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Cours ScPo
1.
OLIVIER GUILLOTIN _________________________________________________________ DiplÎmé de
Sciences-Po Paris ChargĂ© dâenseignement Ă Sciences-Po Paris _________________________________________________________ AVOCAT A LA COUR _________________________________________________________ 42, avenue de la Grande ArmĂ©e â 75017 Paris tel : 01 45 72 24 41 â fax : 01 45 72 23 87 Palais A 1001 APPROCHE LIMINAIRE DU DROIT DES BIENS ET DE LEUR DEVOLUTION CONTRACTUELLE Master CarriĂšres judiciaires et juridiques â Sciences-Po â 4Ăšme annĂ©e â 2Ăšme semestre 2006-2007
2.
Les éléments qui
suivent correspondent aux diffĂ©rents thĂšmes abordĂ©s au cours du sĂ©minaire « droit des biens-obligations approfondies », qui pourrait aussi bien avoir Ă©tĂ© intitulĂ© « droit des biens et de leur dĂ©volution contractuelle ». Une premiĂšre partie sera consacrĂ©e au droit des biens Ă proprement parler, tant il est nĂ©cessaire de dĂ©finir au prĂ©alable lâobjet mĂȘme des dĂ©veloppements qui suivent. Une deuxiĂšme partie sera consacrĂ©e Ă lâexamen de la plupart des contrats spĂ©ciaux Ă©numĂ©rĂ©s dans le Code civil, qui visent tous Ă la transmission ou Ă lâutilisation de biens ou Ă la dĂ©livrance de prestations, selon des modalitĂ©s qui varient en fonction de la qualitĂ© des parties et de leurs intentions respectives. Une troisiĂšme partie portera sur les garanties qui assortissent le plus souvent les contrats Ă©numĂ©rĂ©s dans la deuxiĂšme partie, ces garanties pouvant aussi bien ĂȘtre des garanties personnelles donnĂ©es par lâobligĂ© ou un tiers (et qui peuvent dans ce cas porter sur lâensemble du patrimoine de celui qui garantit), ou bien ĂȘtre des garanties rĂ©elles, un bien (ou une universalitĂ© de biens) Ă©tant affectĂ©, selon diffĂ©rentes modalitĂ©s, Ă la garantie de lâexĂ©cution dâune obligation. Ils supposent une connaissance minimale des mĂ©canismes contractuels exposĂ©s aux articles 1101 et suivants du Code civil, ainsi que des principes de responsabilitĂ© contractuelle, tels quâils dĂ©coulent notamment des articles 1134 et 1147 du mĂȘme Code. On supposera Ă©galement que les mĂ©canismes de responsabilitĂ© dĂ©lictuelle, quâelle soit liĂ©e Ă la faute de lâauteur de lâacte dĂ©lictueux (article 1382) ou pas (article 1384), seront maĂźtrisĂ©s. Les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments exposĂ©s ci-aprĂšs sont directement issus de diffĂ©rents ouvrages de rĂ©fĂ©rence auxquels le lecteur pourra se reporter utilement. - TerrĂ© et Simler : Droit des biens (Dalloz, 6Ăšme Ă©dition, 2002) ; - Sophie Schiller : Droit des biens (Dalloz, 2005) - Delebecque et Collard-Dutilleul : Contrats civils et commerciaux (Dalloz, 2004) ; - Daniel Mainguy : Contrats spĂ©ciaux (Dalloz, 2006) - Jean-Baptiste Seube : Droit des sĂ»retĂ©s (Dalloz aoĂ»t 2006). Dâautres ouvrages de rĂ©fĂ©rence peuvent Ă©videmment ĂȘtre consultĂ©s avec profit, tant en droit des biens quâen droit des contrats. Les ouvrages relatifs au droit des sĂ»retĂ©s antĂ©rieurs Ă la rĂ©forme du 23 mars 2006 devront nâĂȘtre utilisĂ© quâavec prĂ©caution. Les Ă©lĂ©ments ci-aprĂšs sâarticulent Ă©videmment avec les exposĂ©s qui ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s au cours du semestre, qui viennent en complĂ©ment sur de nombreux points (Ă titre dâexemples, ceux qui ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s sur la dĂ©termination du prix, les conventions de porte-fort, les actions directes, les clauses de rĂ©serve de propriĂ©tĂ©, lâusure, notamment). Lâensemble des rĂ©fĂ©rences textuelles et la plupart des arrĂȘts peuvent ĂȘtre trouvĂ©s sur legifrance.gouv.fr Pour toute question, vous pouvez me contacter Ă lâadresse suivante : olivier.guillotin@noos.fr Accessoirement, la toile « Supremus n°56 » de Kasimir Malevitch, qui figure sur la couverture, nâa pas pour objectif de vous convaincre que lâaddition de concepts clairement 2
3.
délimités peut donner
un rĂ©sultat parfaitement abstrait : câest juste quâavec on peut bĂątir des univers entiers⊠3
4.
TABLE DES MATIERES PREMIERE
PARTIE â DROIT DES BIENS ............................................................................ 12 1. Notion de bien ................................................................................................................ 13 1.1. DĂ©finition ................................................................................................................. 13 1.2. Le bien entre dans le patrimoine ................................................................................ 13 1.3. Classification des biens.............................................................................................. 14 2. Notion de propriĂ©tĂ©.......................................................................................................... 15 2.1. DĂ©finition du droit de propriĂ©tĂ© .................................................................................. 15 2.2. Composantes de la propriĂ©tĂ©...................................................................................... 16 2.2.1. Usus.................................................................................................................. 16 2.2.2. Fructus.............................................................................................................. 16 2.2.3. Abusus .............................................................................................................. 16 2.3. CaractĂšres de la propriĂ©tĂ© : ....................................................................................... 18 2.3.1. CaractĂšre absolu ................................................................................................ 18 2.3.2. CaractĂšre exclusif............................................................................................... 18 2.3.3. CaractĂšre perpĂ©tuel ............................................................................................ 19 2.4. Etendue de la propriĂ©tĂ© :........................................................................................... 20 2.4.1. Dimension du droit de propriĂ©tĂ©........................................................................... 20 2.4.2. Restrictions au droit de propriĂ©tĂ© : abus de droit, troubles anormaux du voisinage... 21 2.4.2.1. Abus de droit.................................................................................................. 21 2.4.2.2. Troubles anormaux de voisinage ...................................................................... 22 3. Notion dâappropriation par occupation, possession ou accession .......................................... 22 3.1. Lâoccupation ............................................................................................................. 23 3.2. La possession ........................................................................................................... 24 3.2.1. CaractĂ©ristiques de la possession......................................................................... 24 3.2.1.1. RĂ©union dâun corpus et dâun animus ................................................................. 24 3.2.1.2. Absence de vices............................................................................................. 25 3.2.2. Effets juridiques de la possession......................................................................... 26 3.2.2.1. En matiĂšre mobiliĂšre : « en fait de meubles, possession vaut titre » (article 2279) 26 3.2.2.2. En matiĂšre immobiliĂšre : lâusucapion................................................................. 27 3.2.3. Protection de la possession ................................................................................. 28 3.3. Lâaccession............................................................................................................... 29 4. DĂ©membrement de la propriĂ©tĂ© ........................................................................................ 30 4.1. Lâusufruit.................................................................................................................. 30 4.1.1. Notion dâusufruit................................................................................................. 30 4.1.2. Constitution de lâusufruit ..................................................................................... 31 4.1.2.1. Usufruit lĂ©gal .................................................................................................. 31 4.1.2.2. Usufruit conventionnel..................................................................................... 31 4.1.2.3. Usufruit des biens consomptibles : quasi-usufruit............................................... 32 4.1.2.4. Usufruit sur les universalitĂ©s............................................................................. 32 4.1.3. Effets de lâusufruit .............................................................................................. 33 4.1.3.1. Droits de lâusufruitier ....................................................................................... 33 4.1.3.2. Obligations de lâusufruitier................................................................................ 34 4.1.3.3. Droits du nu-propriĂ©taire.................................................................................. 34 4.1.3.4. Devoirs du nu-propriĂ©taire ............................................................................... 35 4.1.4. Extinction de lâusufruit ........................................................................................ 35 4.1.4.1. Causes dâextinction de lâusufruit........................................................................ 35 4.1.4.2. ConsĂ©quences de lâextinction de lâusufruit.......................................................... 36 4.2. Les servitudes........................................................................................................... 36 4.2.1. Notion de servitude ............................................................................................ 36 4.2.1.1. ElĂ©ments constitutifs de la notion de servitude................................................... 37 4.2.1.2. CaractĂ©ristiques de la notion de servitude ......................................................... 37 4.2.1.3. Classification des servitudes ............................................................................. 38 4.2.2. RĂ©gime des servitudes ........................................................................................ 39 4
5.
4.2.2.1. Mode dâĂ©tablissement
des servitudes ................................................................ 39 4.2.2.2. Exercice des servitudes.................................................................................... 41 4.2.3. Extinction des servitudes..................................................................................... 42 4.2.3.1. Extinction par impossibilitĂ© dâexercice................................................................ 42 4.2.3.2. Extinction par absence de pluralitĂ© de fonds ...................................................... 42 4.2.3.3. Extinction par renonciation............................................................................... 42 4.2.3.4. Extinction par non-usage ................................................................................. 43 DEUXIEME PARTIE â CONTRATS SPECIAUX ...................................................................... 44 INTRODUCTION : LES CONTRATS SPECIAUX..................................................................... 45 I â LES CONTRATS RELATIFS AUX BIENS .......................................................................... 49 LA VENTE ............................................................................................................................ 50 1. Formation....................................................................................................................... 50 1.1. Les parties Ă la vente ................................................................................................ 50 1.1.1. Le vendeur ........................................................................................................ 50 1.1.2. Lâacheteur.......................................................................................................... 51 1.2. Le consentement ...................................................................................................... 51 1.2.1. Les promesses de vente ou dâachat...................................................................... 51 1.2.1.1. Promesses unilatĂ©rales de vente....................................................................... 51 1.2.1.2. Promesses synallagmatiques de vente............................................................... 53 1.2.2. Pactes de prĂ©fĂ©rence .......................................................................................... 53 1.2.3. Ventes avec effet diffĂ©rĂ© ..................................................................................... 53 1.3. La chose .................................................................................................................. 54 1.3.1. Une chose aliĂ©nable............................................................................................ 54 1.3.1.1. Une chose ...................................................................................................... 54 1.3.1.2. Une chose existante ........................................................................................ 54 1.3.1.3. Une chose dans le commerce juridique ............................................................. 54 1.3.2. Une chose dĂ©terminĂ©e ou dĂ©terminable................................................................ 54 1.4. Le prix ..................................................................................................................... 54 1.4.1. Existence du prix................................................................................................ 55 1.4.1.1. Un prix ayant un caractĂšre monĂ©taire ............................................................... 55 1.4.1.2. Un prix libre.................................................................................................... 55 1.4.2. DĂ©termination du prix ......................................................................................... 56 1.4.3. LicĂ©itĂ© du prix .................................................................................................... 56 2. Effets de la vente ............................................................................................................ 57 2.1. Transfert de la propriĂ©tĂ© et des risques....................................................................... 57 2.1.1. Transfert de la propriĂ©tĂ© ..................................................................................... 57 2.1.1.1. Les rĂšgles supplĂ©tives concernant le transfert de propriĂ©tĂ© ................................. 57 2.1.1.2. Les amĂ©nagements conventionnels du transfert de propriĂ©tĂ© .............................. 57 2.1.1.3. Lâobligation de donner ..................................................................................... 58 2.1.2. Transfert des risques .......................................................................................... 59 2.1.2.1. Les rĂšgles supplĂ©tives concernant le transfert de risques .................................... 59 2.1.2.2. Les amĂ©nagements conventionnels du transfert de risques ................................. 59 2.2. Obligations des parties .............................................................................................. 59 2.2.1. Obligations du vendeur ....................................................................................... 59 2.2.1.1. Les obligations de renseignement..................................................................... 60 2.2.1.2. Lâobligation de dĂ©livrance................................................................................. 62 2.2.1.3. Lâobligation de garantie ................................................................................... 63 2.2.1.4. Lâobligation de conformitĂ©................................................................................ 67 2.2.1.5. Lâobligation de sĂ©curitĂ© .................................................................................... 68 2.2.2. Lâobligation de lâacheteur..................................................................................... 68 5
6.
