2. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
1 2 3
1 A. Sténose valvulaire : valve en « dôme » et dilatation post-sténotique
Dans cette forme, les valves sont généralement continentes. Au fil des
années, elles perdent de leur souplesse, s’épaississent et peuvent, après
l’âge de 15 ans, se calcifier. L’insuffisance aortique devient alors
fréquente.
Il existe des formes associées à une hypoplasie de l’anneau aortique qui
complique évidemment la thérapeutique.
Sténoses sous-valvulaires
La forme la plus fréquente est la forme membraneuse : une membrane
semi-lunaire située à moins de 1 cm de l’orifice valvulaire s’insère à la
fois sur la paroi libre du ventricule gauche et sur la partie inférieure de la
grande valve mitrale. Les valves aortiques sont souvent le siège d’une
lésion de « jet » à leur face inférieure qui peut, à la longue, entraîner
l’apparition d’une fuite.
Les autres formes sont moins fréquentes : sténoses fibreuses constituées
d’un bourrelet fibreux plus épais que la membrane et plus étendu en
hauteur [5] ; sténoses fibromusculaires constituées de masses polypoïdes
irrégulières ; sténoses en « tunnel » constituées d’un chenal fibreux
rigide et étroit [30] ; tissu mitral « accessoire » venant obstruer la chambre
de chasse.
À noter enfin que ces formes sous-valvulaires sont fréquemment
associées (25 % des cas) à d’autres malformations cardiaques
(communication interventriculaire, canal artériel, coarctation, sténose
aortique...).
Sténoses supravalvulaires
L’obstacle siège 1 à 2 cmau-dessus du sinus de Valsalva et peut revêtir
plusieurs aspects [62] :
– sténoses en « sablier » : il existe un bourrelet fibreux qui diminue le
calibre extérieur de l’aorte et plus encore son diamètre interne ;
– sténoses en diaphragme membraneux, plus rares ;
– hypoplasie diffuse de l’aorte ascendante réduisant globalement le
calibre du vaisseau au-delà des sinus de Valsalva dilatés. Cette forme
s’associe fréquemment à des sténoses de l’origine des gros vaisseaux de
la base et à un syndrome deWilliams et Beuren.
Dans ces sténoses sus-valvulaires, les coronaires situées en amont de la
sténose sont soumises à un régime de pressions élevées et sont souvent
dilatées et tortueuses.
Physiopathologie
La présence d’un obstacle à l’éjection ventriculaire gauche détermine
des réactions d’adaptation du ventricule gauche sous forme d’une
hypertrophie le plus souvent concentrique des parois. Le volume
télédiastolique se réduit du fait de l’hypertrophie pariétale. La
contractilité augmente.
À l’effort, la pression systolique s’élève de façon parfois considérable
dans le ventricule gauche. La fréquence cardiaque s’élève
proportionnellement davantage pour un même niveau d’effort [40].
La conséquence est l’apparition d’une ischémie myocardique, lorsque
les besoins en oxygène du myocarde dépassent les apports. Ceux-ci
dépendent de la perfusion coronaire qui se fait essentiellement en
diastole. Elle est diminuée par la tachycardie, l’augmentation de la
pression intramurale, l’hypertrophie des parois.
Cette ischémie myocardique d’effort peut être à l’origine de douleurs
thoraciques, voire de syncopes ou de mort subite.
Dans les formes très serrées du nouveau-né ou du nourrisson, ces
réactions d’adaptation peuvent ne pas se produire. Très rapidement
apparaît une dysfonction ventriculaire gauche avec diminution de la
contractilité, absence d’hypertrophie réactionnelle des parois et
dilatation de la cavité. Le patient présente des signes d’insuffisance
ventriculaire gauche. En l’absence de levée rapide de l’obstacle, le
pronostic est très sombre [47].
de l’aorte ascendante.
B. 1. Valve tricuspide ; 2. bicuspidie ; 3. valve unicuspide.
C. Sténose sous-valvulaire de type membraneux.
D. Sténose sous-valvulaire de type fibromusculaire.
E. Sténose sous-valvulaire étendue, en « tunnel », avec
hypoplasie de l’anneau.
F. Sténose supravalvulaire étendue avec hypoplasie de
A l’aorte ascendante.
B
C
D E F
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3. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
Signes cliniques
En dehors des formes sévères du nourrisson, la plupart des sténoses
aortiques sont très bien tolérées au cours de la première et de la seconde
enfances. Dans les formes serrées, on observe parfois fatigabilité
d’effort anormale, dyspnée, syncope ou lipothymie.
L’examen clinique est dominé par le souffle systolique d’éjection
souvent intense et frémissant, maximal à la base et irradiant vers les
vaisseaux du cou. On peut retrouver également un souffle
protodiastolique de fuite. Dans les formes valvulaires, le souffle est
précédé d’un click protosystolique.
Explorations complémentaires
La radiographie thoracique standard s’avère souvent de peu de secours.
L’hypertrophie ventriculaire gauche, de type concentrique, est souvent
peu apparente. La dilatation de l’aorte ascendante s’observe presque
uniquement dans les formes valvulaires.
L’échocardiographie (fig 2), couplée au doppler pulsé, continu et à
codage couleur, est l’examen clef : il fait le diagnostic positif et
topographique de l’obstacle ; il apprécie le retentissement de la sténose
sur le ventricule gauche et sa sévérité. Il dépiste les anomalies
associées [3].
Dans les formes valvulaires, les sigmoïdes aortiques s’ouvrent de façon
incomplète, réalisant un dôme dans la lumière aortique en systole. Elles
sont souvent épaissies. On pourra, sur une incidence petit axe, essayer
de préciser l’anatomie de l’appareil valvulaire : aspect bicommissural
avec une seule ligne de fermeture le plus souvent excentrée dans la
bicuspidie. Le doppler à codage couleur montre l’accélération du flux
au niveau de la valve.
Dans les sténoses sous-valvulaires, il existe une image d’addition dans
la voie de chasse du ventricule gauche [52]. La forme la plus fréquente,
membraneuse, réalise un écho linéaire implanté au niveau de la face
gauche du septum interventriculaire, quelques millimètres sous les
sigmoïdes. La sténose fibreuse réalise un bourrelet plus dense et plus
épais. La sténose en « tunnel » se caractérise par un rétrécissement
allongé dans la chambre de chasse du ventricule gauche.
2 Échocardiographie de différentes variétés
en incidence latérosternale gauche grand axe.
vg : ventricule gauche ; ao : aorte ; og :
oreillette gauche.
A. Sténose valvulaire sévère sur bicuspi-die
chez un nourrisson ; les valves (flè-ches)
sont épaisses et bicuspides.
B. Sténose sous-valvulaire membra-neuse
; image d’addition linéaire (flèche)
implantée sur la face gauche du septum
interventriculaire.
C. Sténose sous-valvulaire fibromuscu-laire
; l’obstacle (flèches) est plus étendu
dans la voie de chasse, en rapport avec
une hypertrophie musculaire et des pla-ges
de fibrose.
D. Sténose supravalvulaire ; rétrécisse-ment
de la lumière aortique au-dessus
des sinus de Valsalva (flèches).
Dans la forme supravalvulaire, les sinus deValsalva sont souvent dilatés,
les valves normales, et il existe une diminution de calibre de l’aorte
ascendante plus ou moins étendue jusqu’à l’origine des troncs
supra-aortiques.
Le retentissement et la gravité de la sténose sont appréciés sur
l’importance de l’hypertrophie du ventricule gauche, l’augmentation
des indices de contractilité.
La détermination du gradient sera effectuée par le doppler à codage
couleur continu. Le site de mesure varie avec le siège de la sténose :
suprasternal ou latérosternal droit dans les formes valvulaires ou
supravalvulaires ; apical dans les formes sous-valvulaires. On mesure
ainsi de manière fiable et précise le gradient maximal et le gradient
moyen.
Le cathétérisme et l’angiocardiographie ne sont indiqués que si
l’échocardiographie fournit des renseignements insuffisamment précis
ou si l’on envisage un cathétérisme interventionnel. Il est parfois
indispensable dans les formes supravalvulaires pour apprécier
exactement l’étendue des lésions sur la crosse aortique et sur les
vaisseaux de la base (fig 3).
Traitements
Les méthodes et les indications thérapeutiques diffèrent totalement selon
le siège de l’obstacle.
Dans les sténoses valvulaires, il faut s’efforcer à tout prix de conserver
la valve. Le remplacement valvulaire aortique doit être évité chez
l’enfant car il impose un traitement anticoagulant et surtout, si le
remplacement est effectué précocement, un changement de prothèse
avec la croissance. Les bioprothèses sont définitivement abandonnées
en raison de leur détérioration très rapide à cet âge.
La levée de l’obstacle nécessite une commissurotomie. Elle peut être
faite chirurgicalement sous circulation extracorporelle par une courte
aortotomie. Ce geste est effectué sous contrôle de la vue, de façon
minutieuse et prudente, pour éviter l’apparition d’une fuite aortique. Les
résultats sont très généralement excellents et la mortalité très faible [16].
L’autre méthode est la valvuloplastie percutanée au ballonnet. Elle a
pour avantage de dispenser d’une thoracotomie et d’une circulation
A
B
C
D
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4. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
extracorporelle, mais effectue une commissurotomie « à l’aveugle » qui
fait courir un risque élevé de déchirure de la valve aortique, génératrice
de fuite souvent importante [64].
À l’heure actuelle, on a tendance à réserver la valvuloplastie percutanée
aux formes mal tolérées du nourrisson ou du nouveau-né où la mortalité
de la chirurgie est élevée [47]. Les formes de l’enfant sont confiées de
préférence aux chirurgiens.
La commissurotomie doit être considérée comme un traitement
palliatif : une « resténose » ou une fuite se constitue plus ou moins
rapidement dans les mois ou les années qui suivent le geste initial, et
obligent généralement à recourir au remplacement valvulaire.
D’autres gestes chirurgicaux associés sont parfois nécessaires : plastie
d’élargissement de l’anneau selon la technique de Konno [26] ; en cas de
lésion très sévère de la valve, réalisation de l’intervention de Ross, c’est-à-
dire autotransplantation de la valve pulmonaire en position aortique et
mise en place d’une homogreffe en position pulmonaire.
