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Poème numéro 1 d’Eté 
A l’improviste, c’est venu: 
De l’indicible, je vais tâcher d’en dire, 
Au moins quelques mots en dentelles, 
Des poussières d’étoiles pareilles 
A l’une de celle qui borda nos pas ce soir 
Sous l’étang et le parc silencieux, 
A l’abri du ciel bleu nuit, la marche éternelle 
De ce début d’un bien que j’accueille sans rêve 
Simplement là, telle que tu me permets d’être 
Nous cherchant, sans rien exiger déjà. 
Tous les chemins sont encore ouverts. 
Rien n’a encore été barré. 
Rien ne me retient encore, 
De m’acheminer vers ce bel aurore, 
De m’enfoncer vers ce qui sera mon sort. 
Tu es arrivé sans que j’aie pu te prévenir. 
D’un coup, je nous ai vu nous découvrir, 
Face à face, un peu timides. 
J’ai rougis sous mon visage placide. 
Tu n’as pas vu cela, je crois, la première fois. 
Je tremblais sans bouger. 
Je ne voulais point être guide. 
Sous mon timbre maîtrisé, 
Ma parole allait se dérobant à ma portée, 
Encore plus qu’à l’habitude, 
Elle te racontait déjà 
Ce que je n’étais pas sûre de vouloir te dire. 
J’étais là et j’étais absente. 
J’étais au profond de moi à déjà te rencontrer. 
J’écoutais la résonnance en moi, de ta voix, 
Si tranquille, si enjouée par moment, 
Et caverneuse encore de la vie qu’elle délivre 
Qui a coulé en elle.
Poème numéro 8 d’Hiver 
Les ailes me brulent. 
Sur la neige glacée, 
Mes envolées se gèlent. 
Mes patins ne glissent plus. 
La surface est rayée, 
Où mon élan brisé, 
Se meurt sans pardessus. 
Oh, mon amour décousu 
Heurté tant de jours et de nuits. 
Mon ange recommandé, 
Masqué, tu m’apparais en songe. 
Tu prenais mes ombres. 
Dans les creux de tes hanches. 
Les chauffant de ta patience, 
De ta passion d’aimant. 
Je devenais sable, 
Pour l’eau de tes jardins, 
Malléable et docile 
Pour qui m’aime. 
Je t’aimai 
Comme un feu de folie. 
Ton nom, ton visage 
Me courraient dans les veines. 
Pas un instant, 
Sans ce ravage rouge sang 
Qui m’ôta à mes chaînes 
Et me donna à toi. 
Tant de fois répétés 
Ont été nos écarts et nos retrouvailles, 
Rivière de larmes de joie et de peine, 
Sous la barque de nos rêves. 
Tu fis 
Ce vertige libre 
Qui m’assiégea 
De haut en bas. 
Ténébreux et pénétrant, 
Tu visais haut. 
Généreux amour, 
Grand maître 
Trônant sur mes détours. 
Avec aplomb, 
Tu embrassas d’un coup 
Toutes nos incohérences 
De ta bouche goulue.
Poème numéro 11 Léger printemps 
Un léger brin d’air 
Vole libre parmi les azalées. 
Encore étourdis de vert, 
Les buissons sont en bourgeons. 
A quand leur pleine floraison ? 
L’impatience m’a gagnée. 
Sur les pierres posées à terre 
Mes pieds enjambent les gués. 
Un temps de printemps, 
Clair et clément, 
Et sa joie chassant l’hiver 
Sont entrés par les battants de la fenêtre.
Poème numéro 12 
Entre les pierres s’est égaré l’hiver. 
Le manteau de son froid 
Touche de verre mes doigts 
Qui se gèlent loin de toi. 
Que de mois sans émoi 
Ont pillés nos réserves 
Pour la saison prochaine. 
J’ai la haine des conserves. 
Dans un foyer déserté de frivolité 
Habité par tes silences besogneux 
Un lent déclin fit main basse 
Et tua mes chimères. 
Le livre est la main 
Pour le puits de la connaissance. 
Le chemin de ses lignes 
Trace face aux indifférences. 
Tes pleurs résonnent 
Comme des cris de détresse. 
La masse de leur perte 
Altère l’évidence de ma foi. 
Tes peines d’angoisses 
Pèsent sur le sommeil clair. 
Tremble la peur des hommes 
Et le trouble de leur liesse. 
Depuis hier, 
L’arbre de nos échanges est couvert 
D’une fine opercule de blancheur immaculée 
Qui me laisse émerveillée. 
Au milieu de la clairière 
De nos denses contradictions 
Je rêve, 
Danse, elfe libre et fière 
De ta pleine possession. 
Nous ne contrôlons plus rien 
Mais l’amour nous sied 
Dans les brûlures du Ciel 
Où fondent les frimas. 
L’orchidée de nos sexes déchire 
Les silences lourds de nos blessures. 
Contre les parois et fêlures 
Naissent les pommes du désir. 
Je fis promesses de me laisser à toi. 
Tu m’épousailles avec témérité. 
C’est ardeur que de s’aimer, 
Labeur d’une aube certaine. 
Tu vois le printemps 
Derrière les fagots de misère. 
Par la fenêtre, 
J’entends le rire des enfants.
Poème numéro 12 (suite) 
De retour et d’aller 
Mon coeur s’est dissout dans une inconséquence. 
Décoiffé d’insouciance, 
Il tousse à découvert. 
Le voyage erre de gare en gare. 
