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Présidente d’Honneur : Doris Bensimon ‫לייז‬
L.D.J. Siège social 13 rue du Cambodge 75020 Paris

Editorial
Une année nouvelle s'ouvre avec une nouvelle équipe à
la tête de notre Association. L'année qui s'achève a été à
la fois fructueuse et éprouvante. Elle a été fructueuse
en activités, mais éprouvante avec la mort brutale
d'Irène Wekstein, notre vice-présidente, et celle
d'Albert Sicsu. Venant après le décès de Doris
Bensimon qui avait porté LDJ durant de très
nombreuses années, toute la charge de l'Association a
été supportée par Marlène Celermajer, qui en a assuré la
Présidence durant deux années. Après ses deux années
de mandat durant lesquelles elle a redynamisé le
fonctionnement de l'Association, elle a souhaité se
retirer et c'est maintenant Simone Simon, soutenue par
une équipe partiellement renouvelée, qui a accepté de
reprendre transitoirement le flambeau.
Que Marlène soit ici remerciée au nom de tous.
Les buts et les objectifs de LDJ restent les mêmes :
ménager un lieu où peuvent se retrouver des personnes,
de toutes origines et de tous milieux, intéressées par les
Cultures juives dans toutes leurs diversités.
LDJ, Association laïque, ouverte à tous les courants qui
traversent le judaïsme français, mais également sur le
monde, comme en témoigne le fil conducteur choisi
cette année pour notre cycle de conférences :
"l'Altérité", se veut un lieu d'échange et de travail en
commun de personnes venues d'horizons divers. C'est à
la fois sa force et sa difficulté quand un peu partout se
dressent ou se redressent l'intolérance et le refus des
autres.
Pour mener à bien son projet, LDJ compte sur ses
adhérents actuels et sur tous ceux qui viendront la
rejoindre avec le même esprit de dialogue. Elle
s'appuiera comme précédemment sur ses conférences et
les riches débats qui les prolongent, sur son Bulletin
"La lettre de LDJ", sur ses Cercles de lecture en
commun et dans un avenir que nous espérons proche
sur un renouveau de son site internet interactif et ouvert
à la discussion et au dialogue.

Le Bureau

N° 113 janvier-février 2012

le numéro 2,50€

Judaïsme et Laïcité en France
et aux Etats-Unis
Notre amie Nadia Malinovich qui nous a présenté une
conférence le 14 décembre 2011, nous avait fait
parvenir le texte suivant. Nous l'en remercions
vivement
Jacqueline, une de mes amies juives ici
en France, m’a raconté il y a quelques
années une histoire qui m’a fait réfléchir
sur les différences entre les cultures
juives en France et aux Etats-Unis. Après
quelques visites d’églises et de
cathédrales pendant les vacances, sa fille
Sonia, âgée de dix ans, lui avait demandé
" Maman, à quoi ressemble l’intérieur
d’une synagogue ? ". Pour un Juif
américain, cet échange caractériserait
forcément une famille qui n’était juive que nominalement.
Mais en fait, Sonia et ses deux frères allaient dans une école
privée juive et fréquentaient une organisation sioniste tous
les samedis après-midi ; la famille allait régulièrement en
Israël pour les vacances, et les amis de la famille sont
majoritairement juifs.
Du point de vue français, ce comportement est loin d’être
paradoxal : comme beaucoup de familles juives françaises
qui ne s’identifient pas au judaïsme orthodoxe dominant en
France, cette famille exprime sa judaïté principalement dans
des cadres laïcs. Le frère aîné de Sonia avait d’ailleurs fait
une bar-mitsvah laïque au Cercle Bernard Lazare. En
revanche, il est quasiment impossible de trouver aux EtatsUnis une famille juive, même très peu pratiquante, dont un
enfant n’aurait jamais mis les pieds dans une synagogue.
Bien sûr, il existe aux Etats-Unis des associations et des
publications qui promeuvent un judaïsme laïc. La plus
ancienne est le Workmen's Circle / Arbeter Ring, l'analogue
du Centre Medem à Paris, dont la branche américaine avait
été créée à New York en 1892. La mission principale de cette
association est l'apprentissage du Yiddish, associé avec
l’enseignement de l'histoire et de la culture des Juifs
d'Europe de L'Est. L'association, fortement impliquée dans
des projets de politique progressiste, milite par exemple
pour un système de sécurité sociale universelle et
gouvernementale (« single payer universal health care ») et

1
pour le contrôle des armes (« gun control ») aux Etats-Unis,
Le Workmen's Circle (1) est actif à New York et dans ses
environs, où il maintient quatre Schules (Talmud Torah laïc).
Il a également des branches dans quelques autres grandes
villes à travers le pays, mais ne maintient que quatre Schules
en dehors de New York : à Boston, à Cleveland, à
Philadelphie et à Sommerset (New Jersey).
(2)
La Society for Humanistic Judaism fut créée en 1963 par
un rabbin libéral pour rompre avec le judaïsme religieux et
promouvoir des valeurs juives « indépendamment de toute
autorité super-naturelle ». Tout comme le Workmen's Circle,
cette organisation est fortement impliquée dans les milieux
de gauche, et propose des bar-mitsvah laïques aux enfants
de ses membres. La Society for Humanistic Judaism a
aujourd’hui plus de succès que le Workmen's Circle (il existe
actuellement 22 communautés dans le pays). Toutefois, ces
communautés sont peu nombreuses et très peu visibles aux
Etats-Unis ; la plupart des familles juives, même très peu
pratiquantes ou croyantes, chercheraient une synagogue qui
leur convienne plutôt qu'une organisation laïque. Pour
comprendre la différence entre les situations en France et
aux Etats-Unis, il faut analyser l’histoire du judaïsme et des
communautés juives dans ces deux pays.
Aujourd’hui, la population juive française est constituée
principalement de Sépharades qui ont leurs racines en
Afrique du Nord, tandis que les Ashkénazes, dont les grandsparents quittèrent l’Europe de l’Est au début du XXe siècle,
sont beaucoup moins nombreux. Les Sépharades, arrivés
d’Afrique du Nord depuis une ou deux générations, ont une
pratique plus traditionnelle (orthodoxe) que les Ashkénazes.
Inversement, les Ashkénazes, comme Sonia et sa famille,
sont majoritaires dans les milieux juifs laïcs et nonorthodoxes.
Aux Etats-Unis, la vaste majorité des Juifs sont Ashkénazes,
et la plupart d'entre eux descendent des immigrés de
l'empire russe qui arrivèrent aux Etats-Unis entre 1881 et
1915. Un petit noyau de Juifs allemands, arrivés au milieu du
XIXe siècle, avait fondé des synagogues libérales aux EtatsUnis, mais celles-ci attirèrent peu la première génération de
Juifs d'Europe de l'Est, qui se retrouvèrent soit dans des
synagogues traditionnelles orthodoxes, soit dans des
communautés yiddish laïques qui se développèrent à cette
époque aux Etats-Unis (et surtout à New York) en même
temps qu’en Europe de l'Est. A partir des années 1950
cependant, leurs enfants et petits-enfants rejoignirent
massivement les communautés libérales et "Conservative"»
(Massorti). Ce dernier mouvement, qui vit le jour dans les
années 1880 pour offrir un compromis entre le judaïsme
libéral et le judaïsme orthodoxe, se développa surtout dans
les années 1950. Pour les Juifs américains de cette
génération d'après-guerre, le judaïsme libéral ou
conservateur était évidemment plus attirant que le judaïsme
orthodoxe "old world" importé du shtetl de leurs parents. La
mixité, les prières traduites en anglais, ainsi que la
transformation de la synagogue en centre communautaire
correspondaient bien aux besoins de cette communauté en
pleine acculturation et embourgeoisement.
Les communautés libérales ou conservatrices se sont aussi
épanouies dans le paysage d’après-guerre américain aux
dépens du judaïsme laïc. Associés surtout à des idéologies

de gauche et aux mouvements ouvriers, le Bund et les
autres associations de ce genre étaient, eux aussi, trop
proches de la génération immigrée précédente.
Toutefois, pour comprendre l'attraction des Juifs américains
envers le judaïsme libéral et Massorti au détriment du
judaïsme laïc, il faut bien comprendre que la religion et la
laïcité ont des statuts très différents en France et aux EtatsUnis. Alors qu'en France, la religion est considérée comme
une affaire relevant strictement de la sphère privée, aux
Etats-Unis, on affiche bien plus facilement ses croyances et
son appartenance religieuse.
Pourquoi ces différences ? Premièrement, alors que le
républicanisme français se créa en opposition avec une
église catholique toute puissante et alliée inconditionnelle
de la monarchie, la naissance de la république américaine
fut fortement associée à la liberté religieuse. Le mythe
fondateur du pays est celui des pèlerins, partis d'Angleterre
pour échapper à la persécution religieuse. Bien qu'aux EtatsUnis, comme en France, la liberté religieuse soit un principe
fondateur de la République, les Etats-Unis, dès leur origine
ont valorisé la pratique religieuse comme symbole de la
liberté dont on jouit en tant que citoyen américain. La laïcité
(au sens de la non-croyance ou de la non-pratique de la
religion) est, aujourd’hui encore, regardée d'un air
soupçonneux par la majorité des Américains. Donc, aux
Etats-Unis, pratiquer sa religion, en l'adaptant aux mœurs de
la société, est une forme d'américanisation.
Il faut signaler qu’en France, le Consistoire est responsable
du fait que les courants Réformateurs et Conservateurs qui
se développèrent aux Etats-Unis tout au long du XIXe siècle
ne purent pas s’installer en France pendant la même
période. Seul le Consistoire avait le pouvoir d’autoriser la
création de nouvelles congrégations, et ses membres
cherchèrent à perpétuer leur propre vision quelque peu
" modernisée" du judaïsme orthodoxe. Quand le contrôle de
la religion par l’Etat prit fin en 1905, quelques synagogues
réformatrices et conservatrices furent alors fondées, mais
même aujourd’hui, elles ne représentent qu’une très faible
minorité par rapport à la majorité orthodoxe.
Cette combinaison entre anticléricalisme et domination du
Consistoire explique fondamentalement pourquoi une jeune
enfant comme Sonia n’avait jamais vu l’intérieur d’une
synagogue : puisque ses parents ne s’identifiaient pas avec
certaines valeurs du judaïsme orthodoxe (prières en hébreu,
mise à l’écart des femmes, etc.), ils quittèrent tout
simplement le monde social religieux. Pourtant, ils ne
perdirent pas leur identité juive, et choisirent plutôt
d’intégrer des réseaux d’associations juives laïques qui
depuis quelques années proposent une forme alternative
d’identité juive en France. Aux Etats-Unis, par contre, cette
famille aurait probablement cherché à rejoindre une
synagogue "cool" à l’heure où leurs enfants atteignaient
l'âge d’aller au talmud torah, puis de préparer une bar ou
bat mitsvah.
Effectivement, au-delà du fait que la religion en tant que
telle n'a pas la même connotation négative dans la culture
ambiante américaine qu'en France, les religions (judaïsme et
autres) s’y sont montrées très malléables, s’adaptant
constamment à la société américaine. Depuis les années
1970, on a vu croître des dizaines de communautés
"alternatives" d'orientations politiques et sociales très

2
diverses aux Etats-Unis. Souvent associés avec le judaïsme
libéral, on n'hésite pas aux Etats-Unis à fonder une nouvelle
communauté pour répondre à des besoins idéologiques ou
politiques particuliers. L'exemple le plus frappant est sans
nul doute la multiplication de synagogues "gay et lesbian" :
fondées d'abord à New York et à Los Angeles au début des
années 1970, des communautés avec cette étiquette se
trouvent maintenant également à Boston, à San Francisco, à
Philadelphie, à Miami et à Atlanta. Ces synagogues, fondées
à une époque où les homosexuels n'étaient pas bienvenus
dans les synagogues libérales ou orthodoxes, se sont
beaucoup développées, car de nombreuses familles
hétérosexuelles les rejoignent à cause de leur atmosphère
ouverte et progressiste (3). Même pour la majorité des
familles qui cherchent des communautés moins
« alternatives », le fait de rechercher activement une
synagogue qui correspond à ses valeurs (exactement comme
le font leurs compatriotes chrétiens à la recherche d'un
temple ou d’une église) fait beaucoup plus partie de la
culture américaine que de la culture française. Bien sûr, il
existe des synagogues non orthodoxes en France (surtout à
Paris où l’on peut compter cinq communautés libérales et
deux communautés Massorti). Mais, en France, la
dominance du système consistorial fait que ces lieux sont
souvent inconnus des Juifs français, qui pour la plupart ne
savent tout simplement pas qu'il existe des alternatives au
Consistoire. Pour Sonia et sa famille, la découverte de la
synagogue Adath Shalom (Massorti), lors d'une invitation à
la bat-mitzvah d'une amie, fut une vraie révélation. Sonia et
ses parents furent heureusement surpris de découvrir une
congrégation progressiste qui pratique l’égalité entre les
sexes : voir son amie monter à la Torah fut particulièrement
émouvant pour Sonia, qui décida alors de faire une " vraie"
bat-mitzvah plutôt qu’une bat-mitzvah laïque au Centre
Bernard Lazare, et son frère cadet la suivit peu après.
Découvrir Adath Shalom n’a pas vraiment rendu Sonia ou
ses parents plus religieux, mais leur permit (tout comme aux
Juifs américains) d'intégrer à leur vie des pratiques
religieuses compatibles avec leurs valeurs progressistes et
laïques.

Nadia Malinovich
1) cf. http://www.circle.org/?page=about#mission
2) cf. http://www.shj.org).
3) Cf. Anthony Weiss, As Acceptance Grows,Gay
Synagogues Torn Between the Straight and Narrow,
The Jewish Daily Forward, March 20, 2008.
http://www.forward.com/articles/12994).

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Mémoire
Il y a trois ans…
Jean Torstein, premier Président de LDJ, est parti le 31
janvier 2009 à la suite d’une maladie qui l’a handicapé,
progressivement, pendant de nombreuses années. Nous
ne serions pas ici, à « Liberté du Judaïsme », si son
principal initiateur, accompagné de Elie Garbaz et de
Claude Kolinka, n’en avait eu et l’idée et la volonté.
Ses parents, originaires de Cracovie, arrivent en France
en 1924. Jean naît le 3 juin 1939 (quelques mois avant
l’invasion de la Pologne par les nazis, et l’entrée en
guerre de l’Angleterre, puis de la France). En 1942
l’étau se resserre autour des Juifs et, pour le sauver, sa
mère le confie à une famille de paysans de l’Indre, à
Blanc. Il y restera jusqu’à la fin de la guerre. Son
sentiment d’abandon fut tel qu’il ne parvint jamais à le
surmonter.
J’ai rencontré Jean au Cercle Bernard Lazare au cours
des années 1963-1964 : il y était un membre très actif.
Ses interventions, toujours pertinentes, faisaient les
délices de l’auditoire – l’irritaient, parfois – mais ne le
laissaient jamais indifférent. Il était mon aîné à
l’Hashomer Hatsaïr, au Parti Socialiste, dans le
syndicalisme. En 1974, est créée la loge Ben Gourion,
première loge « B’nai Brith » du XIXème
arrondissement : il en est élu Président.
L’engagement est l’une des facettes de sa personnalité...
J’imagine que les locaux de la C.F.D.T. – impôts (dont
il était responsable de section) résonnent encore de ses
révoltes légendaires ! Le Parti Socialiste lui avait confié
la charge de Secrétaire général à Aubervilliers, sans
compter l’organisation du service d’ordre au cours des
manifestations.
Sa générosité envers les plus faibles est connue de ceux
qui l’ont approché, ses combats toujours sincères et
justes, son amitié sans faille. Nous sommes restés très
liés même si – le temps aidant - nous nous voyions
moins souvent.
Et puis Michèle entre dans sa vie, ce sera un très bel
épisode ; leur mariage est célébré en 1969 à la Mairie
d’Aubervilliers.
Je garde de Jean le souvenir d’un homme de
convictions, passionné – passionnant aussi – dont les
indignations n’avaient d’égales que les actions pour
essayer de changer le cours des choses. C’était
l’intégrité personnifiée et Michèle peut en témoigner,
elle qui avait l’interdiction formelle de se fournir chez
les commerçants du quartier dont Jean administrait les
dossiers en tant qu’Inspecteur des Impôts… ceci pour
éviter toute compromission quelle qu’elle soit !

