Ce mémoire a été écrit lors de mon Bachelor Européen Graphisme en juillet 2010.
Ce mémoire a pour but de s’interroger sur la simplicité comme moyen de communication. À la cohue générale, l’atout de la simplicité ne pourrait-il pas redonner aux images la parole? La simplicité peut-elle nous aider à « mieux » communiquer ?
Mémoire "La simplicité peut-elle nous aider a "mieux" communiquer?"
1. CNA CEFAG SESSION DE JUILLET 2010
Bagnolet
La simplicité peut-elle nous aider à
« mieux » communiquer ?
*
Mémoire en Bachelor Européen Graphic Design
Présenté par Elodie JAEGER
2. Je tiens à remercier Gilles Juan pour ses conseils avisés, le temps qu’il m’a accordé, ainsi
que ses références toutes plus intéressantes les unes que les autres.
Une pensée particulière est adressée aux personnes qui ont pris le temps de lire et re-lire ce
mémoire et qui ont ainsi contribué aux multiples corrections apportées à ce dernier,
Arnaud Rubio, Charles Jaeger et Lucile Bonnaud.
2
3. Table des matières
Introduction ................................................................................................................................ 5
I - La simplicité .................................................................................................................... 9
1 Un besoin......................................................................................................................... 9
1.1 quelque chose de naturel .......................................................................................... 9
1.2 un reflexe face au surplus ...................................................................................... 11
2 Réduire, synthétiser pour « plus » ................................................................................. 12
2.1 une mise en valeur de l’essentiel ........................................................................... 12
2.2 un gain de temps .................................................................................................... 13
2.3 engager le spectateur .............................................................................................. 14
3 Un esthétisme séduisant ................................................................................................ 16
3.1 un art bien maitrisé par les Japonais ...................................................................... 16
3.2 une grande histoire d’architecture .......................................................................... 17
3.3 le design suisse ....................................................................................................... 17
II - Pas si simple ! ................................................................................................................ 19
1 Les risques de simplifier ............................................................................................... 19
1.1 perdre des éléments essentiels ............................................................................... 19
1.2 tomber dans le simplisme....................................................................................... 20
1.3 la simplicité reflet de « pauvreté » ......................................................................... 21
1.4 perdre le contrôle ................................................................................................... 22
2 Et la complexité dans tout ça......................................................................................... 23
2.1 simplicité et complexité: les opposés s’attirent ..................................................... 23
2.2 la complexité comme moyen d’expression ............................................................ 23
3 « Complexe » et « chaos » ............................................................................................ 24
3.1 deux termes à ne pas confondre ............................................................................. 25
3.2 organiser la complexité préserve l’information ..................................................... 25
3
4. III - L’éloge du sens.............................................................................................................. 27
1 Un bon graphiste est un graphiste respectueux ............................................................. 27
1.1 produire par nécessité ............................................................................................ 27
1.2 investir sans gêne ................................................................................................... 28
1.3 ne pas sous-estimer son public ............................................................................... 29
2 Un graphiste sait se servir de ces outils......................................................................... 30
2.1 les images & les signes parlent .............................................................................. 30
2.2 les couleurs aussi.................................................................................................... 31
Conclusion ................................................................................................................................ 32
Bibliographie ............................................................................................................................ 34
Annexes .................................................................................................................................... 35
4
5. Introduction
L'image a acquis un statut privilégié dans notre société. Les moyens de sa diffusion et
de sa consommation n'ont d’ailleurs jamais été aussi nombreux. C’est un fait, nous sommes
dans une « société de l’image » – terme d’ailleurs énormément utilisé à l’heure actuelle. Une
prolifération visuelle incontrôlable a complètement envahi notre quotidien, nos espaces
publics comme privés. « Il y trop d’images. » comme le dit si justement le cinéaste Bernard
Emond « Chaque jour, nous sommes submergés par une quantité monstrueuse d’images
grossières, menteuses, nuisibles publicités imbéciles – ou pire : intelligentes –, émissions de
télévisions stupides et racoleuses, « documentaires » voyeurs, photographies et journaux
d’une invraisemblable vulgarité. L’espace public et privé est envahi par des images qui
vendent et se vendent, l’un étant indissociable de l’autre. » 1 Trop de variété. Trop de
reproduction. Trop de signe. Le trop–plein est palpable.
Plusieurs auteurs ont, depuis la fin des années 60, formulé une critique radicale du rôle de
l'image dans les sociétés contemporaines. Partant d'une critique de la consommation, le
sociologue Jean Baudrillard a progressivement radicalisé son constat sur l'image. Ce que l'on
remarque, c'est la mort du réel et l'ouverture d'une ère de simulation, qui signe la « mise à
mort de toute référence. » 2 L'image a proliféré et s'est autonomisée, elle a fini par ne plus
renvoyer à un quelconque réel, ne signifiant plus rien. Plus on avance dans l'orgie de l'image,
moins on y croit. Lors du 15eme festival Visa pour l’image à Perpignan il déclara « C’est se
faire beaucoup d’illusions que de croire que les images peuvent témoigner de la réalité. […]
Elles sont devenues trop familières pour nous toucher. Nous sommes accoutumés. Il nous en
faut toujours plus. La prolifération des images est telle qu’on a franchi un seuil critique qui
interdit un décodage véritable. » 3 Et pourtant, au XXe siècle jamais la crédibilité de l’image
n’aurait pu être mise en doute. Puisqu’en effet, ce siècle restera comme celui de l’information
et de l’image, la seconde donnant à la première la force et le crédit qui manquaient pour
toucher le plus grand nombre. Si on pouvait opposer d’autres mots aux mots, on ne pouvait
rien opposer à l’image. L’image restait dans les mentalités un témoin de la réalité qui n’était
pas négociable, une part de vérité qui faisait dire aux sociologues, qu’une information sans
image n’existait pas. Quoi de plus vrai que ce que l'on a vu de ses propres yeux ? Ce n’est que
dans la seconde moitié du siècle qu’on remarqua le côté falsificateur des images. D’abord, en
1
EMOND, Bernard, « Lettre aux jeunes gens qui me demandent comment devenir réalisateur », 2006
2
BAUDRILLART Jean, « La société de consommation », Gallimard, 1996
3
BAUDRILLART Jean, Interview à l’occasion du 15eme festival Visa pour l’image, Le Monde, 2008
5
6. dénonçant les photomontages comme ceux des pays communistes qui sont restés célèbres.
Ensuite, Chris Marker dans son court métrage Lettre de Sibérie (1958) montra comment les
mêmes images pouvaient se prêter à des interprétations totalement contradictoires selon le
point de vue qu’on adoptait, le traitement qu’on faisait subir à ce matériau visuel brut, le
commentaire qui l’accompagnait ou encore le fond sonore sur lequel on le faisait défiler. Dans
le même état d’esprit, l’effet Koulechov – appelé aussi effet-K – désigne la propension d’une
image à influer sur le sens des images qui l’entourent. Pour mettre en évidence cela, le
théoricien Lev Koulechov réalisa une expérience. Il fit trois tirages d’une même photo : un
gros plan de l’acteur russe Mosjoukine inexpressif auquel il fit précéder trois images
différentes : une assiette à soupe, un cadavre dans un cercueil et une femme allongée dans un
canapé. Interrogés après le visionnage de chaque séquence, les spectateurs devaient
caractériser le sentiment exprimé par l'acteur. Dans le premier cas, les spectateurs croyaient
percevoir la faim, dans le second, la tristesse et dans le dernier le désir. L’effet Koulechov
démontre que les images prennent leur sens les unes par rapport aux autres. C’est ainsi que
l’image transita lentement de vérité universelle à interprétation possible donc subjective.
Rapidement, les graphistes et publicitaires prirent conscience du pouvoir manipulateur de
l’image. « Là où il y a de l'image, il y a du désir et de l'amour », affirmait Hugues de Saint-
Victor. La publicité fonctionne largement sur ce principe et permet de vérifier à quel point
l'image est un objet de désir : la pulsion acheteuse, aujourd'hui, s'accroche en grande partie
aux images. En 2002, Rick Poynor dévoile avec violence et ironie une vérité à la fois
ambigüe, dérangeante et inquiétante, dans « La loi du plus fort. La société de l’image ». À
travers ces 36 essais, il commente la place qu’a prit l’image dans notre société à travers le
graphisme la publicité en passant par la photographie et l’art. « L’image a tellement envahi
nos vies que nous ne reconnaissons même plus ces innombrables astuces pour nous séduire,
nous cajoler, nous déranger et nous exciter. C’est tout à fait naturel. Les choses sont ainsi. » 4
On assiste à une « guerre de l’image » ouverte où celui qui parlera le plus fort gagnera. Et
cela, à travers divers moyens : le traitement graphique, la tactique utilisé pour toucher le
spectateur, ou encore l’envergure de la campagne – affiches placardées dix fois dans une seule
station de métro. C’est malheureux, mais les images ne nous parlent plus, elles sont bien trop
occupées à l’heure actuelle à se chamailler entre elles. D’après Guy Debord, la société est
désormais vouée au culte de la marchandise et de la consommation triomphante. Dans son
œuvre majeur « La société du spectacle », cette société se fonde sur « un rapport social entre
4
POYNOR Rick, « La société de l’image », Pyramyd, 2002
6
7. des personnes, médiatisé par des images » 5 qui éloignent de la vraie vie. En effet, il est vrai
que l’image ne peut être inévitablement qu’une représentation, une imitation, un fragment de
vérité tout au mieux du réel. « […] l’image est analogique : elle fonctionne par ressemblance
avec l’objet représenté. » 6 L'urbaniste et philosophe Paul Virilio intègre, lui, l'image dans le
cadre d'une « dromologie » c'est-à-dire science de la vitesse. Il montre que nous vivons dans
une civilisation de l'optique, où l'image participe à une tyrannie du temps réel, de
l'immédiateté, de l'ubiquité. C’est certain, pour communiquer plus facilement et surtout plus
rapidement, l’image semble supérieure au texte. « […] on le voit tous les jours : les
magazines illustrés se vendent plus facilement que les magazines de texte. »6 Entre l'image et
l'écriture, une longue histoire de rivalité existe, qui aujourd'hui ne fait que grandir.
