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Audiovisuel public :
tous ensemble vers le numérique
Par Louis-Cyrille Trébuchet
et Benjamin Amalric1
Le 15 juin 2015
Les évolutions des technologies et des usages ont modifié en profondeur le secteur
des médias et des industries de contenus.
C’est un nouveau monde auquel l’audiovisuel public, dans son ensemble et
collectivement, doit s’adapter. Un monde plus ouvert oĂč l’accĂšs aux mĂ©dias et aux
contenus s’affranchit de plus en plus des frontiĂšres tant technologiques entre mĂ©dias
de l’écrit, de l’image et du son, que gĂ©ographiques ; le numĂ©rique est un espace
commun sur lequel l’ensemble des mĂ©dias se rejoignent tout en conservant leurs
spécificités - la radio filmée en est une illustration.
Un monde d’abondance de l’offre privĂ©e, qu’elle Ă©mane des acteurs traditionnels ou
des pure players (actifs uniquement sur Internet), oĂč le service public doit chaque jour
faire la preuve que sa spécificité, son accessibilité au sens le plus large, justifient
l’octroi à son profit d’une ressource publique de plus en plus contrainte. Un monde
plus complexe et en Ă©volution constante, oĂč le maintien des compĂ©tences et leur
dĂ©veloppement, ainsi que celui d’une culture de l’agilitĂ© dans l’entreprise, sont
devenus des enjeux majeurs de compétitivité.
Individuellement les sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public ont su prendre le virage du
numérique. Leurs offres sont de qualité par rapport à celles de leurs concurrents.
Cependant, dùs lors que l’on considùre l’empreinte globale de l’audiovisuel public, le
constat est nettement moins flatteur : une offre fragmentée, cloisonnée, parfois
redondante et confuse, des services qui se concurrencent, des infrastructures
1
Louis-Cyrille Trébuchet est consultant spécialisé dans la transformation numérique des médias et des industries
culturelles ; Benjamin Amalric est étudiant à SciencesPo Paris. Cette note a été réalisée avec le concours de deux
cadres dirigeants de l'audiovisuel public, qui ont souhaité conserver l'anonymat.
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techniques complexes et hétérogÚnes, une ergonomie trÚs variable selon les
services.
Au Royaume-Uni, la BBC met Ă  la disposition des usagers, sous sa banniĂšre unique,
un bouquet d’offres thĂ©matiques, transversales et complĂ©mentaires, sur une
infrastructure technique commune. Au bĂ©nĂ©fice du citoyen qui dispose ainsi d’un
accĂšs simplifiĂ© Ă  l’ensemble de l’offre de l’audiovisuel public et nourrit sans doute le
sentiment d’un usage intelligent et responsable de l’argent public.
En France, il est aujourd’hui urgent de mettre en Ɠuvre ce dont tout le monde ou
presque s’accorde Ă  reconnaĂźtre la nĂ©cessitĂ© : une vision intĂ©grĂ©e et ambitieuse de
l’offre numĂ©rique de l’audiovisuel public afin, grĂące Ă  la coordination des actions et Ă 
la mutualisation des ressources, de garantir aux usagers une offre ergonomique,
exhaustive et cohérente ; aux contribuables une efficacité économique renforcée ;
aux citoyens, une rĂ©novation du rĂŽle que joue l’audiovisuel public dans la cohĂ©sion
sociale, en retrouvant les clĂ©s d’un accĂšs Ă  de larges franges de la population.
Cette ambition pourrait se concrétiser selon deux axes :
1) S’agissant des moyens technologiques, l’ensemble des services numĂ©riques de
l’audiovisuel public (France TĂ©lĂ©visions, Radio France, France MĂ©dias Monde, Arte,
TV5 Monde et l’INA sont ici concernĂ©s) doit s’appuyer sur une infrastructure commune
pour l’hĂ©bergement et la publication des contenus et services. Cette infrastructure
sera mise en Ɠuvre par une entitĂ© de droit public (existante ou Ă  crĂ©er) dĂ©signĂ©e Ă 
cette fin, et dont la mission principale sera d’assurer l’hĂ©bergement, l’indexation et la
publication de l’ensemble des contenus, de mettre à disposition des outils transverses
de connaissance des publics (d’« intelligence client », pour reprendre un vocable
d’entreprise), d’animation marketing et, le cas Ă©chĂ©ant, de monĂ©tisation et de
commercialisation. La mutualisation des ressources donnera à l’ensemble plus
d’efficacitĂ© Ă©conomique, une prĂ©sence numĂ©rique plus large et un meilleur
rĂ©fĂ©rencement, une capacitĂ© d’innovation et une agilitĂ© accrues.
2) S’agissant des services, et sans rĂ©duire la capacitĂ© de chaque Ă©diteur, chaque
chaßne ou chaque programme à maintenir et développer des sites propres (pour
autant qu’ils procĂšdent de la mĂȘme infrastructure), le regroupement des forces des
sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public doit se traduire par une structuration des contenus
autour d’offres thĂ©matiques (ou « verticales ») communes, consacrĂ©es Ă  l’information,
Ă  la culture et au spectacle vivant, aux jeunes adultes, Ă  l’éducation

Les offres de tĂ©lĂ©vision de rattrapage et de podcast, de vidĂ©o Ă  la demande Ă  l’acte
et demain par abonnement, pourront Ă©galement ĂȘtre regroupĂ©es pour bĂ©nĂ©ficier de la
dynamique des offres croisées et des propositions additionnelles. En complément de
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ces offres thĂ©matiques, chaque Ă©diteur pourra s’appuyer sur ces ressources
communes pour distribuer des services qui lui sont propres, permanents ou
Ă©vĂ©nementiels, et s’adresser Ă  des territoires de marques spĂ©cifiques.
Evidemment, et sauf à envisager un service public à nouveau unifié (ce qui ne devrait
pas ĂȘtre un tabou mais soulĂšve des enjeux dĂ©passant le cadre de cette analyse),
donner une forme concrĂšte Ă  ces propositions suppose d’instituer un pilotage serrĂ©, et
une « gouvernance » adaptée, pour surmonter les inerties et les blocages qui
empĂȘchent aujourd’hui en pratique toute coopĂ©ration spontanĂ©e.
Pour dĂ©signer un pilote crĂ©dible et Ă©viter les surcoĂ»ts de la crĂ©ation d’une entitĂ© ex
nihilo, deux options paraissent envisageables : s’appuyer sur France TĂ©lĂ©visions
Editions Numériques, qui seule possÚde une taille critique et une couverture
suffisante des offres et services Ă©voquĂ©s ici ; ou sur l’INA, dont les missions, la forme
juridique et l’expertise numĂ©rique sont a priori compatibles avec les objectifs fixĂ©s.
Ces deux acteurs semblent Ă  mĂȘme d’assurer la maĂźtrise d’ouvrage opĂ©rationnelle
d’un tel projet, dans le cadre d’une gouvernance collĂ©giale.
En tout Ă©tat de cause, il reviendra Ă  l’Etat, qui est Ă  la fois tutelle, financeur,
actionnaire et stratĂšge, d’intervenir avec dĂ©termination pour fixer des objectifs, une
mĂ©thode et des leviers d’action. L’arrivĂ©e de nouveaux dirigeants Ă  France
TĂ©lĂ©visions et Ă  l’INA, la nĂ©gociation du Contrat d’Objectifs et de Moyens de Radio
France, et la crĂ©ation Ă©ventuelle de l’instance de pilotage stratĂ©gique de l’audiovisuel
public, préconisée par Marc Schwartz dans le rapport « France Télévisions 2020 : Le
chemin de l’ambition », crĂ©ent les conditions d’une telle impulsion.
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PREAMBULE
1.1 - LE MONDE A CHANGÉ
Les Ă©volutions des technologies et des usages ont modifiĂ© en profondeur l’environnement dans
lequel s’exprime la loi de l’offre et de la demande. DĂ©sormais, la capacitĂ© des entreprises Ă  s’adapter
sans cesse pour maintenir ou développer leurs positions concurrentielles est vitale.
Les industries de contenu sont particuliĂšrement touchĂ©es par cette transformation. Il n’est pas un seul
domaine de leur activitĂ© qui ne soit bouleversĂ© par le numĂ©rique : la production, l’édition et la
distribution des contenus et services, la relation avec les consommateurs-usagers, la communication
et le marketing. L’adaptation n’est donc pas seulement nĂ©cessaire, elle est Ă©galement urgente et doit
se déployer à partir de trois constats.
Le « terrain de jeu » s’est ouvert : il est mondial
Les barriÚres géographiques se sont abaissées et les acteurs mondiaux peuvent prendre pied sur
notre marché domestique, avec la puissance financiÚre et les avantages compétitifs et souvent
réglementaires qui leur sont propres. Dans une perspective moins défensive, il est nécessaire de
partir Ă  la conquĂȘte de nouveaux marchĂ©s et de nouveaux publics depuis ses propres bases et de
dĂ©velopper d’importantes synergies entre les activitĂ©s nationales et internationales.
Les barriÚres technologiques se sont souvent ouvertes et déplacées. Au cours des derniÚres
dĂ©cennies, le secteur de l’audiovisuel s’était structurĂ© - et aussi cloisonnĂ© - autour de ses rĂ©seaux de
distribution, réseaux géographiquement limités, et dédiés à la télévision, à la radio. Avec Internet, ces
cloisons ont volĂ© en Ă©clat. La convergence, les synergies entre image, son et texte, n’ont jamais Ă©tĂ©
aussi Ă©videntes.
Le téléspectateur - auditeur - usager occupe une place centrale
Le mot d’ordre de la transformation numĂ©rique de la plupart des industries est d’ĂȘtre « user centric »,
c’est-Ă -dire centrĂ© sur les utilisateurs. Les mĂ©dias n’y font pas exception, tout particuliĂšrement les
acteurs de l’audiovisuel public qui portent une responsabilitĂ© supplĂ©mentaire vis-Ă -vis du citoyen qui
les finance à travers le paiement de la contribution à l’audiovisuel public.
ConcrĂštement, quelles sont, Ă  l’ùre du numĂ©rique, les attentes du tĂ©lĂ©spectateur – auditeur
aujourd’hui Ă©galement internaute et mobinaute ? Un accĂšs simple et intelligent Ă  l’ensemble de l’offre
de service public (autrement dit, une proposition éditoriale cohérente et riche, une expérience unifiée
et un moteur de recherche performant couvrant l’ensemble des contenus) ; une capacitĂ© Ă  cheminer
et à découvrir un contenu pertinent, y compris inopinément (en serendipité) ; une forme de
personnalisation des services, fondĂ©e sur le dĂ©veloppement de l’interactivitĂ©, de la recommandation
et de la prescription individuelle ; et, bien sûr, une relation basée sur la confiance et la transparence
avec l’éditeur de service qui repose sur des ambitions de diversitĂ© et de pluralisme et non
exclusivement sur les intĂ©rĂȘts commerciaux de l’éditeur lui-mĂȘme ou de ses annonceurs.
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Dans le secteur de l’industrie et des services, on parle de « casser les silos » ; ici, les silos ce sont la
tĂ©lĂ©vision d’un cĂŽtĂ©, la radio de l’autre, plus loin les archives audiovisuelles

La maĂźtrise de la complexitĂ© et la recherche d’agilitĂ© : des enjeux essentiels de compĂ©titivitĂ©
La maßtrise des technologies numériques est un atout majeur ; son absence, un handicap fatal. Ainsi
par exemple des systĂšmes de distribution des contenus : Ă  l’ùre digitale, un mĂ©dia doit concevoir et
déployer un ou plusieurs sites web, une ou plusieurs applications mobiles, des dispositifs spécifiques
sur les rĂ©seaux sociaux. Ces dispositifs technologiques doivent ĂȘtre compatibles avec l’ensemble des
standards internet du marché, avec les différents navigateurs web et leur différentes versions, avec
l’ensemble des terminaux mobiles et les systĂšmes d’exploitation qu’ils hĂ©bergent, avec les versions
successives des protocoles Facebook, Twitter, Youtube, pour ne citer que les principaux. Cette
complexité est inouïe et les technologies qui la composent évoluent toutes à un rythme qui ne cesse
de s’accĂ©lĂ©rer.
L’acquisition et le dĂ©veloppement des compĂ©tences technologiques, sont des enjeux vitaux pour la
performance et Ă  la rĂ©activitĂ© des entreprises de l’audiovisuel public.
1.2 - L’AUDIOVISUEL PUBLIC EN ORDRE DISPERSE FACE A CE NOUVEAU PARADIGME
C’est vĂ©ritablement en 2007, avec le lancement de l’iPhone, que la prise de conscience du puissant
mouvement qui allait bouleverser l’audiovisuel s’est gĂ©nĂ©ralisĂ©e. Depuis lors, chaque opĂ©rateur de
l’audiovisuel public, isolĂ©ment, s’est efforcĂ© de dĂ©velopper son infrastructure et son offre digitales.
Prises individuellement, la plupart de ces offres n’ont pas à rougir devant celles des concurrents
directs, que ce soit en terme de richesse Ă©ditoriale ou d’innovation technologique.
Cependant lorsque l’on considĂšre le pĂ©rimĂštre de l’audiovisuel public dans son ensemble (France
TĂ©lĂ©visions, Radio France, Institut National de l’Audiovisuel, France MĂ©dias Monde, Arte) et que l’on
analyse l’offre ainsi proposĂ©e Ă  l’auditeur – tĂ©lĂ©spectateur – usager, force est de constater qu’il existe
de nombreuses marges d’amĂ©lioration.
Pour le tĂ©lĂ©spectateur – auditeur numĂ©rique, l’audiovisuel public offre un visage fragmentĂ© et
en partie appauvri
L’offre digitale de l’audiovisuel public est fragmentĂ©e, sans passerelle entre les univers de la
tĂ©lĂ©vision, de la radio, des archives, voire entre diffĂ©rents services d’un mĂȘme mĂ©dia. C’est une offre
« en silo » qui ne permet pas d’accĂ©der simplement Ă  toute la richesse des contenus disponibles, ni
mĂȘme, et c’est plus grave, de leur assurer la visibilitĂ© maximale que leur qualitĂ© justifierait. Les
services sont au contraire souvent redondants voire concurrents, lĂ  oĂč les moyens devraient ĂȘtre mis
en commun au bĂ©nĂ©fice d’un seul et mĂȘme usager. Quelques exemples de telles situations
anormales en attestent.
Sur l’information en ligne, tout d’abord, comment justifier, du point de vue du contribuable, la
coexistence de deux services totalement distincts Ă©ditorialement et techniquement :
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- francetvinfo.fr, offre complĂšte d’information en lignĂ© Ă©ditĂ©e par France TĂ©lĂ©visions,
indépendante des journaux des chaßnes de FTV, et qui, dotée de moyens conséquents
(plusieurs dizaines de journalistes dĂ©diĂ©s) s’est imposĂ©e aux premiers rangs des offres
numériques de médias audiovisuels, devant de nombreux sites de journaux pourtant lancés
plusieurs années auparavant ;
- franceinfo.fr, qui a Ă©tĂ© conçu comme un prolongement et un complĂ©ment de l’antenne de
France Info et qui, faute de moyens, n’est pas parvenu depuis son lancement à s’imposer
dans l’univers des sites d’information, alors mĂȘme que France Info est sans doute la plus
belle marque française d’information en temps rĂ©el.
Comment ne pas regretter que la qualité technologique et la force de frappe éditoriale de
Francetvinfo ne puissent se conjuguer avec la puissance de la marque et avec une antenne qui vit
vĂ©ritablement dans l’instant ?
