2. 33-519-A-10 Conduite à tenir devant une masse focale hépatique Radiodiagnostic
"A1 "A2
"B1 "B2
"C1 "C2
Le recours à la TDM ou à l’IRM est exceptionnel, et se conçoit
uniquement en cas de kystes atypiques ou symptomatiques
(supérieurs à 8 cm de diamètre le plus souvent). La TDM montre
une hypodensité non rehaussée par le produit de contraste, et l’IRM
révèle une lésion en hyposignal sur les séquences pondérées T1 et
en hypersignal franc sur les séquences pondérées T2.
"B3
"C3
La ponction échoguidée évacuatrice peut également avoir une
indication en cas de kyste douloureux ou compressif, permettant un
soulagement le plus souvent temporaire, et affirmant la
responsabilité du kyste. En revanche, elle est souvent décevante en
termes de diagnostic différentiel car paucicellulaire et peu
informative.
1 Imagerie par résonance magnétique. Coexistence chez une même patiente de trois
types de lésions : hyperplasie nodulaire, hémangiomes et kystes biliaires.
Hyperplasie nodulaire focale du segment IV, pratiquement iso-intense en T2 et
en T1, homogène. Rehaussement précoce, intense et fugace après injection
de chélate de gadolinium. La zone centrale (têtes de flèche courtes noires) est en
discret hypersignal T2, et se rehausse tardivement après injection de chélate
de gadolinium.
Hémangiomes des segments III et VI, hyperintenses en T2, hypo-intenses en T1,
se rehaussant lentement, en motte, de façon centripète, après injection de chélate
de gadolinium. La zone centrale de l’hémangiome du segment VI (têtes de flèche
"A3
longues noires) est plus hyperintense en T2 et ne se rehausse pas. Elle correspond à une
zone de nécrose.
Kyste biliaire du segment VII, hyperintense en T2, hypo-intense en T1 (petites étoiles
blanches), bien limité, non rehaussé par le chélate de gadolinium.
A. Coupes horizontales de 7 mm d’épaisseur en SSFSE pondéré T2 (TE = 90 ms).
B. Coupes horizontales de 7 mm d’épaisseur en écho de gradient pondéré T1, sans
injection de chélate de gadolinium.
C. Coupes horizontales de 7 mmd’épaisseur en écho de gradient pondéré T1, après
injection de chélate de gadolinium avec des acquisitions réalisées au temps arté-riel.
2
3. Radiodiagnostic Conduite à tenir devant une masse focale hépatique 33-519-A-10
"D1 "D2
"E1 "E2
Atypie échographique
et /ou anomalies clinicobiologiques
et /ou contexte épidémiologique
¦ Autres images kystiques
Ces diagnostics différentiels sont nombreux mais essentiellement
théoriques, en raison des paramètres diagnostiques cliniques et
biologiques fréquemment associés [42] :
"D3
"E3
– Les kystes parasitaires, et essentiellement le kyste hydatique : en
pratique, seul le kyste débutant ou les formes solides peuvent poser
un problème diagnostique [42]. En cas de doute, la TDM et, dans une
moindre mesure l’IRM, peuvent permettre de préciser le diagnostic.
La sérologie hydatique contribue également au diagnostic. La
ponction, réalisée avec précaution et sous certaines conditions
(aiguille fine, passage dans le parenchyme hépatique adjacent au
kyste, traitement antiparasitaire prophylactique) a également été
proposée [23] bien qu’elle soit de mauvaise réputation, du fait du
risque classique de choc anaphylactique, et d’essaimage péritonéal.
– Les abcès et les hématomes sont caractérisés par une paroi plus
épaisse, des contours polylobés moins bien définis, et leur aspect
évolue rapidement avec le temps.
– Les métastases nécrotiques pseudokystiques (neuroendocriniennes,
ovariennes) sont rares et se caractérisent par un aspect de lésions
moins transsonores, avec des parois plus épaisses et la coexistence
de lésions d’aspects différents. La réalisation d’acquisitions TDM ou
IRM tardives (10 minutes) permet de corriger un certain nombre de
diagnostics de tumeurs présumées kystiques ou nécrotiques en
tumeurs fibreuses [34].
– Le cystadénome biliaire est une tumeur rare de la femme après
30 ans [40], volontiers volumineuse, unique, cloisonnée, à paroi
épaisse avec un rehaussement pariétal après injection de produit de
contraste en TDM.
– Les kystes ciliés bronchogéniques sont des lésions congénitales
rares [10].