Cependant, il ne faut pas non plus trop blâmer l’image puisque c’est indéniable, elle a sa
place dans notre société tant elle nous apporte. Le philosophe Daniel Bougnoux exprime cette
« nécessité » de l’image dans un article au titre parlant « Il ne faut pas avoir peur des
images » : « […] tant de choses ne passent que dans l'image : si je veux reconnaître
quelqu'un, connaître un pays avant d'y aller, rien ne vaut une bonne photo plutôt qu'une
longue description. » 6 Plus vite et plus fort qu'un long discours, l'image parle. Il y a 50 ans à
peine, la bande dessinée était fortement critiquée, rejetée par de nombreux éducateurs et
parents. On lui reprochait de prendre la place de l’écrit et d’offrir des narrations plus pauvres.
Maintenant on s’aperçoit que la bande dessinée et, plus globalement l’image, est un très bon
outil pédagogique. D’ailleurs, Daniel Bougnoux soutiens l’importance de l’image et plus
précisément de la bande dessinée dans le domaine scolaire : « Non seulement elles nous ont
éduqué, mais elles suscitent autour d'elles une intense communication : Tintin a beaucoup fait
parler de lui dans les préaux d'école, et la « tintinologie » s'enseigne aujourd'hui à
l'université. […] Les programmes, les manuels, incitent à l’exploitation de l’image et les
élèves y sont sensibles. » La « force » de l’image tient aussi au fait qu’elle soit perçue
synthétiquement. Elle éveille nos affects, suscite nos émotions. D'ailleurs Plutarque y fait
allusion dans la « Vie de Brutus », quand il raconte le moment où Porcia son épouse, doit être
séparée de lui: « Elle s'efforçait de cacher l'extrême douleur qu'elle ressentait, mais en dépit
de tout son courage, un tableau l'amena à se trahir ; le sujet était tiré de la littérature
grecque ; Hector était reconduit par Andromaque qui recevait de ses mains leur petit enfant
et avait les yeux fixés sur son mari. La vue de cette peinture qui rappelait à Porcia son
malheur, la fit fondre en larmes, elle alla la regarder à plusieurs reprises dans la journée et
5 DEBORD Guy, « La société du spectacle », Gallimard, 1996
6
BOUGNOUX Daniel, Sciences Humaines Hors-Série N°43, Déc2003/Jan Fév2004
7
8. chaque fois elle pleurait. » 7 De plus, la photographie et les moyens modernes
d'enregistrement ont conféré à l'image un rôle non seulement de conservation mais aussi
d'investigation dans les sciences de la nature, permettant bien souvent de donner à voir
l'invisible, grâce aux capacités d'observations de certaines machines bien supérieures à celle
de l'œil humain. À la suite de cela, on remarque que ce qu’il faut blâmer ce n’est pas l’image
elle-même mais la répétition des mêmes signes sans signifiant, le matraquage publicitaire.
Intoxiqués de se faire « shampooiner » le cerveau à longueur de journée on a choisi de se
méfier de l’image. Peu à peu, on s’est fait à l’idée que, dans un monde envahi d’images
chargées, la simplicité pouvait être un gage d’authenticité. Et à l’inverse, que ce qui était trop
chargé était forcément suspect.
À la cohue générale, l’atout de la simplicité ne pourrait-il pas redonner aux images la
parole? La simplicité peut-elle nous aider à « mieux » communiquer ?
Dans un premier temps nous étudierons les différentes raisons qui témoignent que la
simplicité est un atout majeur dans notre société. Pourquoi avons-nous tant besoin de
simplicité à l’heure actuelle? Quelles sont les points forts de cette utilisation ? Par la suite,
nous verrons que paradoxalement ce n’est pas si simple de simplifier. Nous étudierons les
dérives qu’engendre son utilisation excessive ou sa mauvaise utilisation. Ensuite, en étudiant
le contraire de la simplicité : la complexité, nous en déduirons que la simplicité au delà d’être
un bon moyen de communication ne peut vivre sans la complexité et ainsi avoir le monopole
dans le domaine de la communication. Ce constat fera naître la dissociation entre
« complexité » et « chaos » qui mettra en évidence l’importance majeur d’une « bonne »
communication : l’organisation. À la suite de tout cela, il m’est apparut essentiel que la
simplicité possédait des « lignes de conduites » qui dans notre société peuvent nous être utile
pour « mieux » communiquer. En effet, la simplicité se démarque de nos jours fortement
puisqu’elle n’agresse pas, elle est respectueuse. D’après mes constats, j’ai donc décidé dans
ma troisième partie de soulever des sujets plus ciblées, tel que la production nécessaire, ou
encore la communication respectueuse envers le public et l’environnement.
7
PLUTARQUE, « La vie de Brutus, premier consul de Rome », 1730
8
9. I - La simplicité
Avant même de parler de simplicité, il me semble important de rappeler quelques définitions
issues du dictionnaire – Larousse 2003 – pour qu’il n’y ait pas de confusion entre les
différents termes abordés dans ce mémoire.
« Simplicité : Qui suffit à soi seul, qui n’a besoin de rien d’autre pour produire l’effet
attendu. Qui est constitué d’un petit nombre d’éléments qui s’organisent de manière claire. »
La simplicité s’oppose à la complexité.
« Simpliste : D’une simplicité exagérée, qui ne considère qu’un aspect des choses. » Quelque
chose de simpliste est incomplet, il y a un manque, un oublie volontaire ou involontaire.
« Minimaliste : Recherche de solutions requérant le minimum de moyens. » Le minimalisme
est aussi un mouvement artistique où les formes sont simplifiées à l’extrême et les éléments
orchestrés dans la simplicité la plus radicale.
Après lecture de ces quelques définitions, nous pouvons déjà constater qu’il ne faut pas
confondre le terme « simple », qui exprime le dépouillement de tout superflu avec le terme
« simpliste », qui exprime le fait de donner une vision incomplète des choses.
Plus discret et moins tape à l’œil, nous avons confiance dans la simplicité. Mais pourquoi lui
accordons-nous plus d’attention et de crédibilité? Dans cette première partie nous analyserons
les différents points forts de la simplicité.
1 Un besoin
1.1 quelque chose de naturel
La réponse la plus « simple » serait que nous en avons naturellement besoin! John Maeda
auteur « De la simplicité » commence d’ailleurs son ouvrage par cette phrase « La simplicité
c’est sain. » 8 Il y a dans le culte du « moins » quelque chose de rigoureux, de rationnel et de
serein. Econome de ses moyens, il serait ascétique. La Gestalt – psychologie de la forme – a
observé à travers la loi de Prägnanz que notre cerveau recherche toujours la simplicité.
Lorsque des choses se présentent à nous de façon ambigüe de sorte qu’elles peuvent être
interprétées de différentes manières, notre cerveau choisira toujours l’interprétation la plus
8
MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
9
10. simple. Ainsi, de façon naturel, un tout, un ensemble est perçu avant les parties le formant.
L’exemple le plus évocateur est celui du smileys ☺ ce n’est qu’une succession de caractères
spéciaux qui n’a aucun sens et ne fait référence à aucune règle. Pourtant naturellement nous le
regardons dans sa globalité pour l’identifier et ensuite seulement dans un second temps
remarquons de quoi il est constitué. John Maeda, à travers la Gestalt changeante de l’Ipod
Apple, montre à quel point de petits changements d’organisation peuvent créer de grandes
différences dans le design. Il confronte les trois designs des touches de commandes de l’Ipod :
« De gauche à droite, nous pouvons lire les étapes de l’évolution de l’Ipod ainsi : simple au
départ, puis plus complexe, et enfin aussi simple que possible. […] la troisième phase des
commandes de l’Ipod suscite le désir, parce qu’elle estompe toutes les commandes pour
arriver à une seule image simple. » Apple en créant un tout constitué d’un ensemble de
parties organise de façon à ce que notre cerveau soit le plus réceptif. En généralisant un
ensemble complexe, nous simplifions. Ce comportement peut aussi bien être expliqué par
notre cerveau reptilien qui gère notre « instinct de survie ». Nous avons besoin d’identifier le
plus rapidement possible ce qui nous entoure pour y distinguer un éventuel danger. Imaginez
le temps qu’il nous faudrait à identifier une pelouse si nous devions pour cela voir chaque brin
d’herbe individuellement. Cet exemple peut sembler un peu farouche mais pourtant nous
pensons ainsi. John Maeda résume –de façon peu être un peu brutal – que nous sommes des
« […] des animaux organisationnels. Nous ne pouvons nous empêcher de regrouper ce que
nous voyons. »
En fait, simplifier un design soulage l’effort cognitif de l’observateur, d’une certaine manière
on facilite le travail de réflexion. Car naturellement, le cerveau aime que d’une certaine façon
on lui mâche le travaille.