LES BAUX ............................................................................................................................
69 1. Les Ă©lĂ©ments du bail........................................................................................................ 69 1.1. La qualification du bail............................................................................................... 69 1.2. La diversitĂ© des baux................................................................................................. 69 1.2.1. Les baux dâhabitations ........................................................................................ 70 1.2.2. Les baux commerciaux........................................................................................ 71 1.2.3. Les baux ruraux ................................................................................................. 72 1.2.4. Les baux professionnels ...................................................................................... 72 1.3. Forme et preuve du bail ............................................................................................ 72 2. La formation du bail......................................................................................................... 73 2.1. Les parties ............................................................................................................... 73 2.1.1. Le bailleur.......................................................................................................... 73 2.1.2. Le preneur......................................................................................................... 73 2.2. Le consentement ...................................................................................................... 74 2.3. La chose et le loyer................................................................................................... 74 2.3.1. La chose............................................................................................................ 74 2.3.2. Le loyer ............................................................................................................. 74 2.4. La durĂ©e .................................................................................................................. 75 3. Les effets du bail............................................................................................................. 75 3.1. Les obligations du bail............................................................................................... 75 3.1.1. Les obligations du bailleur................................................................................... 75 3.1.2. Les obligations du preneur .................................................................................. 77 3.2. La circulation du bail ................................................................................................. 77 3.2.1. Changement de bailleur ...................................................................................... 77 3.2.2. Changement de preneur ..................................................................................... 78 4. La rupture du bail............................................................................................................ 78 4.1. Les causes de lâextinction du bail................................................................................ 78 4.2. Les effets de lâextinction du bail ................................................................................. 79 LES PRETS........................................................................................................................... 80 1. Le prĂȘt Ă usage ............................................................................................................... 80 1.1. Les Ă©lĂ©ments du prĂȘt Ă usage .................................................................................... 80 1.2. La formation du prĂȘt Ă usage ..................................................................................... 81 1.3. Les effets du prĂȘt Ă usage ......................................................................................... 82 1.3.1. Obligations de lâemprunteur................................................................................. 82 1.3.2. Obligations du prĂȘteur ........................................................................................ 83 2. Le prĂȘt Ă consommation................................................................................................... 83 2.1. Les Ă©lĂ©ments du prĂȘt Ă consommation........................................................................ 83 2.2. La formation du prĂȘt Ă consommation......................................................................... 83 2.3. Les effets du prĂȘt Ă consommation............................................................................. 84 2.3.1. Obligations de lâemprunteur................................................................................. 84 2.3.2. Obligations du prĂȘteur ........................................................................................ 84 3. Le prĂȘt dâargent............................................................................................................... 84 3.1. RĂšgles communes aux prĂȘts dâargent.......................................................................... 85 3.1.1. Les Ă©lĂ©ments du prĂȘt dâargent ............................................................................. 85 3.1.2. La formation du prĂȘt dâargent.............................................................................. 85 3.1.3. Les effets du prĂȘt dâargent .................................................................................. 86 3.1.3.1. Les obligations de lâemprunteur........................................................................ 86 3.1.3.2. Les obligations du prĂȘteur................................................................................ 87 3.2. RĂšgles spĂ©cifiques Ă la protection de lâemprunteur consommateur................................. 87 3.2.1. Le crĂ©dit Ă la consommation................................................................................ 87 3.2.2. Le crĂ©dit immobilier ............................................................................................ 88 6
7.
II â LES
CONTRATS RELATIFS AUX SERVICES................................................................... 90 LES MANDATS..................................................................................................................... 91 1. Les Ă©lĂ©ments du contrat de mandat .................................................................................. 91 1.1. Les caractĂšres du contrat de mandat .......................................................................... 91 1.1.1. Effectuer des actes juridiques.............................................................................. 91 1.1.2. Effectuer des actes juridiques avec reprĂ©sentation ................................................ 91 1.2. La distinction du mandat avec dâautres contrats........................................................... 92 2. La formation du contrat ................................................................................................... 92 3. Les effets du mandat ....................................................................................................... 93 3.1. Les effets entre les parties......................................................................................... 93 3.1.1. Les obligations du mandataire ............................................................................. 93 3.1.2. Les obligations du mandataire ............................................................................. 95 3.2. Les effets Ă lâĂ©gard du tiers contractant ...................................................................... 96 3.2.1. Le mandataire et le tiers ..................................................................................... 96 3.2.2. Le mandant et le tiers......................................................................................... 96 4. Lâextinction du mandat..................................................................................................... 98 4.1. lâextinction volontaire du mandat................................................................................ 98 4.1.1. RĂ©vocation du mandat par le mandant ................................................................. 98 4.1.2. Renonciation au mandat par le mandataire........................................................... 98 4.2. lâextinction involontaire du mandat ............................................................................. 99 5. Les rĂšgles spĂ©cifiques au contrat de commission ................................................................ 99 LES CONTRATS DE DEPOT ................................................................................................ 101 1. Les rĂšgles communes du contrat de dĂ©pĂŽt....................................................................... 101 2. Les rĂšgles particuliĂšres Ă certains dĂ©pĂŽts......................................................................... 102 2.1. DĂ©pĂŽt hĂŽtelier......................................................................................................... 102 2.2. SĂ©questre............................................................................................................... 103 LES CONTRATS DâENTREPRISE â LOUAGE DâOUVRAGE ................................................... 104 1. Les Ă©lĂ©ments du contrat dâentreprise............................................................................... 104 1.1. Les caractĂšres du contrat dâentreprise....................................................................... 104 1.1.1. Une prestation ................................................................................................. 104 1.1.2. Une prestation indĂ©pendante............................................................................. 105 1.1.3. Une prestation sans reprĂ©sentation.................................................................... 105 1.2. La distinction du contrat dâentreprise avec dâautres contrats ....................................... 106 1.2.1. Contrat dâentreprise et vente ............................................................................. 106 1.2.2. Contrat dâentreprise et bail................................................................................ 106 2. La formation du contrat dâentreprise ............................................................................... 106 3. Les effets du contrat dâentreprise.................................................................................... 107 3.1. Les obligations de lâentrepreneur.............................................................................. 107 3.1.1. ExĂ©cution de la prestation ................................................................................. 107 3.1.1.1. Contenu de lâobligation .................................................................................. 107 3.1.1.2. InexĂ©cution de lâobligation ............................................................................. 108 3.1.1.3. Obligation de moyens ou de rĂ©sultat ? ............................................................ 108 3.1.2. Obligations annexes.......................................................................................... 109 3.1.2.1. Obligation dâinformer et de conseiller annexes Ă lâobligation principale (contrat dâagence de voyage, contrat de soins, contrat de rĂ©parationâŠ). ........................................ 109 3.1.2.2. Obligation de sĂ©curitĂ©.................................................................................... 109 3.2. Les obligations du maĂźtre de lâouvrage ...................................................................... 109 3.2.1. Lâobligation de payer le prix............................................................................... 109 3.2.2. Les obligations de coopĂ©rer, prendre livraison et rĂ©ceptionner.............................. 110 4. La circulation du contrat dâentreprise : la sous-traitance.................................................... 110 4.1. DĂ©finition-Domaine ................................................................................................. 110 4.2. AgrĂ©ment du sous-traitant ....................................................................................... 111 7
8.
4.3. Paiement et
action directs........................................................................................ 111 4.4. ResponsabilitĂ© ........................................................................................................ 111 5. Lâextinction du contrat ................................................................................................... 112 III â LES CONTRATS RELATIFS AUX PRODUITS : LES CONTRATS DE DISTRIBUTION.... 113 LES CONTRATS DE DISTRIBUTION .................................................................................. 114 1. RĂšgles communes Ă lâensemble des contrats de distribution .............................................. 114 1.1. La qualification du contrat cadre de distribution......................................................... 114 1.1.1. ProblĂšmes Ă©conomiques posĂ©s par la qualification de contrat cadre ...................... 114 1.1.2. Ebauche de classification................................................................................... 115 1.2. La construction du contrat cadre de distribution......................................................... 116 1.2.1. Formation des contrats cadres........................................................................... 116 1.2.1.1. Consentement .............................................................................................. 116 1.2.1.2. DurĂ©e........................................................................................................... 116 1.2.1.3. DĂ©termination du prix.................................................................................... 117 1.2.1.4. Encadrement par le droit de la concurrence..................................................... 117 1.2.1.5. Encadrement par le droit du travail................................................................. 117 1.2.2. ExĂ©cution des contrats cadres ........................................................................... 117 1.2.3. Extinction des contrats cadres ........................................................................... 118 2. RĂšgles particuliĂšres Ă certains contrats............................................................................ 119 TROISIEME PARTIE â SURETES ....................................................................................... 120 I â LES SURETES PERSONNELLES â LE CAUTIONNEMENT............................................... 121 1. CaractĂšres gĂ©nĂ©raux du cautionnement........................................................................... 121 1.1. CaractĂšres gĂ©nĂ©raux du cautionnement .................................................................... 121 1.2. DiversitĂ© des modes de cautionnement..................................................................... 121 1.2.1. Cautionnements consensuels et solennels........................................................... 121 1.2.2. Cautionnement civil et commercial..................................................................... 122 1.2.3. Cautionnements simples et solidaires ................................................................. 122 1.2.4. Cautionnements Ă titre gratuit ou onĂ©reux.......................................................... 123 1.2.5. PossibilitĂ©s de montages ................................................................................... 123 2. DĂ©clenchement du cautionnement .................................................................................. 123 2.1. Conditions de fond du cautionnement....................................................................... 123 2.1.1. Consentement de la caution .............................................................................. 123 2.1.1.1. Mention manuscrite requise de la caution........................................................ 123 2.1.1.2. Les vices Ă©ventuels du consentement.............................................................. 124 2.1.2. Objet de la caution ........................................................................................... 124 2.1.2.1. ConsĂ©quences du caractĂšre accessoire de la caution ........................................ 124 2.1.2.2. Cautionnement de dettes prĂ©sentes ou futures ................................................ 124 2.1.2.3. Cautionnement indĂ©fini ou limitĂ© .................................................................... 125 2.1.3. Cause de la caution .......................................................................................... 125 2.1.4. CapacitĂ© de la caution....................................................................................... 125 2.2. Conditions de forme du cautionnement..................................................................... 126 3. Le dĂ©roulement de la caution ......................................................................................... 126 3.1. Les effets du cautionnement entre le crĂ©ancier et la caution ....................................... 126 3.1.1. ExigibilitĂ© de la dette Ă lâĂ©gard de la caution ....................................................... 126 3.1.2. Information de la caution.................................................................................. 127 3.2. Les effets du cautionnement entre le dĂ©biteur et la caution ........................................ 127 3.2.1. Le recours de la caution aprĂšs paiement............................................................. 127 3.2.1.1. Recours personnel (2305).............................................................................. 128 3.2.1.2. Recours subrogatoire (2306).......................................................................... 128 3.2.2. Le recours de la caution avant paiement............................................................. 128 3.3. Les effets du cautionnement en cas de cofidĂ©jusseurs................................................ 129 4. Le dĂ©nouement de la caution.......................................................................................... 129 8
9.
