Le mouvement du DIY (Do It Yourself) originaire de la culture punk des années 70, croit ces dernières année. En effet, de plus en plus d'émissions télévisés, sites internet ou événements sur le thème du DIY voient le jour, comme par exemple le festival World Makers Faire à New York, en septembre 2012, qui a attiré sur 2 jours 55 000 passionnés et 650 exposants.
Différentes raisons en sont la cause : méthodes d’apprentissage souvent trop traditionnelles transmises par l’école, crise économique depuis 2007 et développement des outils et lieux numériques qui structurent et rapprochent les passionnés de DIY.
Après avoir analysé les différentes méthodes d’apprentissage existantes (traditionnelles et modernes), recherché comment les savoir-faire étaient transmit dans les lieux numériques et interviewé différents professionnels dans le domaine de l’habillement et la couture (autodidactes, formation scolaire et réalisation de projet dans un fablab), j’ai compris quelle était la part des outils et lieux numériques dans l’acquisition de savoir-faire et quels étaient leur apport.
Mémoire : Je fais donc je suis / Apprendre DIY | Bertrand Alice | 2013
1.
2. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
1
3. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
2
REMERCIEMENTS
Ce
mémoire
de
recherche
a
été
réalisé
dans
le
cadre
du
Master
de
Management
Multimédias,
deuxième
année
du
programme
de
la
Fonderie
de
l’image
à
Bagnolet.
Il
a
été
dirigé
par
David
Prud’Homme,
professeur
à
la
Fonderie
de
l’image
et
Anthony
Masure,
relecteur
du
mémoire.
Je
remercie,
David
Prud’Homme
pour
son
soutien,
sa
relecture
et
ses
précieux
conseils
tout
à
long
du
projet.
L’ensemble
de
l’équipe
pédagogique
pour
leurs
nombreuses
références,
sources,
instructions
et
recommandations
qui
m’ont
permis
de
mener
à
bien
ce
mémoire.
La
classe
I3M3
pour
leur
soutien,
leur
encouragement
et
leur
solidarité.
L’ensemble
des
acteurs
interviewés
pour
leur
riche
témoignage
ainsi
que
ceux
qui
m’ont
chaleureusement
accueilli
dans
leur
univers
et
leur
FabLab.
4. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
3
RESUME
Les
méthodes
d’apprentissage
du
système
éducatif
sont
aujourd’hui
controversées
:
contrôle
des
formations,
comparaison
des
compétences
d’un
élève
avec
un
système
de
notation,
capital
culturel
inégal
pour
les
apprenants…
En
conséquence,
d’autres
méthodes
d’apprentissage
font
surface
ces
cinq
dernières
années
:
apprentissage
par
les
pairs,
par
soi-‐même,
par
l’action
et
par
les
nouvelles
technologies.
Ces
méthodes
d’apprentissage
en
rupture
redeviennent
de
plus
en
plus
utilisées
par
tous
:
avoir
la
réponse
à
ses
questions
grâce
à
un
forum,
suivre
les
conseils
prodigués
par
son
père
lors
de
bricolage,
réparer
un
objet
soi-‐même
en
suivant
pas
à
pas
un
tutoriel
ou
encore
apprendre
lors
d’un
projet
en
groupe.
Ces
activités
sont
représentatives
d’un
mouvement
ancien
:
celui
du
Do
It
Yourself,
c’est
à
dire
de
faire
soi-‐même,
emblématique
de
la
culture
punk
des
années
70.
Le
web
a
pris
une
grande
place
dans
l’échange
et
le
partage
de
ces
activités
DIY.
Nombreuses,
rapides
et
massives,
les
informations
se
transmettent
par
une
communauté
qui
s’est
regroupée
sur
le
web
:
des
makers.
Néanmoins,
depuis
2010,
tous
ne
se
passe
plus
sur
le
web.
Des
espaces
physiques,
des
makerspaces,
réunissant
ces
communautés
se
créent
dans
le
monde
entier
afin
de
partager,
créer
et
d’apprendre
ensemble
différemment.
L’objectif
de
ce
mémoire
est
de
connaître
la
part
de
ces
outils
et
de
ces
lieux
numériques
dans
le
développement
des
savoir-‐faire.
Mots
clés
:
méthode
d’apprentissage,
savoir-‐faire,
Do
It
Yourself,
makers,
outil
numérique,
lieu
numérique,
markerspace
Today,
learning
methods
of
education
are
controversial:
education
control,
of
students'
skills
with
notations,
inequality
of
learners’
cultural
capital,
etc.
Accordingly,
other
learning
methods
have
appeared
for
five
years:
peer
learning,
by
oneself,
by
action
and
by
new
technologies.
These
learning
methods
are
out
with
traditional
methods
and
have
been
increasingly
used:
getting
an
answer
in
a
forum,
following
one's
father
pieces
of
advice
through
DIY
sessions, mending
a
product
to
follow
step
by
step
with
a
tutorial
or
learning
in
a
group
project.
These
activities
are
representative
of
an
old
movement:
the
Do
It
yourself
one,
emblematic
of
punk
culture
in
70’s.
The
Web
has
taken
an
important
place
in
exchanging
and
sharing
of
DIY
activities.
Quick
and
massive,
much
information
is
transmitted
through
a
community:
makers’
community.
Since
2010,
everything
only
occurs
on
the
web,
physical
spaces,
makerspaes
gathering
communities
of
creators
are
being
created
worldwide,
so
as
to
make
these
people
share,
create
together
and
learn
from
one
another.
The
aim
of
this
project
is
to
know
what
part
these
tools
and
these
places
have
occupied
in
the
development
of
know-‐
how.
Key
words:
learning
method,
know-‐how,
Do
It
Yourself,
makers,
digital
tool,
physical
spaces
digital,
markerspace
5. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
4
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS
..........................................................
2
RESUME
........................................................................
3
SOMMAIRE
...................................................................
4
VERS
UN
APPRENTISSAGE
DO
IT
YOURSELF
.................
7
I
–
ACQUISITION
DE
SAVOIR-‐FAIRE
.............................
11
1
-‐
L’EVOLUTION
DE
L’APPRENTISSAGE
.........................................................
11
1.1
-‐
L’apprentissage
.......................................................................................................
11
1.2
-‐
L’apprentissage
du
Moyen
Âge
à
la
société
moderne
............................................
11
1.3
-‐
L’apprenti
du
Moyen
Âge
et
l’apprenti
d’aujourd’hui
............................................
12
2
–
LE
CARACTERE
PLURI-‐DISCIPLINAIRE
DU
SAVOIR
....................................
13
2.1
-‐
Le
savoir
..................................................................................................................
13
2.2
-‐
Le
savoir-‐faire
.........................................................................................................
14
2.3
-‐
Le
savoir
être
..........................................................................................................
14
2.4
-‐
La
dimension
symbolique
du
savoir
.......................................................................
14
3
-‐
LA
COMPETENCE
......................................................................................
15
3.1
-‐
La
notion
de
compétence
.......................................................................................
15
4
-‐
BILAN
........................................................................................................
16
5
-‐
LES
METHODES
D’APPRENTISSAGE
..........................................................
17
5.1
-‐
Le
béhaviorisme
.....................................................................................................
18
5.2
-‐
Le
constructivisme
..................................................................................................
18
5.3
-‐
Le
socio-‐constructivisme
........................................................................................
19
5.4
-‐
Le
cognitivisme
.......................................................................................................
19
5.5
-‐
Grille
comparative
des
méthodes
d’apprentissage
................................................
20
6. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
5
6
-‐
DES
METHODES
D’APPRENTISSAGE
EN
RUPTURE
AVEC
LES
METHODES
TRADITIONNELLES
.........................................................................................
20
6.1
-‐
Le
connectivisme
....................................................................................................
20
6.2
-‐
L’apprentissage
par
l’action
...................................................................................
21
6.3
-‐
L’apprentissage
par
soi-‐même
...............................................................................
22
6.4
-‐
L’apprentissage
par
les
pairs
..................................................................................
22
7
-‐
LE
SYSTEME
EDUCATIF
ET
L’APPRENTISSAGE
...........................................
23
7.1
-‐
Le
contrôle
des
formations
par
le
système
éducatif
..............................................
23
7.2
-‐
La
compétence
et
le
système
educatif
...................................................................
24
7.3
-‐
Le
chômage
selon
les
diplômes
..............................................................................
26
II
-‐
OUTILS
ET
ESPACES
NUMERIQUES
........................
28
1
-‐
LE
MOUVEMENT
DU
DIY
...........................................................................
28
1.1
-‐
La
culture
Punk
.......................................................................................................
28
1.2
-‐
Le
DIY
du
21ème
siècle
...........................................................................................
30
1.3
-‐
Le
DIY
comme
mode
de
vie
....................................................................................
31
1.4
-‐
Du
DIY
au
DIWO
:
Faisons
ensemble
......................................................................
