adoption par les organes administratifs
                                                                                                    257
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      del Consejo de Estado Francés



        compétents des mesures nécessaires à l’application des lois (art. 14c). Le centre coopère
        avec les institutions scientifiques pour l’exécution de ses missions (art. 14d).
             Le gouvernement suit en général les avis du conseil législatif; environ 20%
        des avis sont négatifs. Sur l’exemple d’une année (octobre 2003 – octobre 2004),
        sur l’ensemble des projets de loi: 35% ont été transmis au parlement avec l’avis du
        conseil législatif, 35% n’ont pas été transmis au parlement, 7% ont été transmis au
        parlement sans avoir été soumis au conseil législatif, et 23% étaient des projets de
        loi relatifs à des accords internationaux non soumis au conseil législatif20. Selon des
        données plus récentes, toutefois, seulement 60% des projets de loi seraient soumis
        au conseil législatif21.
             En Pologne, le fonctionnement et le rôle du conseil législatif semblent donner
        satisfaction. Toutefois, ce type d’institution peut donner lieu aussi à des évaluations
        plus critiques. Ainsi, en Slovaquie, on a relevé que le délai d’examen des projets de loi
        est excessif, pouvant atteindre huit mois, et que les conditions de l’inscription d’un
        projet à l’ordre du jour du conseil législatif ne sont pas claires, ce qui laisse place au
        marchandage politique22. En outre, mais cela ressort aussi de l’ampleur des auditions
        auxquelles le conseil peut procéder, les limites du rôle du conseil législatif ne sont pas
        très claires : en principe l’avis porte sur les questions de droit et sur la qualité technique
        du texte, mais en pratique l’avis peut porter aussi sur des questions de contenu.


        II.          La fonction consultative associée au pouvoir d’action en
                     justice du pouvoir exécutif
             Un modèle très différent de ceux que l’on vient d’évoquer est celui qui s’est
        développé en Angleterre: les Law Officers of the Crown ce que l’on pourrait traduire
        par: les «légistes de la Couronne», une traduction qui restitué l’origine médiévale
        de l’institution, mais à raison de son actualité on préférera «Avocats généraux de
        la Couronne». Produit d’une expérience historique particulière également, cette
        institution a été transposée aux Etats-Unis et dans de nombreux autres pays qui ont
        système juridique fondé sur la common law.
             Il convient de présenter le système britannique avant d’examiner rapidement
        quelles variations il a connues dans les pays qui s’en sont inspirés.


        a)           Les avocats généraux de la Couronne

            Il existe deux avocats généraux de la Couronne pour l’Angleterre et le Pays de
        Galles: l’Attorney general et le Solicitor general, qui est son adjoint23. Ce dernier peut
        20
             Entretien précité.
        21
             SIGMA, op. cit, p. 38.
        22
             Katarina Staronova / Katarina Mathernova. Recommendations for the improvement of the legislative drafting
             process in Slovakia. OSI IPF Fellowship, Budapest, mars 2003, p. 8.
        23
             Ils ont un homologue pour l’Ecosse: the Advocate General for Scotland.
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                                Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



suppléer l’Attorney general dans toutes ses fonctions, et il en a toutes les attributions
en dehors de celles que l’Attorney general se réserve.
     Il s’agit d’une institution singulière qui puise sa source dans la longue histoire
du droit anglais, et qui n’est pas dépourvue de contradictions. L’Attorney general est
apparu en 1315 pour exercer les poursuites au nom de la Couronne, il reçu ce titre en
1452. Le Solicitor general est apparu en 1461 pour la défense de la Couronne en justice.
Mais c’est seulement au 17ème siècle que l’institution a acquis ses caractéristiques
modernes en devenant les conseillers juridiques de la Couronne et fournissant des
avis que les questions de droit à tous les départements du gouvernement24.
     Aujourd’hui encore, l’un et l’autre sont avocats (barristers, plus précisément),
membres de l’une ou l’autre chambre du Parlement, et membres du gouvernement,
à ce titre nommés par le Premier ministre. Comme ministres, les avocats généraux
de la Couronne sont responsables devant le Parlement, comme tous les membres
du gouvernement. L’Attorney general est, ès qualité, le chef du barreau, bien que
membre du gouvernement et qu’il entre dans sa fonction de représenter les intérêts
de la Couronne en justice.
     L’office des avocats généraux de la Couronne est régi aujourd’hui par le Law
Officers Act de 1997, mais aussi comme on le verra par certaines conventions de
la constitution. Cette loi établit clairement la suppléance de l’Attorney general
par le Solicitor general, mais le véritable titulaire de la charge reste l’Attorney
general. C’est pourquoi, dans ce qui suit on emploiera simplement l’expression:
l’Avocat général.
     Selon la loi, l’Avocat général remplit trois grandes fonctions:
     • conseiller juridique du gouvernement;
     • ministre chargé des poursuites au nom du gouvernement (superintending
           minister);
     • gardien de l’intérêt public.
     Il en outre charge de diverses fonctions en relation avec le Parlement ou les
professions juridiques.
     En tant que «gardien de l’intérêt public» (gardian of the public interest), il est
censé agir en toute indépendance. Cette fonction fait de lui l’autorité la plus haute
du royaume en matière criminelle : certaines poursuites sont soumises à son accord,
il détient à l’inverse le pouvoir de décider de ne pas poursuivre, il peut faire appel
des jugements trop cléments, il peut engager les poursuites pour outrage à la cour
(contempt of court) (un délit qui garantit notamment l’exécution des décisions de
justice, notamment. Cette indépendance est considérée par la jurisprudence comme
une règle constitutionnelle: «Selon notre droit constitutionnel, dans les matières
qui concernent le public en général, l’Avocat général est le gardien de l’intérêt public.
Bien que membre du gouvernement en exercice, il est de son devoir de représenter
l’intérêt public avec une objectivité et un détachement complets. Il doit agir en



24
     J. Ll. J. Edwards, The law officers of the Crown. A study of the offices of the Attorney general and of the Solicitor
     general of England, Londres, Sweet & Maxwell, 1964, v. chapitre 1er.
                                                                                                                         259
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés



        toute indépendance à l’égard de toute pression extérieure d’où quelle vienne»25. Ce
        principe a été réaffirmé par l’Avocat général devant la Commission de la constitution
        de la Chambre des Lords26. Toutefois, cette indépendance n’est pas invoquée dans
        les autres fonctions que remplit l’Avocat général.
             En ce qui concerne l’exercice la fonction de conseil juridique pour le pouvoir
        exécutif, il est nécessaire de distinguer deux aspects: 1) les avis juridiques que l’Avocat
        général doit donner au gouvernement, dont il fait partie; 2) le rôle du département de
        l’avocat du Trésor (Treasury Solicitor’s Department), qui est placé sous son autorité.
             Le département de l’avocat du Trésor est l’une des six administrations placées
        sous l’autorité de l’Avocat général, et qui sont les suivantes :
             • le Serious Fraud Office (SFO), chargé de la recherche et de la poursuite des
                  fraudes les plus graves ;
             • le Crown Prosecution Service (CPS), qui est placé sous la direction du
                  Directeur de l’Action publique (Director of Public Prosecution), et qui
                  remplit une fonction classique du parquet;
             • le Département de l’Avocat du Trésor;
             • le Département du directeur de l’Action publique pour l’Irlande du Nord;
             • l’Inspection du CPS;
             • le Revenue and Customs Prosecution Office, qui est chargé des poursuites
                  en matière fiscale et douanière.
             Ces administrations sont considérées comme faisant partie du système judiciaire
        britannique et l’Avocat général nomme le directeur de chacun d’elle.
             En outre, l’Avocat général dispose d’un petit département qui lui est directement
        rattaché, le bureau de l’Avocat général (Attorney general’s Office), formé d’une cinquantaine
        de personnes répartis en trois groupes spécialisés en droit civil, en droit pénal et en
        matière d’administration et de politique publique. C’est ce service qui appuie l’Avocat
        général dans l’exercice des fonctions qui lui sont propres énumérées précédemment.
             Précisons encore que, malgré ces fonctions, l’Avocat général n’est pas un ministre
        de la justice. Cette fonction, traditionnellement exercée par le Lord Chancellor, qui
        cumulait les fonctions de président de la Chambre des Lords, de président de sa
        formation judiciaire et de ministre de la justice, est passée avec la réforme de 2005
        à un vrai ministre de la justice, tandis qu’une véritable cour suprême succédait à la
        formation de jugement (Appellate Committee) de la Chambre des Lords.
             Membre du gouvernement, l’Avocat général ne fait cependant pas partie du
        Cabinet, qui constitue le cœur politique du gouvernement. Toutefois, il est souvent
        invité, avec le Solicitor general, aux réunions du Cabinet, à raison de sa fonction de
        conseil juridique, et il est membre de divers comités ou sous-comités du Cabinet,
        tels que le comité des affaires intérieures, le comité du programme législatif (l’Avocat
        général est ainsi conduit à donner un avis sur tous les projets de loi), le comité des
        questions européennes, par exemple.

        25
             Jugement prononcé par Lord Denning: «Attorney General v. Independent Boradcasting Authority” [1973] 1
             All E. R. p. 689, 697 (trad. par l’auteur).
        26
             Constitutional Affairs Committee, Inquiry into constitutional role of the Attorney general, Memorandum from the
             Attorney general Attorney General’s Office, 6 février 2007, paragraphe 25.
260
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                                   Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



      Dans l’exercice de la fonction de conseil juridique pour le pouvoir exécutif, le
système britannique distingue ainsi en fait deux niveaux: un niveau plus politique,
celui des avis juridiques donnée par l’Avocat général lui-même au gouvernement et
en tant que membre du gouvernement, et la fonction d’expertise juridique organisée
pour le Premier ministre et l’ensemble du gouvernement au travers du Département
de l’Avocat du Trésor.
      Les avis juridiques de l’Avocat général concernent les affaires les plus
importantes et les plus sensibles. Comme l’a exprimé l’Avocat général, celui-ci se
situe «au sommet de l’organisation du conseil juridique composé des juristes des
ministères et de l’avocat du Trésor. (…) Je peux être consulté à n’importe quel
stade du processus. Mais ce n’est habituellement pas nécessaire (…). Mais dans les
domaines présentant une sensibilité ou une difficulté particulières, mon avis est
souvent sollicité»27. Selon certaines estimations, cela ne concernerait pas plus de
1% des questions juridiques rencontrées, selon l’exemple des affaires étrangères et du
Commonwealth28. Toutefois, les critères restrictifs qui devaient guider la décision
d’un ministère de demander un avis juridique à l’Avocat général ont disparu dans la
plus récente version du «code ministériel», la circulaire du Premier ministre qui
encadre les procédures et le travail des ministères29. Cela devrait conduire à ce que
l’avis de l’Avocat général soit plus souvent sollicité, sans que l’on puisse encore en
prendre la mesure.
      La question de la confidentialité des avis donnés au gouvernement par l’Avocat
général a donné lieu à de nombreux débats. En effet, ces avis sont considérés comme
des documents du pouvoir exécutif qui ne sont pas communicables au public. Cette
règle n’est guère différente de celle qui s’applique aux avis que le Conseil d’Etat
français donne au gouvernement sur sa demande, et dont le gouvernement décide
d’autoriser ou non la publication. Un certain nombre d’entre eux sont cependant
publiés dans le Rapport annuel du Conseil d’Etat. Mais le statut de l’Avocat général
crée une difficulté: puisqu’il est un ministre, membre du gouvernement, il est
responsable devant le Parlement; comment alors peut-il justifier qu’il ne puisse en
rendre compte de ses avis au Parlement?
      La confidentialité des avis juridiques de l’Avocat général au gouvernement
est une convention de la constitution qui s’est affirmée au 19ème siècle dans de
rares cas où le gouvernement a accepté de rendre publics un tel avis en raison de
« circonstances particulières et exceptionnelles»30. Le Premier ministre Palmerston
avait ainsi déclaré devant le Parlement en 1865 après les émeutes de Belfast que
la règle était que ces avis n’étaient pas communiqués au Parlement car les avocats
généraux de la Couronne seraient plus prudents dans leurs opinions s’ils savaient
qu’elles devraient être rendues publiques, mais il appartenait au gouvernement

27
     Cité par K. A. Kyriakides. «The advisory functions of the Attorney-General”, Hertfordshire Law Journal 2003.
     1(1), p. 74.
28
     K.A. Kyriakides, op. cit. p.75
29
     Ministerial Code. Cabinet Office, juillet 2007, par. 2.10 à 2.13, à comparer avec le Ministerial Code de 2005,
     dont le paragraphe 6.22 énonçait encore ces conditions restrictives.
30
     J. Ll. J. Edwards, op. cit. p. 257.
                                                                                                                    261
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés



        d’apprécier si les circonstances justifiaient qu’il rende public un avis31. Cette règle
        a été depuis constamment réaffirmée, lors d’interpellations parlementaires à la suite
        de décisions sensibles ou controversées pour lesquelles le gouvernement a parfois
        tenté de s’abriter derrière l’autorité des avis juridiques de l’Avocat général. Tel fut le
        cas dans l’affaire Matrix Churchill de vente d’armes à l’Irak en 1992: quatre ministres
        avaient signé des certificats d’immunité dans l’intérêt public, qui avaient pour
        effet, selon le droit anglais, de faire obstacle à la communication de documents à la
        défense devant la justice; cela empêchait aussi l’information complète du parlement
        sur la réalité de la politique du gouvernement. Le Premier ministre a cependant dû
        consentir à l’ouverture d’une enquête sous l’autorité de Lord Justice Scott. L’un des
        points était la portée des avis juridiques donnés par l’Attorney general aux ministres,
        et dans quelle mesure il affecte la responsabilité des ministres: une fois cet avis
        remis, les ministres n’auraient plus de marge d’appréciation («no discretion left»)32.
        Toutefois, la déclaration de l’Avocat général devant la commission limite la portée de
        cette opinion, qui mettrait en cause la possibilité de la responsabilité des ministres
        ayant sollicité l’avis devant le Parlement. Selon l’Avocat général, l’avis exprimé
        était que, s’agissant de l’application de la loi sur l’immunité dans l’intérêt public, le
        ministre avait le devoir de ne pas communiquer un document s’il reconnaissait que
        ce document entrait dans l’un des catégories de documents couverts par cette loi33.
        C’est donc la loi qui liait le ministre et non l’avis qui en rappelait les termes.
             Par la suite, la question a été de nouveau soulevée à propose d’autres décisions
        controversées du gouvernement, et notamment lors de la ratification du traité de
        Masstricht en 1993 et lors de l’engagement du Royaume-Uni dans la guerre en Irak
        en 2003. Dans le premier cas, le gouvernement a été conduit à communiquer la
        substance de l’avis par lequel l’Avocat général exprimait que la non incorporation
        du protocole dans le droit interne du Royaume-Uni ne ferait pas obstacle à la
        ratification du traité de Maastricht, mais l’Avocat général a refusé de donner plus
        de détail lorsqu’il a comparu devant la commission de la chambre des Communes le
        22 février 1993. En revanche, en ce qui concerne la guerre en Irak, le gouvernement
        ayant affirmé préalablement qu’il ne ferait rien de contraire au droit, il a autorisé
        l’Avocat général à rendre public, sous la forme d’une réponse écrite à une question
        parlementaire (17 mars 2003), l’avis qui exposait les raisons de droit de la participation
        du Royaume-Uni à la guerre. L’interprétation que l’on a pu donner de ces décisions
        reste conforme à la convention de la constitution. Les avis juridiques de l’Avocat
        général au gouvernement sont confidentiels et ne peuvent pas être rendus publics,
        sauf en cas de circonstances particulières et exceptionnelles que le gouvernement
        apprécie34. Les exemples cités montrent que ces cas ne se présentent que rarement.
             Cette convention de la constitution a été également exprimée dans d’autres textes.
        Elle sigure d’abord depuis longtemps dans les «codes ministériels» qui, modifiés et