4.1. Extinction de
la caution par voie accessoire............................................................... 129 4.1.1. Extinction de lâobligation principale par satisfaction du crĂ©ancier........................... 129 4.1.2. Extinction de lâobligation principale sans satisfaction du crĂ©ancier ......................... 129 4.1.2.1. Annulation ou rĂ©solution de lâobligation principale ............................................ 129 4.1.2.2. Remise de dette............................................................................................ 129 4.1.2.3. Novation et notions voisines........................................................................... 130 4.1.2.4. DĂ©faut de dĂ©claration .................................................................................... 130 4.2. Extinction de la caution par voie principale................................................................ 131 4.2.1. Extinction fondĂ©e sur le droit commun des obligations......................................... 131 4.2.1.1. Extinction de lâobligation de rĂšglement............................................................ 131 4.2.1.2. Extinction de lâobligation de couverture ........................................................... 131 4.2.2. Extinction fondĂ©e sur la faute du crĂ©ancier ......................................................... 132 4.2.2.1. BĂ©nĂ©fice de la cession dâactions et de subrogation ........................................... 132 4.2.2.2. ResponsabilitĂ© civile du crĂ©ancier.................................................................... 132 II â LES SURETES REELLES .............................................................................................. 133 1. PrĂ©sentation des sĂ»retĂ©s rĂ©elles...................................................................................... 133 1.1. Traits caractĂ©ristiques de ces sĂ»retĂ©s........................................................................ 133 1.1.1. Trait caractĂ©ristique principal............................................................................. 133 1.1.2. CaractĂ©ristiques secondaires des sĂ»retĂ©s rĂ©elles.................................................. 134 1.2. Classification des sĂ»retĂ©s......................................................................................... 134 LES SURETES REELLES MOBILIERES................................................................................ 135 2. Les privilĂšges mobiliers .................................................................................................. 135 2.1. EnumĂ©ration des privilĂšges mobiliers ........................................................................ 135 2.1.1. PrivilĂšges mobiliers gĂ©nĂ©raux............................................................................. 135 2.1.2. PrivilĂšges mobiliers spĂ©ciaux.............................................................................. 135 2.1.2.1. Les privilĂšges fondĂ©s sur lâidĂ©e dâun gage tacite ............................................... 136 2.1.2.2. Les privilĂšges fondĂ©s sur lâentrĂ©e dâune valeur dans le patrimoine du dĂ©biteur .... 136 2.1.2.3. Les privilĂšges fondĂ©s sur la conservation du patrimoine du dĂ©biteur (article 2332 3°) 137 2.2. EfficacitĂ© des privilĂšges mobiliers â concours de crĂ©anciers......................................... 137 2.2.1. RĂšgles normales de classement ......................................................................... 137 2.2.1.1. Les rĂšgles de classement des privilĂšges gĂ©nĂ©raux ............................................ 137 2.2.1.2. Les rĂšgles de classement des privilĂšges spĂ©ciaux ............................................. 138 2.2.2. RĂšgles dĂ©rogatoires de classement .................................................................... 138 3. Le gage de meuble corporel ........................................................................................... 138 3.1. Gage de droit commun............................................................................................ 139 3.1.1. Conditions de formation du gage ....................................................................... 139 3.1.1.1. Conditions de fond ........................................................................................ 139 3.1.1.2. Conditions de forme et dâopposabilitĂ© aux tiers ................................................ 139 3.1.2. Effets du gage.................................................................................................. 140 3.1.2.1. Le dĂ©biteur paye ........................................................................................... 140 3.1.2.2. Le dĂ©biteur ne paye pas ................................................................................ 140 3.2. Gages spĂ©ciaux....................................................................................................... 141 3.2.1. Le gage sur vĂ©hicule automobile........................................................................ 141 3.2.2. Le gage commercial.......................................................................................... 141 3.2.3. Le gage de stock.............................................................................................. 142 3.2.4. Le nantissement de matĂ©riel et dâoutillage .......................................................... 142 3.2.5. Les warrants .................................................................................................... 143 4. Le nantissement de meubles incorporels.......................................................................... 143 4.1. Nantissement de droit commun................................................................................ 143 4.1.1. Conditions de formation.................................................................................... 143 4.1.2. Effets .............................................................................................................. 144 4.2. Nantissements spĂ©ciaux........................................................................................... 144 4.2.1. Nantissement du fonds de commerce................................................................. 144 9
10.
4.2.2. Nantissement des
parts sociales et valeurs mobiliĂšres.......................................... 145 4.2.3. Nantissement de crĂ©ances particuliĂšres .............................................................. 145 4.2.3.1. Nantissement des polices dâassurance-vie........................................................ 145 4.2.3.2. Nantissement des crĂ©ances professionnelles.................................................... 145 LES SURETES REELLES IMMOBILIERES ........................................................................... 146 5. LâhypothĂšque conventionnelle......................................................................................... 146 5.1. Constitution de lâhypothĂšque.................................................................................... 147 5.1.1. Conditions de fond ........................................................................................... 147 5.1.1.1. Principe de spĂ©cialitĂ© ..................................................................................... 147 5.1.1.2. Conditions tenant Ă la crĂ©ance garantie........................................................... 147 5.1.1.3. Conditions tenant au bien hypothĂ©quĂ© ............................................................ 148 5.1.1.4. Conditions tenant Ă la personne du constituant................................................ 149 5.1.2. Conditions de forme ......................................................................................... 149 5.2. Inscription de lâhypothĂšque...................................................................................... 150 5.3. Effets de lâhypothĂšque............................................................................................. 150 5.3.1. Relations entre le crĂ©ancier hypothĂ©caire et le constituant ................................... 150 5.3.1.1. Effets de lâhypothĂšque avant sa rĂ©alisation ...................................................... 151 5.3.1.2. Effets de lâhypothĂšque lors de sa rĂ©alisation .................................................... 151 5.3.2. Relations entre le crĂ©ancier hypothĂ©caire et les autres crĂ©anciers ......................... 152 5.3.2.1. ProcĂ©dure dâordre.......................................................................................... 152 5.3.2.2. Perturbations apportĂ©es aux procĂ©dure dâordre................................................ 152 5.3.3. Relations entre le crĂ©ancier hypothĂ©caire et lâacquĂ©reur de lâimmeuble.................. 152 5.3.3.1. Mise en Ćuvre du droit de suite ..................................................................... 153 5.3.3.2. Purge des hypothĂšques ................................................................................. 153 5.3.4. Transmission et extinction de lâhypothĂšque......................................................... 154 5.3.4.1. Transmission de lâhypothĂšque ........................................................................ 154 5.3.4.2. Extinction de lâhypothĂšque ............................................................................. 154 6. Les hypothĂšques lĂ©gales et judiciaires ............................................................................. 154 6.1. Les sĂ»retĂ©s lĂ©gales immobiliĂšres............................................................................... 154 6.1.1. PrivilĂšges spĂ©ciaux immobiliers .......................................................................... 154 6.1.1.1. PrivilĂšge du vendeur dâimmeuble (2374, 1°) .................................................... 155 6.1.1.2. PrivilĂšge du prĂȘteur de deniers (2374, 2°)....................................................... 155 6.1.1.3. PrivilĂšge du copartageant (2374, 3°) .............................................................. 155 6.1.1.4. PrivilĂšge des architectes et entrepreneurs (2374, 4°) ....................................... 155 6.1.1.5. PrivilĂšge de sĂ©paration des patrimoines (2374, 6°)........................................... 155 6.1.1.6. PrivilĂšge des accĂ©dants Ă la propriĂ©tĂ© (2374, 7°) ............................................. 155 6.1.1.7. PrivilĂšge du syndicat de copropriĂ©taires (2374, 1°bis)....................................... 156 6.1.2. PrivilĂšges spĂ©ciaux immobiliers .......................................................................... 156 6.1.2.1. PrivilĂšge des Ă©poux ....................................................................................... 156 6.1.2.2. PrivilĂšge des personnes placĂ©es sous tutelle (2409) ......................................... 156 6.1.2.3. PrivilĂšge attachĂ© aux jugements de condamnation (2412)................................. 156 6.2. SĂ»retĂ©s judiciaires immobiliĂšres................................................................................ 156 6.2.1. Autorisation judiciaire dâinscrire lâhypothĂšque ...................................................... 156 6.2.2. Inscription provisoire ........................................................................................ 157 6.2.3. Inscription dĂ©finitive ......................................................................................... 157 7. LâantichrĂšse .................................................................................................................. 157 III â LE TRANSFERT DE PROPRIETE COMME MODE DE SURETE ..................................... 158 LE TRANSFERT DE PROPRIETE COMME MODE DE SURETE .............................................. 159 1. Rappel des dispositifs prĂ©existant permettant dâutiliser la propriĂ©tĂ© dâun bien comme mode de sĂ»retĂ© 159 1.1. Le bordereau Dailly (articles L 313-23 s CMF)............................................................ 159 1.2. La clause de rĂ©serve de propriĂ©tĂ© (article 2367 s) ...................................................... 160 1.3. La vente Ă rĂ©mĂ©rĂ© (articles 1659 s) .......................................................................... 160 10
11.
2. La fiducie......................................................................................................................
161 2.1. Le fonctionnement gĂ©nĂ©ral dâune fiducie ................................................................... 161 2.2. LâutilitĂ© dâune fiducie ............................................................................................... 162 2.2.1. La fiducie pour la transmission........................................................................... 162 2.2.2. La fiducie pour la gestion .................................................................................. 162 2.2.3. La fiducie comme garantie ................................................................................ 163 2.3. La fiducie telle quâelle dĂ©coule des articles 2011 s...................................................... 163 2.3.1. Une fiducie limitĂ©e dans son utilisation possible................................................... 164 2.3.2. Une fiducie rĂ©servĂ©e Ă une catĂ©gorie de personnes uniquement ........................... 165 2.3.3. La mise en Ćuvre de la fiducie .......................................................................... 165 2.3.3.1. Etablissement dâun contrat............................................................................. 165 2.3.3.2. Fonctionnement quotidien de la fiducie ........................................................... 166 2.3.3.3. ResponsabilitĂ© du fiduciaire............................................................................ 167 2.3.3.4. Sort des biens dĂ©tenus par le fiduciaire ........................................................... 167 2.3.3.5. DĂ©nouement de la fiducie .............................................................................. 168 2.4. Conclusion.............................................................................................................. 169 11
12.
PREMIERE PARTIE â
DROIT DES BIENS Droit des biens : notion de bien, notion dâappropriation, notion de propriĂ©tĂ©, modalitĂ©s de dĂ©membrement de la propriĂ©tĂ©, aperçu des modalitĂ©s de son exercice collectif. 12
13.
