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Cross-border cooperation - adaptation to climate change
1.
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2.
3.
UNIVERSITE DE GRENOBLE Sciences
Po Grenoble Sarah VOIRIN LA COOPĂRATION TRANSFRONTALIĂRE : UN CHAMP DâACTION POUR LâADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE. 2014 Master 2 Organisations Internationales Sous la direction de M. StĂ©phane Labranche
4.
REMERCIEMENTS Je tiens Ă
remercier StĂ©phane Labranche, mon directeur de mĂ©moire, pour sa disponibilitĂ©, son aide et ses conseils qui mâont permis de rĂ©aliser ce travail. Son appui a Ă©tĂ© fondamental pour cadrer mon analyse. Je tiens Ă©galement Ă souligner lâaccompagnement que mâont fourni les membres de lâObservatoire national sur les effets du rĂ©chauffement climatique (ONERC), et en particulier Sylvain Mondon, mon directeur de stage, pour sa disponibilitĂ© et sa patience. Ses rĂ©flexions critiques et constructives mâont aidĂ© Ă concevoir mon mĂ©moire. Ce stage nâaurait pas eu lieu sans que Nicolas BĂ©riot accepte ma candidature, et pour cela je le remercie. Pour realiser les entretiens qui alimentent ce memoire, jâai sollicite de nombreuses personnes, qui mâont accorde leur temps et partage leurs informations. Un grand merci a MaĂŻtĂ© Fournier, Sarah Tiefenauer, Mohamed Boulahia, Michel Aldon et Chantal Andrianarivo. Je remercie egalement les membres du Departement de lutte contre lâeffet de serre pour leur accueil, et particulierement Claire BergĂ© pour ses encouragements. Pour la qualite et la sympathie de nos echanges, je veux remercier Marie-Pierre MĂ©ganck et FrĂ©dĂ©ric Schafferer du MinistĂšre de lâĂ©cologie, du dĂ©veloppement durable et de lâĂ©nergie. Je souhaite remercier HĂ©lĂšne Desbieys pour son appui et sa bonne humeur lorsque nous Ă©tions toutes les deux en stage Ă lâONERC. Je remercie Ă©videmment tous mes proches pour leur soutien dans cette belle aventure.
5.
SOMMAIRE INTRODUCTION GĂNĂRALE.................................................................................................................................. 6 CHAPITRE
1 : COOPĂRATION TRANSFRONTALIĂRE, UNE DIMENSION PERTINENTE POUR LâADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ?......................................................................................18 CHAPITRE 2 : APPROCHE EMPIRIQUE DE LA COOPĂRATION TRANSFRONTALIĂRE POUR LâADAPTATION Ă TRAVERS TROIS ĂTUDES DE CAS...................................................................................30 SECTION 1 : LE BASSIN DE LA MEUSE..................................................................................................................................... 31 SECTION 2 : LE BASSIN MĂDITERRANĂEN..............................................................................................................................40 SECTION 3 : LES ĂLES DE LâOUEST DE LâOCĂAN INDIEN........................................................................................................47 CHAPITRE 3 : ENSEIGNEMENTS POUR ENRICHIR UN PROCESSUS EN DEVENIR................................53 CONCLUSION GĂNĂRALE..................................................................................................................................... 62 BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................................................... 66 ANNEXES ................................................................................................................................................................. 78 Annexe 1 - PrĂ©sentation des missions de lâONERC..................................................................................................................................79 Annexe 2 - La dĂ©marche dâadaptation de lâUnion EuropĂ©enne..........................................................................................................81 Annexe 3 - Ătude comparĂ©e des processus dâadaptation au changement climatique dans les pays de lâespace europĂ©en (printemps 2014)...............................................................................................................................................................................89 Annexe 4 - Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion..................................................................................................100 TABLE DES MATIĂRES....................................................................................................................................... 102 Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 4
6.
INTRODUCTION GĂNĂRALE 1. La
NĂ©cessitĂ© des Politiques Climatiques a)Lâadaptation au changement climatique : une politique climatique nouvelle. Lâadaptation au regard du changement environnemental nâest rien de nouveau. Les individus et les systĂšmes socio-Ă©cologiques ont toujours rĂ©pondu aux pressions extĂ©rieures. Mais le changement climatique apporte un dĂ©fi particulier : celui de pouvoir anticiper les phĂ©nomĂšnes climatiques. Câest pour cette raison que la comprĂ©hension de lâadaptation au changement climatique est un dĂ©fi critique de notre Ă©poque. Lâadaptation est ici conçue comme un phĂ©nomĂšne dynamique, comme un processus plutĂŽt que comme un statut. En effet, un individu ou une organisation peuvent ĂȘtre bien adaptĂ©s Ă un moment particulier dans lâhistoire, mais le dynamisme du changement climatique requiert une adaptation qui puissent co-Ă©voluer avec lui. Le changement climatique nâest plus une menace extĂ©rieure, mais un Ă©lĂ©ment intime de lâhistoire humaine, Ă la fois consĂ©quence et moteur des dĂ©cisions prises en matiĂšre de dĂ©veloppement par les individus, les organisations et les gouvernements. Ce qui suggĂšre quâil est nĂ©cessaire dâanticiper les impacts du changement climatique1 . Nous devons dĂšs aujourdâhui rĂ©flĂ©chir Ă la maniĂšre dâadapter notre sociĂ©tĂ© au changement climatique car, malgrĂ© les efforts pour rĂ©duire les Ă©missions de gaz Ă effet de serre, des changements profonds sont dĂ©sormais inĂ©luctables, du fait de la concentration actuelle de gaz Ă effet de serre dans lâatmosphĂšre et de lâinertie du systĂšme climatique2 . Lâadaptation Ă la variabilitĂ© et au changement climatique est dĂ©finie par le Groupe dâexperts Intergouvernemental sur lâEvolution du Climat (GIEC) comme « lâajustement des systĂšmes naturels ou humains en rĂ©ponse Ă des stimuli climatiques ou Ă leurs effets, afin dâattĂ©nuer les effets nĂ©fastes ou dâexploiter des opportunitĂ©s bĂ©nĂ©fiques »3 . En somme, 1 PELLING, Mark. Adaptation to climate change : from resilience to transformation. Londres : Routledge, 2011. 224 p. 2 Observatoire National sur les Effets du RĂ©chauffement Climatique. Lâadaptation de la France au changement climatique, rapport annuel au Premier Ministre et au Parlement, 2011. 3 Groupe dâexperts Intergouvernemental sur lâEvolution du Climat. TroisiĂšme rapport dâĂ©valuation, rapport du Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 5
7.
lâadaptation a pour
but de rĂ©duire la vulnĂ©rabilitĂ© Ă la variabilitĂ© climatique et au changement climatique. La vulnĂ©rabilitĂ© Ă la variabilitĂ© et au changement climatique est dĂ©finie par le GIEC comme « le degrĂ© auquel un systĂšme risque de subir ou dâĂȘtre affectĂ© nĂ©gativement par les effets nĂ©fastes des changements climatiques ». La vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique est la rencontre de lâexposition dâun territoire aux impacts du changement climatique et de la sensibilitĂ© dâune sociĂ©tĂ© telle quâelle ne peut empĂȘcher ces impacts de crĂ©er des dommages sociaux, Ă©conomiques ou environnementaux. La vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique est donc Ă la jonction entre des facteurs naturels et des facteurs anthropiques (Ă©conomiques, sociaux, culturels, politiques). Lâexposition correspond Ă la nature et au degrĂ© auxquels un systĂšme est exposĂ© Ă des variations climatiques significatives sur une certaine durĂ©e. Les variations du systĂšme climatique se matĂ©rialisent par des Ă©vĂ©nements extrĂȘmes tels que des inondations, des tempĂȘtes ainsi que lâĂ©volution des moyennes climatiques. La sensibilitĂ© au changement climatique fait rĂ©fĂ©rence Ă la proportion dans laquelle un Ă©lĂ©ment exposĂ© (collectivitĂ©, organisationâŠ) au changement climatique est susceptible dâĂȘtre affectĂ© favorablement ou dĂ©favorablement par la manifestation dâun alĂ©a. LâalĂ©a au sens large constitue un phĂ©nomĂšne, une manifestation physique ou une activitĂ© humaine susceptible dâoccasionner des dommages aux biens, des perturbations sociales et Ă©conomiques voire des pertes en vies humaines ou une dĂ©gradation de lâenvironnement4 . La vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique apparaĂźt donc comme le degrĂ© par lequel un systĂšme risque dâĂȘtre affectĂ© nĂ©gativement par les effets des changements climatiques sans pouvoir y faire face. En cas de pĂ©riode de forte chaleur, la vulnĂ©rabilitĂ© dâun territoire dĂ©pend de son degrĂ© dâexposition Ă lâaugmentation des tempĂ©ratures ; de ses caractĂ©ristiques socio-Ă©conomiques telles que la prĂ©sence de populations fragiles, les personnes ĂągĂ©es, par exemple, qui vont conditionner sa sensibilitĂ© Ă lâalĂ©a chaleur ; et de sa capacitĂ© dâadaptation, câest-Ă -dire des systĂšmes de prĂ©vention mis en place et de lâaccĂšs aux Ă©quipements dâurgence. Il existe deux types dâadaptation. La premiĂšre est rĂ©active ou spontanĂ©e, il sâagit dâune rĂ©action aux impacts du changement climatique aprĂšs quâils se soient produits. La seconde est anticipative et consiste Ă agir avant que les Ă©volutions climatiques ne se produisent, afin de rĂ©duire les vulnĂ©rabilitĂ©s des territoires. Dans ce dernier cas, il sâagit dâune adaptation qui rĂ©sulte de dĂ©cisions stratĂ©giques dĂ©libĂ©rĂ©es, fondĂ©es sur une Groupe de Travail II : « Impacts, Adaptation et VulnĂ©rabilitĂ© », 2001. 4 Agence de lâenvironnement et de la maĂźtrise de lâĂ©nergie. Diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© dâun territoire au changement climatique. ĂlĂ©ments mĂ©thodologiques tirĂ©s de lâexpĂ©rience internationale, 2012. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 6
8.
perception claire des
conditions qui pourront changer. Lâacceptation de la notion dâadaptation sâest dĂ©roulĂ©e en plusieurs Ă©tapes, avec des tensions et demeure encore floue. Elle fut dâabord le fruit dâun consensus scientifique, puis dâun consensus politique. Lâadaptation apparaĂźt formellement pour la premiĂšre fois dans le DeuxiĂšme rapport d'Ă©valuation du GIEC en 1995. Le rapport conclut en Ă©bauchant la portĂ©e du soutien nĂ©cessaire pour lâadaptation. Il soutient quâune adaptation efficace dĂ©pend de la disponibilitĂ© des ressources financiĂšres, du transfert de technologies, des pratiques culturelles, Ă©ducatives, managĂ©riales, institutionnelles, lĂ©gales, rĂ©glementaires intĂ©rieures et internationales. Ensuite lâadaptation entre dans le cadre des nĂ©gociations internationales sur le climat. Les annĂ©es 2000 ont vu la montĂ©e en puissance de la notion dâadaptation. Progressivement les gouvernements ont accordĂ© plus dâattention Ă lâanticipation des changements climatiques, face Ă lâincapacitĂ© de la communautĂ© internationale Ă adopter un accord international suffisamment contraignant pour limiter les Ă©missions de gaz Ă effet de serre, alimentant le changement climatique. En 2005, le Programme de travail de Nairobi est adoptĂ© pour aider les Ătats parties Ă la Convention Cadre des Nations Unies pour le changement climatique (CCNUCC), et surtout les pays en dĂ©veloppement, Ă amĂ©liorer leur comprĂ©hension et leur Ă©valuation des impacts et de leur vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique ainsi quâĂ prendre des dĂ©cisions avisĂ©es sur les actions et mesures concrĂštes dâadaptation. En 2009, la ConfĂ©rence des Parties de Copenhague reconnaĂźt la nĂ©cessitĂ© dâamĂ©liorer lâaction en matiĂšre dâadaptation pour rĂ©duire la vulnĂ©rabilitĂ© et construire une rĂ©silience dans les pays en dĂ©veloppement et surtout dans les pays les plus vulnĂ©rables. Enfin, en 2010, en crĂ©ant le Fonds Vert pour le Climat, la ConfĂ©rence des Parties de CancĂșn offre un vĂ©ritable cadre pour lâadaptation avec pour objectif de mettre en valeur lâaction en matiĂšre dâadaptation et un focus spĂ©cifique sur les pays en dĂ©veloppement, et pour inciter les pays les moins avancĂ©s (PMA) Ă formuler des plans dâadaptation nationaux (PANA). b) Adaptation et AttĂ©nuation : deux politiques pour lutter contre le changement climatique. Pour limiter les impacts nĂ©gatifs du changement climatique, on peut soit rĂ©duire les Ă©missions de gaz Ă effet de serre (attĂ©nuation), soit sâadapter aux changements du climat Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 7
9.