        31
             Ibid.
        32
             J. McEldowney. Public Law. Londres, Sweet & Maxwell, 1994, p. 83.
        33
             Voir cette déclaration: http:/www.fas.org/news/uk/scott/atg2.txt
        34
             K. A. Kyriakides, op. cit. pp.77-82 et pp.83-84.
262
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



republiés régulièrement, fixent les règles de conduite que les ministres doivent respecter
dans tous les domaines. Dans l’édition de 2007, on lit ainsi au paragraphe 2.13: «The fact
that the Law Officers have advised or have not advised and the content of their advice must
not be disclosed outside of Government without their authority”. Cette formulation intègre
la possibilité de rendre publics les avis juridiques tout en maintenant le principe de la
confidentialité. En outre, le Freedom of Information Act 2000, qui règle les conditions
auxquelles des documents officiels peuvent être communiqués au public, exclut
expressément de ces documents les avis juridiques de l’Avocat général (s. 35).
     Cependant, les avis juridiques de l’Avocat général ne suffisent pas à rendre
compte de la fonction consultative juridique centrale telle qu’elle est organisée en
Angleterre. Dans le fonctionnement courant du gouvernement, le premier degré,
en quelque sorte, de la fonction consultative juridique centrale est constitué par le
Département de l’Avocat du Trésor et du réseau de juristes spécialisés en fonction
dans les différents ministères. L’importance de ce premier degré s’explique par
l’absence de juristes parmi les hauts fonctionnaires impliqués dans la formation des
politiques publiques a des conséquences sur le caractère de la fonction publique,
une caractéristique de la haute administration britannique dont Wade avait bien
souligné l’importance. Le point de vue juridique sur les politiques publiques est très
sous-représenté, à la différence de beaucoup d’autres pays. L’influence du droit sur
le style et la technique de l’administration est très limitée. Il en résulte un certain
antagonisme entre les fonctionnaires et la mentalité juridique35.
     La mission du Département de l’Avocat du Trésor est double. D’une part, il
assiste le gouvernement et tous les organismes publics dans les procédures judiciaires
qui les concernent, que ce soit en demande ou en défense. D’autre part, il fournit au
gouvernement et aux organismes publics l’expertise juridique dont ils ont besoin,
soit dans l’élaboration des projets de loi ou de règlement, soit en présentant des avis
juridiques sur les questions qui lui sont soumises.
     Le Département de l’Avocat du Trésor a été transformé en «agence exécutive»,
au cours de la réforme administrative des années 90 («next step agencies»). Il
demeure partie intégrante du gouvernement central, ils est placé sous l’autorité de
l’Avocat général, mais il constitue une agence dotée de l’autonomie financière, ce
qui signifie qu’il doit couvrir ses coûts avec les paiements de ses «clients», c’est-
à-dire les ministères et d’autres organismes publics. Son «chiffre d’affaires» serait
de 50 millions de livres en 2007. En pratique, il offre ses services à 180 organismes
publics d’Angleterre et du Pays de Galles, avec un personnel de 800 personnes, parmi
lesquels 400 juristes (barristers et solicitors). En outre, le Département, de l’Avocat du
Trésor sous-traite certaines consultations à des firmes privées. Enfin, les juristes du
Département travaillent avec un réseau de juristes spécialisé des divers ministères, à
l’égard desquels il joue souvent un rôle de coordination.
     Le Département de l’Avocat du Trésor est organisé en plusieurs divisions ou
services spécialisés, ainsi nommés:
     • Litigation and Employment Group;

35
     H. W. R. Wade, Administrative law. Clarendon, Oxford, 5ème éd. 1982, p. 57.
                                                                                             263
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés



              •  Cabinet Office and Central Advisory Division: il s’agit d’un groupe de 20
                 juristes, chargés de conseiller le Cabinet sur toutes les questions juridiques
                 soulevées par les décisions politiques, sur les projets de loi et de règlement;
             • European Division: c’est un groupe de 14 juristes chargés d’assister le
                 gouvernement dans les litiges en matière de droit européen et de le conseiller
                 en général sus totue question de droit communautaire et européen;
             • Advisory Teams: il s’agit d’une centaine de juristes qui se trouvent dans les
                 principaux ministères et leur apportent l’expertise juridique spécialisée
                 dont ils ont besoin;
             • Treasury Legal Advisers: apportent une expertise juridique en droit
                 financier, notamment en ce qui concerne l’application de la loi sur les
                 services financiers et de marché, ainsi que les organismes publics rattachés
                 au ministère des finances (Treasury);
             • Office of Government Commerce Legal Advisers: ce groupe de sept juristes est
                 spécialisé en matière de marchés publics (y compris le droit communautaire)
                 et de mesures visant à améliorer l’efficacité du secteur public ;
             • Culture Media and sport Advisory Division ;
             • Children and School Advisory Division.
             Cette organisation peut, bien sûr, évoluer en fonction des besoins du
        gouvernement. Mais le plus important est que tous les juristes qui travaillent dans
        environ 40 départements ministériels forment ce qu’on appelle le Service Juridique
        du Gouvernement (Government Legal Service), lequel est placé sous l’autorité directe
        de l’Avocat du Trésor, qui est lui-même nommé par l’Avocat général36.


        b)          Les Etats-Unis et les autres pays de common law
              L’institution britannique des Law Officers of the Crown s’est largement diffusée
        parmi les pays de common law, des Etats-Unis à Chypre en passant par la Nouvelle-
        Zélande et le Canada. Il n’est pas possible de rendre compte de leurs nombreuses
        particularités. On s’arrêtera ici seulement sur le cas des Etats-Unis.
              L’Attorney general (Avocat général) a été introduit par la loi sur l’organisation
        judiciaire de 1789 (Judiciary Act 1789); il n’était pas prévu par la Constitution
        des Etats-Unis. Selon l’article 35 de cette loi, «… And there shall be appointed a meet
        person learned in the law to act as an attorney general for the United States, … whose duty
        it shall be to prosecute and conduct all suits in the Supreme Court in which the United
        States shall be concerned, and to give his advise and opinion upon questions of law when
        required by the President of the United States, or when requested by the heads of any of the
        departments, touching any matters that may concern their departments, and shall receive
        such compensation for his services as shall be by law provided”. L’Avocat général fait partie
        du cabinet; il est nommé et révoqué discrétionnairement par le président (sous réserve
        de l’accord du Sénat pour la nomination). Mais le Congrès ne peut le destituer que par
        une procédure d’impeachment, et seulement pour des faits criminels graves.

        36
             Treasury Solicitor. Law at the heart of Government. Londres 2007.
264
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



     C’est seulement en 1870 que l’Avocat général fut doté d’un département, le
ministère de la justice, dont il est le chef. Aujourd’hui, l’Avocat général est le seul
membre du cabinet qui ne porte par le titre de «secrétaire».
     Selon la législation en vigueur (28 USC § 503), l’Avocat général des Etats-Unis
est le chef du département fédéral de la justice, il est membre du cabinet du Président
des Etats-Unis, il est le juriste le plus élevé, chargé de toutes les affaires juridiques
du gouvernement des Etats-Unis, il est enfin le procureur général des Etats-Unis,
responsable à ce titre du respect des lois.
     On voit que l’Avocat général présente aux Etats-Unis plusieurs particularités
qui le distinguent de son homologue britannique. Premièrement, l’Avocat général
fait clairement partie de la «branche» exécutive du gouvernement au sens de la
constitution des Etats-Unis, et non du pouvoir judiciaire, alors qu’au Royaume-Uni,
l’Avocat général est considéré, bien que faisant partie aussi du gouvernement, comme
une institution du système judiciaire. Deuxièmement, aux Etats-Unis, l’Avocat
général est le ministre de la Justice, alors qu’au Royaume-Uni cette dernière fonction
est confiée à un membre distinct du gouvernement. Du point de vue administratif
et budgétaire, le département de la justice est aux Etats-Unis un département
ministériel classique avec un financement par des inscriptions budgétaires
     En pratique, c’est la fonction de procureur général, chargé de la mise en œuvre de
la politique criminelle, qui paraît l’emporter sus toutes les autres. Le Rapport annuel
de l’Avocat général37 lui est presque entièrement consacré. Bien que la fonction de
conseil juridique de l’exécutif demeure en principe importante, la confidentialité qui
s’attache aux avis juridiques émis et le silence du Rapport annuel sur cette fonction
rend impossible d’apprécier sa portée réelle aujourd’hui. On doit aussi relever que
les commissions réglementaires fédérales disposent, en raison même de leur nature
et de leurs fonctions, de leur propre expertise juridique.


IV.         La fonction consultative intégrée
            à l’organisation ministérielle
     La fonction consultative juridique centrale du gouvernement peut aussi être
exercée par le ministère de la justice dans des pays qui ne se rattachent pas à la
tradition juridique anglo-saxonne. On le constate dans divers pays européens qui ne
connaissent pas le modèle du conseil d’Etat.
     En Allemagne, le ministère fédéral de la justice examine tous les projets de loi
et de règlement fédéraux, ainsi que les projets d’accords internationaux, afin de
vérifier qu’ils sont conformes à la Loi fondamentale, au droit communautaire et à
la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés
fondamentales et aux autres engagements internationaux de la République fédérale.
Cependant, il s’agit d’une fonction de contrôle plutôt que de conseil ou d’appui. Le
ministère fédéral de l’intérieur examine aussi ces projets.

37
     U.S. Department of Justice. Performance and Accountability Report. Fiscal Year 2007.
                                                                                            265
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés



             Le contrôle s’étend à la technique législative et à la clarté des textes juridiques. Il s’agit
        d’une sorte de contrôle de qualité. Aucun projet ne peut être soumis à la chancellerie
        pour son approbation par le gouvernement sans avoir franchi ces étapes avec succès38.
             En outre, le ministère fédéral de la justice publie un guide de rédaction des textes
        juridiques et les divers ministères doivent se conformer aux directives énoncées dans
        ce guide39.
             Le ministère fédéral de la justice est organisé en six sections, parmi lesquelles
        quatre se partagent la fonction de contrôle juridique:
             • droit civil,
             • droit pénal,
             • droit commercial et de l’économie,
             • droit constitutionnel et administratif, droit européen et international.
             Cette organisation se retrouve au niveau des Länder, lesquels ont leur propre
        ministère de la justice.


        V.           L’institut spécialisé rattaché au gouvernement et chargé
                     de lui apporter l’expertise juridique dont il a besoin
             CE dernier type d’organisation de la fonction consultative juridique centrale est
        le plus nouveau et le moins connu.
             Il s’agit de l’établissement d’un institut d’études destiné à répondre aux besoins
        du gouvernement en matière d’expertise juridique, et dont l’organisation est proche
        de celles d’instituts de recherche de type académique. On peut en identifier deux cas :
        l’Institut de Législation et de Droit comparé près le Gouvernement de la Fédération
        de Russie (IZAK), et l’Institut de Recherche sur la Législation du Gouvernement
        de la République de Corée (KLRI). Le gouvernement de la Roumanie prépare
        la création d’un institut de ce type à partir d’une institution existante. C’est une
        solution qui paraît répondre à la préoccupation d’organiser une capacité permanente
        d’expertise juridique à la disposition du gouvernement mais dotée d’une certaine
        autonomie, en se fondant sur le modèle des instituts de recherche, dans des pays qui
        n’ont pas de conseil d’Etat.


        a)           L’Institut de Législation et de Droit comparé près le
                     Gouvernement de la Fédération de Russie (IZAK)
            Cet institut fait suite à une ancienne institution de l’époque soviétique, apparue
        en 1925. Aujourd’hui, selon les statuts adoptés par le gouvernement fédéral (arrêté
        du 29 décembre 2006, n°836, remplaçant les statuts adoptés par l’arrêté du 29 mars


        38
             Kai Andreas Otto. The role of ministries in policy development and evaluation. Germany. SIGMA, OCDE Paris,
             p. 10.
        39
             Ibid. p.8.
266
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



1994 n° 255, mod. 2 juillet 2003 n° 393 et 7 décembre 2004 n° 745), il s’agit d’un
établissement public scientifique, doté de la personnalité morale et directement
rattaché au gouvernement fédéral, qui en fixe l’organisation et en nomme le
directeur. Il dispose des ressources budgétaires qui lui sont allouées et de ressources
propres tirées de son activité commerciale. Il a une double vocation: académique et
d’expertise, pour toutes les branches du droit et l’organisation administrative. Son
activité a connu un développement important depuis 2000.
     Ses missions sont ainsi définies:
     réaliser des recherches dans le domaine juridique pour le Gouvernement fédéral,
le Président de la Fédération de Russie et l’Assemblée fédérale (Douma d’Etat et
Conseil de la Fédération) ;
• élaborer des rapports scientifiques sur l’évolution de la législation;
• réaliser des études scientifiques préparatoires aux projets de loi du
     gouvernement;
• analyser l’application de la législation;
• réaliser des études comparatives de la législation des sujets de la Fédération, des
     Etats membres de la Confédération des Etats Indépendants et des autres Etats.
     Pour remplir ses missions, l’Institut participe à la préparation du programme
législatif du Gouvernement en liaison avec le ministère de la Justice. En outre, il
expertise tous les projets de loi fédérale et les règlements les plus importants des
organes du pouvoir exécutif. Selon l’arrêté du Gouvernement fédéral du 2 août
2001 (n° 576, mod. 20 août 2004 n° 424), la conception de tous les projets de loi
ou ensembles de mesures techniques doit être transmise pour expertise juridique au
ministère de la Justice et à l’Institut après que les administrations responsables se
soient mises d’accord sur le projet (paragraphe 13)40.
     Du point de vue de la procédure, un arrêté du Gouvernement fédéral du 15
avril 2000 n°347 avait fixé le rôle du ministère de la Justice dans l’organisation
du travail législatif du Gouvernement fédéral; dans ce cadre, l’Institut devait être
associé d’une part aux directives méthodologiques que le ministère devait adresser
aux autres organes du pouvoir exécutif, et d’autre part à l’expertise juridique des
projets de loi devant être soumis au Gouvernement fédéral41. Selon cet arrêté, c’est
le ministère de la Justice qui transmet au Gouvernement le projet de loi au terme
des discussions entre les différents départements concernés et en tenant compte des
expertises produites par l’Institut42. Le règlement actuel du conseil des ministres
de la Fédération de Russie (27 mai 2006, n° 322) confirme cette règle (paragraphe
60): le ministre de la Justice présente pour chaque projet de loi, projet d’ordonnance
du Président de la Fédération de Russie ou projet d’arrêté du Gouvernement de la
Fédération de Russie des conclusions qui formulent une évaluation juridique du
projet, du point de vue de sa conformité aux normes supérieures, de l’absence de
contradiction avec d’autres normes ou de lacunes juridiques.
40
     Talia Ya. Khabrieva (ed.). Pravitel’stvo Rossijskoj Federacii (Le gouvernement de la Fédération de Russie).
     Moscou, Norma, 2005, pp. 467-471.
41
     Igor I. Chouvalov. Pravitel’stvo Rossijkij Federacii v zakonotvortcheskom processe (Le gouvernement de la
     Fédération de Russie dans le processus législatif ). Moscou, Norma, 2004, pp. 124-127.
42
     Ibid. p. 127.
                                                                                                                   267
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés




               Toutefois, la fonction d’expertise juridique est en réalité passée, pour l’essentiel
        à l’Institut. Ses membres participent régulièrement aux groupes de travail et
        commission chargés de la préparation des textes, aux conseils consultatifs mis en place
        par différentes institutions fédérales. Mais surtout, son directeur est régulièrement
        invité aux réunions du Gouvernement fédéral, sur la base des dispositions du
        règlement du Gouvernement fédéral permettant que participent à ses réunions,
        et présentent éventuellement un rapport, des dirigeants d’autres organismes
        en rapport direct avec une question à l’ordre du jour (paragraphe 31 et 36); des
        demandes d’avis lui sont parfois directement adressées. Selon les données publiées
        par l’Institut, celui-ci a reçu en 2004 plus de 2.000 commandes et demandes d’avis,
        en 2005 plus de 2.200 et en 2006 plus de 2.700. En 2006, l’Institut a examiné plus
        de 800 projets de loi et rendu plus de 200 analyses à la demande du Gouvernement
        fédéral, de l’Administration du Président de la Fédération de Russie, du Conseil de
        la Fédération, de la Douma d’Etat, ou même de la Cour constitutionnelle fédérale,
        de la Cour suprême et du Tribunal suprême d’arbitrage43.
              En tant qu’institut de recherche, l’Institut de Législation et de Droit comparé
        près le Gouvernement de la Fédération de Russie publie des livres (une trentaine
        par an), plusieurs revues ( Journal Rossijskogo Prava - Revue de Droit russe, Journal
        zarubejnogo zakonodatel’stva i sravnitel’nogo pravovedenia - Revue de Législation
        étrangère et de Droit comparé) et organise des colloques, parfois à la demande de
        tel ou tel ministère sur un sujet spécialisé. Cette activité n’est pas moins importante
        et l’Institut souligne que cette activité concerne aussi bien la réflexion fondamentale
        (cf article 8 des statuts) que les recherches appliquées, la publication d’ouvrages
        théoriques aussi bien que de manuels d’enseignement et de commentaires des grands
        codes du droit russe. L’Institut recrute chaque année des doctorants qui réaliseront
        leur thèse au sein de l’Institut44.
              En 2007, l’Institut comptait 250 employés, dont 150 ayant au moins le grade de
        docteur ou de candidat en droit45. Il est organisé en 22 sections, dont 16 remplissent
        des fonctions de recherche et d’expertise couvrant tous les domaines du droit, et
        6 des fonctions de soutien. Le directeur est assisté d’un premier adjoint, de trois
        adjoints, d’un secrétaire scientifique et d’un conseil scientifique de 23 membres.


        b)           L’Institut de Recherche sur la Législation de la République de Corée

            L’Institut de Recherche sur la Législation de Corée est un organisme de réflexion
        financé par le gouvernement et créé en 1990 ; il est doté de la personnalité morale et
        son statut est celui d’une institution de recherche. Sa mission initiale était double:
        d’une part réaliser un inventaire systématique de la législation et des règlements


        43
             L’Institut de Législation et de Droit comparé auprès du Gouvernement fédéral russe, Moscou. 2007, p. 9.
        44
             Ibid. p. 21.
        45
             Ibid. p. 25.
268
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                        Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



d’application et exploiter l’information qui s’y rapporte, et d’autre part mener des
études et des recherches de niveau professionnel en matière de législation dans le
but d’appuyer la politique législative nationale et d’assurer une information rapide et
précise sur les nouveaux textes publiés. L’Institut a ainsi pour mission de contribuer
plus généralement à l’élévation du niveau de la culture juridique.
     L’Institut coréen de Recherche sur la Législation a déjà entrepris plusieurs
projets de recherche sur les progrès de l’Etat de droit et sur le développement de la
culture juridique. Il a aussi publié le recueil des lois de la République de Corée, ainsi
que la traduction en anglais des lois coréennes les plus importantes, une histoire de
la législation et il a mis en place une base de données sur la législation.
     Mais la mission de l’Institut fait une place de plus en plus importante à l’expertise
juridique au service du gouvernement. L’Institut participe à la préparation des
réformes de la gestion publique, sous leur aspect juridique. Il répond aux demandes
d’expertise des différents ministères et organismes gouvernementaux en matière de
législation et de réglementation. Il s’adresse également aux professions juridiques.


Conclusions
     Il est évident à l’issue de cet examen que la fonction consultative d’expertise
juridique correspond à un besoin des Etats modernes.
     Il apparaît également que l’histoire des institutions administratives de chaque
pays est un facteur explicatif essentiel des divers modèles qui ont pu être identifiés.
     Mais la distinction fondamentale est celle qui en ressort entre les pays qui visent
à établir une fonction consultative indépendante et les autres. L’indépendance de
la fonction consultative est une garantie pour le gouvernement, qui bénéficie d’avis
objectifs, et pour la crédibilité de l’instance consultative. L’indépendance de la
fonction consultative résout également le problème de la responsabilité politique :
dès lors que ce n’est pas un membre du gouvernement qui assume cette fonction, elle
ne peut plus être soumise à la pression pour répondre à des questions parlementaires
sur les avis adressés au gouvernement, et on ne peut suspecter que l’avis ait été préparé
pour appuyer la position que le gouvernement avait décidé d’adopter.
     Au regard de ces préoccupations, le modèle du conseil d’Etat liant la fonction
contentieuse juridictionnelle et la fonction consultative continue d’être une réponse
valable, car l’indépendance acquise pour la fonction juridictionnelle bénéficie en
même temps à l’exercice de la fonction consultative.




                                                                                             269
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés




                               La función
                       consultiva jurídica central
                            Aproximación
                        de derecho comparado1
                            Gérard Marcou
               P   U  P  P – S



        A diferencia de la jurisdicción administrativa, la función consultiva ha dado lugar a
        muy pocos estudios de derecho comparado; si acaso algunos desarrollos en trabajos
        de organizaciones internacionales referentes a la organización gubernamental o al
        mejoramiento de la calidad de la legislación. Su importancia, sin embargo, no cesa
        de crecer, con las necesidades de especialización que hoy acompañan a todas las
        políticas públicas.
            No obstante, la función consultiva ha dado lugar en Francia a un cierto número

        la concepción napoleónica de la administración que durante un buen tiempo ha
        marcado a Francia, según la cual, si deliberar es el hecho de varios, actuar es el hecho
        de uno solo, lo cual se encuentra en el origen de la doble función contenciosa y
        consultiva del Consejo de Estado moderno.
             Maurice Hauriou es, tal vez, el primero en haber utilizado la expresión
        “administración consultiva”, para oponerla a la ”administración activa” y designar los
        numerosos consejos y comisiones que rodean al gobierno2. Yves Weber ha tratado de

        “la administración consultiva puede entenderse como la expresión jurídica de
        opiniones emitidas individual o colegiadamente a una autoridad administrativa, la
        cual es la única habilitada para dictar el acto de decisión a propósito del cual se
        realiza la consulta”; esto supone una institución cuya misión es la de ser consultada, la
        autoridad consultante puede ser el gobierno3. Según este autor, la consulta responde

        intereses; la garantía de los derechos individuales4. La segunda, la más reciente, que
        se ha desarrollado con la administración económica y social, le cambia en realidad la

        1
            Traducción: Jorge Murgueitio Cabrera, Magistrado Auxiliar, Sala de Consulta y Servicio Civil
        2
            Précis de droit administratif. Paris, Sirey, 9ème éd., 1927.
        3
            Y. Weber. L’administration consultative. Paris, LGDJ, 1968, Bibl. de Droit Public No. 82, pp. 1 y 2.
        4
            Ibid. principalmente pp. 16-43.
270
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                               Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



naturaleza: con la representación de intereses, la función consultiva tiene de absorber
el poder reconocido a la autoridad consultante5. Pero en lo que concierne a la primera,
Y. Weber distingue entre la función consultiva jurídica, ejercida esencialmente
por el Consejo de Estado, y la función consultiva asociada a los diferentes asuntos
“técnicos” de la acción administrativa6. La importancia de esta distinción había sido
subrayada antes que él por Gilbert Dauphin, quien distinguía sencillamente, en el
seno de la administración consultiva, entre el Consejo de Estado y “el resto”7. Pero
este autor hacía una observación de mayor alcance haciendo notar que el Consejo de
Estado había asegurado la perennidad de su preeminencia evitando la penetración
en su seno de “técnicos” cuyo concurso se hacía cada vez más necesario en los poderes
públicos, y restringiéndose a las más altas esferas de la vida jurídica8.
     Esta función consultiva jurídica debe en efecto ser distinguida claramente de las
innumerables instancias consultivas instituidas tanto en el ámbito del gobierno central
como local. Hoy más que nunca se consolida la existencia de una función consultiva
jurídica central en el Estado. Ella se opone por la generalidad de su vocación, que se
aplica al momento jurídico de expresión de todas las políticas públicas, a los diversos
órganos de consulta técnica cuya naturaleza de peritaje limita su intervención a sectores
de actividad más o menos estrechamente definidos. Ella se impone por la complejidad
creciente del derecho y de las relaciones entre los órdenes jurídicos.
     Esta distinción no disminuye por la importancia que conviene reconocer
igualmente a los diferentes procedimientos e instancias consultivas que
conllevan dictámenes técnicos o permiten tener en cuenta las expectativas o los
comportamientos anticipados de los destinatarios de las normas. Al contrario,
ha sido destacada en numerosos trabajos sobre el mejoramiento de la calidad
reglamentaria o la “reforma de la reglamentación” (regulatory reform), que
estudia la simplificación, la medida del impacto, económico principalmente, de la
reglamentación en todas sus formas9.
     Las dos funciones no son concurrentes ni contradictorias. La cuestión de la
calidad reglamentaria así comprendida se plantea solamente si la seguridad jurídica
está garantizada, y la función consultiva jurídica central debe tener en cuenta los
objetivos de calidad reglamentaria. Pero la función consultiva jurídica central tiene
un sentido específico: implica la organización por parte del Estado de una capacidad
de dictamen jurídico independiente para asistir al gobierno (y más ampliamente al
poder ejecutivo) en su misión de elaboración de proyectos de ley y de reglamentos,
preservando la autonomía de la capacidad de decisión política, lo que significa que
no debe depender de ningún organismo o grupo exterior.


5
    Ibid. pp. 305-306.
6
    Ibid. pp. 16 y 19.
7
    G. Dauphin. L’administration consultative centrale. Paris, Marcel Rivière, 1932, p. 7.
8
    Ibid. p. 70.
9
     Ver para Francia: D. Mandelkern. Rapport du Groupe de travail interministériel sur la qualité de la
    réglementation. Paris. La Documentation Francaise, Ministère de la Fonction Publique, 2002, 139 páginas. En
    el plan internacional, ver: The 0ECD Report on Regulatory Reform, 1997, al cual ha seguido un programa
    continuo de intercambios y la publicación de informes por países.
                                                                                                                  271
Misión de Cooperación Técnica en Colombia
      del Consejo de Estado Francés



             Definida así, la función consultiva jurídica central existe bajo las formas más
        diversas sin duda en la mayoría de países, pero las instituciones que se pueden
        identificar que asumen esta función no responden todas a todos los elementos de la
        definición, y tanto la amplitud como la calidad de la función son extremadamente
        variables. Los consejos de Estado, que reúnen las funciones consultiva y contenciosa,
        son ciertamente la forma más típica de ejercicio de la función consultiva jurídica
        central. Pero se puede observar que esta puede atribuirse a instituciones muy
        diversas, según la historia administrativa de cada país.
             Se puede así distinguir cinco categorías:
        1. La función consultiva asociada a la función contenciosa en el Consejo de
             Estado;
        2. La función consultiva atribuida a un órgano colegiado situado cerca del
             gobierno;
        3. La función consultiva asociada al poder de acción en justicia del poder
             ejecutivo;
        4. La función consultiva integrada a la organización ministerial;
        5. El instituto especializado vinculado al gobierno y encargado de aportarle el
             dictamen jurídico que necesita.
             Salvo en la segunda categoría, se verá que la función consultiva jurídica central
        nunca ha sido la única función de las instituciones que la ejercen, y estas han dejado
        de tener la exclusividad de la función de consejo jurídico del gobierno, el cual puede
        siempre acudir a los consejos de su elección.


        I.       La función consultiva asociada a la función contenciosa
                 en el Consejo de Estado
             Este tipo de institución tiene su origen en el antiguo consejo del rey que existió
        en diversos países europeos, y que encontró su forma clásica con el Consejo de Estado
        napoleónico. El sistema llamado de la “justicia retenida” fue durante mucho tiempo una
        característica distintiva de su función contenciosa. Esta última ha desaparecido hoy de los
        países que tienen un Consejo de Estado, el último país en abandonarla ha sido Holanda.
             Hoy, el Consejo de Estado es un tipo de institución al cual la ley le garantiza
        la independencia y la de sus miembros ante el poder ejecutivo, y cumple a la vez las
        funciones consultivas para el gobierno, y la función de jurisdicción administrativa
        suprema. Es este estatuto de independencia el que ha permitido, en los Estados
        modernos, mantener en el seno de la misma institución la función consultiva y la
        función de juzgar a la administración. Los miembros del Consejo de Estado no
        siempre son magistrados, pero la independencia que les confiere su estatuto los
        aproxima a tal calidad.
             Los países europeos que tienen un Consejo de Estado en el sentido que se acaba
        de definir son hoy en día, además de Francia: Bélgica, Grecia, Italia, Holanda. Pero se
        encuentra también este tipo de institución en Turquía y Líbano, en Egipto y, desde
        1998, en Argelia. Ciertos países de África tienen también un Consejo de Estado:
272
Memorias • Seminario Franco-Colombiano
                                Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa



Burkina Fasso, Gabón, Senegal, la República Centroafricana. Esta vía ha sido seguida
igualmente por Tailandia desde 1979, antes de ser abandonada en 1999 con la creación
de una corte administrativa suprema. En América Latina, Colombia es el único país
que ha adoptado un Consejo de Estado en el sentido que se ha definido10.
     En todos estos países, son la jurisdiccionalización de la función contenciosa y la
independencia adquirida frente al poder ejecutivo las que han asegurado a la vez la
perennidad y la ejemplaridad del Consejo de Estado.
     La cuestión de la compatibilidad de la reunión en el seno de la misma institución
de la función contenciosa y de la función de consejo del poder ejecutivo con el derecho
de cualquier persona a que su causa sea atendida por un tribunal independiente e
imparcial, garantizado por el artículo 6º de la Convención Europea de Salvaguardia
de los Derechos del Hombre y las Libertades Fundamentales, ha sido sometida en
varias ocasiones a la Corte Europea de Derechos del Hombre. En el fallo Procola
del 28 de septiembre de 1995 a propósito del Consejo de Estado luxemburgués11, la
Corte declaró en relación con una sentencia de este que en ella no se había respetado
el mencionado derecho, por cuanto algunos miembros de la sección de juzgamiento
habían hecho parte de la sección consultiva que había emitido un concepto para el
gobierno sobre los decretos reglamentarios que habían sido recurridos.
     Sin embargo, en dos sentencias posteriores, la Corte Europea de Derechos del
Hombre ha precisado que esta jurisprudencia no cuestionaba el modelo institucional
del Consejo de Estado como tal y las condiciones en las cuales su compatibilidad con
el artículo 6º de la Convención podía estar asegurada. La sentencia Kleyn de 2003 se
refirió al Consejo de Estado de Holanda12 y la sentencia Sacilor –Lormines de 2006
al Consejo de Estado francés13. Con base en estas dos sentencias, la jurisprudencia de
la Corte europea de Derechos del Hombre puede resumirse de la siguiente manera.
     La Corte admite la compatibilidad del modelo institucional del Consejo
de Estado con el artículo 6º de la Convención, pero bajo ciertas condiciones: 1.
que la independencia institucional de los miembros del Consejo de Estado esté
asegurada, lo que reconoce explícitamente como establecido en el caso del Consejo
de Estado francés; 2. que el ejercicio sucesivo de una función consultiva y de una
función jurisdiccional no conlleve en la primera una implicación de naturaleza a
atentar contra la imparcialidad del interesado en la formación del juicio; 3. que la
consulta y el juicio no se refieran al “mismo asunto” o a “cuestiones análogas”; 4. que
el concepto haya tratado la cuestión de manera “general y abstracta”, si existe una
relación entre las cuestiones jurídicas14.
10
     G. Marcou. “Une cour administrative suprême: particularité francaise ou modèle en expansion?”. Pouvoirs No.
     123, 2007, pp. 133-154.
11
     CEDH 28 sept. 1995. “Procola c/ Luxembourg”, série A, No. 326, RFDA 1996, no. 4, p. 795, comm. J.-L.
     Autin / F. Sudre. “La dualité fonctionnelle du Conseil d’Etat en question devant la Cour européenne des droits
     de l’homme”, p. 777.
12
     CEDH G de Ch. 6 mai 2003. “Kleyn c/Pays-Bas”, RTDH 2004, p. 365, note González.
13
     CEDH 9 novembre 2006. “Soc. Sacilor-Lormines c/France”, RFDA 2007, no. 2, p. 352, comm. J.-L. Autin / F.
     Sudre. “L’impartialité structurelle du Conseil d’Etat hors de cause?”, p. 342.
14
     Cf G. Marcou, op. cit. Pero para un comentarista holandés, B. W. N. de Waard, aun en ese caso, el concepto puede
     tener un carácter prejudicial: nota bajo la sentencia Sacilor-Lormines Administratiefrechtelijke Beslissingen.
     2007, A. . 34, 22 septembre, pp. 1484-1487.
                                                                                                                        273
Función consultiva jurídica central
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Función consultiva jurídica central