1. Notion de
bien 1.1. DĂ©finition Quâest-ce quâun bien ? Selon Portalis, « les choses ne seraient rien pour le lĂ©gislateur sans lâutilitĂ© quâen tirent les hommes ». Selon TerrĂ© et Simler (Droit des Biens, Dalloz, 6Ăšme Ă©dition, 2002), les biens sont « les choses qui servent Ă lâusage de lâhomme et permettent Ă celui-ci de satisfaire Ă ses besoins, soit directement en se servant dâelles, en recueillant leurs fruits voire en les dĂ©truisant, soit indirectement en les Ă©changeant contre dâautres choses plus propres Ă satisfaire ses besoins. ». Selon Planiol et Ripert (TraitĂ© pratique de droit civil français, 1926), « les choses deviennent des biens, au sens juridique du mot, non pas lorsquâelles sont utiles Ă lâHomme, mais lorsquâelles sont appropriĂ©es ». Ainsi, le bien peut se dĂ©finir comme une chose utile Ă lâHomme, de quelque maniĂšre que ce soit, et quâil peut sâapproprier. A telle enseigne que lâarticle 714 du Code civil prĂ©voit « quâil est des choses qui nâappartiennent Ă personne et dont lâusage est commun Ă tous. Des lois de police rĂšglent la maniĂšre dâen jouir ». Ces dispositions sâappliquent notamment aux ressources naturelles et aux choses sans maĂźtre. 1.2. Le bien entre dans le patrimoine Il dĂ©coule de cette idĂ©e dâappropriation que le bien est ce qui rentre dans le patrimoine de son dĂ©tenteur. Le patrimoine est cette universalitĂ© juridique indivisible, qui naĂźt avec son dĂ©tenteur et meurt avec lui, comprenant aussi bien les Ă©lĂ©ments dâactif que de passif de son dĂ©tenteur. La notion de patrimoine dâaffectation nâest pas admise en droit français (contrairement Ă la solution retenue en Allemagne, notamment, et qui permet notamment de mettre en Ćuvre des procĂ©dures de liquidation judiciaire des particuliers), mĂȘme sâil a Ă©tĂ© affirmĂ©, lors de lâinstauration de sociĂ©tĂ©s unipersonnelles en 1985 que ces sociĂ©tĂ©s constituaient des patrimoines dâaffectation. Câest inexact, dans la mesure oĂč ces sociĂ©tĂ©s sont dotĂ©es dâune personnalitĂ© juridique distincte de celle de son associĂ©/actionnaire. - Seules les personnes ont un patrimoine ; - Toutes les personnes ont un patrimoine ; - Chaque personne nâa quâun patrimoine ; - La durĂ©e dâexistence est consubstantielle Ă la durĂ©e dâexistence de la personnalitĂ© juridique de son dĂ©tenteur. Tous les Ă©lĂ©ments du patrimoine ont une valeur Ă©conomique. Les droits personnels nâont pas de valeur Ă©conomique, ils nâentrent pas dans le patrimoine, ce sont des droits extra- patrimoniaux. 13
14.
Nâentrent Ă©galement pas
dans le patrimoine les objets de famille, qui se dĂ©finissent comme « prĂ©sentant un rapport direct Ă la famille », et permettant en consĂ©quence, malgrĂ© leur valeur vĂ©nale, quâils ne puissent ĂȘtre vendus. Un exemple vient de la mise en vente par le comte de Paris de certains biens dâorigine familiale, dont la vente a Ă©tĂ© empĂȘchĂ©e par ses enfants, prĂ©cisĂ©ment en raison du caractĂšre familial de ces biens (Civ 2Ăšme , 29 mars 1995, n°93-18769, consorts dâOrlĂ©ans). Le corps humain nâentre en aucune façon dans le patrimoine. Lâarticle 16-5 du Code civil prĂ©voit que « les conventions ayant pour effet de confĂ©rer une valeur patrimoniale au corps humain, Ă ses Ă©lĂ©ments et Ă ses produits sont nulles ». Une mention spĂ©ciale pour certains droits, comme le droit Ă lâimage, qui sont issus de la protection de certains droits personnels, comme le droit Ă al vie privĂ©e (article 9 du Code civil), et qui donnent lieu Ă une rĂ©ification progressive. 1.3. Classification des biens Article 516 : les biens sont soit meubles, soit immeubles. Sont immeubles tous les biens qui ont une attache au sol : article 518 : « les fonds de terre et les bĂątiments sont immeubles par leur nature ». Sont immeubles par destination les biens meubles qui sâattachent Ă lâimmeuble de telle façon que le fait des les ĂŽter de lâimmeuble conduirait Ă dĂ©grader soit le meuble, soit lâimmeuble, soit les deux (biens attachĂ©s au fonds Ă perpĂ©tuelle demeure, article 525), et les biens affectĂ©s au service dâun fonds (article 524 ; le Code civil ayant Ă©tĂ© conçu pour des propriĂ©taires fonciers, le fait de supprimer une paire de bĆufs et une charrue dâun bien immobilier consiste Ă rendre le bien impropre Ă la destination qui est la sienne, Ă savoir ĂȘtre cultivĂ©). Enfin, sont immeubles par lâobjet auxquels ils sâappliquent lâusufruit des choses immobiliĂšres, les servitudes ou services fonciers, les actions qui tendent Ă revendiquer un immeuble. Sont meubles toutes les autres choses, soit par nature (les animaux et les corps qui peuvent se transporter dâun lieu Ă un autre â biens meubles corporels â article 528), soit par la dĂ©termination de la loi (les obligations et actions portant sur des sommes exigibles, les actions et intĂ©rĂȘts dans les compagnies de finance, de commerce ou dâindustrie â biens meubles incorporels â article 529). Il existe une troisiĂšme catĂ©gorie trĂšs spĂ©cifique, celle des meubles par anticipation, qui sâapplique quasi exclusivement aux ventes de rĂ©coltes sur pied (elles sont rattachĂ©es au sol sans pouvoir ĂȘtre dĂ©placĂ©es, puisque non encore moissonnĂ©es, donc elles sont immeubles. Mais pour les besoins de la transaction, on anticipe sur la moisson, et on leur donne un caractĂšre mobilier, ce qui dispense les parties de faire Ă©tablir un acte authentique pour constater la vente, entre autres â CA Montpellier, 23 juin 1927, DH 1927, 472). La distinction entre meubles et immeubles est trĂšs importante : la preuve de la possession ou de la propriĂ©tĂ© du bien nâest pas rĂ©gie par les mĂȘmes mĂ©canismes ; les garanties qui peuvent ĂȘtre donnĂ©es sur ces biens sont totalement diffĂ©rentes ; les modalitĂ©s de transfert de la propriĂ©tĂ© varient du tout au tout ; les tribunaux ayant Ă connaĂźtre des litiges gĂ©nĂ©rĂ©s par ces biens ne sont pas les mĂȘmes ; les rĂšgles en matiĂšre de saisie ne sont pas les mĂȘmes ; les rĂšgles de rescision pour lĂ©sion ne valent que pour certains meubles, quand elles valent pour tous les immeubles. 14
15.
Distinction secondaire :
les choses se distinguent entre : - Les biens dans le commerce juridique ; o Soit quâils peuvent ĂȘtre lâobjet dâun droit de propriĂ©tĂ© ; o Soit quâils ne peuvent ĂȘtre lâobjet dâun droit de propriĂ©tĂ© ; Quand il sâagit de choses communes (article 714) ; Quand il sâagit de choses sans maĂźtre : âą Res nullius (choses nâappartenant Ă personne â article 713) ; âą Res delictae (choses abandonnĂ©es dĂ©libĂ©rĂ©ment par leur maĂźtre) ; - Les choses hors du commerce juridique ; o Soit par nature ; o Soit par lâeffet dâune rĂšgle de droit ; Elles peuvent Ă©galement se distinguer entre : - biens appropriables et biens non appropriables (biens du domaine public ; biens communs Ă tous â lâair, lâeau, la mer, les eaux courantes⊠; les personnes, les Ă©lĂ©ments du corps humain) ; - biens consomptibles (dĂ©truits aprĂšs usage â produits alimentaires, monnaieâŠ) et biens non consomptibles (maison, voiture â en principe â etcâŠ) ; - biens fongibles (ou choses de genre, qui ne peuvent ĂȘtre individualisĂ©s â une tonne de blĂ©, qui peut ĂȘtre remplacĂ©e par une autre tonne de blĂ© de la mĂȘme catĂ©gorie) et biens non fongibles (qui sont individualisĂ©s â le sac de blĂ© n° tant, une voitureâŠ) ; - fruits (revenus rĂ©guliers tirĂ©s dâun bien sans en altĂ©rer la substance : intĂ©rĂȘts dâun capital, loyer dâun immeuble, rĂ©coltes) et produits (qui sortent du capital en lâaltĂ©rant ou en le diminuant â actions dâun portefeuille vendues, produits tirĂ©s dâune mineâŠ). Nota bene : un droit rĂ©el est un droit consubstantiel Ă une chose (droit de propriĂ©tĂ©, dĂ©membrements du droit de propriĂ©tĂ©, sĂ»retĂ©s rĂ©elles â gage, hypothĂšque) ; un droit personnel est un droit quâun crĂ©ancier dĂ©tient sur un dĂ©biteur, lequel a obligation soit de donner, soit de faire, soit de ne pas faire. 2. Notion de propriĂ©tĂ© 2.1. DĂ©finition du droit de propriĂ©tĂ© Des trois piliers du Code civil tels que conçus en 1804 (les personnes, les biens et la propriĂ©tĂ©), la propriĂ©tĂ© est celui qui, dans ses fondements a connu le moins dâĂ©volutions. Le droit de propriĂ©tĂ© est considĂ©rĂ© comme un droit naturel et imprescriptible dans la dĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen (article 2) et comme un droit inviolable et sacrĂ© (article 17). Câest le seul Ă ĂȘtre mentionnĂ© deux fois dans la dĂ©claration. Lâarticle 1er du Protocole additionnel n°1 du 20 mars 1952 de la CEDH reconnaĂźt Ă chacun le droit au respect de ses biens, ce qui revient Ă garantir en substance le droit de propriĂ©tĂ© (CEDH 13 juin 1979, Marckx c/Belgique, sĂ©rie A, n°31 ; 23 septembre 1982, Sporrong et Lönnroth c/SuĂšde, sĂ©rie A, n°52). 15
16.
Portalis considérait «
quâil y a des propriĂ©taires depuis quâil y a des hommes », prenant le contre-pied de la position dĂ©fendue par Jean-Jacques Rousseau sur ce point dans le Contrat Social. Lâarticle 544 dĂ©finit la propriĂ©tĂ© comme « le droit de jouir et de disposer des choses de la maniĂšre la plus absolue, pourvu quâon nâen fasse pas un usage prohibĂ© par les lois ou par lĂ© rĂšglements ». 2.2. Composantes de la propriĂ©tĂ© 2.2.1. Usus Lâusus permet dâuser ou de ne pas user de son bien. Le droit de propriĂ©tĂ© confĂšre Ă son titulaire le droit dâutiliser la chose quâil dĂ©tient. Câest un droit quâil lui est loisible dâutiliser comme bon lui semble, ce qui inclut la possibilitĂ© pour lui de ne pas sâen servir. Ainsi, le propriĂ©taire dâun immeuble ne perdra pas la propriĂ©tĂ© de son immeuble mĂȘme sâil nây rĂ©side pas. Le fait dâuser dâune chose consomptible entraĂźne la destruction de cette chose et se confond alors avec lâabusus. 2.2.2. Fructus Le fructus est le droit de jouir de la chose. De cette facultĂ© dĂ©coule la possibilitĂ© pour le propriĂ©taire de tirer profit de la chose en bĂ©nĂ©ficiant des fruits de celle-ci. Du fructus ne dĂ©coule pas la possibilitĂ© de profiter de la chose en y pratiquant une altĂ©ration (dâoĂč lâintĂ©rĂȘt de la distinction entre les fruits et les produits). Les articles 583 et 584 du Code civil distinguent trois catĂ©gories de fruits : - Les fruits naturels : il sâagit du « produit naturel de la terre » et du « produit et du croĂźt des animaux » ; les noisettes dans lâarbre, ou les mĂ»res du roncier sont des fruits naturels ; - Les fruits industriels, qui sont ceux issus de la culture du fonds (la rĂ©colte de blĂ©, les fruits dâun verger cultivĂ©, les lĂ©gumes du potagerâŠ) ; - Les fruits civils : les loyers des maisons, les intĂ©rĂȘts des sommes exigibles, les arrĂ©rages des rentes, les prix des baux Ă ferme. Le fructus confĂšre au propriĂ©taire le droit dâexploiter lâimage de son bien, au moyen de photographies en particulier. Ce droit dâexploitation de lâimage de son bien nâest pas un droit exclusif, mais il peut donner lieu Ă rĂ©paration au profit du propriĂ©taire quand, exercĂ© par un tiers, il cause un trouble anormal au propriĂ©taire (Ass. Plen. 7 mai 2004, n°02-10450). 2.2.3. Abusus Lâabusus est le droit de disposer de la chose. Câest la composante fondamentale du droit de propriĂ©tĂ©. Parce que dĂ©tenteur de lâabusus, le propriĂ©taire peut prendre toutes les dispositions ayant pour effet de lui faire perdre tout ou partie du bien, soit quâil le cĂšde, quâil le donne, quâil lâabandonne ou quâil le dĂ©truise. 16
17.