(adaptation). Ces deux
types de politiques climatiques nâont cependant pas Ă©tĂ© traitĂ©es de maniĂšre symĂ©trique, lâadaptation au changement climatique ayant Ă©tĂ© longtemps relĂ©guĂ©e au second plan dans le dĂ©bat sur le changement climatique. Ce dĂ©sĂ©quilibre traduit Ă la fois les difficultĂ©s que soulĂšve lâadaptation, comme le traitement de lâincertitude sur les impacts futurs du changement climatique, par exemple, et la volontĂ© dâesquiver la discussion sur lâadaptation, perçue par certains acteurs comme une solution infĂ©rieure, car nâagissant que sur les consĂ©quences du changement climatique et non sur ses causes, voire comme une solution dangereuse, car risquant de freiner la discussion sur lâattĂ©nuation5 . De fait, on oppose souvent la gouvernance de lâadaptation Ă celle de lâattĂ©nuation en considĂ©rant que lâadaptation, qui tente de rĂ©duire les consĂ©quences du changement climatique, est un enjeu de politique publique nationale alors que lâattĂ©nuation, qui agit sur les causes du changement climatique, serait le seul enjeu qui ne pourrait se rĂ©soudre que dans un cadre de coopĂ©ration internationale. A priori, les Ă©missions de gaz Ă effet de serre dâorigine anthropique contribuant au changement climatique Ă©tant produites par tous les pays, leur attĂ©nuation devrait passer par un effort collectif au niveau mondial. Et, le changement climatique ayant des impacts au niveau local, lâadaptation devrait se rĂ©soudre individuellement au niveau national. En rĂ©alitĂ©, chercher Ă rĂ©duire sa vulnĂ©rabilitĂ© individuellement Ă lâĂ©chelle nationale peut conduire Ă des formes de mal-adaptation sur son territoire comme au-delĂ des frontiĂšres. Pour sâadapter aux effets du changement climatique il peut alors devenir nĂ©cessaire de coopĂ©rer avec les autres pays. 2. Les barriĂšres Ă lâadaptation et les risques de mal-adaptation. Sâil est clair quâil faut commencer dĂšs maintenant Ă penser Ă adapter nos sociĂ©tĂ©s au changement climatique, il nâest pas question dâagir avec prĂ©cipitation, sinon cela 5 HALLEGATTE StĂ©phane, LECOCQ Franck, DE PERTHUIS Christian. Economie de lâadaptation au changement climatique, rapport du Conseil Economique pour le DĂ©veloppement Durable, 2010. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 8
10.
risquerait dâengendrer de
la « mal-adaptation ». Jared Diamond essaye de montrer dans ses travaux que lâadaptation spontanĂ©e des sociĂ©tĂ©s est insuffisante6 . On ne peut pas se contenter dâune adaptation rĂ©active. Il faut une adaptation prĂ©ventive et mĂȘme transformatrice. Câest dans ce sens que Mark Pelling analyse la dimension sociale de lâadaptation au changement climatique7 . Il tente de nous montrer que jusquâici lâadaptation a Ă©tĂ© pensĂ©e comme lâidentification de ce qui doit ĂȘtre prĂ©servĂ© et ce dont on peut se passer plutĂŽt que comme ce qui peut ĂȘtre rĂ©formĂ© et ce que lâon peut gagner grĂące Ă lâadaptation. Il nous prĂ©vient contre le fait que les politiques et pratiques de lâadaptation ne se rĂ©duisent Ă la recherche de la prĂ©servation dâun noyau Ă©conomique plutĂŽt que permettant dâencourager la prospĂ©ritĂ© des dĂ©veloppements culturels, sociaux aussi bien quâĂ©conomiques. Il sâagit de comprendre lâadaptation comme un acte social et politique, un acte particuliĂšrement contemporain, qui porte en lui la possibilitĂ© de donner une nouvelle forme au futur et aux relations de pouvoirs dans la sociĂ©tĂ©. Mark Pelling se rĂ©fĂšre Ă Paulo Freire8 qui nous met en garde sur le fait que sans une conscience critique, lâadaptation risque de ne se limiter quâĂ des efforts qui ne promeuvent que des actions pour survivre mieux avec, quâĂ chercher Ă changer les structures sociales et politiques. Ainsi la forme la plus Ă©vidente de mal-adaptation au changement climatique est une adaptation prenant la forme dâune rĂ©sistance Ă un nouvel Ă©vĂ©nement qui survient et, par la mĂȘme, dâune adaptation conservatrice en tant que volontĂ© de retour Ă un Ă©tat initial. La tentation de sâadapter Ă un changement de situation actuel sans penser Ă lâĂ©volution potentielle de cette situation sur le long terme est si forte et paraĂźt si naturel quâil convient dâadresser le problĂšme de la mal-adaptation. La mal-adaptation est dĂ©finie par le GIEC comme « un changement opĂ©rĂ© dans les systĂšmes naturels ou humains qui font face au changement climatique et qui conduit - de maniĂšre non intentionnelle - Ă augmenter la vulnĂ©rabilitĂ© au lieu de la rĂ©duire »9 . En ce sens, la mal-adaptation est une adaptation ayant eu lâeffet inverse que prĂ©vu. La mal-adaptation peut prendre plusieurs formes. Elle peut rĂ©sulter dâune utilisation inefficace de ressources comparĂ©e Ă dâautres options dâutilisation possibles. Câest le cas, 6 DIAMOND, Jared. Effondrement. Comment les sociĂ©tĂ©s dĂ©cident de leur disparition ou de leur survie, Paris, Gallimard, 2006. 7 op. cit. p.1 8 FREIRE, Paulo. Education for Critical Consciousness, 1969. 9 op. cit. p.1 Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 9
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par exemple, du
recours massif Ă la climatisation individuelle au lieu de lâinvestissement dans lâisolation. La mal-adaptation peut Ă©galement se prĂ©senter sous la forme dâune rĂ©duction de la marge dâadaptation future. Elle peut venir dâune erreur de calibrage, on parle alors de sous-adaptation. Cela se produit dans le cas de la construction dâune digue trop petite par rapport Ă lâaugmentation du niveau de la mer rĂ©sultant du changement climatique. Et la mal-adaptation est aussi un transfert incontrĂŽlĂ© de vulnĂ©rabilitĂ© dâun systĂšme Ă un autre, dâune pĂ©riode Ă une autre, dâun pays Ă un autre. Dans le cas de la mise en Ćuvre dâune coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour favoriser lâadaptation au changement climatique, le type de mal-adaptation qui nous intĂ©resse est celui du transfert de vulnĂ©rabilitĂ©. Câest dans cette perspective que Paul VergĂšs, prĂ©sident de lâObservatoire national sur les effets du rĂ©chauffement climatique (ONERC)10 , nous encourage Ă rĂ©flĂ©chir sur lâapport de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation au changement climatique : « Le transfert de vulnĂ©rabilitĂ© au-delĂ des frontiĂšres dâun Ătat nâest pas une option acceptable. Lâadaptation dâun territoire ne doit pas conduire Ă fragiliser ses voisins »11 . Puisque les frontiĂšres naturelles ne correspondent pas aux frontiĂšres politiques et que donc les bassins de risques dĂ©passent les frontiĂšres tracĂ©es par les Ătats, lâadaptation au changement climatique des rĂ©gions transfrontaliĂšres est un enjeu transnational. Câest pourquoi il est nĂ©cessaire dâintĂ©grer la dimension transfrontaliĂšre dans les projets dâadaptation au changement climatique. 3. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre : un type de solution pour Ă©viter la mal- adaptation. Selon la Mission OpĂ©rationnelle TransfrontaliĂšre (MOT), « la coopĂ©ration transfrontaliĂšre correspond aux relations de voisinage quâentretiennent les collectivitĂ©s territoriales et leurs groupements de part et dâautre des frontiĂšres. »12 De plus, le but principal de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est de rĂ©duire les effets nĂ©gatifs des frontiĂšres en tant que barriĂšres administratives, lĂ©gales et physiques, de traiter des problĂšmes 10 cf. annexe 1 â PrĂ©sentation des missions de lâONERC. 11 Observatoire National sur les Effets du RĂ©chauffement Climatique. Adaptation transfrontaliĂšre. La lettre aux Ă©lus, 2013. 12 Mission operationnelle transfrontaliere, Guide de la cooperation decentralisee transfrontaliere, juillet 2010. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 10
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communs et dâexploiter
des potentiels inexploitĂ©s. Ă travers la gestion conjointe de programmes et de projets, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est en charge dâune large gamme dâenjeux, incluant notamment lâamĂ©lioration de la gestion conjointe des ressources naturelles. De fait, si le changement climatique a des impacts sur les ressources naturelles communes aux rĂ©gions transfrontaliĂšres, les mesures dâadaptation qui en dĂ©coulent doivent Ă©galement faire lâobjet dâune coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Câest pourquoi la coopĂ©ration transfrontaliĂšre apparaĂźt comme un levier pour dĂ©bloquer des situations oĂč des rĂ©gions transfrontaliĂšres ne peuvent pas bien sâadapter en le faisant individuellement puisquâelles sont interdĂ©pendantes les unes des autres. Dans cette perspective, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre peut permettre, aux Ătats qui souhaitent sâadapter, dâĂ©viter le transfert de vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique, et de se dĂ©tourner dâune trajectoire menant Ă la mal-adaptation. Elle peut Ă©galement contribuer Ă ce que les pays coopĂ©rant se partagent lâeffort dâadaptation par la mutualisation des compĂ©tences. Et dans le meilleur des cas, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre peut ĂȘtre un levier pour que lâadaptation au changement climatique ne soit plus perçue comme une contrainte et quâelle permette mĂȘme de rĂ©colter des bĂ©nĂ©fices qui dĂ©passent le seul fait dâĂȘtre adaptĂ©. 4. Les justifications de la mĂ©thode de travail. De par ma formation pluridisciplinaire en sciences politiques jâai Ă©tĂ© amenĂ©e Ă rĂ©investir des connaissances et Ă utiliser des cadres de rĂ©flexion en provenance de diffĂ©rents enseignements. Ainsi ce mĂ©moire a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© selon une approche croisant la thĂ©orie des rĂ©gimes internationaux, les politiques publiques internationales, le droit international public, la sociologie des organisations internationales, les nĂ©gociations internationales sur le climat, la protection internationale de lâenvironnement et la coopĂ©ration dĂ©centralisĂ©e des collectivitĂ©s territoriales. Dâune part, la dĂ©marche avec laquelle jâai abordĂ© ce sujet de mĂ©moire est un travail de recherche sous forme d'analyse, accompli Ă partir de lâĂ©tude de diffĂ©rents articles, rapports et ouvrages en lien avec les thĂ©matiques de lâadaptation au changement climatique et de Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 11
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la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Dâautre
part, le stage que jâai effectuĂ© Ă lâONERC mâa permis dâavoir accĂšs Ă la plupart des donnĂ©es clĂ©s existantes aujourdâhui sur lâadaptation au changement climatique ; et grĂące au suivi de lâĂ©quipe de travail dans ses nombreuses et diverses missions, jâai eu lâopportunitĂ© dâobserver et de participer Ă la construction pratique de lâapproche nationale de lâadaptation au changement climatique. En effet, pendant toute la durĂ©e de mon stage, jâai pu assister Ă des sĂ©minaires, Ă des confĂ©rences, et Ă des rĂ©unions de travail informelles sur la thĂ©matique de lâadaptation. Par ailleurs, il mâa Ă©galement Ă©tĂ© permis de rencontrer la plupart des acteurs clĂ©s des politiques dâadaptation. La mĂ©thode utilisĂ©e pour rĂ©aliser ce mĂ©moire est donc dâallier Ă la fois des enseignements thĂ©oriques et empiriques. En outre, ce mĂ©moire Ă Ă©tĂ© lâoccasion de mobiliser le travail dâapprofondissement spĂ©cifique que jâai effectuĂ© dans le cadre de mon stage Ă lâONERC, Ă savoir : lâĂ©tude comparative des processus dâadaptation au changement climatique dans les pays europĂ©ens13 . La France Ă©tant un des pays les plus en avance dans son processus dâadaptation au changement climatique aujourdâhui et lâONERC Ă©tant le point focal de lâadaptation en France, il a semblĂ© judicieux de prendre pour point de dĂ©part lâĂ©tude de la coopĂ©ration en matiĂšre dâadaptation aux frontiĂšres de la France selon des axes complĂ©mentaires. Ceci implique dâexplorer Ă la fois le pourtour mĂ©tropolitain et les outre-mer afin de restituer au mieux la pluralitĂ© des enjeux dâadaptation en fonction de leurs lieux dâĂ©mergence. Par ailleurs, de lâanalyse des diffĂ©rents processus dâadaptation existant dans lâespace europĂ©en, que jâai menĂ©e dans le cadre de mon stage Ă lâONERC, ressort une diversitĂ© et une richesse de solutions possibles pour sâadapter au changement climatique, quâil a semblĂ© opportun de mettre Ă contribution pour dĂ©limiter le pĂ©rimĂštre gĂ©ographique de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en matiĂšre dâadaptation que je comptais traiter. De surcroĂźt, la pertinence de cette dĂ©marche est confortĂ©e par la pratique. En effet, la plupart des 13 Cf. Annexe 3 - Ătude comparĂ©e des processus dâadaptation au changement climatique dans les pays de lâespace europĂ©en (printemps 2014). Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 12