Les indications de ces traitements sont formelles en cas de sténose
symptomatique à l’effort, de dysfonction ventriculaire gauche chez le
nouveau-né et le nourrisson.
Les formes asymptomatiques mais serrées (gradient moyen égal ou
supérieur à 50 mmHg, apparition de signes d’ischémie myocardique à
l’épreuve d’effort) nécessitent la levée systématique de l’obstacle
valvulaire pour prévenir tout accident, notamment mort subite à l’effort.
Les sténoses sous-valvulaires. Ces formes ne sont accessibles qu’à la
chirurgie. L’intervention consiste à réséquer l’obstacle sous-valvulaire
par aortotomie sous circulation extracorporelle [5]. Ce geste est
relativement aisé dans les formes localisées de type membraneux ou
fibreux. Il est difficile, voire quasi impossible, dans les formes étendues
en « tunnel ». Il est parfois nécessaire de réaliser une chirurgie palliative
telle l’implantation d’un tube de dérivation apicoaortique.
Les indications de la chirurgie sont plus larges que dans les formes
valvulaires. On craint en effet, dans cette malformation, la survenue
progressive d’une détérioration des valves aortiques avec apparition
d’une fuite qui complique bien sûr le traitement. Pour beaucoup
d’auteurs, une sténose sous-valvulaire aortique membraneuse doit être
réséquée dès qu’elle réalise un gradient moyen égal ou supérieur à
30 mmHg. Les résultats sont bons et la mortalité très faible.
Les sténoses supravalvulaires relèvent également de la chirurgie sous
circulation extracorporelle : résection du diaphragme ; aortoplastie
d’élargissement de l’aorte ascendante ; correction d’éventuelles
sténoses ostiales coronaires [25].
Coarctation de l’aorte
La coarctation de l’aorte (ou sténose isthmique) se définit comme un
obstacle anormal organique sur l’aorte situé à l’union de la crosse
aortique et de l’aorte descendante, au voisinage du point d’attache du
ligament artériel. Il existe également des coarctations d’autres sièges,
notamment au niveau abdominal, qui sont beaucoup plus rares et qui ne
seront pas traitées ici.
La coarctation est une malformation fréquente : 5 à 9 % des
cardiopathies congénitales.
Elle s’observe avec une particulière fréquence dans le syndrome de
Turner (25 % des cas).
Elle est fréquemment associée à d’autres malformations : défauts
septaux interventriculaires, malformation mitrale ou valvulaire aortique,
cardiopathies complexes.
C’est une malformation grave. Elle doit être dépistée et traitée le plus
précocement possible chez l’enfant pour prévenir des complications
liées à l’hypertension artérielle. On peut mettre en jeu le pronostic vital
du nourrisson. Les progrès de la réanimation et de la chirurgie néonatale
ont toutefois beaucoup amélioré le pronostic.
Anatomie pathologique et morphogenèse (fig 4)
La coarctation réalise le plus souvent un rétrécissement circulaire au-dessous
de l’origine de l’artère sous-clavière gauche. À l’intérieur, il
existe un diaphragme fibreux percé d’un orifice généralement excentré,
parfois complètement imperforé. En aval de la sténose, l’aorte est
généralement dilatée avec une lésion de jet. En amont, une hypoplasie
tubulaire de l’aorte horizontale plus ou moins étendue peut être associée.
La morphogenèse de la coarctation n’est pas bien connue. Elle ferait
intervenir une hypoplasie de la région isthmique constituée pendant la
période anténatale, à la suite d’une réduction du débit aortique.
L’hypoplasie de la crosse aortique est en effet fréquemment constatée
dans les coarctations néonatales associées à une large communication
interventriculaire ou une sténose sous-aortique. Lors de
l’échocardiographie anténatale, c’est souvent une disproportion
cardiaque avec petit coeur gauche qui en permet parfois le dépistage.
En période postnatale, la constriction du canal artériel sera responsable
de la constitution de la sténose isthmique liée à la présence de tissu
ductal dans la paroi aortique [44].
Physiopathologie
La coarctation réalise une interruption plus ou moins importante du flux
sanguin dans la partie inférieure du corps. On observe une hypertension
artérielle au niveau des membres supérieurs et de la région céphalique
contrastant avec une hypotension au niveau des membres inférieurs.
Cette particularité hémodynamique constitue l’élément essentiel du
diagnostic, l’asymétrie de pulsatilité.
L’importance du retentissement hémodynamique va être très différente
selon la sévérité de l’obstacle, sa rapidité de constitution, l’âge du patient
et l’existence de malformations associées.
Dans la forme de l’enfant, le ventricule gauche s’adapte à la surcharge
de pression par hypertrophie de ses parois et augmentation de sa
contractilité. Une circulation collatérale se développe entre les artères
périscapulaires et mammaires, épigastriques et intercostales.
Chez le nourrisson, l’obstacle est de constitution plus rapide et souvent
de gravité plus grande. Ces conséquences sont aggravées, d’une part par
la fréquence de l’association à une hypoplasie aortique, d’autre part de
malformations associées (shunt gauche/droite, anomalie mitrale ou
valvulaire aortique). Les capacités d’adaptation du ventricule gauche se
trouvent rapidement débordées et il apparaît une insuffisance cardiaque
souvent aiguë et gravissime.
Les formes de l’adulte sont devenues rarissimes. Elles se caractérisent
par l’importance de la circulation collatérale, des lésions
d’athérosclérose précoces au niveau des parois aortiques sus-stricturales,
le développement d’anévrismes artériels en amont et en aval
de la sténose ou parfois à distance, notamment au niveau du polygone
deWillis.
Formes de l’enfant
Clinique
Dans ces formes, la bonne tolérance fonctionnelle est la règle.
L’anomalie est souvent découverte fortuitement devant un souffle, une
hypertension artérielle, ou une asymétrie de pulsatilité : les fémorales
ne sont pas ou peu battantes alors que les humérales sont amples. Le
souffle est discret, maximal dans l’espace interscapulaire, systolique ou
continu. La tension artérielle est élevée aux deux membres supérieurs,
d’autant plus que le patient est plus âgé et la coarctation plus serrée.
3 Aortographie chez un enfant atteint d’un syndrome de Williams et Beuren. La
sténose est située à 1 cm au-dessus des valves. L’aorte descendante est hypopla-sique
; les coronaires sont dilatées.
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5. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
Explorations complémentaires
L’examen radiologique du thorax fournit des signes de valeur mais
inconstants : anomalie du pédicule vasculaire réalisant une image en
« cheminée » ou en « double bouton » aortique, dont la partie supérieure
correspond à la zone sus-sténotique et la partie inférieure à la dilatation
sous-sténotique de l’aorte (fig 5). Les encoches costales témoignant du
développement anormal des artères intercostales sont tardives. Elles se
recherchent sur le bord inférieur du tiers moyen de l’arc postérieur d’une
ou plusieurs côtes, le plus souvent de la quatrième à la huitième.
L’hypertrophie ventriculaire gauche n’est pas constante. On note parfois
une dilatation de l’aorte ascendante.
L’échographie bidimensionnelle (fig 6) permet de voir la coarctation de
l’aorte par voie suprasternale et de préciser les anomalies adjacentes de
la crosse aortique [7]. Le doppler montre une accélération du flux dans
l’aorte descendante, de chronologie systolodiastolique lorsque la
coarctation est serrée et permet de calculer le gradient de pression au
travers la coarctation en appliquant l’équation de Bernouilli simplifiée.
Toutefois, certaines divergences sont observées avec les résultats de
l’hémodynamique. On apprécie également le retentissement sur le
ventricule gauche (importance de l’hypertrophie réactionnelle, des
anomalies associées notamment au niveau de la valve aortique).
Il n’est toutefois pas toujours possible, surtout chez l’adolescent et
l’adulte, d’obtenir des images de qualité satisfaisante. On est contraints
de recourir à d’autres techniques, notamment l’imagerie par résonance
magnétique (IRM) (fig 7). Les images morphologiques obtenues par la
technique d’« écho de spin » peuvent décrire parfaitement la crosse
aortique à condition que le plan de coupe passe bien par la coarctation et
les segments adjacents, ce qui est parfois difficile en cas de forte coudure
de la région isthmique [56].
Le cathétérisme et l’angiocardiographie conservent un certain intérêt
dans le bilan préopératoire. L’examen peut être conduit par voie droite
en réalisant une angiographie pulmonaire, ou par cathétérisme gauche
5 B, 9 ans. Vue thoracique de face : image en trois de chiffre du pédicule. Ventricule
gauche augmenté de volume. Encoches costales du bord inférieur des arcs postérieurs
de la quatrième et de la sixième côtes à droite, de la huitième à gauche.
par voie artérielle rétrograde. On parvient généralement à franchir la
sténose. On peut alors mesurer le gradient de part et d’autre de
1
2
3
4 Morphogenèse de la coarctation : du tissu ductal, situé dans la
paroi aortique, subirait une constriction contemporaine de la ferme-ture
du canal responsable de la sténose de l’isthme aortique.
A B 1. Canal artériel ; 2. artère pulmonaire ; 3. tissu ductal.
6 Échocardiographie doppler de coarcta-tions
isthmiques de l’aorte, réalisée par voie
suprasternale.
A. Forme de l’enfant : crosse aortique
de taille normale ; sténose en « sablier »
au niveau de l’isthme (flèche). TABC :
tronc artériel brachiocéphalique ; CPG :
carotide primitive gauche ; SCG : sous-clavière
gauche.
B. Doppler continu : flux systolodiastoli-que.
« Double enveloppe » traduisant
les vélocités sanguines sus- et sous-A
B sténotiques.
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6. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
l’obstacle, qui n’a d’ailleurs qu’une valeur relative car dépendant
largement du développement de la circulation collatérale.
L’angiocardiographie effectuée dans l’aorte ascendante permet une
étude très fine des lésions de l’isthme aortique, de l’importance de la
circulation collatérale, et d’éventuelles anomalies associées (naissance
anormale d’une artère sous-clavière au-dessous de la coarctation)
(fig 8).
Traitement
Toute coarctation hémodynamiquement significative doit être opérée.