Et parce quâil
est dĂ©tenteur de lâabusus, le propriĂ©taire peut Ă©galement prendre toutes les mesures pour Ă©viter dâarriver Ă une telle situation et conserver son bien (position du bonus pater familias, qui prendra soin de prĂ©server ses biens pour les transmettre Ă ses hĂ©ritiers lĂ©gitimes). Lâabusus peut ĂȘtre restreint du fait des spĂ©cificitĂ©s du bien qui en est lâobjet. - Lâarticle 1048 du Code civil prĂ©voit la possibilitĂ© pour le propriĂ©taire dâun bien dâaccorder une libĂ©ralitĂ© Ă quelquâun Ă charge pour ce dernier de transmettre le bien, Ă son dĂ©cĂšs, Ă une troisiĂšme personne dĂ©nommĂ©e. Dans ce cas, le bĂ©nĂ©ficiaire de la libĂ©ralitĂ© ne dispose en fait dâaucun abusus, puisquâil est tenu de conserver le bien jusquâĂ sa mort, afin quâun tiers puisse cette fois disposer de lâensemble des composantes du droit de propriĂ©tĂ© sur ce bien. Le bĂ©nĂ©ficiaire grevĂ© nâest pas pour autant usufruitier, dans la mesure oĂč celui qui hĂ©ritera finalement du bien nâa pas reçu ab initio la nue-propriĂ©tĂ© de ce bien. - Les souvenirs de famille, qui correspondent le plus souvent aux objets personnels du dĂ©funt, ne sont pas assortis dâun abusus. A telle enseigne que le fait de refuser une succession permet quand mĂȘme aux hĂ©ritiers de sâemparer des souvenirs de famille, lesquels nâentrent pas dans la succession, qui constitue le gage gĂ©nĂ©ral des crĂ©anciers du dĂ©funt. - Le « bien de famille » : câest une notion un peu confuse, qui recouvre deux cas de figure distincts : soit la protection particuliĂšre quâun commerçant ou un entrepreneur individuel aura voulu donner Ă sa rĂ©sidence principale, en faisant enregistrer lâacte notariĂ© dans lequel il dĂ©clare ce bien insaisissable (articles L 526-1 et suivants du Code de commerce) ou un autre bien immobilier quâil veut conserver dans lâintĂ©rĂȘt de la famille (loi du 12 juillet 1909, valeur de lâimmeuble limitĂ©e Ă 50.000 FRF/7.500 âŹ) ; soit la protection dâun bien dĂ©volu par voie successorale, et dont on souhaite quâil reste « du mĂȘme cĂŽtĂ© de la fente », quâil ne soit pas dĂ©volu par la suite Ă la famille par alliance du dĂ©tenteur du bien (loi du 4 dĂ©cembre 2001). Lâabusus peut ĂȘtre restreint du fait de stipulations rĂ©gissant lâinaliĂ©nabilitĂ© du bien : lâarticle 900-1 du Code civil prĂ©voit que le donateur dâun bien pourra en prĂ©voir lâinaliĂ©nabilitĂ© que de façon temporaire, et pourvu que lâinaliĂ©nabilitĂ© soit justifiĂ©e par un intĂ©rĂȘt sĂ©rieux et lĂ©gitime. Le juge pourra revenir sur les dispositions dâune telle clause si lâintĂ©rĂȘt qui avait justifiĂ© la clause a disparu, ou sâil advient quâun intĂ©rĂȘt plus important lâexige. LâintĂ©rĂȘt sĂ©rieux et lĂ©gitime peut rĂ©sider dans le souci du donateur de voir le bien donnĂ© rester dans la famille jusquâĂ son dĂ©cĂšs (Civ 1Ăšre , 20 nov 1985, RTD Civ 1986, 620) ; dans lâintĂ©rĂȘt des codonateurs de garantir le paiement dâune rente viagĂšre stipulĂ©e Ă leur profit (Civ 1Ăšre , 20 juillet 1982, RTD Civ 1983, 376) ; dans le souci des donateurs de jouir dâun droit dâusage et dâhabitation exempt de tout trouble de jouissance (Civ 1Ăšre , 10 juillet 1990, RTD Civ 1991, 141). La durĂ©e de la vie du donateur est considĂ©rĂ©e comme une durĂ©e limitĂ©e (par opposition Ă une durĂ©e perpĂ©tuelle, une telle clause devant alors avoir un caractĂšre non- Ă©crit : Civ 1Ăšre , 8 janvier 1975, JCP 1976 II 18240 ; Aix-en-Provence, 21 janvier 1999, Dr. Fam 2000, n°122). Une vente qui intervient en contradiction de la clause dâinaliĂ©nabilitĂ© sera nulle. Le droit de conserver le bien peut Ă©galement donner lieu Ă des restrictions. 17
18.
- Le bien
peut faire lâobjet dâune destruction forcĂ©e : o dĂ©molition forcĂ©e des bĂątiments menaçant ruine, article L 511-1 du Code de la construction et de lâhabitation ; o abattage forcĂ© des animaux dangereux (article L 211-11 du Code rural) ; o abattage des animaux non rĂ©cupĂ©rĂ©s dans leur lieu de dĂ©pĂŽt (article L 211-25 du Code rural) ; - La propriĂ©tĂ© du bien peut ĂȘtre transfĂ©rĂ©e dâautoritĂ© : o Expropriation dâutilitĂ© publique (notamment lors des procĂ©dures dâalignement de la voirie) ; elle doit donner lieu au versement dâune juste et prĂ©alable indemnitĂ©. o Mesure de rĂ©quisition : accomplissement de certaines prestations dans un but dâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, sur lâordre de lâautoritĂ© publique. Si le bien est immeuble, la rĂ©quisition sera temporaire, et sâanalysera comme une location forcĂ©e ; si le bien est meuble, la rĂ©quisition pourra ĂȘtre temporaire ou dĂ©finitive, auquel cas elle correspondra Ă une vente forcĂ©e. Les mesures de rĂ©quisition ne sont prises que dans des buts prĂ©cis, pour rĂ©pondre Ă des besoins particuliers (loi n°87-1132 du 31 dĂ©cembre 1987 autorisant la rĂ©quisition temporaire des immeubles nĂ©cessaires Ă lâorganisation et au dĂ©roulement des JO dâAlbertville) ; o Obligation de cĂ©der le bien suite Ă une nationalisation : pourvu que cette nationalisation donne lieu Ă une juste indemnitĂ©, et que la nĂ©cessitĂ© de sa survenue ait Ă©tĂ© lĂ©galement constatĂ©e, le Conseil constitutionnel a considĂ©rĂ© quâune telle mesure nâĂ©tait pas contraire Ă lâarticle 17 de la dĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen (dĂ©cision du 16 janvier 1982). o Confiscation du bien : sanction prise dans diffĂ©rents cas, et qui prive le propriĂ©taire du bien de son droit de propriĂ©tĂ©, mais sans indemnisation. Elle peut frapper celui qui ne sâest pas pliĂ© Ă une mesure de rĂ©quisition, ou qui diffuse dans le public des produits dangereux. Il peut Ă©galement sâagir dâune peine complĂ©mentaire Ă une sanction pĂ©nale principale, lâobjet ayant permis lâaccomplissement dâun crime ou dâun dĂ©lit. 2.3. CaractĂšres de la propriĂ©tĂ© : La propriĂ©tĂ© prĂ©sente un caractĂšre absolu, exclusif et perpĂ©tuel. 2.3.1. CaractĂšre absolu Cela revient Ă dire que le propriĂ©taire dâun bien est le seul maĂźtre de ce bien, du devenir de ce bien, et des fruits que ce bien peut gĂ©nĂ©rer. Cela ne signifie pas pour autant que le caractĂšre absolu de la propriĂ©tĂ© prĂ©sente un caractĂšre illimitĂ© : lâarticle 544 limite le caractĂšre absolu de la propriĂ©tĂ© au fait que le propriĂ©taire ne doit pas faire de son bien un usage prohibĂ© par les lois ou par les rĂšglements, sachant quâen plus il peut ĂȘtre contraint de cĂ©der la propriĂ©tĂ© de son bien si les circonstances lâexigent (voir plus haut). 2.3.2. CaractĂšre exclusif Il est le corollaire du caractĂšre absolu du droit de propriĂ©tĂ© : ce droit absolu que le propriĂ©taire dĂ©tient, il est le seul Ă le dĂ©tenir. A partir du moment oĂč la propriĂ©tĂ© est dĂ©membrĂ©e (usufruit contre nue-propriĂ©tĂ©, par exemple), le caractĂšre exclusif de lâexercice du droit de propriĂ©tĂ© disparaĂźt. 18
19.