D’un wagon de chemin de fer 
A l’autre, 
Je suis en transfert. 
Dans le jour 
Assorti à le nuit bleutée, 
Qui peut sentir l’étrange tourment 
De la valse de l’expérience ?
Poème numéro 20 
L’or des baisers 
Luit dans les pupilles claires. 
Bercés par les chevaux du rêve, 
Les galops tissent la voie lactée. 
Devant mes yeux dansent, 
L’homme et la femme enlacés. 
Le don de leur amour 
Glisse sans aspérité.
Poème numéro 22 
Surprise au lever du soleil ! 
Avril s’est ouvert 
Au bas d’un sentier où je me fis aller. 
Les jacinthes tapissent en rivière 
La forêt d’un bleu phosphorescent. 
Adultes, petits et grands enfants, 
Par bouquet viennent religieusement 
Admirer le miracle parmi les pierres. 
Au ras du sol et de la terre, 
Des parcelles d’un jour joyeux éclairent, 
Sous l’arbre de nos rêves, la profondeur du ciel.
Poème numéro 26 
Au bord de mes doutes, 
Béante danse ma question. 
Entre l’un et l’autre abord, 
Mon coeur balance. 
Le temps me déboute. 
Quand le choix est-il bon ? 
Ô maître qui m’échappe, 
Tisse l’heure à mon errance. 
Le vent s’agite dehors. 
Son cours en cahot se poursuit 
Et brutalement à terre, 
Lance les rêves d’illusions. 
Un pays sombre et gris, 
Jamais connu, Amor, coûte 
A ma vie plus légère 
L’enfant de notre union. 
Un trait manque à ma route. 
Seul le présent offre sa chape 
De rayons épars et solitaires, 
Entre les gouttes et le plomb. 
L’histoire se tisse dans le noir. 
Un jour, venant à la lumière, 
Pâques fleurit. Un soir, tout autre, 
broda la fête à la résurrection. 
Le sillon d’or des apôtres 
Luisait dans la nuit de prière. 
Jamais la tête n’aurait pu croire 
Le retour de tels avatars.
Poème numéro 34 Bris et brisures 
Au bout du désespoir, 
Mon âme s’est penchée. 
Liquéfiée, morte et blême 
Elle ne fit pas belle à voir, 
Elle qui dit « je t’aime ». 
Je voudrais m’élancer. 
Elle s’est vidée de toutes ses eaux, 
Laissant ça et là, main et os. 
Tous en pièces et morceaux. 
La déchirure lui ôta la peau. 
Dans le noir, la colonne s’est brisée, 
Laissant à terre l’ancienne détresse. 
« Vlan », la faux tranche ce qui, passé, 
Superflu, révolu, tombe en pièce. 
La pensée en tournant se perd. 
Le corps tremble solitaire. 
L’absence n’a pas d’égal 
Creusant le ravage infernal. 
Après le froid, le glacis du cachot, 
Long et triste pays sans mot. 
Puisse enfin l’envie d’union 
Recevoir le don d’un pardon. 
Tel un épi de blé jaillit 
Une gerbe verte de la nuit. 
Inattendu et inédit, 
Un espoir pointe tout petit. 
L’ivresse de la tendresse, 
L’enlacement de mes bras tendus 
Il m’attend. Acquiesce 
Venus en sa grâce s’offrant nue. 
Des bris d’étoile dans un ciel nuit 
Tracent l’horizon à l’infini. 
Mais le temps va si long 
Franchir son pont. 
Point n’imagine tant 
En cet instant, et pourtant… 
Nul ne sait déjà, où, quand, pourquoi, 
Mais elle y croit avec foi. 
Les allumettes d’un vertigineux bonheur 
Crépitent d’une fraîche ardeur.
Poème numéro 41 Trouble horizon 
Tourments infimes troublant mes veines, 
Emotions, semblables tourbillons de poussières, 
Par wagon, vous entrez dans l’antre des pensées. 
Sans vous souciez de rien, vous faites apparition, 
Semez la confusion dans ce qui n’était qu’une ombre, 
Le champ délabré de mon attente sereine, 
La pauvreté de mes constructions de défense. 
Levez un pied et tout sera écroulé, telle une offense 
Là où je n’espérais rien de plus que le glas de rompre. 
Je n’ai en offrande que du pain et du vin. Est-ce assez, 
Une saine contribution pour guérir de toute peine ? 
Demain, je peux apporter encore et encore. 
Sans compter, la foi du charbonnier, mes enfants de lumière, 
L’or de l’espérance qui se sème pendant l’enfance, 
L’engagement vif à sauter par-dessus les morts. 
Ce soir, mon âme n’est point d’eau limpide ni claire, 
Pas plus vaillante ni moins noire qu’un vieux cheval épuisé. 
Elle s’inquiète de ce qui fit sa disparition et sa souffrance. 
Jaillira-t-elle encore si aucune avance n’est professée ? 
La lie a été bue jusqu’à s’en épuiser. 
A l’entour d’un retour, le poète requiert une pacification. 
D’un geste fou et insensé, il jette son appel et s’élance 
Avec au coeur, une gerbe fleurie et un amour en bandoulière.
Poème numéro 43 Mots du soir 
Tranquille, apaise toi. 
Comme l’eau se délie 
Dénoue-toi. 
Repose ton coeur en moi. 
Furie, ce n’est pas toi. 
Ouvre-toi à la vie. 