On met ainsi le patient à l’abri des complications, notamment de
l’hypertension artérielle. Une intervention précoce idéalement entre
6 mois et 2 ans diminuerait le risque d’hypertension artérielle résiduelle.
La technique la plus habituelle est celle décrite par Crafoord : résection
de la coarctation et suture terminoterminale des deux tranches de section
aortique. La mortalité et la morbidité de cette intervention sont très
faibles. Ces bons résultats chez l’enfant sont la règle.
L’angioplastie percutanée des coarctations isthmiques « natives » reste
encore très controversée. Cette technique fait en effet courir le risque de
constitution d’un anévrisme, voire d’une rupture de la paroi aortique [18].
Formes du nourrisson
On décrit sous ce terme les coarctations précocement mal tolérées du
nouveau-né et du nourrisson. La gravité de ces formes tient à la sévérité
de la sténose, à l’association fréquente à une hypoplasie de l’arche
aortique, aux mauvaises capacités d’adaptation ventriculaire, ainsi qu’à
la fréquence des malformations associées.
Clinique
C’est presque toujours devant un tableau d’insuffisance cardiaque grave
que se révèle la maladie. Il s’agit d’une défaillance globale, avec
détresse respiratoire, hépatomégalie, insuffisance rénale, qui s’aggrave
rapidement pouvant mener au collapsus et à la mort.
Le diagnostic n’est pas toujours facile : le gradient tensionnel peut
manquer ; la palpation des pouls est difficile et trompeuse chez un
nourrisson en insuffisance cardiaque. Cependant, l’asymétrie de
pulsatilité est presque toujours présente.
Explorations
La radiographie thoracique révèle une cardiomégalie globale, une
hypervascularisation pulmonaire associée à des signes d’oedème.
L’échocardiographie doppler est essentielle pour confirmer le
diagnostic. Elle montre la coarctation de l’aorte, détermine sa position
par rapport au canal artériel et aux artères sous-clavières, précise le degré
d’hypoplasie tubulaire segmentaire de la portion horizontale. Le doppler
évalue la perméabilité du canal artériel et permet d’en surveiller
l’évolution sous l’effet des prostaglandines. Elle renseigne sur le degré
d’altération de la fonction ventriculaire gauche et surtout l’existence des
malformations associées.
Le cathétérisme et l’angiocardiographie ne sont pas dénués de risque sur
un tel terrain. Ils sont exceptionnellement pratiqués.
Traitement
La première étape du traitement est médicale : correction des troubles
métaboliques, traitement diurétique et tonicardiaque, ventilation
assistée. La perfusion de prostaglandines E a transformé le pronostic des
formes néonatales. Elles agissent en provoquant la réouverture du canal
artériel mais probablement aussi, dans certains cas, au niveau du tissu
ductal migrant dans la paroi aortique.
L’amélioration obtenue permet de confier l’enfant au chirurgien dans de
meilleures conditions. L’intervention consiste à supprimer le canal
artériel et à réséquer la coarctation. Elle doit être effectuée de façon à
supprimer tout le tissu ductal pour éliminer les risques de récidive [18].
En cas d’hypoplasie de la région isthmique, on peut utiliser un lambeau
7 Coarctation aortique en
IRM (coupe oblique selon l’axe
longitudinal de l’aorte descen-dante)
: la sténose isthmique est
nettement visible entre, en haut,
la partie postérieure de la crosse
de l’aorte avec l’artère carotide
primitive puis l’origine de l’artère
sous-clavière gauche et, en bas,
l’aorte descendante.
8 A. B, 9 ans. Coarctation localisée,
serrée. Dilatation de l’aorte ascen-dante
et des troncs supra-aortiques.
B. M, 6 ans. Coarctation longue.
Dilatation de l’aorte ascendante et
des troncs supra-aortiques, impor-
A B tante circulation collatérale.
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7. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
A B C
d’artère sous-clavière gauche sectionné et basculé de façon à élargir
l’isthme (intervention de Waldausen). L’hypoplasie de la portion
horizontale peut justifier une plastie d’élargissement [27, 46].
La mortalité de cette chirurgie n’est pas négligeable en raison de la
fragilité extrême de ces nourrissons, surtout dans les premières
semaines. Elle dépend largement des malformations associées. Elle est
en moyenne de 15 à 20 %, mais inférieure à 10 % pour les formes
simples.
À distance, la resténose représente la complication principale,
notamment chez les enfants opérés avant 3 mois [63]. Sa fréquence est
actuellement en diminution, estimée aux alentours de 15 %. Le
traitement de choix en est l’angioplastie par voie percutanée, effectuée
si possible 2 à 3 mois après l’intervention initiale. Ses bons résultats sont
constants et ses risques très faibles [67].
Interruption de l’arche aortique
Malformation rare (moins de 1 % des cardiopathies congénitales) mais
importante à connaître car réalisant une des situations les plus critiques
de la cardiologie néonatale, l’interruption de l’arc aortique est
caractérisée par une interruption complète de la lumière aortique entre
l’aorte ascendante et l’aorte descendante.
Dans l’immense majorité des cas elle s’associe à une communication
interventriculaire, ce qui l’apparente à une forme extrême du syndrome
de coarctation, mais celle-ci est particulière car elle réalise un obstacle
sous-aortique par malalignement du septum infundibulaire sous l’aorte.
La perfusion de l’aorte sous-isthmique est totalement dépendante du
canal artériel, et l’obstacle sous-aortique aggrave l’hypertension
artérielle pulmonaire et complique le traitement.
Elle est fréquemment associée à un syndrome de Di George.
Anatomie pathologique (fig 9)
Les interruptions de l’arc aortique sont classées en fonction du siège de
l’interruption [22] : type A où l’interruption siège après l’artère sous-clavière
gauche ; type B où elle siège après la carotide gauche ; type C
(la plus rare) où elle siège après la carotide droite.
Chacun de ces types est subdivisé en deux groupes selon que l’artère
sous-clavière droite naît normalement (groupe 1) du tronc artériel
brachiocéphalique, ou naît de l’aorte thoracique descendante et a ainsi
un trajet rétro-oesophagien (groupe 2).
Les anomalies associées sont surtout la communication
interventriculaire et l’obstacle sous-aortique qui lui est généralement
associé [15]. En effet, en dehors de quelques cas exceptionnels où le
septum interventriculaire est intact, l’interruption de l’arc aortique
s’accompagne d’une communication interventriculaire antérieure
périmembraneuse accompagnée d’un déplacement du septum
infundibulaire vers la gauche responsable d’une obstruction
sous-aortique.
L’interruption de l’arc aortique peut être associée à une fenêtre
aortopulmonaire. Plus rarement, elle est associée à des malformations
complexes avec malposition des gros vaisseaux, ventricule unique ou
canal atrioventriculaire, mais toujours avec un obstacle sous-aortique.
Physiopathologie
C’est une malformation qui détermine une hypertension artérielle
pulmonaire sévère et une obstruction aortique dont la tolérance dépend
essentiellement de la perméabilité du canal artériel.
Lorsque le canal artériel commence à se fermer, une hypotension
apparaît dans l’aorte descendante avec hypoperfusion rénale. Tant que
la perfusion de l’aorte descendante est suffisante pour oxygéner les
territoires sous-isthmiques, il n’y a pas d’acidose métabolique, mais une
défaillance cardiaque apparaît avec disparition des pouls aux membres
inférieurs et parfois aux membres supérieurs. Cette situation ne dure en
général que quelques heures ou quelques jours.
Lorsque le canal artériel est fermé, l’effondrement de la pression dans
l’aorte descendante provoquera une acidose métabolique avec altération
de la fonction myocardique et vasoconstriction artériolaire pulmonaire.
À ce stade survient une déchéance pluriviscérale souvent fatale si le
canal artériel n’est pas redilaté en urgence par une perfusion de
prostaglandines E1.
Clinique
L’examen clinique oriente le diagnostic sur la constatation, chez un
nouveau-né, d’une défaillance cardiaque sans cyanose avec une
asymétrie des pouls [13]. Celle-ci dépend de la forme anatomique et de la
perméabilité du canal artériel. En cas de fermeture totale ou complète
du canal artériel, les pouls ne sont pas perçus aux membres inférieurs,
mais ils ne le sont pas non plus aux membres supérieurs, si les artères
sous-clavières naissent de l’aorte descendante (type B 2). Dans tous les
cas, la carotide droite est palpable, ce qui différencie la clinique de
l’interruption de l’arc aortique de celle de l’hypoplasie du coeur gauche.
Explorations complémentaires
La radiographie pulmonaire est peu spécifique, avec une cardiomégalie
modérée et une hypervascularisation pulmonaire. Elle est évocatrice de
l’interruption de l’arc aortique s’il n’y a pas d’ombre thymique, ce qui
oriente vers le syndrome de Di George.
L’examen ultrasonique est aujourd’hui essentiel et, dans la majorité des
cas, suffisant pour permettre le diagnostic précis de l’interruption de
l’arc aortique [53].
L’échocardiographie permet de faire le bilan anatomique des lésions et
le doppler apprécie le sens des flux et les gradients de pression à travers
la sténose sous-aortique, la communication interventriculaire et le canal
artériel. Sur les coupes longitudinales précordiales ou sous-xiphoïdiennes,
on voit très bien la communication interventriculaire
haute et surtout le malalignement du septum conal sous l’aorte. Au-delà
9 Interruption de l’arche aortique : la malformation est presque toujours associée à
une communication interventriculaire (flèche) avec malalignement du septum conal
responsable d’un obstacle sous-valvulaire aortique. Selon le siège de l’interruption, on
distingue les types A, B et C.
page 7
8. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
A B oreillette gauche.
du rétrécissement, l’aorte est toujours hypoplasique avec un petit anneau
aortique, des valves souvent dysplasiques et bicuspides, et une aorte
ascendante très rectiligne, n’amorçant aucune courbure, et donnant
naissance à une seule carotide (type C) ou se bifurquant en deux
carotides.
Il faut alors rechercher l’artère sous-clavière gauche qui peut naître de
l’aorte ascendante au pied de la carotide gauche (type A) ou de l’aorte
descendante à la jonction avec le canal artériel (type B) (fig 10).
