1. Poème numéro 1 d’Eté
A l’improviste, c’est venu:
De l’indicible, je vais tâcher d’en dire,
Au moins quelques mots en dentelles,
Des poussières d’étoiles pareilles
A l’une de celle qui borda nos pas ce soir
Sous l’étang et le parc silencieux,
A l’abri du ciel bleu nuit, la marche éternelle
De ce début d’un bien que j’accueille sans rêve
Simplement là, telle que tu me permets d’être
Nous cherchant, sans rien exiger déjà.
Tous les chemins sont encore ouverts.
Rien n’a encore été barré.
Rien ne me retient encore,
De m’acheminer vers ce bel aurore,
De m’enfoncer vers ce qui sera mon sort.
Tu es arrivé sans que j’aie pu te prévenir.
D’un coup, je nous ai vu nous découvrir,
Face à face, un peu timides.
J’ai rougis sous mon visage placide.
Tu n’as pas vu cela, je crois, la première fois.
Je tremblais sans bouger.
Je ne voulais point être guide.
Sous mon timbre maîtrisé,
Ma parole allait se dérobant à ma portée,
Encore plus qu’à l’habitude,
Elle te racontait déjà
Ce que je n’étais pas sûre de vouloir te dire.
J’étais là et j’étais absente.
J’étais au profond de moi à déjà te rencontrer.
J’écoutais la résonnance en moi, de ta voix,
Si tranquille, si enjouée par moment,
Et caverneuse encore de la vie qu’elle délivre
Qui a coulé en elle.
2. Poème numéro 8 d’Hiver
Les ailes me brulent.
Sur la neige glacée,
Mes envolées se gèlent.
Mes patins ne glissent plus.
La surface est rayée,
Où mon élan brisé,
Se meurt sans pardessus.
Oh, mon amour décousu
Heurté tant de jours et de nuits.
Mon ange recommandé,
Masqué, tu m’apparais en songe.
Tu prenais mes ombres.
Dans les creux de tes hanches.
Les chauffant de ta patience,
De ta passion d’aimant.
Je devenais sable,
Pour l’eau de tes jardins,
Malléable et docile
Pour qui m’aime.
Je t’aimai
Comme un feu de folie.
Ton nom, ton visage
Me courraient dans les veines.
Pas un instant,
Sans ce ravage rouge sang
Qui m’ôta à mes chaînes
Et me donna à toi.
Tant de fois répétés
Ont été nos écarts et nos retrouvailles,
Rivière de larmes de joie et de peine,
Sous la barque de nos rêves.
Tu fis
Ce vertige libre
Qui m’assiégea
De haut en bas.
Ténébreux et pénétrant,
Tu visais haut.
Généreux amour,
Grand maître
Trônant sur mes détours.
Avec aplomb,
Tu embrassas d’un coup
Toutes nos incohérences
De ta bouche goulue.
3. Poème numéro 11 Léger printemps
Un léger brin d’air
Vole libre parmi les azalées.
Encore étourdis de vert,
Les buissons sont en bourgeons.
A quand leur pleine floraison ?
L’impatience m’a gagnée.
Sur les pierres posées à terre
Mes pieds enjambent les gués.
Un temps de printemps,
Clair et clément,
Et sa joie chassant l’hiver
Sont entrés par les battants de la fenêtre.
4. Poème numéro 12
Entre les pierres s’est égaré l’hiver.
Le manteau de son froid
Touche de verre mes doigts
Qui se gèlent loin de toi.
Que de mois sans émoi
Ont pillés nos réserves
Pour la saison prochaine.
J’ai la haine des conserves.
Dans un foyer déserté de frivolité
Habité par tes silences besogneux
Un lent déclin fit main basse
Et tua mes chimères.
Le livre est la main
Pour le puits de la connaissance.
Le chemin de ses lignes
Trace face aux indifférences.
Tes pleurs résonnent
Comme des cris de détresse.
La masse de leur perte
Altère l’évidence de ma foi.
Tes peines d’angoisses
Pèsent sur le sommeil clair.
Tremble la peur des hommes
Et le trouble de leur liesse.
Depuis hier,
L’arbre de nos échanges est couvert
D’une fine opercule de blancheur immaculée
Qui me laisse émerveillée.
Au milieu de la clairière
De nos denses contradictions
Je rêve,
Danse, elfe libre et fière
De ta pleine possession.