– Les ectasies des canaux biliaires dans la maladie de Caroli ont un
aspect moins arrondi que le kyste biliaire simple, et sont
1 (suite) Imagerie par résonance magnétique. Coexistence chez une même patiente
de trois types de lésions : hyperplasie nodulaire, hémangiomes et kystes biliaires.
D. Coupes horizontales de 7 mmd’épaisseur en écho de gradient pondéré T1, après
injection de chélate de gadolinium avec des acquisitions réalisées au temps portal.
E. Coupes horizontales de 7 mm d’épaisseur en écho de gradient pondéré T1,
après injection de chélate de gadolinium avec des acquisitions réalisées au temps
tardif.
Kyste parasitaire : surtout kyste hydatique,
rarement kyste amibien
Cystadénome biliaire
Métastase pseudokystique : rare
Stop
TDM
Kyste biliaire
Caractéristique
(arrondi, parois fines et régulières,
anéchogène)
Transsonore
2 Arbre décisionnel pour une lésion transsonore. TDM : tomodensitométrie.
3
4. 33-519-A-10 Conduite à tenir devant une masse focale hépatique Radiodiagnostic
Aspect
adénome ou HNF
IRM +
échodoppler
classiquement parallèles aux axes vasculaires hépatiques. Le
caractère communicant de ces ectasies avec les voies biliaires est
affirmé par la cholangiographie rétrograde endoscopique, par la bili-
TDM, ou mieux par l’IRM après injection de produit parama-gnétique
(gadolinium ou manganèse) à spécificité hépatique et
excrétion biliaire.
En synthèse, dans la pratique quotidienne, seul le diagnostic
différentiel entre un kyste biliaire compliqué et un
cystadénocarcinome peut poser problème. La TDM ou l’IRM doivent
rechercher une prise de contraste d’un bourgeon tissulaire
intrakystique ou d’une portion épaissie de la paroi, en faveur d’un
cystadénocarcinome. L’association d’au moins un kyste biliaire
typique est en revanche très en faveur d’un kyste biliaire
compliqué [65].
IMAGES ISO- OU HYPERÉCHOGÈNES (fig 3)
¦ Hémangiome (ou angiome)
Il s’agit de la lésion hyperéchogène la plus fréquente (prévalence
dans la population générale : 4 %), survenant surtout chez la femme
(comme les autres masses bénignes) et le plus souvent unique (90 %
des cas). L’aspect caractéristique, rencontré dans 80 % des cas [18] est
une image hyperéchogène, homogène, arrondie, avec un faible
renforcement postérieur, mesurant entre 1 et 4 cm. La localisation
préférentielle est la partie postérieure sous-capsulaire du lobe droit.
Lorsque la lésion est plus volumineuse, l’angiome est souvent
remanié, partiellement fibrosé, et l’image échographique est moins
caractéristique, avec un aspect plus hétérogène et des contours
irréguliers, nécessitant de poursuivre les explorations diagnostiques
par une TDM, ou mieux, une IRM.
En TDM, l’hémangiome apparaît hypodense avant injection de
produit de contraste. La cinétique de prise de contraste permet de
faire le diagnostic, avec une valeur prédictive positive de 96 % selon
certains auteurs [46]. La prise de contraste se fait en « mottes » par la
périphérie, limitée à quelques spots au temps artériel, avec un
remplissage progressif de la lésion de manière centripète. Une
acquisition tardive met en évidence un remplissage complet de la
lésion dans un délai variant de 1 à 15 minutes suivant la taille de la
lésion. L’intensité de la prise de contraste des mottes périphériques
évolue de façon parallèle à celle de l’aorte.
Les aspects atypiques sont essentiellement en rapport avec la taille
de la lésion : lorsque l’hémangiome est volumineux (> 4 cm), le
remplissage peut être incomplet, du fait de l’existence d’une zone
de nécrose ou de fibrose volontiers centrale. Les hémangiomes de
petite taille posent eux aussi problème, car le remplissage de la
lésion est très rapide, et la cinétique de prise de contraste classique
décrite précédemment ne peut plus être observée. Un problème
particulier est posé par les hémangiomes hypervasculaires qui
représentent, selon certains auteurs, 16 % des hémangiomes [63]. Ces
lésions sont souvent de petite taille, et se caractérisent par un
rehaussement intense et homogène dès le temps artériel. L’intensité
de leur prise de contraste évolue de façon parallèle à celle de l’aorte.