L’origine de l’artère sous-clavière droite est plus délicate à retrouver en
échographie. Il faut aussi préciser la taille du ventricule gauche, l’aspect
de la valve mitrale et de son appareil sous-valvulaire. On vérifie
également l’absence de communication interventriculaire du septum
trabéculé au doppler couleur. Enfin, on peut apprécier le calibre du canal
artériel, et au doppler l’absence de gradient entre celui-ci et l’aorte
descendante en recueillant le signal doppler pulsé dans l’aorte
descendante. Dans l’artère pulmonaire un flux diastolique provenant du
canal artériel témoigne du reflux du sang à partir de l’aorte descendante
vers le lit vasculaire pulmonaire à résistances plus basses. La mesure de
sa vélocité fournit des indications sur la pression artérielle pulmonaire.
Le cathétérisme et l’angiographie ne sont pratiqués qu’en cas de doute
après l’échocardiographie doppler et chez un nouveau-né remis en état
hémodynamique stable par une perfusion de prostaglandine E1. Le
cathétérisme renseigne sur l’hémodynamique et mesure avec précision
les gradients à travers la zone sous-aortique et le canal artériel. Il chiffre
mieux le débit pulmonaire. L’angiographie identifie parfaitement le type
anatomique de l’interruption de l’arc aortique en injectant directement
dans l’aorte ascendante atteinte à partir du ventricule droit par la
communication interventriculaire [21]. L’angiographie du ventricule
gauche atteint par le foramen ovale confirme que la communication
interventriculaire est bien unique avec un rétrécissement sous-aortique.
Traitement
Il doit être commencé en urgence, avant même la confirmation
échocardiographique du diagnostic [20]. Ce traitement comprend avant
tout la perfusion de prostaglandine E1 pour rétablir la perfusion sous-isthmique
en dilatant le canal artériel. Une vasodilatation complète du
canal artériel est quasi constante, car une fermeture organique n’a
pratiquement jamais le temps de s’installer. Le reste du traitement est
symptomatique et comprend la ventilation artificielle en pression
positive constante, des diurétiques pour combattre l’oedème pulmonaire,
la correction de l’acidose métabolique et le maintien d’une oxygénation
tissulaire optimale par transfusion globulaire. Le but est d’amener le
nouveau-né à la chirurgie dans les meilleures conditions possibles, en
sachant qu’une attente trop prolongée s’accompagnera d’une surcharge
pulmonaire due à la baisse des résistances vasculaires pulmonaires [37].
Depuis quelques années, de nombreuses équipes chirurgicales ont opté
pour une intervention curatrice d’emblée avec réparation de la crosse sous
circulation extracorporelle, fermeture de la communication
interventriculaire et levée de l’obstacle sous-aortique par résection du
septum conal mal aligné [49, 65]. Cette chirurgie agressive semble donner de
bons résultats à court et moyen termes. Elle ne peut toutefois être
envisagée que si le ventricule gauche et l’anneau aortique sont de taille
suffisante pour qu’une perfusion systémique adéquate soit assurée après
la plastie aortique et la fermeture de la communication interventriculaire.
10 Échocardiographie d’un
nouveau-né atteint d’une interrup-tion
de l’aorte de type B.
A. Voie suprasternale : aorte
(AO) ascendante rectiligne ;
pas de crosse identifiable ;
bifurcation en carotide primi-tive
droite (CPD) et gauche
(CPG).
B. Incidence latérosternale
grand axe : large communi-cation
interventriculaire (flè-che)
avec déplacement vers
la gauche du septum conal à
l’origine d’une sténose sous-aortique.
AO : aorte ; VG :
ventricule gauche ; OG :
Quel que soit le résultat, il faudra surveiller à long terme la croissance
du coeur de ces enfants et, en particulier, vérifier l’état de la valve
aortique souvent bicuspide et la zone sous-aortique où peut se
développer une membrane ou un tunnel fibromusculaire. Enfin, comme
dans toutes les plasties aortiques néonatales, une sténose résiduelle peut
se produire et être responsable d’une hypertension artérielle aux
membres supérieurs nécessitant une dilatation au ballonnet ou une
réintervention.
Obstacles au remplissage ventriculaire
Les malformations qui font obstacle au remplissage ventriculaire gauche
appartiennent à deux groupes d’origine embryologique différente.
Certaines résultent d’un sous-développement plus ou moins sévère
d’une ou plusieurs structures qui forment le coeur gauche (valve
aortique, ventricule gauche, valve mitrale) : ce sont les diverses variétés
d’hypoplasie du coeur gauche et de rétrécissement mitral congénital.
D’autres sont la conséquence d’un vice fondamental dans le
développement du système veineux pulmonaire lui-même : retour
veineux pulmonaire anormal total, coeur triatrial, sténose des veines
pulmonaires.
L’organe cible d’une obstruction au remplissage ventriculaire n’est pas
le coeur mais le poumon. C’est par des altérations plus ou moins graves
de l’hémodynamique pulmonaire qu’on explique les signes cliniques,
les images radiologiques et l’évolution spontanée de ces malformations.
L’hypertension veineuse pulmonaire est la première conséquence de
l’obstacle et se transmet vite au lit capillaire, d’où engorgement
interstitiel et lymphatique pulmonaire. Quand les possibilités de
drainage accessoire par les lymphatiques et les veines bronchiques sont
débordées, l’oedème pulmonaire apparaît. Celui-ci est à l’origine des
troubles fonctionnels : dyspnée, tachypnée, toux évoluant parfois en
poussée d’infection bronchopulmonaire et gênant la nutrition. Au
maximum, ce peut-être un tableau d’asphyxie par oedème aigu du
poumon.
Dans cette pathologie, la radiographie du thorax fournit des
informations très précieuses. Il existe presque toujours des aspects plus
ou moins prononcés de stases veineuse et lymphatique pulmonaires :
dilatation des veines pulmonaires sous forme d’opacités linéaires,
tortueuses, horizontales, coupant la direction des artères ; ligne de
Kerley de type B ; opacités scissurales ; ligne bordante pleurale ; aspect
en « verre dépoli » respectant base et sommet dans les cas les plus
graves.
L’hypertension gagne rapidement le système artériel pulmonaire,
retentit exclusivement sur le coeur droit et, si l’évolution naturelle est
assez longue, une maladie vasculaire pulmonaire obstructive se
constitue. À l’examen clinique, cette hypertension pulmonaire va se
traduire par l’éclat du deuxième bruit, contrastant souvent avec la
modicité, voire l’absence, de souffle cardiaque.
La cyanose est généralement absente, sauf quand un oedème pulmonaire
compromet gravement l’hématose ou qu’il s’établit un shunt droite-gauche
à travers une communication interauriculaire associée.
page 8
9. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
A B C
Tout ceci donne à ces anomalies le masque d’une maladie pulmonaire
primitive, et contribue à des erreurs ou à des retards de diagnostic.
Heureusement, l’échocardiographie apporte des informations
précieuses pour le diagnostic différentiel et anatomique.
Retour veineux pulmonaire anormal total
Dans cette anomalie, toutes les veines pulmonaires se jettent, non dans
l’oreillette gauche, mais dans l’oreillette droite ou dans l’un de ses
vaisseaux afférents. Une communication interauriculaire est
obligatoirement associée, car elle seule assure la circulation systémique.
C’est une malformation sévère qui évolue généralement vers la mort, au
cours de la première enfance, en l’absence de traitement. Elle a
beaucoup bénéficié des progrès de l’échocardiographie pour son
diagnostic. Son traitement est chirurgical et aboutit actuellement à
d’excellents résultats.
Les retours veineux pulmonaires anormaux totaux ne sont pas très
fréquents. Ils correspondent à 2 % de l’ensemble des cardiopathies
congénitales. C’est, par ordre de fréquence, la quatrième cardiopathie
congénitale cyanogène à opérer pendant la première année de la vie. La
fréquence est identique dans les deux sexes, sauf pour le retour veineux
pulmonaire anormal total sous-diaphragmatique qui est beaucoup plus
fréquent chez le garçon que chez la fille, dans le rapport 3,6/1.
Anatomie pathologique (fig 11)
Dans deux tiers des cas, le retour veineux pulmonaire anormal total est
une malformation isolée. Dans l’autre tiers, il est associé à une autre
cardiopathie : communication interventriculaire, tétralogie de Fallot,
ventricule droit à double issue, et surtout isomérisme auriculaire.
De nombreuses classifications ont été proposées selon les particularités
anatomiques, physiologiques, ou embryologiques et anatomiques. Selon
les modalités anatomiques du retour veineux, on peut distinguer :
– les retours veineux supracardiaques (50 %des cas) qui se font quatre
fois sur cinq dans une veine cave supérieure gauche et une fois sur cinq
dans une veine cave supérieure droite ou l’azygos. Lorsque les veines
pulmonaires se jettent dans la veine cave supérieure droite, elles forment
un confluent derrière l’oreillette gauche ; de ce confluent, un tronc
commun remonte devant le hile droit et pénètre, par l’arrière, dans la
veine cave supérieure. Dans de rares cas, ce tronc commun se jette dans
la veine azygos. Lorsque les veines pulmonaires se jettent dans la veine
cave supérieure gauche, elles forment également un confluent
immédiatement derrière l’oreillette gauche. Du bord gauche de ce
confluent part un tronc collecteur qui monte dans le médiastin supérieur,
passe généralement devant l’artère pulmonaire gauche pour rejoindre le
tronc innominé gauche près de son origine ;
– les retours veineux intracardiaques (25 % des cas) qui se font quatre
fois sur cinq dans le sinus coronaire et une fois sur cinq dans l’oreillette
droite ; lorsque les veines pulmonaires se jettent dans l’oreillette droite,
elles peuvent le faire séparément ou par un tronc commun. Lorsque les
veines pulmonaires se jettent dans le sinus coronaire, le retour veineux
est intrapéricardique. Les veines pulmonaires rejoignent un tronc
commun et se jettent dans le sinus coronaire en arrière, près du sillon
auriculoventriculaire ;
– les retours veineux infracardiaques (20 %des cas), qui se font dans la
veine porte ou l’un de ses vaisseaux afférents. Dans les retours veineux
sous-diaphragmatiques, le tronc collecteur des veines pulmonaires part
d’un confluent rétroauriculaire gauche et se dirige vers le bas, en avant
de l’oesophage, il pénètre le diaphragme à travers l’hiatus oesophagien et
rejoint le plus souvent la veine porte au confluent des veines splénique
et mésentérique supérieure. Plus rarement, il se jette dans le canal
veineux d’Arantius, l’une des veines sus-hépatiques ou la veine cave
inférieure ;
– les retours veineux mixtes (5 % des cas).