10
11. 1.2 un reflexe face au surplus
La simplicité c’est aussi une réponse face aux communications qui chargent actuellement
notre quotidien. Elle apparait comme un coup de balai dans les oripeaux d’une société qui
croule sous ses propres excès. Graphiste et plasticien, Malte Martin prend le parti pris de
s’opposer à la tendance actuelle de surenchère des images et des couleurs avec son procédé de
« basse tension ». Il entend proposer des signes qui « parlent moins fort » que les signes
commerciaux et le mobilier urbain. Il le dit lui-même lors d’une conférence donné à la
Sorbonne «La société du spectacle produit une course effrénée menant à une surenchère de
signes. Le clignotement permanent et généralisé des enseignes est le symbole de la
marchandisation du monde. Je n’ai pas les moyens de crier plus fort et je n’ai pas envie de
rajouter du bruit au bruit, de la couleur à la couleur. » 9 La « basse tension » c’est en quelque
sorte parler moins fort que les autres personnes qui crient atour de vous afin d’attirer
l’attention. Dans son travail pour le théâtre Athénée, il propose des affiches au graphisme
calme et sans fioriture mêlant des jeux typographiques aux signes. « Les mots, le contraste
typographique, le noir et blanc, et souvent la matière du papier, sont les ingrédients de mes
tentatives de ralentissement du monde. Il s’agit paradoxalement de gagner en force en
susurrant, et d’envoyer de temps en temps des éclats de mots dans la ville « avec excès, près
de leur déchirure. » Même si le traitement graphique de Malte Martin est très épuré, sobre et
minimaliste, il n’en reste pas moins fort, et son impact visuel puissant. Puisque attention, il ne
faut pas croire que la simplicité doit être « discrète » ou « petite », la preuve le graphisme de
Malte Martin est affirmé, ces signes graphiques occupent toute la surface... Un jeune graphiste
français, Florent Guerlain a eu le projet ambitieux de concevoir une identité visuelle
modulable pour la France qu’il appellera « Logographie France », « Logo » comme logotype
et « Graphie » pour graphisme. Du bleu, du blanc, du rouge et des formes géométriques, à
peine plus ! L’objectif est de créer une identité visuelle globale pour la France d’une
modularité extrême. Une charte pour répondre une bonne fois pour toute au désastre
graphique causé par l’infinie alternance gauche /droite au sein des institutions qui remet
quasi-systématiquement en cause la marque graphique du prédécesseur pour mieux marquer
son territoire. Ce début de « charte graphique » –très réussie – tente de répondre à l’actuelle
création d’images multiples des différentes institutions publiques et ministères qui produisent
en continu un patchwork graphique des plus monstrueux et des plus coûteux.
9
MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne
11
12. La simplicité c’est en quelque sorte « une bouffée d’air frais » qui vient au milieu d’une cohue
graphique apporter un peu de tranquillité.
2 Réduire, synthétiser pour « plus »
2.1 une mise en valeur de l’essentiel
1.1.1 cibler sur l’information
La simplicité permet de mettre en valeur certains éléments. « Less is more » – trad : « Moins
est plus ». Le plus célèbre de tous les « éloges du moins » a été fait par un architecte. Et pas
des moindres : au milieu du XXe siècle, Mies van der Rohe symbolisait l’attrait des bâtisseurs
pour le minimalisme. Cette formule signifie que moins vous mettez d’éléments, plus ceux qui
restent sont mis en valeur. En effet, les éléments d’une composition rentrent en compétitions
les uns par rapport aux autres et cela génère ce qu’on appel du « bruit visuel ». Moins il y a
de « compétiteurs » en liste, plus ceux qui restent ont la chance de gagner l’attention du
spectateur. Le dessinateur de bande dessiné Scott McCloud exprime très bien cela dans son
livre « L’art de l’invisible » ou il affirme en parlant du dessin humoristique « Quand nous
faisons tendre une image vers l’abstraction, nous éliminons des détails mais par contre nous
en mettons d’autres en valeurs. En épurant une image pour n’en garder que sa signification
essentielle, le dessinateur amplifie cette signification… » 10 Récemment, des créations
d’affiches ont prouvés qu’avec très peu d’élément ont pouvait résumer facilement un contenu.
« Poster Series of TV Shows » est un formidable travail graphique conçut par le directeur
artistique Albert Exergiant. Une série de posters minimaliste, représentant par des symboles
simples, les séries TV les plus populaires dans le monde. Avec cette collection de quarante
affiches, Albert Exergian propose de redécouvrir les séries sous un nouvel angle, avec des
symboles simples mais fort de sens. Le résultat est tellement convaincant qu'il est facile de
découvrir les séries qui se cachent derrière chaque affiche. En réduisant le nombre d’élément
on focalise le spectateur sur l’essentiel et ainsi l’information n’en ai que plus lisible.
1.1.2 délivrer de l’émotion
« Le peintre et l’empereur » est un conte Zen qui amène la simplicité de manière très
intéressante dans un contexte fantastique et sensible. Ce conte relate l’histoire d’un empereur
qui commanda à un peintre une fresque pour ses nouveaux appartements. Il demanda « qu’il y
soit représenté deux dragons, l’un bleu et l’autre jaune, symbole des deux énergies
10
McCLOUD Martin, « L’art de l’invisible », Delcourt, 2007s
12
13. primordiales dont l’union engendre l’harmonie céleste. » 11 Le temps passa, à tel point que
l’empereur en oublia sa commande passée. « Il découvrit alors avec stupéfaction deux espèces
de zigzags grossièrement esquissés, l'un bleu et l'autre jaune. Cela ressemblait vaguement à
deux calligraphies ! » Furieux du résultat, qui avait demandé tant d’argent et tant de temps il
jeta le peintre en prison. Il dût pourtant se résigner la première nuit à dormir devant cette
fresque qu’il avait malheureusement demandé à être devant son lit. « Au plus profond de la
nuit, des rugissements réveillèrent le maître de la Chine. Celui-ci se tourna vers la fresque et,
dans la pièce tout embrasée par un clair de lune, il crut voir deux éclairs, pareils à des
dragons, l'un bleu et l'autre jaune. Ils s'affrontaient, s'enlaçaient, se repoussaient,
échangeaient leurs places en une danse infinie. » Le lendemain, l’empereur alla demander des
explications au peintre. Ce dernier, l’emmena dans sa caverne là ou il effectuait ses
recherches pour lui donner des réponses. « Sur les parois, tout près de l'entrée, étaient peints
des dragons bleus et jaunes comme l'empereur les avait tant espérés, avec tous les détails les
plus réalistes, les écailles luisantes, les griffes acérées, les naseaux fumants... Mais à mesure
que la torche s'enfonçait dans les profondeurs, elle réveillait des images de plus en plus
épurées pour aboutir à de simples lignes de force. Il ne resta plus à la fin que l'essence
vibrante des dragons, les énergies primordiales figurées par les mêmes traits de couleurs que
ceux tracés sur la fresque. » Ce conte Zen met en évidence que pour délivrer une émotion il
n’est pas obligatoire d’être proche du réalisme. À l’inverse, c’est souvent le superflu, les petits
détails, qui cachent des choses beaucoup plus profondes.
Simplifier un design – par élimination – permet de mettre l’accent sur certains éléments
considérés comme essentiels. Si on ne voit que les éléments primordiaux par ce que les autres
éléments sont tout simplement absents, notre attention n’a d’autre choix que de se focaliser
sur ceux qui existent, c’est à dire l’essentiel. Synthétiser/réduire s’avère être un très bon
moyen de mettre en valeur de l’information mais aussi dans certain cas aussi de délivrer de
l’émotion.
2.2 un gain de temps
La simplicité nous fait gagner du temps. Et dans un monde où tout va plus vite, où le temps
disponible devient de plus en plus précieux, gagner du temps est primordial. Pourtant
inévitablement nous passons beaucoup de temps à attendre et pour beaucoup de choses :
attendre qu’une page internet charge, attendre que l’eau boue, attendre son repas au
restaurant, attendre un examen… John Maeda aborde cette notion, du temps que nous
11
YEIAZEL, « Le peintre et l’empereur »
13
14. n’aimons pas laisser filer. Il affirme « Personne n’aime souffrir de la frustration liée à
l’attente. Les consommateurs et les entreprises essaient tous de trouver l’option la plus rapide
ou tout autre moyen de réduire cette frustration. » Et c’est ainsi que les Fast Food peuvent se
vanter de ne pas vous faire attendre votre repas, les Chronopost vous offre la possibilité
d’envoyer votre courrier plus rapidement, les avions vous proposent des vols direct pour
éviter de vous faire perdre du temps en passant par de pénible escales… Quoi de plus simple
que de fais un vol Paris – New York lorsque l’on veut aller à New York en partant de Paris ?
Et pourtant, « Un vol direct économise du temps par rapport à un trajet avec
correspondances mais il coûte sensiblement plus cher. » En effet, la simplicité est devenue un
formidable atout de vente. Et même plus impressionnant, la simplicité est devenue le sujet
principal d’une publicité. Prenons l’exemple de la publicité qui passe actuellement pour la
nouvelle Nissan Pixo : « Nouvelle Nisan Pixo, economique 103g de CO² par kilomètre, c’est
simple. Welcome to Simplicity. » Nissan joue sur le côté conviviale, la publicité pour une fois
ne cherche pas a en dire trop pour coller à son message. Revenons à notre gain de temps. John
Maeda nous parle dans son livre de l’Ipod Suffle lancé par Apple, qui diffère des autres Ipod
ayant la particularité de ne pas avoir d’écran. Son interface utilisateur est de ce fait largement
simplifiée. L’Ipod Suffle passe aléatoirement des musiques, la seule action possible est de
passer la chanson. « Renoncer à la possibilité de choisir et laisser une machine le faire pour
vous : voila une méthode radicale pour atténuer le temps passé à tripoter la molette. » Le
Shuffle part d’un bon principe même s’il faudrait qu’il sache selon notre humeur, notre envie
ce que l’on veut vraiment entendre. Amazon.com ou la Fnac.com ont très bien compris cela.