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rĂ©unions internationales dâĂ©changes
formelles et informelles sur lâadaptation auquel lâONERC participe sont principalement des rĂ©unions entre pays europĂ©ens, et qui plus est transfrontaliers, et semblent cristalliser depuis un certain temps une demande croissante dâaide Ă lâadaptation par mutualisation des compĂ©tences entre pays voisins. 5. ProblĂ©matique. Lâadaptation au changement climatique est aujourdâhui reconnue comme un enjeu de coopĂ©ration internationale puisquâelle vient dâĂȘtre mise Ă lâagenda politique de la CCNUCC au mĂȘme titre que lâattĂ©nuation. Cependant et puisque cette reconnaissance est rĂ©cente, tous les aspects de lâadaptation ne sont pas encore pris en compte. La mutualisation des compĂ©tences des acteurs de lâadaptation reste majoritairement affectĂ©e Ă lâaide au dĂ©veloppement tandis que la coopĂ©ration aux frontiĂšres des Ătats, comme option pour gĂ©rer un risque commun accentuĂ© par le changement climatique et les rĂ©percussions de ce risque dâun pays voisin Ă un autre, ne semble pas suffisamment Ă©tudiĂ©e, en regard de lâimportance que ce volet recouvre dans le processus dâadaptation. Cela peut sâexpliquer parce que lâadaptation elle-mĂȘme est encore un concept mal compris et que la plupart des pays ne sont pas suffisamment avancĂ©s dans lâĂ©laboration de leur stratĂ©gie et de leur plan dâadaptation pour comprendre lâintĂ©rĂȘt de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans le processus dâadaptation. Ceci pose problĂšme puisque, comme nous lâavons vu, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est nĂ©cessaire dans certains cas, dâune part pour se prĂ©munir dâun Ă©ventuel transfert de vulnĂ©rabilitĂ©s dâun pays Ă un autre, et dâautre part, pour que les coĂ»ts dâadaptation du pays qui choisit de sâadapter ne soient pas plus Ă©levĂ©s quâils ne le devraient parce que le pays voisin ne le fait pas, et donc pour Ă©viter que lâadaptation de certains pays ne se traduisent par une mal-adaptation dans un ou plusieurs autres pays. Si la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est une des clefs pour amĂ©liorer le processus dâadaptation au changement climatique, il sâagit alors de savoir comment dĂ©velopper ce type de coopĂ©ration et quels sont les obstacles Ă lâintĂ©gration de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans les processus dâadaptation. En effet, mĂȘme lorsque des pays rĂ©ussissent Ă se mettre dâaccord pour se lancer dans un projet de coopĂ©ration Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 13
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transfrontaliĂšre, ils ne
sây engagent pas forcĂ©ment pour les mĂȘmes raisons et ne mettent pas en avant les mĂȘmes prioritĂ©s, cette divergence pouvant alors devenir un obstacle Ă la coopĂ©ration. Câest pourquoi nous veillerons Ă ne pas nĂ©gliger les intĂ©rĂȘts et les attentes des diffĂ©rents acteurs quant Ă lâadaptation dans les projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre que nous Ă©tudierons. Toute la question Ă©tant de savoir dans quelle mesure la coopĂ©ration transfrontaliĂšre reprĂ©sente une opportunitĂ© pour sâadapter au changement climatique et de comprendre quels sont les moteurs et les freins Ă cette coopĂ©ration. Quel cadre serait alors propice pour que la coopĂ©ration transfrontaliĂšre soit intĂ©grĂ©e dans les processus dâadaptation et inversement comment mettre lâadaptation Ă lâagenda des initiatives de coopĂ©ration transfrontaliĂšre ? Certains projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour sâadapter au changement climatique fonctionnent bien, et ce, sans avoir eu recours Ă une convention de coopĂ©ration, qui nâest pas obligatoire, certes, mais est lâoutil de droit commun des collectivitĂ©s et autoritĂ©s locales pour les projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre ; tandis que dâautres projets, qui se sont dĂ©veloppĂ©s sous lâĂ©gide dâune convention ont des difficultĂ©s Ă engager des actions. Ceci pose la question de la pertinence des conventions, des traitĂ©s internationaux et donc des rĂ©gimes internationaux de coopĂ©ration pour engendrer ou venir en appui des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation. En effet, si les orientations stratĂ©giques dâadaptation ont une vocation strictement nationale et que la mise en Ćuvre des actions dâadaptation sâeffectue Ă lâĂ©chelon local, on peut se demander en quoi un rĂ©gime de coopĂ©ration international serait un cadre pertinent pour dĂ©velopper des projets dâadaptation au changement climatique. 6. HypothĂšses de recherche. Sur le plan scientifique, le changement climatique est un phĂ©nomĂšne mondial qui ne connaĂźt pas de frontiĂšres, et ce, mĂȘme si ses impacts sont et seront diffĂ©rents selon les pays. Par consĂ©quent Ă©tudier lâadaptation au changement climatique sous lâangle transfrontalier apparaĂźt appropriĂ©. Sur le plan Ă©thique, il apparaĂźt irrecevable de promouvoir des mesures dâadaptation pour protĂ©ger un pays des impacts du changement climatique si celles-ci ont des rĂ©percussions nĂ©fastes sur les pays voisins. Sur le plan Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 14
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Ă©conomique, il nâest
pas non plus rentable de mettre en Ćuvre des mesures dâadaptation qui nâauraient aucun effet ou qui auraient des rĂ©percussions nĂ©fastes dans dâautres pays puisque pour se prĂ©munir de telles consĂ©quences ces pays-lĂ auraient tĂŽt fait de renvoyer Ă leur tour le problĂšme vers son pays dâorigine. Ă lâinverse, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est un moyen dâĂ©viter des coĂ»ts supplĂ©mentaires dâadaptation dans le futur qui auraient Ă©tĂ© gĂ©nĂ©rĂ©s par une mal-adaptation dans le prĂ©sent. Sur le plan de lâactualitĂ©, lâUnion EuropĂ©enne vient de publier sa stratĂ©gie dâadaptation en avril 2013, offrant ainsi un cadre de pensĂ©e transnational Ă lâadaptation dont il semble opportun de se saisir pour faire pencher le dĂ©bat sur lâadaptation en direction de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre14 . Ce mĂ©moire vise Ă montrer toute lâimportance de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour amĂ©liorer le processus dâadaptation. Si, dâune part, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre permet Ă minima dâĂ©viter le transfert de vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique, et par lĂ mĂȘme permet de se dĂ©tourner dâune trajectoire menant Ă la mal-adaptation ; elle est, dâautre part, lâopportunitĂ© de se partager lâeffort dâadaptation et de jouer des compĂ©tences de chacun pour sâadapter si bien que certains secteurs pourront en rĂ©colter des bĂ©nĂ©fices. Pour toutes ces raisons une coopĂ©ration entre pays transfrontaliers en matiĂšre dâadaptation au changement climatique apparaĂźt nĂ©cessaire et opportune. 7. Plan du mĂ©moire. Tout dâabord, ce mĂ©moire va tenter de montrer la pertinence de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans le processus dâadaptation au changement climatique. Dans le premier chapitre, nous poserons le cadre gĂ©nĂ©ral de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Nous Ă©tudierons la coopĂ©ration transfrontaliĂšre Ă travers la thĂ©orie des rĂ©gimes internationaux. Nous montrerons la spĂ©cificitĂ© de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans lâespace europĂ©en. De plus, nous analyserons la place que peut recouvrir lâadaptation dans les initiatives de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Dans le second chapitre, nous nous appuierons sur trois Ă©tudes de cas, rĂ©alisĂ©es au 14 Ătant donnĂ© que les mesures dâadaptation au changement climatique sont souvent prises au niveau local, lâidĂ©e dâune adaptation transfrontaliĂšre ne va pas de soi. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 15
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travers dâentretiens semi-directifs
auprĂšs de personnes responsables ou impliquĂ©es dans des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. LâidĂ©e Ă©tant de confronter nos hypothĂšses avec des initiatives concrĂštes en matiĂšre de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation. Nous procĂ©derons de maniĂšre systĂ©matique par un diagnostic et une analyse des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans les rĂ©gions du bassin de la Meuse, de la mer MĂ©diterranĂ©e et de lâouest de lâocĂ©an Indien. Dans ce deuxiĂšme chapitre, nous avons choisi des Ă©tudes de cas reprĂ©sentant trois axes possibles et significatifs des formes que peut prendre la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation. Chacun des projets rĂ©pond Ă sa maniĂšre Ă une partie des dĂ©fis de lâadaptation au changement climatique. Lâanalyse de ces projets portera sur les difficultĂ©s et les opportunitĂ©s, les problĂšmes potentiellement ainsi que les Ă©cueils Ă©vitĂ©s par les acteurs au cours de ces initiatives de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation. Par ailleurs, le pĂ©rimĂštre gĂ©ographique, les acteurs et les enjeux de ces trois Ă©tudes de cas nâĂ©tant pas les mĂȘmes, il sâagira de tirer des enseignements de cette diversitĂ© dâoptions pour enrichir lâadaptation. Dans le troisiĂšme chapitre, nous tenterons dâillustrer lâidĂ©e que lâadaptation est un processus en devenir, loin dâĂȘtre achevĂ© et ouvert Ă lâinnovation, en mettant en lumiĂšre les diffĂ©rents types dâenseignements dont sont porteuses les trois Ă©tudes de cas. De plus, Ă©tant donnĂ© la diversitĂ© des acteurs et des approches qui façonne la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en matiĂšre dâadaptation, nous proposerons une gouvernance de lâadaptation transfrontaliĂšre sans pilote attitrĂ© encourageant la mutualisation des compĂ©tences. Enfin, nous montrerons lâinadĂ©quation de la recherche dâun modĂšle de rĂ©fĂ©rence en regard de la singularitĂ© des situations dâadaptation et du foisonnement de solutions existantes. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 16
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CHAPITRE 1 :
COOPĂRATION TRANSFRONTALIĂRE, UNE DIMENSION PERTINENTE POUR LâADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ? 1. Cadre gĂ©nĂ©ral de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Si les notions de coopĂ©ration transnationale et de coopĂ©ration transfrontaliĂšre sont souvent utilisĂ©es de maniĂšre interchangeable, la notion retenue pour cette Ă©tude est la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Câest la coopĂ©ration transfrontaliĂšre qui nous intĂ©resse car la notion de frontiĂšre Ă dĂ©passer quâelle recouvre est nĂ©cessaire Ă la comprĂ©hension de notre sujet sur lâadaptation au changement climatique. De plus, il ne peut sâagir de coopĂ©ration transnationale car, selon la terminologie de lâUnion EuropĂ©enne, le principe de la coopĂ©ration transnationale est dâorganiser des partenariats au sein de grandes rĂ©gions europĂ©ennes, concerne des macro-rĂ©gions et non pas des espaces frontaliers dâĂ©tendue limitĂ©e. La dĂ©finition que nous utiliserons est celle retenue dans le Guide de la coopĂ©ration dĂ©centralisĂ©e transfrontaliĂšre de la MOT selon laquelle « la cooperation transfrontaliere correspond aux relations de voisinage quâentretiennent les collectivites territoriales et leurs groupements de part et dâautre des frontieres. »15 Nous cherchons Ă montrer que la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est une dimension pertinente pour lâadaptation au changement climatique. LâidĂ©e est de partir du principe que lâĂ©tendue de territoire qui subit certains effets du changement climatique et qui donc doit ĂȘtre adaptĂ©e Ă celui-ci constitue un bassin de risques qui dĂ©passe les frontiĂšres des Ătats. Le bassin de risques Ă©tant dĂ©finit dans le guide gĂ©nĂ©ral de plan de prĂ©vention des risques16 comme une « entitĂ© gĂ©ographique homogĂšne soumise Ă un mĂȘme phĂ©nomĂšne 15 op. cit. p.7 16 MinistĂšre de l'Equipement, des Transports et du Logement, MinistĂšre de l'AmĂ©nagement du Territoire et de l'Environnement. Plans de prĂ©vention des risques naturels (PPR), Guide gĂ©nĂ©ral, ed. La Documentation française, 1999. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 17