Ta colère me fait peine 
Tu veux de moi ? 
Brindille comme tempête 
Telle qu’un vol t’emmène, 
Oublie l’infâme de tes lois. 
Arrondis le bois des arrêtes. 
Brasier, encore une fois, 
Ne souffle point l’incendie. 
Amadoue le feu dans la Seine 
Fais flirter les mots à l’envie. 
Ta langue teinte de bon aloi. 
A l’usage, retire s’en la magie. 
Laisse-moi te faire ravie. 
Libère la chape des émois. 
Cela glissera sur les rives. 
Le fil échappera par endroit. 
Cependant, près du roi et sa reine, 
Mon aise est tout aubaine.
Poème numéro 50 
En roulage en air libre, 
La bicyclette passe de-ci de-là, 
Des trottoirs hauts et bas. 
Elle enjambe fossés et tracas, 
Les nids de poule à même la terre 
Des pièges à fesses, des nids à rats. 
Au passage, la roue vibre. 
Le cadre même ploie. 
Quel tremblement de vent 
Tel l’amant sur la princesse! 
Elle avance sans cesse 
Par-delà la détresse.
Poème numéro 51 
Des verres pleins d’enivrement 
Tintent dans le matin 
Nu sur un ciel blanc. 
Les aléas, qui aime leur dard ? 
Quand la balance cherche en l’air, 
Un équilibre toujours précaire. 
Au midi du jour en paresse 
Danse dense, presqu’en transe, 
Elle quête l’innocence, 
A desserrer les dents 
En jouant d’un air léger, 
A peindre l’allégorie. 
La présence tendre s’emploie 
A chanter les lendemains 
Sans connaître sa voix. 
Elle emprunte les tournants, 
Mue par un rire sur le tard 
Derrière la coquetterie.
Poème numéro 52 
Femmes indésirables, 
Feu du coeur toujours en ravage, 
Des cailloux vous ouvrent la bouche 
Où les mots vous accouchent, 
Brûlées vives dans l’acide 
Qui ronge les espoirs 
Quand vient l’heure du soir 
L’eau des promesses placides. 
Femmes par trop désirables, 
Aux nerfs dans un cercle en otage, 
Les épousailles vous touchent 
Dans le cirque des nuages. 
Sous les verrous du temps, 
Tels des essaims de mouches, 
Les affaires d’entant vous 
Livrèrent poing et sang 
Femmes indéfinissables, 
Vastes terres en partage, 
Les grands hêtres se couchent 
Sur vos ombre d’enfant.
Poème numéro 62 L’exilé, mon frère 
Il se prend pour Rimbaud 
N’a que peau sur les os. 
Le feu le brûle souvent 
Des pieds à la tête 
Jusqu’à voir Lucifer 
Sur la face de sa mère. 
Vers elle, violemment 
Son sang retourne ses nerfs. 
Depuis tout jeune enfant 
Il se tenait pour Roi. 
Dans sa verve solitaire 
Peu à peu, se terra. 
Il paie son exil d’une parole 
Qui à son corps le prend. 
D’invisibles pactes, il signa 
A de fiels protocoles, se livra. 
Pour un je t’aime 
Avec ses poèmes, 
il met le Monde à bas, 
Ses Lois qu’il ne suit pas. 
Mais sa grande traversée 
Est un dure combat, 
plus proche de la guerre 
que d’aucun ne le figure. 
Qui se souvient de son air ? 
Petit garçon effronté et fier 
Comme il guettait les fêtes 
Pour s’empresser à plaire. 
Qui sait où il ira, 
Incertain et sans âge 
La folie sous le bras 
Les idées en tapage ? 
Nul repos pour ce regard amer. 
Et pourtant, c’est mon frère 
D’exilé sur la terre, 
A son coeur défendant.
Poème numéro 65 
Côté jardin, 
Les oiseaux chantent. 
Côté rue, 
L’incertitude hante. 
Dans un jour ordinaire, 
Un ventre nu restait assoupi, 
Tapi derrière une pierre, 
Dans sa rondeur enfouit. 
Pressée dans un amas d’habit 
Sa nudité ne venait à la vie. 
Mais, un matin sous la charpente 
Le réveil avala l’attente. 
Alors l’aurore apparut 
La femme lui plut. 
Elle le voulait ingénu. 
Il la trouva charmante. 
Elle mit un pied dans l’herbe 
Et son coeur se tut. 
Les brins caressaient 
Ses blancs seins, son teint ému. 
Et soudain, sans dire, 
Levant sa virilité en force 
Il la fit tressaillir, 
Du feutre sous l’écorce. 
La voix de terre courut 
Jusqu’à sa poitrine battante. 
Ses cheveux sentaient l’humus, 
Les fleurs fraîches et l’amarante. 
Un léger bruissement se fit 
Au creux du vallon isolé. 
Les arbres centenaires riants 
Etendaient leurs sarments. 
A pas feutrés, il t’étendit. 
Le long du jour, il la conquit. 
Midi jouait à leurs pieds 
Comme leur vieil ami.
Poème numéro 67 Les nuits pleines 
Plutôt que l’ennui 
Et la vie éphémère, 
En unique prière 
La révolte nous attend. 
Nous, bons amants 
Des nuits pleines, 
Gorgés d’ivresse claire 
Et de chairs de poèmes. 
Suis-je déjà ivre 
De baisers ? Insatiable, 
Parmi les livres, 
Quand git l’impalpable. 