32
1.5
-‐
Le
marché
du
DIY
....................................................................................................
32
2
-‐
LE
DIY
ET
LE
WEB
......................................................................................
33
2.1
-‐
La
communauté
du
DIY
:
les
makers
......................................................................
33
2.2
-‐
La
diffusion
du
DIY
..................................................................................................
34
2.2.1
-‐
Les
supports
de
diffusion
du
DIY
......................................................................
34
2.2.2
-‐
Les
plateformes
des
communautés
de
makers
................................................
35
2.2.3
-‐
Les
valeurs
du
DIY
en
ligne
...............................................................................
37
2.2.3.1
-‐
L’aspect
communautaire
..........................................................................
37
2.2.3.2
-‐
La
diffusion
du
savoir
................................................................................
38
2.2.4
-‐
Du
maker
amateur
au
maker
professionnel
.....................................................
39
3
-‐
ESPACES
NUMERIQUES
:
MAKERSPACES
..................................................
40
3.1
-‐
Le
makerspace
héritier
du
DIY
................................................................................
40
3.2
-‐
La
communauté
des
makers
...................................................................................
40
3.3
-‐
Le
makers
:
bricoleur
ou
ingénieur
?
......................................................................
41
3.4
-‐
Les
Typologies
de
makerspaces
..............................................................................
42
3.4.1
-‐
Les
hackerspaces
..............................................................................................
42
3.4.2
-‐
Les
techshop
.....................................................................................................
42
3.4.3
-‐
Les
FabLab
........................................................................................................
43
3.4.3.1
-‐
Historique
.................................................................................................
43
3.4.3.2
-‐
Qu’est-‐ce
qu’un
laboratoire
de
fabrication
numérique
?
.........................
43
3.4.3.3
-‐
La
charte
du
MIT
.......................................................................................
43
3.4.3.4
-‐
Des
FabLab
au
quatre
coins
du
monde
....................................................
44
3.5
-‐
Enjeux
et
caractéristiques
......................................................................................
44
3.5.1
-‐
Innovation
par
l'usager
et
innovation
ouverte
.................................................
44
7. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
6
3.5.2
-‐
La
diffusion
des
savoir-‐faire
..............................................................................
46
3.5.2.1
-‐
Les
processus
d'apprentissage
.................................................................
46
3.5.2.2
-‐
L’apprentissage
par
les
pairs
....................................................................
46
3.5.2.3
-‐
L’apprentissage
par
l'action
......................................................................
47
3.5.3
-‐
Vecteur
d'empowerment
.................................................................................
48
3.5.3.1
-‐
Un
climat
de
réassurance
.........................................................................
48
3.5.3.2
–
La
capacitation
à
faire
..............................................................................
49
4
-‐
GRILLE
DE
COMPARAISON
DES
METHODES
D’APPRENTISSAGE
...............
50
III
-‐
DEMONSTRATION
.................................................
51
1
-‐
DOMAINE
DE
L'HABILLEMENT
ET
LA
COUTURE
........................................
51
1.1
-‐
La
couture
et
web
...................................................................................................
52
1.1.1
-‐
Les
réseaux
sociaux
..........................................................................................
53
1.1.2
-‐
Les
sites
internet
..............................................................................................
55
1.1.3
-‐
Les
plateformes
de
vente
en
ligne
....................................................................
56
1.2
-‐
Le
DIY
un
business
..................................................................................................
57
1.3
-‐
La
couture
et
le
lieu
numérique
.............................................................................
57
1.3.1
-‐
Les
tissus
personnalisables
...............................................................................
57
1.3.2
-‐
Les
tissus
Arduino
.............................................................................................
58
1.3.3
-‐
La
rencontre
d’une
couturière
dans
un
FabLab
...............................................
59
2
-‐
FORMULAIRE
ET
INTERVIEWS
:
METHODES
D’APPRENTISSAGE
..............
60
2.1
–
Faire
évoluer
sa
marque
grâce
à
un
FabLab
..........................................................
60
2.2
-‐
Enquête
de
terrain
.................................................................................................
63
2.2.1
-‐
Réalisation
d’une
enquête
................................................................................
63
2.2.2
-‐
Les
objectifs
de
l’enquête
.................................................................................
63
2.2.3
-‐
Les
hypothèses
.................................................................................................
63
2.2.4
-‐
La
taille
de
l’échantillon
....................................................................................
64
2.2.5
-‐
La
population
de
l’enquête
...............................................................................
64
2.2.6
-‐
La
diffusion
du
questionnaire
...........................................................................
65
2.2.7
-‐
L’analyse
des
réponses
.....................................................................................
66
2.2.8
-‐
Les
réponses
aux
hypothèses
...........................................................................
69
2.3
-‐
Bilan
........................................................................................................................
70
FAIRE
TOUS,
TOUT
SEUL
?
..........................................
71
BIBLIOGRAPHIE
...........................................................
74
8. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
7
VERS UN APPRENTISSAGE DO IT YOURSELF
Sorti
de
tous
cursus
scolaire
ou
universitaire,
comment
un
individu
peut
continuer
à
apprendre,
à
faire
et
à
acquérir
de
nouvelles
compétences
?
Connaissez
vous
Marcin
Jakubowski
?
Marc
Jakubowski
est
un
fermier
du
Missouri
et
a
obtenu
un
doctorat
en
fusion
énergétique.
Pour
développer
au
mieux
sa
ferme,
il
a
acheté
un
tracteur
qui
tomba
régulièrement
en
panne.
Endetté
par
l’achat
et
les
réparations
incessantes
de
son
matériel
agricole,
il
a
décidé
de
créer
lui-‐même
son
tracteur.
Satisfait
de
la
productivité
de
son
produit,
il
a
ensuite
mis
à
disposition
les
plans
3D
détaillés
de
son
véhicule
sur
un
wiki,
en
libre
accès.
Par
la
suite,
d’autres
participants
du
monde
entier
se
sont
intéressés
à
son
projet.
Grâce
à
leur
aide,
8
autres
prototypes
de
machines
ont
vu
le
jour.
Marc
Jakubowski
a
donc
décidé
de
fonder
l’Open
Source
ecology1
,
un
réseau
de
fermiers,
d’ingénieurs
et
de
bricoleurs
sur
une
plateforme
dédiée
à
la
fabrication
de
machines
pour
l’agriculture,
la
construction
et
la
production
low-‐cost
et
en
accès
libre.
Depuis,
le
réseau
a
conçu
près
de
50
prototypes
de
différentes
machines
à
faible
coût
de
production
(le
Global
village
construction
set2
)
permettant
à
n’importe
qui
de
bâtir
toute
l’infrastructure
dont
une
communauté
a
besoin
au
sein
d’un
village.
«
Nous
explorons
les
limites
de
ce
que
nous
pourrions
faire
pour
rendre
le
monde
meilleur
avec
des
technologies
physiques
en
accès
libre.
»3
L’exemple
de
Marc
Jakubowski
n’est
pas
un
cas
isolé.
De
plus
en
plus
de
personnes
ont
recourt
à
des
produits
fait
main,
à
des
produits
Do
It
Yourself
(traduit
par
fais
le
toi-‐même
en
français).
Le
mouvement
DIY
est
un
mouvement
qui
s’est
développé
en
même
temps
que
la
culture
punk
des
années
1970.
Cette
culture
punk
reflète
l’éthique
du
DIY
car
elle
se
veut
anti-‐consumérisme,
en
rejetant
la
nécessité
d'acheter
des
articles
ou
d’utiliser
des
systèmes
et
des
procédés
existants
qui
favorisent
la
dépendance
à
la
société,
mais
en
conservant
l’idée
que
tout
le
monde
peut
faire.
Dans
les
années
1970,
la
culture
du
DIY
a
pris
tout
son
sens
grâce
au
développement
de
groupes
punks
émergents
qui
ont
enregistré,
de
manière
totalement
indépendante,
leurs
musiques
et
leurs
albums
et
les
ont
distribué
et
vendu.
Loran,
guitariste
du
groupe
français
des
Bérurier
Noir4
expliquait
ce
qu’était
la
culture
punk
:
1
http://opensourceecology.org/
2
Wiki
du
projet
Global
village
construction
set
:
http://opensourceecology.org/about.php
3
Marc
Jakubowski,
«
des
plans
détaillés
en
accès
libre
pour
la
civilisation
»
[Conférence],
avril
2011
sur
TED
:
http://www.ted.com/talks/lang/fr/marcin_jakubowski.html
4
Bérurier
Noir
est
un
groupe
phare
de
la
scène
punk
et
alternative
française
des
années
1980,
composé
principalement
de
deux
membres
:
Loran
à
la
guitare
et
Fanfan1
au
chant.
9. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
8
«
Ce
qui
m’a
plu
dans
le
punk,
ce
que
j’en
ai
compris,
c’était
vraiment
ça
:
fais
ton
groupe,
fais
ton
label,
sois
indépendant,
arrête
de
consommer
comme
un
idiot
en
ouvrant
le
bec
et
en
gobant
tout.»