Le diagnostic différentiel avec de petits carcinomes hépatocellulaires
(CHC) ou des métastases hypervasculaires est alors très difficile [28].
Un élément important du diagnostic d’hémangiome est la
persistance de la prise de contraste sur un temps tardif de
l’angioscanner et son évolution parallèle à celle de l’aorte [63].
Après injection de chélate de gadolinium, l’IRM montre la même
cinétique de rehaussement des lésions qu’en TDM. En pondération
T2, l’hémangiome apparaît en hypersignal franc, homogène. Cet
hypersignal ne décroît que très peu, comparativement au signal
tissulaire environnant lorsque la pondération T2 augmente [38]. La
combinaison des séquences en pondération T2, et les acquisitions
dynamiques en pondération T1 après injection de produit
paramagnétique, permettent d’obtenir une sensibilité et une
spécificité de l’IRM allant de 90 à 99 % suivant les études, pour le
diagnostic d’hémangiome [17, 38, 56].
En synthèse, le diagnostic d’hémangiome est possible dans 80 % des
cas par une simple échographie. Si une confirmation est nécessaire,
le choix entre la TDM et l’IRM est possible. Pour les nodules
mesurant plus de 2 cm, les deux techniques peuvent être réalisées
de façon équivalente, la cinétique de prise de contraste permettant
le diagnostic dans les deux cas. En revanche, pour un nodule de
plus petite taille, la cinétique de prise de contraste pouvant être prise
en défaut, l’IRM semble être préférable. Le diagnostic est alors
affirmé sur l’aspect très hyperintense en T2. De même, en cas
d’angiome hypervasculaire, le caractère hyperintense en T2 de la
lésion est un argument diagnostique important.
Le recours à la ponction-biopsie percutanée sous contrôle
échographique ou TDM est possible, lorsque l’imagerie ne peut être
concluante et lorsqu’un doute diagnostique persiste. La notion de
contre-indication à la ponction biopsie de l’hémangiome est obsolète.
L’utilisation d’aiguilles fines (18 à 20 G) associée à l’interposition
d’une languette de parenchyme hépatique sain entre la capsule
hépatique et la lésion, est toutefois indispensable [29]. La sensibilité
de la technique est supérieure à 90 %, et sa spécificité est
pratiquement de 100 %.
¦ Adénome et hyperplasie nodulaire focale
Hyperplasie nodulaire focale
L’hyperplasie nodulaire focale (HNF) est la tumeur hépatocytaire
bénigne la plus fréquente. En raison des progrès des moyens
diagnostiques radiologiques, on estime que la prévalence de cette
lésion pourrait être d’environ 1 % [13]. L’association à un
hémangiome hépatique est classique (20 % des cas) [41]
vraisemblablement parce qu’il s’agit des deux tumeurs bénignes les
plus fréquentes. L’association échographie doppler et IRM permet
le diagnostic dans environ 70 à 80 % des cas.
En échographie, l’HNF apparaît le plus souvent comme une lésion
isoéchogène (45 à 54 % des cas), moins souvent hypoéchogène (30 à
41 %) [13, 60]. L’échostructure est homogène. L’étude doppler peut
découvrir une vascularisation radiaire avec, au sein de la zone
fibreuse centrale, un signal de type artériel à faible résistance [24, 60].
L’IRM montre une lésion homogène, hypervasculaire. En
pondération T2, la lésion apparaît iso- ou très discrètement
hyperintense. La zone centrale, lorsqu’elle est visible, est en
hypersignal par rapport au reste de la lésion. En pondération T1, la
lésion apparaît le plus souvent iso-intense au parenchyme adjacent,
homogène, avec une zone stellaire centrale qui, dans 80 % des cas,
est visible spontanément, plus hypo-intense que le reste de la
lésion [37].
Après injection de produit paramagnétique en bolus, un
rehaussement intense est visible, homogène, précoce et fugace, et ce
Stop
Autres aspects
Autres
aspects
Doute Ponction
HNF
Biopsie chirurgicale et résection si adénome
Aspect hémangiome
Hyperéchogène
Image
caractéristique
Atypie
TDM
IRM
ouTDM
3 Arbre décisionnel pour une lésion hyperéchogène. HNF : hyperplasie nodulaire
focale ; TDM : tomodensitométrie ; IRM : imagerie par résonance magnétique.