Sur ces sites, on vous recommande des livres que vous serez susceptible d’aimer d’après un
choix de livre. Ce gain de temps astucieux est établi en fonction des préférences d’autres
personnes dont le site juge que vous avez le même profil que vous. D’ailleurs Internet reste
l’exemple le plus éloquent, c’est un lieu d’abondance ou l’internaute doit trier et faire des
choix parmi une multitude d’informations pour trouver ce qu’il cherche. De même que plus
un site sera simple, plus il sera claire, et plus rapidement l’internaute trouvera ce qu’il
cherche. Ainsi, les choses simples, claires nous donneront la satisfaction de ne pas avoir perdu
notre temps. Mais pourquoi ne pourrait-on pas apprécier la lenteur ? Est-ce une réaction
inhérente de notre volonté ?
2.3 engager le spectateur
La simplicité est aussi un moyen d’engager le spectateur. Dans l’art Zen – on peut d’ailleurs
se remémorer le conte « Le peintre et l’empereur » –, les Japonais pensent que si tout est
14
15. exprimé, l’intérêt de l’observateur disparaît. En décrivant les choses de manière la plus
dépouillée possible, on réduit leur description au strict minimum. Cela permet d’éveiller
l’intérêt et l’imagination de l’observateur en lui laissant une marge d’interprétations. Bien des
fois, l’image révèle trop de choses, ne permettant pas à l’observateur de se projeter. Dans
l’introduction nous avions déjà comparé les mots aux images. Les mots ont tendance à nous
laisser imaginer des représentations à défaut d’avoir une image. Prenons par exemple les
romans adaptés au cinéma – Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux… Combien de personne
vous ont dit après avoir vu un film adapté d’un livre : « Je préfère largement le livre.» « Les
acteurs sont mal choisi.» « Je n’imaginais pas du tout cette scène comme ça. » C’est évident,
à travers un livre, aussi bien détaillé soi-t-il, il y aura toujours notre propre interprétation
d’après les mots. Les mots nous laissent une part de liberté, tandis que l’image et surtout
l’audiovisuel figent, et nous donne immédiatement à voir une représentation de la réalité.
C’est d’ailleurs pour cela que les publicités qui utilisent la technique du teasing – ou de
l’aguichage – fonctionnent très bien. Le teasing ne peut dire d’où il provient. Pas de signature,
pas de moyen d’identification de la marque, seulement une énigme, une question, une petite
phrase amusante ou quelque chose de totalement incompréhensible. Peu importe, tant que le
consommateur n’ait qu’une seule envie : celle d’aller voir de l’autre côté de l’affiche, de la
page du journal, ou du spot télévisé pour découvrir de quoi il s’agit. La réponse arrive au
prochain épisode, dans un laps de temps plus ou moins court. On se souvient tous de la
publicité anti-tabac « Maintenant vous savez » qui fonctionne en deux temps. Le premier spot
visuel est un micro trottoir où l’on présente aux gens cette information : « On a décelé dans
un produit de grande consommation des traces d’ACIDE CYANHYDRIQUE, de MERCURE,
d’ACETONE et d’AMMONIAC. » En réponse à cela, les gens pensent à des détergents, du
poison, des produits ménagés… Un peu plus tard un deuxième spot publicitaire donnera la
réponse « Ce produit c’est la cigarette. » Le teasing fonctionne incroyablement bien parce
qu’à la première étape nous n’avons pas de suite, de réponse. Cela suscite la curiosité. Tout ne
nous est pas donné. L’inconvénient du teasing est qu’il coûte plus cher qu’une publicité
traditionnelle – deux affiches, deux spots télévisuels… Mais n’oublions pas que dans le
vacarme publicitaire constant, une seconde d’attention de la part du consommateur n’a pas de
prix. L’image suggérée est un bon moyen d’engager le spectateur et d’attirer son attention.
15
16. 3 Un esthétisme séduisant
3.1 un art bien maitrisé par les Japonais
La simplicité est aussi une forme d’esthétisme très prisée par certaines cultures. L’Art
Japonais en est le meilleur exemple. Il faut néanmoins souligner que malgré les apparences
leur art est caractérisé par des oppositions esthétiques. Prenons par exemple deux œuvres de la
même période : le Palais de Katsura est un exercice de simplicité mettant l’accent sur les
matériaux naturels et bruts alors que le Mausolée de Töshögu est une structure symétrique
rigide recouverte sur chacune de ses surfaces visibles de gravures en relief colorées avec éclat.
Mais l’art japonais reste néanmoins connu pour sa simplicité étant donné qu’il excelle dans ce
domaine. C’est après la seconde guerre mondiale que les développements du design graphique
de manière général, en matière d'emballages, d'affiches et de magazines, s'inspirent
visiblement du graphisme japonais. Par la suite, les Jeux olympiques de Tokyo en 1964 vont
fournir aux graphistes japonais l'occasion de démontrer leurs talents, et c'est à partir de cette
date que se développa au Japon le mouvement moderne de design graphique, inspiré du
constructivisme européen. Les affiches de Yasuku Kamekura (1969), et notamment celle des
Jeux olympique de Tokyo, sont à travers des formes géométriques simples, sobres et
dynamiques. L’art Japonais à cette philosophie d’apporter une attention toute particulière à la
finesse et la simplicité, aux choix de matériaux et au sens aigu du détail. Différents concepts
guident le design japonais actuel : kawaii – beau –, craft – l’artisanat –, kime – la finesse du
grain, la finition parfaite –, tezawari – sensations tactiles –, minimal – la beauté des formes
dépouillées. Prenons par exemple la célèbre marque : Muji, qui est loin d’être anodine. Muji
est une enseigne de magasins japonais, née à Tokyo en 1980, appartenant à l'entreprise
Ryohin Keikaku. Le mot « Muji » veut littéralement dire « pas de marque, bon produit » –
soit « de qualité sans marque ». D’ailleurs, Nick Currie affirme « Ici, en Occident, nous avons
enfin la chance de découvrir une marque qui repose sur l'absence de stratégie de
marque. » 12 Le succès de Muji est tel que de nos jours il possède des magasins et des points
de ventes dans beaucoup de villes du monde entier et propose des articles allant des biens
ménagés aux jouets pour enfant, en passant par la papeterie et la vaisselle. Les produits tout
comme la communication visuelle de la « non marque », repose sur le concept du Shibui. Il
s’agit d’une esthétique reposant sur la simplicité et l’inintrusivité. En effet, ce qui unit
l’ensemble des produits de la marque tout comme son graphisme c’est l’absence de couleurs
et de détails inutiles.
12
CURRIE Nick, The Moment, le blog du Style Magazine du New York Times, 2008
16
17. 3.2 une grande histoire d’architecture
La simplicité occupe une place très importante dans le domaine de l’architecture. L’art
cistercien datant de 1098 est caractérisé par des bâtiments remarquables par la pureté de leurs
lignes, l’économie des matériaux et leurs simplicités. Toute moulure ou tout élément décoratif
était banni. Nous avons bien mentionné « art » cistercien mais cette expression repose sur un
malentendu. Les moines n’avaient aucune intention de faire de l’art, mais justement d’évacuer
l’art de leurs églises. En réalité, les moines de XIIe siècle souhaitaient revenir à la pureté de la
règle de Saint Benoît, fondée sur le renoncement, l’exigence, la pauvreté. Des constructeurs
ont ainsi bâti une série de chef-d’œuvres sans le savoir ; leur quête uniquement spirituelle,
n’était à aucun titre une recherche du beau. En 1134, lors d'une réunion du Chapitre général
de l'ordre, Bernard de Clairvaux qui est au sommet de son influence, recommande « La
simplicité dans toutes les expressions de l'art. » 13 Dès lors, les cisterciens vont développer un
art dépouillé et souvent monochrome. Des architectes comme Le Corbusier, Mies van der
Rohe ou encore Loos ont en commun avec les cisterciens cette haine de l’ornement qui
distrait, cet idéal de pureté. Adolf Loos, architecte Viennois, fut un des précurseurs et
théoricien du « moins ». Son texte le plus célèbre mais aussi le plus incisif, « Ornement et
crime » fit scandale sûrement du fait que l’heure était à la surabondance de l’art nouveau, fort
de ses couleurs luxuriantes et de ses rondeurs voluptueuses. « D'un combat de trente années,
je suis sorti vainqueur. J'ai libéré l'humanité de l'ornement superflu. "Ornement", ce fut
autrefois le qualificatif pour dire "beau". C'est aujourd'hui, grâce au travail de toute ma vie,
un qualificatif pour dire "d'une valeur inférieure". » 14 L’Art nouveau lui semble refléter
l’hypocrisie de la société de son temps. Il met ses idées en application, puisqu’il conçoit son
immeuble de la Michaelerplatz à Vienne, surnommé « La maison sans sourcils » du fait que
les fenêtres ne comportaient aucun ornement. Construite en 1910, on peut faire remarquer que
Loos est peu être quelqu’un d’encore incompris mais qu’il a au moins le mérite d’avoir
quarante ans d’avance sur son temps.
3.3 le design suisse
Le style typographique international (ou style international), également connu sous le nom de
style suisse, est un courant du design graphique développé en Suisse dans les années 1950
notamment par Armin Hofmann et Paul Rand. Il met l'accent sur le dépouillement, la lisibilité
et l'objectivité. Le design Suisse a sût imposer l’Helvetica et la grille de composition dans le
13
DE CLAIRVAUX Bernard, « L’essence du christianisme », Gallimard, 1992
14
LOOS Adolph, « Ornement & Crime », Rivages, 2003
17
18. but premier de nous aider à soustraire méthodiquement de nos compositions tout élément
superflu. La police Helvetica est créée en 1957 par Max Miedinger, elle a pour objectif
d’atteindre l’harmonie optique la plus aboutie possible. Son tracé d’une grande neutralité lui
permet de se prêter à tous les usages, si bien qu’elle est une des polices les plus utilisées dans
le monde. Dans ce courant, la photographie est souvent en noir et blanc, elle est préférée aux
illustrations dessinées. Les affiches sont une synthèse entre une « manière allemande » –
monumentalité des représentations, sobriété des traits, contraste des couleurs – et une
« manière à la française » – couleurs et fluidité des traits. Le design suisse répond aux besoins
nouveaux de la société de consommation de masse de l'après-guerre et le monde entier va
l'adopter. Caractérisé par sa grande simplicité ont peut souligner que ce courant a encore
beaucoup d’influence de nos jours.