Aujourd’hui,
cette
culture
du
DIY
est
toujours
présente
et
s’est
répandu
vers
une
population
beaucoup
plus
large.
Préférer
cuisiner
plutôt
que
consommer
des
plats
préparés
aux
additifs
divers,
faire
son
potager,
recoudre
ou
customiser
des
vêtements,
créer
un
robot
qui
n’existe
pas,
réparer
son
téléviseur
plutôt
que
d’en
racheter
un...
Ces
comportements
d’éco-‐consommateurs
s’inscrivent
dans
un
mouvement
en
plein
boom,
où
l’on
ne
rachète
pas
quand
l’objet
est
obsolète
ou
cassé,
on
le
répare
et
le
plus
souvent
en
misant
sur
la
récupération
et
le
recyclage
de
matériaux
et
des
produits.
Le
marché
du
bricolage
ou
appelé
aussi
de
la
“bidouille”
est
en
forte
croissance.
Les
outils,
produits,
kits
à
faire
soi-‐même,
livres,
magazines,
événements,
sites
internet,
émissions
télévisées,
formations,
groupes
de
travail
et
ateliers
autour
du
DIY
se
multiplient
et
ont
un
succès
grandissant.
Tous
les
domaines
sont
concernés
:
cuisine,
couture,
décoration,
construction,
informatique,
sciences,
écologique,
technologique…
L’exemple
de
la
World
Maker
Faire
5
en
septembre
2012
à
New
York
prouve
l’engouement
vers
ce
mouvement
car
cet
événement
a
regroupé
55
000
passionnés
de
DIY
et
650
exposants
en
seulement
2
jours.
Comment
expliquer
ce
tel
succès
alors
que
l’industrie
ou
les
commerces
nous
propose
tout
ce
dont
nous
avons
besoin
?
Dans
un
premier
temps,
les
conséquences
du
modèle
d’apprentissage
dans
le
système
éducatif
peuvent
en
être
la
cause.
On
observe
une
divergence
entre
les
apprentissages
inculqués
à
l’école
et
les
besoins
des
individus
pour
évoluer
dans
la
société.
L’école
nous
enseigne
principalement
des
savoirs
et
des
connaissances
et
nous
dispense
de
savoirs
pratiques.
De
ce
fait,
les
personnes
ont
de
moins
en
moins
la
capacité
à
savoir-‐faire
les
choses,
à
créer,
à
modifier,
à
adapter
et
à
réparer
les
objets
de
tous
les
jours.
De
plus,
les
produits
que
veulent
les
consommateurs
sont
des
produits
personnalisés
ou
sur
mesure
en
fonction
de
leur
besoin.
C’est
pourquoi,
l’école
et
la
société
industrielle
ne
répondent
plus
à
ces
besoins
de
savoir
«
faire
»
soi-‐même.
Les
individus
ont
donc
tendance
à
se
former
et
à
apprendre
à
faire
seul
pour
pouvoir
répondre
à
leur
besoin.
Dans
un
second
temps,
la
crise
économique
est
aussi
un
facteur
de
l’accélération
de
la
tendance
du
DIY
depuis
2007.
Faire
soi-‐même
permet
de
réaliser
de
nombreuses
économies
et
peut
être
une
alternative
face
à
ce
monde
d’ultra-‐
consommation.
Le
fait
de
créer
à
partir
de
matériaux
bruts,
de
concevoir
et
suivre
la
réalisation
d’un
produit
nous
pousse
à
réfléchir
sur
nos
besoins
réels,
qui
sont
souvent
éloignés
de
ceux
générés
par
la
société
de
consommation.
5
Festival
du
21
et
22
septembre
2012.
Vidéo
de
présentation
du
World
Make
Faire
2012
:
http://www.youtube.com/watch?v=_jc2UdIqDMA
10. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
9
Ensuite,
faire
soi-‐même
est
associé
aux
développements
personnels.
En
effet,
inventer,
manipuler,
réparer
des
choses
de
ses
mains,
les
adapter
à
ses
besoins
et
y
apporter
sa
touche
personnelle
sont
liés
au
plaisir
et
à
l’acquisition
de
nouvelles
pratiques.
Cette
tendance
nous
permet
également
de
nous
épanouir
dans
des
domaines
qui
sont
souvent
éloignés
de
nos
métiers.
Cela
nous
permet
de
continuer
à
apprendre
de
nouveaux
savoir-‐faire
et
dans
de
nouveaux
domaines.
Le
DIY
n’a
de
valeurs
que
s’il
est
partagé
entre
les
individus.
Il
n’est
donc
pas
étonnant
de
remarquer
que
ce
mouvement
du
fais
le
toi-‐même
est
principalement
présent
sur
le
web.
Grâce
à
ce
canal,
la
diffusion
des
pratiques
et
des
savoirs
est
rapide
et
massive.
De
plus
en
plus
de
plateformes
diffusent
ses
supports
porteurs
de
ce
mouvement.
De
plus,
l’information
vient
aussi
des
réseaux
sociaux
grâce
aux
utilisateurs
qui
créé
leur
propre
DIY
et
les
partagent
à
la
communauté.
Nous
sommes
donc
en
train
de
passer
du
DIY,
fais
le
toi-‐même
au
DIWO,
faisons-‐le
ensemble.
Cependant,
comme
cite
Chris
Anderson 6
dans
son
expression
favorite
:
«
Certains
sont
déjà
en
train
de
passer
des
bits
aux
atomes
»7
.
Les
«
bits
»
représentant
le
web
et
le
«
atomes
»
représentant
le
monde
réel.
Le
web
a
été
un
espace
en
ligne
porteur
de
partage,
de
collaboration
et
de
rapprochement
de
communauté
partageant
les
mêmes
centres
d’intérêt
du
DIY.
Depuis
2010,
de
nouveaux
lieux
propices
à
cette
culture
du
«
faire
»
voient
le
jour
:
des
makerspaces
dont
des
laboratoires
de
fabrication
numérique
(FabLab).
Ces
lieux
numériques
permettent
aux
utilisateurs
de
fabriquer
presque
n’importe
quoi.
Mais,
au-‐delà
de
simple
atelier
de
fabrication,
ces
outils
sont
également
des
facteurs
de
transmission
de
savoir-‐faire.
Ouvert
à
tous,
ils
sont
des
lieux
d’échange
et
de
partage
de
compétence,
basés
sur
un
modèle
horizontal,
sans
hiérarchie,
mais
avec
un
fort
lien
avec
le
reste
de
la
communauté
regroupés
dans
des
lieux
physiques.
Tous
ces
outils
et
lieux
numériques
porteurs
du
mouvement
du
fais
le
toi-‐même
permettent
à
chaque
individu
d’acquérir
de
nouveaux
savoir-‐faire
en
créant
soi-‐
même,
sans
pour
autant
avoir
suivi
un
enseignement
traditionnel.
Nous
pouvons
donc
nous
demander
:
Quel
part
les
outils
et
espaces
numériques
ont-‐ils
dans
le
développement
des
savoir-‐faire
?
Dans
une
première
partie,
nous
définirons
les
notions
d’apprentissage,
des
savoirs
et
de
la
compétence,
puis
nous
rappellerons
quelles
sont
différentes
6
Chris
Anderson
est
un
journaliste
américain
spécialisé
dans
l’économie
de
l’internet
et
de
la
gratuité.
Il
est
un
ancien
rédacteur
de
la
revue
Wired
et
a
écrit
plusieurs
livre
comme
«
The
long
tail
»
;
«
Why
the
future
of
business
is
selling
less
of
more
»
et
«
Makers
;
La
nouvelle
révolution
industrielle
».
7
Chris
Anderson,
Maker
la
prochaine
révolution
industrielle
[2012]
Random
House
Business
Books
11. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
10
méthodes
d’apprentissage
existantes
traditionnelles
et
novatrices
afin
de
comprendre
pourquoi
le
mouvement
du
DIY
refait
surface
ces
dernières
années.
Dans
un
second
temps,
nous
démonterons
en
quoi
les
outils
et
lieux
numériques
sont
des
héritiers
du
mouvement
du
DIY
par
leur
partage
de
savoir-‐faire.
Nous
expliquerons
quels
sont
leurs
procédés
pour
diffuser
les
savoir-‐faire
et
leur
méthode
d’apprentissage
en
opposition
avec
le
système
éducatif,
utilisé
pour
faire
apprendre.
Enfin,
grâce
à
un
cas
concret
d’un
apprentissage
d’un
savoir-‐faire
dans
le
domaine
de
la
couture
et
de
l’habillement,
nous
montrerons
quelles
sont
les
différences
entre
l’acquisition
de
savoir-‐faire
par
un
enseignement
traditionnel,
par
l’utilisation
d’outils
numériques
ou
par
la
fréquentation
d’espace
de
fabrication
numérique.