4
5. Radiodiagnostic Conduite à tenir devant une masse focale hépatique 33-519-A-10
dans 96 % des cas [37, 38, 64]. À ce temps précoce, la zone centrale
demeure hypo-intense et ne se rehausse que tardivement (1 à
3 minutes) dans 78 % des cas [13]. L’IRM est actuellement la méthode
la plus performante pour le diagnostic d’HNF, avec une sensibilité
de 70 % et une spécificité de 98 % [13].
La TDM montre une lésion volontiers isodense, dont la cinétique
vasculaire est superposable à celle observée en IRM.
Diagnostic différentiel hyperplasie nodulaire focale-adénome
L’adénome est une tumeur beaucoup plus rare que l’HNF, avec une
prévalence estimée à 1/10 000. Cette lésion est rencontrée
essentiellement chez la femme (80 % des cas), âgée de 25 à 35 ans,
observant fréquemment une contraception orale par
oestroprogestatifs depuis plusieurs années [22]. Une étude récente a
montré une stabilisation, voire une diminution de la fréquence des
adénomes [13], qui pourrait avoir un lien avec la généralisation des
oestroprogestatifs microdosés.
À l’inverse de l’HNF, il n’existe pas de signe formel d’adénome en
imagerie. En échographie, la lésion peut être iso-, hyper- ou
hypoéchogène. Elle est souvent peu différente de l’échostructure du
parenchyme sain, mais hétérogène, avec quelquefois une zone
centrale hypoéchogène, correspondant à de la nécrose. L’étude en
doppler couleur montre inconstamment une vascularisation plutôt
de type veineux monophasique [25].
En IRM, l’hétérogénéité de la lésion est très fréquente (92 % des
cas) [48] et, sur les images pondérées en T1, la lésion est le plus
souvent hyperintense (59 à 77 % des cas) [3, 48]. Un anneau
périlésionnel, le plus souvent hypo-intense en pondération T1, peut
être vu dans environ un tiers des cas. Il correspond à une
pseudocapsule constituée d’une fibrose et d’une compression du
parenchyme adjacent [3]. Une zone centrale peut être visible, mais
elle n’est pas rehaussée par le produit paramagnétique lors des
acquisitions tardives. Cette zone centrale correspond le plus
fréquemment à une nécrose intratumorale. En pondération T2, la
lésion est le plus souvent hyperintense (74 % des cas). Cette
hyperintensité en pondération T1 et T2 correspond à un contenu en
graisse élevé de la lésion [3, 48].
Si l’imagerie ne peut trancher entre adénome et HNF, le recours à la
biopsie est nécessaire. Mais l’étude anatomopathologique peut être
difficile, du fait de la petitesse de l’échantillon rendant difficile
l’étude de l’architecture de la tumeur, et de l’existence de formes
atypiques [45]. Certaines équipes préfèrent avoir recours à la biopsie
chirurgicale [12], mais cette attitude ne règle pas le problème des
formes atypiques qui peuvent rester de diagnostic difficile, même
sur une macrobiopsie.
Diagnostic différentiel entre adénome et carcinome hépatocellulaire
bien différencié
Aucun critère radiologique ne permet de différencier ces deux
tumeurs. En présence d’une cirrhose, le diagnostic en faveur du
CHC ne pose pas de difficulté particulière. En revanche, en présence
d’un foie non cirrhotique, le diagnostic peut être plus délicat,
d’autant plus que le CHC est alors souvent histologiquement bien
différencié et d’évolution lente.
La discussion est en fait très théorique, puisque la suspicion de l’une
ou l’autre de ces deux lésions implique théoriquement la résection
chirurgicale. Toutefois, dans certains cas, une attitude attentiste peut
être prise face à un adénome. En de tels cas, la biopsie hépatique est
indispensable.
Synthèse [55]
La différenciation adénome-HNF est indispensable pour deux
raisons principales :
– premièrement, le risque de complication de l’adénome, dominé
par le risque hémorragique (environ 30 % des cas) et plus rarement
de cancérisation [19], justifie l’exérèse chirurgicale ;
– deuxièmement, la prise de contraceptifs oraux microdosés et la
grossesse ne sont pas contre-indiquées en cas d’HNF [39], alors
qu’elles doivent encore être proscrites en cas d’adénome.
Le couple échographie doppler-IRM assure le diagnostic d’HNF
dans 70 à 80 % des cas. Le diagnostic sur biopsie est difficile, aussi
en cas de doute, la résection chirurgicale doit être proposée.
