Test d'exploration de l'audition des patients qui contrairement à celui de l'audiométrie tonale explore l'audition dans sa globalité (test d’intelligibilité) dont l’intérêt est multiple : diagnostic, social, thérapeutique, prothétique et médico-légal.
Guide pratique sur l'audiométrie vocale en arabe marocain
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L’AUDIOMETRIE VOCALE (TEST D’INTELLIGIBILITE)
EN ARABE MAROCAIN
Oujilal A
Service d’ORL et de Chirurgie Cervico-faciale, CHU Ibn-Sina, Rabat
oujilalabdelilah@gmail.com
I. INTRODUCTION
L’audiométrie vocale est un test psychophysiologique qui explore l’audition grâce à
un stimulus acoustique fait non plus de sons purs comme c’est le cas de l’audiométrie
tonale, mais par de la parole ou voix.
Aussi, contrairement à cette audiométrie tonale qui fait une étude analytique du système
auditif, l’audiométrie vocale étudie l’audition dans son sens le plus large ou entre en jeu
plusieurs facteurs entre autres existe l’intelligibilité, la connaissance de la langue
utilisée, la suppléance mentale et l’audition du sujet.
Par ailleurs, l’audiométrie vocale en permettant l’émission des sons tests en champ libre,
avec ou sans étude de la labio-lecture et la réalisation de l’examen dans le silence et/ou
dans le bruit, il est devenu facile d’étudier et de se renseigner le plus réellement possible
sur la situation auditive des patients sourds.
De ceci découle que l’audiométrie vocale est considérée à l’état actuel comme le test
audiométrique le plus physiologique et dont l’intérêt n’est plus à démontrer dans
plusieurs domaines parmi lesquels on peut citer un intérêt :
— Diagnostic en confirmant les résultats de l'audiométrie tonale et permettant de la
contrôler.
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— Social en décelant de gros troubles de l'intelligibilité et de la compréhension de la
parole (dans le silence et/ou dans le bruit) même avec une perte auditive minime en
audiométrie tonale.
— Thérapeutique en étant un élément primordial lors de l’indication et le suivie
postopératoire dans le cadre de la chirurgie de l’implantation cochléaire et le
traitement chirurgical de l'otospongiose. Egalement, cet intérêt se retrouve dans le
cadre de la rééducation orthophonique en évaluant l’importance de la lecture labiale.
— Prothétique en apportant des renseignements très importants pour les
audioprothésistes en leur permettant d’une part, l’évaluation de l’état auditif des
patients, le type de prothèse qui leur sera adaptée et les modalités de réglage de
cette prothèse, et d’autre part, elle permet de faire le choix le plus judicieux et
rationnel entre les différentes prothèses jugées comme bénéfiques. Ce choix se
réalise après étude de plusieurs paramètres (gain d’intensité, tolérance de la
prothèse, le confort auditif, etc.. ) lors des essais des différentes prothèses choisies
initialement.
— Médicolégale en mesurant le plus réellement possible la perte auditive et son
retentissement sur la vie professionnelle (aptitude ou complication) au travail en
donnant un pourcentage d'invalidité.
Pour être réalisé, cet examen d’audiométrie vocale nécessite deux types de matériaux :
un matériel technique et un matériel phonétique composé d’une série de liste de mots
monosyllabiques, dissyllabiques ou de phrases.
Si le matériel technique est généralement identique d’un pays à l’autre, on trouve que le
matériel phonétique doit répondre à un certain nombre de règles qui diffèrent suivant la
langue propre de chaque pays.
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Au pays du Maghreb arabe, Hadi Messouak (1) est le premier qui a pu établir et publier
en 1956 un matériel phonétique en arabe maghrébin destiné aux Tunisiens, Algériens et
aux Marocains.
Au Maroc, en particulier, ce matériel phonétique n’a jamais été exploité, et ceci, pour
plusieurs raisons parmi lesquelles existe le non-respect de certaines règles régissant son
établissement.
Actuellement et depuis 1993 un nouveau matériel phonétique en arabe (dialecte)
marocain, répondant aux critères internationaux a été établit.
II. LE MATÉRIEL TECHNIQUE ET PHONÉTIQUE
Le matériel technique est composé de :
— Une ou deux cabine (s) audiométrique(s) insonorisée (s) et d’un audiomètre vocal.
— Le support représenté par la voix directe de l’opérateur délivrée à l’aide d’un
microphone avec ou sans lecture labiale ou la voix enregistrée avec ou sans bruit
surajouté (ambiance) délivré sur disque (CD).
La voix directe offre la possibilité de tester la lecture labiale. Toutefois, le locuteur doit
parler de façon naturelle et claire, il doit y avoir une double cabine insonorisée, un
niveau vocal contrôlé au moyen d’un indicateur et une distance locuteur/microphone
maintenue constante pendant toute la durée du test.