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naturel », la
coopĂ©ration transfrontaliĂšre semble donc ĂȘtre le moyen de contourner les barriĂšres administratives formĂ©es par les frontiĂšres Ă©tatiques pour adapter ce type de territoire au changement climatique. Ătant donnĂ© que lâadaptation au changement climatique implique des actions transversales dans plusieurs domaines dâactivitĂ©s tels que la protection de lâenvironnement, la gestion de lâeau, la gestion du territoire, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation des bassins de risques au changement climatique peut prendre la forme ou avoir un impact sur la gestion intĂ©grĂ©e des ressources en eau des bassins transfrontaliers. En protĂ©geant les ressources en eau dâun bassin transfrontalier, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre permet de ce fait dâassurer la paix, la subsistance des populations qui y vivent, de contribuer a la securite regionale et au developpement economique. Dans cette perspective la coopĂ©ration transfrontaliĂšre apparaĂźt comme une opportunitĂ© pour permettre aux bassins transfrontaliers dâĂȘtre gĂ©rĂ©s de la mĂȘme façon que les bassins nationaux. Et ce dâautant plus que comme le rappelle le Conseil Mondial de lâeau il nâexiste aucune autorite internationale ou systeme judiciaire reconnu, pour arbitrer les litiges dans le secteur des hydro-systĂšmes transfrontaliers.17 La coopĂ©ration transfrontaliĂšre est, en tout cas, de plus en plus perçue comme la consĂ©quence logique dâune perspective intĂ©grĂ©e de la gestion des fleuves majeurs dâEurope. Cette tendance vers la coopĂ©ration entre les Ătats membres de lâUnion europĂ©enne est renforcĂ©e par les directives europĂ©ennes dans le domaine de lâeau, notamment la directive-cadre sur lâeau et la directive europĂ©enne sur les risques dâinondation. La directive-cadre sur l'eau, adoptĂ©e le 23 octobre 2000 par le Parlement europĂ©en, entrĂ©e en vigueur le 22 dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e, entend impulser une politique de l'eau plus cohĂ©rente, en posant le cadre europĂ©en d'une gestion et d'une protection des eaux par district hydrographique. La directive europĂ©enne relative Ă la gestion des inondations, entrĂ©e en vigueur le 26 novembre 2007, demande aux Ătats membres d'identifier et de cartographier les bassins hydrographiques et les zones cĂŽtiĂšres Ă risque et d'Ă©tablir des plans de gestion. Entre la premiĂšre et la deuxiĂšme directive une Ă©volution se dessine en faveur de la prise en compte du changement climatique dans la 17 Conseil mondial de lâeau. Bassins transfrontaliers. World Water Action, 2003, chap.3. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 18
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gestion intégrée des
bassins hydrographiques et donc potentiellement des bassins hydrographiques transfrontaliers. LâintĂ©rĂȘt dâĂ©tudier lâadaptation au changement climatique Ă travers la coopĂ©ration transfrontaliĂšre et non pas Ă travers une autre forme de coopĂ©ration est, dâune part, que les entitĂ©s territoriales frontaliĂšres semblent possĂ©der un meilleur degrĂ© dâadaptation aux processus de changement en cours puisquâelles montrent une tendance Ă coexister et interagir avec dâautres catĂ©gories et organisations dâacteurs internationales. En effet, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre se prĂ©sente comme une dynamique multi-niveaux oĂč diffĂ©rents systĂšmes lĂ©gaux se rencontrent : le droit international, le droit europĂ©en et les lois nationales. Dans cette perspective, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pourrait ĂȘtre un instrument potentiel du processus de « mainstreaming » de lâadaptation au changement climatique, câest-Ă -dire dâintĂ©gration de cette notion dans toutes les politiques publiques dĂ©jĂ existantes et Ă tous les niveaux de gouvernance. LâintĂ©rĂȘt dâavoir recours Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour porter des projets dâadaptation au changement climatique est, dâautre part, si lâon sâappuie sur lâanalyse du droit transnational que fait Anna Margherita Russo dans Perspectives on Federalism18 , publiĂ© en 2012, que cette forme de coopĂ©ration porte en elle des sources de lĂ©gislations en meilleure adĂ©quation avec lâĂ©volution des besoins lĂ©gaux actuels et futurs par rapport Ă la coopĂ©ration Ă©tatique traditionnelle. En effet, le phĂ©nomĂšne de globalisation a apportĂ© la crise de lâĂtat. La crise de lâĂtat a produit la fin du monopole dâĂtat sur les sources lĂ©gales applicables sur son propre territoire. Ce phĂ©nomĂšne a deux effets, dâune part, le droit national ne peut pas, complĂštement en tout cas, couvrir la rĂ©gulation des activitĂ©s sur le territoire Ă©tatique ; et dâautre part, il met en lumiĂšre lâimportance de nouveaux phĂ©nomĂšnes lĂ©gaux impliquant diffĂ©rentes organisations et institutions. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre se prĂ©senterait donc comme une alternative Ă la coopĂ©ration bilatĂ©rale dâĂtat Ă Ătat qui relĂšve plus dâune approche « top-down », câest-Ă -dire du haut vers le bas de la hiĂ©rarchie administrative. En effet, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre relĂšve plutĂŽt dâinitiatives locales, sont souvent le fait des collectivitĂ©s territoriales, et tĂ©moigne donc dâune approche 18 RUSSO, Anna Margherita, Globalization and Cross-border Cooperation in EU Law: A Transnational Research Agenda. Perspectives on Federalism, 2012, vol. 4, n°3. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 19
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« bottom-up »,
câest-Ă -dire du bas vers le haut de la hiĂ©rarchie administrative. En ce sens, il serait intĂ©ressant de considĂ©rer la coopĂ©ration transfrontaliĂšre comme une arĂšne de coopĂ©ration potentielle pour palier le vide lĂ©gislatif entre les actions et mesures dâadaptation au changement climatique au niveau national et local orientĂ©es par les stratĂ©gies et plans nationaux dâadaptation et les actions et mesures dâadaptation au changement climatique telles quâelles sont prĂ©vues par le rĂ©gime international de coopĂ©ration de la CCNUCC. 2. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre analysĂ©e Ă travers la thĂ©orie des rĂ©gimes internationaux. Afin dâobtenir une analyse intĂ©grĂ©e de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre, il sâagit dâen comprendre lâensemble des motivations, des rĂ©sultats attendus et les moyens mis en Ćuvre par les acteurs impliquĂ©s dans ces projets de coopĂ©ration. La thĂ©orie des rĂ©gimes internationaux nous apporte Ă cet Ă©gard un panel dâangles dâanalyse suffisant pour avoir une vision englobante des dynamiques qui sous-tendent la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. On peut catĂ©goriser les courants au sein de la thĂ©orie des rĂ©gimes de diffĂ©rentes façons. Pour notre analyse nous retiendrons quâil existe trois courants principaux : le courant rĂ©aliste, le courant libĂ©ral et le courant constructiviste. Au fondement de ces trois courants, on retrouve la mĂȘme notion de rĂ©gime international, dĂ©finie par Stephen Krasner comme « un ensemble de principes, de normes, de regles et de procedures de prise de decision, implicites ou explicites, autour desquelles les attentes des acteurs convergent dans un domaine specifique des relations internationales. Les principes sont les croyances dans les faits et les causes. Les normes sont des criteres de comportements definis en termes de droits et dâobligations. Les regles sont des prescriptions specifiques a partir desquelles on prend action. Les procedures de prise de decision sont les pratiques acceptees afin de creer et de mettre en Ćuvre un choix collectif. »19 La notion de rĂ©gime international fait donc rĂ©fĂ©rence Ă une forme de coopĂ©ration semi-institutionnelle. 19 KRASNER, Stephen. International Regimes, Ithaca, New York : Cornell University Press, 1983. 384 p. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 20
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Le courant realiste,
tient que la presence dâune « puissance hegemonique »20 est necessaire a la formation et a la persistance dâun regime. Charles Kindleberger a introduit le terme dâhĂ©gĂ©monie dans le champ des relations internationales et dans le champ de lâĂ©conomie politique Ă travers sa thĂ©orie de la stabilitĂ© hĂ©gĂ©monique. Dans The World in Depression: 1929â1939, publiĂ© en 1973, il montre que lâhĂ©gĂ©monie relĂšve de la capacitĂ©, pour la puissance dirigeante dâune pĂ©riode spĂ©cifique, de fournir les biens publics fondamentaux au niveau Ă©conomique international. Il cite en particulier le libre-Ă©change et un systĂšme monĂ©taire international stable comme deux biens publics particuliĂšrement prĂ©cieux Ă lâĂ©chelle internationale. Il considĂšre que le leader, tout en se montrant bienveillant, est aussi le seul Ă disposer de la puissance nĂ©cessaire pour assumer les coĂ»ts de fourniture de tels biens, mobiliser ses partenaires et leur imposer le respect des rĂšgles. Selon la thĂ©orie de la stabilitĂ©, la concentration de puissance en un Ătat dominant facilite le dĂ©veloppement des rĂ©gimes forts alors que la fragmentation de puissance est associĂ©e Ă lâeffondrement des rĂ©gimes. Les auteurs du courant rĂ©aliste considĂšrent lâĂtat comme lâunique acteur significatif dĂ©tenant la lĂ©gitimitĂ© politique. Le courant rĂ©aliste part du principe que lâĂ©tat normal des relations Ă©tatiques est un Ă©tat dâanarchie voire de guerre permanent, pense la politique extĂ©rieure des Ătats comme une politique de puissance dans une quĂȘte de sĂ©curitĂ© et perçoit les Ătats comme des acteurs rationnels qui cherchent Ă maximiser leur intĂ©rĂȘt national. Dans le courant rĂ©aliste, la coopĂ©ration prend la forme dâun marchandage dont la nĂ©gociation est lâoutil. Dans cette perspective, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est dĂ©finie comme le rĂ©sultat de la distribution ou de la redistribution des intĂ©rĂȘts et des ressources de chaque cĂŽtĂ© de la frontiĂšre. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre est donc dĂ©pendante de la complĂ©mentaritĂ© des ressources, des possibles Ă©changes et compromis au sein du domaine de politique publique pertinent21 . De ce point de vue, une coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour le dĂ©veloppement de projets dâadaptation au changement climatique peut voir le jour si lâinterdĂ©pendance des Ătats riverains dans la gestion intĂ©grĂ©e des bassins de risques transfrontaliers surpasse leur capacitĂ© Ă rĂ©soudre le problĂšme individuellement. Pour le courant liberal, la presence dâune puissance hegemonique nâest pas necessaire a la persistance dâun rĂ©gime car les Ătats et les autres acteurs peuvent sâorganiser afin de 20 KINDLEBERGER, Charles. The World in Depression: 1929â1939. University of California Press, 1973. 21 WIERING Mark, VERWIJMEREN Joris, LULOFS Kris, FELD Christian. Experiences in Regional Cross Border Co-operation in River Management. Comparing Three Cases at the Dutch-German Border. Water Resources Management, 2010, vol. 24, n°11. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 21
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creer un regime.