  • 2. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa La fonction consultative juridique centrale. Approche de droit comparé Gérard Marcou Professeur À l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne A la différence de la juridiction administrative, la fonction consultative a donné lieu a très peu d’études en droit comparé, tout au plus quelques développements dans des travaux d’organisations internationales portant sur l’organisation gouvernementale ou l’amélioration de la qualité de la législation. Son importance ne cesse cependant de croître, avec les besoins en expertise qui accompagnent aujourd’hui toutes les politiques publiques. La fonction consultative a cependant donné lieu en France à un certain nombre de réflexions doctrinales, et sans doute ne faut-il pas s’en étonner, si l’on veut bien se rappeler la conception napoléonienne de l’administration qui a durablement marqué la France, selon laquelle, si délibérer est le fait de plusieurs, agir est le fait d’un seul, et qui est à l’origine de la double fonction contentieuse et consultative du Conseil d’Etat moderne. Maurice Hauriou est, semble-t-il, le premier à avoir introduit l’expression «administration consultative», pour l’opposer à l’«administration active» et désigner les nombreux conseils ou commissions entourant le gouvernement1. Yves Weber a tenté d’en faire la théorie au moment où elle était en train de changer. Selon la définition qu’il en donne, «l’administration consultative peut s’entendre comme l’expression juridique d’opinions émises individuellement ou collégialement à l’égard d’une autorité administrative, seule habilitée à prendre l’acte de décision à propos duquel intervient la consultation»; cela suppose une institution dont la mission est d’être consultée, l’autorité consultante peut être le gouvernement2. Selon l’auteur, la consultation répond à trois exigences: l’efficacité, en éclairant l’administration; la représentation des intérêts; la garantie des droits individuels3. La seconde, la plus récente, qui s’est développée avec l’administration économique et sociale, en change en fait la nature: avec la représentation des intérêts, la fonction consultative tend à absorber le pouvoir reconnu à l’autorité consultante4. Mais en ce qui concerne 1 Précis de droit administratif. Paris, Sirey, 9ème éd., 1927. 2 Y. Weber. L’administration consultative. Paris, LGDJ, 1968, Bibl. de Droit Public n° 82, pp.1 et 2. 3 Ibid. notamment pp.16-43. 4 Ibid. pp. 305-306. 247
  • 3. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés la première, Y. Weber distingue nettement la fonction consultative juridique, essentiellement exercée par le Conseil d’Etat, et la fonction consultative associée aux différents domaines «techniques» de l’action administrative5. L’importance de cette distinction avait été soulignée avant lui par Gilbert Dauphin, qui distinguait simplement, au sein de l’administration consultative centrale, entre le Conseil d’Etat et «le reste»6. Mais cet auteur livrait une observation de plus grande portée en remarquant que le Conseil d’Etat avait assuré la pérennité de sa prééminence en évitant la pénétration en son sein des «techniciens» dont le concours était sans cesse plus indispensable aux pouvoirs publics, et en se restreignant aux plus hautes sphères de la vie juridique7. Cette fonction consultative juridique doit en effet être nettement distinguée des innombrables instances consultatives instituées au niveau du gouvernement central comme au niveau local. Plus que jamais, on voit s’affirmer l’existence d’une fonction consultative juridique centrale au sein de l’Etat. Elle s’oppose par la généralité de sa vocation, qui s’applique au moment juridique de l’expression de toutes les politiques publiques, aux divers organes de consultation technique dont la nature de l’expertise limite l’intervention à des secteurs d’activité plus ou moins étroitement définis. Elle s’impose par la complexité croissante du droit et des rapports entre les ordres juridiques. Cette distinction ne diminue par l’importance qu’il convient également de reconnaître aux différentes procédures et instances consultatives qui mobilisent des expertises techniques ou permettent de prendre en compte les attentes ou les comportements anticipés des destinataires des normes. Au contraire, elle a été consacrée par de nombreux travaux sur l’amélioration de la qualité réglementaire ou la «réforme de la réglementation» (regulatory reform), dont l’attention sur porte sur la simplification, la mesure de l’impact, économique notamment, de la réglementation sous toutes ses formes8. Les deux fonctions ne sont pas concurrentes ni contradictoires. La question de la qualité réglementaire ainsi comprise ne se pose que si la sécurité juridique est garantie, et la fonction consultative juridique centrale doit prendre en compte les objectifs de qualité réglementaire. Mais la fonction consultative juridique centrale a un sens spécifique : elle désigne l’organisation par l’Etat d’une capacité d’expertise juridique indépendante pour assister le gouvernement (et plous généralement le pouvoir exécutif ) dans sa mission d’élaboration de projets de loi et de règlements, tout en préservant l’autonomie de la capacité de décision du politique, ce qui signifie qu’elle ne doit dépendre d’aucun corps ou groupe extérieur. Ainsi définie, la fonction consultative juridique centrale existe sous les formes les plus diverses sans doute dans la plupart des pays, mais les institutions que l’on peut 5 Ibid. pp.16 et 19. 6 G. Dauphin. L’administration consultative centrale. Paris, Marcel Rivière, 1932, p. 7. 7 Ibid. p.70. 8 Voir pour la France: D. Mandelkern. Rapport du Groupe de travail interministériel sur la qualité de la réglementation, Paris. La Documentation Française, Ministère de la Fonction Publique, 2002, 139 pages. Sur le plan international, voir: The OECD Report on Regulatory Reform, 1997, qui a été suivi par un programme continu d’échanges et la publication de rapports par pays. 248
  • 4. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa identifier comme assumant cette fonction ne répondent pas toutes à tous les éléments de cette définition, et l’ampleur comme la qualité de cette fonction sont extrêmement variables. Les conseils d’Etat, qui réunissent la fonction consultative et la fonction contentieuse, sont certainement la forme la plus typique d’exercice de la fonction consultative juridique centrale. Mais on peut observer que celle-ci peut être confiée à des institutions fort diverses, selon l’histoire administrative de chaque pays. On peut ainsi en distinguer cinq catégories: 1. La fonction consultative associée à la fonction contentieuse au sein du conseil d’Etat; 2. La fonction consultative attribuée à un organe collégial placé auprès du gouvernement; 3. La fonction consultative associée au pouvoir d’action en justice du pouvoir exécutif; 4. La fonction consultative intégrée à l’organisation ministérielle; 5. L’institut spécialisé rattaché au gouvernement et chargé de lui apporter l’expertise juridique dont il a besoin. Sauf dans la deuxième catégorie, on verra que la fonction consultative juridique centrale n’est jamais l’unique fonction des institutions qui l’exercent, et celles-ci n’ont pas davantage l’exclusivité de la fonction de conseil juridique du gouvernement, lequel peut toujours faire appel aux conseils de son choix. I. La fonction consultative associée à la fonction contentieuse au sein du Conseil d’Etat Ce type d’institution tire son origine de l’ancien conseil du roi qui a existé dans divers pays européens, et qui a trouvé sa forme classique avec le Conseil d’Etat napoléonien. Le système dit de la «justice retenue» fut durablement une caractéristique distinctive de sa fonction contentieuse. Cette dernière a aujourd’hui disparu des pays qui ont un conseil d’Etat, le dernier pays l’ayant abandonnée étant les Pays-Bas. Aujourd’hui, le conseil d’Etat est un type d’institution dont la loi garantit l’indépendance et celle de ses membres vis-à-vis du pouvoir exécutif, et qui remplit à la fois des fonctions consultatives pour le gouvernement, et la fonction de juridiction administrative suprême. C’est ce statut d’indépendance qui a permis, dans les Etats modernes, de maintenir au sein de la même institution la fonction consultative et la fonction de juger l’administration. Les membres du conseil d’Etat ne sont pas toujours des magistrats, mais l’indépendance que leur confère leur statut les en rapproche. Les pays européens qui ont un conseil d’Etat au sens que l’on vient de définir sont aujourd’hui, outre la France: la Belgique, la Grèce, l’Italie, les Pays-Bas. Mais on rencontre aussi ce type d’institution en Turquie et au Liban, en Egypte et, depuis 1998, en Algérie. Certains pays d’Afrique ont également un conseil d’Etat: le Burkina Faso, le Gabon, le Sénégal, la République Centrafricaine. Cette voie a également été 249
  • 5. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés suivie par la Thaïlande à partir de 1979, avant d’être abandonnée en 1999 avec la création d’une cour administrative suprême. En Amérique Latine, la Colombie est le seul pays qui ait adopté un Conseil d’Etat au sens que l’on a défini9. Dans tous ces pays, ce sont la juridictionnalisation de la fonction contentieuse et l’indépendance acquise envers le pouvoir exécutif qui ont assuré à la fois la pérennité et l’exemplarité du conseil d’Etat. La question de la compatibilité de la réunion au sein de la même institution de la fonction contentieuse et de la fonction de conseil du pouvoir exécutif avec le droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial garanti par l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales a été soumise à plusieurs reprises à la Cour européenne des Droits de l’Homme. Dans l’arrêt Procola du 28 septembre 1995 à propos du Conseil d’Etat luxembourgeois10, la Cour a jugé à propos d’un arrêt du Conseil d’Etat du Luxembourg que celui-ci n’avait pas respecté ce droit, dès lors que certains membres de la section de jugement avait fait partie de la section consultative qui avait émis un avis pour le gouvernement sur les arrêtés réglementaires qui avaient fait l’objet du recours. Dans deux arrêts ultérieurs, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a cependant précisé que cette jurisprudence ne mettait pas en cause le modèle institutionnel du conseil d’Etat en tant que tel et les conditions auxquelles sa compatibilité avec l’article 6 de la Convention pouvait être assurée. L’arrêt Kleyn de 2003 mettait en cause le Conseil d’Etat des Pays-Bas11 et l’arrêt Sacilor-Lormines de 2006 le Conseil d’Etat français12. Sur la base de ces deux arrêts, la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme peut être résumée de la façon suivante. La Cour admet ainsi la compatibilité du modèle institutionnel du Conseil d’Etat avec l’article 6 de la Convention, mais sous certaines conditions: 1. que l’indépendance institutionnelle des membres du conseil d’Etat soit assurée, ce qu’elle reconnaît explicitement comme établi dans le cas du Conseil d’Etat français ; 2. que l’exercice successif d’une fonction consultative et d’une fonction juridictionnelle ne comporte pas dans la première une implication de nature à porter atteinte à l’impartialité de l’intéressé dans la formation de jugement; 3. que la consultation et le jugement ne portent pas sur la «même affaire» ou «des questions analogues»; 4) que l’avis ait abordé la question de façon «générale et abstraite» s’il existe un lien entre les questions juridiques13. 9 G. Marcou. «Une cour administrative suprême: particularité française ou modèle en expansion?», Pouvoirs n°123, 2007, pp. 133-154. 10 CEDH 28 sept. 1995 «Procola c/ Luxembourg», série A, n° 326, RFDA 1996, n° 4, p. 795, comm. J.-L. Autin / F. Sudre, «La dualité fonctionnelle du Conseil d’Etat en question devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme», p. 777. 11 CEDH Gde Ch. 6 mai 2003 «Kleyn c/Pays-Bas», RTDH 2004, p. 365, note González. 12 CEDH 9 novembre 2006 «Soc. Sacilor-Lormines c/ France», RFDA 2007, n° 2, p. 352, comm. J.-L. Autin / F. Sudre. «L’impartialité structurelle du Conseil d’Etat hors de cause?», p. 342. 13 Cf. G. Marcou, op. cit. Mais pour un commentateur néerlandais, B.W.N. de Waard, même dans ce cas, l’avis peut présenter un caractère préjudiciel: note sous l’arrêt Sacilor-Lormines. Administratiefrechtelijke Beslissingen, 2007, Afl.34, 22 septembre, pp. 1484-1487. 250
  • 6. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa L’arrêt Procola a conduit à une réforme fondamentale du Conseil d’Etat du Luxembourg. La constitution du 17 octobre 1868 a été révisée (12 juillet 1996). Une Cour administrative a été instituée par le nouvel article 95bis dans le chapitre VI («De la Justice»); l’ensemble du contentieux administratif jusqu’alors de la compétence du Conseil d’Etat lui a été transféré. Ce dernier est maintenu mais avec ses seules attributions consultatives (art.83bis). La loi du 7 novembre 1996 a réorganisé la justice administrative sur cette base. En Belgique, en France et aux Pays-Bas, des réformes de l’organisation interne du Conseil d’Etat ont été adoptées dans le but de prévenir tout risque de mise en cause de l’institution sur la base de l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales. Le Conseil d’Etat de Belgique est régi par une sorte de code connu sous le nom de «lois sur le Conseil d’Etat coordonnées le 12 janvier 1973». Il se compose d’une section de législation et d’une section du contentieux administratif, ainsi nommée depuis la loi du 15 septembre 2006. C’est la section de législation qui exerce la fonction consultative, pour le gouvernement fédéral comme pour les gouvernements des communautés et des régions qui composent la Belgique. La loi du 15 mai 1999 a prévu que les auditeurs affectés par priorité à la section de Législation (lois coordonnées: art. 76) ne peuvent connaître des recours dirigés contre les actes sur lesquels ils ont été amenés à donner un avis dans la section de Législation (art. 29); enfin, il existe une procédure de récusation des membres de la section d’Administration (art. 29).En outre, la section du contentieux administratif se compose des présidents et des conseillers d’Etat qui ne font pas partie de la section de législation (art. 89). En France, le décret du 6 mars 2008 a modifié assez profondément l’organisation interne du Conseil d’Etat. Outre la création d’une section administrative (consultative) supplémentaire, la section de l’Administration, qui sera chargée des questions de fonction publique, de contrats, de propriétés publiques et des relations avec les usagers, le décret introduit deux règles nouvelles importantes au regard de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (code de justice administrative: art. R.122-21 et 122-21-1 et 2). D’une part, le président de la section administrative qui a eu à délibérer d’un avis relatif à un acte faisant l’objet d’un recours venant en assemblée du contentieux ne peut plus y siéger et sera suppléé par un président adjoint d’une autre section. D’autre part, les membres du Conseil d’Etat ayant participé à la délibération de cet avis ne peuvent plus participer à une formation contentieuse, quelle qu’elle soit, devant statuer sur un recours contre cet acte, et la liste en est communiquée au requérant qui en fait la demande14. Aux Pays-Bas, les arrêts Kleyn et Sacilor-Lormines ont mis fin aux débats sur une réforme fondamentale et le projet de loi (n° 30 385)15, déposé en septembre 2006, toujours au stade de la discussion parlementaire, prévoit une réforme de 14 F. Moderne et P. Delvolvé, «La réforme du Conseil d’Etat». RFDA 2008, n° 2, p. 213, suivi d’un entretien avec Bernard Stirn, président de la section du contentieux, et des nouvelles dispositions du code de justice administrative. 15 Kamerstukken II 2005/2006. 30 585, n° 1-4, 27 septembre 2006. 251