3
Apprenant – de moi – que j’étais adhérente à l’AJHL, il
n’a pas été long à me convaincre de rejoindre LDJ, ce
que j’ai fait parce qu’il était difficile de résister à un
ami tel que lui. Je n’ai d’ailleurs eu qu’à me louer de
cette décision.
Son réseau d’amis et de relations était impressionnant
notamment dans le monde universitaire, politique,
syndical, et LDJ, je pense, en fut une des grandes
bénéficiaires. C’est Jean qui a œuvré à l’arrivée de
Doris Bensimon à LDJ, assurant à l’Association la
continuité, dans la transmission d’une culture d’un
Judaïsme humaniste et laïc qui lui tenait tant à cœur,
car, si pour lui l’Alliance et la transmission demeuraient
les valeurs fondamentales du judaïsme, l’un de ses
postulats était qu’être juif laïc, c’était être juif
culturellement.
Jean adorait la vie. Personne ne peut imaginer sa
souplesse quand, au son d’une musique russe, ou
tzigane, ou yiddish, il se mettait à danser seul, lançant
et croisant jambes et bras : notre premier enfant, à
bientôt quarante ans, en garde, un souvenir
impérissable. Il aimait également chanter, et j'ai ouïdire qu'à LDJ lors des Seders laïques il entonnait
souvent des passages de la Hagadah au grand dam de
certains des participants qui pensaient que ce n'était pas
le lieu pour ce genre de chants…mais hier comme
aujourd'hui LDJ était, et reste, un lieu de rencontres et
d'échanges entre tradition et laïcité. A ce souvenir est
toujours associée, Michèle, professeur et soliste
merveilleuse. (Savez-vous qu’Huguette Dreyfus* lui
confiait « sa » classe lorsqu’elle partait en tournée ?)
Et puis la maladie surgit. En rampant d’abord, puis
progressivement envahissant l’espace... tout en le
restreignant. Vous imaginez sans peine le drame de cet
infatigable lecteur petit à petit dépossédé de la vue
(entre autres difficultés). Tout au long de ces années, ô
combien difficiles, Michèle fut auprès de lui une alliée
patiente, pleine de tendresse, de dévouement et de
fidélité.
Danièle Weill-Wolf.
*Claveciniste française née à Mulhouse (1928). Elève de Ruggero
Gerlin, lui-même de Wanda Landowska. C’est l’une des figures
incontournables de la renaissance de la musique ancienne. C’est non
seulement une soliste reconnue en France mais également dans le
monde entier. Elle a enseigné à la Schola Cantorum, à la Sorbonne,
au Conservatoire de musique de Lyon – entre autres ! – et fait partie
du jury du Concours International de Clavecin de Paris.

La Lettre de LDJ. Janvier-Février 2012

Rédaction et administration
13 rue du Cambodge 75020 Paris
Directrice de la publication:
Simone Simon
Comité de lecture :
Flora Novodorsqui, Danièle Weill-Wolf, Michel Mohn
Simone Simon, Isidore Jacubowiez,
Copytoo 281 rue des Pyrénées 75020 Paris
Dépôt légal à la parution ISSN 1145-0584

Histoire
Le sauvetage des enfants juifs
Il faut traiter le problème juif sans sentimentalisme.
Il faut se séparer des juifs en bloc et ne pas garder les petits.
Robert Brasillach dans le journal collaborationniste
" Je suis partout" (25 septembre 1942).

Un jour quelqu'un m'a dit "Sauve-toi, ils prennent les enfants
français maintenant. Sauve-toi ; au coin de la rue tu
trouveras une personne qui s'occupera de toi". J'avais 11 ans.
C'était au mois de septembre 1943. Je l'ai cru, car mes frères
et mes sœurs avaient déjà été arrêtés. Je l'ai cru parce j'avais
déjà assisté à quelques opérations de ce genre. Sur des
enfants qui n'étaient pas naturalisés français. La police était
entrée dans le Centre, les avait embarqués et parfois
pourchassés lorsqu'ils refusaient de la suivre. Je ne
connaissais pas la personne qui m'a dit cela, mais je l'ai crue
et cela m'a sauvé la vie. Au coin de la rue en question, il y
avait effectivement quelqu'un qui s'est occupé de moi et de
quelques autres. Quelques jours après nous franchissions la
frontière suisse.
Ce que je viens de vous raconter, c'est comment mon ami
Wolf a été extrait du Centre de la rue Lamarck dans le 18ème
arrondissement de Paris. C'était un des centres gérés par
l'UGIF - l'Union Générale Israélite de France – créée par
l'occupant qui désirait avoir un, et n'avoir qu'un seul
interlocuteur en France à l'image des "Judenrats" que les
nazis instaurèrent un peu partout dans les pays de l'est.
l'UGIF qui crut qu'elle pouvait faire du bien fit aussi
beaucoup de mal et le fait de n'avoir pas dispersé à temps les
enfants juifs qu'elle avait sous sa garde restera comme une
tâche indélébile sur son histoire. (1).
Dans un livre paru récemment (2) l'auteur suit une famille
juive d'origine roumaine de la Bretagne où elle vivait, jusqu'à
Sobibor où elle fut exterminée, elle raconte comment le père
réussit sous des prétextes fallacieux à faire sortir une de ses
filles, Odette, âgée de 5 ans du camp de Drancy et comment
elle fut confiée à l'UGIF. Odette fut consignée au Centre de
la rue Lamarck. Elle sortait le dimanche avec une lointaine
amie de la famille. Un hobereau de la vieille France
bretonnante, maire de Plenour-Menez qui connaissait la
famille, demanda que la petite fille lui soit confiée. En vain,
les enfants avaient été remis à l'UGIF par la police française
aux ordres des nazis, elle ne pouvait les rendre qu'à cette
même police. Ce qu'elle fit le 24 mars 1943 en la renvoyant à
Drancy et à la mort.
Si Odette n'a pas pu être sortie des griffes des assassins, la
petite sœur d'André Schwarz-Bart eut plus de chance. Son
frère, le futur écrivain (3), qui avait 14 ans en 1942 et était
également passé par le Centre de la rue Lamarck fut placé au
centre d'apprentissage de l'ORT (4) rue des Rosiers pour y
apprendre le métier d'ajusteur. En janvier 1944, il va sortir
cette petite sœur qui était dans une des maisons contrôlées
par l'UGIF pour une promenade et disparaît avec elle.
Les organisations de résistance juives conscientes que le
séjour des enfants dans les centres de l'UGIF présentait des
risques importants, une opération "d'extraction" fut organisée
avec l'aide d'un Centre social protestant "La Clairière" dirigée

4
par le Pasteur Vergara. Le 16 février 1943, une quarantaine
de femmes protestantes et juives se présentèrent aux Centres
de la rue Lamarck et à celui de la rue Guy Patin dans le 10 ème
arrondissement, munies d'autorisations obtenues avec de faux
papiers leur permettant de sortir, qui un, qui deux enfants
pour l'après midi. Elles en sortirent 63. Ces enfants, dont
certains étaient trop jeunes pour comprendre ce qui leur
arrivait furent immédiatement emmenés dans le local de "La
Clairière" 60 rue Greneta dans le 2ème arrondissement d'où ils
furent dispersés et envoyés en province.
La liaison entre les organisations juives de résistance et les
organisations d'aide protestantes était assurée par Sophie
Schwartz (5), qui traversa la guerre et mourut en 1999, et
Suzanne Spaak, belle-sœur du futur ministre belge des
affaires étrangères, Paul-Henri Spaak, qui fut par la suite
arrêtée et assassinée par les nazis.
Seul le "rapt" de Vénissieux, qui permit de sortir 108
enfants des griffes de la police de Vichy peut lui être
comparé en terme "d'efficacité". Encore que ce dernier se
passa dans la zone sud le 29 Août 1942, c'est-à-dire à
l'époque hors de portée des Allemands. Aux deux femmes
dont les noms figurent ci-dessus il faudrait en ajouter bien
d'autres qui constituèrent la chaîne de sauvetage, en
particulier l'assistante du Pasteur Vergara : Marcelle
Guillemot, les camarades communistes de Sophie Schwartz:
Lily Berger, Techka Forszteter (6), et toutes les autres dont
certaines sont restées anonymes.
Si nous racontons cette histoire
aujourd'hui, c'est que "La Clairière" a
célébré le 23 novembre dernier ses 100
ans d'existence. Cette célébration s'est
faite au Palais Brongniart, autrement dit
dans l'ex-Bourse. Durant la matinée on
a parlé de cette histoire passée et dans
l'après-midi en présence de Martin
Hirsch, Président de l'Agence de
Service Civique, on a parlé du présent.
Car La Clairière ne désarme pas et
continue à tendre la main à ceux qui en ont besoin. (7) Dans
une brève intervention l'historienne Annette Wievorka a
salué, la mémoire du Pasteur Vergara et de Marcelle
Guillemot, qui ont été décorés de la médaille des Justes par
Yad Vaschem en 1990, et rappelé l'action des milieux
protestants, essentiellement calvinistes, dans l'aide apportée
aux Juifs durant les années noires.

Isidore Jacubowiez
1)

2)
3)
4)

5)
6)
7)

Entre le 20 et le 24 juillet 1944 (un mois avant la libération de
Paris) les nazis firent irruption dans les Centres de l'UGIF et
raflèrent tous les enfants encore présents dans ces centres. Le viceprésident de l'UGIF de la zone occupée, André Baur, fut lui aussi
finalement déporté fin 1943 avec sa femme et ses quatre enfants.
Marie-Noëlle Postic "Sur les traces d'une famille juive en Bretagne"
Editions Coop Breizh 2007
André Schwarz-Bart. " Le dernier des Justes" Prix Goncourt 1959
ORT : Organisation Reconstruction Travail créée au début des
années 1900 à St Petersburg pour promouvoir la propagation du
travail artisanal et agricole parmi les Juifs
René Goldman : " Une femme juive dans les tourmentes du siècle
passé" Editions AGP 2006
Techka Forszteter "Il y a cinquante ans" article paru dans la revue "
Yiddishe Kultur" NewYork Sept 1993
"La Clairière", qui a toujours son siège rue Greneta agit dans
différents secteurs grâce à 46 salariés et 160 bénévoles.

Vu, Lu, Entendu
L'écrivain David Grossman a obtenu le Prix "Médicis
2011 du roman étranger" pour son livre "Une femme
fuyant l'annonce" dont nous avons parlé dans notre
Lettre 112. Une raison de plus pour y revenir.

L'angoisse.
Le titre du livre de David
Grossman dans sa version anglaise
est "To the end of the land". Si,
bien sûr, on peut le comprendre
comme la fuite de l'héroïne
jusqu'au bout du pays pour ne pas
apprendre la nouvelle de la mort
possible de son fils, on peut
difficilement ne pas songer à la "fin
du pays", à la fin d'Israël.
Car c'est cette angoissante dimension existentielle qui
domine tout au long du livre. Dès le début, dans un des
meilleurs passages du livre, on est saisi par l'angoisse,
l'angoisse de jeunes adolescents hospitalisés pour une
maladie contagieuse qui n'est pas nommée, et qui, la
nuit, font des cauchemars : les Arabes arrivent, Israël
est détruit. C'est aussi l'angoisse qui saisit Ofer enfant
quand il découvre qu'Israël est entouré de pays
ennemis.
L'angoisse, c'est celle d'Ora, l'héroïne, qui fuit pour ne
pas recevoir l'annonce de la mort de son fils mais qui a
également peur d'apprendre que son fils, qu'elle n'a pas
élevé pour cela, se livre au cours de son séjour à
l'armée à des exactions contre les "autres". L'angoisse,
c'est l'angoisse collective de la disparition du pays,
quand Ofer partant en mission glisse à l'oreille de sa
mère "Si je meurs quitte-le", ou quand Avram, l'un des
deux hommes de sa vie, revient de captivité en Egypte,
où il a été odieusement torturé, et dont la première
question est : "Israël existe-t-il encore ?"
L'angoisse, elle est dans ces pages qui décrivent les
premières heures de la guerre du Kippour, avec l'armée
Israélienne en débandade et Avram, seul survivant
dans un des fortins qui se trouvaient au bord du canal
de Suez, qui soliloque dans un poste radio que son ami
et presque frère Illan arrive à capter sans pouvoir lui
répondre, ni surtout le secourir.
L'angoisse, c'est la rencontre régulière au cours de la
randonnée des tombes de soldats morts dans toutes les
guerres qui jalonnent l'existence de l'Etat d'Israël. Cette
angoisse, elle est exprimée par Ora : " Je me dis que
c'est mon pays et que j'ai nulle part où aller…; si on
réfléchit, si on raisonne en termes de chiffres, de faits,
d'histoire, sans se bercer d'illusions, il n'y a aucune
chance". On ne peut qu'espérer qu'elle se trompe et que
l'angoisse, un jour, disparaîtra avec l'état de guerre.
I.J.