Selon lâapproche liberale, un regime est une autoregulation internationale dans laquelle des Ătats et dâautres acteurs internationaux cooperent afin de maximiser leurs gains ou minimiser leurs pertes. Le courant libĂ©ral part du principe que les Ătats sont soumis Ă des interdĂ©pendances complexes qui les poussent quasi inĂ©vitablement Ă coopĂ©rer. Puisque les Ătats sont poussĂ©s Ă coopĂ©rer, il sâagit de pouvoir prĂ©voir le comportement des autres Ătats et câest le rĂŽle des institutions internationales, des rĂ©gimes internationaux. En effet, selon Keohane, lâun des fondateurs de la thĂ©orie des rĂ©gimes avec Krasner, les rĂ©gimes internationaux « facilitent la coopĂ©ration en rĂ©duisant lâincertitude »22 . Les rĂ©gimes ont lâavantage de donner une structure relativement stable aux Ă©changes internationaux dans un secteur donnĂ©, de permettre aux acteurs de prĂ©voir leurs comportements respectifs et dâaccroĂźtre leur information mutuelle. Pour le courant libĂ©ral, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre est plus facilement Ă©tablie quand elle se dĂ©veloppe au sein dâun rĂ©gime international de coopĂ©ration23 . En effet, les rĂ©gimes internationaux serviraient Ă produire des normes et des valeurs communes et Ă encourager lâagrĂ©gation et lâintĂ©gration des intĂ©rĂȘts des Ătats riverains impliquĂ©s. Dans cette perspective, le dĂ©veloppement de projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation au changement climatique serait favorisĂ© par la mise en place dâun rĂ©gime international de coopĂ©ration spĂ©cifique Ă lâadaptation au changement climatique. Le courant constructiviste, quant Ă lui, souligne lâimpact des idĂ©es. Au lieu de prendre lâĂtat pour une donnĂ©e et de supposer quâil cherche tout simplement Ă survivre, les constructivistes considĂšrent les intĂ©rĂȘts et les identitĂ©s comme des produits extrĂȘmement mallĂ©ables de processus historiques spĂ©cifiques. Ils accordent une grande attention aux discours prĂ©dominants au sein des sociĂ©tĂ©s parce que le discours reflĂšte et façonne les croyances et les intĂ©rĂȘts, et Ă©tablit les normes du comportement acceptĂ©. Les normes qui prĂ©valent Ă la coopĂ©ration ne viennent pas seulement des Ătats mais peuvent aussi ĂȘtre produites par des rĂ©seaux de professionnels dotĂ©s dâune expertise scientifique dans des secteurs particuliers de politique publique internationale appelĂ©es communautĂ©s epistemiques transnationales. Selon lâapproche foucaldienne de la theorie des regimes, proche du constructivisme, de StĂ©phane Labranche, la persistance dâun rĂ©gime dĂ©pend de la croyance en sa lĂ©gitimitĂ© par les acteurs. Son hypothĂšse est que la persistance dans le temps dâun rĂ©gime « dĂ©pend non pas de la capacitĂ© dâune puissance hĂ©gĂ©monique Ă 22 KEOHANE, Robert. After Hegemony : Cooperation and Discord in the World Political Economy, Princeton University Press, 1984. 23 op. cit. p.19 Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 22
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imposer des rĂšgles
mais bien plutĂŽt de lâinternalisation, par ces acteurs, des valeurs et principes qui sous-tendent ces rĂšgles », et « permettrait dâexpliquer pourquoi et comment un rĂ©gime continue dâexister mĂȘme lorsque la puissance hĂ©gĂ©monique disparaĂźt, quâelle change, ou quâun rĂ©gime puisse apparaĂźtre Ă partir dâefforts dâacteurs non hĂ©gĂ©moniques. »24 Dans la thĂ©orie constructiviste, la croyance des acteurs impliquĂ©s dans le projet de coopĂ©ration transfrontaliĂšre joue un rĂŽle dans lâorientation de la prise de dĂ©cision. En effet, lâĂ©tude de la coopĂ©ration pour la lutte contre la pollution environnementale de la mer MĂ©diterranĂ©e et la formation du Plan dâAction pour la MĂ©diterranĂ©e (PAM) de Haas25 a montrĂ© que la distribution de la puissance entre les pays ou lâinfluence du pays prĂ©sumĂ© le plus fort de la rĂ©gion, dans ce cas la France, ne pouvait pas expliquer le dĂ©veloppement dâune coopĂ©ration. La coopĂ©ration dans la rĂ©gion a Ă©tĂ© dĂ» au fait que la communautĂ© Ă©pistĂ©mique transnationale de MĂ©diterranĂ©e partageait un savoir commun sur la pollution environnementale, des croyances et des objectifs communs qui ont Ă©tĂ© institutionnalisĂ©s dans des nouvelles institutions gouvernementales et intergouvernementales et qui ont pĂ©nĂ©trĂ© la prise de dĂ©cision de cette façon. Dans cette perspective, le dĂ©veloppement de projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation au changement climatique dĂ©pendrait du degrĂ© de connaissance des acteurs locaux sur lâadaptation au changement climatique et de leur capacitĂ© Ă diffuser un discours de sensibilisation aux enjeux de lâadaptation au changement climatique de telle sorte quâil soit institutionnalisĂ© et intĂ©grĂ© dans les politiques publiques dĂ©jĂ existantes. 3. Cadre juridique de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans lâespace europĂ©en. Nous faisons le choix dâĂ©tudier la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans lâespace europĂ©en car, dâune part, si la coopĂ©ration transfrontaliĂšre nâest pas restreinte Ă lâUnion europĂ©enne, câest dans cette enceinte de coopĂ©ration que la coopĂ©ration transfrontaliĂšre a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e Ă son maximum. Dâautre part, nous avons choisi dâĂ©tudier lâapport de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre Ă lâadaptation au changement climatique dans lâoptique dâamĂ©liorer le processus dâadaptation français portĂ© par lâONERC. Câest pourquoi le cadre 24 LABRANCHE, Stephane. La transformation des normes de participation et de durabilite en valeurs ? Reflexions pour la theorie des regimes. Ătudes Internationales, 2003, vol. 34, n°4, pp.611-629. 25 HAAS, Peter M. Saving the Mediterranean : the politics of international environmental co-operation. New York : Columbia University Press, 1990, op. cit. p.19 Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 23
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de coopération transfrontaliÚre
Ă©tudiĂ© est europĂ©en. Les premiĂšres formes de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre, qui nâont Ă©tĂ© reconnues juridiquement quâen 1980 au moyen d'une convention du Conseil de l'Europe, apparaissent dans l'immĂ©diat aprĂšs-guerre. Le rapprochement des collectivitĂ©s territoriales a Ă©tĂ© favorisĂ© par le dĂ©veloppement des Ă©changes Ă©conomiques, culturels ou sociaux entre les Ătats europĂ©ens. Le 21 mai 1980, des Ătats membres du Conseil de lâEurope signent la Convention-cadre europĂ©enne sur la coopĂ©ration transfrontaliĂšre des collectivitĂ©s et autoritĂ©s territoriales, dite Convention de Madrid. Les parties contractantes s'engagent Ă faciliter et Ă promouvoir la coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Elle est considĂ©rĂ©e comme l'acte fondateur du cadre juridique de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre des collectivitĂ©s et autoritĂ©s territoriales en Europe. La Convention a pour but d'encourager et de faciliter la conclusion d'accords entre rĂ©gions et communes, de part et d'autre d'une frontiĂšre, dans les limites de leurs compĂ©tences. De tels accords peuvent s'Ă©tendre, entre autres, au dĂ©veloppement rĂ©gional, Ă la protection de l'environnement, Ă l'amĂ©nagement des infrastructures et des services publics, etc. Pour tenir compte de la variĂ©tĂ© des systĂšmes juridiques et constitutionnels des Ătats membres du Conseil de l'Europe, la Convention offre toute une gamme d'accords modĂšles permettant aux collectivitĂ©s locales et rĂ©gionales ainsi quâaux Ătats de placer la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans le cadre qui leur convient le mieux. En 1990, la Commission europĂ©enne met sur pied la premiĂšre gĂ©nĂ©ration de programmes Interreg de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Interreg est un programme europĂ©en visant Ă promouvoir la coopĂ©ration entre les rĂ©gions europĂ©ennes et le dĂ©veloppement de solutions communes dans les domaines du dĂ©veloppement urbain, rural et cĂŽtier, du dĂ©veloppement Ă©conomique et de la gestion de lâenvironnement. Il est financĂ© par le Fonds europĂ©en de dĂ©veloppement rĂ©gional (FEDER) Ă hauteur de 7,75 milliards d'euros. L'actuel programme se dĂ©nomme Interreg IV, il couvre la pĂ©riode 2007-2013. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre, câest-Ă -dire, le dĂ©veloppement rĂ©gional intĂ©grĂ© entre rĂ©gions transfrontaliĂšres est lâune des trois composantes du programme Interreg. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 24
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Les financements Interreg
permettent le dĂ©veloppement de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre, mais arrivent aussi souvent sur un terrain oĂč la collaboration locale existent dĂ©jĂ depuis longtemps. Lâinitiative Interreg a ete mise en Ćuvre pour desenclaver les regions frontalieres. La Commission europeenne stipule en effet que les regions frontalieres sont penalisees par un double isolement : isolement par rapport aux regions frontalieres limitrophes, et isolement par rapport a leur propre espace national dont elles sont une peripherie. Dans lâobjectif thĂ©matique n°3 « coopĂ©ration territoriale europĂ©enne » de la pĂ©riode de programmation 2007-2013, lâaide consacrĂ©e Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre se concentre selon les termes du rĂšglement FEDER sur « le dĂ©veloppement dâactivitĂ©s Ă©conomiques, sociales et environnementales transfrontaliĂšres au moyen de stratĂ©gies conjointes en faveur du dĂ©veloppement territorial durable ». La coopĂ©ration transfrontaliĂšre a vu un Ă©largissement des zones de coopĂ©ration par rapport Ă lâancien Interreg III, en particulier en ce qui concerne la coopĂ©ration maritime, du fait de lâapplication de la rĂšgle des 150 km. Cet Ă©largissement touche notamment les territoires riverains de la Manche ainsi que lâoutre-mer pour la coopĂ©ration transfrontaliĂšre de la France. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre ne constitue en aucun cas une compĂ©tence supplĂ©mentaire pour les collectivitĂ©s territoriales. Ces derniĂšres ne peuvent coopĂ©rer que dans les limites des compĂ©tences qui leur sont attribuĂ©es par leurs lĂ©gislations nationales. Elles sont par ailleurs obligĂ©es de respecter les engagements internationaux pris par leurs Ătats nationaux respectifs. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre reprĂ©sente en revanche pour les collectivitĂ©s une opportunitĂ© supplĂ©mentaire d'utiliser leurs compĂ©tences. Pour coopĂ©rer au travers des frontiĂšres, les collectivitĂ©s locales et leurs groupements peuvent sâappuyer sur diffĂ©rentes bases juridiques nationales, europĂ©ennes et internationales, qui dĂ©finissent autant dâoutils de coopĂ©ration. Dans de nombreux Ătats, les collectivitĂ©s territoriales peuvent signer des conventions de coopĂ©ration ou crĂ©er des organismes de coopĂ©ration, parfois dotĂ©s de la personnalitĂ© juridique. Ces organismes, dĂ©crits dans le chapitre suivant, peuvent notamment dĂ©couler des accords signĂ©s dans le Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 25
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cadre du Conseil
de l'Europe ou du droit de l'Union europĂ©enne. Chaque projet transfrontalier sâinscrit dans un cadre juridique et opĂ©rationnel qui lui est propre, en fonction de la nature des partenaires concernĂ©s de part et dâautre de la frontiĂšre, de la thĂ©matique concernĂ©e et du type dâaction envisagĂ©. Selon la typologie Ă©tablie par la MOT26 , les collectivitĂ©s locales peuvent avoir recours Ă deux types de projets opĂ©rationnels : les projets transfrontaliers immatĂ©riels et les projets transfrontaliers dâinvestissement. Les projets transfrontaliers immatĂ©riels correspondent Ă des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre sans rĂ©alisation dâinvestissements publics, soit tout projet transfrontalier qui ne sâappuie pas sur des investissements matĂ©riels des partenaires. Il sâagit par exemple de la gestion dâun institut de formation transfrontalier. Un projet transfrontalier dâinvestissement peut, quant Ă lui, prendre la forme dâun Ă©quipement transfrontalier en matiĂšre de traitement de lâeau, par exemple. 4. Quelle place pour lâadaptation dans les initiatives de coopĂ©ration transfrontaliĂšre ? Au-delĂ dâun traitement national et local, les actions transfrontaliĂšres dans le domaine du changement climatique ont une vraie valeur ajoutĂ©e car les effets du changement climatique ne connaissent pas de frontiĂšre. Il est essentiel dâapporter une rĂ©ponse transfrontaliĂšre Ă ces dĂ©fis, dĂšs lors que les enjeux dĂ©passent les frontiĂšres et dans la mesure oĂč la situation dâun pays peut affecter celle de ses voisins. Ainsi, les territoires transfrontaliers pourraient devenir des espaces de gestion commune et de mutualisation de moyens dans le domaine de lâadaptation au changement climatique. Le livre blanc intitulĂ© « Adaptation au changement climatique : vers un cadre dâaction europĂ©en »27 , qui Ă©tablit le cadre dĂ©fini par lâUnion europĂ©enne en matiĂšre dâadaptation aux changements climatiques, et la stratĂ©gie europĂ©enne dâadaptation publiĂ©e en avril 2013 fournissent un premier cadre juridique sur lequel la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour 26 op. cit. p.7 27 cf. Annexe 2 â La dĂ©marche dâadaptation de lâUnion EuropĂ©enne. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 26
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lâadaptation au changement