  • 7. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés l’organisation interne du Conseil d’Etat pour assurer le respect de l’article 6. Alors que, selon l’organisation actuelle, les avis sont adoptés par l’assemblée plénière sur rapport des sections administratives, le Conseil d’Etat serait organisé à l’avenir en deux sections distinctes: la section consultative et la section juridictionnelle. Le principe est maintenu que certains membres du Conseil d’Etat participent aux deux sections, mais leur nombre serait plus limité, et surtout un membre du Conseil ne pourrait statuer au contentieux dans une «affaire» à laquelle se rapporterait un avis auquel il aurait participé dans la section consultative. En Italie, l’organisation du Conseil d’Etat évite depuis longtemps la participation à la fonction juridictionnelle de membres des sections administratives. Beaucoup de pays qui ont introduit un conseil d’Etat ont rattaché celui-ci au pouvoir judiciaire, et attribuent à ses membres le statut de magistrats ; ils sont alors recrutés de la même manière que les juges ordinaires (Grèce, Turquie, Egypte, Liban). II. La fonction consultative attribuée à un organe collégial placé auprès du gouvernement Cette conception connaît deux variantes assez différentes par leur origine, mais qui ne sont pas sans points communs, du point de vue fonctionnel. La première correspond aux conseils d’Etat maintenus ayant perdu leur fonction contentieuse initiale; la seconde à l’introduction d’une organe spécialisé de conseil juridique au gouvernement, essentiellement en matière de législation, introduit dans des pays connaissant un système de dualité de juridiction avec une cour administrative suprême n’exerçant aucune fonction consultative. A) Le Conseil d’Etat comme organe seulement consultatif du gouvernement Il existe trois cas: l’Espagne, depuis la loi Maura de 1904, qui a décidé de transféré la juridiction contentieuse administrative aux juridictions ordinaires, le Luxembourg, depuis la révision constitutionnelle de 1996, et la Thaïlande depuis la constitution de 1997. Dans les trois cas, c’est l’insuffisante indépendance avec laquelle la fonction contentieuse était exercée par rapport au pouvoir exécutif qui explique que celle-ci ait été finalement retirée au conseil d’Etat pour être confiée à une juridiction spécifique en matière administrative, et jouissant des mêmes garanties d’indépendance que les juridictions ordinaires16. On ne s’arrêtera ici que sur le cas de l’Espagne. Le système résultant de la réforme de 1904 a traversé les régimes politiques en conservant ses traits essentiels. Selon la constitution de 1978, le Conseil d’Etat est «l’organe consultatif suprême du gouvernement» (art. 107). Il est organisé aujourd’hui par une loi organique 16 G. Marcou. «Une cour administrative suprême…», op. cit. 252
  • 8. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa de 1980, révisé en 2004, et qui a remplacé l’ancienne loi de 1944 sur le Conseil d’Etat17. Selon la loi organique de 1980, le Conseil d’Etat «exerce la fonction consultative avec l’autonomie organique et fonctionnelle qui garantit son objectivité et son indépendance conformément à la Constitution et à la loi» (art. 1er, par. 2). Son rôle consultatif peut cependant aller au-delà d’un avis sur la stricte légalité ou constitutionnalité du texte présenté. Selon l’article 2 (par. 1er), le Conseil d’Etat, dans l’exercice de ses fonctions, «veille au respect de la Constitution et de l’ensemble de l’ordre juridique», mais il «évaluera aussi les aspects d’opportunité et d’adéquation si la nature de l’affaire l’exige ou si il est expressément sollicité de le faire par l’autorité consultante». Le Conseil d’Etat émet ses avis sur les questions qui lui sont soumises par le gouvernement ou ses membres (art. 2, par. 2, al. 1er). Il ne peut donc prendre l’initiative lui-même d’émettre un avis. Cependant, selon la loi organique de 2004, il peut aussi réaliser les études, rapports, mémoires et formuler les propositions (texte consolidé de la loi organique: art. 20, par.1er) qui lui paraissent opportuns pour assurer au mieux ses fonctions (art. 2, par. 3), et la commission des études est créée à cet effet (art. 23). La loi organique de 2004 a également prévu la publication d’un rapport annuel d’activité adopté par l’assemblée plénière du Conseil d’Etat (art. 20). Dans l’élaboration des propositions constitutionnelles et législatives que lui commande le gouvernement, le Conseil d’Etat suit les objectifs, les critères et les limites fixés par le gouvernement, mais il peut formuler à leur sujet les observations qu’il estime pertinentes (art. 2, par. 3, al. 2). La loi organique établit donc une différence de régime de régime entre les avis (dictamen) et les autres documents adoptés par le Conseil d’Etat au titre de sa fonction consultative. En effet, la loi organique précise que la consultation du Conseil d’Etat est obligatoire dans les cas où la loi le prévoit, et facultative dans les autres cas. Les avis, en revanche, ne lient pas l’autorité consultante, à moins que la loi n’en dispose autrement (art. 2, par. 2, al. 2). La loi organique donne cependant une certaine portée aux avis. Tenant compte du fait que les avis peuvent être adoptés par des formations différentes, notamment par l’assemblée plénière (pleno) ou par la commission permanente, il est précisé que les affaires ayant donné lieu à un avis adopté en assemblée plénière ne peuvent soumises au rapport d’aucun autre corps ou organes de l’administration d’Etat; les avis adoptés par la commission permanente, ne peuvent être reconsidérés que par l’assemblée plénière. C’est au conseil des ministres de décider, dans les cas où la consultation est obligatoire, sur les affaires dans lesquelles le ministre est en désaccord avec l’avis du Conseil d’Etat (art. 2, par. 2, al. 3). Enfin, les dispositions ayant fait l’objet d’un avis du Conseil d’Etat doivent préciser si elles sont conformes à cet avis ou si elles s’en écartent (art. 2, par. 2, al. 4). En fait les amendements adoptés par la loi organique 3/2004 ont quelque peu étendu la compétence et renforcé l’autorité des avis du Conseil d’Etat. La consultation 17 Miguel Sánchez Morón (2006). Derecho administrativo. Parte general, Madrid, Tecnos, 2ème éd., pp. 287s. 253
  • 9. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés préalable du Conseil d’Etat en assemblée plénière est désormais obligatoire pour tout projet de loi constitutionnelle et sur les projets de loi se rapportant à la mise en œuvre ou au développement de normes issus d’engagements internationaux ou du droit communautaire; la consultation est également obligatoire notamment sur les projets de décrets législatifs, sur les problèmes d’interprétation d’engagements internationaux, sur les transactions judiciaires ou extrajudiciaires intéressant les droits du Trésor public ou les compromis ou arbitrages qui s’y rapportent, ou encore sur toute question à laquelle le gouvernement reconnaît une importance ou des répercussions particulières (art. 21). En outre, la consultation de la commission permanente du Conseil d’Etat est obligatoire notamment sur la nécessité d’une autorisation parlementaire préalable à la ratification des traités et accords internationaux, sur les dispositions réglementaires nécessaires à la mise en œuvre ou au développement d’engagements internationaux ou du droit communautaire, sur toutes les mesures réglementaires nécessaires à l’exécution des lois, sur les projets de loi organique relatifs au transfert ou à la délégation aux communautés autonomes de compétences de l’Etat ainsi que sur le contrôle de l’exercice des compétences déléguées, ou encore sur la concession de monopoles ou de services publics en monopole, une compétence dont el droit communautaire réduit sans cesse le champ. La commission permanente conserve également un rôle consultatif en matière contentieuse dans certains cas, que la loi organique de 2004 a un peu élargi: ainsi sur les recours gracieux ou en appel qui sont portés, en vertu d’une disposition législative, devant le conseil des ministres, des commissions déléguées du gouvernement ou la présidence du gouvernement; sur les recours administratifs en révision (selon sur la loi sur la procédure administrative; sur la révision d’office d’actes administratifs dans les cas prévus par la loi; sur la nullité, l’interprétation ou la résolution de contrats administratifs, ou encore la modification ou l’extinction de contrats de concession, en cas d’opposition du cocontractant ou dans des cas prévus par la loi; enfin, et ceci a été ajouté par la loi organique de 2004, en cas de réclamations pécuniaires d’un montant supérieur à 6.000 euros consécutives à un dommage ou préjudice imputé à l’administration d’Etat. La composition du Conseil d’Etat espagnol est assez complexe. En résumé, on peut dire qu’elle fait appel à de hautes personnalités, dont le statut et l’expérience assurent l’indépendance de jugement et l’autorité morale, mais qui n’assurent pas directement, pour la plupart d’entre elles, l’expertise juridique du Conseil d’Etat, bien que, selon la loi organique, «la composition du Conseil d’Etat vise à garantir la diversité de son expertise et son indépendance» (art. 2, par.3, al.3). La loi organique de 2004 a introduit les anciens chefs de gouvernement parmi les membres de droit et à vie du Conseil d’Etat, sous réserve qu’ils manifestent la volonté d’exercer cette charge. La loi organique distingue trois catégories de membres du Conseil d’Etat (art. 7 à 9): les conseillers permanents, les conseillers de droit, les conseillers électifs. Les conseillers permanents, en nombre égal à celui des sections qui composent le Conseil d’Etat, sont nommés à vie par décret royal parmi les ministres, présidents ou membres des conseils exécutifs des communautés autonomes, les autres membres du Conseil d’Etat, les membres des conseils consultatifs des communautés autonomes, les 254
  • 10. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa référendaires supérieurs du Conseil d’Etat, les professeurs d’université des spécialités juridiques, économiques et sociales ayant au moins quinze ans d’exercice, certains hauts fonctionnaires, notamment. Les conseillers électifs sont au nombre de dix, nommés pour quatre ans, notamment parmi les catégories suivantes : parlementaires, deux au moins des conseillers électifs doivent avoir exercé les fonctions de président ou de membre de conseil exécutif d’une communauté autonome, membre du Tribunal constitutionnel ou de la Cour de Justice de la Communauté européenne, ministre ou secrétaire d’Etat, Défenseur du Peuple, ambassadeur, maire d’un chef- lieu de province, président de députation provinciale ou l’équivalent. Enfin, les membres de droit, outre les anciens chefs de gouvernement comptent: les présidents ou directeurs d’académie, le président du conseil économique et social, le procureur général de l’Etat, le chef d’état-major de la défense, l’avocat général de l’Etat – directeur du service juridique de l’Etat, le président de la commission générale de codification, le président du conseil général du barreau, le gouverneur de la banque centrale. Le président du Conseil d’Etat est nommé par décret royal délibéré en conseil des ministres parmi les juristes «dont le prestige est reconnu» et qui ont «l’expérience des affaires de l’Etat» (art. 6). On peut se demander si cette composition assure au Conseil d’Etat une capacité d’expertise, sur les questions juridiques, et une disponibilité à la hauteur des fonctions qui lui sont confiées. L’une et l’autre dépendent en réalité de la capacité représentée par les référendaires chargés de préparer les délibérations, lesquels forment toutefois un corps de juristes très réputés. Enfin, la plupart des communautés autonomes ont mis en place un conseil consultatif qui remplit à l’égard du gouvernement régional les fonctions que remplit le Conseil d’Etat au niveau national. Celles qui ne l’ont pas fait peuvent se tourner vers le Conseil d’Etat. Bien que la loi organique de 2004 ait entendu renforcé la fonction consultative du Conseil d’Etat, on ne doit pas oublier qu’il existe une autre instance d’expertise juridique au niveau central, l’Avocature générale de l’Etat (Abogacía general del Estado), ayant le rang d’un sous-secrétariat au sein du ministère de la justice. L’Avocature générale est formée du corps des avocats de l’Etat (abogados del Estado). Elle est chargée d’une part de la défense en justice des intérêts de l’Etat, et en particulier dans les procédures devant les juridictions européennes (Cour de Justice de la Communauté européenne et Tribunal de Première Instance, Cour européenne des Droits de l’Homme), et d’autre part d’apporter une assistance juridique consultative à toutes les administrations publiques. Son origine remonte à un décret royal du 28 décembre 1849 créant la direction générale du contentieux. Le corps des avocats de l’Etat a été créé par un décret royal du 16 mars 1886, qui réorganisait la direction générale du contentieux. C’est aujourd’hui un corps supérieur de l’administration de l’Etat, très prestigieux, formé de juristes recruté par un concours réputé particulièrement difficile. L’organisation actuelle de l’Avocature générale de l’Etat et ses deux fonctions essentielles sont définies par la loi 52/1997 du 27 novembre 1997 sur l’assistance juridique à l’Etat et aux autres institutions publiques et par le décret royal 1474/2000 du 4 août 2000 qui fixe l’organisation 255
  • 11. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés du ministère de la justice, sans préjudice, est-il précisé, des attributions du Conseil d’Etat. Toutefois, les textes n’indiquent pas comment la répartition des tâches entre le Conseil d’Etat et les avocats de l’Etat. En pratique, il semble que les avocats de l’Etat se concentrent, dans leur fonction consultative, sur les questions relatives aux droits de l’homme. b) La création d’un organe spécialisé de conseil juridique au gouvernement C’est principalement dans le but d’améliorer la qualité de la législation qu’un certain nombre de pays se sont dotés d’un conseil de législation (son nom précis peut varier d’un pays à l’autre) placé auprès du gouvernement, et chargé d’expertiser tous les projets de loi préparés par le gouvernement avant leur transmission au parlement. Il s’agit essentiellement de pays d’Europe de l’est confrontés à la nécessité d’adapter rapidement l’ensemble de leur législation au cadre communautaire dans la perspective puis en raison de leur adhésion à l’Union européenne. Mais il s’agit aussi de pays de droit administratif dans lesquels l’organisation de la juridiction administrative suit le modèle austro-allemand de la cour administrative suprême, laquelle est rattachée au pouvoir judiciaire, séparée du pouvoir exécutif et dépourvue traditionnellement d’attributions consultatives pour le gouvernement. Toutefois, un tel conseil de législation n’existe ni en Allemagne ni en Autriche (cf infra). Actuellement, on peut relever l’existence d’un conseil de législation auprès du gouvernement en Pologne, République Tchèque, Slovaquie et Slovénie. Sa composition fait habituellement appel à des professeurs de droit, de hauts magistrats et des experts de la haute fonction publique. Ces conseils de législation sont saisis de tous les projets de loi et les examine du point de vue de leur conformité à la constitution, au droit communautaire ou d’autres engagements internationaux, aux principes généraux du droit ; ils veillent aussi à la qualité du style législatif, qui doit être clair et compréhensible. La compétence des conseils de législation s’étend aux actes réglementaires de la compétence du gouvernement18. On s’arrêtera sur l’exemple de la Pologne19. Le conseil législatif (Rada Legislacyjna) est prévu par l’article 14 de la loi du 8 août 1996 sur le conseil des ministres. Selon ce texte, le conseil législatif est créé auprès du président du conseil des ministres (c’est le chef du gouvernement) qui en nomme les membres et en fixe par décret les tâches et le mode de fonctionnement. Le président du conseil des ministres arrête après avis du conseil législatif les principes de rédaction des textes normatifs auxquels doivent se conformer les différentes administrations. Le décret du président du conseil des ministres du 23 juillet 1998 définit les missions du conseil législatif et ses règles de fonctionnement. Le conseil législatif se compose 18 SIGMA. Regulatory management capacities of member States of the EU that joined the Union on 1st May 2004, SIGMA. Paper n° 42, GOV/SIGMA(2007)6, juin 2007, notamment pp. 37 et suiv. 19 On se fonde sur les textes de base en langue polonaise et sur un entretien au conseil législatif le 10 novembre 2004. 256