Nous ne contrôlons plus rien
Mais l’amour nous sied
Dans les brûlures du Ciel
Où fondent les frimas.
L’orchidée de nos sexes déchire
Les silences lourds de nos blessures.
Contre les parois et fêlures
Naissent les pommes du désir.
Je fis promesses de me laisser à toi.
Tu m’épousailles avec témérité.
C’est ardeur que de s’aimer,
Labeur d’une aube certaine.
Tu vois le printemps
Derrière les fagots de misère.
Par la fenêtre,
J’entends le rire des enfants.
5. Poème numéro 12 (suite)
De retour et d’aller
Mon coeur s’est dissout dans une inconséquence.
Décoiffé d’insouciance,
Il tousse à découvert.
Le voyage erre de gare en gare.
D’un wagon de chemin de fer
A l’autre,
Je suis en transfert.
Dans le jour
Assorti à le nuit bleutée,
Qui peut sentir l’étrange tourment
De la valse de l’expérience ?
6. Poème numéro 20
L’or des baisers
Luit dans les pupilles claires.
Bercés par les chevaux du rêve,
Les galops tissent la voie lactée.
Devant mes yeux dansent,
L’homme et la femme enlacés.
Le don de leur amour
Glisse sans aspérité.
7. Poème numéro 22
Surprise au lever du soleil !
Avril s’est ouvert
Au bas d’un sentier où je me fis aller.
Les jacinthes tapissent en rivière
La forêt d’un bleu phosphorescent.
Adultes, petits et grands enfants,
Par bouquet viennent religieusement
Admirer le miracle parmi les pierres.
Au ras du sol et de la terre,
Des parcelles d’un jour joyeux éclairent,
Sous l’arbre de nos rêves, la profondeur du ciel.
8. Poème numéro 26
Au bord de mes doutes,
Béante danse ma question.
Entre l’un et l’autre abord,
Mon coeur balance.
Le temps me déboute.
Quand le choix est-il bon ?
Ô maître qui m’échappe,
Tisse l’heure à mon errance.
Le vent s’agite dehors.
Son cours en cahot se poursuit
Et brutalement à terre,
Lance les rêves d’illusions.
Un pays sombre et gris,
Jamais connu, Amor, coûte
A ma vie plus légère
L’enfant de notre union.
Un trait manque à ma route.
Seul le présent offre sa chape
De rayons épars et solitaires,
Entre les gouttes et le plomb.
L’histoire se tisse dans le noir.
Un jour, venant à la lumière,
Pâques fleurit. Un soir, tout autre,
broda la fête à la résurrection.
Le sillon d’or des apôtres
Luisait dans la nuit de prière.
Jamais la tête n’aurait pu croire
Le retour de tels avatars.
9. Poème numéro 34 Bris et brisures
Au bout du désespoir,
Mon âme s’est penchée.
Liquéfiée, morte et blême
Elle ne fit pas belle à voir,
Elle qui dit « je t’aime ».
Je voudrais m’élancer.
Elle s’est vidée de toutes ses eaux,
Laissant ça et là, main et os.
Tous en pièces et morceaux.
La déchirure lui ôta la peau.
Dans le noir, la colonne s’est brisée,
Laissant à terre l’ancienne détresse.
« Vlan », la faux tranche ce qui, passé,
Superflu, révolu, tombe en pièce.
La pensée en tournant se perd.
Le corps tremble solitaire.
L’absence n’a pas d’égal
Creusant le ravage infernal.
Après le froid, le glacis du cachot,
Long et triste pays sans mot.
Puisse enfin l’envie d’union
Recevoir le don d’un pardon.
Tel un épi de blé jaillit
Une gerbe verte de la nuit.
Inattendu et inédit,
Un espoir pointe tout petit.
L’ivresse de la tendresse,
L’enlacement de mes bras tendus
Il m’attend. Acquiesce
Venus en sa grâce s’offrant nue.
Des bris d’étoile dans un ciel nuit
Tracent l’horizon à l’infini.
Mais le temps va si long
Franchir son pont.
Point n’imagine tant
En cet instant, et pourtant…
Nul ne sait déjà, où, quand, pourquoi,
Mais elle y croit avec foi.
Les allumettes d’un vertigineux bonheur
Crépitent d’une fraîche ardeur.