climatique peut sâappuyer. Pour la pĂ©riode 2014-2020, les programmes financĂ©s par les fonds europĂ©ens, et notamment ceux de coopĂ©ration territoriale, peuvent soutenir des actions dans ce domaine en vertu de lâobjectif thĂ©matique n°5 « Promouvoir lâadaptation aux changements climatiques, ainsi que la prĂ©vention et la gestion des risques ». Lâadaptation aux changements climatiques ainsi que la prĂ©vention et la gestion des risques sont parmi les prioritĂ©s des politiques europĂ©ennes, au titre du pilier « croissance durable » de la StratĂ©gie Europe 2020, dont lâun des cinq objectifs est relatif au changement climatique et aux Ă©nergies durables. Au-delĂ des projets de coopĂ©ration sectoriels, lâadaptation au changement climatique nĂ©cessite une approche globale Ă lâĂ©chelle des territoires, que ce soit pour maĂźtriser la mobilitĂ© par des politiques coordonnĂ©es dâurbanisme et de transports ou pour concilier le dĂ©veloppement Ă©conomique avec la prĂ©servation de lâenvironnement, par exemple. Etant donnĂ©e que lâadaptation au changement climatique ne constitue pas une politique publique spĂ©cifique en soi et quâelle a vocation Ă sâintĂ©grer dans les politiques publiques rĂ©gissants des domaines dâactivitĂ©s dĂ©jĂ en place, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans ce domaine nĂ©cessitera dâĂ©tablir des synergies entre les actions en faveur de lâadaptation au changement climatique et de la gestion des risques avec celles dĂ©veloppĂ©es dans le domaine de la protection de lâenvironnement, de lâinnovation, de lâĂ©nergie, du dĂ©veloppement Ă©conomique, et des transports, autres objectifs de coopĂ©ration territoriale pour la pĂ©riode 2014-2020. Toutefois, mĂȘme si la coopĂ©ration transfrontaliĂšre apparaĂźt comme une opportunitĂ© pour lâadaptation au changement climatique, elle nâen est pas moins au dĂ©part un facteur de complexitĂ© et de coĂ»ts supplĂ©mentaires pour les collectivitĂ©s territoriales. En effet, le manque ou lâhĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des donnĂ©es statistiques, lâabsence dâĂ©tudes transfrontaliĂšres ; la mĂ©connaissance des acteurs, des lĂ©gislations et des modes de gestion de part et dâautre de la frontiĂšre; la disparitĂ© des compĂ©tences ; lâabsence de rĂ©fĂ©rentiels, de mĂ©canismes de concertation et dâoutils de gestion collective ; le manque de participation de la population ; et lâintĂ©rĂȘt trĂšs variable des Ă©lus pour lâadaptation au changement Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 27
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climatique peuvent entraver
la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans ce domaine. Cependant, AurĂ©lia Aebischer et StĂ©phane La Branche ont montrĂ© dans leurs travaux sur la coopĂ©ration transfrontaliĂšre autour du lac LĂ©man que les grandes diffĂ©rences entre les systĂšmes politiques français et suisse nâont pas empĂȘchĂ© la mise en place dâun rĂ©gime de cooperation et le manque dâharmonisation nâa pas constitue un obstacle a la cooperation transfrontaliere28 . De la mĂȘme maniĂšre, il est permis de penser que, pour les trois Ă©tudes de cas retenues dans ce mĂ©moire, les diffĂ©rences politiques ne seront pas un obstacle Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation au changement climatique. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation aux changements climatiques nĂ©cessite, comme le recommande la MOT, « la pleine association des citoyens, qui doivent ĂȘtre sensibilisĂ©s, informĂ©s, voire formĂ©s, et associĂ©s Ă la gestion de lâespace commun, de ses coĂ»ts et de ses bĂ©nĂ©fices, directement et au travers de lâaction conjointe de leurs Ă©lus. »29 De nombreux types dâaction sont a priori mobilisables pour dĂ©velopper des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre tournĂ©s vers lâadaptation au changement climatique. On pourrait envisager par exemple de se fixer des stratĂ©gies et des plans dâadaptation aux changements climatiques au niveau transfrontalier, de crĂ©er des bases de connaissance et de renforcer les capacitĂ©s dâobservation des donnĂ©es climatiques Ă lâĂ©chelle des bassins transfrontaliers, de dĂ©velopper des mĂ©canismes pour lâĂ©change dâinformations de part et dâautre de la frontiĂšre touchant Ă lâadaptation au changement climatique ou Ă la gestion des risques et de rĂ©investir les outils et systĂšmes de gestion des situations de catastrophe pour lâadaptation au changement climatique comme les systĂšmes de dĂ©tection et dâalerte prĂ©coces, la cartographie et lâĂ©valuation des risques. Nous verrons dans la partie suivante quels types dâaction les acteurs des diffĂ©rents projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre ont effectivement utilisĂ©s pour promouvoir lâadaptation au changement climatique. 28 AEBISCHER AurĂ©lia, LABRANCHE StĂ©phane. Les espaces tiers dans les rĂ©gimes internationaux. Le cas du Lac LĂ©man. Ătudes Internationales, 2007 vol 38, n°2. 29 Site web de la Mission opĂ©rationnelle transfrontaliĂšre, thĂšme «Changement climatique, gestion et prĂ©vention des risques» : http://www.espaces-transfrontaliers.org/ressources/themes/changement- climatique-gestion-et-prevention-des-risques/changement-climatique-risques-2/ Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 28
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CHAPITRE 2 :
APPROCHE EMPIRIQUE DE LA COOPĂRATION TRANSFRONTALIĂRE POUR LâADAPTATION Ă TRAVERS TROIS ĂTUDES DE CAS. Ă partir de rĂ©fĂ©rences bibliographiques et dâentretiens tĂ©lĂ©phoniques avec les personnes directement en charge ou impliquĂ©es dans les projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre qui ont promu lâadaptation au changement climatique dans le bassin de la Meuse, autour de la mer MĂ©diterranĂ©e et dans lâouest de lâOcĂ©an Indien, jâentends dresser, pour chacune des sections correspondantes, un diagnostic et une analyse de facteurs favorisant ou entravant la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en matiĂšre dâadaptation au changement climatique. Le diagnostic de la premiĂšre partie exposera la vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique des diffĂ©rents pays impliquĂ©s dans les projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Pour ce faire, je compte mâappuyer sur la dĂ©finition de diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique de lâAgence de lâenvironnement et de la maĂźtrise de lâĂ©nergie (Ademe). LâAdeme dĂ©finit le diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© comme ce qui « permet dâidentifier et de distinguer les signes observables dâune dĂ©faillance et dâun problĂšme ou sa cause et origine » et le diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© au changement climatique comme ce qui par permet, Ă la fois « dâĂ©valuer qualitativement la vulnĂ©rabilitĂ© dâune organisation, dâune structure ou dâun territoire aux risques liĂ©s au changement climatique en Ă©tudiant notamment son exposition et sa sensibilitĂ© » et « de hiĂ©rachiser ce niveau de vulnĂ©rabilitĂ© liĂ©s au diffĂ©rents impacts, par rapport Ă lâampleur des consĂ©quences et Ă la probabilitĂ© dâoccurrence de ses impacts. »30 Lâanalyse de facteurs favorisant ou entravant la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en matiĂšre dâadaptation au changement climatique de la seconde partie se concentrera sur les opportunitĂ©s et les barriĂšres Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en matiĂšre dâadaptation au changement climatique ainsi que les rĂ©ussites issues des projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre qui ont promu lâadaptation au changement climatique et relĂšvera les pistes dâamĂ©lioration possibles pour ces projets. 30 Agence de lâenvironnement et de la maĂźtrise de lâĂ©nergie. Diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© dâun territoire au changement climatique. ĂlĂ©ments mĂ©thodologiques tirĂ©s de lâexpĂ©rience internationale, 2012. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 29
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Section 1 :
Le bassin de la Meuse 1. Diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© menant Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour sâadapter au changement climatique. a) Le constat dâune vulnĂ©rabilitĂ© actuelle et de futurs impacts en prĂ©vision. La Meuse est un fleuve navigable transnational dâEurope du Nord-Ouest long de 950 km et reprĂ©sente une zone densĂ©ment peuplĂ©e dâenviron 9 millions dâhabitants. Le bassin hydrologique ou bassin versant de la Meuse a une superficie de 36 000 km2, dont un tiers en RĂ©gion wallonne, et sâĂ©tend sur cinq Ătats : la Belgique, la France, lâAllemagne, le Luxembourg et les Pays-Bas. Son dĂ©bit varie considĂ©rablement selon les saisons : 3100 m3/s en hiver Ă la frontiĂšre Pays-Bas/Wallonie, seulement 10-40 m3/s l'Ă©tĂ©. Principalement alimentĂ© par les pluies, il n'a pas de glacier et peu de nappes phrĂ©atiques pour amortir les Ă©carts de prĂ©cipitations. Un lien direct existe donc entre lâĂ©volution des prĂ©cipitations et les variations de dĂ©bits maximaux et minimaux. De nombreux enjeux sont menacĂ©s dont des infrastructures et industries majeures, d'inestimables hĂ©ritages historiques et Ă©cologiques. Les berges du fleuve Meuse constituent un secteur vulnĂ©rable aux inondations, avec des enjeux importants en termes de population et d'industries installĂ©es dans ce bassin versant. La Meuse nâest pas toujours perçue de la mĂȘme façon par les pays riverains. Abusivement, la Meuse est souvent considĂ©rĂ©e comme une riviĂšre affluente du Rhin et non un fleuve en lui-mĂȘme. En particulier, elle ne fait pas partie des grands fleuves français enseignĂ©s Ă l'Ă©cole primaire en France peut-ĂȘtre car elle n'y fait que la moitiĂ© de son parcours total. Par contre, en Belgique et aux Pays-Bas, elle est considĂ©rĂ©e comme un fleuve important car elle sert au transport de marchandises et a façonnĂ© l'histoire et la gĂ©ographie de ces pays. Si la Meuse nâa pas la mĂȘme importance pour tous les pays câest sans doute parce quâelle Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 30
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ne les traverse
pas tous de la mĂȘme façon. La perception du fleuve nâest pas la mĂȘme que lâon se situe en amont ou en aval du fleuve, selon la distance parcourus dans un pays et selon la nature des zones traversĂ©es. La Meuse prend sa source en France, puis traverse la Belgique, pour arriver Ă son embouchure aux Pays-Bas, et enfin se jeter dans la mer du Nord. ParallĂšlement, les affluents de la Meuse traverse lâAllemagne et le Luxembourg. La Belgique est donc le pays le plus traversĂ© par le fleuve Meuse qui y assure de nombreuses fonctions. Il traverse la rĂ©gion naturelle de lâArdenne, l'ancien bassin houiller wallon dans la province de LiĂšge, puis il contribue au refroidissement de la centrale nuclĂ©aire de Tihange, ensuite il longe les installations sidĂ©rurgiques de Seraing, un peu avant Herstal, ses eaux sont utilisĂ©es pour alimenter le Canal Albert, et de Namur Ă VisĂ©, il sert Ă la production d'Ă©lectricitĂ© avec six centrales hydroĂ©lectriques. Le fleuve semble Ă©galement jouer un rĂŽle dans la richesse du milieu naturel de la partie nĂ©erlandaise puisquâelle contient quarante-trois zones classĂ©es Natura 2000, une zone pour les eaux conchylicoles, cent trente-quatre lieux de baignades, cinq plans dâeau de surface, et trois masses dâeau souterraines qui sont destinĂ©es Ă lâalimentation en eau potable. b) Une coopĂ©ration transfrontaliĂšre de longue date. Cependant, malgrĂ© les divergences de perception, la coopĂ©ration transfrontaliĂšre existe depuis longtemps entre les Ătats du bassin de la Meuse. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans le bassin de la Meuse existe depuis 1994 avec la signature Ă Charleville-MĂ©ziĂšres de lâAccord concernant la protection de la Meuse. Depuis 1995, la RĂ©gion flamande et les Pays-Bas coopĂšrent pour rĂ©guler la distribution de lâeau durant les pĂ©riodes dâĂ©tiages. Depuis 1998, les pays du bassin de la Meuse se sont engagĂ©s avec un Plan dâAction Inondations Meuse. LâAccord international sur la Meuse, dit « Accord de Gand » a Ă©tĂ© signĂ© en 2002 par la Belgique, la France, le Grand-DuchĂ© de Luxembourg, les Pays-Bas et lâAllemagne et est entrĂ© en vigueur le 1er dĂ©cembre 2006. L'objectif de l'accord est d'arriver Ă une gestion durable et globale de l'eau du district hydrographique de la Meuse. Cet accord est fondamental pour la prise en compte de lâadaptation dans les projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre puisquâil crĂ©e la Commission Internationale de la Meuse (CIM), Ă lâorigine du lancement du projet AMICE. Le projet AMICE a en effet Ă©tĂ© initiĂ© Ă partir des rĂ©sultats des Ă©tudes rĂ©alisĂ©es sur les changements climatiques futurs et Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 31
33.
synthétisées dans «
Les consĂ©quences du changement climatique sur les dĂ©bits du fleuve Meuse », sous lâimpulsion de la Commission Internationale de la Meuse en 2005. Les rĂ©sultats de ces Ă©tudes ont montrĂ© que dâici Ă 2050 ou 2100, le bassin versant risque de subir fortement les effets du changement climatique. Il y aurait une augmentation de la frĂ©quence des inondations en hiver, une augmentation des Ă©tiages, plus probablement dus Ă une hausse de la demande en eau qu'Ă une hausse des tempĂ©ratures, avec notamment une diminution globale des prĂ©cipitations saisonniĂšres pouvant aller jusqu'Ă -39% en Ă©tĂ© pour la pĂ©riode 2071-2100. Les rĂ©sultats de cette Ă©tude ont Ă©galement mis en avant le besoin de s'accorder sur les scĂ©narios et dâexaminer conjointement les effets d'une meilleure coordination des politiques de gestion de l'eau pour la rĂ©gulation et la gestion des crues et pour anticiper les potentiels conflits dâusage de lâeau en pĂ©riode dâĂ©tiage, par exemple. Ă partir de ces rĂ©sultats, les partenaires dâAMICE ont souhaitĂ© sâengager dans un projet de coopĂ©ration transfrontaliĂšre devant conduire Ă une stratĂ©gie d'adaptation, via les scĂ©narios de changement climatique et de dĂ©bits Ă©tablis pour le bassin versant. c) Le projet AMICE. AMICE constitue le sigle pour « Adaptation of the Meuse to the Impacts of Climate Evolutions ». Le point de dĂ©part de la rĂ©flexion qui a abouti au lancement du projet AMICE a Ă©tĂ© la prise de conscience du dĂ©calage entre lâexistence de stratĂ©gies dâadaptation au niveau national et lâabsence de concertation au niveau transnational sur la question. Les partenaires dâAMICE se sont lancĂ©s dans ce projet plutĂŽt dans lâoptique dâapporter des solutions que dâĂ©viter le transfert de vulnĂ©rabilitĂ©s dâun pays Ă un autre31 . Lâadaptation au changement climatique est rapidement apparu comme lâenjeu le plus important Ă traiter pour les partenaires. Le projet AMICE a Ă©tĂ© lancĂ© Ă lâinitiative de lâĂtablissement public dâamĂ©nagement de la Meuse et de ses affluents (EPAMA), le 5 dĂ©cembre 2008 pour une pĂ©riode de mise en 31 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 32
34.