5
Vu, Lu, Entendu
En ce temps-là, l'amour ...
Le petit théâtre du "Tambour Royal", 94 rue du
Faubourg du Temple, dans le 11ème arrondissement,
s'appelle désormais le "Théâtre de Belleville" et après
rénovation, il a ouvert ses portes au mois d'octobre. Son
nouveau propriétaire, Laurent Stroussi, vient d'y
programmer une pièce magnifique : "En ce temps là,
l'amour..."
L'auteur et acteur, Gilles Ségal, est presque octogénaire.
Il est né en 1932 en Roumanie, et fut l'élève du mime
Marceau dans les années 50. Il a aussi interprété Yankel
dans "Les eaux mêlées " de Jean Kerbron en 1969, et
tourné dans de nombreux films avec Jules Dassin ou
Edouard Molinaro, entre autres grands cinéastes.
Dans cette pièce, il est seul en scène. Le personnage
qu'il interprète est plein d'humanité et d'émotion
contenue. Il entreprend de faire le récit à son fils, qui vit
aux Etats Unis, d'un souvenir à jamais gravé dans sa
mémoire lorsqu'il était dans le wagon qui l'emportait
vers les camps de la mort. Pour ce faire, il utilise un
petit magnétophone.
Car "en ce temps là, l'amour c'était de chasser ses
enfants pour les sauver de grands malheurs", nous dit-il,
mais dans le wagon à bestiaux, son plus proche voisin
était un père et son jeune fils. Au désespoir, ce père, qui
a déjà perdu sa femme, décide de transmettre en
accéléré à son enfant la quintessence de ce qui fait d'un
individu un homme. Et il passe en revue des questions
comme celle de l'existence de Dieu, ou comme celle de
la Liberté, ou de l'Amour, profitant du plus petit instant
de vie qui leur reste.
C'est un vibrant et poignant plaidoyer contre le
fascisme et les certitudes définitives, exprimé sans
pathos, avec pudeur et générosité par un auteur et un
acteur de grand talent.
La pièce, qui dure une heure, sera reprise en janvier au
même Théâtre de Belleville et mérite une belle
audience.
Adeline Fride
Bureau de L .D. J
Simone Simon
Maryse Sicsu
Nicole Abravanel
Brigitte Thieblin
Noémie Fischer
Flora Novodorsqui

Présidente
Vice- Présidente
Secrétaire
Secrétaire adjointe
Trésorière
Trésorière adjointe

Contact L. D. J.: 01 43 40 75 82 ou ldj@col.fr
Site internet :
www.col.fr/ldj/

Vu, Lu, Entendu
Drôle de Jeux.
Au Mémorial de la Shoah se tient actuellement (1) une
exposition " Le sport européen à l'épreuve du nazisme"
dans le cadre de laquelle se sont tenus un colloque et
des conférences sur le "Sport et les Régimes
autoritaires et totalitaires". Tout le monde sait bien que
le Sport que certains de ses adorateurs présentent
comme apolitique et destiné à promouvoir l'amitié entre
les peuples est bien souvent très loin de cette idyllique
vision. Les exemples contraires ne manquent
malheureusement pas et on peut citer, dans le désordre,
les manifestations racistes lors de matchs de football au
Parc des Princes à Paris ou celles, antisémites, à
Amsterdam contre Ajax, club soupçonné d'être
subventionné par les diamantaires juifs de la ville, en
passant par la Manifestation des athlètes noirs, ralliés
aux " Black Panthers", lors des Jeux Olympiques de
Mexico en 1968, et les huées qui accueillirent la
Marseillaise au Stade de France lors d'une rencontre de
l'Equipe de France de Football avec celle d'Algérie.
Encore s'agit-il là de manifestations émanant des
acteurs – les joueurs – ou des spectateurs qui mettent
ainsi à profit le rassemblement sur un même lieu d'un
grand nombre de gens, flanqués d'un non moins grand
nombre de médias, pour faire entendre leur voix.
Les régimes totalitaires qui ont gouverné une partie de
l'Europe au cours du 20ème siècle ont très vite compris
l'intérêt qu'il y avait à utiliser les activités sportives à
leur profit ce qui leur permettait, du moins l'espéraientils, d'embrigader les jeunes générations. Ils ne
lésinèrent pas sur les moyens et on leur doit ces grands
stades, construits entre les deux guerres, qui
permettaient de rassembler des dizaines de milliers de
personnes autour d'activités sportives ou autour du
"Duce" ou du "Führer".
Les Jeux Olympiques de 1936 qui se sont tenus à Berlin
n'étaient peut-être pas le prélude à la Shoah, comme l'a
dit un des conférenciers (2) au colloque qui s'est tenu
dans le cadre de l'exposition, mais ce fut la
démonstration de l'aveuglement pour certains, de la
lâcheté pour d'autres, des démocraties occidentales
devant la montée du péril nazi.
Le Comité International Olympique (CIO) avait décidé
en 1931, c'est-à-dire avant l'arrivée au pouvoir d'Hitler,
de confier l'organisation des Jeux à l'Allemagne qui
rentrait ainsi de nouveau dans le concert des Nations
après la Grande Guerre. En 1933, les Nazis s'installent à
la tête de l'état allemand, ils prennent d'entrée des
mesures anti-juives et, après l'incendie du Reichtag(3) ,
suppriment toutes les libertés démocratiques.

6
Des voix s'élèvent tout d'abord pour demander le
transfert des Jeux dans une autre ville, ce que le CIO
refuse, puis lancent une campagne pour le boycott. Aux
Etats-Unis plusieurs grandes
organisations juives appelèrent au
boycott, ce qui sera également le
point de vue de l'Ambassadeur
(W.Dodd)
et
du
Consul
(G.Messersmith) des Etats-Unis
en Allemagne. Mais finalement
les Américains décident de
participer.
En France et dans les autres pays
européens des appels au boycott sont également lancés
par des organisations de gauche. Le gouvernement de
Front Populaire qui vient tout juste d'arriver au pouvoir
en juin 1936 n'ose pas se prononcer pour le boycott ce
qui nous vaudra de voir, dans le film (4) que Hitler à
commandé à la cinéaste Leni Riefenstahl, la délégation
française saluer, lors de l'ouverture des Jeux, Hitler et
ses sbires d'un salut, soit disant olympique, qui
ressemble étrangement au salut nazi.
Le CIO qui n'était pas particulièrement antinazi,
rencontra les dignitaires nazis et obtint que, pour calmer
le jeu et les opposants américains, les Juifs ne seraient
pas, par principe, exclus de l'équipe allemande. Sur
quoi les Allemands demandèrent à une championne
juive allemande de saut en hauteur, Gretel Bergman,
déjà réfugiée en Angleterre de revenir au pays tout en
lui cherchant une concurrente qui s'avéra plus tard être
un concurrent. Le Comité Olympique américain
s'arrangea pour limiter la participation d'athlètes juifs
dans sa délégation, mais Hitler dut quand même
supporter à ces Jeux, qui devaient être une glorification
de la race germanique, des Noirs comme le très grand
champion Jesse Owens qui y
remporta quatre médailles.
Des organisations de la gauche,
décidèrent en accord avec le
gouvernement espagnol de Front
Populaire
d'organiser des
"Contre-Jeux" à Barcelone, mais
le putsch de Franco et le
déclenchement de la guerre civile
ne permirent pas à ces Jeux de
voir le jour.
Les Jeux devaient être pour l'appareil nazi une vitrine
de propagande et ils n'avaient pas lésiné sur les moyens
mis en œuvre. Outre la construction d'un Grand Stade
Olympique à Berlin, ils inventèrent pour cette occasion
pour bien montrer la filiation, qu'il y avait, d'après eux,
entre les Germains et les peuples nordiques qui
s'installèrent en Grèce durant la haute antiquité, le relais
qui porta le flambeau allumé d'Olympie jusqu'à Berlin,
(5).
pratique qui a été conservée pour les Jeux ultérieurs.
Pour les nazis, ces jeux furent un succès, les athlètes
allemands arrivèrent en tête avec 89 médailles et le

film " Les Dieux du Stade" fut ultérieurement primé au
Festival de Venise.
L'Allemagne n'en avait pas fini avec les Jeux, et c'est à
Munich en 1972 qu'un commando Palestinien tua dans
l'enceinte du Village Olympique onze athlètes
israéliens. Si en 1936 les dirigeants du sport mondial ne
se sont pas vraiment sentis concernés par le sort fait
aux sportifs juifs, ils ne l'ont pas été beaucoup plus
trente six ans plus tard, puisqu'après avoir rendu un
hommage rapide aux morts, les Jeux continuèrent
comme si de rien n'était.
Avery Brundage, qui était le patron du Comité
Olympique aux Etats-Unis et fit tout pour éviter le
boycott en 1936 était devenu en 1972 le Président du
CIO ; il eut ce mot historique " The Games must go on".
Les deux Allemagnes raflèrent ensemble le plus de
médailles (104 dont 66 pour la DDR) devant l'URSS
(99) et les Etats-Unis (93). La DDR, dont il s'avéra plus
tard qu'elle pratiqua le dopage institutionnalisé de ses
sportifs édita dans la foulée un magnifique album (6)
glorifiant les performances du sport socialiste dans
lequel un simple entrefilet parle du tragique événement
en mettant sur le même pied les morts "de l'équipe
israélienne et les combattants arabes de la liberté".

I.J.
1)
2)

Au Mémorial de la Shoah jusqu'au 18 mars 2012
Georges Eisen Patterson : University NJ (Etats-Unis)

3)

Le 27 février 1933 le feu est mis au Reichtag, très
probablement par les nazis qui crient au complot communiste
et s'en servent pour supprimer les libertés fondamentales.
"Olympia" ou les "Dieux du Stade".

4)
5)

Johan Chapoutot "Le national-socialisme et l'Antiquité"
(Presses Universitaires de France 2008)

6)

Spiele der XX Olympiades. München 1972 - Gesellschaft zür
Förderung des Olympishen Gedankens in der D.D.R.-1973-

Voyages
Budapest
La foule s'écoule de la Synagogue Dohany, la séance
d'ouverture du Festival des Musiques juives qui s'est
tenu à Budapest du 27 août au 5 septembre dernier
vient de se terminer avec un concert des cuivres du
New York Metropolitan Orchestra. Le lendemain, ce
sera un merveilleux orchestre tsigane qui occupera les
lieux. Quelques jours plus tard, c'est dans la synagogue
de la rue Leo Frenkel, sur l'autre rive du Danube, que
six des meilleurs Cantors de la ville régaleront une
foule de spectateurs avec la palette de leurs chants

7
liturgiques, mais aussi avec des mélodies yiddish et
judéo-espagnoles. Il y avait beaucoup de touristes
étrangers, attirés par l'événement ou tout simplement
par la ville, parmi les spectateurs mais il y avait aussi
beaucoup de Hongrois et de Juifs hongrois.

La grande synagogue de la rue Dohany

Entre 60 000 et 80 000 Juifs habiteraient actuellement à
Budapest. Ils étaient plus de 200 000 en juillet 1944
lorsque les déportations commencèrent. Juifs
profondément intégrés à l'empire austro-hongrois puis
au royaume, sans roi, de Hongrie, mais avec un régent,
l'Amiral Horthy, ils parlaient dans leur très grande
majorité le hongrois, et un grand nombre d'entre eux
avaient magyarisé leur nom. Se croyant à l'abri des
nazis allemands, puisque la Hongrie était l'alliée de
l'Allemagne, c'est avec une sorte de stupeur qu'ils virent
déferler quelques mois seulement avant l'arrivée de
l'Armée Rouge aux portes de la ville, les tueurs
d'Eichmann.
Dans son livre (1) le Prix Nobel de Littérature Imre
Kertesz - quoi de plus magyar comme nom? - met en
scène cette stupeur, au travers des yeux d'un adolescent
à qui, sur la rampe de sélection de Birkenau, un homme
en pyjama rayé lui glissa dans une langue qu'il ne
connaissait pas – le yiddish – mais qui avait quelque
ressemblance avec le peu d'allemand qu'il connaissait
"Seize ans, seize ans, dis que tu as seize ans". Ce qu'il
fit, et lui sauva la vie.
La Hongrie, hyper-nationaliste traumatisée par les deux
guerres mondiales où elle se retrouva à chaque fois
dans le camp des vaincus ; la Hongrie qui se considère
comme la victime du traité du Trianon après la
première guerre mondiale et qui a vécu une quarantaine
d'années sous un régime communiste imposé par les
Soviétiques à la fin de la seconde ; la Hongrie qui
vénère la révolte de 1956 écrasée par les chars russes ;
cette Hongrie-là vient de se doter d'une nouvelle
constitution, dans laquelle on peut lire, entre autres :

" Nous sommes fiers que notre roi saint Etienne ait
établi l'Etat Hongrois…et qu'il ait fait de notre pays
une partie de l'Europe chrétienne"
"Nous respectons ce qui a été accompli par notre
constitution historique et la Sainte Couronne, qui
incarne la continuité de l'Etat constitutionnel et l'unité
des nations.
Comment ne pas être inquiet à la lecture de cette
Constitution qui a été votée par la nouvelle majorité de
droite du parlement, sous les ors de la splendide
enceinte du Palais du Parlement érigé après que la
Hongrie eut obtenu un statut d'autonomie dans le cadre
de
l'Empire austro-hongrois.
Cette nouvelle
Constitution qui a été fortement critiquée par le
Parlement Européen.
Lorsque l'on visite le Parlement construit à la fin du
19ème siècle, on se dit que les Hongrois de l'époque
avaient sans doute la folie des grandeurs, mais on peut
dire que la Communauté juive de l'époque n'en
manquait pas non plus. La Synagogue Dohany avec ses
tours et ses bulbes orientaux, construite un peu avant le
Parlement, par les Juifs libéraux de l'époque – que l'on
appelait, bizarrement pour nous, les néologues – est
l'une des plus grandes du monde et peut recevoir 3000
personnes. Ce qui est bien utile pour les concerts mais
un peu large, actuellement, pour les offices et le
recueillement.

Le Parlement hongrois de nuit

Le recueillement, c'est plutôt derrière la synagogue
qu'on le trouve avec l'arbre aux 600 000 feuilles
métalliques qui chacune porte le nom d'un disparu de
la Shoah. C'est derrière la synagogue aussi que l'on
trouve la tombe vide de Raoul Wallenberg, le diplomate
suédois, qui se dépensa sans compter à la fin de 1944
pour sauver les Juifs de Budapest de la déportation et
qui disparut, sans que l'on sache encore aujourd'hui
pourquoi et comment, en allant voir le Maréchal
Malinowski, le chef de l'Armée Rouge. C'était le 17
janvier 1945. Cela faisait plus de trois mois que les
Soviétiques se battaient contre une forte garnison
d'Allemands et de Hongrois retranchés sur les hauteurs
de Buda, sur la rive gauche du Danube, dans une
bataille dont on dit qu'elle fit plus de morts que
Stalingrad ou la prise de Berlin.

8
Vu, Lu, Entendu

Néophytes ?

L'arbre aux 600 000 feuilles métalliques

C'est sur cette ville haute que l'on trouve le Château
Royal, mais aussi les fameux bains de l'Hôtel Gellert
avec ses multiples piscines d'eau chaude et ses
décorations "Art nouveau" Cela vaut le coup d'œil mais
si c'est pour vous baigner je vous conseille plutôt les
bains Szechenyi qui se trouvent à Pest sur l'autre rive.
Vous y trouvez une quinzaine de bassins où la
température de l'eau s'étage entre 26 et 36 °C.
C'est sur cette même rive sur les bords immédiats du
Danube que l'on peut voir cet angoissant alignement de
chaussures posées là en souvenir des Juifs extraits du
Ghetto de Budapest par les nazis hongrois – " les Croix
Fléchées" – et jetés par groupe de trois dans le beau
Danube bleu. Ces mêmes " Croix Fléchées" qui étaient
enfin arrivées à leurs fins et au pouvoir à la mi-octobre
1944, après l'élimination de l'Amiral, et qui, en guère
plus de deux mois, les routes de la déportation étant
définitivement coupées par les bombardements et les
soviétiques, réussirent à assassiner sur place une
quinzaine de milliers de Juifs.
Isidore Jacubowiez

Je ne sais pas si nous sommes tous des Juifs allemands, mais
en tout cas nous sommes certainement tous des néophytes…
en quelque chose. Dans la Provence du 15ème siècle c'est
sous ce nom que l'on désignait les convertis juifs au
catholicisme. Ces néophytes étaient sans doute plus attachés
à la douceur provençale qu'à la religion de leurs pères et c'est
sans trop d'état d'âme qu'ils passèrent de Moïse à Jésus. Ils
étaient probablement de l'ordre d'un millier alors qu'un
nombre équivalent choisit lui l'exil vers l'Italie, le Maghreb
ou Salonique. Cela se passa dans les années qui suivirent la
mort du roi René d'Anjou en 1480 et par voie de conséquence
le rattachement de la Provence au Royaume de France.
Les néophytes changèrent de patronyme en même temps que
de religion et on vit apparaître des Danjou, des d'Estienne,
des d'Entrevaux, etc, noms qui sentent plus la lavande que les
cactus de Judée.
Les Juifs de Provence devaient être à leur apogée environ
12000. Ils étaient localisés dans trois grandes cités :
Marseille, Aix, et Arles mais aussi dans un grand nombre de
villes de bien moindre importance telles que Manosque,
Forcalquier, Tarascon, Trets, Draguignan, Toulon, Hyères, ce
qui est attesté, en particulier, par les rues de la Juiverie que
l'on rencontre encore aujourd'hui dans ces villes.
Les premières implantations de Juifs remontent sans doute au
premier siècle de notre ère mais c'est à partir du 12ème siècle
que l'on signale la présence de communautés relativement
importantes. Leur vie y était plutôt agréable et prospère
malgré l'obligation de port d'un signe distinctif imposé par le
Concile de Latran en 1215, signe distinctif dont on pense
qu'il fut, en Provence, réduit à sa plus simple expression.
Arriva la peste noire et, comme il est bien connu que ce genre
d'événement est forcément de la faute des "autres", les Juifs
de Toulon furent massacrés en 1348 et ceux des petites
communautés de Haute Provence durement pris à partie. Le
résultat fut une quasi disparition des communautés rurales et
une concentration dans les trois grandes cités nommées plus
haut. Quand ces cités rejoignirent le doux pays des Francs,
les Juifs durent choisir entre partir et se convertir.
Tout cela et leurs vies de tous les jours Danièle Jancu-Agou
(1)
et les historiens qui l'ont précédée les ont débusqués dans
les archives écrites et en particulier dans les actes notariés qui
subsistent en très grande quantité et qui permettent de suivre
à la trace certains de ces Juifs tout au long de leur existence.
Danièle Jancu-Agou a aussi retrouvé des descendants de
néophytes et, ce qui n'est pas banal, c'est que plus de 500 ans
plus tard certaines de ces familles connaissent encore
l'histoire de leur origine.
Mais qu'est-ce que cinq cents ans ? nous a dit Danièle JancuAgou, surtout quand on vit, comme elle, en permanence avec
des gens qui ont vécu à cette époque.