10. Poème numéro 41 Trouble horizon
Tourments infimes troublant mes veines,
Emotions, semblables tourbillons de poussières,
Par wagon, vous entrez dans l’antre des pensées.
Sans vous souciez de rien, vous faites apparition,
Semez la confusion dans ce qui n’était qu’une ombre,
Le champ délabré de mon attente sereine,
La pauvreté de mes constructions de défense.
Levez un pied et tout sera écroulé, telle une offense
Là où je n’espérais rien de plus que le glas de rompre.
Je n’ai en offrande que du pain et du vin. Est-ce assez,
Une saine contribution pour guérir de toute peine ?
Demain, je peux apporter encore et encore.
Sans compter, la foi du charbonnier, mes enfants de lumière,
L’or de l’espérance qui se sème pendant l’enfance,
L’engagement vif à sauter par-dessus les morts.
Ce soir, mon âme n’est point d’eau limpide ni claire,
Pas plus vaillante ni moins noire qu’un vieux cheval épuisé.
Elle s’inquiète de ce qui fit sa disparition et sa souffrance.
Jaillira-t-elle encore si aucune avance n’est professée ?
La lie a été bue jusqu’à s’en épuiser.
A l’entour d’un retour, le poète requiert une pacification.
D’un geste fou et insensé, il jette son appel et s’élance
Avec au coeur, une gerbe fleurie et un amour en bandoulière.
11. Poème numéro 43 Mots du soir
Tranquille, apaise toi.
Comme l’eau se délie
Dénoue-toi.
Repose ton coeur en moi.
Furie, ce n’est pas toi.
Ouvre-toi à la vie.
Ta colère me fait peine
Tu veux de moi ?
Brindille comme tempête
Telle qu’un vol t’emmène,
Oublie l’infâme de tes lois.
Arrondis le bois des arrêtes.
Brasier, encore une fois,
Ne souffle point l’incendie.
Amadoue le feu dans la Seine
Fais flirter les mots à l’envie.
Ta langue teinte de bon aloi.
A l’usage, retire s’en la magie.
Laisse-moi te faire ravie.
Libère la chape des émois.
Cela glissera sur les rives.
Le fil échappera par endroit.
Cependant, près du roi et sa reine,
Mon aise est tout aubaine.
12. Poème numéro 50
En roulage en air libre,
La bicyclette passe de-ci de-là,
Des trottoirs hauts et bas.
Elle enjambe fossés et tracas,
Les nids de poule à même la terre
Des pièges à fesses, des nids à rats.
Au passage, la roue vibre.
Le cadre même ploie.
Quel tremblement de vent
Tel l’amant sur la princesse!
Elle avance sans cesse
Par-delà la détresse.
13. Poème numéro 51
Des verres pleins d’enivrement
Tintent dans le matin
Nu sur un ciel blanc.
Les aléas, qui aime leur dard ?
Quand la balance cherche en l’air,
Un équilibre toujours précaire.
Au midi du jour en paresse
Danse dense, presqu’en transe,
Elle quête l’innocence,
A desserrer les dents
En jouant d’un air léger,
A peindre l’allégorie.
La présence tendre s’emploie
A chanter les lendemains
Sans connaître sa voix.
Elle emprunte les tournants,
Mue par un rire sur le tard
Derrière la coquetterie.
14. Poème numéro 52
Femmes indésirables,
Feu du coeur toujours en ravage,
Des cailloux vous ouvrent la bouche
Où les mots vous accouchent,
Brûlées vives dans l’acide
Qui ronge les espoirs
Quand vient l’heure du soir
L’eau des promesses placides.
Femmes par trop désirables,
Aux nerfs dans un cercle en otage,
Les épousailles vous touchent
Dans le cirque des nuages.
Sous les verrous du temps,
Tels des essaims de mouches,
Les affaires d’entant vous
Livrèrent poing et sang
Femmes indéfinissables,
Vastes terres en partage,
Les grands hêtres se couchent
Sur vos ombre d’enfant.
15. Poème numéro 62 L’exilé, mon frère
Il se prend pour Rimbaud
N’a que peau sur les os.
Le feu le brûle souvent
Des pieds à la tête
Jusqu’à voir Lucifer
Sur la face de sa mère.
Vers elle, violemment
Son sang retourne ses nerfs.
Depuis tout jeune enfant
Il se tenait pour Roi.
Dans sa verve solitaire
Peu à peu, se terra.