Ćuvre de trois
ans de 2009 Ă 2012. Il a Ă©tĂ© financĂ© par le programme INTERREG IV B Europe du Nord-Ouest, son budget total sâĂ©levait Ă 8,9 millions dâeuros (2,8 millions dâeuros de la part du FEDER et 6,1 millions dâeuros de la part des autoritĂ©s locales, rĂ©gionales et nationales, des agences et associations de lâeau). Le projet compte dix-sept partenaires dont trois français, huit belges, trois allemands, trois nĂ©erlandais. Le dĂ©fi principal auquel le projet a souhaitĂ© rĂ©pondre Ă©tait de savoir comment concevoir de nouvelles structures de gestion de lâeau capables de traiter des inondations, de la sĂ©cheresse et de lâaugmentation de la demande en eau, de maniĂšre intĂ©grĂ©e. Les objectifs visĂ©s ont Ă©tĂ© de dĂ©finir une stratĂ©gie d'adaptation commune aux impacts du changement climatique sur les inondations et la sĂ©cheresse, reconnue Ă lâĂ©chelle du bassin fluvial international de la Meuse; de mettre en place un dispositif de mesures bĂ©nĂ©fiques et transfĂ©rables Ă lâensemble du bassin de la Meuse; de renforcer et Ă©largir le partenariat des acteurs dans le bassin international de la Meuse ; et dâimpliquer la population et les autoritĂ©s publiques Ă travers une meilleure connaissance des enjeux et le dĂ©veloppement dâun sentiment dâappartenance au bassin de la Meuse et dâune prise de conscience des risques dâinondations et de sĂ©cheresse. Les moyens dĂ©ployĂ©s pour atteindre ces objectifs ont Ă©tĂ© de rĂ©unir les partenaires du projet autour de cinq modules thĂ©matiques de travail; de rĂ©aliser une Ă©tude du comportement hydrologique actuel et futur du bassin, et de dĂ©terminer les caractĂ©ristiques prĂ©vues des inondations, ainsi que les mesures de gestion des eaux de crue qui doivent ĂȘtre prises; de dĂ©finir des scĂ©narios, partagĂ©s Ă lâĂ©chelle du bassin international, en lien avec le changement climatique; de rĂ©aliser la premiĂšre simulation hydraulique du fleuve et des cartes de risques associĂ©es; et dâidentifier des points chauds, câest-Ă -dire des secteurs et des usages de lâeau menacĂ©s par les futures inondations et pĂ©riodes de sĂ©cheresse. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 33
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2. Analyse des
facteurs de coopĂ©ration transfrontaliĂšre favorisant ou entravant la promotion de lâadaptation au changement climatique. a) OpportunitĂ©s. Le contexte de coopĂ©ration a Ă©tĂ© un Ă©lĂ©ment favorable pour le lancement du projet et qui a par lĂ -mĂȘme contribuĂ© Ă la prise en compte de lâadaptation dans la rĂ©gion. Le bassin versant de la Meuse Ă©tait dĂ©jĂ perçu par les partenaires dâAMICE comme un bassin international au moment de la construction du projet, du fait dâune coopĂ©ration de longues dates entre les diffĂ©rentes agences de lâeau. La perception de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans la rĂ©gion est un autre Ă©lĂ©ment qui a facilitĂ© le lancement du projet et son bon fonctionnement. La coopĂ©ration transfrontaliĂšre apparaĂźt dĂšs le dĂ©but du projet comme Ă©vidente : les partenaires dâAMICE issus de tous les pays partagent une vision de la Meuse comme un bien commun et une passion commune. La plupart dâentres eux sont mĂȘme nĂ©s dans une ville au bord de la Meuse expliquant sans doute cet attachement profond au fleuve. Le choix des acteurs a Ă©tĂ© Ă©galement crucial dans le bon dĂ©roulement du projet. Si le projet a aussi bien fonctionnĂ© câest en effet en partie parce que les partenaires dâAMICE possĂ©daient une expĂ©rience de terrain et une bonne connaissance du bassin versant de la Meuse32 . Lâorganisation des rĂ©unions de travail telles quâelle sâest dĂ©roulĂ©e durant le projet a Ă©tĂ© une opportunitĂ© pour faciliter la prise en compte de lâadaptation au changement climatique. En effet, la volontĂ© de dĂ©cloisonnement entre les groupes de travail thĂ©matiques (au moins un partenaire de chaque pays par groupe de travail) a sans doute crĂ©Ă© un cadre favorable aux Ă©changes. Le projet a bĂ©nĂ©ficiĂ© dâun cadre intellectuel et politique favorable Ă la prise en compte de lâadaptation au changement climatique33 . En effet, la publication de projections 32 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. 33 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 34
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régionalisées et du
QuatriĂšme rapport dâĂ©valuation du GIEC en 2007, offrant un meilleur accĂšs aux donnĂ©es climatiques ainsi que la mĂ©diatisation internationale qui sâest portĂ©e sur le changement climatique et la reconnaissance de lâadaptation Ă la confĂ©rence de Copenhague en 2009 ont coĂŻncidĂ© avec le dĂ©but de la pĂ©riode de mise en Ćuvre du projet. Le Programme INTERREG IV B de lâUnion EuropĂ©enne est apparu comme une opportunitĂ© de financement du projet AMICE. Câest ainsi quâun programme de financement destinĂ© Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre permet de promouvoir un projet dâadaptation au changement climatique. Dâautre part, lâexistence dâun cadre institutionnel de protection de la Meuse Ă travers la Commission internationale de la Meuse semble une opportunitĂ© pour ancrer le projet de coopĂ©ration transfrontaliĂšre sur lâadaptation dans la durĂ©e. b) Lacunes et barriĂšres. Des problĂšmes administratifs ont ralenti la collecte des donnĂ©es et les projections climatiques Ă©taient encore difficiles dâaccĂšs (en dehors de la communautĂ© du climat) au moment du lancement du projet34 . En effet, le portail DRIAS les futurs du climat qui fournit des services climatiques nâexistait pas encore. LâintĂ©gration de scĂ©narios climatiques dans les paramĂštres de mise en Ćuvre des projets ne faisait pas partie de la pratique des gestionnaires de lâeau et donc il sâagissait dâune technique non maĂźtrisĂ©e. Il sâest avĂ©rĂ© difficile dâaccorder les projections nationales pour disposer de donnĂ©es Ă lâĂ©chelle du bassin versant, notamment du fait de certaines incompatibilitĂ©s techniques. Une construction collective sâappuyant sur des contributions de tous a Ă©tĂ© nĂ©cessaire car les projections climatiques au niveau de chaque partenaire ne permettaient pas de 34 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 35
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rĂ©pondre au besoin. Dâautre
part, le projet a manquĂ© de moyens humains dans sa rĂ©alisation, notamment parce que les acteurs devaient partager leur temps de travail entre leurs missions habituelles et ce projet de coopĂ©ration35 . Ce manque de moyens consacrĂ©s Ă la mise en Ćuvre dâun projet est caractĂ©ristique de ce quâOran R. Young appelle le problĂšme de lâadĂ©quation (« fit »)36 entre les systĂšmes biophysiques et les systĂšmes de gouvernance crĂ©Ă©s pour gĂ©rer lâapparition de problĂšmes environementaux. En effet, il semble que dans beaucoup de cas, il y a un manque critique de resources nĂ©cessaires pour enclencher un contrĂŽle systĂ©matique des activitĂ©s, ce qui conduit Ă des efforts superficiels, souvent Ă©chouant Ă capter les changements socio-Ă©conomiques importants au moment opportun et de maniĂšre appropriĂ©e.37 Dans le cas du projet AMICE, la recherche dâune meilleure adĂ©quation entre le systĂšme de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour lâadaptation au changement climatique et le systĂšme biophysique du bassin de la Meuse pourrait se manifester, par exemple, par lâadoption dâune plus grande flexibilitĂ© dans la rĂ©partition du temps de travail entre les moments consacrĂ©s au travail administratif habituel des partenaires et les moments oĂč ils travaillent sur le projet de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. Ceci leur permettrait de dĂ©gager temporairement plus de temps libre pour se consacrer au projet sans affecter leurs missions habituelles sur le long terme. Le concept dâadaptation au changement climatique lui-mĂȘme a Ă©tĂ© difficile Ă expliquer. A priori, il nâapporte pas de changement perceptible localement pour la population et les modifications quâil entraĂźne ne sont pas aussi visibles que des amĂ©nagements dâingĂ©nierie mis en place dans le cadre de lâattĂ©nuation au changement climatique. Ce qui a rendu dâautant plus difficile Ă faire comprendre la valeur ajoutĂ©e de lâadaptation aux collectivitĂ©s locales. Si elles nâont pas montrĂ© dâopposition au projet, les collectivitĂ©s locales nâont pas nâont plus montrĂ© dâenthousiasme pour le projet. Enfin, on a observĂ© que lâadaptation au changement climatique avait encore du mal Ă ĂȘtre 35 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. 36 YOUNG, Oran R. The Institutional Dimensions of Environmental Change : Fit, Interplay, and Scale. Cambridge, Massachusetts : MIT Press, 2002. 237 p. 37 YOUNG, Oran R. Matching Institutions and Ecosystems: The Problem of Fit. Les sĂ©minaires de lâIddri, 2002, n°2. ConfĂ©rence dans le cadre du sĂ©minaire Economie de lâenvironnement et du dĂ©veloppement durable, coorganisĂ© par lâIddri et le MinistĂšre de lâĂ©cologie, du dĂ©veloppement durable et de lâĂ©nergie. Paris, 25 juin 2002. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 36
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mise en avant
au moment du lancement du projet AMICE puisque câest la coopĂ©ration transfrontaliĂšre qui a prĂ©valu sur lâadaptation pour obtenir des financements. c) RĂ©ussites. Tous les amĂ©nagements qui avaient Ă©tĂ© prĂ©vus dans le cadre du projet AMICE ont Ă©tĂ© achevĂ©s. Le projet AMICE a permis de dĂ©couvrir de nouvelles formes de coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour sâentraider Ă sâadapter au changement climatique jusque-lĂ insoupçonnĂ©es. GrĂące au projet AMICE, lâAllemagne a, par exemple, dĂ©couvert que lâeau pouvait ĂȘtre fournie aux Pays-Bas pour les aider Ă mieux afronter les pĂ©riodes de sĂ©cheresse, sans consĂ©quence nationale significative38 . Le projet AMICE a permis de disposer de projections climatiques au niveau du bassin versant et de faciliter lâĂ©change de donnĂ©es entre les organismes des diffĂ©rents pays. Des signes montrent que le projet AMICE a bien fonctionnĂ© et quâil continue. Les prochaines Ă©tudes sur lâadaptation dans le bassin de la Meuse vont intĂ©grer les rĂ©sultats dâAMICE. En effet, les universitĂ©s de Metz, LiĂšge, Aix-La-Chapelle et Maastricht poursuivent aujourdâhui lâaffinage des projections climatiques pour la Meuse. De plus, les rĂ©sultats dâAMICE seront utilisĂ©s pour la mise en Ćuvre de la Directive-cadre sur lâeau de lâUnion europĂ©enne39 : lâadaptation sera prise en compte dans la norme sur le bon Ă©tat Ă©cologique des cours dâeau, sur la qualitĂ© de lâeau. Ensuite, une stratĂ©gie dâadaptation au changement climatique pour le bassin de la Meuse sera peut-ĂȘtre Ă©laborĂ©e par la CIM, Ă lâissue de ces rĂ©sultats. 38 Entretien avec MaĂŻtĂ© Fournier cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. 39 La Directive-cadre sur l'eau de lâUnion europĂ©enne, adoptĂ©e le 23 octobre 2000 par le Parlement europĂ©en et entrĂ©e en vigueur le 22 dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e, entend impulser une politique de l'eau plus cohĂ©rente, en posant le cadre europĂ©en d'une gestion et d'une protection des eaux par district hydrographique. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 37
39.