Les obstacles au retour veineux pulmonaire peuvent s’observer dans
presque tous les types :
– dans les retours veineux sous-diaphragmatiques, il y a une gêne
considérable au retour veineux pulmonaire dans les formes, de loin les
plus fréquentes, où le collecteur s’abouche dans la veine porte ou l’un
de ses affluents. Le sang veineux pulmonaire doit traverser le
parenchyme hépatique avant de gagner l’oreillette droite, ce qui
provoque un ralentissement marqué de cette circulation de retour [41] ;
– dans certains retours veineux totaux dans la veine cave supérieure
gauche, le tronc collecteur passe entre l’artère pulmonaire et le tronc
bronchique gauche. Il risque alors d’être comprimé entre ces deux
éléments. Cette compression extrinsèque est évolutive car l’obstacle au
retour veineux qu’elle détermine augmente la pression dans l’artère
pulmonaire gauche, ce qui renforce l’obstruction ;
– dans certains retours veineux pulmonaires totaux dans la veine cave
supérieure droite, le tronc collecteur peut être comprimé entre l’artère
pulmonaire droite et la trachée, et ici encore la compression a une
tendance spontanée à l’aggravation ;
– dans les retours veineux pulmonaires anormaux intracardiaques dans
le sinus coronaire et l’oreillette droite, les obstructions sont beaucoup
plus rares [23].
Àcôté de ces obstacles extrinsèques, on peut aussi observer des sténoses
du collecteur. Il est également courant de noter des anomalies de la paroi
du collecteur : épaississement de la média et prolifération de l’adventice.
Les altérations du lit vasculaire pulmonaire sont constantes en cas
d’obstruction, avec essentiellement une hypertrophie notable de la
média.
L’oreillette gauche, qui ne reçoit aucune veine pulmonaire, est de petite
taille mais sa paroi a une musculature normale.
Le ventricule gauche qui apparaît souvent petit par comparaison avec le
volumineux ventricule droit est, en fait, de taille normale. Il n’y a
pratiquement jamais d’hypoplasie du coeur gauche associée aux retours
veineux pulmonaires anormaux totaux.
Physiopathologie
Trois éléments déterminent le retentissement de la malformation :
– la taille de la communication interauriculaire conditionne la
circulation systémique. Les formes avec communication
interauriculaire large sont les mieux tolérées. Dans de nombreux cas, le
shunt droite-gauche auriculaire s’effectue à travers le foramen ovale.
Celui-ci pourrait alors faire obstruction à la circulation systémique.
L’obstruction au retour veineux pulmonaire, quel qu’en soit le
mécanisme (traversée hépatique dans les retours veineux sous-diaphragmatiques,
sténose extrinsèque ou intrinsèque dans les autres
types), provoque une stase pulmonaire veineuse et lymphatique
importante et une hypertension artérielle pulmonaire sévère qui est
rapidement mal tolérée ; on parle alors de retour veineux pulmonaire
anormal total « bloqué » et ces formes sont mal tolérées dès la période
néonatale ;
– l’état du lit vasculaire pulmonaire : il est rapidement et sévèrement
modifié par l’obstruction veineuse pulmonaire [17] mais aussi, dans les
formes sans obstruction, par l’énorme shunt gauche-droite auriculaire :
tout le débit sanguin pulmonaire aboutit à l’oreillette droite. La pression
capillaire pulmonaire est élevée, alors que la pression auriculaire gauche
est basse.
Signes cliniques et radiologiques
Ils sont variables selon la variété et surtout l’importance d’une
éventuelle obstruction.
11 Différentes variétés anatomiques de retour veineux pulmonaire anormal total.
A. Infracardiaque : le collecteur se jette ici dans la veine porte.
B. Intracardiaque : le collecteur s’abouche au sinus coronaire.
C. Supracardiaque : le collecteur se jette dans une veine cave supérieure
gauche.
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10. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
Formes du nouveau-né
Elles réalisent un tableau d’oedème pulmonaire néonatal à petit coeur en
rapport avec une obstruction importante au retour veineux pulmonaire
C’est le fait des retour veineux pulmonaires anormaux totaux bloqués,
sous-diaphragmatiques le plus souvent, ou de l’atrésie de la veine
pulmonaire commune.
Cliniquement, la cyanose et la polypnée existent dès la naissance. Elles
sont en général remarquées dès les premiers jours de la vie. Parfois, il y
a un syndrome de détresse respiratoire qui peut faire penser à une
pathologie pulmonaire primitive (inhalation amniotique, infection
pulmonaire néonatale). L’enfant boit mal, et les repas accentuent la
dyspnée et la cyanose. Les signes cardiovasculaires sont peu
évocateurs : le second bruit est claqué en raison de l’hypertension
artérielle pulmonaire qui est au moins de niveau systémique, mais il n’y
a pas de souffle. L’hépatomégalie est constante.
L’aspect radiologique du retour veineux pulmonaire anormal total avec
obstruction est caractéristique (fig 12).
Le volume du coeur est normal, son contour est parfois estompé par la
grisaille périhilaire, surtout si le cliché est peu pénétré. L’aspect du
parenchyme pulmonaire est très particulier : c’est celui de « poumon
brouillard » ou de « verre cathédrale ». En effet, les deux champs
pulmonaires, dans leurs deux tiers internes au moins, sont envahis par
des opacités réticulées qui traduisent l’obstruction veineuse et l’oedème
interstitiel. On a aussi décrit des lignes de Kerley B.
Ces signes radiologiques peuvent être confondus avec les signes
produits par la maladie des membranes hyalines. Mais, dans celle-ci, les
opacités pulmonaires sont souvent moins diffuses. En outre, l’aspect de
bronchogramme aérien et la disparition de la netteté des bords
cardiaques, habituels en cas de maladie des membranes hyalines, sont
rares dans les retours veineux pulmonaires anormaux sous-diaphragmatiques.
Formes du nourrisson.
Ces formes correspondent généralement aux retours veineux sans
blocage, souvent sus-diaphragmatiques, sans communication
interauriculaire large, avec élévation nette des pressions artérielles
pulmonaires qui sont parfois de niveau systémique.
Ces nourrissons, habituellement asymptomatiques à la naissance,
deviennent progressivement essoufflés et anorexiques au cours du
premier mois de la vie. Ils ont très vite un retard de croissance surtout
pondéral, de la polypnée, de la tachycardie, des sueurs profuses et de
l’irritabilité, comme dans tous les shunts gauche-droite importants.
La cyanose est souvent modérée et peut facilement être méconnue. Elle
s’accentue à l’effort et est constante en cas d’insuffisance cardiaque.
Celle-ci se constitue souvent avant l’âge de 6 mois : elle provoque,
constamment une hépatomégalie, une distension des veines du cou et,
dans la moitié des cas, des oedèmes de la face et des membres inférieurs.
L’auscultation peut sembler peu modifiée à un examen peu attentif, car
la tachycardie estompe les principales anomalies. On entend
généralement un dédoublement large du second bruit dont la
composante pulmonaire est accentuée, un souffle systolique, lié soit à
l’insuffisance tricuspide, soit à l’augmentation du débit au niveau de la
valve pulmonaire qui n’est jamais très intense.
Certains signes radiologiques sont constants, quel que soit le point
d’abouchement du retour veineux : il y a une hypervascularisation
pulmonaire importante et diffuse qui traduit la distension des artères et
des veines. D’autre part, le coeur droit est globalement dilaté : oreillette,
ventricule et tronc de l’artère pulmonaire. Le coeur gauche est normal.
Par ailleurs, certains signes sont caractéristiques de certains types
d’abouchement : refoulement vers l’arrière de l’oesophage baryté de
profil, en regard de l’oreillette droite, en cas d’abouchement dans le
sinus coronaire ; dilatation de la veine cave supérieure droite en cas
d’abouchement à ce niveau et surtout aspect en « 8 de chiffre » ou en
« bonhomme de neige » en cas d’abouchement dans la veine cave
supérieure gauche (fig 13). La partie supérieure du huit est produite par
la dilatation des deux veines caves supérieures. Classiquement, ce signe
ne s’observe pas au cours des premiers mois de la vie : la dilatation des
veines caves est progressive et donc moins nette au cours des premiers
mois de la vie et, surtout, les clichés pris chez le nourrisson sont trop
pénétrés et effacent l’opacité plus discrète des deux veines caves
supérieures.
12 Retour veineux pulmonaire anormal total obstructif néonatal : aspect typique
de stase veineuse.
13 Formes obstructive et hypertensive d’un retour veineux pulmonaire anormal
supracardiaque : noter la stase veineuse pulmonaire et l’élargissement médiastinal
supérieur.
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11. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
A B aorte.
Échocardiographie (fig 14)
Elle permet d’affirmer le retour veineux, de préciser le siège
d’abouchement du collecteur et dépister les éventuelles malformations
associées [59].
Certains signes échocardiographiques sont communs à toutes les
formes : le ventricule droit est dilaté et semble comprimer le ventricule
gauche ; le septum bombe vers l’arrière. Le ventricule gauche paraît
petit mais est, en fait, de taille normale. L’oreillette gauche est petite,
l’oreillette droite dilatée ainsi que le tronc de l’artère pulmonaire.
En échocardiographie bidimensionnelle trois signes doivent faire penser
d’emblée à la possibilité d’un retour veineux pulmonaire anormal total :
– l’impossibilité de mettre en évidence l’entrée des veines pulmonaires
dans l’oreillette gauche en incidence parasternale haute ou par voie
suprasternale ;
– la découverte, en incidence suprasternale ou sous-costale, d’un espace
libre d’échos en arrière de l’oreillette gauche qui correspond au
collecteur et dans lequel on peut voir s’aboucher les veines
pulmonaires ;
– le flux du collecteur anormal est facilement repéré par
l’échocardiographie doppler à codage couleur.