En cas de polyadénomatose, définie par au moins dix adénomes
hépatiques [14], l’abstention thérapeutique est la règle, en raison de la
rareté des formes compliquées (hémorragie, cancer). Les résections
chirurgicales sont essentiellement indiquées en cas de lésions
volumineuses, plus ou moins compressives [26]. Par la suite, une
surveillance morphologique des lésions restantes est indiquée. Dans
le cas d’HNF multiples [45], le risque majeur est de méconnaître
l’association fortuite d’une HNF et d’une tumeur maligne.
¦ Stéatose hépatique focale [6] et angiomyolipome
En échographie, il s’agit d’une plage hyperéchogène, homogène, de
forme irrégulière, plus ou moins bien limitée, sans effet de masse.
Le contexte clinique est fréquemment évocateur (obésité, diabète,
corticothérapie, dénutrition, alimentation parentérale exclusive,
malabsorption, éthylisme) [51]. En TDM, la lésion apparaît
spontanément hypodense (inférieure à 30 UH [unités Hounsfield]).
Après injection de produit de contraste, le gradient de densité n’est
pas modifié, et il n’est pas visualisé d’anomalies de vascularisation
artérielle ou portale.
Inversement, un îlot de foie sain peut se rencontrer au sein d’une
stéatose diffuse, souvent localisée en avant du hile du fait de la
vascularisation principalement systémique de cette région.
Dans les rares cas où un doute diagnostique persiste, l’IRM,
notamment avec les pondérations T1, les séquences avec
suppression de graisse, ou mieux les séquences in phase-out phase,
peut être utile pour caractériser cette lésion [18]. Le recours à la
ponction-biopsie hépatique (PBH) radioguidée est rarement
nécessaire.
La stéatose focale ne doit pas être confondue avec de vraies tumeurs
à contingent graisseux type adénome, métastase, CHC [2], ou avec
un angiomyolipome [30, 59]. L’angiomyolipome est une tumeur
hépatique rare, bénigne, associant des contingents vasculaire,
musculaire et graisseux, ce dernier étant responsable du caractère
hyperéchogène de la lésion. Le diagnostic radiologique (TDM, IRM)
peut être évoqué chez un patient asymptomatique, avec une image
à contenu graisseux et hypervascularisée. Mais il s’agit le plus
souvent du diagnostic différentiel d’une des tumeurs à contingent
graisseux citées précédemment. Le diagnostic est alors précisé par
la biopsie.
¦ Métastases (fig 4)
La découverte de ces lésions se fait exceptionnellement en l’absence
de signes d’appel cliniques ou biologiques associés. Leur aspect
échographique est variable, mais la présence d’un halo
hypoéchogène périlésionnel est un argument diagnostique [36]. Ces
lésions ne sont hyperéchogènes que dans 20 % des cas, et
correspondent alors volontiers à des métastases de cancer
colorectal [8].
L’aspect des métastases est très variable en TDM et IRM en fonction
de la taille des lésions, du degré de nécrose tumorale et de la
vascularisation intratumorale. La prise de contraste n’est intense que
dans les lésions hypervascularisées d’origine classiquement rénale,
thyroïdienne, endocrine ou carcinoïde.
En revanche la TDM ou l’IRM, au mieux avec agent paramagnétique
à spécificité hépatique (gadolinium ou manganèse), permettent de
réaliser le bilan d’extension locale (nombre et localisation des
métastases). Toutefois, le nombre de métastases est très
fréquemment sous-estimé, quelle que soit la technique utilisée [66].
En l’absence de mise en évidence de la tumeur principale ou en cas
de doute, l’origine des métastases est précisée par la biopsie
radioguidée.
¦ Carcinome hépatocellulaire
Sa découverte fortuite est rare, puisqu’il survient dans 85 % des cas
dans un contexte de cirrhose [17]. Nous avons vu son possible
5
6. 33-519-A-10 Conduite à tenir devant une masse focale hépatique Radiodiagnostic
Hypoéchogène
diagnostic différentiel avec l’adénome lorsqu’il survient sur foie sain.
Dans le cas majoritaire où il existe une cirrhose sous-jacente, la
reconnaissance de celle-ci, associée à la présence d’un nodule, doit
immédiatement orienter vers le diagnostic de CHC.
L’aspect hyperéchogène n’est présent que dans environ 25 % des cas.