Le caractĂšre exclusif
du droit de propriĂ©tĂ© rencontre des exceptions, en cas de mitoyennetĂ©, de copropriĂ©tĂ© ou dâindivision, qui constituent autant de formes de propriĂ©tĂ© collective. La vente sous condition suspensive nâentraĂźne pas de dĂ©rogation au caractĂšre exclusif du droit de propriĂ©tĂ©. Si le propriĂ©taire dâun immeuble le vend Ă un acquĂ©reur, Ă la condition que celui-ci obtienne un prĂȘt bancaire, lâimmeuble reste entre les mains du vendeur tant que la condition nâest pas remplie. Si elle ne peut ĂȘtre remplie, la vente est rĂ©putĂ©e nâavoir jamais eu lieu. De la mĂȘme façon, en cas de multipropriĂ©tĂ©, les diffĂ©rents bĂ©nĂ©ficiaires de plages calendaires ne sont pas propriĂ©taires collectivement dâun mĂȘme bien, ils sont les propriĂ©taires de parts dans la sociĂ©tĂ© constituĂ©e ad hoc, qui est propriĂ©taire de lâimmeuble. Câest la possession de ces parts qui leur donne un droit de jouissance pour une durĂ©e donnĂ©e (Loi n°86-18 du 6 janvier 1986). 2.3.3. CaractĂšre perpĂ©tuel Le droit de propriĂ©tĂ© est le seul droit rĂ©el qui prĂ©sente un tel caractĂšre. Le droit de propriĂ©tĂ© ne disparaĂźt pas du fait du non usage. Ce principe a Ă©tĂ© Ă©noncĂ© en 1905 par la Cour de cassation (Req. 12 juillet 1905, DP 1907, 1, 141). Une famille Ă©tait propriĂ©taire dâun Ă©tang en bord de mer. Au cours dâune trĂšs violente tempĂȘte, en 1824, le cordon littoral avait Ă©tĂ© emportĂ© par les vagues, lâĂ©tang avait Ă©tĂ© envahi par lâeau de mer et lâĂ©tang inclus de facto dans le domaine public maritime. Au fil des ans, le cordon littoral sâest reconstituĂ©, au point que la piĂšce dâeau a retrouvĂ© sa nature dâĂ©tang. La cour de cassation a rendu la propriĂ©tĂ© de lâĂ©tang au propriĂ©taire du fonds dont il avait Ă©tĂ© dĂ©tachĂ© en 1824. Le caractĂšre perpĂ©tuel du droit de propriĂ©tĂ© vaut tant pour les meubles que pour les immeubles. Le fait de ne pas entretenir son bien ne peut entraĂźner dĂ©chĂ©ance du droit de propriĂ©tĂ© (Civ 2Ăšme , 14 novembre 1979, JCP 1981 II, 19507). La cour de cassation a considĂ©rĂ© quâen matiĂšre de propriĂ©tĂ©, le dĂ©lai de lâaction en revendication Ă©tait Ă©galement perpĂ©tuel, et en tous cas pas plafonnĂ© par la durĂ©e de 30 ans mentionnĂ©e Ă lâarticle 2262 du Code civil (Civ 2Ăšme , 14 novembre 1979, JCP 1981 II, 19507). De plus, lâextinction du droit de propriĂ©tĂ© par non usage aurait pour effet de faire de nombreux biens des biens sans maĂźtre, qui reviendraient Ă lâEtat ou aux communes, en application de lâarticle 714 du Code civil. Enfin, si la propriĂ©tĂ© Ă©tait susceptible de pĂ©remption, cela contraindrait le propriĂ©taire Ă exercer son usus. Or le droit de propriĂ©tĂ© est absolu, et le propriĂ©taire ne peut pas ĂȘtre contraint dâexercer son usus dâune façon donnĂ©e, son usus lui permettant aussi bien dâuser que de ne pas user du bien. Le droit de propriĂ©tĂ© dure aussi longtemps que la chose. Si la chose disparaĂźt de façon irrĂ©mĂ©diable, le droit de propriĂ©tĂ© disparaĂźt avec. Câest particuliĂšrement vrai pour les meubles, et ça lâest Ă©galement pour les droits de propriĂ©tĂ© industrielle, littĂ©raire ou artistiques, qui sont dâune durĂ©e limitĂ©e. Le dĂ©tenteur dâun brevet dĂ©tient un monopole dâutilisation pour une durĂ©e de vingt ans. Il peut cĂ©der son droit, mais uniquement pour la durĂ©e restant Ă courir Ă compter du dĂ©pĂŽt du brevet. Le droit ayant disparu, lâex-dĂ©tenteur ne peut plus le cĂ©der. Il en va de mĂȘme en matiĂšre de droit dâauteur dâune Ćuvre littĂ©raire, 19
20.
pour toute la
vie de lâauteur rallongĂ©e de 50 ans, et pour celui dâune Ćuvre artistique, pour toute la vie de lâauteur rallongĂ©e de 70 ans. 2.4. Etendue de la propriĂ©tĂ© : La propriĂ©tĂ© porte sur un bien, et ne porte que sur ce bien, ce qui nĂ©cessite de le dĂ©limiter de façon prĂ©cise. De plus, lâexercice du droit de propriĂ©tĂ© nâautorise pas son bĂ©nĂ©ficiaire Ă agir sans tenir compte de son entourage. 2.4.1. Dimension du droit de propriĂ©tĂ© La dĂ©limitation dâun bien meuble nâest pas de nature Ă susciter de difficultĂ©, que ce bien soit matĂ©riel ou immatĂ©riel. La question de la dĂ©limitation se pose concrĂštement en matiĂšre immobiliĂšre, afin de sâassurer de lâexacte quotitĂ© fonciĂšre du bien acquis, ou du bien Ă vendre. Le bien immobilier devra ĂȘtre dĂ©limitĂ© par bornage, conformĂ©ment aux mentions conservĂ©es par le cadastre, afin de dĂ©limiter avec prĂ©cision deux parcelles limitrophes. Toutefois, le bornage est facultatif, et ne peut ĂȘtre mise en Ćuvre que si un des deux propriĂ©taires le demande. Le bornage peut ĂȘtre fait amiablement. Le bornage peut ĂȘtre ordonnĂ© par voie judiciaire, mais lâaction en bornage nâest possible que si un litige existe Ă propos de deux terrains nus, appartenant Ă deux propriĂ©taires distincts. Si les deux parcelles peuvent ĂȘtre dĂ©limitĂ©es par la prĂ©sence dâun chemin, dâun bĂątiment, ou de tout autre Ă©lĂ©ment permettant de les dĂ©limiter avec prĂ©cision, lâaction en bornage ne pourra pas prospĂ©rer. Lâaction en bornage est imprescriptible. Le bornage est rĂ©alisĂ© Ă frais communs (article 646 du Code civil). Le bornage ne dĂ©termine pas le droit de propriĂ©tĂ© de lâun ou de lâautre sur tel fonds, il se contente de fixer la sĂ©paration entre les deux propriĂ©tĂ©s. Il ne vaut pas dĂ©volution dâun titre de propriĂ©tĂ© Ă tel ou tel, selon lâendroit ou passe la limite cadastrale. Dans les limites de sa propriĂ©tĂ©, le propriĂ©taire a le droit de se clore, pourvu que sa clĂŽture ne fasse pas obstacle Ă lâexercice dâune servitude, de passage notamment (article 647). Le droit de se clore ne saurait ĂȘtre exercĂ© de façon abusive : la thĂ©orie de lâabus de droit a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e Ă cette occasion. La cour de cassation (Req, 3 aoĂ»t 1915, DP 1917, 1, 19, ClĂ©ment Bayard) a qualifiĂ© dâabusif lâexercice du droit de se clore exercĂ© par le voisin dâun fabriquant de ballons dirigeables qui avait ceint sa propriĂ©tĂ© de carcasses de bois de 16 m de haut surmontĂ©es de pics en fer. Ce principe a Ă©tĂ© repris Ă chaque fois que la clĂŽture a Ă©tĂ© Ă©rigĂ©e dâabord pour porter prĂ©judice au voisinage (murs trop Ă©levĂ©s, haies dâarbres particuliĂšrement hauts et masquant la lumiĂšre, plantation de bambous Ă la croissance particuliĂšrement rapideâŠ). Le droit de clĂŽturer son fonds devient une obligation dans les conditions visĂ©es Ă lâarticle 663 du Code civil : quand les terrains sont dans des villes ou des faubourgs ; lorsque les terrains sont dĂ©volus Ă lâhabitation, quâils soient bĂątis ou la dĂ©pendance dâun bĂątiment ; la hauteur de la clĂŽture est fixĂ©e selon les usages locaux ; sinon, elle sera de 32 dĂ©cimĂštres dans les villes de plus de 50.000 habitants, et de 26 dĂ©cimĂštres (8 pieds) dans les autres. 20
21.
Le droit de
propriĂ©tĂ© nâest pas quâhorizontal, il est Ă©galement vertical. Lâarticle 552 prĂ©voit que le propriĂ©taire est propriĂ©taire du dessus et du dessous. La propriĂ©tĂ© du dessus a pour effet dâinterdire toute intrusion, quâelle prenne la forme dâune branche dâarbre ou dâune construction. Dans le cas dâune construction, si le propriĂ©taire du terrain ne demande pas la dĂ©molition de la construction qui empiĂšte chez lui, il pourra invoquer les dispositions de lâarticle 553, qui prĂ©voit que toutes les constructions et plantations faites sur un terrain sont rĂ©putĂ©es appartenir au propriĂ©taire du terrain. La propriĂ©tĂ© du dessous a pour effet de donner le droit au propriĂ©taire de faire toutes les fouilles et constructions dans le sous-sol de sa parcelle, dans la limite des droits de lâEtat en matiĂšre miniĂšre. Cela donne notamment au propriĂ©taire le droit de sâopposer aux empiĂštements en sous-sol. En cas de dĂ©couverte dâune grotte prĂ©historique, les propriĂ©taires des parcelles se trouvant au dessus de la grotte seront expropriĂ©s, en application de la rĂ©glementation en matiĂšre dâarchĂ©ologie prĂ©ventive, mais ils seront indemnisĂ©s non seulement en fonction de la valeur de leur parcelles, mais aussi en fonction de la valeur de la grotte. En application de ce principe, posĂ© par la cour dâappel de Toulouse, les propriĂ©taires des parcelles sous lesquelles se trouvait la grotte Chauvet ont vu leur indemnisation passer de 4.836 Ă 13.340.000 âŹâŠ (Toulouse, 26 mars 2001). Quid des sources ? Leur rĂ©gime est plus compliquĂ© que celui de lâeau de pluie, qui revient au propriĂ©taire du fonds sur lequel elle tombe, et qui peut en faire ce quâil veut. Pour les sources, lâarticle 642 prĂ©voit que le propriĂ©taire du fonds peut lâutiliser Ă sa volontĂ©, dans les limites et pour les besoins de son hĂ©ritage. Il ne peut attenter aux droits des voisins se trouvant en aval et qui, depuis trente ans au moins, ont fait des travaux sur le fonds oĂč jaillit la source pour en capter une partie des eaux. Il ne peut pas non plus enlever Ă une commune, village ou hameau lâeau dont cette agglomĂ©ration a besoin. Les cours dâeau, sâils sont navigables, relĂšvent du domaine public fluvial, et ne sont pas susceptibles dâappropriation. Sâils ne sont pas navigables, ils appartiennent aux propriĂ©taires riverains, la limite de propriĂ©tĂ© passant en gĂ©nĂ©ral au milieu du lit du cours dâeau. Ce qui donne le droit aux propriĂ©taires de puiser lâeau et dâextraire les sables et graviers dont ils peuvent avoir besoin. Sâil sâagit dâĂ©tangs, ils font partie du fonds auxquels ils se rattachent. Lâeau de mer fait partie du domaine publique et la bande littorale doit ĂȘtre dĂ©volue au passage des particuliers. 2.4.2. Restrictions au droit de propriĂ©tĂ© : abus de droit, troubles anormaux du voisinage 2.4.2.1. Abus de droit Câest avec lâarrĂȘt ClĂ©ment Bayard que la Cour de cassation a Ă©laborĂ© la thĂ©orie de lâabus de droit, en Ă©nonçant que « lâinstallation sur un terrain dâun dispositif ne prĂ©sentant pour son propriĂ©taire aucune utilitĂ© et nâayant dâautre but que de nuire Ă autrui constitue un abus du droit de propriĂ©tĂ© ». 21
22.