Quand le collecteur se draine dans la veine cave supérieure gauche
(éventualité la plus fréquente), il est généralement trouvé assez haut
derrière l’oreillette gauche en incidence apicale L’incidence
suprasternale permet une bonne étude de l’entrée du collecteur dans la
veine cave supérieure gauche. Le doppler couleur montre la direction
du flux sanguin vers le haut, d’abord dans la veine cave supérieure
gauche puis vers la droite dans le tronc innominé, puis vers le bas dans
la veine cave supérieure jusqu’à l’oreillette droite.
Quand le collecteur se draine dans la veine cave supérieure droite ou la
veine azygos, ces structures apparaissent dilatées. Le doppler couleur
montre la direction ascendante initiale du flux dans le tronc collecteur,
direction qui est en sens inverse du courant sanguin dans une veine cave
supérieure normale.
Quand le collecteur se draine dans le sinus coronaire, celui-ci est dilaté.
Comme il est attaché au sillon auriculoventriculaire, le collecteur est
situé un peu plus bas que dans le retour veineux pulmonaire anormal
total dans la veine cave supérieure gauche. Une nette dilatation du sinus
coronaire peut s’observer en cas de drainage dans le sinus coronaire de
la veine cave supérieure gauche, anomalie beaucoup plus fréquente et
beaucoup plus banale. Pour affirmer le retour veineux pulmonaire
anormal total dans le sinus coronaire, il ne suffit donc pas d’affirmer la
dilatation de celui-ci, il est nécessaire de voir les veines pulmonaires
s’aboucher directement dans le sinus. Le bord supérieur du sinus
coronaire bombe alors vers le haut, alors qu’en cas d’abouchement de la
veine cave supérieure dans le sinus coronaire, le bord supérieur du sinus
a un trajet parallèle à son bord inférieur.
Quand le retour veineux pulmonaire anormal est mixte, deux aspects
sont possibles :
– l’association d’un retour veineux pulmonaire anormal de deux ou
trois veines dans le sinus coronaire et du reste du contingent veineux
pulmonaire dans la veine cave supérieure gauche. Ce type de retour
veineux mixte est relativement facile à démontrer à l’échocardiographie.
14 Échocardiographie d’un nourrisson porteur
d’un retour veineux pulmonaire anormal total su-pracardiaque.
A. Incidence latérosternale gauche : oreillette
gauche (OG) de petite taille ; présence à sa
face postérieure d’une cavité (flèches) corres-pondant
au collecteur des veines pulmonai-res
; dilatation du ventricule gauche (VG).
B. Incidence suprasternale : les veines pul-monaires
droites et gauches (VPD et VPG)
convergent vers un collecteur qui se jette
dans une volumineuse veine cave supérieure
gauche ; dilatation du tronc veineux inominé
(TVI). APD : artère pulmonaire droite ; AO :
Il n’en est pas de même du retour veineux mixte où les quatre veines
pulmonaires se jettent séparément dans l’oreillette droite. Les signes
communs à tous les retours veineux pulmonaires totaux sont retrouvés,
et on peut exclure les autres types si on n’en trouve pas les
caractéristiques échocardiographiques. Mais il est souvent difficile
d’observer et d’affirmer l’abouchement des quatre veines pulmonaires
dans l’oreillette droite ;
– dans les formes sous-diaphragmatiques, la convergence des veines
pulmonaires forme un tronc collecteur qui est retrouvé derrière
l’oreillette gauche, immédiatement au-dessus du diaphragme. Il peut
apparaître comme une chambre distincte nettement séparée du coeur. Il
est mieux observé par voie sous-costale ; on réalise un balayage de
gauche à droite pour identifier les vaisseaux abdominaux qu’on ne peut
voir tous en un seul plan. En incidence sagittale, l’aorte descendante est
le vaisseau postérieur et le plus à gauche, la veine cave inférieure le
vaisseau le plus à droite et le plus antérieur, le tronc collecteur est en
position intermédiaire.
Le doppler aide aussi à la reconnaissance des vaisseaux en montrant un
flux systolique descendant dans l’aorte abdominale, un flux montant,
presque continu, phasique dans la veine cave inférieure, un flux presque
continu, phasique mais descendant dans le tronc collecteur.
Dans les formes « bloquées », le doppler est la meilleure méthode pour
dépister une éventuelle obstruction veineuse pulmonaire. Seront plus
particulièrement examinés le collecteur et son abouchement. En cas
d’obstruction, on observe un flux continu, de grande vélocité, non
phasique. L’examen met aussi en évidence le niveau de l’obstruction et
sa sévérité.
Cathétérisme et angiocardiographie
Ils seront réalisés sans hésitation lorsqu’il y a un doute diagnostique
mais ils ne sont plus la clé du diagnostic. De plus en plus de patients sont
opérés sans cathétérisme et angiocardiographie préalables, d’autant que
ces explorations ne sont pas dénuées de risque, surtout dans les formes
avec obstruction.
Au cathétérisme, l’oxymétrie est caractéristique d’un retour veineux
pulmonaire anormal total avec une désaturation dans l’oreillette gauche,
plus importante que celle de l’oreillette droite. Des prélèvements étagés
permettent d’évoquer le niveau d’abouchement du collecteur. Les
pressions dans le ventricule droit et dans l’artère pulmonaire sont
élevées, souvent de niveau systémique. De même, la pression auriculaire
droite est toujours nettement élevée. Le trajet du cathéter est intéressant.
Il peut faire rejeter le diagnostic. Si le cathéter passé dans l’oreillette
gauche par le foramen ovale s’engage à partir de celle-ci dans une veine
pulmonaire. D’autre part, il peut mettre en évidence une obstruction au
retour veineux : une sténose du tronc collecteur détermine un gradient à
la courbe de retrait et donne un aspect de rétrécissement si une injection
de produit de contraste est faite à cet endroit.
L’angiocardiographie réalisée dans le ventricule droit ou dans le tronc
de l’artère pulmonaire, montre le lieu d’abouchement du collecteur et
précise l’anatomie de la malformation (fig 15).
Dans les retours veineux cardiaques (dans le sinus coronaire ou
l’oreillette droite), le diagnostic angiographique peut être difficile.
Certains ont proposé d’utiliser alors l’incidence « des quatre cavités »
décrite par Bargeron.
page 11
12. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
Traitement
La gravité de l’évolution spontanée justifie un traitement agressif
précoce. Les résultats de la chirurgie sont en constante amélioration
grâce aux progrès de la chirurgie et de la réanimation du nourrisson.
Dans les formes « bloquées » néonatales, seul le traitement chirurgical
d’urgence peut sauver ces nouveau-nés [48]. Il consiste en
l’abouchement, sous circulation extracorporelle, avec éventuellement
hypothermie profonde, du tronc collecteur dans l’oreillette gauche.
Cette intervention est encore grevée d’une mortalité postopératoire
précoce survenant soit en fin d’intervention, soit dans les jours qui
suivent l’intervention, par poussée aiguë d’hypertension artérielle
pulmonaire. La mortalité diminue cependant au fur et à mesure que les
réanimateurs savent mieux contrôler ces poussées hypertensives.
Dans les retours veineux intracardiaques, la réparation est plus facile : si
le retour veineux se faisait dans l’oreillette droite, la cloison
interauriculaire est refermée de manière à renvoyer les veines
pulmonaires dans l’oreillette gauche [1]. S’il s’agit d’un retour veineux
total dans le sinus coronaire, la technique décrite parVan Praagh permet
de renvoyer le sinus coronaire dans l’oreillette gauche. Le shunt droite-gauche
réalisé par le passage du sang veineux coronaire dans l’oreillette
gauche est minime et n’a, en pratique, aucune conséquence.
Dans les retours veineux supracardiaques, le collecteur est anastomosé
à la paroi postérieure de l’oreillette gauche. Il a été proposé d’agrandir
l’oreillette gauche aux dépens de l’oreillette droite [28]. D’autre part, en
15 Même patient que figure 14, temps de retour gauche d’une ventricu-lographie
droite, injection dans le collecteur veineux cave supérieur gau-che
: aspect typique de retour veineux pulmonaire anormal total
supracardiaque.
cas de mauvaise tolérance hémodynamique à la fermeture du collecteur,
certains chirurgiens ont suggéré de ne pas refermer la communication
interauriculaire et de ne pas lier le collecteur, quitte à compléter
l’intervention 1 à 2 ans plus tard. Cette technique est de plus en plus
abandonnée.
Les patients doivent être surveillés pendant les 6 mois qui suivent
l’intervention. En effet, le pronostic à long terme dépend non seulement
de l’état du lit vasculaire pulmonaire, mais aussi du calibre de
l’anastomose entre le collecteur et l’oreillette gauche. Des obstructions
secondaires sont parfois observées à distance de l’anastomose [58].
Coeur triatrial
Cette malformation est définie par la présence d’une membrane divisant
l’oreillette gauche en deux cavités. C’est une malformation rare. Elle est
grave et peut mettre en jeu le pronostic vital. Mais elle est définitivement
curable par la chirurgie si le diagnostic est posé à temps.
Anatomie pathologique (fig 16)
Les veines pulmonaires s’abouchent toutes à une chambre accessoire,
séparée du reste de l’oreillette gauche par une membrane
fibromusculaire généralement oblique, percée d’un ou de plusieurs
orifices de taille variable [60]. La chambre distale, qui est la véritable
oreillette gauche, comprend toujours le vestibule mitral et l’auricule
gauche [42].
OD
VD
VG
OG
CA
VP
16 Différentes variétés de coeur triatial.
A. Forme habituelle : la chambre acces-soire
(CA) reçoit les veines pulmonaires
(VP) et communique avec l’oreillette gau-che
(OG) au travers la membrane.
B. Forme avec communication de la cham-bre
accessoire avec l’oreillette droite (OD).
C. Forme avec membrane imperforée ; la
chambre accessoire ne communique
qu’avec l’oreillette droite : communication
interauriculaire ou foramen ovale assurant
A B C le remplissage de l’OG.
page 12
13. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
De nombreuses variantes ont été décrites selon les communications
entre la chambre accessoire, la chambre proximale et l’oreillette
droite [6].
Dans certains cas, une partie seulement des veines pulmonaires est
connectée à la chambre accessoire, le reste pouvant s’aboucher
normalement à l’oreillette gauche ou anormalement à l’oreillette droite,
via la veine porte ou l’axe veine inominée-veine cave supérieure [39].