Des notes par-ci, 
Le jazz, son écriture 
Là, Le Brésil à en faire 
Tourner la tête, 
Valsent sans mesure, 
Pour mon coeur grenat 
Et ma poitrine blême 
Emplie de ses contraires.
Poème numéro 69 
Un jour sans nuit 
Une nuit endormie 
Un veilleur veillait. 
Au matin, la lune l’avait vu. 
Engourdi sur sa veille, 
Il s’était assoupi. 
Durant son siège, 
Les rêves étaient venus 
Jeter leurs sortilèges. 
Une sorcière sans pareille 
Tassée dans sa cahutte 
Tournait dans son chaudron. 
De la mer, le vent s’était levé. 
Le sable commença à crier 
En l’air, les cormorans dansaient. 
Le sommeil du dormeur 
Ne s’était point troublé 
A l’assaut des goélands rieurs. 
Dans les vagues chahutent, 
Sautent les blancs moutons 
Dans un vaste ballet.
Poème numéro 70 
Le silence avait mangé les mots 
Les mots s’étaient tus. 
Alors, après des tempêtes, 
Des eaux et des naufrages. 
Tu m’avais prises le jour venu 
Le long de la lagune rose. 
Je regardais le ciel des Tropiques 
La jungle résonnait de mille possibles 
Dans mes orteils logeaient 
Nos innombrables lendemains. 
Les mots avaient manqué. 
Le silence était descendu. 
Bas sur les champs de terre, 
Ton corps avait touché ma paix. 
Tu avais avancé ta main 
Là où il fait chaud et moite. 
Lourde sur les bans de sable, 
Ma tête s’était mise à la prose. 
Alors, la nuit nous reprit, 
Mère de nos appétits insatiables. 
Dans la jetée des variables 
Nous étions couchés à mi-dire. 
Nos visages se faisaient face 
Et nous apprenions à parler. 
Je nous cherchais dans ces brios, 
forêts de nos seuls langages. 
Loin des cases étroites, 
La voûte dévoilait la musique 
L’infini tremblait de toi à moi, 
Secouant nos refuges paisibles. 
Il courut le champ des sirènes 
Tandis que s’embrasait l’espace 
Un dauphin vint en ligne de mire. 
Au petit matin, mise à nu, 
La herse de ma bouche creusait 
Encore, ton inconnu sans relâche.
Poème numéro 73 Tranchés 
Ca va couler là où on ne s’y attend point. 
Entre le blanc - le rouge, ça prend le sang. 
Enturbanné d’acier, éternel a semblé ce matin. 
Tout le jour, j’ai marché arme au poing. 
Contre moi-même intensément, 
La fougue du changement m’étreint. 
J’aimerais clouer à terre l’incertain, 
Mes grandes espérances d’antan, 
Lucifer et ses airs de sacristain. 
J’attendis comme on guette les trains 
Au bras de mon loup solitaire, 
Trépignant ne sachant le chemin. 
Dans la ville de verre et d’étain, 
Je ne cherchais plus la lumière 
Quand j’entrevis la main du Destin 
De vastes cieux et le pur éther 
Montraient de tendres lendemains. 
Une pluie d’étoile irradiait en l’air. 
Nul effort ne m’eut mené si loin. 
Soudain, il devint si léger d’être 
L’âme riait à son aise – j’étais bien.
Poème numéro 81 
Hier, j’étais dans le gouffre de la colère 
Le ton de ma voix ne désemplissait pas de ses aires 
Avec raison, pourtant 
Je ne voulais me laisser faire 
Les assauts délétères jetés sans ordre 
Ne sortent pas les morts des cimetières 
Les grands yeux menaçants 
Ne font pas se hâter le passant 
Les marchés de dupe, quelle misère 
Vendre son âme pour réchauffer l’hiver 
Par derrière penser le contraire, 
Ne me rendent pas plus légère 
Se faire respecter quelle affaire 
Face aux manants, je ne monnaye plus rien 
Malgré jamais gagnée, la route en vaut la peine 
D’incroyables trouvailles au détour des pas incertains 
Combien de guerre et de combats ai-je déserté, 
Faute de moyen de confronter 
Mon prétendu adversaire ou mon alter 
Mon simple moi gêné de lui-même que n’être ? 
Tel l’effeuillage d’un trèfle au tendre vert 
Mon opinion sort des sentiers ordinaires 
Pour se frotter à l’inconnu, 
Son dur et tendre coeur devra paraître 
Et sa figure renaître. 
Couches, pelures et autres masques 
L’un après l’autre tombent à terre 
A mesure que mes armes s’enterrent 
Oh belle amie que j’ai vu 
Dans le sillage d’une ombre 
Sur le miroir de l’estaminet 
Je t’ai reconnue, ma fidèle incernable 
Douce compagnie que de goûter 
A celle que tu es devenue 
Sans orgueil ni tiare, 
Vaquant à tes affaires 
Tu m’en vois obligée 
De veiller sur tes jours 
Tendrement, avec des calembours 
Et des esprits de fées 
Oserais-je ainsi affirmer ? 
N’est-ce point plutôt chimère 
Ou démesure recommencée, 
Que d’allumer la paix 
D’un calumet en bois teinté 
Pour celle qui peut aimer son sombre ?
Poème numéro 83 
Rien ne bouge 
En apparence. 
Presqu’immobile semble la peau de la vie. 
Mais 
Je sens 
Dans le silence et sous le vent, 
Mes os crissent différemment. 