Sur l’information internationale, ne pourrait-on envisager que l’offre numĂ©rique de France 24, elle
aussi largement le reflet ou le prolongement de l’antenne Ă©ponyme, dans le cadre contraint des
moyens de France MĂ©dia Monde, puisse s’appuyer sur la richesse et la profondeur de l’offre vidĂ©o de
FTV, et bien sûr aussi sur la capacité de production de Geopolis, service de France Télévisions dédié
Ă  l’information internationale en ligne qui, malgrĂ© des moyens non nĂ©gligeables, reste confidentiel ?
De la mĂȘme maniĂšre, comment l’internaute perçoit-il la complĂ©mentaritĂ© et l’articulation des offres
culturelles d’Arte (Arte Concerts), de France TĂ©lĂ©visions (Culturebox), de la plateforme numĂ©rique de
l’INA ou des informations culturelles disponibles sur les sites de Radio France ?
On ne peut que constater la dispersion des efforts, la confusion pour l’usager et parfois mĂȘme l’effet
dĂ©lĂ©tĂšre d’une concurrence entre acteurs de la mĂȘme famille, par exemple sur la nĂ©gociation de
droits exclusifs, ou au contraire en doublon, auprĂšs des producteurs d’évĂ©nements culturels. Bien
sûr, la diversité des offres et des marques, la co-existence de sites de chaßnes (ou de programmes)
et d’offres thĂ©matiques « verticales », est souhaitable pour une meilleure couverture de l’ensemble
des situations d’usage. Pour autant, il faut que les marques et les offres soient conçues et organisĂ©es
pour en optimiser la cohĂ©rence et l’efficacitĂ©, et que la production ou l’acquisition des contenus soient
mutualisĂ©es chaque fois que c’est possible, ce qui n’est, Ă  l’évidence, pas le cas aujourd’hui.
Comment expliquer, alors que la plupart des acteurs du e-commerce recherchent la taille critique et
l’accĂšs aux places de marchĂ©, que l’audiovisuel public puisse juxtaposer les offres ou les projets de
vidéo à la demande (VàD) et de vidéo à la demande avec abonnement (VàDA) de France
TĂ©lĂ©visions (Pluzz), d’ARTE et de l’INA, sans passerelle ni possibilitĂ© de ventes croisĂ©es.
Enfin, la difficultĂ© de l’audiovisuel public Ă  construire une offre destinĂ©e aux jeunes adultes est
patente. Tous les acteurs du secteur s’accordent Ă  considĂ©rer qu’une telle offre doit impĂ©rativement
reposer sur un pilier numérique fort et, certainement, sur une identité, des supports, des formats et
des codes trĂšs Ă©loignĂ©s de ceux de l’offre actuelle du(des) service(s) public(s), trĂšs tournĂ©e vers le
cƓur de son public (ĂągĂ© et vieillissant2
, catégories sociaux professionnelles supérieures). Aucune
2
Rapport « France TĂ©lĂ©visions 2020 : le chemin de l’ambition », Marc Schwartz, 2015 : « Le vieillissement des
tĂ©lĂ©spectateurs est un enjeu majeur des groupes audiovisuels publics comme privĂ©s, l’ñge moyen Ă©tant de 50 ans
en 2014 (contre 48,2 ans en 2011, soit une progression annuelle moyenne de 6 mois en 3 ans), contre 42,5 ans
pour la population française de 4 ans et plus »
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des initiatives rĂ©centes (Mouv’, nouveau France 4, Arte Creative, nouvelles Ă©critures FTV) n’a
rĂ©ellement trouvĂ© un large public. N’y a-t-il pas moyen de constituer une force de frappe entiĂšrement
dédiée à ce « non public »3
Ă©videmment prioritaire, lĂ  oĂč elle n’est aujourd’hui, au sein de chacun des
opĂ©rateurs, au mieux qu’un Ă©tendard destinĂ© Ă  donner une image de modernitĂ© et Ă  masquer le fait
que la jeunesse n’est de fait, et malgrĂ© les intentions proclamĂ©es, pas une prioritĂ© ? «
Des modalitĂ©s d’organisation diffĂ©rentes d’un opĂ©rateur Ă  l’autre ; une mosaĂŻque de choix
technologiques
Depuis à peu prÚs une décennie, France Télévisions a fait le choix structurant de regrouper ses
activitĂ©s numĂ©riques au sein d’une entitĂ© centrale et transverse, France TĂ©lĂ©visions Editions
NumĂ©riques (FTVEN), qui dispose de ressources importantes (170 collaborateurs, 24 millions d’euros
de charges externes et 12 millions d’euros de dĂ©penses d’investissement annuelles). Cette
entitĂ© assure la production et l’édition des services numĂ©riques du groupe, c’est-Ă -dire leur
conception, leur fabrication et leur exploitation. A cet effet, elle dispose d’une Ă©quipe d’environ
cinquante « Ă©diteurs » (chefs de produits, chefs de projets, chargĂ©s d’édition numĂ©riques) et
d’environ dix « producteurs » (conseillers de programmes numĂ©riques) en charge des nouvelles
Ă©critures.
Selon la nature des services, les contenus peuvent ĂȘtre produits directement par FTVEN ou par les
journalistes des rédactions de France Télévisions. FTVEN assure également le marketing digital de
ces services numĂ©riques ; cette activitĂ©, trĂšs Ă©largie et qui s’appuie sur une quarantaine de
collaborateurs, comprend les études, les acquisitions et la fidélisation des audiences, les
partenariats, les jeux en ligne, la télématique, le webdesign
 Enfin, FTVEN a la responsabilité de la
conception, du dĂ©veloppement et de l’exploitation des plateformes technologiques ; sa direction
technique s’appuie lĂ  encore sur une quarantaine de collaborateurs dĂ©diĂ©s, chefs de projet,
architectes, ingĂ©nieurs d’exploitation et dĂ©veloppeurs. Cette organisation centralisĂ©e confĂšre Ă 
France Télévisions une plus grande réactivité et plus de cohérence et de simplicité dans les
processus, notamment de décision. Cependant la synergie entre les activités et les ressources
déployées sur le numérique et les activités historiques de France Télévisions restent assez faibles,
ce qui Ă  moyen terme peut fortement limiter le dĂ©veloppement de l’entreprise.
L’organisation pour le numĂ©rique Ă  Radio France est comparable sur le principe Ă  celle de France
Télévisions, mais avec des moyens beaucoup plus limités. La Direction des Nouveaux Médias
dispose d’un budget annuel de 4,6 millions d’euros pour les charges externes, de deux millions
d’euros pour les investissements et s’appuie sur une Ă©quipe de 48 collaborateurs permanents. Cette
entitĂ© assure la conception, l’édition et l’exploitation des services numĂ©riques, la conception, le
dĂ©veloppement et l’exploitation des infrastructures techniques (avec de faibles moyens, huit chefs de
projets et développeurs) et le marketing digital des offres (là encore avec des moyens réduits, quatre
3
Expression issue de la démarche de démocratisation du théùtre public, utilisée pour désigner cette (large) partie de
la population qui n’en franchit pas les portes. Marion Denizot notait par exemple que cette notion « permet de
dĂ©noncer le « dĂ©ficit dĂ©mocratique de l'action culturelle » (Marie-Ange Rauch) et doit donc ĂȘtre entendue comme
une volonté de restaurer le rÎle du citoyen dans la vie artistique afin de créer du lien social par la culture ». Voir
Marion Denizot, « 1968, 1998, 2008 : le théùtre et ses fractures générationnelles Entre malentendus et héritages
méconnus », Sens Public, 2009
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collaborateurs). Contrairement Ă  France TĂ©lĂ©visions, Radio France s’appuie de façon beaucoup plus
accentuée sur les rédactions et les équipes de production de radio pour produire les contenus des
services numériques.
De son cotĂ©, l’INA a fait un choix d’organisation sensiblement diffĂ©rent, et a rĂ©parti ses diffĂ©rentes
activités numériques sur plusieurs directions :
- La direction des collections, pour le DépÎt légal du web,
- La direction de l’enseignement et de la recherche pour les activitĂ©s de formations liĂ©es aux
métiers, filiÚres et enjeux du numérique,
- La direction des contenus pour la vente et la valorisation des contenus vers les
professionnels et le grand public.
C’est dans cette derniĂšre que sont Ă©laborĂ©es et pilotĂ©es les principales activitĂ©s numĂ©riques
« busines to bussiness » (« B2B » ou interprentreprises) et « business to consumer » (« B2C »,
dédié aux consommateurs) au sein du département des éditions multimédia, dont les missions sont
de valoriser et promouvoir le patrimoine audiovisuel sous toutes les formes, toucher tous les publics
via les différents dispositifs, plateformes et interfaces numériques, sur des modÚles économiques
mixtes gratuits et payants.
Les principales activités du département sont (1) la conception et réalisation de sites et applications
web Ă©ditorial pour des partenaires et clients B2B, (2) l’édition de sites web et la gestion des rĂ©seaux
sociaux, chaĂźnes vidĂ©o et audio sur les principales plateformes du marchĂ©, (3) l’édition des
plateformes de vidéo à la demande et prochainement la vidéo à la demande avec abonnement grand
public, (4) la production et co production de web documentaires et objets transmédia. Ce
dĂ©partement dispose d’une vingtaine de personnes affectĂ©es Ă  l’éditorial, la conception, la gestion
des propositions et le marketing digital et s’appuie sur une Ă©quipe technique de cinq Ă  dix personnes
selon les projets.
Du point de vue technologique, chaque acteur a fait le choix de développer sa propre infrastructure et
de gérer seul la complexité inhérente au développement et du maintien en conditions opérationnelles
des infrastructures, des sites et des applications mobiles, et en particulier à l’effort constant pour
garantir la compatibilité des outils avec les différentes normes, en perpétuelle évolution, et les
nouveaux terminaux. Les dispositifs techniques mis en Ɠuvre par les diffĂ©rents acteurs de
l’audiovisuel public sont trĂšs souvent redondants (un mĂȘme investissement est effectuĂ© deux ou
plusieurs fois) ; mĂȘme s’ils portent sur les mĂȘmes fonctionnalitĂ©s, ils reposent sur des choix
technologiques peu ou pas interopérables. Par ailleurs, il est souvent difficile pour ces structures
d’acquĂ©rir, de dĂ©velopper et surtout de conserver les talents nĂ©cessaires Ă  la conception et Ă 
l’évolution de ces plateformes numĂ©riques. Pris globalement pour l’ensemble de l’audiovisuel public,
cette juxtaposition d’actifs technologiques, de mĂ©thodes, de ressources et de compĂ©tences paraĂźt
peu efficace et mal rĂ©pondre aux enjeux de maĂźtrise de la complexitĂ©, d’agilitĂ© et d’adaptabilitĂ©.
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1.3 - L’EXEMPLE DE LA BBC
A l’inverse, la BBC a su proposer un service cohĂ©rent et unifiĂ© Ă  ses usagers. Comme c’est le cas
dans la trÚs grande majorité des pays européens4
(Allemagne et SuĂšde exceptĂ©es), l’audiovisuel
public britannique est regroupĂ© au sein d’une seule et mĂȘme entitĂ© qui perçoit l’équivalent de la
redevance audiovisuelle, conçoit et exploite les services de télévision, de radio, et les services en
ligne. Ces derniÚres années, la BBC a renversé le paradigme en plaçant le digital au centre de son
organisation et de sa stratégie.
L’offre digitale de la BBC, si elle permet Ă©videmment d’avoir accĂšs Ă  tous les services linĂ©aires, est
avant tout organisée par thématiques : information, sport, éducation, international, jeunesse
 Les
chaĂźnes et les programmes de tĂ©lĂ©vision et de radio sont des composantes de l’offre, accessibles soit
directement soit à travers les différentes thématiques. Ainsi la BBC donne un accÚs rapide et simple
Ă  l’ensemble de ses contenus, Ă  travers une expĂ©rience de consommation unifiĂ©e et cohĂ©rente, et en
capitalisant sur la puissance fĂ©dĂ©ratrice de sa marque ombrelle « BBC », dĂ©clinĂ©e autant qu’il est
nécessaire (BBC news, BBC sciences, BBC earth
). Du point de vue technologique, les offres de la
BBC s’appuient sur une infrastructure commune et des technologies de rĂ©fĂ©rence dĂ©veloppĂ©es en
interne. Le « iPlayer », lecteur de média audio et vidéo, brique essentielle des services digitaux de la
BBC, s’est installĂ© comme une rĂ©fĂ©rence en Grande Bretagne. Autre spĂ©cificitĂ© outre manche, les
entitĂ©s rĂ©dactionnelles chargĂ©es de la production d’information (news factory) sont mutualisĂ©es et
produisent indifféremment pour la télévision et la radio, pour les services digitaux, pour les services
nationaux et internationaux.
Certes, la transformation numérique de la BBC a aussi connu ses difficultés, que ce soit au plan
technologique avec l’abandon du programme Digital Media Initiative (prùs de 100 M£) qui visait à
intĂ©grer toute l’infrastructure de production et de diffusion linĂ©aire et numĂ©rique ; ou Ă©ditorial, avec les
rĂ©sultats trĂšs dĂ©cevant du basculement de BBC 3 sur le web. Il n’empĂȘche : sa stratĂ©gie numĂ©rique
unique, englobant l’ensemble des forces productives financĂ©es par la redevance, quel que soit le
mĂ©dia, doit avoir valeur de source d’inspiration pour un audiovisuel public français dont les acteurs
numériques ne partagent rien ou presque.
La fragmentation des audiences appelle certainement une grande diversité des offres et des moyens
d’y accĂ©der ; mais au sein d’un environnement trĂšs concurrentiel, convergent et ouvert, cette diversitĂ©
des dispositifs numĂ©riques de l’audiovisuel public ne peut trouver son sens et son efficacitĂ© que si
elle s’appuie sur une conception et une planification intĂ©grĂ©e des ressources techniques, marketing
et en partie Ă©ditoriales mis en Ɠuvre.
1.4 - L’ETAT ; LES SOCIETES DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC ; TOUS ENSEMBLE VERS LE
NUMERIQUE
MĂȘme si le marchĂ© de la tĂ©lĂ©vision de rattrapage, de la vidĂ©o Ă  la demande ou de la vidĂ©o Ă  la
demande par abonnement peinent Ă  trouver leur modĂšle Ă©conomique (ce qui n’est plus le cas aux
4
RAI en Italie, RTVE en Espagne, RTS en Suisse, DR au Danemark, NRK en Norvùge

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Etats-Unis), les usages migrent doucement mais sûrement de la consommation linéaire de média
vers la consommation Ă  la demande :
- Les écrans se sont multipliés dans les foyers français ; on compte en moyenne 6,4 écrans
par foyers en 2014. Le multi écrans se généralise : 76,1% des foyers sont équipés de 3
Ă©crans (tablettes, ordinateur, mobile) (rapport Schwartz, 2015).
- Un téléviseur sur deux est connecté à Internet via une « box IPTV » (réseau dédié à la
tĂ©lĂ©vision sur ADSL, contrĂŽlĂ© par les fournisseurs d’accĂšs Ă  internet) ou Over The Top (OTT,
sur internet, sans contrîle par les fournisseurs d’accùs) (rapport Schwartz, 2015).
- L’équipement des Français en Smartphones est de 59,3% ; avec un taux de pĂ©nĂ©tration de
81% chez les 15-24 ans, le « second Ă©cran » est pour les jeunes gĂ©nĂ©rations l’écran
principal (rapport Schwartz, 2015).