Ainsi, lâusage du
droit de propriĂ©tĂ© devient abusif quand il nâest employĂ© que pour nuire Ă autrui. Lâabus sera prĂ©sumĂ© quand lâusage fait par le propriĂ©taire ne prĂ©sente aucune utilitĂ© pour lui. 2.4.2.2. Troubles anormaux de voisinage Le voisinage est par essence constitutif dâun trouble. La jurisprudence a dĂ» faire le tri entre ce qui relĂšve des troubles normaux des troubles anormaux du voisinage. La distinction a Ă©tĂ© posĂ©e par lâarrĂȘt du 4 fĂ©vrier 1971 (Civ 3Ăšme , 4 fĂ©vrier 1971, JCP 1971, II, 16781) : « le propriĂ©taire voisin de celui qui construit lĂ©gitimement sur son terrain est nĂ©anmoins tenu de subir les inconvĂ©nients normaux du voisinage, en revanche, il est en droit dâexiger une rĂ©paration dĂšs lors que des inconvĂ©nients excĂšdent cette limite ». La jurisprudence a Ă©laborĂ© Ă la suite de cette dĂ©cision un mĂ©canisme de responsabilitĂ© sans faute, reposant initialement sur lâarticle 1384, puis sur le principe gĂ©nĂ©ral du droit selon lequel « nul ne doit causer Ă autrui un trouble de voisinage », tel quâil suffit quâun trouble prĂ©sente un caractĂšre grave et continu pour contraindre son auteur Ă le rĂ©parer. Ce cadre laisse Ă la charge des parties le soin dâĂ©tablir les troubles anormaux du voisinage par rapport aux troubles normaux, et de dĂ©terminer quel est le seuil au delĂ duquel des troubles normaux deviennent des troubles anormaux. Lâauteur du trouble ne pourra invoquer son absence de faute, comme le fait de disposer dâun permis de construire pour Ă©riger une cheminĂ©e libĂ©rant des fumĂ©es nausĂ©abondes, ni mĂȘme invoquer lâexistence dâune servitude, qui nâautorise pas le propriĂ©taire du fonds dominant Ă causer un trouble anormal de voisinage au propriĂ©taire du fonds servant. Le propriĂ©taire du fonds Ă lâorigine du trouble de voisinage peut sâexonĂ©rer de sa responsabilitĂ© sâil justifie du fait dâun tiers qui revĂȘt les caractĂšres de la force majeure. Le fait que son immeuble soit squattĂ© ne suffit pas pour exonĂ©rer le propriĂ©taire de sa responsabilitĂ© au titre des troubles anormaux de voisinage. La prĂ©somption de responsabilitĂ© de lâauteur sera Ă©galement Ă©cartĂ©e sâil est Ă©tabli quâil habite dans les lieux depuis plus longtemps que la victime supposĂ©e du trouble anormal de voisinage. Les juges du fonds ont un pouvoir souverain dâapprĂ©ciation pour dĂ©terminer dâune part la qualitĂ© de voisin et dâautre part ce qui relĂšve du trouble normal du trouble anormal de voisinage. 3. Notion dâappropriation par occupation, possession ou accession Les articles 711 et 712 dĂ©crivent la plupart des modes dâaccession Ă la propriĂ©tĂ©. La propriĂ©tĂ© sâacquiert et se transmet par : - Succession ; - Donation entre vifs ou testamentaire ; - Lâeffet des obligations ; - Accession ou incorporation ; - Prescription. 22
23.
Les successions et
donations relĂšvent du droit des successions ; lâeffet des obligations renvoie aux contrats de vente, quâon abordera plus tard. Restent lâaccession, lâincorporation et la prescription, qui seront envisagĂ©es ici, ainsi que lâoccupation, qui, historiquement, reste le premier mode connu dâappropriation dâun bien, comme lâa indiquĂ© Jean-Jacques Rousseau, nâen dĂ©plaise Ă Portalis⊠3.1. Lâoccupation Lâoccupation est le mode dâappropriation des biens entrant sous la dĂ©nomination de « res nullius », biens susceptibles dâappropriation, mais sans propriĂ©taires. Cette catĂ©gorie est en fait restreinte : lâarticle 539 confĂšre Ă lâEtat les successions vacantes, qui se les approprie dans les conditions fixĂ©es Ă lâarticle 811, et lâarticle 713 lui confĂšre la propriĂ©tĂ© des immeubles sans maĂźtre. La rĂ©daction de lâarticle 713 renvoie Ă lâensemble des biens, mais les dispositions de lâarticle L 541-1-II du Code de lâenvironnement prĂ©voit quâun bien meuble abandonnĂ© ou que son propriĂ©taire destine Ă lâabandon est un dĂ©chet et doit ĂȘtre traitĂ© comme tel. De fait, lâoccupation ne sâapplique guĂšre quâau gibier et aux poissons et produits de la mer dâune part, aux trĂ©sors et biens dĂ©couvert fortuitement dâautre part. - Le gibier, y compris le produit de la chasse illĂ©gale, peut important que lâespĂšce chassĂ©e soit sauvage ou pas ; - Le produit de la pĂšche rĂ©alisĂ©e dans les eaux salĂ©es ou douces, Ă lâexception des captures faites dans des eaux totalement privĂ©es (toute la diffĂ©rence entre la pĂšche en riviĂšre et la pĂšche dans un Ă©tang ; - Les biens culturels : si le bien est sur/sous terre, des fouilles archĂ©ologiques ne pourront avoir lieu quâavec lâaccord de lâEtat, lâEtat pouvant imposer au propriĂ©taire du fonds de faire des recherches (ce qui se produit souvent en cas de travaux, dans le cadre de lâarchĂ©ologie dite prĂ©ventive). Les objets trouvĂ©s ainsi sont partagĂ©s par moitiĂ© entre lâEtat et le propriĂ©taire du fonds ; si le bien est sous la mer, les recherches ne peuvent avoir lieu quâavec lâautorisation de lâadministration. En cas de dĂ©couverte fortuite, le bien doit ĂȘtre remis Ă lâEtat, le dĂ©couvreur ayant droit Ă une rĂ©compense ; - Les biens abandonnĂ©s, qui deviennent la propriĂ©tĂ© de celui qui les trouve : si vous trouvez un billet de 500 ⏠dans la rue, il est Ă vous⊠LâarrĂȘt du 18 octobre 2000 de la chambre criminelle de la Cour de cassation vous inviterait presque Ă ne surtout rien dire Ă la police, dans un tel cas de figure⊠(Crim, 18 octobre 2000, n°00-82904) ; - Les trĂ©sors : des biens meubles enfouis dĂ©libĂ©rĂ©ment par leur propriĂ©taires et dĂ©couverts fortuitement par leur inventeur. Lâarticle 716 prĂ©voit que si le trĂ©sor est dĂ©couvert par le propriĂ©taire du fonds, il lui appartient intĂ©gralement ; sâil est dĂ©couvert par un autre que par le propriĂ©taire du fonds, il est partagĂ© par moitiĂ© entre lâinventeur et le propriĂ©taire ; - Les Ă©paves : ce sont des biens qui ont Ă©tĂ© perdus, mais pas dĂ©libĂ©rĂ©ment abandonnĂ©s par leur propriĂ©taire. La dĂ©couverte des Ă©paves maritimes fait lâobjet dâune publicitĂ© afin de permettre au propriĂ©taire Ă©ventuel de se faire connaĂźtre. A dĂ©faut de revendication, les Ă©paves maritimes sont revendues au profit de lâEtat ; les Ă©paves telles que les objets trouvĂ©s sur la voie publique sont le plus souvent dĂ©posĂ©es par leurs inventeurs auprĂšs du bureau des objets trouvĂ©s ; la 23
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possession de ces
biens leur sera dĂ©volue aprĂšs un an et un jour, sâils nâont pas Ă©tĂ© rĂ©clamĂ©s entre temps. La question de savoir sâils bĂ©nĂ©ficient dâune prescription acquisitive leur confĂ©rant la propriĂ©tĂ© en bonne et due forme est dĂ©battue : Malaurie et AynĂšs considĂšrent que lâinventeur, qui vient reprendre le bien au bout dâun an et un jour est de bonne foi, et peut donc se voir accorder le bĂ©nĂ©fice de la prescription triennale ; TerrĂ© et Simler considĂšrent eux que lâinventeur sait pertinemment nâĂȘtre pas le propriĂ©taire du bien, pour lâavoir trouvĂ© et avoir dĂ©clarĂ© la perte de ce bien par un tiers ; ce faisant, ils ne pourraient, selon ces auteurs, se prĂ©valoir du bĂ©nĂ©fice de lâarticle 2279. 3.2. La possession La reconnaissance de la possession par le Code civil obĂ©it Ă des mĂ©canismes trĂšs gĂ©nĂ©raux, hĂ©ritĂ©s pour certains du droit romain, liĂ©s Ă la paix sociale, tels la prĂ©fĂ©rence donnĂ©e Ă celui qui respecte la fonction du bien plutĂŽt quâĂ celui qui lâaura abandonnĂ©, ou pour favoriser le maintien des situations Ă©tablies plutĂŽt que le rĂ©tablissement de droits en faveur dâun ancien propriĂ©taire. Cette logique se comprend dâautant mieux que le Code civil a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© en 1804 par et pour les bĂ©nĂ©ficiaires de la RĂ©volution de 1789⊠Si lâoccupation ne porte que sur les biens sans maĂźtre, la possession sâapplique Ă lâensemble des biens. La possession se dĂ©finit comme la maĂźtrise de fait, le pouvoir physique exercĂ© sur une chose, que ce pouvoir de fait coĂŻncide ou non avec le pouvoir de droit. Le propriĂ©taire est possesseur de sa chose. En revanche, le possesseur de la chose peut ne pas en ĂȘtre le propriĂ©taire, et câest lĂ que la notion de possession prend toute son importance. 3.2.1. CaractĂ©ristiques de la possession 3.2.1.1. RĂ©union dâun corpus et dâun animus Le corpus est lâĂ©lĂ©ment matĂ©riel de la possession : lâarticle 2228 du Code civil renvoie Ă la « dĂ©tention ou Ă la jouissance dâune chose ou dâun droit ». La reconnaissance de la possession suppose lâaccomplissement dâactes matĂ©riels de possession, ce qui implique pour le possesseur quâil se comporte Ă lâĂ©gard de la chose comme sâil en Ă©tait le propriĂ©taire, et quâil pourvoie notamment Ă son entretien (actes de dĂ©tention), ou quâil lâutilise dâun point de vue Ă©conomique, en percevant notamment des loyers sur le bien (actes de jouissance). A dĂ©faut dâactes matĂ©riels de possession, le possesseur ne pourra voir son titre validĂ© (Civ 3Ăšme , 30 juin 1999, JCP 2000 II 10399). ConformĂ©ment Ă lâarticle 2230, celui qui dĂ©tient un lien physique direct avec la chose est prĂ©sumĂ© en ĂȘtre le possesseur (« On est toujours prĂ©sumĂ© possĂ©der pour soi »). Cependant, le possesseur peut exercer son lien direct avec la chose au travers de son locataire, lequel sait ĂȘtre le locataire du bien qui lui a Ă©tĂ© louĂ© par le possesseur. Ce faisant, le locataire ne sera pas regardĂ© comme possesseur de la chose, mais comme un dĂ©tenteur prĂ©caire, possĂ©dant pour autrui la chose (article 2236). Or, « Quand on a commencĂ© Ă possĂ©der pour autrui, on est toujours prĂ©sumĂ© possĂ©der au mĂȘme titre, sâil nây a preuve contraire ». Si le locataire, dĂ©tenteur prĂ©caire, veut voir sa qualitĂ© Ă©voluer et devenir possesseur Ă son tour, il faut quâil obtienne une interversion de son titre. Le fait de rester dans les lieux Ă lâexpiration du bail ne suffira pas, il faudra quâil prouve avoir fait des dĂ©marches effectives auprĂšs du possesseur ou du propriĂ©taire au sujet du renouvellement de son bail, et quâensuite il se soit 24
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comporté en propriétaire