Un changement lent, si lent qu’à peine visible, 
Si profond qu’à peine dicible 
Palpite dans le calme du recul. 
Dans l’ardeur de l’action, 
A la surface de jours, 
Discrètement, 
Mille plis ondulent, 
Mille nuances brillent. 
Mes bras veulent s’offrir, se tendre 
Etreindre 
Comme les ramures d’un chêne 
Déployer un doux ombrage 
Une piste d’atterrissage 
Aux oiseaux innombrables 
Caresser tendrement la profondeur du ciel 
Avec leur feuillage frémissant. 
Ma voix se cherche. 
Mon regard s’ouvre, 
Se heurte, puis, se ferme 
Et revient se poser. 
Mes oreilles guettent le dedans le dehors 
Mon corps s’abandonne à ce présent 
Encore et encore. 
La vie en un seul tenant 
Se tient à ma porte 
Avec fermeté 
Doucement 
Souplement 
Pleine de résolutions 
Je me démène 
Entre pesanteur ou légèreté. 
Le soir me surprend à vif encore, 
Dans un sanglot 
Survenu soudainement. 
J’aimerais encore et encore 
Te dire mes délires, 
Danser ma lourdeur, 
Chanter l’hiver, 
Rire ivre de rire, 
Les jours de tempête 
Les nuits étoilées 
Laisse aller.

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Delphine Simonis

  • 1. Poème numéro 1 d’Eté A l’improviste, c’est venu: De l’indicible, je vais tâcher d’en dire, Au moins quelques mots en dentelles, Des poussières d’étoiles pareilles A l’une de celle qui borda nos pas ce soir Sous l’étang et le parc silencieux, A l’abri du ciel bleu nuit, la marche éternelle De ce début d’un bien que j’accueille sans rêve Simplement là, telle que tu me permets d’être Nous cherchant, sans rien exiger déjà. Tous les chemins sont encore ouverts. Rien n’a encore été barré. Rien ne me retient encore, De m’acheminer vers ce bel aurore, De m’enfoncer vers ce qui sera mon sort. Tu es arrivé sans que j’aie pu te prévenir. D’un coup, je nous ai vu nous découvrir, Face à face, un peu timides. J’ai rougis sous mon visage placide. Tu n’as pas vu cela, je crois, la première fois. Je tremblais sans bouger. Je ne voulais point être guide. Sous mon timbre maîtrisé, Ma parole allait se dérobant à ma portée, Encore plus qu’à l’habitude, Elle te racontait déjà Ce que je n’étais pas sûre de vouloir te dire. J’étais là et j’étais absente. J’étais au profond de moi à déjà te rencontrer. J’écoutais la résonnance en moi, de ta voix, Si tranquille, si enjouée par moment, Et caverneuse encore de la vie qu’elle délivre Qui a coulé en elle.
  • 2. Poème numéro 8 d’Hiver Les ailes me brulent. Sur la neige glacée, Mes envolées se gèlent. Mes patins ne glissent plus. La surface est rayée, Où mon élan brisé, Se meurt sans pardessus. Oh, mon amour décousu Heurté tant de jours et de nuits. Mon ange recommandé, Masqué, tu m’apparais en songe. Tu prenais mes ombres. Dans les creux de tes hanches. Les chauffant de ta patience, De ta passion d’aimant. Je devenais sable, Pour l’eau de tes jardins, Malléable et docile Pour qui m’aime. Je t’aimai Comme un feu de folie. Ton nom, ton visage Me courraient dans les veines. Pas un instant, Sans ce ravage rouge sang Qui m’ôta à mes chaînes Et me donna à toi. Tant de fois répétés Ont été nos écarts et nos retrouvailles, Rivière de larmes de joie et de peine, Sous la barque de nos rêves. Tu fis Ce vertige libre Qui m’assiégea De haut en bas. Ténébreux et pénétrant, Tu visais haut. Généreux amour, Grand maître Trônant sur mes détours. Avec aplomb, Tu embrassas d’un coup Toutes nos incohérences De ta bouche goulue.
  • 3. Poème numéro 11 Léger printemps Un léger brin d’air Vole libre parmi les azalées. Encore étourdis de vert, Les buissons sont en bourgeons. A quand leur pleine floraison ? L’impatience m’a gagnée. Sur les pierres posées à terre Mes pieds enjambent les gués. Un temps de printemps, Clair et clément, Et sa joie chassant l’hiver Sont entrés par les battants de la fenêtre.
  • 4. Poème numéro 12 Entre les pierres s’est égaré l’hiver. Le manteau de son froid Touche de verre mes doigts Qui se gèlent loin de toi. Que de mois sans émoi Ont pillés nos réserves Pour la saison prochaine. J’ai la haine des conserves. Dans un foyer déserté de frivolité Habité par tes silences besogneux Un lent déclin fit main basse Et tua mes chimères. Le livre est la main Pour le puits de la connaissance. Le chemin de ses lignes Trace face aux indifférences. Tes pleurs résonnent Comme des cris de détresse. La masse de leur perte Altère l’évidence de ma foi. Tes peines d’angoisses Pèsent sur le sommeil clair. Tremble la peur des hommes Et le trouble de leur liesse. Depuis hier, L’arbre de nos échanges est couvert D’une fine opercule de blancheur immaculée Qui me laisse émerveillée. Au milieu de la clairière De nos denses contradictions Je rêve, Danse, elfe libre et fière De ta pleine possession. Nous ne contrôlons plus rien Mais l’amour nous sied Dans les brûlures du Ciel Où fondent les frimas. L’orchidée de nos sexes déchire Les silences lourds de nos blessures. Contre les parois et fêlures Naissent les pommes du désir. Je fis promesses de me laisser à toi. Tu m’épousailles avec témérité. C’est ardeur que de s’aimer, Labeur d’une aube certaine. Tu vois le printemps Derrière les fagots de misère. Par la fenêtre, J’entends le rire des enfants.