Nous avons vu que la simplicité améliore la clarté d’un message ou d’une mise en page et
facilite l’effort cognitif de l’observateur tout en l’impliquant. La simplicité a donc beaucoup
d’avantages et répond à un besoin naturel chez l’observateur. Mais, simplifier n’est pas un
acte aisé. Nous évoquerons dans cette seconde partie les dérives de la simplicité. Et dans un
second temps, nous pencherons sur son contraire la complexité. Puisque la simplicité se
montre un si bon atout de communication, pourquoi aurait-on encore besoin de complexité ?
18
19. II - Pas si simple !
1 Les risques de simplifier
La simplicité s’avère paradoxalement une opération délicate et ardue. Faire simple demande
d’investir du temps et de l’énergie. Etrangement, faire simple ce n’est pas simple ! Puisque
mal utilisée la simplicité peut faire des dégâts.
1.1 perdre des éléments essentiels
Andy Rutledge dans son texte « Complexe Order Simple Chaos » compare l’action de
simplifié à celle de faire de la chimie. « Il parait que simplifier est une action délicate. […]
Tout comme avec la chimie, la simplification peut entraîner la réduction, la distillation. […]
En outre, comme en chimie, si vous ne faîtes pas attention le résultat peut vous exploser au
visage. » 15 Le novlangue – Newsweek en anglais – langue officielle d’Océania, inventée par
George Orwell pour son roman « 1984 » en est un bon exemple. Cette langue a pour but de
rendre impossible l’expression des idées et à éviter toute formulation de critique envers l’Etat
en appauvrissant le lexique et la syntaxe du vocabulaire. Le vocabulaire est réorganisé en trois
classes A, B et C : le A ne contient que les termes nécessaires au travail et à la vie, le B les
termes à des fins politiques et le C à des termes scientifiques et techniques. « Comparé au
notre, le vocabulaire novlangue était minuscule. On imaginait constamment de nouveaux
moyens de le réduire. » 16 L’idée fondamentale du novlangue est de supprimer toutes les
nuances d’une langue. Par exemple, si la langue possède le mot « bon », il est inutile qu’elle
est aussi le mot « mauvais ». On crée le concept « mauvais » en ajoutant un préfixe marquant
la négation : cela donnera « inbon ». « On remarqua qu’en abrégeant ainsi un mot, on
restreignait et changeait subtilement sa signification car on lui enlevait les associations qui,
autrement, y étaient attachées. […] Chaque réduction était un gain puisque, moins le choix
est étendu, moindre est la tentation de réfléchir. » L’idée sous-jacente au novlangue est que
si une chose ne peut pas être dite, cette chose ne peut pas être pensée. La question soulevée
par cette supposition est de savoir si nous définissons toujours la langue ou sommes parfois
« formatés » par elle. Par exemple, peut-on ressentir l’idée de « liberté » si nous ignorons ce
mot ? Cette théorie est liée à l’hypothèse Sapir-Whorf et à la formule de Ludwig
Wittgenstein : « Les limites de ma langue sont les limites de mon monde ». Le novlangue, en
réduisant son vocabulaire, a soulevé un des risques important de la simplification par la
réduction : à enlever trop on supprime le sens. « La puissance de la simplification est telle
15
RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009
16
ORWELL George, « 1984 », Folio, 1972
19
20. qu’elle peut faciliter une communication directe mais elle peut aussi détruire ou corrompre
des renseignements. » 17
1.2 tomber dans le simplisme
L’autre risque de trop simplifier serait de tomber dans une conception trop simpliste, c'est-à-
dire où il manque des éléments essentiels. Et ainsi, faire trop simple risque d’être interprété
comme quelque chose de « léger ». D’ailleurs, la communication d’Apple commence vis-à-
vis de cela à être fortement critiquée de part et d’autre « (…) des campagnes publicitaire se
rapprochant plus du produit cosmétique. » 18 Comme vous le savez, la pomme communique
depuis quelques années sur la simplicité. Tout le monde connait leurs produits à l’esthétique
pure et sans fioriture. Les publicités et spots télévisuels jouent sur cette intense simplicité :
des fonds immaculés de blanc, un produit placé souvent au centre, et une voix off qui vient
sobrement présenter les fonctionnalités du produit. Leur communication est justifiée
puisqu’elle suit parfaitement les produits Apple ; des outils simples, pratiques et beaux, et
d’ailleurs cela marchait très bien. Mais depuis peu la marque semble manquer cruellement de
créativité en matière de communication et se servir abusivement de leur atout de
communication, si bien que la simplicité caractérisant l’univers Apple tourne dangereusement
au simplisme. Prenons par exemple leur tout dernier produit « L’Ipad », leur plus grande faille
fût de lancer un slogan certes simple, mais sans fond ni message percutant « Qu’est ce que
l’iPad ? L’iPad est fin, l’iPad est beau. » Pourtant cela n’empêche aucunement le produit de
se vendre. Sûrement parce que la marque est déjà bien trop ancrée dans notre culture, l’image
est installée et Apple n’a plus besoin de s’imposer. Cependant, on comprend qu’entre
simplicité et simplisme, existe une frontière ténue difficile à percevoir mais facile à franchir.
« Le problème est qu’il faut choisir ce qui mérite de vivre en sacrifiant ce qui mérite de
périr. » 19 Pour nous aider à faire cela, Jacob Nielsen, ergonome Américain, préconise avant
d’ajouter un élément de se poser deux questions fondamentales :
1. « Cet élément simplifie-t-il la tâche de l’utilisateur ? »
2. « Cet élément apporte-t-il une valeur ajoutée ? »
… si la réponse est « non » éliminez-le.
John Maeda se confronte à la même problématique « Où se trouve l’équilibre entre simplicité
et complexité ? Telle est la question. Jusqu’où les choses peuvent elles être simplifiées ? »
17
RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009
18
EKINOXE Julien, extrait d’un article de blog, 2010
19
MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
20
21. Naturellement, nous avons tendance à en garder toujours plus, nous n’aimons pas supprimer
les choses. Réduire n’est donc pas un acte aisé. Avant d’ajouter un élément graphique dans un
design il faut se demander si cet élément participe oui ou non à communiquer un message.
1.3 la simplicité reflet de « pauvreté »
Don Norman, un des vieux gourous de l’utilisabilité, a jeté un pavé dans la mare avec son
article « Simplicity is highly overrated » – « La simplicité est largement surestimé » –, où il
exprime son agacement face à cette nouvelle « tendance » qui incite les designers à
débarrasser nos écrans de toutes les fonctions qui pourraient nous être utiles. « Alors qu’est-ce
que les gens veulent dire quand ils parlent de la simplicité ? D’une seule touche, bien sûr,
mais avec l’ensemble de leur fonctionnalités préférées. » 20 Don Norman dans son article
compare deux grille-pains : le traditionnel avec un bouton pour contrôler la cuisson du pain à
un grille-pain allemand à $ 250 constitué d’un moteur pour abaisser automatiquement le pain
non grillé, d’un écran LCD, avec de nombreuses icônes, des graphiques et des chiffres… « La
simplicité ? Pourquoi un tel grille-pain ? […] Parce qu’il ajoute des fonctionnalités que les
gens veulent avoir. » Très radicale dans ses propos, selon lui la simplicité « est un mythe »
qui ne se vend pas. Plus un objet possédera des caractéristiques qui par conséquent le rendront
plus complexe mieux il se vendra. Les acheteurs assimilent la simplicité au manque de
puissance et de capacité – même si par derrière il peut s’avérer que ce soit tout l’inverse –, et
inversement la complexité s’assimile à la puissance. « […] les gens ont tendance à aller vers
des produits puissants, ils jugent de cela par l’aspect complexe. » C’est assez étrange comme
raisonnement, puisque moi-même j’ai arrêté d’acheter des objets aux fonctions multiples à
partir du moment où je me suis rendu compte qu’en achetant ce genre d’objet, je n’utilisais à
peine les 1/3 du produit. L’objet le plus éloquent serait sans doute l’évolution du téléphone
portable, en plus de téléphoner, d’envoyer des textos, de jouer et de prendre des photos, des
vidéos, ont peut maintenant aller sur internet, regarder la télévision, téléphoner en visio... Une
chose complexe nous demande du temps pour la comprendre et nous avons pourtant
mentionné précédemment que ce qui nous demande du temps ne nous attire franchement
pas. « D’un côté vous voulez un produit ou un service facile à utiliser ; de l’autre, vous voulez
qu’il accomplisse tout ce qu’une personne pourrait rêver qu’il effectue.» L’Iphone a tout à
fait compris cela, le design très épuré et simple cache l’envergure de ce Smartphone. De la
même façon, prenons comme exemple Google. Une page blanche, avec un endroit où écrire,
nous permet en un clique d’accéder à l’immense réseau d’ordinateurs et de bases de données
20
NORMAN Don, « Simplicity is highly overrated », 2007
21
22. Google. C’est pour cela que John Maeda expliquer que « Plus semble moins si on s’en tient
éloigné, très éloigné. » Don Norman a tendance à oublier cela, et à généraliser ou plutôt à
penser que les consommateurs généralisent et ainsi avance qu’une esthétique simple
s’assimile forcement à des fonctionnalités pauvres. « Et la vérité est que la simplicité ne se
vend pas. Pourquoi ? […] La réponse est celle-ci : les gens ne sont pas prêts à payer pour un
système qui semble plus simple, car il semble perdre en capacité. » La simplicité peut en effet
rendre sceptique les gens leur laisser penser qu’ils ne paient pas le prix fort pour un produit
dans lequel ils espéraient « plus ». John Maeda aborde ce souci dans son livre. Selon lui
lorsque l’on fait appel à la simplicité on est dans l’obligation de lui « insuffler » de la qualité.