de la chose louĂ©e. Cas des fermiers ayant cherchĂ© Ă obtenir la confirmation de leur propriĂ©tĂ© sur les biens louĂ©s Ă des propriĂ©taires disparus pendant la seconde guerre mondiale. Lâanimus est lâĂ©lĂ©ment intentionnel, qui vient nĂ©cessairement complĂ©ter les actes matĂ©riels de possession. Lâanimus, câest la volontĂ© de se comporter en possesseur ou en propriĂ©taire de la chose quâon dĂ©tient. Le dĂ©tenteur dâun bien, quâil sait ĂȘtre la propriĂ©tĂ© dâun autre (emprunteur, crĂ©ancier gagiste, notamment) ne peut se prĂ©valoir dâun animus domini sur la chose en question. La prĂ©somption dâanimus domini dĂ©coule de lâarticle 2230 du Code civil, qui Ă©nonce quâon est rĂ©putĂ© possĂ©der pour soi, sâil nâest prouvĂ© quâon a commencĂ© Ă possĂ©der pour autrui. 3.2.1.2. Absence de vices La possession ne produira dâeffets que si elle est continue, paisible, publique et non Ă©quivoque (article 2229), et pourvu que le possesseur soit de bonne foi (article 2279 notamment). - La possession doit ĂȘtre exercĂ©e « dans toutes les occasions comme Ă tous les moments oĂč elle devait lâĂȘtre dâaprĂšs la nature de la chose possĂ©dĂ©e, sans intervalles anormaux assez prolongĂ©s pour constituer des lacunes et rendre la possession discontinue » (Civ, 11 janvier 1950, D 1950, 125). Le fait de laisser un terrain en jachĂšre peut ne pas attenter au caractĂšre continu de la possession si la jachĂšre fait partie du mode dâexploitation normal de ce terrain. - Le possesseur ne doit pas faire usage de violence pour sâemparer de la chose ; câest le contradicteur du possesseur qui devra faire la preuve de lâusage de la violence pour lâappropriation de la chose. La possession utile ne commence que quand la violence a cessĂ©. Or le fait pour le possesseur dâutiliser tous les moyens lĂ©gaux pour se maintenir dans les lieux ne constitue pas un vice. Le squatter qui entre dans un appartement en cassant la porte ne peut se prĂ©valoir de sa possession lĂ©gitime dans la mesure oĂč il a fait preuve de violence pour entrer dans les lieux. - La possession doit sâexercer ouvertement. La possession manifeste, soumise au regard de tout tiers est une bonne façon dâĂ©tablir lâexistence dâun animus domini. A lâinverse, une possession occulte ne peut que rĂ©vĂ©ler la conscience quâa le possesseur du caractĂšre illĂ©gitime de sa possession. - La possession ne doit pas ĂȘtre Ă©quivoque. Or la possession est Ă©quivoque lorsque les actes accomplis peuvent sâexpliquer autrement que par une intention de se comporter comme un possesseur. Câest le cas de lâacte de dĂ©tention ou de jouissance accompli par un indivisaire en lieu et place de lâindivision, ou par le conjoint ou un membre de la famille du propriĂ©taire : dans de telles circonstances, lâindivisaire, le conjoint ou le parent ne pourra pas se prĂ©valoir de sa possession, celle-ci Ă©tant Ă©quivoque. - Le possesseur doit ĂȘtre de bonne foi, ce qui est un impĂ©ratif en matiĂšre mobiliĂšre (article 2279 du Code civil) comme en matiĂšre immobiliĂšre (article 550 : « le possesseur est de bonne foi quand il possĂšde comme propriĂ©taire en vertu dâun titre translatif de propriĂ©tĂ© dont il ignore les vices. Il cesse dâĂȘtre de bonne foi du moment oĂč ces vices lui sont connus. ») 25
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3.2.2. Effets juridiques
de la possession 3.2.2.1. En matiĂšre mobiliĂšre : « en fait de meubles, possession vaut titre » (article 2279) Ce principe sâapplique pourvu que la possession ne soit pas viciĂ©e, quâelle remplisse les critĂšres Ă©numĂ©rĂ©s ci-dessus. De fait, la possession ne vaut titre que si les meubles sont susceptibles dâune tradition manuelle, remis de la main Ă la main sans Ă©crit particulier. Ce qui exclut de facto tous les meubles incorporels, et la plupart des biens immatriculĂ©s (navires ou aĂ©ronefs) ; les vĂ©hicules automobiles, mĂȘme sâils sont soumis Ă immatriculation, peuvent tomber sous le coup de lâarticle 2279, les mentions de la carte grise ne constituant pas une preuve absolue interdisant de prendre en considĂ©ration les critĂšres de la possession (Civ 1Ăšre , 11 juillet 1960, D 1960, 702). Le possesseur doit ĂȘtre de bonne foi, sa bonne foi Ă©tant apprĂ©ciĂ©e au jour de son entrĂ©e en possession. Ces deux critĂšres Ă©tant rĂ©unis, la possession vaut titre. Lâarticle 2279 permettra notamment dâaccorder la propriĂ©tĂ© dâun bien au possesseur de celui- ci, qui le tiendra de son propriĂ©taire initial, si le propriĂ©taire le lui a remis et conteste ensuite le transfert de propriĂ©tĂ©, en lâabsence de tout Ă©crit. La prĂ©somption de propriĂ©tĂ© dĂ©coulant de lâapplication de lâarticle 2279 nâest quâune prĂ©somption simple, et non irrĂ©fragable. Si le propriĂ©taire arrive Ă dĂ©montrer judiciairement que lâun au moins des deux critĂšres nâest pas rempli, le bien devra lui ĂȘtre restituĂ© par celui qui se prĂ©valait de sa possession. Câest notamment le cas du sous-acquĂ©reur dâun vĂ©hicule automobile dont la vente initiale avait Ă©tĂ© assortie dâune clause de rĂ©serve de propriĂ©tĂ© au profit du vendeur. Le sous-acquĂ©reur a eu beau allĂ©guer sa possession, la propriĂ©tĂ© du vĂ©hicule a Ă©tĂ© attribuĂ©e au vendeur initial (Civ 1Ăšre , 14 mai 1996, n°93-21187). La Cour de cassation a considĂ©rĂ© que le sous- acquĂ©reur, en ne se faisant pas remettre la carte grise du vĂ©hicule, ne pouvait opportunĂ©ment se prĂ©valoir dâune possession non Ă©quivoque. Le jeu de lâarticle 2279 est plus dĂ©licat quand le possesseur ne tient pas le bien litigieux du propriĂ©taire initial de celui-ci. Dans un tel cas, il faut rĂ©unir davantage de conditions : - Le possesseur doit ĂȘtre pourvu dâun corpus et dâun animus ; - Il doit ĂȘtre de bonne foi ; - Sa possession doit ĂȘtre exempte de vices ; - Elle doit porter sur un bien meuble corporel ; - Le propriĂ©taire initial doit sâĂȘtre dessaisi volontairement de son bien au profit de la personne qui lâa ensuite transmis au possesseur, mĂȘme dans le cadre dâune escroquerie ou dâun abus de confiance. Le principe de lâarticle 2279 ne sâefface quâen cas de perte ou de vol subi par le propriĂ©taire du bien. Dans ce cas, le propriĂ©taire volĂ© a un dĂ©lai de trois ans Ă compter du vol ou de la perte pour revendiquer son bien. Lâaction est prescrite au delĂ , et la propriĂ©tĂ© est alors acquise au possesseur, pourvu quâil ne soit pas le voleur. Si le possesseur, qui nâest pas le voleur, a dĂ» restituer le bien au propriĂ©taire initial, il dispose dâun recours contre celui qui lui a transmis le bien litigieux. 26
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Accessoirement, si le
voleur a gardĂ© le bien, le propriĂ©taire dispose contre le voleur dâune action civile qui ne se prescrit que par trente ans (article 2262). 3.2.2.2. En matiĂšre immobiliĂšre : lâusucapion Lâarticle 2262 prĂ©voit une prescription extinctive trentenaire pour lâaction en revendication du propriĂ©taire. Par ailleurs, lâarticle 2279 prĂ©voit que le possesseur de bonne foi dâun bien meuble corporel en est instantanĂ©ment propriĂ©taire. De ce fait, pour les biens meubles incorporels et pour les immeubles, il faudra justifier dâune possession pendant trente ans pour se prĂ©valoir de la propriĂ©tĂ© du bien ainsi dĂ©tenu. Ce mĂ©canisme dâappropriation dâun bien, le plus souvent immeuble, est dĂ©nommĂ© usucapion. Il importe peu ici de savoir si le possesseur acquĂ©rant la propriĂ©tĂ© est de bonne ou de mauvaise foi. Il suffit simplement de constater la prĂ©sence dâune possession constituĂ©e dâun animus et dâun corpus, qui ne soit pas entachĂ©e de vice. Il faut que cette possession ait durĂ© trente ans. Le point de dĂ©part du dĂ©lai dâusucapion est fixĂ© Ă la date dâentrĂ©e en possession. Si Ă cette date toutes les conditions de la possession nâĂ©taient pas rĂ©unies, le dĂ©lai ne court quâĂ compter de la rĂ©union des Ă©lĂ©ments de la possession. Cf le cas des fermiers revendiquant les terrains dont les propriĂ©taires Ă©taient morts en dĂ©portation. Une fois que le point de dĂ©part est Ă©tabli, il faut dĂ©compter une durĂ©e de trente ans. Il nâest pas nĂ©cessaire, sur une telle durĂ©e, que la possession soit exercĂ©e par la mĂȘme personne : lâarticle 2235 prĂ©voit que lâon peut joindre Ă sa possession celle de son auteur, de quelque maniĂšre quâon lui ait succĂ©dĂ© : la possession du pĂšre profite au fils. Mais le dĂ©lai trentenaire peut ĂȘtre suspendu, partant du principe que la prescription ne court pas contre celui qui ne peut agir. La prescription ne court ni contre les mineurs non Ă©mancipĂ©s, ni contre les majeurs sous tutelle, et ne court pas non plus entre Ă©poux (articles 2252 et 2253 du Code civil). La jurisprudence a mĂȘme suspendu le cours de la prescription dans des cas de force majeure tels que guerres, invasions, Ă©pidĂ©mies, qui auraient empĂȘchĂ© le propriĂ©taire dâavoir connaissance de son droit de propriĂ©tĂ© ou de mener les actions permettant de le protĂ©ger (Civ 1Ăšre , 22 dĂ©cembre 1959, JCP 1960, II, 11494). Lorsque la pĂ©riode de suspension sâarrĂȘte, le dĂ©compte de la prescription reprend lĂ oĂč la suspension lâavait suspendu. Il peut Ă©galement ĂȘtre interrompu, lorsque le possesseur est privĂ© de la jouissance de la chose pendant plus dâun an, soit par lâancien propriĂ©taire, soit par un tiers (article 2243 : la perte du corpus fait perdre son effet Ă la possession) ; lorsque le possesseur reconnaĂźt les droit de celui contre qui la prescription courait (article 2248 : ici, câest pour un dĂ©faut dâanimus) ; en cas de citation en justice (article 2244), en particulier dans le cas oĂč le propriĂ©taire met en Ćuvre une action en revendication. Si le possesseur devait retrouver en possession du bien dans le cadre de lâarticle 2243, ou le rester dans le cadre de lâarticle 2244, le dĂ©lai de prescription trentenaire repart de zĂ©ro. Lâexpiration du dĂ©lai trentenaire ouvre au possesseur le droit de faire reconnaĂźtre sa propriĂ©tĂ©, avec effet rĂ©troactif Ă la date dâentrĂ©e en possession. La demande pourra ĂȘtre faite par le possesseur ou par un de ses crĂ©anciers dans le cadre de lâaction oblique. La reconnaissance de la propriĂ©tĂ© se fera par lâĂ©tablissement dâun acte de notoriĂ©tĂ© par un 27
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