  • 5. Poème numéro 12 (suite) De retour et d’aller Mon coeur s’est dissout dans une inconséquence. Décoiffé d’insouciance, Il tousse à découvert. Le voyage erre de gare en gare. D’un wagon de chemin de fer A l’autre, Je suis en transfert. Dans le jour Assorti à le nuit bleutée, Qui peut sentir l’étrange tourment De la valse de l’expérience ?
  • 6. Poème numéro 20 L’or des baisers Luit dans les pupilles claires. Bercés par les chevaux du rêve, Les galops tissent la voie lactée. Devant mes yeux dansent, L’homme et la femme enlacés. Le don de leur amour Glisse sans aspérité.
  • 7. Poème numéro 22 Surprise au lever du soleil ! Avril s’est ouvert Au bas d’un sentier où je me fis aller. Les jacinthes tapissent en rivière La forêt d’un bleu phosphorescent. Adultes, petits et grands enfants, Par bouquet viennent religieusement Admirer le miracle parmi les pierres. Au ras du sol et de la terre, Des parcelles d’un jour joyeux éclairent, Sous l’arbre de nos rêves, la profondeur du ciel.
  • 8. Poème numéro 26 Au bord de mes doutes, Béante danse ma question. Entre l’un et l’autre abord, Mon coeur balance. Le temps me déboute. Quand le choix est-il bon ? Ô maître qui m’échappe, Tisse l’heure à mon errance. Le vent s’agite dehors. Son cours en cahot se poursuit Et brutalement à terre, Lance les rêves d’illusions. Un pays sombre et gris, Jamais connu, Amor, coûte A ma vie plus légère L’enfant de notre union. Un trait manque à ma route. Seul le présent offre sa chape De rayons épars et solitaires, Entre les gouttes et le plomb. L’histoire se tisse dans le noir. Un jour, venant à la lumière, Pâques fleurit. Un soir, tout autre, broda la fête à la résurrection. Le sillon d’or des apôtres Luisait dans la nuit de prière. Jamais la tête n’aurait pu croire Le retour de tels avatars.
  • 9. Poème numéro 34 Bris et brisures Au bout du désespoir, Mon âme s’est penchée. Liquéfiée, morte et blême Elle ne fit pas belle à voir, Elle qui dit « je t’aime ». Je voudrais m’élancer. Elle s’est vidée de toutes ses eaux, Laissant ça et là, main et os. Tous en pièces et morceaux. La déchirure lui ôta la peau. Dans le noir, la colonne s’est brisée, Laissant à terre l’ancienne détresse. « Vlan », la faux tranche ce qui, passé, Superflu, révolu, tombe en pièce. La pensée en tournant se perd. Le corps tremble solitaire. L’absence n’a pas d’égal Creusant le ravage infernal. Après le froid, le glacis du cachot, Long et triste pays sans mot. Puisse enfin l’envie d’union Recevoir le don d’un pardon. Tel un épi de blé jaillit Une gerbe verte de la nuit. Inattendu et inédit, Un espoir pointe tout petit. L’ivresse de la tendresse, L’enlacement de mes bras tendus Il m’attend. Acquiesce Venus en sa grâce s’offrant nue. Des bris d’étoile dans un ciel nuit Tracent l’horizon à l’infini. Mais le temps va si long Franchir son pont. Point n’imagine tant En cet instant, et pourtant… Nul ne sait déjà, où, quand, pourquoi, Mais elle y croit avec foi. Les allumettes d’un vertigineux bonheur Crépitent d’une fraîche ardeur.
  • 10. Poème numéro 41 Trouble horizon Tourments infimes troublant mes veines, Emotions, semblables tourbillons de poussières, Par wagon, vous entrez dans l’antre des pensées. Sans vous souciez de rien, vous faites apparition, Semez la confusion dans ce qui n’était qu’une ombre, Le champ délabré de mon attente sereine, La pauvreté de mes constructions de défense. Levez un pied et tout sera écroulé, telle une offense Là où je n’espérais rien de plus que le glas de rompre. Je n’ai en offrande que du pain et du vin. Est-ce assez, Une saine contribution pour guérir de toute peine ? Demain, je peux apporter encore et encore. Sans compter, la foi du charbonnier, mes enfants de lumière, L’or de l’espérance qui se sème pendant l’enfance, L’engagement vif à sauter par-dessus les morts. Ce soir, mon âme n’est point d’eau limpide ni claire, Pas plus vaillante ni moins noire qu’un vieux cheval épuisé. Elle s’inquiète de ce qui fit sa disparition et sa souffrance. Jaillira-t-elle encore si aucune avance n’est professée ? La lie a été bue jusqu’à s’en épuiser. A l’entour d’un retour, le poète requiert une pacification. D’un geste fou et insensé, il jette son appel et s’élance Avec au coeur, une gerbe fleurie et un amour en bandoulière.