« La perception de la qualité devient un facteur décisif quand il faut choisir moins à plus. »
D’ailleurs, l’industrie du luxe marche énormément avec cela. Si nous ne donnons pas à un
produit simple une valeur technique, prestigieuse ou autre ce dernier peut rapidement tomber
dans l’objet simpliste.
1.4 perdre le contrôle
L’action de simplifier – que ce soit pour un objet, une affiche ou encore une interface –
revient à ce que quelqu’un fasse le tri à notre place. Et par conséquent, à trop nous faciliter le
travail on perd la diversité qui nous permettait de faire des choix, prendre des décisions.
Comme nous l’avons vu l’Ipod Shuffle d’Apple impose la musique de manière aléatoire et de
ce fait il nous épargne la perte de notre temps à choisir des musiques mais en contre partie il
nous supprime la prise de décision. Est-ce vraiment un avantage ? Pourquoi sommes-nous
prêts à nous en remettre à la simplicité ? John Maeda donne une réponse à cela en affirmant
que « Dans la simplicité nous avons confiance. » La preuve, il n’y a pas longtemps une
machine à laver pas comme les autres est sortie sur le marché la « BEKO ONE ». L’utilisation
de cette machine par l’utilisateur se fait avec un unique bouton ! Les paramètres de lavage ou
autre sont déterminés automatiquement par la machine. Tout ce qu’il vous reste à faire est de
presser l’unique bouton présent sur la machine pour lancer le lavage, rien de plus simple ! La
simplicité ne serait-elle pas destinée aux fainéants ? De la même façon, une affiche qui ne
nous montre que l’essentiel ne va-t-elle pas manquer de « plus » de choses? Le surplus nous
apporte une valeur en plus qui n’est pas forcement nécessaire à la compréhension de l’affiche
mais appréciable. Il y a dans le « moins » quelque chose qui nous plait instinctivement
puisqu’en étant plus direct et plus simple il est beaucoup plus facile à comprendre que les
choses complexes, mais tout simplifier ne rendrait-il pas les choses trop ennuyeuses ?
22
23. 2 Et la complexité dans tout ça
2.1 simplicité et complexité: les opposés s’attirent
La simplicité sans la complexité aurait-elle encore une raison d’être ? C’est bien connu, les
opposés vivent de leur opposition. « La complexité et la simplicité sont deux qualités
symbiotiques. […] chacune a besoin de l’autre : sa définition dépend de l’existence de
l’autre. » 21 C’est le propre de la pensée complexe, que de ne pas séparer les contradictions.
La simplicité et la complexité ont besoin l’un de l’autre. Et d’ailleurs on remarque que plus il
y a de complexité sur le marché plus la simplicité ressort. C’est de cette manière que le
journal Telegraph s’est fait remarquer à Londres avec sa nouvelle campagne publicitaire.
Avec la prolifération des quotidiens gratuits la baisse des ventes de la plupart des grands
journaux a été inévitable. On a pu ainsi voir dans le métro Londonien une campagne pour le
journal Telegraph, ou plutôt pour son site internet, sur lequel le journal semble avoir
beaucoup investi. Sur fond blanc, des phrases viennent ponctuer agréablement les montées et
descentes menant aux quais du métro, soigneusement composées dans une typographie qui
rompt avec les caractères à empattements propres au monde des journaux. Ces phrases
vantent avec une sobriété graphique très Suisse la qualité des informations que l'on peut
trouver sur le site du journal, qui en ont fait le site du journal anglais le plus visité.
L'économie de moyens employés est apaisante et vient curieusement faire mouche au milieu
d'une débauche de visuels criards et colorés, qui cherchent tous à attirer l'attention avec
beaucoup d'excès. En choisissant un graphisme sobre et sans fioriture le journal Telegraph a
su se faire remarquer face aux communications beaucoup plus chargées. Imaginons
maintenant qu’il n’y ait que des communications jouant de leur simplicité, la campagne du
journal Telegraph aurait-il eu autant d’impact ? S’il ne restait que la simplicité, comment
saurait-on ce qui est vraiment simple ? Aurait-on besoin des communications « complexes »
pour faire ressortir les autres ? A-t-on besoin du mal pour savoir ce qui est bien ? Oui, sans
aucun doute. La simplicité ne peut donc en aucun cas exister sans son opposé, la complexité.
Mais la complexité est-elle vraiment responsable des mauvaises communications ?
2.2 la complexité comme moyen d’expression
On observe globalement que l’art oscille constamment entre deux pôles, le purisme et la
surcharge. L’approche vers une phase de surcharge est progressive, alors que la phase de
dépouillement survient brutalement. Prenons par exemple, l’art baroque. L’art baroque est un
21
MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
23
24. style qui naît au XVIe siècle en Italie à Rome et se repend rapidement dans toute l’Europe. Il
touche tous les domaines artistiques – sculpture, peinture, littérature, architecture et musique –
et se caractérise par l’exagération du mouvement, la surcharge décorative, les effets
dramatiques, l’exubérance et la grandeur parfois pompeuse. Les œuvres baroques avec leurs
extravagances et l’excès d’ornements nous donnent une impression de grande générosité.
Pendant un certain temps, l’art baroque fut jugé décadent jusqu’à ce que la mode – par
définition versatile – rejoue en sa faveur. Ainsi, les œuvres d’un Gaudi à Barcelone, regardées
il y a cinquante ans comme des curiosités issues d’un cerveau malade, attirent aujourd’hui le
monde entier. Son œuvre principal, l’église de la « Sagrada familia » située à Barcelone et
toujours inachevée, joue énormément sur la surabondance d’ornements. Sur certaines parties
du bâtiment on peut remarquer des végétations exubérantes. L’art baroque définit par des
aspects étranges et torturés s’épanouie pourtant dans un art luxuriant. À l’époque, la simplicité
et tout ce qui était de l’ordre d’épurer n’était pas bien perçus car on y voyait dedans une sorte
d’abandon du passé. De nos jours, l’art de la surabondance est beaucoup mieux accepter. Le
collectif de graphiste « Peach Beach », composé de trois artistes et designers basé à Neuköllz
à Berlin – Falk Hoger, Attila Szamosi et Lars Wunderlich – joue dans leurs compositions de
la surcharge. Peach Beach réalise le design de divers événements, édite des tee-shirts, travaille
sur des pochettes d’album... mêlant un goût prononcé pour les comics, le streetart. Il réalise la
couverture de l’ « Ex Berliner » de janvier où ils se font remarquer pour leur graphisme
« joyeusement bordélique et naïf. » 22 D’ailleurs, « So Me » se rapproche fortement de ce
graphisme. Cette artiste de son vrai nom Bertrand Sommie est un graphiste qui joue lui aussi
sur la surabondance graphique. Il réalise d’ailleurs en 2008 le clip de Justice « DVNO » dans
lequel il utilisera uniquement les logos détournés de marques américaines connues pour
critiquer la société de consommation. Toutes ces compositions démontrent que la complexité
est souvent inhérente et voir vitale pour le succès de certaines choses. Et comme le dit
simplement John Maeda « La complexité peut être belle. »
3 « Complexe » et « chaos »
Les choses complexes sont à dissocier des choses chaotiques. Tout comme nous l’avons fait
remarquer précédemment les choses simples ne sont pas forcement simplistes.
22
LES LAPINS TECHNO, extrait d’un article en ligne sur http://www.leslapinstechno.com, 2010
24
25. 3.1 deux termes à ne pas confondre
« Complexité : Qui se compose d’éléments différents, combinés d’une manière qui n’est pas
immédiatement saisissable. »
« Chaos : Ensemble d’éléments désordonnés, confus. »
A la simplicité s’oppose la complexité mais qui n’a rien à voir avec le chaos. La complexité
exprime plus une notion de quantité alors que le chaos, lui, exprime le désordre et la
confusion. Dans le graphisme, la simplicité est souvent vue comme quelque chose de moins
polluant et de ce fait attire notre regard. A contrario, la complexité est quelque chose qui ne
nous attire pas de manière instinctive. Comme nous l’avons vu, l’esprit aime voir les choses
de manière générale – psychologie de la forme – et aller à l’essentiel. Pourtant, Blaise Pascal
disait : « je ne peux comprendre les parties que si je comprends le tout dans lequel sont les
parties et je ne peux comprendre le tout que si je comprends les parties. » Si l’on veut
comprendre une affiche dans sa globalité il faut forcement analyser et comprendre ce qui la
compose. La complexité n’est pas quelque chose que l’ont peut comprendre d’un premier
coup d’œil, alors que la simplicité a pour caractéristique d’être saisissable rapidement.
Comme le dit si justement Edgar Morin « La complexité, c’est le défi qui vous demande de
penser. » La complexité est quelque chose qui est à notre porté qui peut être décodé, alors que
le chaos qui est caractérisé par une absence d’ordre ne peut être compris.