Par ailleurs, la
confĂ©rence de clĂŽture du projet AMICE a Ă©tĂ© un vĂ©ritable succĂšs et pourra ĂȘtre pris en exemple pour le lancement dâautres projets de coopĂ©ration transfrontaliĂšre sur lâadaptation au changement climatique. La confĂ©rence a, en effet, mobilisĂ© trois cents personnes et la participation de la Commission Ăconomique pour lâEurope des Nations Unies (CEE-ONU) a sans doute apportĂ© une visibilitĂ© au-delĂ de lâEurope de lâouest au projet. Enfin, le fait que le projet ait une suite et que lâadaptation au changement climatique continue dâĂȘtre prise en compte dans le nouveau projet tĂ©moigne du succĂšs du projet AMICE. Enfin, si les rĂ©sultats du projet AMICE ne seront pas nĂ©cessairement intĂ©grĂ©s dans les politiques des Ă©lus locaux en tant que rĂ©sultats relevant dâun projet dâadaptation au changement climatique mais peut-ĂȘtre seulement en tant que rĂ©sultats ayant traits Ă la gestion de lâeau, lâadaptation au changement climatique sera en tout cas prise en compte. Ce rĂ©sultat positif pouvant sâinterprĂ©ter comme la manifestation du mainstreaming de lâadaptation au changement climatique. d) Pistes dâamĂ©lioration. Dâune part, au lieu dâune stratĂ©gie dâadaptation, comme cela avait Ă©tĂ© lâobjectif de dĂ©part du projet AMICE, les partenaires nâont Ă©laborĂ© quâune simple feuille de route. Les partenaires ont manquĂ© dâanticipation par rapport Ă lâĂ©tat dâavancement du projet et ne possĂ©daient pas de mandat pour rĂ©diger un document politique comme une stratĂ©gie. Dâautre part, le projet nâa pas bĂ©nĂ©ficiĂ© du portage politique escomptĂ© par les partenaires dâAMICE qui nâont pas rĂ©ussi Ă suffisamment sensibiliser le grand public et les Ă©lus locaux Ă la prise en compte de lâadaptation au changement climatique dans les projets dâamĂ©nagement du territoire. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 38
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Section 2 :
Le bassin MĂ©diterranĂ©en 1. Diagnostic de vulnĂ©rabilitĂ© menant Ă la coopĂ©ration transfrontaliĂšre pour sâadapter au changement climatique. a) Le Constat dâune vulnĂ©rabilitĂ© actuelle et de futurs impacts en prĂ©vision. La mer MĂ©diterranĂ©e est une mer intercontinentale presque entiĂšrement fermĂ©e, entre lâEurope, lâAfrique et lâAsie, et qui sâĂ©tend sur prĂšs de 2,5 millions de kilomĂštres carrĂ©s. Elle a la particularitĂ© dâĂȘtre bordĂ©e par deux rives comprenant des pays dĂ©veloppĂ©s au nord et des pays en dĂ©veloppement au sud. Cette rĂ©gion du monde souffre dâimportants problĂšmes de stress hydrique, de dĂ©sertification, de pertes de biodiversitĂ© et dâĂ©vĂšnements climatiques extrĂȘmes tels quâinondations et sĂ©cheresses. Elle est considĂ©rĂ©e comme un « hot spot » du changement climatique. Les scĂ©narios du GIEC projettent une hausse moyenne des tempĂ©ratures de 2 Ă 3°C Ă lâhorizon 2050, et de 3 Ă 5°C Ă lâhorizon 2100 pour la rĂ©gion, ainsi quâune diminution des prĂ©cipitations estivales de 35 % sur la rive sud et de 25 % sur la rive nord dâici la fin du siĂšcle. b) Un vaste cadre international de coopĂ©ration transfrontaliĂšre. La prise en compte de lâadaptation au changement climatique comme objet de coopĂ©ration en MĂ©diterranĂ©e commence Ă peine Ă voir le jour et passe dâabord par le biais de la protection de lâenvironnement marin contre la pollution et du dĂ©veloppement durable. En 1975, le Plan dâAction pour la MĂ©diterranĂ©e (PAM) a Ă©tĂ© adoptĂ© sous lâĂ©gide du Programme des Nations Unies pour lâEnvironnement (PNUE) par seize pays Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 39
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méditerranéens et par
lâUnion EuropĂ©enne pour aider les pays mĂ©diterranĂ©ens Ă Ă©valuer et Ă contrĂŽler la pollution marine, Ă formuler leurs politiques environnementales nationales, Ă promouvoir la capacitĂ© des gouvernements Ă identifier les meilleures options pour des modĂšles alternatifs de dĂ©veloppement, et Ă optimiser les choix dans lâallocation des ressources. Entre 1976 et 1978, la Convention de Barcelone pour la Protection de la mer MĂ©diterranĂ©e contre la pollution est adoptĂ©e. Ă la fin des annĂ©es 1970, le Plan Bleu pour lâenvironnement et le dĂ©veloppement en MĂ©diterranĂ©e est crĂ©Ă© dans le cadre du PAM. Le Plan Bleu est Ă la fois une association et un centre dâobservation, dâanalyse et de prospective. Il a vocation Ă ĂȘtre une interface entre la production de donnĂ©es scientifiques et la dĂ©cision politique. Il est financĂ© par la France, la Commission EuropĂ©enne, le Fonds pour lâenvironnement mondial et la Banque mondiale. Le Plan Bleu a pour missions : le dĂ©veloppement de bases de donnĂ©es sur l'environnement, lâĂ©conomie et la sociĂ©tĂ© ; lâanalyse et la prospective concernant les principaux enjeux de dĂ©veloppement durable Ă lâĂ©chelle du bassin mĂ©diterranĂ©en et de ses composantes Ă©cologiques ou gĂ©ographiques, en utilisant des mĂ©thodes systĂ©miques ; la publication et la diffusion des rĂ©sultats de ses Ă©tudes et synthĂšses ; le dĂ©veloppement et lâanimation de rĂ©seaux dâexperts dans les pays mĂ©diterranĂ©ens et lâaide Ă la construction des capacitĂ©s ; et le soutien Ă la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne pour le dĂ©veloppement durable dans le cadre de la Commission mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable. En 1996 est crĂ©Ă©e la Commission mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable dans le cadre du PAM avec pour mission de prĂ©parer une stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable. Entre 2007 et 2013, le Programme de coopĂ©ration transfrontaliĂšre de Bassin Maritime MĂ©diterranĂ©e est adoptĂ©. Il sâagit du Programme pour la mise en Ćuvre des activitĂ©s de coopĂ©ration transfrontaliĂšre dans le contexte de la Politique EuropĂ©enne de Voisinage (PEV), en complĂ©ment des efforts conduits dans le cadre du Partenariat Euro- MĂ©diterranĂ©en. Son but est de dĂ©velopper une zone de paix, stabilitĂ©, prospĂ©ritĂ© et de bon voisinage entre les pays MĂ©diterranĂ©ens de lâUnion europĂ©enne et les pays partenaires Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 40
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méditerranéens. En janvier 2008
est signĂ© le Protocole de gestion intĂ©grĂ©e des zones cĂŽtiĂšres (GIZC) qui entra en vigueur en mars 2011 et dont la mise en Ćuvre a Ă©tĂ© prĂ©vue dans le cadre dâun Plan dâaction pour la pĂ©riode 2012-2019. Ce Protocole a Ă©tĂ© Ă©tabli par nĂ©cessitĂ© dâun instrument juridique contraignant car les politiques de gestion intĂ©grĂ©e des zones cĂŽtiĂšres mise en place dans le cadre de la Convention de Barcelone nâavaient quâune valeur de « soft law », ne reposaient que sur une base volontaire, et leur application Ă©tait quasi nulle en raison de leur caractĂšre facultatif et non contraignant. En septembre 2009 est organisĂ©e la 13e rĂ©union de la Commission mĂ©diterranĂ©enne du dĂ©veloppement durable invitant les Parties contractantes Ă mettre en Ćuvre des mesures urgentes dâadaptation afin de renforcer la rĂ©silience de lâespace mĂ©diterranĂ©en au changement climatique. Et enfin, lors de la mĂȘme annĂ©e 2009, la dĂ©claration de Marrakech est adoptĂ©e par les Parties contractantes Ă la Convention de Barcelone sur la protection du milieu marin et du littoral de la MĂ©diterranĂ©e. Ă travers cette dĂ©claration, les Ătats parties mettent en avant le fait quâils considĂšrent le changement climatique comme un dĂ©fi majeur pour lâhumanitĂ©, et quâil faille prendre en compte les impacts du changement climatique et lâadaptation au changement climatique. Ils sâengagent Ă renforcer les consultations entre les pays de la rĂ©gion ; Ă promouvoir la coopĂ©ration mĂ©diterranĂ©enne en matiĂšre de lutte contre les effets du changement climatique dans la rĂ©gion et Ă renforcer les mĂ©canismes institutionnels ; Ă assurer lâintĂ©gration des questions de changement climatique dans les politiques de dĂ©veloppement ; Ă faire en sorte que lâadaptation au changement climatique soit pleinement prise en compte dans la rĂ©vision de la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable au cours du prochain exercice biennal ; Ă favoriser les synergies entre la Convention de Barcelone, lâUnion pour la MĂ©diterranĂ©e (UpM) et la Politique europĂ©enne de voisinage (PEV) ; et Ă renforcer la capacitĂ© du Plan dâAction pour la MĂ©diterranĂ©e (PAM). La coopĂ©ration transfrontaliĂšre en MĂ©diterranĂ©e se dĂ©veloppe donc dans le cadre dâune multiplicitĂ© dâaccords rĂ©gionaux et dâorganisations rĂ©gionales tournĂ©s vers le dĂ©veloppement durable et donc potentiellement porteurs de projets dâadaptation au changement climatique. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 41
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c) Le projet
dâintĂ©gration de lâadaptation au changement climatique dans la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable. La promotion de lâadaptation au changement climatique par le biais de la coopĂ©ration transfrontaliĂšre en est Ă ses dĂ©buts en MĂ©diterranĂ©e et nâexiste pour lâinstant que par lâintĂ©gration de lâadaptation au changement climatique dans la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable. Cette stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne pour le dĂ©veloppement durable, publiĂ©e en 2005, a intĂ©grĂ© lâadaptation aux impacts du changement climatique dans ses sept domaines dâaction prioritaires dĂšs le dĂ©part et sa rĂ©vision est en cours Ă lâĂ©tĂ© 2014 pour renforcer cette prise en compte de lâadaptation au changement climatique. En parallĂšle avec le projet de rĂ©vision de la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne de dĂ©veloppement durable, des sĂ©minaires sont rĂ©guliĂšrement organisĂ©s par le Plan Bleu pour dĂ©velopper et maintenir un dialogue sur lâadaptation au changement climatique entre les pays riverains. En 2012, par exemple, a Ă©tĂ© organisĂ©e une confĂ©rence au Caire sur lâadaptation au changement climatique en MĂ©diterranĂ©e. Cette confĂ©rence a donnĂ© lâoccasion Ă la prĂ©sentation du systĂšme dâalerte prĂ©coce liĂ© Ă la submersion marine de MĂ©tĂ©o France, le Plan Canicule, et le plan national dâadaptation au changement climatique français. Il en est ressorti que les pays mĂ©diterranĂ©ens avaient au moins une perception commune de leur prioritĂ© dâadaptation : la vulnĂ©rabilitĂ© des grandes zones urbaines au changement climatique. Et cette confĂ©rence a eu pour effet de donner une impulsion pour initier un travail commun sur la stratĂ©gie mĂ©diterranĂ©enne pour le dĂ©veloppement durable, sur un guide mĂ©thodologique, et sur une plateforme dâĂ©change de donnĂ©es climatiques40 . 40 Entretien avec Sylvain Mondon cf. Annexe 4 â Listes des personnes ayant contribuĂ© Ă ma rĂ©flexion. Sarah Voirin | Institut dâĂtudes Politiques de Grenoble | M2 ORG INT. | 2014 42
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