Pour
conclure,
nous
réfléchirons
à
la
possibilité
et
aux
limites
d’apprendre
de
manière
autonome
et
indépendante
par
des
méthodes
et
des
lieux
d’apprentissage
différents
de
ceux
du
système
traditionnel.
12. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
11
I – ACQUISITION DE SAVOIR-FAIRE
Dans
cette
première
partie,
nous
définirons
les
termes
d’apprentissage,
de
savoir,
de
savoir-‐faire,
de
savoir
être
et
de
compétence
afin
de
bien
comprendre
les
enjeux
de
l’apprentissage
et
de
l’acquisition
de
savoir-‐faire.
Nous
chercherons
aussi
à
connaître
leur
évolution
du
Moyen
Âge
à
aujourd’hui.
1 - L’EVOLUTION DE L’APPRENTISSAGE
1.1 - L’APPRENTISSAGE
Selon
la
définition
de
De
Ketele
:
«
L’apprentissage
est
un
processus
systématiquement
orienté
vers
l’acquisition
de
certains
savoirs,
savoir-‐faire,
savoir-‐être
et
savoir-‐devenir.
»8
L’apprentissage
comprend
un
processus
d’acquisition
de
pratiques,
de
connaissances,
compétences,
d'attitudes
et
de
valeurs
culturelles,
par
l'observation,
l'imitation,
l'essai,
la
répétition
et
la
présentation.
1.2 - L’APPRENTISSAGE DU MOYEN AGE A LA SOCIETE
MODERNE
L’apprentissage
tel
qu’il
est
aujourd’hui,
provient
d’une
évolution
historique
qui
remonte
au
Moyen
Âge,
comprenant
depuis
cette
époque
de
forts
remaniements.
L’apprentissage
était
déjà
présent
au
Moyen
Âge.
Cette
forme
d’enseignement
était
fortement
hiérarchisée
entre
trois
palliés
:
les
maîtres,
les
compagnons
et
les
apprentis.
Les
apprentis,
au
plus
bas
de
l’échelle,
devaient
effectuer
des
travaux
dictés
par
les
maîtres.
Ils
étaient
recrutés
à
partir
de
10
-‐
12
ans.
Pour
se
présenter
comme
compagnon,
l’apprentissage
pouvait
durer
jusqu’à
une
dizaine
d’années.
Les
compagnons
du
Devoir
d’aujourd’hui
sont
les
successeurs
du
mouvement
du
compagnonnage
du
Moyen
Âge.
Le
compagnonnage
s’est
développé
au
Moyen
Âge,
lors
de
la
construction
des
cathédrales
par
exemple.
Ce
système
d’apprentissage
était
très
reconnu
et
formateur
car
les
compagnons
se
déplaçaient
de
ville
en
ville
et
de
chantier
en
chantier
pour
bâtir,
réparer
des
édifices,
avoir
des
missions...
Du
XVIII
au
XIX
siècles,
l’apprentissage
connaît
des
changements
sur
ses
méthodes
de
transmission,
ce
qui
entraîne
une
baisse
de
la
qualité
des
formations.
Pendant
la
Révolution,
les
apprentis
devaient
rester
chez
leur
employeur
et
n’étaient
plus
autorisés
à
se
former
de
ville
en
ville.
Au
XIX
siècle,
8
Jean
Marie
De
Ketele,
L'évaluation
conjuguée
en
paradigme
[1993]
Revue
française
de
Pédagogie
13. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
12
les
formations
supérieures
comme
des
écoles
polytechniques
se
développent
au
profit
de
la
dégradation
de
l’apprentissage.
Les
industries
ont
besoin
de
plus
en
plus
de
travailleurs
de
force,
non
qualifiés.
Elles
refusent
donc
de
former
des
apprentis
qualifiés.
C’est
à
partir
de
ce
moment
que
deux
voies
se
tracent
:
d’un
côté
les
formations
en
atelier
accompagnées
de
cours
à
l’école
et
de
l’autre
les
formations
à
l’école.
En
1896,
9
ouvriers
sur
10
ne
fréquentaient
pas
l’école.
Mais
en
1919,
l’école
devient
obligatoire
grâce
à
la
loi
Astier.
Pendant
l’entre
des
deux
guerres,
de
nouveaux
apprentissages
voient
le
jour
:
• 1929
:
apprentissage
agricole
• 1937
:
apprentissage
artisanal
• 1938
:
apprentissage
industriel
et
commercial
Et
l’on
distingue
quatre
nouveaux
niveaux
de
l’enseignement
professionnel
:
• le
primaire
supérieur
(section
professionnelle)
• le
secondaire
technique
(école
pratique
de
commerce
et
d’industrie,
CAP...)
• la
formation
en
lycée
d’enseignement
professionnel
(CAP
ou
BEP)
• le
supérieur
(arts
et
métiers,
école
d’ingénieurs...)
En
1939,
on
remarque
que
240
000
élèves
sont
désormais
dans
l’enseignement
professionnel
(hors
supérieur).
C’est
la
loi
de
1971
qui
clarifie
réellement
la
situation
de
l’apprentissage.
Soit
l’apprenant
exerce
un
contrat
d’apprentissage
liant
une
formation
en
atelier
chez
un
maître
d’apprentissage
avec
un
contrat
de
travail
et
une
rémunération
accompagnée
d’une
formation
dans
un
centre,
c’est
un
apprenti,
soit
l’apprenant
se
forme
dans
un
lycée
et
a
le
statut
d’élève.
1.3 - L’APPRENTI DU MOYEN AGE ET L’APPRENTI
D’AUJOURD’HUI
Malgré
le
fait
que
l’apprentissage
par
le
compagnonnage
date
du
Moyen
Âge,
on
peut
remarquer
une
forte
similitude
et
on
observe
une
continuité
entre
l’apprenti
du
Moyen
Âge
qui
voulait
devenir
un
compagnon
et
l’apprenti
d’aujourd’hui.
En
effet,
certains
critères
d’apprentissage
ont
été
conservés.
On
peut
citer
l’apprentissage
par
la
transmission
:
l’apprenti
d’aujourd’hui
apprend
toujours
par
la
transmission
du
savoir-‐faire
que
son
maître
d’apprentissage
lui
offre.
Nous
pouvons
parler
aussi
de
l’apprentissage
par
l’expérience,
comme
à
l’époque,
les
apprentis
apprenaient
par
l’exécution
d’une
tâche
dans
une
situation
donnée.
Le
fait
de
répéter
cette
tâche,
de
l’adapter
à
d’autres
environnements
et
dans
d’autres
contextes,
le
tout
encadré
d’un
maître
qui
fait
comprendre
à
l’apprenti
où
il
a
effectué
des
erreurs,
permet
de
développer
ses
compétences.
Ces
14. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
13
facteurs
font
aussi
preuve
d’intelligence
lorsque
l’apprenti
arrive
à
mettre
en
œuvre
ses
savoir-‐faire
acquis
dans
la
fabrication
d’un
objet.
Comme
précise
Richard
Sennet9
:
«
La
gratification
émotionnelle
réside
dans
l’expérience
même
de
la
répétition
».
10
L’acquisition
des
compétences
manuelles
vient
au
travers
de
répétition
des
gestes.
Ces
répétitions
font
émerger
des
compréhensions
mentales
donc
l’apprenti
arrivera
mieux
à
anticiper
à
travers
de
la
routine
et
comprendra
mieux
les
processus
de
création.
De
plus,
Sennet
insiste
sur
l’idée
que
l’expérimentation
via
l’erreur
est
également
une
caractéristique
qui
procure
à
l'artisan
ou
à
l’apprenti
l’envie
de
s’améliorer
et
de
créer
alors
une
capacité
à
penser
dans
le
faire.
Dans
le
secteur
tertiaire,
nous
retrouvons
encore
une
continuité
avec
le
modèle
du
compagnonnage
du
Moyen
Âge.
Le
secteur
tertiaire
est
le
troisième
secteur
économique
(après
l’agriculture
et
l’industrie)
qui
produit
du
service
et
qui
est
en
forte
croissance
depuis
1970.
Ce
secteur
a
un
lien
proche
avec
le
modèle
du
compagnonnage
car
c’est
un
secteur
de
service
qui
à
pour
but
d’accroître
les
qualifications
et
les
capacités
créatives
des
employés.
2 – LE CARACTERE PLURI-DISCIPLINAIRE DU
SAVOIR
Voici
ci
dessous,
les
notions
et
une
grille
comparative
qui
distinguent
les
différents
types
de
savoirs.
2.1 - LE SAVOIR
Le
savoir
désigne
ce
qui
est
acquis,
construit
et
élaboré
par
l’étude
ou
l’expérience.
Il
apparaît
donc
comme
le
résultat
d’une
activité
d’apprentissage,
qui
évolue
dans
des
situations
et
dans
des
pratiques.