Diagnostic
Les signes cliniques sont d’autant plus précoces et sévères que l’orifice
séparant la chambre proximale de la chambre distale de l’oreillette
gauche est plus petit. Lorsqu’il est large, la malformation peut être
cliniquement muette. En cas d’obstruction très sévère, une détresse
respiratoire avec asphyxie et acidose peut se produire dès la
naissance [45].
L’échocardiogramme est le moyen le plus sûr de poser le diagnostic [34].
En mode bidimensionnel, la membrane est visible sous forme d’un écho
linéaire au sein de l’oreillette gauche, toujours placée au-dessus de
l’auricule, assez loin de l’anneau mitral. Cette structure se déforme en
diastole en « accent circonflexe » renversé vers la chambre distale
(fig 17). L’orifice entre les deux chambres de l’oreillette gauche est
parfois visible, de même que la ou les communications avec l’oreillette
droite.
Le doppler couleur facilite grandement le diagnostic en visualisant
nettement le jet poststénotique au niveau de l’orifice reliant les deux
chambres. La mesure de sa vélocité permet d’estimer la sévérité de la
sténose. Une insuffisance tricuspide permet également de quantifier le
niveau d’hypertension pulmonaire. Le ventricule droit est souvent dilaté
et hypertrophié, le septum interventriculaire aplati en télésystole vers le
ventricule gauche. On recherche soigneusement un retour veineux
pulmonaire anormal associé [51].
Le cathétérisme et l’angiocardiographie ne sont pas indispensables dans
le diagnostic, notamment chez le nouveau-né et le petit nourrisson. Ils
ne sont pas non plus dépourvus de risques.
Le cathétérisme mesure le niveau d’hypertension artérielle et veineuse
pulmonaire. Parfois le cathéter peut passer de l’oreillette droite vers la
chambre proximale à travers la communication interauriculaire et de là,
redescendre à travers l’orifice sténotique vers la chambre distale de
l’oreillette gauche. On peut ainsi mesurer le gradient entre les deux
chambres.
La cinéangiographie dans l’artère pulmonaire sera effectuée avec
prudence. Elle peut parfois permettre de mettre en évidence au retour
veineux pulmonaire la membrane intra-auriculaire gauche. D’une façon
générale, elle est toujours mieux vue en échocardiographie. L’intérêt
essentiel de l’examen est le dépistage des anomalies associées
notamment du retour veineux pulmonaire.
Traitement
En période de détresse respiratoire aiguë, il commence par une
réanimation médicale avec restriction hydrique, administration de
diurétiques, digitalisation, sédation, voire intubation et ventilation
assistée en cas d’oedème pulmonaire.
Le traitement chirurgical consiste à exciser la membrane, sous
circulation extracorporelle, par atriotomie droite ou gauche. Les
anomalies associées (communication interauriculaire, anomalie
partielle du retour veineux pulmonaire, etc) seront corrigées dans le
même temps opératoire. Cette intervention est simple, grevée d’une
faible mortalité même chez le nourrisson, et aboutit à une guérison
complète.
Sténose des veines pulmonaires
Ce sont des anomalies très rares dont la clinique ressemble beaucoup à
celle des autres obstructions veineuses pulmonaires gauches, mais dont
le diagnostic et surtout le traitement restent très difficiles.
Anatomie pathologique
L’anomalie morphologique consiste le plus souvent en un discret
rétrécissement d’une ou de plusieurs, parfois de toutes les veines
pulmonaires dans leur trajet extrapulmonaire [4]. Les sténoses localisées
sont dues à un diaphragme ou à un bourrelet fibreux, complet ou
incomplet, à la jonction avec l’oreillette gauche [32]. Plus rarement, c’est
une hypoplasie diffuse qui peut aller jusqu’à l’atrésie d’une ou de
plusieurs veines ou, très exceptionnellement, de la veine pulmonaire
commune [55].
Les malformations associées ont été décrites dans plus de la moitié des
cas : simple shunt gauche/droite ou cardiopathie plus complexe.
Diagnostic
Le tableau clinique est celui des obstructions veineuses pulmonaires.
L’échocardiographie permet d’abord d’éliminer l’obstacle intra-auriculaire
gauche ou mitral. Il faut analyser soigneusement les veines
pulmonaires et rechercher des rétrécissements localisés ou des
hypoplasies plus étendues. Là encore le diagnostic est grandement aidé
par le doppler à codage couleur. En cas de sténose significative, la
pression veineuse pulmonaire est toujours supérieure à celle de
l’oreillette gauche, le flux pulmonaire devient continu à haute vélocité.
À partir de cette vélocité, on peut évaluer le gradient.
Le cathétérisme cardiaque reste néanmoins nécessaire. Il permet de
retrouver une hypertension artérielle et capillaire pulmonaire contrastant
avec une pression auriculaire gauche normale. Il est très difficile
d’explorer a retro les veines pulmonaires sténosées pour mesurer un
éventuel gradient et les opacifier par des injections sélectives. Il faut
recourir à une angiographie pulmonaire qui expose au même danger et
implique les mêmes précautions que dans le coeur triatrial.
Traitement
La chirurgie consiste en une résection des sténoses suivie
d’angioplastie [61]. Un certain nombre d’échecs est imputable au fait
qu’une partie de ces sténoses extrapulmonaires s’accompagne de
sténoses dans le trajet intrapulmonaire des veines. Le risque de
thrombose postopératoire des veines est grand avec récidive et mort
précoce.
Plus récemment, l’angioplastie intraluminale par ballon a été tentée mais
sans succès. En effet, la dilatation immédiate des veines est suivie assez
rapidement d’une resténose. La mise en place peropératoire, sous
contrôle visuel, de stent, immédiatement après l’angioplastie par
ballonnet de certaines sténoses, pourrait être un geste salvateur [11, 38].
Sténose mitrale congénitale
Le rétrécissement mitral congénital est le nom général donné à tous les
obstacles au remplissage diastolique du ventricule gauche. Ce terme
englobe toutes les anomalies de l’anneau, des deux feuillets, des
cordages et des muscles papillaires de la valve mitrale tandis que le
ventricule gauche est normal. Ceci exclut donc, par définition, les
anomalies mitrales associées au syndrome d’hypoplasie du coeur
gauche.
17 Échocardiographie d’une forme habituelle de coeur triatial chez un nourrisson :
incidence sous-costale « quatre cavités » en diastole ; écho linéaire intra-auriculaire
gauche correspondant à la membrane (flèches) ; dilatation de l’oreillette et du ven-tricule
droit (VD) ; ventricule gauche (VG) de petite taille. OD,OG : oreillettes respec-tivement
droite, gauche.
page 13
14. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
A B C
D E F
Ces cardiopathies sont rares. On les retrouve plus volontiers chez le
garçon (deux garçons pour une fille).
La sténose mitrale congénitale est très fréquemment associée à d’autres
malformations cardiaques pouvant masquer l’aspect clinique et
hémodynamique habituel du rétrécissement pur : obstruction du coeur
gauche (sténose valvulaire ou sous-valvulaire aortique, coarctation de
l’aorte), shunt gauche/droite (communication interventriculaire ou canal
artériel), cardiopathie par obstacle sur la voie pulmonaire (sténose
pulmonaire, tétralogie de Fallot).
Anatomie pathologique (fig 18)
On classe les rétrécissements mitraux selon que la dysplasie touche
préférentiellement l’un des éléments de la mitrale, tout en gardant à
l’esprit que les autres éléments de cette valve sont le plus souvent
également malformés. On distingue :
– les sténoses supravalvulaires : il s’agit d’une prolifération de tissu
fibreux se développant à partir de la surface atriale des feuillets mitraux,
réalisant soit un diaphragme complet, soit un croissant obstructif, juste
au-dessus de la valve [10] ;
– les sténoses valvulaires : les valves et les cordages sont épaissis et
rétractés, les commissures plus ou moins fusionnées. La dysplasie peut
toucher de la même façon toutes les parties de la mitrale, entraînant une
véritable « miniaturisation » de la valve [43] ;
– les sténoses sous-valvulaires : les anomalies des muscles papillaires
et des cordages sont au premier plan, mais la valve elle-même peut aussi
être atteinte. La forme la plus caractéristique est la valve mitrale en
« parachute » : il n’existe qu’un seul gros muscle papillaire sur lequel se
fixent tous les cordages très épaissis, souvent fusionnés les uns avec les
autres, réalisant une sorte d’entonnoir très sténosant. Cette forme fait
partie d’un syndrome polymalformatif, appelé complexe de Shone [50],
associant une sténose mitrale en « parachute », un anneau
18 Différentes variétés de sténose mitrale congénitale.
A. Sténose par diaphragme supravalvulaire.
B. Sténose valvulaire avec feuillets hypoplasiques, symphysés, cordages courts
et rétractés.
C. Valve mitrale en « parachute » avec un unique pilier vers lequel convergent
tous les cordages.
D. Muscles papillaires anormaux, en « croissant ».
E. Anomalie de position des muscles papillaires.
F. Valve mitrale en « arcade ».
19 Échocardiographie de
sténoses mitrales congénita-les.
VD, VG : ventricules res-pectivement
droit, gauche ;
OD, OG : oreillettes respecti-vement
droite, gauche.
A, B. Valve en « para-chute
» chez un en-fant
; incidence paras-ternale
grand axe (A)
et petit axe (B) ; les cor-dages
convergent vers
un volumineux pilier
unique (flèches).
C. Sténose supraval-vulaire
chez un nour-risson
en incidence
apicale ; les flèches
désignent le « diaph-ragme
» sus-valvu-laire.
D. Sténose mitrale val-vulaire
chez un nour-risson
en incidence
apicale ; les feuillets
valvulaires (flèches)
sont épaissis et sym-physés,
réalisant un
« entonnoir ».
A B
C D
page 14
15. Radiodiagnostic CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE 32-015-A-30
supravalvulaire mitral, une sténose sous-valvulaire aortique, une
coarctation de l’aorte parfois combinée à une communication
interventriculaire.
L’absence de cordage tendineux réalise la valve mitrale en « arcade » [8],
où les valves et les muscles papillaires sont en contact direct les uns avec
les autres.