Il paie son exil d’une parole
Qui à son corps le prend.
D’invisibles pactes, il signa
A de fiels protocoles, se livra.
Pour un je t’aime
Avec ses poèmes,
il met le Monde à bas,
Ses Lois qu’il ne suit pas.
Mais sa grande traversée
Est un dure combat,
plus proche de la guerre
que d’aucun ne le figure.
Qui se souvient de son air ?
Petit garçon effronté et fier
Comme il guettait les fêtes
Pour s’empresser à plaire.
Qui sait où il ira,
Incertain et sans âge
La folie sous le bras
Les idées en tapage ?
Nul repos pour ce regard amer.
Et pourtant, c’est mon frère
D’exilé sur la terre,
A son coeur défendant.
16. Poème numéro 65
Côté jardin,
Les oiseaux chantent.
Côté rue,
L’incertitude hante.
Dans un jour ordinaire,
Un ventre nu restait assoupi,
Tapi derrière une pierre,
Dans sa rondeur enfouit.
Pressée dans un amas d’habit
Sa nudité ne venait à la vie.
Mais, un matin sous la charpente
Le réveil avala l’attente.
Alors l’aurore apparut
La femme lui plut.
Elle le voulait ingénu.
Il la trouva charmante.
Elle mit un pied dans l’herbe
Et son coeur se tut.
Les brins caressaient
Ses blancs seins, son teint ému.
Et soudain, sans dire,
Levant sa virilité en force
Il la fit tressaillir,
Du feutre sous l’écorce.
La voix de terre courut
Jusqu’à sa poitrine battante.
Ses cheveux sentaient l’humus,
Les fleurs fraîches et l’amarante.
Un léger bruissement se fit
Au creux du vallon isolé.
Les arbres centenaires riants
Etendaient leurs sarments.
A pas feutrés, il t’étendit.
Le long du jour, il la conquit.
Midi jouait à leurs pieds
Comme leur vieil ami.
17. Poème numéro 67 Les nuits pleines
Plutôt que l’ennui
Et la vie éphémère,
En unique prière
La révolte nous attend.
Nous, bons amants
Des nuits pleines,
Gorgés d’ivresse claire
Et de chairs de poèmes.
Suis-je déjà ivre
De baisers ? Insatiable,
Parmi les livres,
Quand git l’impalpable.
Des notes par-ci,
Le jazz, son écriture
Là, Le Brésil à en faire
Tourner la tête,
Valsent sans mesure,
Pour mon coeur grenat
Et ma poitrine blême
Emplie de ses contraires.
18. Poème numéro 69
Un jour sans nuit
Une nuit endormie
Un veilleur veillait.
Au matin, la lune l’avait vu.
Engourdi sur sa veille,
Il s’était assoupi.
Durant son siège,
Les rêves étaient venus
Jeter leurs sortilèges.
Une sorcière sans pareille
Tassée dans sa cahutte
Tournait dans son chaudron.
De la mer, le vent s’était levé.
Le sable commença à crier
En l’air, les cormorans dansaient.
Le sommeil du dormeur
Ne s’était point troublé
A l’assaut des goélands rieurs.
Dans les vagues chahutent,
Sautent les blancs moutons
Dans un vaste ballet.
19. Poème numéro 70
Le silence avait mangé les mots
Les mots s’étaient tus.
Alors, après des tempêtes,
Des eaux et des naufrages.
Tu m’avais prises le jour venu
Le long de la lagune rose.
Je regardais le ciel des Tropiques
La jungle résonnait de mille possibles
Dans mes orteils logeaient
Nos innombrables lendemains.
Les mots avaient manqué.
Le silence était descendu.
Bas sur les champs de terre,
Ton corps avait touché ma paix.
Tu avais avancé ta main
Là où il fait chaud et moite.
Lourde sur les bans de sable,
Ma tête s’était mise à la prose.
Alors, la nuit nous reprit,
Mère de nos appétits insatiables.
Dans la jetée des variables
Nous étions couchés à mi-dire.
Nos visages se faisaient face
Et nous apprenions à parler.
Je nous cherchais dans ces brios,
forêts de nos seuls langages.
Loin des cases étroites,
La voûte dévoilait la musique
L’infini tremblait de toi à moi,
Secouant nos refuges paisibles.
Il courut le champ des sirènes
Tandis que s’embrasait l’espace
Un dauphin vint en ligne de mire.