Cet aspect étant d’ailleurs plus fréquent dans le cas rare de
carcinome fibrolamellaire [53] survenant sur foie sain. L’aspect le plus
fréquent est celui d’un nodule hypoéchogène et hétérogène. Le taux
d’alphafoetoprotéine est souvent normal ou faiblement augmenté en
cas de petit CHC. Le diagnostic est affirmé par la biopsie guidée par
échographie ou TDM, mais dont la réalisation est actuellement
discutée en raison des risques de dissémination tumorale sur le trajet
de ponction, dès lors qu’un geste chirurgical peut être envisagé. La
TDM permet de préciser l’importance du syndrome tumoral et la
perméabilité du système portal.
Le bilan d’extension et le diagnostic différentiel seront envisagés
plus loin.
IMAGES HYPOÉCHOGÈNES (fig 5)
La découverte d’un nodule hypoéchogène asymptomatique, en
l’absence de contexte clinique ou biologique particulier, est une
éventualité rare. La première hypothèse à éliminer est celle d’une
métastase. Il faut toutefois se rappeler que l’HNF se présente comme
un nodule hypoéchogène dans 30 % des cas, et l’adénome dans 40 %
des cas. Toutefois, leur distinction d’une métastase est, comme nous
l’avons vu, assez aisée en TDM dans la plupart des cas. Le CHC est
lui aussi fréquemment hypoéchogène, mais la découverte de signes
échographiques de cirrhose permet de l’évoquer aisément.
Le cholangiocarcinome est également une tumeur se présentant
volontiers comme une lésion hypoéchogène, fréquemment hilaire [21].
Les acquisitions tardives (10 minutes) après injection de produit de
contraste, en TDM comme en IRM, sont d’un grand intérêt pour
leur diagnostic en confirmant leur caractère fibreux et en précisant
leur extension.
Les hypothèses diagnostiques envisagées en cas de découverte d’un
nodule hypoéchogène vont donc rapidement conduire à la
réalisation d’une TDM, voire d’une ponction-biopsie hépatique.
Situations de dépistage
SURVEILLANCE D’UNE HÉPATOPATHIE CHRONIQUE
OU D’UNE CIRRHOSE [27]
Il s’agit du dépistage du CHC, dont les modalités sont toujours
controversées. Actuellement, il est généralement proposé, chez les
malades cirrhotiques âgés de plus de 55 ans, une échographie
hépatique tous les 3 à 6 mois, associée à un dosage d’alpha-foetoprotéine.
Toutefois, ces modalités pourraient être adaptées en
fonction de :
– l’étiologie de la cirrhose, le risque de survenue d’un CHC étant
plus fréquent en cas de cirrhose postvirale que d’origine alcoolique ;
– l’âge du patient, le risque de survenue d’un CHC augmentant
avec l’âge ;
– l’échostructure du parenchyme hépatique, d’une part parce que
l’hétérogénéité du parenchyme, si elle est très importante, rend la
détection difficile ; d’autre part parce qu’un aspect nodulaire
globalement hypoéchogène du parenchyme est un facteur de risque
supplémentaire de la survenue d’un CHC [33].
La découverte d’une image focale hépatique chez un malade
cirrhotique doit être considérée, jusqu’à preuve du contraire, comme
un CHC. En effet, la découverte d’une tumeur bénigne ou d’une
métastase d’un cancer extrahépatique asymptomatique, est un
événement rare au cours de la cirrhose [7].
¦ Diagnostic différentiel entre carcinome
hépatocellulaire, nodules cirrhotiques et nodules
dysplasiques [31]
En échographie, le nodule cirrhotique peut être iso- ou
hypoéchogène avec un liseré hyperéchogène, le nodule dysplasique
est rarement visible, quelquefois hypoéchogène. Ni l’un ni l’autre
n’est le siège d’un signal doppler.
En TDM, le nodule cirrhotique peut être spontanément hyperdense
(présence de fer). Les nodules cirrhotiques, comme les nodules
dysplasiques, ne sont pas hypervasculaires. L’IRM semble être le
moyen le plus performant pour la différenciation de ces nodules.
Classiquement, le nodule cirrhotique est hypo-intense en T1 et en
T2 (présence de fer), alors que le nodule dysplasique est
hyperintense en T1 et plutôt iso-intense en T2 [44].
En échographie, le CHC peut avoir deux aspect principaux :
hypoéchogène, sans liseré périphérique ou, plus évocateur,
hyperéchogène, hétérogène, entouré d’un halo hypoéchogène.