Dans
le
système
scolaire,
les
savoirs
sont
décrits
comme
des
connaissances
organisées,
réfléchies,
institutionnalisées,
qui
sont
transmises
par
l’école.
Les
savoirs
peuvent
être
acquis
à
l’école,
mais
il
ne
faut
pas
négliger
le
fait
qu’un
grand
nombre
de
savoirs
sont
construits
en
dehors
du
contexte
scolaire
(famille,
ami,
monde
professionnel,
etc.).
Le
savoir
est
synonyme
de
connaissance.
ð Connaissance
La
connaissance
est
l’ensemble
des
domaines
où
s'exerce
l'activité
d'apprendre.
9
Richard
Sennett
est
né
en
1943.
Il
est
un
sociologue
et
historien
américain
10
Richard
Sennet,
Ce
que
sait
la
main
:
la
culture
de
l'artisanat
[2010],
Editions
Albin
Michel
15. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
14
2.2 - LE SAVOIR-FAIRE
Le
savoir-‐faire
est
une
compétence
acquise
par
l'expérience
dans
les
problèmes
pratiques
ou
dans
l'exercice
d'un
métier.
Il
permet
l’accomplissement
d’une
tâche.
L’apprentissage
des
savoir-‐faire
nécessite
l’entraînement
de
l’élève,
par
l’observation
de
différentes
situations,
par
la
mise
en
situation
et
par
le
jeu
répété
des
essais
et
des
erreurs
dès
l’instant
qu’ils
sont
traités.
Le
savoir-‐faire
est
associé
à
la
notion
de
capacité.
ð Capacité
Le
terme
capacité
désigne
ce
qui
est
de
l’ordre
du
savoir-‐faire
nécessitant
plusieurs
opérations
mentales.
D’après
Philippe
Meirieu
11
:
«
C’est
une
activité
acquise,
reproductible
dans
des
domaines
divers,
et
qui
peut
évoluer
dans
le
temps.
»
2.3 - LE SAVOIR ETRE
Le
savoir
être
est
synonyme
de
domaine
affectif.
Il
s’agit
de
traits
généraux
qui
composent
la
personnalité
et
qui
ne
relèvent
pas
du
domaine
cognitif
(les
valeurs,
les
émotions,
la
socialisation,
la
motivation...).
Cela
définit
la
personne
dans
ses
rapports
aux
autres,
à
elle-‐même
et
au
monde.
Le
savoir
être
est
relié
à
la
notion
d’attitude.
ð Attitude
L’attitude
se
définit
comme
un
état
d’esprit,
une
disposition
intérieure
acquise,
d’une
personne
à
l’égard
d’elle-‐même
ou
de
tout
élément
de
son
entourage,
qui
incite
à
une
manière
d’être
ou
d’agir
face
à
une
situation
particulière.
2.4 - LA DIMENSION SYMBOLIQUE DU SAVOIR
En
dehors
de
ces
notions
théoriques,
le
savoir
comporte
aussi
un
aspect
social.
Pierre
Bourdieu12
explique
que
le
positionnement
des
individus
dans
la
société
peut
être
différent
en
fonction
de
leur
capital.
Il
estime
qu’il
existe
quatre
sortes
de
capital
:
• le
capital
économique
:
les
ressources
économiques
• le
capital
culturel
:
les
ressources
culturelles
• le
capital
social
:
les
ressources
humaines
et
les
relations
• le
capital
symbolique
:
une
stratégie
d’accumulation
11
Philippe
Meirieu
est
né
le
29
novembre
1949
à
Alès.
Il
est
un
chercheur
et
écrivain
français,
spécialiste
des
sciences
de
l'éducation
et
de
la
pédagogie
12
Pierre
Bourdieu,
Les
trois
états
du
capital
culturel
[1979],
Actes
de
la
recherche
en
sciences
sociales,
vol
30
16. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
15
Nous
allons
nous
intéresser
au
capital
culturel
au
sein
de
l’enseignement.
Cette
notion
avait
été
présentée
par
Pierre
Bourdieu
et
Claude
Passeron
dans
l’ouvrage
«
La
Reproduction.
Éléments
pour
une
théorie
du
système
d’enseignement
»13
pour
démontrer
qu’il
existe
des
inégalités
du
savoir
dans
le
système
scolaire
pour
les
élèves,
en
fonction
de
leur
origine
sociale.
Étant
donné
que
le
capital
culturel
existe
sous
3
formes
:
• une
forme
incorporée
:
disposition
de
savoirs
et
de
savoir-‐faire
• une
forme
objectivée
:
ce
sont
les
biens
culturels
• une
forme
institutionnalisée
:
ce
sont
les
titres
scolaires
On
se
rend
compte
que
les
élèves
et
les
classes
sont
plus
ou
moins
munis
de
ces
trois
formes
de
capitaux.
En
effet,
la
classe
sociale
d’origine
des
élèves
est
représentative
de
leur
capital
culturel,
ce
qui
va
influencer
dans
leur
réussite
scolaire.
Le
problème
est
que
le
système
scolaire
a
reproduit
les
structures
des
classes
sociales
de
la
société
industrielle,
ce
qui
a
enclenché
une
inégalité
de
la
transmission
des
savoirs
pour
tous
au
sein
de
l’éducation.
De
plus,
il
est
difficile
de
savoir
si
un
de
ces
trois
savoirs
prédomine
sur
nos
tâches
de
tous
les
jours.
Mais
selon
Emmanuel
Bourdieu,
le
savoir
être
prédomine
sur
le
savoir-‐faire.
En
effet,
comme
il
le
cite
dans
son
ouvrage
«
Savoir-‐faire
:
contribution
à
une
théorie
dispositionnelle
de
l’action
»14
:
«
Avoir
une
disposition,
c'est
être
enclin
à
agir
régulièrement
de
telle
ou
telle
manière,
dans
telles
ou
telles
circonstances.
»
La
notion
de
disposition
est
très
importante
pour
lui
et
il
l’a
définit
comme
le
fait
que
c’est
à
partir
de
nos
échecs
et
de
nos
réussites
dans
nos
expériences
passées
que
nous
écrivons
nos
propres
lois
de
comportement.
Il
précise
aussi
que
ces
lois
de
comportement
que
l’on
développe
par
soi-‐même,
se
modifient
continuellement
en
fonction
de
ses
propres
expériences.
Dans
ce
sens,
nous
pouvons
dire
que
le
savoir
être
conditionne
nos
savoir-‐faire.
3 - LA COMPETENCE
3.1 - LA NOTION DE COMPETENCE
La
description
de
la
compétence
dans
le
Socle
Commun15
est
la
suivante
:
13
Pierre
Bourdieu,
Jean-‐Claude
Passeron,
La
reproduction
:
éléments
pour
une
théorie
du
système
d'enseignement
[1970],
Minuit
(le
Sens
Commun)
14
Emmanuel
Bourdieu,
Savoir-‐faire
:
contribution
à
une
théorie
dispositionnelle
de
l’action,
Paris
:
Seuil,
1998,
279
p.
15
Le
Socle
commun
est
un
ensemble
de
valeurs,
de
savoirs,
de
langages
et
de
pratiques
dont
l'acquisition
repose
sur
la
mobilisation
de
l'École
et
qui
suppose,
de
la
part
des
élèves,
des
efforts
et
de
la
persévérance.
17. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
16
Chaque
grande
compétence
est
conçue
comme
une
combinaison
de
connaissances
fondamentales
pour
notre
temps,
de
capacités
à
les
mettre
en
œuvre
dans
des
situations
variées,
mais
aussi
d’attitudes
indispensables
tout
au
long
de
la
vie,
comme
l’ouverture
aux
autres,
le
goût
pour
la
recherche
de
la
vérité,
le
respect
de
soi
et
d’autrui,
la
curiosité
et
la
créativité.
Nous
pouvons
affirmer
selon
cette
définition
que
la
compétence
chapeaute
tous
les
savoirs
:
• «
connaissances
fondamentales
pour
notre
temps
»:
savoir,
connaissance
• «
de
capacités
à
les
mettre
en
œuvre
dans
des
situations
variées
»
:
savoir-‐faire,
capacité
• «
d’attitudes
indispensables
tout
au
long
de
la
vie
»
:
savoir
être,
attitude
On
peut
donc
définir
la
compétence
comme
le
fait
d’avoir
acquis
un
savoir
et
un
savoir-‐faire,
le
tout
régulé
avec
son
propre
savoir
être.
4 - BILAN
Nous
pouvons
conclure
que
:
• certains
termes
sont
en
relation
:
savoir
peut
être
relié
à
connaissance,
savoir-‐faire
à
capacité
et
savoir-‐être
à
attitude
• ces
différents
savoirs
peuvent
évoluer
dans
le
temps
:
ils
peuvent
se
construire,
se
développer
ou
se
stabiliser
Voici
ci
dessous
une
infographie
résumant
les
concepts
vus
précédemment
:
18. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
17
Infographie
de
l’acquisition
de
savoir
et
notion
de
compétence
–
Bertrand
Alice
Dès
lors
que
nous
connaissons
les
notions
d’acquisition
des
différents
savoirs
et
de
la
compétence,
nous
allons
analyser
par
quels
processus
nous
pouvons
acquérir
ses
savoirs.