3.2 organiser la complexité préserve l’information
« Ordre : Ensemble d’éléments organisés, rangés, classés, disposés de manière logique. »
Andy Rudlege dans son écrit « Chaos Ordre complexe, simple » met en évidence que
contrairement aux apparences la simplicité n’est pas la solution à la complexité. Pour définir
quelque chose qui ne fonctionne pas il emploie le terme « chaos » et non « complexité » dont
nous avons expliqué les différences précédemment. À travers l’exemple du site Amazon.com
« qui est un des sites au monde les plus mal conçu et complexe. [… ] » il met en évidence que
la faille du site internet n’est pas la complexité mais le manque d’organisation. La complexité
est efficace, dans le cas et l’unique cas ou elle est ordonnée. « Mais là où la complexité
semble être un problème, il est probable que l’ordre et non la simplicité devrait être
imposée. » Alors la solution serait donc dans l’organisation ? En effet, mettre de l’ordre à la
complexité préserve l’information. Henri Atlan affirmait « Tout se passe comme si notre
raison ne pouvait pas supporter l’absence d’ordre. » La pensée complexe est un concept
25
26. philosophique introduit par Edgar Morin datant de 1982 qui exprime un peu cette idée de la
même manière. Le terme de complexité est pris au sens de son étymologie « complexus » qui
signifie « ce qui est tissé ensemble ». La complexité ne conduit pas à l’élimination de la
simplicité. La pensée complexe « refuse les conséquences mutilantes, réductrices,
unidimensionnalisantes et finalement aveuglantes d’une simplification […] » mais axe la
complexité dans un cadre d’organisation.
À travers ces deux parties, nous avons constaté que la simplicité est un très bon outil de
communication : pour faire simple, elle nous oblige à garder l’essentiel en éliminant les
éléments surplus. Cependant, mal utilisée elle peut tourner au simplisme, ou être mal
comprise. Puis, nous avons constaté que la simplicité ne peut exister sans son contraire, la
complexité. Et que la complexité ne fait pas forcement référence à une mauvaise
communication lorsque cette dernière est organisée. À la suite de ces constats, il m’a tout de
même semblée important de relever quelques points qu’à soulevé les réflexions sur la
simplicité. Si la simplicité fonctionne si bien c’est en partie parce qu’elle répond à de
nombreux besoin de la société, comme le respect de l’environnement et du public… C’est
pour cela que dans la suite de ce mémoire, nous évoquerons des sujets tels que la nécessité de
productions, le respect de son environnement et de son public ainsi que la bonne utilisation
des couleurs, des signes et des images.
26
27. III - L’éloge du sens
1 Un bon graphiste est un graphiste respectueux
1.1 produire par nécessité
Roy Arden écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale « Bien sûr qu’il y a trop
d’images inutiles dans le monde. Mais l’idée que la surabondance d’images signifiant qu’il
est en vain d’en créer d’autres me paraît le raisonnement de quelqu’un qui cherche une
solution de facilité. Je crois qu’il relève de la responsabilité de l’artiste de produire ce qui est
nécessaire. » 23
« Nécessité : Caractère de ce qui est absolument obligatoire, indispensable, de ce dont on ne
peut se passer. »
On pourrait penser que de nos jours, la notion de « nécessité » est un peu oubliée dans la
réflexion des graphistes et des publicitaires. Pour un petit projet il arrive que la quantité
déployée pour en parler soit gigantesque. Pourquoi ? Ne serait-il pas plus juste au contraire
pour coller au sujet de respecter son envergure ? On a tendance à penser que des campagnes
« clignoterons » plus si elles sont plus voyantes. L’exemple le plus aberrant sont les spots
publicitaire qui passent six fois dans le même spot publicitaires d’affiler – ce qui est le
nombre légale autorisé ou la marque ou le produit doit être prononcé dans un spot – :
« Mercurochrome le pansement des héros. Mercurochrome le pansement des héros…» Je ne
classerai même pas ce genre de publicités dans de la communication tout simplement parce
que selon moi elles ne cherchent pas à communiquer en faisant du « forcing ». Ce matraquage
soit la répétition abrutissante d’un message est désagréable pour un grand nombre de
personne. La dernière campagne de Kinder Surprise a lui aussi mais plus subtilement joué sur
le matraquage. Sur un spot de 30 secondes le mot « surprise » est bombardé de manière plus
ou moins subtile. Au final, « surprise » est répété neuf fois et est visible neuf fois à l’écran. La
technique de « la répétition » aussi perfide soit-elle arrive malheureusement à ses fins
puisqu’elle permet un ancrage de la marque dans les esprits. Est-il nécessaire d’en arriver à un
matraquage publicitaire pour se faire entendre? Ne sommes-nous pas assez civilisés pour
parler comme il faut entre nous ? Dove a récemment conçu un petit film – de 79 secondes.
Interdit à la télévision et en salle il n’est visible que sur Internet ce qui ne l’empêche pourtant
pas de se propager comme un virus sur la toile. Ce spot publicitaire s’intitule « Matraquage ».
Conçu par l’agence Ogilvy & Mather à Toronto, il a été traduit en plusieurs langues et diffusé
23
ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale
27
28. viralement « au niveau mondial ». Une succession d’affiche se suivent rapidement les unes
après les autres de manière à exprimer la quantité d’affiches indénombrables qui se succèdent
dans notre journée. Il met en avant la prolifération d’images qu’on nous impose. Mais
malheureusement de nos jours, l’objectif premier est de se faire entendre, parler de soi ou de
son produit et cela peu importe la technique pour y arriver. Le besoin de se faire connaitre
dans notre société a en conséquence fait augmenter la quantité de production graphique.
D’ailleurs dans une interview dédiée à la communication à l’entré des villes Michel Serres
affirme « Je ne dis pas que les publicités ne sont pas belles, ou qu’elles sont laides, mais c’est
leur multiplicité à un endroit donné qui produit un effet de guerre ou de chaos tel que la
laideur est l’expérience qu’on en tire le plus facilement. » 24 Dans ce paragraphe concernant la
nécessité, la réduction dont on parlait dans la simplicité pourrait être un bon conseil à prendre
en compte pour éviter de polluer graphiquement notre environnement.
1.2 investir sans gêne
La communication s’est invitée un peu partout dans notre quotidien et elle en est devenue
gênante. Imposer une image dans un paysage urbain n’est pas une chose aisée. L’affiche est
pour cela quelque chose de très difficile ; elle s’impose ! La première à en souffrir c’est la
ville. « Quartiers sensibles ? Pour une fois une appellation politiquement correcte à fait
naître un sens nouveau : « quartiers sensibles ». Des endroits sensibles ? Mais il en faudrait
partout ! » 25 Notre environnement est quelque chose de sensible et aujourd’hui heureusement
nous en avons pris plus conscience. « Quand Malte Martin créer une affiche pour un théâtre,
quand il réalise un programme publicitaire, l’objet qu’il affectionne n’est pas, dans son
essence, conçu comme un support simplement publicitaire, c'est-à-dire visant à accrocher le
passant, à lui faire désirer la représentation, il est pensé en lui même comme un instant de
théâtre descendu sur le quai du métro. » 26 Communiquer c’est en effet bien plus que plaquer
une image sur un support, il faut donner un sens, créer une atmosphère, dialoguer avec ce qui
l’entour et ceux qui l’a regarde. Les communications à l’entrée des villes font
particulièrement parler d’elles en ce moment. Le Conseil national du paysage a créé un atelier
de réflexion, intitulé « Publicité et entrées de ville ». Il s’agit d’y discuter les bases d’une
réforme de la législation en matière d’affichage publicitaire. La loi de 1979 concernant les
publicités et les enseignes, est souvent transgressée. Michel Blain, président de l’association
Paysages de France, explique : « Il y a eu un consensus autour de la table [de l'atelier] pour
24
SERRE Michel, interview, « Les pubs polluent nos entrées de ville », 2008
25
MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne
26
WAJCMAN Gérard, « Malte Martin », Pyramid, 2007
28
29. dire que la loi était mal appliquée. » Le Conseil de Paris a lui aussi décidé de réagir et a
décidé de réduire cette pollution visuelle en interdisant totalement tout affichage publicitaire
dans un rayon de cinquante mètres autour des écoles, sur les bords de Seine, aux abords des
monuments historiques. Le projet est une expérimentation en cours, mais à long terme il vise
à réduire d'un tiers le nombre de panneaux publicitaires d'ici deux ans. Lors de l’interview
concernant la pollution des publicités à l’entrée des villes, Michel Serres affirme : « J’ai
l’impression que ceux qui ont fait les entrées de ville, ceux qui ont sculpté le paysage tel que
nous le voyons aujourd’hui n’ont plus le sens de la beauté et ça, ça me parait très
important. » Les publicités sont arrivées à un point où nous en somme réduit à les refuser, à
lutter contre. En effet, maintenant il est possible d’apposer sur sa boîte aux lettres un
autocollant mentionnant le refus de publicité : « le stop-pub ». Dire non à la publicité nous a
la fois permis de nous débarrasser de la paperasse inutile dans nos boîtes aux lettres mais
aussi a participé à une amélioration économique et environnementale. Sommes-nous rentrés
en guerre contre la publicité ? Pour certaines personnes il n’y pas de doute, oui ! Le groupe
« Ras la pub » vient de neutraliser, par des inscriptions à la peinture, – «RAS LA PUB»,
«NON MERCI» – les 4 écrans publicitaires LCD installé le 1er décembre par la régie
publicitaire Métrobus dans la station de métro Charles de Gaulle Etoile, à Paris. Ces panneaux
sont destinés à remplacer – à terme – les vieilles affiches désormais trop statiques pour nos
contemporains. Dans son communiqué, Ras la pub précise qu' « il est grand temps que les
dirigeants de la RATP comprennent que le métro a pour finalité de transporter des usagers
d'un point à un autre, et non de les transformer en chair à canon pour publicitaire. » 27
1.3 ne pas sous-estimer son public
Les graphistes et les publicitaires donnent de plus en plus souvent l’impression qu’ils
surestiment leur public en se servant d’astuces, de techniques qui nous laissent maintenant de
glace. Nous ne sommes pas ou du moins plus dupes ! Les mannequins retouchés sur
Photoshop, les sandwiches trop parfaits de chez McDonald’s ou encore des régimes minceurs
qui nous présentent une anorexique c’est fini, on n’y croit plus ! D’ailleurs, je m’étonne
même des fois à lire les textes en petit caractère sur des produits ou même des affiches pour
me satisfaire d’avoir déjoué une possible tentative d’un graphiste ou d’un publicitaire de faire
passer une information importante sous mon nez. Pour redonner du sens aux images il faudrait
déjà comprendre ce qui a du sens pour le public. Mais encore une fois les publicitaires ne
savent pas s’y prendre de la bonne façon pour comprendre nos attentes. Par exemple,
27
RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008
29
30. concernant l’installation du nouveau principe d’affiches via les ecrans LCD, il est prévu
l’installation d’un dispositif qui mesurerait l'efficacité du message publicitaire avec des
capteurs enregistrant les réactions des visages des passants afin de détecter quel élément de
l'image a retenu leur attention. Ces nouvelles installations font débats et c’est logique vu le
climat actuelle de la publicité au sein de notre société. En nous analysant comme des souris de
laboratoire la publicité tente encore d’aller plus loin dans ces objectifs de vente : « Quelle
image attirera le plus le consommateur ? La peur ? Utilisons la peur alors ! » Les
publicitaires sont-ils conscient d’aller à l’encontre des attentes de son public ? En ce
formatant dans la seule optique de vendre en plus grande quantité ils en viennent à nous
épuiser. Les stop-pub et les luttes anti publicité qui se multiplient ne font que conforter l’idée
que bientôt la publicité sera en guerre bien malgré elle contre nous.