I.J.

Le mémorial aux assassinés par les Croix-Fléchées
1)

Imre Kertesz, Prix Nobel de Littérature 2002
"Etre sans destin" Editions 10/18 Domaine étranger

Danièle Iancu-Agou, Provincia Judaica. Dictionnaire de
géographie historique des juifs en Provence médiévale, Paris
/ Louvain, Peeters, 2010, 248p. Présentation au MAHJ le 17
mars 2011

9
Echos des conférences de LDJ
Mercredi 16 novembre 2011

Juifs en anthropologie, en psychanalyse ou dans les
mouvements révolutionnaires, en allant vers les autres qu'il
s'est exprimé le plus fortement dans le monde moderne. Aller
vers les autres, qui est l'opposé du repli communautaire.

Stephane Encel, Historien, professeur à l'ESG

----------------------------------

Mercredi 14 décembre 2011

L'autre a-t-il défini le Judaïsme ?

Ce qui frappe dans le Judaïsme c'est le
manque de glorieux de ses mythes
fondateurs. Si les peuples de l'antiquité
avaient tous tendance à se voir
descendre de quelque Dieu ou demidieu, le peuple juif se voit, lui,
descendre d'un émigré venu de
Mésopotamie, Abraham, qui vit au
milieu des autres en Canaan, puis d'une
tribu d'esclaves qui fuit les Egyptiens,
avec lesquels il entretiendra par la suite
des relations continues : alliance contre les empires de
Mésopotamie, présence d'une importante colonie juive à
Alexandrie, etc.
Après la destruction du premier temple, qui n'est pas une
affaire tombée du ciel mais une affaire de gros sous, la Judée
refusant de payer le tribut que Nabuchodonosor se croit en
droit d'exiger des peuples par lui soumis, une partie des
Judéens se retrouvèrent en exil du côté de Babylone.
Il faut croire que leurs relations avec les autres n'étaient pas
si mauvaises puisque quand Cyrus leur proposa de réintégrer
la Judée un grand nombre préférèrent rester sur place, où ils
créèrent, au milieu des autres peuples, un des pôles les plus
importants du Judaïsme diasporique.
C'est durant cet exil que se forgea, au travers des messages
prophétiques, d'une part le monothéisme et d'autre part le fait
que l'Eternel n'étant plus, uniquement, logé entre les murs du
Temple est devenu accessible quel que soit le lieu où l'on se
trouve.
Ceux qui rentrèrent de Babylone, durs parmi les purs,
commencèrent à se protéger des autres qui étaient restés sur
place – les Samaritains - et refoulèrent les épouses non
juives (Esdras IX). Ce fut une période de repliement comme
on en voit souvent dans les situations de crise.
Quelques siècles plus tard, l'autre se présenta sous la forme
du Grec, porteur d'un système de pensée et d'une culture
puissante, et la tentation hellénistique fut bien forte.
Tentation qui se heurta à l'opposition de milieux très attachés
aux pratiques du judaïsme et qui conduisit à la révolte des
Macchabés. Quelque temps après encore, les autres étant
devenus Romains, l'histoire recommença avec une guerre
civile et suicidaire (Massada) qui se termina par la
destruction de Jérusalem.
Le Judaïsme s'est donc construit à la fois parmi les autres et
contre les autres ; le plus surprenant c'est qu'il ait survécu à
travers les âges, posant un problème difficile aux historiens
positivistes et à tous ceux qui sont tentés de systématiser
l'Histoire.
Cette survie, il la doit peut-être à son combat permanent
contre d'Almaleq, le mal absolu, qui a ressurgi régulièrement
dans son histoire, sous la forme d'Aman, de Khmelnytsky ou
d'Hitler. Cette survie, il la doit sans doute aussi à ses
capacités d'adaptation dont les plus marquantes, parmi
d'autres, ont été de passer de la filiation par le père à la
filiation par la mère au début de notre ère et de substituer le
Livre au Temple après la destruction de celui-ci. C'est
finalement, si on en croit la présence active de nombre de

Nadia Malinovich, Maître de conférences à l'Université
de Picardie

"Le judaïsme en France et aux Etats-Unis :
réflexions comparatives"
Nadia est citoyenne américaine. Elle vit en France depuis
2002. Elle s'est intéressée au judaïsme
en France et sa thèse porte sur
"Français et Juif. La culture et la
politique de l'Identité de la France au
début du 20ème siècle". Ce travail a été
finalisé par un livre qui a été traduit et
publié en France (1). Elle a enseigné
dans plusieurs Universités américaines
de Paris et à Sciences-Po. Ses
connaissances lui permettent de porter
un regard des deux côtés de
l'Atlantique.
Historiquement, la situation est évidemment très différente:
lors de la création des Etats-Unis, il y avait environ 2000
Juifs, pour la plupart sépharades, disséminés sur l'ensemble
du territoire, dont le statut était similaire à celui des autres
américains. Il fallut attendre quelques années de plus que la
Révolution Française octroie un statut de citoyen à des gens
qui faisaient partie d'une communauté présente depuis
plusieurs siècles sur le territoire.
Cent trente ans plus tard, après la Grande Guerre,
l'immigration ashkénaze a porté la population juive des EtatsUnis à trois millions de personnes, essentiellement
implantées dans les grandes villes, et qui n'avaient guère de
contact avec les autres habitants. En France, la communauté
juive, après être passée par la tempête de l'affaire Dreyfus et
sa participation, à l'égal des autres Français, à la guerre de
1914-18, pouvait se sentir parfaitement intégrée à la
République. C'était l'époque du Franco-Judaïsme.
La situation commence à se dégrader dans les deux pays à
partir des années 1920. Aux Etats-Unis les lois sur
l'immigration stoppent celle-ci en 1924. En France, compte
tenu de la saignée de la Grande Guerre et du manque de main
d'œuvre, c'est sous les coups de la récession économique de
1929-30 que l'étranger devient indésirable, avec des deux
côtés de l'océan une montée des mouvements xénophobes et
antisémites avec Henri Ford aux US et Maurras en France,
pour ne citer qu'eux.
Pendant la guerre de 1940-1945 durant laquelle un quart des
Juifs de France fut englouti par la Shoah, la population juive
des Etats-Unis se renforça socialement et l'antisémitisme
aurait globalement disparu "au profit" d'autres césures. Peuton dire vraiment la même chose en France à l'égard d'un
groupe humain qui comporte maintenant une majorité de
Juifs d'origine sépharade.

I.J

10
Poésie
Vivre avec sa langue et une autre langue.

Dans le cadre de notre thème annuel "L'altérité", il nous a
paru intéressant de publier le poème ci-dessous.

L'auteur Naim Araidi, druze israélien, dont la langue
maternelle est l'arabe, a écrit d'abord en hébreu langue
apprise à l'école puis, plus tard, en arabe
Traduit de l'hébreu par Marlèna Braester

______________

Ainsi
Ainsi passé ma vie dans l'entre
deux
et dans l'entre deux : toi
ou une autre
elle est ainsi ma vie
pas autrement
l'arabe est langue de ma mère
l'hébreu est langue de son époux
et mes poèmes
ne peuvent s'écrire qu'en ces deux langues
pas autrement
Ainsi s'écrivent mes poèmes dans l'entre
deux
Et dans l'entre deux : un roman
ou une petite histoire
l'Orient est un point de départ
l'Occident –une station en chemin
vers l'autrement
Où serai-je d'ici peu
si je ne suis pas
et si une autre femme
ne me met pas au monde?
Publié dans le blog Kef Israël de Rachel Samoul,
et reproduit avec son autorisation
---------------------------------------

On recherche…
L’Association Muestros Dezaparesidos, fédération des
différentes associations judéo-espagnoles de France, dans le
cadre de ses travaux sur la déportation des Judéo-Espagnols
de France, recherche un étudiant de Master 2, ou en début
de thèse, susceptible de faire un travail de recherche sur
cette période. Différents sujets historiques ou de sciences
politiques peuvent être envisagés. Possibilité de bourse.

S’adresser à :
Alain de Tolédo 06 61 99 36 82
alain.detoledo@dbmail.com

Le débat sur le droit de vote des étrangers, venus du
dehors de l'Union Européenne, ressurgit une fois de
plus en France. C'est un débat auquel nous, qui pour la
plupart avons eu des parents ou des grands-parents
immigrés, ne pouvons rester indifférents.
Quelle fierté cela aurait été pour eux de pouvoir exercer
leur devoir de citoyens dans cette France qu'ils s'étaient
choisie ! Les seuls qui entre les deux guerres mondiales
purent le faire étaient ceux qui avait demandé et obtenu
leur naturalisation. Las ! Dès le 22 juillet 1940, soit à
peine plus d'un mois après la capitulation de la France
devant les nazis, le Gouvernement de Vichy, sans
perdre de temps, dénaturalisait tous ceux qui avaient
obtenu la nationalité française depuis 1927 et les rejetait
ainsi hors de la nation.
Donner le droit de vote à ces étrangers aux élections
municipales permettrait de mieux intégrer ceux qui ne
le sont peut-être pas encore totalement mais qui
participent à la vie économique du pays, qui payent la
TVA sur leur consommation et bien souvent aussi, au
minimum, des impôts locaux.
Si on en croit les sondages, une majorité de Français
serait d'accord avec une telle mesure. Alors pourquoi
attendre pour légiférer dans ce sens en se rappelant ce
vieux mot d'ordre que nous avons mis en titre. C'était
celui des "insurgents" américains lorsqu'ils se lancèrent,
en 1775, dans la Guerre d'indépendance.

I.J

------------------------------------------Vive LDJ
Vive sa nouvelle équipe
C’est avec un immense plaisir que j’ai vu se mettre en place
la nouvelle équipe de notre Association,
Liberté du
Judaïsme, avec son Conseil d’Administration et son Bureau,
lors de l’Assemblée générale du 23 novembre.
La relève est bien assurée et l’arrivée au CA des trois
«petites nouvelles» - Brigitte, Danièle et Fabienne renforcera encore plus le dynamisme de L.D.J.
Je sais que notre Association est entre de bonnes mains avec
Nicole, Maryse , Noémie , Flora, Isidore et bien sûr notre
nouvelle Présidente, Simone Simon à qui j’exprime tous mes
vœux de pleine réussite dans cette tâche.
Qu’il me soit ici donné l’occasion de remercier toute l’équipe
avec laquelle j’ai travaillé au cours de ces deux dernières
années, sans oublier ceux et celles non encore cités plus
haut, comme Margaret, Michel, Marlyse, Roselyne, Hélène
mais aussi Raphaël et Armand.
Je reste, malgré mes activités externes, un membre fidèle et
profondément attaché à notre Association Liberté du
Judaïsme et j’adresse à sa Présidente et à toute son
équipe un chaleureux Mazel Tov !

Marlène Celermajer

11
Activités de LDJ
Conférences
LDJ a axé son programme pour l'année 2011-2012 sur
le thème de :
L'altérité
Les premières conférences ont eu lieu le :
Mercredi 19 octobre 2011
Mireille Ouziel,
Professeur agrégée de Lettres
"Comment composer avec l'altérité"
Mercredi 16 novembre 2011
Stéphane Encel , Historien, professeur à l'ESG
"L'autre a-t-il défini le Judaïsme ?"
Mercredi 14 décembre 2011
Nadia Malinovich Maître de conférences 'Université de Picardie
"Judaïsmes en France et aux Etats-Unis : réflexions
comparatives"

Les prochaines conférences auront lieu le :
Mardi 17 janvier 2012
Alain de Toledo
Président de l'Association " Muestros Dezaparesidos"
"Les Judéo-espagnols et la Shoah,
histoire méconnue, mémoire en reconstruction"
Mercredi 15 février 2012

Yitskhok Niborski. Enseignant à l'Inalco et à la Maison
de la Culture Yiddish.
"Eliezer Steynberg,
fabuleux fabuliste, yiddish et universaliste"
Mercredi 14 mars 2012

Sophie Nizard. Chercheur au Centre d'études des faits

religieux (EHESS-CNRES)
"Adopter et transmettre: filiations adoptives dans le
Judaïsme contemporain"
Mercredi 11 Avril 2012
Charles Leselbaum. Maître de conférences à l'université
Paris-Sorbonne
" Marranes et marranisme"

---------------------------------------

Ces conférences sont suivies d'un débat et se tiennent
13 rue du Cambodge Paris 20ème à 20 heures.
Accueil dès 19 h 30

RAJEL
Table ronde sur :

Samedi 11 février à 15 h30

"La laïcité à l'épreuve des révolutions arabes"

Avec
Martine Gozlan Rédactrice en chef de "Marianne"
Antoine Sfeir
Directeur des "Cahiers de l'Orient"
Nadia El Fani
Réalisatrice du film "Laïcité, Inch'Allah"
Mohamed Sifaoui Ecrivain, auteur de
"Pourquoi l'Islamisme séduit-il ?"
Dominique Moïsi* Co-fondateur de l'Institut Français des
relations Internationales.
*sous réserve à la date de publication
Dans les locaux du Medem-Arbeiter Ring
52 rue René Boulanger Paris 10ème

Et ailleurs
 Au Centre Alliance Edmond J.Safra
6 bis rue Michel-Ange Paris 16éme
"L'étranger biblique dans le regard de la tradition Juive"
Un Colloque sur "l'Autre" vu au travers des textes bibliques.
Dimanche 8 janvier de 9h30 à 19 h
 A l'Hôtel Lutétia
La rencontre annuelle organisée par l'AJHL autour des
" Livres des mondes juifs et Diasporas en dialogue"
Avec comme thème cette année : "De la vie au texte"
Samedi 4 et dimanche 5 février 2012

 Au Mémorial de la Shoah.
"Le sport européen à l'épreuve du nazisme"

Des Jeux Olympiques de 1936 (Berlin) à ceux de Londres
(1948) Exposition, conférences et débats sur ce thème.
Jusqu'au 18 mars 2012 (voir page 6)

 A l'UNESCO à Paris

Colloque International organisé par le Bnai Brith avec la
Participation de la Maison de la Culture Yiddish :

" Permanence du Yiddish"

Avec des acteurs du monde Yiddish d'une dizaine de pays.
Lundi 6 et Mardi 7 février 2012

 A la Maison de la culture Yiddish
"Les sons du silence"

Exposition de photos sur le patrimoine juif en Lituanie.
Documents mis à disposition par l'ambassade de Lituanie en
France.
Jusqu'au 1er Mars 1912

 Au Théâtre de Belleville

94 rue du Fg du temple Paris XIème
"En ce temps-là, l'amour …"
Un monologue poignant de Gilles Ségal (voir page 6)

 Au musée du Quai Branly
"Exhibition"

Les représentations de l'autre quand il est différent.
Comment on glisse de la curiosité à l'exclusion en passant
par l'exhibition et les théories raciales.
Jusqu'au 3 juin 2011

 Au Grand Palais
"L'aventure des Stein"
La vie prodigue et prodigieuse d'une famille de
collectionneurs Juifs américains (voir notre Lettre 112)
Jusqu'au 16 janvier 2012 (Dépêchez-vous !)