5
-‐
LES
METHODES
D’APPRENTISSAGE
Les
sciences
de
l’éducation
puisent
leurs
fondements
théoriques
dans
la
19. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
18
psychologie,
la
sociologie,
la
philosophie
et
les
sciences
cognitives.
Cette
diversité
est
à
la
base
des
différentes
approches
de
l’enseignement
et
de
l’apprentissage
que
l’on
peut
trouver.
Actuellement,
une
majorité
de
théoriciens
de
l’éducation
s’accordent
pour
regrouper
les
modèles
de
l’enseignement
et
de
l’apprentissage
selon
quatre
grands
courants
:
le
béhavioriste,
le
constructiviste,
le
socio-‐constructiviste
et
le
cognitiviste.
Ces
mouvements
seront
présentés
succinctement
ci-‐dessous.
5.1 - LE BEHAVIORISME
Le
béhaviorisme
(ou
le
comportementalisme
en
français)
a
été
introduit
par
John
Waltson16
au
XXème
siècle.
Ce
mouvement
considère
l’apprentissage
comme
une
modification
durable
du
comportement
résultant
d’un
entraînement
particulier.
Avec
la
théorie
d’apprentissage
du
béhaviorisme,
on
cherche
à
modeler
le
comportement
des
apprenants
en
mettant
les
élèves
dans
des
situations
où
ils
sont
face
à
des
stimulis
et
produiront
une
réponse
à
laquelle
l’enseignant
va
fournir
un
renforcement
positif
ou
négatif
(récompense
ou
punition).
Cet
apprentissage
va
chercher
à
découper
en
tâche
une
action
pour
développer
des
routines
et
des
procédures.
Cependant,
cette
théorie
ne
s’intéresse
pas
à
ce
qui
se
passe
dans
la
tête
de
l’apprenant,
la
«
boite
noire
»,
quand
il
fait
une
erreur.
L’erreur
est
synonyme
d’échec
de
l’apprentissage
dans
le
béhaviorisme.
ð Un
exemple
d’activité
d’apprentissage
provenant
de
ce
mouvement
:
Le
découpage
des
tâches
en
sous
tâches
pour
un
projet.
5.2 - LE CONSTRUCTIVISME
Le
constructivisme
se
centre
sur
la
manière
dont
un
individu
organise
le
monde
et
ses
propres
connaissances
au
travers
de
ses
expériences
personnelles
et
de
ses
schémas
mentaux.
Dans
la
théorie
du
constructivisme,
chaque
connaissance
est
constituée
par
une
construction
propre
à
chacun.
De
ce
fait,
il
n’est
pas
possible
d’avoir
les
mêmes
connaissances
que
quelqu’un
d’autre.
Les
élèves
apprennent
beaucoup
dans
l’action
et
le
travail
sur
l’erreur
est
très
développé
par
leur
sens
cognitif.
Pour
apprendre,
l’enfant
doit
manipuler
les
informations
et
les
connaissances.
ð Un
exemple
d’activité
d’apprentissage
provenant
de
ce
mouvement
:
Une
situation
complexe
où
l’on
questionne
l’élève
plusieurs
fois
de
suite
mais
de
16
Watson
est
né
en
1878
et
mort
en
1958.
Il
était
psychologue
et
fondateur
du
béhaviorisme.
20. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
19
manière
différente.
5.3 - LE SOCIO-CONSTRUCTIVISME
Issus
du
constructivisme,
le
socio-‐constructivisme
ajoute
un
critère
social
dans
l’apprentissage
:
la
dimension
du
contact
avec
les
autres
afin
de
construire
ses
connaissances.
Le
socio-‐constructivisme
est
une
théorie
qui
met
l’accent
sur
la
dimension
relationnelle
de
l’apprentissage.
Grâce
à
l’aspect
social
pris
en
compte,
le
langage
par
exemple
permet
d’avoir
une
construction
d’un
apprentissage
beaucoup
plus
abouti
en
échangeant
et
en
exprimant
ses
perceptions.
Le
socio-‐constructivisme
affirme
que
l’accompagnement
individuel
aide
plus
facilement
et
rapidement
à
évoluer
et
à
acquérir
des
connaissances.
ð Un
exemple
d’activité
d’apprentissage
provenant
de
ce
mouvement
:
Le
débat.
5.4 - LE COGNITIVISME
Le
cognitivisme
se
centre
sur
les
processus
mentaux
de
l’apprenant.
Cette
théorie
cherche
à
comprendre
comment
les
informations
sont
stockées
dans
la
mémoire
à
long
terme.
Par
exemple,
ce
mouvement
va
analyser
comment
un
élève
peut
stocker
des
informations
et
y
accéder
au
moment
où
il
en
a
besoin.
Dans
le
modèle
du
cognitivisme,
les
élèves
ont
déjà
un
bagage
de
connaissances
avant
d’intégrer
une
école
ou
une
formation
et
il
faut
tenir
compte
du
fait
que
la
tête
de
l’apprenant
n’est
pas
vide.
Il
faut
apprendre
aux
élèves
à
ajouter
des
informations
aux
informations
qu’ils
ont
déjà
et
à
les
trier.
ð Un
exemple
d’activité
d’apprentissage
provenant
de
ce
mouvement
:
Les
logiciels
de
réseaux
de
concepts.
21. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
20
5.5 - GRILLE COMPARATIVE DES METHODES
D’APPRENTISSAGE
Béhaviorisme
Constructivisme
Socio-‐constructuvisme
Cognitivisme
Enseigner
c’est
Stimuler
l’apprenant
Ouvrir
la
vision
vers
le
monde
extérieur
Dialoguer
Hiérarchiser
et
organiser
l’information
que
l’on
transmet
Apprendre
c’est
Avoir
un
renforcement
positif
ou
négatif
en
fonction
d’une
réponse
Construire
ses
propres
connaissances
Construire
ses
propres
connaissances
en
les
confrontant
à
celles
des
autres
Associer
et
organiser
les
nouvelles
connaissances
Méthodes
pédagogiques
Apprentissage
par
le
découpage
des
tâches
en
sous
tâche
Apprentissage
par
un
problème,
par
un
questionnement
Apprentissage
par
des
discussions,
des
débats,
des
exercices...
Apprentissage
par
la
gestion
et
la
hiérarchie
de
ses
connaissances
6 - DES METHODES D’APPRENTISSAGE EN
RUPTURE AVEC LES METHODES TRADITIONNELLES
En
dehors
de
ces
quatre
mouvements
classiques,
d’autres
méthodes
d’apprentissage
ont
vu
le
jour.
L’apprentissage
du
connectivisme
développé
par
George
Siemens
mais
aussi
des
théories
novatrices
basées
sur
l’acquisition
de
compétences
par
les
pairs
et
par
l’expérience
viennent
bouleverser
les
théories
d’apprentissage
traditionnelles.
6.1 - LE CONNECTIVISME
Le
connectivisme
est
une
théorie
d'apprentissage
à
l'ère
numérique.
Elle
a
été
développée
par
George
Siemens17
et
Stephen
Downes18
.
Elle
montre
que
les
théories
du
béhaviorisme,
du
cognitivisme
et
du
constructivisme
comportent
des
limites
car
les
effets
de
la
technologies
peuvent
moduler
la
façon
dont
vivent,
communiquent
et
apprennent
les
individus.
Cette
méthodologie
se
base
sur
les
ressources
des
nouvelles
sciences
ainsi
que
les
technologies
de
l’information
et
de
la
communication.
Le
connectivisme
est
la
somme
de
principes
issus
de
la
théorie
du
chaos,
des
réseaux,
de
l'auto-‐organisation
et
de
la
complexité.
L'apprentissage
est
un
processus
qui
se
produit
dans
des
environnements
flous
composés
17
Siemens
est
un
théoricien
de
l’apprentissage
dans
une
société
basée
sur
les
technologies
numériques.
18
Downes
est
un
designer
et
expert
dans
le
domaine
de
l’apprentissage
en
ligne
et
des
nouveaux
médias
22. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
21
d'éléments
de
base
changeants,
et
qui
n'est
pas
entièrement
sous
le
contrôle
de
l'individu.
George
Siemens
Ce
mouvement
est
aussi
motivé
par
la
prise
de
décision
changeante
des
individus
car
les
bases
sur
lesquelles
ils
se
fondent,
se
modifient
très
souvent
et
très
rapidement.
De
ce
fait,
de
nouvelles
informations
sont
constamment
acquises
et
l’homme
développe
la
capacité
d'établir
des
distinctions
entre
l'information
importante
et
l’information
sans
importance.