  • 12. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa de 20 membres au plus nommés par le président du conseil des ministres parmi des représentants éminents de la science juridique et des praticiens expérimentés. Leur mandat est de quatre ans ; le président et le vice-président ainsi que le secrétaire (ces deux derniers sur proposition du président) sont nommés parmi les membres par le président du conseil des ministres, qui peut également les révoquer. En revanche, le président du conseil des ministres ne peut mettre fin au mandat des membres avant le terme du mandat que dans des cas limitativement énumérés par le décret sur le conseil législatif (§5, par. 1er). Tous les membres du conseil législatif sont des professeurs de droit, des diverses disciplines juridiques, quelques anciens juges des plus hautes juridictions. Le conseil législatif est consulté sur tous les projets de loi du gouvernementaux ; il ne l’est cependant pas sur les textes proposés par les autres autorités investies du droit d’initiative législative. Toutefois, le conseil législatif peut donner un avis sur une initiative parlementaire ou du président si l’auteur de l’initiative le demande. Le conseil législatif est saisi des projets de décret les plus importants. Il arrive pourtant que des projets de loi ne soient pas soumis au conseil législatif, et davantage encore les projets de décret réglementaire du gouvernement. Le président et le vice-président du conseil législatif sont invités aux réunions du conseil des ministres. En outre, le conseil législatif est consulté quotidiennement par les services du Premier ministre de manière informelle. Le conseil législatif se réunit environ toutes les deux semaines et examine 10 à 12 projets de loi par séance, sur la base de rapports présentés par certains de ses membres. Le conseil législatif forme des groupes de travail pour étudier les projets. Le président du conseil législatif peut demander des informations et des documents complémentaires aux services qui les ont préparés, il peut inviter à la réunion du conseil législatif comme aux réunions préparatoires des groupes de travail les fonctionnaires en charge du projet ou des représentants d’organisations intéressées (organisations sociales, collectivités locales, etc…) (décret du 23 juillet 1998, §§10 et 11). En pratique, l’examen d’un projet de loi est toujours précédé de réunions de travail avec les services qui les ont préparés. Les présidents des plus hautes juridictions ou leur vice-président ont invités aux réunions du conseil législatif. Les avis sont transmis au conseil des ministres immédiatement après leur adoption (§12), mais aucune disposition n’impose la confidentialité de ces avis. Bien entendu, ils ne lient pas le gouvernement. Il est précisé que le directeur du Centre de législation du gouvernement ou son délégué participent aux travaux du conseil législatif (§9, par. 3). Le Centre de législation du gouvernement, prévu par la loi du 8 août 1996 sur le conseil des ministres (art. 14a à 14i) est un établissement placé sous l’autorité directe du président du conseil des ministres, qui en nomme et révoque le président et le vice- président. Il est chargé de coordonner l’activité législative. Il s’agit d’un organisme de gestion, mais aussi de suivi et d’étude, dont l’appui au conseil législatif peut être important. Outre, l’édition du journal officiel polonais, le Centre de législation du gouvernement prépare un avis juridique sur les projets d’actes juridiques du gouvernement, coordonne les évaluations des effets socio-économiques des actes juridiques en préparation, collabore aux avis juridiques du conseil législatif sur les projets qui lui sont soumis, contrôle l’adoption par les organes administratifs 257
  • 13. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés compétents des mesures nécessaires à l’application des lois (art. 14c). Le centre coopère avec les institutions scientifiques pour l’exécution de ses missions (art. 14d). Le gouvernement suit en général les avis du conseil législatif; environ 20% des avis sont négatifs. Sur l’exemple d’une année (octobre 2003 – octobre 2004), sur l’ensemble des projets de loi: 35% ont été transmis au parlement avec l’avis du conseil législatif, 35% n’ont pas été transmis au parlement, 7% ont été transmis au parlement sans avoir été soumis au conseil législatif, et 23% étaient des projets de loi relatifs à des accords internationaux non soumis au conseil législatif20. Selon des données plus récentes, toutefois, seulement 60% des projets de loi seraient soumis au conseil législatif21. En Pologne, le fonctionnement et le rôle du conseil législatif semblent donner satisfaction. Toutefois, ce type d’institution peut donner lieu aussi à des évaluations plus critiques. Ainsi, en Slovaquie, on a relevé que le délai d’examen des projets de loi est excessif, pouvant atteindre huit mois, et que les conditions de l’inscription d’un projet à l’ordre du jour du conseil législatif ne sont pas claires, ce qui laisse place au marchandage politique22. En outre, mais cela ressort aussi de l’ampleur des auditions auxquelles le conseil peut procéder, les limites du rôle du conseil législatif ne sont pas très claires : en principe l’avis porte sur les questions de droit et sur la qualité technique du texte, mais en pratique l’avis peut porter aussi sur des questions de contenu. II. La fonction consultative associée au pouvoir d’action en justice du pouvoir exécutif Un modèle très différent de ceux que l’on vient d’évoquer est celui qui s’est développé en Angleterre: les Law Officers of the Crown ce que l’on pourrait traduire par: les «légistes de la Couronne», une traduction qui restitué l’origine médiévale de l’institution, mais à raison de son actualité on préférera «Avocats généraux de la Couronne». Produit d’une expérience historique particulière également, cette institution a été transposée aux Etats-Unis et dans de nombreux autres pays qui ont système juridique fondé sur la common law. Il convient de présenter le système britannique avant d’examiner rapidement quelles variations il a connues dans les pays qui s’en sont inspirés. a) Les avocats généraux de la Couronne Il existe deux avocats généraux de la Couronne pour l’Angleterre et le Pays de Galles: l’Attorney general et le Solicitor general, qui est son adjoint23. Ce dernier peut 20 Entretien précité. 21 SIGMA, op. cit, p. 38. 22 Katarina Staronova / Katarina Mathernova. Recommendations for the improvement of the legislative drafting process in Slovakia. OSI IPF Fellowship, Budapest, mars 2003, p. 8. 23 Ils ont un homologue pour l’Ecosse: the Advocate General for Scotland. 258
  • 14. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa suppléer l’Attorney general dans toutes ses fonctions, et il en a toutes les attributions en dehors de celles que l’Attorney general se réserve. Il s’agit d’une institution singulière qui puise sa source dans la longue histoire du droit anglais, et qui n’est pas dépourvue de contradictions. L’Attorney general est apparu en 1315 pour exercer les poursuites au nom de la Couronne, il reçu ce titre en 1452. Le Solicitor general est apparu en 1461 pour la défense de la Couronne en justice. Mais c’est seulement au 17ème siècle que l’institution a acquis ses caractéristiques modernes en devenant les conseillers juridiques de la Couronne et fournissant des avis que les questions de droit à tous les départements du gouvernement24. Aujourd’hui encore, l’un et l’autre sont avocats (barristers, plus précisément), membres de l’une ou l’autre chambre du Parlement, et membres du gouvernement, à ce titre nommés par le Premier ministre. Comme ministres, les avocats généraux de la Couronne sont responsables devant le Parlement, comme tous les membres du gouvernement. L’Attorney general est, ès qualité, le chef du barreau, bien que membre du gouvernement et qu’il entre dans sa fonction de représenter les intérêts de la Couronne en justice. L’office des avocats généraux de la Couronne est régi aujourd’hui par le Law Officers Act de 1997, mais aussi comme on le verra par certaines conventions de la constitution. Cette loi établit clairement la suppléance de l’Attorney general par le Solicitor general, mais le véritable titulaire de la charge reste l’Attorney general. C’est pourquoi, dans ce qui suit on emploiera simplement l’expression: l’Avocat général. Selon la loi, l’Avocat général remplit trois grandes fonctions: • conseiller juridique du gouvernement; • ministre chargé des poursuites au nom du gouvernement (superintending minister); • gardien de l’intérêt public. Il en outre charge de diverses fonctions en relation avec le Parlement ou les professions juridiques. En tant que «gardien de l’intérêt public» (gardian of the public interest), il est censé agir en toute indépendance. Cette fonction fait de lui l’autorité la plus haute du royaume en matière criminelle : certaines poursuites sont soumises à son accord, il détient à l’inverse le pouvoir de décider de ne pas poursuivre, il peut faire appel des jugements trop cléments, il peut engager les poursuites pour outrage à la cour (contempt of court) (un délit qui garantit notamment l’exécution des décisions de justice, notamment. Cette indépendance est considérée par la jurisprudence comme une règle constitutionnelle: «Selon notre droit constitutionnel, dans les matières qui concernent le public en général, l’Avocat général est le gardien de l’intérêt public. Bien que membre du gouvernement en exercice, il est de son devoir de représenter l’intérêt public avec une objectivité et un détachement complets. Il doit agir en 24 J. Ll. J. Edwards, The law officers of the Crown. A study of the offices of the Attorney general and of the Solicitor general of England, Londres, Sweet & Maxwell, 1964, v. chapitre 1er. 259
  • 15. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés toute indépendance à l’égard de toute pression extérieure d’où quelle vienne»25. Ce principe a été réaffirmé par l’Avocat général devant la Commission de la constitution de la Chambre des Lords26. Toutefois, cette indépendance n’est pas invoquée dans les autres fonctions que remplit l’Avocat général. En ce qui concerne l’exercice la fonction de conseil juridique pour le pouvoir exécutif, il est nécessaire de distinguer deux aspects: 1) les avis juridiques que l’Avocat général doit donner au gouvernement, dont il fait partie; 2) le rôle du département de l’avocat du Trésor (Treasury Solicitor’s Department), qui est placé sous son autorité. Le département de l’avocat du Trésor est l’une des six administrations placées sous l’autorité de l’Avocat général, et qui sont les suivantes : • le Serious Fraud Office (SFO), chargé de la recherche et de la poursuite des fraudes les plus graves ; • le Crown Prosecution Service (CPS), qui est placé sous la direction du Directeur de l’Action publique (Director of Public Prosecution), et qui remplit une fonction classique du parquet; • le Département de l’Avocat du Trésor; • le Département du directeur de l’Action publique pour l’Irlande du Nord; • l’Inspection du CPS; • le Revenue and Customs Prosecution Office, qui est chargé des poursuites en matière fiscale et douanière. Ces administrations sont considérées comme faisant partie du système judiciaire britannique et l’Avocat général nomme le directeur de chacun d’elle. En outre, l’Avocat général dispose d’un petit département qui lui est directement rattaché, le bureau de l’Avocat général (Attorney general’s Office), formé d’une cinquantaine de personnes répartis en trois groupes spécialisés en droit civil, en droit pénal et en matière d’administration et de politique publique. C’est ce service qui appuie l’Avocat général dans l’exercice des fonctions qui lui sont propres énumérées précédemment. Précisons encore que, malgré ces fonctions, l’Avocat général n’est pas un ministre de la justice. Cette fonction, traditionnellement exercée par le Lord Chancellor, qui cumulait les fonctions de président de la Chambre des Lords, de président de sa formation judiciaire et de ministre de la justice, est passée avec la réforme de 2005 à un vrai ministre de la justice, tandis qu’une véritable cour suprême succédait à la formation de jugement (Appellate Committee) de la Chambre des Lords. Membre du gouvernement, l’Avocat général ne fait cependant pas partie du Cabinet, qui constitue le cœur politique du gouvernement. Toutefois, il est souvent invité, avec le Solicitor general, aux réunions du Cabinet, à raison de sa fonction de conseil juridique, et il est membre de divers comités ou sous-comités du Cabinet, tels que le comité des affaires intérieures, le comité du programme législatif (l’Avocat général est ainsi conduit à donner un avis sur tous les projets de loi), le comité des questions européennes, par exemple. 25 Jugement prononcé par Lord Denning: «Attorney General v. Independent Boradcasting Authority” [1973] 1 All E. R. p. 689, 697 (trad. par l’auteur). 26 Constitutional Affairs Committee, Inquiry into constitutional role of the Attorney general, Memorandum from the Attorney general Attorney General’s Office, 6 février 2007, paragraphe 25. 260
  • 16. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa Dans l’exercice de la fonction de conseil juridique pour le pouvoir exécutif, le système britannique distingue ainsi en fait deux niveaux: un niveau plus politique, celui des avis juridiques donnée par l’Avocat général lui-même au gouvernement et en tant que membre du gouvernement, et la fonction d’expertise juridique organisée pour le Premier ministre et l’ensemble du gouvernement au travers du Département de l’Avocat du Trésor. Les avis juridiques de l’Avocat général concernent les affaires les plus importantes et les plus sensibles. Comme l’a exprimé l’Avocat général, celui-ci se situe «au sommet de l’organisation du conseil juridique composé des juristes des ministères et de l’avocat du Trésor. (…) Je peux être consulté à n’importe quel stade du processus. Mais ce n’est habituellement pas nécessaire (…). Mais dans les domaines présentant une sensibilité ou une difficulté particulières, mon avis est souvent sollicité»27. Selon certaines estimations, cela ne concernerait pas plus de 1% des questions juridiques rencontrées, selon l’exemple des affaires étrangères et du Commonwealth28. Toutefois, les critères restrictifs qui devaient guider la décision d’un ministère de demander un avis juridique à l’Avocat général ont disparu dans la plus récente version du «code ministériel», la circulaire du Premier ministre qui encadre les procédures et le travail des ministères29. Cela devrait conduire à ce que l’avis de l’Avocat général soit plus souvent sollicité, sans que l’on puisse encore en prendre la mesure. La question de la confidentialité des avis donnés au gouvernement par l’Avocat général a donné lieu à de nombreux débats. En effet, ces avis sont considérés comme des documents du pouvoir exécutif qui ne sont pas communicables au public. Cette règle n’est guère différente de celle qui s’applique aux avis que le Conseil d’Etat français donne au gouvernement sur sa demande, et dont le gouvernement décide d’autoriser ou non la publication. Un certain nombre d’entre eux sont cependant publiés dans le Rapport annuel du Conseil d’Etat. Mais le statut de l’Avocat général crée une difficulté: puisqu’il est un ministre, membre du gouvernement, il est responsable devant le Parlement; comment alors peut-il justifier qu’il ne puisse en rendre compte de ses avis au Parlement? La confidentialité des avis juridiques de l’Avocat général au gouvernement est une convention de la constitution qui s’est affirmée au 19ème siècle dans de rares cas où le gouvernement a accepté de rendre publics un tel avis en raison de « circonstances particulières et exceptionnelles»30. Le Premier ministre Palmerston avait ainsi déclaré devant le Parlement en 1865 après les émeutes de Belfast que la règle était que ces avis n’étaient pas communiqués au Parlement car les avocats généraux de la Couronne seraient plus prudents dans leurs opinions s’ils savaient qu’elles devraient être rendues publiques, mais il appartenait au gouvernement 27 Cité par K. A. Kyriakides. «The advisory functions of the Attorney-General”, Hertfordshire Law Journal 2003. 1(1), p. 74. 28 K.A. Kyriakides, op. cit. p.75 29 Ministerial Code. Cabinet Office, juillet 2007, par. 2.10 à 2.13, à comparer avec le Ministerial Code de 2005, dont le paragraphe 6.22 énonçait encore ces conditions restrictives. 30 J. Ll. J. Edwards, op. cit. p. 257. 261
  • 17. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés d’apprécier si les circonstances justifiaient qu’il rende public un avis31. Cette règle a été depuis constamment réaffirmée, lors d’interpellations parlementaires à la suite de décisions sensibles ou controversées pour lesquelles le gouvernement a parfois tenté de s’abriter derrière l’autorité des avis juridiques de l’Avocat général. Tel fut le cas dans l’affaire Matrix Churchill de vente d’armes à l’Irak en 1992: quatre ministres avaient signé des certificats d’immunité dans l’intérêt public, qui avaient pour effet, selon le droit anglais, de faire obstacle à la communication de documents à la défense devant la justice; cela empêchait aussi l’information complète du parlement sur la réalité de la politique du gouvernement. Le Premier ministre a cependant dû consentir à l’ouverture d’une enquête sous l’autorité de Lord Justice Scott. L’un des points était la portée des avis juridiques donnés par l’Attorney general aux ministres, et dans quelle mesure il affecte la responsabilité des ministres: une fois cet avis remis, les ministres n’auraient plus de marge d’appréciation («no discretion left»)32. Toutefois, la déclaration de l’Avocat général devant la commission limite la portée de cette opinion, qui mettrait en cause la possibilité de la responsabilité des ministres ayant sollicité l’avis devant le Parlement. Selon l’Avocat général, l’avis exprimé était que, s’agissant de l’application de la loi sur l’immunité dans l’intérêt public, le ministre avait le devoir de ne pas communiquer un document s’il reconnaissait que ce document entrait dans l’un des catégories de documents couverts par cette loi33. C’est donc la loi qui liait le ministre et non l’avis qui en rappelait les termes. Par la suite, la question a été de nouveau soulevée à propose d’autres décisions controversées du gouvernement, et notamment lors de la ratification du traité de Masstricht en 1993 et lors de l’engagement du Royaume-Uni dans la guerre en Irak en 2003. Dans le premier cas, le gouvernement a été conduit à communiquer la substance de l’avis par lequel l’Avocat général exprimait que la non incorporation du protocole dans le droit interne du Royaume-Uni ne ferait pas obstacle à la ratification du traité de Maastricht, mais l’Avocat général a refusé de donner plus de détail lorsqu’il a comparu devant la commission de la chambre des Communes le 22 février 1993. En revanche, en ce qui concerne la guerre en Irak, le gouvernement ayant affirmé préalablement qu’il ne ferait rien de contraire au droit, il a autorisé l’Avocat général à rendre public, sous la forme d’une réponse écrite à une question parlementaire (17 mars 2003), l’avis qui exposait les raisons de droit de la participation du Royaume-Uni à la guerre. L’interprétation que l’on a pu donner de ces décisions reste conforme à la convention de la constitution. Les avis juridiques de l’Avocat général au gouvernement sont confidentiels et ne peuvent pas être rendus publics, sauf en cas de circonstances particulières et exceptionnelles que le gouvernement apprécie34. Les exemples cités montrent que ces cas ne se présentent que rarement. Cette convention de la constitution a été également exprimée dans d’autres textes. Elle sigure d’abord depuis longtemps dans les «codes ministériels» qui, modifiés et 31 Ibid. 32 J. McEldowney. Public Law. Londres, Sweet & Maxwell, 1994, p. 83. 33 Voir cette déclaration: http:/www.fas.org/news/uk/scott/atg2.txt 34 K. A. Kyriakides, op. cit. pp.77-82 et pp.83-84. 262