2 Un graphiste sait se servir de ces outils
De la même manière qu’un chirurgien doit bien savoir se servir de son scalpel et de son
bistouri un graphiste doit savoir manipuler les images, les signes, les typographies et les
couleurs.
2.1 les images & les signes parlent
L’image et les signes parlent. Les graphistes aujourd’hui ont oublié qu’une image véhicule
beaucoup de choses et que forcement elle a un impact sur son public. Le jeu du rebus est une
façon d’expliquer un peu le principe d’une communication qui fonctionne. Le rebus
souvenez-vous, c’est cette suite de dessins qui, une fois interprétés, donnent les syllabes
permettant de découvrir une phrase ou un mot. Une communication marche exactement
comme cela, c’est une suite de signes graphiques qui une fois interprétés vous permette
d’accéder à l’information. Une communication à un impact visuel, elle nous donne une
impression et cela va même plus loin elle nous donne une idée sur la vie en générale. Le spot
publicitaire de Dove « Matraquage », dénonce d’ailleurs le pouvoir visuel des images au sein
de notre société. Au début du spot, une jeune fille regarde la caméra et sourit dans une
atmosphère naturelle à la limite de la naïveté – qui caractérise bien évidemment l’enfance. A
cela, s’enchaine une vague déferlante d’images qui vantent particulièrement la beauté
féminine, les courbes parfaites, le rajeunissement par des crèmes, les régimes... « Parlez à
votre fille avant que quelqu’un d’autre ne le fasse. » Le message est clair les images nous
30
31. influencent, et il faut s’en méfier puisqu’elles ne sont pas toutes jolies à voir et
particulièrement pour prendre exemple dessus!
2.2 les couleurs aussi
Si tous les graphistes avaient pour bible « Le petit livre des couleurs » de Michel Pastoureau
et Dominique Simmonet les couleurs retrouveraient sûrement l’usage qui leur est destiné. En
effet, les couleurs sont souvent mal utilisées, elles sont placées de manière gratuite, à tout va
et vient et ont de ce fait perdues de leur authenticité. C’est ainsi, que l’utilisation du noir et
blanc est devenu un échappatoire à la surenchère de couleur. Comme nous l’avons vu
précédemment, Malte Martin en divorçant des couleurs, et en utilisant le noir et blanc a
renforcé sa communication pour le théâtre Athénée. François Delclaux, directeur de l'agence
de style « Un nouvel air » affirme « Mis à part la parenthèse glamour des années 1990, le
noir et blanc est un classique dont l'impact visuel est fort. C'est une base neutre de
réassurance. »
On remarque, que toutes nos démarches lorsqu’il s’agit de « rattraper la donne » sont souvent
faite dans l’extrême. Je m’explique. On n’arrive plus à communiquer, alors on simplifie tout.
On ne sait plus se servir des couleurs alors on en vient à passer au noir et blanc. Peut-être
qu’avant de trouver une solution diamétralement opposé à ce qui ne va pas il faudrait d’abord
comprendre la cause de ce qui ne fonctionne pas. Le pourquoi
31
32. Conclusion
Ce mémoire avait pour but de s’interroger sur la simplicité comme moyen de communication.
En me penchant sur « la simplicité », je me suis rendu compte tout d’abord a quel point ce
sujet était très passionnant à étudier mais aussi qu’il regorgeait d’une richesse que j’avais
largement sous-estimée. La simplicité est une notion qui s’est avérée tellement vaste qu’elle
me semble aujourd’hui difficilement résumable. Mais on pourrait retenir principalement que
la simplicité a cette force de réduire à l’essentiel les choses complexes de manière à mettre en
valeur ou/et engager le spectateur tout en nous simplifiant la réflexion elle nous fait gagner du
temps qui est de nos jours si précieux à nos yeux. Ensuite, nous avons vu que la simplicité
s’avérait paradoxalement un art difficile à maîtriser : synonyme de pauvreté, prise de pouvoir
à notre place, trop réduire, risquer de basculer dans le simplisme, changer le sens...
Je ne pensais pas que c’est en analysant le contraire de la simplicité « la complexité » que
j’allais faire perdre de la crédibilité à cette dernière. Bien au contraire, je pensais l’affirmer !
Il c’est révélé que la simplicité ne saurait exister sans son contraire. De plus, nous avons fait
remarquer que la complexité à autant sa place que la simplicité dans notre société, c’est un
outil certes diamétralement opposé à la simplicité mais qui regorge lui aussi de qualités. C’est
ainsi que c’est effondré l’utopie que la simplicité pouvait avoir le monopole de la
communication et ainsi être la solution à tous les problèmes. De ce constat fût abordée la
différence entre « complexité » et « chaos ». Les choses complexes sont certes chargés et pas
du premier coup d’œil compréhensible mais la complexité organisée fonctionne très bien. Le
chaos est défini par une surcharge d’éléments incontrôlés, qui ne sont pas organisé et qui ne
peuvent être compris même après réflexion. Il ne faut pas confondre complexité et chaotique.
La simplicité a fait naitre cependant des pistes riches qui selon moi étaient intéressantes à
explorées. Ce n’est pas pour rien si de nos jours, les communications « simples » ont une
ligne d’avance sur les autres. En effet, en m’intéressant à la simplicité il m’a paru évident que
certaines qualités de cette dernière pouvaient néanmoins répondre à certains soucis de
communication présent dans notre société. Simplifier c’est respecter les images en gardant ce
qui est nécessaire à la compréhension d’un produit ou d’un message. C’est aussi investir un
lieu avec ces images sans gêner l’environnement et le public visé. La simplicité s’adresse sans
fioriture, ni gadget pour séduire, vendre ou informer. Nous avons confiance en elle car elle a
cette façon innocente de se mettre à nu. De nos jours, il me semble que nous sommes
complètement réfractaire aux images tant elles nous ont usé de leurs stratagèmes, de leurs
32
33. beautés artificielles et parfois mensongères. Les graphistes et – plus particulièrement – les
publicitaires devraient essayer de considérer plus leur public, se préoccuper un peu plus de
leur attente.
A force de communiquer « n’importe comment », nous en sommes venus à transformer le
paysage urbain, notamment en utilisant mal les couleurs, ou encore les signes et les images.
La mise en place d’un code de déontologie pour les graphistes et – surtout – les publicitaires
ne serai pas du luxe ! Serait-il possible de mettre en place ce genre de chose de manière à faire
promettre aux graphistes de ne pas « abimer » notre environnement et de ne pas matraquer le
public ? Est-on obligé d’en arriver là ?
33
34. Bibliographie
- Hors champs [En ligne], EMOND Bernard, Lettre aux jeunes gens qui me
demandent comment devenir réalisateur, 2006, [consulté le 1er juin 2010],
disponible sur : http://www.horschamp.qc.ca
- BAUDRILLART Jean, La société de consommation, Gallimard, 1996, 318 p.
- POYNOR Rick, La société de l’image, Pyramyd, 2002, 224 p.
- BOUGNOUX Daniel, Il ne faut pas avoir peur des images, Sciences Humaines,
Déc2003/Jan Fév2004, Hors-Série N°43.
- DEBORD Guy, La société du spectacle, Gallimard, 1996, 208 p.
- PLUTARQUE, La vie de Brutus, premier consul de Rome, 1730, 38 p.
- MAEDA John, De la simplicité, Payot & Rivages, 2009, 190 p.
- MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne.
- MCCLOUD Martin, L’art de l’invisible, Delcourt, 2007, 232 p.
- Contes et histoires zen, [En ligne], YEIAZEL, Le peintre et l’empereur, 2009,
[consulté le 28 mai 2010], disponible sur : http://contes-et-histoires-zen. spot.com
- LOOS Adolph, Ornement & Crime, Rivages, 2003, 277 p.
- DE CLAIRVAUX Bernard, L’essence du christianisme, Gallimard, 1992, 527 p.
- Andy Rutlege web site [En ligne], RUTLEGE Andy, Complexe Order Simple Chaos,
2009, [consulté le 1er juin 2010], disponible sur : http://www.andyrutledge.com
- ORWELL George, 1984, Folio, 1972, 438 p.
- Don Norman web site [En ligne], NORMAN Don, Simplicity is highly overrated,
2007, [consulté le 1 juin 2010], disponible sur : http://www.jnd.org
- ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale
- WAJCMAN Gérard, Malte Martin, Pyramid, 2007, 120 p.
- SERRE Michel, interview, Les pubs polluent nos entrées de ville, 2008
- RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008
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35. Annexes
Affiches pour le théâtre Athénée saison 2009-2010, Malte Martin
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