Il
arrive
aussi
à
développer
la
capacité
de
reconnaître
quand
de
nouvelles
informations
vont
modifier
son
environnement.
En
dehors
de
ce
mouvement,
il
y
a
aussi
des
méthodes
novatrices
qui
font
confiance
à
l’individu
en
le
rendant
plus
libre
dans
ses
actions,
lui
permettant
d’apprendre
différemment.
6.2 - L’APPRENTISSAGE PAR L’ACTION
John
Dewey
est
à
l’initiative
du
«
hands
on
learning
»,
c’est
à
dire
apprendre
par
l’action.
Cette
théorie
peut
aussi
être
appelée
pédagogie
du
projet.
Dans
cette
méthodologie,
le
maître
a
pour
rôle
de
guide
et
l’élève
apprend
en
agissant.
L’objectif
est
de
réconcilier
l’esprit
et
l’action.
Dewey
remarque
que
l’atmosphère
qui
ressort
des
salles
de
classe
est
plutôt
négative
:
• ambiance
autoritaire
• le
maître
est
le
monarque
de
la
salle
• soumission
et
obéissance
des
élèves
• …
L’éducation
nouvelle
de
Dewey
va
à
contre-‐courant
de
ces
observations.
Les
élèves
doivent
apprendre
en
exerçant
des
activités
actuelles
qu’ils
seront
amenés
à
exécuter
plus
tard.
Apprendre
par
l’expérience
apporte
plusieurs
avantages
:
• l’élève
peut
essayer
:
il
n’a
pas
tord
ou
raison,
il
teste
par
lui
même.
• l’élève
éprouve
:
l’expérience
lui
fait
comprendre
la
nature
de
la
réalité
des
choses
(en
cas
d’échec
par
exemple).
L’expérience
permet
de
faire
apprendre
à
l’élève
d’un
côté
l’épreuve,
mais
aussi
de
l’autre
les
connaissances.
Cette
association
lui
permet
d’arriver
à
résoudre
un
problème
bien
précis
et
actuel.
Apprendre
par
l’expérience
permet
à
l’élève
de
développer
une
participation
active
de
sa
propre
formation.
Nous
pouvons
dire
que
la
théorie
de
Dewey
reprend
les
principes
de
l’apprentissage
par
l’expérience
du
modèle
du
compagnonnage,
que
nous
avons
présenté
précédemment.
En
effet,
comme
pour
le
compagnonnage,
l’individu
se
23. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
22
forme
au
travers
d’expériences
et
d’actions
qu’il
rencontre
tout
au
long
de
son
chemin,
afin
de
former
ses
propres
savoir-‐faire
et
ses
connaissances.
6.3 - L’APPRENTISSAGE PAR SOI-MEME
Les
écoles
Montessori,
crées
par
Maria
Montessori19
vont
encore
plus
loin
dans
l’autonomie
de
l’apprentissage
des
enfants.
Ici,
les
enfants
n’apprennent
plus
par
une
action,
un
exercice
ou
une
tâche
demandée,
mais
ils
apprennent
par
eux-‐mêmes,
sans
demande
d’exécution
particulière.
En
effet,
les
enfants
se
forment
par
des
actions
de
la
vie
quotidienne.
L’accent
est
mis
sur
l’apport
d’un
environnement,
des
objets,
du
temps
et
de
l’espace
dans
lequel
l’individu
peut
apprendre
par
lui-‐même
et
évoluer.
Cette
éducation
laisse
l’enfant
éprouver
la
joie
de
faire
des
choses
par
lui-‐même,
ce
qui
va
favoriser
son
autonomie
et
son
envie
de
découvrir
d’autres
choses.
Les
avantages
d’un
apprentissage
par
les
écoles
Montessori
:
• apprendre
dans
un
environnement
stimulant
• chaque
enfant
peut
explorer,
toucher
et
apprendre
sans
crainte
• chaque
enfant
apprend
à
son
propre
rythme
• l’enseignant
encourage
les
enfants
6.4 - L’APPRENTISSAGE PAR LES PAIRS
L’apprentissage
par
les
pairs
n’est
pas
nouveau.
Il
est
utilisé
depuis
toujours
par
exemple
dans
la
transmission
d’un
métier
de
père
en
fils.
Un
mouvement
a
fait
ses
preuves
en
Inde
et
a
été
diffusé
dans
le
monde
entier
:
les
Université
du
mouvement
Va-‐nu-‐pieds.
Sanjit
Bunker
Roy20
a
construit
une
Université
Va-‐nu-‐pieds
en
1986,
pour
recevoir
les
personnes
qui
n’ont
pas
eu
la
chance
de
faire
des
études,
mais
qui
sont
riches
en
savoir-‐faire
traditionnels.
Le
principe
de
cette
université
:
le
partage
et
la
transmission
de
savoir-‐faire
par
les
pairs.
19
Montessori
était
doctoresse
et
pédagogue
italienne
et
a
mis
en
place
la
pédagogie
Montessori
20
Bunker
Roy
est
un
activiste
et
formateur
qui
a
fondé
le
Barefoot
College.
Il
a
été
sélectionné
comme
l'une
des
100
personnalités
les
plus
influentes
en
2010
par
Time
pour
son
travail
d'éducation
auprès
d'indiens
ruraux
souvent
illettrés.
24. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
23
Alors
ce
sera
la
seule
université
en
Inde
ou,
si
tu
as
un
Doctorat
ou
un
Master,
tu
n'as
pas
le
droit
d'en
faire
partie.
Tu
dois
être
un
dégonflé,
un
recalé,
ou
avoir
abandonné
les
études
pour
venir
dans
notre
université.
Tu
dois
vivre
de
tes
mains.
Tu
dois
avoir
une
certaine
dignité
relative
au
travail.
Tu
dois
faire
preuve
de
compétences
que
tu
peux
offrir
à
la
communauté
et
fournir
un
service
à
la
communauté.
Alors
nous
avons
lancé
l'Université
des
Va-‐nu-‐pieds,
et
nous
avons
repensé
la
définition
du
professionnalisme.21
Bunker
Roy
Bunker
Roy
explique
que
l'apprentissage
qui
se
met
en
place
dans
cette
université
se
fait
dans
un
esprit
de
partage
et
de
collaboration
partant
d'une
situation
ou
d’un
problème
précis.
Par
exemple
:
renouveler
l’eau,
chauffer
les
locaux,
soigner
un
malade
etc.
Ce
modèle
de
transmission
par
les
pairs
apporte
des
valeurs
ajoutées
pour
l'apprentissage
comme
:
• d'acquérir
de
nouvelles
compétences
à
travers
l'essai
et
l’erreur
• de
renforcer
leur
esprit
d'entraide
et
la
collaboration
• d'apprendre
par
soi-‐même
et
de
développer
une
certaine
indépendance
• de
consolider
et
de
construire
des
relations
afin
d’améliorer
la
communication
au
sein
d’une
communauté
Ces
trois
exemples
de
méthodes
d’apprentissage
sont
importants
car
ils
démontrent
que
l’apprentissage
scolaire
traditionnel
n’est
pas
le
seul
moyen
d’apprendre
et
n’est
pas
non
plus
le
meilleur.
7 - LE SYSTEME EDUCATIF ET L’APPRENTISSAGE
7.1 - LE CONTROLE DES FORMATIONS PAR LE SYSTEME
EDUCATIF
Aujourd’hui,
le
système
scolaire
exerce
deux
différents
types
de
formations
:
• des
formations
de
«
savoirs
»
orientées
sur
les
fondamentaux
:
telles
que
le
collège,
le
lycée
et
les
études
généralistes
où
l’on
va
enseigner
à
l’élèves
des
connaissances,
par
exemple
les
mathématiques
• des
formations
de
«
savoir-‐faire
»
orientées
sur
les
métiers
:
telles
que
les
CAP,
BEP
et
les
études
spécialisées
où
l’on
va
apprendre
à
l’élève
à
acquérir
les
capacités
à
exercer
un
métier
21
Bunker
Roy,
«
Apprendre
d'un
mouvement
va-‐nu-‐pied
»
[Conférence]
diffusé
en
octobre
2011
sur
TED
http://www.ted.com/talks/lang/fr/bunker_roy.html
25. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
24
L’éducation
contrôle
le
second
type
de
formation.
En
effet,
l’éducation
va
influencer
les
élèves
à
s’orienter
dans
des
domaines
où
l’on
a
besoin
de
travailleurs
pour
la
société
d’industrialisation
de
masse,
afin
de
répondre
au
besoin
de
main
d’œuvre
manquante.
Le
système
éducatif
va
aussi
par
ailleurs
créer
de
nouvelles
formations
et
de
nouvelles
classes
lorsque
l’industrie
aura
besoin
de
ressources
humaines
et
de
travailleurs
dans
un
nouveau
domaine.