L’existence d’un vaisseau artériel afférent en doppler est un
argument supplémentaire en faveur d’un CHC [58]. En TDM, le CHC
est hypervasculaire dès le temps artériel dans 83 à 88 % des cas [57],
mais des rehaussements hétérogènes au temps portal peuvent aussi
se rencontrer. En IRM, le CHC est aussi rapidement rehaussé après
injection de chélate de gadolinium [49], mais surtout il apparaît
hyperintense en pondération T2 [38].
Toutefois, il faut retenir qu’aucun de ces arguments n’a de valeur
formelle, notamment en cas de CHC de petite taille (< 15 mm), et
que plusieurs lésions de même type peuvent coexister jusque dans
le même nodule [16, 54].
4 Imagerie par résonance magnétique avec injection de substance paramagnétique
à spécificité hépatique (mangafodipir), dans le bilan préthérapeutique de métastases
hépatiques d’un cancer colique. Coupe horizontale de 7 mm d’épaisseur en écho
de gradient pondéré T1. Le foie non tumoral est rehaussé par le chélate de manganèse
permettant de découvrir de multiples petites lésions métastatiques en hyposignal, qui
n’étaient pas visible sur les autres séquences.
Adénome ou HNF
TDM
Autres
Ponction
5 Arbre décisionnel pour
une lésion hypoéchogène.
TDM : tomodensitométrie ;
HNF : hyperplasie nodu-laire
focale.
6
7. Radiodiagnostic Conduite à tenir devant une masse focale hépatique 33-519-A-10
Synthèse
On retiendra donc comme argument en faveur du CHC :
– la présence d’une cirrhose ;
– la taille de la lésion supérieure à 2 cm ;
– l’hypervascularisation de la lésion au temps artériel de la TDM ;
– le signal hyperintense en T2 en IRM ;
– l’existence d’une thrombose portale associée.
¦ Conduite à tenir devant un nodule suspect
de carciniome hépatocellulaire
Deux situations fréquentes peuvent se présenter :
– le diagnostic de CHC est certain : masse focale avec un taux
d’alphafoetoprotéine supérieur à 250 ng/mL et/ou argument
d’imagerie très évocateur. Les examens radiologiques
complémentaires permettent de préciser les possibilités
thérapeutiques. En pratique, il est rare dans cette situation qu’une
indication chirurgicale soit envisageable (moins de 5 % des cas), de
par l’extension tumorale ou le terrain. La PBH peut être discutée et
n’est pas indispensable ;
– il existe un doute diagnostique : en cas d’inopérabilité du malade
(contre-indications générales), la PBH est indiquée, et un traitement
local (alcoolisation, radiofréquence) peut être discuté après
réalisation du bilan d’extension. Si le malade paraît opérable, le bilan
d’extension est réalisé. En cas d’absence de contre-indication
opératoire, le moment de la confirmation histologique est discuté,
soit avant l’intervention, soit au cours du temps opératoire sous
repérage échographique.
¦ Choix des examens pour le bilan d’extension
Il ne semble pas exister de différence majeure en termes de
performance, entre la TDM spiralée et l’IRM réalisée dans des
conditions techniques adéquates.
L’artériographie lipiodolée suivie d’un scanner 3 semaines plus tard,
serait d’après certains auteurs très performante [15]. Mais, du fait de
son caractère invasif, elle ne se justifie que dans les centres réalisant
des chimioembolisations lipiodolées, où le bilan d’extension et la
première cure de traitement sont alors couplés.
CONTEXTE NÉOPLASIQUE
Il s’agit d’un malade ayant un cancer primitif connu. La PBH sera
proposée si les résultats histopathologiques peuvent influencer la
prise en charge thérapeutique, et en cas de doute diagnostique
(hémangiome, stéatose focale…).
Ponction-biopsie hépatique
Deux types de prélèvements sont possibles : la ponction à l’aiguille
fine permettant un examen cytologique, et la microbiopsie autorisant
un examen histologique.
La première de ces techniques a un taux de complication moindre,
avec notamment un risque d’essaimage d’environ 1/10 000 [62], alors
qu’il est d’environ 2 % avec la microbiopsie [9]. Mais la ponction
aspiration ne permet pas l’analyse de la structure du tissu biopsié,
et nécessite une équipe anatomopathologique entraînée à la
cytologie. En pratique, le choix de la technique va donc dépendre :
– du centre : existe-t-il des cytologistes confirmés ? la décision
thérapeutique nécessite-t-elle toujours une histologie ?