- La standardisation des pratiques de consommation a permis de rendre accessible environ 90
% des programmes diffusés sur les antennes historiques (sauf pour le cinéma) et la moitié
de l’offre de programmes des chaines de TNT (rapport Schwartz, 2015)
- Dans son rapport intitulé « La télévision de rattrapage : une pratique installée, une économie
en devenir » daté du 13 février 2015, le CSA indiquait que la Télévision de rattrapage,
adoptĂ©e par une majoritĂ© large et croissante d’internautes (de 69 % en moyenne en 2013 Ă 
72 % en 2014), a vu son volume mensuel moyen de vidéos vues augmenter de moitié en un
an, pour s’établir Ă  311 millions sur l’annĂ©e 2014, contre 207 millions en moyenne en 2013.
- « Si l’usage quotidien de tĂ©lĂ©vision dĂ©linĂ©arisĂ©e n’est globalement que 9 minutes par jour, Ă 
comparer Ă  4h08 en 2014 sur l’écran de tĂ©lĂ©vision (base : 42 millions de foyers), auprĂšs de
la population qui l’utilise rĂ©ellement (8,4 millions d’individus) elle s’élĂšve Ă  55 minutes par
jour... et mĂȘme 1h11 par jour pour les utilisateurs sur ordinateurs, smartphones et tablettes »
(rapport Schwartz, 2015).
- Pour la premiĂšre fois, les innovations en terme de qualitĂ© de diffusion comme l’ultra haute
dĂ©finition (4K) se dĂ©veloppent d’abord sur Internet (Youtube, Netflix, Amazon), sans que les
diffuseurs hertziens ne soient en mesure de le proposer Ă  court terme, en raison des
investissements trop importants,
- Enfin, les offres de média Over The Top se développent au sein des opérateurs privés et en
particulier Canal+ ; en s’affranchissant des contraintes liĂ©es aux rĂ©seaux de diffusion TV ou
IPTV, ces services renouvellent l’expĂ©rience de consommation audiovisuelle en permettant
un passage fluide et harmonieux entre les offres linéaires et les offres délinéarisées.
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Structurer dĂšs aujourd’hui la stratĂ©gie, la gouvernance et l’offre numĂ©rique de l’audiovisuel
public est donc incontournable pour prĂ©parer l’avenir du secteur dans sa globalitĂ©.
Ce qui est vrai sur les programmes et services historiques l’est encore plus pour les offres
numériques : la coopération spontanée des acteurs est au mieux symbolique, au pire inexistante,
oscillant entre indiffĂ©rence, mĂ©fiance et concurrence. Seule une action forte de l’Etat, qui est Ă  la fois
la « tutelle » des opĂ©rateurs, leur financeur et leur « client » puisque c’est lui qui collecte et alloue la
redevance (plus de 90 % des ressources du secteur) et leur actionnaire unique, permettra de mieux
coordonner les actions et mutualiser les moyens de l’audiovisuel public dans le domaine du
numĂ©rique. Il doit ici encore plus qu’ailleurs assumer sa responsabilitĂ© de stratĂšge, dans la droite
ligne des orientations exprimĂ©es par le PrĂ©sident de la RĂ©publique le 17 dĂ©cembre 2013 Ă  l’occasion
du 50Ăšme anniversaire de la Maison de la Radio5
.
Pour le bĂ©nĂ©fice de l’usager : exhaustivitĂ© et cohĂ©rence de l’offre, simplicitĂ© d’accĂšs et de recherche
sur l’ensemble du catalogue de l’audiovisuel public, expĂ©rience unifiĂ©e, offres croisĂ©es, propositions
et recommandations pertinentes (par exemple, rechercher une information culturelle sur Culturebox
et se voir proposer des reportages pertinents de France Inter ; donner accĂšs aux contenus de RFI Ă 
partir d’une rubrique « Football africain » sur francetvsports
),
Pour amĂ©liorer l’efficacitĂ© Ă©conomique de l’ensemble, dans une logique de responsabilitĂ© de tous les
acteurs publics vis-Ă -vis du contribuable : Ă©conomies d’échelle dans les investissement et les achats,
positionnement concurrentiel renforcé, capacité de négociation accrue avec les tiers fournisseurs,
annonceurs ou distributeurs

Pour mieux répondre aux enjeux de service public : se donner les moyens de développer la relation
avec tous les citoyens et d’ĂȘtre un facteur de cohĂ©sion sociale, imaginer de nouvelles façons de
toucher des publics diffĂ©rents, qui se tiennent Ă  l’écart des mĂ©dias traditionnels et privilĂ©gient les
rĂ©seaux sociaux, offrir au tissu crĂ©atif un accĂšs Ă  l’audience (Ă  quoi servent les politiques de soutien
Ă  la crĂ©ation, s’il n’existe pas de surface d’exposition commune, simplifiĂ©e et Ă©largie, partageant les
mĂȘmes objectifs de service public ?)

Au-delà de ce constat et de ces objectifs, qui semblent déjà largement partagés, trois orientations
simples peuvent guider leur mise en Ɠuvre :
- sur les moyens technologiques, il faut que l’ensemble des services digitaux de l’audiovisuel
public s’appuie sur une infrastructure commune pour l’hĂ©bergement et la publication des
contenus et services et pour la relation avec l’usager,
- sur les services proposĂ©s, sans aller jusqu’à une mutualisation gĂ©nĂ©rale des moyens de
production et des fonctions Ă©ditoriales, les offres principales devraient ĂȘtre regroupĂ©es
autour de grandes thĂ©matiques : l’information, la culture, la jeunesse, la vidĂ©o Ă  la demande
et la vidéo à la demande par abonnement,
- enfin, une gouvernance et une feuille de route devront ĂȘtre arrĂȘtĂ©es pour mettre en Ɠuvre
concrÚtement ces préconisations.
5
« D’autres mutations sont possibles. Nous pourrions par exemple imaginer que France TĂ©lĂ©vision et Radio France
puissent un jour assembler leurs contenus internet dans un grand service audiovisuel numérique. », Déclaration du
Président de la République, le 17 décembre 2013
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2 - PROPOSITIONS POUR UN AUDIOVISUEL PUBLIC PLUS PUISSANT ET
PLUS EFFICACE SUR LE NUMERIQUE
2.1 - UNE INFRASTRUCTURE COMMUNE POUR L’HEBERGEMENT, LA PUBLICATION ET LA
RELATION CLIENT
Notre premiĂšre proposition est de regrouper les fonctions d’hĂ©bergement, de publication et de
relation client au sein d’une mĂȘme entitĂ©.
Au service des différents opérateurs (France Télévision, Radio France, France Médias Monde, Arte,
INA, TV5 Monde), la vocation de cette entitĂ© sera de fournir (1) l’infrastructure technique
d’hĂ©bergement, d’indexation et de distribution des contenus, (2) les outils transverses d’« intelligence
client », d’animation marketing permettant les recommandations, les croisements entre les diffĂ©rentes
offres et la présence sur les réseaux sociaux, et enfin (3) les dispositifs de monétisation des offres
payantes et des offres financĂ©es par la publicitĂ©. Sa mission sera d’assurer la mise Ă  disposition des
contenus et services auprÚs des usagers et de mettre en relation les créateurs de contenus et
Ă©diteurs de service avec leur audience ; en ce sens, on peut parler d’une plateforme.
Pour autant, cette entité ne doit pas se substituer aux éditeurs pour la production des contenus,
l’édition des services, le positionnement et l’animation des marques. Ces missions relĂšvent
exclusivement de chacun des opérateurs publics. La diversité et la différenciation des services, de
mĂȘme que « l’agilitĂ© marketing » sont des facteurs clĂ©s de succĂšs dans la construction et la
fidĂ©lisation d’une audience ; il serait absurde de les remettre en question, sous rĂ©serve bien sĂ»r
d’éviter les doublons et les concurrences inutiles.
Le bĂ©nĂ©fice pour les usagers sera un accĂšs simplifiĂ© Ă  l’ensemble de l’offre, une expĂ©rience unifiĂ©e
et optimisée, ainsi que des fonctionnalités avancées de personnalisation et de recommandation, une
façon plus intuitive de trouver des contenus pertinents faisant une large place à la sérendipité.
Economies d’échelle sur la conception et l’exploitation de l’infrastructure technique
La mutualisation des infrastructures techniques permettra d’importantes Ă©conomies d’échelle et la
suppression de doublons. En effet, les coĂ»ts d’hĂ©bergement et de transport des contenus sur internet
sont fortement dĂ©gressifs avec le volume traitĂ©. Ainsi, au sein d’une infrastructure commune, les
coĂ»ts d’hĂ©bergement et de diffusion de la radio resteront marginaux. L’harmonisation des
technologies employées et la mutualisation des moyens permettront de réduire considérablement les
coûts de conception, de développement et de maintenance des installations. Une partie des
Ă©conomies pourra ĂȘtre rĂ©investie pour amĂ©liorer la performance technologique et l’expĂ©rience client.
L’architecture technique devra intĂ©grer des dispositifs d’interface (API) avec les services existants
d’une part, pour favoriser leur raccordement sur l’infrastructure commune, et d’autre part avec les
plateformes tierces tels que Facebook et Youtube. En effet, les rĂ©seaux sociaux, aujourd’hui mĂ©dias
Ă  part entiĂšre, sont des facteurs clĂ©s de construction de l’audience. Une entitĂ© reprĂ©sentant
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l’ensemble des sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public sera d’ailleurs en position plus favorable pour
négocier les accords de distribution avec ces acteurs mondiaux.
Indexation et amélioration du référencement naturel
Autre bĂ©nĂ©fice, consĂ©quence de la mutualisation, la mise en commun et l’indexation des contenus
permettra d’amĂ©liorer le rĂ©fĂ©rencement naturel de l’offre sur les moteurs de recherche, de simplifier et
d’optimiser l’accùs aux contenus pour les usagers et de contribuer à l’accroissement de l’audience.
Pour cela, le systĂšme de gestion des contenus (Content Management System) devra Ă  terme ĂȘtre
commun et utilisé par tous les opérateurs.
Le savoir-faire de l’INA en matiĂšre d’indexation pourra ĂȘtre utilisĂ© au profit de tous, au moment du
chargement des contenus sur cette plateforme commune d’hĂ©bergement. Actuellement, et pour
schĂ©matiser, les collaborateurs de l’INA assurent l’indexation de l’ensemble des contenus en aval de
leur exploitation par les opĂ©rateurs. Avec les mĂȘmes moyens, et avec une partie de ceux de la
documentation de Radio France, l’objectif pourrait ĂȘtre de rechercher une indexation des contenus en
amont de leur exploitation et en faire bĂ©nĂ©ficier l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel et non pas
uniquement lorsqu’il a acquis une valeur patrimoniale.
Plus largement, il s’agira de veiller Ă  une organisation systĂ©matique de la collecte de toutes les
informations saisies aux diffĂ©rentes Ă©tapes des processus de production et d’édition, par tous ceux
qui contribuent directement ou non à l’indexation au sein de l’audiovisuel public (par exemple par les
administrateurs ou attachĂ©s de production, par les responsables d’édition
). A ce titre, les services
de sous titrage pour la tĂ©lĂ©vision sont des puissants vecteurs d’indexation et de rĂ©fĂ©rencement,
comme pourraient l’ĂȘtre les services de sous titrage de la radio Ă  destination des malentendants.
« Intelligence Client » et marketing digital
L’accĂšs Ă  l’ensemble de l’audience Ă  travers une mĂȘme plateforme de distribution permettra Ă  terme
de disposer d’outils transverses d’intelligence client et de packaging des offres. Les donnĂ©es
collectĂ©es sur les contenus et les usages pourront ĂȘtre utilisĂ©es au bĂ©nĂ©fice de tous pour accroĂźtre et
fidéliser les audiences. Ainsi il sera envisageable de développer des dispositifs de recommandation
permettant une meilleure adĂ©quation de l’offre avec la demande, des dispositifs de cross et d’up
selling (ventes croisĂ©es, propositions), et d’optimiser l’expĂ©rience et les parcours clients.
Une partie des compĂ©tences spĂ©cialisĂ©es dans le marketing digital pourraient ĂȘtre mises en commun
au sein de cette nouvelle entitĂ© et assister les Ă©diteurs de service dans leurs actions de conquĂȘte de
fidĂ©lisation de l’audience, notamment sur les rĂ©seaux sociaux.
Au cƓur d’un Ă©cosystĂšme pour l’innovation, la crĂ©ation et le dĂ©veloppement des talents
En regroupant les collaborateurs en charge de la conception, du développement et de la
maintenance des infrastructures au sein d’une seule entitĂ©, dont l’ambition, les moyens et le
pĂ©rimĂštre d’activitĂ© seront plus Ă©tendus, l’audiovisuel public pourra plus facilement attirer, dĂ©velopper
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et surtout conserver les talents. Elle améliorera ainsi ses chances de maßtriser la complexité
technologique et d’avoir la rĂ©activitĂ© nĂ©cessaire.
Cette nouvelle entitĂ© se positionnera de fait au cƓur d’un Ă©cosystĂšme qu’elle contribuera Ă  faire
émerger. Les relations réguliÚres et naturelles avec les startups et les innovateurs en technologies,
comme avec les crĂ©ateurs de nouvelles formes d’écriture audiovisuelle, permettront de dĂ©velopper la
veille prospective et stratĂ©gique, de diffuser la culture numĂ©rique dans l’entreprise, de rĂ©vĂ©ler les
talents, d’accompagner l’émergence de nouveaux acteurs et de participer Ă  l’effort en faveur de la
création audiovisuelle.
2.2 - DES SERVICES COHERENTS ET COMPLEMENTAIRES
Non seulement l’utilisation d’une infrastructure commune de distribution permettra de rĂ©duire les
coĂ»ts d’investissement et de fonctionnement, et de donner plus d’agilitĂ© Ă  l’animation marketing,
mais elle permettra Ă©galement d’envisager une meilleure coordination Ă©ditoriale et des services.
Offres thématiques
A l’instar de la BBC, nous prĂ©conisons d’organiser les contenus autour d’offres thĂ©matiques :
information, culture et spectacle vivant, Ă©ducation, jeunes adultes, etc.
Trois principales voies d’accùs aux contenus sur internet sont identifiables.
- L’accùs direct au contenu à travers des moteurs de recherche comme celui de Google
(notamment Ă  partir du titre d’une Ă©mission, d’une Ɠuvre, d’un artiste, d’un thĂšme) est
aujourd’hui le principal chemin pour entrer dans l’offre de service. Nos propositions en
termes d’indexation et le regroupement des contenus sur une mĂȘme plateforme conduiraient
mécaniquement à renforcer le référencement naturel des offres sur les moteurs de
recherche. C’est un des premiers leviers pour amĂ©liorer l’accessibilitĂ© aux contenus et
accroütre l’audience.
- La deuxiĂšme voie d’accĂšs Ă  l’offre est l’entrĂ©e par thĂ©matique. La dĂ©couverte des contenus
au sein d’une thĂ©matique donnĂ©e sera guidĂ©e par les choix Ă©ditoriaux. La puissance de
marque et la richesse des contenus sont alors des éléments essentiels de construction et de
fidĂ©lisation de l’audience.
- A contrario, l’accùs à l’offre à travers les sites de chaüne (site de France 2 ou site de France
Inter par exemple) reste trÚs minoritaire et voué à décliner avec la perte de puissance des
médias linéaires, sauf lorsque les moteurs de recherche renvoient vers eux pour accéder au
programme recherché.