La voix enregistrée, quant à elle, a pour avantage de garantir une intensité et une qualité
sonore du message vocal identique, indépendamment de l’opérateur. L’enregistrement
doit cependant obéir à des règles précises, et comporter notamment un signal
d’étalonnage et des signaux permettant de contrôler la distorsion harmonique de
l’audiomètre vocal.
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— Les casques (écouteurs) qui permettent une étude séparée, par voie aérienne de
chaque oreille.
— Les haut-parleurs qui permettent une étude en champ libre dans le silence ou dans le
bruit de la meilleure oreille.
Le matériel phonétique (en dialecte marocain) quant à lui comporte des listes de
logatomes (mots monosyllabiques sans signification), ou de mots monosyllabiques,
dissyllabiques (les plus utilisées) +++ ou de phrases courtes avec signification.
Les mots et les listes de mots utilisés doivent répondre à certains critères :
— Les mots doivent avoir un nombre de syllabes identique, une prononciation fixe, être
connus du sujet (présents dans son vocabulaire) et ne doivent pas prêter à confusion
— Les listes de mots doivent être phonétiquement équilibrées en respectant le principe
que tous les phonèmes dont se compose le langage parlé doivent être représentés, que
les différents phonèmes doivent se trouver dans la même proportion que dans la langue
parlée et que la difficulté moyenne de chaque liste doit être constante.
L’origine des mots monosyllabiques et dissyllabiques en arabe marocain composant les
listes de mots disponibles actuellement est le fruit du travail de Hadi Messouak
(1956)(1), de Hassaoui Mohammed (1978)(2) et de Oujilal Abdelilah (1993)(3). Il s’agit
de 12 listes de 25 mots monosyllabiques et 27 listes de 10 mots dissyllabiques (voir les
listes de mots).
III. DÉROULEMENT DU TEST
Au début, il faut informer le patient sur les modalités du déroulement de l’examen.
Par la suite, la réalisation de l’examen d’audiométrie vocale doit se faire après l’examen
d’audiométrie tonale. Il faut tester au début la meilleure oreille (si examen au casque) en
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utilisant des listes de mots phonétiquement équilibrés à des intensités connues dans le
silence ou dans le bruit, avec ou sans lecture labiale. L’épreuve débute à un niveau situé
à 20 dB au-dessus de la moyenne du seuil tonal des fréquences conversationnelles (500,
1000 et 2000 Hz). Le score de reconnaissance vocale est déterminé en diminuant le
niveau à chaque liste de 5 à 10 dB selon la réponse. En modifiant l’intensité du son vocal,
on obtient une série de points qui dessinent la courbe d’intelligibilité vocale. Il faut
tester également les fortes intensités qui se trouvent au-delà du score d’intelligibilité
maximal pour observer s’il y aura un maintient ou une dégradation de ce score
d’intelligibilité. Il faut en général 5 à 10 points pour tracer une courbe complète
IV. RESULTATS DE L’EXAMEN
Au début, il faut évaluer sur la représentation graphique obtenue l’aspect de la
courbe. Cette dernière peut être, par rapport à la courbe de référence (courbe A),
décalée et parallèle (courbe D) ou encore décalée et déformée (courbe B) avec parfois
un aspect en plateau ou en cloche (courbe C). L’aspect de la courbe D est en faveur
d’une surdité de transmission alors que celui de la courbe B est en faveur d’une surdité
de perception sans distorsion (sans recrutement) sonore et celui de la courbe C est
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typiquement celui d’une surdité de perception qui peut être endo ou rétrocochléaire
avec une distorsion sonore assez importante.
Il faut également préciser les valeurs qui caractérisent cette courbe, à savoir le seuil
d’intelligibilité (exprimé en dB) qui représente le point de croisement de la courbe
avec la ligne de 50 % de mots répétés (il correspond à 27 dB pour la courbe D, à 33 dB
pour la courbe B et 43 dB pour la courbe C), le pourcentage de discrimination
(exprimé en %) qui représente le pourcentage de mots correctement répétés à une
intensité de 35 dB au-dessus du seuil d’intelligibilité (il correspond à 65 % pour la
courbe C) et le maximum d’intelligibilité (exprimé en %) qui représente le plus grand
nombre de mots qui peuvent être répétés lors de l’épreuve (il correspond à 100 % pour
les courbes D et B et à 74 % pour la courbe C).
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REFERENCES
1. Messouak H
Audiométrie vocale en arabe maghrébin
Paris, compagnie Française d’Audiologie (CEA)
Cahier n°4, 1956, 32p
2. Hassaoui M
Le système phonologique de l’arabe Marocain
Thèse du troisième cycle de linguistique (option linguistique générale).
Université de Provence (Aix-Marseille I) Centre d’Aix. 1978-1979
3. Oujilal A
L’audiométrie vocale : intérêt et essai de listes adaptées au dialecte marocain
Thèse de médecine, faculté de médecine et de pharmacie de Rabat, n° 88, 1993