Au petit matin, mise à nu,
La herse de ma bouche creusait
Encore, ton inconnu sans relâche.
20. Poème numéro 73 Tranchés
Ca va couler là où on ne s’y attend point.
Entre le blanc - le rouge, ça prend le sang.
Enturbanné d’acier, éternel a semblé ce matin.
Tout le jour, j’ai marché arme au poing.
Contre moi-même intensément,
La fougue du changement m’étreint.
J’aimerais clouer à terre l’incertain,
Mes grandes espérances d’antan,
Lucifer et ses airs de sacristain.
J’attendis comme on guette les trains
Au bras de mon loup solitaire,
Trépignant ne sachant le chemin.
Dans la ville de verre et d’étain,
Je ne cherchais plus la lumière
Quand j’entrevis la main du Destin
De vastes cieux et le pur éther
Montraient de tendres lendemains.
Une pluie d’étoile irradiait en l’air.
Nul effort ne m’eut mené si loin.
Soudain, il devint si léger d’être
L’âme riait à son aise – j’étais bien.
21. Poème numéro 81
Hier, j’étais dans le gouffre de la colère
Le ton de ma voix ne désemplissait pas de ses aires
Avec raison, pourtant
Je ne voulais me laisser faire
Les assauts délétères jetés sans ordre
Ne sortent pas les morts des cimetières
Les grands yeux menaçants
Ne font pas se hâter le passant
Les marchés de dupe, quelle misère
Vendre son âme pour réchauffer l’hiver
Par derrière penser le contraire,
Ne me rendent pas plus légère
Se faire respecter quelle affaire
Face aux manants, je ne monnaye plus rien
Malgré jamais gagnée, la route en vaut la peine
D’incroyables trouvailles au détour des pas incertains
Combien de guerre et de combats ai-je déserté,
Faute de moyen de confronter
Mon prétendu adversaire ou mon alter
Mon simple moi gêné de lui-même que n’être ?
Tel l’effeuillage d’un trèfle au tendre vert
Mon opinion sort des sentiers ordinaires
Pour se frotter à l’inconnu,
Son dur et tendre coeur devra paraître
Et sa figure renaître.
Couches, pelures et autres masques
L’un après l’autre tombent à terre
A mesure que mes armes s’enterrent
Oh belle amie que j’ai vu
Dans le sillage d’une ombre
Sur le miroir de l’estaminet
Je t’ai reconnue, ma fidèle incernable
Douce compagnie que de goûter
A celle que tu es devenue
Sans orgueil ni tiare,
Vaquant à tes affaires
Tu m’en vois obligée
De veiller sur tes jours
Tendrement, avec des calembours
Et des esprits de fées
Oserais-je ainsi affirmer ?
N’est-ce point plutôt chimère
Ou démesure recommencée,
Que d’allumer la paix
D’un calumet en bois teinté
Pour celle qui peut aimer son sombre ?
22. Poème numéro 83
Rien ne bouge
En apparence.
Presqu’immobile semble la peau de la vie.
Mais
Je sens
Dans le silence et sous le vent,
Mes os crissent différemment.
Un changement lent, si lent qu’à peine visible,
Si profond qu’à peine dicible
Palpite dans le calme du recul.
Dans l’ardeur de l’action,
A la surface de jours,
Discrètement,
Mille plis ondulent,
Mille nuances brillent.
Mes bras veulent s’offrir, se tendre
Etreindre
Comme les ramures d’un chêne
Déployer un doux ombrage
Une piste d’atterrissage
Aux oiseaux innombrables
Caresser tendrement la profondeur du ciel
Avec leur feuillage frémissant.
Ma voix se cherche.
Mon regard s’ouvre,
Se heurte, puis, se ferme
Et revient se poser.
Mes oreilles guettent le dedans le dehors
Mon corps s’abandonne à ce présent
Encore et encore.
La vie en un seul tenant
Se tient à ma porte
Avec fermeté
Doucement
Souplement
Pleine de résolutions
Je me démène
Entre pesanteur ou légèreté.
Le soir me surprend à vif encore,
Dans un sanglot
Survenu soudainement.
J’aimerais encore et encore
Te dire mes délires,
Danser ma lourdeur,
Chanter l’hiver,
Rire ivre de rire,
Les jours de tempête
Les nuits étoilées
Laisse aller.