Dans ce contexte, mĂȘme si chaque Ă©diteur, chaque chaĂźne ou chaque programme peut continuer Ă 
maintenir et dĂ©velopper des sites propres, en s’appuyant de prĂ©fĂ©rence sur les outils et les savoir
faire communs mis Ă  disposition, la prioritĂ© devrait ĂȘtre donnĂ©e Ă  la construction d’offres thĂ©matiques
clairement identifiées et positionnées, dotées de marques fortes. Par exemple, en matiÚre
d’information, il pourrait ĂȘtre envisagĂ© de consolider les services existants en un seul, sous une
marque puissante et si possible déjà bien installée. Chaque opérateur (France Télévision, Radio
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France, France MĂ©dias Monde, Arte, TV5 Monde et Ă©ventuellement l’INA) serait appelĂ© Ă  contribuer
Ă  travers la mise Ă  disposition de ses contenus et sa participation Ă  l’animation Ă©ditoriale.
Au delĂ  d’une offre dĂ©diĂ©e Ă  l’information, qui s’impose comme une Ă©vidence, d’autres offres
thĂ©matiques mĂ©riteraient d’ĂȘtre constituĂ©es Ă  partir ou en remplacement des services existants. Une
offre dédiée à la culture et aux spectacles vivants permettrait de mieux valoriser la richesse des
contenus culturels d’Arte, de Radio France ou de France TĂ©lĂ©visions, mieux que ne le font
actuellement Arte Concerts, Culturebox ou les sites de France Inter, France Culture et France
Musique, dont l’audience n’est pas Ă  la hauteur de la qualitĂ© des services offerts, ni de la formidable
valeur de prescription de ces marques en matiĂšre culturelle.
Une présence mutualisée et donc plus massive sur le numérique permettrait également de mieux
s’adresser aux jeunes adultes Ă  travers une (des) offre(s) qui leur serait spĂ©cifiquement destinĂ©e(s),
et qui transcenderai(en)t les frontiÚres entre les médias historiques, dans lesquels cette partie de la
population se reconnaüt de fait de moins en moins et qu’elle consomme trùs peu. La question de
l’éducation des jeunes aux mĂ©dias, des formes d’expression du dĂ©bat citoyen Ă  l’heure du
numérique, a pris un relief particulier à la suite des événements tragiques de janvier 2015 ; elle
constitue Ă  l’évidence un enjeu majeur de service public, face auquel les services publics ne peuvent
répondre en ordre dispersé.
Enfin, en regroupant sur une mĂȘme plateforme les catalogues et les offres de tĂ©lĂ©vision de
rattrapage, de vidéo à la demande et de vidéo à la demande par abonnement, en bénéficiant des
outils permettant de définir des offres croisées, de développer la recommandation et la
personnalisation, il sera possible d’augmenter la visibilitĂ©, l’audience et le cas Ă©chĂ©ant le chiffre
d’affaire global, au bĂ©nĂ©fice de l’audiovisuel public dans son ensemble.
Services propres à chaque opérateur
En complĂ©ment des offres thĂ©matiques, il devra ĂȘtre possible pour chacun des opĂ©rateurs de
proposer des services permanents ou éphémÚres, avec une grande agilité, trÚs fédérateurs ou
contraire trÚs différenciés : par exemple, des services événementiels comme la couverture de Roland
Garros, ou des services destinés à des catégories trÚs ciblées de la population comme les
passionnĂ©s d’art lyrique. Les outils mis Ă  disposition par l’infrastructure commune permettront Ă 
chaque opĂ©rateur de mettre en Ɠuvre des nouveaux services trĂšs rapidement, avec des coĂ»ts
d’investissement minimum, pour dĂ©velopper l’audience sur des populations ciblĂ©es. La conquĂȘte de
segments de marché par des offres trÚs différenciées est un autre facteur clé de création de
l’audience, que notre projet souhaite favoriser.
3 - FEUILLE DE ROUTE
Plus d’agilitĂ© et de rĂ©activitĂ©, plus d’innovation technologique, moins de dĂ©penses de fonctionnement
et d’investissement, un effet vertueux sur l’audience, des bĂ©nĂ©fices indiscutables pour le
tĂ©lĂ©spectateur – auditeur – usager, dans le respect des missions et valeurs de service public
 Ce
constat semble partagé par le plus grand nombre et en particulier par la plupart des candidats à la
présidence de Radio France et de France Télévisions, et en particulier les deux candidats finalement
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retenus, qui ont intégré cet objectif de mutualisation et de coordination à leur projet, certes à des
degrés divers.
3.1 - POURQUOI, A CE JOUR, AUCUNE INITIATIVE CONCRETE N’A-T-ELLE ETE PRISE EN CE
SENS ?
Pour une part, cela s’explique par l’inertie naturelle des acteurs, par la tendance des « petits »
opĂ©rateurs Ă  redouter l’impĂ©rialisme du « gros », qui en retour craint le parasitisme des premiers, et
par la tendance de tous les acteurs à considérer avec méfiance tout partage de compétence ou de
territoire.
Au-delĂ , trois arguments sont souvent mis en avant. Le premier est la perte d’agilitĂ© des Ă©diteurs de
service. On peut considérer au contraire que la mutualisation bien dosée de certaines fonctions clés
sera vertueuse en terme de rĂ©activitĂ© et d’agilitĂ©, pour autant qu’elle respecte le principe de
subsidiarité. Le second argument consiste à dire que la mutualisation et la consolidation des services
sous des marques ombrelles se traduirait par une diminution mĂ©canique de l’audience, consĂ©quence
de la rĂ©duction du nombre de chemins d’accĂšs aux contenus.
Il apparaßt comme nécessaire de mettre en place un dispositif mixte : des services thématiques
transverses et puissants, complétés par des offres liées à des programmes ou des services,
différenciées et « agiles ». Loin de provoquer une cannibalisation, la mise en commun des moyens
va permettre de dégager de nouvelles ressources pour développer et valoriser de nouveaux services.
Enfin, ce projet structurant se heurte aux freins inhĂ©rents Ă  tout projet de transformation d’entreprise,
qui s’expriment en particulier dans le champ des technologies (comment et à quel rythme mettre en
Ɠuvre une infrastructure commune), dans le champ de l’organisation (quelles ressources clĂ©s,
quelles compétences regrouper dans une nouvelle entité, avec quelles missions) et dans le champ
de la gouvernance (comment se constitue cette entité, comment est-elle pilotée et financée) ; et ce
alors mĂȘme que l’audiovisuel public a connu et connaĂźt encore des Ă©tapes de rĂ©organisation plus que
dĂ©licates, et trĂšs longues Ă  digĂ©rer, qu’il s’agisse de la crĂ©ation de l’entreprise unique France
Télévisions ou du rapprochement entre France 24 et RFI.
Il est dans ce contexte compréhensible que la mise en commun des moyens numériques ne soit pas
apparue comme prioritaire au cours des années récentes. Mais les progrÚs enregistrés aussi bien à
France TĂ©lĂ©visions qu’à France MĂ©dias Monde doivent maintenant permettre de se consacrer Ă  cette
Ă©volution.
Sur le fond, la fusion de l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel public, à l’instar de la plupart de nos
voisins europĂ©ens, ne devrait pas ĂȘtre tabou. Elle permettrait de mutualiser les plateformes de
distribution numérique comme nous le proposons dans cette note, mais aussi les moyens de
production, avec comme conséquence un arbitrage plus fluide des conflits de territoires ou de
moyens.
Dans le cas présent nous nous attacherons à des scénarios plus réalistes à court et moyen terme, en
nous limitant Ă  la mutualisation des infrastructures de distribution.
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3.2 - MISE EN ƒUVRE DE L’INFRASTRUCTURE
Pour construire cette infrastructure commune, il convient de s’appuyer sur les dispositifs et les
ressources existants. Il ne paraĂźt pas envisageable de construire de toutes piĂšces une nouvelle
infrastructure de distribution, ce qui, à court terme, requerrait des investissements supplémentaires et
nĂ©cessiterait d’exploiter des moyens en parallĂšle durant une pĂ©riode difficile Ă  dĂ©terminer.
Notre proposition est d’identifier et de consolider la plateforme technologique la plus avancĂ©e et la
plus Ă©volutive. Une Ă©tude technique plus poussĂ©e devra permettre d’identifier les briques
technologiques à conserver et sur lesquelles s’appuyer, notamment au sein des infrastructures de
France TĂ©lĂ©visions et de l’INA, qui ont atteint une masse critique et une expertise que n’ont pas les
autres opérateurs.
Pour initier ce processus de mutualisation, il nous semble nĂ©cessaire d’identifier et de mettre en
Ɠuvre une premiĂšre offre thĂ©matique, par exemple autour de l’information ou de la culture et du
spectacle vivant. Pour des raisons autant pratiques que symboliques, il conviendra d’identifier un
acteur chef de file sur chaque offre thĂ©matique. A cette occasion, l’infrastructure commune sera
consolidĂ©e et complĂ©tĂ©e pour la doter de l’ensemble des fonctionnalitĂ©s requises.
Les services existants pourront alors ĂȘtre connectĂ©s individuellement Ă  l’infrastructure commune Ă 
travers une technologie adapté (API), avant de rejoindre de façon structurelle la plateforme au fur et à
mesure de la construction des offres thématiques.
3.3 - FORME JURIDIQUE ET GOUVERNANCE
Cette infrastructure de distribution commune, au service des sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public,
producteurs et Ă©diteurs de services et de contenus, doit ĂȘtre pilotĂ©e au sein d’une entitĂ©
indĂ©pendante ou autonome. Les ressources et les actifs de chaque sociĂ©tĂ©, lorsqu’elles sont
consacrĂ©es Ă  ces activitĂ©s, devront ĂȘtre versĂ©es au sein de la nouvelle entitĂ©. Bien entendu, lĂ 
encore, une Ă©tude dĂ©taillĂ©e devra ĂȘtre conduite pour identifier les missions et les activitĂ©s de la
nouvelle entité, les compétences et les ressources concernées au sein de chaque société, ainsi que
les actions de transformation Ă  mener. Les Ă©diteurs pourront alors se consacrer Ă  la production et
l’édition des services, en favorisant en leur sein l’intĂ©gration des processus de production et d’édition
numĂ©riques avec les processus de production et d’édition de services de tĂ©lĂ©vision ou de radio, et
recherchant les synergies possibles entre ces deux activités.
Concernant le support juridique de cette nouvelle entitĂ©, deux options nous semblent devoir ĂȘtre
étudiées. La premiÚre consiste à prendre acte du fait que le centre de gravité numérique de
l’audiovisuel public est Ă  FTV, et Ă  s’appuyer sur l’entitĂ© France TĂ©lĂ©visions Editions NumĂ©riques, Ă 
laquelle il faudra alors rendre son indépendance du groupe France Télévisions, par exemple sous la
forme juridique d’un groupement d’intĂ©rĂȘt Ă©conomique (GIE) au sein de l’audiovisuel public. La
deuxiĂšme option consiste Ă  dĂ©velopper les missions de l’INA sur le numĂ©rique et Ă  les complĂ©ter par
la distribution et la valorisation des services numĂ©riques de l’ensemble des Ă©diteurs de l’audiovisuel
public. A travers ses missions actuelles, l’INA couvre dĂ©jĂ  une grande part de la proposition de valeur
Terra Nova – Note - 18/18
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de cette nouvelle entité : hébergement et distribution des contenus, indexation, distribution à travers
des offres gratuites et payantes, valorisation des données auprÚs de tiers B2B.
Dans les deux cas, il sera nécessaire de définir le mode de gouvernance et en particulier la place qui
sera faite à chacune de sociétés concernées dans le processus de décision, ou les garanties, par
exemple contractuelles, quant au service qui lui sera assuré. Ce point est crucial.
Une intervention rĂ©solue de l’Etat sera Ă©videmment dĂ©terminante. Elle devra s’appuyer sur deux
leviers :
- la discussion et la dĂ©finition d’une feuille de route partagĂ©e par l’ensemble des acteurs, au
sein de l’instance de pilotage stratĂ©gique de l’audiovisuel public dont la crĂ©ation a Ă©tĂ©
préconisée par Marc Schwartz dans le rapport « France Télévisions 2020 : Le chemin de
l’ambition »,
- la nĂ©gociation des contrats d’objectifs et de moyens de Radio France et de France
TĂ©lĂ©visions (et sans doute d’un avenant pour les autres sociĂ©tĂ©s), pour y inclure les objectifs
communs ainsi définis, et conditionner en partie le versement de la ressource publique (par
exemple une part correspondant au financement des activités numériques des sociétés
concernées) au respect de la feuille de route.
L’arrivĂ©e de deux nouveaux dirigeants Ă  France TĂ©lĂ©visions et Ă  l’INA, ainsi que la nĂ©gociation en
cours du contrat d’objectifs et de moyens de Radio France, constituent pour l’Etat, actionnaire et
tutelle du secteur, une occasion unique de faire bouger les acteurs. Il faut la saisir.
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ANNEXE - SCHEMA GLOBAL DE LA PROPOSITION

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  • 1. Terra Nova – Note - 1/18 www.tnova.fr Audiovisuel public : tous ensemble vers le numĂ©rique Par Louis-Cyrille TrĂ©buchet et Benjamin Amalric1 Le 15 juin 2015 Les Ă©volutions des technologies et des usages ont modifiĂ© en profondeur le secteur des mĂ©dias et des industries de contenus. C’est un nouveau monde auquel l’audiovisuel public, dans son ensemble et collectivement, doit s’adapter. Un monde plus ouvert oĂč l’accĂšs aux mĂ©dias et aux contenus s’affranchit de plus en plus des frontiĂšres tant technologiques entre mĂ©dias de l’écrit, de l’image et du son, que gĂ©ographiques ; le numĂ©rique est un espace commun sur lequel l’ensemble des mĂ©dias se rejoignent tout en conservant leurs spĂ©cificitĂ©s - la radio filmĂ©e en est une illustration. Un monde d’abondance de l’offre privĂ©e, qu’elle Ă©mane des acteurs traditionnels ou des pure players (actifs uniquement sur Internet), oĂč le service public doit chaque jour faire la preuve que sa spĂ©cificitĂ©, son accessibilitĂ© au sens le plus large, justifient l’octroi Ă  son profit d’une ressource publique de plus en plus contrainte. Un monde plus complexe et en Ă©volution constante, oĂč le maintien des compĂ©tences et leur dĂ©veloppement, ainsi que celui d’une culture de l’agilitĂ© dans l’entreprise, sont devenus des enjeux majeurs de compĂ©titivitĂ©. Individuellement les sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public ont su prendre le virage du numĂ©rique. Leurs offres sont de qualitĂ© par rapport Ă  celles de leurs concurrents. Cependant, dĂšs lors que l’on considĂšre l’empreinte globale de l’audiovisuel public, le constat est nettement moins flatteur : une offre fragmentĂ©e, cloisonnĂ©e, parfois redondante et confuse, des services qui se concurrencent, des infrastructures 1 Louis-Cyrille TrĂ©buchet est consultant spĂ©cialisĂ© dans la transformation numĂ©rique des mĂ©dias et des industries culturelles ; Benjamin Amalric est Ă©tudiant Ă  SciencesPo Paris. Cette note a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e avec le concours de deux cadres dirigeants de l'audiovisuel public, qui ont souhaitĂ© conserver l'anonymat.