  • 11. Poème numéro 43 Mots du soir Tranquille, apaise toi. Comme l’eau se délie Dénoue-toi. Repose ton coeur en moi. Furie, ce n’est pas toi. Ouvre-toi à la vie. Ta colère me fait peine Tu veux de moi ? Brindille comme tempête Telle qu’un vol t’emmène, Oublie l’infâme de tes lois. Arrondis le bois des arrêtes. Brasier, encore une fois, Ne souffle point l’incendie. Amadoue le feu dans la Seine Fais flirter les mots à l’envie. Ta langue teinte de bon aloi. A l’usage, retire s’en la magie. Laisse-moi te faire ravie. Libère la chape des émois. Cela glissera sur les rives. Le fil échappera par endroit. Cependant, près du roi et sa reine, Mon aise est tout aubaine.
  • 12. Poème numéro 50 En roulage en air libre, La bicyclette passe de-ci de-là, Des trottoirs hauts et bas. Elle enjambe fossés et tracas, Les nids de poule à même la terre Des pièges à fesses, des nids à rats. Au passage, la roue vibre. Le cadre même ploie. Quel tremblement de vent Tel l’amant sur la princesse! Elle avance sans cesse Par-delà la détresse.
  • 13. Poème numéro 51 Des verres pleins d’enivrement Tintent dans le matin Nu sur un ciel blanc. Les aléas, qui aime leur dard ? Quand la balance cherche en l’air, Un équilibre toujours précaire. Au midi du jour en paresse Danse dense, presqu’en transe, Elle quête l’innocence, A desserrer les dents En jouant d’un air léger, A peindre l’allégorie. La présence tendre s’emploie A chanter les lendemains Sans connaître sa voix. Elle emprunte les tournants, Mue par un rire sur le tard Derrière la coquetterie.
  • 14. Poème numéro 52 Femmes indésirables, Feu du coeur toujours en ravage, Des cailloux vous ouvrent la bouche Où les mots vous accouchent, Brûlées vives dans l’acide Qui ronge les espoirs Quand vient l’heure du soir L’eau des promesses placides. Femmes par trop désirables, Aux nerfs dans un cercle en otage, Les épousailles vous touchent Dans le cirque des nuages. Sous les verrous du temps, Tels des essaims de mouches, Les affaires d’entant vous Livrèrent poing et sang Femmes indéfinissables, Vastes terres en partage, Les grands hêtres se couchent Sur vos ombre d’enfant.
  • 15. Poème numéro 62 L’exilé, mon frère Il se prend pour Rimbaud N’a que peau sur les os. Le feu le brûle souvent Des pieds à la tête Jusqu’à voir Lucifer Sur la face de sa mère. Vers elle, violemment Son sang retourne ses nerfs. Depuis tout jeune enfant Il se tenait pour Roi. Dans sa verve solitaire Peu à peu, se terra. Il paie son exil d’une parole Qui à son corps le prend. D’invisibles pactes, il signa A de fiels protocoles, se livra. Pour un je t’aime Avec ses poèmes, il met le Monde à bas, Ses Lois qu’il ne suit pas. Mais sa grande traversée Est un dure combat, plus proche de la guerre que d’aucun ne le figure. Qui se souvient de son air ? Petit garçon effronté et fier Comme il guettait les fêtes Pour s’empresser à plaire. Qui sait où il ira, Incertain et sans âge La folie sous le bras Les idées en tapage ? Nul repos pour ce regard amer. Et pourtant, c’est mon frère D’exilé sur la terre, A son coeur défendant.
  • 16. Poème numéro 65 Côté jardin, Les oiseaux chantent. Côté rue, L’incertitude hante. Dans un jour ordinaire, Un ventre nu restait assoupi, Tapi derrière une pierre, Dans sa rondeur enfouit. Pressée dans un amas d’habit Sa nudité ne venait à la vie. Mais, un matin sous la charpente Le réveil avala l’attente. Alors l’aurore apparut La femme lui plut. Elle le voulait ingénu. Il la trouva charmante. Elle mit un pied dans l’herbe Et son coeur se tut. Les brins caressaient Ses blancs seins, son teint ému. Et soudain, sans dire, Levant sa virilité en force Il la fit tressaillir, Du feutre sous l’écorce. La voix de terre courut Jusqu’à sa poitrine battante. Ses cheveux sentaient l’humus, Les fleurs fraîches et l’amarante. Un léger bruissement se fit Au creux du vallon isolé. Les arbres centenaires riants Etendaient leurs sarments. A pas feutrés, il t’étendit. Le long du jour, il la conquit. Midi jouait à leurs pieds Comme leur vieil ami.
  • 17. Poème numéro 67 Les nuits pleines Plutôt que l’ennui Et la vie éphémère, En unique prière La révolte nous attend. Nous, bons amants Des nuits pleines, Gorgés d’ivresse claire Et de chairs de poèmes. Suis-je déjà ivre De baisers ? Insatiable, Parmi les livres, Quand git l’impalpable. Des notes par-ci, Le jazz, son écriture Là, Le Brésil à en faire Tourner la tête, Valsent sans mesure, Pour mon coeur grenat Et ma poitrine blême Emplie de ses contraires.
  • 18. Poème numéro 69 Un jour sans nuit Une nuit endormie Un veilleur veillait. Au matin, la lune l’avait vu. Engourdi sur sa veille, Il s’était assoupi. Durant son siège, Les rêves étaient venus Jeter leurs sortilèges. Une sorcière sans pareille Tassée dans sa cahutte Tournait dans son chaudron. De la mer, le vent s’était levé. Le sable commença à crier En l’air, les cormorans dansaient. Le sommeil du dormeur Ne s’était point troublé A l’assaut des goélands rieurs. Dans les vagues chahutent, Sautent les blancs moutons Dans un vaste ballet.