 Au Collège des Bernardins
18-24 rue de Poissy Paris Vème
" Sauver les enfants. 1938-1945"
Le sauvetage par l'OSE des enfants juifs pendant la guerre.
(Voir page 4, sur le même thème, l'action de "La Clairière")
Du 9 au 19 janvier 2012

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  • 1. Présidente d’Honneur : Doris Bensimon ‫לייז‬ L.D.J. Siège social 13 rue du Cambodge 75020 Paris Editorial Une année nouvelle s'ouvre avec une nouvelle équipe à la tête de notre Association. L'année qui s'achève a été à la fois fructueuse et éprouvante. Elle a été fructueuse en activités, mais éprouvante avec la mort brutale d'Irène Wekstein, notre vice-présidente, et celle d'Albert Sicsu. Venant après le décès de Doris Bensimon qui avait porté LDJ durant de très nombreuses années, toute la charge de l'Association a été supportée par Marlène Celermajer, qui en a assuré la Présidence durant deux années. Après ses deux années de mandat durant lesquelles elle a redynamisé le fonctionnement de l'Association, elle a souhaité se retirer et c'est maintenant Simone Simon, soutenue par une équipe partiellement renouvelée, qui a accepté de reprendre transitoirement le flambeau. Que Marlène soit ici remerciée au nom de tous. Les buts et les objectifs de LDJ restent les mêmes : ménager un lieu où peuvent se retrouver des personnes, de toutes origines et de tous milieux, intéressées par les Cultures juives dans toutes leurs diversités. LDJ, Association laïque, ouverte à tous les courants qui traversent le judaïsme français, mais également sur le monde, comme en témoigne le fil conducteur choisi cette année pour notre cycle de conférences : "l'Altérité", se veut un lieu d'échange et de travail en commun de personnes venues d'horizons divers. C'est à la fois sa force et sa difficulté quand un peu partout se dressent ou se redressent l'intolérance et le refus des autres. Pour mener à bien son projet, LDJ compte sur ses adhérents actuels et sur tous ceux qui viendront la rejoindre avec le même esprit de dialogue. Elle s'appuiera comme précédemment sur ses conférences et les riches débats qui les prolongent, sur son Bulletin "La lettre de LDJ", sur ses Cercles de lecture en commun et dans un avenir que nous espérons proche sur un renouveau de son site internet interactif et ouvert à la discussion et au dialogue. Le Bureau N° 113 janvier-février 2012 le numéro 2,50€ Judaïsme et Laïcité en France et aux Etats-Unis Notre amie Nadia Malinovich qui nous a présenté une conférence le 14 décembre 2011, nous avait fait parvenir le texte suivant. Nous l'en remercions vivement Jacqueline, une de mes amies juives ici en France, m’a raconté il y a quelques années une histoire qui m’a fait réfléchir sur les différences entre les cultures juives en France et aux Etats-Unis. Après quelques visites d’églises et de cathédrales pendant les vacances, sa fille Sonia, âgée de dix ans, lui avait demandé " Maman, à quoi ressemble l’intérieur d’une synagogue ? ". Pour un Juif américain, cet échange caractériserait forcément une famille qui n’était juive que nominalement. Mais en fait, Sonia et ses deux frères allaient dans une école privée juive et fréquentaient une organisation sioniste tous les samedis après-midi ; la famille allait régulièrement en Israël pour les vacances, et les amis de la famille sont majoritairement juifs. Du point de vue français, ce comportement est loin d’être paradoxal : comme beaucoup de familles juives françaises qui ne s’identifient pas au judaïsme orthodoxe dominant en France, cette famille exprime sa judaïté principalement dans des cadres laïcs. Le frère aîné de Sonia avait d’ailleurs fait une bar-mitsvah laïque au Cercle Bernard Lazare. En revanche, il est quasiment impossible de trouver aux EtatsUnis une famille juive, même très peu pratiquante, dont un enfant n’aurait jamais mis les pieds dans une synagogue. Bien sûr, il existe aux Etats-Unis des associations et des publications qui promeuvent un judaïsme laïc. La plus ancienne est le Workmen's Circle / Arbeter Ring, l'analogue du Centre Medem à Paris, dont la branche américaine avait été créée à New York en 1892. La mission principale de cette association est l'apprentissage du Yiddish, associé avec l’enseignement de l'histoire et de la culture des Juifs d'Europe de L'Est. L'association, fortement impliquée dans des projets de politique progressiste, milite par exemple pour un système de sécurité sociale universelle et gouvernementale (« single payer universal health care ») et 1
  • 2. pour le contrôle des armes (« gun control ») aux Etats-Unis, Le Workmen's Circle (1) est actif à New York et dans ses environs, où il maintient quatre Schules (Talmud Torah laïc). Il a également des branches dans quelques autres grandes villes à travers le pays, mais ne maintient que quatre Schules en dehors de New York : à Boston, à Cleveland, à Philadelphie et à Sommerset (New Jersey). (2) La Society for Humanistic Judaism fut créée en 1963 par un rabbin libéral pour rompre avec le judaïsme religieux et promouvoir des valeurs juives « indépendamment de toute autorité super-naturelle ». Tout comme le Workmen's Circle, cette organisation est fortement impliquée dans les milieux de gauche, et propose des bar-mitsvah laïques aux enfants de ses membres. La Society for Humanistic Judaism a aujourd’hui plus de succès que le Workmen's Circle (il existe actuellement 22 communautés dans le pays). Toutefois, ces communautés sont peu nombreuses et très peu visibles aux Etats-Unis ; la plupart des familles juives, même très peu pratiquantes ou croyantes, chercheraient une synagogue qui leur convienne plutôt qu'une organisation laïque. Pour comprendre la différence entre les situations en France et aux Etats-Unis, il faut analyser l’histoire du judaïsme et des communautés juives dans ces deux pays. Aujourd’hui, la population juive française est constituée principalement de Sépharades qui ont leurs racines en Afrique du Nord, tandis que les Ashkénazes, dont les grandsparents quittèrent l’Europe de l’Est au début du XXe siècle, sont beaucoup moins nombreux. Les Sépharades, arrivés d’Afrique du Nord depuis une ou deux générations, ont une pratique plus traditionnelle (orthodoxe) que les Ashkénazes. Inversement, les Ashkénazes, comme Sonia et sa famille, sont majoritaires dans les milieux juifs laïcs et nonorthodoxes. Aux Etats-Unis, la vaste majorité des Juifs sont Ashkénazes, et la plupart d'entre eux descendent des immigrés de l'empire russe qui arrivèrent aux Etats-Unis entre 1881 et 1915. Un petit noyau de Juifs allemands, arrivés au milieu du XIXe siècle, avait fondé des synagogues libérales aux EtatsUnis, mais celles-ci attirèrent peu la première génération de Juifs d'Europe de l'Est, qui se retrouvèrent soit dans des synagogues traditionnelles orthodoxes, soit dans des communautés yiddish laïques qui se développèrent à cette époque aux Etats-Unis (et surtout à New York) en même temps qu’en Europe de l'Est. A partir des années 1950 cependant, leurs enfants et petits-enfants rejoignirent massivement les communautés libérales et "Conservative"» (Massorti). Ce dernier mouvement, qui vit le jour dans les années 1880 pour offrir un compromis entre le judaïsme libéral et le judaïsme orthodoxe, se développa surtout dans les années 1950. Pour les Juifs américains de cette génération d'après-guerre, le judaïsme libéral ou conservateur était évidemment plus attirant que le judaïsme orthodoxe "old world" importé du shtetl de leurs parents. La mixité, les prières traduites en anglais, ainsi que la transformation de la synagogue en centre communautaire correspondaient bien aux besoins de cette communauté en pleine acculturation et embourgeoisement. Les communautés libérales ou conservatrices se sont aussi épanouies dans le paysage d’après-guerre américain aux dépens du judaïsme laïc. Associés surtout à des idéologies de gauche et aux mouvements ouvriers, le Bund et les autres associations de ce genre étaient, eux aussi, trop proches de la génération immigrée précédente. Toutefois, pour comprendre l'attraction des Juifs américains envers le judaïsme libéral et Massorti au détriment du judaïsme laïc, il faut bien comprendre que la religion et la laïcité ont des statuts très différents en France et aux EtatsUnis. Alors qu'en France, la religion est considérée comme une affaire relevant strictement de la sphère privée, aux Etats-Unis, on affiche bien plus facilement ses croyances et son appartenance religieuse. Pourquoi ces différences ? Premièrement, alors que le républicanisme français se créa en opposition avec une église catholique toute puissante et alliée inconditionnelle de la monarchie, la naissance de la république américaine fut fortement associée à la liberté religieuse. Le mythe fondateur du pays est celui des pèlerins, partis d'Angleterre pour échapper à la persécution religieuse. Bien qu'aux EtatsUnis, comme en France, la liberté religieuse soit un principe fondateur de la République, les Etats-Unis, dès leur origine ont valorisé la pratique religieuse comme symbole de la liberté dont on jouit en tant que citoyen américain. La laïcité (au sens de la non-croyance ou de la non-pratique de la religion) est, aujourd’hui encore, regardée d'un air soupçonneux par la majorité des Américains. Donc, aux Etats-Unis, pratiquer sa religion, en l'adaptant aux mœurs de la société, est une forme d'américanisation. Il faut signaler qu’en France, le Consistoire est responsable du fait que les courants Réformateurs et Conservateurs qui se développèrent aux Etats-Unis tout au long du XIXe siècle ne purent pas s’installer en France pendant la même période. Seul le Consistoire avait le pouvoir d’autoriser la création de nouvelles congrégations, et ses membres cherchèrent à perpétuer leur propre vision quelque peu " modernisée" du judaïsme orthodoxe. Quand le contrôle de la religion par l’Etat prit fin en 1905, quelques synagogues réformatrices et conservatrices furent alors fondées, mais même aujourd’hui, elles ne représentent qu’une très faible minorité par rapport à la majorité orthodoxe. Cette combinaison entre anticléricalisme et domination du Consistoire explique fondamentalement pourquoi une jeune enfant comme Sonia n’avait jamais vu l’intérieur d’une synagogue : puisque ses parents ne s’identifiaient pas avec certaines valeurs du judaïsme orthodoxe (prières en hébreu, mise à l’écart des femmes, etc.), ils quittèrent tout simplement le monde social religieux. Pourtant, ils ne perdirent pas leur identité juive, et choisirent plutôt d’intégrer des réseaux d’associations juives laïques qui depuis quelques années proposent une forme alternative d’identité juive en France. Aux Etats-Unis, par contre, cette famille aurait probablement cherché à rejoindre une synagogue "cool" à l’heure où leurs enfants atteignaient l'âge d’aller au talmud torah, puis de préparer une bar ou bat mitsvah. Effectivement, au-delà du fait que la religion en tant que telle n'a pas la même connotation négative dans la culture ambiante américaine qu'en France, les religions (judaïsme et autres) s’y sont montrées très malléables, s’adaptant constamment à la société américaine. Depuis les années 1970, on a vu croître des dizaines de communautés "alternatives" d'orientations politiques et sociales très 2
  • 3. diverses aux Etats-Unis. Souvent associés avec le judaïsme libéral, on n'hésite pas aux Etats-Unis à fonder une nouvelle communauté pour répondre à des besoins idéologiques ou politiques particuliers. L'exemple le plus frappant est sans nul doute la multiplication de synagogues "gay et lesbian" : fondées d'abord à New York et à Los Angeles au début des années 1970, des communautés avec cette étiquette se trouvent maintenant également à Boston, à San Francisco, à Philadelphie, à Miami et à Atlanta. Ces synagogues, fondées à une époque où les homosexuels n'étaient pas bienvenus dans les synagogues libérales ou orthodoxes, se sont beaucoup développées, car de nombreuses familles hétérosexuelles les rejoignent à cause de leur atmosphère ouverte et progressiste (3). Même pour la majorité des familles qui cherchent des communautés moins « alternatives », le fait de rechercher activement une synagogue qui correspond à ses valeurs (exactement comme le font leurs compatriotes chrétiens à la recherche d'un temple ou d’une église) fait beaucoup plus partie de la culture américaine que de la culture française. Bien sûr, il existe des synagogues non orthodoxes en France (surtout à Paris où l’on peut compter cinq communautés libérales et deux communautés Massorti). Mais, en France, la dominance du système consistorial fait que ces lieux sont souvent inconnus des Juifs français, qui pour la plupart ne savent tout simplement pas qu'il existe des alternatives au Consistoire. Pour Sonia et sa famille, la découverte de la synagogue Adath Shalom (Massorti), lors d'une invitation à la bat-mitzvah d'une amie, fut une vraie révélation. Sonia et ses parents furent heureusement surpris de découvrir une congrégation progressiste qui pratique l’égalité entre les sexes : voir son amie monter à la Torah fut particulièrement émouvant pour Sonia, qui décida alors de faire une " vraie" bat-mitzvah plutôt qu’une bat-mitzvah laïque au Centre Bernard Lazare, et son frère cadet la suivit peu après. Découvrir Adath Shalom n’a pas vraiment rendu Sonia ou ses parents plus religieux, mais leur permit (tout comme aux Juifs américains) d'intégrer à leur vie des pratiques religieuses compatibles avec leurs valeurs progressistes et laïques. Nadia Malinovich 1) cf. http://www.circle.org/?page=about#mission 2) cf. http://www.shj.org). 3) Cf. Anthony Weiss, As Acceptance Grows,Gay Synagogues Torn Between the Straight and Narrow, The Jewish Daily Forward, March 20, 2008. http://www.forward.com/articles/12994). Pensez à régler votre cotisation ou votre abonnement à la Lettre de L.D.J, pour l'année 5772 (Septembre 2011 à août 2012). Si vous le pouvez, faites un don à L.D.J. Il peut être déductible de vos impôts. Un certificat CERFA vous sera délivré. Envoyez vos chèques à notre trésorière Noémie Fischer 119 bis rue d'Avron 75020 Paris Mémoire Il y a trois ans… Jean Torstein, premier Président de LDJ, est parti le 31 janvier 2009 à la suite d’une maladie qui l’a handicapé, progressivement, pendant de nombreuses années. Nous ne serions pas ici, à « Liberté du Judaïsme », si son principal initiateur, accompagné de Elie Garbaz et de Claude Kolinka, n’en avait eu et l’idée et la volonté. Ses parents, originaires de Cracovie, arrivent en France en 1924. Jean naît le 3 juin 1939 (quelques mois avant l’invasion de la Pologne par les nazis, et l’entrée en guerre de l’Angleterre, puis de la France). En 1942 l’étau se resserre autour des Juifs et, pour le sauver, sa mère le confie à une famille de paysans de l’Indre, à Blanc. Il y restera jusqu’à la fin de la guerre. Son sentiment d’abandon fut tel qu’il ne parvint jamais à le surmonter. J’ai rencontré Jean au Cercle Bernard Lazare au cours des années 1963-1964 : il y était un membre très actif. Ses interventions, toujours pertinentes, faisaient les délices de l’auditoire – l’irritaient, parfois – mais ne le laissaient jamais indifférent. Il était mon aîné à l’Hashomer Hatsaïr, au Parti Socialiste, dans le syndicalisme. En 1974, est créée la loge Ben Gourion, première loge « B’nai Brith » du XIXème arrondissement : il en est élu Président. L’engagement est l’une des facettes de sa personnalité... J’imagine que les locaux de la C.F.D.T. – impôts (dont il était responsable de section) résonnent encore de ses révoltes légendaires ! Le Parti Socialiste lui avait confié la charge de Secrétaire général à Aubervilliers, sans compter l’organisation du service d’ordre au cours des manifestations. Sa générosité envers les plus faibles est connue de ceux qui l’ont approché, ses combats toujours sincères et justes, son amitié sans faille. Nous sommes restés très liés même si – le temps aidant - nous nous voyions moins souvent. Et puis Michèle entre dans sa vie, ce sera un très bel épisode ; leur mariage est célébré en 1969 à la Mairie d’Aubervilliers. Je garde de Jean le souvenir d’un homme de convictions, passionné – passionnant aussi – dont les indignations n’avaient d’égales que les actions pour essayer de changer le cours des choses. C’était l’intégrité personnifiée et Michèle peut en témoigner, elle qui avait l’interdiction formelle de se fournir chez les commerçants du quartier dont Jean administrait les dossiers en tant qu’Inspecteur des Impôts… ceci pour éviter toute compromission quelle qu’elle soit ! 3