  • 2. Terra Nova – Note - 2/18 www.tnova.fr techniques complexes et hĂ©tĂ©rogĂšnes, une ergonomie trĂšs variable selon les services. Au Royaume-Uni, la BBC met Ă  la disposition des usagers, sous sa banniĂšre unique, un bouquet d’offres thĂ©matiques, transversales et complĂ©mentaires, sur une infrastructure technique commune. Au bĂ©nĂ©fice du citoyen qui dispose ainsi d’un accĂšs simplifiĂ© Ă  l’ensemble de l’offre de l’audiovisuel public et nourrit sans doute le sentiment d’un usage intelligent et responsable de l’argent public. En France, il est aujourd’hui urgent de mettre en Ɠuvre ce dont tout le monde ou presque s’accorde Ă  reconnaĂźtre la nĂ©cessitĂ© : une vision intĂ©grĂ©e et ambitieuse de l’offre numĂ©rique de l’audiovisuel public afin, grĂące Ă  la coordination des actions et Ă  la mutualisation des ressources, de garantir aux usagers une offre ergonomique, exhaustive et cohĂ©rente ; aux contribuables une efficacitĂ© Ă©conomique renforcĂ©e ; aux citoyens, une rĂ©novation du rĂŽle que joue l’audiovisuel public dans la cohĂ©sion sociale, en retrouvant les clĂ©s d’un accĂšs Ă  de larges franges de la population. Cette ambition pourrait se concrĂ©tiser selon deux axes : 1) S’agissant des moyens technologiques, l’ensemble des services numĂ©riques de l’audiovisuel public (France TĂ©lĂ©visions, Radio France, France MĂ©dias Monde, Arte, TV5 Monde et l’INA sont ici concernĂ©s) doit s’appuyer sur une infrastructure commune pour l’hĂ©bergement et la publication des contenus et services. Cette infrastructure sera mise en Ɠuvre par une entitĂ© de droit public (existante ou Ă  crĂ©er) dĂ©signĂ©e Ă  cette fin, et dont la mission principale sera d’assurer l’hĂ©bergement, l’indexation et la publication de l’ensemble des contenus, de mettre Ă  disposition des outils transverses de connaissance des publics (d’« intelligence client », pour reprendre un vocable d’entreprise), d’animation marketing et, le cas Ă©chĂ©ant, de monĂ©tisation et de commercialisation. La mutualisation des ressources donnera Ă  l’ensemble plus d’efficacitĂ© Ă©conomique, une prĂ©sence numĂ©rique plus large et un meilleur rĂ©fĂ©rencement, une capacitĂ© d’innovation et une agilitĂ© accrues. 2) S’agissant des services, et sans rĂ©duire la capacitĂ© de chaque Ă©diteur, chaque chaĂźne ou chaque programme Ă  maintenir et dĂ©velopper des sites propres (pour autant qu’ils procĂšdent de la mĂȘme infrastructure), le regroupement des forces des sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public doit se traduire par une structuration des contenus autour d’offres thĂ©matiques (ou « verticales ») communes, consacrĂ©es Ă  l’information, Ă  la culture et au spectacle vivant, aux jeunes adultes, Ă  l’éducation
 Les offres de tĂ©lĂ©vision de rattrapage et de podcast, de vidĂ©o Ă  la demande Ă  l’acte et demain par abonnement, pourront Ă©galement ĂȘtre regroupĂ©es pour bĂ©nĂ©ficier de la dynamique des offres croisĂ©es et des propositions additionnelles. En complĂ©ment de
  • 3. Terra Nova – Note - 3/18 www.tnova.fr ces offres thĂ©matiques, chaque Ă©diteur pourra s’appuyer sur ces ressources communes pour distribuer des services qui lui sont propres, permanents ou Ă©vĂ©nementiels, et s’adresser Ă  des territoires de marques spĂ©cifiques. Evidemment, et sauf Ă  envisager un service public Ă  nouveau unifiĂ© (ce qui ne devrait pas ĂȘtre un tabou mais soulĂšve des enjeux dĂ©passant le cadre de cette analyse), donner une forme concrĂšte Ă  ces propositions suppose d’instituer un pilotage serrĂ©, et une « gouvernance » adaptĂ©e, pour surmonter les inerties et les blocages qui empĂȘchent aujourd’hui en pratique toute coopĂ©ration spontanĂ©e. Pour dĂ©signer un pilote crĂ©dible et Ă©viter les surcoĂ»ts de la crĂ©ation d’une entitĂ© ex nihilo, deux options paraissent envisageables : s’appuyer sur France TĂ©lĂ©visions Editions NumĂ©riques, qui seule possĂšde une taille critique et une couverture suffisante des offres et services Ă©voquĂ©s ici ; ou sur l’INA, dont les missions, la forme juridique et l’expertise numĂ©rique sont a priori compatibles avec les objectifs fixĂ©s. Ces deux acteurs semblent Ă  mĂȘme d’assurer la maĂźtrise d’ouvrage opĂ©rationnelle d’un tel projet, dans le cadre d’une gouvernance collĂ©giale. En tout Ă©tat de cause, il reviendra Ă  l’Etat, qui est Ă  la fois tutelle, financeur, actionnaire et stratĂšge, d’intervenir avec dĂ©termination pour fixer des objectifs, une mĂ©thode et des leviers d’action. L’arrivĂ©e de nouveaux dirigeants Ă  France TĂ©lĂ©visions et Ă  l’INA, la nĂ©gociation du Contrat d’Objectifs et de Moyens de Radio France, et la crĂ©ation Ă©ventuelle de l’instance de pilotage stratĂ©gique de l’audiovisuel public, prĂ©conisĂ©e par Marc Schwartz dans le rapport « France TĂ©lĂ©visions 2020 : Le chemin de l’ambition », crĂ©ent les conditions d’une telle impulsion.
  • 4. Terra Nova – Note - 4/18 www.tnova.fr PREAMBULE 1.1 - LE MONDE A CHANGÉ Les Ă©volutions des technologies et des usages ont modifiĂ© en profondeur l’environnement dans lequel s’exprime la loi de l’offre et de la demande. DĂ©sormais, la capacitĂ© des entreprises Ă  s’adapter sans cesse pour maintenir ou dĂ©velopper leurs positions concurrentielles est vitale. Les industries de contenu sont particuliĂšrement touchĂ©es par cette transformation. Il n’est pas un seul domaine de leur activitĂ© qui ne soit bouleversĂ© par le numĂ©rique : la production, l’édition et la distribution des contenus et services, la relation avec les consommateurs-usagers, la communication et le marketing. L’adaptation n’est donc pas seulement nĂ©cessaire, elle est Ă©galement urgente et doit se dĂ©ployer Ă  partir de trois constats. Le « terrain de jeu » s’est ouvert : il est mondial Les barriĂšres gĂ©ographiques se sont abaissĂ©es et les acteurs mondiaux peuvent prendre pied sur notre marchĂ© domestique, avec la puissance financiĂšre et les avantages compĂ©titifs et souvent rĂ©glementaires qui leur sont propres. Dans une perspective moins dĂ©fensive, il est nĂ©cessaire de partir Ă  la conquĂȘte de nouveaux marchĂ©s et de nouveaux publics depuis ses propres bases et de dĂ©velopper d’importantes synergies entre les activitĂ©s nationales et internationales. Les barriĂšres technologiques se sont souvent ouvertes et dĂ©placĂ©es. Au cours des derniĂšres dĂ©cennies, le secteur de l’audiovisuel s’était structurĂ© - et aussi cloisonnĂ© - autour de ses rĂ©seaux de distribution, rĂ©seaux gĂ©ographiquement limitĂ©s, et dĂ©diĂ©s Ă  la tĂ©lĂ©vision, Ă  la radio. Avec Internet, ces cloisons ont volĂ© en Ă©clat. La convergence, les synergies entre image, son et texte, n’ont jamais Ă©tĂ© aussi Ă©videntes. Le tĂ©lĂ©spectateur - auditeur - usager occupe une place centrale Le mot d’ordre de la transformation numĂ©rique de la plupart des industries est d’ĂȘtre « user centric », c’est-Ă -dire centrĂ© sur les utilisateurs. Les mĂ©dias n’y font pas exception, tout particuliĂšrement les acteurs de l’audiovisuel public qui portent une responsabilitĂ© supplĂ©mentaire vis-Ă -vis du citoyen qui les finance Ă  travers le paiement de la contribution Ă  l’audiovisuel public. ConcrĂštement, quelles sont, Ă  l’ùre du numĂ©rique, les attentes du tĂ©lĂ©spectateur – auditeur aujourd’hui Ă©galement internaute et mobinaute ? Un accĂšs simple et intelligent Ă  l’ensemble de l’offre de service public (autrement dit, une proposition Ă©ditoriale cohĂ©rente et riche, une expĂ©rience unifiĂ©e et un moteur de recherche performant couvrant l’ensemble des contenus) ; une capacitĂ© Ă  cheminer et Ă  dĂ©couvrir un contenu pertinent, y compris inopinĂ©ment (en serendipitĂ©) ; une forme de personnalisation des services, fondĂ©e sur le dĂ©veloppement de l’interactivitĂ©, de la recommandation et de la prescription individuelle ; et, bien sĂ»r, une relation basĂ©e sur la confiance et la transparence avec l’éditeur de service qui repose sur des ambitions de diversitĂ© et de pluralisme et non exclusivement sur les intĂ©rĂȘts commerciaux de l’éditeur lui-mĂȘme ou de ses annonceurs.
  • 5. Terra Nova – Note - 5/18 www.tnova.fr Dans le secteur de l’industrie et des services, on parle de « casser les silos » ; ici, les silos ce sont la tĂ©lĂ©vision d’un cĂŽtĂ©, la radio de l’autre, plus loin les archives audiovisuelles
 La maĂźtrise de la complexitĂ© et la recherche d’agilitĂ© : des enjeux essentiels de compĂ©titivitĂ© La maĂźtrise des technologies numĂ©riques est un atout majeur ; son absence, un handicap fatal. Ainsi par exemple des systĂšmes de distribution des contenus : Ă  l’ùre digitale, un mĂ©dia doit concevoir et dĂ©ployer un ou plusieurs sites web, une ou plusieurs applications mobiles, des dispositifs spĂ©cifiques sur les rĂ©seaux sociaux. Ces dispositifs technologiques doivent ĂȘtre compatibles avec l’ensemble des standards internet du marchĂ©, avec les diffĂ©rents navigateurs web et leur diffĂ©rentes versions, avec l’ensemble des terminaux mobiles et les systĂšmes d’exploitation qu’ils hĂ©bergent, avec les versions successives des protocoles Facebook, Twitter, Youtube, pour ne citer que les principaux. Cette complexitĂ© est inouĂŻe et les technologies qui la composent Ă©voluent toutes Ă  un rythme qui ne cesse de s’accĂ©lĂ©rer. L’acquisition et le dĂ©veloppement des compĂ©tences technologiques, sont des enjeux vitaux pour la performance et Ă  la rĂ©activitĂ© des entreprises de l’audiovisuel public. 1.2 - L’AUDIOVISUEL PUBLIC EN ORDRE DISPERSE FACE A CE NOUVEAU PARADIGME C’est vĂ©ritablement en 2007, avec le lancement de l’iPhone, que la prise de conscience du puissant mouvement qui allait bouleverser l’audiovisuel s’est gĂ©nĂ©ralisĂ©e. Depuis lors, chaque opĂ©rateur de l’audiovisuel public, isolĂ©ment, s’est efforcĂ© de dĂ©velopper son infrastructure et son offre digitales. Prises individuellement, la plupart de ces offres n’ont pas Ă  rougir devant celles des concurrents directs, que ce soit en terme de richesse Ă©ditoriale ou d’innovation technologique. Cependant lorsque l’on considĂšre le pĂ©rimĂštre de l’audiovisuel public dans son ensemble (France TĂ©lĂ©visions, Radio France, Institut National de l’Audiovisuel, France MĂ©dias Monde, Arte) et que l’on analyse l’offre ainsi proposĂ©e Ă  l’auditeur – tĂ©lĂ©spectateur – usager, force est de constater qu’il existe de nombreuses marges d’amĂ©lioration. Pour le tĂ©lĂ©spectateur – auditeur numĂ©rique, l’audiovisuel public offre un visage fragmentĂ© et en partie appauvri L’offre digitale de l’audiovisuel public est fragmentĂ©e, sans passerelle entre les univers de la tĂ©lĂ©vision, de la radio, des archives, voire entre diffĂ©rents services d’un mĂȘme mĂ©dia. C’est une offre « en silo » qui ne permet pas d’accĂ©der simplement Ă  toute la richesse des contenus disponibles, ni mĂȘme, et c’est plus grave, de leur assurer la visibilitĂ© maximale que leur qualitĂ© justifierait. Les services sont au contraire souvent redondants voire concurrents, lĂ  oĂč les moyens devraient ĂȘtre mis en commun au bĂ©nĂ©fice d’un seul et mĂȘme usager. Quelques exemples de telles situations anormales en attestent. Sur l’information en ligne, tout d’abord, comment justifier, du point de vue du contribuable, la coexistence de deux services totalement distincts Ă©ditorialement et techniquement :
  • 6. Terra Nova – Note - 6/18 www.tnova.fr - francetvinfo.fr, offre complĂšte d’information en lignĂ© Ă©ditĂ©e par France TĂ©lĂ©visions, indĂ©pendante des journaux des chaĂźnes de FTV, et qui, dotĂ©e de moyens consĂ©quents (plusieurs dizaines de journalistes dĂ©diĂ©s) s’est imposĂ©e aux premiers rangs des offres numĂ©riques de mĂ©dias audiovisuels, devant de nombreux sites de journaux pourtant lancĂ©s plusieurs annĂ©es auparavant ; - franceinfo.fr, qui a Ă©tĂ© conçu comme un prolongement et un complĂ©ment de l’antenne de France Info et qui, faute de moyens, n’est pas parvenu depuis son lancement Ă  s’imposer dans l’univers des sites d’information, alors mĂȘme que France Info est sans doute la plus belle marque française d’information en temps rĂ©el. Comment ne pas regretter que la qualitĂ© technologique et la force de frappe Ă©ditoriale de Francetvinfo ne puissent se conjuguer avec la puissance de la marque et avec une antenne qui vit vĂ©ritablement dans l’instant ? Sur l’information internationale, ne pourrait-on envisager que l’offre numĂ©rique de France 24, elle aussi largement le reflet ou le prolongement de l’antenne Ă©ponyme, dans le cadre contraint des moyens de France MĂ©dia Monde, puisse s’appuyer sur la richesse et la profondeur de l’offre vidĂ©o de FTV, et bien sĂ»r aussi sur la capacitĂ© de production de Geopolis, service de France TĂ©lĂ©visions dĂ©diĂ© Ă  l’information internationale en ligne qui, malgrĂ© des moyens non nĂ©gligeables, reste confidentiel ? De la mĂȘme maniĂšre, comment l’internaute perçoit-il la complĂ©mentaritĂ© et l’articulation des offres culturelles d’Arte (Arte Concerts), de France TĂ©lĂ©visions (Culturebox), de la plateforme numĂ©rique de l’INA ou des informations culturelles disponibles sur les sites de Radio France ? On ne peut que constater la dispersion des efforts, la confusion pour l’usager et parfois mĂȘme l’effet dĂ©lĂ©tĂšre d’une concurrence entre acteurs de la mĂȘme famille, par exemple sur la nĂ©gociation de droits exclusifs, ou au contraire en doublon, auprĂšs des producteurs d’évĂ©nements culturels. Bien sĂ»r, la diversitĂ© des offres et des marques, la co-existence de sites de chaĂźnes (ou de programmes) et d’offres thĂ©matiques « verticales », est souhaitable pour une meilleure couverture de l’ensemble des situations d’usage. Pour autant, il faut que les marques et les offres soient conçues et organisĂ©es pour en optimiser la cohĂ©rence et l’efficacitĂ©, et que la production ou l’acquisition des contenus soient mutualisĂ©es chaque fois que c’est possible, ce qui n’est, Ă  l’évidence, pas le cas aujourd’hui. Comment expliquer, alors que la plupart des acteurs du e-commerce recherchent la taille critique et l’accĂšs aux places de marchĂ©, que l’audiovisuel public puisse juxtaposer les offres ou les projets de vidĂ©o Ă  la demande (VĂ D) et de vidĂ©o Ă  la demande avec abonnement (VĂ DA) de France TĂ©lĂ©visions (Pluzz), d’ARTE et de l’INA, sans passerelle ni possibilitĂ© de ventes croisĂ©es. Enfin, la difficultĂ© de l’audiovisuel public Ă  construire une offre destinĂ©e aux jeunes adultes est patente. Tous les acteurs du secteur s’accordent Ă  considĂ©rer qu’une telle offre doit impĂ©rativement reposer sur un pilier numĂ©rique fort et, certainement, sur une identitĂ©, des supports, des formats et des codes trĂšs Ă©loignĂ©s de ceux de l’offre actuelle du(des) service(s) public(s), trĂšs tournĂ©e vers le cƓur de son public (ĂągĂ© et vieillissant2 , catĂ©gories sociaux professionnelles supĂ©rieures). Aucune 2 Rapport « France TĂ©lĂ©visions 2020 : le chemin de l’ambition », Marc Schwartz, 2015 : « Le vieillissement des tĂ©lĂ©spectateurs est un enjeu majeur des groupes audiovisuels publics comme privĂ©s, l’ñge moyen Ă©tant de 50 ans en 2014 (contre 48,2 ans en 2011, soit une progression annuelle moyenne de 6 mois en 3 ans), contre 42,5 ans pour la population française de 4 ans et plus »
