La publication des résultats de l’essai nord américain « Women’s Health Initiative » (WHI) en juillet 2002 a transformé le paysage du traitement hormonal de la ménopause (THM), remettant en question un rapport bénéfices/risques considéré jusqu’à cette date comme nettement favorable. Les augmentations induites par le THM du risque cardiovasculaire et du risque de cancer du sein, démontrées par cet essai, ont conduit les agences européennes du médicament, dont l’Afssaps, à restreindre les indications du THM. L’objectif de ce travail, demandé et financé par l’Afssaps, était de décrire en France, après juillet 2002, l’évolution du recours au THM chez des femmes récemment ménopausées, en termes de fréquence et de nature des traitements utilisés.
1. Usage du traitement hormonal de la
ménopause avant et après 2002 dans deux
cohortes françaises
Virginie Ringa, Henri Panjo (Inserm U1018/INED U 822)
Françoise Clavel-Chapelon, Agnès Fournier, Céline Kernaleguen (Inserm U1018)
Menopause 2011; 18(2): 219-23
2. • Ménopause : arrêt de la production des estrogènes et
de la progestérone par les ovaires
• La ménopause peut s’accompagner de « troubles
climatériques » : bouffées de chaleur, sécheresse et
atrophie vaginale, …
• La perte osseuse s’accélère à la ménopause : le risque
d’ostéoporose augmente
Principe du THM :
- Augmenter le taux d’estrogènes circulants par
l’administration d’estrogènes exogènes
- On ajoute un progestatif pour éviter le sur-
risque de cancer de l’endomètre dû aux estrogènes
Le traitement hormonal de la ménopause (THM)
3. Avant 2002
2,5 à 3 millions d’utilisatrices (France)
Effet protecteur troubles du climatère, ostéoporose,
maladies coronariennes
Effet délétère cancer du sein ?
2002, essai Women’s Health Initiative (WHI)
↑ risques de maladies cardiovasculaires (dont
coronariennes) et de cancer du sein
Après 2002
Restriction des indications (troubles du climatère)
A utiliser pour la durée la plus courte possible, à la dose
minimale efficace
Contexte (1)
4. • En France,
- utilisation quasi-exclusive du 17 beta-estradiol (produit
différent des estrogènes de la WHI)
- utilisation très fréquente de la voie cutanée (gels, patchs)
pour l’estradiol
- utilisation du progestatif de la WHI marginale, utilisation de
progestérone micronisée fréquente
• Effets peut-être différentiels des types d’estrogènes et de
progestatifs sur sein et thrombose (Fournier et al. 2005,
Fournier et al. 2008, Scarabin et al. 2003)
Financement Afssaps pour étudier l’impact de la remise en
question de la balance bénéfices/risques du THM en France
Contexte (2)
5. On veut observer l’évolution (avant 2002 / après 2002) des
mises sous THM parmi les femmes nouvellement
ménopausées
• Initiation d’un THM = mise sous traitement dans l’année
qui suit la ménopause
• THM = estrogènes systémiques, avec ou sans progestatif,
• Si changements de traitement, 1er traitement
• Tibolone : exclusion de la femme si 1er traitement
• Estrogènes locaux : non considérés comme THM
• Définition du statut ménopausique basée sur date
dernières règles, ovariectomie, hystérectomie, dosages
hormonaux, THM
Définitions
6. • Deux cohortes françaises de femmes nées entre 1925 et 1953, suivies depuis
1990 par auto-questionnaires :
- E3N (http://www.idf.inserm.fr/site/eri20/)
- GAZEL (www.gazel.inserm.fr), « Les femmes et leur santé »
• Critères d’inclusion : femmes ménopausées naturellement, avec un suivi d’au
moins 1 an après la ménopause
• Pré-WHI : ménopausées entre juillet 1999 et juillet 2001 (E3N),
entre janvier 1994 et juillet 2001 (Gazel)
• Post-WHI : ménopausées entre janvier 2003 et juillet 2005 (E3N),
entre janvier 2003 et décembre 2007 (Gazel)
• Critères d’exclusion : ménopause atteinte hors de ces dates (ou non datée),
tibolone comme 1er traitement, cancer du sein ou de l’endomètre, âge à la
première prise de THM non connu, âges de ménopause non comparables entre
périodes
Pré-WHI : 3364 femmes nouvellement ménopausées
Post-WHI : 1880 femmes nouvellement ménopausées
Population d’analyse
7. Taux d'initiation de THM dans l'année suivant la
ménopause
58,2
51,1
18,7
12,9
55,8
16,8
0
10
20
30
40
50
60
70
Global E3N Gazel
Pourcentage
Pre-WHI
Post-WHI
Chute de ≈ 70% du taux d’initiation de THM
NB. Les taux de la période post-WHI sont standardisés sur la structure d’âge pré-WHI
Résultats (1)
9. Résultats (3)
Post-WHI, estrogène voie orale, n = 71
Progestérone
micronisée
6%
Dydrogestérone
33%
Dérivés de la
testostérone
27%
Autres dérivés de
la progestérone
34%
Pré-WHI, estrogène voie orale, n = 680
Dérivés de la
testostérone
21%
Progestérone
micronisée
7%
Autres dérivés de
la progestérone
43%
Dydrogestérone
29%
Post-WHI, estrogène transdermique, n =181
Autres dérivés de la
progestérone
15%
Dydrogestérone
10%
Dérivés de la
testostérone
7%
Progestérone
micronisée
68%
Pré-WHI, estrogène transdermique, n =914
Progestérone
micronisée
40%
Dydrogestérone
17%
Autres dérivés de
la progestérone
39%
Dérivés de la
testostérone
4%
10. Estrogène transdermique + progestérone micronisée :
21,9% des THM initiés
dans la période pré-WHI
(E3N : 22,5% 44,0%
Gazel : 20,6% 42,2%)
NB. Analyse complémentaire E3N : stabilité estrogènes locaux, baisse 50%
tibolone (livial®)
Résultats (4)
43,6% des THM initiés
dans la période post-
WHI
11. • Evolution homogène entre E3N et Gazel
• Baisse de 70% du taux d’initiation d’un THM
• Doublement de la part de l’association estrogène transdermique +
progestérone micronisée parmi les initiatrices de THM
impact probable de deux études françaises:
1. ESTHER (THM et risque thrombo-embolique), Lancet 2003 :
estrogènes transdermiques > estrogènes oraux
2. E3N (THM et cancer du sein), Int J Cancer 2005 (publication online
2004) : progestérone micronisée > autres progestatifs
• Impact hors de France (notamment USA) ? Pas de données
suffisantes
Conclusion