  • 19. Poème numéro 70 Le silence avait mangé les mots Les mots s’étaient tus. Alors, après des tempêtes, Des eaux et des naufrages. Tu m’avais prises le jour venu Le long de la lagune rose. Je regardais le ciel des Tropiques La jungle résonnait de mille possibles Dans mes orteils logeaient Nos innombrables lendemains. Les mots avaient manqué. Le silence était descendu. Bas sur les champs de terre, Ton corps avait touché ma paix. Tu avais avancé ta main Là où il fait chaud et moite. Lourde sur les bans de sable, Ma tête s’était mise à la prose. Alors, la nuit nous reprit, Mère de nos appétits insatiables. Dans la jetée des variables Nous étions couchés à mi-dire. Nos visages se faisaient face Et nous apprenions à parler. Je nous cherchais dans ces brios, forêts de nos seuls langages. Loin des cases étroites, La voûte dévoilait la musique L’infini tremblait de toi à moi, Secouant nos refuges paisibles. Il courut le champ des sirènes Tandis que s’embrasait l’espace Un dauphin vint en ligne de mire. Au petit matin, mise à nu, La herse de ma bouche creusait Encore, ton inconnu sans relâche.
  • 20. Poème numéro 73 Tranchés Ca va couler là où on ne s’y attend point. Entre le blanc - le rouge, ça prend le sang. Enturbanné d’acier, éternel a semblé ce matin. Tout le jour, j’ai marché arme au poing. Contre moi-même intensément, La fougue du changement m’étreint. J’aimerais clouer à terre l’incertain, Mes grandes espérances d’antan, Lucifer et ses airs de sacristain. J’attendis comme on guette les trains Au bras de mon loup solitaire, Trépignant ne sachant le chemin. Dans la ville de verre et d’étain, Je ne cherchais plus la lumière Quand j’entrevis la main du Destin De vastes cieux et le pur éther Montraient de tendres lendemains. Une pluie d’étoile irradiait en l’air. Nul effort ne m’eut mené si loin. Soudain, il devint si léger d’être L’âme riait à son aise – j’étais bien.
  • 21. Poème numéro 81 Hier, j’étais dans le gouffre de la colère Le ton de ma voix ne désemplissait pas de ses aires Avec raison, pourtant Je ne voulais me laisser faire Les assauts délétères jetés sans ordre Ne sortent pas les morts des cimetières Les grands yeux menaçants Ne font pas se hâter le passant Les marchés de dupe, quelle misère Vendre son âme pour réchauffer l’hiver Par derrière penser le contraire, Ne me rendent pas plus légère Se faire respecter quelle affaire Face aux manants, je ne monnaye plus rien Malgré jamais gagnée, la route en vaut la peine D’incroyables trouvailles au détour des pas incertains Combien de guerre et de combats ai-je déserté, Faute de moyen de confronter Mon prétendu adversaire ou mon alter Mon simple moi gêné de lui-même que n’être ? Tel l’effeuillage d’un trèfle au tendre vert Mon opinion sort des sentiers ordinaires Pour se frotter à l’inconnu, Son dur et tendre coeur devra paraître Et sa figure renaître. Couches, pelures et autres masques L’un après l’autre tombent à terre A mesure que mes armes s’enterrent Oh belle amie que j’ai vu Dans le sillage d’une ombre Sur le miroir de l’estaminet Je t’ai reconnue, ma fidèle incernable Douce compagnie que de goûter A celle que tu es devenue Sans orgueil ni tiare, Vaquant à tes affaires Tu m’en vois obligée De veiller sur tes jours Tendrement, avec des calembours Et des esprits de fées Oserais-je ainsi affirmer ? N’est-ce point plutôt chimère Ou démesure recommencée, Que d’allumer la paix D’un calumet en bois teinté Pour celle qui peut aimer son sombre ?
  • 22. Poème numéro 83 Rien ne bouge En apparence. Presqu’immobile semble la peau de la vie. Mais Je sens Dans le silence et sous le vent, Mes os crissent différemment. Un changement lent, si lent qu’à peine visible, Si profond qu’à peine dicible Palpite dans le calme du recul. Dans l’ardeur de l’action, A la surface de jours, Discrètement, Mille plis ondulent, Mille nuances brillent. Mes bras veulent s’offrir, se tendre Etreindre Comme les ramures d’un chêne Déployer un doux ombrage Une piste d’atterrissage Aux oiseaux innombrables Caresser tendrement la profondeur du ciel Avec leur feuillage frémissant. Ma voix se cherche. Mon regard s’ouvre, Se heurte, puis, se ferme Et revient se poser. Mes oreilles guettent le dedans le dehors Mon corps s’abandonne à ce présent Encore et encore. La vie en un seul tenant Se tient à ma porte Avec fermeté Doucement Souplement Pleine de résolutions Je me démène Entre pesanteur ou légèreté. Le soir me surprend à vif encore, Dans un sanglot Survenu soudainement. J’aimerais encore et encore Te dire mes délires, Danser ma lourdeur, Chanter l’hiver, Rire ivre de rire, Les jours de tempête Les nuits étoilées Laisse aller.