  • 7. Terra Nova – Note - 7/18 www.tnova.fr des initiatives rĂ©centes (Mouv’, nouveau France 4, Arte Creative, nouvelles Ă©critures FTV) n’a rĂ©ellement trouvĂ© un large public. N’y a-t-il pas moyen de constituer une force de frappe entiĂšrement dĂ©diĂ©e Ă  ce « non public »3 Ă©videmment prioritaire, lĂ  oĂč elle n’est aujourd’hui, au sein de chacun des opĂ©rateurs, au mieux qu’un Ă©tendard destinĂ© Ă  donner une image de modernitĂ© et Ă  masquer le fait que la jeunesse n’est de fait, et malgrĂ© les intentions proclamĂ©es, pas une prioritĂ© ? « Des modalitĂ©s d’organisation diffĂ©rentes d’un opĂ©rateur Ă  l’autre ; une mosaĂŻque de choix technologiques Depuis Ă  peu prĂšs une dĂ©cennie, France TĂ©lĂ©visions a fait le choix structurant de regrouper ses activitĂ©s numĂ©riques au sein d’une entitĂ© centrale et transverse, France TĂ©lĂ©visions Editions NumĂ©riques (FTVEN), qui dispose de ressources importantes (170 collaborateurs, 24 millions d’euros de charges externes et 12 millions d’euros de dĂ©penses d’investissement annuelles). Cette entitĂ© assure la production et l’édition des services numĂ©riques du groupe, c’est-Ă -dire leur conception, leur fabrication et leur exploitation. A cet effet, elle dispose d’une Ă©quipe d’environ cinquante « Ă©diteurs » (chefs de produits, chefs de projets, chargĂ©s d’édition numĂ©riques) et d’environ dix « producteurs » (conseillers de programmes numĂ©riques) en charge des nouvelles Ă©critures. Selon la nature des services, les contenus peuvent ĂȘtre produits directement par FTVEN ou par les journalistes des rĂ©dactions de France TĂ©lĂ©visions. FTVEN assure Ă©galement le marketing digital de ces services numĂ©riques ; cette activitĂ©, trĂšs Ă©largie et qui s’appuie sur une quarantaine de collaborateurs, comprend les Ă©tudes, les acquisitions et la fidĂ©lisation des audiences, les partenariats, les jeux en ligne, la tĂ©lĂ©matique, le webdesign
 Enfin, FTVEN a la responsabilitĂ© de la conception, du dĂ©veloppement et de l’exploitation des plateformes technologiques ; sa direction technique s’appuie lĂ  encore sur une quarantaine de collaborateurs dĂ©diĂ©s, chefs de projet, architectes, ingĂ©nieurs d’exploitation et dĂ©veloppeurs. Cette organisation centralisĂ©e confĂšre Ă  France TĂ©lĂ©visions une plus grande rĂ©activitĂ© et plus de cohĂ©rence et de simplicitĂ© dans les processus, notamment de dĂ©cision. Cependant la synergie entre les activitĂ©s et les ressources dĂ©ployĂ©es sur le numĂ©rique et les activitĂ©s historiques de France TĂ©lĂ©visions restent assez faibles, ce qui Ă  moyen terme peut fortement limiter le dĂ©veloppement de l’entreprise. L’organisation pour le numĂ©rique Ă  Radio France est comparable sur le principe Ă  celle de France TĂ©lĂ©visions, mais avec des moyens beaucoup plus limitĂ©s. La Direction des Nouveaux MĂ©dias dispose d’un budget annuel de 4,6 millions d’euros pour les charges externes, de deux millions d’euros pour les investissements et s’appuie sur une Ă©quipe de 48 collaborateurs permanents. Cette entitĂ© assure la conception, l’édition et l’exploitation des services numĂ©riques, la conception, le dĂ©veloppement et l’exploitation des infrastructures techniques (avec de faibles moyens, huit chefs de projets et dĂ©veloppeurs) et le marketing digital des offres (lĂ  encore avec des moyens rĂ©duits, quatre 3 Expression issue de la dĂ©marche de dĂ©mocratisation du thĂ©Ăątre public, utilisĂ©e pour dĂ©signer cette (large) partie de la population qui n’en franchit pas les portes. Marion Denizot notait par exemple que cette notion « permet de dĂ©noncer le « dĂ©ficit dĂ©mocratique de l'action culturelle » (Marie-Ange Rauch) et doit donc ĂȘtre entendue comme une volontĂ© de restaurer le rĂŽle du citoyen dans la vie artistique afin de crĂ©er du lien social par la culture ». Voir Marion Denizot, « 1968, 1998, 2008 : le thĂ©Ăątre et ses fractures gĂ©nĂ©rationnelles Entre malentendus et hĂ©ritages mĂ©connus », Sens Public, 2009
  • 8. Terra Nova – Note - 8/18 www.tnova.fr collaborateurs). Contrairement Ă  France TĂ©lĂ©visions, Radio France s’appuie de façon beaucoup plus accentuĂ©e sur les rĂ©dactions et les Ă©quipes de production de radio pour produire les contenus des services numĂ©riques. De son cotĂ©, l’INA a fait un choix d’organisation sensiblement diffĂ©rent, et a rĂ©parti ses diffĂ©rentes activitĂ©s numĂ©riques sur plusieurs directions : - La direction des collections, pour le DĂ©pĂŽt lĂ©gal du web, - La direction de l’enseignement et de la recherche pour les activitĂ©s de formations liĂ©es aux mĂ©tiers, filiĂšres et enjeux du numĂ©rique, - La direction des contenus pour la vente et la valorisation des contenus vers les professionnels et le grand public. C’est dans cette derniĂšre que sont Ă©laborĂ©es et pilotĂ©es les principales activitĂ©s numĂ©riques « busines to bussiness » (« B2B » ou interprentreprises) et « business to consumer » (« B2C », dĂ©diĂ© aux consommateurs) au sein du dĂ©partement des Ă©ditions multimĂ©dia, dont les missions sont de valoriser et promouvoir le patrimoine audiovisuel sous toutes les formes, toucher tous les publics via les diffĂ©rents dispositifs, plateformes et interfaces numĂ©riques, sur des modĂšles Ă©conomiques mixtes gratuits et payants. Les principales activitĂ©s du dĂ©partement sont (1) la conception et rĂ©alisation de sites et applications web Ă©ditorial pour des partenaires et clients B2B, (2) l’édition de sites web et la gestion des rĂ©seaux sociaux, chaĂźnes vidĂ©o et audio sur les principales plateformes du marchĂ©, (3) l’édition des plateformes de vidĂ©o Ă  la demande et prochainement la vidĂ©o Ă  la demande avec abonnement grand public, (4) la production et co production de web documentaires et objets transmĂ©dia. Ce dĂ©partement dispose d’une vingtaine de personnes affectĂ©es Ă  l’éditorial, la conception, la gestion des propositions et le marketing digital et s’appuie sur une Ă©quipe technique de cinq Ă  dix personnes selon les projets. Du point de vue technologique, chaque acteur a fait le choix de dĂ©velopper sa propre infrastructure et de gĂ©rer seul la complexitĂ© inhĂ©rente au dĂ©veloppement et du maintien en conditions opĂ©rationnelles des infrastructures, des sites et des applications mobiles, et en particulier Ă  l’effort constant pour garantir la compatibilitĂ© des outils avec les diffĂ©rentes normes, en perpĂ©tuelle Ă©volution, et les nouveaux terminaux. Les dispositifs techniques mis en Ɠuvre par les diffĂ©rents acteurs de l’audiovisuel public sont trĂšs souvent redondants (un mĂȘme investissement est effectuĂ© deux ou plusieurs fois) ; mĂȘme s’ils portent sur les mĂȘmes fonctionnalitĂ©s, ils reposent sur des choix technologiques peu ou pas interopĂ©rables. Par ailleurs, il est souvent difficile pour ces structures d’acquĂ©rir, de dĂ©velopper et surtout de conserver les talents nĂ©cessaires Ă  la conception et Ă  l’évolution de ces plateformes numĂ©riques. Pris globalement pour l’ensemble de l’audiovisuel public, cette juxtaposition d’actifs technologiques, de mĂ©thodes, de ressources et de compĂ©tences paraĂźt peu efficace et mal rĂ©pondre aux enjeux de maĂźtrise de la complexitĂ©, d’agilitĂ© et d’adaptabilitĂ©.
  • 9. Terra Nova – Note - 9/18 www.tnova.fr 1.3 - L’EXEMPLE DE LA BBC A l’inverse, la BBC a su proposer un service cohĂ©rent et unifiĂ© Ă  ses usagers. Comme c’est le cas dans la trĂšs grande majoritĂ© des pays europĂ©ens4 (Allemagne et SuĂšde exceptĂ©es), l’audiovisuel public britannique est regroupĂ© au sein d’une seule et mĂȘme entitĂ© qui perçoit l’équivalent de la redevance audiovisuelle, conçoit et exploite les services de tĂ©lĂ©vision, de radio, et les services en ligne. Ces derniĂšres annĂ©es, la BBC a renversĂ© le paradigme en plaçant le digital au centre de son organisation et de sa stratĂ©gie. L’offre digitale de la BBC, si elle permet Ă©videmment d’avoir accĂšs Ă  tous les services linĂ©aires, est avant tout organisĂ©e par thĂ©matiques : information, sport, Ă©ducation, international, jeunesse
 Les chaĂźnes et les programmes de tĂ©lĂ©vision et de radio sont des composantes de l’offre, accessibles soit directement soit Ă  travers les diffĂ©rentes thĂ©matiques. Ainsi la BBC donne un accĂšs rapide et simple Ă  l’ensemble de ses contenus, Ă  travers une expĂ©rience de consommation unifiĂ©e et cohĂ©rente, et en capitalisant sur la puissance fĂ©dĂ©ratrice de sa marque ombrelle « BBC », dĂ©clinĂ©e autant qu’il est nĂ©cessaire (BBC news, BBC sciences, BBC earth
). Du point de vue technologique, les offres de la BBC s’appuient sur une infrastructure commune et des technologies de rĂ©fĂ©rence dĂ©veloppĂ©es en interne. Le « iPlayer », lecteur de mĂ©dia audio et vidĂ©o, brique essentielle des services digitaux de la BBC, s’est installĂ© comme une rĂ©fĂ©rence en Grande Bretagne. Autre spĂ©cificitĂ© outre manche, les entitĂ©s rĂ©dactionnelles chargĂ©es de la production d’information (news factory) sont mutualisĂ©es et produisent indiffĂ©remment pour la tĂ©lĂ©vision et la radio, pour les services digitaux, pour les services nationaux et internationaux. Certes, la transformation numĂ©rique de la BBC a aussi connu ses difficultĂ©s, que ce soit au plan technologique avec l’abandon du programme Digital Media Initiative (prĂšs de 100 MÂŁ) qui visait Ă  intĂ©grer toute l’infrastructure de production et de diffusion linĂ©aire et numĂ©rique ; ou Ă©ditorial, avec les rĂ©sultats trĂšs dĂ©cevant du basculement de BBC 3 sur le web. Il n’empĂȘche : sa stratĂ©gie numĂ©rique unique, englobant l’ensemble des forces productives financĂ©es par la redevance, quel que soit le mĂ©dia, doit avoir valeur de source d’inspiration pour un audiovisuel public français dont les acteurs numĂ©riques ne partagent rien ou presque. La fragmentation des audiences appelle certainement une grande diversitĂ© des offres et des moyens d’y accĂ©der ; mais au sein d’un environnement trĂšs concurrentiel, convergent et ouvert, cette diversitĂ© des dispositifs numĂ©riques de l’audiovisuel public ne peut trouver son sens et son efficacitĂ© que si elle s’appuie sur une conception et une planification intĂ©grĂ©e des ressources techniques, marketing et en partie Ă©ditoriales mis en Ɠuvre. 1.4 - L’ETAT ; LES SOCIETES DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC ; TOUS ENSEMBLE VERS LE NUMERIQUE MĂȘme si le marchĂ© de la tĂ©lĂ©vision de rattrapage, de la vidĂ©o Ă  la demande ou de la vidĂ©o Ă  la demande par abonnement peinent Ă  trouver leur modĂšle Ă©conomique (ce qui n’est plus le cas aux 4 RAI en Italie, RTVE en Espagne, RTS en Suisse, DR au Danemark, NRK en NorvĂšge

  • 10. Terra Nova – Note - 10/18 www.tnova.fr Etats-Unis), les usages migrent doucement mais sĂ»rement de la consommation linĂ©aire de mĂ©dia vers la consommation Ă  la demande : - Les Ă©crans se sont multipliĂ©s dans les foyers français ; on compte en moyenne 6,4 Ă©crans par foyers en 2014. Le multi Ă©crans se gĂ©nĂ©ralise : 76,1% des foyers sont Ă©quipĂ©s de 3 Ă©crans (tablettes, ordinateur, mobile) (rapport Schwartz, 2015). - Un tĂ©lĂ©viseur sur deux est connectĂ© Ă  Internet via une « box IPTV » (rĂ©seau dĂ©diĂ© Ă  la tĂ©lĂ©vision sur ADSL, contrĂŽlĂ© par les fournisseurs d’accĂšs Ă  internet) ou Over The Top (OTT, sur internet, sans contrĂŽle par les fournisseurs d’accĂšs) (rapport Schwartz, 2015). - L’équipement des Français en Smartphones est de 59,3% ; avec un taux de pĂ©nĂ©tration de 81% chez les 15-24 ans, le « second Ă©cran » est pour les jeunes gĂ©nĂ©rations l’écran principal (rapport Schwartz, 2015). - La standardisation des pratiques de consommation a permis de rendre accessible environ 90 % des programmes diffusĂ©s sur les antennes historiques (sauf pour le cinĂ©ma) et la moitiĂ© de l’offre de programmes des chaines de TNT (rapport Schwartz, 2015) - Dans son rapport intitulĂ© « La tĂ©lĂ©vision de rattrapage : une pratique installĂ©e, une Ă©conomie en devenir » datĂ© du 13 fĂ©vrier 2015, le CSA indiquait que la TĂ©lĂ©vision de rattrapage, adoptĂ©e par une majoritĂ© large et croissante d’internautes (de 69 % en moyenne en 2013 Ă  72 % en 2014), a vu son volume mensuel moyen de vidĂ©os vues augmenter de moitiĂ© en un an, pour s’établir Ă  311 millions sur l’annĂ©e 2014, contre 207 millions en moyenne en 2013. - « Si l’usage quotidien de tĂ©lĂ©vision dĂ©linĂ©arisĂ©e n’est globalement que 9 minutes par jour, Ă  comparer Ă  4h08 en 2014 sur l’écran de tĂ©lĂ©vision (base : 42 millions de foyers), auprĂšs de la population qui l’utilise rĂ©ellement (8,4 millions d’individus) elle s’élĂšve Ă  55 minutes par jour... et mĂȘme 1h11 par jour pour les utilisateurs sur ordinateurs, smartphones et tablettes » (rapport Schwartz, 2015). - Pour la premiĂšre fois, les innovations en terme de qualitĂ© de diffusion comme l’ultra haute dĂ©finition (4K) se dĂ©veloppent d’abord sur Internet (Youtube, Netflix, Amazon), sans que les diffuseurs hertziens ne soient en mesure de le proposer Ă  court terme, en raison des investissements trop importants, - Enfin, les offres de mĂ©dia Over The Top se dĂ©veloppent au sein des opĂ©rateurs privĂ©s et en particulier Canal+ ; en s’affranchissant des contraintes liĂ©es aux rĂ©seaux de diffusion TV ou IPTV, ces services renouvellent l’expĂ©rience de consommation audiovisuelle en permettant un passage fluide et harmonieux entre les offres linĂ©aires et les offres dĂ©linĂ©arisĂ©es.