Par
exemple
:
l’énergie
thermique
avec
les
panneaux
solaires
il
y
a
quelques
années.
Nous
pouvons
donc
affirmer
que
l’éducation
et
l’industrie
sont
intimement
liées
et
orientent
les
élèves
à
exercer
les
formations
où
elles
ont
besoin
de
main
d’œuvre.
Il
est
aussi
très
difficile
pour
un
étudiant
de
s’orienter
dans
un
milieu
technique
mais
qui
n’est
pas
en
expansion.
Bien
souvent,
les
formations
sont
coûteuses,
mais
il
y
a
aussi
une
forte
sélection
des
élèves
ainsi
que
des
places
à
l’entrée
restreintes.
Il
est
fort
regrettable
que
ces
formations
soient
difficiles
d’accès
car
bien
souvent
ce
sont
celles-‐ci
qui
permettent
de
transformer
la
nature
des
choses.
Aujourd’hui
les
individus
se
retrouvent
prisonniers
dans
une
stratégie
économique
de
l’éducation
et
de
l’économie
car
ils
n’ont
pas
les
savoir-‐faire
pour
transformer,
réparer
ou
innover.
Ils
n’ont
pas
les
codes
pour
faire
évoluer
les
produits
et
les
objets
de
tous
les
jours.
Ils
sont
donc
obligés
de
consommer
de
nouveaux
produits.
Si
mon
Smartphone
tombe
en
panne,
je
suis
dans
l’incapacité
de
pouvoir
l’ouvrir
et
de
savoir
ce
qui
ne
fonctionne
pas.
Je
serais
donc
incapable
de
le
réparer.
7.2 - LA COMPETENCE ET LE SYSTEME EDUCATIF
L’objectif
de
l’école
est
de
faire
acquérir
aux
élèves
des
compétences.
Ainsi,
on
peut
dire
que
la
compétence
est
mise
en
œuvre
lorsque
l’élève
a
compris
la
signification
de
ce
qu’il
fait
et
qu’il
s’adapte
pour
résoudre
un
problème
spécifique
dans
une
situation
particulière.
Les
compétences
sont
souvent
associées
les
unes
par
rapport
aux
autres
pour
se
développer.
On
peut
cependant
se
demander
comment
l’école
comptabilise
et
représente
ces
compétences
afin
de
savoir
lesquelles
ont
été
acquises
par
un
élève
ou
un
étudiant
durant
sa
formation
?
Dans
le
système
scolaire,
les
élèves
sont
associés
par
le
biais
de
notation.
En
primaire
et
collège
par
des
moyennes,
en
lycée
par
l'obtention
d'un
diplôme.
Dans
les
formations
supérieures,
on
peut
associer
les
compétences
d’un
26. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
25
étudiant
au
système
européen
de
transfert
et
d’accumulation
de
crédit,
l’ECTS22
.
L’ECTS
a
été
mis
en
place
en
1989
afin
de
faciliter
la
reconnaissance
des
prestations
d’études
passées.
Ce
système
repose
sur
le
principe
qu’un
étudiant
à
plein
temps
fournit
un
volume
de
travail
équivalant
à
60
crédits
au
cours
d'une
année
académique.
Ces
crédits
sont
répartis
sur
les
différentes
unités
du
cursus
(cours,
modules,
autres
unités
d'enseignement)
de
l’année.
Les
acquis
de
l’étudiant
durant
son
année
de
formation
sont
évalués
qualitativement
par
le
biais
de
notes,
organisées
par
sections
de
cursus.
Les
compétences
acquises
d’un
étudiant,
durant
son
année
de
formation,
seraient
donc
représentées
uniquement
par
l’acquisition
d’un
nombre
de
crédits
organisé
par
des
unités
?
Ce
système
de
notation
est
certes
appliqué
à
grande
échelle
(UE)
depuis
1989,
ce
qui
prouve
qu’il
fonctionne
et
permet
de
notifier
clairement
la
réussite
de
l’année
académique
d’un
étudiant.
Cependant,
on
peut
se
rendre
compte
qu’il
représente
mal
les
réelles
compétences
d’un
étudiant.
Imaginons
un
étudiant
ayant
effectué
et
validé
une
formation
de
deux
ans
dans
un
IUT
SRC
(Services
et
Réseaux
de
Communication).
Cet
étudiant
aura
appris
à
utiliser
des
logiciels
de
graphisme,
saura
programmer,
présenter
professionnellement
des
projets
multimédias
à
l’oral
etc.
Imaginons
un
second
étudiant
ayant
effectué
une
formation
de
deux
ans
dans
IUT
Information
et
Communication
avec
une
option
en
Documentation
et
ayant
appris
grâce
à
des
manuelles
et
des
tutoriels
en
ligne
en
dehors
de
ces
cours,
à
utiliser
des
logiciels
de
graphisme
et
à
programmer.
A
la
fin
de
leurs
deux
années
d’études,
les
deux
étudiants
ont
un
niveau
semblable
des
compétences
en
multimédias
et
chacun
ont
des
compétences
complémentaires
variées
en
fonction
de
leur
domaine.
Lorsque
ces
deux
personnes
chercheront
à
s’orienter
dans
une
licence
professionnelle
en
multimédias,
le
premier
étudiant
aura
plus
de
facilité
à
atteindre
son
objectif
car
il
aura
avec
lui
une
liste
d’ECTS
validée
dans
les
cursus
qui
seront
au
programme
de
la
licence.
Le
deuxième
étudiant,
aura
beau
avoir
acquis
ces
même
compétences
de
manière
informelle,
ces
ECTS
validés
ne
prouveront
pas
qu’il
sache
réellement
programmer,
utiliser
des
logiciels
etc.
Il
aura
moins
de
chance
de
pouvoir
accéder
à
cette
licence
alors
qu’il
a
les
compétences
pour
faire
cette
formation.
Si
un
individu
sait
faire,
c’est
qu’il
a
la
compétence
de
le
faire.
Comme
l’exprime
John
Dewey23
,
initiateur
du
mouvement
«
hands-‐on
learning
»24
,
l’objectif
et
la
finalité
est
de
savoir-‐faire
quelque
chose,
mais
pas
d’expliquer
comment
faire
la
22
European
Credits
Transfer
System
23
John
Dewey
est
un
philosophe
américain
du
courant
du
pragmatisme
dans
le
domaine
de
la
pédagogie
et
des
éducations
nouvelles.
24
«
Apprendre
par
l'action
»
27. Je
fais
donc
je
suis
–
Apprendre
Do
It
Yourself
26
chose.
On
peut
donc
dire
que
le
système
éducatif
pose
des
barrières
sur
la
reconnaissance
des
compétences
puisqu’il
va
davantage
prendre
en
compte
les
notations
et
les
ECTS
d’un
étudiant
que
les
véritables
compétences
qu’il
a
acquis
hors
cursus
scolaire
(stage,
expériences
personnelles,
entourage…).
7.3 - LE CHOMAGE SELON LES DIPLOMES
Les
conditions
d’accès
à
l’emploi
des
jeunes
qui
entrent
sur
le
marché
du
travail
varient
selon
le
niveau
de
diplôme.
Cependant,
encore
26,2%
de
la
population
n’ont
pas
de
diplôme.
Cette
cible
est
la
plus
désavantagée
pour
trouver
un
emploi.
Le
choix
de
la
spécialité
de
formation
a
aussi
une
influence
sur
l’accès
à
l’emploi
et
la
qualité
de
l’insertion
professionnelle.
Certains
jeunes
sont
mieux
préparés
que
d’autres
à
cette
entrée
dans
le
monde
professionnel
:
les
apprentis,
dont
la
formation
alterne
avec
une
expérience
professionnelle,
en
apportent
l’exemple.
Le
fait
d’être
diplômé
et
le
niveau
de
diplôme
jouent
énormément
sur
l’insertion
professionnelle
en
début
de
carrière.
En
effet,
la
situation
professionnelle
des
diplômés
du
supérieur
est
nettement
meilleure
que
celle
des
diplômés
de
l’enseignement
secondaire
(CAP-‐BEP,
baccalauréat
ou
équivalent)
ou
des
peu
diplômés
(personnes
sorties
de
formation
initiale
avec
uniquement
le
brevet
ou
sans
aucun
diplôme).
En
2011,
parmi
les
jeunes
actifs
sortis
du
système
éducatif
depuis
moins
de
cinq
ans,
9,4%
%
des
diplômés
du
supérieur
sont
au
chômage,
contre
22,1
%
des
diplômés
du
secondaire
et
45,7
%
de
ceux
non
diplômés
ou
diplômés
uniquement
du
brevet
des
collèges.
De
part
ces
chiffres,
l’on
se
rend
compte
que
malgré
les
études
et
diplômes
des
élèves,
la
société
n’est
plus
capable
de
trouver
un
travail
pour
tous.
Niveau
de
diplôme
selon
l'âge
en
2011
–
Insee
2011
25
25
http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=nattef07232