  • 18. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa republiés régulièrement, fixent les règles de conduite que les ministres doivent respecter dans tous les domaines. Dans l’édition de 2007, on lit ainsi au paragraphe 2.13: «The fact that the Law Officers have advised or have not advised and the content of their advice must not be disclosed outside of Government without their authority”. Cette formulation intègre la possibilité de rendre publics les avis juridiques tout en maintenant le principe de la confidentialité. En outre, le Freedom of Information Act 2000, qui règle les conditions auxquelles des documents officiels peuvent être communiqués au public, exclut expressément de ces documents les avis juridiques de l’Avocat général (s. 35). Cependant, les avis juridiques de l’Avocat général ne suffisent pas à rendre compte de la fonction consultative juridique centrale telle qu’elle est organisée en Angleterre. Dans le fonctionnement courant du gouvernement, le premier degré, en quelque sorte, de la fonction consultative juridique centrale est constitué par le Département de l’Avocat du Trésor et du réseau de juristes spécialisés en fonction dans les différents ministères. L’importance de ce premier degré s’explique par l’absence de juristes parmi les hauts fonctionnaires impliqués dans la formation des politiques publiques a des conséquences sur le caractère de la fonction publique, une caractéristique de la haute administration britannique dont Wade avait bien souligné l’importance. Le point de vue juridique sur les politiques publiques est très sous-représenté, à la différence de beaucoup d’autres pays. L’influence du droit sur le style et la technique de l’administration est très limitée. Il en résulte un certain antagonisme entre les fonctionnaires et la mentalité juridique35. La mission du Département de l’Avocat du Trésor est double. D’une part, il assiste le gouvernement et tous les organismes publics dans les procédures judiciaires qui les concernent, que ce soit en demande ou en défense. D’autre part, il fournit au gouvernement et aux organismes publics l’expertise juridique dont ils ont besoin, soit dans l’élaboration des projets de loi ou de règlement, soit en présentant des avis juridiques sur les questions qui lui sont soumises. Le Département de l’Avocat du Trésor a été transformé en «agence exécutive», au cours de la réforme administrative des années 90 («next step agencies»). Il demeure partie intégrante du gouvernement central, ils est placé sous l’autorité de l’Avocat général, mais il constitue une agence dotée de l’autonomie financière, ce qui signifie qu’il doit couvrir ses coûts avec les paiements de ses «clients», c’est- à-dire les ministères et d’autres organismes publics. Son «chiffre d’affaires» serait de 50 millions de livres en 2007. En pratique, il offre ses services à 180 organismes publics d’Angleterre et du Pays de Galles, avec un personnel de 800 personnes, parmi lesquels 400 juristes (barristers et solicitors). En outre, le Département, de l’Avocat du Trésor sous-traite certaines consultations à des firmes privées. Enfin, les juristes du Département travaillent avec un réseau de juristes spécialisé des divers ministères, à l’égard desquels il joue souvent un rôle de coordination. Le Département de l’Avocat du Trésor est organisé en plusieurs divisions ou services spécialisés, ainsi nommés: • Litigation and Employment Group; 35 H. W. R. Wade, Administrative law. Clarendon, Oxford, 5ème éd. 1982, p. 57. 263
  • 19. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés • Cabinet Office and Central Advisory Division: il s’agit d’un groupe de 20 juristes, chargés de conseiller le Cabinet sur toutes les questions juridiques soulevées par les décisions politiques, sur les projets de loi et de règlement; • European Division: c’est un groupe de 14 juristes chargés d’assister le gouvernement dans les litiges en matière de droit européen et de le conseiller en général sus totue question de droit communautaire et européen; • Advisory Teams: il s’agit d’une centaine de juristes qui se trouvent dans les principaux ministères et leur apportent l’expertise juridique spécialisée dont ils ont besoin; • Treasury Legal Advisers: apportent une expertise juridique en droit financier, notamment en ce qui concerne l’application de la loi sur les services financiers et de marché, ainsi que les organismes publics rattachés au ministère des finances (Treasury); • Office of Government Commerce Legal Advisers: ce groupe de sept juristes est spécialisé en matière de marchés publics (y compris le droit communautaire) et de mesures visant à améliorer l’efficacité du secteur public ; • Culture Media and sport Advisory Division ; • Children and School Advisory Division. Cette organisation peut, bien sûr, évoluer en fonction des besoins du gouvernement. Mais le plus important est que tous les juristes qui travaillent dans environ 40 départements ministériels forment ce qu’on appelle le Service Juridique du Gouvernement (Government Legal Service), lequel est placé sous l’autorité directe de l’Avocat du Trésor, qui est lui-même nommé par l’Avocat général36. b) Les Etats-Unis et les autres pays de common law L’institution britannique des Law Officers of the Crown s’est largement diffusée parmi les pays de common law, des Etats-Unis à Chypre en passant par la Nouvelle- Zélande et le Canada. Il n’est pas possible de rendre compte de leurs nombreuses particularités. On s’arrêtera ici seulement sur le cas des Etats-Unis. L’Attorney general (Avocat général) a été introduit par la loi sur l’organisation judiciaire de 1789 (Judiciary Act 1789); il n’était pas prévu par la Constitution des Etats-Unis. Selon l’article 35 de cette loi, «… And there shall be appointed a meet person learned in the law to act as an attorney general for the United States, … whose duty it shall be to prosecute and conduct all suits in the Supreme Court in which the United States shall be concerned, and to give his advise and opinion upon questions of law when required by the President of the United States, or when requested by the heads of any of the departments, touching any matters that may concern their departments, and shall receive such compensation for his services as shall be by law provided”. L’Avocat général fait partie du cabinet; il est nommé et révoqué discrétionnairement par le président (sous réserve de l’accord du Sénat pour la nomination). Mais le Congrès ne peut le destituer que par une procédure d’impeachment, et seulement pour des faits criminels graves. 36 Treasury Solicitor. Law at the heart of Government. Londres 2007. 264
  • 20. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa C’est seulement en 1870 que l’Avocat général fut doté d’un département, le ministère de la justice, dont il est le chef. Aujourd’hui, l’Avocat général est le seul membre du cabinet qui ne porte par le titre de «secrétaire». Selon la législation en vigueur (28 USC § 503), l’Avocat général des Etats-Unis est le chef du département fédéral de la justice, il est membre du cabinet du Président des Etats-Unis, il est le juriste le plus élevé, chargé de toutes les affaires juridiques du gouvernement des Etats-Unis, il est enfin le procureur général des Etats-Unis, responsable à ce titre du respect des lois. On voit que l’Avocat général présente aux Etats-Unis plusieurs particularités qui le distinguent de son homologue britannique. Premièrement, l’Avocat général fait clairement partie de la «branche» exécutive du gouvernement au sens de la constitution des Etats-Unis, et non du pouvoir judiciaire, alors qu’au Royaume-Uni, l’Avocat général est considéré, bien que faisant partie aussi du gouvernement, comme une institution du système judiciaire. Deuxièmement, aux Etats-Unis, l’Avocat général est le ministre de la Justice, alors qu’au Royaume-Uni cette dernière fonction est confiée à un membre distinct du gouvernement. Du point de vue administratif et budgétaire, le département de la justice est aux Etats-Unis un département ministériel classique avec un financement par des inscriptions budgétaires En pratique, c’est la fonction de procureur général, chargé de la mise en œuvre de la politique criminelle, qui paraît l’emporter sus toutes les autres. Le Rapport annuel de l’Avocat général37 lui est presque entièrement consacré. Bien que la fonction de conseil juridique de l’exécutif demeure en principe importante, la confidentialité qui s’attache aux avis juridiques émis et le silence du Rapport annuel sur cette fonction rend impossible d’apprécier sa portée réelle aujourd’hui. On doit aussi relever que les commissions réglementaires fédérales disposent, en raison même de leur nature et de leurs fonctions, de leur propre expertise juridique. IV. La fonction consultative intégrée à l’organisation ministérielle La fonction consultative juridique centrale du gouvernement peut aussi être exercée par le ministère de la justice dans des pays qui ne se rattachent pas à la tradition juridique anglo-saxonne. On le constate dans divers pays européens qui ne connaissent pas le modèle du conseil d’Etat. En Allemagne, le ministère fédéral de la justice examine tous les projets de loi et de règlement fédéraux, ainsi que les projets d’accords internationaux, afin de vérifier qu’ils sont conformes à la Loi fondamentale, au droit communautaire et à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales et aux autres engagements internationaux de la République fédérale. Cependant, il s’agit d’une fonction de contrôle plutôt que de conseil ou d’appui. Le ministère fédéral de l’intérieur examine aussi ces projets. 37 U.S. Department of Justice. Performance and Accountability Report. Fiscal Year 2007. 265
  • 21. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés Le contrôle s’étend à la technique législative et à la clarté des textes juridiques. Il s’agit d’une sorte de contrôle de qualité. Aucun projet ne peut être soumis à la chancellerie pour son approbation par le gouvernement sans avoir franchi ces étapes avec succès38. En outre, le ministère fédéral de la justice publie un guide de rédaction des textes juridiques et les divers ministères doivent se conformer aux directives énoncées dans ce guide39. Le ministère fédéral de la justice est organisé en six sections, parmi lesquelles quatre se partagent la fonction de contrôle juridique: • droit civil, • droit pénal, • droit commercial et de l’économie, • droit constitutionnel et administratif, droit européen et international. Cette organisation se retrouve au niveau des Länder, lesquels ont leur propre ministère de la justice. V. L’institut spécialisé rattaché au gouvernement et chargé de lui apporter l’expertise juridique dont il a besoin CE dernier type d’organisation de la fonction consultative juridique centrale est le plus nouveau et le moins connu. Il s’agit de l’établissement d’un institut d’études destiné à répondre aux besoins du gouvernement en matière d’expertise juridique, et dont l’organisation est proche de celles d’instituts de recherche de type académique. On peut en identifier deux cas : l’Institut de Législation et de Droit comparé près le Gouvernement de la Fédération de Russie (IZAK), et l’Institut de Recherche sur la Législation du Gouvernement de la République de Corée (KLRI). Le gouvernement de la Roumanie prépare la création d’un institut de ce type à partir d’une institution existante. C’est une solution qui paraît répondre à la préoccupation d’organiser une capacité permanente d’expertise juridique à la disposition du gouvernement mais dotée d’une certaine autonomie, en se fondant sur le modèle des instituts de recherche, dans des pays qui n’ont pas de conseil d’Etat. a) L’Institut de Législation et de Droit comparé près le Gouvernement de la Fédération de Russie (IZAK) Cet institut fait suite à une ancienne institution de l’époque soviétique, apparue en 1925. Aujourd’hui, selon les statuts adoptés par le gouvernement fédéral (arrêté du 29 décembre 2006, n°836, remplaçant les statuts adoptés par l’arrêté du 29 mars 38 Kai Andreas Otto. The role of ministries in policy development and evaluation. Germany. SIGMA, OCDE Paris, p. 10. 39 Ibid. p.8. 266
  • 22. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa 1994 n° 255, mod. 2 juillet 2003 n° 393 et 7 décembre 2004 n° 745), il s’agit d’un établissement public scientifique, doté de la personnalité morale et directement rattaché au gouvernement fédéral, qui en fixe l’organisation et en nomme le directeur. Il dispose des ressources budgétaires qui lui sont allouées et de ressources propres tirées de son activité commerciale. Il a une double vocation: académique et d’expertise, pour toutes les branches du droit et l’organisation administrative. Son activité a connu un développement important depuis 2000. Ses missions sont ainsi définies: réaliser des recherches dans le domaine juridique pour le Gouvernement fédéral, le Président de la Fédération de Russie et l’Assemblée fédérale (Douma d’Etat et Conseil de la Fédération) ; • élaborer des rapports scientifiques sur l’évolution de la législation; • réaliser des études scientifiques préparatoires aux projets de loi du gouvernement; • analyser l’application de la législation; • réaliser des études comparatives de la législation des sujets de la Fédération, des Etats membres de la Confédération des Etats Indépendants et des autres Etats. Pour remplir ses missions, l’Institut participe à la préparation du programme législatif du Gouvernement en liaison avec le ministère de la Justice. En outre, il expertise tous les projets de loi fédérale et les règlements les plus importants des organes du pouvoir exécutif. Selon l’arrêté du Gouvernement fédéral du 2 août 2001 (n° 576, mod. 20 août 2004 n° 424), la conception de tous les projets de loi ou ensembles de mesures techniques doit être transmise pour expertise juridique au ministère de la Justice et à l’Institut après que les administrations responsables se soient mises d’accord sur le projet (paragraphe 13)40. Du point de vue de la procédure, un arrêté du Gouvernement fédéral du 15 avril 2000 n°347 avait fixé le rôle du ministère de la Justice dans l’organisation du travail législatif du Gouvernement fédéral; dans ce cadre, l’Institut devait être associé d’une part aux directives méthodologiques que le ministère devait adresser aux autres organes du pouvoir exécutif, et d’autre part à l’expertise juridique des projets de loi devant être soumis au Gouvernement fédéral41. Selon cet arrêté, c’est le ministère de la Justice qui transmet au Gouvernement le projet de loi au terme des discussions entre les différents départements concernés et en tenant compte des expertises produites par l’Institut42. Le règlement actuel du conseil des ministres de la Fédération de Russie (27 mai 2006, n° 322) confirme cette règle (paragraphe 60): le ministre de la Justice présente pour chaque projet de loi, projet d’ordonnance du Président de la Fédération de Russie ou projet d’arrêté du Gouvernement de la Fédération de Russie des conclusions qui formulent une évaluation juridique du projet, du point de vue de sa conformité aux normes supérieures, de l’absence de contradiction avec d’autres normes ou de lacunes juridiques. 40 Talia Ya. Khabrieva (ed.). Pravitel’stvo Rossijskoj Federacii (Le gouvernement de la Fédération de Russie). Moscou, Norma, 2005, pp. 467-471. 41 Igor I. Chouvalov. Pravitel’stvo Rossijkij Federacii v zakonotvortcheskom processe (Le gouvernement de la Fédération de Russie dans le processus législatif ). Moscou, Norma, 2004, pp. 124-127. 42 Ibid. p. 127. 267