  • 11. Terra Nova – Note - 11/18 www.tnova.fr Structurer dĂšs aujourd’hui la stratĂ©gie, la gouvernance et l’offre numĂ©rique de l’audiovisuel public est donc incontournable pour prĂ©parer l’avenir du secteur dans sa globalitĂ©. Ce qui est vrai sur les programmes et services historiques l’est encore plus pour les offres numĂ©riques : la coopĂ©ration spontanĂ©e des acteurs est au mieux symbolique, au pire inexistante, oscillant entre indiffĂ©rence, mĂ©fiance et concurrence. Seule une action forte de l’Etat, qui est Ă  la fois la « tutelle » des opĂ©rateurs, leur financeur et leur « client » puisque c’est lui qui collecte et alloue la redevance (plus de 90 % des ressources du secteur) et leur actionnaire unique, permettra de mieux coordonner les actions et mutualiser les moyens de l’audiovisuel public dans le domaine du numĂ©rique. Il doit ici encore plus qu’ailleurs assumer sa responsabilitĂ© de stratĂšge, dans la droite ligne des orientations exprimĂ©es par le PrĂ©sident de la RĂ©publique le 17 dĂ©cembre 2013 Ă  l’occasion du 50Ăšme anniversaire de la Maison de la Radio5 . Pour le bĂ©nĂ©fice de l’usager : exhaustivitĂ© et cohĂ©rence de l’offre, simplicitĂ© d’accĂšs et de recherche sur l’ensemble du catalogue de l’audiovisuel public, expĂ©rience unifiĂ©e, offres croisĂ©es, propositions et recommandations pertinentes (par exemple, rechercher une information culturelle sur Culturebox et se voir proposer des reportages pertinents de France Inter ; donner accĂšs aux contenus de RFI Ă  partir d’une rubrique « Football africain » sur francetvsports
), Pour amĂ©liorer l’efficacitĂ© Ă©conomique de l’ensemble, dans une logique de responsabilitĂ© de tous les acteurs publics vis-Ă -vis du contribuable : Ă©conomies d’échelle dans les investissement et les achats, positionnement concurrentiel renforcĂ©, capacitĂ© de nĂ©gociation accrue avec les tiers fournisseurs, annonceurs ou distributeurs
 Pour mieux rĂ©pondre aux enjeux de service public : se donner les moyens de dĂ©velopper la relation avec tous les citoyens et d’ĂȘtre un facteur de cohĂ©sion sociale, imaginer de nouvelles façons de toucher des publics diffĂ©rents, qui se tiennent Ă  l’écart des mĂ©dias traditionnels et privilĂ©gient les rĂ©seaux sociaux, offrir au tissu crĂ©atif un accĂšs Ă  l’audience (Ă  quoi servent les politiques de soutien Ă  la crĂ©ation, s’il n’existe pas de surface d’exposition commune, simplifiĂ©e et Ă©largie, partageant les mĂȘmes objectifs de service public ?)
 Au-delĂ  de ce constat et de ces objectifs, qui semblent dĂ©jĂ  largement partagĂ©s, trois orientations simples peuvent guider leur mise en Ɠuvre : - sur les moyens technologiques, il faut que l’ensemble des services digitaux de l’audiovisuel public s’appuie sur une infrastructure commune pour l’hĂ©bergement et la publication des contenus et services et pour la relation avec l’usager, - sur les services proposĂ©s, sans aller jusqu’à une mutualisation gĂ©nĂ©rale des moyens de production et des fonctions Ă©ditoriales, les offres principales devraient ĂȘtre regroupĂ©es autour de grandes thĂ©matiques : l’information, la culture, la jeunesse, la vidĂ©o Ă  la demande et la vidĂ©o Ă  la demande par abonnement, - enfin, une gouvernance et une feuille de route devront ĂȘtre arrĂȘtĂ©es pour mettre en Ɠuvre concrĂštement ces prĂ©conisations. 5 « D’autres mutations sont possibles. Nous pourrions par exemple imaginer que France TĂ©lĂ©vision et Radio France puissent un jour assembler leurs contenus internet dans un grand service audiovisuel numĂ©rique. », DĂ©claration du PrĂ©sident de la RĂ©publique, le 17 dĂ©cembre 2013
  • 12. Terra Nova – Note - 12/18 www.tnova.fr 2 - PROPOSITIONS POUR UN AUDIOVISUEL PUBLIC PLUS PUISSANT ET PLUS EFFICACE SUR LE NUMERIQUE 2.1 - UNE INFRASTRUCTURE COMMUNE POUR L’HEBERGEMENT, LA PUBLICATION ET LA RELATION CLIENT Notre premiĂšre proposition est de regrouper les fonctions d’hĂ©bergement, de publication et de relation client au sein d’une mĂȘme entitĂ©. Au service des diffĂ©rents opĂ©rateurs (France TĂ©lĂ©vision, Radio France, France MĂ©dias Monde, Arte, INA, TV5 Monde), la vocation de cette entitĂ© sera de fournir (1) l’infrastructure technique d’hĂ©bergement, d’indexation et de distribution des contenus, (2) les outils transverses d’« intelligence client », d’animation marketing permettant les recommandations, les croisements entre les diffĂ©rentes offres et la prĂ©sence sur les rĂ©seaux sociaux, et enfin (3) les dispositifs de monĂ©tisation des offres payantes et des offres financĂ©es par la publicitĂ©. Sa mission sera d’assurer la mise Ă  disposition des contenus et services auprĂšs des usagers et de mettre en relation les crĂ©ateurs de contenus et Ă©diteurs de service avec leur audience ; en ce sens, on peut parler d’une plateforme. Pour autant, cette entitĂ© ne doit pas se substituer aux Ă©diteurs pour la production des contenus, l’édition des services, le positionnement et l’animation des marques. Ces missions relĂšvent exclusivement de chacun des opĂ©rateurs publics. La diversitĂ© et la diffĂ©renciation des services, de mĂȘme que « l’agilitĂ© marketing » sont des facteurs clĂ©s de succĂšs dans la construction et la fidĂ©lisation d’une audience ; il serait absurde de les remettre en question, sous rĂ©serve bien sĂ»r d’éviter les doublons et les concurrences inutiles. Le bĂ©nĂ©fice pour les usagers sera un accĂšs simplifiĂ© Ă  l’ensemble de l’offre, une expĂ©rience unifiĂ©e et optimisĂ©e, ainsi que des fonctionnalitĂ©s avancĂ©es de personnalisation et de recommandation, une façon plus intuitive de trouver des contenus pertinents faisant une large place Ă  la sĂ©rendipitĂ©. Economies d’échelle sur la conception et l’exploitation de l’infrastructure technique La mutualisation des infrastructures techniques permettra d’importantes Ă©conomies d’échelle et la suppression de doublons. En effet, les coĂ»ts d’hĂ©bergement et de transport des contenus sur internet sont fortement dĂ©gressifs avec le volume traitĂ©. Ainsi, au sein d’une infrastructure commune, les coĂ»ts d’hĂ©bergement et de diffusion de la radio resteront marginaux. L’harmonisation des technologies employĂ©es et la mutualisation des moyens permettront de rĂ©duire considĂ©rablement les coĂ»ts de conception, de dĂ©veloppement et de maintenance des installations. Une partie des Ă©conomies pourra ĂȘtre rĂ©investie pour amĂ©liorer la performance technologique et l’expĂ©rience client. L’architecture technique devra intĂ©grer des dispositifs d’interface (API) avec les services existants d’une part, pour favoriser leur raccordement sur l’infrastructure commune, et d’autre part avec les plateformes tierces tels que Facebook et Youtube. En effet, les rĂ©seaux sociaux, aujourd’hui mĂ©dias Ă  part entiĂšre, sont des facteurs clĂ©s de construction de l’audience. Une entitĂ© reprĂ©sentant
  • 13. Terra Nova – Note - 13/18 www.tnova.fr l’ensemble des sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public sera d’ailleurs en position plus favorable pour nĂ©gocier les accords de distribution avec ces acteurs mondiaux. Indexation et amĂ©lioration du rĂ©fĂ©rencement naturel Autre bĂ©nĂ©fice, consĂ©quence de la mutualisation, la mise en commun et l’indexation des contenus permettra d’amĂ©liorer le rĂ©fĂ©rencement naturel de l’offre sur les moteurs de recherche, de simplifier et d’optimiser l’accĂšs aux contenus pour les usagers et de contribuer Ă  l’accroissement de l’audience. Pour cela, le systĂšme de gestion des contenus (Content Management System) devra Ă  terme ĂȘtre commun et utilisĂ© par tous les opĂ©rateurs. Le savoir-faire de l’INA en matiĂšre d’indexation pourra ĂȘtre utilisĂ© au profit de tous, au moment du chargement des contenus sur cette plateforme commune d’hĂ©bergement. Actuellement, et pour schĂ©matiser, les collaborateurs de l’INA assurent l’indexation de l’ensemble des contenus en aval de leur exploitation par les opĂ©rateurs. Avec les mĂȘmes moyens, et avec une partie de ceux de la documentation de Radio France, l’objectif pourrait ĂȘtre de rechercher une indexation des contenus en amont de leur exploitation et en faire bĂ©nĂ©ficier l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel et non pas uniquement lorsqu’il a acquis une valeur patrimoniale. Plus largement, il s’agira de veiller Ă  une organisation systĂ©matique de la collecte de toutes les informations saisies aux diffĂ©rentes Ă©tapes des processus de production et d’édition, par tous ceux qui contribuent directement ou non Ă  l’indexation au sein de l’audiovisuel public (par exemple par les administrateurs ou attachĂ©s de production, par les responsables d’édition
). A ce titre, les services de sous titrage pour la tĂ©lĂ©vision sont des puissants vecteurs d’indexation et de rĂ©fĂ©rencement, comme pourraient l’ĂȘtre les services de sous titrage de la radio Ă  destination des malentendants. « Intelligence Client » et marketing digital L’accĂšs Ă  l’ensemble de l’audience Ă  travers une mĂȘme plateforme de distribution permettra Ă  terme de disposer d’outils transverses d’intelligence client et de packaging des offres. Les donnĂ©es collectĂ©es sur les contenus et les usages pourront ĂȘtre utilisĂ©es au bĂ©nĂ©fice de tous pour accroĂźtre et fidĂ©liser les audiences. Ainsi il sera envisageable de dĂ©velopper des dispositifs de recommandation permettant une meilleure adĂ©quation de l’offre avec la demande, des dispositifs de cross et d’up selling (ventes croisĂ©es, propositions), et d’optimiser l’expĂ©rience et les parcours clients. Une partie des compĂ©tences spĂ©cialisĂ©es dans le marketing digital pourraient ĂȘtre mises en commun au sein de cette nouvelle entitĂ© et assister les Ă©diteurs de service dans leurs actions de conquĂȘte de fidĂ©lisation de l’audience, notamment sur les rĂ©seaux sociaux. Au cƓur d’un Ă©cosystĂšme pour l’innovation, la crĂ©ation et le dĂ©veloppement des talents En regroupant les collaborateurs en charge de la conception, du dĂ©veloppement et de la maintenance des infrastructures au sein d’une seule entitĂ©, dont l’ambition, les moyens et le pĂ©rimĂštre d’activitĂ© seront plus Ă©tendus, l’audiovisuel public pourra plus facilement attirer, dĂ©velopper
  • 14. Terra Nova – Note - 14/18 www.tnova.fr et surtout conserver les talents. Elle amĂ©liorera ainsi ses chances de maĂźtriser la complexitĂ© technologique et d’avoir la rĂ©activitĂ© nĂ©cessaire. Cette nouvelle entitĂ© se positionnera de fait au cƓur d’un Ă©cosystĂšme qu’elle contribuera Ă  faire Ă©merger. Les relations rĂ©guliĂšres et naturelles avec les startups et les innovateurs en technologies, comme avec les crĂ©ateurs de nouvelles formes d’écriture audiovisuelle, permettront de dĂ©velopper la veille prospective et stratĂ©gique, de diffuser la culture numĂ©rique dans l’entreprise, de rĂ©vĂ©ler les talents, d’accompagner l’émergence de nouveaux acteurs et de participer Ă  l’effort en faveur de la crĂ©ation audiovisuelle. 2.2 - DES SERVICES COHERENTS ET COMPLEMENTAIRES Non seulement l’utilisation d’une infrastructure commune de distribution permettra de rĂ©duire les coĂ»ts d’investissement et de fonctionnement, et de donner plus d’agilitĂ© Ă  l’animation marketing, mais elle permettra Ă©galement d’envisager une meilleure coordination Ă©ditoriale et des services. Offres thĂ©matiques A l’instar de la BBC, nous prĂ©conisons d’organiser les contenus autour d’offres thĂ©matiques : information, culture et spectacle vivant, Ă©ducation, jeunes adultes, etc. Trois principales voies d’accĂšs aux contenus sur internet sont identifiables. - L’accĂšs direct au contenu Ă  travers des moteurs de recherche comme celui de Google (notamment Ă  partir du titre d’une Ă©mission, d’une Ɠuvre, d’un artiste, d’un thĂšme) est aujourd’hui le principal chemin pour entrer dans l’offre de service. Nos propositions en termes d’indexation et le regroupement des contenus sur une mĂȘme plateforme conduiraient mĂ©caniquement Ă  renforcer le rĂ©fĂ©rencement naturel des offres sur les moteurs de recherche. C’est un des premiers leviers pour amĂ©liorer l’accessibilitĂ© aux contenus et accroĂźtre l’audience. - La deuxiĂšme voie d’accĂšs Ă  l’offre est l’entrĂ©e par thĂ©matique. La dĂ©couverte des contenus au sein d’une thĂ©matique donnĂ©e sera guidĂ©e par les choix Ă©ditoriaux. La puissance de marque et la richesse des contenus sont alors des Ă©lĂ©ments essentiels de construction et de fidĂ©lisation de l’audience. - A contrario, l’accĂšs Ă  l’offre Ă  travers les sites de chaĂźne (site de France 2 ou site de France Inter par exemple) reste trĂšs minoritaire et vouĂ© Ă  dĂ©cliner avec la perte de puissance des mĂ©dias linĂ©aires, sauf lorsque les moteurs de recherche renvoient vers eux pour accĂ©der au programme recherchĂ©. Dans ce contexte, mĂȘme si chaque Ă©diteur, chaque chaĂźne ou chaque programme peut continuer Ă  maintenir et dĂ©velopper des sites propres, en s’appuyant de prĂ©fĂ©rence sur les outils et les savoir faire communs mis Ă  disposition, la prioritĂ© devrait ĂȘtre donnĂ©e Ă  la construction d’offres thĂ©matiques clairement identifiĂ©es et positionnĂ©es, dotĂ©es de marques fortes. Par exemple, en matiĂšre d’information, il pourrait ĂȘtre envisagĂ© de consolider les services existants en un seul, sous une marque puissante et si possible dĂ©jĂ  bien installĂ©e. Chaque opĂ©rateur (France TĂ©lĂ©vision, Radio