  • 4. Apprenant – de moi – que j’étais adhérente à l’AJHL, il n’a pas été long à me convaincre de rejoindre LDJ, ce que j’ai fait parce qu’il était difficile de résister à un ami tel que lui. Je n’ai d’ailleurs eu qu’à me louer de cette décision. Son réseau d’amis et de relations était impressionnant notamment dans le monde universitaire, politique, syndical, et LDJ, je pense, en fut une des grandes bénéficiaires. C’est Jean qui a œuvré à l’arrivée de Doris Bensimon à LDJ, assurant à l’Association la continuité, dans la transmission d’une culture d’un Judaïsme humaniste et laïc qui lui tenait tant à cœur, car, si pour lui l’Alliance et la transmission demeuraient les valeurs fondamentales du judaïsme, l’un de ses postulats était qu’être juif laïc, c’était être juif culturellement. Jean adorait la vie. Personne ne peut imaginer sa souplesse quand, au son d’une musique russe, ou tzigane, ou yiddish, il se mettait à danser seul, lançant et croisant jambes et bras : notre premier enfant, à bientôt quarante ans, en garde, un souvenir impérissable. Il aimait également chanter, et j'ai ouïdire qu'à LDJ lors des Seders laïques il entonnait souvent des passages de la Hagadah au grand dam de certains des participants qui pensaient que ce n'était pas le lieu pour ce genre de chants…mais hier comme aujourd'hui LDJ était, et reste, un lieu de rencontres et d'échanges entre tradition et laïcité. A ce souvenir est toujours associée, Michèle, professeur et soliste merveilleuse. (Savez-vous qu’Huguette Dreyfus* lui confiait « sa » classe lorsqu’elle partait en tournée ?) Et puis la maladie surgit. En rampant d’abord, puis progressivement envahissant l’espace... tout en le restreignant. Vous imaginez sans peine le drame de cet infatigable lecteur petit à petit dépossédé de la vue (entre autres difficultés). Tout au long de ces années, ô combien difficiles, Michèle fut auprès de lui une alliée patiente, pleine de tendresse, de dévouement et de fidélité. Danièle Weill-Wolf. *Claveciniste française née à Mulhouse (1928). Elève de Ruggero Gerlin, lui-même de Wanda Landowska. C’est l’une des figures incontournables de la renaissance de la musique ancienne. C’est non seulement une soliste reconnue en France mais également dans le monde entier. Elle a enseigné à la Schola Cantorum, à la Sorbonne, au Conservatoire de musique de Lyon – entre autres ! – et fait partie du jury du Concours International de Clavecin de Paris. La Lettre de LDJ. Janvier-Février 2012 Rédaction et administration 13 rue du Cambodge 75020 Paris Directrice de la publication: Simone Simon Comité de lecture : Flora Novodorsqui, Danièle Weill-Wolf, Michel Mohn Simone Simon, Isidore Jacubowiez, Copytoo 281 rue des Pyrénées 75020 Paris Dépôt légal à la parution ISSN 1145-0584 Histoire Le sauvetage des enfants juifs Il faut traiter le problème juif sans sentimentalisme. Il faut se séparer des juifs en bloc et ne pas garder les petits. Robert Brasillach dans le journal collaborationniste " Je suis partout" (25 septembre 1942). Un jour quelqu'un m'a dit "Sauve-toi, ils prennent les enfants français maintenant. Sauve-toi ; au coin de la rue tu trouveras une personne qui s'occupera de toi". J'avais 11 ans. C'était au mois de septembre 1943. Je l'ai cru, car mes frères et mes sœurs avaient déjà été arrêtés. Je l'ai cru parce j'avais déjà assisté à quelques opérations de ce genre. Sur des enfants qui n'étaient pas naturalisés français. La police était entrée dans le Centre, les avait embarqués et parfois pourchassés lorsqu'ils refusaient de la suivre. Je ne connaissais pas la personne qui m'a dit cela, mais je l'ai crue et cela m'a sauvé la vie. Au coin de la rue en question, il y avait effectivement quelqu'un qui s'est occupé de moi et de quelques autres. Quelques jours après nous franchissions la frontière suisse. Ce que je viens de vous raconter, c'est comment mon ami Wolf a été extrait du Centre de la rue Lamarck dans le 18ème arrondissement de Paris. C'était un des centres gérés par l'UGIF - l'Union Générale Israélite de France – créée par l'occupant qui désirait avoir un, et n'avoir qu'un seul interlocuteur en France à l'image des "Judenrats" que les nazis instaurèrent un peu partout dans les pays de l'est. l'UGIF qui crut qu'elle pouvait faire du bien fit aussi beaucoup de mal et le fait de n'avoir pas dispersé à temps les enfants juifs qu'elle avait sous sa garde restera comme une tâche indélébile sur son histoire. (1). Dans un livre paru récemment (2) l'auteur suit une famille juive d'origine roumaine de la Bretagne où elle vivait, jusqu'à Sobibor où elle fut exterminée, elle raconte comment le père réussit sous des prétextes fallacieux à faire sortir une de ses filles, Odette, âgée de 5 ans du camp de Drancy et comment elle fut confiée à l'UGIF. Odette fut consignée au Centre de la rue Lamarck. Elle sortait le dimanche avec une lointaine amie de la famille. Un hobereau de la vieille France bretonnante, maire de Plenour-Menez qui connaissait la famille, demanda que la petite fille lui soit confiée. En vain, les enfants avaient été remis à l'UGIF par la police française aux ordres des nazis, elle ne pouvait les rendre qu'à cette même police. Ce qu'elle fit le 24 mars 1943 en la renvoyant à Drancy et à la mort. Si Odette n'a pas pu être sortie des griffes des assassins, la petite sœur d'André Schwarz-Bart eut plus de chance. Son frère, le futur écrivain (3), qui avait 14 ans en 1942 et était également passé par le Centre de la rue Lamarck fut placé au centre d'apprentissage de l'ORT (4) rue des Rosiers pour y apprendre le métier d'ajusteur. En janvier 1944, il va sortir cette petite sœur qui était dans une des maisons contrôlées par l'UGIF pour une promenade et disparaît avec elle. Les organisations de résistance juives conscientes que le séjour des enfants dans les centres de l'UGIF présentait des risques importants, une opération "d'extraction" fut organisée avec l'aide d'un Centre social protestant "La Clairière" dirigée 4
  • 5. par le Pasteur Vergara. Le 16 février 1943, une quarantaine de femmes protestantes et juives se présentèrent aux Centres de la rue Lamarck et à celui de la rue Guy Patin dans le 10 ème arrondissement, munies d'autorisations obtenues avec de faux papiers leur permettant de sortir, qui un, qui deux enfants pour l'après midi. Elles en sortirent 63. Ces enfants, dont certains étaient trop jeunes pour comprendre ce qui leur arrivait furent immédiatement emmenés dans le local de "La Clairière" 60 rue Greneta dans le 2ème arrondissement d'où ils furent dispersés et envoyés en province. La liaison entre les organisations juives de résistance et les organisations d'aide protestantes était assurée par Sophie Schwartz (5), qui traversa la guerre et mourut en 1999, et Suzanne Spaak, belle-sœur du futur ministre belge des affaires étrangères, Paul-Henri Spaak, qui fut par la suite arrêtée et assassinée par les nazis. Seul le "rapt" de Vénissieux, qui permit de sortir 108 enfants des griffes de la police de Vichy peut lui être comparé en terme "d'efficacité". Encore que ce dernier se passa dans la zone sud le 29 Août 1942, c'est-à-dire à l'époque hors de portée des Allemands. Aux deux femmes dont les noms figurent ci-dessus il faudrait en ajouter bien d'autres qui constituèrent la chaîne de sauvetage, en particulier l'assistante du Pasteur Vergara : Marcelle Guillemot, les camarades communistes de Sophie Schwartz: Lily Berger, Techka Forszteter (6), et toutes les autres dont certaines sont restées anonymes. Si nous racontons cette histoire aujourd'hui, c'est que "La Clairière" a célébré le 23 novembre dernier ses 100 ans d'existence. Cette célébration s'est faite au Palais Brongniart, autrement dit dans l'ex-Bourse. Durant la matinée on a parlé de cette histoire passée et dans l'après-midi en présence de Martin Hirsch, Président de l'Agence de Service Civique, on a parlé du présent. Car La Clairière ne désarme pas et continue à tendre la main à ceux qui en ont besoin. (7) Dans une brève intervention l'historienne Annette Wievorka a salué, la mémoire du Pasteur Vergara et de Marcelle Guillemot, qui ont été décorés de la médaille des Justes par Yad Vaschem en 1990, et rappelé l'action des milieux protestants, essentiellement calvinistes, dans l'aide apportée aux Juifs durant les années noires. Isidore Jacubowiez 1) 2) 3) 4) 5) 6) 7) Entre le 20 et le 24 juillet 1944 (un mois avant la libération de Paris) les nazis firent irruption dans les Centres de l'UGIF et raflèrent tous les enfants encore présents dans ces centres. Le viceprésident de l'UGIF de la zone occupée, André Baur, fut lui aussi finalement déporté fin 1943 avec sa femme et ses quatre enfants. Marie-Noëlle Postic "Sur les traces d'une famille juive en Bretagne" Editions Coop Breizh 2007 André Schwarz-Bart. " Le dernier des Justes" Prix Goncourt 1959 ORT : Organisation Reconstruction Travail créée au début des années 1900 à St Petersburg pour promouvoir la propagation du travail artisanal et agricole parmi les Juifs René Goldman : " Une femme juive dans les tourmentes du siècle passé" Editions AGP 2006 Techka Forszteter "Il y a cinquante ans" article paru dans la revue " Yiddishe Kultur" NewYork Sept 1993 "La Clairière", qui a toujours son siège rue Greneta agit dans différents secteurs grâce à 46 salariés et 160 bénévoles. Vu, Lu, Entendu L'écrivain David Grossman a obtenu le Prix "Médicis 2011 du roman étranger" pour son livre "Une femme fuyant l'annonce" dont nous avons parlé dans notre Lettre 112. Une raison de plus pour y revenir. L'angoisse. Le titre du livre de David Grossman dans sa version anglaise est "To the end of the land". Si, bien sûr, on peut le comprendre comme la fuite de l'héroïne jusqu'au bout du pays pour ne pas apprendre la nouvelle de la mort possible de son fils, on peut difficilement ne pas songer à la "fin du pays", à la fin d'Israël. Car c'est cette angoissante dimension existentielle qui domine tout au long du livre. Dès le début, dans un des meilleurs passages du livre, on est saisi par l'angoisse, l'angoisse de jeunes adolescents hospitalisés pour une maladie contagieuse qui n'est pas nommée, et qui, la nuit, font des cauchemars : les Arabes arrivent, Israël est détruit. C'est aussi l'angoisse qui saisit Ofer enfant quand il découvre qu'Israël est entouré de pays ennemis. L'angoisse, c'est celle d'Ora, l'héroïne, qui fuit pour ne pas recevoir l'annonce de la mort de son fils mais qui a également peur d'apprendre que son fils, qu'elle n'a pas élevé pour cela, se livre au cours de son séjour à l'armée à des exactions contre les "autres". L'angoisse, c'est l'angoisse collective de la disparition du pays, quand Ofer partant en mission glisse à l'oreille de sa mère "Si je meurs quitte-le", ou quand Avram, l'un des deux hommes de sa vie, revient de captivité en Egypte, où il a été odieusement torturé, et dont la première question est : "Israël existe-t-il encore ?" L'angoisse, elle est dans ces pages qui décrivent les premières heures de la guerre du Kippour, avec l'armée Israélienne en débandade et Avram, seul survivant dans un des fortins qui se trouvaient au bord du canal de Suez, qui soliloque dans un poste radio que son ami et presque frère Illan arrive à capter sans pouvoir lui répondre, ni surtout le secourir. L'angoisse, c'est la rencontre régulière au cours de la randonnée des tombes de soldats morts dans toutes les guerres qui jalonnent l'existence de l'Etat d'Israël. Cette angoisse, elle est exprimée par Ora : " Je me dis que c'est mon pays et que j'ai nulle part où aller…; si on réfléchit, si on raisonne en termes de chiffres, de faits, d'histoire, sans se bercer d'illusions, il n'y a aucune chance". On ne peut qu'espérer qu'elle se trompe et que l'angoisse, un jour, disparaîtra avec l'état de guerre. I.J. 5