  • 23. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés Toutefois, la fonction d’expertise juridique est en réalité passée, pour l’essentiel à l’Institut. Ses membres participent régulièrement aux groupes de travail et commission chargés de la préparation des textes, aux conseils consultatifs mis en place par différentes institutions fédérales. Mais surtout, son directeur est régulièrement invité aux réunions du Gouvernement fédéral, sur la base des dispositions du règlement du Gouvernement fédéral permettant que participent à ses réunions, et présentent éventuellement un rapport, des dirigeants d’autres organismes en rapport direct avec une question à l’ordre du jour (paragraphe 31 et 36); des demandes d’avis lui sont parfois directement adressées. Selon les données publiées par l’Institut, celui-ci a reçu en 2004 plus de 2.000 commandes et demandes d’avis, en 2005 plus de 2.200 et en 2006 plus de 2.700. En 2006, l’Institut a examiné plus de 800 projets de loi et rendu plus de 200 analyses à la demande du Gouvernement fédéral, de l’Administration du Président de la Fédération de Russie, du Conseil de la Fédération, de la Douma d’Etat, ou même de la Cour constitutionnelle fédérale, de la Cour suprême et du Tribunal suprême d’arbitrage43. En tant qu’institut de recherche, l’Institut de Législation et de Droit comparé près le Gouvernement de la Fédération de Russie publie des livres (une trentaine par an), plusieurs revues ( Journal Rossijskogo Prava - Revue de Droit russe, Journal zarubejnogo zakonodatel’stva i sravnitel’nogo pravovedenia - Revue de Législation étrangère et de Droit comparé) et organise des colloques, parfois à la demande de tel ou tel ministère sur un sujet spécialisé. Cette activité n’est pas moins importante et l’Institut souligne que cette activité concerne aussi bien la réflexion fondamentale (cf article 8 des statuts) que les recherches appliquées, la publication d’ouvrages théoriques aussi bien que de manuels d’enseignement et de commentaires des grands codes du droit russe. L’Institut recrute chaque année des doctorants qui réaliseront leur thèse au sein de l’Institut44. En 2007, l’Institut comptait 250 employés, dont 150 ayant au moins le grade de docteur ou de candidat en droit45. Il est organisé en 22 sections, dont 16 remplissent des fonctions de recherche et d’expertise couvrant tous les domaines du droit, et 6 des fonctions de soutien. Le directeur est assisté d’un premier adjoint, de trois adjoints, d’un secrétaire scientifique et d’un conseil scientifique de 23 membres. b) L’Institut de Recherche sur la Législation de la République de Corée L’Institut de Recherche sur la Législation de Corée est un organisme de réflexion financé par le gouvernement et créé en 1990 ; il est doté de la personnalité morale et son statut est celui d’une institution de recherche. Sa mission initiale était double: d’une part réaliser un inventaire systématique de la législation et des règlements 43 L’Institut de Législation et de Droit comparé auprès du Gouvernement fédéral russe, Moscou. 2007, p. 9. 44 Ibid. p. 21. 45 Ibid. p. 25. 268
  • 24. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa d’application et exploiter l’information qui s’y rapporte, et d’autre part mener des études et des recherches de niveau professionnel en matière de législation dans le but d’appuyer la politique législative nationale et d’assurer une information rapide et précise sur les nouveaux textes publiés. L’Institut a ainsi pour mission de contribuer plus généralement à l’élévation du niveau de la culture juridique. L’Institut coréen de Recherche sur la Législation a déjà entrepris plusieurs projets de recherche sur les progrès de l’Etat de droit et sur le développement de la culture juridique. Il a aussi publié le recueil des lois de la République de Corée, ainsi que la traduction en anglais des lois coréennes les plus importantes, une histoire de la législation et il a mis en place une base de données sur la législation. Mais la mission de l’Institut fait une place de plus en plus importante à l’expertise juridique au service du gouvernement. L’Institut participe à la préparation des réformes de la gestion publique, sous leur aspect juridique. Il répond aux demandes d’expertise des différents ministères et organismes gouvernementaux en matière de législation et de réglementation. Il s’adresse également aux professions juridiques. Conclusions Il est évident à l’issue de cet examen que la fonction consultative d’expertise juridique correspond à un besoin des Etats modernes. Il apparaît également que l’histoire des institutions administratives de chaque pays est un facteur explicatif essentiel des divers modèles qui ont pu être identifiés. Mais la distinction fondamentale est celle qui en ressort entre les pays qui visent à établir une fonction consultative indépendante et les autres. L’indépendance de la fonction consultative est une garantie pour le gouvernement, qui bénéficie d’avis objectifs, et pour la crédibilité de l’instance consultative. L’indépendance de la fonction consultative résout également le problème de la responsabilité politique : dès lors que ce n’est pas un membre du gouvernement qui assume cette fonction, elle ne peut plus être soumise à la pression pour répondre à des questions parlementaires sur les avis adressés au gouvernement, et on ne peut suspecter que l’avis ait été préparé pour appuyer la position que le gouvernement avait décidé d’adopter. Au regard de ces préoccupations, le modèle du conseil d’Etat liant la fonction contentieuse juridictionnelle et la fonction consultative continue d’être une réponse valable, car l’indépendance acquise pour la fonction juridictionnelle bénéficie en même temps à l’exercice de la fonction consultative. 269
  • 25. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés La función consultiva jurídica central Aproximación de derecho comparado1 Gérard Marcou P   U  P  P – S A diferencia de la jurisdicción administrativa, la función consultiva ha dado lugar a muy pocos estudios de derecho comparado; si acaso algunos desarrollos en trabajos de organizaciones internacionales referentes a la organización gubernamental o al mejoramiento de la calidad de la legislación. Su importancia, sin embargo, no cesa de crecer, con las necesidades de especialización que hoy acompañan a todas las políticas públicas. No obstante, la función consultiva ha dado lugar en Francia a un cierto número la concepción napoleónica de la administración que durante un buen tiempo ha marcado a Francia, según la cual, si deliberar es el hecho de varios, actuar es el hecho de uno solo, lo cual se encuentra en el origen de la doble función contenciosa y consultiva del Consejo de Estado moderno. Maurice Hauriou es, tal vez, el primero en haber utilizado la expresión “administración consultiva”, para oponerla a la ”administración activa” y designar los numerosos consejos y comisiones que rodean al gobierno2. Yves Weber ha tratado de “la administración consultiva puede entenderse como la expresión jurídica de opiniones emitidas individual o colegiadamente a una autoridad administrativa, la cual es la única habilitada para dictar el acto de decisión a propósito del cual se realiza la consulta”; esto supone una institución cuya misión es la de ser consultada, la autoridad consultante puede ser el gobierno3. Según este autor, la consulta responde intereses; la garantía de los derechos individuales4. La segunda, la más reciente, que se ha desarrollado con la administración económica y social, le cambia en realidad la 1 Traducción: Jorge Murgueitio Cabrera, Magistrado Auxiliar, Sala de Consulta y Servicio Civil 2 Précis de droit administratif. Paris, Sirey, 9ème éd., 1927. 3 Y. Weber. L’administration consultative. Paris, LGDJ, 1968, Bibl. de Droit Public No. 82, pp. 1 y 2. 4 Ibid. principalmente pp. 16-43. 270
  • 26. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa naturaleza: con la representación de intereses, la función consultiva tiene de absorber el poder reconocido a la autoridad consultante5. Pero en lo que concierne a la primera, Y. Weber distingue entre la función consultiva jurídica, ejercida esencialmente por el Consejo de Estado, y la función consultiva asociada a los diferentes asuntos “técnicos” de la acción administrativa6. La importancia de esta distinción había sido subrayada antes que él por Gilbert Dauphin, quien distinguía sencillamente, en el seno de la administración consultiva, entre el Consejo de Estado y “el resto”7. Pero este autor hacía una observación de mayor alcance haciendo notar que el Consejo de Estado había asegurado la perennidad de su preeminencia evitando la penetración en su seno de “técnicos” cuyo concurso se hacía cada vez más necesario en los poderes públicos, y restringiéndose a las más altas esferas de la vida jurídica8. Esta función consultiva jurídica debe en efecto ser distinguida claramente de las innumerables instancias consultivas instituidas tanto en el ámbito del gobierno central como local. Hoy más que nunca se consolida la existencia de una función consultiva jurídica central en el Estado. Ella se opone por la generalidad de su vocación, que se aplica al momento jurídico de expresión de todas las políticas públicas, a los diversos órganos de consulta técnica cuya naturaleza de peritaje limita su intervención a sectores de actividad más o menos estrechamente definidos. Ella se impone por la complejidad creciente del derecho y de las relaciones entre los órdenes jurídicos. Esta distinción no disminuye por la importancia que conviene reconocer igualmente a los diferentes procedimientos e instancias consultivas que conllevan dictámenes técnicos o permiten tener en cuenta las expectativas o los comportamientos anticipados de los destinatarios de las normas. Al contrario, ha sido destacada en numerosos trabajos sobre el mejoramiento de la calidad reglamentaria o la “reforma de la reglamentación” (regulatory reform), que estudia la simplificación, la medida del impacto, económico principalmente, de la reglamentación en todas sus formas9. Las dos funciones no son concurrentes ni contradictorias. La cuestión de la calidad reglamentaria así comprendida se plantea solamente si la seguridad jurídica está garantizada, y la función consultiva jurídica central debe tener en cuenta los objetivos de calidad reglamentaria. Pero la función consultiva jurídica central tiene un sentido específico: implica la organización por parte del Estado de una capacidad de dictamen jurídico independiente para asistir al gobierno (y más ampliamente al poder ejecutivo) en su misión de elaboración de proyectos de ley y de reglamentos, preservando la autonomía de la capacidad de decisión política, lo que significa que no debe depender de ningún organismo o grupo exterior. 5 Ibid. pp. 305-306. 6 Ibid. pp. 16 y 19. 7 G. Dauphin. L’administration consultative centrale. Paris, Marcel Rivière, 1932, p. 7. 8 Ibid. p. 70. 9 Ver para Francia: D. Mandelkern. Rapport du Groupe de travail interministériel sur la qualité de la réglementation. Paris. La Documentation Francaise, Ministère de la Fonction Publique, 2002, 139 páginas. En el plan internacional, ver: The 0ECD Report on Regulatory Reform, 1997, al cual ha seguido un programa continuo de intercambios y la publicación de informes por países. 271
  • 27. Misión de Cooperación Técnica en Colombia del Consejo de Estado Francés Definida así, la función consultiva jurídica central existe bajo las formas más diversas sin duda en la mayoría de países, pero las instituciones que se pueden identificar que asumen esta función no responden todas a todos los elementos de la definición, y tanto la amplitud como la calidad de la función son extremadamente variables. Los consejos de Estado, que reúnen las funciones consultiva y contenciosa, son ciertamente la forma más típica de ejercicio de la función consultiva jurídica central. Pero se puede observar que esta puede atribuirse a instituciones muy diversas, según la historia administrativa de cada país. Se puede así distinguir cinco categorías: 1. La función consultiva asociada a la función contenciosa en el Consejo de Estado; 2. La función consultiva atribuida a un órgano colegiado situado cerca del gobierno; 3. La función consultiva asociada al poder de acción en justicia del poder ejecutivo; 4. La función consultiva integrada a la organización ministerial; 5. El instituto especializado vinculado al gobierno y encargado de aportarle el dictamen jurídico que necesita. Salvo en la segunda categoría, se verá que la función consultiva jurídica central nunca ha sido la única función de las instituciones que la ejercen, y estas han dejado de tener la exclusividad de la función de consejo jurídico del gobierno, el cual puede siempre acudir a los consejos de su elección. I. La función consultiva asociada a la función contenciosa en el Consejo de Estado Este tipo de institución tiene su origen en el antiguo consejo del rey que existió en diversos países europeos, y que encontró su forma clásica con el Consejo de Estado napoleónico. El sistema llamado de la “justicia retenida” fue durante mucho tiempo una característica distintiva de su función contenciosa. Esta última ha desaparecido hoy de los países que tienen un Consejo de Estado, el último país en abandonarla ha sido Holanda. Hoy, el Consejo de Estado es un tipo de institución al cual la ley le garantiza la independencia y la de sus miembros ante el poder ejecutivo, y cumple a la vez las funciones consultivas para el gobierno, y la función de jurisdicción administrativa suprema. Es este estatuto de independencia el que ha permitido, en los Estados modernos, mantener en el seno de la misma institución la función consultiva y la función de juzgar a la administración. Los miembros del Consejo de Estado no siempre son magistrados, pero la independencia que les confiere su estatuto los aproxima a tal calidad. Los países europeos que tienen un Consejo de Estado en el sentido que se acaba de definir son hoy en día, además de Francia: Bélgica, Grecia, Italia, Holanda. Pero se encuentra también este tipo de institución en Turquía y Líbano, en Egipto y, desde 1998, en Argelia. Ciertos países de África tienen también un Consejo de Estado: 272
  • 28. Memorias • Seminario Franco-Colombiano Reforma a la Jurisdicción Contencioso Administrativa Burkina Fasso, Gabón, Senegal, la República Centroafricana. Esta vía ha sido seguida igualmente por Tailandia desde 1979, antes de ser abandonada en 1999 con la creación de una corte administrativa suprema. En América Latina, Colombia es el único país que ha adoptado un Consejo de Estado en el sentido que se ha definido10. En todos estos países, son la jurisdiccionalización de la función contenciosa y la independencia adquirida frente al poder ejecutivo las que han asegurado a la vez la perennidad y la ejemplaridad del Consejo de Estado. La cuestión de la compatibilidad de la reunión en el seno de la misma institución de la función contenciosa y de la función de consejo del poder ejecutivo con el derecho de cualquier persona a que su causa sea atendida por un tribunal independiente e imparcial, garantizado por el artículo 6º de la Convención Europea de Salvaguardia de los Derechos del Hombre y las Libertades Fundamentales, ha sido sometida en varias ocasiones a la Corte Europea de Derechos del Hombre. En el fallo Procola del 28 de septiembre de 1995 a propósito del Consejo de Estado luxemburgués11, la Corte declaró en relación con una sentencia de este que en ella no se había respetado el mencionado derecho, por cuanto algunos miembros de la sección de juzgamiento habían hecho parte de la sección consultiva que había emitido un concepto para el gobierno sobre los decretos reglamentarios que habían sido recurridos. Sin embargo, en dos sentencias posteriores, la Corte Europea de Derechos del Hombre ha precisado que esta jurisprudencia no cuestionaba el modelo institucional del Consejo de Estado como tal y las condiciones en las cuales su compatibilidad con el artículo 6º de la Convención podía estar asegurada. La sentencia Kleyn de 2003 se refirió al Consejo de Estado de Holanda12 y la sentencia Sacilor –Lormines de 2006 al Consejo de Estado francés13. Con base en estas dos sentencias, la jurisprudencia de la Corte europea de Derechos del Hombre puede resumirse de la siguiente manera. La Corte admite la compatibilidad del modelo institucional del Consejo de Estado con el artículo 6º de la Convención, pero bajo ciertas condiciones: 1. que la independencia institucional de los miembros del Consejo de Estado esté asegurada, lo que reconoce explícitamente como establecido en el caso del Consejo de Estado francés; 2. que el ejercicio sucesivo de una función consultiva y de una función jurisdiccional no conlleve en la primera una implicación de naturaleza a atentar contra la imparcialidad del interesado en la formación del juicio; 3. que la consulta y el juicio no se refieran al “mismo asunto” o a “cuestiones análogas”; 4. que el concepto haya tratado la cuestión de manera “general y abstracta”, si existe una relación entre las cuestiones jurídicas14. 10 G. Marcou. “Une cour administrative suprême: particularité francaise ou modèle en expansion?”. Pouvoirs No. 123, 2007, pp. 133-154. 11 CEDH 28 sept. 1995. “Procola c/ Luxembourg”, série A, No. 326, RFDA 1996, no. 4, p. 795, comm. J.-L. Autin / F. Sudre. “La dualité fonctionnelle du Conseil d’Etat en question devant la Cour européenne des droits de l’homme”, p. 777. 12 CEDH G de Ch. 6 mai 2003. “Kleyn c/Pays-Bas”, RTDH 2004, p. 365, note González. 13 CEDH 9 novembre 2006. “Soc. Sacilor-Lormines c/France”, RFDA 2007, no. 2, p. 352, comm. J.-L. Autin / F. Sudre. “L’impartialité structurelle du Conseil d’Etat hors de cause?”, p. 342. 14 Cf G. Marcou, op. cit. Pero para un comentarista holandés, B. W. N. de Waard, aun en ese caso, el concepto puede tener un carácter prejudicial: nota bajo la sentencia Sacilor-Lormines Administratiefrechtelijke Beslissingen. 2007, A. . 34, 22 septembre, pp. 1484-1487. 273