  • 15. Terra Nova – Note - 15/18 www.tnova.fr France, France MĂ©dias Monde, Arte, TV5 Monde et Ă©ventuellement l’INA) serait appelĂ© Ă  contribuer Ă  travers la mise Ă  disposition de ses contenus et sa participation Ă  l’animation Ă©ditoriale. Au delĂ  d’une offre dĂ©diĂ©e Ă  l’information, qui s’impose comme une Ă©vidence, d’autres offres thĂ©matiques mĂ©riteraient d’ĂȘtre constituĂ©es Ă  partir ou en remplacement des services existants. Une offre dĂ©diĂ©e Ă  la culture et aux spectacles vivants permettrait de mieux valoriser la richesse des contenus culturels d’Arte, de Radio France ou de France TĂ©lĂ©visions, mieux que ne le font actuellement Arte Concerts, Culturebox ou les sites de France Inter, France Culture et France Musique, dont l’audience n’est pas Ă  la hauteur de la qualitĂ© des services offerts, ni de la formidable valeur de prescription de ces marques en matiĂšre culturelle. Une prĂ©sence mutualisĂ©e et donc plus massive sur le numĂ©rique permettrait Ă©galement de mieux s’adresser aux jeunes adultes Ă  travers une (des) offre(s) qui leur serait spĂ©cifiquement destinĂ©e(s), et qui transcenderai(en)t les frontiĂšres entre les mĂ©dias historiques, dans lesquels cette partie de la population se reconnaĂźt de fait de moins en moins et qu’elle consomme trĂšs peu. La question de l’éducation des jeunes aux mĂ©dias, des formes d’expression du dĂ©bat citoyen Ă  l’heure du numĂ©rique, a pris un relief particulier Ă  la suite des Ă©vĂ©nements tragiques de janvier 2015 ; elle constitue Ă  l’évidence un enjeu majeur de service public, face auquel les services publics ne peuvent rĂ©pondre en ordre dispersĂ©. Enfin, en regroupant sur une mĂȘme plateforme les catalogues et les offres de tĂ©lĂ©vision de rattrapage, de vidĂ©o Ă  la demande et de vidĂ©o Ă  la demande par abonnement, en bĂ©nĂ©ficiant des outils permettant de dĂ©finir des offres croisĂ©es, de dĂ©velopper la recommandation et la personnalisation, il sera possible d’augmenter la visibilitĂ©, l’audience et le cas Ă©chĂ©ant le chiffre d’affaire global, au bĂ©nĂ©fice de l’audiovisuel public dans son ensemble. Services propres Ă  chaque opĂ©rateur En complĂ©ment des offres thĂ©matiques, il devra ĂȘtre possible pour chacun des opĂ©rateurs de proposer des services permanents ou Ă©phĂ©mĂšres, avec une grande agilitĂ©, trĂšs fĂ©dĂ©rateurs ou contraire trĂšs diffĂ©renciĂ©s : par exemple, des services Ă©vĂ©nementiels comme la couverture de Roland Garros, ou des services destinĂ©s Ă  des catĂ©gories trĂšs ciblĂ©es de la population comme les passionnĂ©s d’art lyrique. Les outils mis Ă  disposition par l’infrastructure commune permettront Ă  chaque opĂ©rateur de mettre en Ɠuvre des nouveaux services trĂšs rapidement, avec des coĂ»ts d’investissement minimum, pour dĂ©velopper l’audience sur des populations ciblĂ©es. La conquĂȘte de segments de marchĂ© par des offres trĂšs diffĂ©renciĂ©es est un autre facteur clĂ© de crĂ©ation de l’audience, que notre projet souhaite favoriser. 3 - FEUILLE DE ROUTE Plus d’agilitĂ© et de rĂ©activitĂ©, plus d’innovation technologique, moins de dĂ©penses de fonctionnement et d’investissement, un effet vertueux sur l’audience, des bĂ©nĂ©fices indiscutables pour le tĂ©lĂ©spectateur – auditeur – usager, dans le respect des missions et valeurs de service public
 Ce constat semble partagĂ© par le plus grand nombre et en particulier par la plupart des candidats Ă  la prĂ©sidence de Radio France et de France TĂ©lĂ©visions, et en particulier les deux candidats finalement
  • 16. Terra Nova – Note - 16/18 www.tnova.fr retenus, qui ont intĂ©grĂ© cet objectif de mutualisation et de coordination Ă  leur projet, certes Ă  des degrĂ©s divers. 3.1 - POURQUOI, A CE JOUR, AUCUNE INITIATIVE CONCRETE N’A-T-ELLE ETE PRISE EN CE SENS ? Pour une part, cela s’explique par l’inertie naturelle des acteurs, par la tendance des « petits » opĂ©rateurs Ă  redouter l’impĂ©rialisme du « gros », qui en retour craint le parasitisme des premiers, et par la tendance de tous les acteurs Ă  considĂ©rer avec mĂ©fiance tout partage de compĂ©tence ou de territoire. Au-delĂ , trois arguments sont souvent mis en avant. Le premier est la perte d’agilitĂ© des Ă©diteurs de service. On peut considĂ©rer au contraire que la mutualisation bien dosĂ©e de certaines fonctions clĂ©s sera vertueuse en terme de rĂ©activitĂ© et d’agilitĂ©, pour autant qu’elle respecte le principe de subsidiaritĂ©. Le second argument consiste Ă  dire que la mutualisation et la consolidation des services sous des marques ombrelles se traduirait par une diminution mĂ©canique de l’audience, consĂ©quence de la rĂ©duction du nombre de chemins d’accĂšs aux contenus. Il apparaĂźt comme nĂ©cessaire de mettre en place un dispositif mixte : des services thĂ©matiques transverses et puissants, complĂ©tĂ©s par des offres liĂ©es Ă  des programmes ou des services, diffĂ©renciĂ©es et « agiles ». Loin de provoquer une cannibalisation, la mise en commun des moyens va permettre de dĂ©gager de nouvelles ressources pour dĂ©velopper et valoriser de nouveaux services. Enfin, ce projet structurant se heurte aux freins inhĂ©rents Ă  tout projet de transformation d’entreprise, qui s’expriment en particulier dans le champ des technologies (comment et Ă  quel rythme mettre en Ɠuvre une infrastructure commune), dans le champ de l’organisation (quelles ressources clĂ©s, quelles compĂ©tences regrouper dans une nouvelle entitĂ©, avec quelles missions) et dans le champ de la gouvernance (comment se constitue cette entitĂ©, comment est-elle pilotĂ©e et financĂ©e) ; et ce alors mĂȘme que l’audiovisuel public a connu et connaĂźt encore des Ă©tapes de rĂ©organisation plus que dĂ©licates, et trĂšs longues Ă  digĂ©rer, qu’il s’agisse de la crĂ©ation de l’entreprise unique France TĂ©lĂ©visions ou du rapprochement entre France 24 et RFI. Il est dans ce contexte comprĂ©hensible que la mise en commun des moyens numĂ©riques ne soit pas apparue comme prioritaire au cours des annĂ©es rĂ©centes. Mais les progrĂšs enregistrĂ©s aussi bien Ă  France TĂ©lĂ©visions qu’à France MĂ©dias Monde doivent maintenant permettre de se consacrer Ă  cette Ă©volution. Sur le fond, la fusion de l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel public, Ă  l’instar de la plupart de nos voisins europĂ©ens, ne devrait pas ĂȘtre tabou. Elle permettrait de mutualiser les plateformes de distribution numĂ©rique comme nous le proposons dans cette note, mais aussi les moyens de production, avec comme consĂ©quence un arbitrage plus fluide des conflits de territoires ou de moyens. Dans le cas prĂ©sent nous nous attacherons Ă  des scĂ©narios plus rĂ©alistes Ă  court et moyen terme, en nous limitant Ă  la mutualisation des infrastructures de distribution.
  • 17. Terra Nova – Note - 17/18 www.tnova.fr 3.2 - MISE EN ƒUVRE DE L’INFRASTRUCTURE Pour construire cette infrastructure commune, il convient de s’appuyer sur les dispositifs et les ressources existants. Il ne paraĂźt pas envisageable de construire de toutes piĂšces une nouvelle infrastructure de distribution, ce qui, Ă  court terme, requerrait des investissements supplĂ©mentaires et nĂ©cessiterait d’exploiter des moyens en parallĂšle durant une pĂ©riode difficile Ă  dĂ©terminer. Notre proposition est d’identifier et de consolider la plateforme technologique la plus avancĂ©e et la plus Ă©volutive. Une Ă©tude technique plus poussĂ©e devra permettre d’identifier les briques technologiques Ă  conserver et sur lesquelles s’appuyer, notamment au sein des infrastructures de France TĂ©lĂ©visions et de l’INA, qui ont atteint une masse critique et une expertise que n’ont pas les autres opĂ©rateurs. Pour initier ce processus de mutualisation, il nous semble nĂ©cessaire d’identifier et de mettre en Ɠuvre une premiĂšre offre thĂ©matique, par exemple autour de l’information ou de la culture et du spectacle vivant. Pour des raisons autant pratiques que symboliques, il conviendra d’identifier un acteur chef de file sur chaque offre thĂ©matique. A cette occasion, l’infrastructure commune sera consolidĂ©e et complĂ©tĂ©e pour la doter de l’ensemble des fonctionnalitĂ©s requises. Les services existants pourront alors ĂȘtre connectĂ©s individuellement Ă  l’infrastructure commune Ă  travers une technologie adaptĂ© (API), avant de rejoindre de façon structurelle la plateforme au fur et Ă  mesure de la construction des offres thĂ©matiques. 3.3 - FORME JURIDIQUE ET GOUVERNANCE Cette infrastructure de distribution commune, au service des sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public, producteurs et Ă©diteurs de services et de contenus, doit ĂȘtre pilotĂ©e au sein d’une entitĂ© indĂ©pendante ou autonome. Les ressources et les actifs de chaque sociĂ©tĂ©, lorsqu’elles sont consacrĂ©es Ă  ces activitĂ©s, devront ĂȘtre versĂ©es au sein de la nouvelle entitĂ©. Bien entendu, lĂ  encore, une Ă©tude dĂ©taillĂ©e devra ĂȘtre conduite pour identifier les missions et les activitĂ©s de la nouvelle entitĂ©, les compĂ©tences et les ressources concernĂ©es au sein de chaque sociĂ©tĂ©, ainsi que les actions de transformation Ă  mener. Les Ă©diteurs pourront alors se consacrer Ă  la production et l’édition des services, en favorisant en leur sein l’intĂ©gration des processus de production et d’édition numĂ©riques avec les processus de production et d’édition de services de tĂ©lĂ©vision ou de radio, et recherchant les synergies possibles entre ces deux activitĂ©s. Concernant le support juridique de cette nouvelle entitĂ©, deux options nous semblent devoir ĂȘtre Ă©tudiĂ©es. La premiĂšre consiste Ă  prendre acte du fait que le centre de gravitĂ© numĂ©rique de l’audiovisuel public est Ă  FTV, et Ă  s’appuyer sur l’entitĂ© France TĂ©lĂ©visions Editions NumĂ©riques, Ă  laquelle il faudra alors rendre son indĂ©pendance du groupe France TĂ©lĂ©visions, par exemple sous la forme juridique d’un groupement d’intĂ©rĂȘt Ă©conomique (GIE) au sein de l’audiovisuel public. La deuxiĂšme option consiste Ă  dĂ©velopper les missions de l’INA sur le numĂ©rique et Ă  les complĂ©ter par la distribution et la valorisation des services numĂ©riques de l’ensemble des Ă©diteurs de l’audiovisuel public. A travers ses missions actuelles, l’INA couvre dĂ©jĂ  une grande part de la proposition de valeur
  • 18. Terra Nova – Note - 18/18 www.tnova.fr de cette nouvelle entitĂ© : hĂ©bergement et distribution des contenus, indexation, distribution Ă  travers des offres gratuites et payantes, valorisation des donnĂ©es auprĂšs de tiers B2B. Dans les deux cas, il sera nĂ©cessaire de dĂ©finir le mode de gouvernance et en particulier la place qui sera faite Ă  chacune de sociĂ©tĂ©s concernĂ©es dans le processus de dĂ©cision, ou les garanties, par exemple contractuelles, quant au service qui lui sera assurĂ©. Ce point est crucial. Une intervention rĂ©solue de l’Etat sera Ă©videmment dĂ©terminante. Elle devra s’appuyer sur deux leviers : - la discussion et la dĂ©finition d’une feuille de route partagĂ©e par l’ensemble des acteurs, au sein de l’instance de pilotage stratĂ©gique de l’audiovisuel public dont la crĂ©ation a Ă©tĂ© prĂ©conisĂ©e par Marc Schwartz dans le rapport « France TĂ©lĂ©visions 2020 : Le chemin de l’ambition », - la nĂ©gociation des contrats d’objectifs et de moyens de Radio France et de France TĂ©lĂ©visions (et sans doute d’un avenant pour les autres sociĂ©tĂ©s), pour y inclure les objectifs communs ainsi dĂ©finis, et conditionner en partie le versement de la ressource publique (par exemple une part correspondant au financement des activitĂ©s numĂ©riques des sociĂ©tĂ©s concernĂ©es) au respect de la feuille de route. L’arrivĂ©e de deux nouveaux dirigeants Ă  France TĂ©lĂ©visions et Ă  l’INA, ainsi que la nĂ©gociation en cours du contrat d’objectifs et de moyens de Radio France, constituent pour l’Etat, actionnaire et tutelle du secteur, une occasion unique de faire bouger les acteurs. Il faut la saisir.
  • 19. Terra Nova – Note - 19/18 www.tnova.fr ANNEXE - SCHEMA GLOBAL DE LA PROPOSITION