  • 6. Vu, Lu, Entendu En ce temps-là, l'amour ... Le petit théâtre du "Tambour Royal", 94 rue du Faubourg du Temple, dans le 11ème arrondissement, s'appelle désormais le "Théâtre de Belleville" et après rénovation, il a ouvert ses portes au mois d'octobre. Son nouveau propriétaire, Laurent Stroussi, vient d'y programmer une pièce magnifique : "En ce temps là, l'amour..." L'auteur et acteur, Gilles Ségal, est presque octogénaire. Il est né en 1932 en Roumanie, et fut l'élève du mime Marceau dans les années 50. Il a aussi interprété Yankel dans "Les eaux mêlées " de Jean Kerbron en 1969, et tourné dans de nombreux films avec Jules Dassin ou Edouard Molinaro, entre autres grands cinéastes. Dans cette pièce, il est seul en scène. Le personnage qu'il interprète est plein d'humanité et d'émotion contenue. Il entreprend de faire le récit à son fils, qui vit aux Etats Unis, d'un souvenir à jamais gravé dans sa mémoire lorsqu'il était dans le wagon qui l'emportait vers les camps de la mort. Pour ce faire, il utilise un petit magnétophone. Car "en ce temps là, l'amour c'était de chasser ses enfants pour les sauver de grands malheurs", nous dit-il, mais dans le wagon à bestiaux, son plus proche voisin était un père et son jeune fils. Au désespoir, ce père, qui a déjà perdu sa femme, décide de transmettre en accéléré à son enfant la quintessence de ce qui fait d'un individu un homme. Et il passe en revue des questions comme celle de l'existence de Dieu, ou comme celle de la Liberté, ou de l'Amour, profitant du plus petit instant de vie qui leur reste. C'est un vibrant et poignant plaidoyer contre le fascisme et les certitudes définitives, exprimé sans pathos, avec pudeur et générosité par un auteur et un acteur de grand talent. La pièce, qui dure une heure, sera reprise en janvier au même Théâtre de Belleville et mérite une belle audience. Adeline Fride Bureau de L .D. J Simone Simon Maryse Sicsu Nicole Abravanel Brigitte Thieblin Noémie Fischer Flora Novodorsqui Présidente Vice- Présidente Secrétaire Secrétaire adjointe Trésorière Trésorière adjointe Contact L. D. J.: 01 43 40 75 82 ou ldj@col.fr Site internet : www.col.fr/ldj/ Vu, Lu, Entendu Drôle de Jeux. Au Mémorial de la Shoah se tient actuellement (1) une exposition " Le sport européen à l'épreuve du nazisme" dans le cadre de laquelle se sont tenus un colloque et des conférences sur le "Sport et les Régimes autoritaires et totalitaires". Tout le monde sait bien que le Sport que certains de ses adorateurs présentent comme apolitique et destiné à promouvoir l'amitié entre les peuples est bien souvent très loin de cette idyllique vision. Les exemples contraires ne manquent malheureusement pas et on peut citer, dans le désordre, les manifestations racistes lors de matchs de football au Parc des Princes à Paris ou celles, antisémites, à Amsterdam contre Ajax, club soupçonné d'être subventionné par les diamantaires juifs de la ville, en passant par la Manifestation des athlètes noirs, ralliés aux " Black Panthers", lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968, et les huées qui accueillirent la Marseillaise au Stade de France lors d'une rencontre de l'Equipe de France de Football avec celle d'Algérie. Encore s'agit-il là de manifestations émanant des acteurs – les joueurs – ou des spectateurs qui mettent ainsi à profit le rassemblement sur un même lieu d'un grand nombre de gens, flanqués d'un non moins grand nombre de médias, pour faire entendre leur voix. Les régimes totalitaires qui ont gouverné une partie de l'Europe au cours du 20ème siècle ont très vite compris l'intérêt qu'il y avait à utiliser les activités sportives à leur profit ce qui leur permettait, du moins l'espéraientils, d'embrigader les jeunes générations. Ils ne lésinèrent pas sur les moyens et on leur doit ces grands stades, construits entre les deux guerres, qui permettaient de rassembler des dizaines de milliers de personnes autour d'activités sportives ou autour du "Duce" ou du "Führer". Les Jeux Olympiques de 1936 qui se sont tenus à Berlin n'étaient peut-être pas le prélude à la Shoah, comme l'a dit un des conférenciers (2) au colloque qui s'est tenu dans le cadre de l'exposition, mais ce fut la démonstration de l'aveuglement pour certains, de la lâcheté pour d'autres, des démocraties occidentales devant la montée du péril nazi. Le Comité International Olympique (CIO) avait décidé en 1931, c'est-à-dire avant l'arrivée au pouvoir d'Hitler, de confier l'organisation des Jeux à l'Allemagne qui rentrait ainsi de nouveau dans le concert des Nations après la Grande Guerre. En 1933, les Nazis s'installent à la tête de l'état allemand, ils prennent d'entrée des mesures anti-juives et, après l'incendie du Reichtag(3) , suppriment toutes les libertés démocratiques. 6
  • 7. Des voix s'élèvent tout d'abord pour demander le transfert des Jeux dans une autre ville, ce que le CIO refuse, puis lancent une campagne pour le boycott. Aux Etats-Unis plusieurs grandes organisations juives appelèrent au boycott, ce qui sera également le point de vue de l'Ambassadeur (W.Dodd) et du Consul (G.Messersmith) des Etats-Unis en Allemagne. Mais finalement les Américains décident de participer. En France et dans les autres pays européens des appels au boycott sont également lancés par des organisations de gauche. Le gouvernement de Front Populaire qui vient tout juste d'arriver au pouvoir en juin 1936 n'ose pas se prononcer pour le boycott ce qui nous vaudra de voir, dans le film (4) que Hitler à commandé à la cinéaste Leni Riefenstahl, la délégation française saluer, lors de l'ouverture des Jeux, Hitler et ses sbires d'un salut, soit disant olympique, qui ressemble étrangement au salut nazi. Le CIO qui n'était pas particulièrement antinazi, rencontra les dignitaires nazis et obtint que, pour calmer le jeu et les opposants américains, les Juifs ne seraient pas, par principe, exclus de l'équipe allemande. Sur quoi les Allemands demandèrent à une championne juive allemande de saut en hauteur, Gretel Bergman, déjà réfugiée en Angleterre de revenir au pays tout en lui cherchant une concurrente qui s'avéra plus tard être un concurrent. Le Comité Olympique américain s'arrangea pour limiter la participation d'athlètes juifs dans sa délégation, mais Hitler dut quand même supporter à ces Jeux, qui devaient être une glorification de la race germanique, des Noirs comme le très grand champion Jesse Owens qui y remporta quatre médailles. Des organisations de la gauche, décidèrent en accord avec le gouvernement espagnol de Front Populaire d'organiser des "Contre-Jeux" à Barcelone, mais le putsch de Franco et le déclenchement de la guerre civile ne permirent pas à ces Jeux de voir le jour. Les Jeux devaient être pour l'appareil nazi une vitrine de propagande et ils n'avaient pas lésiné sur les moyens mis en œuvre. Outre la construction d'un Grand Stade Olympique à Berlin, ils inventèrent pour cette occasion pour bien montrer la filiation, qu'il y avait, d'après eux, entre les Germains et les peuples nordiques qui s'installèrent en Grèce durant la haute antiquité, le relais qui porta le flambeau allumé d'Olympie jusqu'à Berlin, (5). pratique qui a été conservée pour les Jeux ultérieurs. Pour les nazis, ces jeux furent un succès, les athlètes allemands arrivèrent en tête avec 89 médailles et le film " Les Dieux du Stade" fut ultérieurement primé au Festival de Venise. L'Allemagne n'en avait pas fini avec les Jeux, et c'est à Munich en 1972 qu'un commando Palestinien tua dans l'enceinte du Village Olympique onze athlètes israéliens. Si en 1936 les dirigeants du sport mondial ne se sont pas vraiment sentis concernés par le sort fait aux sportifs juifs, ils ne l'ont pas été beaucoup plus trente six ans plus tard, puisqu'après avoir rendu un hommage rapide aux morts, les Jeux continuèrent comme si de rien n'était. Avery Brundage, qui était le patron du Comité Olympique aux Etats-Unis et fit tout pour éviter le boycott en 1936 était devenu en 1972 le Président du CIO ; il eut ce mot historique " The Games must go on". Les deux Allemagnes raflèrent ensemble le plus de médailles (104 dont 66 pour la DDR) devant l'URSS (99) et les Etats-Unis (93). La DDR, dont il s'avéra plus tard qu'elle pratiqua le dopage institutionnalisé de ses sportifs édita dans la foulée un magnifique album (6) glorifiant les performances du sport socialiste dans lequel un simple entrefilet parle du tragique événement en mettant sur le même pied les morts "de l'équipe israélienne et les combattants arabes de la liberté". I.J. 1) 2) Au Mémorial de la Shoah jusqu'au 18 mars 2012 Georges Eisen Patterson : University NJ (Etats-Unis) 3) Le 27 février 1933 le feu est mis au Reichtag, très probablement par les nazis qui crient au complot communiste et s'en servent pour supprimer les libertés fondamentales. "Olympia" ou les "Dieux du Stade". 4) 5) Johan Chapoutot "Le national-socialisme et l'Antiquité" (Presses Universitaires de France 2008) 6) Spiele der XX Olympiades. München 1972 - Gesellschaft zür Förderung des Olympishen Gedankens in der D.D.R.-1973- Voyages Budapest La foule s'écoule de la Synagogue Dohany, la séance d'ouverture du Festival des Musiques juives qui s'est tenu à Budapest du 27 août au 5 septembre dernier vient de se terminer avec un concert des cuivres du New York Metropolitan Orchestra. Le lendemain, ce sera un merveilleux orchestre tsigane qui occupera les lieux. Quelques jours plus tard, c'est dans la synagogue de la rue Leo Frenkel, sur l'autre rive du Danube, que six des meilleurs Cantors de la ville régaleront une foule de spectateurs avec la palette de leurs chants 7
  • 8. liturgiques, mais aussi avec des mélodies yiddish et judéo-espagnoles. Il y avait beaucoup de touristes étrangers, attirés par l'événement ou tout simplement par la ville, parmi les spectateurs mais il y avait aussi beaucoup de Hongrois et de Juifs hongrois. La grande synagogue de la rue Dohany Entre 60 000 et 80 000 Juifs habiteraient actuellement à Budapest. Ils étaient plus de 200 000 en juillet 1944 lorsque les déportations commencèrent. Juifs profondément intégrés à l'empire austro-hongrois puis au royaume, sans roi, de Hongrie, mais avec un régent, l'Amiral Horthy, ils parlaient dans leur très grande majorité le hongrois, et un grand nombre d'entre eux avaient magyarisé leur nom. Se croyant à l'abri des nazis allemands, puisque la Hongrie était l'alliée de l'Allemagne, c'est avec une sorte de stupeur qu'ils virent déferler quelques mois seulement avant l'arrivée de l'Armée Rouge aux portes de la ville, les tueurs d'Eichmann. Dans son livre (1) le Prix Nobel de Littérature Imre Kertesz - quoi de plus magyar comme nom? - met en scène cette stupeur, au travers des yeux d'un adolescent à qui, sur la rampe de sélection de Birkenau, un homme en pyjama rayé lui glissa dans une langue qu'il ne connaissait pas – le yiddish – mais qui avait quelque ressemblance avec le peu d'allemand qu'il connaissait "Seize ans, seize ans, dis que tu as seize ans". Ce qu'il fit, et lui sauva la vie. La Hongrie, hyper-nationaliste traumatisée par les deux guerres mondiales où elle se retrouva à chaque fois dans le camp des vaincus ; la Hongrie qui se considère comme la victime du traité du Trianon après la première guerre mondiale et qui a vécu une quarantaine d'années sous un régime communiste imposé par les Soviétiques à la fin de la seconde ; la Hongrie qui vénère la révolte de 1956 écrasée par les chars russes ; cette Hongrie-là vient de se doter d'une nouvelle constitution, dans laquelle on peut lire, entre autres : " Nous sommes fiers que notre roi saint Etienne ait établi l'Etat Hongrois…et qu'il ait fait de notre pays une partie de l'Europe chrétienne" "Nous respectons ce qui a été accompli par notre constitution historique et la Sainte Couronne, qui incarne la continuité de l'Etat constitutionnel et l'unité des nations. Comment ne pas être inquiet à la lecture de cette Constitution qui a été votée par la nouvelle majorité de droite du parlement, sous les ors de la splendide enceinte du Palais du Parlement érigé après que la Hongrie eut obtenu un statut d'autonomie dans le cadre de l'Empire austro-hongrois. Cette nouvelle Constitution qui a été fortement critiquée par le Parlement Européen. Lorsque l'on visite le Parlement construit à la fin du 19ème siècle, on se dit que les Hongrois de l'époque avaient sans doute la folie des grandeurs, mais on peut dire que la Communauté juive de l'époque n'en manquait pas non plus. La Synagogue Dohany avec ses tours et ses bulbes orientaux, construite un peu avant le Parlement, par les Juifs libéraux de l'époque – que l'on appelait, bizarrement pour nous, les néologues – est l'une des plus grandes du monde et peut recevoir 3000 personnes. Ce qui est bien utile pour les concerts mais un peu large, actuellement, pour les offices et le recueillement. Le Parlement hongrois de nuit Le recueillement, c'est plutôt derrière la synagogue qu'on le trouve avec l'arbre aux 600 000 feuilles métalliques qui chacune porte le nom d'un disparu de la Shoah. C'est derrière la synagogue aussi que l'on trouve la tombe vide de Raoul Wallenberg, le diplomate suédois, qui se dépensa sans compter à la fin de 1944 pour sauver les Juifs de Budapest de la déportation et qui disparut, sans que l'on sache encore aujourd'hui pourquoi et comment, en allant voir le Maréchal Malinowski, le chef de l'Armée Rouge. C'était le 17 janvier 1945. Cela faisait plus de trois mois que les Soviétiques se battaient contre une forte garnison d'Allemands et de Hongrois retranchés sur les hauteurs de Buda, sur la rive gauche du Danube, dans une bataille dont on dit qu'elle fit plus de morts que Stalingrad ou la prise de Berlin. 8
  • 9. Vu, Lu, Entendu Néophytes ? L'arbre aux 600 000 feuilles métalliques C'est sur cette ville haute que l'on trouve le Château Royal, mais aussi les fameux bains de l'Hôtel Gellert avec ses multiples piscines d'eau chaude et ses décorations "Art nouveau" Cela vaut le coup d'œil mais si c'est pour vous baigner je vous conseille plutôt les bains Szechenyi qui se trouvent à Pest sur l'autre rive. Vous y trouvez une quinzaine de bassins où la température de l'eau s'étage entre 26 et 36 °C. C'est sur cette même rive sur les bords immédiats du Danube que l'on peut voir cet angoissant alignement de chaussures posées là en souvenir des Juifs extraits du Ghetto de Budapest par les nazis hongrois – " les Croix Fléchées" – et jetés par groupe de trois dans le beau Danube bleu. Ces mêmes " Croix Fléchées" qui étaient enfin arrivées à leurs fins et au pouvoir à la mi-octobre 1944, après l'élimination de l'Amiral, et qui, en guère plus de deux mois, les routes de la déportation étant définitivement coupées par les bombardements et les soviétiques, réussirent à assassiner sur place une quinzaine de milliers de Juifs. Isidore Jacubowiez Je ne sais pas si nous sommes tous des Juifs allemands, mais en tout cas nous sommes certainement tous des néophytes… en quelque chose. Dans la Provence du 15ème siècle c'est sous ce nom que l'on désignait les convertis juifs au catholicisme. Ces néophytes étaient sans doute plus attachés à la douceur provençale qu'à la religion de leurs pères et c'est sans trop d'état d'âme qu'ils passèrent de Moïse à Jésus. Ils étaient probablement de l'ordre d'un millier alors qu'un nombre équivalent choisit lui l'exil vers l'Italie, le Maghreb ou Salonique. Cela se passa dans les années qui suivirent la mort du roi René d'Anjou en 1480 et par voie de conséquence le rattachement de la Provence au Royaume de France. Les néophytes changèrent de patronyme en même temps que de religion et on vit apparaître des Danjou, des d'Estienne, des d'Entrevaux, etc, noms qui sentent plus la lavande que les cactus de Judée. Les Juifs de Provence devaient être à leur apogée environ 12000. Ils étaient localisés dans trois grandes cités : Marseille, Aix, et Arles mais aussi dans un grand nombre de villes de bien moindre importance telles que Manosque, Forcalquier, Tarascon, Trets, Draguignan, Toulon, Hyères, ce qui est attesté, en particulier, par les rues de la Juiverie que l'on rencontre encore aujourd'hui dans ces villes. Les premières implantations de Juifs remontent sans doute au premier siècle de notre ère mais c'est à partir du 12ème siècle que l'on signale la présence de communautés relativement importantes. Leur vie y était plutôt agréable et prospère malgré l'obligation de port d'un signe distinctif imposé par le Concile de Latran en 1215, signe distinctif dont on pense qu'il fut, en Provence, réduit à sa plus simple expression. Arriva la peste noire et, comme il est bien connu que ce genre d'événement est forcément de la faute des "autres", les Juifs de Toulon furent massacrés en 1348 et ceux des petites communautés de Haute Provence durement pris à partie. Le résultat fut une quasi disparition des communautés rurales et une concentration dans les trois grandes cités nommées plus haut. Quand ces cités rejoignirent le doux pays des Francs, les Juifs durent choisir entre partir et se convertir. Tout cela et leurs vies de tous les jours Danièle Jancu-Agou (1) et les historiens qui l'ont précédée les ont débusqués dans les archives écrites et en particulier dans les actes notariés qui subsistent en très grande quantité et qui permettent de suivre à la trace certains de ces Juifs tout au long de leur existence. Danièle Jancu-Agou a aussi retrouvé des descendants de néophytes et, ce qui n'est pas banal, c'est que plus de 500 ans plus tard certaines de ces familles connaissent encore l'histoire de leur origine. Mais qu'est-ce que cinq cents ans ? nous a dit Danièle JancuAgou, surtout quand on vit, comme elle, en permanence avec des gens qui ont vécu à cette époque. I.J. Le mémorial aux assassinés par les Croix-Fléchées 1) Imre Kertesz, Prix Nobel de Littérature 2002 "Etre sans destin" Editions 10/18 Domaine étranger Danièle Iancu-Agou, Provincia Judaica. Dictionnaire de géographie historique des juifs en Provence médiévale, Paris / Louvain, Peeters, 2010, 248p. Présentation au MAHJ le 17 mars 2011 9