Diagnostic
Le tableau clinique est celui des obstructions au remplissage
ventriculaire gauche, d’autant plus précoce et sévère que la sténose est
serrée. Il est souvent dominé par les malformations associées à la sténose
mitrale. En cas de forme pure, l’auscultation peut apporter des éléments
contributifs par la découverte d’un roulement diastolique apexoaxillaire.
Contrairement aux sténoses mitrales rhumatismales, l’éclat du premier
bruit est rare.
L’aspect radiologique est dominé par la dilatation de l’oreillette gauche
associée aux signes de stase veineuse pulmonaire.
L’échocardiographie (fig 19) reste le moyen le plus sûr de diagnostic [2].
Elle va montrer la dilatation de l’oreillette gauche, la petite taille du
ventricule gauche, l’hypertrophie et la dilatation du ventricule droit
d’autant plus sévère que l’hypertension pulmonaire est importante.
L’analyse des lésions de la valve sera méthodique, explorant le nombre,
la position et l’anatomie des piliers, la taille et la longueur des cordages,
l’aspect des feuillets valvulaires, la taille de l’anneau.
Le doppler fournit des renseignements précieux pour la mesure du degré
de sténose, tout du moins lorsque la valvulopathie est isolée. La mesure
du temps de demi-pression (intervalle entre l’instant du gradient de
pression maximale et celui où cette pression a diminué de moitié) permet
d’estimer la surface d’ouverture de la mitrale. Celle-ci peut également
être mesurée par la planimétrie du jet doppler couleur en incidence
parasternale petit axe. On analyse également une éventuelle fuite
associée.
La précision des informations rend le plus souvent inutile la réalisation
d’un cathétérisme cardiaque, d’autant que l’angiocardiographie fournit
des renseignements moins précis que l’examen ultrasonore.
Traitement
La sténose mitrale congénitale est une cardiopathie grave dont le
pronostic est sombre [9].
Le traitement chirurgical est difficile et n’est qu’exceptionnellement
conservateur : résection d’une sténose supravalvulaire, commis-surotomie
à coeur ouvert [54, 57].
Lorsque les lésions sont trop sévères, un remplacement valvulaire
prothétique est nécessaire. Il devra être effectué à l’aide d’une prothèse
mécanique, la prothèse biologique ayant une forte tendance à se calcifier
et à se détériorer précocement chez les jeunes enfants. La petite taille de
l’anneau ne permet souvent que l’implantation de prothèses de petit
calibre qui devront être changées avec la croissance du patient. Un
traitement anticoagulant efficace, dont on imagine les contraintes et les
difficultés chez le jeune enfant, est bien sûr nécessaire.
En cas d’anneau mitral trop petit, des gestes palliatifs ont été tentés
(conduit de dérivation oreillette gauche/ventricule gauche) [31].
Quant à la dilatation par sonde à ballonnet, elle est possible mais les
résultats sont plus aléatoires qu’en cas de sténose rhumatismale,
essentiellement en raison de la complexité des lésions.
Hypoplasie du coeur gauche
Le terme d’hypoplasie du coeur gauche sert à désigner les insuffisances
de développement du ventricule gauche, de ses valves d’admission et de
sortie ainsi que de l’aorte ascendante. On l’appelle parfois atrésie
aortique ou atrésie mitrale. Quoi qu’il en soit, le ventricule gauche est
incapable d’assurer le débit systémique qui est pris en charge, de façon
exclusive ou largement prédominante, par le ventricule droit, l’artère
pulmonaire et le canal artériel.
Il s’agit d’une malformation gravissime, mettant en jeu le pronostic vital
dès les premières heures ou premiers jours de vie, à laquelle on ne peut
opposer que des solutions thérapeutiques palliatives.
Ce type de malformation représente un peu plus de 1 % des
cardiopathies congénitales. La prédominance masculine est connue
depuis longtemps : une fille pour deux à trois garçons.
OD
OG
VD
VG
1
20 Forme la plus fréquente d’hypoplasie du coeur gauche : minuscule ventricule
gauche avec atrésie valvulaire mitrale et aortique ; hypoplasie de l’aorte ascendante
jusqu’à l’origine des troncs supra-aortiques. L’aorte ascendante et les coronaires sont
perfusées de façon rétrograde par le canal artériel (1). OD, OG : oreillettes respecti-vement
droite, gauche ; VD, VG : ventricules respectivement droit, gauche.
La pathogénie des lésions reste discutée. Le rôle de la fermeture précoce
du foramen ovale excluant le coeur gauche de la circulation foetale a été
souvent mise en cause, mais cette éventualité n’est vérifiée que dans une
minorité de cas.
Anatomie pathologique (fig 20)
Anomalies élémentaires
Le ventricule gauche est toujours sous-développé mais de manière
variable : cavité virtuelle ou petite sphère fibroélastosique.
L’orifice aortique est en règle atrésique. L’anneau est très hypoplasique.
La valve mitrale est toujours sous-développée. Elle est presque toujours
borgne.
L’aorte ascendante est hypoplasique de sa racine jusqu’à l’origine des
troncs supra-aortiques. Les vaisseaux coronaires ont habituellement une
distribution et des dimensions normales.
Les structures droites, veine cave, oreillette droite, ventricule droit,
artère pulmonaire sont dilatées et hypertrophiées. Le canal artériel est
naturellement perméable et se poursuit sans réduction apparente de
calibre par l’aorte descendante.
Formes anatomiques
Les formes majeures associant atrésie mitrale, ventricule gauche virtuel,
atrésie aortique et hypoplasie majeure de l’aorte ascendante sont les plus
fréquentes [12].
Les formes intermédiaires sont celles où la cavité ventriculaire gauche
reste très hypoplasique mais existe. Selon les cas, on découvre une
atrésie aortique avec mitrale perméable ou, plus rarement, une atrésie
mitrale sans atrésie aortique complète [24].
Les formes mineures sont rares. Elles ont en commun une cavité
ventriculaire gauche hypoplasique communiquant avec le ventricule
droit par une communication interventriculaire, avec atrésie aortique ou
mitrale.
Physiopathologie
Quel que soit son type, le syndrome d’hypoplasie du coeur gauche est à
l’origine d’un syndrome d’obstruction veineuse pulmonaire associé à un
syndrome de bas débit systémique.
page 15
16. 32-015-A-30 CARDIOPATHIES PAR OBSTACLE DU COEUR GAUCHE Radiodiagnostic
A B trale.
Le syndrome d’obstruction veineuse pulmonaire est d’autant plus sévère
que le défaut septal auriculaire est plus restrictif. De plus, un shunt
gauche/droite auriculaire total amène obligatoirement tout le retour
veineux pulmonaire à la tricuspide et au ventricule droit. Une
hypertension ventriculaire droite et artérielle pulmonaire est constante.
Le syndrome de bas débit systémique est lié à la ductodépendance totale
de la cardiopathie. La perfusion systémique est en effet assurée par
l’artère pulmonaire et le canal artériel. La fermeture de ce dernier
conduit à un collapsus immédiatement fatal [35].
Diagnostic
Le syndrome d’hypoplasie du coeur gauche fait partie des cardiopathies
qui doivent être dépistées en anténatal.
Dans le cas contraire, la malformation se révèle par un collapsus
cardiovasculaire associé à une cyanose et une grande détresse
respiratoire. Les pouls sont faibles, voire absents.
L’aspect radiologique associe cardiomégalie globale et oedème
pulmonaire.
L’échocardiographie (fig 21) est le temps fort du diagnostic. On observe
une dilatation considérable du ventricule droit, de la tricuspide et de
l’artère pulmonaire. En revanche, le ventricule gauche est très
hypoplasique. La valve mitrale n’est pas identifiée ou paraît minuscule
et peu mobile. La racine aortique est minuscule [29].
Le doppler à codage couleur montre l’absence de flux de remplissage
ventriculaire gauche, un shunt gauche/droite total au niveau du foramen
ovale apprécie l’état du canal artériel.
L’échocardiographie est toujours suffisante et les investigations
hémodynamiques et angiographiques inutiles.
21 Échocardiographie d’hypoplasie du coeur
gauche. OD, OG : oreillettes respectivement
droite, gauche ; VD, VG : ventricules respective-ment
droit, gauche.
A. Forme majeure avec ventricule gauche
virtuel (flèche), petite oreillette gauche.
B. Forme avec petit ventricule gauche fibro-élastique,
à parois épaisses ; atrésie mi-
Traitement
Le traitement médical repose sur la perfusion de prostaglandines E1 de
façon à maintenir la béance du canal artériel, vitale chez ces patients. On
y associe les mesures de réanimation habituelle (ventilation,
alcalinisation, traitement tonicardiaque et diurétique).
La suite de ce traitement ne se conçoit que si on envisage un programme
chirurgical.
Le traitement dit chirurgical ne peut être que palliatif. Il repose sur le
procédé décrit par Norwood [14] : premier temps à quelques jours de vie
comprenant une septectomie auriculaire, une section du tronc
pulmonaire, une anastomose de sa partie proximale à l’aorte ascendante
incisée longitudinalement, réalisation d’une anastomose
systémicopulmonaire à l’aide d’un tube prothétique implanté entre
l’aorte et la bifurcation pulmonaire.
Le deuxième temps est appliqué 5 à 6 mois plus tard aux survivants dont
les résistances pulmonaires sont basses et le retour veineux pulmonaire
normal [33]. Il repose sur la réalisation d’une dérivation cavopulmonaire
partielle, au besoin complétée entre 18 mois et 2 ans par une dérivation
complète [36, 66]. Il s’agit là d’un traitement très lourd grevé de beaucoup
d’incertitudes à moyen ou long terme. Dans les meilleures mains, les
bons résultats oscillent entre 50 et 70 % des patients opérés.
L’autre option thérapeutique est la réalisation, en période néonatale,
d’une transplantation cardiaque. Elle se heurte en France à une difficulté
majeure : l’indisponibilité de greffons utilisables chez le nouveau-né.
C’est dire que cette malformation pose de considérables problèmes
éthiques. Le plus souvent, c’est vers une interruption volontaire de
grossesse que s’orientent les familles lorsque le diagnostic est effectué
pendant la période anténatale.
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