– de la question posée. S’il s’agit de connaître la nature bénigne ou
maligne d’une lésion, la cytologie est tout à fait indiquée. Si en
revanche on veut connaître la nature d’une lésion bénigne ou la
nature ou le degré de différenciation d’une lésion maligne, la
microbiopsie est nécessaire. De plus, les techniques
immunohistochimiques pour caractériser certaines tumeurs
nécessitent un matériel tissulaire important qui implique l’utilisation
de la microbiopsie.
Enfin, quelle que soit la technique de prélèvement utilisée,
l’obtention d’un prélèvement tumoral et extratumoral est toujours
souhaitable [35].
Le problème de l’essaimage lors de la ponction, se pose en pratique
uniquement lorsqu’une intervention chirurgicale et surtout une
transplantation hépatique sont envisagées. Nous avons vu que
même si le risque est faible, il n’est pas négligeable, surtout en cas
de microbiopsie. À noter toutefois que ces récidives sur le trajet de
ponction, traitées chirurgicalement, ne semblent pas affecter le taux
de survie des patients [9].
En cas de lésion manifestement maligne, il paraît donc logique de
ne pas proposer de ponction-biopsie percutanée si un geste
chirurgical est envisagé. Si un traitement local est envisagé, la
confirmation histologique, si elle est nécessaire, pourra être obtenue
dans le même temps.
Prise en charge thérapeutique
et surveillance des tumeurs bénignes
KYSTES
Le kyste biliaire asymptomatique ne nécessite aucune surveillance,
ni traitement spécifique [5]. En cas de kyste symptomatique, le
traitement repose sur la résection du dôme saillant, éventuellement
sous coeliochirurgie [43]. L’injection d’alcool absolu après aspiration
du contenu du kyste est proposée en cas de kystes volumineux,
multiples ou récidivants [61].
HÉMANGIOMES
L’abstention thérapeutique est la règle en cas d’hémangiome
asymptomatique. En cas d’angiome volumineux, la surveillance
morphologique par échographie, 6 à 12 mois après le diagnostic
initial, a pour but de s’assurer de la stabilité du volume de la
lésion [11]. La résection chirurgicale est proposée en cas de lésion
symptomatique ou devant une augmentation rapide du volume, ce
qui ne concerne en pratique que les rares hémangiomes dits géants
(> 4 cm) [1]. Les hémangiomes géants proches de la surface du foie
ou ayant un développement extrahépatique ont un risque de
rupture, surtout après corticothérapie [20].
ADÉNOME HÉPATIQUE ET HYPERPLASIE
NODULAIRE FOCALE
– En cas de diagnostic de certitude après réalisation au minimum
d’un examen échodoppler et d’une IRM, l’abstention thérapeutique
est conseillée pour l’HNF.
– En cas d’adénome de moins de 3 cm, une attitude attentiste avec
arrêt des traitements hormonaux et surveillance morphologique
peut être éventuellement envisagée dans un premier temps. En cas
de lésion plus volumineuse, et en raison du risque hémorragique et
de dégénérescence, la résection chirurgicale est à préconiser. Après
résection, une surveillance par échographie est conseillée, au rythme
d’un examen tous les 1 à 2 ans pendant 5 à 10 ans. Par ailleurs, les
traitements oestroprogestatifs et androgènes sont contre-indiqués.
– En cas de doute diagnostique, la résection est la règle [4]
RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES
En cas d’abstention thérapeutique, il est nécessaire de rassurer les
malades sur le faible risque de complication. Il est toutefois
nécessaire d’éviter les situations à risques (sports de combat,
traumatisme abdominal…).
CONDUITE À TENIR À L’ÉGARD DES OESTROGÈNES
En cas d’adénome, il est nécessaire d’arrêter tout traitement
hormonal et d’éviter une grossesse, en l’absence de résection
tumorale. En effet, le rôle des oestrogènes sur la croissance tumorale
7
8. 33-519-A-10 Conduite à tenir devant une masse focale hépatique Radiodiagnostic
et sur le risque hémorragique est bien démontré, autant lors d’une
contraception orale, qu’au cours de la grossesse, notamment lors du
troisième trimestre [32].
En revanche, les effets sur la croissance des hémangiomes restent
hypothétiques et controversés [20]. Toutefois, certains auteurs
conseillent d’éviter les oestrogènes en cas d’hémangiome géant ou
symptomatique. En revanche, la grossesse n’est pas contre-indiquée
[20, 50].
En cas d’HNF, la prise de contraceptifs oraux et la grossesse ne sont
pas contre-indiquées [39].
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