  • 10. Echos des conférences de LDJ Mercredi 16 novembre 2011 Juifs en anthropologie, en psychanalyse ou dans les mouvements révolutionnaires, en allant vers les autres qu'il s'est exprimé le plus fortement dans le monde moderne. Aller vers les autres, qui est l'opposé du repli communautaire. Stephane Encel, Historien, professeur à l'ESG ---------------------------------- Mercredi 14 décembre 2011 L'autre a-t-il défini le Judaïsme ? Ce qui frappe dans le Judaïsme c'est le manque de glorieux de ses mythes fondateurs. Si les peuples de l'antiquité avaient tous tendance à se voir descendre de quelque Dieu ou demidieu, le peuple juif se voit, lui, descendre d'un émigré venu de Mésopotamie, Abraham, qui vit au milieu des autres en Canaan, puis d'une tribu d'esclaves qui fuit les Egyptiens, avec lesquels il entretiendra par la suite des relations continues : alliance contre les empires de Mésopotamie, présence d'une importante colonie juive à Alexandrie, etc. Après la destruction du premier temple, qui n'est pas une affaire tombée du ciel mais une affaire de gros sous, la Judée refusant de payer le tribut que Nabuchodonosor se croit en droit d'exiger des peuples par lui soumis, une partie des Judéens se retrouvèrent en exil du côté de Babylone. Il faut croire que leurs relations avec les autres n'étaient pas si mauvaises puisque quand Cyrus leur proposa de réintégrer la Judée un grand nombre préférèrent rester sur place, où ils créèrent, au milieu des autres peuples, un des pôles les plus importants du Judaïsme diasporique. C'est durant cet exil que se forgea, au travers des messages prophétiques, d'une part le monothéisme et d'autre part le fait que l'Eternel n'étant plus, uniquement, logé entre les murs du Temple est devenu accessible quel que soit le lieu où l'on se trouve. Ceux qui rentrèrent de Babylone, durs parmi les purs, commencèrent à se protéger des autres qui étaient restés sur place – les Samaritains - et refoulèrent les épouses non juives (Esdras IX). Ce fut une période de repliement comme on en voit souvent dans les situations de crise. Quelques siècles plus tard, l'autre se présenta sous la forme du Grec, porteur d'un système de pensée et d'une culture puissante, et la tentation hellénistique fut bien forte. Tentation qui se heurta à l'opposition de milieux très attachés aux pratiques du judaïsme et qui conduisit à la révolte des Macchabés. Quelque temps après encore, les autres étant devenus Romains, l'histoire recommença avec une guerre civile et suicidaire (Massada) qui se termina par la destruction de Jérusalem. Le Judaïsme s'est donc construit à la fois parmi les autres et contre les autres ; le plus surprenant c'est qu'il ait survécu à travers les âges, posant un problème difficile aux historiens positivistes et à tous ceux qui sont tentés de systématiser l'Histoire. Cette survie, il la doit peut-être à son combat permanent contre d'Almaleq, le mal absolu, qui a ressurgi régulièrement dans son histoire, sous la forme d'Aman, de Khmelnytsky ou d'Hitler. Cette survie, il la doit sans doute aussi à ses capacités d'adaptation dont les plus marquantes, parmi d'autres, ont été de passer de la filiation par le père à la filiation par la mère au début de notre ère et de substituer le Livre au Temple après la destruction de celui-ci. C'est finalement, si on en croit la présence active de nombre de Nadia Malinovich, Maître de conférences à l'Université de Picardie "Le judaïsme en France et aux Etats-Unis : réflexions comparatives" Nadia est citoyenne américaine. Elle vit en France depuis 2002. Elle s'est intéressée au judaïsme en France et sa thèse porte sur "Français et Juif. La culture et la politique de l'Identité de la France au début du 20ème siècle". Ce travail a été finalisé par un livre qui a été traduit et publié en France (1). Elle a enseigné dans plusieurs Universités américaines de Paris et à Sciences-Po. Ses connaissances lui permettent de porter un regard des deux côtés de l'Atlantique. Historiquement, la situation est évidemment très différente: lors de la création des Etats-Unis, il y avait environ 2000 Juifs, pour la plupart sépharades, disséminés sur l'ensemble du territoire, dont le statut était similaire à celui des autres américains. Il fallut attendre quelques années de plus que la Révolution Française octroie un statut de citoyen à des gens qui faisaient partie d'une communauté présente depuis plusieurs siècles sur le territoire. Cent trente ans plus tard, après la Grande Guerre, l'immigration ashkénaze a porté la population juive des EtatsUnis à trois millions de personnes, essentiellement implantées dans les grandes villes, et qui n'avaient guère de contact avec les autres habitants. En France, la communauté juive, après être passée par la tempête de l'affaire Dreyfus et sa participation, à l'égal des autres Français, à la guerre de 1914-18, pouvait se sentir parfaitement intégrée à la République. C'était l'époque du Franco-Judaïsme. La situation commence à se dégrader dans les deux pays à partir des années 1920. Aux Etats-Unis les lois sur l'immigration stoppent celle-ci en 1924. En France, compte tenu de la saignée de la Grande Guerre et du manque de main d'œuvre, c'est sous les coups de la récession économique de 1929-30 que l'étranger devient indésirable, avec des deux côtés de l'océan une montée des mouvements xénophobes et antisémites avec Henri Ford aux US et Maurras en France, pour ne citer qu'eux. Pendant la guerre de 1940-1945 durant laquelle un quart des Juifs de France fut englouti par la Shoah, la population juive des Etats-Unis se renforça socialement et l'antisémitisme aurait globalement disparu "au profit" d'autres césures. Peuton dire vraiment la même chose en France à l'égard d'un groupe humain qui comporte maintenant une majorité de Juifs d'origine sépharade. I.J 10
  • 11. Poésie Vivre avec sa langue et une autre langue. Dans le cadre de notre thème annuel "L'altérité", il nous a paru intéressant de publier le poème ci-dessous. L'auteur Naim Araidi, druze israélien, dont la langue maternelle est l'arabe, a écrit d'abord en hébreu langue apprise à l'école puis, plus tard, en arabe Traduit de l'hébreu par Marlèna Braester ______________ Ainsi Ainsi passé ma vie dans l'entre deux et dans l'entre deux : toi ou une autre elle est ainsi ma vie pas autrement l'arabe est langue de ma mère l'hébreu est langue de son époux et mes poèmes ne peuvent s'écrire qu'en ces deux langues pas autrement Ainsi s'écrivent mes poèmes dans l'entre deux Et dans l'entre deux : un roman ou une petite histoire l'Orient est un point de départ l'Occident –une station en chemin vers l'autrement Où serai-je d'ici peu si je ne suis pas et si une autre femme ne me met pas au monde? Publié dans le blog Kef Israël de Rachel Samoul, et reproduit avec son autorisation --------------------------------------- On recherche… L’Association Muestros Dezaparesidos, fédération des différentes associations judéo-espagnoles de France, dans le cadre de ses travaux sur la déportation des Judéo-Espagnols de France, recherche un étudiant de Master 2, ou en début de thèse, susceptible de faire un travail de recherche sur cette période. Différents sujets historiques ou de sciences politiques peuvent être envisagés. Possibilité de bourse. S’adresser à : Alain de Tolédo 06 61 99 36 82 alain.detoledo@dbmail.com Le débat sur le droit de vote des étrangers, venus du dehors de l'Union Européenne, ressurgit une fois de plus en France. C'est un débat auquel nous, qui pour la plupart avons eu des parents ou des grands-parents immigrés, ne pouvons rester indifférents. Quelle fierté cela aurait été pour eux de pouvoir exercer leur devoir de citoyens dans cette France qu'ils s'étaient choisie ! Les seuls qui entre les deux guerres mondiales purent le faire étaient ceux qui avait demandé et obtenu leur naturalisation. Las ! Dès le 22 juillet 1940, soit à peine plus d'un mois après la capitulation de la France devant les nazis, le Gouvernement de Vichy, sans perdre de temps, dénaturalisait tous ceux qui avaient obtenu la nationalité française depuis 1927 et les rejetait ainsi hors de la nation. Donner le droit de vote à ces étrangers aux élections municipales permettrait de mieux intégrer ceux qui ne le sont peut-être pas encore totalement mais qui participent à la vie économique du pays, qui payent la TVA sur leur consommation et bien souvent aussi, au minimum, des impôts locaux. Si on en croit les sondages, une majorité de Français serait d'accord avec une telle mesure. Alors pourquoi attendre pour légiférer dans ce sens en se rappelant ce vieux mot d'ordre que nous avons mis en titre. C'était celui des "insurgents" américains lorsqu'ils se lancèrent, en 1775, dans la Guerre d'indépendance. I.J ------------------------------------------Vive LDJ Vive sa nouvelle équipe C’est avec un immense plaisir que j’ai vu se mettre en place la nouvelle équipe de notre Association, Liberté du Judaïsme, avec son Conseil d’Administration et son Bureau, lors de l’Assemblée générale du 23 novembre. La relève est bien assurée et l’arrivée au CA des trois «petites nouvelles» - Brigitte, Danièle et Fabienne renforcera encore plus le dynamisme de L.D.J. Je sais que notre Association est entre de bonnes mains avec Nicole, Maryse , Noémie , Flora, Isidore et bien sûr notre nouvelle Présidente, Simone Simon à qui j’exprime tous mes vœux de pleine réussite dans cette tâche. Qu’il me soit ici donné l’occasion de remercier toute l’équipe avec laquelle j’ai travaillé au cours de ces deux dernières années, sans oublier ceux et celles non encore cités plus haut, comme Margaret, Michel, Marlyse, Roselyne, Hélène mais aussi Raphaël et Armand. Je reste, malgré mes activités externes, un membre fidèle et profondément attaché à notre Association Liberté du Judaïsme et j’adresse à sa Présidente et à toute son équipe un chaleureux Mazel Tov ! Marlène Celermajer 11
  • 12. Activités de LDJ Conférences LDJ a axé son programme pour l'année 2011-2012 sur le thème de : L'altérité Les premières conférences ont eu lieu le : Mercredi 19 octobre 2011 Mireille Ouziel, Professeur agrégée de Lettres "Comment composer avec l'altérité" Mercredi 16 novembre 2011 Stéphane Encel , Historien, professeur à l'ESG "L'autre a-t-il défini le Judaïsme ?" Mercredi 14 décembre 2011 Nadia Malinovich Maître de conférences 'Université de Picardie "Judaïsmes en France et aux Etats-Unis : réflexions comparatives" Les prochaines conférences auront lieu le : Mardi 17 janvier 2012 Alain de Toledo Président de l'Association " Muestros Dezaparesidos" "Les Judéo-espagnols et la Shoah, histoire méconnue, mémoire en reconstruction" Mercredi 15 février 2012 Yitskhok Niborski. Enseignant à l'Inalco et à la Maison de la Culture Yiddish. "Eliezer Steynberg, fabuleux fabuliste, yiddish et universaliste" Mercredi 14 mars 2012 Sophie Nizard. Chercheur au Centre d'études des faits religieux (EHESS-CNRES) "Adopter et transmettre: filiations adoptives dans le Judaïsme contemporain" Mercredi 11 Avril 2012 Charles Leselbaum. Maître de conférences à l'université Paris-Sorbonne " Marranes et marranisme" --------------------------------------- Ces conférences sont suivies d'un débat et se tiennent 13 rue du Cambodge Paris 20ème à 20 heures. Accueil dès 19 h 30 RAJEL Table ronde sur : Samedi 11 février à 15 h30 "La laïcité à l'épreuve des révolutions arabes" Avec Martine Gozlan Rédactrice en chef de "Marianne" Antoine Sfeir Directeur des "Cahiers de l'Orient" Nadia El Fani Réalisatrice du film "Laïcité, Inch'Allah" Mohamed Sifaoui Ecrivain, auteur de "Pourquoi l'Islamisme séduit-il ?" Dominique Moïsi* Co-fondateur de l'Institut Français des relations Internationales. *sous réserve à la date de publication Dans les locaux du Medem-Arbeiter Ring 52 rue René Boulanger Paris 10ème Et ailleurs  Au Centre Alliance Edmond J.Safra 6 bis rue Michel-Ange Paris 16éme "L'étranger biblique dans le regard de la tradition Juive" Un Colloque sur "l'Autre" vu au travers des textes bibliques. Dimanche 8 janvier de 9h30 à 19 h  A l'Hôtel Lutétia La rencontre annuelle organisée par l'AJHL autour des " Livres des mondes juifs et Diasporas en dialogue" Avec comme thème cette année : "De la vie au texte" Samedi 4 et dimanche 5 février 2012  Au Mémorial de la Shoah. "Le sport européen à l'épreuve du nazisme" Des Jeux Olympiques de 1936 (Berlin) à ceux de Londres (1948) Exposition, conférences et débats sur ce thème. Jusqu'au 18 mars 2012 (voir page 6)  A l'UNESCO à Paris Colloque International organisé par le Bnai Brith avec la Participation de la Maison de la Culture Yiddish : " Permanence du Yiddish" Avec des acteurs du monde Yiddish d'une dizaine de pays. Lundi 6 et Mardi 7 février 2012  A la Maison de la culture Yiddish "Les sons du silence" Exposition de photos sur le patrimoine juif en Lituanie. Documents mis à disposition par l'ambassade de Lituanie en France. Jusqu'au 1er Mars 1912  Au Théâtre de Belleville 94 rue du Fg du temple Paris XIème "En ce temps-là, l'amour …" Un monologue poignant de Gilles Ségal (voir page 6)  Au musée du Quai Branly "Exhibition" Les représentations de l'autre quand il est différent. Comment on glisse de la curiosité à l'exclusion en passant par l'exhibition et les théories raciales. Jusqu'au 3 juin 2011  Au Grand Palais "L'aventure des Stein" La vie prodigue et prodigieuse d'une famille de collectionneurs Juifs américains (voir notre Lettre 112) Jusqu'au 16 janvier 2012 (Dépêchez-vous !)  Au Collège des Bernardins 18-24 rue de Poissy Paris Vème " Sauver les enfants. 1938-1945" Le sauvetage par l'OSE des enfants juifs pendant la guerre. (Voir page 4, sur le même thème, l'action de "La Clairière") Du 9 au 19 janvier 2012 12